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ET RECUEIL DES LOIS SUISSES 70e année.

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Berne, le 17 juillet 1918.

Volume III.

Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif

au projet d'une loi fédérale concernant le droit d'auteur sur les oeuvres littéraires et artistiques.

(Du 9 juillet 1918.)

Introduction.

I.

La loi fédérale concernant la propriété littéraire et artistique, du 23 avril 1883, a besoin d'être revisée sous bien des rapports. Bornons-nous à relever à cet égard les points suivants : 1. Réglementation incomplète et peu claire du droit de représentation et d'exécution; incertitude touchant la définition très importante de la publication de l'oeuvre; lacunes diverses, telles, par exemple, l'absence de dispositions sur la présomption de la qualité d'auteur, sur les oeuvres anonymes et pseudonymes, l'absence dé dispositions réglant, d'une manière générale, la protection des reproductions présentant une certaine originalité.

2. Loi actuelle devenue surannée par suite du développement qui s'est produit dans certains domaines (de la photographie et de la cinématographie, par ex.), ainsi que par suite des développements et perfectionnements successifs qui ont été apportés au droit d'auteur par les législations modernes, la jurisprudence et la doctrine.

3. Le fait que la Suisse a adhéré à l'Union internationale pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques est Feuille fédérale suisse. 70e année. Vol. III.

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d'une importance particulière pour la revision de la législation concernant cette matière. L'Union a été fondée1 par la convention de Berne du 9 septembre 1886. Elle a donc pri» naissance postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 23 avril 1883. La convention primitive de 1886 a été révisée ,par l'acte additionnel arrêté à la conférence de Paria de 1896; ces deux accords furent dès lors re visés par la conférence de Berlin de 1908. Cette dernière a établi un texte unique, désigné sous le nom de « Convention, de Berne revisée pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques » et portant la date du 13 novembre 1908, lequel est destiné à remplacer les anciennes conventions de 1886 et de 1896. Ce texte a dès lors -- par lé protocole additionnel du 20 mars 1914 -- été soumis, lui aussi, à une révision qui n'a porté cependant que sur un seul point spécial n'entrant pas ici en considération. Ainsi que le faisaient les précédents accords, la convention revisée, elle aussi, ne garantit en principe à l'auteur ayant droit à la protection que le traitement accordé aux nationaux des divers pays de l'Union, mais elle règle, d'autre part, divers rapports de droit.

d'une façon positive et obligatoire pour les pays unionistesLorsque ces dernières dispositions accordent une protection plus étendue que celle octroyée par la législation d'un despays de l'Union, ce pays se voit dans la nécessité de traiter les oeuvres provenant d'autres pays de l'Union plus avantageusement que les oeuvres dont il est lui-même pays d'origine. Il résulte de cet état de choses qu'il est indispensabledé tenir compte, pour la revision de la loi suisse, des normes convenues internationalement qui garantissent aux auteurs des droits positifs, aussi est-ce ici la convention revisée de1908 qui fait règle puisqu'elle a été ratifiée sans réserves parla Suisse. Nous aurons l'occasion de revenir plus loin sur lésdispositions qui entrent en ligne de compte.

Outre la Suisse, tous les pays de l'Union, sauf la Suède, ont adhéré à la convention de Berne revisée de 1908, savoir t Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, France, GrandeBretagne, Haïti, Italie, Japon, Libéria, Luxembourg, Maroe (territoire du protectorat français), Monaco, Norvège, PaysBas, Portugal et Tunisie. Quelques pays ont réservé, il est vrai, sur certains points l'application des anciennes conventions.

589 II.

Le bureau suisse, de la propriété intellectuelle a été chargé par le département suisse de justice et police d'exécuter les travaux préparatoires en vue de la revision de la loi fédérale du 23 avril 1883. Un premier avant-projet, élaboré par le bureau précité, a été soumis par le département de justice et police à l'examen d'une commission d'experts.

Cette commission .était notamment composée de représentants des cercles intéressés à la revision du droit d'auteur.

En faisaient partie : MM. Bühler, E., à Winterthour, pour le. « Schweizerischer Kunstverein »; Combe, Edouard, à Lausanne, pour l'Association des musiciens suisses; Etlin, professeur, à Lucerne, pour la Société fédérale de musique; Dr Ganz, Paul, professeur, à Baie, pour le « Verband der schweizerischen Kunstmuseen»; Ganz, Kodolphe, à Zurich, pour l'Union suisse des photographes; Gaudard, Emile, conseiller national, à Vevey; : Lichtenhahn, H., à Baie, pour le « Schweizerischer Buchhändlerverein », pour la Société des libraires et éditeurs de la Suisse romande et pour le «Verband schweizerischer Musitalienhändler »; Loosli, C.-A., à Bümpliz, pour la Société suisse des ingénieurs et architectes, la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses et la Fédération des architectes suisses; Mermod, Louis-Philippe, à Ste-Croix, pour la Société industrielle et commerciale de Ste-Croix; Munzinger, Oscar, conseiller aux Etats, à Soleure; D1' Reichel, Alexandre, juge fédéral, à Lausanne; Dr Richard, Eugène, conseiller, aux Etats, à Genève ; Dr Röthlisberger, Ernest, professeur, à Berne; Scheidegger, J., conseiller national, à Berne, président central de l'Union suisse des arts et métiers; Schürmann, Melchior, à Lucerne, pour la Société fédérale de chant;

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Dr Sc&uler, Hans, à Zurich, pour l'Union suisse du commerce et de l'industrie; Simon, Fridolin, grand-conseiller, à Kagaz, pour la Société suisse des hôteliers; Dr Wagnière, G., à Genève, pour l'Association de la presse suisse; Wild, Emile, conseiller national, à St-Gall.

Faisaient en outre, d'office, partie de la commission : MM. Müller, conseiller fédéral, chef du département suisse de justice et police; r D Kaiser, W., chef de la division de justice et de législation au département suisse de justice et police; Haller, F., directeur du bureau suisse de la propriété intellectuelle; Kraft, W., adjoint du bureau suisse de la propriété intellectuelle.

La commission a consacré à la discussion du premier avant-projet 10 séances -- du 20 au 29 mai 1912 -- qui ont eu lieu à Berne. Elle a été présidée par M. le conseiller fédéral Müller, excepté dans les 6», 7e et 8e séances où M.

Müller fut remplacé par M. feeiehel. MM. Munzinger et Kaiser ont été empêchés d'assister aux séances de la commission.

Les délibérations de la commission d'experts ont été sténographiées et le bureau suisse .de la propriété intellectuelle a rédigé, sur la base du Stenogramme, un procès-verbal qui a été imprimé.

Ensnite des délibérations de la commission d'experts, le bureau de la propriété intellectuelle a, sur ordre du département, remanié sérieusement le Ier avant-projet. Le' IIe avantprojet ainsi obtenu fut dès lors soumis à son tour, par le département de justice et police, à la commission d'experts, dont la composition avait subi entre temps les modifications suivantes : M. Munzinger avait démissionné comme membre de la commission.

Avaient été remplacés : M. Edouard Combe, comme représentant de l'Association

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des musiciens suisses, par M. le Dr Philippe Dunant, à Genève; M. H. Lichtenhahn, comme représentant du «Verband schweizerischer Musikalienhändler », par M. Adolphe Hug, à Zurich; M. Louis-Philippe Mermod, comme représentant de la : Société industrielle et commerciale de Ste-Croix, par M. A.

de Meuron, conseiller national, à Lausanne; M. C.-A. Loosli, comme représentant de la Société suisse des ingénieurs et architectes, par M. Otto Pfleghard, architecte, à Zurich, et M. A. E. Rohn, professeur, à Zurich également.

Outre M. C.-A. Loosli, la Fédération des architectes suisses avait chargé encore M. Otto Pfleghard de la représenter auprès de la commission; M. Loosli a renoncé toutefois dans la suite à représenter cette société.

Les nouveaux membres suivants avaient, d'autre part, été désignés : M. Fritz Marti, rédacteur, à Zurich, et M. René Morax, à Morges, comme représentants de la Société des écrivains suisses; M. A.-E. Rohn, professeur à Zurich, comme représentant du «Verein schweizerischer Maschinen-Industrieller»; M. C. Vogler, directeur de musique, à Baden, comme représentant du « Schweizerischer musikpädagogischer Verband ».

La commission d'experts a consacré à la délibération du.

IIe avant-projet sept s.éances -- du 11 au 14 mai 1914 --, lesquelles ont eu lieu à Berne comme la première fois. Celles-ci ont été présidées par M. le conseiller fédéral Müller.

MM. Gaudard, de Meuron, Richard et Kaiser ont été empêchés d'y prendre part.

Les délibérations de la IIe session de la commission d'experts ont également été sténographiées et le bureau de la propriété intellectuelle a aussi rédigé, sur la base du sténogramme, un procès-verbal qui a été imprimé.

Tous ces travaux préparatoires ont finalement abouti au projet d'une nouvelle «loi fédérale concernant le droit d'auteur sur les oeuvres littéraires et artistiques», lequel se trouve annexé au présent message.

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III.

Nous donnons ci-après un aperçu des postulat (de l'Assemblée fédérale), motions (de membres de cette Assemblée) et pétitions diverses, qui se rapportent à la revision de la législation suisse concernant le droit d'auteur sur les oeuvres littéraires et artistiques : A. Postulat, motions et pétitions antérieures à la lre session de la commission d'experts.

Par postulai n° 551 'des 16 mars/U octobre 1897, le Conseil national et le Conseil des Etats ont invité le Conseil fédéral à examiner : ; 1° si, par une application convenable de la législation nationale et par de nouvelles dispositions légales, on ne parviendrait pas à mettre de justes bornes à la tendance à réclamer, pour les ouvrages littéraires et artistiques, une protection excessive et trop minutieuse, notamment en ce qui concerne l'architecture et la musique; 2° si, pour.la musique en particulier, et principalement pour l'exécution ou la représentation, en Suisse, d'oeuvres musicales ou dramatico-musicales organisée sans but de lucre, c'est-à-dire gratuitement ou dans un but de bienfaisance, il n'y aurait pas lieu de reviser l'article 11, § 10, de la loi fédérale du 23 avril 1883, dans le but de mettre un terme aux abus constatés.

Dans la séance du Conseil national du 13 juin 1902, M.

Zurbuchen, « faisant allusion à la manière tracassière en laquelle sont appliqués les lois et traités sur la protection de la propriété littéraire et artistique », a manif esté le désir de voir s'opérer à bref délai une revision de la loi fédérale du 23 avril 1883 dans le sens du postulat n° 551.

Dans la séance du Conseil des Etats du 15 juin 1904, M.

Richard a fait observer qu'une puissante association de compositeurs français se permettait d'adresser des réclamations, non seulement aux sociétés exécutantes, mais encore aux propriétaires des salles dans lesquelles les représentations ou exécutions ont lieu, et il a formulé le voeu que la loi fédérale fût revisée de façon à ce que les auteurs ne pussent réclamer aucune indemnité pour les représentations et exécutions organisées essentiellement sans but de lucre.

593 Dans la séance du Conseil des Etats du 9 décembre 1908, M. Richard a manifesté l'opinion qu'il y avait lieu de donner suite aux nombreuses pétitions de sociétés musicales Qui se plaignaient de la société française des compositeurs.

A la séance du Conseil des Etats du 14 avril 1910, M.

Brügger, se référant à la revision future de la loi sur le droit d'auteur, a fait remarquer que la protection accordée devrait profiter aux artistes et non pas à de tierces personnes, entrepreneurs et exploiteurs de tout genre.

En décembre 1896 et au printemps de 1897, la société de musique de la Suisse orientale, à St-Gall, et M. Eomieux, à Genève, ont transmis au Conseil fédéral une pétition provoquée! par cette société et signée par de nombreuses autres sociétés de chant ou de musique de toute la Suisse; la pétition formulait une série d'amendements et d'adjonctions à apporter" à la loi de 1883; les conclusions peuvent en être ré.sumées de la manière suivante : 1° Ad article premier : a. Le droit d'exécution doit être expressément mentionné comme compris dans le droit d'auteur (cette conclusion ne se rapporte qu'au texte allemand); 6. toute édition autorisée par l'auteur ou ses ayants cause sera susceptible de circuler en. Suisse « nonobstant l'existence d'une ou plusieurs éditions territorialement autorisées ».

2° Ad article 7 : a. Il sera dit expressément que les oeuvres dramatiques, musicales et dramatico-musicales non publiées ne peuvent être représentées ou exécutées publiquement qu'avec le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause; o. la réglementation actuelle du droit de représentation (alinéas 2 à 4 de l'article 7) sera maintenue pour les oeuvres dramatiques et dramatico-musicales; c. pour les oeuvres musicales, la protection du droit d'exécution ne dépendra d'aucune mention de réserve; toutefois, le droit d'exécuter des oeuvres musicales i ou des morceaux détachés ou des arrangements licites pour concerts d'oeuvres dramatico-musicales, ne pourra

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être refusé à des tiers lorsque l'exécutant aura acheté de l'éditeur le matériel nécessaire.

3« Ad article 10:

Par oeuvres publiées il faut entendre les oeuvres qui ont paru imprimées, à l'exception de celles qui portent la mention « imprimé comme manuscrit ». La représentation, l'exécution, l'exhibition ou l'exposition d'une oeuvre musicale, dramatique, dramatico-musicale ou.

artistique non imprimée ne constitue pas une publi-' cation dans le sens de la loi.

4° Ad article 11 :

La transcription ou la transposition de morceaux de > musique ou de voix isolées sera licite, si l'exécution..

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est impossible à l'aide du matériel imprimé existant.

et si l'exécutant a acheté de l'éditeur l'édition impri: mée se rapprochant le plus du but qu'il vise.

D'autres allégations de la pétition se rapportaient à la convention internationale pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques.

Pétition de l'Union suisse des photographes, adressée au Conseil fédéral en mars 1900 et proposant d'apporter les modifications suivantes à la loi fédérale du 23 avril 1883 : 1° suppression de l'enregistrement prévu à l'article 9; 2° prolongation à 30 ans de la durée de protection; 3° application des .az-ticles 19 et 20 concernant la possibilité de rétroactivité.

Pétition de la Société suisse des hôteliers, adressée le 19 août 1901 au Conseil fédéral et demandant que la loi fédérale du 23 avril 1883 soit revisée dans le sens des cinq desiderata suivants : 1° Etablissement d'une liste exacte et accessible à tous des pièces de musique protégées, afin que chacun ait la possibilité de s'orienter sur les morceaux dont l'exécution est libre et sur ceux qui ne peuvent être produits que moyennant finance, c'est-à-dire après paiement d'une taxe fixée par la loi.

2° Etablissement de règles précises pour le calcul du tantième à accorder aux auteurs. La règle contenue dans la loi actuelle ne convient que pour les théâtres, mai»

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non pour les auditions musicales dont le programmecomporte des morceaux protégés et des morceaux li-, très et dont bien souvent! l'entrée est gratuite.

3° Etablissement de dispositions désignant d'une manière précise les personnes responsables du paiement des tantièmes et des ' infractions à la loi.

4° Stipulation dans la loi que les tantièmes sont payables · périodiquement, non pas avant, mais après les audi- L tions, sans exclure par là, pour certains cas, le dépôt d'une caution dont le montant serait fixé par la loi.

5° Création d'un organe officiel, compétent et impartial; pour trancher les contestations ou les cas douteux.

; Dans une requête adressée le 18 juin 1903 au département fédéral de justice et police, M. Linder-.Stehelin, caissier du · conseil d'administration du jardin zoologique à Baie, a formulé, 1« voeu que la nouvelle loi contînt une disposition prévoyant que les concerts organisés par des sociétés reconnues d'utilité publique ou de bienfaisance, etc., soient , libérés du paiement d'un tantième à l'auteur, même lors- .qu'une entrée est perçue, pourvu que la finance d'entrée ne soit pas distribuée aux organisateurs à titre de dividende ou de bénéfice ou comme moyen de subsistance, mais qu'elle soit affectée à l'exploitation de l'établissement intéressé.

Par requête adressée le 29 février 1904 au département fédéral de justice et police, le comité central de la Société' fédérale des musiques militaires et populaires a fait remar-quer que, dans le postulat n° 551, on envisage comme exécutions organisées sans but de lucre celles qui ont lieu gratuitement ou dans un but de bienfaisance; cette définition va trop loin, car le but de lucre ne fait pas nécessairement défaut dans toute exécution organisée sans finance d'entrée; d'autre part, cette définition ne vise pas le cas, très important pour les musiques de la société, où le but de lucre n'est 'pas poursuivi par leurs différents membres, mais où une finance d'entrée est néanmoins perçue pour faire face aux frais directs de la société.

Par mémoire du 24 juin 1907, le comité de l'Association des musiciens suisses a communiqué à M. le conseiller fédéral Buchet, chef du département dte l'intérieur, pour êtretransmis au Conseil fédéral, le voeui formulé par l'assemblée générale de l'association tendant à ce que la législation'

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suisse sur le droit d'auteur soit revisée dans le sens « d'une harmonisation » avec la législation des pays voisins, de fa
Pétition de M. Charles Jahn, avocat, à Berne, adressée le 14 septembre 1908 au bureau fédéral de la propriété intellectuelle et demandant, eu égard à l'arrêt rendu par le Tribunal fédéral le 11 février 1908 dans la cause Choudens contre Kruse (RO 34, I, n° 20), qu'on insère, dans une nouvelle loi, une disposition interdisant de faire usage de reproductions illicites pour des représentations ou exécutions publiques.

Pétition du « Verband schweizerische/r Musikalienhändler », adressée le 14 juillet 1910 au bureau fédéral de la propriété intellectuelle, tendant à ce que la disposition de l'article 11, C, chiffre 9, de la loi fédérale du 23 avril 1883 soit restreinte en ce sens que les recueils y mentionnés ne puieeent être livrés par l'éditeur (généralement un office cantonal chargé de la distribution du matériel scolaire) qu'aux écoles ou aux conseils de paroisse, à l'exclusion des particuliers et des sociétés.

Pétition collective de la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses et de la Fédération des architectes suisses, adressée le 10 mars 1911 au département suisse de justice ·et police avec une consultation de M. le Dr Arthur Curti, à Zurich, pour la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses. Elle formule les desiderata suivants : 1° La commande ou l'achat d'un produit artistique ne doit en aucune manière avoir pour conséquence de conférer le droit de reproduction au commettant ou à l'acheteur.

2° Extension, pour les produits artistiques, de la durée de protection à 50 ans après la mort de l'auteur.

'3° Reconnaissance légale en faveur de l'artiste d'un droit de poursuite pour tort moral ou pour atteinte à son honneur professionnel, lorsque "sa réputation ou les chances de vente de l'oeuvre sont diminuées par des reproductions inintelligentes ou défectueuses. En tous cas, reconnaissance légale du droit de refuser, dans ces circonstances, de signer, en dépit de l'obligation assumée ;par contrat.

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4» L'art appliqué et les plans d'architecture, ou les projets artistiques qui servent à l'art industriel et à l'architectucre, ne doivent plus être protégés comme dessins et modèles industriels, mais bien comme de véritables oeuvres d'art.

5° Abrogation du règlement du 13 mai 1897 concernant là permission de prendre des copies des oeuvres d'art appartenant à la Confédération, attendu que ce règlement est en-contradiction avec la législation fédérale et avec les dispositions dte la Convention die Berme revisée, du 13 novembre 1908.

Pétition de l'Union suisse des photographes, adressée le 24 juin 1911 au département suisse de justice et police, demandant que les photographies «oient traitées absolument comme les oeuvres littéraires et artistiques, qu'en particulier leur protection soit libérée de toutes'formalités quelconques et soit de même durée.

Pétition de la Librairie Payot & Cie, à Lausanne, adressée le 19 avril 1912 à M. le conseiller fédéral Buchet, chef du département de l'intérieur, et demandant que les dispositions de l'article 11, A, chiffre 1, et B, chiffre 6, de la loi fédérale du 23 avril 1883 soient maintenues pour autant qu'elles autorisent la reproduction d'oeuvres littéraires dans les recueils destinés à l'enseignement scolaire (art. 11, A, chiffre 1) ou la reproduction fragmentaire d'une oeuvre des arts figuratifs dans un ouvrage destiné au même enseignement (art. 11, B, chiffre 6).

Pétition de M. Charles Jahn, avocat, à Berne, adressée le 9 mai 1912 au chef du département suisse de justice et police, proposant : 1° d'établir des règles légales pour le calcul des tantièmes dans les cas où la représentation ou exécution a lieu sans perception de finance d'entrée; 2° de déclarer illicite, eu égard à l'arrêt rendu par le Tribunal fédéral le 11 février Ì908 dans la cause Choudens contre Kruse (KO 34, I, n° 20), aussi bien la mise en circulation que l'utilisation d'une contrefaçon.

Pétition collective diu « Verband der schweizerischen Kunstmuseen» et au « Schweizerischer Kunstverein», adressée le 13 mai 1912 au chef du département suisse de justice

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et policé, demandant que les deux sociétés soient représentées dans la commission d'experts chargée d'examiner le Ier avant-projet. Les auteurs de la requête se plaignent que d'après la loi fédérale du 23 avril 1883 les musées des beaux-arts ne peuvent, sans y être autorisés par le titulaire du doroit d'auteur, ni permettre aux intéressés de se livrer à des études d'après des oeuvres d'art, ni reproduire eux-mêmes, dans des publications officielles, les oeuvres qui leur sont confiées.

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B. Pétitions reçues entre la l et la II session de la commission d'experts.

Pétition de la Conférence intercantonale des chefs de département (de l'instruction publique) de la Suisse romande, adressée le 25 juin 1912 au Conseil fédéral, demandant que la disposition de l'article 11, A, chiffre 1, de la loi · fédérale du 23 avril 1883 soit maintenue en ce qui concerne la reproduction d'oeuvres littéraires dans les recueils destinés à l'enseignement scolaire.

Pétition, du Syndicat français pour la protection de la propriété intellectuelle, communiquée au Conseil fédéral le 9 août 1912 par les soins de l'ambassade de France. Les auteurs de la pétition, sachant qu'un projet de revision de la loi fédérale du 23 avril 1883 est à l'étude, signalent les divers, inconvénients que présentent les dispositions de l'article 7, chiffires 2 à 4 de cette loi, réglementant le droit de représentation ou d'exécution, et ils relèvent à ce propos les trois points suivants : 1« en obligeant un auteur à mentionner les conditions auxquelles il entend subordonner la représentation ou l'exécution publique de son oeuvre, on lui enlève la possibilitàde choisir son théâtre et ses interprètes; 2° en fixant d'avance le tantième maximum qui doit revenir à l'auteur, on retire à celui-ci le droit de déter^ miner le taux de sa propre rémunération, taux qui doit varier suivant les circonstances de temps, de lieu et de personnes; 3° l'oeuvre une 1 fois publiée, l'auteur se trouve dépouillé de tout droit d'appréciation et l'on crée à son préjudice un véritable système de licence obligatoire.

Pétition collective de personnes intéressées à la pro*tection des oeuvres musicales, adressée en décembre 1912f

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·aux membres de la commission d'experts et réclamant pour le compositeur un droit de représentation ou d'exécution -absolu.

Pétition de la Société fédérale de musique, adressée le 30 mars 1913 au président de la Confédération et au département suisse de justice et police, sollicitant le maintien d'une limite légale maximum pour les tantièmes ainsi que des dispositions du Ier avant-projet concernant les représentations ou exécutions de sociétés d'amateurs (art. 25) et les représentations ou- exécutions sans but de lucre ou données dans des fêtes publiques (art. 26).

Pétition de la Société du théâtre de la Comédie à Genève, adressée le 16 avril 1913 aux membres de la commission d'experts, demandant que la disposition de l'art. 7 de la loi fédérale du 23 avril 1883 soit maintenue pour les théâtres, abstraction faite du taux du tantième.

Pétition collective de la Société suisse des ingénieurs et architectes et du « Verein schweizerischer Maschinen-Indur strieller », adressée le 16 juin 1913 au cbef du département suisse de justice et police et renfermant, outre un voeu tendant à ce que les ingénieurs soient également représentés ·dans la commission d'experte, les postulats suivants : 1° transformation de la loi sur les. oeuvres littéraires et artistiques en une loi sur les oeuvres littéraires, artistiques et techniques (éventuellement : « et de la science de l'ingénieur ») ; "2° octroi de la protection légale sans qu'il soit besoin de remplir des formalités ou de réserver certains droits; 3° protection des dessins techniques, que ceux-ci poursuivent un but instructif ou un autre but quelconque, et cela même s'ils ne sont pas publiés ou destinés à l'être; 4° protection des auteurs de « dessins, plans, etc. » non seulement contre toute reproduction, mais aussi contre "toute exécution abusive.

Pétition de diverses Fabriques allemandes de grammophones, adressée le 11 août 1913 au département suisse de justice et police, 1° préconisant en principe l'introduction du système de la licence obligatoire pour l'adaptation des oeuvres musicales à des instruments mécaniques ' de reproduction, .ainsi que la protection des organes des instraments ser-

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vant à l'adaptation, comme le prévoyait déjà le Ier avant-projet; 2° émettant, en outre, divers autres voeux concernant ces deux domaines.

Proposition de M. le Dr P. Schindler, à Glaris, adressée le 3 septembre 1913 à M. Müller, président de la Confédération, et visant la rédaction de l'article 21 du IIe avant-projet.

Pétition de la Société des écrivains suisses adressée le 1er janvier 1914 au département suisse de justice et police, laquelle 1° réclame le droit de 'représentation et d'exécution absolu; 2° demande que non seulement les romans-feuilletons et nouvelles publiés dans les journaux jouissent d'uno protection illimitée, mais aussi les articles littéraires, artistiques ou scientifiques qui paraissent dans les journaux; 3° s'élève contre les articles 23 (reproductions destinées à l'usage scolaire), 30 (représentations ou exécutions données par des sociétés d'amateurs), 31 (représentations, etc. organisées dans un but dee bienfaisance) et 49 (exemption de responsabilité) du II avant-projet.

Par lettre du 16 février 1914, le Bureau permanent du Congrès international des éditeurs, à Berne, a donné communication au département suisse de justice et police des décisions ,qui furent prises par ledit Congrès, lors de sa huitième session en juin 1913, en ce qui concerne la protection des oeuvres photographiques, et il a exprimé en particulier le voeu que la nouvelle loi suisse 1° reconnaisse le principe que le droit d'auteur appartient à celui qui a fait le cliché, et, si le cliché a été fait sur 'commande, à celui qui l'a commandé; 2° stipule que, pour obtenir la jouissance du droit d'auteur, celui qui veut l'exercer doit inscrire sur chaque épreuve l'année du premier tirage, le pays d'origine, son nom et son adresse. .

Pétition de la Société fédérale de musique, adressée le 6 mai 1914 au département suisse de justice et police, demandant qu'on établisse une limite légale maximum pour la perception des tantièmes.

60Ì C. Pétitions postérieures à la IIe session de la commission d'experts.

Pétition de l'Union suisse des arts et métiers, adressée1 le 17 juillet 1914 au département suisse de justice et police; elle s'élève contre le fait que les produits de l'art appliquéà l'industrie seraient, d'après le IIe avant-projet, protégé» comme oeuvres d'art d'une manière toute générale, et exprime le voeu que la législation sur les dessins et modèles industrielsdemeure applicable pour la protection de l'activité artistique dans le domaine industriel.

Pétitions de la Fabrique des produits alimentaires Maggi à Kempthal, des 25 septembre 1916 et 9 mai 1917, demandant que les étalages dans les vitrines, qui présentent un caractère original, soient admis à figurer dans la définition ou énumération éventuelle des oeuvres protégées par la nouvelle loi, ou qu'il soit tout au moins stipulé expressément, dans les documents officiels servant à l'interprétation de la notion des oeuvres protégeables, que les étalages originaux et artistiques dans les vitrines constituent des oeuvres protégeables.

IV.

1. En ce qui concerne le système à suivre pour la revision> on pouvait se demander s'il fallait élaborer: ou bien -- comme c'est le cas par exemple en Allemagne -- une loi spéciale pour le droit d'auteur sur les oeuvres littéraires et musicales, et une autre loi spéciale pour le droit d'auteur sur les oeuvres des arts figuratifs et de la photographie, ou une loi unique réglant cependant séparément les deuxdomaines ci-dessus.

Suivant l'exemple de la loi fédérale du 23 avril 1883, nous avons réuni les divers domaines susmentionnés en un seul projet et nous avons renoncé également à les traiter séparément dans ce dernier. Cette solution nous a paru être la plusrationnelle. En traitant séparément les domaines en question dans le sens des deux possibilités précitées, on- aurait dû avoirrecours fréquemment à des répétitions, ce qui aurait alourdi le texte de la loi. Une seule et unique loi constitue une simplification très considérable et n'exclut nullement la possibilité d'une réglementation claire et bien ordonnée. Si unedisposition, en particulier, ne doit être appliquée qu'à cer-

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taines catégories d'oeuvres, le projet le mentionne expresséjnent (comp. par exemple articles 13, 25 à 27), sauf dans le -cas où cela résulte déjà clairement de la disposition elle-même.

Le système sur lequel est basé le projet n'a d'ailleurs .-soulevé aucune opposition formelle au sein de la commission d'experts. Un seul membre de cette commission eût préféré ·qu'on traitât séparément -- à l'instar de la loi allemande -- .les divers domaines entrant ici en ligne de compte, mais il a reconnu qu'au point de vue pratique la chose présenterait des inconvénients. Un autre membre de la commission a jnême directement déconseillé de traiter séparément les domaines en question.

2. En ce qui concerne la terminologie du projet, il y a .lieu d'observer ce qui suit: Le terme « auteur » n'est employé que là où il est question de l'auteur personnellement. Lorsqu'une disposition est .applicable aussi bien à l'auteur qu'à ses ayants cause, on s'est servi de l'expression « titulaire du droit d'auteur » et, ·dans certains cas spéciaux, du terme «titulaire du droit de représentation ou d'exécution».

Conformément à une proposition faite dans le Ire session ;de la commission d'experts, le projet distingue entre l'oeuvre, bien immatériel, et les matérialisations de l'oeuvre. Le bien immatériel est désigné par le terme «oeuvre», ou par «oeuvre originale» lorsqu'il s'agit de l'oeuvre dans sa forme primitive. Pour les matérialisations de l'oeuvre, on s'est servi: pour le sens large, de l'expression «exemplaire d'une -(de 1') oeuvre», pour le sens restreint, des termes: « exemplaire original», s'il s'agit d'indiquer la matérialisation primitive - de l'oeuvre, et «exemplaire d'une (de la) reproduction».

3. La loi fédérale du 23 avril 1883 fait dépendre, dans ·certains cas, la protection de l'accomplissement de formalités, et elle prévoit: l'inscription dans un registre public a. pour les oeuvres posthumes ou pour celles publiées par la Confédération, par un canton, par une personne juridique ou par une société (art. 3, al. 1),.

ife. pour les oeuvres photographiques et autres oeuvres analogues (art. 9, lit. a);

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une mention de réserve sur l'oeuvre publiée . -a. pour le droit de représentation ou d'exécution des oeuvres dramatiques, musicales et dramatico-musicales (d'après l'interprétation donnée par le Tribunal fédéral à l'art. 7, comp. R. 0. 25, IL, n° 63, page 538), b. pour les articles de journaux ou de recueils périodiques, à l'exception des articles de discussion politique parus dans les feuilles publiques et des nouvelles du jour, dont la reproduction ne peut pas être réservée (art. 11, A, n03 4 et.5). .

Déjà à teneur de l'interprétation authentique donnée a.u 2e alinéa de l'art. 2 de la Convention de 1886 par la Déclaration interprétative de la Conférence de Paris de 1896, les aiuteurs unionistes pouvaient invoquer la protection découlant de la Convention (assimilation aux nationaux et droits spécialement accordés par la convention) sans avoir à remplir les formalités1 du pays où la protection était réclamée. La Convention revisée dispense les auteurs unionistes de l'accomplissement de toutes formalités (art. 4), donc aussi de celles du pays d'origine de l'oeuvre; en outre, elle abroge (art. 11, al. 3) la mention de réserve du droit d'exécution déclarée obligatoire ; par l'art. 9, al. 3, de la Convention de 1886 pour les oeuvres musicales publiées.

Dès lors, il n'y a plus aucune raison de prescrire dans une nouvelle loi intérieure des formalités qui ne s'appliqueraient qu'aux oeuvres dont le pays d'origine est la Suisse et pas à celles provenant d'autres pays unionistes; en ce qui concerne notamment la mention de réserve du droit d'exécution, cette formalité ne pourrait être exigée pour les oeuvres provenant de pays qui ont ratifié le 3e alinéa de l'article 11 de la Convention revisée- (soit, en l'espèce, tous les pays de l'Unioni sauf le Japon et la Suède, ce dernier Etat n'ayant même pas encore -- ainsi que nous l'avons déjà dit -- adhéré à la Convention revisée).

En ce qui concerne plus particulièrement la réserve du droit d'exécution, on a déjà fait remarquer, dans le message relatif à la Convention revisée, que sa suppression n'a pas l'importance qu'on y attribue souvent, et qu'il n'en est pas moins possible de sauvegarder, dans une mesure équitable, les intérêts de la musique populaire. Dans ce but le présent projet propose; avant tout la liberté d'exécution des sociétés d'amateurs (art. 32), et prévoit quelques autres dispositions en faveur des exécutants (confection licite de matériel d'exéFeuitte fédérale suisse. 70e année. Vol. III.

42

604

cution: art. 27; liberté des représentations ou exécutions organisées sans but de lucre: art. 33; acquisition de bonne foi du matériel d'exécution: art. 62; les art. 60 et 61 tiennent spécialement compte des intérêts des hôteliers et cafetiers).

Pour les motifs qui précèdent, le présent projet (sauf pour les .articles de journaux, art. 24, al. 1) ne fait plus dépendre la protection de l'accomplissement de formalités.

L'exception faite pour les articles de journaux est en harmoaie avec la Convention revisée (art. 9, al. 2).

4. Le projet comprend les cinq chapitres suivants: I. Dispositions générales (art. 1 à 10); II. Etendue du droit d'auteur (art. 11 à 36); III. Durée de la protection (art. 37 à 42); IV. Sanction civile et pénale (art. 43 à 62); V. Dispositions finales (art. 63 à 71).

Exposé du projet.

Titre.

Les oeuvres de la photographie, dont il est aussi question dans le projet, ne figurent pas dans le titre. Il résulte clairement de l'article 2 qu'elles sont comprises parmi les oeuvres protégées. Tenant compte de cette circonstance, l'Union suisse des photographes a fait déclarer dans la commission d'experts qu'elle ne s'opposait pas à la rédaction actuelle du x titre.

D'autre part, le simple titre «Loi fédérale sur le droit d'auteur» («Bundesgesetz betreffend das Urheberrecht»), qui a été proposé dans la commission d'experts, ne serait pas suffisamment clair en ce qui concerne le texte allemand, attendu que le terme «Urheberrecht» est aussi employé dans le domaine de la propriété industrielle.

I. Dispositions générales.

Ce chapitre comprend d'abord des dispositions sur les oeuvres protégées (art. 1 à 4) et sur les auteurs protégés (art. 5), (ensuite des dispositions sur la collaboration (art.

6), sur la présomption de la qualité d'auteur et sur les oeuvres anonymes ou pseudonymes (art. 7), sur la transmissibilité du droit d'auteur (art. 8), la saisie du droit d'auteur (art. 9) et sur la publication et l'édition d'une oeuvre dan» le sens de la loi (art. 10).

'

605 Article premier.

A l'instar de la loi fédérale du 23,avril 1883, le Ier avant-projet désignait aussi d'une manière toute générale les oeuvres protégées («oeuvres littéraires, artistiques et photographiques»); il ne relevait spécialement que certaines catégories d'oeuvres au sujet desquelles le doute paraissait possible. A la Ire session de la commission d'experts, on a préconisé soit une rédaction toute générale de la disposition, soit une énumération -- à titre d'exemples -- d'oeuvres protégées analogue à celle prévue par la Convention de Berne. Le IIe avant-projet a adopté la seconde solution que nous avons maintenue dans le projet actuel, rémunération (à titre d'exemples pouvant être utile aussi bien au public qu'aux tribunaux.

Le Ier aUnéa déclare en principe que la loi protège les oeuvres littéraires et artistiques (les oeuvres photographiques sont mentionnées spécialement à l'article 2).

Le 2e alinéa renferme une énumération de catégories d'oeuvres protégées: d'abord des exemples d'oeuvres littéraires, puis les oeuvres musicales et enfin des exemples d'oeuvres des arts figuratifs. Cette énumération donne lieu aux observations suivantes: I. Bien que la chose ait été proposée à la IIe session de la commission d'experts, le projet renonce à mentionner, comme catégories spéciales, les oeuvres « dramatiques » et «dramatico-musicales». Une oeuvre dramatique est une oeuvre des belles-lettres et unie oeuvre dramatico-musicale est con> posée en réalité d'une oeuvre littéraire et d'une oeuvre musicale. Il s'ensuit que la mention spéciale des oeuvres dramatiques et dramatico-musicales ne ferait qu'alourdir inutilement le texte de la loi.

II. Oeuvres des belles-lettres, oeuvres scientifiques. On a proposé à la IIe session de la commission d'experts de remplacer ces deux termes par « écrits, conférences et discours ».

La proposition a suscité des objections. Nous avons préféré nous en tenir aux deux expressions ci-dessus, vu qu'elles désignent certaines catégories littéraires, tandis que la proposition présentée se rapporte plutôt à la forme sous laquelle des produits littéraires sont portés à la connaissance du public. Nous renvoyons à cet égard à la discussion du 3e alinéa.

III. Cartes géographiques et topographiques ou autres ouvrages figuratifs de nature scientifique, ou technique, y compris les ouvrages plastiques de nature scientifique.

1. La loi fédérale du 23 avril 1883 désigne, en son articles,

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comme protégés par la loi les «dessins géographiques, topographiques, d'histoire naturelle, architecturaux, techniques et autres .analogues». Au lieu de cette énumération, le projet a adopté une désignation plus générale, résultant de la destination même des oeuvres dont il s'agit, et il ne mentionne comme exemples que les cartes géographiques et topographiques. La mention des ouvrages plastiques de nature scientifique est nouvelle; elle répond à une disposition imperativ© de la Convention revisée (art. 2, al. 1 et 3).

Doivent être considérés comme étant de «nature scientifique » en particulier aussi les ouvrages qui sont destinés à l'instruction.

2. On a proposé dans la IIe session de la commission d'experts de mentionner aussi, à titre d'exemples, les ouvrages architecturaux. Les observations présentées par l'auteur de cette proposition ont montré qu'il avait principalement en vue les projets d'oeuvres d'architecture. Nous n'avons pas cru devoir cependant étendre davantage l'énumération des exemples.

D'ailleurs les projets en question n'auraient pas à figurer parmi les « ouvrages figuratifs », mais bien à côté des « oeuvres d'architecture» mentionnées également à l'article premier.

Or il va de soi que les oeuvres d'architecture, de même que les autres oeuvres, comprennent aussi les projets de ces oeuvres, ce qui fait qu'il eût été superflu de mentionner spéciale-1 ment ces derniers.

IV. L'énumération des oeuvres chorégraphiques et des pantomimes parmi les oeuvres protégées est dictée par une disposition imperative de la Convention revisée (art. 2, al. 1 et 3).

V. Arrangements scéniques fi&és far la cinématographie ou par un ^procédé analogue et représentant une création originale.

1. L'article 14 de la Convention revisée oblige les pays contractants à protéger: d'wne part, les «oeuvres littéraires, scientifiques ou 'artistiques» contre la reproductioner et la représentation publique par la cinématographie (1 alinéa); d'autre part, a) tant l'oeuvre indépendante fixée par la cinématographie (« production cinématographique », 2e alinéa), b) que la simple reproduction cinématographique d'une oeuvre comme telle, sous réserve des droits de l'auteur de l'original (3e alinéa).

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Les dispositions susmentionnées s'appliquent également aux reproductions ou productions obtenues par tout autre procédé analogue à la cinématographie (4e alinéa).

2. On sait que la cinématographie consiste en la fixation d'une action au moyen d'une succession d'images et en la projection de ces images sur un écran de .façon à rendre sensible le mouvement de la dite action. (Pour plus de simplicité, il ne sera question dans les lignes suivantes que, d'images photographiques, celles-ci étant d'ailleurs, sans doute, seules en usage actuellement.)

3. Si le film a été pris d'après nature, sans arrangement arbitraire de l'action fixée par la cinématographie, celuici est censé, au point de ;vue du droit d'auteur, être uniquement composé d'autant d'oeuvres photographiques qu'il renferme d'images différentes.

4. Lorsqu'une action arrangée arbitrairement est fixée par la cinématographie, au droit d'auteur photographique sur chacune des images composant le film vient alore s'ajouter le droit d'auteur sur l'action ou -- ainsi que s'exprime le projet -- sur l'arrangement scénique tel qu'il est représenté par l'ensemble des dites images. Selon que l'arrangement scénique a été imaginé indépendamment ou qu'il se borne à reproduire une autre oeuvre, un drame par exemple, il y a oeuvre indépendante fixée par la cinématographie ou simplement reproduction cinématographique d'une oeuvre originale.

5. Une réglementation légale des arrangements scéniques fixés oinématographiquement nous paraît nécessaire, bien que ces arrangements se rapprochent beaucoup des pantomimes, pour la simple raison déjà que la Convention revisée prévoit des dispositions spéciales à leur sujet alors qu'elle enumero, en son article 2, les pantomimes parmi les oeuvres protégées.

Se conformant en principe à l'art. 14 de la Convention revisée, le projet règle cette matière de la façon suivante: a) l'article premier reconnaît que les arrangements scéniques originaux constituent une oeUvre dans le sens de la loi, soit une . oeuvre du genre littéraire, ainsi que cela résulte de son groupement dans l'énumération du dit article; b) l'article 12, chiffre 3, étend le droit exclusif de la reproduction d'une oeuvre à la reproduction au moyen de la cinématographie ou d'un procédé analogue (la protection contre la «représentation» au moyen de la projection du film renfermant la reproduction, résulte ;

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de la disposition du chiffre 3 de l'article 11; comp.

observation à la fin de l'exposé relatif à l'art. 12); c) l'article 3, lai. 1, chiffre 2, désigne, d'autre part, la reproduction obtenue par la einématographie ou par un procédé analogue comme protégeable; le droit du titulaire du droit d'autour sur l'oeuvre originale, demeure réservé (art. 3, al. 3).

De la disposition des articles 1er et 3, al. 1, chiffre 2, combinée avec celle de l'art. 11, chiffre 3, il résulte que les arrangements scéniques fixés par la cinématographie ou par un procédé analogue sont protégés comme tels contre la « représentation » au moyen de la projection du film fixant ces .arrangements.

VI. Oeuvres d'architecture. Il peut exister des doutes sur l'étendue de la protection conférée aux oeuvres d'architecture par l'article 11, B, chiffre 8, de la loi fédérale du 23 avril 1883. Se conformant à une disposition imperative de la Convention re visée (art. 2, al. 1 et 3), le projet déclare sans, autre protégeables les oeuvres d'architecture. Il va de soi que toute construction quelconque ne peut pas être objet de protection, mais qu'il faut pour cela une oeuvre possédant, dans son ensemble, un caractère artistique.

3me alinéa. Il peut arriver que l'auteur d'une création littéraire ou musicale n'ayant encore fait l'objet d'aucune notation quelconque, la récite ou la joue simplement de mémoire. Les créations de ce genre, qui n'ont pas encore été « fixées » d'une manière ou d'une autre, sont eaussi protégées comme oeuvres dans le sens de la loi; le 3 alinéa le dit expressément. Il résulte de cette disposition qu'il ne doit pas être permis à une personne, qui aurait p. ex. noté l'oeuvre lors d'une récitation ou d'une exécution musicale, de mettre la reproduction ainsi obtenue en circulation ou de s^en servir pour une récitation, représentation ou exécution publique de l'oeuvre, sans l'autorisation du titulaire du droit d'auteur.

En proposant au sein de la commission d'experts d'insérer dans le projet la mention « écrits, conférences et discours » (v. chiffre II de l'exposé relatif au 2e alinéa de l'arer ticle 1 ), le motionnaire désirait exprimer qu'en principe les productions purement verbales jouissent aussi de la protection. Or comme il ne s'agit pas ici, ainsi que nous l'avons montré, uniquement de la production verbale, il nous a paru préférable de nous servir d'une expression générale.

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La disposition du 3e alinéa n'est pas applicable, de par, sa nature, aux oeuvres des arts figuratifs, ni, par exemple, aux ouvrages figuratifs de nature scientifique ou technique ou aux (arrangements scéniques fixés par la cinématographie ou par un procédé analogue, mentionnés comme oeuvres littéraires au 2e alinéa.

A propos de l'article premier, il reste encore deux questions à traiter qui ont donné lieu à.des pétitions et notamment .aussi à des discussions très approfondies au sein de la commission d'experts; elles ont trait: A. d'une part, à l'extension de la protection de la présente loi aux produits de l'art appliqué à l'industrie; B. d'autre part, à la protection des projets techniques, particulièrement en ce qui concerne leur exécution.

A. Produits de l'art appliqué à l'industrie.

I. L'article 2, al. 4, de la Convention revisée déclare que les « oeuvres d'art appliqué à l'industrie » sont protégées autant que le permet la législation intérieure de chaque pays. Les produits en question ne doivent, en conséquence, être protégés comme oeuvres des arts figuratifs dans les pays de l'Union que si la législation intérieure prévoit cette protection et dans les limites fixées par cette législation seulement. Si la protection est prévue, il résulte de l'art. 4 de la Convention revisée que celle-ci doit être accordée, sans égard à la réciprocité, aux produits provenant des piays qui ont adhéré » l'art. 2, al. 4, et à l'art. 4 de la Convention revisée.

Abstraction faite de la Suisse, 15 pays de l'Union sur 18 ont adhéré à la Convention revisée -- y compris l'art. 2, al. 4 --, soit tous sauf la France, la Suède et la Tunisie. De ces 15 pays, 5 seulement protègent expressément les produits de l'iart appliqué à l'industrie comme oeuvres artistiques, savoir: l'Allemagne, le Danemark, la Grande-Bretagne, le Maroc (territoire du protectorat français) et les Pays-Bas; la GrandeBretagne ne le fait encore que dans une mesure restreinte.

La France, dont la législation accord© la protection artistique aux produits de l'art industriel, ainsi que la Tunisie, ont ratifié, il est vrai, la Convention revisée, l'article 4 y compris, mais elles se sont réservées, d'autre part, d'appliquer les anciennes Conventions (de 1886 et 1896) pour ce qui con«oerne les produits de l'art industriel; ces deux pays ne sont

610

donc pas tenus d'accorder la protection artistique aux produits de ce genre provenant des autres pays de l'Union,'.

Quant à la Suède, elle n'a 'même pas encore ratifié la Convention revisée.

II. Déjà à la Conférence de révision de 1908 à Berlin, la Suisse s'est opposée à une proposition tendant à obliger .

les pays de l'Union à accorder la protection artistique aux produits de l'art industriel. Conformément à cette attitude, le département a établi dams son rapport à l'appui du premier avant-projet que les produits de l'art industriel ne sont pas compris, comme tels, parmi les oeuvres déclarées protégées.

D'autre part, la pétition collective de la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses et de la Fédération des architectes suisses, datée du 10 mars 1911, est venue réclamer la protection artistique pour les produits de l'art industriel (desideratum N° 4). Cette protection a été aussi vivement recommandée par 'divers membres · de la commission d'experts lors de la première session de cette commission.

Celle-ci s'est prononcée, par 15 voix contre 2, en faveur de la protection artistique en dépit de l'opposition des représentants de l'Union suisse des arts et métiers et de l'Union suisse du commerce et de l'industrie.

Dans ces circonstances, le département de justice et police a cru devoir insérer les produits de l'art appliqué à l'industrie parmi les oeuvres protégées du IIe avant-projet.

Dans la IIe session de la commission d'experts, le représentant de l'Union suisse des arts et métiers est revenu à la charge en déclarant que la solution du IIe avant-projet allait directement à l'encontre des intérêts des industriels suisses.

L'Union suisse des arts et métiers s'étant dès lors, elle-même aussi, vivement prononcée contre la protection artistique des produits de l'art industriel dans la pétition du 17 juillet 1914, il a paru plus juste au département et au Conseil fédéral.

d'en revenir à la solution du Ier avant-projet.

III. Il y a lieu tout d'abord de faire une distinction bien nette entre la protection des oeuvres d'art contre leur adaptation à des produits de l'art industriel, et l'extension de la protection artistique à des produits de l'art industriel comme tels.

Cette dernière extension est ici -seule en question; la protection des oeuvres d'art contre leur adaptation à des

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produits industriels n'est pas contestée: elle résulte sans autre de la protection contre la reproduction illicite en général.

Quant à l'extension de la protection artistique aux produits de l'art industriel comme tels, les considérations suivantes militent notamment contre elle: 1° Les produits industriels, y compris ceux de l'art industriel, peuvent être protégés en Suisse, au moyen de leur dépôt au bureau de la propriété intellectuelle et contre payement de taxes minimes, comme dessins ou modèles industriels. Pour obtenir cette protection, les étrangers sont aussi tenus de se soumettre aux.

conditions susmentionnées; la durée maximum de la protection des dessins et modèles est de 15 ans.

2° La protection suisse des dessins et modèles industriels est utilisée essentiellement par l'industrie de la broderie; elle n'est que fort peu sollicitée par l'étranger..

La concurrence peut donc admettre -- sauf en ce qui concerne l'industrie de la broderie -- que la plupart des modèles dont elle a besoin ne sont pas protégés.

3° L'admission de la protection artistique pour les produits de l'art industriel aurait pour effet d'augmenter très considérablement le nombre des objets protégés:.

La protection -- parce ique protection artistique -- ne nécessiterait aucunes formalités quelconques et serait de longue durée. Eu égard aux dispositions de la Convention revisée mentionnées plus haut sous chiffre I, ainsi qu'à l'absence de toutes formalités et à celle de l'obligation d'exploiter le dessin ou le modèle industriel déposé, l'étranger participerait, lui aussi, dans june très forte mesure à la protection artistique.

4° Dans ces circonstances, il y aurait lieu de craindre .que l'admission de la protection artistique pour les produits de l'ait industriel jue portât gravement atteinte .

en particulier aux intérêts de la petite industrie, laquelle est réduite, vu les modestes capitaux dont elle dispose, à se servir autant que possible de modèles non protégés.

Nous constatons en conséquence expressément que la protection prévue par le projet ne s'étend pas aux produits de l'art industriel comme tels.

612 B. Projets techniques.

La pétition collective de la Société suisse des ingénieurs et .architectes et du «Verein schweizerischer Maschinen-Industrieller», du 16 juin 1913, ainsi que les représentants de ces deux sociétés dans la commission d'experts, ont demandé «aitre autres: 1° que les dessins techniques soient protégés comme tek -- c'est-à-dire indépendamment de la question de savoir s'ils poursuivent un but instructif ou un autre but déterminé -- pai la nouvelle loi sur les oeuvres littéraires et artistiques; 2° que la protection accordée par la nouvelle loi aux> « dessins, plans, etc. » techniques s'étende, en particulier, au droit d'exécuter ces dessins, plans, etc.

Les représentants des deux sociétés ont insisté sur le fait que le besoin d'une ferme protection s& faisait tout spécialement sentir en ce qui concerne les projets présentés à l'occasion de soumissions de travaux techniques.

Le premier voeu est sans objet, attendu que le 2e alinéa de l'article premier du projet de loi spécifie expressément comme étant protégés les ouvrages figuratifs de nature technique à côté de ceux de nature scientifique, et cela sans restriction quelconque relativement à un but déterminé.

Le second voeu donne lieu aux observations suivantes: I. Relativement aux projets techniques, il y a lieu de bien distinguer: 1° la reproduction du projet comme tel, et 2° l'exécution du produit technique représenté par ce projet.

L'octroi d'un (droit exclusif de reproduire les projets techniques comme tels ne présente aucun inconvénient; il résulte de l'art. 11, chiffre 1, du projet de loi.

. II. En ce qui concerne l'exécution du produit technique représenté par le projet, il faut distinguer entre la forme sous laquelle le produit technique est représenté, et l'idée technique sur laquelle est basée la forme représentée.

L'octroi par la loi sur les oeuvres littéraires et artistiques d'un droit d'exécution ne pourrait d'emblée entrer en question

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qu'en ce qui concerne exclusivement la forme représentée.

La protection de l'idée technique relève de la loi fédérale sur les brevets d'invention, à laquelle elle doit demeurer réservée, car elle constitue en fait un monopole industriel très étendu qui se trouve réglé et restreint d'une manière déterminée par l'a susdite loi dans l'intérêt de la concurrence.

Toutefois, même l'octroi d'un 'droit d'exécution restreint à la forme représentée soulève de sérieuses objections si l'on se place au point de vue de la loi sur les oeuvres littéraires et artistiques: 1° La protection contre l'exécution de la forme représentée de produits techniques rentre dans le domaine de la loi sur les dessins et modèles. L'interprétation de cette dernière, dans le sens voulu par lé législateur, permet donc de protéger un projet technique contre l'exécution de la formé représentée si ce projet est déposé conformément ' à cette loi. Ainsi que noua l'avons déjà dit plus haut sous A, le dépôt est obligatoire tant pour les nationaux que pour les étrangers et la durée maximum de protection est de 15 ans.

D'un autre côté, il est permis de conclure de l'exposé sous A ci-dessus que l'utilisation de la protection des dessins et modèles ne saurait en aucun cas être bien considérable aussi pour les produits de nature purement technique, et que la concurrence pourrait ainsi admettre le plus souvent qu'elle peut librement utiliser les produits techniques dont elle a besoin comme modèles, 2° Si ' la nouvelle loi sur les oeuvres littéraires et artistiques prévoit un droit exclusif d'exécution pour les projets techniques, il faudra alors, conformément au.

principe de l'assimilation des étrangers aux nationaux admis à l'art. 4 de la Convention revisée, que la même faveur soit accordée aussi pour les oeuvres de ce genre provenant des autres pays de l'Union qui ont adhéré à la Convention revisée.

3° L'octroi, dans la loi sur les oeuvres littéraires et artistiques, d'un droit exclusif d'exécution des projets techniques aurait dans tous les cas pour conséquence une augmentation très sensible du nombre des produits techniques protégés contre l'exécution, vu que la protection accordée par cette loi ne serait liée à aucunes formalités1 et que l'étranger serait appelé à en bène-

614

ficier largement, ainsi que cela résulte du chiffre 2 ci-dessus. La protection serait, en outre, d'une durée beaucoup plus grande que celle prévue par la loi sur les dessins et modèles industriels. Ces diverses circonstances causeraient, de même que la protection artistique des produits de l'art industriel, un gros préjudice notamment à la petite industrie suisse.

III. Or, le Tribunal fédéral a interprété à plusieurs reprises la loi sur les dessins et modèles industriels en ce sens qu'un objet n'est protégeable comme dessin ou modèle que si sa forme (art. 2 de la loi) vise à un effet esthétique, ce qui revient à dire que seuls les dessins ou modèles d'oraement isont en fait protégeables (comp. p. ex. E. 0. 38, II, N° 109, cons. 2). Une telle interprétation ne ressort toutefois nullement de la loi elle-même, soit en particulier de lai définition légale des dessins et modèles (art. 2); elle va au contraire à l'encontre des intentions du législateur, lequel a entendu protéger, d'une manière générale, la forme extérieure, que celle-ci vise ou non à un effet esthétique. Il n'en reste pas moins, cependant, qu'au regard de la jurisprudence du Tribunal fédéral les formes purement techniques, dépourvues d'effet esthétique, ne jouissent actuellement d'aucune protection contre leur exécution.

Il est clair qu'une 'telle situation juridique n'est pasi satisfaisante. On ne doit toutefois pas songer y remédier en admettant dans la loi sur les oeuvres littéraires et artistiques un Adroit d'exécution pour les projets techniques et en créant de cette façon de nouveaux inconvénients tout aussi graves.

Il est vrai que ces inconvénients seraient moins sensibles si le droit d'exécution était restreint aux seuls projets techniques présentés à l'occasion de soumissions. Toutefois le fait qu'un très grand nombre de produits techniques demeureraient -- vu la jurisprudence du Tribunal fédéral -- exclus, après comme :avant, de la protection contre l'exécution de la forme représentée, militerait contre une telle solution.

Si le Tribunal fédéral ne modifie pas son point de vue, il ne pourra être remédié rationnellement à l'état de choses actuel que par une revision de la loi sur les dessins et modèles industriels rendant impossible l'interprétation trop étroite du Tribunal fédéral. Nous concluons, en conséquence, des
considérations qui précèdent qu'il n'y a pas lieu de prévoir dans la nouvelle loi sur les oeuvres littéraires et artistiques un droit d'exécution pour les projets techniques.

615

Art. 2. La loi fédérale du 23 avril 1883 restreint notablement la protection des photographies dans deux sens différents: , .

a) les photographies doivent, pour être protégées, être enregistrées (art. 9, lettre a); b) la protection prend fin au bout de cinq ans après l'enregistrement (art. 9, lettre b).

Dans sa pétition du 24 juin 1911, ,1'Union suisse des photographes demande que les photographies soient mises au bénéfice du même traitement que les oeuvres artistiques.

La suppression de l'obligation de l'enregistrement résulte de celle de toutes formalités quelconques. Pour le surplus, le projet, tenant compte des voeux formulés par les photographes, assimile les photographies à tous les points de vue -- donc aussi en ce qui concerne la durée de protection -- aux oeuvres littéraires et artistiques. Cette assimilation se .fonde .notamment sur les motifs suivants: 1° Depuis que la loi fédérale de 1883 a été promulguée, la photographie a fait des progrès considérables, de telle sorte que ses produits atteignent aujourd'hui souvent un degré de perfection artistique.

2° Le résultat de l'activité photographique est fortement influencé par le choix de l'objet, de l'endroit d'où la photographie est prise, ainsi que des autres conditions dans lesquelles doit s'opérer la pose; suivant la personne .

qui les prend, les photographies d'un même objet peuvent différer sensiblement. La photographie paraît dès lors être souvent le résultat d'une activité se rapprochant de celle de l'artiste.

3° II n'y a pas d'inconvénient à accorder aux photographies la durée générale de protection pour ce motif déjà que beaucoup d'entre elles sont destinées à perdre rapidement et définitivenuent de leur intérêt, et que la prolongation de la durée de protection a ainsi pour elles une valeur plutôt théorique; d'autre part, il faut prendre en considération aussi le fait que le photographe ne peut pas empêcher une tierce personne de prendre une nouvelle photographie (originale) de l'objet qu'il a lui-même photographié (art. 15).

Parmi les 19 pays de l'Union internationale, il n'y en a =qu'un (Suède), outre la Suisse, qui restreigne la protection à yDinq ans; 3 pays protègent les photographies pendant dis

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ans à partir de leur apparition (Allemagne) ou de la publication ou de la confection du négatif (Danemark et Japon); 3 pays les protègent pendant cinquante ans à partir de la confection du négatif (Grande-Bretagne) ou à partir de l'année de la première publication (Maroc [territoire du protectorat français], Pays-Bas) ; 1 pays (Norvège) protège jusqu'à quinze ans après la mort de l'auteur; 7 pays (Belgique, Espagne, France, Italie, Luxembourg, Monaco et Portugal) ne prescrivent pas de délais spéciaux, mais accordent aux photographies la durée de protection générale (en Belgique, en France et en Italie la protection est basée sur la jurisprudence, laquelle assimile les photographies aux oeuvres d'art lorsqu'elles présentent un caractère artistique, ce qui est à examiner dans chaque cas particulier); la législation de 3 pays (Haïti, Libéria et Tunisie) ne mentionne pas les oeuvres photographiques, la jurisprudence n'est pas connue.

L'assimilation des photographies aux oeuvres littéraires et artistiques n'a soulevé aucune opposition au sein de la commission d'experts.

' ' Eu égard à la terminologie de la Convention revisée (art. 3), le projet constate expressément que lesi oeuvres obtenues par un procédé analogue à la photographie, telles les héliogravures, les autotypies, etc., sont comprises parmi les «oeuvres photographiques».

Art. 3. La loi fédérale du 23 avril 1883 protège les traductions au même titre que les oeuvres originales (art. 2, al. 4). Tenant matériellement compte des dispositions des art. 2, al. 2, et 14, al. 3, de la Convention revisée, qui sont obligatoires pour les pays de l'Union, le premier alinéa du présent article 3 étend la protection légale à toutes les autres reproductions possédant un caractère d'originalité les rendant protégeablès, y compris la reproduction obtenue par la cinématographic ou par un procédé analogue.

Le deuxième ·alinéa traite spécialement de l'adaptation d'une oeuvre à des organes d'instruments mécaniques. De même que la loi allemande pour l'exécution de la Convention revisée, du 22 mai 1910, le présent projet prévoit deux cas: a) celui où l'adaptation se fait au moyen de l'intervention personnelle d'un exécutant, c'est-à-dire lorsque, par exemple, quelqu'un parle, chante ou joue dans un phonographe; b) celui où l'adaptation s'opère par le perforage, l'estampage ou par un autre procédé analogue.

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Dans le cas sous a, c'est le travail individuel de l'exécutant qui est fixé par l'organe. Quant à l'adaptation prévue sous b, elle ne sera souvent qu'un travail technique et routinier.

Dans certains cas cependant, elle exigera un remaniement de l'oeuvre à adapter dénotant un caractère d'originalité pro* tégeable. Il paraît justifié, en conséquence, de traiter les deux adaptations comme des reproductions protégeables dans le sens de l'art. 3, celle sous b toutefois seulement si elle possède un caractère artistique.

Il résulte de la disposition générale du 2e alinéa de l'article 12 que les organes eux-mêmes doivent être considérés comme des exemplaires de l'oeuvre dans le sens de la loi.

L'article 3 vise les utilisations qui, bien qu'étant souscertains rapports le résultat d'une activité individuelle, re^ produisent néanmoins essentiellement l'oeuvre originale. Si cette dernière est encore protégée, il s'ensuit que le droit de celui qui l'utilise ne peut pas être indépendant tant que dure le droit sur l'oeuvre originale; c'est ce qu'exprimé 10 troisième alinéa de l'art. 3.

D'un autre côté, pour protéger les reproductions de ce g-enre, l'article 3 ne recherche pas si elles ont été faitesd'une manière licite ou non. La Convention revisée ne faisant pas non plus de distinction à cet égard, l'absence, dans la législation intérieure, d'une protection sur les reproductions illicites n'atteindrait que les oeuvres de provenance^ suisse.

Le titulaire du droit sur l'oeuvre originale trouvera, cast échéant, dans les dispositions sur les violations du droit d'auteur des moyens suffisants pour sauvegarder ses intérêts.

La Convention revisée étend expressément sa protection aux «recueils de différentes oeuvres» (art. 2, al. 2).

Objet de la protection est ici le plan suivant lequel le recueil est disposé. Le projet renonce à édicter une disposition spécialeà ce'sujet, attendu qu'il va de soi qu'il y a droit d'auteur surun recueil comme tel, c'est-à-dire abstraction faite de chacune des oeuvres qu'il renferme, sitôt qu'il peut être considéré, dans son ensemble, comme une oeuvre ayant un caractère original..

L'art. 4 a été inséré -- avec une rédaction moins générale -- dans le IIe avant-projet essentiellement parce que ce dernier admettait la protection des produits de l'art Industriel. Bien que le projet de
loi actuel ait renoncé à cette protection, l'article 4 conserve sa valeur, parce qu'il met en lumière les rapports existant entre la protection de la présente loi et celle des dessins et modèles industriels. L'introduction

f18 de la disposition de l'art. 4 a d'ailleurs été accueillie favorablement -- eu égard notamment au droit international -- par un membre de la commission d'experts particulièrement compétent en la matière.

L'art. 5 détermine quels sont les auteurs qui bénéficient de la protection. L'art. 10, al. 1, de la loi fédérale du 23 avril 1883 protège inconditionnellement (sous réserve de l'accomplissement des formalités légales): a) toutes les oeuvres dont les auteurs sont domiciliés en Suisse; b) toutes les oeuvres «parues ou publiées» en Suisse, dont les auteurs sont domiciliés à l'étranger.

Les oeuvres «parues ou publiées» à l'étranger, dont les auteurs sont domiciliés à l'étranger également, ne sont protégées que s'il y a réciprocité de traitement entre le pays étranger et la Suisse (alinéa 2).

L'article 5 du projet prévoit, en revanche, une réglemeniation essentiellement différente: 1° Le Ier avant-projet, allant plus loin que la loi de 1883, voulait déjà protéger les citoyens suisses domiciliés à l'étranger pour leurs oeuvres non éditées, attendu que la Suisse est tenue, aux termes de la : Convention revisée, de protéger les ressortissants des autres pays de l'Union pour leurs oeuvres non éditées, et qu'on ne voulait pas que les citoyens suisses fussent moins bien traités dans leur propre pays que les étrangers. Dans la Ire session de la commission d'experts, on a proposé d'accorder la protection inconditionnelle de la loi à tous les citoyens suisses pour toutes leurs oeuvres, ©t l'on a allégué notamment, à ce propos, qu'avec la loi de 1883 beaucoup de citoyens suisses perdent la protection dans leur pays d'origine du fait qu'ils sont domiciliés dans des pays n'ayant pas de réciprocité avec la Suisse. Le chiffre 1 du premier alinéa tient compte de cette proposition qui n'a soulevé aucune objection.

2° A la Ire session de la commission d'experts, on a soulevé la question de savoir si le domicile en Suisse continuerait à l'avenir à donner droit à la protection.

Comme les citoyens suisses doivent être, du fait de leur nationalité, protégés pour toutes leurs oeuvres, la question n'a dès lors plus d'importance que pour les seuls étrangers. Or on risquerait de créer une situation de droit

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douteuse si l'on faisait dépendre la protection du domicile, puisque celui-ci peut changer. Le IIe avant-projet a par conséquent abandonné ce principe de protection et n'a plus prévu la protection inconditionnelle des étrangers ·que pour leurs oeuvres éditées pour la première fois en Suisse. Cette nouvelle réglementation, n'ayant soulevé aucune opposition à la IIe session de la commission d'experts, a été maintenue dans le présent projet (alinéa 1, chiffre 2).

3° Aux ternies du deuxième alinéa de l'article 5, les oeuvres d'auteurs étrangers, éditées pour la première fois à l'étranger, ne doivent être protégées en Suisse que si le pays où la première édition a eu lieu accorde aux citoyens suisses une protection semblable à celle octroyée par la loi suisse. La loi fédérale de 1883 demande seulement l'assimilation des auteurs d'oeuvres parues en Suisse aux auteurs d'oeuvres parues dans l'autre pays. Or avec une réciprocité aussi purement formelle, ü peut arriver qu'on soit obligé d'accorder à un étranger en Suisse une protection que son pays d'origine n'octroie pas à un resortissant suisse, cette protection n'étant pas prévue par la législation de ce pays; une telle réciprocité n'est donc pas dans l'intérêt de la Suisse. C'est pour ce motif que le IIe avant-projet ·déjà a réclamé une réciprocité matérielle.

Cette innovation a été combattue dans la IIe session de la commission d'experts, et cela principalement pour la raison . .qu'elle ne manquerait pas d'engendrer des complications', tandis que la réciprocité purement formelle serait beaucoup plus simple et plus pratique aussi pour les autorités. A notre avis, ces craintes ne sont pas fondées si l'on prend en considération les avan- ' tages que comporte le système de la réciprocité matérielle; elles sont d'ailleurs d'autant . moins justifiées que ce ne sont pas1 les tribunaux qui ont à se prononcer, dans chaque cas particulier, sur l'existence d'une réciprocité matérielle, mais bien le Conseil fédéral, ce qui d'emblée crée une situation claire.e Les doutes qu'on a exprimés également dans la II ·session de la commission au sujet de la compétence du Conseil fédéral n© sont pas fondés non plus, car il ne s'agit -pas ici de la conclusion d'arrangements contractuels, mais simplement de la constatation d'un état de fait suivant lequel il y a réciprocité et cela dans Veuille fédérale suisse. 70e année. Vol. III.

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telle- mesure déterminée. Comparé au IIe avant-projet,.

le projet actuel donne plus de latitude au Conseil fédéral en ce sens qu'il n'exige plus une protection «essentiellement de même nature», mais simplement une protection «semblable» à celle octroyée en Suisse.

. , : Au reste, il suffira que le pays étranger accorde aux citoyens suisses un traitement satisfaisant aux conditions nécessaires à la reciprocate; il n'est pas exigé, que celui-ci s'étende à tous les auteurs ,qui éditent leursoeuvres pour la première fois en Suisse.

4° L'expression «parues ou publiées» de la foi fédéraledé 1883 n'est pas claire. Le projet se sert à cet égard, en son article 5, de l'expression «éditées», ce qui correspond à la terminologie de la Convention revisée..

Art. 6. La loi fédérale du 23 .avril 1883 ne contient aucune disposition sur la collaboration; il a paru indiqué dérégler cette matière dans la nouvelle loi.

Au sujet de l'alinéa 2, il y a lieu en particulier d'observer ce qui suit: II faut le consentement unanime des collaborateurspour disposer des facultés résultant du droit d'auteur, par exemple pour disposer du droit de reproduction, de représentation ou d'exécution de l'oeuvre. En revanche, chaque collaborateur doit pouvoir disposer librement de sa cpart; cette dernière comprend les droits particuliers tels que celui de participer ,au droit de disposer de l'oeuvre ou de bénéficier d'une part proportionnelle du _profit tiré de celle-ci. Chaque collaborateur est en outre autorisé à sauvegarder les droits, communs.

Art. 7. La loi fédérale du 23 avril 1883 ne contient de dispositions ni sur la qualité d'auteur, ni sur les oeuvresanonymes et pseudonymes. Dans l'intérêt d'une situation!

claire, il paraît indiqué de réglementer ces deux matières.

Qualité d'auteur. L'alinéa 1 de l'article 7 indique les cas dans lesquels une personne. est présumée, suivant la loi, être l'auteur d'une oeuvre. On a proposé dans la IIe session de la commission d'experts d'assimiler la raison de commerce au nom civil. Il y a lieu de remarquer à cet égard que, d'après le projet, seule une personne physique peut être auteur; le premier alinéa admet expressément ce point de vue, afin qu'aucun doute ne subsiste sur ce point.

Les oeuvres artistiques et les photographies sont souvent

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signées par leurs auteurs d'un simple monogramme ou d'un, autre signe remplaçant le nom écrit en entier. Tenant compte de cet usage, le chiffre 1 du premier alinéa assimile ce «signe' distinctif de l'auteur» au nom civil.

La présomption de l'alinéa 1 dispense le titulaire dû droit d'auteur de la nécessité de prouver que la personne désignée comme auteur possède effectivement cette qualité; c'est à la partie contestant cette dernière qu'il incombe, cas échéant, de prouver le bien-fondé de sa contestation.

La Convention revisée renferme également (art. 15, al. 1) une présomption de la qualité d'auteur, laquelle lie les Etats contractants.

Oeuvres anonymes et pseudonymes.

1° Le projet soumet ces oeuvres, sous deux rapports, à des règles spéciales: a) Le publicateur ou l'éditeur est autorisé à sauvegarder les droits de l'a,uteur et est présumé, de par la loi, être l'ayant cause de ce dernier (art. 7, al. 2) ; ceci permet, particulièrement en cas de procès, de sauvegarder le .droit d'auteur sans qu'il soit besoin de nommer l'auteur.

b) La protection de ces oeuvres prend fin 30 ans après leur divulgation; si l'auteur est indiqué, durant ce délai, en la manière prévue par la loi, l'oeuvre bénéficie de la protection ordinaire prenant fin 30 .ans laprès la mort de l'auteur (art. 38). Aussi longtemps que cette indication fait défaut, on est obligé de s'en tenir à là date de la divulgation pour calculer la durée de' protection.

La présomption de droit sous a répond au deuxième alinéa de l'article 15 de la Convention revisée, .avec la différence toutefois que cette dernière disposition n'établit la présomption qu'en faveur de l'éditeur.

En ce qui concerne la durée de protection des " oeuvres anonymes et pseudonymes, la Convention revisée (art. 7, al. 3) réserve expressément la législation de chaque pays.

: 2° Des critiques ont été formulées ,au ;sein de la commission d'experts contre le fait que les oeuvres pseudonymes l étaient traitées spécialement dans le projet de loi, et [ .

l'on a présenté à -cet égard les propositions suivantes:

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a) assimilation du pseudonyme notoire au nom civil de l'auteur; b) assimilation du pseudonyme au nom civil de l'auteur lorsque celui-ci est énoncé dans des publications, telles que le «Kürschners Lexikon» par exemple; c) assimilation pure et simple du pseudonyme au nom civil de l'auteur.

D'autre part, on a exprimé le voeu que les devises («mottos»), dont il est fait usage pour les offres de soumission, soient assimilées au pseudonyme et partant au nom civil de l'auteur.

Dans la Ire session, la, commission d'experts1 s'est prononcée presque à l'unanimité pour la proposition a ci-dessus. A la IIe session, il s'est trouvé encore une majorité de voix pour demander qu'il fût tenu compte d'une manière quelconque du pseudonyme à côté du nom civil de l'auteur.

3° II n'est pas possible d'emblée d'admettre l'assimilation de la devise au pseudonyme ou au nom civil de l'auteur, car ce dernier choisira, pour chacune de ses oeuvres, une devise différente plutôt qu'un pseudonyme différent; d'autre part, il peut arriver que plusieurs auteurs distincts se servent pour leurs oeuvres de la même devise. Il résulte de ceci que la devise n'est pas un signe distinctif.

4° Quant au pseudonyme, les propositions a et &, sous chiffre 2 ci-dessus, ne peuvent être prises en considération parce qu'elles donneraient lieu à des solutions peu pratiques. La notion du pseudonyme notoire, en particulier, serait absolument douteuseï; la notoriété ne pourrait être valablement établie, en définitive, que par le juge; aussi l'introduction de cette notion dans la loi ne manquerait-elle pas de donner lieu, notamment en ce qui concerne la durée de protection, à une situation juridique très incertaine.

En général, nous n'avons pas estimé qu'il fût utile de tenir compte du pseudonyme dans le sens de son assimilation au nom civil de l'auteur: a) Le nom civil de l'auteur d'une oeuvre pseudonyme n'étant toujours connu que d'un nombre plus ou moins restreint de personnes, il s'ensuit que bien des gens se trouveraient, pour le calcul de la durée

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de protection de l'oeuvre d'après la mort de l'auteur, dans l'incertitude sur la question de savoir si l'oeuvre est protégée ou non. Il y a lieu de tenir d'autant plus compte de cette circonstance que l'assimilation, daiis la législation intérieure, du pseudonyme au nom civil devrait être appliquée également à toutes les oeuvres pseudonymes provenant des autres pays de l'Union.

b) L'oeuvre pseudonyme jouit, comme telle, d'un délai de protection amplement suffisant; les égards dus au public exigent que l'auteur soit, dans ce délai, indiqué en la manière prévue par la loi, si le titulaire du droit d'auteur veut obtenir pour l'oeuvre la durée de protection ordinaire qui est déterminée d'après la mort de l'auteur.

. ; Parmi les lois des 18 pays de l'Union internationale !

' (hormis la Suisse), cinq ne contiennent aucunes dispositions sur les oeuvres .anonymes et pseudonymes; huit prévoient une présomption de droit semblable à celle du deuxième alinéa de l'article 7 du projet et quatre considèrent l'éditeur de ces oeuvres comme auteur; sept · prévoient expressément, comme le projet, des délais spéciaux de protection pour les oeuvres anonymes et pseudonymes.

L'art. 8, alinéa 1, pose -en principe que le droit, d'auteur est susceptible de transfert et passe à l'héritier.

I. Il résulte du 2e alinéa de l'article premier de là loi fédérale du 23 avril 1883 que celle-ci reconnaît, elle aussi, en principe la transmissibilité du droit d'auteur. Elle contient, outre cela, les dispositions spéciales suivantes: 1° l'aliénation du droit de «publication» n'entraîne pas par elle-même aliénation du droit d'exécution, et réciproquement (art. 7, al. 1); i 2° à moins de stipulations contraires, l'acquisition d'une oeuvre «appartenant aux beaux-arts» n'implique, pas en. elle-même le -droit de la reproduire (art. 5, .al. 1); 3° à moins de stipulations contraires, l'acquéreur de « plans architecturaux » a le droit de les faire exécuter (art. 6) ; 4° lorsqu'il s'agit de portrait ou de buste-portrait commandé, le droit de reproduction est aliéné avec l'oeuvre d'art (art. 5, al. 2);

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5° à moins de stipulations contraires, le photographe n'a pas le droit de reproduire la photographie commandée (art. 9, litt, c; sans doute parce que l'on envisage le droit de reproduction comme passant au commettant); 6° à moins de stipulations contraires, l'écrivain ou l'artiste qui travaille pour le compte d'un autre écrivain ou artiste est censé avoir cédé à celui-oi son droit d'auteur (art. 1, al. 3).

Il nous a paru indiqué de maintenir, sous une -forme plus générale, les règles contenues dans les dispositions spéciales 1 jet 2 (Ciidessus (voir art. 8, lai'. 2 et 3 du projet).

En revanche, nous n'avons pas repris dans le présent projet les dispositions spéciales 3, 4, 5 et 6, et cela pour les raisons suivantes: Disposition spéciale 3. En conformité de la Convention revisée, le projet considère l'architecture à tous égards comme une partie des arts figuratifs en général. Il n'est donc pas juste de traiter l'architecte moins favorablement que les auteurs d'autres oeuvres d'art figuratif en l'obligeant à se réserver expressément le droit d'exécuter les projets (plans) livrés par lui. Il n'y a pas lieu de craindre que la suppression de 'Cette disposition entraîne des inconvénients dans la pratique ; si l'architecte ne veut pas exécuter son projet lui-même:, il ne fera aucune difficulté pour en autoriser l'exécution par un autre.

Dispositions spéciales à, 5 et 6. En première ligne, il faut bien distinguer entre la commande ou le contrat de travail, d'une part, et la question de savoir, d'autre part, quelle est jentre plusieurs personnes ayant participé à la création d'une oeuvre celle qui peut être envisagée comme le véritable auteur en raison de son activité. Ce dernier point de vue paraît avoir influencé l'élaboration de la disposition spéciale 6 (comp. rapport de la commission du Conseil des Etats à l'appui du projet de la loi fédérale de 1883, Feuille fédérale 1883, II, p. 37). Nous préférons en principe laisser cette question, dans chaque cas spécial, à l'appréciation du juge.

En ce qui concerne la corn/mande, il y a lieu de a'e-.

marquer que le simple fait de commander une oeuvre ne suffit pas encore pour justifier le transfert légal du droit d'auteur au commettant. Il est donc indiqué de faire abandon ici (de toute présomption légale et de s'en, remettre dans chaque

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Relativement aux droits que possède l'employeur sur les -oeuvres exécutées par son employé,. il .y a lieu d'observer ·que les lois sur les dessins et modèles industriels et sur les brevets d'invention, qui concernent des domaines voisins de celui de la propriété littéraire et artistique, ne contiennent aucunes dispositions sur la matière. Pour ce qui concerne la loi sur les brevets, l'absence de dispositions de ce genre provient de ce qu'on a expressément admis qu'il s'agissait là ·d'une question de contrat de travail (v. bulletin sténographique ·de l'Assemblée fédérale 1906, p. 1512).

L'article 343 du code revisé des obligations ne règle, il est vrai, que le droit de l'employeur sur les inventions faites par l'employé. A notre avis, il faut admettre que la détermination des droits que possède l'employeur sur les oeuvres littéraires, artistiques ou photographiques exécutées par l'employé rentre en principe également dans le domaine du contrat de [travail et que cette question n'a pas à être résolue dans la présente loi spéciale. Comme il s'agit ici de deux domaines analogues et en présence, d'autre part, de la disposition de l'article premier du C. C. S., il est à prévoir qu'en «as de doute le juge prendra comme guide l'art. 343 du code révisé des obligations.

Quant aux oeuvres littéraires, artistiques ou photographiques créées par des fonctionnaires et employés publics comme tels, on observera que l'art: 362 du code revisé des obligations réserve le droit public de la Confédération et des cantons pour ces personnes. Cette disposition légale nous a engagés également à ne pas réglementer, dans la présente loi, la question du droit d'auteur sur les oeuvres du genre spécifié ci-dessus. La loi sur les brevets et celle sur les dessins* et modèles industriels ne prévoient, elles non plus, aucunes dispositions' à ce sujet.

II. La loi fédérale du 23 avril 1883 dispose en son article 2, alinéa 2, que le droit d'auteur sur «une oeuvre publiée par la Confédération; par un canton, par une personne juridique ou par une société » dure trente ans à partir du jour de la publication. Il résulte du rapport de la commission du
Conseil national sur le projet de loi Feuille fédérale 1882, III, p. 219) que le droit d'auteur doit appartenir pendant ces trente ans aux communautés ou associations précitées. Le projets a renoncé

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à prévoir une disposition exceptionnelle de ce genre; la questiondé savoir si le droit d'auteur sur une oeuvre appartient ou non aux communautés ou associations en question dépend dans, chaque cas des circonstances; vis-à-vis des tiers la situation juridique est la suivante: 1° si les -susdites communautés ou associations éditent une oeuvre sans désigner l'auteur dans la manière légale prévue, elles sont alors jréputées ayants cause de l'auteur en vertu «de la présomption générale de droit établie en faveur du publicateur d'une oeuvreanonyme ou pseudonyme; la preuve du contraire est toutefois admise; 2° dans tous les autres .cas, elles doivent, lorsqu'elles veulent faire valoir des droits sur une oeuvre, prouver le bien-fondé de leurs prétentions.

III. Pour les cas où l'auteur d'une oeuvre d'art cède le droit de reproduire cette dernière photographiquement sans prévoir contractuellement la durée de la cession, la loi fédéraledû 23 avril 1883 fixe elle-même cette durée à cinq ans (art. 9, litt. b). Cette disposition provient sans doute du fait que lamême Ipi accorde une protection de cinq ans aux photographies (art. 9, litt, b, lre phrase). Sans compter que le.

projet actuel assimile, en ce qui concerne la durée de protection, les photographies aux oeuvres. des arts figuratifs,, on peut s'en remettre ici parfaitement, en cas de contestation, à la décision du juge. Le projet a par conséquent renoncé à reprendre une disposition de ce genre.

Il y a lieu d'ajouter que le point de vue développé dans le présent exposé de l'art. 8 n'a isuscité aucune opposition au sein de la commission d'experts.

Art. 9. La loi fédérale du 23 avril 1883 ne contient aucune disposition sur la poursuite en matière de droit d'auteur; le législateur fédéral était alors de l'avis que le soin de trouver une solution en cette matière devait être abandonné à la future loi fédérale «sur la faillite» (v. rapport de la commission du Conseil des Etats à l'appui du projet de loi, Feuille fédérale 1883, II, p. 36; la commission a observé toutefois que cette façon de procéder avait l'inconvénient de laisser subsister dans ce domaine l'incertitude juridique), La loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 11 avril 1889, n'ayant pas réglé la question de la poursuite en matière de droit d'auteur, il nous a paru opportun do

62?prévoir une disposition à cet égard dans la nouvelle loi qui.

nous occupe.

Le Ier avant-projet renfermait une disposition concernant la poursuite ayant pour objet aussi bien le droit d'auteur que 1'«oeuvre elle-même», c'est-à-dire l'oeuvre en tant qu'ob-jet matériel.

Dans la Ire session de la commission d'experts, on a proposé de ne pas réglementer la poursuite dans le domaine du droit d'auteur pour la raison qu'il s'agissait ici de questions qui seraient mieux tranchées de cas à cas par les tribunaux ; la majorité de la commission s'est prononcée alors pour lasuppression de la disposition prévue.

Le département a toutefois conservé la .disposition -- complétée notamment en ce qui concerne la poursuite ayant pour objet les exemplaires de l'oeuvre -- dans le IIe avantprojet, parce qu'il a estimé qu'il était opportun, que la loi réglât expressément la question.

Dans la IIe session de la commission d'experts, la pro- position tendant à supprimer cette disposition a été renouvelée. A cette occasion, on a observé encore qu'au point de vue pratique la disposition serait à peu près sans importance, les cas de poursuites dans le domaine du droit d'auteur étant très rares. En revanche, d'autres membres de la commission ont demandé qu'on maintînt dans la loi tout au.

moins une disposition spéciale sur la saisie du droit d'auteur proprement dit.

Nous estimons avec le département qu'il est indiqué d'insérer dans la nouvelle loi quelques règles directives sur la question tout en restreignant ces dernières à la poursuite ayant pour objet le droit d'auteur. Pour la poursuiteayant pour objet les exemplaires .de l'oeuvre, il est préférable de s'en remettre à l'appréciation des tribunaux, car les circonstances peuvent, précisément dans ce domaine, varier beaucoup d'un cas à l'autre.

Suivant l'alméa 1 (de l'article 9, le droit d'auteur doit demeurer soustrait à l'action des créanciers de l'auteur ou de.

ses héritiers ausisi longtemps que l'oeuvre n'est pas divulguée.

La poursuite contre d'autres ayants cause de l'auteur .que ses héritiers doit être permise même .avant la divulgation de l'oeuvre, lorsque le droit d'auteur a été aliéné précisément dans un but de divulgation (par exemple par la cession à un .

éditeur du droit de reproduction et de mise «n circulation...

'^628 Dams ce cas la volonté de divulguer l'oeuvre, manifestée par l'auteur ou ses héritiers, doit être assimilée à la divulgation.

Jj'alinéa 2
Art. 10. 'L'alinéa 1 indique les conditions auxquelles une oeuvre doit être envisagée comme publiée au sens de la loi suisse.

1. La loi fédérale du 23 avril 1883 «·'exprime peu clairement sur la question. Si l'on déduit de l'article 7, al. 1, que la simple représentation ou exécution publique ne fait pas de l'oeuvre une oeuvre publiée (R. 0. 19, N° 148, cons. 6), le texte de l'article 10, au contraire, semble précisément admettre que ces actes constituent une « publication ».

2, L'article 4, al. 4, de la Convention revisée stipule qu'il faut entendre par oeuvres « publiées », dans le sens de la convention, les oeuvres éditées,, et que la représentation, l'exécution ou l'exposition d'une oeuvre, ou la construction d'une · oeuvre d'architecture, ne constituent pas une publication.

D'après cette définition, la partie musicale d'un opéra représenté depuis longtemps est réputée «non publiée» tant qu'elle n'est pas éditée. Une oeuvre des arts figuratifs exposée dans une collection publique ou érigée sur une place publique est «noii publiée» aussi long-temps tout au moins qu'une reproduction n'en a pas paru.

Comme d'après le présent projet et d'après la loi fédérale de 1883: déjà, la durée de protection se règle sur la date de la publication de l'oeuvre, la notion de la publication au sens de la Convention revisée aurait pour conséquence par -«x. qu'une oeuvre, représentée ou exécutée depuis long-

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temps déjà du vivant de l'auteur, mais éditée partant «publiée» vingt ans seulement après sa mort, deviendrait posthume et jouirait de ce fait, dès l'édition, encore de la protection accordée aux oeuvres posthumes (30 ans).

3. Il ressort de ce qui précède que la notion de la. publication de1 la Convention revisée crée une situation de droit ,, artificielle ne répondant pas aux circonstances1 de fait; elle présente, d'autre part, le danger d'une protection d'une longueur tout à fait disproportionnée. C'est pourquoi le projet a admis que la publication d'une oeuvre résulte non seulement de l'édition, mais encore de tout acte rendant l'oeuvre publique, tel notamment la récitation, la représentation, l'exécution, l'exhibition ou l'exposition publique; enfin, il est logique que la publication n'ait de conséquences1 juridiques que lorsqu'elle a eu lieu avec le consentement du titulaire du droit d'auteur. Le premier alinéa de .l'article 10 a été rédigé en conséquence.

4. Les effets principaux que le projet fait découler de la publication se rapportent à la durée de protection (art. 37 à 42); La Convention revisée (art. 7) laisse en ce domaine toute liberté aux pays unionistes, de sorte que chacun d'eux peut prendre comme base la notion de publication qui lui convient.

Dans les autres cas également où le projet subordonne certains effets juridiques à la publication (v. articles 9; 11, chiffre 4; 29, chiffre 1; 43, I, chiffre 4), la notion de la publication de la Convention revisée ne s'oppose pas à celle du projet.

5. En présence de la différence existant entre la publication dans le sens de la Convention revisée et celle dans le sens du projet, il est indiqué, pour éviter tout malentendu, de ne pas se servir dans le projet des termes «publier» et «publication» employés par la Convention revisée; le projet use à leur place des expressions « divulguer » et « divulgation ».

D'après le projet, l'édition de l'oeuvre entraîne, elle aussi, quelquefois des conséquences légales (v. par ex. un des principaux cas à l'article 16)., Le deuxième alinéa de l'article 10 dispose que seule l'édition faite avec le consentement du titulaire du droit d'auteur est réputée être une « édition » dans le sens de la loi. Lé projet a renoncé à donner une définition de l'édition comme on l'a proposé au sein de la commission
d'experts: une définition sommaire est prévue à l'article 380 du code revisé des obligations (contrat d'édition). Vu la variété des oeuvres entrant ici en ligne de compte, une dé-

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finition plus précise ne ferait que compliquer la réglementation. Aussi a-t-il paru préférable, précisément à cause de la diversité des .conditions, de ne pas établir une définition légale abstraite, mais de s'en remettre dans chaque cas à l'appréciation des tribunaux.

D'après le troisième alinéa de l'article 10, la divulgation "ou l'édition à l'étranger constitue également une divulgation ou une édition dans le sens de la loi. Si >ces actes n'entraînaient d'effets juridiques que s'ils étaient accomplis dans le pays, l'oeuvre qui aurait par exemple été divulguée à l'étranger déjà du vivant de l'auteur, mais qui ne l'aurait été en Suisse qu'après la mort de celui-ci, serait pour la.

Suisse une oeuvre posthume; elle devrait de ce fait -- sa protég«abilité en Suisse étant présumée -- être protégée encore trente ans après la divulgation en Suisse ou pour le moins soixante ans après la mort de l'auteur (art. 39); d'autre part, une oeuvre non éditée dans le pays -- protégeable en principe en Suisse -- bénéficierait de la protection suisse entière contre la représentation ou l'exécution alors qu'elle aurait paru depuis longtemps déjà à l'étranger. A teneur de l'alinéa 3 de l'art. 10, la protection, dans le premier exemple, prend fin trente ans après la mort d© l'auteur; dans le second exemple, le droit limité de représentation ou d'exécution prévu aux .articles 16 et 17 du projet entre en vigueur sitôt que l'oeuvre est éditée, et cela même seulement à l'étranger.

Dams la pétition des sociétés puisses de chant et de musique (postulat ad art. 10 de la loi fédérale de 1883), on a exprimé l'opinion qu'une oeuvre peut rester « non publiée » si elle porte la mention « imprimé .comme manuscrit/». H y a lieu d'observer à .cet égard que la question de savoir si une oeuvre a été éditée ou -- d'une façon générale -- divulguée est une simple question de fait que le juge devra trancher sans égard à une réserve du genre spécifié ci-dessus.

II. Etendue du droit d'auteur.

Ce chapitre détermine l'étendue du droit d'auteur (art. 11 à 15), traite de diverses restrictions de ce droit (art. 16 à 20), de diverses exceptions (art. 21 à 34), et renferme enfin quelques autres dispositions qu'il convient de faire figurer dans ce chapitre (art. 35 et 36).

Les art. 11 à 13 ont pour but de déterminer d'une manière positive et limitative l'étendue du droit d'auteur. On a pro-

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posé au sein de la commission d'experts de ne: pas rédiger ces articles d'une façon limitative, afin que la loi ne présentât pas tôt ou tard des lacunes et que les tribunaux pussent tenir compte du développement 'du droit .d'auteur. Nouai n'avons pas donné suite à cette proposition, et cela pour les motifs suivants: 1° La détermination de l'étendue du droit d'auteur a pour but de limiter en principe le droit exclusif de l'auteur ou de son ayant cause vis-à-vis des tiers. Or il importe, dans l'intérêt de ces derniers, que cette limitation soit bien claire et précise, ce qui ne peut être atteint que si l'étendue du droit d'auteur est exprimée sous la forme d'une énumération limitative de certaines facultés exclusives déterminées.

2° L'énonciation toute générale, non limitative de l'étendue du droit d'auteur aurait aussi pour conséquence de rendre impossible une énumération limitative des violations du droit d'auteur, laquelle a été reconnue, dans la commission d'experts, comme indispensable au point de vue du droit pénal (v. plus loin.sous art. 43).

3° II résulte de la comparaison des législations en vigueur dans les principaux pays de l'Union que ceux-ci énoncent également l'étendue du droit d'auteur sous la forme de droits exclusifs déterminés.

4° Même si l'on fixait l'étendue du droit d'auteur d'une manière toute générale et non limitative, on se verrait obligé de chercher une ligne de démarcation entre l'auteur et les tiers au moyen de dispositions exceptionnelles. Il y aurait lieu de craindre toutefois qu'il n'en résulte une réglementation beaucoup plus compliquée et moins claire que celle prévue par le prò-jet.

Art. 11. En ce qui concerne les dnoits partiels dont est constitué le droit d'auteur, il y a lieu de remarquer: Chiffre 1. L'adjonction «par n'importe quel procédé», préconisée à la Iree session de la commission d'experts et insérée dans le II avant-projet après le mot « oeuvre », a été supprimée parce que le .droit de transformation prévu à l'art. 12 la'.rend superflue.

Le cMffre'2 accorde, contrairement à la loi fédérale du 23 avril 1883, un droit spécial de mettre en circulation des exemplaires de l'oeuvre, vu qu'il peut se produire non seulement une mise en circulation d'exemplaires illicitement

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confectionnés, mais aussi une mise en circulation illicite d'exemplaires régulièrement confectionnés (comp. p. ex. art. 22.

conjointement avec l'art. 43, chiff. III).

Le chiffre 3 va, plus loin que la loi fédérale du 23 avril 1883 en ce sens qu'il accorde non seulement le droit de représentation ou d'exécution, mais encore un droit exclusif de récitation et d'exhibition. De même ^que la représentation ou l'exécution publique, la récitation et l'exhibition publiques de l'oeuvre permettent de tirer profit de cette dernière; cet avantage doit, en toute équité, demeurer réservé au titulaire du idroit d'auteur. Le Ier avant-projet accordait, à l'instar de la loi allemande sur la protection des oeuvres artistiques du 9 janvier 1907, le droit d'exhibition publique «au moyen d'instruments mécaniques ou optiques », d'où il ressortait clairement que la simple exposition ne constituait pas.

une «exhibition» au sens de la loi. Ensuite d'une proposition faite au -sein de la commission d'experts, l'adjonction restrictive susmentionnée a été abandonnée afin d'éviter les dangers d'une rédaction trop étroite. Toutefois il demeure bien entendu que la simple exposition ne doit pas être comprise dans1'« exhibition », ce qui résulte d'ailleurs explicitement de la.

mention spéciale de l'exposition au chiffre 4 et déjà au premier alinéa, chiffre 2, de l'article 7.

Le chiffre i apporte une nouvelle innovation à la loi fédérale du 23 avril 1883 en ce sens qu'il accorde un droit: spécial de rendre l'oeuvre publique: Potir autant que la loi ne formule pas d'exceptions (comp. p. ex. art. 34), c'est au titulaire du droit d'auteur qu'il .appartient de décider si et quand l'oeuvre doit être rendue publique, car une «publication » faite sans son consentement peut lui causer un préjudicesensible. L'exposition d'exemplaires de l'oeuvre a été mentionnée expressément, d'une part, pour la raison indiquée au chiffre 3 ci-'dessus, d'autre part, afin de permettre de se rendre compte que le titulaire du droit d'auteur ne possède le droit, exclusif d'exposer l'oeuvre que tant que celle-ci n'est pasi divulguée.

L'art. 12' indique clairement que le droit de reproduire^ l'oeuvre n'est pas limité à la simple copie, mais qu'il s'étend aussi aux transformations de l'oeuvre, c'est-à-dire à la reproduction modifiée de celle-ci. Il importe
peu d'ailleurs que la transformation comme telle soit protégeable (art. 3) ou non:: le droit de reproduction embrasse tous les cas dans lesquels une oeuvre, nonobstant les modifications qu'on y a appor^

638tées, est reproduite en tout ou en partie dans sa structura essentielle. Il s'ensuit que le droit de reproduction comprend en particulier aussi: la traduction d'oeuvres littéraires; dans le domaine des oeuvres musicales, par exemple, l'arrangement.

pour piano d'une oeuvre composée pour orchestre ou la transformation d'une oeuvre à une voix en une oeuvre à plusieurs voix; dans le domaine des arts figuratifs ou de la photographie, la reproduction par un autre procédé que · celui utilisé pour l'oeuvre originale.

D'après la Convention .revisée (art. 12), le droit de reproduction comprend également la faculté de faire des «appropriations indirectes» n'ayant pas le caractère d'une nouvelle oeuvre originale; à titre d'exemple '(d'appropriations de ce genre, la Convention cite les- adaptations, les arrangements demusique, la transformation d'un roman, d'une nouvelle ou d'une·· poésie en pièce de théâtre, et; réciproquement.

. L'art. 12 donne lieu en particulier aux observations.

suivantes : Chiffre 1: La loi fédérale du 23 avril 1883 n'accorde le droit exclusif de traduction pendant toute la durée du droit d'auteur que si ce droit est exercé dans les cinq ans à dater de l'apparition de l'oeuvre originale (art. 2, al. 3). La Convention révisée octroyant sans condition île droit exclusif de traduction pendant toute la durée (du droit d'auteur sur l'oeuvre originale (art. 8), il faut renoncer également à prévoir une limitation dans-la loi suisse.

Le chiffre 2 établit que le droit d'adapter l'oeuvre à des instruments mécaniques fait en principe et d'une manière générale partie intégrante du droit de transformer, par- tant de reproduire l'oeuvre. En présence de la restriction formulée aux articles 18 à 20, ce droit ne peut en général déployer tous ses effets qu'en 'ce qui concerne l'adaptation .

d'oeuvres purement littéraires.

Pour ce qui touche au chiffre 3, nous renvoyons à l'exposé que nous avons consacré au deuxième alinéa de l'article · premier (v. chiffre V).

Il va de soi que le droit de mettre en circulation, de réciter, de représenter, d'exécuter ou d'exhiber publiquement une oeuvre, prévu à l'art. 11, s'étend à l'oeuvre dans sa forme originale aussi bien qu'à la reproduction sous une forni© modifiée. En conséquence, le titulaire du droit d'auteur estë* protégé en particulier aussi contre

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a) la récitation, la représentation ou l'exécution publique au moyen d'instruments mécaniques; b) la « représentation », au moyen de la projection du film, de la reproduction d'une oeuvre littéraire fixée1 cinématographiquement.

Dans le cas où un tiers a fait de l'oeuvre une reproduction susceptible de protection, par exemple une traduction, il résulte de la reconnaissance légale (art. 3) d'un droit d'aur teur spécial sur une reproduction de ce genre, que le titulaire du droit d'auteur sur l'oeuvre originale n'a qu'un droit d'in·terdiction à l'égard de cette reproduction; il ne peut pas, en vertu de son droit sur l'oeuvre originale, exercer, en ce qui -concerne par ex. la traduction ci-idessus, les facultés que pos.sède le traducteur, telles la mise en circulation ou la représentation.

Art. 13. Eelativement aux projets dont il est question dans cet article, il faut nettement distinguer, ainsi que nous l'avons déjà fait pour les projets techniques, entre: a) la reproduction du projet comme tel, et b) l'exécution de l'oeuvre représentée par ce projet.

Il ressort sans autre de l'art. 11, chiffre 1, que le droit exclusif de reproduire le projet comme tel est compris dans le ··droit d'auteur.

L'art. 13 accorde en outre, pour les projets dont il fait mention, un droit exclusif d'exécution qu'il ' déclare partie intégrante du droit de reproduction des dits projets. Alors -qu'aux termes de l'exposé qui précède aucun droit d'exécution ne peut être accordé pour les projets techniques, rien ne «'oppose ici à ce que ce droit soit octroyé pour les projets des oeuvres visées à l'art. 13.

Les avant-projets de loi ont réservé expressément aussi le droit de confectionner à nouveau l'oeuvre elle-même. L'art.

13 ne mentionne plus cette réserve, parce qu'il va de soi que ·ce droit est compris dans le droit de reproduire les oeuvres en question.

Les art. 14 et 15 prévoient, sous deux rapports, une délimitation négative de l'étendue du droit d'auteur: Art. 14. On a exprimé le voeu au sein d© la commission ·d'experts que la loi édictât des dispositions plus détaillées ·sur le droit de transformer les oeuvres musicales et qu'on, tranchât notamment la question du «droit à la mélodie»,

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soit celle de savoir si chaque utilisation d'une mélodie provenant d'une oeuvre protégée tombe sous le coup du droit d'auteur sur cette oeuvre.

1. A notre avis, l'établissement de règles spéciales sur le droit de transformer les oeuvres musicales mènerait trop loin.

Nous estimons qu'il est préférable de s'en remettre dans chaque cas à l'application, par le juge, des art. 11 et 12.

2. Pour ce qui concerne le «droit à la mélodie», il y a lieu de 'distinguer nettement les deux cas suivants: a) L'utilisation de la mélodie n'est en réalité qu'une reproduction plus ou moins modifiée de l'oeuvre la renfermant: il s'agit ici simplement d'un cas tombant sous le coup du droit exclusif de reproduire l'oeuvre utilisée.

b) L'utilisation de la mélodie a donné naissance' à une nouvelle oeuvre indépendante., Pour ce cas, l'art. 14 prévoit, d'accord avec le Tribunal fédéral (R. 0. 33, II, n° 64, cons. 7), que le droit d'auteur sur une oeuvre musicale ne comprend pas l'utilisation des mélodies renfermées dans cette oeuvre. Il s'agit ici d'un exemple de la « libre » utilisation qu'il faut bien distinguer, en principe, de la simple reproduction; elle consiste unique: ment à emprunter à l'oeuvre des idées ou des motifs et à les utiliser pour la création d'une oeuvre nouvelle et indépendante. Le droit d'auteur ne \peut donc pas' s'étendre aux utilisations de ce genre; ,il est par conséquent, en soi, superflu de faire confirmer par1 la loi la légitimité de la libre utilisation. Si l'art. 14 prévoit néanmoins une disposition -- négative -- sur le « droit à la mélodie », c'est qu'il s'agit ici d'un casi : spécial au sujet duquel des doutes pourraient s'élever et qu'il est préférable pour ce motif de trancher dans la loi même.

Art. 15. Nous estimons qu'il est utile de stipuler expressément, comme dans la loi fédérale du 23 avril 1883 (art. 9, dernier .alinéa), que le titulaire du droit d'auteur sur une oeuvre photographique ne peut pas empêcher des tiers de prendre de nouvelles photographies de l'objet photographié.

Les délibérations de la commission d'experts ont montré qu'il était désirable de préciser davantage la disposition comme le fait l'art. 15.

La question de savoir si l'objet photographié est du domaine public ou s'il est une oeuvre protégée n'entre pas ici Feuille fédérale suisse. 70e année. Vol. III.

44

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en considération; l'art. 15 a uniquement pour but de déterminer nettement les limites du droit d'auteur sur la photographie de l'objet comme telle.

Les art. 16 et 17 traitent de la question importante ettrès discutée du droit de représenter ou d'exécuter l'oeuvre éditée.

I. Il y a lieu d'établir tout d'abord que la Convention révisée (art. 11) -- abstraction faite de la suppression de la réserve concernant la représentation ou l'exécution dont il a.

déjà été parlé plus haut, ainsi que de la réserve, sans importance pour le projet, relative à la durée du droit de représenter les traductions (art. 11, ,al. 2) -- ne s'oppose pas à ce que la loi nationale de chacun des pays de l'Union règlelibrement la question du idroit |de représentation ou d'exécution..

II. Les .art. 16 et 17 limitent le droit de représenter ou d'exécuter l'oeuvre éditée. Tant que l'oeuvre n'est pas éditée,.

le droit (de représentation ou d'exécution ne subit aucune; restriction. Ce point de vue correspond effectivement à l'interprétation donnée par le Tribunal fédéral à l'art. 7 de la loi fédérale du 23 avril 1883, et il n'a d'ailleurs été combattu par1 personne.

III. Les pétitions relatives au droit de représentation ou d'exécution, qui sont antérieures à l'élaboration du Ier avantprojet, préconisaient, suivant qu'elles provenaient des auteurs ou des exécutants, soit un droit illimité de représentation ou d'exécution, soit le maintien du système des tan-:tièmes avec quelques compléments, ou alors des restrictions d'autre nature.

Le Ier avant-projet a maintenu en principe le systèmedés tantièmes, c'est-à-dire fia. licence obligatoire avec un, maximum légal de redevance (tantième), comme la loi fédérale' de 1883, en tentant toutefois de régler cette matière d'une façon plus claire et plus complète que ne le fait cette dernière loi.

A la Ire session de la commission d'experts, les représentants des associations d'exécutants se sont prononcés en majorité contre la licence obligatoire avec tantième maximum légal, ainsi que pour la liberté du contrat avecl le titulaire, du; droit de représentation ou d'exécution. La plu^ part des autres orateurs de la commission ont déclaré aussi préférer cette dernière solution, quelques-uns d'entre.

eux, il est vrai, sous la réserve qu'il fût prévu pour les re>-

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présentations théâtrales un tantième maximum légal ou certaines autres restrictions.

Ensuite des votes émis à la Ire session -de la commission d'experts, le département a décidé de maintenir en principe la licence obligatoire dans le IIe avant-projet sans toutefois fixer le 'montant de la redevance à payer, cette fixation devant, à défaut de stipulation entre parties, être laissée à l'appréciation du juge. Il est parti de l'idée qu'il était nécessaire de posséder certaines garanties légales contre l'exploitation des exécutants et il -a estimé que le système défini ci-dessus offrait ces garanties.

A la IIe session de la commission d'experts, il s'est formé à cet égard deux groupes principaux, le premier réclamant le droit illimité de représentation ou d'exécution, le ° second préconisant plutôt le système de la licence obligatoire avec tantième maximum légal. Tous les représentants des associations d'exécutants votèrent cette fois-ci pour la dernière solution. Dans la votation de.principe sur la question de savoir si le droit de représentation ou d'exécution devait être restreint ou non, les deux tiers des commissaires se prononcèrent pour 1© droit illimité de .représentation ou d'exécution.

Quelques pétitions parvenues entre la Ire et la IIe session préconisaient un droit illimité de représentation ou d'exécution, ou un tantième maximum légal, suivant qu'elles émanaient des cercles d'auteurs on des cercles d'exécutants (ainsi par exemple de la Société fédérale de musique).

IV. Parmi les diverses solutions proposées, celle formulée dans la pétition des sociétés suisses de chant et de musique, de 1896/97, tendant à faire déclarer que le droit d'exécuter des oeuvres musicales est acquis par l'achat chez l'éditeur du matériel licite, 'Serait en pratique irréalisable, sans parlée des objections d'ordre juridique auxquelles elle se heurterait: l'indemnité d'exécution comprise dans le prix d'achat serait la même pour tous les exécutants, quelles que soient leurs diversités, et même celui qui achèterait le matériel pour son usage privé aurait à payer une redevance pour l'exécution.

La proposition analogue présentée au sein de la commission d'experts (Ire session) par le représentant de la Société fédérale de musique et préconisant la perception d'une indemnité d'exécution sur le matériel, doit de même être repoussée comme impraticable.

Les solutions suivantes peuvent entrer en ligne de compte :

638

:

1° Droit illimité de représentation ou d'exécution comme pour les oeuvres non éditées.

2° Licence obligatoire avec fixation d'une redevance maximum, c'est-à-dire en principe le système des1 tantièmes tel qu'il est prévu par la loi federale de 1883.

Cette solution comporte, à son tour, deux possibilités différentes : a) la loi n'établit que le principe; les dispositions de détail réglant la perception de la redevance sont prévues par une ordonnance du Conseil fédéral, laquelle établit en particulier un tarif prévoyant divers taux de redevances; i>) la loi prévoit et le principe et les dispositions de détail, et cela conformément au Ier avant-projet sauf pour ce qui concerne la fixation du taux de la redevance.

3° Solution intermédiaire entre celles mentionnées soua 1 et 2 ci-dessus: Licence obligatoire, mais) sans détermination de la redevance dont la fixation est réservée au juge à défaut de convention entre parties.

Nous sommes d'avis, avec le département, que: la loi doit prévoir certaines garanties contre l'exploitation des exécutants et qu'il m'est par conséquent pas possible d'accorder un droit illimité de représentation ou d'exécution de l'oeuvre éditée.

Nous avons été conduits à cette manière de voir surtout par la considération que le droit de représentation ou d'exécution sera le plus souvent exercé par des sociétés d'auteurs, l'auteur, pris individuellement, n'étant pas en mesure de contrôler les représentations ou exécutions de ses oeuvres. Or il est à craindre qu'avec un droit illimité de représentation ou d'exécution ces sociétés n'abusent, au détriment des exécutants, de la situation privilégiée qui en résulterait pour elles, et cela bien que les exécutants soient groupés en organisations importantes et bien qu'il existe un grand nombre d'oeuvres non protégées; car il sera souvent impossible d'éviter la représentation ou l'exécution d'oeuvres protégées.

Comme argument en faveur du droit absolu de représentation ou d'exécution, on a émis l'opinion au sein de la commission d'experts que l'auteur devrait être en mesure d'empêcher une représentation ou exécution donnée dans des conditions défavorables' et susceptibles de défigurer l'oeuvre. Or on touche ici au domlaine du droit à la personnalité dont la

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protection ne saurait rentrer -- à part quelques cas spéciaux -- dans le cadre de la présente loi. Au reste, pour autant que les sociétés d'auteurs exercent le droit de représentation ou d'exécution -- et ce sera le cas la plupart du temps -- elles le feront presque toujours dans un but essentiellement commercial et financier, en sorte que le droit à la personnalité de l'auteur se trouve relégué à l'arrière-plan.

En ce qui 'concerne les solutions mentionnées sous chiffres 2 et 3 ci-dessus, il y ,a lieu d'objecter avant tout au système de la licence obligatoire avec fixation d'une redevance maximum (chiffre 2) qu'une redevance déterminée à l'avance ne saurait satisfaire en l'espèce vu la diversité" des cas qui peuvent se présenter (diversité portant par ex. sur la nature des oeuvres, ainsi que isur le genre des représentations eu exécutions). Ceci esii vrai tout d'abord en ce qui concerne la redevance maximum à fixer par la loi (chiffre 2, litt, b), mais pas beaucoup moins non plus en. ce qui concerne le tarif à établir par une ordonnance (chiffre 2, litt, a), sans compter au surplus1 les gr-andes difficultés que rencontrerait l'établissement d'un, tel tarif. Il s'ensuit que le système indiqué sous chiffre 2 constitue dans tous les cas une solution schématique et peu satisfaisante. Aussi est-ce avec raison qu'on lui a reproché, au sein de là commission d'experts, de traiter les auteurs unionistes en Suisse incomparablement plus mal que ne sont traités les auteurs suisses dans les autres pays de l'Union.

Eu égard à ces considérations, nous avons- donné la préférence à la solution intermédiaire, soit au système de la licence obligatoire sans redevance déterminée par la loi ou.

par ordonnance (chiffre 3). Oe système assure, d'une part, la possibilité de représenter ou. d'exécuter une oeuvre éditée; d'autre part, il épargne à l'auteur l'inconvénient d'être indemnisé suivant un schéma rigoureux et artificiel. L'intérêt que l'auteur a à tirer profit de son oeuvre et la possibilité qui est accordée aux organisateurs de la représentation ou exécution de faire fixer la redevance ide licence par lei juge, sont autant de facteurs susceptibles d'exercer une action modératrice sur les exigences des auteurs et des sociétés d'auteurs. Il ne faut pas oublier non plus que les art. 32 et 33 déclarent licites un
nombre considérable de représentations ou d'exécutions. On peut donc 'inférer de ce qui précède que la solution adoptée par le projet tient compte, dans une juste mesure, aussi bien des intérêts' des auteurs que de ceux des tiers.

' L'art. 16 contient la disposition de principe concernant le

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droit de représenter ou d'exécuter l'oeuvre éditée. La teneur du 1er (alinéa est conforme ,au point de vue admis dans le projet, suivant lequel l'organisateur d'une représentation ou exécution est responsable de la légitimité de cette dernière.

En chargeant le juge d'apprécier .toutes les circonstances concomitantes pour la fixation de 1'« indemnité » -- c'est ainsi que le projet désigne la redevance de licence --, le 2e alinéa a voulu permettre notamment au juge de tenir aussi équitablement compte des indemnités stipulées entre les sociétés d'auteurs et les associations d'exécutants, et cela même après, l'expiration des contrats qui auraient été conclus.

L'art. 17 établit qu'il suffit pour la légitimité [de la représentation ou exécution que l'indemnité ait été préalablement assurée et prévoit en outre que le juge prend les mesures nécessaires à la requête de l'organisateur de la représentation ou exécution. Il n'est donc pas indispensable que l'organisateur s'entende avec le titulaire du droit de représentation ou d'exécution et que l'indemnité soit fixée conventionnellement ou par le juge déjà avant l'audition; ces opérations peuvent, au contraire, avoir lieu seulement après l'audition si des sûretés ont été fournies. S'il n'en était pas ainsi, la représentation ou exécution risquerait de ne pas pouvoir avoir lieu à l'époque fixée à cet effet.

Dans l'intérêt du titulaire du droit de représentation ou d'exécution, l'art.° 17 (alinéa 2) prévoit que, pour la détermination des sûretés à fournir, le juge peut entendre ce titulaire avant de se prononcer; toutefois la représentation ou exécution ne doit subir de ce fait ni retard, ni autre empêchement.

L'art. 17 (alinéa 3) fixe enfin le délai pendant lequel les sûretés fournies deployent' leurs effets.

Comme suite aux développements ci-dessus touchant le droit de représenter ou d'exécuter l'oeuvre éditée, il y a lieu de relever encore spécialement les deux points suivants: 1° La Société suisse des hôteliers a demandé dans sa pétition qu'il fût tenu une liste publique des oeuvres musicales protégées. En outre, on a proposé 'au sein de la commission d'experts, d'une1 part, d'obliger les sociétés d'auteurs à déposer publiquement une liste des oeuvres qu'elles représentent, d'autre part, d'astreindre ces mêmes sociétés à déposer publiquement une liste de leurs membres: Le voeu de la Société suisse des hôteliers doit être

641 ;1

'

déclaré d'emblée comme pratiquement irréalisable.

Il est de même évident que le dépôt et la tenue à jour d'une liste des oeuvres représentées par les sociétés d'auteurs rencontreraient des difficultés pratiques considérables. A part cela, il y a lieu de tenir compte \ encore des circonstances suivantes en ce qui concerne l'obligation éventuelle, pour les sociétés d'auteurs, de tenir une liste des oeuvres qu'elles représentent ou une liste de leurs membres: Les mesures de coercition qui pourraient être prises à cet effet contre les sociétés d'auteurs seraient facilement éludées par le fait que les sociétaires, dont le droit de représentation ou d'exécution aurait été violé, '· intenteraient eux-mêmes les poursuites. En présence des dispositions de la Convention revisée (art. 4), les mesures coercitive® prises en vue de l'exécution des i obligations imposées aux sociétés ne seraient dans tous les cas pas applicables aux sociétaires en ce qui concerne les oeuvres dont le pays d'origine serait un autre pays de l'Union. L'efficacité des mesures prises à ' l'égard des sociétés serait donc très problématique dans la grande majorité des cas. Or prévoir une réglementation ne pouvant être appliquée qu'aux seules oeuvres d'origine suisse serait sans raison d'être; aussi avonsnous renoncé à édicter, à l'égard des sociétés d'auteurs, ' des prescriptions leur enjoignant de déposer des listes des oeuvres qu'elles représentent ou des membres dont elles se composent.

2° Lors des délibérations de la commission d'experts sur le droit de représentation ou d'exécution, on a proposé d'édicter une disposition légale prévoyant la participation de l'auteur ou de sa parenté au produit de la vente d'une oeuvre des arts figuratifs. Des doutes ont été émis avec raison au sein de la commission touchant la possibilité de mettre en pratique cette proposition.

: La question ne paraît, à tout le moins, pas encore suffisamment éclaircie aujourd'hui pour pouvoir être réglée déjà dans la présente loi.

Les art. 18 à 20 prévoient une restriction du droit -- reconnu à l;art. 12, chiffre 2 -- d'adapter l'oeuvre à des instruments mécaniques, pour autant qu'il s'agit d'oeuvres mu·sicales avec ou sans texte.

L'art. 11> C, chiffre 11, de la loi fédérale du 23 avril 1883

642

autorise sans autre la « reproduction de compositions musicales par les boîtes à musique et autres instruments analogues».

Cette exception du droit d'auteur était en parfaite harmonie avec la Convention internationale de 1886, laquelle déclarait licites la fabrication et la vente des instruments servant à «reproduire» mécaniquement des airs de musique protégés (Protocole de clôture, chiffre 3).

D'un autre côté, la Convention révisée protège en principe les auteurs Id'oeuvres musicales contre l'adaptation de ces oeuvres à des instruments mécaniques et contre l'exécution publique au moyen de ces instruments (art. 13, al. 1); II est seulement permis à chaque pays de l'Union de subordonner ce droit à des « réserves et conditions », lesquelles ne, sont toutefois pas applicables à toute l'étendue territoriale de l'Union, mais seulement au pays gui les a établies (art. 13, au. 2 et 4).

En présence d'une telle disposition internationale, la libre utilisation des oeuvres musicales ne peut plus être admise.

Le projet tient compte des intérêts de l'industrie des instruments de musique mécaniques en introduisant le système de la licence obligatoire: Suivant ce système, l'adaptation d'oeuvres musicales avec ou sans texte à des instruments mécaniques doit être permise aux conditions prévues par la loi sitôt que l'auteur ou ses héritiers ont donné volontairement une autorisation à ce sujet.

Déjà à la Conférence de revision de Berlin de 1908, on a proposé d'introduire dans la Convention revisée une disposition instituant la 'licence obligatoire; cette mesure aurait eu le grand avantage d'imposer ce système dans le domaine intermiational. La proposition n'a cependant pas été acceptée.

Parmi les pays de l'Union qui ont modifié leurs législations depuis l'entrée en vigueur de la Convention révisée ou édicté de nouvelles lois (Allemagne, Danemark, France, Grande-Bretagne, Japon, Libéria, Maroc [territoire du protectorat français],Norvège et Pays-Bas), · l'Allemagne et la Grande-Breftagne ont .adopté la licence obligatoire; la France accorde, avec quelques exceptions, une protection inconditionnelle contre l'adaptation d'oeuvres musicales à des instruments mécaniques; les autres pays ne prévoient, en revanche, aucune exception au droit d'auteur en faveur de cette adaptation.

Il n'est pas douteux que la licence obligatoire, telle qu'elleest prévue par le projet, soit conciliable avec, la disposition de l'art. 13 de la Convention revisée et qu'elle soit par conséquent

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aussi applicable aux oeuvres des ressortissants des autres pays de l'Union; car le droit de l'auteur d'adapter l'oeuvre à des.

. instruments mécaniques est seulement . restreint -mais pas supprimé entièrementl. Il faut cependant toujours bien se rappeler que les effets de la licence obligatoire sont limités au seul territoire suisse (et à l'exportation dans les pays sans protection).

A la Ire .session de la commission d'experts, le représentant" de l'industrie suisse des instruments de musique mécaniques a proposé que la nouvelle loi déclarât licite au moins la reproduction d'oeuvres musicales au moyen de boîtes à musique ou de leurs organes indépendants, cylindres ou disques. D'un autre côté, on a demandé, 'afin" d'éviter une interprétation trop étendue, que seule la reproduction au moyen de «boîtes ä musique proprement dites, à l'exclusion des instruments analogues» fût permise.

Après avoir examiné attentivement la question, le département a /trouvé qu'on ne pouvait pas donner suite aux propositions ci-dessus pour les raisons suivantes: Une disposition exceptionnelle, rédigée dans le sens de la.

première ou de la seconde proposition, n'aurait de .raison d'être que si elle pouvait être appliquée non seulement aux.

oeuvres d'origine suisse, mais aussi aux oeuvres provenant d'autres pays de l'Union; d'autre part, il résulte de l'aveu même de l'auteur de la première proposition qu'on adapte en Suisse, à des instruments mécaniques, 'principalement des.

oeuvres de compositeurs étrangers.

Or, il est constant que l'art. 13, al. 1, de la Convention revisée, établit, en principe et d'une manière toute générale, que l'auteur d'oeuvres muisicafes a le 'droit d'adapter ces oeuvres à des instruments mécaniques. Ge serait donc déroger à ceprincipe que d'interpréter les « réserves et conditions », concédées aux pays de l'Union par l'alinéa 2 de l'art. 13, dans le sens que certaines catégories d'instruments pourraient être complètement affranchies du droit d'adaptation appartenant à l'auteur. Une interprétation loyale doit conduire au contraire à ce (que ce droit puisse bien être restreint, mais jamais entièrement supprimé, ne serait-ce même que pour une seule catégorie d'instruments.

Il s'ensuit qu'une exception, dans le sens des propositions, ci-dessus ne serait vas applicable aux oeuvres provenant despays de l'Union qui ont adhéré à l'art. 13 de la Convention revisée -- soit tous les pays sauf la Suède --, ce qui fait,

·644 qu'il n'existe pas, ainsi qu'il est dit plus haut, de raison, valable pour qu'une exception de ce genre soit prévue.

Ce point de vue du département a été approuvé entièrement à la IIe session de la commission d'experts par un membre particulièrement compétent en la matière.

Il y la lieu d'ajouter que l'industrie puisse des boîtes à musique gè bornie, de l'aveu même du représentant de l'industrie des instruments de musique mécaniques, à fabriquer presque exclusivement des jouets -- les boîtes à musique présentées! à la commission d'experts par ce représentant reproduisaient les mélodies les plus simples, toutes non protégées -- et que cette industrie est en train de perdre beaucoup de son importance. Ces circonstances aussi militeraient, au point de vue pratique, contre l'admission d'une exception en faveur des boîtes à musique.

Tout bien considéré, nous nouis voyons obligés de reconnaître, avec le département, qu'il n'est pas possible de donner «uite aux propositions en question.

Pour la structure de la licence obligatoire, le projet a pris pour modèle, d'une manière générale, la réglementation très détaillée de la loi allemande d'introduction de la Convention revisée, du 22 mai 1910. Au sujet de chacun des article® du projet que cela concerne, nous observons ce qui suit: Art. 18. I. La licence obligatoire a avant tout pour objet l'adaptation d'oeuvr>es musicales à des instruments mécaniques (1er alinéa). iSi la musique est accompagnée d'un texte, tes prescriptions sur la licence obligatoire sont également applicables à ce dernier (3e alinéa). L'art. 18 ne distìngue1 pas si les organes, auxquels a lieu l'adaptation, sont fixés à l'instrument mécanique ou s'ils sont «interchangeables».

II. La licence obligatoire est liée aux conditions suivantes (1er alinéa) : 1° L'auteur ou, à son défiaut, son héritier doit avoir autorisé volontairement un tiers à adapter l'oeuvre.

Le projet relève encore expressément que l'autorisation n'a pas besoin, d'être spéciale, mais qu'elle peut 1 résulter des circonstances, ainsi par ex. de la cession totale du droit d'auteur.

.2° L'oeuvre doit être éditée. Doit en particulier être considérée aussi comme une « édition », en vertu de l'art.

; 12, al. .2, la vente d'organes pour instruments inéca: niques auxquels l'oeuvre a été adaptée.

645

3° Le preneur de licence doit avoir un établissement industriel en Suisse, c'est-à-dire qu'il doit fabriquer dans le pays des organes pour instruments mécaniques; peu importe, au reste, que l'établissement en Suisse soit rétablissement principal ou une simple succursale.

4° II doit être payé une indemnité équitable.

III. Quiconque veut obtenir une licence obligatoire n'est obligé de traiter qu'avec l'auteur ou ses héritiers ou toute autre personne lui ayant succédé sans restriction dans le droit d'adapter l'oeuvre à des instruments mécaniques (art.

18, al. 1). Si l'autorisation des ayants cause à titre particulier était nécessaire pour une licence obligatoire, il pourrait *n résulter des- complications désagréables.

IV. La 'portée de la licence suisse est délimitée en ce sens qu'elle comprend non seulement la mise en circulation des organes dans le pays, mais encore leur exportation dans les pays qui me protègent pas l'auteur contre l'adaptation en question (art. 18, al. 1). Cette précision légale paraît utile, parce qu'on pourrait conclure de l'article 13 de la Convention revisée que la licence ne s'applique, dans tous! les cas, qu'au iseul territoire de la Suisse; or, l'exportation dans les jpays non protecteurs n'est pas 'touchée: par la disposition de l'art. 13 de la Convention revisée (puisqu'il ne peut s'agir ici -- à part la Suède -- que de pays non-unionistes) et n© porte aucune atteinte au droit de l'auteur.

V. Le Conseil fédéral peut dispenser les ressortissants des pays accordant la réciprocité de remplir là condition relative à l'établissement industriel en Suisse; les autres conditions requiseiS pour l'obtention d'une licence; obligatoire suisse demeurent toutefois sans changement. Vu laer délimitation de la portée de la licence suisse, prévue au 1 alinéa de l'art. 18, il paraît utile, pour plus de clarté, de déterminer aussi expressément l'extension admise en cas de réciprocité (art.

18, al. 2).

VI. Si la musique est accompagnée d'un texte, le titulaire du droit d'adapter l'oeuvre musicale doit, en matière de licence obligatoire, être en droit de représenter vis-à-vis des tiers le titulaire du droit d'auteur suif le texte (art. 18, al. 3). Cette .disposition, qui a été proposée à la IIe session de la commission d'experts, constitue un allégement pour l'industrie des instruments mécaniques.

646

L'art. 19 prévoit la décision du juge dans les cas où les parties n'arrivent pas à s'entendre au sujet de la licence obligatoire. Il règle en outre la question du for pour les cas où cette licence doit être demandée au moyen d une action judiciaire lorsque l'auteur (ou son ayant cause), contre le/quej. l'action est dirigée, est domicilié à l'étranger.

L'art. 20 admet que lorsqu'une oeuvre a été adaptée licitement à des instruments mécaniques, celle-ci peut être exécutée librement au moyen de ces instruments, et cela aussi bien lorsque l'adaptation a été volontairement autorisée que lorsqu'elle a été faite en vertu d'une licence obligatoire.

Les art. 21 à 34 traitent des exceptions au droit d'auteur: L'art. 21 remplace l'art. 11, A, chiffre 2, de la loi fédérale de 1883. En excluant sans autres les lois, décisions, délibérations et rapports en question de la protection de la présente loi, cet article va plus loin que l'ancienne loi, mais cela toutefois davantage au point de vue formel que réel.

Art. 22. L'art. 11, chiffre 1, déclarant en principe que le droit exclusif de reproduction' fait partie intégrante du droit d'auteur, il est indiqué, d'un autre côté, d'établir expressément que la reproduction est licite lorsqu'elle est destinée à l'usage personnel et privé de celui qui y procède. Lesf délibérations au .sein de la commission d'experts ont confirmé l'utilité de l'insertion d'une telle disposition.

La permission de reproduire l'oeuvre pour «l'usage personnel et privé» signifie: 1° que la reproduction ne peut être utilisée que par la perisonne même qui y a procédé et que les exemplaires de ·cette reproduction ne peuvent pas être mis en circulation; 2° que la reproduction ne peut ni être utilisée pour une récitation, représentation, exécution ou exhibition publique de l'oeuvre, ni être rendue publique d'une autre manière.

D'un autre côté, comme il n'est pas absolument exclu que la reproduction ne puisse être utilisée dans un but de lucre même dans le domaine privé, l'art. 22 interdit cette utilisation d'une manière expresse, conformément 'à une proposition présentée au sein de la commission d'experts.

Il est clair que la permission de reproduire l'oeuvre pour

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l'usage privé ne peut pas s'étendre aussi à la construction des oeuvres d'architecture.

L'art. 23 remplace l'art. 11, A, chiffre 3, de la loi fédérale du 23 avril 1883. Ensuite d'une proposition présentée à la Ire session de la commission d'experts, l'expression « discussions publiques» a été substituée au terme plus large de «réunions publiques» employé par la loi actuelle; on a -voulu empêcher par là que la disposition exceptionnelle ne s'appliquât par exemple, aux conférences scientifiques ou aux sermons, (alors que les assemblées publiques de, nature politique, par exemple, constituent des « discussions » dans le sens de l'art. 23. Au reste, il y a lieu d'insister moins sur la légitimité |des rapports; sur des discussions publiques -- laquelle ne peut être douteuse -- que sur la reproduction, dans ces rapports, de discours tenus au cours de discussions de ce genre.

L'art. 24 règle la reproduction des articles de journaux comformément à l'art. 9 ide la Convention revisée. Aux termes de cette (dernière, les articles de recueils périodiques sont protégés dans tous les cas, ce qui fait que le projet a renoncé ·à prévoir une exception pour eux.

Il y a lieu de mentionner encore deux points au sujet desquels des propositions ont été formulées au sein de la commission d'experts: 1° Relativement au 1er alinéa, de l'art. 24, les représentants de la Société des écrivains suisses ont demandé que non seulement les romans-feuilletons et les nouvelles, mais aussi les «articles revêtant un caractère littéraire et scientifique », soient soustraits à la restriction du droit d'auteur. (La pétition de la société avait réclamé l'extension de la protection absolue aux «articles revêtant un caractère littéraire, artistique et scientifique»).

Nous n'avons pas donné suite à cette proposition, car nous avons estimé qu'il n'y avait pas lieu de protéger les articles de journaux davantage que ne le fait la Convention revisée.

2° Le représentant de l'Association de la presse suisse a proposé d'ajouter à l'art. 24 une disposition suivant laquelle la reproduction des informations de presse pourrait toujours être interdite lorsqu'elle constituerai un acte de concurrence déloyale. Serait considérée, entre- autres, comme revêtant ce caractère, la reproduction de toute information télégraphique ou télé-

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phonique reçue d'un correspondant spécial et désignée comme telle dans sa première publication, pour autant qu'elle aurait lieu sons indication de la sourceutilisée ou avant l'écoulement de 24 heures depuis la.

première publication.

D'un .autre .côté, on a fait la proposition de compléter le 2e .alinéa de l'art. 24 par une simple adjonction déclarant que les dispositions sur la concurrence déloyale sont applicables à la reproduction abusive desinformations de presse en question.

En présence de ces propositions, nous devons observer qu'on ne peut pas 'demander de la présente loi qu'elle édicté des prescriptions sur des cas qui rentrent dans le domaine de la concurrence déloyale. Il peut .seulement être stipulé :que la protection de la présente loi ne s'étend pas aux informations mentionnées au 2e alinéa de l'art. 24. La, question de savoir à quels autres points de vue ces informations peuvent être protégées n'a pas à être tranchée par la présente loi ; cette observation s'applique plus particulièrement à la seconde proposition ci-dessus.

Toutes les fois d'ailleurs que des nouvelles du jour et des faits divers ont 1© caractère d'une oeuvre littéraire et non seulement de «simples informations de presse», le journal peut se prémunir contre leur reproduction par l'insertion d'une réserve spéciale (alinéa 1). Dans les autres cas, les iarticles 41 et suivants, en particulier l'article 48 du c-ode revisé des obligations garantiront suffisamment le jouinal, au point de vue civil, contre toute reproduction abusive ;quant à la protection pénale contre la concurrence déloyale,, c'est au futur code pénal suisse qu'il incombera de la prévoir éventuellement.

Enfin, il y a lieu de remarquer qu'on a d'abord eu l'intention d'insérer dans la Convention revisée des dispositions analogues à celles qui sont préconisées dans la première proposition ci-dessus, mais qu'on y a renoncé, et cela pour des.

raisons en partie identiques à celles que nous venons de mentionner. La Convention revisée se borne, elle aussi, à poser le principe que sa protection ne s'applique pas aux simples informations de presse (art. 9, al. 3).

L'ari. 25 remplace l'art. 11, A, chiffre 1, de la loi fédérale du 23 avril 1883 pour autant que cette disposition ne se rapporte pas aux recueils scolaires. Conformément à une proposition faite au sein de la commission d'experts et dans le

649' but d'obvier à des abus possibles,, là. reproduction en question, dans les 'dissertations n'est autorisée expressément que pour autant (qu'elle sert à expliquer le texte de la dissertation.

Le représentant de l'Association de la presse suisse avait exprimé le désir qu'il résultât de la, loi que' les dissertations, dont il est question à l'article 25, puissent auBsî paraître dans les journaux et revues; en n'insérant pas une disposition de ce genre dans la loi, on risquerait de voir les' auteurs prétendre que les oeuvres littéraires -- des poésies, par exemple -- reproduites dans- les dissertations sont des.

«nouvelles» dans le sens de l'art. 24 et poursuivre de cefait la reproduction, en vertu, de cet article; toutes les fois que la dissertation paraîtrait dans un journal ou une revue^ ' A cet égard, il y a lieu d'observer d'emblée que l'article 25 ne prescrit rien en ce qui concerne la forme de l'apr parition des dissertations, que cette forme est donc sans importance et que ' l'art. 25 est applicable aussi' aux; dissertations qui paraissent dans les journaux (ou recueils, périodiques). En outre, la disposition exceptionnelle de l'art.

25 part d'un tout autre point de vue que la réserve à l'art. 24 à laquelle l'auteur de la proposition fait allusion; pour ce même motif .aussi, cette réserve ne saurait être invoqué» contre l'art. 25. Nous avons par conséquent estimé qu'il était superflu d'insérer dans la loi une disposition spéciale dans le sens de la proposition.

Art. 26. La loi fédérale du 23 avril 1883 admet la reproduction d'oeuvres littéraires ou musicales dans les recueils, scolaires (art. 11, A, chiffre 1, et G, chiffre 9)-.

Le Ier avant-projet voulait permettre la reproduction dans les recueils confectionnés sur l'ordre d'autorités fédérales ou: cantonales, c'est-à-dire possédant de prime abord le caractèredé matériel scolaire; la vente de ces recueils eût été soumise également à des restrictions conformes à leur but.

Cette réglementation fut toutefois critiquée aussi bien par les libraires suisses que par des autorités scolaires cantonales(v. pétition de la Conférence intercantonale des chefs de département [de l'instruction publique] de la Suisse romande), lesquels réclamèrent pour les oeuvres littéraires le maintien de la liberté absolue de reproduction, telle qu'elle est prévue par la loi fédérale de 1883, en invoquant essentiellement les motifs suivants: 1° Dans bien des cantons, il est fait usage .de matériel

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scolaire confectionné par des particuliers et non sur ordre des autorités.

..2° Les conditions spéciales de la Suisse (territoire peu étendu, pluralité de langues, diversité des régimes scolaires cantonaux) sont préjudiciables au débit du matériel scolaire suisse.

Il en résulte: d'une part, que les intérêts des auteurs ne peuvent pas être gravement lésés par la liberté de reproduction ; .d'autre part, que la limitation de la liberté de reproduction entraînerait le renchérissement du matériel scolaire suisse et favoriserait l'importation de matériel étranger au détriment de l'instruction publique suisse.

La Société des écrivains suisses et ses représentants à la · commission d'experts ont, de leur côté, demandé la suppression complète de la faculté de reproduire librement des oeuvres littéraires dans les livres scolaires, et revendiqué, subsidiairement, tout au moins l'obligation, pour les intéressés, de demander l'autorisation de l'auteur -- ainsi que le prévoit la loi allemande de 1901 (§ 19, chiffre 4) --, les écrivains subissant un préjudice du fait de la liberté de reproduction. Ce dernier voeu a été exprimé aussi pour la raison que les auteurs pourraient s'opposer par ce moyen à des modifications défigurant l'oeuvre.

Les motifs invoqués en ïaveur de la liberté de reproduction paraissent en général fondés; il n'est pas probable, en particulier, que les auteurs subissent un dommage tant soit peu considérable du fait de cette liberté. Le IIa avant-projet a (abandonné en conséquence les restrictions du Ier avantprojet et le projet actuel admet aussi sans autre la reproduction dans les livres d'école. Une restriction a été prévue seulement en ce sens que la reproduction doit être faite sans aucune modification; on a voulu par là, en tenant partiellement compte des désirs des écrivains, rendre impossibles les défigurations «ad usum delphini» dont on use quelquefois dans1 les manuels scolaires. On a fait observer au sein de la commission d'experts que l'art. 25 devrait aussi prescrire une .reproduction sans modification; il.y a lieu toutefois de ré-' pondre à cet égard que les conditions ne sont pas les mêmes dans cet article et qu'il peut se produire des cas où la re>production autorisée par l'article 25 ne peut pas être faite

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sans modification; la chose a d'ailleurs été confirmée au sein même de la commission.

En ce qui concerne la reproduction d'oeuvres imisicales dans les recueils scolaires, on a proposé au sein de la corn-.

mission d'experts, d'une part, de renoncer entièrement à admettre une exception en la matière (représentant du re «Verband schweizerischer Musikalienhändler » à la I session), d'autre part, d'admettre uneer exception, mais avec des restrictions dans le sens Idu I avant-projet (représentant du «Schweizerischer musikpädagogischer Verband»).

Touchant la première proposition, on a insisté notamment sur le fait que les recueils scolaires d'oeuvres musicales peuvent très bien être utilisés en dehors de l'école. Cette observation est fondée à notre avis; il en résulte dès lors -- ce qui n'est pas le cas pour les recueils scolaires d'oeuvres littéraires -- que l'auteur peut éprouver de ce fait un dommage sérieux.

Nous avons renoncé en conséquence à insérer dans le projet une disposition exceptionnelle en faveur de la reproduction d'oeuvres musicales dans les recueils scolaires.

La loi fédérale de 1883 (art. 11, C, chiffre 9) admet la reproduction d'oeuvres musicales dans les recueils destinés à l'église <3omme dans les recueils scolaires. Les avant-projets contenaient tous deux une exception à cet égard, mais avec certaines restrictions, il est vrai. En conformité d'une proposition faite à la IIe session de la commission d'experts par le représentant du « Verband schweizerischer Musikalienhändler » et approuvée par cette dernière, nous Bavons renoncé à prévoir dans le projet une disposition exceptionnelle en faveur des recueils destinés à l'église, 'attendu que ces recueils sont susceptibles, eux aussi, d'être utilisés dans des circonstances ne répondant pas à leur but et qu'aux dires du représentant de la société susdésignée des utilisations de ce genre se produisent même assez fréquemment.

1/art. 27 tient compte d'un voeu exprimé dans la pétition des sociétés suisses de chant et de musique de 1896/97; il ne se rapporte toutefois pas seulement aux oeuvres musicales, mais ·aussi aux oeuvres dramatiques, cela conformément à une proposition faite au sein de la commission d'experts. Le fait que ·cette disposition répond à un besoin a été confirmé d'une manière expresse, en ce qui concerne plus particulièrement les oeuvres musicales, par le représentant de la Société -fédérale de musique à la commission d'experts.

Feuille fédérale suisse. 70" année. Vol. III.

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D'après la discussion qui eut lieu au sein de la commis* sion, il faut entendre par 1'«exemplaire complet» qui doit être obtenu du titulaire du droit d'auteur, la partition avec toutes les parties instrumentales ,ou vocales éditées et de.

chacune de ces parties autant d'exemplaires qu'il y a, dans l'audition prévue, d'exécutants pour la partie en question.

Il ressort de l'art. 30 que les exemplaires d'une reproduction qui est licite en vertu de l'art. 27 ne peuvent pas être mis en circulation.

L'art. 28 prévoit une exception au droit d'auteur sur l'image commandée d'une personne; par 1'«image d'une personne1», le projet entend aussi bien la représentation plastique que la représentation non plastique.

1. A teneur de.l'art. 5, al. 2, de la loi fédérale du 23 avril.

1883, le droit de reproduction est aliéné avec l'oeuvre d'art lorsqu'il is'agit de portrait ou de buste-portrait commandéDéjà lors de l'exposé de l'art. 8, nous avons fait remarquer que la commande en soi ne justifiait pas une disposition allant aussi loin. Le fait que ce sont en premier lieu la personne, représentée et ses proches qui ont un intérêt à la reproduction de l'image commandée et que le commettant n'est pas; nécessairement identique à ces personnes, ne milite pas enfaveur de l'octroi au commettant de la faculté de reproduction..

2. L'art. 28 admet le point de vue que le droit d'auteur sur l'image commandée appartient en principe à l'auteur et que la personne représentée ou certains de ses proches n'ont qu'une faculté de reproduction, présentant le caractère d'une licence.

L'art. 28 précise le contenu de ce droit en ce sens a) que la personne représentée et -- à côté d'elle -- certains de ses proches ont la faculté de reproduire l'image; ou d'en faire faire des reproductions par un tiers (al. l)'j b) que la personne représentée ou, à son défaut, .certains de ses proches peuvent autoriser des tiers à reproduire l'image sous une forme déterminée (al. 2>,, 3. L'Union suisse des photographes a fait proposer dans; la commission d'experts que la faculté de la personne représentée et de ses proches de reproduire l'image fût limitée à leur usage personnel et que l'exploitation industrielle ou commerciale de celle-ci, y compris son exposition, fût réservée à.

l'auteur. Pour justifier cette proposition, on a insisté notamment sur le fait qu'en l'absence d'une obligation de demander l'autorisation de l'auteur, la reproduction de l'image -- dans

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les revues par exemple -- cause un sérieux préjudice à ce dernier, et que, d'autre part, l'exposition de mauvaises reproductions (le plus souvent des agrandissements) est susceptible de nuire à la réputation de l'auteur original.

Le IIe avant-projet s'est conformé à ces voeux en n'accordant que la faculté de reproduction prévue au 1er alinéa de l'art. 28 et en interdisant de mettre en circulation des exemplaires de la reproduction ou de rendre cette dernière publique d'une manière quelconque.

En revanche, nous avons trouvé qu'il était /impossible de ne pas tenir compte de certains usages existants- ainsi que le fait le 2e alinéa de l'art. 28; d'autre part, ce dernier alinéa prend soin de n'accorder la faculté de reproduction que pour autant qu'elle répond à un besoin réel. Au reste, les voeux des photographes tendant à interdire l'exposition de la reproduction rentrent moins dans le domaine du droit d'auteur que dans celui de la personnalité; or, cette dernière matière est réglée par le code civil.

4. En ce qui concerne les dispositions de détail de l'art. 28, nous observons ce qui suit: Le ier alinéa autorise la parenté à reproduire ou à faire reproduire l'image même du vivant de la personne représentée et pas seulement après la mort de celle-ci ainsi qu'on l'a proposé au sein de la commission d'experts. Les parents peuvent avoir même du vivant de la personne représentée un intérêt très légitime à posséder une image de celle-ci; ils doivent par conséquent ne pas être tenus davantage que la personne représentée de demander encore l'autorisation de l'auteur de l'image. Gomme la reproduction" permise en vertu du 1er alinéa n'est destinée qu'à l'usage personnel de la personne représentée ou de ses parents, elle ne doit pouvoir ni être mise en circulation, ni être exhibée publiquement; ceci résulte de l'art. 30.

En revanche, une véritable obligation de tenir la reproduction secrète n'aurait pas sa raison d'être en présence de l'exception prévue au 2e alinéa de l'art. 28.

2S alinéa: Par égard à l'auteur, il a fallu ici resserrer davantage le cercle des parents de la personne représentée que cgla n'est le cas pour la reproduction autorisée en vertu >du 1er alinéa; le même motif et la nature même de la faculté de reproduction en question exigent, d'autre part, qu'on établisse un ordre déterminé des personnes qui ont le droit d'autoriser la reproduction. Conformément au but de la reproduction

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autorisée en vertu de l'alinéa 2, la mise en circulation d'exemplaires de la reproduction; soit de la publication contenant cette dernière, doit être également permtee (v. art. 30); en revanche, il n'y a aucun besoin d'admettre la libre exhibition publique de la reproduction.

L'art. 29. Le chiffre 1 remplace l'art. 11, B, chiffre 6, de la loi fédérale du 23 avril 1883: a) Le Ier avant-projet soumettait la reproduction des oeuvres des arts figuratifs ou de la photographie dans les manuels scolaires aux mêmes restrictions que la reproduction des oeuvres littéraires. Ainsi que nous l'avons déjà fait pour ces dernières, nous avons renoncé à prévoir les restrictions en question au chiffre 1 de l'art. 29, cela d'autant plus qu'elles suscitèrent, dans l'un eb l'autre cas, de l'opposition au sein de la commission d'experts.

b) La loi actuelle ne permet que la reproduction «fragmentaire»; la portée de cette restriction manquant de précision, nous ne l'avons pas admise dans le projet.

c) Vu les conditions spéciales dans lesquelles se trouvent notamment les oeuvres d'art qui, suivant le cas, restent non éditées ou ne sont éditées qu'après un long laps de temps, la reproduction doit être permise déjà après la divulgation de l'oeuvre.

d) Tenant compte d'une observation présentée à ce sujet au isein de la commission d'experts, le chiffre 1 permet la reproduction seulement lorsqu'elle sert à expliquer le texte de l'ouvrage scolaire; sans cette restriction, la faculté de reproduction risquerait d'être étendue d'une manière injustifiée.

Le chiffre 2 répond à un voeu du représentant du « Verband der schweizerischen Kunstmuseen », qui nous a paru fondé. En revanche, il n'est pas possible de prendre en considération la proposition du même représentant suivant laquelle les « guides » des musées devraient être mis au bénéfice de la même exception que les «catalogues»; il serait en effet contraire, aux égards dus au titulaire du droit d'auteur de permettre la libre reproduction dans les publications éditées par les administrations de musées si ces publications ne peuvent pas être considérées comme des «catalogues ». Le juge aura d'ailleurs à. décider dans chaque cas quelles sont les publications qui constituent effectivement des «catalogues» dans le sens de la loi.

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Le chiffre 3 remplace l'art. 11, B, chiffre 7, de la loi fédérale du 23 avril 1883. Cette dernière disposition qui prescrit que la reproduction ne peut pas avoir lieu dans la forme artistique de l'original, n'est pas très claire ea ce qui concerne la notion de la « forme artistique ». Le Tribunal fédéral a interprété ce terme en ce sens qu'il faut rechercher, dans chaque cas, si les éléments artistiques essentiels de la reproduction sont bien identiques à ceux de l'original de telle sorte que la reproduction produise le même effet que ce dernier. Il a déclaré, en conséquence, qu'une reproduction en bois sculpté delà statue de Tell à Altdorf ne représente pas la même forme artistique que l'original, parce que la sculpture sur bois ne pos-.

sède pas le caractère «monumental» constituant l'élément artistique essentiel de l'original (!R. 0. 31, II, N° 20).

Le Ier avant-projet s'est rapproché de cette interprétation en autorisant toute reproduction ne pouvant servir au même but que l'oeuvre originale.

A ce propos, on a fait remarquer avec raison au sein de la commission d'experts que le fait de permettre de reproduire plastiquement des oeuvres plastiques, même sous une forme réduite, diminuait par' trop le droit d'auteur. En réalité, le but de l'exception en question est suffisamment atteint si la reproduction non plastique (par exemple par des photographies, des cartes-vues, etc.) est autorisée comme c'est le cas, d'une manière analogue, dans la loi allemande de 1907 (§ 20).

Il va de soi que les reproductions de ce genre ne peuvent pas non plus être utilisées dans le même but que l'oeuvré originale et que des fresques, par exemple, ne peuvent pas être reproduites sous la forme de fresques. Le projet prévoit, en outre, que les oeuvres d'architecture qui tombent sous le coup du chiffre 3 ne peuvent pas être confectionnées à nouveau.

Qn a proposé au sein de la commission d'experts de régler aussi expressément, au. chiffre 3 de l'art. 29, la reproduction des oeuvres exposées au bord des eaux publiques. Nous n'avons pas accédé à ce voeu dans la pensée qu'il était préférable, dans les feas (de ;oe igenre, de> s'en remettre chaque fois à l'appréciation du juge.

L'art. 30 établit dans quelle mesure les exemplaires des reproductions faites conformément aux art. 23 à 29 peuvent être mis en circulation ou dans quelle mesure les reproductions de ce genre peuvent être utilisées d'une autre manière limitant le droit d'auteur.

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L'art. 31 tient compte de l'usage qui consiste, lors de l'exécution d'une oeuvre musicale avec texte, à reproduire ce dernier par ex. dans les programmes et à le distribuer aux auditeurs; il détermine en même temps les limites! dans lesquelles les reproductions de ce genre sont licites. L'article résulte d'une proposition faite au sein de la commission d'experts.

L'art. 32 veut tenir compte des intérêts de l'art musical et dramatique populaire; tel qu'il est rédigé, il ne profitera le plus souvent qu'aux petites sociétés de peu d'importance.

La condition suivant laquelle aucun des exécutants ne doit être rétribué à l'exception de celui qui dirige, est fondée sur la considération que l'auteur doit recevoir en première ligne sa part lorsque, outre le dirigeant qui est nécessaire, d'autres exécutants touchent aussi une indemnité.

Dans la commission d'experts, les représentants des cercles d'auteurs se sont élevés vivement contre cette disposition exceptionnelle, et cela tant pour des raisons de nature matérielle que pour des motifs touchant au droit à la personnalité. En ce qui concerne le point de vue matériel, il y a lieu de remarquer que les auteurs ne peuvent, en présence des cas auxquels l'art. 32 est applicable, subir un dommage matériel bien considérable; quant aux craintes que les .auteurs ont exprimé relativement au droit à la personnalité, nous renvoyons à l'observation que nous avons faite à ce sujet dans notre exposé des art. 16 et 17.

L'art. 33 remplace l'art. 11, C, chiffre 10, de la loi fédérale du 23 avril 1883.

1. La disposition exceptionnelle de l'art. 33 ;n'est pas limitée, comme la loi actuelle, à la représentation ou exécution, mais s'étend aussi à la récitation et à l'exhibition de l'oeuvre. Cette extension paraît logique; elle doit être établie d'une manière expresse du moment que le projet fait rentrer, en principe, la récitation et l'exhibition dans le droit d'auteur.

2. L'exception comprend toutes les récitations, représentations, exécutions et exhibitions qui ne poursuivent pas un but de lucre; celles organisées dans un but de bienfaisance étant particulièrement importantes ont été mentionnées expressément. On a demandé aU sein de la commission d'experts que Fart. ,33 ne soit applicable qu'aux seules organisations poursuivant un but de bienfaisance. Il n'est pas possible de déférer à ce voeu: Déjà la loi fédérale de 1883 permet une audition

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sitôt qu'elle est organisée sans but de lucre; il n'existe pas de raison d'admettre un point de Tue plus étroit.

D'un autre côté, il ne peut pas non plus être donné suite .à la proposition qui a été faite d'étendre l'art. 33 aux récitations représentations, exécutions ou exhibitions organisées dans un but d'utilité publique, parce qu'il résulterait de l'imprécision de ce terme une restriction du droit d'auteur, beaucoup trop considérable.

3. L'intention de réaliser un gain doit faire défaut chez tous ceux qui participent à la récitation, représentation, exécution ou exhibition, donc aussi bien chez l'organisateur que chez Jes exécutants; en particulier, aucun de ces derniers ne: doit être rétribué. Car pour l'art. 33 également, il faut admettre que l'auteur doit recevoir avant tout autre sa part lorsque les personnes qui participent à la récitation, représentation, exécution ou exhibition veulent en retirer un profit quelconque.

4. Le Ier avant-projet voulait admettre comme licites aussi les organisations qui ont lieu à l'occasion d'une «fête fédérale, cantonale ou communale » et qui font partie du programme officiel tde la fête. Le IIe avant-projet a abandonné cette exception. Dans sa pétition du 30 mars 1913, la Société fédérale de musique a dès lors demandé qu'on l'admette à nouveau dans le projet. Nous avons toutefois trouvé -- abstraction faite de la difficulté que présenterait la détermination des fêtes reentrant ici en question et dont on s'est rendu compte à la I session de la commission d'experts -- que le besoin d'une nouvelle exception dans le sens indiqué ci-dessus ne pouvait être reconnu eu égard aux exceptions au droit de représentation ou d'exécution déjà prévues par le projet.

5. La pétition de la Société des écrivains suisses et les représentants! de cette société à la commission d'experts se sont élevés contre l'art. 33, et cela moins pour des raisons matérielles que pour des motifs touchant au droit à la personnar lité; mous renvoyo-no à cet égard de nouveani à la remarque que nous avons faite à propos des art. 16 et 17. Si la pétition, en présence de la bienveillance que les écrivains suisses auraient témoignée de tout temps à l'égard des récitations, représentations, exécutionsi ou exhibitions organisées dans un but « d'utilité publique », refuse d'admettre la contrainte
qui est imposée aux auteurs par l'art. 32, il est alors nécessaire d'observer que les auteurs étrangers et les sociétés d'auteurs entrent ici également en ligne de compte.

658

Art. 34. L'exposition publique d'exemplaires d'une oeuvre avant sa divulgation est illicite (art. 11, chiffre 4, et art. 43, I, chiffre 4). Si l'on 'devait toutefois demander absolument l'autorisation du titulaire du droit d'auteur pour pouvoir exposer publiquement des oeuvres d'art ou des photographies non encore divulguées, il pourrait résulter de cette obligation de graves inconvénients pour le trafic de ces objets, car l'on pourrait, pour des raisons diverses, se trouver dans l'impossibilité de demander l'autorisation en question. L'art. 34 paraît en conséquence répondre à un véritable besoin. Le IIe avant-projet, qui contenait une disposition analogue, permettait sans autre l'exposition publique des exemplaires. Nous estimons cependant qu'il est plus juste de restreindre la disposition aux seuls cas où l'autorisation ne peut être demandés au titulaire du droit d'auteur.

Art. 35. A la Ire session de la commission d'experts, on a proposé que pour les opéras et les autres oeuvres musicales accompagnées d'un texte le compositeur fût déclaré -- comme le fait d'une manière semblable la loi allemande du 19 juin 1901 en son § 28, alinéa 2 -- en droit d'autoriser la représentation ou exécution pour le texte aussi chaque fois que ,ce dernier aurait servi de base, avec l'assentiment du poète>, à l'élaboration de l'oeuvre musicale.

Le IIe avant-projet n'ayant pas tenu.

compte de la proposition, celle-ci a été renouvelée à la IIe session de la coinmission d'experts et approuvée, idans la votation, par la grande majorité des membres.

En faveur du privilège proposé plus haut pour le compositeur, on a soutenu notamment que le fait que le poète pourrait empêcher, par son refus, la représentation ou exécution de l'ensemble serait non seulement injuste -- le texte étant quand même moins important que la composition musicale --, mais irait en outre à l'encontre des intérêts des organisateurs de l'audition ainsi que de ceux du public.

Nous avons tenu compte (en principe-de la proposition dans le projet parce que les raisons invoquées nous ont paa-U' dignes d'attention. Pour les organisateurs de représentations ou exécutions ien particulier, la tâche sera le plus souvent considérablement simplifiée s'ils n'ont à s'entendre qu'avec le seul [titulaire du droit de représentation ou d'exécution; la disposition de la loi allemande se base aussi principalement sur cette dernière considération.

659En ce qui concerne les dispositions de détail de l'art. 35, nous observons encore ce qui suit: 1° Le projet distinguant entre le droit de représentation ou d'exécution avant ou après l'édition, il a fallu également formuler d'une manière différente les pouvoirs en question (Vertretungsvollmacht) du titulaire du droit de représentation ou d'exécution suivant que le* texte est édité ou non.

2° Contrairement à la proposition faite, les pouvoirs ne sont pas restreints aux seuls cas où le texte a été mis ' en musique avec le consentement du poète: ils sont donnés au contraire d'une manière toute générale. Si les pouvoirs étaient restreints comme on l'a proposé, l'organisateur de l'audition devrait chaque fois s'assurer du consentement du poète, ce qui lui ferait perdre une bonne partie de l'avantage que doit lui offrir l'art. 35.

La loi allemande ne prévoit pas non plus une restriction semblable.

3° Les pouvoirs sont valables d'une manière toute générale pour la représentation ou exécution des oeuvres musicales avec texte; il n'est donc pas nécessaire qu'il existe un rapport particulier entre la musique et le texte comme, par exemple, entre la partition et le libretto d'un opéra; l'art. 35 doit, au contraire, pouvoirêtre appliqué même à la mise en musique d'une poésie.

L'existence d'un privilège étant en principe reconnue en faveur du titulaire du droit de représentation ou d'exécution de l'oeuvre musicale, la réglementation prévue par le projet apparaît dès lors comme la solution la plus simple et la plus claire.

4° Les pouvoirs fondés sur Fart. 35 légitiment le titulaire du droit de représentation ou d'exécution de l'oeuvre musicale vis-à-vis des tiers, mais ne touchent en rien aux rapports existant entre lui et le titulaire du droit, d'auteur sur le texte; l'art. 35 établit expressément ce principe.

L'art. 36 s'occupe du « droit à sa propre image ».

1. Nous sommes d'avis qu'il y a lieu, d'une manière' générale, de renoncer à régler ce droit dans le présent projet de loi, et cela pour les motifs suivants: a) Le « droit à sa propre image » n'a rien de commun avecle droit d'auteur, mais touche à la question de savoir-

·660 jusqu'à quel point il y a lieu de tenir compte, pour des raisons découlant du droit à la personnalité, de l'intérêt que peut avoir la personne représentée ou sa parenté à ce que l'image ne soit pas rendue publique.

b) Si Je fait de rendre publique l'image d'une personne constitue une atteinte illicite aux intérêts personnels du représenté ou de ses proches, la protection prévue à l'art. 28 du code civil paraît suffisante; cette' manière de voir a d'ailleurs été exprimée également au sein de la commission d'experts pour le code civil (v. procèsverbal, 1er vol., p. 18 et 19); la nécessité d'édicter en la matière des mesures pénales spéciales ne paraît pas davantage s'imposer.

·c) Si l'acte mentionné sous b ci-dessus ne porte atteinte ni aux intérêts personnels du représenté, ni à ceux de ses proches, des mesures légales ne sont pas nécessaires.

2. Nous croyons devoir cependant nous écarter du point 'de vue exposé sous 1 ci-dessus s'il s'agit d'une image commandée, parce qu'en pareil cas le «droit à sa propre image» doit être pris davantage en considération que lorsque l'auteur a confectionné l'image de son propre chef. L'art. 36 prévoit ·en conséquence 'd'une façon absolue que les images! commandées ne peuvent être mises en circulation oui rendues publiques qu'avec le consentement de la personne représentée ·ou de certains de ses proches (ces derniers s'excluant les uns les autres). En insérant la réserve d'une stipulation conti-aire, ·on a cependant voulu permettre que l'autorisation n'eût pas à être demandés dans chaque cas, mais pût être obtenue d'emblée et une fois pour toutes.

Il ne peut être question de demander une autorisation lorsqu'il s'agit de mesures prises par les autorités dans l'intérêt de la justice pénale (2e alinéa).

3. Comme la disposition de l'art. 36 règle une question de droit à la personnalité et non une question de droit d'auteur, nous l'avons fait figurer à la fin du chapitre II du présent projet.

III. Durée de la protection.

Art. 37 à 42.

I. La Convention révisée pose à l'art. 7, al. 1, le principe que la protection accordée par la Convention dure pendant la vie de l'auteur et cinquante ans après sa mort. En réalité,

661

cette disposition n'est pas de droit impératif; ceci résulte du deuxième alinéa de l'art. 7 qui prévoit que dans le cas où cette durée ne serait pas uniformément adoptée par tous les pays de l'Union, la durée de la protection conventionnelle sera réglée 'dans chaque pays par la législation intérieure sans pouvoir toutefois excéder la durée fixée dans le pays d'origine de l'oeuvre.

Le maintien de cette règle est confirmé spécialement à l'alinéa 3 de l'art. 7 en ce qui concerne les oeuvres photographiques, posthumes, anonymes et pseudonymes.'

La Suisse n'est donc nullement tenue de protéger les oeuvres provenant des autres pays unionistes pour une durée plus longue que celle prévue par la loi suisse.

II. Dans les cas où la durée de protection se calcule d'après la mort de l'auteur, la loi fédérale du 23 avril 1883 (art. 2, al. 1) fait expirer la protection trente ans après le décès. Le même délai de protection est prévu -- pour les oeuvres littéraires et artistiques -- en Allemagne et au Japon, tandis que la majorité des pays unionistes accordent une protection plus^ longue encore, à savoir: 12 pays (Belgique, Danemark, France, Grande-Bretagne, Luxembourg, Maroc [territoire du protectorat français], Monaco, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Suède -- pour les oeuvres littéraires ·--, Tunisie) jusqu'à cinquante ans et un pays (Espagne) même jusqu'à quatre-vingts ans après la mort de l'auteur.

Nous estimons que :le délai de protection actuelle de trente ans est suffisant. Son maintien a d'ailleurs été approuvé aussi au sein de la commission d'experts; la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses, qui avait proposé, dans sa pétition du 10 mars 1911, de prolonger1 le délai de protection jusqu'à cinquante ans après le décès de l'auteur, a fait retirer ce voeu par son représentant à la commission.

III. La loi fédérale de 1883 ne fixe pas de limite absolue à la durée de protection: Une oeuvre posthume est protégée dans tous les cas encore trente ans après sa «publication» (comp. art. 2, al. 2), quelle que soit la date de cette dernière, d'où il résulte que la protection d'une oeuvre «publiée» par ex. quatre-vingts ans après la mort de l'auteur ne prendra effectivement fin que cent dix ans après ce décès.

Le Ier avant-projet avait adopté le même point de vue.

662

Cette manière de régler la durée de protection a soulevé toutefois des objections à la Ire session de la commission d'experts; on a fait remarquer que la possibilité d'une protection démesurément longue n'est pas uniquement théorique, attendu qu'il arrive encore assez fréquemment qu'on retrouve des oeuvres dont les auteurs sont décédés depuis longtemps.

Considérant 1° qu'il sera souvent, après 1'ecoulenient d'un long laps de temps depuis la mort de l'auteur, très difficile de savoir au juste s'il existe un titulaire du droit d'auteur et quelle est la personne qui doit être considérée comme tel; que, d'autre part, une solution arbitraire de la question telle qu'elle est contenue par ex. dans la loi allemande de 1901, en son § 29, ne saurait être préconisée ; 2° qu'il n'existe pas de motifs particuliers de tenir compte des personnes auxquelles profiterait le droit d'auteur après l'écoulement d'un long laps de temps depuis la 'mort de l'auteur, et qu'il arrive, au contraire, un moment où l'intérêt des tiers à la libre utilisation de l'oeuvre prédomine, nous estimons qu'il y a lieu de prévoir -- comme au IIe avant-projet déjà -- une limite absolue de protection et qu'il convient de faire cesser la protection légale dans tous les cas soixante ans après la mort de l'auteur (art. 39, al. 2).

A la IIe session de la commission d'experts, on a reconnu la pertinence de cette réglementation.

Les divers articles du présent chapitre ne donnent lieu à aucunes observations spéciales.

IV. Sanction civile et pénale.

Les dispositions de ce chapitre ont été groupées comme suit: Les art. 43 et 44 traitent des infractions (au point de vue objectif) donnant lieu à des poursuites civiles et pénales, les art. 45 et 46 contiennent des dispositions exclusivement de droit civil (et de procédure civile, les art. 47 à 52, des dispositions exclusivement de droit pénal ou de procédure pénale, les art. 53 à 58, des dispositions communes aux poursuites civile et pénale, les art. 59 à 62, quelques cas spéciaux.

L'art. 43 énumère les faits qui constituent objectivement, en conformité du chapitre II du projet (Etendue du droit

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d'auteur), une violation du droit d'auteur et qui seuls peuvent donner lieu à des poursuites aussi bien civiles que pénales.

L'énumération entend être limitative comme la détermination positive de l'étendue du droit d'auteur aux art. 11 à 13.

On a proposé au sein de la, commission d'experts de ne pas indiquer les ' cas d'infraction sous la forme d'une énumération limitative, et cela pour les mêmes motifs qui furent invoqués contre la détermination limitative de l'étendue du droit Id'auteur (v. ci-dessus l'exposé concernant les art. 11 à 13).

Un autre membre de la commission a constaté que pour la responsabilité pénale une énumération limitative d'infractions bien déterminées -- telle qu'elle était déjà, prévue dans les deux avant-projets -- était la seule solution pouvant convenir en l'espèce; en revanche, il a recommandé de renoncer à une énumération de ce genre pour la responsabilité civile, de renvoyer à cet égard simplement aux dispositions générales du droit des obligations et de faire figurer ce renvoi en tête du chapitre « Sanction civile et pénale », afin de bien montrer la différence existant entre la responsabilité civile et la responsabilité pénale.

En fait, il ne peut être question de formuler la responsabilité pénale d'une manière générale comme le voudrait la première proposition ci-dessus. Il ne nous reste ainsi à examiner que la deuxième proposition -- à laquelle d'ailleurs l'auteur de la première a fini par se rallier -- tendant à ce que la responsabilité civile soit formulée en des termes généraux. A cette proposition, il y a lieu d'objecter ce qui suit: 1° Une disposition sur la responsabilité civile, qui serait formulée en termes 'généraux et qu'on placerait en tête du chapitre IV, laisserait supposer -- l'auteur de la proposition était en effet de cet avis -- qu'il peut exister plus de cas de responsabilité civile qu'il n'en est spécifié dans rémunération limitative des cas entraînant une responsabilité pénale.

2° Une telle situation serait en soi injustifiable, vu que chaque violation intentionnelle du droit d'auteur doit entraîner en principe ime sanction aussi bien civile que pénale. La chose est d'ailleurs irréalisable si l'on se place au point de vue du projet, car l'étendue du droit d'auteur et les violations de ce droit sont en rapport réciproque. Une infraction au droit d'auteur ne peut naturellement être commise que

664

pour autant que l'élément de droit qui a été lésé se trouve compris dans le droit d'auteur. Si l'étendue de ce dernier est circonscrite -- comme dans le projet -- d'une manière précise et bien délimitée, il en résulte alors, tant pour la sanction civile que pour la sanction pénale, un nombre limité de violations (au point de vue objectif) correspondant à l'énumération de l'art. 43.

La question de savoir si un acte constitue une violation du droit d'auteur dépend de celle de savoir si cet acte lèse un des droits partiels compris dans ce droit; en cas d'affirmative, l'acte en question -- pour autant d'ailleurs que les autres conditions légales sont remplies -- peut être poursuivi civilement malgré que la responsabilité civile soit restreinte à certains cas déterminés, attendu que ces derniers ont été formulés de manière à correspondre à l'étendue du droit d'auteur. Dans le cas contraire, l'acte -- même si la responsabilité civile est prévue d'une façon tout à fait générale -- ne peut pas être poursuivi davantage civilement que pénalement, 'parce qu'il est en dehors eu droit d'auteur.

3° II résulte de ce qui précède qu'il n'y aurait de raison de formuler la responsabilité civile en termes généraux non limitatifs que si l'étendue du droit d'auteur n'était pas elle-même circonscrite d'une manière limitative. Dans ce cas toutefois, l'énumération limitative des cas d'infraction ne serait pas possible non plus pour la responsabilité pénale pour laquelle cette limitation fut cependant reconnue nécessaire; car en l'absence de droits partiels déterminés constituant le droit d'auteur, on ne pourrait plus spécifier toutes les violations possibles de ce droit.

4° Si l'on conserve la détermination limitative de l'étendue du droit d'auteur -- voir à cet égard l'exposé des art. 11 à 13 --, la limitation expresse de .la responsabilité pénale et civile aux cas de violation résultant de cette détermination, telle qu'elle est prévue par le projet, constitue dès lors une solution claire et nette parce qu'elle répond parfaitement aux conditions de fait. Il y a lieu d'ajouter qu'une solution analogue a déjà été adoptée dans la loi sur les brevets (art. 38, 39 et 40), ainsi que dans celle sur les dessins et modèles industriels (art. 24, 25 et 26).

665.

Le projet tient compte des propositions présentées au ,sein de la commission d'experts en ce sens qu'il s'en remet simplement au droit commun (art. 45) pour la sanction civile des cas d'infraction prévus par la loi.

Quelques dispositions de l'art. 43 donnent lieu aux observations suivantes: Chiffre I, 3. Les compositeurs ont demandé au sein de la commission d'experts que la loi désignât clairement la personne responsable de la représentation ou exécution, et cela dans la personne de celui qui engage les exécutants et retire le profit de l'audition. Le projet tient compte de ce voeu ien déclarant responsable l'organisateur de la représentation ou · exécution : cela sera par conséquent, si les exécutants ont été engagés, la personne qui les aura engagés,, alors que les exécutants seront reconnus eux-mêmes responsables, en tant qu'organisateurs de l'audition, chaque fois, qu'ils auront agi pour leur propre compte. Comme des circonstances analogues peuvent se présenter lors de la récitatation ou de l'exhibition, nous avons prévu la même dis« position pour ces deux cas.

Chiffre I, 4. Comme le projet a admis un droit spécial de rendre l'oeuvre publique (art. 11, chiffre 4), il y a lieu deprévoir aussi la violation de ce droit comme un délit spécial. Il en résulte qu'un seul et même acte peut constituer une Violation du droit de rendre l'oeuvre publique et en mêmetemps une violation d'un autre :droit \partiel (du droit de représentation ou d'exécution par exemple) compris dans le droit.

· d'auteur.

Chiffre II. L'utilisation des exemplaires de l'oeuvre pour une récitation, représentation, exécution ou exhibition neconstitué pas une mise en circulation de ces exemplaires.

Comme le Tribunal fédéral s'est placé à ce point de vue en cequi concerne l'utilisation pour 'une représentation ou exécution (E. 0. 34, I, N» 20) et comme il paraît, d'autre part,, douteux, suivant son arrêt, qu'il considère l'utilisation d'un matériel illicite comme une atteinte au droit de représentation ou d'exécution, il est indiqué de stipuler expressément que cette utilisation est poursuivable. Comme auteur de cedélit seul l'exécutant peut entrer ici en considération, et cela même s'il est engagé, car c'est lui qui utilise les exem. plaires. Il ne serait pas juste, dans les cas de ce genre, depermettre des poursuites contre l'employeur (organisateur).

666

Chiffre III. La reproduction licite d'après l'art. 22 doit demeurer dans le domaine privé de celui qui l'a faite; elle ne peut en outre être utilisée dans un but de lucre. La <· non-observation de ces restrictions constitue un délit qui n'est que partiellement visé par les chiffres I efb II de l'art. 43.

Aiin d'éviter des malentendus, il convient de définir spécialement l'infraction à la disposition de l'art. 22, bien que cette infraction soit déjà comprise, sous certains rapports, dans les cas prévus aux chiffres susmentionnés.

L'art. 44 énumère (au point de vue objectif) des cas qui, sans être des violations du droit d'auteur, constituent néanmoins des délits d'une nature spéciale et procèdent d'une atteinte à la personnalité.

Le chiffre 1 s'occupe de l'usage abusif du nom (nom civil ou pseudonyme) ou du signe de l'auteur. La loi fédérale du 23 avril 1883 (art. 13) prévoit déjà, en cas de violation du droit d'auteur, une aggravation de la peine lorsque le nom ou la marque de l'auteur ou de l'éditeur ont été aussi imités. La Conférence de Paris de l'Union internationale, de 1896, a exprimé le désir (voeu n° IV) « que des dispositions pénales fussent insérées dans les législations nationales afin de réprimer l'usurpation des noms, signatures ou signes des auteurs en matière d'oeuvres littéraires et artistiques ». En tenant compte ide ce voeu tout général, le projet va plus loin que la loi fédérale de 1883 en ce sens qu'il ne fait, en ce qui concerne la désignation abusive (par le nom ou le signe de l'auteur) des exemplaires de la reproduction, aucune dis.tinction entre la reproduction licite et la reproduction illicite, et qu'il prévoit en outre la désignation abusive d'une oeuvre originale. En revanche, le chiffre 1 ne vise que l'usurpation du nom ou du signe distinctif de l'auteur, la Conférence de Paris elle-même n'en ayant pas demandé da-.

vantage. En ce qui concerne l'utilisation abusive du, nom ou de la marque de l'éditeur, on peut parfaitement s'en remettre au droit commun, éventuellement à la loi concernant la protection des marques de fabrique et de commerce.

Les infractions prévues au chiffre 1 peuvent se cumuler avec la fraude réprimée par le droit pénal commun.

Chiffre ä. Le projet traite l'omission de l'indication claire de la source comme un délit ispécial, attendu qu'on irait
trop loin si l'on déclarait une reproduction -- autorisée en fait par la loi -- illicite pour la seule raison que l'indication de la source a été omise. Pour ce qui toiiche spéciale-

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suent à l'indication de la source lors de la reproduction d'article de journaux, la Convention revisée (art. 9) ne s'oppose .nullement à la réglementation prévue par le projet.

Le chiffre 3 détermine l'infraction spéciale correspondan à l'art. 36.

Comme suite à l'exposé de l'art. 44, il y a lieu de re.marquer que la pétition collective de la Société des peintres, -sculpteurs et architectes suisses et de la Fédération des architectes suisses, du · 10 mars 1911, demandait que la loi re·connût, en faveur de l'artiste, le droit d'intenter action lorsqu'il serait porté atteinte à ses intérêts personnels par des reproductions inintelligentes ou défectueuses de son oeuvre.

On a également exprimé le voeu à plusieurs reprises au sein de la commission d'experts que la personnalité de l'auteur fût .protégée par la nouvelle loi.

Bien qu'il soit tenu compte du droit à la personnalité dans plusieurs dispositions du projet -- celles des art. 9, 36 et 44 par exemple --, il y a lieu néanmoins d'établir en ce qui.

concerne les voeux et propositions mentionnés ci-dessus: 1° qu'il est nécessaire de faire en principe une distinction entre le droit d'auteur et le droit à la personnalité. -- II suffit de rappeler à cet égard que la personne lésée en cas d'atteinte au droit d'auteur n'est pas néces~ sairement identique à la personne lésée dans le cas d'une atteinte à la personnalité et, d'autre part,, qu'une violation du droit d'auteur n'implique pas forcément une violation du droit à la personnalité, ou inversement; 2° .qu'il (ne peut pas rentrer dans le cadre de la présente loi de sauvegarder en principe la personnalité de l'auteur.

A l'auteur qui se croit lésé dans ses intérêts personnels par une utilisation de son oeuvre -- que cette utilisation «oit d'ailleurs licite ou illicite au point de vue du droit ·d'auteur --, lesi dispositions du droit commun (art. 28 du C. C. et art. 49 du C. 0. rev.) accordent une protection suffisante.

L'art. 45 s'enremet, ainsi que [nous l'avons déjà dit, simplement au droit commun pour la sanction civile des cas de ·violation (au point de vue objectif) prévus par la loi. Le fait que les dispositions du C. C. concernant le droit à la .personnalité sont aussi invoquées pour la sanction civile des infractions énumérées à Part. 44 s'explique par la nature spéciale de ces infractions.

Feuille fédérale suisse. 70e année. Vol. III.

46

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L'art. 46 prévoit, à son premier alinéa, une seule instance cantonale pour les contestations de droit civil, corano la loi isur les brevets d'invention (art. 49) et celle sur lesdessins et modèles industriels (art. 33).

Le deuxième alinéa découle de l'art. 62 de la loi fédéralesur l'organisation judiciaire fédérale.

L'art. 47 détermine les conditions auxquelles le® infractions des art. 43 et 44 entraînent une répression pénale, ainsi que les pénalités elles-mêmes.

La loi fédérale du 23 avril 1883 réprime pénalement aussi bien les infractions au droit d'auteur commises intentionnellement que celles commises par suite d'une négligence grave (art. 13). Le projet ne prévoit en revanche-une répression pénale, à l'instar de la loi sur les brevets d'invention (art,, 39), de la loi sur les dessins et modèles industriels (art. 25) et conformément au principe admis sur ce point en droit moderne, que lorsque les infractions des art. 43 .et 44 oj.t été commises intentionnellement. Afin de pouvoir tenir compte de la gravité possible des violations du 'droit d'auteur, il a paru indiqué d'élever le montant des amendes prévues par la loi actuelle.

Art. 48. Partant du point de vue que les intérêts du lésé l'emportent régulièrement sur l'intérêt public: à la punition, l'art. 48 déclare que la poursuite pénale ne peut avoir lieu que sur plainte. Ce principe est d'ailleurs admis déjà parla loi fédérale du 23 avril 1883 (art. 13>, par l'art. 41 de la,, loi sur les brevets d'invention et par l'art. 27 de la loi sur les.

dessins et modèles industriels.

De même ique la loi sur les brevets d'invention (art. 42Xl'art. 48 permet de retirer la plainte jusqu'au moment de la communication du jugement de première instance. Il y a lieu de remarquer à cet égard que la loi sur l'organisation judiciaire fédérale fait courir également le délai de recours.

en cassation contre les jugements cantonaux prononcés en application des lois pénales fédérales à (partir de la « communication » du jugement cantonal (art. 164) et qu'elle entend par cette dernière une communication aussi bien verbale qu'écrite (art. 152).

L'art. 49 stipule expressément que les clauses pénales du projet sont complétées par les dispositions générales, dm code pénal fédéral.

669

Art. 50. Le premier alinéa statue en principe que la poursuite pénale et le jugement des infractions à la présente loi incombent aux cantons. La loi réglemente cependant d'une manière uniforme certains points spéciaux. Ainsi l'alinéa 2 de l'art. 50 établit en particulier une règle uniforme en ce qui concerne le for pour la poursuite fienale, et cela dans le même isens que l'art. 42, al. 2, de la loi sur les brevets d'invention. Cette dernière loi déclare (art. 42, al. 3) le même for applicable aussi à la poursuite civile; eu égard à une proposition présentée dans .la commission d'experts, nous avons renoncé à insérer une disposition de ce genre dans le projet, ce qui fait que le for pour la poursuite civile basée sur la présente loi est déterminé par la procédure civile ordinaire.

L'art. 51 correspond à l'art. 47 de la loi sur les brevets d'invention et à l'art. 151 de la loi fédérale sur l'organisation judiciaire fédérale.

L'art. 52 règle la prescription de l'action pénale et celle de la peine, et cela en fixant les mêmes délais que ceux prévus par la loi sur les brevets d'invention (art. 48).

Le droit civil commun ayant été réservé pour la sanction civile des infractions à la présente loi, il s'ensuit que ce droit est également applicable en ce qui concerne la prescription de l'action civile.

Les art. 53 et 54 s'occupent des mesures conservatoires; ils résultent essentiellement de diverses propositions présentées au isein de la commission d'experts.

A teneur des art. 53 et 54, chiffre 3, des mesures conservatoires peuvent être requises déjà avant l'ouverture de l'action, et -cela même par des personnes s'estimant simplement menacées dans leurs droits par une infraction dmminenta L'art. 53 donne quelques exemples de mesures conservatoires a titre d'indication.

Il appartient en principe aux cantons de réglementer la procédure relative aux mesures conservatoires et de désigner les autorités compétentes; le projet règle toutefois d'unie manière uniforme -quelques questions importantes de procédure ;(art. 54). Il y a lieu de relever à cet égard les points suivants : '· 1° D'après le projet, des mesures conservatoires peuvent être demandées et ordonnées déjà avant l'ouverture de l'action civile ou pénale; d'autre part, plusieurs fors, situés éventuellement même dans des cantons

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différents, peuvent entrer concurremment en ligne de compte. Nous estimons, dans ces circonstances, qu'il est indiqué d'édicter à l'art. 54, chiffre 3, une disposition prescrivant qu'en cas de mesures conservatoires préalables à l'ouverture d'action, le délai pour ouvrir action, imparti par l'autorité qui a ordonné lesdites mesures, doit être considéré comme observé -- pour autant que l'action civile ou pénale est intentée dans ce délai devant un tribunal compétent -- même lorsque les mesures en question n'ont été ordonnées ni par le tribunal qui a été saisi de l'action, ni dans le ressort de ce tribunal.

2° L'art. 54, chiffre 4, n'autorise des mesures conservatoires en prévision d'une représentation ou exécution et de l'usage qui sera fait à cette occasion de matériel déterminé que isous la forme d'une prestation de sûretés ou d'une saisie des recettes de la représentation ou exécution. Cette restriction est nécessaire, car sans elle les représentations ou exécutions légalement permises pourraient être directement empêchées. En stipulant d'une manière expresse que la représentation ou exécution ou l'utilisation de matériel ne peut être empêchée ni pour des motifs de droit d'auteur, ni pour >un (autre motif quelconque, le chiffre 4 s'oppose en particulier aussi à la tentative qui pourrait être faite de rendre impassible une représentation ou exécution pour des raisons touchant au droit à la, personnalité de l'auteur. Les délibérations de la commission d'experts ont démontré l'utilité d'une telle disposition. Une fois que la représentation ou exécution aura eu lieu, l'auteur pourra toujours porter plainte s'il s'estime lésé dans ses intérêts personnels; du fait de l'imperfection de l'audition.

L'art. 55 donne lieu aux observations suivantes: · 1° Les mesures prévues à l'art. 55 ne doivent s'appliquer, de même que la saisie (art. 53, chiffre 3), qu'aux moyens qui servent exclusivement erà la confection illicite d'exemplaires de l'oeuvre (1 alinéa, chiffre 1, lettre c); cette restriction répond à desi voeux émis à ce sujet au sein de la commission d'experts.

2° Au lieu de détruire les objets confisqués, il suffira,, suivant les circonstances, de les mettre simplement hors d'usage, par exemple en grattant la gravure du

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cliché; en pareils cas, la destruction proprement dite constituerait une mesure 'inutilement dure. La destruction ou la mise hors d'usage des moyens servant exclusivement à la confection illicite d'exemplaires! de l'oeuvre peut être ordonnée comme mesure préventive même en dehors de toute condamnation civile ou pénale (3e ialinéa).

3° Conformément à des propositions formulées dans la commission d'experts, le projet prescrit que le produit de la confiscation et de la réalisation doit être utilisé d'abord pour l'indemnisation de la personne lésée, ensuite pour le payement de l'amende s'il y en a une, enfin pour l'acquittement des frais judiciaires en cas de poursuites pénales.

L'art. 56 s'explique par la nature des objets en question.

L'art. 57 est rédigé de telle manière qu'il peut être appliqué aussi en cas d'acquittement.

L'art. 58 oblige expressément les cantons à se prêter réciproquement assistance dans les causes civiles ou pénales qui sont jugées d'après la présente loi. Une disposition analogue est déjà prévue à l'art. 150 de la loi fédérale sur l'organisation judiciaire fédérale, mais elle est restreinte -aux seules causes pénales qui sont jugées d'après les lois fédérales.

L'art. 59 a pour objet le droit d'édition territorialemeni; limité et tient compte d'un voeu formulé dans la pétition des sociétés de chant ou de musique de 1896/97.

1. Aux termes de l'alinéa 1 de l'art. 59, la mise en circulation des exemplaires d'une oeuvre, effectuée en dépit d'une limitation territoriale imposée par le titulaire du droit d'auteur, ne constitue pas une violation de ce droit. Il s'ensuit que des exemplaires de ce genre peuvent être utilisés notamment aussi pour une récitation, représentation, exécution ou exhibition publique sans que la disposition de l'art.

43, chiffre II, puisse être opposée à cette utilisation.

Le titulaire du droit d'auteur doit s'en prendre à celui qui a enfreint des obligations 'Contractuelles à son égard.

2. Cette dernière considération nous conduit à repousser également la proposition faite au sein de la commission d'experts et tendant à exclure la sanction pénale de la loi sur le droit d'auteur. Dans le cas d'une exclusion de ce genre, la mise en circulation d'exemplaires hors du territoire prévu con-

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tractuellement constituerait en principe une violation du droit d'auteur, et des poursuites civiles pourraient aussi être intentées au cas où ces exemplaires auraient été utilisés pour une récitation, représentation, exécution ou exhibition publique.

3. Il est nécessaire de faire une réserve en ce qui concerne les organes d'instruments servant à rendre l'oeuvrq sonore mécaniquement: Si des organes de ce genre, auxquels auraient été adaptées des oeuvres musicales provenant d'autres pays de l'Union, sont.mis en circulation dans le pays ;sans que l'adaptation soit, autorisée pour le territoire suisse en vertu, des articles 18 et 19 ou ensuite du consentement spontané du titulaire du droit d'auteur, il est conforme à l'art. 13 de la Convention revisée que cette mise en circulation soit poursuivable comme violation du droit d'auteur. Le 1er alinéa de l'art. 59 ne serait donc en fait pas applicable ,aux cas de ce genre; d'ailleurs, de'par son origine il ne vise pas les organes d'instruments mécaniques, ce qui fait que le 2e alinéa exclut simplement ces organes de l'application du 1er alinéa.

L'art. 60 doit empêcher qu'il ne soit payé deux fois une indemnité pour une seule et même récitation, représentation, exécution ou exhibition. Lorsque, par exemple, une troupe professionnelle, qui a été autorisée une fois pour toutes, contre payement d'une indemnité, à exécuter une oeuvre;, est engagée pour donner un concert, il n'est 'pas juste que la personne qui l'a engagée soit tenue, elle aussi, de payer pour ce concert une redevance au titulaire du droit d'auteur.

Art. 61. Le Tribunal fédéral s'est refusé à déclarer responsable comme auteur de l'infraction (organisateur) celui qui se borne à fournir le local pour une représentation ou exécution illicite (E. 0. 29, II, n° 40). Le .projet a admis ce principe en l'étendant encore à la récitation, l'exhibition et l'exposition de l'oeuvre. A cet égard, il y a lieu de remarquer ce qui suit: 1° L'art. 61 prévoit également l'exposition parce que celle-ci est soumise au droit d'auteur aussi longtemps que l'oeuvre n'est pas divulguée.

2° Nous n'avons pas donné suite à une proposition faite au sein de la commission d'experts et tendant à ce que la personne ayant fourni le local soit déclarée responsable non 'seulement lorsqu'elle connaît effectivement le caractère illicite de l'audition, mais' aussi lorsqu'elle aurait dû connaître ce caractère;; une telle responsabilité eût été exagérée.

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'3° La question de savoir si le local a été fourni grar tuitement ou à titre onéreux doit être sans influence quant à la responsabilité de la personne qui l'a fourni.

Contrairement à certaines opinions émises! au sein de la commission d'experts, nous estimons que l'art. 61 a sa raison d'être, et /cela notamment (aussi parcfe qu'il spécifie clairement que les hôteliers ou cafetiers ne peuvent pas ·être rendus responsables des auditions qui sont données dans leurs locaux par des troupes ambulantes jouant pour leur propre compte, pour autant qu'aucune complicité ne ;peut leur être imputée en vertu du 1er alinéa.

L'art. 62 tient compte de l'acquisition publique et de bonne foi des 'exemplaires de l'oeuvre qui sont exposés ou utilisés pour une récitation, représentation^, exécution ou exhibition publique. En ce. qui concerne les divers modes d'acquisition dégageant l'acquéreur de toute responsabilité, l'art., 62 s'est inspiré de l'art. 934, al. 2, du code civil. L'acquéreur devient responsable dès le moment où il apprend, entre l'époque de l'acquisition et celle de l'utilisation ou exposition des exemplaires, le caractère illicite de ces derniers ou de leur exposition et perd ainsi sa bonne foi.

Le Ier lavant-projet (art. 45) admettait que celui qui avait violé le droit d'auteur sur une oeuvre divulguée était ·exonéré de toute responsabilité s;il prouvait qu'il ne savait .pas que l'oeuvre fût protégée et qu'aucune faute ne lui était imputable du If'ait de son ignorance.

Cette disposition fut critiquée à la Ire session de la commission d'experts et l'on soutint notamment que l'existence de la protection devait être présumée; la personne accusée d'une infraction 'au droit d'auteur devrait donc être tenue de prouver qu'elle pouvait admettre d'une manière1 excusable que l'oeuvre n'était 'pas protégée. La plus grande partie des membres de la commission s'étant rangée à cette opinion, le IIe avant-projet (art. 49) modifia la disposition en conséquence.

Nous avons renoncé à édicter dans le projet une prescription dans ce sens: Les1 objections faites à l'art. 45 du Ier avant-projet ne sont pas sans fondement. On irait loin en «ffet en admettant que la personne accusée d'une infraction au droit d'auteur puisse se libérer de toute respon-

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sabilité en prouvant simplement qu'elle a cherché en vain & savoir si l'oeuvre était protégée ou non. Une disposition comme celle de l'art. 49 du IIe avant-projet parait superflue ainsi qu'on l'a fait remarquer avec raison à la IIe session de la commission d'experts; il résulte en effet des principes- généraux du droit que l'accusé qui réussit à prouver qu'aucune ïaute ne lui est imputable n'encourt aucune responsabilité civile ou pénale et qu'il peut tout au plus être tenu, à la restitution de son enrichissement éventuel.

V. Dispositions finales.

Ces dispositions traitent des rapports existants entre la nouvelle loi et le droit suisse actuel (art. 63 à 67 et 70), d'une part, et de ceux existants entre cette loi et les traités internationaux relatifs au droit d'auteur, d'autre part (art. 68 et 69); elles renferment en outre la disposition habituelle chargeant le Conseil fédéral de publier la loi et de fixer la date où elle entrera en vigueur (art. 71).

L'art. 63 établit le principe à observer pour l'application de la nouvelle loi aux oeuvres créées avant son entrée en.

vigueur: I. Pour le règlement de cette question, l'art. 18 de la Convention revislée concernant l'application de cette convention aux oeuvres créées avant sa mise en vigueur est d'une importance particulière; il résulte de cette disposition: 1° A teneur des alinéas 1 et 2 de l'art. 18, la Convention' sus visée est applicable ,à toutes les oeuvres dont la » durée de protection n'est expirée, au moment de son entrée en vigueur, ni dans le pays d'origine de l'oeuvre, ni dans le pays unioniste où la protection est; réclamée.

2° A moins que la durée de protection ne soit expirée',, les oeuvres provenant d'autres pays de l'Union doivent par conséquent être protégées en Suisse même si elles ne l'étaient pas à l'époque de l'entrée en vigueur de la Convention par suite par ex. de l'inexécution des formalités et conditions requises au pays d'origine ou dans la Convention de 1886/1896. En. particulier: a) 'Cette protection doit être accordée à partir de l'entrée en vigueur de la Convention! révisée même aux oeuvres qui, faute d'une réserve, ne jouissaient d'au-;

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cune protection contre leur exécution avant cette entrée en vigueur (art. 9, al. 3, de la Convention, de 1886); b) en vertu de l'art. 8 de la Convention révisée, le droit de traduction idoit être accorde à nouveau jusqu'à l'expiration de la durée générale de protection de l'oeuvre, -si ce droit était éteint au moment de la mise en vigueur de la Convention.

3° En vertu de l'alinéa 3 de l'art. 18 de la Convention révisée, des dispositions exceptionnelles sont admisisibles lorsqu'elles se rapportent à une utilisation d'oeuvres préalable à l'entrée en vigueur de la Convention, pour autant du moins que ces oeuvres n'étaient pas protégées avant cette époque.

II. La nouvelle loi ne pourrait dans tous les cas pas admettre pour les auteurs une .«rétroactivité» moins favorable que celle prévue par la Convention revisée, car alors seules les oeuvres d'origine suisse en pâtiraient. L'art. ,63 du projet favorise cependant les auteurs davantage que la Convention revisée eh ce sens qu'il déclare la nouvelle loi applicable à toutes les oeuvres sans exception créées avant son entrée en vigueur. Il s'ensuit que les oeuvres non protégées au moment de la mise en vigueur ide la nouvelle loi acquièrent la protection de cette dernière non iseulement si elles ont été jusqu'ici sans protection parce qu'une formalité nécessaire n'a pas été remplie, mais aussi si l'ancien délai de protection s'est écoulé mais pas celui 'qui résulte de la nouvelle loi.

Cette réglementation .a une importance pratique tout, particulièrement pour les oeuvres photographiques dont la protection, d'après la loi fédérale
partir de cet enregistrement (art. 9, litt, a et &). Ce régime est si défavorable par rapport à celui prévu par le projet qu'il est équitable d'accorder les avantages de la nouvelle loi même aux photographies qui ne sont pas protégées ,au moment de son entrée en vigueur, et cela quelleque -soit la cause de l'absence de protection.

Au reste, si la nouvelle loi n'était pas applicable aux oeuvres dont la durée de protection est expirée au momemt de sa mise en vigueur, on obtiendrait ce résultat singulierqu'une photographie, qui aurait été par ex. enregistrée conformément à l'ancienne loi et dont le délai de protection.

-676 ·aurait expiré au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle, ne serait plus du tout protégée alors qu'une autre photo. graphie; dont l'enregistrement aurait été omis sous le régime de l'ancienne loi pourrait, suivant les circonstances, être protégée.

Il y a lieu enfin d'observer .que l'art. 63, en posant la règle ci-dessus, reprend un principe déjà admis par la loi -actuelle (art. 19, al. 1).

III. A teneur de l'art. 63 («ou protégés seulemenjt en partie»), le droit de traduction ou le droit de représentation ou d'exécution reprend vie avec l'entrée en vigueur de la nouvelle loi au cas où ces droits auraient expiré, le premier par suite de la non-observation de l'art. 2, al. 3, de la loi fédérale de 1883, le dernier par suite du défaut d'une réserve.

Il résulte du chiffre I ci-dessus que cette réglementation est ·conforme à la Convention revisée.

IV. Les art. 66 à 69 du projet contiennent des dispositions exceptionnelles en faveur d'une utilisation licite de l'oeuvre qui a eu lieu avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi suisse ou de la Convention revisée.

V. Le 2e alinéa de l'art. 63 correspond à la disposition du 2" alinéa de l'art. 19 de la loi fédérale de 1883.

VI. Le projet ne reconnaissant plus le domicile suisse comme base de protection (comp. exposé de l'art. 5), on s'est demandé s'il ne faudrait pas prévoir une disposition en faveur des étrangers qui auraient été protégés, en raison de leur domicile en Suisse, sous le régime de la loi fédérale de 1883. Nous avons renoncé à édicter une disposition de ce genre, parce que nous avons trouvé que les motifs qui avaient engagé à abandonner la base de protection susvisée militaient également contre l'insertion d'une disposition transitoire.

L'art. 64- a de l'importance particulièrement pour les photographies.

La première [phrase de l'art. 20 de la loi fédérale du 23 avril 1883 pose déjà le principe que la prolongation de la durée de protection qui résulte de l'application de la nouvelle loi est accordée à l'auteur ou à ses héritiers. Cette disposition provient de ce que le législateur a considéré que le cessionnaire avait acquis son droit -seulement pour la durée de protection plus courte fixée par les prescriptions antérieures et n'avait par conséquent effectué son payement que sur la

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base de cette protection plus courte (rapport de la commission du Conseil national au sujet du projet de la loi fédérale de 1883, Feuille fédérale 1882, III, p. 227).

Cette considération sera juste en. général s'il s'agit» de la cession du droit sur une oeuvre déterminée,; c'est-à-dire s'il s'agit par ex. du contrat d'édition. Il en est autrement toutefois si l'auteur a été l'employé de son ayant cause et si l'oeuvre a été exécutée dans l'exercice de sa fonction d'employé, par exemple dans le cas de photographies faites par l'employé d'un "établissement photographique pour le compte de ce dernier. L'indemnité à payer pour une activité de ce genre sera calculée moins sur la durée de protection des oeuvres créées par l'employé que SUT la base d'autres facteurs d'ordre commercial, parmi lesquels notamment la capacité de l'employé.

Il y a lieu de tenir compte, en outre, des difficultés qui ' résulteraient pour l'employeur du fait qu'il aurait par ex. à "traiter avec d'anciens employés ayant quitté depuis longtemps son service, ou avec leurs héritiers, au sujet de la cession des 'droits résultant de la protection plus longue de la nouvelle loi.

L'art. 64 accorde en conséquence la prolongation du délai de protection non seulement aux héritiers^, mais aussi aux autres ayants cause, lorsque l'auteur a été l'employé de son ayant cause et qu'il a exécuté l'oeuvre en cette qualitél Suivant sa teneur1, la disposition est aussi applicable aux; oeuvres que les fonctionnaires et employés publics ont confectionnées dans l'exercice de leurs fonctions.

Le fait que le projet s'abstient de réglementer le droit ;sur les oeuvres créées par l'employé ne s'oppose pas à la disposition ci-dessus, attendu que cette dernière ne touche nullement à la question de la cause de la cession.

L'art. 65 réserve dans quelques cas l'application de l'ancienne loi et cela contrairement à la règle générale sur la « rétroactivité » de la nouvelle loi, contenue à l'art. 63.

Premier ·alinéa. La notion d© la « publication » dans ,1e .sens de la loi fédérale du 23 avril 1883 étante d'après l'interprétation du Tribunal fédéral, plus étroite que celle de la ^divulgation dans le sens du projet (voir l'exposé relatif ;à l'art. 10), .et étant donné, notamment, que la durée de protection a été limitée dans ce dernier d'une manière absolue, il pourrait arriver qu'une oeuvre, posthume selon l'an-

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cienne loi, soit non seulement protégée moins longtemps sous la nouvelle loi que sous l'ancienne, mais ne soit même plus du tout protégée alors qu'elle l'eût encore été sous l'ancienne loi. Il est donc équitable de stipuler que la loi fédérale de 1883 .(art. 2, al. 2) demeure applicable pour le calcul de la durée de protection des oeuvres posthumes lorsque ce délai n'est pas expiré au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Cette disposition paraît justifiée par égard aux contrats déjà qui, en vue de la durée de protection de l'ancienne loi,, pourraient avoir été conclus relativement au droit d'auteur sur des oeuvres de ce genre. La loi fédérale de 1883 tient d'ailleurs aussi compte de ila protection plus longue qui pourrait être accordée par des prescriptions légales antérieures (art.

20, 2e phrase).

A teneur de l'art. 3 de l'ancienne loi, l'oeuvre posthume doit être enregistrée pour être protégée. Si l'enregistrement n'a pas eu lieu dans le délai lutile, la condition prévue» à l'art. 65, al. 1, du projet pour calculer le délai de protection sur la base de l'ancienne loi (persistance de l'ancien délai au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi) fait alors défaut.

2e alinéa. Il est juste d'établir -- comme pour les oeuvres posthumes à l'alinéa 1 ci-dessus -- une réserve en ce qui concerne le délai spécial de protection prévu à l'art. 2", alinéa 2, (de la loi fédérale de 1883, pour les oeuvres publiées par la Confédération, par un canton, par une personne juridique ou par une société, .afin que ces communautés et associations puissent conserver la jouissance des droits acquis sous l'ancienne loi également après l'entrée en vigueur de la nouvelle; nous renvoyons à cet égard à nos observations!

touchant l'art. 8 du projet. Le délai spécial de protection prévu par l'ancienne loi en faveur desdites communautés et associations étant écoulé, c'est la nouvelle loi qui devra être appliquée en ce qui concerne la suite éventuelle de la protection et le droit sur l'oeuvre.

La loi fédérale de 1883 (art. 3) fait dépendre aussi de l'enregistrement la protection des oeuvres mentionnées au 2e alinéa de l'art. 65 du projet; il s'ensuit qu'à ces oeuvres s'applique également, par analogie, ce que nous avons dit au sujet de l'enregistrement des oeuvres posthumes.

3e alinéa. Nous avons observé à propos de l'art. 8 que le projet ne maintient pas les présomptions formulées aux art. 1, al. 3, 5, al. 2, 6 et 9, litt, c, de la loi fédérale de 1883.

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En conséquence, il paraît indiqué de sauvegarder expressément dans la nouvelle loi les droits qui ont été acquis par des tiers en vertu des dispositions susindiquées de l'ancienne loi.

Les art. 66 et 67 prévoient des exceptions à l'application de la nouvelle loi, et cela en faveur des actes qui tout en étant illicites au regard de cette dernière ont été commis néanmoins licitement avant son entrée en vigueur.

L'art. 66 reprend, en l'étendant comme l'exige la disposition du projet, la règle contenue à l'alinéa 3 de l'art.

19 de la loi fédérale du 23 avril 1883. Relativement au 2e alinéa de l'art. 66, il y a lieu de remarquer, en particulier, que l'utilisation -- pour une récitation, représentation, exécution ou exhibition publique -- des exemplaires qu'on met en circulation sans observer les conditions prescrites à cet alinéa, tombe logiquement sous le coup de l'art. 43, chiffre II, du projet. Quant au 3e alinéa de l'art. 66, la disposition qu'il contient a paru utile, -- ce qui a d'ailleurs été confirmé .aussi au sein de la commission en réponse à une proposition ten'dant à la suppression de cet alinéa.

L'art. 67 règle-, en ce qui concerne l'adaptation "des oeuvres musicales à des instruments mécaniques1, les rapports de la nouvelle loi suisse avec l'ancienne suivant des principes analogues à ceux que prévoit l'art. 13, alinéas 3 et 4, de la Convention revisée pour la rétroactivité de cette, dernière.

L'art. 67 dispose en conséquence: a) que les oeuvres qui ont été adaptées d'une manière licite conformément à l'art. 11, C, chiffre 11, de la loi fédérale du 23 avril 1883, peuvent, également sous: la nouvelle loi, être adaptées à des organes d'instruments mécaniques et être exécutées publiquement au moyen de ces derniers; b) que les organes peuvent être mis en circulation dans les limites prévues aussi pour la licence obligatoire (art. 18).

On a proposé au sein de la commission d'experts de renoncer à la mention de l'art. 11, C, chiffre 11, de l'ancienne loi, c'est-à-dire d'appliquer sans autre l'art. 67 à toutes les .«oeuvres adaptées antérieurement à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, la portée de; la disposition exceptionnelle de l'ancienne loi étant très incertaine. Nous trouvons toutefois .qu'il serait injustifiable en principe de ne pasi protéger

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contre l'adaptation une oeuvre qui aurait été adaptée peutêtre illicitement sous l'ancienne loi, et nous estimons, d'un autre côté, flue l'appréciation de la portée, de l'ancienne disposition, doit être réservée aux tribunaux.

Les art. 68 et 69 s'occupent des rapports de la nouvelle loi avec le droit conventionnel international.

L'art. 68 règle ces rapports en. ce qui concerne l'adaptation des oeuvres musicales à des instruments mécaniques et fait .ainsi suite à l'art. 67.

Le premier alinéa de l'art. 68 constate tout d'abord que les ,art. 18 à 20 du projet s'appliquent aussi aux oeuvres provenant des autres pays de l'Union. Il a paru utile de prévoir expressément cette disposition, vu la teneur de l'art. 13,.

al. 2, de la Convention revisée.

Le 2e alinéa complète l'art. 67.

Le chiffre 3 du Protocole de clôture de la Convention de Berne du 9 septembre 1886 déclarait licites la fabrication et la vente des instruments servant à reproduire mécaniquement des «airs de musique» protégés. Contrairement à cette disposition, l'alinéa 1 de l'art. 13 de la Convention reviséeaccorde aux auteurs unionistes le droit exclusif d'adapter des oeuvres musicales à des instruments mécaniques et de les exécuter au moyen de ces derniers. Le 3e alinéa de l'art. 13 de la Convention revisée déclare le 1er alinéa non applicable, dans un pays unioniste, aux oeuvres qui ont été adaptées licitement, dans ce pays, à des instruments mécaniques avant l'entrée en vigueur de la Convention revisée. Il résulte de cette exception les deux conséquences suivantes: 1° Tant qu'un pays de l'Union n'a pas adhéré à la Convention revisée et spécialement à son art. 13,, la disposition du chiffre 3 du Protocole de clôture de 1886 est applicable dans les rapports entre ce pays et la Suisse (comp. ;art. 27 de la Convention revisée), d'où il résulte que les oeuvres musicales provenant de ce pays peuvent être librement adaptées en Suisse à des.

instruments mécaniques.

2° 8i le pays unioniste adhère à la Convention e révisée et spécialement à son article 13, il résulte du 3 alinéa de cet article que les oeuvres qui proviennent de ce pays et qui, avant l'adhésion de celui-ci -- c'est-à-dire avant que la Convention revisée soit entrée en vigueur dans les rapports entre la Suisse et ce pays --, onrt été.

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adaptées en Suisse à des instruments mécaniques conformément au chiffre 3 du Protocole de clôture de1886, partant licitement, peuvent continuer à être librement adaptées en Suisse.

Afin d'éviter tout doute possible sur la question, le 2e' alinéa de l'art. 68 dispose expressément que le droit d'auteur sur les oeuvres susvisées est soumis aux mêmes .restrictions; qu'à l'art. 67, et cela en particulier aussi après l'entrée en/, vigueur de la nouvelle loi suisse.

Art. 69. L'article 14 de la Convention de Berne de 1886déclare que cette dernière s'applique à toutes les oeuvresqui, au moment de son entrée en vigueur, ne sont pas encore, tombées dans le domaine public dans leur pays d'origine..

Les oeuvres provenant d'un pays unioniste qui, avant l'adhésion de ce dernier, à la Convention de Berne de 1886, avaient pu être utilisées librement en Suisse faute d'un traité spéciaL entre ce pays et la Suisse, devaient être protégées à partir de cette adhésion.

L'Acte additionnel (de 1896 a étendu la disposition cidessus au droit exclusif de traduction élargi par lui, ainsi, qu'aux nouvelles accessions à l'Union (art. 2, chiffre II): Si le droit de traduction sur une oeuvre était éteint à teneur) de la Convention de 1886, ce droit pouvait ainsi reprendre vie,, .suivant le cas, au moment de l'entrée en vigueur de l'Acteadditionnel.

La Convention revisée pose, elle aussi, le principe de l'extension de la protection aux oeuvres qui existaient avant son entrée en vigueur (comp. l'exposé concernant l'art. 63 du": projet) et proclame l'application de ce principe aux nouvelles accessions à l'Union (art. 18, al. 4).

La Convention de 1886 déjà (Protocole de clôture, chiffre4), (puis la Convention revisée (art. 18, al. 3) réservent, pour leur application aux oeuvres susvisées, soit des conventions; spéciales entre pays unionistes, soit des dispositions légales à; élaborer par chacun d'eux («les pays respectifs régleront . . . . »), dans le but de tenir compte des cas. dans lesquelsune oeuvre protégée par la nouvelle Convention aurait pu êtrelibrement utilisée jusqu'ici. Telle qu'elle est formulée, cette réserve peut être interprétée en ce sens que les pays unionistes?

ne peuvent. déroger au principe de l'application stricte de la Convention aux oeuvres déjà existantes que lorsqu'une^ dérogation de ce genre est expressément prévue. La Suisse n'a-,

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pas encore de prescriptions spéciales sur ce point. Pour éviter d'emblée toute interprétation dans le sens mentionné ci-dessus, il est indiqué d'établir expressément que les dispositions prévues aux (alinéas 1 et 2 de l'art. 66 du projet s'appliquent par analogie aux oeuvres provenant des autres pays de l'Union.

Les art.|70 et5-71 ne donnent lieu à aucune observation.

Agréez, monsieur le président et messieurs, l'assurance de notre considération distinguée.

Berne, le 9 juillet 1918.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, CALONDER.

Le vice-chancelier, DAVID.

(Projet.)

Loi fédérale concernant

le droit d'auteur sur les oeuvres littéraires et artistiques.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

'.

C O N F É D É R A T I O N SUISSE, Se fondant sur l'art. 64 de la constitution fédérale; Vu le message du Conseil fédéral da 9 juillet 1918, décrète :

I. Dispositions générales.

Article premier.

protéLa présente loi protège les oeuvres littéraires et ]I. Oeuvres gées.

1.

Oeuvres littéartistiques.

] raires et L'expression « oeuvres littéraires et artistiques » com- artistiques.

prend notamment: les oeuvres des belles-lettres,, les oeuvres scientifiques, les cartes géographiques et topographiques ou autres ouvrages figuratifs de nature scientifique ou technique, y compris les ouvrages plastiques de nature scientifique, les oeuvres chorégraphiques et les pantomimes, les arrangements scéniques fixés par la cinématographie ou par un procédé analogue et représentant une création originale; les oeuvres musicales; les oeuvres de dessin, de peinture, de sculpture, de xylographie, de gravure, de lithographie et d'architecture.

Les oeuvres littéraires et musicales sont protégées même lorsqu'elles ne sont pas écrites ou fixées d'une autre manière, à moins qu'elles' ne puissent, suivant leur nature, ne prendre naissance qu'ensuite d'une fixation quelconque.

Art. 2.

photoLa présente loi protège les oeuvres photographiques. 2. Oeuvres graphiques.

feuille fédérale suisse. 70' année. Vol. III.

47

684

3. Reproductions.

Les oeuvres obtenues par un procédé analogue à la photographie isont comprises parmi les oeuvres photographiques.

Art. 3.

Sont protégées comme des oeuvres originales: 1° les traductions; 2° toute autre reproduction d'une oeuvre, pour autant qu'elle a le caractère d'une oeuvre littéraire, artistique où photographique originale, y compris la reproduction obtenue par la cinématographie ou par un procédé analogue.

Lorsqu'une oeuvre est adaptée au moyen de l'intervention personnelle d'un exécutant à des organes d'instruments servant à la rendre sonore mécaniquement, l'audition ainsi fixée est considérée comme une reproduction protégée par la loi. Il en est de même de l'adaptation se faisant par le perforage, l'estampage, l'apposition de pointes ou par tout autre procédé analogue, pour autant que cette adaptation peut être envisagée comme une production artistique.

Demeure réservé, dans tous les cas, le droit du titulaire du droit d'auteur sur l'oeuvre originale.

Art. 4.

Le dépôt comme dessin ou modèle industriel d'une i. Rapports avec la protection des oeuvre -- achevée ou à l'état de projet -- tombant sous dessins et modèles, le coup de la présente loi n'exclut pas la protection accordée par cette dernière.

II. Auteurs protégés.

Art. 5.

-Sont /protégées par la présente loi: 1° toutes les oeuvres de citoyens suisses éditées en Suisse ou à l'étranger, ou non éditées; 2° les oeuvres d'auteurs étrangers éditées pour la première fois en Suisse.

Les oeuvres d'auteurs étrangers, éditées pour la première fois à l'étranger, ne jouissent de la protection de la présente loi que si le pays dans lequel l'édition a eu lieu accorde aux citoyens suisses, pour leurs oeuvres éditées la première fois en Suisse, une protection sem-

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blable à celle octroyée par la présente loi, et cela seulement dans la -mesure où cette protection est accordée dans ce pays étranger. Le Conseil fédéral établit si et dans quelle mesure un pays remplit la condition ci-dessus; son arrêté est obligatoire pour les tribunaux.

Les dispositions des traités internationaux demeurent réservées.

Art. 6. , Les personnes qui ont créé une oeuvre commune III. Co-atiteurs.

de telle façon que leurs travaux individuels ne peuvent être disjoints, possèdent comme collaborateurs un droit d'auteur commun sur l'oeuvre.

Il ne peut être disposé du droit d'auteur sur l'oeuvre commune que 'par tous les collaborateurs ensemble. Toutefois, chacun des collaborateurs est autorisé à poursuivre les atteintes' au droit commun et à disposer de sa part.

Art. 7.

Est réputé auteur de l'oeuvre jusqu'à preuve du IV.dePrésomption la qualité contraire : d'auteur.

Oeuvres anoet pseu1° la personne physique dont le nom civil est in- nymes donymes.

diqué sur les 'exemplaires de l'oeuvre en la manière usitée pour la désignation de l'auteur; : pour les oeuvres des arts figuratifs et de la photographie, l'apposition d'un signe distinctif de l'auteur doit être assimilée à l'apposition du .

nom civil; 2° la personne physique qui', lors de la récitation, : de la représentation, 'de l'exécution ou de l'exhibition de l'oeuvre en public, ou lors de l'exposition publique d'exemplaires de l'oeuvre, est désignée par son nom civil comme auteur.

Pour les oeuvres éditées dont l'auteur n'est pas indiqué conformément .aux dispositions des chiffres 1 et 2 ci-dessus, il appartient au publicateur ou, si celuici .n'est pas désigné, à l'éditeur de sauvegarder les droits de l'auteur. Le publicateur, ou l'éditeur si celuici est seul désigne, est réputé ayant cause de l'auteur jusqu'à preuve du contraire.

686

V. Cessibilité du droit d'auteur.

VI. Poursuite du droit d'auteur.

VII. DiviügaHon et édition d'une oeuvre.

Art. 8.

Le droit d'auteur est susceptible de transfert et passe à l'héritier.

Le transfert d'un droit compris dans le droit d'auteur n'implique pas, sauf convention contraire, le transfert d'autres droits partiels. A moins que le contraire n'ait été convenu, le transfert du droit de reproduire une oeuvre, en particulier, n'entraîne pas le transfert des droits partiels compris dans ce droit et énumérés spécialement.

Sauf convention contraire, le transfert de la propriété de l'exemplaire d'une oeuvre n'entraîne pas le transfert du droit d'auteurs et cela même pas lorsqu'il s'agit de l'exemplaire original.

Art. 9.

Le droit d'auteur ne peut pas faire l'objet d'une poursuite dirigée contre l'auteur ou contre ses héritiers tant que l'oeuvre n'est pas divulguée; tout autre ayant cause ne peut être poursuivi que si l'auteur ou ses héritiers ont aliéné le droit d'auteur dans le but de divulguer l'oeuvre.

' Même après la divulgation de l'oeuvre,1, le droit d'auteur ne peut faire l'objet d'une poursuite dirigée contre l'auteur ou contre ses héritiers que dans la mesure où ces personnes ont déjà exercé ce droit. La poursuite ayant pour objet le droit de représentation ou d'exécution d'une oeuvre éditée peut être exercée sans autre aussi contre ces personnes.

Art. 10.

, Une oeuvre est divulguée dans le sens de la présente loi sitôt qu'elle a été rendue publique par un acte accompli avec le consentement du titulaire du droit d'auteur.

Une oeuvre n'est éditée dans le sens de la présente loi que lorsque l'édition a eu lieu avec le consentement du titulaire du droit d'auteur.

Une oeuvre est divulguée ou éditée dans le sens de la présente loi même lorsque la divulgation ou l'édition ,a eu lieu à l'étranger.

687

IL Etendue du droit d'auteur.

Art. 11.

Le droit d'auteur garanti par la présente loi con- I. Définition de l'étendue du siste dans le droit exclusif: droit d'auteur.

1. Définition posi1° de reproduire l'oeuvre; tive.

2° de vendre, mettre en vente ou mettre autrement a. Disposition générale.

en circulation des exemplaires de l'oeuvre; 3° de réciter, représenter, exécuter ou exhiber l'oeuvre publiquement; 4° d'exposer publiquement des exemplaires de l'oeuvre ou de rendre l'oeuvre publique d'une autre manière quelconque, tant que celle-ci n'est pas divulguée.

Art. 12.

partiels Est compris dans le droit exclusif de reproduction 6. Droits contenus dans le droit de transformer l'oeuvre, en particulieir: le droit de reproduction.

an. Transfor1° de traduire l'oeuvre; mation.

2° d'adapter l'oeuvre à des organes d'instruments servant à la rendre sonore mécaniquement; 3° de reproduire l'oeuvre par la cinématographie ou par un procédé analogue.

Les organes mentionnés au chiffre 2 ci-dessus doivent être considérés comme des exemplaires de l'oeuvre qui leur est adaptée. Art. 13.

Exécution de Le droit exclusif de reproduire les projets d'ou- b&.projets de cervrages plastiques de nature scientifique, d'oeuvres plas- taines oeuvres.

tiques des arts figuratifs ou d'oeuvres d'architecture, comprend aussi le droit de les exécuter.

Art. 14.

Délimitations Le droit d'auteur sur une oeuvre musicale ne com- 2. négatives.

prend pas le droit d'utiliser des mélodies de l'oeuvre a. Utilisation de.

lorsque cette utilisation donne lieu à la création d'une mélodies.

nouvelle oeuvre musicale originale.

Art. 15.

Le titulaire du droit d'auteur sur une oeuvre photographique ne peut pas empêcher une autre personne de prendre une nouvelle photographie de l'objet photo-

b. Nouvelle photo-raphie d'objetséjà photographiés.

f

688

graphie, et cela même lorsque cette dernière a été prise du même endroit et, d'une façon générale, dans les mêmes conditions que la première photographie.

Art. 16.

II. Restrictions du La représentation ou exécution publique d'une droit d'auteur.

1. Représentation oeuvre éditée peut être organisée en tout temps moyenou exécution nant le paiement d'une indemnité équitable au titud'une oeuvre éditée.

laire du droit de représentation ou d'exécution.

a. Principe (licence obliSi les parties n'arrivent pas à s'entendre au sujet gatoire).

S. Sûretés.

2. Adaptation d'oeuvres musicales il des instruments mécaniques.

a. Principe (licence obligatoire).

de l'indemnité, le juge en fixe le montant en tenant équitablement compte de toutes les circonstances concomitantes.

Art. 17.

Pour que la représentation ou exécution soit licite, il suffit que l'indemnité revenant au titulaire du droit de représentation ou d'exécution ait été garantie par des sûretés fournies avant la représentation ou exécution.

Le montant et la nature des sûretés à fournir et, le cas échéant, le lieu où celles-ci doivent être déposées, sont fixés par le juge du lieu de la représentation ou exécution sur la demande de l'organisateur de cette manifestation. Avant de se prononcer, le juge peut entendre le titulaire du droit de représentation ou d'exécution, à condition toutefois que la représentation ou exécution puisse avoir lieu à l'époque fixée.

Si le titulaire du droit de représentation ou d'exécution laisse s'écouler une année depuis la représentation ou exécution sans intenter action en vue de la fixation de l'indemnité, les sûretés fournies cessent de déployer leurs effets; celles qui ont été fournies sous forme de dépôts d'argent ou d'autres objets quelconques doivent dans ce cas être restituées au déposant.

Art. 18.

Si l'auteur d'une oeuvre musicale ou ses héritiers, ont autorisé un tiers à adapter l'oeuvre à des organes d'instruments servant à la rendre sonore mécaniquement, toute autre personne ayant un établissement industriel en Suisse peut demander,, après l'édition de l'oeuvre, qu'une autorisation d'adaptation lui soit aussi

689

accordée contre paiement d'une indemnité équitable.

Pour que ce droit de demander une autorisation d'adaptation existe, il n'est pas nécessaire que la première adaptation consentie par l'auteur ou ses héritiers ait fait l'objet d'une autorisation spéciale; il suffit que l'autorisation résulte des circonstances, par exemple du transfert total du droit d'auteur. L'autorisation doit être demandée à l'auteur ou à ses héritiers ou -- dans le cas où le droit d'adapter l'oeuvre à des organes d'instruments mécaniques a été transféré sans restriction à un tiers -- à cet ayant cause; elle n'a d'effet que pour la (mise en circulation en Suisse desdits organes et pour l'exportation dans les pays où l'oeuvre ne jouit d'aucune protection contre une telle adaptation.

Le Conseil fédéral peut déclarer l'obligation d'avoir un établissement industriel en Suisse inapplicable à l'égard des ressortissants des pays qui accordent la réciprocité aux Suisses; il peut en outre ordonner que l'autorisation sortira ses effets pour l'exportation dans ces pays, si et dans la mesure où l'exportateur y a le droit d'adapter une oeuvre musicale à des organes d'instruments mécaniques.

Si l'auteur du texte accompagnant une oeuvre musicale, ou ses héritiers, ont autorisé un tiers à adapter l'oeuvre à des organes «l'instrumenta' mécaniques, on appliquera par analogie les dispositions des deux alinéas qui précèdent. La personne à laquelle il appartient d'accorder l'autorisation d'adapter l'oeuvre musicale est toutefois en droit,, vis-à-vis des tiers, d'autoriser également l'adaptation du texte. Il n'est rien changé de ce fait aux rapports juridiques existant entre cette personne et le titulaire du droit d'auteur BUT le texte.

Art. 19.

Décision judiSi les parties n'arrivent pas à s'entendre au sujet 'î». ciaire.

de l'autorisation d'adapter une oeuvre à des organes For.

d'instruments mécaniques, le juge décide de la cause en tenant équitablement compte de toutes les circonstances concomitantes.

Si le défendeur n'a pas de domicile en Suisse, les actions tendant à obtenir l'autorisation d'adapter une oeuvre à des organes d'instruments mécaniques peuvent être portées devant le tribunal à désigner, en vertu de

690

l'art. 46, comme instance unique du canton dans lequel le demandeur possède un établissement industriel; si le demandeur ne possède aucun établissement industriel en Suisse, son action peut alors être portée devant l'instance unique du canton dans lequel se trouve 1© siège du Bureau suisse de la propriété intellectuelle.

c. Représentation ou exécution an moyen d'instruments mécaniques.

III. Exceptions au droit dfauteur.

1. Lois, etc.

2. Reproduction.

a. Four l'usage privé,

i. De discours tenus dans des discussions publiques.

c. D'articles de journaux.

Art. 20.

Lorsque l'adaptation d'une oeuvre à des organes d'instruments mécaniques est licite conformément à l'art. 18, cette oeuvre peut également être représentée 'ou exécutée -publiquement au moyen desdits organes sans autre permission. Il en est de même lorsque l'uno des personnes auxquelles il appartient d'accorder l'autorisation d'adaptation conformément à l'art. 18, alinéas 1 et 3, a permis volontairement cette dernière.

Art. 21.

Les lois, les décisions et délibérations des autorités, ainsi que les rapports des administrations publiques sont exclus de la protection de la présente loi.

Art. 22.

Sauf en ce qui concerne la construction des oeuvres d'architecture, la reproduction d'une oeuvre est licite lorsqu'elle est destinée exclusivement à l'usage personnel et privé de celui qui y procède. La reproduction ne doit pas être utilisée dans un but de lucre.

Art. 23.

Il est licite de reproduire dans les comptes rendus de discussions publiques les discours qui y ont été prononcés.

Art. 24.

Est licite la reproduction dans les journaux des articles publiés dans d'autres journaux -- à l'exclusion des romans-feuilletons et des nouvelles -- pour autant que cette reproduction n'est pas expressément interdite; la source utilisée doit être clairement indiquée.

Les nouvelles du jour et les faits divers ayant le caractère de simples informations de presse ne sont pas protégés par la présente loi.

691

Art. 25.

D'oeuvres littéIl est licite de reproduire une oeuvre littéraire <ä. raires ou musiou musicale éditée de peu d'étendue, ou des parties cales dans des dissertations détachées d'une oeuvre littéraire ou musicale éditée,) scientifiques.

dans des dissertations d'histoire littéraire ou de critique ou autres dissertations scientifiques, pour autant que cette reproduction sert à expliquer le texte de la dissertation. La source utilisée doit être clairement indiquée.

Art. 26.

littéIl est licite de reproduire telle quelle une oeuvre 'e. D'oeuvres raires dans des littéraire éditée de peu d'étendue ou des parties dé- recueils scotachées d'une oeuvre littéraire éditée, dans les recueils laires. · destinés à l'enseignement scolaire. La source utilisée doit être clairement indiquée.

Art. 27.

Celui qui veut exécuter publiquement une oeuvre ·f, musicale ou dramatique éditée est autorisé à la reproduire ou à la faire reproduire, en vue de cette exécution, sous une forme différant de l'original, mais cela seulement si et dans la mesure où il ne peut se procurer dans le commerce des exemplaires appropriés de l'oeuvre et s'il a obtenu un exemplaire complet de cette dernière du titulaire du droit d'auteur.

Enyuedel'exécution de l'oeuvre.

Art. 28.

Est licite la reproduction de l'image commandée g. De l'image commandée d'une personne lorsqu'elle est faite par la personne d'une personne.

représentée, par son conjoint, par ses descendants ou par ses parents ou leurs) descendants, ou lorsqu'elle est faite sur l'ordre de ces personnes.

La personne représentée peut autoriser la reproduction de l'image commandée dans des journaux, revues ou autres publications ne constituant pas une édition d'exemplaires isolés de la reproduction, et cela sans qu'il soit besoin de demander le consentement du titulaire du droit d'auteur. Si la personne représentée est décédée ou si elle est empêchée d'autoriser la reproduction, son conjoint, ses enfants, ses parents ou ses frères et soeurs peuvent le faire à sa place; toutefois, les personnes appartenant à l'un des groupes

«92

susmentionnés ne sont en droit d'accorder l'autorisation demandée que si celles du groupe qui précède en sont empêchées.

A. D'oeuyres artistiques ou photographiques.

3. Utilisations de reproductions licites.

Art. 29.

Est licite : 1° la reproduction, dans un ouvrage destiné à l'enseignement scolaire, d'oeuvres divulguées appartenant aux arts figuratifs ou à la photographie, pour autant qu'elle sert à expliquer le texte de l'ouvrage scolaire; la source utilisée doit être clairement indiquée; 2° la reproduction d'oeuvres des arts figuratifs ou de la photographie faite d'après des exemplaires se trouvant à demeure dans une collection publique, pour autant qu'elle a lieu dans les catalogues édités par l'administration de la collection; 3° la reproduction d'oeuvres des arts figuratifs ou de la photographie, faite d'après des exemplaires se trouvant à demeure dans des rues ou sur des voies et places publiques; toutefois, il est illicite de confectionner à nouveau une oeuvre d'architecture; en outre, la reproduction ne doit ni - être plastique ni pouvoir être utilisée dans le même but que l'exemplaire reproduit.

Art. 30.

Les exemplaires des reproductions qui sont licites conformément aux articles 23, 24, 25, 26, 28, alinéa 2, et 29, peuvent être mis en circulation.

Sont en outre licites: 1° la récitation publique ou la représentation on exécution publique des oeuvres ou parties d'oeuvre reproduites d'une manière licite conformément à l'art. 25, à condition que cette récitation ou cette représentation ou exécution ait lieu conjointement avec la récitation publique de la dissertation renfermant la reproduction ; 2° l'exhibition publique d'oeuvres dont la reproduction est licite conformément à l'art. 29, chiffre 3,

693

;

à (condition qu'elle soit faite au moyen de la reproduction.

Art. 31.

En cas d'exécution publique d'oeuvres musicales 4. Reproduction du texte avec texte, la reproduction du texte et la remise, d'oeuvres musicales en Tue de gratuite ou non, d'exemplaires de cette reproduction sa remise aux aux auditeurs de l'exécution sont licites pour autant auditeurs.

qu'il s'agit d'oeuvres littéraires éditées de petite dimension ou de petits fragments d'une oeuvre littéraire éditée.

L'exception au droit d'auteur prévue au premier alinéa n'est pas applicable aux livrets d'opéra ou aux autres oeuvres littéraires qui, suivant leur nature, sont destinées à être mises en musique.

Art. 32.

Sont licites les représentations ou exécutions pu- 5. Représentations ou exécutions bliques d'oeuvres éditées auxquelles procèdent les. so- par des sociétés ciétés d'amateurs sans le concours de forces étrangères, d'amateurs.

à la condition qu'aucun des exécutants, à part celui qui dirige, ne soit rétribué.

Art. 33.

reEst licite la récitation, représentation, exécution 6. Récitation, présentation, ou exhibition publique d'une oeuvre' éditée lorsque exécution, ou exhibition de l'audition ou exhibition ne poursuit pas un but de lucre, l'oeuvre sans but de lucre.

en particulier lorsque le produit de celle-ci est entièrement affecté à un but de bienfaisance.

Il y a aussi but de lucre lorsque l'un des exécutants reçoit une rétribution.

Art. 34.

L'exemplaire d'une oeuvre non divulguée des arts 7. Exposition figuratifs ou de la photographie, confectionné et mis d'exemplaires d'oeuvres non en circulation d'une manière licite, peut, même sans divulguées.

1 l'autorisation du titulaire du droit d'auteur, être exposé publiquement lorsque cette autorisation ne peut être demandée.

Art. 35.

Autorisation · S'il s'agit d'une représentation ou exécution pu- IV.d'exécution la musique blique d'une oeuvre musicale avec texte non édité, le pour titulaire du droit de représentation ou d'exécution sur avec texte.

694

l'oeuvre musicale est en droit, vis-à-vis des tiers, d'accorder l'autorisation de représentation ou d'exécution en ce qui concerne le texte. Si le texte est édité et si les articles 16 et 17 sont par conséquent applicables à lareprésentation ou exécution publique de ce texte, le titulaire du droit de représentation ou d'exécution sur l'oeuvre musicale sera considéré, dans les cas tombant sous le coup desdits articles 16 et 17, comme représentant le titulaire du droit d'auteur sur le texte visà-vis des tiers.

Les dispositions de l'alinéa qui précède ne touchent pas aux rapports juridiques existant entre le titulaire idu droit de représentation ou d'exécution sur l'oeuvre musicale et le titulaire du droit d'auteur sur le texte.

Art. 36.

V. Droit à la perA moins que le contraire n'ait été convenu, les sonnalité en ce qui concerne exemplaires de l'image commandée d'une personne ne rimage commandée.

peuvent ,être mis en circulation ni être rendus publics sans l'autorisation de la personne représentée.

Si la personne représentée est décédée ou si l'autorisation ne peut lui être demandée, cette dernière devra être requise de son conjoint, de ses enfants, de ses parents ou de ses frères et soeurs; toutefois, les personnes appartenant à l'un des groupes susmentionnés ne seront en droit d'accorder l'autorisation -que si celles do groupe précédent en sont empêchées.

La disposition qui précède n'est pas applicable aux actes qui sont accomplis, par les autorités ou sur leur ordre, dans l'intérêt de la justice pénale et par lesquels l'image commandée d'une personne est mise en circulation ou rendue publique.

III. Dnrée de la protection.

I. Oeuvres divulguées du vivant de l'auteur.

1. Oeuvres dont l'auteur est désigné en la manière prévue par la loi.

2. Oeuvres anonynres et pseudonymes.

Art. 37.

La protection d'une oeuvre divulguée du vivant de l'auteur avec l'indication de ce dernier en la manière prévue par la loi, prend fin trente ans après la mort de l'auteur.

Art. 38.

Si, lors de la divulgation de l'oeuvre, l'auteur n'a

·

695

pas été indiqué en la manière prévue par la loi, la protection prend fin trente ans après cette divulgation. Si dans ce délai l'auteur est indiqué en la manière prévue par la loi,, la protection prend fin trente ans après la mort de l'auteur.

Art. 39.

Oeuvres La protection d'une oeuvre divulguée seulement II.posthumes.

après la mort de l'auteur prend fin trente ans après la divulgation de l'oeuvre.

Toutefois, la protection prendra fin dans tous les cas soixante ans après la mort de l'auteur,, et cela même si à l'expiration de ce délai il ne s'est pas encore écoulé trente ans depuis la divulgation de l'oeuvre ou si l'oeuvre n'a pas été divulguée du tout.

Art. 40.

Si l'époque de la mort de l'auteur fait règle pour III. Co-auteurs.

le calcul de la durée de la protection d'une oeuvre issue d'une collaboration, l'expiration de la protection sera calculée à partir de la mort du collaborateur décédé en dernier lieu.

Art. 41.

Oeuvres se Lorsqu'une oeuvre se compose de plusieurs parties IV.composant de plusieurs parindépendantes qui ne sont pas divulguées en même ties indépentemps, chaque partie est considérée comme une oeuvre dantes ou divulen livraispéciale pour le calcul de la durée de protection. guées sons.

Si la divulgation d'une oeuvre s'opère sous forme de livraisons, c'est la divulgation de la dernier© livraison qui fait règle pour le calcul de la durée de protection de l'oeuvre.

Art. 42.

de L'expiration de la protection légale se compte à V.laExpiration protection : générale partir du 31 décembre de l'année dans laquelle s'est règle pour sa déterproduit l'événement qui sert de base au calcul.

mination.

IV. Sanction civile et pénale.

Art. 43.

Peut être poursuivi civilement et pénalement pour violation du droit d'auteur:

I. Définition objective des violations de la loi.

696 1. Violations du droit d'auteur.

2. Autres violations.

I. celui qui, slans y être autorisé par le titulaire du droit d'auteur ou en vertu de la loi, 1° reproduit une oeuvre, 2° vend, met en vente ou met autrement en circulation des exemplaires d'une oeuvre, 3° organise la récitation, la représentation, l'exécution ou l'exhibition publiques d'une oeuvre, 4° expose publiquement des exemplaires d'une oeuvre ou rend cette dernière publique d'une autre manière quelconque, et cela avant sa divulgation; II. celui qui pour réciter, représenter, exécuter ou exhiber une oeuvre publiquemtent, en utilise des exemplaires confectionnés ou mis en circulation d'une manière illicite conformément au chiffrel; III. celui qui met en circulation des exemplaires d'une reproduction faite en conformité de l'art. 22, ou utilise des exemplaires de ce genre pour une récitation, représentation, exécution ou exhibition publique de l'oeuvre reproduite, ou rend lareproduction publique en en exposant des exemplaires ou en agissant d'une autre manière quelconque, ou qui utilise la reproduction dans un but de lucre même sans commettre un des actes mentionnés ci-dessus.

Art. 44.

Peut être poursuivi civilement et pénalement: 1° celui qui appose, d'une manière à induire en erreur, le nom civil, le signe distinctif ou le pseudonyme de l'auteur d'une oeuvre sur desi exemplaires d'une reproduction de celle-ci n'émanant pas de l'auteur lui-même ou sur des exemplaires d'une oeuvre originale confectionnée par une autre personne; 2° celui qui, dans les cas prévus par la loi, n'indique pas clairement la source utilisée; 3° celui qui met en circulation ou rend publics des exemplaires de l'image commandée d'une personne sans en avoir reçu, dans les cas prévus par la loi, l'autorisation de la personne re-

697

présentée ou de son conjoint, de ses enfants, de ses parents ou de ses frères et soeurs.

Art. 45.

Poursuites Les dispositions générales du code suisse des obli- II.civiles.

,, gations (loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le 1. Dispositions réla responcode civil suisse) sont applicables en ce qui concerne la glant sabilité.

responsabilité civile découlant d'une des infractions prévues aux articles 43 ou 44. Les dispositions du code civil suisse concernant la protection de la personnalité sont en outre applicables pour la répression des infractions prévues par l'art. 44.

Art. 46.

Les cantons désignent une instance cantonale unique chargée de juger les contestations civiles se rapportant à la présente loi.

Le recours au Tribunal fédéral est recevable sans égard à la valeur de l'objet du litige.

2. Procédure.

Art. 47.

III. Poursuites Est puni pénales.

1° d'une amende ne pouvant excéder 5000 francs, 1. Peines.

celui qui commet intentionnellement une des infractions mentionnées à l'art. 43; 2° d'une amende ne pouvant excéder 2000 francs, celui qui commet intentionnellement une des infractions mentionnées à l'art. 44, chiffre 1; 3° d'une amende ne pouvant excéder1 500 francs, celui qui commet intentionnellement une des infractions mentionnées à l'art. 44, chiffres 2 et 3, Art. 48.

Les poursuites pénales n'ont lieu que sur plainte.

Cette dernière peut être formulée par toute personne qui a été lésée par l'acte ou l'omission donnant lieu à la poursuite.

La plainte pénale peut être retirée jusqu'au moment de la communication du jugement de première instance.

< ,

2. Poursuite sur plaiote.

698

3. Késerve des dispositions générales do code pénal fédéral.

4. Procédure.

5. Perception et conversion des amendes.

6. Prescription de l'action pénale et de la peine.

IV. Dispositions communes pour la poursuite ciTile et pénale.

1. Mesures conservatoires.

«. Dispositions · générales.

Art. 49.

Pour la répression pénale des infractions à la présente loi et pour autant que cette dernière n'en dispose pas autrement, on appliquera par analogie les dispositions de la première partie du code pénal fédéral du 4 février 1853.

Art. 50.

Les poursuites pénales et le jugement des infractions à la présente loi rentrent dans la compétence des cantons.

Sont compétents pour juger les plaintes les tribunaux du lieu où le délit a été commis ou ceux du domicile du délinquant ou de l'un des délinquants s'il y en a plusieurs. La procédure se poursuit là où la plainte a été déposée en premier lieu.

Art. 51.

Le produit des amendes revient aux cantons. Faute de paiement, l'amende doit être convertie en un emprisonnement calculé à raison d'un jour de prison pour cinq francs d'amende. La durée de l'emprisonnement ne peut toutefois pas dépasser une année.

Art, 52: L'action pénale se prescrit par trois ans à partir de la contravention à la présente loi.

La peine se prescrit par cinq ans à partir du jour où le jugement a été rendu.

Art. 53.

Celui qui se croit menacé ou atteint dans ses droits par une infraction à la présente loi peut requérir de l'autorité compétente des mesures conservatoires, telles que la saisie 1° des exemplaires de l'oeuvre confectionnés, mis en circulation ou rendus publics en violation du droit d'auteur, 2° des exemplaires de l'oeuvre visés à l'art. 44, 3° des moyens servant exclusivement à la confection illicite d'exemplaires de l'oeuvre.

699

Art. 54.

Prescriptions Les cantons désignent les autorités compétentes Z>. spéciales.

pour ordonner les mesures conservatoires et déterminent la procédure à suivre sous réserve des dispositions suivantes: 1° Le requérant doit rendre plausible l'imminence ou l'existence d'une violation de son droit et démontrer en outre qu'il est menacé de ce fait d'un dommage difficilement réparable que seule l'autorité pst à même de prévenir par des mesures conservatoires.

2° L'autorité compétente décide après audition de la partie adverse; elle peut renomoer à cette audition dans les cas d'urgence.

3° Si le requérant n'a pas encore ouvert action civile ou pénale au moment de l'ordonnance des mesures conservatoires, l'autorité qui prononce cette dernière lui fixe un délai pour ouvrir action en l'avisant que l'ordonnance rendue, tombera en nullité si ce délai est outrepassé. Le délai doit être considéré comme observé si l'action civile ou pénale est intentée dans ce délai devant un. tribunal compétent et cela même lorsque les mesures conservatoires n'ont été ordonnées ni par le tribunal qui a été saisi de l'action, ni dans le ressort de ce tribunal.

4° S'il s'agit de mesures conservatoires) à prendre en prévision d'une représentation ou- exécution publique ou de l'usage qu'il sera fait à cette1 occasion d'exemplaires déterminés de l'oeuvre, la représentation ou exécution ou l'utilisation des exemplaires de l'oeuvre ne pourra être empêchée ni pour des motifs de droit d'auteur ni pour un autre motif quelconque; l'autorité pourra seulement astreindre la partie adverse à fournir des sûretés ou ordonner la saisie des recettes provenant de la représentation ou exécution.

5° Lorsque des mesures conservatoires sont ordonnées, le requérant peut être astreint à fournir des sûretés pour le dommage que pourrait subir la partie adverse du fait de ces mesures.

Feuille fédérale suisse. 70« année. Vol. III.

700

'·'. Confiscation.

Art. 55.

En cas de condamnation civile ou pénale pour une infraction à la présente loi, le tribunal peut ordonner: 1° la confiscation et la vente, la destruction ou la mise hors d'usage a) des exemplaires de l'oeuvre confectionnés, mis en circulation ou rendus publics en violation du droit d'auteur, b) des exemplaires de l'oeuvre visés à l'art. 44, c) des moyens servant exclusivement à la confection illicite d'exemplaires de l'oeuvre; 2° la confiscation des recettes provenant de la réci, tation, représentation, exécution, exhibition ou exposition illicite; 3° la confiscation des sommes d'argent ou la confiscation et la réalisation d'autres objets, dont le dépôt comme sûretés a été ordonné provisoirement en prévision d'une infraction, imminente ou déjà commise, à la présente loi.

Sur le produit net de la vente, ainsi que sur les recettes confisquées ou sur l'argent déposé comme sûreté et confisqué, on prélèvera en première ligne l'indemnité due au lésé; en cas d'action pénale, on se servira de l'excédent éventuel pour payer d'abord l'amende et ensuite les frais judiciaires'. Le restant éventuel reviendra au propriétaire des objets confisqués et, s'il s'agit de recettes confisquées, à celui qui aura organisé la récitation, représentation, exécution, exhibition ou exposition; le restant éventuel de l'argent déposé comme sûreté et confisqué reviendra à celui qui aura fourni la sûreté.

Le tribunal pourra ordonner la destruction ou la mise hors d'usage des moyens servant exclusivement à la confection illicite d'exemplaires de l'oeuvre même s'il ne prononce aucune condamnation civile ou pénale.

3. Constructions insaisissables et Jneonfiscables.

Axt. 56.

Les constructions ne peuvent pas faire l'objet d'une saisie conservatoire ni être confisquées, vendues, détruites ou mises hors d'usage.

701

Art. 57.

Le tribunal peut ordonner la publication du jugement dans un ou plusieurs journaux ou revues; il décide qui doit en supporter les frais.

4. Publication du jugement.

Art. 58.

Dans les causes civiles ou pénales qui sont jugées 5. Assistance intercantonale d'après la présente loi, les autorités des cantons se" doivent réciproquement assistance, et cela dans la même mesure que s'il s'agissait d'une affaire" traitée dans leur propre canton.

Art. 59.

Infraction à la Si des exemplaires d'une oeuvre licitement confec- V. limitation tertionnés sont mis en circulation en violation du terri- ritoriale dn droit d'édition.

toire pour lequel le titulaire du droit d'auteur en a autorisé le débit, cette mise en circulation ne constitue pas un acte illicite dans le sens de l'art. 43. Demeure* toutefois réservée la responsabilité découlant de la violation de dispositions contractuelles.

La disposition de l'alinéa qui précède n'est pas applicable aux organes d'instruments servant à rendre une oeuvre sonore mécaniquement.

Art. 60.

Caractère Lorsqu'une personne a engagé un tiers pour la VI.licite de la réreprérécitation, représentation, exécution ou exhibition pu- citation, sentation, exécution ou exhiblique d'une oeuvre, il suffit, pour donner un caractère ., bition en cas licite à cette audition ou exhibition, que l'employeur d'engagement d'exécutants.

ou l'employé y ait été autorisé par le titulaire du droit d'auteur ou que l'un d'eux ait, dans le cas d'une représentation ou exécution d'oeuvres éditées, pris, conformément aux articles 16 et 17, les mesures nécessaires pour rendre la représentation ou exécution licite.

Art. 61.

Celui qui se borne à fournir le local pour une récitation, représentation, exécution, exhibition ou exposition illicite n'est pas responsable comme organisateur. Toutefois, il demeure aussi bien civilement que pénalement responsable comme complice s'il a connu'le

VII. Responsabilité de la personne qui fournit le local pour des auditions, exhibitions ou expositions illicites.

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caractère illicite de la récitation, représentation, exécution, exhibition ou exposition.

Ces (dispositions sont applicables que le local ait été fourni ou non gratuitement.

VIII. Exonération de responsabilité en cas d'utilisation d'exemplaires illicites de l'oenvre.

Art. 62.

Celui qui utilise, pour lai récitation, représentation.; Exécution ou exhibition publique d'une oeuvre, des1 exemplaires confectionnés ou mis en circulation d'une manière illicite, est exonéré de toute responsabilité s'il a acquis de bonne foi les exemplaires dans des enchères publiques, dans un marché ou d'une personne faisant le commerce de produits1, du même genre, à moins qu'il n'ait appris le caractère illicite des exemplaires avant l'audition ou l'exhibition.

Celui qui a acquis de bonne foi, de la manière indiquée à l'alinéa qui précède, des exemplaires d'une oeuvre dont l'exposition publique est contraire à la loi, est exonéré de toute responsabilité pour l'exposition publique desdits exemplaires, à moins qu'il n'ait connu avant l'exposition le caractère illicite de cette dernière.

T. Dispositions finales.

Art. 63.

. Rapports entre La présente loi est applicable à toutes les oeuvres la nouvelle loi r 'r! et l'ancien droit. existant au moment de son entrée en vigueur. Une ÏTRétroactivité comme règle. oeuvre jouit en particulier de la protection de la pré-

sente loi même si elle n'était pas protégée ou protégée seulement en partie au moment de l'entrée en vigueur de cette loi.

Pour le calcul de la durée de protection qu'accordé la présente loi aux oeuvres mentionnées à l'alinéa qui précède, ;il y a lieu de tenir compte du délai déjà écoulé entre l'événement qui fait règle pour ce calcul suivant la présente loi et l'entrée en vigueur de la loi.

2. Droit à la prolongation de protection résultant de la rétroactivité.

Art. 64.

Si l'application de la présente loi aux oeuvres existant au moment de son entrée en vigueur entraîne

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une prolongation de la durée de protection, cette prolongation profite à l'auteur et à ses héritiers. Elle ne profite à un autre ayant cause de l'auteur que si ce dernier a été l'employé de cet ayant cause et a exécuté l'oeuvre dans l'exercice de son emploi.

H en est de menue en ce qui concerne la protection qu'obtient, par suite de l'application de la présente loi, une oeuyre entièrement ou partiellement non protégée au moment de l'entrée en vigueur de cette loi.

Art. 65.

Lorsque pour une oeuvre le délai de protection prévu pour les oeuvres posthumes à l'art. 2, alinéa 2, de la loi fédérale du 23 avril 1883 concernant la propriété littéraire et artistique, court encore au moment de l'entrée en vigueur de. la présente loi, la loi fédérale de 1883 demeure seule applicable pour le calcul de ce délai.

Il en est de même en ce qui concerne le délai de protection spécial prévu à l'article 2, alinéa 2, de la loi fédérale précitée du 23 avril 1883 pour les oeuvres publiées par la Confédération, par un canton, par une personne juridique ou par une société.

Les transferts des droits de l'auteur résultant de l'article 1, alinéa 3, de l'article 5, alinéa 2, de l'article 6 et de l'article 9, lettre c, de la loi fédérale précitée du 23 ,avril 1883, conservent leurs effets sous la présente loi pour la durée de protection accordée par l'ancienne loi.

Art. 66.

Aucune poursuite civile ou pénale ne pourra être intentée en raison d'un acte illicite suivant la présente loi mais commis avant l'entrée en vigueur de cette dernière, si cet acte était licite au moment de son accomplissement.

Les exemplaires d'une reproduction tombant sous le coup de l'alinéa précédent, qui existent au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi, peuvent être mis en circulation si le propriétaire s'est entendu à cet effet avec le titulaire du droit d'auteur ou s'il a, à défaut d'entente, payé l'indemnité fixée par le Tribunal fédéral.

3..Exceptions au principe de la rétroactivité.

a. Cas d'application de 1 ancienne loi.

b. Actes commis avant la nouvelle loi.

aa. Disposition générale.

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Les exemplaires dont la vente était jusqu'ici licite en vertu de l'art. 19, alinéa 3, de la loi fédérale du 23 avril 1883 concernant la propriété littéraire et artistique, peuvent aussi être mi® en circulation sans autre sous la présente loi.

64. Adaptation d'oeuvres musicales à des instruments mécaniques.

II. Rapports entre la nouvelle loi et les traités internationaux concernant le droit d'auteur.

1. Adaptation d'oeuvres musicales à des instruments mécaniques.

Art. 67.

Pour autant que l'art. 68, alinéa 2, ne déroge pas à la présente disposition, les oeuvres musicales qui, avant l'entrée en vigueur de la présente loi1, ont été adaptées d'une manière licite à des organes d'instruments mécaniques conformément à l'art. 11, lettre C, chiffre 11, de la loi fédérale du 23 avril 1883 concernant la propriété littéraire et artistique, peuvent, même après l'entrée en vigueur de la présente loi, être adaptées par quiconque à de tels organes, aiasij qu'être exécutées' publiquement au moyen de ces derniers, sans qu'il soit besoin de l'autorisation du titulaire du droit d'auteur. Il en est de même en ce qui concerne la mise en circulation en Suisse desdits organes et leur exportation dans des pays où les oeuvres ne jouissent d'aucune protection contre l'adaptation à des organes d'instruments mécaniques.

Art. 68.

Le droit exclusif -- conféré aux auteurs d'oeuvres musicales par l'art. 13 de la Convention de Berne revisée pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques du 13 novembre 1908 -- d'autoriser l'adaptation de leurs oeuvres à des instruments servant à les reproduire mécaniquement, ainsi que l'exécution publique de ces oeuvres au moyen desdits instruments, est soumis aux restrictions prévues par les articles 18, 19 et 20 de la présente loi.

Si des oeuvres musicales provenant d'un pays ayant adhéré à l'art. 13 de la Convention de Berne revisée ont été adaptées en Suisse, d'une manière licite, à des organes d'instruments mécaniques conformément au chiffre 3 du Protocole de clôture de la Convention de Berne du 9 septembre 1886, et cela avant que l'art.

13 précité soit entré en vigueur dans leur pays d'origine, ces oeuvres peuvent être, même après l'entrée en vigueur

o

.

.

705

de la présente loi, adaptées par quiconque à des organes de ce genre ou exécutées publiquement au moyen de ces derniers, sans qu'il soit besoin pour cela de l'autorisation du titulaire du 'droit d'auteur. Il en est de même en ce qui concerne la mise en circulation en Suisse desdits organes ou leur exportation dans des pays où les oeuvres ne jouissent d'aucune protection contre l'adaptation à des instruments, mécaniques.

Art. 69.

Application Lorsqu'une oeuvre provenant d'un autre pays de 2. analogue de ,l'art.

l'Union internationale pour la protection des droite l et à.66, alinéa; des auteurs sur leurs oeuvres littéraires et artistiques, sera devenue protégeable en Suisse en vertu de l'art. 14 de la Convention de Berne du 9 septembre 1886, . ,ou de l'art. 2, chiffre II, de l'Acte additionnel du 4 mai 1896, ou de l'art.- 18, alinéa 1, de la Convention de Berne revisée du 13 novembre 1908, l'art. 66, alinés 1 et 2, de la présente loi sera applicable à cette oeuvre par analogie. Il en sera de même pour les oeuvres qui seront devenues protégeables en Suisse ensuite d'une oiouvelie adhésion, à la Convention de Berne revisée en conformité de l'art. 18, alinéa 4, de cette convention.

Art. 70.

La présente loi abroge la loi fédérale du 23 avril 1883 concernant la propriété littéraire et artistique.

Art. 71.

Le Conseil fédéral est chargé, conformément aux dispositions de la loi du 17 juin 1874 concernant les ·rotations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux, de publier la présente loi et de fixer la date de son entrée en vigueur.

III. Abrogation de l'ancienne lo!.

IV. Disposition finale.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif au projet d'une loi fédérale concernant le droit d'auteur sur les oeuvres littéraires et artistiques. (Du 9 juillet 1918.)

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