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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à la participation de la Confédération aux frais d'assistance de réfugies (Du 15 décembre 1950)

Monsieur le Président et Messieurs, Depuis des siècles, la Suisse a accordé asile aux proscrits et aux persécutés. L'exercice du droit d'asile répond à un principe profondément enraciné dans les moeurs de notre peuple et dont la politique de la Suisse s'est constamment inspirée. Cette tradition a même été respectée lors de circonstances difficiles; elle demeurera en honneur à l'avenir également.

Mais il est hors de doute qu'un pays ne peut accorder l'asile que dans la mesure de ses possibilités; les intérêts vitaux du peuple et de l'Etat ne doivent pas en être lésés. Un pays ne saurait accueillir les yeux fermés, sans se soucier de la sauvegarde et de la prospérité de l'Etat, toutes les personnes qui se présentent à ses frontières. La forte densité de la population de notre pays, le nombre proportionnellement élevé d'étrangers qui y vivent, sa faible surface cultivable et ses possibilités matérielles limitées sont autant de facteurs qui doivent être pris en considération.

Lors de l'avènement du national-socialisme en Allemagne, au printemps 1933, des milliers de personnes quittèrent ce pays et cherchèrent refuge en Suisse. La crise économique et, en particulier, le chômage qui sévissait alors fortement nous contraignirent à prendre des mesures dictées par la prudence. Nous décrétâmes que les fugitifs devaient être autorisés à franchir la frontière, mais que l'asile dont ils bénéficieraient dans notre pays ne pouvait être que temporaire. Nous manifestions par là notre volonté de demeurer fidèles à nos traditions en accordant l'asile aux persécutés, mais laissions entendre du même coup que la Suisse ne pouvait être pour eux qu'un pays de passage.

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Au cours des années qui précédèrent la guerre, comme aussi pendant la guerre, ce principe fut consacré par toutes les dispositions légales décrétées en la matière. Ainsi nos arrêtés, fondés sur les pouvoirs extraordinaires, du 17 octobre 1939 modifiant les prescriptions sur la police des étrangers (art. 10) et du 12 mars 1943 concernant l'hébergement des réfugiés (art. 7) confirmèrent expressément que la Suisse ne pouvait être qu'un pays de passage pour les réfugiés.

LA LIBÉRATION DES RÉFUGIES DE L'OBLIGATION DE QUITTER LA SUISSE Le principe énoncé ci-dessus ne fut cependant pas appliqué avec une rigidité absolue. Un certain nombre d'étrangers venus en Suisse comme réfugiés ne furent plus astreints à émigrer. H s'agissait pour la plupart de personnes auxquelles notre pays offrait des possibilités d'existence ou qui, vraisemblablement, auraient aussi été admises à prendre domicile chez nous si leurs cas avaient été traités selon la procédure habituelle en matière de police des étrangers.

C'est dans notre arrêté du 7 mars 1947 modifiant les prescriptions sur la police des étrangers, arrêté fondé sur les pouvoirs extraordinaires, que, pour la première fois, une disposition expresse autorisa certaines catégories de réfugiés, sur une plus large échelle, à séjourner durablement en Suisse. Il s'agissait notamment de personnes âgées ou malades auxquelles on accorda ce que l'on a appelé l'asile durable. Le même arrêté maintenait en revanche pour tous les autres réfugiés l'obligation, de quitter le pays.

Au moment de l'entrée en vigueur de la loi revisée du 26 mars 193l/ 8 octobre 1948 sur le séjour et l'établissement des étrangers, soit le 21 mars 1949, les arrêtés fondés sur les pouvoirs extraordinaires furent abrogés.

Nous n'infirmâmes cependant pas expressément la règle selon laquelle la Suisse ne pouvait être qu'un pays de passage pour les réfugiés; aussi les autorités de police des étrangers n'ont-elles généralement pas libéré jusqu'ici les intéressés de l'obligation de préparer leur départ. En revanche, dès la fin de la guerre, les autorités fédérales s'efforcèrent de ne pas appliquer sans tempérament le principe du « pays de passage » tel qu'il avait été établi en 1933. Mais la Confédération n'avait pas, à elle seule, la compétence d'apporter des adoucissements à cette règle. Sans l'assentiment
et la collaboration des cantons, un assouplissement de la pratique ne peut être envisagé.

La pratique semble cependant devenir peu à peu moins rigide par le fait de l'attitude libérale qu'ont adoptée certains cantons, encouragés par les autorités fédérales. Le moment est maintenant venu de faire un pas de plus et de libérer de l'obligation d'émigrer tous les réfugiés qui sont venus dans notre pays avant et pendant la guerre et dont la conduite a

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été correcte ; sont réservés à cet égard l'examen du cas d'espèce et l'assentiment dea autorités cantonales. Cette solution s'impose pour de nombreux motifs.

Tout d'abord, le nombre des réfugiés se trouvant dans notre pays a beaucoup diminué depuis la fin de la guerre. La plupart des 300 000 étrangers en chiffre rond qui avaient cherché refuge dans notre pays pendant la guerre (dans ce chiffre sont compris environ 104 000 internés militaires) ont pu retourner dans leurs foyers ou ont trouvé ailleurs une nouvelle patrie. A l'heure actuelle, le nombre des étrangers qui se trouvent en Suisse et doivent être considérés comme des réfugiés ne s'élève plus guère qu'à 11 000. 1341 ont reçu, sous la forme de l'asile durable, l'assurance de pouvoir séjourner durablement en Suisse. Hormis quelques cas de recours, il n'est plus possible d'accorder l'asile durable à d'autres personnes, car l'arrêté, fondé sur les pouvoirs extraordinaires, en vertu duquel les décisions avaient été prises, a été abrogé et le délai supplémentaire accordé par la loi fédérale revisée est expiré. Quelques milliers de réfugiés ont obtenu une autorisation de résidence et, dans de nombreux cas, ont même été autorisés à prendre définitivement domicile dans notre pays. Dans ce chiffre de 11 000 sont également compris les réfugiés que les événements politiques survenus après la guerre dans l'Est européen ont contraints à quitter leur pays. Restent donc environ 4 à 6000 réfugiés de guerre dont les conditions de séjour n'ont pas été réglées d'une manière définitive ou qui sont encore soumis à l'obligation de quitter la Suisse. Sont compris dans ce chiffre les femmes, les enfants, les écoliers, les étudiants, les malades et les autres personnes qui ne jouent aucun rôle en ce qui concerne le marché du travail. Le nombre des personnes âgées de 20 à 40 ans qui sont aptes à prendre un emploi doit être de 2 à 3000, tout au plus.

Pour les réfugiés qui sont restés chez nous, les possibilités d'émigration se font de plus en plus rares. Nombre d'entre eux ne remplissent pas les conditions requises par les pays disposés à accueillir des réfugiés. D'autres se sont créé, au cours des années, d'étroites attaches avec notre pays et se sont adaptés à nos moeurs, si bien qu'ils ne partiraient qu'à contre-coeur.

Plusieurs réfugiés ont épousé des Suissesses.
Les possibilités de travail favorables qui existaient dans les années de grande prospérité économique de l'après-guerre ont permis à tous les réfugiés plus ou moins qualifiés de trouver un emploi. La plupart d'entre eux ont, depuis des années, une occupation régulière. On doit cependant se demander s'ils pourront, à l'avenir également, gagner leur vie dans notre pays. C'est précisément la crainte que tel ne serait plus le cas un jour ou l'autre qui nous avait incités à décréter que les milliers de réfugiés qui affluaient sur notre territoire ne pourraient pas y demeurer durablement.

C'est pour la même raison que certains cantons éprouvent tant de difficultés à accorder aux réfugiés, qu'ils traitent du reste avec sympathie, des autorisations de travail illimitées ou de longue durée.

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II faut sans doute s'attendre que certains réfugiés libérés de l'obligation de quitter la Suisse, se verront un jour privés d'ouvrage dans leur profession ou qu'ils se rendront compte du peu de chances qu'ils ont de pouvoir se créer dans notre pays une situation leur donnant pleine satisfaction.

Ceux d'entre eux qui savent se faire une idée juste de leur position chercheront alors, sans aucune pression de la part des autorités, à trouver un gagne-pain à l'étranger et quitteront notre pays. L'usage suivi jusqu'ici d'inviter ces étrangers, à intervalles réguliers, à poursuivre leur voyage ou même de les soumettre à une certaine pression pour qu'ils s'en aillent, a bien eu pour résultat d'amener nombre d'entre eux à quitter notre pays.

En revanche, il a eu souvent un effet négatif en ce qu'il a poussé des réfugiés à adopter, à tort ou à raison, une attitude de défense à l'égard des ordres de l'autorité, attitude qui les empêche fréquemment d'apprécier la situation avec calme et clairvoyance, notamment en ce qui concerne leurs chances d'avenir. Ainsi se développent certains complexes qui se traduisent par une résistance ouverte du réfugié et souvent aussi de ses protecteurs suisses contre l'émigration, même si cette dernière se présente dans de bonnes conditions; la fixation de courts délais de départ va alors à l'encontre du but visé. De plus, ce mode de faire provoque des difficultés ou des malentendus qui jettent une ombre sur tout ce que notre pays a pu réaliser de positif en faveur des réfugiés pendant la guerre et après la fin des hostilités.

Au lieu de reconnaissance et de satisfaction, il ne reste qu'amertume et mécontentement.

Mais surtout, il ne suffit pas d'examiner la situation à l'intérieur de nos frontières; il faut aussi tenir compte de ce qui se passe à l'étranger.

Nous verrons alors combien nous aurions tort d'exagérer les difficultés que peut entraîner la libération de quelques müliers de réfugiés de l'obligation d'émigrer. H n'est pour cela que de considérer la détresse dans laquelle se trouvent les réfugiés dans le monde et l'ampleur des problèmes que les pays voisins ont à résoudre dans ce domaine. Le nombre total des réfugiés dans le monde est évalué à 60 millions, dont le quart pour l'Europe. Il est vrai que l'Organisation internationale pour les réfugiés, grâce à son vaste
appareil et à ses moyens financiers considérables, a pu assurer l'établissement de plus de 820 000 personnes et en a rapatrié 70 000.

Jusqu'à la fin de son activité en automne 1951, elle pourra probablement assurer encore l'émigration de 230 000 autres réfugiés dans des pays d'outremer. Plusieurs milliers de réfugiés demeureront néanmoins là où ils se trouvent actuellement, leur établissement dans un pays d'outre-mer ne paraissant pas possible. Aux personnes soumises au mandat de l'Organisation internationale pour les refuges, il convient d'ajouter notamment les 11 millions de réfugiés de nationalité ou d'origine ethnique allemande, venus de l'Est, qui se trouvent en Allemagne occidentale. Le souci de loger ces gens, de les assister et de les réincorporer dans la collectivité place les services responsables devant des problèmes presque insolubles. Avons-nous encore

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le droit, en présence d'une telle misère, d'astreindre à quitter notre pays les réfugiés qui virent en Suisse depuis des années et qui s'y sont bien comportés ? L'aide privée et officielle que la Suisse apporte aux réfugiés à l'étranger perdrait beaucoup de sa signification, si nous ne nous attachions pas à trouver une solution, digne de notre passé, au problème que pose la présence dans notre pays de réfugiés de la dernière guerre.

Les pourparlers qui ont eu lieu avec les présidents des gouvernements cantonaux et, par la suite, avec les directeurs de justice et police et les chefs de polices cantonales des étrangers ont montré que les autorités cantonales ne demeurent pas sourdes à ces arguments et qu'elles sont en général disposées, après un examen minutieux des cas d'espèce, à s'associer à nos efforts.

Ce programme ne peut toutefois être réalisé que si les cantons n'ont aucune charge financière sensible à assumer. Ils n'ont jamais laissé de doute à ce sujet. C'est seulement si des tiers ou la Confédération continuent d'assister les réfugiés indigents, ou s'ils fournissent des garanties pour l'avenir, que les cantons sont prêts à coopérer à la réalisation de nos intentions et à accorder aux intéressés des autorisations de police des étrangers.

Nous espérons que les autorités cantonales entendront l'appel qui leur a souvent été adressé et ne se désintéresseront pas complètement de l'assistance des réfugiés. Mais il n'est guère à prévoir, pour l'instant du moins, qu'elles se montreront disposées à collaborer dans une mesure importante à l'accomplissement de cette tâche. On comprend en quelque sorte cette attitude; en effet, la plupart des réfugiés étant groupés sur le territoire de quelques cantons seulement, il s'est révélé pratiquement impossible de répartir les charges qui en résulteraient pour ces derniers de façon équitable entre tous les cantons.

Etant donné que des tiers et, en particulier, les institutions suisses d'aide aux réfugiés ne sont pas à même d'assumer seuls ces frais, la Confédération doit continuer à consacrer des fonds à l'assistance des réfugiés; il est possible qu'elle doive le faire dans une mesure accrue à l'avenir. La base juridique de cette assistance fait toutefois défaut dans les cas où les réfugiés sont libérés de l'obligation d'émigrer. Si l'on veut donc que les
réfugiés ne demeurent pas tenus à préparer leur départ, il faut modifier en conséquence l'arrêté fédéral du 21 décembre 1948 concernant les contributions de la Confédération aux institutions privées d'aide aux réfugiés.

LA RÉGLEMENTATION ACTUELLE DE L'ASSISTANCE DES RÉFUGIÉS Jusqu'il y a quelques années, la Confédération ne pouvait assister les étrangers -- à part une exception sur laquelle nous reviendrons plus loin -- que si leur internement avait été prononcé conformément à l'article 14, 2e alinéa, de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers.

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On entendait d'ordinaire par internement le placement dana un home ou un établissement approprié. Pendant la guerre toutefois, l'internement ne revêtit plus guère qu'une importance théorique, car il ne constituait plue que la base juridique de la présence des réfugiés dans le pays. Une décision d'internement fut prise à l'égard de tous les étrangers entrés en Suisse sans visa. Mais, de plus en plus, ces étrangers furent placés en résidence privée, dans des conditions plus ou moins identiques à celles des étrangers au bénéfice d'une tolérance ou d'une autorisation de séjour. L'internement devint donc une mesure tenant lieu d'une telle autorisation, l'étranger interné demeurant sous le contrôle et la responsabilité de la Confédération.

Le nouvel article 27 ajouté à la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers lors de la revision, tient compte de cette évolution. Cet article dispose, en effet, que l'internement, qui ne devrait normalement pas durer plus de deux ans, peut dépasser ce délai lorsque la décision d'internement ne vise qu'à régler, conformément à la loi, les conditions de résidence d'un étranger qui ne peut recevoir une autorisation régulière du canton et ne peut non plus être refoulé. La décision d'internement imposant à la Confédération la responsabilité pour l'étranger qui en fait l'objet, tous les frais d'assistance que son séjour peut occasionner lui incombent. L'ancien article 14, 2e alinéa, le mentionnait expressément; cette disposition n'a pas été reprise dans la loi revisée, car elle va de soi. En revanche on a ajouté, dans un nouvel alinéa, que les internés disposant de ressources pouvaient être astreints à supporter les frais de leur internement et qu'une garantie pouvait être exigée à cet effet.

Toutefois, dans la pratique, la division de police n'assiste pas seule tous les réfugiés internés qui sont dans l'indigence. Il existe différents a,rrangements avec les oeuvres de secours privées selon lesquels ces dernières fournissent également leur part dans certains cas. Le nombre des réfugiés internés assistés diminue constamment. Alors qu'il était au début de cette année de 512, ce nombre est tombé jusqu'au 30 septembre 1950 à 310. Au cours des neuf premiers mois de cette année, 537 réfugiés internés au total ont été assistés pendant un temps plus ou moins long.
Les dépenses totales qui en sont résultées pour la Confédération se montent à 487 000 francs ; l'assistance d'un réfugié interné a donc coûté en moyenne 1200 francs par année ou 100 francs par mois.

C'est seulement l'arrêté fédéral du 16 décembre 1947 concernant la contribution de la Confédération aux frais d'entretien d'émigrants et de réfugiés indigents en Suisse qui créa une base légale pour l'assistance de réfugiés non internés, c'est-à-dire au bénéfice d'une autorisation régulière de résidence. Mais cet arrêté ne s'applique qu'aux réfugiés admis à séjourner durablement en Suisse (asile durable) au sens de notre arrêté du 7 mars 1947, fondé sur les pouvoirs extraordinaires. Seuls les étrangers ayant reçu une attestation formelle dans ce sens peuvent être assistés en vertu de cet arrêté fédéral. Sur les 1341 réfugiés autorisés d'avance à séjour-

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ner durablement en Suisse, 617 ont à l'heure actuelle besoin de secours.

Ce chiffre n'augmentera sans doute pas sensiblement au cours des prochaines années. Certes, il faut admettre que certains réfugiés, au bénéfice de l'asile durable, qui ne sont pas assistés aujourd'hui, ne seront tôt ou tard plus en mesure de subvenir eux-mêmes à leur entretien ; en revanche, certains assistés meurent ou quittent la Suisse. Parmi ces 617 nécessiteux, 291 sont considérés comme d'« anciens cas » et sont assistés principalement par la division de police (art. 3 de l'arrêté de 1947), tandis que, dans 326 cas, les charges d'assistance sont assumées, à raison d'un tiers chacun, par la Confédération, le canton et l'oeuvre de secours compétente. Pour les premiers, la Confédération dépense en moyenne 148 francs par assisté et par mois ou 1776 francs par année ; ces chiffres sont de 63 et 756 franca pour les seconds. Les frais que l'assistance de ces réfugiés entraîne pour la Confédération s'élèvent à environ 762 000 francs par an. Comme nous avions tablé, dans notre message relatif à cet arrêté, sur une charge annuelle maximum de 3,2 millions de francs, on constatera que les dépenses demeurent bien au-dessous des prévisions. Cela s'explique notamment par le fait que le nombre des réfugiés et des émigrants mis au bénéfice de l'asile durable est resté sensiblement inférieur à ce qui avait été admis tout d'abord ; cette différence est due pour une bonne part à la politique restrictive pratiquée par les cantons, qui craignaient des charges financières trop lourdes. En outre, plusieurs réfugiés âgés ou de santé précaire ont réussi, grâce à la situation économique favorable, à trouver un gagne-pain, sur lequel il ne pouvait guère compter à l'époque. L'écart entre les charges effectives résultant de l'application de l'arrêté fédéral du 17 décembre 1947 et les pronostics est certes réjouissant; mais il est compensé par un supplément de dépenses à un autre titre. En effet, les réfugiés totalement ou partiellement inaptes au travail auxquels l'asile durable n'a pas été expressément accordé, mais qui, en raison de leur âge ou de leur état de santé, n'ont plus la possibilité d'émigrer, devront en tout état de cause être secourus d'une manière ou d'une autre.

Lorsqu'au début de l'année 1948 notamment, de nouveaux réfugiés se
présentèrent à notre frontière, les institutions d'aide se déclarèrent incapables d'assumer à elles seules les frais de leur assistance. Il convenait cependant, par ailleurs, d'éviter de prendre des décisions d'internement à l'égard des nouveaux venus. Aussi était-il nécessaire d'asseoir l'assistance de ces derniers sur une nouvelle base légale. Il fallait également que la Con-, fédération pût, au besoin, continuer à assister les réfugiés, jusqu'ici internés, qui devaient obtenir une autorisation régulière de résidence. L'arrêté fédéral du 21 décembre 1948 concernant les contributions de la Confédération aux institutions privées d'aide aux réfugiés a tenu compte de ces nécessités. Il permettait aux autorités fédérales d'accorder également leur aide sans qu'il fallût maintenir le réfugié sous le coup d'une décision d'internement ou en prononcer une au préalable.

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Au cours des trois premiers trimestres de cette année, des contributions au sens de cet arrêté fédéral ont été versées aux institutions d'aide en faveur de 611 réfugiés. A la date du 30 septembre 1950, 389 réfugiés étaient encore assistés. La Confédération remboursait tout d'abord aux institutions d'aide 50 pour cent des secours versés avec son assentiment; dès le 1er avril 1950, ce taux est de 60 pour cent. Sa part s'élevait en moyenne à 60 francs par réfugié et par mois ou à 720 francs par année. L'aide fédérale est subordonnée dans chaque cas à la condition qu'une institution d'aide soit disposée à prendre soin du réfugié et à assumer une partie des frais d'assistance. Selon l'article 1er, 2e alinéa, des contributions fédérales ne sont allouées en faveur d'un réfugié que dans la mesure où ni son retour dans son Etat d'origine ou son dernier Etat de résidence, ni son émigration dans un autre pays ne sont possibles ou ne peuvent raisonnablement être exigés. En d'autres termes, des prestations de la Confédération peuvent seulement être fournies aussi longtemps que le réfugié demeure astreint à quitter la Suisse. Dès qu'un réfugié est admis à prendre domicile dans notre pays et qu'il obtient par exemple une autorisation d'établissement, il n'est plus possible de verser des contributions au sens de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1948. La limitation de la durée de validité de l'arrêté à 5 ans, dont 2 sont bientôt écoulés, montre que les réfugiés admis à un séjour de longue durée dans notre pays ne peuvent pas être assistés en vertu de cet arrêté. Celui-ci ne peut donc pas tenir compte de la nouvelle situation produite par le fait que la plupart des réfugiés de la dernière guerre ont été libérés de l'obligation de préparer leur départ; aussi convient-il de le modifier.

Mentionnons enfin une dernière catégorie d'étrangers que la Confédération assiste depuis de longues années. Selon notre arrêté du 23 mars 1926 réduisant la contribution d'entretien des malades russes indigents, la division de police verse un subside de 4 francs par assisté et par jour.

Si des circonstances particulières l'exigent, le subside journalier peut être porté à 5 francs. Les subsides sont distribués par la Croix-Rouge suisse, qui prend soin des intéressés. A l'heure actuelle, 90 personnes en chiffre rond bénéficient de telles
contributions, ce qui coûte environ 100 000 francs par année à la Confédération. Le nombre des bénéficiaires de secours et le total des prestations diminuent faiblement d'année en année. Il sera sans doute indiqué de profiter de la refonte des dispositions sur l'assistance des réfugiés pour abroger cet arrêté, pris en vertu des pouvoirs extraordinaires qui nous avaient été conférés lors de la première guerre mondiale, et pour régler l'octroi de ces subsides par la législation ordinaire.

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LES GRANDES LIGNES DU PROJET MODIFIANT L'ARRÊTÉ FÉDÉRAL C'est surtout l'extension de l'assistance aux réfugiés libérés de l'obligation de quitter la Suisse qui contraint de modifier l'arrêté fédéral du 21 décembre 1948. On ne peut atteindre ce résultat en supprimant simplement le 2e alinéa de l'article 1er de l'arrêté en vigueur, alinéa aux termes duquel la Confédération ne peut allouer des contributions en faveur d'un réfugié que dans la mesure où ni son retour dans son Etat d'origine ou son dernier Etat de résidence, ni son émigration dans un autre pays ne sont possibles ou ne peuvent raisonnablement être exigés, et à la condition seulement qu'il demeure soumis à l'obligation de quitter la Suisse. La nécessité d'assister aussi bien les réfugiés astreints à préparer leur départ --il s'agit des nouveaux réfugiés en général et de certains réfugiés de guerre -- que ceux qui pourront se fixer à demeure dans notre pays, exige d'autres changements et adjonctions au texte de l'arrêté.

Le nouveau projet fait une distinction plus nette que jusqu'ici entre les différentes possibilités d'accorder une aide financière aux réfugiés.

L'octroi de contributions aux frais de leur formation professionnelle et de leur émigration est réglé d'une manière plus étendue. Il importe de conférer à la Confédération le droit d'allouer également cette contribution dans les cas d'exception où aucune institution d'aide ne prend soin du réfugié. Sinon la Confédération ne pourrait aider le réfugié que si elle l'internait. Une telle mesure ne serait cependant pas indiquée dans la plupart des cas; elle aurait pour conséquence que les autorités fédérales devraient assumer seules la totalité des frais.

Les institutions suisses d'aide aux réfugiés groupées au sein de l'office central suisse d'aide aux réfugiés, qui a son siège à Zurich., se sont en principe déclarées prêtes à continuer de coopérer, de leur mieux et dans la mesure de leurs moyens, à l'accomplissement de cette tâche. Elles ont naturellement dû se réserver de soumettre aux autorités de nouvelles propositions relatives à la répartition des frais, si leur situation se modifiait et si le nouvel arrêté fédéral entraînait pour elles des charges imprévisibles.

Les institutions d'aide prendront donc encore soin des réfugiés à l'avenir et les assisteront; les charges des
pouvoirs publics en seront sensiblement allégées. A moins d'une évolution extraordinaire, il est permis d'admettre qu'en poursuivant son aide dans les proportions actuelles, la Confédération permettra aux institutions de secours de continuer leur oeuvre humanitaire. Si toutes ces institutions d'une manière générale ou certaines d'entre elles seulement devaient, par la suite, ne plus être en mesure de fournir leur part, l'arrêté nous permettrait d'augmenter la contribution fédérale; une telle décision ne pourrait évidemment être prise qu'après un examen minutieux de la requête. A noter que les institutions d'aide se sont spontanément chargées du lourd fardeau que constitue l'assistance des réfugiés ;

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en ce faisant, elles se sont acquis des mérites qu'il convient de reconnaître ; il est vrai qu'à l'exception des comités neutres de moindre importance, elles ne s'occupent que des réfugiés auxquels elles sont unies par des liens confessionnels ou idéologiques.

Un autre principe inséré dans l'arrêté revêt une importance particulière. La Confédération ne participera à l'assistance de réfugiés libérés de l'obligation de quitter la Suisse que si le canton leur donne la possibilité de subvenir eux-mêmes à leur entretien. Aussi l'article 8 du nouvel arrêté prévoit-il expressément que la Confédération n'alloue des subsides en faveur de tels réfugiés que si le canton leur accorde une autorisation d'établissement ou, tout au moins, une autorisation de séjour leur permettant d'exercer une activité lucrative non indépendante. Les cantons ne sauraient d'une part exiger de la Confédération qu'elle assiste les réfugiés indigents et, d'autre part, priver ceux-ci de toute possibilité de gagner leur vie. Si un canton ne pouvait pas se décider à accorder pareille autorisation à un réfugié, il aurait à supporter lui-même les frais d'assistance qui en résulteraient.

L'aide de la Confédération est subordonnée en outre à la condition que le réfugié ait été astreint, par les autorités cantonales, à constituer une caution convenable en vue de garantir les frais de son entretien pour le cas où il tomberait dans l'indigence (art. 9). Il sied toutefois de tenir dûment compte de la situation du réfugié et de ne l'astreindre à alimenter un compte d'épargne que si son gain et ses charges d'entretien le lui permettent. Les étrangers qui, à l'égard des autorités de police des étrangers, invoquent le fait qu'ils sont munis de pièces de légitimation nationales pour ne pas être tenus de fournir une garantie ne peuvent plus être considérés comme des réfugiés; ils n'obtiendront plus tard aucune aide en vertu de l'arrêté fédéral, s'ils sont dépourvus de moyens d'existence. Un certain nombre de réfugiés, notamment les plus jeunes, se décideront sans doute à accepter une pièce de légitimation nationale. Cette pièce leur offrirait la possibilité de se prévaloir des avantages accordés par le traité d'établissement que la Suisse a conclu avec leur Etat d'origine, et cette possibilité leur paraîtra en effet plus intéressante que les
garanties accordées par l'arrêté fédéral. Chaque réfugié devra être renseigné d'une manière détaillée sur cette question lors du règlement de ses conditions de résidence, afin qu'il se rende parfaitement compte des conséquences de sa décision.

L'arrêté fédéral vise à régler pour une longue durée l'assistance des réfugiés. Sa validité ne peut dès lors pas être limitée comme on l'a fait pour l'arrêté actuellement en vigueur. Les oeuvres de secours et les cantons doivent pouvoir compter sur une garantie de la Confédération à longue échéance. Sinon les institutions d'aide ne pourront pas prendre d'engagements à long terme; il s'ensuivra que les cantons ne voudront pas régler les conditions de résidence des réfugiés conformément aux nouvelles directives élaborées par les autorités fédérales.

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On espérait, à l'époque, que l'arrivée de nouveaux réfugiés n'aurait qu'un caractère temporaire et que les dispositions de l'arrêté fédéral de décembre 1947 suffiraient à l'assistance des anciens réfugiés; c'est pourquoi l'arrêté actuel a été limité dans sa durée. Or de nouveaux réfiigiés continuent de franchir notre frontière, et il n'est pas possible de dire aujourd'hui quand cette situation changera. Par ailleurs, on ne saurait permettre à tous les réfugiés de la dernière guerre de se réinstaller dans un autre pays.

Dès lors, il aurait été nécessaire, dans trois ans, de proroger l'arrêté actuel, même si la pratique n'eût pas été modifiée.

Les effets du nouvel arrêté devront cependant, d'une manière ou d'une autre, être limités dans le temps. L'aide de la Confédération doit prendre fin un jour; elle ne saurait être poursuivie pendant plusieurs générations.

Nous proposons dès lors de ne plus assister que jusqu'à leur vingtième année au plus tard les réfugiés qui seront encore mineurs le 1er janvier 1970; en outre, seuls les réfugiés qui, depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté jusqu'à la date ci-dessus, auront dû recouru" une fois à l'aide des pouvoirs publics, pourront encore bénéficier de subsides de la Confédération après cette date.

Il y a lieu d'admettre, en effet, que les réfugiés qui auront subvenu euxmêmes à leur entretien pendant de nombreuses années et n'auront pas eu besoin de secours avant le 1er janvier 1970, c'est-à-dire après un délai de 19 ans, seront plus tard également en mesure de se tirer d'affaire seuls. Les risques d'assistance que les cantons courent de ce fait sont minimes. Comme ces réfugiés auront alors payé la majorité de leurs impôts, pendant des années, à leur canton de résidence, il ne serait pas équitable de réclamer après si longtemps une participation de la Confédération aux frais d'assistance. Eu égard à cette restriction, la réalisation de nos intentions pourrait, certes, rencontrer ça et là des difficultés. Nous comptons toutefois sur la compréhension des cantons et espérons que ces charges lointaines, possibles certes, mais plutôt théoriques, ne les amèneront pas à pratiquer une politique restrictive dans l'octroi d'autorisations de police des étrangers.

La solution proposée nous paraît convenable et appropriée aux circonstances.

Enfin, le nouvel arrêté
apporte des simplifications et donne une meilleure vue d'ensemble sur les diverses façons dont la Confédération peut assister des réfugiés. Le fait d'accorder des contributions à l'assistance de réfugiés sur la base de deux arrêtés édictés à bref intervalle provoque souvent des confusions qui pourraient être évitées si l'on réunissait les différentes prescriptions. Nous proposons dès lors d'abroger non seulement notre arrêté du 23 mars 1926 réduisant la contribution d'entretien des malades russes indigents, mais aussi l'arrêté fédéral du 16 décembre 1947 concernant la contribution de la Confédération aux frais d'entretien d'émigrants et de réfugiés indigents en Suisse, et d'en insérer les dispositions essentielles dans le nouvel arrêté fédéral. Bien ne sera changé quant au fond.

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LES RÉPERCUSSIONS FINANCIÈRES DU NOUVEL ARRÊTÉ Nous avons tenté de déterminer ces répercussions. Il est malheureusement très difficile d'émettre des pronostics. Selon l'état au 30 septembre 1950, les contributions accordées par la Confédération en vertu de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1948 se sont élevées à 36 300 francs par mois en moyenne. Cela représente une dépense annuelle de 436000 francs. Si, le 30 septembre, le nouvel arrêté et non l'ancien avait été applicable, il y aurait eu au maximum 50 à 100 cas d'assistance de plus. En effet, ce nombre correspond, à peu de chose près, à celui des demandes de secours que la division de police a dû rejeter parce que les réfugiés visés avaient été formellement déliés de l'obligation de quitter la Suisse. Supposé que ces réfugiés aient besoin d'être entièrement assistés et qu'il n'existe aucune autre raison de refuser une contribution fédérale, l'accroissement des charges serait de 3 à 6000 francs par mois ou de 36 000 à 72 000 francs par année.

Ce supplément de dépenses est supporté à l'heure actuelle par les institutions suisses d'aide aux réfugiés. Si on ne les en décharge pas prochainement, il faut s'attendre qu'elles nous demanderont des contributions plus élevées pour l'assistance des réfugiés non libérés de l'obligation de préparer leur départ. L'article 2 de l'arrêté actuel ouvre la voie à une telle démarche. En règle générale, les institutions d'aide aux réfugiés ne disposent que des ressources provenant de leurs collectes annuelles. Une augmentation de leurs prestations en faveur d'une certaine catégorie de réfugiés se traduirait inévitablement par une diminution de l'aide qu'elles apportent à d'autres. Que l'on modifie ou non l'arrêté fédéral, que l'on étende ou non l'assistance aux réfugiés libérés de l'obligation de quitter la Suisse, la Confédération n'abandonnera finalement pas les oeuvres de secours à leur sort ; elle devra de toute façon leur fournir les ressources, qu'elles ne peuvent pas se procurer par leurs propres moyens.

Un point encore à noter : Si quelques cantons ont déjà libéré certains réfugiés -- ceux-là mêmes qui ne peuvent pas être assistés à l'heure actuelle-- de l'obligation de quitter la Suisse et s'ils les ont mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement, c'est surtout parce qu'ils comptaient sur l'adoption
des nouvelles dispositions que contient notre projet. Il ne serait pas équitable de laisser les frais, au cas où les institutions d'aide ne seraient plus à même de les assumer, à la charge des cantons qui ont précisément le mieux soutenu les efforts déployés par les autorités fédérales en vue de résoudre le problème que pose la présence dans notre pays de réfugiés arrivés dans les années de guerre. C'est justement dans de tels cas que la Confédération ne doit pas refuser son aide. Pour l'avenir, le montant des crédits nécessaires dépendra, comme pour l'arrêté actuellement en vigueur, de l'évolution de la situation. Il est malaisé de faire des prévisions à cet égard. Les dépenses de la Confédération s'accroîtraient si des nouveaux

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réfugiés arrivaient en plus grand nombre sur notre sol ces prochains temps ou si la situation économique devait faire perdre leur emploi à de nombreux réfugiés. Mais ceux qui ne sont plus tenus de partir pourront s'assurer dans une large mesure contre de tels risques. Lorsqu'au cune restriction décrétée par la police dea étrangers n'entrave leur placement, ils peuvent aussi être admis à bénéficier de l'assurance-chômage.

REMARQUES COMPLÉMENTAIRES SUR LES DIFFÉRENTS ARTICLES DU PROJET A l'article 2, la contribution de la Confédération qui, selon la teneur de l'arrêté actuel, était de 50 pour cent, a été augmentée aux trois cinquièmes. Faisant usage de la compétence qui nous est accordée par l'article 2 de l'ancien arrêté, nous avons augmenté la part de la Confédération à 60 pour cent dès le 1er avril 1950. Le nouvel arrêté prend ce taux pour base, aujourd'hui déjà, il faut cependant prévoir que l'une ou l'autre oeuvre de secours aura par la suite de la peine à fournir sa part de 40 pour .cent.

C'est pourquoi nous devrions être autorisés, comme par le passé, à élever les contributions de la Confédération lorsque, malgré toutes les démarches, il n'est plus possible à une oeuvre de secours de fournir sa part.

En ce qui concerne le financement de l'émigration des réfugiés, il est parfois nécessaire de recourir à des solutions particulières. Des réfugiés qui ont toujours été en mesure de subvenir eux-mêmes à leur entretien peuvent avoir besoin, pour émigrer dans un pays d'outre-mer, d'une somme d'argent considérable. S'ils n'étaient jusqu'ici en contact avec aucune institution d'aide, il serait, dans certains cas, inéquitable d'exiger de celle-ci une forte participation aux frais d'émigration. La division de police devrait avoir la possibilité de tenir compte des circonstances particulières du cas et d'accorder des subsides dépassant 60 pour cent des frais d'émigration.

L'article 3 est nouveau et doit permettre à la Confédération, ainsi que nous l'avons relevé, d'accorder également, dans des cas exceptionnels, des contributions aux cantons ou aux communes qui assistent des réfugiés.

Ces contributions ne doivent pas dépasser celles qui sont allouées aux institutions d'aide. L'augmentation des taux en faveur d'une oeuvre de secours n'aura pas nécessairement pour conséquence le relèvement des subsides
versés aux cantons.

"L'article 4 incorpore au projet l'aide apportée, en vertu de notre arrêté susmentionné, aux anciens réfugiés russes. Cette disposition est nécessaire parce que l'assistance telle qu'elle était accordée jusqu'ici et qui s'est révélée judicieuse, ne correspond pas au système prévu aux articles 2 ou 3.

Les secours de 4 ou 5 francs par jour que la Confédération verse dépassent souvent 60 pour cent du total des allocations; il arrive parfois aussi que ce taux de 60 pour cent ne soit pas atteint. La Croix-Rouge suisse n'alloue elle-même aucune contribution; elle ne fait que s'occuper de ses protégés.

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"L'article 5 contient les dispositions essentielles de l'arrêté fédéral du 16 décembre 1947 concernant la contribution de la Confédération aux frais d'entretien d'émigrants et de réfugiés indigents en Suisse. Rien n'est changé quant au fond à la réglementation actuelle qui concerne les seuls réfugiés autorisés d'avance à séjourner durablement en Suisse (asile durable) conformément à l'article 1er de notre arrêté du 7 mars 1947, abrogé entre-temps.

Il ne serait d'ailleurs pas juste de modifier quoi que ce soit à ces dispositions ; les cantons et les institutions d'aide doivent en effet pouvoir se fier aux assurances qui leur ont été données au moment de la mise en vigueur de l'arrêté.

L'article 6 est le pendant du deuxième alinéa de l'ancien article 3.

Les réfugiés qui sont manifestement fainéants et abusent de l'aide publique ou privée devront être astreints à quitter le pays ou, si cela n'est pas possible, être internés dans un établissement approprié, L'article 7 est nouveau. Puisque l'on fait une distinction entre les réfugiés qui sont libérés de l'obligation de quitter la Suisse et ceux qui y demeurent astreints, il y a lieu de prévoir, à l'égard de ces derniers, certaines sanctions pour le cas où ils ne partiraient pas alors qu'ils pourraient le faire dans des conditions acceptables. En pareille circonstance, l'internement s'imposera sans doute aussi.

Nous nous sommes déjà exprimés au sujet de la signification de l'article 8. Si l'on n'exige pas sur toute la ligne que l'autorisation d'établissement soit accordée aux réfugiés, cela provient de la nécessité de soumettre, pour l'instant du moins, certains réfugiés à un contrôle sans lequel ils s'occuperaient probablement d'importations, d'exportations ou d'affaires de transit ; or il n'est pas désirable que des réfugiés exercent une telle activité. Le même but est atteint si les cantons leur donnent la possibilité de gagner leur vie d'une autre manière. L'article 8 ne doit pas non plus être interprété dans ce sens que l'exercice d'une activité dépendante doive être autorisé pour toutes les professions et tous les genres d'emploi. Les restrictions seront toujours adaptées à la situation du réfugié; il ne faut pas qu'elles le privent de la possibilité d'occuper un emploi répondant à ses goûts et à ses aptitudes. Pour un réfugié possédant une
formation commerciale, l'autorisation d'exercer une activité lucrative ne devrait, par exemple, pas être limitée à la prise d'emplois dans l'agriculture, l'industrie du bâtiment ou l'hôtellerie. Elle pourrait cependant prévoir que le réfugié n'aurait pas le droit d'occuper sans permission spéciale un poste de directeur d'entreprise, tandis qu'il aurait la faculté de prendre à sa guise une place d'employé de commerce, de fondé de pouvoirs, etc.

"L'article, 9 subordonne l'octroi de contributions fédérales à la condition que le réfugié ait été astreint à déposer une garantie convenable s'il était en mesure de le faire. Nous avons déjà exposé les motifs pour lesquels cette disposition a été insérée dans le nouvel arrêté. Cet article presFeuïlle fédérale. 102« année. Vol. III.

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758 crit en outre qu'avant de solliciter l'aide de la Confédération, il convient de faire usage de telles cautions ou d'autres garanties et d'obliger les tiers à tenir les promesses de paiement qu'ils peuvent avoir faites. Cela correspond à une prescription contenue dans les dispositions d'exécution de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1948. L'expérience a montré que les cautions ou garanties ne peuvent pas être mises à contribution intégralement dans chaque cas. Il est nécessaire d'avoir égard aux circonstances dans lesquelles la promesse de paiement a été faite. Aussi la division de police examine-t-elle avec soin dans chaque cas, de concert avec l'autorité cantonale et l'institution d'aide, s'il existe des raisons suffisantes de délier un garant de la totalité ou d'une partie de ses engagements.

~L'artîcU 11 correspond à l'ancien article 5 et n'a subi que des modifications d'ordre rédactionnel. Le renvoi à l'article 3, qui constitue une innovation par rapport à l'ancien arrêté, était indispensable.

L'orticZe 13 nous autorise, comme le faisait l'article 6, à accorder à l'office central suisse d'aide aux réfugiés une subvention annuelle convenable pour ses frais d'administration. Comme la Croix-Rouge suisse reçoit, en vertu de notre ancien arrêté sur l'assistance des réfugiés russes, une subvention pour ses frais d'administration dans ce domaine et qu'il n'existe aucun motif de supprimer cette subvention, la possibilité en est prévue à l'article 13. Pour le cas où l'une ou l'autre des tâches assumées actuellement par l'office central suisse d'aide aux réfugiés ou par la Croix-Rouge suisse serait reprise par un autre organisme central, nous serions autorisés à accorder à ce dernier une subvention analogue.

Au vu des considérations énoncées ci-dessus, nous avons l'honneur de vous recommander d'adopter le projet d'arrêté modifiant l'arrêté fédéral qui concerne les contributions de la Confédération à l'assistance de réfugiés étrangers.

Nous saisissons cette occasion pour vous renouveler, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 15 décembre 1950.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Max PETITPIERRE 8518

*

Le chancelier de la Confédération, LEIMGKUBEB

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ARRÊTÉ FÉDÉRAL concernant la participation de la Confédération aux frais d'assistance de réfugiés

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 15 décembre 1950, arrête : Article premier La Confédération participe à l'assistance de réfugiés étrangers indigents. Elle contribue en premier lieu aux frais de leur entretien. Elle facilite en outre, au moyen de subsides, le départ des réfugiés qui sont tenus de quitter le pays en vertu de dispositions générales ou de décisions prises dans des cas particuliers. Elle peut aider ceux qui sont admis à demeurer en Suisse à se procurer des moyens d'existence, en contribuant aux frais de leur formation professionnelle.

Art. 2 La Confédération rembourse aux institutions privées d'aide aux réfugiés les trois cinquièmes des secours qu'elles versent, avec son assentiment, aux réfugiés dont elles s'occupent. La participation des cantons ou des communes est imputée sur la contribution fédérale.

Le Conseil fédéral est autorisé à augmenter sa contribution lorsque, malgré toutes les démarches, il n'est pas possible aux institutions d'aide de fournir leur part.

Les contributions aux frais occasionnés par le départ définitif de Suisse peuvent dépasser le taux prévu au 1er alinéa lorsque les dépenses sont particulièrement élevées et que les institutions d'aide sont fortement mises à contribution par le financement de tels départs. Exceptionnellement, la Confédération peut assumer la totalité des frais de départ.

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Art. 3 La Confédération peut allouer aux cantons ou communes qui assistent des réfugiés dont aucune oeuvre de secours ne prend soin des subsides pouvant atteindre le montant de ceux qu'elle verse aux institutions d'aide privées.

Le Conseil fédéral fixe le taux de ces subsides.

Art. 4 Pour les réfugiés de la première guerre mondiale'placés sous le patronage de la Croix-Rouge suisse, la Confédération continue à payer sa part des frais d'assistance dans la même proportion que jusqu'ici.

Art. 5 La Confédération prend à sa charge, en règle générale, le tiers des secours payés avec son assentiment, par les cantons et les communes, pour l'entretien des réfugiés autorisés à séjourner durablement en Suisse en vertu de l'arrêté du Conseil fédéral du 7 mars 1947.

Exceptionnellement, la contribution de la Confédération peut s'élever jusqu'aux deux tiers des frais. Tel sera notamment le cas lorsque, malgré toutes les démarches, aucun secours ne pourra être obtenu des institutions d'aide privées ou que les secours accordés par ces dernières seront insuffisants, ou encore lorsque les charges d'un canton seraient démesurément élevées.

La Confédération continue d'assister les réfugiés dont elle assurait l'entretien, totalement ou partiellement, avant l'octroi de l'autorisation de séjour durable.

Art. 6 Aucune contribution n'est allouée en faveur des réfugiés qui n'acceptent pas un travail que l'on pourrait raisonnablement exiger d'eux et pour lequel ils obtiendraient une autorisation, ou qui ne cherchent pas un tel travail.

Art. 7 La Confédération peut cesser de verser ses prestations en faveur des réfugiés qui, astreints à quitter la Suisse, ne saisissent pas une occasion de partir dans des conditions acceptables.

Art. 8 La Confédération ne participe à l'assistance d'un réfugié libéré de l'obligation de quitter la Suisse que si le canton a accordé au réfugié une autorisation d'établissement ou, tout au moins, une autorisation de séjour lui permettant d'exercer une activité lucrative dépendante.

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Art. 9 L'allocation de contributions fédérales est subordonnée à la condition que le réfugié ait été astreint à constituer une caution convenable, en rapport avec ses ressources, que cette caution ou d'autres garanties aient été utilisées au préalable et que les promesses de paiement souscrites par des tiers aient été tenues. Des exceptions peuvent être faites lors de circonstances particulières.

Art. 10 Sous réserve de l'article 5, des contributions fédérales ne pourront plus être accordées, après le 1er janvier 1970, qu'en faveur de réfugiés alors mineurs, jusqu'à leur vingtième année au plus tard, et en faveur de réfugiés qui auront dû recourir déjà antérieurement à l'aide des pouvoirs publics.

Art. 11 La Confédération dédommage le canton des charges qui lui sont occasionnées par l'hébergement et la subsistance d'un réfugié récemment entré en Suisse, depuis le moment où le dossier est parvenu à la division de police du département de justice et police jusqu'au moment où la décision est prise sur l'admission ou le refoulement du réfugié. Ensuite, elle contribue, en cas de besoin, à l'assistance du réfugié dont elle a décidé l'admission, dans les limites des articles 2 ou 3.

Art. 12 Aucune taxe de séjour et aucun impôt ne sera perçu des réfugiés pour l'entretien desquels des subsides sont versés dans le sens du présent arrêté.

Art. 13 Le Conseil fédéral est autorisé à accorder à l'office central suisse d'aide aux réfugiés, à la Croix-Rouge suisse ou, le cas échéant, à un autre organisme central s'occupant de l'assistance de réfugiés, une subvention annuelle convenable pour les frais d'administration qui en résultent. Le montant de cette subvention est fixé chaque année dans le budget.

Art. 14 Celui qui, intentionnellement, par des indications mensongères ou incomplètes, aura obtenu ou tenté d'obtenir, pour lui-même ou pour un tiers, des prestations dans le sens du présent arrêté, sera puni de l'emprisormcmcnt pour six mois au plus ou d'une amende de dix mille francs au plus. La poursuite et le jugement incombent aux cantons.

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Art. 15 Les prestations obtenues sans droit devront être restituées.

Doivent également être restituées, en tout ou en partie, les prestations faites pour des buts déterminés, lorsque les conditions dans lesquelles elles ont été accordée ont cessé d'exister et que le bénéficiaire est en mesure d'opérer un remboursement.

Est réservé en outre le remboursement des prestations, en tant qu'il ne constituerait pas une rigueur excessive, lorsque des biens échoient après coup à l'étranger ou lorsque son gain paraît suffisant.

Les remboursements sont répartis entre la Confédération, les institutions d'aide et, le cas échéant, les cantons au prorata des prestations effectuées.

Art. 16 Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution du présent arrêté. Le département de justice et police contrôle l'emploi judicieux des contributions de la Confédération; d'entente avec le département des finances et des douanes, il édicté les instructions nécessaires à l'application de l'arrêté et détermine notamment les institutions d'aide auxquelles des subventions peuvent être accordées, les personnes pouvant être assistées, l'étendue des prestations et la procédure à suivre dans les relations avec les cantons et les institutions d'aide privées.

Les contributions de la Confédération sont versées par la division de police. Les décisions de la division de police peuvent être déférées dans les trente jours au département de justice et police, qui statue en dernier ressort.

Art. 17 Sont abrogés: a. L'arrêté fédéral du 16 décembre 1947 concernant la contribution de la Confédération aux frais d'entretien d'émigrants et de réfugiés indi- gents en Suisse; b. L'arrêté fédéral du 21 décembre 1948 concernant les contributions de la Confédération aux institutions privées d'aide aux réfugiés, et c. L'arrêté du Conseil fédéral du 23 mars 1926 réduisant la contribution d'entretien des malades russes indigents.

Art. 18 Le présent arrêté, qui n'est pas de portée générale, a effet au 1er janvier 1951.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à la participation de la Confédération aux frais d'assistance de réfugiés (Du 15 décembre 1950)

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