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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'adhésion de la Suisse au statut de la cour internationale de justice.

(Du 8 juillet 1947.)

Monsieur le Président et Messieurs, La cour internationale de justice a été créée par la charte des Nations Unies sur le modèle de la cour permanente de justice internationale qui avait été instituée en vertu de l'article 14 du pacte de la Société des Nations. La nouvelle cour ressemble beaucoup à l'ancienne. Elle s'en distingue cependant sur un point essentiel: Le statut de la cour permanente, adopté le 13 décembre 1920 par la première assemblée de la Société des Nations, était un instrument sans lien extérieur avec le pacte, de sorte qu'un Etat pouvait devenir membre de la Société sans adhérer au statut et même dans certains cas pouvait devenir partie au statut sans adhérer au pacte. En revanche le statut de la nouvelle cour est partie intégrante de la charte et tout Etat membre des Nations Unies est ipso facto partie au statut de la cour. Mais la réciproque n'est pas vraie, car un Etat peut être autorisé par l'assemblée générale des Nations Unies à devenir partie au statut sans adhérer à la charte.

En 1920 la Suisse fut l'un des premiers Etats à signer le protocole d'adhésion au statut de la cour permanente et en 1921 l'un de ses ressortissants, M. Max Huber, fut élu juge à la cour, où il a siégé de 1922 à 1930 et où il a exercé les fonctions de président de 1925 à 1927. Notre pays a été partie à deux procès devant la cour, soit dans le différend avec la France au sujet des zones franches de la Haute-Savoie et du Pays de Gex, et dans le différend avec la Yougoslavie dans l'affaire Losinger & Oie.

En raison de la dissolution de la Société des Nations et de la création d'une nouvelle cour rattachée aux Nations Unies, la dernière assemblée de la Société des Nations a décidé que la cour permanente de justice internationale devait être considérée comme dissoute à la date du 19 avril 1946.

526 I.

Nous avions réuni au mois de novembre 1945 une commission consultative, dont les membres, au nombre d'une cinquantaine, furent appelés à se prononcer sur l'attitude que la Suisse devrait adopter à l'égard des Nations Unies. Cette commission a été d'avis que notre pays devait chercher à adhérer à l'organisation des Nations Unies tout en conservant son statut traditionnel d'Etat neutre, mais qu'en raison des délais inévitables d'une telle procédure il aurait avantage à collaborer dès que possible avec les divers organismes techniques créés par les Nations Unies et notamment à adhérer à la cour internationale de justice. Notre politique en 1946 s'est inspirée des avis qui ont prévalu au sein de la commission consultative et le chef du département politique a eu à plusieurs reprises l'occasion de vous exposer les problèmes qui se posaient et la manière dont nous entendions les aborder. Vous nous avez plus tard autorisés à faire acte d'adhésion à l'organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture et à l'organisation mondiale de la santé et nous vous proposerons dans quelque temps d'adhérer également à l'organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, si celle-ci accueille favorablement la demande d'admission que nous lui avons présentée en novembre 1946.

Pour l'adhésion de la Suisse au statut de la cour internationale de justice la situation se présentait de la façon suivante: selon l'article 93, alinéa 2 de la charte, un Etat qui n'est pas membre des Nations Unies peut devenir partie au statut.aux conditions qui sont déterminées dans chaque cas par l'assemblée générale des Nations Unies sur recommandation du conseil de sécurité.

Pour éviter le risque d'un échec, nous avons, le 10 décembre 1945, chargé le département politique de procéder à des sondages auprès des Etats membres des Nations Unies et notamment auprès des membres permanents du conseil de sécurité et des Etats qui furent ultérieurement élus membres non permanents de ce conseil. La plupart de ces sondages ont été effectués au cours des premiers mois de 1946, mais pour l'U.R. S. S.

il a fallu attendre que notre ministre soit arrivé à Moscou.

Aucune des réponses reçues n'ayant été négative, nous avons pu, le 18 octobre 1946, charger le département politique de faire part à M. Lie, secrétaire
général des Nations Unies, de notre désir de connaître les conditions auxquelles la Suisse pourrait adhérer au statut de la cour.

Notre requête vint le 30 octobre devant le conseil de sécurité et celui-ci la renvoya à un comité d'experts. Le rapport de ce comité enumera les conditions qui, à son avis, devaient être mises à une adhésion de la Suisse au statut de la cour et dans sa séance du 15 novembre le conseil de sécurité décida à l'unanimité de recommander à l'assemblée générale de les adopter.

Après examen de la question au sein de la commission VI, l'assemblée générale décida le 11 décembre à l'unanimité d'adopter le rapport du comité

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d'experts et la recommandation du conseil de sécurité. Elle arrêta ainsi les conditions auxquelles la Suisse pourra adhérer au statut de la cour internationale de justice (annexes 1 et 2).

II.

Avant d'examiner la nature et la portée de ces conditions, nous désirons exposer brièvement les principales raisons qui nous ont amenés à entreprendre des démarches en vue de l'adhésion de la Suisse au statut de la cour.

Les unes ont leur fondement dans la politique traditionnelle de la Suisse, qui tend, dans la mesure de ses moyens, à développer le recours à des procédures pacifiques de règlement des conflits entre Etats, tandis que d'autres sont en relation avec les transformations qui s'opèrent dans le monde depuis la fin des hostilités, Le respect du droit a toujours été l'espoir et la sauvegarde des faibles.

Dans les relations internationales un droit s'est développé peu à peu au cours des derniers siècles, mais il est encore incomplet, faute d'organes supérieurs aux Etats qui soient chargés, en toutes circonstances, d'en donner une interprétation obligatoire et de le faire respecter. L'introduction de procédures internationales d'enquête, de conciliation, d'arbitrage et de règlement judiciaire constitue donc une étape essentielle vers une société internationale véritablement organisée, où chaque Etat, si petit soit-il, serait au bénéfice de certaines garanties contre les abus de la force.

Dans toute l'histoire de la Confédération l'arbitrage entre cantons a joué un rôle important et à l'époque moderne la Suisse a rapidement compris l'intérêt vital qu'elle avait à appuyer les efforts entrepris en vue de développer l'arbitrage entre Etats et de constituer un tribunal international permanent ayant un caractère universel. C'est ainsi qu'elle a adhéré aux conventions de La Haye de 1899 et 1907 pour le règlement pacifique des conflits internationaux, au statut de la cour permanente de justice internationale et à l'acte général de conciliation, de règlement judiciaire et de règlement arbitral qui a été conclu en 1928 sous les auspices de la Société des Nations.

Elle a également été l'un des premiers Etats à reconnaître la juridiction obligatoire de la cour permanente de justice internationale conformément à l'article 36 de son statut, et elle a conclu un grand nombre de traités bilatéraux de conciliation, d'arbitrage et de règlement judiciaire.

Cette politique est trop conforme aux intérêts permanents de notre pays pour que l'on puisse envisager de l'abandonner ou même simplement de la suivre
avec moins de vigueur que jusqu'ici.

A ces raisons d'ordre général s'en ajoutent d'autres. Désireuse de contribuer pour sa modeste part au développement de la collaboration internationale, la Suisse a fait partie de la Société des Nations dès son origine et elle aurait sans doute demandé son admission au sein des Nations

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Unies s'il n'était apparu d'emblée qu'il lui serait difficile d'obtenir l'autorisation d'adhérer à la charte au bénéfice de certaines réserves touchant à son statut d'Etat perpétuellement neutre, H y a là un problème qui ne pourra être résolu qu'avec le temps. Aussi avons-nous été heureux de constater que l'article 93, alinéa 2, de la charte prévoit la possibilité qu'un Etat devienne partie au statut de la cour internationale de justice sans adhérer à la charte.

Relevons enfin que plusieurs de nos traités de conciliation, d'arbitrage ou de règlement judiciaire prévoient l'intervention de la cour permanente de justice internationale actuellement dissoute et sont de ce fait devenus partiellement inapplicables. Or, lorsqu'il s'agit de traités conclus entre Etats parties au statut de la nouvelle cour, celle-ci est en vertu de l'article 37 automatiquement substituée à l'ancienne, de telle sorte qu'une adhésion de la Suisse à ce statut aura pour effet de rendre de nouveau entièrement applicables ceux des traités en question que nous avons conclus avec des Etats membres des Nations Unies. Ce résultat est d'autant plus important que nous aurions de grandes difficultés à soumettre un conflit à un autre tribunal international et que nous nous trouverions même souvent dans l'impossibilité de le faire.

III.

Aux termes de la résolution reproduite à l'annexe 1, l'assemblée générale des Nations Unies a décidé que la Suisse peut adhérer au statut de la cour internationale de justice aux trois conditions suivantes: a. Acceptation des dispositions du statut de la cour; 6. Acceptation de toutes les obligations qui découlent pour un membre des Nations Unies de l'article 94 de la charte ; c. Engagement de verser une contribution aux frais de la cour, dont l'assemblée générale des Nations Unies fixera équitablement le montant de temps à autre après consultation du gouvernement suisse.

Voyons de plus près en quoi consistent ces conditions.

A. ACCEPTATION DES DISPOSITIONS DU STATUT C'est là une obligation qui va de soi. Là cour internationale de justice est fondée sur les articles 92 à 96 de la charte des Nations Unies (annexe 3) et sur le statut qui lui est annexé et qui en fait partie intégrante (annexe 4).

L'article 1er du statut rappelle que la cour est l'organe judiciaire principal des Nations Unies. Il se
réfère ainsi implicitement aux articles 92 à 96 de la charte. L'assemblée générale des Nations Unies s'est bornée, en formulant la deuxième condition que nous examinerons plus loin, à mentionner les obligations qui découlent de l'article 94, car les articles 92, 93, 95 et 96 ne créent pas de véritables obligations à la charge des Etats membres des Nations Unies, mais la Suisse ne peut naturellement pas ignorer ces dispositions qui contiennent quelques règles essentielles.

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Le statut traite de l'organisation de la cour (art. 2 à 33), de sa compétence (art. 34 à 38), de sa procédure (art. 39 à 64), des avis consultatifs qu'elle peut être appelée à donner (art. 65 à 68) et des amendements au statut {art. 69 et 70). Il ne contient aucune disposition permettant ou interdisant à un Etat de retirer son adhésion. La situation est la même pour la charte, dont il est une partie intégrante. Toutefois la conférence de San Francisco a exprimé l'avis que les Nations Unies ne pourraient pas s'opposer à un retrait. Nous en concluons que la Suisse aurait elle aussi la faculté de mettre fin à son adhésion au statut, si des circonstances exceptionnelles devaient l'amener à envisager pareille mesure.

Relevons d'emblée que la juridiction de la cour est facultative, aucun Etat ne pouvant y être soumis sans l'avoir préalablement acceptée par un acte distinct de son adhésion au statut. Un tel acte peut être soit la conclusion d'un traité bilatéral prévoyant la juridiction de la cour, soit l'adhésion à une convention multilatérale de même nature. Il peut être aussi la déclaration unilatérale qui est prévue à l'article 36, alinéa 2, du statut et à laquelle nous avons consacré le chapitre IV du présent message.

Les Etats qui sont parties à un procès devant la cour doivent naturellement se conformer aux règles relatives à sa compétence et à sa procédure. Mais en dehors de ce cas le statut n'impose guère d'obligations aux Etats qui y ont adhéré. En revanche il leur accorde certains droits, notamment en ce qui concerne l'élection des juges, la désignation d'un juge national en cas de procès, l'intervention dans un procès engagé par d'autres Etats et la participation à la procédure de revision du statut.

a. L'élection des juges commence par la présentation des candidats.

Le soin en incombe aux membres de la cour permanente d'arbitrage qui sont nommés, au nombre de quatre au maximum, par chacun des Etats liés par la convention de La Haye de 1907 pour le règlement pacifique des conflits internationaux, en vue de figurer sur une liste de personnalités susceptibles d'être choisies comme arbitres par des Etats en litige. Pour la présentation des candidats aux fonctions de juge à la cour internationale de justice les membres de la cour permanente d'arbitrage sont groupés d'après l'Etat qui les a
désignés. Chaque groupe national ainsi constitué est appelé à présenter quatre candidats au maximum, dont deux au plus de sa nationalité. Si la Suisse adhère au statut de la cour internationale de justice, les quatre membres suisses de la cour permanente d'arbitrage auront donc la faculté de participer à la désignation des candidats.

L'élection proprement dite est de la compétence du conseil de sécurité et de l'assemblée générale des Nations Unies. Mais ces deux organes ne peuvent en principe élire que des personnes figurant parmi les candidats présentés. Ils procèdent à l'élection indépendamment l'un de l'autre, et pour être élu juge il faut obtenir la majorité absolue des voix tant au conseil de sécurité qu'à l'assemblée générale.

Feuille fédérale. 99e année. Vol. II.

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Aux termes de l'article 4, alinéa 3, du statut, les Etats qui sont parties au statut sans être membres des Nations Unies peuvent participer à l'élection des juges aux conditions qui seront fixées par l'assemblée générale sur recommandation du conseil de sécurité. Le comité d'experts chargé par le conseil de sécurité d'examiner les conditions d'une adhésion de la Suisse au statut de la cour a été d'avis que l'assemblée générale a, en vertu de cet article, la faculté d'établir des règles valables d'une façon générale pour tous les Etats qui deviendront parties au statut sans être membres des Nations Unies et qu'il convenait par conséquent de surseoir à la fixation de ces règles jusqu'au moment où au moins un Etat non membre des Nations Unies aura adhéré au statut (annexe 2, chiare 7). Le principe d'une participation de la Suisse à l'élection des juges n'a donc pas été contesté. Seules les modalités de cette participation devront encore être précisées.

b. Juge national : Lorsqu'un Etat est partie à un procès devant la cour, il a le droit d'avoir un de ses ressortissants parmi les juges appelés à connaître de l'affaire, soit un juge titulaire s'il en existe un de sa nationalité, soit un juge ad hoc désigné conformément aux dispositions de l'article 31 du statut.

c, Interventions : Le statut distingue deux catégories d'interventions.

Lorsqu'un procès devant la cour porte sur l'interprétation d'une convention à laquelle ont participé d'autres Etats que les parties en litige, le grenier les avertit sans délai. Chacun d'eux a le droit d'intervenir au procès et s'il exerce cette faculté, l'interprétation contenue dans la sentence est également obligatoire à son égard (art. 63 du statut). Dans les autres cas où un Etat tiers estime avoir un intérêt d'ordre juridique dans un procès devant la cour, il peut demander l'autorisation d'intervenir, mais la cour a la faculté de refuser cette autorisation (art, 62 du statut).

à. Revision du statut : Le statut peut être revisé selon la procédure prévue pour la revision de la charte, c'est-à-dire qu'un amendement entre en vigueur s'il est adopté à la majorité des deux tiers par l'assemblée générale des Nations Unies et s'il est ratifié par les deux tiers des Etats membres, y compris les cinq membres permanents du conseil de sécurité (art. 108 de la charte).
L'article 69 du statut ajoute que l'assemblée générale peut, sur recommandation du conseil de sécurité, régler la participation à la procédure de revision des Etats qui sont parties au statut sans être membres des Nations Unies. Ici aussi le comité d'experts a été d'avis qu'il convenait d'attendre qu'au moins un Etat non membre des Nations Unies ait adhéré au statut (annexe 2, chiffre 7).

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B. ARTICLE 94 DE LA CHARTE Cet article, dont le texte est reproduit à l'annexe 3, concerne l'exécution des sentences rendues par la cour. Il pose à l'alinéa premier le principe que chaque membre des Nations Unies s'engage à se conformer à la décision de la cour dans tout litige auquel il est partie. Aucun recours à l'arbitrage ou à un règlement judiciaire ne se conçoit sans que les Etats intéressés n'assument une telle obligation. Sinon le tribunal ne serait pas un véritable tribunal, mais une commission de conciliation, et le résultat de ses délibérations ne serait pas une sentence, mais une proposition en vue de régler le conflit. La Suisse ne saurait donc avoir aucune hésitation à prendre l'engagement de se conformer à la décision de la cour dans tout litige auquel elle serait partie.

L'alinéa 2 de l'article 94 a trait au cas où, contrairement à l'engagement pris à l'alinéa premier, un Etat ne se conformerait pas à l'arrêt rendu par la cour. L'autre partie a alors la faculté de signaler ce manquement au conseil de sécurité et celui-ci peut, s'il le juge nécessaire, faire des recommandations ou décider des mesures à prendre pour faire exécuter l'arrêt.

Le conseil de sécurité n'est pas autorisé à intervenir d'office, puisqu'il ne peut agir que sur requête de l'Etat qui n'obtient pas l'exécution d'un arrêt rendu par le cour en sa faveur. De plus, s'il est saisi d'une requête, il n'est pas tenu d'y donner suite. La disposition de l'article 94, alinéa 2, a ainsi un caractère doublement facultatif et elle ne s'applique pas aux arrêts rendus par d'autres tribunaux internationaux que la cour, ni aux décisions de la cour qui ne sont pas des arrêts, auxquels l'article 60 du statut confère un caractère définitif, mais des décisions provisoires, telles que par exemple des ordonnances imposant des mesures conservatoires. Mais si le progrès qu'elle constitue vers une réglementation complète de la question de l'exécution des sentences internationales est modeste, elle ne représente pas moins une certaine garantie pour les Etats qui soumettront un différend à la cour. Le fait seul qu'un recours au conseil de sécurité est possible engagera les Etats à se conformer aux sentences même défavorables que la cour rendra à leur égard.

Il n'est pas nécessaire d'être membre des Nations Unies pour adresser une requête
au conseil de sécurité sur la base de l'article 94, alinéa 2. Ce droit appartient à tout Etat lié par un arrêt de la cour et par conséquent aussi à des Etats non membres dans la mesure où ils peuvent être admis à prendre part à un procès devant la cour. Lorsque le conseil de sécurité examine une requête qui lui est adressée à la suite de l'inexécution d'un arrêt, il est tenu en vertu de l'article 32 de la charte d'inviter toutes les parties au différend à participer sans droit de vote aux discussions relatives à cette requête.

, ' S'il accorde des droits, l'article 94, alinéa 2, ne crée aucyne obligation ni pour les Etats membres des Nations Unies, ni pour d'autres Etats qui

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seraient parties à un procès devant la cour, ni même pour le conseil de sécurité puisqu'il n'est pas tenu d'agir en cas d'inexécution d'une sentence.

Mais si le conseil de sécurité estime nécessaire d'intervenir, il peut formuler des recommandations qui n'ont pas de caractère obligatoire ou « décider des mesures à prendre pour faire exécuter l'arrêt ». L'article 94, alinéa 2, ne dit pas pour qui une telle « décision » aurait force obligatoire. Aussi le comité d'experts a-t-il jugé nécessaire d'invoquer l'article 25 de la charte, aux termes duquel « les membres de l'Organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du conseil de sécurité conformément à la présente charte ». De la combinaison de l'article 94, alinéa 2, et de l'article 25 il résulte que les Etats membres des Nations Unies sont tenus d'accepter et d'appliquer les décisions que le conseil de sécurité pourrait prendre en vue de faire exécuter un arrêt de la cour.

Une telle obligation n'incomberait pas à la Suisse si elle adhérait au seul article 94 et elle se trouverait ainsi dans une situation privilégiée par rapport aux Etats membres des Nations Unies. C'est pourquoi elle est invitée à accepter «toutes les obligations qui découlent pour un membre des Nations Unies de l'article 94 de la charte » et non pas seulement celles qui sont expressément prévues dans le texte de cet article.

La formule qui a été employée est certes un peu vague et générale, mais le rapport du comité d'experts permet de préciser le sens que les organes compétents des Nations Unies ont entendu lui donner (annexe 2, chiffre 4). De l'avis de ce comité, qui a été approuvé par le conseil de sécurité et par l'assemblée générale, « les obligations des membres des Nations Unies, aux termes de l'article 94, comprennent les obligations complémentaires découlant des dispositions des articles 25 et 103 de la charte, pour autant que ces dispositions peuvent se rapporter à celles de l'article 94 ».

En conséquence, si la Suisse accepte toutes les obligations qui découlent pour un membre des Nations Unies de l'article 94, elle sera liée par les articles 25 et 103, mais dans la mesure seulement où ils peuvent se rapporter aux dispositions de l'article 94.

Nous avons déjà signalé ce que signifie l'article 25 lorsqu'il est mis en rapport avec l'article 94. Quant
à l'article 103, il est ainsi conçu : « En cas de conflit entre les obligations des membres des Nations Unies en vertu de la présente charte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront ».

Les obligations qui résultent pour un Etat membre des Nations Unies de l'article 94 et de sa combinaison avec l'article 25 sont, d'une part, celle de se conformer à la décision de la cour dans tout litige auquel il est partie et, d'autre part, celles d'accepter et d'appliquer les décisions que le conseil de sécurité pourrait prendre en vue de faire exécuter l'arrêt de la cour.

Si la Suisse accepte d'être liée par l'article 103 dans la mesure où il peut se rapporter à l'article 94, elle admettra que les deux obligations que nous

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venons d'énumérer prévalent sur celles qu'elle pourrait avoir en vertu de tout autre accord international. Une solution serait ainsi donnée dans ces deux cas au problème des obligations incompatibles entre elles que le droit international ne règle pas de façon entièrement satisfaisante.

Dans ses relations avec des Etats membres des Nations Unies ou avec d'autres Etats également liés par les articles 94 et 103 de la charte, la Suisse ne rencontrera aucune difficulté, puisque ces Etats auront admis comme elle la primauté des obligations découlant de l'article 94. En revanche certains problèmes pourraient se poser dans ses relations avec des Etats restés entièrement en dehors des Nations Unies. Il est possible en effet qu'un arrêt de la cour mette à la charge de la Suisse des obligations incompatibles avec celles qu'elle aurait assumées à l'égard d'un Etat tiers non lié par les articles 94 et 103. Mais c'est là un risque que court tout Etat qui s'adresse à un tribunal international. De même il se pourrait que le conseil de sécurité, agissant en vue de faire exécuter un arrêt de la cour, demande à la Suisse de prendre des mesures par lesquelles elle violerait des engagements pris à l'égard d'un Etat tiers. Le risque est toutefois minime du fait que les Etats non membres des Nations Unies sont peu nombreux et que plusieurs d'entre eux seront sans doute avec le temps admis au sein de cette organisation, ou se trouveront au moins liés comme la Suisse par l'article 94.

Cela nous amène à la question de la nature des obligations que le conseil de sécurité pourrait imposer à la Suisse dans le cadre des décisions qu'il est autorisé à prendre en vue de faire exécuter un arrêt de la cour. L'article 94, alinéa 2, est muet sur ce point et l'on ne trouve aucun élément d'interprétation ni dans les procès-verbaux de la conférence de San Francisco, ni dans le rapport du comité d'experts.

Cette incertitude est quelque peu embarrassante. Mais il est cependant possible de circonscrire le problème de manière à faire apparaître qu'en acceptant les obligations découlant pour un Etat membre des Nations Unies de l'article 94, alinéa 2, la Suisse ne s'écarterait en aucune manière de sa politique traditionnelle fondée sur la neutralité.

Nous avons déjà relevé que le conseil de sécurité ne peut intervenir en cas d'inexécution
d'un arrêt de la cour que sur requête d'un des Etats en litige et qu'il n'est même pas tenu d'agir en pareil cas. Le veto d'une grande puissance pourrait aussi l'en empêcher. D'autre part, ses pouvoirs sont limités aux recommandations et aux mesures qui tendent à l'exécution de l'arrêt. Il n'est pas une autorité capable de casser ou de reviser l'arrêt, si l'Etat récalcitrant, comme il y a lieu de s'y attendre, allègue un excès de pouvoir de la cour ou un vice de procédure. En pareil cas, il devra sans doute se borner à inviter les parties à régler leur nouveau différend par des moyens pacifiques de leur choix.

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Ajoutons que les cas où un Etat a refusé, pour une raison ou pour une autre, d'exécuter une sentence internationale sont rares et qu'aucun arrêt de la cour permanente de justice internationale ne s'est heurté à pareil refus.

Il y a donc lieu de penser que le conseil de sécurité ne se trouvera jamais à même de faire usage des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article 94, alinéa 2. Cependant cet article existe et nous devons tenir compte de la possibilité qu'il soit appliqué.

Le conseil de sécurité peut en vertu de cet article formuler des recommandations sans caractère obligatoire ou prendre des décisions n'engageant que l'un ou l'autre organe des Nations Unies. Mais il peut aussi imposer des obligations à des Etats membres. Il convient donc de chercher à préciser de quels Etats et de quelles obligations il pourrait s'agir.

En vertu du droit international général, l'exécution d'un arrêt rendu par un tribunal international est une affaire qui concerne exclusivement les parties au procès. Celles-ci peuvent convenir expressément ou tacitement de ne pas exécuter l'arrêt ou de l'exécuter selon certaines modalités non prévues par le tribunal. L'Etat gagnant peut aussi prendre unilatéralement des mesures en vue d'amener l'Etat perdant à exécuter l'arrêt. En tant qu'elle n'est pas restreinte par d'autres dispositions de la charte, cette liberté des parties se retrouve à l'article 94, alinéa 2, puisque l'Etat gagnant n'est pas tenu de recourir au conseil de sécurité lorsqu'il n'obtient pas l'exécution de l'arrêt rendu en sa faveur par la cour. Le conseil de sécurité n'est donc pas chargé d'assurer d'une façon générale l'exécution des arrêts de la cour. II est seulement autorisé à agir si l'Etat gagnant le lui demande.

Il va de soi qu'il a alors la faculté d'inviter les deux Etats intéressés à prendre certaines mesures en vue de l'exécution de l'arrêt et qu'il peut, en vertu de l'article 25 de la charte, leur imposer l'obligation de les prendre.

Est-il également autorisé à faire intervenir des Etats membres des Nations Unies qui sont restés étrangers au litige ? Nous ne le croyons pas et cela pour les raisons suivantes: Comme tout traité, la charte doit être interprétée de façon restrictive, en ce sens qu'une obligation à la charge des Etats membres ne peut résulter que d'une disposition expresse. C'est
ainsi qu'au chapitre VII relatif aux mesures de coercition en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression, la charte indique de façon précise les cas dans lesquels les Etats membres, même étrangers au conflit, peuvent être appelés à participer à une action décidée par le conseil de sécurité. Or, aux deux alinéas de l'article 94, il n'est question que des Etats parties à un litige.

De plus, la charte n'établit aucun lien entre l'article 94 et le chapitre VII et elle précise même à l'article 24 que les pouvoirs conférés au conseil de sécurité en vue du maintien de la paix sont définis aux chapitres VI, VII, Vili et XII, d'où l'on peut déduire que les pouvoirs accordés au conseil de sécurité à l'article 94 du chapitre XIV n'ont rien à. voir avec

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le maintien de la paix et que l'inexécution d'un arrêt de la cour ne peut pas être assimilé au sens de la charte à une menace contre la paix. Ainsi les mesures collectives de coercition prévues au chapitre VII n'entrent pas en ligne de compte pour l'application de l'article 94.

Par conséquent si la Suisse accepte toutes les obligations découlant pour un Etat membre de l'article 94, alinéa 2, elle ne s'engage pas à prêter son appui au conseil de sécurité lorsqu'il s'agit de l'exécution d'un arrêt rendu entre Etats tiers. Les seuls cas qu'elle ait à envisager sont ceux où elle serait partie à un procès devant la cour et où elle-même ou l'autre Etat n'exécuterait pas l'arrêt. Dans l'une et l'autre hypothèse, elle peut éviter l'intervention du conseil de sécurité, soit en exécutant l'arrêt conformément à l'obligation qu'elle a assumée à cet égard, soit en renonçant à recourir au conseil de sécurité si l'autre Etat n'exécute pas l'arrêt.

On pourrait sans doute soutenir que l'article 94, alinéa 2, en raison même de son imprécision, est susceptible d'être interprété en ce sens que le conseil de sécurité serait autorisé à requérir également l'intervention d'Etats membres des Nations Unies qui sont restés étrangers au procès. Une telle interprétation extensive ne pourrait s'appuyer ni sur le droit international général, ni sur d'autres dispositions de la charte. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'elle ne serait pas, à première vue, incompatible avec les termes très vagues de l'article 94, alinéa 2.

Il serait naturellement agréable d'avoir une interprétation authentique, mais la charte n'autorise aucun organe des Nations Unies à en donner une, et selon toute probabilité ni l'assemblée générale, ni le conseil de sécurité ne consentiraient à entrer dans cette voie. Quant à la cour elle-même, elle ne pourrait se prononcer qu'à la suite d'une demande d'avis consultatif émanant de l'assemblée générale ou du conseil de sécurité (art. 96 de la charte). Une démarche de la Suisse tendant à obtenir une interprétation authentique de l'article 94, alinéa 2, n'aurait donc guère de chance d'aboutir et elle serait en outre particulièrement inopportune au point de vue politique.

A vrai dire, le besoin d'une telle interprétation ne se fait même pas sentir.

Nous avons déjà relevé qu'une interprétation normale de l'article
94, alinéa 2, ne conduit pas à admettre l'obligation de participer aux mesures que le conseil de sécurité pourrait prendre en vue de faire exécuter un arrêt rendu entre Etats tiers. Mais même si par une interprétation extensive une telle obligation devait être mise à la charge de la Suisse, cela ne signifierait pas qu'en l'acceptant elle porterait atteinte à sa neutralité.

En effet, les seules mesures collectives de coercition qui puissent être incompatibles avec une politique de neutralité sont celles du chapitre VII de la charte: en premier lieu les actions militaires prévues à l'article 42, mais aussi, suivant les circonstances, la rupture des relations diplomatiques et l'interruption des relations économiques au sens de l'article 41. Une participation de la Suisse à des mesures militaires est exclue d'emblée,

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car elle supposerait la conclusion de l'accord spécial prévu à l'article 43.

D'autre part, toutes les mesures collectives énumérées au chapitre VII ne peuvent être appliquées par le conseil de sécurité qu'en vue du maintien de la paix et nous avons vu qu'au sens de la charte la menace contre la paix et l'inexécution d'un arrêt de la cour sont des notions distinctes entre lesquelles aucun rapport n'a été établi.

Si donc en vertu d'une interprétation extensive de l'article 94, alinéa 2, le conseil de sécurité s'estimait autorisé à requérir l'intervention de la Suisse en vue de l'exécution d'un arrêt rendu entre Etats tiers, il ne pourrait pas lui demander de participer à des mesures du genre de celles qui sont prévues au chapitre VII et il devrait se limiter à des mesures moins graves, compatibles par conséquent avec une politique de neutralité.

C. ENGAGEMENT DE VERSER UNE CONTRIBUTION La dernière condition mise à l'adhésion de la Suisse au statut comporte l'engagement de verser une contribution aux frais de la cour, dont l'assemblée générale des Nations Unies fixera équitablement le montant de temps à autre après nous avoir consultés.

Le versement d'une telle contribution ne saurait soulever des objections et nous aurions la faculté de faire valoir notre manière de voir si le montant proposé nous paraissait trop élevé.

Relevons à titre d'indication que le budget de la cour pour 1947 a été arrêté à environ 640 000 dollars.

D. CONCLUSIONS L'examen auquel nous avons procédé et dont nous vous avons exposé les résultats dans les lignes qui précèdent nous conduit à la conclusion que la Suisse, fidèle à sa tradition, se doit d'adhérer au statut de la cour internationale de justice et qu'elle peut sans inconvénient le faire aux conditions posées par l'assemblée générale des Nations Unies.

Nous vous proposons donc de nous autoriser à déposer entre les mains du secrétaire général des Nations Unies un instrument d'adhésion au statut de la cour portant: a. Acceptation des dispositions de ce statut; b. Acceptation de toutes les obligations qui découlent pour un membre des Nations Unies de l'article 94 de la charte ; c. Engagement de verser une contribution aux frais de la cour, dont l'assemblée générale fixera équitablement le montant de temps à autre après nous avoir consultés.

537 IV.

L'adhésion au statut, nous l'avons déjà relevé, ne comporte pas par elle-même l'obligation d'accepter la juridiction de la cour. Elle a toutefois pour effet en vertu de l'article 37 de rendre de nouveau applicables les dispositions de traités antérieurs qui reconnaissaient la juridiction obligatoire de la cour permanente de justice internationale, la nouvelle cour étant à cet égard substituée à l'ancienne. De plus, l'article 36, alinéa 2, permet aux Etats parties au statut de faire une déclaration aux termes de laquelle ils reconnaissent comme obligatoire de plein droit et sans convention spéciale, à l'égard de tout autre Etat acceptant la même obligation, la juridiction de la cour sur tous les différends d'ordre juridique ayant pour objet: a. L'interprétation d'un traité; b. Tout point de droit international; c. La réalité de tout fait qui, s'il était établi, constituerait la violation d'un engagement international; d. La nature ou l'étendue de la réparation due pour la rupture d'un engagement international.

En faisant une telle déclaration, la Suisse accepterait la juridiction obligatoire de la cour sur tous les différends d'ordre juridique qu'elle pourrait avoir avec un des Etats qui ont fait ou qui feront semblable déclaration. Lorsqu'un différend d'ordre juridique surgit entre Etats qui ont reconnu la juridiction obligatoire de la cour sur la base de l'article 36, alinéa 2, chacun d'eux peut saisir la cour en lui adressant une requête unilatérale conformément à l'article 40. Il n'est pas nécessaire que les parties au différend concluent préalablement un traité spécial, dit « compromis d'arbitrage », par lequel elles conviennent de s'en remettre au jugement de la cour.

Une déclaration analogue était prévue à l'article 36 du statut de l'ancienne cour et la Suisse l'avait faite en même temps qu'elle adhérait à ce statut. Au début, elle ne s'était trouvée liée qu'à l'égard d'un nombre restreint d'Etats qui avaient fait la même déclaration, mais plus tard la juridiction obligatoire de la cour fut reconnue par plus d'une quarantaine d'Etats comprenant plusieurs grandes puissances.

La Suisse avait fait ainsi oeuvre de pionnier à un moment où l'on ignorait encore comment la cour serait composée et comment elle comprendrait sa mission. Actuellement, nous savons quels sont les juges de la nouvelle
cour et nous avons tout lieu de croire qu'ils s'inspireront de la remarquable jurisprudence établie par l'ancienne cour pendant plus de quinze ans d'activité aussi féconde que variée. Nous savons aussi que la juridiction

538 obligatoire de la nouvelle cour est reconnue, parfois sous certaines réserves, par un nombre déjà élevé d'Etats, soit: a. Par ceux, au nombre d'une quinzaine environ, qui, en vertu de l'article 36, alinéa 5 du statut de la nouvelle cour, restent liés par des déclarations faites sous le régime de l'ancienne cour pour une durée qui n'est pas encore expirée; 6. Par ceux qui ont fait récemment une déclaration sur la base de l'article 36, alinéa 2: Grande-Bretagne, Pays-Bas, Etats-Unis, Chine, Norvège, Danemark, Guatemala et France.

La Suisse se doit donc de participer comme par le passé au mouvement qui tend, à étendre le domaine de la juridiction de la cour et nous vous proposons de nous autoriser à remettre au secrétaire général des Nations Unies une déclaration par laquelle la Suisse acceptera la juridiction obligatoire de la cour dans les termes de l'article 36, alinéa 2, du statut.

V.

Si vous acceptez les propositions que nous avons formulées à la fin des chapitres III et IV du présent message, il vous appartiendra de prendre un arrêté fédéral qui pourrait être rédigé dans les termes du projet ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 8 juillet 1947.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le, président de la Confédération, ETTER.

S449

Le vice-chancelier, Ch. OSER.

(Projet.)

Arrêté fédéral concernant

l'adhésion de la Suisse au statut de la cour internationale de justice et la reconnaissance de la juridiction obligatoire de cette cour aux termes de l'article 36 du statut.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

CONFÉDÉRATION SUISSE, vu le message du Conseil fédéral du 8 juillet 1947, arrête :

Article premier.

Le Conseil fédéral est autorisé à déposer entre les mains du secrétaire général des Nations Unies un instrument d'adhésion au statut de la cour internationale de justice portant: a. Acceptation des dispositions du statut; b. Acceptation de toutes les obligations qui découlent pour un membre des Nations Unies de l'article 94 de la charte; c. Engagement de verser une contribution aux frais de la cour, dont l'assemblée générale des Nations Unies fixera équitablement le montant de temps à autre après consultation du Conseil fédéral.

Art. 2.

Le Conseil fédéral est autorisé à remettre au secrétaire général des Nations Unies une déclaration aux termes de laquelle la Suisse reconnaît comme obligatoire de plein droit et sans convention spéciale, à l'égard de tout autre Etat acceptant la même obligation, la juridiction de la cour internationale de justice sur tous les différends d'ordre juridique ayant pour objet: a. L'interprétation d'un traité; 6. Tout point de droit international;

540

c. La réalité de tout fait qui, s'il était établi, constituerait la violation d'un engagement international; d. La nature ou l'étendue de la réparation due pour la rupture d'un, engagement international.

Cette déclaration liera la Suisse jusqu'à son abrogation moyennant un préavis d'un an.

Art. 3.

Le présent arrêté est soumis aux dispositions de l'article 89, 4e alinéa, de la constitution fédérale concernant le referendum en matière de traités internationaux.

6449

541

Annexe n° 1.

Résolution adoptée le 11 décembre 1946 par l'Assemblée générale des Nations Unies.

Le Chef du Département politique fédéral suisse, dans une lettre transmise au Secrétaire général des Nations Unies, le 26 octobre 1946, par le Consul général de Suisse à New-York, a exprimé le désir du Conseil fédéral ·suisse d'être informé des conditions dans lesquelles la Suisse pourrait, «n vertu de l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte, devenir partie au Statut ·de la Cour internationale de Justice.

L'article 93, paragraphe 2, de la Charte, stipule qu'un Etat non membre des Nations Unies peut devenir partie au Statut de la Cour à des conditions qui seront déterminées, dans chaque cas, par l'Assemblée générale sur recommandation du Conseil de sécurité.

Le Conseil de sécurité, au cours de sa quatre-vingtième séance tenue le 15 novembre 1946, a examiné et adopté un rapport et une recommandation à ce sujet émanant de son Comité d'experts (annexe) (1).

L'Assemblée générale a étudié et adopté, sur la recommandation de sa Sixième Commission, le rapport et la recommandation du Conseil de sécurité.

En conséquence l'Assemblée générale détermine, conformément à l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte et sur recommandation du Conseil de sécurité, les conditions dans lesquelles la Suisse peut devenir partie au Statut de la Cour internationale de Justice comme suit: La Suisse deviendra partie au Statut de la Cour à la date du dépôt, entre les mains du Secrétaire général des Nations Unies, d'un instrument signé au nom du Gouvernement suisse et éventuellement ratifié conformément à la loi constitutionnelle suisse. Cet instrument portera: a. Acceptation des dispositions du Statut de la Cour internationale de Justice, b. Acceptation de toutes les obligations qui découlent pour un Membre des Nations Unies de l'Article 94 de la Charte.

c. Engagement de verser la contribution aux frais de la Cour dont l'Assemblée générale fixera équitablement le montant de temps à autre après consultation avec le Gouvernement suisse.

(!) Voir ci-après l'annexe 2.

542

Annexe n° 2.

Rapport du Comité d'experts nommé par le Conseil de sécurité.

1. Le Comité a examiné la lettre du Chef du Département politique fédéral suisse transmise au Secrétaire général le 26 -octobre 1946 par le Consul général de Suisse à New-York (document S/185). Cette lettre exprimait le désir du Conseil fédéral suisse d'être informé des conditions dans lesquelles la Suisse pourrait devenir partie au Statut de la Cour internationale de Justice. Aux termes de l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte, ces conditions doivent être déterminées par l'Assemblée générale sur la recommandation du Conseil de sécurité.

2. Le Comité invite le Conseil de sécurité à soumettre la recommandation suivante à l'Assemblée générale: « Le Conseil de sécurité recommande à l'Assemblée générale de déterminer, conformément à l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte, les conditions dans lesquelles la Suisse peut devenir partie au Statut de la Cour internationale de Justice, de la manière suivante : La Suisse devient partie au Statut de la Cour à la date du dépôt, entre les mains du Secrétaire général des Nations Unies, d'un instrument, signé au nom du Gouvernement suisse, et éventuellement ratifié conformément à la loi constitutionnelle suisse. Cet instrument portera : a. Acceptation des dispositions du Statut de la Cour internationale de Justice; b. Acceptation de toutes les obligations qui découlent pour un Membre des Nations Unies de l'Article 94 de la Charte; c. Engagement de verser la contribution aux frais de la Coin- dont l'Assemblée générale fixera équitablement le montant de temps à autre après consultation avec le Gouvernement suisse, » 3. Le Comité décide qu'il n'est pas nécessaire de faire usage, dans la première condition suggérée, des termes du Protocole de signature du Statut de la Cour permanente de Justice internationale (16 décembre 1920, série D., n° 1, 4e édition, page 7), par lesquels les signataires du Protocole déclarent accepter la juridiction de la Cour dans les termes et conditions prévus par le Statut. De l'avis du Comité, l'acceptation des dispositions

543

du Statut entraîne l'acceptation de « toute compétence d'attribution » dévolue à la Cour aux termes du Statut.

4. Le Comité déclare que ses intentions, en insérant la seconde condition suggérée, sont les mêmes que celles qui l'ont amené à recommander l'emploi des termes mêmes qui figurent au paragraphe 1) de la résolution adoptée par le Conseil de sécurité le 15 octobre 1946, résolution qui déterminait les conditions dans lesquelles la Cour est ouverte aux Etats non parties au Statut. De l'avis du Comité, les obligations que l'Article 94 de la Charte impose aux Membres des Nations Unies s'appliquent également aux Etats non membres des Nations Unies qui deviennent parties au Statut, et aux Etats non parties auxquels la Cour est ouverte. De l'avis du Comité, les obligations des Membres des Nations Unies, aux termes de l'Article 94, comprennent les obligations complémentaires découlant des dispositions des Articles 25 et 103 de la Charte, pour autant que ces dispositions peuvent se rapporter à celles de l'Article 94 ; à son avis aussi, les Etats qui deviennent parties au Statut sans appartenir aux Nations Unies (de même que les Etats non parties auxquels la Cour est ouverte) deviennent liés par les obligations complémentaires découlant des Articles 25 et 103 dans la mesure où ils se rapportent aux dispositions de l'Article 94 (mais non autrement), lorsqu'ils acceptent « toutes les obligations qui découlent pour les Membres des Nations Unies de l'Article 94 ». Le texte français de ce dernier membre de phrase dans la recommandation figurant au présent rapport diffère du texte français de la résolution du Conseil en date du 15 octobre 1946 traitant de l'accès à la Cour. Le Comité croit que le présent texte rend plus exactement le sens.

5. En ce qui concerne la troisième condition suggérée -- contributions aux frais de la Cour -- le Comité a constaté que la dernière phrase de l'article 35, paragraphe 3, du Statut envisageait une contribution générale (c'est-à-dire une contribution qui n'est pas fixée dans chaque cas), aux frais de la Cour, des Etats parties au Statut et qui ne sont pas membres des Nations Unies. Bien que les questions budgétaires soient du ressort de l'Assemblée, c'est sur la recommandation du Conseil de sécurité que l'obligation de contribuer aux frais de la Cour doit être imposée par
l'Assemblée comme condition à fixer en application de l'Article 93, paragraphe 2.

C'est pourquoi le Comité a décidé de recommander cette condition.

6. Le Comité désire attirer l'attention sur le fait que, aux termes de l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte, les conditions auxquelles un Etat qui n'est pas membre de l'Organisation des Nations Unies peut devenir partie au Statut sont déterminées, dans chaque cas, par l'Assemblée générale sur recommandation du Conseil de sécurité. Il s'ensuit que les conditions recommandées ci-dessus comme étant appropriées dans le cas de la Suisse ne sont pas conçues comme devant constituer un précédent à suivre,

,544 soit par le Conseil de sécurité, soit par l'Assemblée générale, dans un cas ultérieur quelconque relevant de l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte.

7. Le Comité fait remarquer que, lorsque la Suisse sera devenue partie au Statut par l'acceptation des conditions déterminées par l'Assemblée générale en application de l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte, la Suisse pourra, en vertu des articles 4 et 69 du Statut, participer à l'élection des membres de la Cour et à la procédure d'amendement du Statut, aux conditions que pourra prescrire l'Assemblée sur recommandation du Conseil de sécurité. A cet égard, il est à noter que, tandis que l'Article 93, paragraphe 2, de la Charte exige que les conditions d'adhésion soient fixées dans chaque cas, les Articles 4 et 69 du Statut permettent à l'Assemblée .générale, sur recommandation du Conseil de sécurité, de poser les conditions applicables d'une manière générale, auxquelles les Etats non membres, parties au Statut, peuvent participer à l'élection des membres de la Cour et à la procédure d'amendement du Statut. Le Comité émet l'avis qu'il n'y aurait pas lieu de fixer de conditions spéciales à cet égard dans le cas de la Suisse. Il émet également l'avis que ce n'est pas maintenant que le Conseil devrait recommander que l'Assemblée prescrive des conditions applicables d'une manière générale en vertu des articles 4 et 69 du Statut, mais après que la Suisse ou tout autre Etat non membre de l'Organisation ·aura effectivement adhéré au Statut. A ce moment, le Conseil désirera peut-être insérer, dans les conditions applicables d'une manière générale, des dispositions analogues à celles de l'Article 19 de la Charte relativement à la troisième condition d'adhésion suggérée au paragraphe 2 ci-dessus, 3i l'Assemblée prescrit cette condition et si la Suisse l'accepte.

545

Annexe n° 3.

Extrait de la Charte des Nations Unies.

CHAPITRE XIV COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE Article 92.

La Cour internationale de Justice constitue l'organe judiciaire principal des Nations Unies. Elle fonctionne conformément à un Statut établi sur la base du Statut de la Cour permanente de Justice internationale et annexé à la présente Charte dont il fait partie intégrante.

Article 93.

1. Tous les Membres des Nations Unies sont ipso facto parties au Statut de la Cour internationale de Justice.

2. Les conditions dans lesquelles les Etats qui ne sont pas Membres de l'Organisation peuvent devenir parties au Statut de la Cour internationale de Justice sont déteoninées, dans chaque cas, par l'Assemblée générale sur recommandation du Conseil de Sécurité.

Article 94.

1. Chaque Membre des Nations Unies s'engage à se conformer à la décision de la Cour internationale de Justice dans tout litige auquel il est partie.

2. Si une partie à un litige ne satisfait pas aux obligations qui lui incombent en vertu d'un arrêt rendu par la Cour, l'autre partie peut recourir au Conseil de Sécurité et celui-ci, s'il le juge nécessaire, peut faire des recommandations ou décider des mesures à prendre pour faire exécuter l'arrêt.

Article 95.

Aucune disposition de la présente Charte n'empêche les Membres de l'Organisation de confier la solution de leurs différends à d'autres tribunaux en vertu d'accords déjà existants ou qui pourront être conclus à l'avenir.

Article 96.

1. L'Assemblée générale ou le Conseil de Sécurité peut demander à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur toute question juridique.

2. Tous autres organes de l'Organisation et institutions spécialisées qui peuvent, à un moment quelconque, recevoir de l'Assemblée générale une autorisation à cet effet, ont également le droit de demander à la Cour des avis consultatifs sur des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de leur activité.

Feuille fédérale. 99e année. Vol, II.

40

546

Annexe n° 4.

Statut de la Cour internationale de Justice.

Article premier.

La Cour internationale de Justice instituée par la Charte des Nations Unies comme organe judiciaire principal de l'Organisation sera constituée et fonctionnera conformément aux dispositions du présent Statut.

CHAPITRE

PREMIER

ORGANISATION DE LA COUR Article 2.

La Cour est un corps de magistrats indépendants, élus, sans égard à leur nationalité, parmi les personnes jouissant de la plus haute considération morale, et qui réunissent les conditions requises pour l'exercice, dans leurs pays respectifs, des plus hautes fonctions judiciaires, ou qui sont des jurisconsultes possédant une compétence notoire en matière de droit international.

V ' ' - . . ,, ..-.'..'

; : Article 3.

' 1. La Cour se compose de quinze membres. Elle ne pourra comprendre plus d'un ressortissant du même Etat.

' 2. A cet égard, celui qui pourrait être considéré comme lé ressortissant de plus d'un Etat sera censé être ressortissant de celui où il exerce habituellement ses droits civils et politiques.

Article 4.

1. Les membres de la Cour sont élus par l'Assemblée générale et par le Conseil de Sécurité sur une liste de personnes présentées par les groupes nationaux de la Cour permanente d'Arbitrage, conformément aux dispositions suivantes.

2. En ce qui concerne les Membres des Nations Unies qui ne sont pas représentés à la Cour permanente d'Arbitrage, les candidats seront présentés par des groupes nationaux, désignés à cet effet par leurs gouvernements, dans les mêmes conditions que celles stipulées pour les membres de la Cour permanente d'Arbitrage par l'article 44 de la Convention de La Haye de 1907 sur le règlement pacifique des conflits internationaux.

547

3. En l'absence d'accord spécial, l'Assemblée générale, sur la recommandation du Conseil de Sécurité, réglera les conditions auxquelles peut participer à l'élection des membres de la Cour un Etat qui, tout en étant partie au présent Statut, n'est pas membre des Nations Unies.

. '.

Article 5.

" 1. Trois mois au moins ayant la date de l'élection, le Secrétaire général des Nations Unies invite par écrit les membres de la Cour permanente d'Arbitrage appartenant aux Etats qui sont parties au présent Statut, ainsi que les membres des groupes nationaux désignés conformément au paragraphe 2 de l'article 4, à procéder dans un délai déterminé, par groupes nationaux, à la présentation de personnes en situation de remplir les fonctions de membre de la Cour.

.. .

. .

2, Chaque groupe ne peut, en aucun cas, présenter plus de quatre personnes, dont deux au plus de sa nationalité. En aucun cas, il ne peut être présenté un nombre de candidats plus élevé que le double des sièges à pourvoir.

Article 6.

Avant de procéder à cette désignation, il est recommandé à chaque groupe national de consulter la plus haute cour de justice, les facultés et écoles de droit; les académies nationales et les sections nationales d'académies internationales, vouées à l'étude: du .droit.

· ···.; : ·-.

· · - · ·· · , Article 7. · -· · . i: · ..

· 1. Le Secrétaire général dresse, par ordre alphabétique, une liste de toutes les personnes ainsi désignées; seules ces personnes sont éligibles, sauf le cas prévu à l'article 12, paragraphe 2.

2. Le Secrétaire général communique cette liste à l'Assemblée générale et au Conseil dé Sécurité.

Article 8 .

. ' . . ' . " L'Assemblée générale et le Conseil de Sécurité procèdent indépendamment l'un de l'autre à l'élection des membres de la Cour.

Article 9.

Dans toute élection, les électeurs auront en vue que- les personnes appelées à faire partie de la Cour, non seulement réunissent individuellement les conditions requises, mais assurent dans l'ensemble la représentation des grandes formes de civilisation et des principaux systèmes juridiques du monde.

Article 10.

1. Sont élus ceux qui ont réuni la majorité absolue des voix dans l'Assemblée générale et dans le Conseil de Sécurité.

548

2. Le vote au Conseil de Sécurité, soit pour l'élection des juges, soit pour là nomination des membres de la commission visée à l'article 12 ci-après, ne comportera aucune distinction entre membres permanents et membres non permanents du Conseil de Sécurité.

3. Au cas où le double scrutin de l'Assemblée générale et du Conseil de Sécurité se porterait sur plus d'un ressortissant du même Etat, le plus âgé est seul élu.

. Article 11, Si, après la première séance d'élection, il reste encore des sièges à pourvoir, il est procédé, de la même manière, à une seconde et, s'il est nécessaire, à une troisième.

Article 12.

1. Si, après la troisième séance d'élection, il reste encore des sièges à pourvoir, il peut être à tout moment formé sur la demande, soit de l'Assemblée générale, soit du Conseil de Sécurité, une commission médiatrice de six membres, nommés trois par l'Assemblée générale, trois par le Conseil de Sécurité, en vue de choisir par un vote à la majorité absolue, pour chaque siège non pourvu, un nom à présenter à l'adoption séparée de l'Assemblée générale et du Conseil de Sécurité.

2. La commission médiatrice peut porter sur sa liste le nom de toute personne satisfaisant aux conditions requises et qui recueille l'unanimité de ses suffrages, lors même qu'il n'aurait pas figuré sur la liste de présentation visée à l'article 7.

3. Si la commission médiatrice constate qu'elle ne peut réussir à assurer l'élection, les membres de la Cour déjà nommée pourvoient aux sièges vacants, dans un délai à fixer par le Conseil de Sécurité, en choisissant parmi les personnes qui ont obtenu des suffrages soit dans l'Assemblée générale, soit dans le Conseil de Sécurité.

4. Si, parmi les juges, il y a partage égal des voix, la voix du juge le plus âgé l'emporte.

Article 13.

1. Les membres de la Cour sont élus pour neuf ans et us sont rééligibles ; toutefois, en ce qui concerne les juges nommés à la première élection de la Cour, les fonctions de cinq juges prendront fin au bout de trois ans, et celles de cinq autres juges prendront fin au bout de six ans.

2. Les juges dont les fonctions prendront fin au terme des périodes initiales de trois et six ans mentionnées ci-dessus seront désignés par tirage au sort effectué par le Secrétaire général, immédiatement après qu'il aura été procédé à la première élection.
3. Les membres de la Cour restent en fonction jusqu'à leur remplacement.

Après ce remplacement, ils continuent de connaître des affaires dont ils sont déjà saisis.

549

4. En cas de démission d'un membre de la Cour, la démission sera adressée au Président de la Cour, pour être transmise au Secrétaire général.

Cette dernière notification emporte vacance de siège.

Article 14.

Il est pourvu aux sièges devenus vacants selon la méthode suivie pour la première élection, sous réserve de la disposition ci-après : dans le mois qui suivra la vacance, le Secrétaire général procédera à l'invitation prescrite par l'article 5, et la date d'élection sera fixée par le Conseil de Sécurité.

Article 15.

Le membre de la Cour élu en remplacement d'un membre dont le mandat n'est pas expiré achève le terme du mandat de son prédécesseur.

Article 16.

1. Les membres de la Cour ne peuvent exercer aucune fonction politique ou administrative, ni se livrer à aucune autre occupation de caractère professionnel.

2. En cas de doute, la Cour décide.

Article 17.

1. Les membres de la Cour ne peuvent exercer les fonctions d'agent, de conBeil ou d'avocat dans aucune affaire.

2. Ils ne peuvent participer au règlement d'aucune affaire dans laquelle ils sont antérieurement intervenus comme agents, conseils ou avocats de l'une des parties, membres d'un tribunal national ou international, d'une commission d'enquête, ou à tout autre titre.

3. En cas de doute, la Cour décide.

Article 18.

1. Les membres de la Cour ne peuvent être relevés de leurs fonctions que si, au jugement unanime des autres membres, ils ont cessé de répondre aux conditions requises.

2. Le Secrétaire général en est officiellement informé par le Greffier.

3. Cette communication emporte vacance de siège.

Article 19.

Les membres de la Cour jouissent, dans l'exercice de leurs fonctions, des privilèges et immunités diplomatiques.

550

Article 20.

Tout membre de la Cour doit, avant d'entrer en fonction, en séance publique, prendre l'engagement solennel d'exercer ses attributions en pleine impartialité et en toute conscience.

Article 21.

1. La Cour nomme, pour trois ans, son Président et son Vice-Président; ils sont rééligibles.

2. Elle nomme son Greffier et peut pourvoir à la nomination de tels autres fonctionnaires qui seraient nécessaires.

Article 22.

1. Le siège de la Cour est fixé à La Haye. La Cour peut toutefois siéger et exercer ses fonctions ailleurs lorsqu'elle le juge désirable.

2. Le Président et le Greffier résident au siège de la Cour.

Article 23.

1. La Cour reste toujours en fonction, excepté pendant les vacances judiciaires, dont les périodes et la durée sont fixées par la Cour.

2. Les membres de la Cour ont droit à des congés périodiques dont la date et la durée seront fixées par la Cour, en tenant compte de la distance qui sépare La Haye de leurs foyers.

3. Les membres de la Cour sont tenus, à moins de congé, d'empêchement pour cause de maladie ou autre motif grave dûment justifié auprès du Président, d'être à tout moment à la disposition de la Cour.

Article 24.

1. Si, pour une raison spéciale, l'un dés membres de la Cour estime devoir ne pas participer au jugement d'une affaire déterminée, il en fait part au Président.

2. Si le Président estime qu'un des membres de.la Cour ne doit pas, pour une raison spéciale, siéger dans une affaire déterminée, il en avertit celui-ci.

3. Si, en pareil cas, le membre de la Cour et le Président sont en désaccord, la Cour décide.

Article 25.

1. Sauf exception expressément prévue par le présent Statut, la Cour exerce ses attributions en séance plénière.

2. Sous la condition que le nombre des juges disponibles pour constituer la Cour ne soit pas réduit à moins de onze, le Règlement de la Cour pourra

551

prévoir que, selon les circonstances et à tour de rôle, un ou plusieurs juges pourront être dispensés de siéger.

3. Le quorum de neuf est suffisant pour constituer la Cour.

Article 26.

1. La Cour peut, à toute époque, constituer une ou plusieurs chambres composées de trois juges au moins selon ce qu'elle décidera, pour connaître de catégories déterminées d'affaires, par exemple d'affaires de travail et d'affaires concernant le transit et les communications.

2. La Cour peut, à toute époque, constituer une chambre pour connaître d'une affaire déterminée. Le nombre des juges de cette chambre sera fixé par la Cour avec l'assentiment des parties.

3. Les chambres prévues au présent article statueront, si les parties le demandent.

Article 27.

Tout arrêt rendu par l'une des chambres prévues aux articles 26 et 29 sera considéré comme rendu par la Cour.

Article 28.

Les chambres prévues aux articles 26 et 29 peuvent, avec le consentement des parties, siéger et exercer leurs fonctions ailleurs qu'à La Haye.

Article 29.

.

En vue de la prompte expédition des affaires, la Cour compose annuellement une chambre de cinq juges, appelés à statuer en procédure sommaire lorsque les parties le demandent. Deux juges seront, en outre, désignés pour remplacer celui des juges qui se trouverait dans l'impossibilité de siéger.

Article 30.

1, La Cour détermine par un règlement le mode suivant lequel elle exerce ses attributions. Elle règle notamment sa procédure.

2. Le Règlement de la Cour peut prévoir des assesseurs siégeant à la Cour ou dans ses chambres, sans droit de vote.

Article 31.

1. Les juges de la nationalité de chacune des parties conservent le droit de siéger dans l'affaire dont la Cour est saisie.

2. Si la Cour compte sur le siège un juge de la nationalité d'une des parties, toute autre partie peut désigner une personne de son choix pour siéger en

552

qualité de juge. Celle-ci devra être prise de préférence parmi les personnes qui ont été l'objet d'une présentation en conformité des articles 4 et 5.

3. Si la Cour ne compte sur le siège aucun juge de la nationalité des parties, chacune de ces parties peut procéder à la désignation d'un juge de la même manière qu'au paragraphe précédent.

4. Le présent article s'applique dans le cas des articles 26 et 29. En pareil cas, le Président priera un, ou, s'il y a lieu, deux des membres de la Cour composant la chambre, de céder la place aux membres de la Cour de la nationalité des parties intéressées et, à défaut ou en cas d'empêchement, aux juges spécialement désignés par les parties.

5. Lorsque plusieurs parties font cause commune, elles ne comptent, pour l'application des dispositions qui précèdent, que pour une seule. En cas de doute, la Cour décide.

6. Les juges désignés comme il est dit aux paragraphes 2, 3, et 4 du présent article, doivent satisfaire aux prescriptions des articles 2; 17, paragraphe 2 ; 20 et 24 du présent Statut. Ils participent à la décision dans des conditions de complète égalité avec leurs collègues.

Article 32, 1. Les membres de la Cour reçoivent un traitement annuel.

2. Le Président reçoit une allocation annuelle spéciale.

3. Le Vice-Président reçoit une allocation spéciale pour chaque jour où il remplit les fonctions de Président.

4. Les juges désignés par application de l'article 31, autres que les membres de la Cour, reçoivent une indemnité pour chaque jour où ils exercent leurs fonctions.

5. Ces traitements, allocations et indemnités sont fixés par l'Assemblée générale. Ils ne peuvent être diminués pendant la durée des fonctions.

6. Le traitement du Greffier est fixé par l'Assemblée générale sur la proposition de la Cour.

7. Un règlement adopté par l'Assemblée générale fixe les conditions dans lesquelles des pensions sont allouées aux membres de la Cour et au Greffier, ainsi que les conditions dans lesquelles les membres de la Cour et le Greffier reçoivent le remboursement de leurs frais de voyage.

8. Les traitements, allocations et indemnités sont exempts de tout impôt.

Article 33.

Les frais de la Cour sont supportés par les Nations Unies de la manière que l'Assemblée générale décide.

55*

CHAPITRE II COMPÉTENCE DE LA COUR Article 34.

1. Seuls les Etats ont qualité pour se présenter devant la Cour.

2. La Cour, dans les conditions prescrites par son Règlement, pourra demander aux organisations internationales publiques des renseignements relatifs aux affaires portées devant elle, et recevra également lesdits renseignements qui lui seraient présentés par ces organisations de leur propre initiative.

3. Lorsque l'interprétation de l'acte constitutif d'une organisationinternationale publique ou celle d'une convention internationale adoptée en vertu de cet acte est mise en question dans une affaire soumise à la Cour, le Greffier en avise cette organisation et lui communique toute la procédure écrite.

Article 35.

1. La Cour est ouverte aux Etats parties au présent Statut.

2. Les conditions auxquelles elle est ouverte aux autres Etats sont,, sous réserve des dispositions particulières des traités en vigueur, réglées par le Conseil de Sécurité, et, dans tous les cas, sans qu'il puisse en résulter pour les parties aucune inégalité devant la Cour.

3. Lorsqu'un Etat, qui n'est pas Membre des Nations Unies, est partie en cause, la Cour fixera la contribution aux frais de la Cour que cette partie devra supporter. Toutefois, cette disposition ne s'appliquera pas, si cet Etat participe aux dépenses de la Cour.

Article 36.

1. La compétence de la Cour s'étend à toutes les affaires que les partieslui soumettront, ainsi qu'à tous les cas spécialement prévus dans la Charte des Nations Unies ou dans les traités et conventions en vigueur.

2. Les Etats parties au présent Statut pourront, à n'importe quel moment, déclarer reconnaître comme obligatoire de plein droit et sans convention spéciale, à l'égard de tout autre Etat acceptant la même obligation, la juridiction de la Cour sur tous les différends d'ordre juridique ayant pour objet: a. l'interprétation d'un traité; b. tout point de droit international; c. la réalité de tout fait qui, s'il était établi, constituerait la violation d'un engagement international; d. la nature ou l'étendue de la réparation due pour la rupture d'un, engagement international.

554

3. Lee déclarations ci-dessus visées pourront être faites purement et simplement ou sous condition de réciprocité de la part de plusieurs ou de certains Etats, ou pour un délai déterminé.

4. Ces déclarations seront remises au Secrétaire général des Nations Unies qui en transmettra copie aux parties au présent Statut ainsi qu'au Greffier de la Cour.

5. Les déclarations faites en application de l'article 36 du Statut de la Cour permanente de Justice internationale pour une durée qui n'est pas encore expirée seront considérées, dans les rapports entre parties au présent Statut, comme comportant acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice pour la durée restant à courir d'après ces déclarations et conformément à leurs termes.

6. En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide.

Article 37.

Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le renvoi à une juridiction que devait instituer la Société des Nations ou à la Cour permanente de Justice internationale, la Cour internationale de Justice constituera cette juridiction entre les parties au présent Statut.

Article 38.

1. La Cour, dont la mission est de régler conformément au droit international les différends qui lui sont soumis, applique: a. les conventions internationales, soit générales, soit spéciales, établissant des règles expressément reconnues par les Etats en litige; b. la coutume internationale comme preuve d'une pratique générale acceptée comme étant le droit; c. les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées; d. sous réserve de la disposition de l'article 59, les décisions judiciaires et la doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de détermination des règles de droit.

2. La présente disposition ne porte pas atteinte à la faculté pour la Cour, si les parties sont d'accord, de statuer ex aequo et bono.

CHAPITRE

III

PROCÉDURE

Article 39.

1. Les langues officielles de la Cour sont le français et l'anglais. Si les parties sont d'accord pour que toute la procédure ait lieu en français, le jugement sera prononcé en cette langue. Si les parties sont d'accord pour

555

que toute la procédure ait lieu en anglais, le jugement sera prononcé en cette langue.

2. A défaut d'un accord fixant la langue dont il sera fait usage, les parties pourront employer pour les plaidoiries celle des deux langues qu'elles préféreront, et l'arrêt de la Cour sera rendu en français et en anglais. En ce cas, la Cour désignera en même temps celui des deux texte» qui fera foi.

3. La Cour, à la demande de toute partie, autorisera l'emploi par cette partie d'une langue autre que le français ou l'anglais.

Article 40.

1. Les affaires sont portées devant la Cour, selon le cas, soit par notification du compromis, soit par une requête, adressées au Greffier; dans les deux cas, l'objet du différend et les parties doivent être indiqués.

2. Le Greffier donne immédiatement communication de la requête à tous intéressés.

3. Il en informe également les Membres des Nations Unies par l'entremise du Secrétaire général, ainsi que les autres Etats admis à ester en justice devant la Cour.

Article 41.

1. La Cour a le pouvoir d'indiquer, si elle estime que les circonstances l'exigent, quelles mesures conservatoires du droit de chacun doivent être prises à titre provisoire.

2. En attendant l'arrêt définitif, l'indication de ces mesures est immédiatement notifiée aux parties et au Conseil de Sécurité.

Article 42.

1. Les parties sont représentées par des agents.

2. Elles peuvent se faire assister devant la Cour par des conseils ou des avocats.

3. Les agents, conseils et avocats des parties devant la Cour jouiront des privilèges et immunités nécessaires à l'exercice indépendant de leurs fonctions.

Article 43.

1, La procédure a deux phases: l'une écrite, l'autre orale.

2, La procédure écrite comprend la communication à juge et à partie des mémoires, des contre-mémoires, et, éventuellement, des répliques, ainsi que de toute pièce et document à l'appui.

3, La communication se fait par l'entremise du Greffier dans l'ordre et les délais déterminés par la Cour.

556

4. Toute pièce produite par l'une des parties doit être communiquée à l'autre en copie certifiée conforme.

5. La procédure orale consiste dans l'audition par la Cour des témoins,, experts, agents, conseils et avocats.

Article 44.

1. Pour toute notification à faire à d'autres personnes que les agents, conseils et avocats, la Cour s'adresse directement au gouvernement de l'Etat sur le territoire duquel la notification doit produire effet.

2. Il en est de même s'il s'agit de faire procéder sur place à l'établissement de tous moyens de preuve.

Article 45.

Les débats sont dirigés par le Président et, à défaut de celui-ci, par le Vice-Président; en cas d'empêchement, par le plus ancien des juges présents.

Article 46.

L'audience est publique, à moins qu'il n'en soit autrement décidé par la Cour ou que les deux parties ne demandent que le public ne soit pas admis.

Article 47.

1, II est tenu de chaque audience un procès-verbal signé par le Grenier et le Président.

2, Ce procès-verbal a seul caractère authentique.

Article 48.

La Cour rend des ordonnances pour la direction du procès, la détermination des formes et délais dans lesquels chaque partie doit finalement conclure ; elle prend toutes les mesures que comporte l'administration des preuves.

Article 49.

La Cour peut, même avant tout débat, demander aux agents de produire tout document et de fournir toutes explications. En cas de refus, elle en prend acte.

Article 50.

A tout moment, la Cour peut confier une enquête ou une expertise à toute personne, corps, bureau, commission ou organe de son choix.

Article 51.

Au cours des débats, toutes questions utiles sont posées aux témoins et experts dans les conditions que fixera la Cour dans le règlement visé à l'article 30.

557

Article 52.

Après avoir reçu les preuves et témoignages dans les délais déterminés par elle, la Cour peut écarter toutes dépositions ou documents nouveaux qu'une des parties voudrait lui présenter sans l'assentiment de l'autre.

Article 53.

1. Lorsqu'une des parties ne se présente pas, ou s'abstient de faire valoir ses moyens, l'autre partie peut demander à la Cour de lui adjuger ses conclusions.

2. La Cour, avant d'y faire droit, doit s'assurer non seulement qu'elle a compétence aux termes des articles 36 et 37, mais que les conclusions sont fondées en fait et en droit.

Article 54.

1. Quand les agents, conseils-et avocats ont fait valoir, sous le contrôle de la Cour, tous les moyens qu'ils jugent utiles, le Président prononcé la clôture des débats.

2. La Cour se retire en Chambre du Conseil pour délibérer.

3. Les délibérations de la Cour sont et restent secrètes.

Article 55.

1. Les décisions de la Cour sont prises à la majorité des juges présents.

2. En cas de partage des voix, la voix du Président ou de celui qui le remplace est prépondérante.

Article 56.

1. L'arrêt est motivé.

2. Il mentionne les noms des juges qui y ont pris part.

Article 57.

Si l'arrêt n'exprime pas en tout ou en partie l'opinion unanime des juges, tout juge aura le droit d'y joindre l'exposé de son opinion individuelle.

Article 58.

L'arrêt est signé par le Président et par le Greffier. Il est lu en séance publique, les agents dûment prévenus.

Article 59.

La décision de la Coni n'est obligatoire que pour les parties en litige ·et dans le cas qui a été décidé.

558

Article 60.

L'arrêt est définitif et sans recours. En cas de contestation sur le sens et la portée de l'arrêt, il appartient à la Cour de l'interpréter, à la demande de toute partie.

Article 61.

!.. La revision de l'arrêt ne peut être éventuellement demandée à la Cour qu'en raison de la découverte d'un fait de nature à exercer une influence décisive et qui, avant le prononcé de l'arrêt, était inconnu de la Cour et de la partie qui demande la revision, sans qu'il y ait, de sa part, faute à l'ignorer.

2. La procédure de revision s'ouvre par un arrêt de la Cour constatant expressément l'existence du fait nouveau, lui reconnaissant les caractères qui donnent ouverture à la revision, et déclarant de ce chef la demande recevable.

3. La Cour peut subordonner l'ouverture de la procédure en revision à l'exécution préalable de l'arrêt.

4; La demande en revision devra être formée au plus tard dans le délai de six mois après la découverte du fait nouveau.

5, Aucune demande de révision ne pourra être formée après l'expiration d'un délai de dix ans à dater de l'arrêt.

Article 6 2 .

. . .

1. Lorsqu'un Etat estime que, dans un différend, .un intérêt d'ordre juridique est pour lui en cause, il peut adresser à la Cour une requête, à fin d'intervention.

2. La Cour décide.

Article 63.

1. Lorsqu'il s'agit de l'interprétation d'une convention à laquelle ont participé d'autres Etats que les parties en litige, le Grenier les avertit sans délai.

2. Chacun d'eux a le droit d'intervenir au procès, et s'il exerce cette faculté, l'interprétation contenue dans la sentence est également obligatoire à son égard.

Article 64.

S'il n'en est autrement décidé par la Cour, chaque partie supporte se» frais de procédure.

559 CE API TUE IV

AVIS CONSULTATIFS Article 65.

1. La Cour peut donner un avis consultatif sur toute question juridique, à la demande de tout organe ou institution qui aura été autorisé par la Charte des Nations Unies ou conformément à ses dispositions, à demander cet avis.

2. Les questions sur lesquelles l'avis consultatif de la Cour est demandé sont exposées à la Cour par une requête écrite qui formule, en termes précis, la question sur laquelle l'avis de la Cour est demandé. Il y est joint tout document pouvant servir à élucider la question.

Article 66.

1. Le Greffier notifie immédiatement la requête demandant l'avis consultatif à tous les Etats admis à ester en justice devant la Cour.

2. En outre, à tout Etat admis à ester devant la Cour et à toute organisation internationale jugés, par la Cour ou par le Président si elle ne siège pas, susceptibles de fournir des renseignements sur la question, le Greffier fait connaître, par communication spéciale et directe, que la Cour est disposée à recevoir des exposés écrits dans un délai à fixer par le Président, ou à entendre des exposés oraux au cours d'une audience publique tenue à cet effet.

3. Si un de ces Etats, n'ayant pas été l'objet de la communication spéciale visée au paragraphe 2 du présent article, exprime le désir de soumettre un exposé écrit ou d'être entendu, la Cour statue.

4. Les Etats ou organisations qui ont présenté des exposés écrits ou oraux sont admis à discuter les exposés faits par d'autres Etats et organisations dans les formes, mesures et délais fixés, dans chaque cas d'espèce, par la Cour ou, si elle ne siège pas, par le Président. A cet effet, le Greffier communique, en temps voulu, les exposés écrits aux Etats ou organisations qui en ont eux-mêmes présenté.

Article 67.

La Cour prononcera ses avis consultatifs en audience publique, le Secrétaire général et les représentants des Membres des Nations Unies, des autres Etats et des organisations internationales directement intéressés étant prévenus.

Article 68.

Dans l'exercice de ses attributions consultatives, la Cour s'inspirera en outre des dispositions du présent Statut qui s'appliquent en matière contentieuse, dans la mesure où elle les reconnaîtra applicables.

560

CHAPITRE V AMENDEMENTS Article 69.

Les amendements au présent Statut seront effectués par la même procédure que celle prévue pour les amendements à la Charte des Nations Unies, sous réserve des dispositions qu'adopterait l'Assemblée générale, sur la recommandation du Conseil de Sécurité, pour régler la participation à cette procédure des Etats qui, tout en ayant accepté le présent Statut de la Cour, ne sont pas Membres des Nations Unies.

Article 70.

La Cour pourra proposer les amendements qu'elle jugera nécessaire d'apporter au présent Statut, par la voie de communications écrites adressées au Secrétaire général, aux fins d'examen conformément aux dispositions de l'article 69.

644«

561

Ad 5220

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la poursuite des oeuvres d'entraide internationale.

(Du 8 juiUet 1947.)

Monsieur le Président et Messieurs, Dans notre rapport du 6 juin dernier concernant le postulat Oeri, nous avons annoncé notre intention de saisir l'Assemblée fédérale de propositions concrètes au sujet de la poursuite des oeuvres d'entraide internationale.

Ce rapport analysait les divers aspects du problème. Comme il doit être examiné en même temps que le présent message, nous nous bornerons à formuler ici les conclusions auxquelles nous nous sommes arrêtés et dont nous jugeons devoir saisir les chambres.

Il serait inconcevable que l'activité charitable de la Suisse prît fin, alors que la détresse règne encore, pour la seule raison que les crédits primitivement consacrés à ce but sont épuisés. De nouvelles ressources sont donc nécessaires. La générosité publique doit être mise à contribution.

Nous en avons déjà souligné la nécessité à l'occasion du dépôt du postulat Oeri. Notre avis n'a pas changé sur ce point. C'est pourquoi, comme nous l'avions annoncé, des études ont été faites afin de déterminer comment peuvent être obtenus les fonds dont on a encore besoin pour notre participation à la lutte contre la misère en Europe. Ces études ont embrassé toutes les formes, classiques ou inédites, que peuvent emprunter les collectes et il n'est pas douteux qu'avec la bonne volonté nécessaire on obtienne encore des résultats intéressants. Le Conseil fédéral attend donc du « Don suisse » qu'il mette tout en oeuvre dans ce but. Nous avons pu toutefois nous convaincre que si l'on est en droit de s'attendre à un sérieux effort, voire à de nouveaux sacrifices du peuple suisse, les moyens financiers que procurera la générosité publique ne suffiront pas à couvrir les frais d'une aide efficace. Or, cette aide, la Suisse se doit de l'accorder, car il serait indigne d'abandonner à la veille de l'hiver ceux qui ont bénéficié de notre aide et dont beaucoup, cette année encore, souffriront des conséquences d'une récolte déficitaire. Nous nous voyons donc contraints, nonobstant Feuille fédérale. 99e année. Vol. II.

41

562

les difficultés financières de la Confédération, de solliciter des chambres l'ouverture d'un nouveau crédit.

Cette décision du parlement doit d'une part permettre d'assurer, dans la mesure où la générosité publique n'y suffira pas, la poursuite de celles des oeuvres suisses de secours qui s'avéreront indispensables. Elle doit d'autre part rendre possible la participation de la Suisse aux tâches qui rentreront dans l'oeuvre du Fonds international de, secours à l'enfance.

Ainsi que cela a déjà été relevé dans le rapport du 6 juin, la contribution des divers pays au fonds n'est pas fixée par ce dernier. Le budget du fonds doit être alimenté par le reliquat des actifs de l'UNRRA, par des dons des gouvernements et par la générosité privée. On ignore encore le montant que le fonds héritera de l'UNRRA. Par contre, le congrès américain lui a déjà consacré 40 millions de dollars. Un grand nombre d'autres Etats ont déjà annoncé leur participation au budget du fonds, en espèces ou en nature. En outre, une collecte mondiale, dont les grandes lignes ont été arrêtées par le conseil économique et social des Nations Unies, doit permettre à la générosité privée de prendre à sa charge une partie importante du budget du fonds, de même que d'autres oeuvres en faveur de l'enfance. Un comité composé de diverses personnalités de réputation mondiale organisera cette collecte en collaboration avec des commissions nationales.

Il est évident que notre pays également doit faire bénéficier le fonds de son concours. Comme nous l'avons dit dans le rapport du 6 juin, l'apport de la Suisse au fonds devrait consister essentiellement dans l'attribution de crédits pour l'intensification des oeuvres suisses de secours à l'enfance -- c'est-à-dire à la Croix-Rouge suisse et au « Don suisse » -- et pour le financement de la formation et du perfectionnement en Suisse d'un personnel de cadre, qui serait envoyé à cet effet dans notre pays. Cela étant, nous admettons que la contribution de la Confédération au fonds proprement dit pourrait être réduite au minimum.

Le montant que la Confédération doit consacrer au financement tant direct qu'indirect du fonds, selon les modalités qui précèdent, ne peut pas être fixé d'avance. II n'en est pas moins nécessaire de calculer le montant du nouveau crédit pour l'entraide de telle sorte que le
Conseil fédéral puisse agir le moment venu.

Nous constations, toujours dans notre rapport du 6 juin, qu'une institution centrale est nécessaire si l'on veut maintenir une coordination des diverses oeuvres suisses. Nous avions prévu qu'au cas où le « Don suisse » disparaîtrait, ce rôle devrait être assuré par une organisation ad hoc. Manifestement, il y aurait plus d'inconvénients que d'avantages à liquider le « Don suisse » avant que les tâches en vue desquelles il a été créé ne soient achevées. Les populations secourues, qui sont unanimes à l'apprécier, ne comprendraient pas qu'on lui substitue un instrument nouveau. C'est

563

donc au « Don suisse » que les sommes à prélever sur le nouveau crédit devront être confiées, au vu de projets détaillés, pour être utilisées selon les méthodes suivies jusqu'ici et dont l'efficacité a été abondamment prouvée. Il convient partant de prévoir que la liquidation du « Don suisse » sera différée jusqu'à l'été prochain; elle devra être achevée le 30 juin 1948.

A ce moment, les organes responsables du « Don suisse » devront avoir déterminé, d'accord avec le Conseil fédéral, l'affectation des ressources dont l'institution pourra encore disposer et arrêter les mesures propres à assurer l'achèvement des tâches qui ne seraient pas terminées.

Nous nous sommes donc convaincus de la nécessité de proposer an parlement le vote d'un nouveau crédit de 20 millions de francs pour la poursuite de l'entraide internationale. Il importe de préciser que ce montant ne permettra pas de faire face à une contribution éventuelle de la Suisse au budget de l'assistance des réfugiés sur le plan international. Cette question, que nous avons effleurée dans le rapport du 6 juin, n'est pas encore mûre ; nous en poursuivons l'étude et devons nous réserver, le cas échéant, d'en saisir le parlement dans un message distinct.

Nous demeurons convaincus que tous les crédits votés depuis le début de 1946 pour la poursuite des oeuvres d'entraide internationale doivent faire l'objet d'une couverture spéciale. Un examen approfondi a révélé, compte tenu du problème d'une nouvelle collecte, qu'il serait prématuré de formuler actuellement des propositions concrètes à ce sujet. Nous devons donc nous réserver de les présenter ultérieurement. Elles porteront sur les crédits ouverts par l'arrêté fédéral du 27 juin 1946 et les suivants.

Nous avons l'honneur de vous proposer l'adoption du projet d'arrêté fédéral ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

: Berne, le 8 juillet 1947.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le, président de la Confédération, ETTER.

Le vice-chancelier, 6545

Ch_

OSER.

564

Projet.)

Arrêté fédéral ouvrant

un crédit pour les oeuvres d'entraide internationale.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

CONFÉDÉRATION SUISSE, vu le message du Conseil fédéral du 8 juillet 1947, arrête :

Article premier.

Un nouveau crédit de 20 millions de francs est ouvert au Conseil fédéral pour les oeuvres d'entraide internationale.

Art. 2.

Le Conseil fédéral fera sur ce crédit les prélèvements qu'il jugera indispensables pour: a. Assurer, par les soins du « Don suisse pour les victimes de la guerre », le financement de la poursuite d'oeuvres suisses de secours; 6. Permettre la participation de la Suisse à l'effort de solidarité entrepris dans le cadre des tâches incombant au « Fonds international de secours à l'enfance » ainsi que, le cas échéant, à d'autres oeuvres collectives internationales.

Art. 3.

Le Conseil fédéral attribuera dans chaque cas les sommes visées à l'article 2, lettre a, sur la base de projets motivés présentés par le « Don suisse ».

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Les sommes visées à l'article 2, lettre b serviront principalement à intensifier les oeuvres nationales suisses en faveur des enfants étrangers, dont l'activité rentrera dans le programme général du fonds international de secours à l'enfance. Elles couvriront également la contribution de la Confédération au budget proprement dit de cette institution; cette contribution sera réduite au minimum de façon qu'il soit tenu compte des prestations directes de la Suisse en faveur du secours à l'enfance et des charges qu'elle encourt par ailleurs pour l'entraide internationale.

Art. 4.

La liquidation du « Don suisse pour les victimes de la guerre » est différée jusqu'au 30 juin 1948.

Les dispositions qu'arrêtera la commission executive du « Don suisse » concernant l'affectation des actifs dont cette institution pourra encore disposer à la date précitée, ainsi que les modalités d'achèvement des tâches qui ne seraient pas terminées à cette même date, seront soumises à l'approbation du Conseil fédéral.

Art. 5.

Le présent arrêté, qui n'est pas de portée générale, entre immédiatement en vigueur.

6546

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'adhésion de la Suisse au statut de la cour internationale de justice. (Du 8 juillet 1947.)

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Jahr

1947

Année Anno Band

2

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27

Cahier Numero Geschäftsnummer

5222

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

10.07.1947

Date Data Seite

525-565

Page Pagina Ref. No

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