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FEUILLE FÉDÉRALE 102e année

Berne, le 4 mai 1950

Volume I

Paraît, en règle générale, chaque semaine. Prix: 28 francs par an; 15 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 50 centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des hoirs C.-J.Wyss, société anonyme, à Berne

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la revision de la loi sur les brevets d'invention (Du 25 avril 1950) Muuaieur le President et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent inessage, le projet d'une nouvelle loi sur les brevets d'invention, INDEX

Pages

A.

B.

C.

D.

E.

La genèse de la loi actuelle sur les brevets d'invention . .

Les travaux préparatoires en vue de la présente revision . .

But de la révision; aperçu des principales modifications . .

L'institution de l'examen préalable Objets non touchés par le projet 1. Cour fédérale des brevets 2. Réglementation de la profession de conseil en matière de propriété industrielle 3. Pas d'extension de la protection au domaine de la sélection des plantes . .

F. Remarques sur les différentes dispositions G. Postulats en relation avec la revision de la loi sur les brevets d'inventimi

H. Remarques Tableaux I à IV Proict de loi Feuille fédérale. 102eannée. Vol. I.

finales

. .

934 934s.

937s.

940 s 949 949 s 953 s 955 s 958 s

1033 1034 1035 1040 65

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A. La genèse de la loi actuelle sur les brevets d'invention En 1887, l'article 64 de la constitution a été complété par une disposition donnant à la Confédération le droit de légiférer « sur la protection des dessins et modèles nouveaux, ainsi que des inventions représentées par des modèles et applicables à l'industrie ». C'est sur cette disposition que se fondait la première « loi fédérale du 29 juin 1888 sur les brevets d'invention », entrée en vigueur le 15 novembre 1888. L'invention devait être représentée par un modèle. Cette exigence eut en particulier pour conséquence que les inventions de procédés de toute sorte, tels que procédés pour la fabrication d'un produit, restaient exclues de la protection. Dans un traité de commerce conclu au début de ce siècle avec notre pays, l'Allemagne se réservait de supprimer la franchise de douane accordée pour « l'aniline et autres substances colorantes, non spécialement mentionnées, tirées du goudron » si, jusqu'au 31 décembre 1907, la Suisse ne modifiait pas sa législation de façon que ces produits ou les produits semblables, ou les procédés servant à leur fabrication, pussent être brevetés. Cette attitude de l'Allemagne eut pour effet de provoquer, tout d'abord, une revision de l'article 64 de la constitution. L'obligation de représenter l'invention par un modèle fut abandonnée. La nouvelle disposition, qui donnait à la Confédération le droit de légiférer « sur la protection des inventions applicables à l'industrie, y compris les dessins et modèles », fut acceptée par le peuple et les cantons le 19 mars 1905. Après quoi, la revision de la loi de 1888 fut mise en train. La nouvelle loi fut adoptée par les conseils législatifs le 21 juin 1907 et entra en vigueur le 1er décembre 1907. Depuis lors, elle a été modifiée deux fois sur des points secondaires: En vertu de la loi du 9 octobre 1926, il fut désormais possible de rétablir le brevet tombé en déchéance faute de paiement d'une annuité (art. 17, 2e al., de la loi actuelle); après l'adhésion de la Suisse au texte de la convention d'union de Paris revisée à La Haye en 1925, la loi du 21 décembre 1928 adopta des dispositions moins sévères en ce qui concerne l'obligation d'exécuter l'invention dans le pays (art. 18 de la loi actuelle), en même temps qu'elle prévoyait la possibilité d'une licence obligatoire
pour des raisons d'intérêt public (art. 22 bis de la loi actuelle).

B. Les travaux préparatoires en vue de la présente révision 1. Au cours des travaux préparatoires qui ont abouti à la revision du 21 décembre 1928, certaines modifications, qui eussent dépassé le cadre d'une simple adaptation de la loi au texte revisé de la convention d'union de Paris, ont été proposées de différents côtés. Ces voeux n'ont pas été, à l'époque, exaucés par les autorités législatives; celles-ci avaient en revanche déclaré qu'elles entreprendraient prochainement une revision totale de la loi. A la suite de cette promesse, le département fédéral de jus lice et police fit en 1930 une enquête auprès des milieux suisses qui pouvaient être inté-

935 ressés à la revision, afin de se rendre compte des points les plus importants sur lesquels la revision était souhaitée. Il se servit à cette fin d'un questionnaire contenant des explications détaillées. L'étude des réponses fut dans la suite retardée. Les raisons en furent essentiellement les suivantes: On avait tout d'abord jugé nécessaire d'attendre les résultats de la conférence, prévue pour l'année 1934, de l'union internationale pour la protection de la propriété industrielle, afin de pouvoir en tenir compte aussi lors de la revision de la loi. Les décisions prises par la conférence, qui tint ses assises à Londres en 1934, furent approuvées par arrêté fédéral du 19 juin 1939 (BO 55, 1275). Sur deux points seulement elles nécessitent une modification de la loi sur les brevets d'invention: tout d'abord en ce qui concerne la sauvegarde de l'honneur de l'inventeur et ensuite en ce qui concerne les mesures tendant à assurer l'exploitation de l'invention en Suisse (voir ci-dessous les remarques faites aux art. 5 et 6, ainsi qu'aux art. 37 à 39). La seconde guerre mondiale suspendit pour un temps les travaux de revision. Au cours de l'année 1944, la question fut reprise par le groupe suisse de l'association internationale pour la protection de la propriété industrielle et par l'association suisse des conseils en matière de propriété industrielle. Le résultat de leurs délibérations fut soumis au département de justice et police.

2. Dès lors, le bureau de la propriété intellectuelle élabora un « Ier avant-projet », qui fut soumis à la fin de l'année 1945 aux organismes intéressés, en même temps qu'un « rapport » explicatif. Le département de justice et police institua une commission d'experts, chargée de donner son avis sur l'avant-projet. Furent appelés à faire partie de la commission comme représentants: MM. Eugène Blum, ingénieur-conseil, secrétaire général de l'association internationale pour la protection de la propriété industrielle, Zurich, P. Bolla, juge fédéral, Lausanne, P. Casparis, professeur à l'université de Berne, Jacques Cornu, avocat, La Chaux-de-Fonds, Georges Dériaz, ingénieur-conseil, Genève, Ludwig Frank, avocat, Zurich, G. Heberlein, fabricant, Wattwil, Hummler, secrétaire de l'union suisse des constructeurs de machines, Zurich, E. Iklé, avocat, St-GalI, Eubli, directeur, Baie, Erwin Matter, avocat, Berne, A. Montandoli, médecin, Genève,

du groupe suisse de PAippi;

du Tribunal fédéral; du service fédéral de l'hygiène publique; de l'industrie horlogère suisse ; del'associationsuissedesconseilsen matière de propriété industrielle ; de l'union syndicale suisse; de l'industrie suisse du textile ; de l'industrie suisse des machines ; de l'industrie suisse du textile; du syndicat des intérêts de la pharmacie suisse; de la fédération des médecins suisses;

936 comme, représentants: MM. G. de Montmollin, directeur, Baie, de l'industrie chimique suisse; W. Müller, avocat, Zurich, de l'industrie suisse des machines; W. Oechslin, fondé de procuration à la fade l'industrie suisse des machines ; brique de machines Oerlikon, Henri Perret, directeur du technicum cande l'union syndicale suisse; tonal, Le Locle, Tell Perrin, professeur et avocat, La Chaux du groupe suisse de l'Aippi; de-Fonds, P.-J. Pointet, secrétaire du directoire, du directoire de l'union suisse du Zurich, commerce et de l'industrie; Otto Schmid, administrateur de la caissedu concordat des caisses-maladie maladie Helvetia, Zurich, suisses; M. Stähelin, professeur à l'université de Baie, Boger Thorens, directeur de la maison de l'association suisse des fabriE. Paillard et Cie, S. A., Ste-Croix, cants de T.S.F.; F. Trachsel, ingénieur de la maison Gfeller de l'union suisse des techniciens; S, A., Bümpliz G. Volkart, ingénieur-conseil, président de de l'association suisse des conseils en matière de propriété indusl'association suisse des conseils en matière de propriété industrielle, Zurich, trielle; B. Zumbühl, secrétaire de la société suisse de l'union suisse des arts et métiers.

des constructeurs de chauffages centraux, Zurich, (Le groupe suisse de l'Aippi fut tout d'abord représenté, à côté de M. Blum, par son président, M. Alexandre Martin-Achard, de Genève. Ce dernier étant tombé malade, il dut se faire remplacer par M. Joseph Braun, avocat à Baie, qui fut nommé membre de la commission après le décès de M. Martin-Achard. M. Braun étant également décédé, il fut remplacé, pour la dernière session, par M. Tell Perrin.)

Firent également partie de la commission, d'office, M. H. Morf, directeur du bureau de la propriété intellectuelle, et M. A. Stierlin, sous-directeur du même bureau. M. P. Graf, 1er adjoint de ce bureau, prit part aux délibérations comme expert dans les questions touchant aux inventions chimiques et aux inventions de remèdes. Les procès-verbaux furent rédigés par M. W. Stamm, IIe adjoint, dudit bureau (pour les 4 sessions), M. J. E, Fierz, ingénieur diplômé (pour les lre et 2e sessions) et par M.L.

Egger, licencié en droit (pour les 3e et 4e sessions).

Les séances de la commission furent présidées par M. de Steiger, conseiller fédéral, chef du département de justice et police, ou, en cas d'empêchement, par le directeur du bureau de la propriété intellectuelle.

3. Le premier avant-projet fut examiné au cours de deux sessions, qui eurent Heu du 20 au 22 mai 1946, à Berne, et du 2 au 4 juillet 1946, à Gunten. A la suite de ces délibérations, le bureau de la propriété intellectuelle élabora un double avant-projet, l'avant-projet II A, qui maintenait le système actuel d'examen, et l'avant-projet II B, qui prévoyait l'examen préalable. Une troisième session de la commission des experts, qui eut

937 lieu du 19 au 21 novembre 1947,, à Vevey, fut consacrée aux deux nouveaux avant-projets. Enfin, un troisième avant-projet fut soumis aux délibérations de la commission, dans une dernière session qui se tint à Neuchâtel du 21 au 22 octobre 1948. Le projet qui vous est soumis s'est inspiré des travaux fournis par la commission des experts. Chaque fois qu'il s'écarte des recommandations de la commission, le fait est relevé, avec un exposé des motifs, dans les « Remarques sur les différentes dispositions » (voir ci-dessous). Le projet correspond à l'avis exprimé par la commission partout où lesdites remarques ne contiennent à ce sujet aucune observation spéciale.

4. Outre les associations ou institutions représentées dans la commission des experts, ont eu également l'occasion de faire des propositions en vue de la revision de la loi: 1. Le président du conseil d'école de l'école polytechnique fédérale; 2. La société suisse des ingénieurs et des architectes; 3. L'union suisse des chimistes; 4. La société suisse des contremaîtres; 5. La fédération des sociétés suisses d'employés.

Chaque fois que le cas s'est présenté, ces organismes ont été informés directement des raisons pour lesquelles leurs propositions n'ont pu être prises en considération dans le présent projet.

C. But de la révision; aperçu des principales modifications I. BUT DE LA REVISION Pendant toute la durée des travaux de revision, personne n'a jamais rais en question le principe même de la protection accordée par les brevets d'invention. H n'y a là cependant rien d'étonnant. Notre pays a un intérêt vital à avoir une industrie, notamment une industrie d'exportation prospère. Pour être à même de soutenir la concurrence avec l'étranger, notre industrie doit se maintenir au niveau d'une technique toujours plus développée. Elle ne pourra le faire que si l'initiative privée continue à prendre sur elle les sacrifices qu'exigé la réalisation d'une invention, depuis le moment où se pose le problème qu'il s'agit de résoudre jusqu'à celui où l'invention est prête à être exploitée. Or, les inventeurs ne seront disposés à faire ces sacrifices que s'ils sont assurés de ne pas avoir à partager avec d'autres le profit matériel tiré de l'invention, ou même que ce profit ne leur sera pas soustrait complètement par des tiers. Ils ne pourront avoir
cette assurance que s'ils obtiennent, pour un certain temps au moins, le droit d'interdire à un tiers quelconque d'utiliser leurs inventions. Il ne faut pas oublier non plus quo la Suisse, qui s'insère dans l'éuouomie mondiale, ne saurait se permettre de ne tenir aucun compte du développe-

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ment, observé à l'étranger, dans le domaine de la protection de la propriété industrielle. A ce point de vue, rien ne justifierait non plus un renversement complet de la situation actuelle. Il n'est pas possible, à l'heure qu'il est, de distinguer à l'étranger aucune tendance qui mette en question les buts visés jusque-là par la protection des brevets d'invention, ou les moyens d'assurer cette protection. On y discerne en revancbe certaines tendances contre la formation de cartels et les accords sur le partage des marchés, tels qu'ils peuvent s'observer dans la grosse industrie détentrice de brevets. Mais les mesures qu'il pourrait être nécessaire de prendre en ce domaine n'entrent pas dans le cadre d'une loi sur les brevets d'invention, Le seul but de la présente revision est donc de corriger les imperfections dont souffre la réglementation actuelle et qui sont dues aux changements d'ordre technique et économique qui se sont produits depuis 1907. Il importe en ce faisant de maintenir le principe selon lequel un compromis équitable doit être trouvé entre les intérêts des inventeurs et ceux de la communauté.

II. APERÇU DES PRINCIPALES MODIFICATIONS 1. La modification de loin la plus importante consiste dans l'institution de ce qu'on est convenu d'appeler l'examen préalable. Cette proposition est motivée de façon détaillée sous lettre D ci-dessous. A signaler en outre : 2. L'abandon du paragraphe dit textile (voir les remarques faites à l'art. 2, in fine); 3. La prolongation de la durée de protection de 15 à 18 ans (avec, en même temps, la renonciation à une durée de protection plus courte pour les inventions de procédés chimiques concernant la fabrication des remèdes ; voir les remarques faites à l'art. 14); 4. L'assouplissement des prescriptions relatives à 1'« unité chimique » (voir les remarques faites à l'art. 62) ; 5. Une réglementation plus complète en ce qui concerne la sanction civile et pénale, avec, en même temps, l'adaptation aux dispositions du code pénal suisse (voir les remarques faites aux art. 85 s.) ; 6. A mentionner, au point de vue de la forme : a. L'abrogation de la loi fédérale du 3 avril 1914 sur les droits de priorité relatifs aux brevets d'invention, etc., en tant qu'elle se rapporte aux brevets d'invention, et la reprise des dispositions ainsi abrogées dans la loi sur les
brevets d'invention (voir les remarques qui précèdent l'art. 17) ; b. Une ordonnance plus exacte et la répartition de toute la matière en titres et chapitres, ce qui permettra de ss renseigner plus facilement sur le contenu de la loi.

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7. Compromis entre les différents intérêts en présence : Si l'on compare enfin le projet et la loi actuelle du point de vue des intérêts des inventeurs, d'une part, et de la communauté, d'autre part, on relèvera surtout, abstraction faite de l'examen préalable: En faveurs des inventeurs: a. L'élargissement du domaine des inventions brevetables (notamment par la suppression du paragraphe textile), art. 2; b. La sauvegarde de l'honneur de l'inventeur (art. 5 et 6) ; c. La prolongation de la durée de protection (art. 14) ; d. L'assouplissement des prescriptions relatives à la renonciation partielle (art. 24 et 25) ; e. Le droit à une indemnité « pleine et entière » en cas d'expropriation du brevet (art. 32) ; /. L'allégement des prescriptions relatives à l'obligation d'exécuter l'invention dans le pays (art. 37 à 39); g. L'élargissement du champ d'application du sursis accordé aux indigents (art. 45) ; h. La possibilité de restitution pour les délais échus (art. 48 et 49) ; ». L'assouplissement des prescriptions relatives au nombre et au contenu des revendications (art. 61 et 62) ; k. Une réglementation plus complète en ce qui concerne la sanction civile et pénale (art. 85 à 106).

En faveur de la communauté : a. L'élargissement du cercle des publications destructrices de nouveauté (art. 7) ; b. L'obligation, pour le titulaire du brevet, de donner les renseignements demandés lorsqu'il use de mentions relatives à l'existence d'une protection .(art. 12); c. L'obligation, pour le titulaire du brevet, de donner des renseignements sur le sort de la demande de brevet déposée antérieurement à l'étranger (art. 26, 2e al.) ; d. L'élargissement des prescriptions relatives à la licence accordée en cas d'invention dépendante (art. 36) ; e. La possibilité d'obtenir une licence, à titre provisoire, après l'introduction d'une action intentée pour cause d'inexécution de l'invention en Suisse (art. 37, 3e al.) ; /. La sauvegarde du secret de fabrication ou d'affaires (art. 87) ; g. L'interdiction d'accumuler les actions (art. 90).

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Rappelons encore à ce propos que l'article 132 de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite, revisé par l'article 8 de la loi du 28 septembre 1949 portant revision de la loi précitée (HO 1950, 57), a été rédigé de manière à prévenir la vente à tout prix en cas de réalisation forcée des brevets d'invention. Cette disposition a été adoptée à la suite d'un voeu émis par la commission des experts.

D. L'institution de l'examen préalable 1. Le système aduel d'examen. -- Selon la loi actuelle, la demande de brevet doit être examinée par le bureau sur les points suivants : L'invention est-elle susceptible d'exploitation industrielle ? La protection revendiquée est-elle clairement délimitée ? (fixation nette de la portée juridique du brevet) ; l'unité de l'invention est-elle sauvegardée ? Les dispositions spéciales relatives à l'unite des inventions ayant pour objet la fabrication de substances chimiques sont-elles observées ? Le cas échéant, l'invention tombe-t-elle sous le coup des dispositions légales excluant de la protection certaines inventions ? Lorsqu'il s'agit d'une-demande de brevet additionnel, y a-t-il en outre avec le brevet principal une relation additionnelle ? Si la demande de brevet présente des défauts qui peuvent être corrigés, le bureau en avise le déposant et lui donne au besoin les indications nécessaires pour les corriger. Si la demande est en ordre sur les points mentionnés ci-dessus, le brevet doit être délivré. En revanche, la demande n'est pas examinée du point de vue de la nouveauté, du progrès technique réalisé et du niveau de l'invention. Par conséquent, le titulaire du brevet court le risque de voir dans la suite son brevet déclaré nul par le juge ordinaire, s'il se révèle que l'invention n'était plus nouvelle au moment du dépôt de la demande, ou si le juge estime qu'il n'y a pas d'invention digne d'être brevetée, mais qu'il s'agit d'un simple tour de main à la portée de n'importe quel homme du métier.

H est incontestable qu'un brevet accordé pour une invention examinée du point de vue de sa nouveauté et de son caractère inventif se vend plus facilement qu'un brevet délivré pour une invention non soumise à cet examen, puisque, dans ce dernier cas, l'acquéreur risque toujours de voir son brevet déclaré nul par la suite. N'oublions pas que de nombreux inventeurs ne
sont pas en mesure d'exploiter eux-mêmes leurs inventions et qu'ils ne peuvent en tirer profit qu'en les vendant.

Pourtant, en 1888 comme en 1907, le législateur a laissé aux parties intéressées le soin de faire examiner l'invention du point de vue de la nouveauté ou du caractère inventif, à leurs propres frais, par la voie d'une procédure en nullité devant les tribunaux ordinaires. II a estimé que l'examen préalable exigerait une documentation et un personnel trop considérables et trop coûteux pour un pays comme la Suisse; qnn le déposant qui avait des doutes sur le caractère brevetable de son invention avait la possibilité

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de s'en assurer, sans trop de frais, en déposant une demande de brevet dans un pays connaissant l'examen préalable, et enfin que les tiers n'avaient pas à se soucier des brevets accordés pour des inventions dont ils savent qu'elles n'étaient plus nouvelles au moment du dépôt de la demande de brevet.

2. Au cours de l'élaboration du premier avant-projet, personne ne contesta que certaines raisons eussent pu justifier l'institution de l'examen préalable, malgré les frais élevés qu'elle eût entraînés ; d'autant plus qu'après l'effondrement de l'Allemagne, le bureau allemand des brevets fut fermé et qu'il n'était dès lors plus possible de s'en tirer en déposant une demande de brevet dans ce pays. L'avant-projet n'en fut pas moins construit sur le système actuel d'examen, parce qu'en 1946 il semblait encore impossible de trouver, dans un avenir plus ou moins rapproché, le nombreux personnel technique que nécessite l'examen préalable.

La commission des experts, dans laquelle étaient représentés tous les milieux du pays intéressés à la protection des brevets d'invention, a cependant estimé, à une grande majorité, que l'institution de l'examen préalable en Suisse répondait à un besoin pressant. Le groupe suisse de l'association internationale pour la protection de la propriété industrielle et l'association suisse des conseils en matière de propriété industrielle ont par la suite présenté au bureau de la propriété intellectuelle des propositions sur la meilleure façon, à leur avis, de régler la procédure d'examen. Ces propositions ont été inspirées, essentiellement, des règles en vigueur jusque-là en Allemagne. Elles servirent subséquemment de base pour l'élaboration des avant-projets et du projet actuel. Pour les détails de cette procédure, veuillez vous reporter aux remarques concernant le titre deuxième du projet (p. 994 s.).

3. Les besoins du bureau, sous le régime de l'examen préalable, seront les suivants: a. Personnel: Durant ces dernières années, plus de 10 000 demande« de brevets ont été déposées chaque année. On peut s'attendre, après l'institution de l'examen préalable, à un certain recul dû à l'augmentation des taxes. Il faut compter cependant sur une moyenne annuelle de 8000 demandes environ. D'après les expériences faites en Allemagne et en Hollande, le nombre des demandes traitées en une
année par un expert varie entre 75 et 80 en moyenne. Il faudra donc disposer de quelque 100 examinateurs, D'autre part, les demandes de brevet peuvent être déposées en Suisse dans les trois langues officielles. Chaque expert ne pouvant cependant correspondre dans plus d'une langue, il en résultera un besoin supplémentaire de personnel que l'on peut évaluer à 15 personnes. Les examinateurs seront réunis en groupes, d'après les domaines auxquels ressortissent les demandes. Chaque groupe a.nra. à. sa tète im elief, chargé de veiller à une pratique uniforme, de surveiller le travail des examinateurs et de former

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le personnel nouveau. A cet effet, 15 à 20 techniciens supplémentaires seront nécessaires.

A ajouter, pour quatre sections des brevets, seize techniciens et quatre juristes, et pour trois sections des recours, douze techniciens et trois juristes.

L'effectif sera donc d'environ 160 techniciens et sept juristes.

Au personnel technique s'ajoute, en Hollande comme en Allemagne, un personnel administratif, chargé de tenir le registre, d'expédier la correspondance, d'assurer le service de caisse, celui des archives, etc., et dont l'effectif est plutôt supérieur au premier. Si l'on compte que le personnel administratif sera à peu près égal en nombre au personnel technique, on arrive à un effectif total de 340 personnes environ.

En 1949, les dépenses du bureau pour le personnel de la section des brevets, qui comprenait 92 personnes, se sont montées à 1,28 million de francs environ. Les dépenses pour le personnel du bureau agrandi peuvent donc être estimées à 4,4 millions de francs environ.

6. Les dépenses pour le matériel de bureau se sont élevées en 1949 à 50 000 francs environ ; ces dépenses seront donc, pour un personnel à peu près quatre fois plus nombreux, de quelque 200 000 francs.

c. Les frais d'impression des expoyé« d'invention, etc. ont été caluuléa pour 1949 à 500 000 francs en chiffres ronds. Ici, l'augmentation des dépenses ne sera probablement pas très sensible; ce qu'il faudra payer en plus pour des formules et les publications dans la Feuille officielle du commerce sera en partie compensé par une certaine diminution du nombre des exposés d'invention. La dépense peut être calculée à 600 000 francs environ.

d. Bibliothèque. L'examen des demandes de brevet du point de vue de la nouveauté suppose que les examinateurs disposent d'une documentation leur permettant d'obtenir des résultats utiles. Cette documentation est constituée avant tout par les exposés d'invention publiés dans les autres pays. Ces exposés pourront, pour la plupart, être obtenus par échange de nos propres exposés, c'est-à-dire sans trop de frais. Il en sera autrement de la bibliographie technique, qui est très coûteuse. Celle dont le bureau dispose actuellement est absolument insuffisante pour les besoins d'un examen préalable. Il n'est cependant pas possible de prévoir dès maintenant, même approximativement, le montant
des dépenses qu'exigera l'achat de la bibliographie nécessaire.

e. Bâtiment nouveau. Le bureau agrandi devra occuper un bâtiment spécial. Les locaux dont dispose le personnel actuel sont déjà trop exigus.

Il s'agira d'obtenir non seulement des locaux de travail pour le personnel, mais encore les salles nécessaires aux débats devant les sections des brevets et les sections des recours, ainsi que des salles d'attente pour les parties et leurs mandataires; il faudra disposer en outre de halles où le public pourra prendre connaissance des demandes de brevet exposées (art. 70 du

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projet), d'une salle publique de lecture pour la collection des exposés d'invention, etc.

Là non plus, il n'est pas possible de prévoir actuellement à combien se monteront les dépenses que nécessitera la nouvelle construction et son aménagement.

4. Financement, La commission des experts a reconnu elle-même que le bureau agrandi devra, en principe, subvenir lui-même à ses besoins.

Or, il ne pourra le faire que si les taxes de tous genres sont, pour une partie du moins, augmentées de façon massive.

Sont visées avant tout les taxes de dépôt et les annuités. Ces dernières sont réglées de la façon suivante : Le titulaire du brevet doit verser chaque année, durant toute la durée de protection du brevet (aujourd'hui 15 ans, dorénavant 18 ans à compter du dépôt de la demande), une annuité, chaque année plus forte. Si l'annuité n'est pas payée dans le délai fixé, le brevet tombe en déchéance. L'Etat n'a aucun droit au paiement des annuités pendant la durée maximum de protection. Le titulaire du brevet ne payera les annuités qu'aussi longtemps qu'il aura un avantage à maintenir son brevet ; il y renoncera dès que son invention paraît dépassée, du point de vue économique ou technique. L'expérience a montré que sur cent brevets délivrés, 70 seulement subsistent encore au bout de 3 ans; après 6 ans, il en reste encore 45 et 6 environ seulement sont maintenus jusqu'à la fin de la durée maximum de protection prévue par la loi. Des chiffres semblables ont aussi pu être notés à l'étranger.

Le projet prévoit de porter dorénavant les taxes de dépôt de 40 à 60 francs, et les annuités, qui sont actuellement de 20 francs pour la l*e année et de 160 francs pour la 15e et dernière année, à 80 francs pour la 3e année jusqu'à 900 francs pour la 18e et dernière année (voir art. 41 et 43).

(La commission des experts s'est déclarée favorable à une échelle, variant entre 80 et 800 francs, calculée sur la base des comptes de l'année 1946. Tous les frais ayant augmenté depuis lors, il convient de prévoir aussi une certaine augmentation des annuités, du moins pour les dernières années, si l'on veut s'en tenir au principe selon lequel le bureau doit subvenir à ses dépenses lui-même.)

En admettant une moyenne de 4000 brevets délivrés chaque année, on peut estimer à 5 millions de francs environ la recette que les taux prévus
dans le projet permettront d'obtenir. Cette somme ne pourra cependant pas être atteinte tout de suite, mais seulement à partir de la 18e année à compter de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Ce n'est qu'à partir de ce moment-là que tous les brevets encore en vigueur seront soumis au paiement des nouvelles taxes. Durant la période transitoire, il y aura encore un certain nombre (qui diminuera d'année en année) de brevets délivrés sous l'empire de l'ancienne loi et pour lesquels ne pourront par

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conséquent pas être perçues les taxes majorées prévues par le projet.

Ce dernier prévoit bien, pour ces anciens brevets également, des taxes plus élevées; cette augmentation doit cependant se borner à compenser la dévaluation de l'argent intervenue depuis 1907; l'annuité maximum est portée de 160 francs pour la 15e année à 350 francs pour la 18e année (voir art. 110).

La somme de 5 millions de francs en chiffres ronds ne pourra donc pas encore être atteinte durant la période transitoire. Mais le bureau luimême ne s'agrandira que graduellement, et plus il s'agrandira, plus nombreux seront les brevets soumis aux nouvelles taxes.

5. Quant à savoir s'il sera possible, en Suisse, d'obtenir le personnel technique et la documentation nécessaires à l'institution de l'examen préalable, c'est là une question qui appelle les remarques suivantes: a. Lors de la rédaction du premier avant-projet, la réponse devait être encore négative, ainsi que nous l'avons dit. Il n'y avait pas d'espoir, à ce moment-là, d'obtenir un nombre suffisant de techniciens. Ceux-ci étaient absorbés par l'industrie dans une mesure telle qu'il était déjà extrêmement difficile pour le bureau de suppléer aux départs ordinaires de son personnel. Mais depuis lors, la situation s'est sensiblement modifiée.

Le bureau n'aura évidemment pas à engager et à former d'un seul coup tout le personnel technique nécessaire; il devra le faire peu à peu, au cours d'une assez longue période. De cette façon, on peut être assez certain, aujourd'hui, de trouver un nombre suffisant de candidats qualifiés.

b. Il ne sera pas facile non plus de se procurer la documentation indispensable à un examen préalable utile. Il ne s'agira pas seulement de rassembler une bibliographie technique considérable (exposés d'invention étrangers, bibliographie scientifique, etc.); il faudra en outre la classer, et prendre toutes les mesures nécessaires pour que les experts puissent l'utiliser avec un minimum de temps. Mais, là encore, les difficultés ne seront pas insurmontables. Le bureau pourra probablement compter sur l'appui de certains bureaux étrangers (ceux-ci pourront, par exemple, lui remettre des listes bibliographiques).

c. Rappelons encore à ce propos la fondation récente d'un « bureau international des brevets ».

Le 6 juin 1947, la France, la Belgique, le
Luxembourg et la Hollande ont conclu un accord portant création d'un bureau international des brevets, avec siège à La Haye. Cet accord est entré en vigueur le 10 juin 1949.

Selon l'article premier, le bureau a pour mission ... de donner aux gouvernements des Etats parties au présent accord des avis motivés eux la nouveauté des iiiveiitiuiis, ubjeta de demandes de brevets déposées dans les services nationaux respectifs de la propriété industrielle.

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Le bureau international ne délivrera donc pas lui-même des brevets valables pour tous les Etats parties à l'accord; il aura pour seule mission de décharger les bureaux des pays membres des recherches nécessaires en vue de déterminer si l'invention faisant l'objet d'une demande de brevet a déjà été publiée ou non. A cet effet, le bureau des brevets de chaque pays devra remettre au bureau international de La Haye un double de la description de l'invention. Le bureau international recherchera dans sa documentation si l'invention a déjà fait l'objet de publications et communiquera le résultat de ses recherches au bureau national. Une fois en possession de ce rapport, le bureau national devra encore vérifier si les conditions nécessaires à la délivrance du brevet sont remplies ou non. Lorsqu'il y a examen préalable, le bureau devra en outre examiner si l'invention est digne d'être protégée par un brevet, c'est-à-dire si elle représente un progrès technique suffisant et repose sur une idée créatrice.

H s'ensuit que cette organisation internationale permet d'éviter un double emploi, au fond irrationnel, qui consisterait en ce que chaque bureau national connaissant l'examen de nouveauté doive se procurer et entretenir la même documentation considérable. Mais il est certain, d'autre part, que l'adhésion à cet accord (qui ne serait en soi pas exclue pour la Suisse) ne saurait remplacer l'examen préalable dans le pays. Même s'il n'y a plus de recherches à faire sur les publications déjà existantes, le vaste appareil décrit plus haut devra être maintenu pour l'examen des autres conditions nécessaires à la délivrance du brevet et en outre pour traiter les oppositions et les recours. Déchargé des recherches sur les publications déjà existantes, l'examinateur gagnerait certainement du temps qui lui permettrait de traiter un plus grand nombre de demandes. Il pourrait en résulter une économie non négligeable de personnel technique. Cet avantage, et celui qu'il y aurait à libérer notre pays de l'obligation d'entretenir lui-même une documentation considérable, font que cette solution doit être envisagée avec une attention particulière. La question n'est toutefois pas assez élucidée pour qu'une décision puisse être prise maintenant déjà.

Le bureau international pourra disposer de la documentation, très volumineuse,
du bureau hollandais des brevets. Mais un certain temps se passera encore avant qu'il puisse commencer son activité. Pour l'instant, on n'a fait qu'en nommer le directeur, qui doit encore recruter le personnel nécessaire. D pourra, à vrai dire, engager un certain nombre d'experts du bureau hollandais, mais ils ne suffiront sans doute pas pour tout le travail auquel le bureau international peut s'attendre. Tant qu'il ne disposera pas d'un personnel suffisant, on peut considérer que l'adhésion de nouveaux Etats ne sera pas désirable.

Il importerait enfin de savoir comment le bureau international collaborera avec les bureaux de chaque pays pour traiter les différents cas

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qui se présenteront; dans quelles langues pourront être rédigées les pièces qui devront lui être soumises et à combien se montera le total des frais.

Les renseignements font encore défaut sur ces différents points. Dans ces conditions, il convient, semble-t-il, d'attendre encore avant de prendre une décision concernant l'adhésion de la Suisse à l'accord international.

6. Reste encore à savoir s'il ne serait pas possible d'obtenir, dans l'examen des demandes de brevet, des résultats suffisants à moins de frais. En fait, on a souvent proposé de se contenter d'une simple procédure d'opposition. Le bureau n'aurait pas à examiner lui-même si l'invention est nouvelle ou si elle est digne d'être protégée. La demande de brevet, qui satisferait pour le reste aux prescriptions légales, serait publiée et toute personne pourrait s'opposer à la délivrance du brevet, en prouvant que l'invention n'est pas nouvelle ou qu'elle ne constitue pas un progrès technique suffisant. De cette façon, l'examen se limiterait aux cas auxquels les milieux intéressés attachent effectivement de l'importance. Ce système pourrait dès lors être appliqué par un personnel notablement réduit et serait par conséquent sensiblement moins onéreux. Enfin, il ne serait plus nécessaire d'entretenir une documentation vaste et coûteuse.

Certes, une telle solution permettrait de réduire les frais de personnel et de documentation. Mais même de cette façon, le bureau devrait être sensiblement agrandi et disposer d'un bâtiment en propre. L'appareil nécessaire pour traiter les oppositions faites par des tiers après la publication des demandes de brevet devrait être en effet exactement le même que pour traiter les oppositions dans le système de l'examen préalable (débats devant les sections des brevets et les sections des recours). Mais surtout, les résultats obtenus ne correspondraient pas du tout aux frais.

Le fait qu'il n'y a pas eu d'opposition après la publication de la demande ne prouverait pas encore que l'invention est nouvelle et digne d'être protégée par un brevet. S'il n'y a pas eu d'opposition de la part des tiers intéressés, c'est peut-être, par exemple, qu'ils n'ont pas pris la peine de le faire ; ils continueront ainsi à utiliser l'invention, sans égard pour le brevet, quittes à faire valoir leurs arguments contre sa validité au
moment où ils seraient poursuivis pour violation du brevet. Les inventeurs peu expérimentés, précisément, seraient tentés de croire que l'absence d'opposition prouve que leur invention est nouvelle et digne d'être protégée. Ajoutons qu'en réalité seules quelques maisons disposant de gros capitaux seraient en mesure de vérifier les publications des demandes de façon suivie et de faire opposition; elles pourraient être tentées -- et ce serait là une conséquence indésirable -- de tenir en respect des concurrents plus faibles en multipliant les oppositions. La commission des experts a porté, elle aussi, le même jugement sur le système de la simple procédure d'opposition.

Elle ne l'a pas admis comme une solution definitive, les resultala qu'il permettrait d'obtenir n'en justifiant pas les frais. Ce système pourra, en

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revanche, être appliqué durant la période transitoire entre la procédure actuelle d'examen et l'examen préalable (voir les remarques faites à l'art. 109); en effet, plusieurs années s'écouleront encore avant que l'on dispose du matériel et du personnel nécessaires à l'examen préalable.

7. Il ne reste donc plus, en réalité, qu'à choisir entre le maintien du système actuel d'examen et l'institution de l'examen préalable. Ce dernier système a suscité de tout temps, en Suisse comme à l'étranger, des objections de principe que nous exposons ci-après afin d'éclairer toutes les faces du problème.

a. D'aucuns jugent déraisonnable de soumettre chaque demande de brevet à un examen aussi coûteux, quand on sait qu'une grande partie des brevets tombent en déchéance au bout de peu d'années déjà et que sur cent d'entre eux, six environ seulement sont maintenus jusqu'à la fin de la durée maximum de protection.

Sans doute, de fortes sommes sont-elles consacrées à des inventions qui, au fond, ne le méritent pas. Mais ce n'est pas là une raison décisive pour dénier à l'examen préalable toute justification. L'intérêt général veut que les brevets soient délivrés en nombre aussi restreint que possible.

Le brevet constitue en effet un monopole, qui entrave la concurrence.

Or, l'examen préalable est le seul moyen efficace de réduire le nombre des brevets à un minimum. Si les frais qu'entraîné cet examen n'étaient réellement pas justifiés, il serait incompréhensible qu'aucun des pays étrangers ayant adopté ce système ne songe sérieusement à l'abandonner.

b. D'autres font remarquer qu'aucun Etat ne garantit la validité du brevet. Malgré l'examen préalable, son titulaire doit compter avec la possibilité de voir le brevet déclaré nul dans la suite, faute de nouveauté de l'invention, certains faits destructeurs de nouveauté ayant échappé lors de l'examen de la demande.

Il est exact encore une fois que, même après l'institution de l'examen préalable, le juge pourra subséquemment prononcer la nullité du brevet.

Mais il ne saurait en être autrement. L'examen préalable ne saurait aboutir pour chaque invention à des résultats absolument certains. D'autre part, il serait intolérable d'exclure toute possibilité d'éliminer ultérieurement un brevet accordé pour une invention qui, en réalité, n'était plus nouvelle.

La loi
allemande, revisée en 1936, avait limité dans le temps la possibilité d'intenter l'action en nullité. Mais au bout de peu d'années déjà, on fut obligé d'abandonner cette solution, précisément parce qu'elle avait eu pour effet de rendre inattaquables même les brevets accordés pour des inventions apparaissant subséquemment comme non brevetables. Quand bien même l'examen préalable ne saurait garantir la validité du brevet, la présomption de validité est cependant autrement plus forte qu'en l'absence d'un tel examen, et le brevet prend une valeur commerciale beaucoup plus élevée que ce n'est le cas aujourd'hui.

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c. On objecte enfin que les taxes devraient nécessairement être fixées à un taux si élevé que les inventeurs de condition modeste ne pussent plus s'en acquitter.

Il est exact que, pour couvrir les frais d'examen, les taxes devraient être fortement augmentées. Cependant, les mesures nécessaires ont été prises pour que les inventeurs de condition modeste puissent malgré tout jouir de la protection accordée par les brevets. Ils pourront, lors du dépôt de la demande, requérir l'octroi d'un sursis qui, s'il leur est accordé, les dispensera du paiement de la moitié de la taxe de dépôt; ils n'auront donc à payer que 30 francs, au lieu des 20 francs qu'exigé la loi actuelle; ils pourront également obtenir le sursis pour le paiement de la taxe de publication et être dispensés du paiement des annuités jusqu'au début de la sixième année (voir l'art. 45 et les remarques qui le concernent). On peut bien admettre que, de cette façon, les inventeurs de condition modeste seront tirés de tout embarras.

8. D'autre part, les considérations suivantes militent en faveur de l'examen préalable : a. Il convient de mentionner en premier lieu gué le brevet acquerra une pins grand« valeur commerciale. C'est là un avantage qu'appréciera spécialement l'inventeur de condition modeste.

b. Signalons aussi que les brevets délivrés sans examen préalable peuvent, dans les mains d'entreprises sans scrupules, constituer un grand danger. Tant qu'il n'est pas déclaré nul, chaque brevet peut, en effet, servir d'arme contre la concurrence. Or, le concurrent attaqué a souvent beaucoup de peine, dans une procédure judiciaire, à apporter une preuve suffisante de la nullité du brevet ; il lui est moins facile de faire cette preuve qu'à un bureau officiel spécialement organisé en vue de l'examen préalable.

Malgré les frais élevés qu'il entraîne, cet examen apparaît par conséquent conforme à l'intérêt public, eu égard aux petits inventeurs et aux industries encore peu développées qui ont à lutter contre une forte concurrence, dans le pays ou à l'étranger.

c. A noter enfin que la commission des experts a demandé à l'unanimité (moins quelques abstentions) l'institution de l'examen préalable, à l'encontre du premier avant-projet. Nous ne cacherons pas que la grosse industrie suisse ne s'est ralliée que tout récemment à cette idée.

Tant qu'il
fût possible de déposer des demandes de brevets au bureau allemand, elle a toujours combattu, comme superflue, l'institution de l'examen préalable en Suisse, Or, le 1er octobre 1949, un « bureau allemand des brevets » a été ouvert à Munich par la République fédérale allemande. Ce bureau n'est toutefois pas en mesure pour le moment et ne le sera pas avant un certain temps, d'appliquer l'ancienne procédure d'examen, notamment parce qu'il manque encore du personnel technique nécessaire. Pour la période transitoire qui, à ce que l'on compte, durera quelques

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années, il se contentera par conséquent d'une simple procédure d'opposition. La demande de brevet sera publiée, sans examen préalable de la nouveauté, du progrès technique ou du niveau de l'invention. En cas d'absence d'opposition, le brevet sera délivré sans autre formalité; dans le cas contraire, le bureau se bornera à examiner les allégués de l'opposant.

Tant qu'elle sera appliquée en Allemagne, cette procédure n'exercera certainement pas une grande force d'attraction. Il est absolument impossible de prévoir dans combien de temps le bureau allemand pourra revenir à son ancien système. De toute façon, il convient de relever que l'un des motifs avancés au sein de la commission des experts en faveur de l'institution de l'examen préalable est que la Suisse -- très développée du point de vue technique -- ne peut, dans ce domaine, rester en arrière par rapport à d'autres petits pays, tels que la Suède et la Hollande. On peut en conclure que le désir exprimé par les représentants de l'industrie suisse n'est pas en corrélation avec la situation existant en Allemagne.

9. Après avoir pesé le pour et le contre, le Conseil fédéral estime que l'institution de l'examen préalable est aujourd'hui une nécessité pour la Suisse et que l'on peut assumer la responsabilité des frais élevés qu'elle implique.

E. Objets non touchés par le projet

1. COUR FÉDÉRALE DES BREVETS a. Sont actuellement compétents pour connaître des actions civiles en matière de brevets d'invention (actions en nullité du brevet intentées par les tiers contre le titulaire du brevet et actions intentées par le titulaire du brevet contre les tiers pour violation de son brevet) les tribunaux cantonaux, en première instance, et le Tribunal fédéral, en seconde instance. En matière pénale, la situation est semblable. Abstraction faite des quelques cantons qui possèdent des tribunaux de commerce, sont compétents les tribunaux ordinaires, c'est-à-dire des tribunaux qui ne comptent généralement pas de techniciens parmi leurs membres. C'est pourquoi ces tribunaux sont le plus souvent obligés de faire appel à des experts en matière de brevets.

En outre, le Tribunal fédéral est lié, en principe, par les constatations de fait du juge cantonal. Or, en matière de brevets, les questions de fait et de droit sont souvent intimement liées, de sorte que la décision du Tribunal fédéral est préjugée par les constatations de fait du juge cantonal.

b. Cette réglementation a été critiquée ces dernières années, surtout dans les milieux touchant à l'industrie des machines. Elle est peu pratique, allèguent-ils, et ne saurait donner satisfaction. Aussi a-t-on demandé Feuille fédérale. 102e annóo. Vol. I.

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l'institution d'une cour fédérale chargée de connaître en première instance de toutes les actions civiles en matière de brevets d'invention. Quant au Tribunal fédéral, maintenu comme juridiction de seconde instance, on a exprimé le voeu qu'il ne soit plus lié par les constatations de fait sur lesquelles se fonde la décision du juge cantonal et qu'il comprenne une chambre spéciale des brevets, composée de juristes et de techniciens.

c. Dans l'exposé des motifs qui accompagnait le premier avantprojet, le bureau de la propriété intellectuelle faisait déjà remarquer que cette requête se heurtait avant tout à des difficultés d'ordre constitutionnel, que l'opportunité d'une telle solution pouvait être mise en doute et, enfin, qu'il y avait heu de se demander si l'on ne créerait pas ainsi un précédent dans la voie d'un fractionnement, indésirable pour des raisons de principe, de la juridiction selon les domaines spéciaux où elle a à s'exercer.

d. En mars 1946, M. Speiser, député au Conseil des Etats, alors membre du Conseil national, a déposé un postulat demandant au Conseil fédéral d'examiner s'il n'y aurait pas heu de créer sans tarder les bases légales nécessaires à l'institution d'une cour fédérale des brevets, comprenant des techniciens. Le postulat fut adopté par le Conseil national le 12 juin 1946, après que le Conseil fédéral se fût déclare dispose à étudier la question.

Dans son exposé des motifs, l'auteur du postulat proposait d'instituer une cour fédérale des brevets de première instance, où siégeraient aussi bien des juristes que des techniciens. Les dispositions actuelles de la constitution ne s'opposeraient pas à la création d'une telle cour, du moins pas pour ce qui est des actions en nullité d'un brevet.

e. La commission des experts eut l'occasion de se prononcer sur la question au cours de sa troisième session de novembre 1947. Par 10 voix contre 4, elle a exprimé le voeu qu'une juridiction spéciale en matière de brevets soit créée le plus tôt possible. Cette réforme ne devrait cependant pas être opérée dans le cadre de la revision de la loi sur les brevets d'invention, mais indépendamment d'elle et si possible, en même temps.

/. Dans la suite, le directoire de l'union suisse du commerce et de l'industrie fit, à la demande de la société suisse des constructeurs de machines, une
enquête auprès de ses sections, afin de connaître leur avis sur l'opportunité de créer une cour fédérale des brevets de première instance. Les réponses furent en partie plutôt négatives. Aussi, cette société, dans une lettre qu'elle adressa au directoire le 8 septembre 1948, limita-t-elle ses exigences en ce sens qu'elle ne demandait plus qu'une réorganisation du Tribunal fédéral: une chambre spéciale, comprenant des techniciens, devrait y être créée et chargée de connaître des litiges relatifs aux brevets d'invention. Elle jouirait, comme juridiction de recours, d'une liberté entière, c'eet-à-dire qu'elle ne serait plus liée par les constatations de fait de la juridiction cantonale. Dès lors, le directoire fit savoir au départe-

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ment fédéral de justice et police, par lettre du 5 octobre 1949, qu'il abandonnait pour le moment sa proposition de créer une cour fédérale des brevets de première instance, étant données les difficultés d'ordre constitutionnel et politique auxquelles elle ee heurtait. II demandait en revanche l'institution auprès du Tribunal fédéral d'une chambre spéciale, comprenant des techniciens, qui aurait à statuer aussi bien sur les faits que sur le droit.

Cette solution, qui pourrait être adoptée, sans qu'il soit nécessaire de modifier la constitution, par une simple revision de la loi d'organisation judiciaire, ne devrait rencontrer aucune difficulté d'ordre politique. Il ajoutait qu'en consentant a limiter ainsi son voeu, la société suisse des constructeurs de machines n'avait pas abandonné son idée fondamentale et qu'elle estimait, comme auparavant, que la création d'une cour fédérale des brevets de première instance restait la solution vers laquelle il faut tendre.

g. Le président de la société suisse des constructeurs de machines, qui a signé la lettre adressée au directoire le 8 septembre 1948, est l'auteur et l'unique signataire du postulat adopté par le Conseil national le 12 juin 1946. Il y a donc tout heu d'admettre qu'il ne défendra pas l'idée exprimée par le postulat tel qu'il a été rédigé. C'est pourquoi les remarques qui vont suivre ne traiteront plus que des deux questions suivantes: Convient-il de donner au Tribunal fédéral, en tant que juridiction de recours en matière de brevets, la liberté de se prononcer aussi bien sur les faits que sur le droit ? Convient-il d'instituer auprès de ce tribunal une chambre spéciale, comprenant des techniciens ? Il importe d'examiner tout d'abord si de telles solutions sont compatibles avec les dispositions constitutionnelles en vigueur.

h. L'article 114 de la constitution laisse à la législation" fédérale le soin de donner au Tribunal fédéral les attributions nécessaires pour assurer l'application uniforme des lois prévues à l'article 64. Nous en concluons que le législateur fédéral peut, en matière de brevets, transformer en appel le recours en réforme devant le Tribunal fédéral (ce tribunal n'étant dès lors plus lié par les constatations de fait du juge cantonal), si cette modification est nécessaire dans l'intérêt d'une application uniforme de la
loi sur les brevets d'invention. Nous ne cacherons pas que le Tribunal fédéral, tout en laissant la question ouverte pour le moment, s'est expressément demandé si cette réforme n'irait pas au delà du but défini par l'article 114 de la constitution. Reste à savoir encore s'il n'est réellement pas possible d'assurer autrement une application uniforme de la loi sur les brevets d'invention. Rappelons à ce sujet que la nouvelle loi d'organisation judiciaire, entrée en vigueur le 1er janvier 1945, a prévu, en ce qui concerne précisément les procès en matière de brevets, une nouvelle disposition qui doit tenir compte des difficultés résultant, en cette matière, de ce que le Tribunal foderai est lie par les constatations de fait du juge cantonal. Il s'agit de l'article 67, qui dispose que « dans les contestations

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relatives aux brevets d'invention, le tribunal ou le juge d'instruction peut, s'il est nécessaire à l'intelligence des faits, procéder à une inspection locale, faire appel à l'expert consulté par la juridiction cantonale et en outre à un nouvel expert ». Le Conseil des Etats, en particulier, avait refusé de tenir compte davantage des particularités propres aux procès relatifs aux brevets d'invention (BS du CE 1943, p. 119 et 229). Dans une expertise publiée en 1948, sans indication de date, dans le bulletin du groupe suisse de l'association internationale pour la protection de la propriété industrielle et présentée par le directoire de l'union suisse du commerce et de l'industrie à l'appui de sa proposition, M. le professeur Fritzsche, de Zurich, déclarait qu'on ne peut guère contester, aujourd'hui déjà, la nécessité de reviser l'article 67 de la loi d'organisation judiciaire, en ce sens qu'il faut reconnaître à la juridiction de recours le droit de revoir librement les faits en ce qui concerne les questions d'ordre technique.

Cette conclusion se fonde sur un seul arrêt du Tribunal fédéral (ATT 71, II, 296). Il a paru indiqué de demander l'avis du Tribunal fédéral sur la valeur pratique de l'article 67 et sur les expériences qui en ont été faites jusque-là. Le Tribunal fédéral est d'avis que cet article tient raisonnablement compte des particularités qu'offrent les contestations relatives aux breveta d'inveution. Il eu aurait fait application à plusieurs reprises et l'audition de l'expert cantonal lui aurait permis d'arriver à une meilleure connaissance du côté technique de l'affaire. Jusqu'à présent, il n'aurait encore jamais désigné un nouvel expert, mais il ne manquerait pas d'user de cette faculté lorsque cela lui paraîtra nécessaire à l'intelligence des faits. De toute façon, le Tribunal fédéral estime qu'avant de procéder à une réforme qui le ferait sortir du rôle que lui assigne une longue tradition, il conviendrait d'attendre que l'article 67 de la loi d'organisation judiciaire ait produit ses effets pendant un certain nombre d'années encore.

Si cette disposition se révélait par trop restrictive, on pourrait, alors seulement, se demander s'il ne suffirait pas de permettre au Tribunal fédéral de faire abstraction de l'expert consulté par la juridiction cantonale et de nommer directement
un nouvel expert, si cela lui paraît opportun. Le Conseil fédéral est du même avis.

i. Selon la proposition faite par les représentants de l'industrie des machines, la chambre des brevets du Tribunal fédéral devrait comprendre un assez grand nombre de techniciens, parmi lesquels on choisirait, pour chaque cas, ceux qui conviennent le mieux. La chambre serait formée par .exemple de cinq juges, soit de trois juges fédéraux « ordinaires » et de deux techniciens fonctionnant comme juges extraordinaires. Les cinq .membres auraient tous le même droit de vote.

Une telle solution ne paraît guère compatible avec les règles constitutionnelles qui régissent actuellement le Tribunal fédéral. H est vrai que M. Tell Perrin, conseiller national, dans une expertise elle aussi publiée en

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1948, sans indication de date, dans le bulletin du groupe suisse et présentée par le directoire, déclare ce qui suit : « La constitution n'impose pas ...

l'obligation de la permanence aux juges fédéraux. On peut donc désigner des juges siégeant occasionnellement. C'est là une question dépendant de la loi d'organisation judiciaire, qui devrait naturellement être revisée dans ce sens ». En réalité, la constitution ne connaît que des membres permanents du Tribunal fédéral, à qui toute autre carrière ou toute autre profession est interdite (art. 108, 3e al., Cst.), et des suppléants, occasionnels, à qui cette interdiction ne s'applique pas. La proposition faite par les représentants de l'industrie des machines aurait pour effet de créer une nouvelle catégorie de juges fédéraux, soit des membres extraordinaires, qui ne pourraient être considérés comme de simples « suppléants ». H n'est pas possible de créer ainsi, par une simple disposition légale, une nouvelle catégorie de juges fédéraux. Une disposition expresse de la constitution serait en effet nécessaire.

En outre, il est permis de douter de l'opportunité d'une telle proposition. Selon le Tribunal fédéral, dont l'avis a été également demandé sur ce point, la difficulté est d'obtenir que le juriste et le technicien se comprennent. Cette difficulté est la même, que le technicien fonctionne comme juge ou comme expert. Il n'est souvent pas aisé de trouver un bon expert, qui ait des connaissances techniques étendues dans le domaine litigieux, qui saisisse le raisonnement juridique et qui soit désintéressé. Cette difficulté serait encore aggravée si le juge technicien devait être choisi sur la liste forcément restreinte des membres du Tribunal; l'expérience en a été faite avec la nouvelle loi sur l'expropriation.

Même si l'on voulait passer par-dessus les considérations qui précèdent, il faudrait de toute façon créer d'abord la base constitutionnelle nécessaire au changement que l'on se propose d'apporter dans l'organisation du Tribunal fédéral. Il convient de laisser aux milieux intéressés le soin d'entreprendre à cette fin les démarches nécessaires.

2. RÉGLEMENTATION DE LA PROFESSION DE CONSEIL EN MATIÈRE DE PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE De nombreux inventeurs ne sont pas en mesure de juger si leur invention remplit les conditions nécessaires à l'obtention
d'un brevet valable; ils ne sont pas à même non plus, le cas échéant, de rédiger une demande de brevet dans la forme prescrite par la loi, en particulier, de formuler des revendications qui ne donnent à la protection revendiquée une portée ni trop large, ni trop restreinte. Ils sont donc obligés de s'en remettre aux conseils de spécialistes. C'est ainsi qu'est née la profession de conseil en matière de propriété industrielle. Les exigences qui y sont attachées de

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nos jours ne sont pas petites. Celui qui veut l'exercer convenablement ne doit pas seulement avoir des connaissances sérieuses et étendues dans de nombreux domaines de la technique; il doit encore être en mesure de juger des possibilités économiques d'une invention et savoir résister à la tentation d'exploiter l'optimisme souvent exagéré de l'inventeur quant à la valeur de son invention, en l'engageant à déposer une demande de brevet dans un grand nombre de pays et à faire ainsi des dépenses que ses moyens financiers ne lui permettent guère.

Jusqu'à maintenant, la profession a été ouverte à n'importe qui.

Il n'existe aucune condition légale à remplir pour pouvoir l'exercer.

En particulier, aucun diplôme de capacité n'est exigé. C'est pourquoi il y eut toujours dans cette profession des personnes qui laissaient à désirer, du point de vue technique ou moral. Une certaine surveillance peut être exercée actuellement, en ce sens que le département fédéral de justice et police peut, en vertu de l'article 49 du règlement d'exécution de la loi sur les brevets d'invention, autoriser le bureau de la propriété intellectuelle à ne plus accepter, temporairement ou définitivement, de nouvelles demandes de brevet présentées par des mandataires de profession dont la manière d'agir en affaires « donne lieu à des plaintes sérieuses ». Une telle mesure a été prise dans un certain nombre de cas.

Mais ses possibilités d'application sont par trop restreintes, étant données les graves conséquences qu'elle entraîne.

Dans ces conditions, on a déjà demandé à réitérées fois l'établissement de prescriptions qui soumettraient l'exercice de la profession à l'obtention d'un diplôme de capacité. Il y aurait heu, en tout cas, de prévoir une telle réglementation si l'examen préalable devait être institué. En effet, pour représenter le déposant dans la procédure d'opposition et, le cas échéant, dans la procédure de recours, le mandataire devra satisfaire à des exigences bien plus grandes encore que jusqu'ici, tant en ce qui concerne l'intelligence des problèmes techniques que la connaissance du droit relatif aux brevets. Il s'agirait de donner à la loi sur les brevets d'invention un complément nécessaire pour assurer efficacement la protection accordée par les brevets. La mesure pourrait dès lors se fonder sur l'article 64 de
la constitution. La compétence de la Confédération pourrait dériver aussi de l'article 33 de la constitution. Etant donné le développement actuel de la technique, la profession de conseil en matière de propriété industrielle peut être considérée comme une profession libérale au sens de cette dernière disposition. Comme il s'agit exclusivement d'une représentation devant une autorité administrative fédérale, dans une procédure réglée par le droit fédéral, on ne peut songer sérieusement à créer un diplôme cantonal de capacité. Mais pour le moment, il convient d'attendre que le sort du présent projet de loi soit fixé.

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3. PAS D'EXTENSION DE LA PROTECTION AU DOMAINE DE LA SÉLECTION DES PLANTES a. Dans une lettre adressée le 13 mai 1946 au département fédéral de justice et police, l'association suisse des horticulteurs a demandé que la loi revisée sur les brevets d'invention tende: 1. A protéger les procédés de culture agricole, notamment les procédés qui influencent l'organisme des plantes vivantes et qui permettent d'obtenir avec quelque sûreté le développement ou la régulation de la croissance des plantes ou l'accroissement de leur rapport; 21. A protéger les procédés de création de nouvelles plantes; 3. A protéger les semences; 4. A protéger les différentes variétés de plantes, y compris les plantes vivrières. Doivent pouvoir jouir de la protection non seulement les variétés nouvelles obtenues par des interventions voulues, mais encore les variétés inconnues jusqu'ici et découvertes pour la première fois; 5. A donner au titulaire du brevet le droit exclusif de cultiver la semence OU la plante, et de mettre en vente, de vendre ou de mettre en circulation les génitures originales et les génitures postérieures (multiplication) ; 6. A assurer une protection qui dure tant que le sélectionneur ou son ayant cause produit les semences originales ou les plantes originales des variétés protégées.

6. Sans doute, une invention qui permet d'obtenir, dans le domaine de l'agriculture ou de l'horticulture, un résultat déterminé en influençant d'une façon voulue des phénomènes physiologiques peut être considérée comme une invention technique, si l'expérience peut être répétée avec quelque chance de succès. Si l'on adopte ce point de Vue, on ne voit pas pourquoi les inventions faites dans les deux domaines que nous venons d'indiquer ne pourraient être considérées, elles aussi, comme utilisables industriellement au sens de la loi sur les brevets d'invention. En fait, le bureau de la propriété intellectuelle a déjà délivré des brevets pour des procédés de culture agricole (chiffre 1 des requêtes présentées par l'association suisse des horticulteurs). A cet égard, la loi n'a donc pas besoin d'être modifiée ni complétée.

c. Il n'en est plus de même des autres requêtes présentées par l'association suisse des horticulteurs (chiffres 2 à 6). Les conditions toutes spéciales, propres aux matières dont il s'agit ici, interdisent d'appliquer les règles générales du droit relatif aux brevets d'invention et nécessiteraient, si l'on voulait en tenir compte, des dispositions particulières:

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aa. Selon l'article 8, 3e alinéa, du projet, si l'invention se rapporte à un procédé, les effets du brevet s'étendent « aux produits directs du procédé ». Or, seules les semences originales peuvent être considérées comme produits directs du procédé. Les génitures obtenues à partir des semences originales sont des produits indirects- du procédé breveté. Il faudrait donc prévoir une disposition spéciale de la loi pour que le titulaire du brevet obtienne aussi le monopole de la mise en vente, de la vente et de la mise en circulation des génitures postérieures.

bb. Selon l'article 59 du projet, l'invention doit être exposée, dans une description, de manière à pouvoir être exécutée par l'homme du métier.

Si cette prescription n'est pas observée, la demande de brevet sera rejetée (art. 68) ou alors le brevet pourra être déclaré nul (art. 26, ch. 4). Le sélectionneur devrait donc indiquer aussi, pour une revendication se rapportant à une plante ou à une semence, un procédé permettant d'obtenir avec quelque sûreté cette plante ou cette semence. Sinon, l'invention ne pourrait pas être exécutée, du moins tant que le sélectionneur ne livre pas la semence.

Une disposition spéciale de la loi serait à nouveau nécessaire si l'on voulait tenir compte du fait que le sélectionneur, bien qu'en possession de la semence permettant d'obtenir la nouvelle plante, n'est pas toujours en mesure d'indiquer un procédé permettant d'obtenir cette semence avec quelque sûreté.

ce. Dans tous les pays, la loi sur les brevets d'invention ne reconnaît comme inventions brevetables que les solutions données à un problème technique et qui reposent sur une idée créatrice. Les découvertes ne sont pas brevetables. Or, dans le domarne dont il s'agit, la protection est revendiquée non seulement pour les inventions proprement dites, mais encore pour les découvertes. Il faudrait donc, encore une fois, prévoir une disposition d'exception.

dd. Selon l'article 2, chiffre 3, du projet, les inventions d'aliments de denrées fourragères et de boissons ne peuvent être brevetées. Or, les, plantes dont la protection est revendiquée peuvent constituer aussi des aliments ou des denrées fourragères (par ex. les choux-raves). Il faudrait donc à nouveau prévoir, en faveur des plantes, une exception dans l'application de la règle indiquée ci-dessus.
ee. Selon l'article 14, 1er alinéa, du projet, le brevet dure au plus jusqu'à l'expiration de 18 ans à compter du dépôt de la demande. La protection revendiquée par l'association suisse des horticulteurs devrait durer beaucoup plus longtemps, soit aussi longtemps que le sélectionneur ou son ayant cause produit les semences originales ou les plantes originales des variétés protégées. Ici aussi, il faudrait prévoir une disposition dérogeant à la règle générale.

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d. Les règles auxquelles il faudrait déroger, ainsi que nous venons de le voir, pour assurer la protection des sélectionneurs comptent parmi les dispositions essentielles du droit relatif aux brevets d'invention. On est donc obligé de constater que, malgré une certaine similitude avec la protection des inventions, la protection des sélectionneurs apparaît comme étant d'un domaine spécial, ayant son caractère propre, et qui ne saurait être intégré dans le droit ordinaire relatif aux brevets d'invention. Si donc l'on devait juger qu'une telle protection est désirable, elle devrait faire l'objet d'une loi spéciale. Il serait alors possible de tenir compte de toutes les particularités propres à cette matière, sans que les dispositions les plus importantes dussent apparaître comme des exceptions a une règle générale, comme ce serait le cas si l'on voulait réaliser cette protection dans le cadre de la loi sur les brevets d'invention. Une autre considération, qui milite en faveur d'une loi spéciale, est la suivante: La Suisse est partie à la convention d'union de Paris pour la protection de la propriété industrielle. Selon l'article 2 de la convention, les ressortissants d'un pays de l'union jouissent dans tous les autres pays de l'union de la même protection que les nationaux. Sans doute, l'article premier, 3e alinéa, de la convention déclare que la notion de « propriété industrielle » s'applique également, en particulier, au domaine des industries agricoles et à tous produits naturels tels que vins, grains, fruits, fleurs, etc. En revanche, le 2e alinéa du même article constate que « la protection de la propriété industrielle a pour objet les brevets d'invention, les modèles d'utilité, les dessins ou modèles industriels, les marques de fabrique ou de commerce, le nom commercial et les indications de provenance ou appellations d'origine, ainsi que la répression de la concurrence déloyale ». Les pays de l'union sont libres de fixer ce qu'ils entendent protéger par les brevets d'invention. Ils peuvent donc, à leur gré, assurer la protection des sélectionneurs par la loi sur les brevets d'invention ou en dehors d'elle, ou refuser purement et simplement d'accorder une telle protection. Actuellement, aucun pays étranger ne connaît une protection aussi étendue que celle qui est revendiquée par l'association
suisse des horticulteurs. Si l'on voulait faire droit à cette requête dans le cadre de la loi sur les brevets d'invention, les étrangers pourraient revendiquer la même protection sans que leur pays d'origine accorde la réciprocité à la Suisse. Si, en revanche, la protection revendiquée était réalisée en dehors de la loi sur les brevets d'invention, la Suisse pourrait, sans s'exposer au reproche de violer des engagements internationaux, accorder la même protection aux étrangers à la condition seulement que leur pays d'origine lui accorde la réciprocité, La commission des experts s'est aussi ralliée à cette manière de voir.

e. On peut se demander enfin si l'institution d'une protection accordée aux sélectionneurs serait dans l'intérêt général. La question a été posée aux offices qui paraissaient particulièrement compétents pour se prononcer,

958 soit à la division de l'agriculture du département fédéral de l'économie publique, à l'institut pour la production dea plantes (de l'école polytechnique fédérale), ainsi qu'à l'institut fédéral des recherches forestières, à Zurich. Tous trois se sont montrés sceptiques, ou ont même donné une réponse négative.

L'association suisse des horticulteurs a été informée par écrit et oralement des raisons qui s'opposent à l'admission de ses requêtes dans le cadre de la revision de la loi sur les brevets d'invention; elle en a pris son parti.

F. Remarques sur les différentes dispositions TITRE PREMIER DISPOSITIONS GÉNÉRALES Chapitre premier Conditions requises pour l'obtention du brevet et effets du brevet Art. lel (conditions générales requises pour l'obtention du brevet).

lel alinéa: 1. L'expression «susceptibles d'exploitation industrielle» a été remplacée par celle de « utilisables industriellement », afin de mieux faire ressortir que la valeur économique de l'invention est en soi indifférente.

2. En revanche, et contrairement à une proposition faite par la commission dès experts, le projet ne dit pas quel niveau l'invention doit atteindre pour pouvoir être protégée par un brevet. Il s'agit là d'un problème suscité par la jurisprudence du Tribunal fédéral : a. Dans le message qui accompagnait le projet de la loi actuelle sur les brevets d'invention, on avait estimé que « nous devons exiger moins (qu'en Allemagne) pour les inventions à breveter » ; lors des délibérations aux chambres, cet avis ne fut combattu par personne. De même, dans son message relatif au projet de la future loi de 1914 sur les droits de priorité, le Conseil fédéral constatait que « les modèles d'utilité sont assimilés en Suisse aux brevets d'invention ». C'est pourquoi les tribunaux, et spécialement le Tribunal fédéral, ont considéré pendant des décennies que les petites inventions pouvaient, elles aussi, être protégées par un brevet.

Cependant, en 1937, le Tribunal fédéral a changé cette jurisprudence. Il a déclaré que les brevets d'invention, en l'absence d'un examen préalable, étaient devenus pour l'industrie une entrave toujours plus sérieuse ; l'augmentation extraordinaire du nombre des brevets tendrait de plus en plus, actuellement, à réduire la liberté de mouvement dans le domaine de l'industrie. Les brevets d'invention seraient devenus, dana les mains de concurrents, une arme de combat. Un tel résultat devrait être combattu

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dans l'intérêt même de l'institution de la protection accordée par les brevets et des inventeurs. La technique elle-même saurait gré au juge de relever la protection accordée aux inventions du domaine de la lutte purement économique pour la porter dans la sphère plus sereine de l'émulation intellectuelle, sans vouloir cependant méconnaître que le succès économique présente pour l'inventeur un intérêt qui joue un rôle certain dans son travail de recherches ou en constitue même le mobile principal. Les innovations techniques, destinées, en dernière analyse, à servir la collectivité, ne devraient pas être soustraites, 15 ans durant, au domaine public si elles n'exigent qu'un modeste effort intellectuel et si elles représentent plus une conformation nouvelle qu'un effet technique nouveau. L'originalité de l'idée créatrice devrait être mise à nouveau -- et plus que jusque-là -- au premier plan; il faudrait pour le moins exiger que le problème posé par l'inventeur et la solution qu'il lui a donnée constituât autre chose qu'un développement technique à portée de tout homme du métier connaissant son art; il conviendrait de se montrer plus exigeant aussi en ce qui concerne le progrès technique. On ne saurait, il est vrai, exiger de chaque invention qu'elle revêtît une importance supérieure; mais le progrès technique n'en devrait pas moins apparaître clairement et être d'une importance réelle dans le domaine auquel se rapporte l'invention (ATF 63, II, 275). Certes, le Tribunal fédéral s'est rendu compte qu'une telle interprétation de la loi excluait purement et simplement de la protection en Suisse les petites inventions. Il a estimé cependant qu'il appartenait au législateur de combler cette lacune (due à l'interprétation de la loi telle que nous venons de la rappeler) par une loi spéciale (ATF 69, II, 428).

b. La nouvelle jurisprudence du Tribunal fédéral n'a pas rencontré dans les milieux intéressés une approbation unanime. Certaines voix l'ont saluée et ont recommandé de combler la lacune constatée par le Tribunal fédéral en créant un « petit brevet ». En revanche, la commission des experts, dans laquelle étaient représentés tous les mih'eux intéressés de l'industrie, repoussa résolument l'idée de faire une telle distinction entre grandes et petites inventions. Elle demanda que chaque invention, grande
ou petite, pût être protégée par un brevet et estima qu'il conviendrait, pour assurer le retour à l'ancienne jurisprudence, de modifier le texte lui-même de la loi. A cette fin, elle proposa tout d'abord le texte suivant: Les brevets d'invention sont délivrés pour les inventions nouvelles utilisables industriellement, qui enrichissent la technique et dépassent les capacités de l'homme du métier de force moyenne.

Dans la suite, elle a estimé que cette rédaction était elle-même insuffisante et l'a remplacée par la suivante: Les brevets d'invention sont délivrés pour les inventions nouvelles utilisables industriellement, quelle qu'en soit l'importance, qui enrichissent la technique et ne constituent pas de simples tours do main.

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c. L'avis de la commission des experts peut être suivi en tant qu'il se prononce contre une distinction entre inventions importantes et inventions de moindre importance et contre une protection de nature différente pour ces deux catégories d'inventions. Si séduisante que puisse paraître au premier abord une telle solution, elle doit être rejetée pour des raisons d'ordre pratique. Il serait tout d'abord difficile, au moment de l'examen de la demande de brevet, de juger si l'on se trouve en présence d'une invention importante ou de moindre importance. D'autre part, il ne semble pas désirable de prévoir pour les innovations techniques trois genres de protection différents (grand brevet, petit brevet et dessin ou modèle industriel). Personne, en effet, ne songe sérieusement à refuser toute protection aux « petites » inventions. Il ne faut cependant pas oublier .que les restrictions que l'on voudrait apporter au monopole dont jouit l'auteur d'une petite invention en cas de délivrance d'un brevet s'opéreront en réalité d'elles-mêmes, aussi bien en ce qui concerne l'étendue du monopole que sa durée. Selon une doctrine éprouvée, l'étendue de la protection accordée par un brevet est proportionnelle à l'importance de l'invention. Plus l'invention est modeste, plus restreint est aussi le domaine interdit aux concurrents et plus il est facile de trouver au même problème dea solutions qui ne seront plua touchées par le brevet. D'autre part, il arrivera rarement qu'un brevet accordé pour une invention de modeste importance soit maintenu pendant toute la durée de la protection prévue par la loi. En effet, tout brevet donne lieu chaque année au paiement d'une taxe toujours plus élevée. L'expérience a montré que le titulaire d'un brevet ne paie plus ces taxes lorsqu'il n'y trouve plus son avantage. Dès que son invention est dépassée par celles de ses concurrents, il n'a plus d'intérêt à maintenir son brevet. Cela se produit d'autant plus tôt que l'invention est plus modeste. Quand les annuités ne sont plus payées, le brevet tombe en déchéance. Nous avons déjà eu l'occasion de voir qu'en Suisse comme à l'étranger 70 brevets environ seulement, sur cent qui ont été délivrés, sont maintenus plus de trois ans, 45 environ plus de six ans et que 6 environ seulement parviennent jusqu'à la fin du délai légal de protection.
d. Il ne s'ensuit pas du tout cependant que le texte de la loi doive nécessairement être modifié selon la proposition faite par la commission des experts. En réalité, cette proposition ne tend à rien d'autre qu'à définir l'invention susceptible d'être protégée par un brevet. Jusqu'à ce jour, aucune loi sur les brevets d'invention, pas plus en Suisse qu'à l'étranger, n'a tenté de le faire. Et pourtant, les propositions n'ont pas manqué. Si le législateur y a renoncé, c'est manifestement qu'il est difficile, voire impossible de donner de l'invention une définition réellement utilisable. Cette difficulté tient au fait que l'appréciation des données qui constituent une invention dépend dans une large mesure de jugements de valeur; c'est pourquoi, une définition consacrée par la loi aurait toute chance d'être dépassée par le développement de la technique, de limiter dans une mesure

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excessive la libre appréciation du juge et d'empêcher ainsi la loi d'atteindre son but, qui est de favoriser l'industrie. Cette objection, de principe vaut aussi à rencontre de la proposition de la commission des experts, abstraction faite de la contradiction intrinsèque dont souffre cette proposition: Si l'importance de l'invention doit être réellement indifférente, il n'est plus possible d'exiger que l'invention soit autre chose qu'un simple tour de main. En revanche, si l'on veut maintenir que l'invention doit être autre chose qu'un simple tour de main, il ne sera plus possible de dire que son importance est indifférente.

Il convient, pour toutes ces raisons, de renoncer à donner dans la nouvelle loi une définition de l'invention et de laisser comme avant à la jurisprudence le soin de trouver la solution appropriée. On peut s'attendre d'ailleurs que les tribunaux n'ignoreront pas les considérations qui précèdent et qu'ils tiendront dûment compte du fait que les industriels euxmêmes considèrent comme désirable et nécessaire de pouvoir protéger par un brevet même les inventions de modeste importance et qu'ils consentent à prendre sur eux la moins grande liberté de mouvement qui peut en résulter. Au reste, il semble qu'aujourd'hui déjà s'amorce un revirement de jurisprudence dans le sens désiré; certains jugements récents ne s'écartent plus beaucoup de l'ancienne jurisprudence, du moins quant à leur résultat.

2e alinéa : Pas de remarques.

3e alinéa : Cette disposition correspond à celle de l'article 3 de la loi actuelle. Elle doit être maintenue même après l'introduction de l'examen préalable. Son absence pourrait faire croire faussement que, sous le régime de l'examen préalable, l'Etat garantirait désormais l'existence d'une invention protégeable. Il ne peut cependant être question d'une telle garantie, qui n'est d'ailleurs assumée par aucun des pays connaissant l'examen préalable. Elle ne serait pas conciliatale non plus avec l'action en nullité (art. 26), à laquelle on ne saurait renoncer: il sera toujours possible en particulier que le bureau des brevets doive, le cas échéant, se prononcer sur la nouveauté de l'invention en tablant sur des faits qui pourront dans la suite apparaître incomplets.

Art. 2 (inventions non brevetables).

Chiffre 1 : Cette disposition concorde avec l'article 2,
chiffre 1, de la loi actuelle.

Chiffre 2 (remèdes): 1. Pas de 'protection 'pour les substances : La loi actuelle exclut de la protection les inventions de remèdes lorsque ceux-ci constituent des substances chimiques (art. 2, ch. 2) ou qu'ils sont obtenus autrement que par des procédés chimiques (art. 2, ch. 3). Selon cette réglementation, les inventions de remèdes sont en revanche brevetables lorsque le remède, bien

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qu'obtenu par un procédé chimique, ne constitue pas une substance chimique. Aucune raison pertinente ne saurait cependant justifier cette exception. H y a là une lacune manifeste de la loi, qu'il convient de combler.

C'est pourquoi, le présent chiffre 2 exclut de la protection les inventions de remèdes, sans exception, le terme de « remèdes » comprenant aussi, naturellement, les mélanges de remèdes et les différentes formes de remèdes : pilules, solutions à injecter, suppositoires, etc.

2. Pas de protection pour certains procédés de fabrication : De même que la loi actuelle, le présent projet exclut de la protection les procédés non chimiques de fabrication, tandis qu'il admet comme brevetables les procédés chimiques.

Pour répondre à une demande des milieux touchant à l'industrie chimique, le premier avant-projet (1945) prévoyait que certains procédés non chimiques de fabrication, soit les procédés dits physico-analytiques, pourraient être brevetés; il n'excluait de la protection que les procédés non chimiques consistant en une simple association de matières premières.

On avait voulu ainsi tenir compte de certains procédés pour la fabrication des remèdes, qui, selon toute vraisemblance, prendront de plus en plus d'importance et qui consistent à isoler certaines substances naturelles très sensibles, telles que les vitamines, les hormones, etc., tirées de certaines parties des plantes, de glandes animales, etc.; dans de nombreux cas, il importe d'éviter, lors d'une opération de ce genre, toute réaction chimique, celle-ci pouvant endommager les substances actives recherchées. Seules sont alors praticables les opérations dans lesquelles n'intervient, en règle générale, aucune modification chimique des substances; ainsi en est-il par exemple de l'extraction, de la dialyse, de la distillation, de l'adsorption, de la Chromatographie, de la cristallisation, etc. C'était, pensait-on, servir l'intérêt général que d'admettre que de tels procédés pussent être protégés, cette protection ayant pour effet de stimuler les recherches tendant à trouver des procédés non chimiques appropriés ou améliorés, pour isoler certaines substances tirées des plantes ou autres matières. Une autre considération qui avait été retenue, c'est que la plus grande partie des autres pays accordent la protection à tout procédé,
quel qu'il soit, servant à la fabrication de remèdes (voir le tableau I, p. 1035). C'est pour ces mêmes raisons que la commission des experts a, dans sa majorité, approuvé la solution envisagée dans le premier avant-projet. Une minorité, comprenant en particulier le représentant du concordat des caisses-maladie, l'a en revanche rejetée, pour le motif essentiel que la protection des procédés physico-analytiques de fabrication étendrait à de nouveaux remèdes le renchérissement provoqué par la protection due aux brevets d'invention.

Actuellement, cette protection, ajoutée à celle qui est assurée par les marques de fabrique ou do commerce, constituerait déjà pour les caissesmaladie une lourde charge financière. Les remèdes constitués de substances

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naturelles, telles que les vitamines, les hormones, etc. auraient toujours plus d'importance; si, par exemple, la fabrication de la pénicilline avait pu être brevetée, le prix payé pour 200 000 unités de cette substance ne serait très probablement pas descendu de 30 francs en 1946 à 3 fr. 65 en 1948. (Pour des raisons analogues, les mêmes milieux s'étaient d'abord opposés à ce que les brevets qui ont pour objet des procédés servant à la fabrication de remèdes jouissent de la même durée de protection que les autres brevets; voir à ce sujet les remarques faites à l'art. 14, 1er al.).

Ces objections ne manquent pas de pertinence, en effet, et il vaudrait mieux, semble-t-il, ne rien changer dans ce domaine. H n'est actuellement pas possible de prévoir avec certitude dans quelle mesure la population verrait ses frais d'achat de remèdes augmenter si les procédés physicoanalytiques devaient être protégés; autant qu'on peut les évaluer, ces frais se montent actuellement à 100 millions de francs environ par année.

Des relevés statistiques ont montré qu'en 1946 les frais supportés par les caisses-maladie pour les remèdes dont le procédé de fabrication était protégé par un brevet se sont montés probablement à 15 à 20 pour cent environ de l'ensemble de leurs dépenses pour des remèdes. Si les procédés physicoanalytiques avaient été protégés à ce moment-là, la part des « remèdes brevetés » eût probablement augmenté de 3 pour cent environ et si la durée maximum de protection des brevets qui ont pour objet des procédés servant à la fabrication de remèdes avait été non pas de 10, mais de 18 ans, cette part eût probablement augmenté encore de quelque 10 pour cent. L'exemple de la penicilline montre bien toute l'importance que peut prendre un nouveau remède et jusqu'à quel point il peut, le cas échéant, faire monter la part que la population doit consacrer aux « remèdes brevetés » sur l'ensemble de ses frais de remèdes. Un grand hôpital public a, par exemple, consacré en 1948 plus de 17 pour cent de ses frais de remèdes ala pénicilline.

Etant données les conséquences financières qui pourraient en résulter, il convient donc d'exclure de la protection, comme auparavant, les procédés physico-analytiques. D'ailleurs, ceux mêmes qui ont demandé leur protection ont déclaré dans la suite qu'ils ne s'opposeraient pas au
maintien du statu quo.

Comme jusqu'ici, il faudra donc veiller, en appliquant la loi, à ce que l'extraction, la dialyse, la distillation, l'adsorption, la Chromatographie et autres opérations de ce genre ne soient pas tenues pour des opérations chimiques, à moins que des circonstances spéciales ne le permettent.

Chiffre

3 (aliments, denrées fourragères et boissons).

1. En ce qui concerne tout d'abord la protection des substances, la loi actuelle présente la même lacune qu'en matière de remèdss (voir les remarques au ch. 2) : les inventions « d'aliments ou de boissons à l'usage de l'homme ou des animaux » peuvent être brevetées lorsque ces aliments ou boissons, bien que n'étant pas des substances chimiques, sont obtenus

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par des procédés chimiques. Il convient, ici aussi, de combler cette lacune et de refuser la protection à toute substance, sans exception.

2. Procédés de fabrication : La loi actuelle exclut de la protection « les inventions de procédés chimiques servant à la fabrication de substances chimiques destinées principalement à l'alimentation de l'homme ou des animaux » (art. 2, ch. 2), ainsi que les procédés non chimiques servant à la fabrication d'aliments ou de boissons à l'usage de l'homme ou des animaux (art, 2, ch. 3), Selon la proposition contenue dans le premier avant-projet et approuvée par la commission des experts, les procédés non chimiques de fabrication eussent été brevetables aussi, comme en matière de remèdes, exception faite des simples mélanges. Après nouvel examen, l'avis de la commission n'a pas été suivi, ici non plus, non pas que la possibilité d'obtenir un brevet ait été restreinte; au contraire, tous les procédés de fabrication, y compris les mélanges, pourront être brevetés, à condition, bien entendu, que les prescriptions de la loi, notamment celles qui concernent le commerce des denrées alimentaires, ne soient pas transgressées (voir art. 2, ch. 1).

En cas de maladie, il arrive souvent que l'on ne puisse se passer d'un nouveau remède déterminé. En revanche, l'expérience a montré que l'on peut se nourrir convenablement sans user des produits les plus récents paraissant sur le marché. Les raisons qui, en matière de remèdes, obligent d'exclure de la protection certains procédés de fabrication ne s'imposent donc pas ici avec la même force. Il ne faut pas oublier non plus que la plupart des autres pays ou bien ne connaissent aucune exception en matière de denrées alimentaires, ou bien n'excluent de la protection que les produits, les procédés de fabrication étant brevetables (voir tableau I p. 1035). Il semble qu'il suffise, pour la Suisse aussi, d'exclure les produits de la protection. C'est pourquoi il n'est plus question, au chiffre 3, des procédés de fabrication. Contre la protection accordée à des procédés de simple mélange, on a déjà objecté qu'elle revenait en fait à protéger le mélange lui-même. Cette objection n'a d'importance que dans les cas où le mélange ne peut être obtenu autrement que par le procédé breveté (lorsque, par exemple, un « procédé » serait « caractérisé
en ce que les produits a et b sont mélangés », sans que la façon dont s'opère le mélange fût précisée).

Mais il n'est pas exclu, en pareille occurrence, que le brevet puisse, le cas échéant, être refusé, pour la raison qu'une telle revendication tendrait à éluder l'interdiction de protéger la substance.

Au reste, il sera toujours possible d'ordonner l'expropriation du brevet, conformément à l'article 32, si, contre toute attente, un brevet accordé pour un procédé de fabrication devait aller à l'encontre de l'intérêt public.

Chiffre, 4 : En co qui concorno les substances chimiques, le projet, avec l'assentiment des représentants de l'industrie chimique, s'en tient à la

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situation actuelle, c'est-à-dire qu'il exclut les substances de la protection et qu'il l'accorde aux procédés de fabrication (voir aussi à ce sujet l'art. 62).

L'impossibilité de faire protéger la substance a vraisemblablement pour effet d'engager les intéressés à consacrer toute l'attention nécessaire à la recherche des procédés de fabrication les plus avantageux du point de vue économique.

La disposition relative aux alliages est nouvelle. S'il intervient une réaction chimique dans la fabrication de l'alliage, on peut se demander si l'alliage ne constitue pas une substance chimique au sens de la loi. Les alliages sont des produits qui, par leur nature, se composent de plusieurs substances. C'est pourquoi, depuis des années, le bureau de la propriété intellectuelle ne les a généralement pas considérés comme de& substances chimiques. Jusqu'ici les tribunaux n'ont pas eu l'occasion de se prononcer sur la question. L'amendement proposé par les représentants de l'industrie métallurgique a pour but de sanctionner la pratique suivie jusqu'à présent par le bureau et d'assurer aux inventions d'alliages un traitement uniforme, aussi bien de la part de l'autorité chargée de la délivrance des brevets que des tribunaux.

Le paragraphe dit textile (art. 2, ch. 4 de la loi actuelle), qui exclut de la protection certaines inventions faites en matière de perfectionnement de fibres textiles, n'a pas été maintenu. Cette disposition avait été autrefois insérée dans la loi à la demande des représentants de l'industrie suisse du textile, qui craignaient de ne pouvoir soutenir la concurrence étrangère si elle avait la possibilité de faire protéger ses inventions en Suisse. Depuis lors, la situation s'est considérablement modifiée. La Suisse possède maintenant une industrie propre, qui exerce elle-même une activité créatrice dans le domaine exclu, aujourd'hui encore, de la protection. La réglementation actuelle ne constitue donc plus pour eDe un avantage, mais tourne à son préjudice. C'est pourquoi, depuis des années, une minorité parmi les entreprises intéressées demande l'abrogation du « paragraphe textile ». La majorité elle-même ne s'oppose plus, en principe, à ce que la protection soit étendue à ce domaine. Elle craint cependant, dans cette éventualité, d'avoir affaire aussitôt à une foule de brevets accordés
pour des inventions qui ne seront plus nouvelles ou qui ne seront pas dignes de protection et d'avoir ensuite à éliminer tous ces brevets par de coûteux procès; c'est pourquoi elle demande que le paragraphe textile ne soit abrogé que si l'examen préalable est introduit en même temps, du moins pour le domaine dont il s'agit.

Le présent projet a tenu compte de cette exigence. L'attitude adoptée par l'industrie textile explique aussi pourquoi l'on prévoit de donner à cette industrie le pas sur les autres au cas où l'examen préalable serait introduit graduellement; voir l'article 109 et les remarques faites à son sujet.

Feuille fédérale. 102e année. Vol. I.

67

966 Art. 3 et 4 (droit à la délivrance du brevet) 1. Il convient tout d'abord d'expliquer ici certaines expressions employées dans le projet et de bien délimiter le sens des unes et des autres.

a. Par « droit à la délivrance du brevet », il faut entendre le droit de requérir la délivrance d'un brevet pour une invention déterminée et de suivre la demande jusqu'à la délivrance du brevet.

b. Le « droit au brevet » est en quelque sorte le droit de « propriété » sur le brevet qui a été délivré. Il n'est pas incorporé dans le « document du brevet » (art. 83). Il appartient à celui à qui le bureau a délivré le brevet, une fois remplies les conditions requises par la loi, ou à son ayant cause (voir art. 33 et les remarques qui le concernent). Celui à qui appartient le droit au brevet est appelé « titulaire du brevet ».

c. Les « droits découlant du brevet » comprennent l'ensemble des droits conférés au titulaire du brevet par l'article 8.

2. La loi actuelle ne dit nulle part à qui appartient le « droit à la délivrance du brevet ». Cependant, le brevet peut, selon l'article 16, chiffre 2, être déclaré nul s'il a été délivré à une personne qui n'y avait pas droit et selon le chiffre 5 du même article, lorsque deux brevets ont été délivres pour la même invention, devra être déclaré nul celui qui a été délivré à la suite d'une demande postérieure. Ces deux causes de nullité sont également prévues dans le présent projet (art. 26, ch. 5 et 6). Toutes les causes de nullité supposent cependant une disposition légale dont elles ont à assurer le respect. Il y a là, dans le droit actuel, une lacune qu'il s'agit de combler.

3. L'article 3, _7er alinéa, pose en principe que le droit à la délivrance du brevet revient à celui à qui l'invention appartient. Ce pourra être l'in.venteur, mais pas nécessairement : si l'inventeur cède son invention à un tiers, avant ou après le dépôt de la demande de brevet, le droit à la délivrance du brevet passera également à l'acquéreur. En cas de décès de l'inventeur, ce droit appartiendra aux héritiers. Il se peut qu'en vertu de la loi l'invention appartienne non pas à l'inventeur mais à un tiers, par exemple à un employeur (cf. art. 343 CO) ; dans ce cas, l'employeur sera aussi titulaire du droit à la délivrance du brevet, et seul il aura à décider s'il veut faire breveter l'invention
et la livrer par là à la publicité ou s'il veut l'exploiter comme secret de fabrication. Indépendamment de son droit à la délivrance du brevet, l'inventeur a droit, au cas où son invention est brevetée, à être reconnu comme inventeur; ce droit est réglé par les articles 5 et 6.

4. Si plusieurs personnes ont collaboré à une invention, le droit à la délivrance du brevet appartient aussi en commun aux différents collaborateurs (art. 3, 2e al.), à moins que l'invention n'appartienne à leur employeur.

967 5, Le 3e alinéa de l'article 3 détermine à qui appartient le droit à la délivrance du brevet lorsque plusieurs personnes ont fait la même invention de façon indépendante. Il n'est pas rare que plusieurs inventeurs étudient simultanément un même problème technique, sans qu'ils en sachent rien. Il est dans la nature des choses qu'un seul d'entre eux puisse obtenir un monopole. Pour des raisons d'ordre pratique, la préférence sera donnée à celui qui, le premier, aura déposé une demande de brevet. Ce ne sera pas forcément celui qui aura le premier réalisé l'invention. Le premier déposant peut cependant perdre le premier rang si, dans la suite, la date de son dépôt est reportée à plus tard conformément à l'article 66. D'autre part, si l'un des déposants peut invoquer une priorité conformément aux articles 17 ou 21, sera déterminante la date de priorité et non pas la date du dépôt de la demande en Suisse. C'est pour tenir compte de ces particularités que le 3e alinéa prend comme critère le « dépôt antérieur ou jouissant d'une priorité antérieure ». Si au cours de la procédure en opposition un tiers, se fondant sur l'article 72 du projet, fait valoir que la même invention a déjà été l'objet d'une première demande de brevet, le bureau ne pourra plus continuer à traiter la seconde demande tant que la première n'aura pas été ou retirée ou rejetée ou qu'elle n'aura pas abouti à la délivrance d'un brevet. En ce dernier cas, un brevet valable ne pourra plus être accordé pour la demande de brevet plus récente (cf. art: 26, ch. 5).

Bien que, sur les différentes personnes ayant fait la même invention de façon indépendante, une seule puisse obtenir un brevet, les autres n'en sont pas pour autant dépourvues de tous droits: l'article 35 leur réserve encore le droit, sous certaines conditions, d'utiliser l'invention, ce droit pouvant être opposé même au titulaire du brevet, 6. Il ne saurait être question pour l'autorité chargée de la délivrance des brevets de vérifier dans chaque cas si le déposant est en droit ou non de requérir la délivrance d'un brevet. Au cours de la procédure en délivrance du brevet, le droit du déposant doit bien plutôt être supposé (art. 4) et la preuve du contraire ne sera pas admise; selon l'article 72 du projet, l'opposition ne peut être fondée que sur le 3e alinéa de l'article 3,
mais non pas sur les 1er et 2e alinéas. En revanche, le véritable ayant droit pourra intenter contre le déposant l'action en cession, conformément à l'article 29.

Art. ô et 6 (mention de l'inventeur) Ces dispositions tendent à mettre à exécution l'article 4 ter de la convention d'union de Paris, texte de Londres, que la Suisse a déjà ratifié.

Elles répondent à un postulat qui intéresse en particulier les inventeurs travaillant au service d'un employeur.

Le déposant doit en principe indiquer au bureau si c'est lui qui a fait l'invention ou quel est le tiers qui en est l'auteur. Dans ce dernier cas, le

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nom de la personne indiquée par le déposant sera publié, à moins que cette personne n'y renonce expressément (art. 6).

Si le déposant ne satisfait pas à son obligation, le bureau lui adressera un a-vertissement (art. 67, 3e al.). Si aucune suite n'est donnée à cet avertissement, la demande de brevet sera rejetée (art. 68).

Le bureau ne peut pas vérifier si les renseignements fournis par le déposant concernant la personne de l'inventeur sont exacts ; il le présumera jusqu'à preuve du contraire. Cette preuve ne pourra être apportée, conformément à l'article 5, 3e alinéa, que par la production d'un jugement exécutoire.

H n'y a pas lieu de prévoir des sanctions pénales contre celui qui donne de faux renseignements sur la personne de l'inventeur. Il suffit que l'inventeur puisse intenter l'action tendant à faire constater sa qualité d'inventeur (art. 94, ch, 6) et demander ensuite que son nom soit mentionné conformément à l'article 5, 3e alinéa.

Art. 7 (nouveauté de l'invention) Selon l'article 4 de la loi actuelle, n'est pas réputée nouvelle l'invention qui, au moment du dépôt de la demande, a déjà été exposée par des écrits ou des dessins dans des publications « se trouvant en Suisse ». Désormais, la nouveauté sera détruite même lorsque l'invention aura été exposée danä une publication parue à l'étranger et qui ne sera jamais parvenue en Suisse. L'opinion, selon laquelle l'invention qui a fait l'objet de publications à l'étranger peut encore être brevetée en Suisse tant que ces publications ne sont pas parvenues dans le pays, semble dépassée, étant données les possibilités actuelles de communication.

Bien qu'il tienne compte des publications étrangères, le projet s'en tient à la règle actuelle selon laquelle l'existence même de publications, écrits ou images, suffit, sans que l'on puisse exiger encore la preuve que l'invention ait été divulguée du fait de ces publications (comparer lettres b et a de l'art. 7).

Cependant, s'il n'existe pas de publications destructrices de nouveauté, celle-ci ne sera détruite que si l'on constate que l'invention a été divulguée en Suisse ; il ne suffit pas que l'invention ait été connue quelque part à l'étranger. Si l'on a adopté ici une autre règle que dans le cas précédent, c'est qu'une publication, un écrit ou une image, est accessible à un nombre illimité de
lecteurs, tandis que les faits connus des gens du métier et non publiés traversent moins rapidement les frontières d'un pays.

On n'a pas tenu compte dans le projet d'une proposition qui a été faite à l'occasion et qui tendait à ne pas considérer comme destructrice de nouveauté une publication émanant de l'inventeur lui-même ou de sou ayant cause dans les six derniers mois qui précèdent le dépôt de la demande

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de brevet. C'eût été en réalité rendre un mauvais service à l'inventeur; en effet, dans tous les Etats qui ne connaissent pas une telle disposition -- et ils forment aujourd'hui encore la grande majorité -- les publications faites par l'inventeur avant le dépôt de la demande sont destructrices de nouveauté, même si elles ont lieu à l'étranger. Cette question ne peut être résolue de façon satisfaisante que sur le plan international.

Art. 8 (effets

du brevet)

Le contenu des droits conférés par le brevet est réglé, quant au fond, de la même façon que dans la loi actuelle (art. 7, 1er et 2e al.). Seule la rédaction en a été modifiée, afin de bien préciser que le droit de vendre l'invention, de la mettre en vente, etc. ne vaut pas seulement, comme on pouvait en conclure du texte actuel, pour le cas où l'objet de l'invention est un produit, mais pour toute espèce d'inventions, y compris celles qui ont pour objet un procédé. Le 2e alinéa indique de façon générale ce qu'il faut entendre par « utilisation » de l'invention. De cette façon, on a pu aussi simplifier le texte qui traite des éléments constitutifs de la violation du brevet (art. 85).

Par utilisation « professionnelle » il faut entendre, comme jusqu'ici par « exécution industrielle », toute utilisation qui n'est pas faite à des fins purement personnelles et privées (comme une utilisation dans le ménage ou pour étude). Celui qui utilise l'invention dans son propre établissement industriel, même pour des recherches, l'utilise professionnellement. En revanche, il pourra y avoir utilisation professionnelle même si l'invention n'est pas utilisée dans un établissement industriel proprement dit.

Art. 9 (brevet additionnel) Cet article correspond, pour l'essentiel, à l'article 14, 1er et 3e alinéas, de la loi actuelle. Son texte a seulement été modifié en ce sens qu'il doit s'agir (comme l'exige déjà l'art. 11, 1er al., du règlement d'exécution) d'un perfectionnement ou de tout autre développement de « l'invention définie dans une revendication du brevet principal » (au lieu de « l'invention brevetée »). Il sera ainsi plus aisé de juger s'il y a ou non un rapport additionnel au sens de la loi.

La disposition spéciale de l'actuel article 14, 2e alinéa, concernant les inventions chimiques a pu être supprimée, la notion de 1'« unité de l'invention » ayant été sensiblement élargie en faveur de ces inventions (voir art. 62). Naturellement, des brevets additionnels pourront aussi être accordés pour des inventions chimiques, aux conditions fixées par l'article 9.

970

Art. 10 (transformation des brevets additionnels en brevets principaux) Les deux premiers alinéas correspondent au droit actuel (art. 15, 1er al., lre et 2e phrases).

Le 3e alinéa s'en écarte (art. 21, 2e al.) en ce sens que le délai imparti pour demander la transformation ne doit plus courir « à partir du jugement définitif ou de la déclaration de renonciation ». Chaque titulaire de brevet ne sera pas toujours en mesure de juger s'il doit ou non présenter une demande de transformation; il convient donc que le bureau l'en avertisse lorsque c'est le cas et que le délai ne commence à courir qu'à partir de cette communication.

Art. 11 (signe du brevet) er Le 1 alinéa correspond, quant au fond, au droit en vigueur (art, 34) ; seule sa rédaction a été quelque peu simplifiée.

Le 2e alinéa ne change rien non plus au droit actuel (art. 35, 1er al,).

Le 3e alinéa s'en écarte sur deux points (art. 35, 2e al.) : D'une part, le titulaire du brevet doit pouvoir intenter l'action en. dommages-intérêts même s'il n'a pas lui-même apposé le signe du brevet sur ses marchandises ; d'autre part, outre le droit de demander des dommages-intérêts, il doit conserver celui d'exiger l'apposition du signe. Le droit actuel ne tient pas suffisamment compte des intérêts du titulaire du brevet au regard des intérêts de celui qui est au bénéfice d'une licence ou d'un droit dérivé d'un usage antérieur.

Art. 12 (autres références à l'existence d'une protection) II n'est pas rare que des papiers de commerce ou des marchandises soient mis en circulation avec une mention faisant croire à l'existence d'un brevet (« tous droits réservés » ou autre indication de ce genre), mais sans que le numéro du brevet soit indiqué. Il arrive aussi que des annonces de journaux, invoquant l'existence de brevets ou de demandes de brevet, mettent en garde la concurrence « contre les imitations ». Cependant, les tiers doivent pouvoir, au vu de l'exposé d'invention, se rendre compte par eux-mêmes de ce qui est protégé et de ce qui leur est par conséquent interdit. C'est ce que veut obtenir la nouvelle disposition de l'article 12.

Il n'y a pas lieu de prévoir une sanction spéciale si le titulaire du brevet refuse de donner le renseignement demandé; ou bien il échouera dans l'action civile ou pénale qu'il voudra intenter contre les tiers, ceux-ci
n'étant pas en faute, ou bien, s'il y réussit dans les cas où il n'est pas nécessaire qu'il y ait faute de la part des tiers (voir les remarques à l'art. 91), il devra s'attendre à supporter les frais du procès qu'il aurait pu éviter en donnant les renseignements demandés. En outre, le refus de fournir

971

un renseignement exigé par la loi pourra, le cas échéant, être considéré comme un acte illicite au sens dos articles 41 s. du code des obligations, entraînant pour son auteur la responsabilité du dommage que les tiers pourront subir du fait de ce refus.

Art. 13 (domicile à l'étranger) Cet article correspond pour l'essentiel à l'article 24, 1er alinéa, de la loi actuelle. De modestes changements ont été apportés sur les points suivants : Au _7er alinéa, le terme de « domicile fixe » a été remplacé par celui de « domicile », afin de permettre à des personnes habitant en Suisse, sans y avoir à proprement parler un domicile au sens du code civil, de s'occuper elles-mêmes de leurs brevets, sans devoir recourir à un mandataire.

Au 2e alinéa sont réservées non plus seulement les dispositions « cantonales », mais d'une façon générale « les dispositions » réglant l'exercice de la profession d'avocat, afin de tenir compte également des dispositions fédérales en la matière.

En vertu de la loi, le mandataire inscrit au registre des brevets représente le titulaire du brevet établi à l'étranger dans tous les procès, aussi bien comme demandeur que comme défendeur. Tant qu'il figure au registre, il ne saurait exciper de la résiliation du mandat qui serait intervenue entre temps. Les tiers doivent pouvoir se fier au registre, spécialement lorsqu'ils veulent actionner le titulaire du brevet.

Les dispositions relatives au for, contenues à l'article 24, 2e alinéa, de la loi actuelle, ont été reportées sous le titre « sanction civile et pénale », où elles semblent mieux à leur place (voir les remarques à l'art. 95).

Art, 14 (durée, du brevet) 1er alinéa : 1. Selon l'article 10 de la loi actuelle, la durée maximum d'un brevet est de quinze ans à partir du dépôt de la demande, cette durée étant limitai» à dix ans pour les brevets qui portent sur des procédés chimiques pour la fabrication de remèdes. Depuis des années déjà, la durée de protection de quinze ans a été jugée insuffisante par les titulaires de brevets. On fit valoir qu'en général une bonne partie de la durée de protection s'écoulait avant qu'un profit quelconque pût être tiré de l'invention, en sorte que l'inventeur n'arrivait plus, dans les quelques années qui lui restaient, à trouver une compensation suffisante de son travail et de ses frais (compte
tenu des frais entraînés par le développement de l'invention). On fit remarquer aussi que tous les autres Etats industriels de quelque importance accordent une protection de plus longue durée. Aussi le Conseil national a-t-il accepté, le 28 septembre 1945, un postulat Picot invitant le Conseil fédéra,] à examiner s'il ne conviendrait pas de présenter aux chambres un projet de loi

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portant prolongation de la durée de protection de 15 à 18 ans. Cependant, lors des délibérations sur le rapport de gestion pour l'année 1946, ce postulat a été classé, sur notre proposition, la commission des experts s'étant prononcée à une forte majorité pour une prolongation réalisée dans le cadre de la revision totale de la loi sur les brevets d'invention, et non par la voie d'une révision partielle.

Le tableau III, p. 1037, donne un aperçu des durées de protection actuellement prévues par les lois étrangères. Si l'on considère que la publication de la demande de brevet ou la délivrance du brevet peuvent, le cas échéant, suivre de plusieurs années le dépôt de la demande, on verra en effet que dans la plupart des Etats étrangers, la durée des brevets est sensiblement plus longue qu'en Suisse. C'est pourquoi le projet prévoit de prolonger la durée de protection de 15 à 18 ans.

2. La durée maximum de 18 ans doit aussi être applicable désormais aux brevets ayant pour objet des procédés chimiques pour la fabrication de remèdes; l'exception dont ces brevets souffraient jusqu'ici a été supprimée pour les raisons suivantes: Dans l'industrie chimico-pharmaceutique, on a depuis longtemps déjà jugé insuffisante la durée actuelle do protection do 10 ana. On y fit valoir qu'un examen pharmacologique attentif, de même que l'examen clinique d'un remède exigent souvent un temps considérable, si bien qu'il arrive parfois que le remède ne peut être mis dans le commerce que peu de temps avant la fin de la durée de protection. La commission des experts, dans sa majorité, a recommandé de mettre sur le même pied les nouveaux procédés chimiques pour la fabrication de remèdes et les autres inventions.

S'est en particulier prononcé pour le maintien d'une plus courte durée de protection des premiers le représentant du concordat des caisses-maladie suisses. La raison essentielle de son opposition a été celle-ci: Les remèdes fabriqués après la période de protection par des tiers selon le procédé anciennement breveté sont en général meilleur marché que les mêmes remèdes fabriqués par l'ancien titulaire du brevet. En prolongeant la durée de protection, on retarderait l'apparition de ces produits moins coûteux, ce qui se traduirait pour les caisses-maladie par une augmentation sensible des frais de remèdes. Cependant,
le concordat des caisses-maladie suisses a également admis, dans la suite, une prolongation de la durée de protection de 10 à 18 ans, à condition que les procédés non chimiques pour la fabrication de remèdes restent, comme auparavant, exclus de la protection; satisfaction lui a été donnée sur ce point par l'article 2, chiffre 2, Les arguments avancés par les représentants de l'industrie, et auxquels s'est ralliée la majorité de la commission des experts, ne sont pas sans pertinence. Une durée de protection trop courte risque de faire apparaître sur le marché, si le fabricant n'a pas un sens très aigu de ses responsabilités, des remèdes nouveaux qui n'auront pas été auparavant soumis

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à un examen clinique approfondi. On ne saurait d'autre part exiger de l'inventeur qu'il attende d'avoir terminé l'examen clinique avant de déposer sa demande de brevet; ce serait lui faire courir le risque de voir un tiers déposer une demande de brevet avant lui ; d'autre part, si des tiers s'emparaient de son invention durant la période d'essai, il se trouverait, en cas de procès, dans une situation moins avantageuse que s'il avait déjà déposé une demande de brevet. Il convient enfin de considérer qu'aucune loi étrangère ne connaît pour les inventions de remèdes une durée de protection plus restreinte, si protection il y a. Pour toutes ces raisons, il semble justifié de fixer également à 18 ans la durée maximum de protection des brevets ayant pour objet des procédés chimiques pour la fabrication de remèdes, d'autant plus que même le concordat des caisses-maladie suisses, qui représente une grande partie des consommateurs intéressés, ne s'y oppose plus.

Comme dans la loi actuelle, le délai de protection commencera à courir à compter de la date du dépôt de la demande (art. 64). En effet, le moment déterminant pour apprécier l'état de la technique, et partant pour juger de la nouveauté de l'invention et du progrès technique réalisé, n'est pas celui de la délivrance du brevet, mais celui du dépôt de la demande.

D'autre part, c'est également à partir du dépôt de la demande que le droit des tiers dérivé d'un usage antérieur ne peut plus être acquis (art. 35).

Remarquons enfin que si le délai de protection commençait à courir à compter de la délivrance du brevet, le déposant pourrait --· et ce serait là une conséquence indésirable -- chercher à faire traîner en longueur la procédure en délivrance du brevet.

Disons encore, pour être complets, que sur cent brevets délivrés six environ seulement ont été jusqu'ici maintenus pendant toute la durée de protection (voir les remarques faites à l'art. 1er, 1er al., sous lettre d). La prolongation de la durée de protection n'intéresse donc qu'un petit nombre d'inventions ; mais ces inventions sont justement celles qui ont une grande valeur économique, en sorte qu'une prolongation de leur durée de protection pourra constituer pour la concurrence une gêne sensible. Il importe de signaler encore à ce propos que jusqu'ici un peu plus de la moitié des brevets
maintenus pendant toute la durée de la protection appartenaient à des étrangers (voir le tableau II, p. 1036). Si les conditions restent les mêmes, la prolongation de la durée de protection profitera donc dans une large mesure à des étrangers. Notons cependant que ces étrangers appartiennent pour la plupart à des pays dans lesquels les industriels suisses jouissent déjà, de leur côté, de la durée de protection que le présent projet tend aujourd'hui seulement à introduire en Suisse (voir tableau III, p. 1037).

Le 2e alinéa correspond au droit actuel (art, 15, 1er al., dernière phrase).

974 Dispositions transitoires. Selon l'article 110 du projet, tous les brevets délivrés avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi et qui ne seront pas encore tombés en déchéance jouiront de la nouvelle durée de protection; seules seront exceptées les inventions non brevetables d'après le nouveau droit. Les contrats de licence conclus sous l'empire de l'ancien droit vaudront-ils encore pour les 16e à 18e années du brevet ? La réponse dépendra avant tout de l'interprétation du contrat de licence. Il est mutile de prévoir à ce sujet une disposition spéciale dans la loi. Les parties s'entendront elles-mêmes, à défaut de quoi elles pourront en appeler au juge. Si ce dernier estime que les parties n'ont voulu conclure le contrat que pour la durée de 15 ans à compter du dépôt de la demande, un nouveau contrat sera nécessaire pour prolonger la licence au delà de ce délai.

Art. 15 (déchéance 'prématurée du brevet) Cet article correspond au droit actuel (art. 17, 1er al., et 21, 1er al.), sauf quelques changements rédactionnels.

Ni la loi actuelle, ni son règlement d'exécution ne disent ce qu'il advient lorsqu'une personne renonce à un brevet sur lequel elle avait accordé des licences ou des droits de gage. Les tiers auxquels de tels droits ont été accordés peuvent subir un dommage du fait de la renonciation.

Un moyen de le prévenir serait de réserver leur consentement à la renonciation. Cependant, seuls pourraient être ainsi sauvegardés les droits des tiers inscrits au registre des brevets, et même dans ce cas on ne saurait simplement exiger du titulaire du brevet qu'il présentât une déclaration écrite de renonciation de la part du tiers et refuser en attendant de tenir compte de sa propre renonciation. Il faudra plutôt impartir au tiers un délai pour faire valoir en justice, à l'encontre du titulaire du brevet, son droit au maintien du brevet, faute de quoi il sera donné suite à la renonciation. Toutes ces dispositions peuvent être cependant réservées au règlement d'exécution.

Art. 16 (réserve en faveur des traités) La Suisse est dès l'origine membre de l'union internationale créée par la convention d'union de Paris pour la protection de la propriété industrielle. Cette convention contient une série de dispositions qui priment le droit national. Elle est soumise de temps en temps à des re visions. Selon
la théorie défendue en Suisse, les ressortissants des pays de l'union qui ont ratifié un texte revisé peuvent invoquer ce texte en Suisse dès le moment où la Suisse l'a aussi ratifié, et cela même si la législation fédérale n'a pas encore été adaptée au texte révisé; en revanche, les ressortissants suisses ne peuvent invoquer devant les autorités suisses que les règles de droit interne et non celles du droit conventionnel. Tl s'ensuit qu'après la ratification d'un texte revisé de la convention, les étrangers pourront jouir en

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Suisse d'un traitement plus favorable que les nationaux, tant que la législation interne n'aura pas été adaptée au nouveau texte de la convention.

C'est pourquoi la ratification n'interviendra en général qu'au moment où cette adaptation aura été assurée. Mais cette procédure peut parfois retarder do plusieurs années la ratification d'un nouveau texte conventionnel. La nouvelle disposition prévue ici permettra à la Suisse de ratifier immédiatement un nouveau texte de la convention, c'est-à-dire sans adaptation préalable du droit interne et sans que, pour autant, les étrangers jouissent en Suisse d'un traitement plus favorable que les nationaux.

Depuis toujours, les pays de l'union sont obligés, en vertu de l'article 2 de la convention, d'accorder aux ressortissants des autres pays de l'union, en ce qui concerne la protection de la propriété industrielle, les mêmes avantages qu'à leurs propres nationaux. La nouvelle disposition prévue par l'article 16 aura donc pour conséquence que les ressortissants des pays de l'union pourront toujours invoquer en Suisse le texte le plus récent de la convention, même si leur pays d'origine ne l'a pas encore ratifié, la Suisse étant obligée, en vertu de l'article 2 de la convention, de leur accorder les mêmes avantages qu'à ses propres ressortissants. Ledit article 2 exclut la possibilité de prévoir une réserve de réciprocité. Cet inconvénient, ai inconvénient il y a, semble cependant de pou de poids à côté do l'avantage qui, ainsi que nous l'avons vu, résultera de l'article 16.

Chapitre 2 Droit de priorité En 1911, les dispositions relatives aux droits de priorité contenues dans la convention d'union de Paris ont été revisées sur différents points, et il a fallu modifier aussi les dispositions correspondantes des lois sur les brevets d'invention et sur les dessins et modèles industriels. Ces modifications ont fait l'objet d'une nouvelle loi du 3 avril 1914 sur les droits de priorité relatifs aux brevets d'invention et aux dessins ou modèles industriels. Cette nouvelle loi a remplacé les dispositions relatives aux droits de priorité contenues dans les lois sur les brevets d'invention et sur les dessins et modèles industriels. On s'est rendu compte cependant que cette façon de régler les droits de priorité dans une loi spéciale entraînait plus d'inconvénients que
d'avantages. Pour permettre d'avoir sur tout le droit relatif aux brevets d'invention une meilleure vue d'ensemble, les dispositions qui concernent les brevets d'invention ont été reprises dans le présent projet (les dispositions correspondantes de la loi de 1914 devant être abrogées; voir art. 107, 2e al., ch. 2).

Conformément à ce qui a été dit à propos de l'article 1er, 1er alinéa, sur la protection des « petites inventions », il restera possible d'obtenir pour les brevets d'invention accordés en Suisse un droit de priorité dérivé

976 du dépôt à l'étranger non seulement d'une demande de brevet, mais aussi d'un modèle d'utilité.

Art, 17 (priorité dérivée d'un dépôt antérieur) Cet article correspond, sauf quelques changements rédactionnels, aux actuels articles 1er et 5 de la loi sur les droits de priorité.

Disons encore ce qui suit, à propos de la suppression, au 1er alinéa, de la réserve en faveur des droits des tiers : Selon l'article 5 de la loi sur les droits de priorité, aucun droit de possession personnelle (droit dérivé d'un usage antérieur) ne peut être acquis « durant le délai de priorité ». Il s'ensuit que la réserve faite à l'article 1er, 2e alinéa, de la loi sur les droits de priorité en faveur des droits des tiers ne peut viser que les droits acquis avant le début du délai de priorité. Cette réserve est cependant mutile. Si donc le 3e alinéa du présent article 17 exclut lui aussi la possibilité d'acquérir un droit dérivé d'un usage antérieur pendant que court le délai de priorité, cela veut dire aussi qu'un tel droit pourra naître de l'usage de l'invention avant le début du délai de priorité.

Il ressort de l'article 35, en liaison avec l'article 17, 3e alinéa, que seuls peuvent acquérir un droit dérivé d'un usage antérieur les tiers qui ont utilisé l'invention professionnellement en Suisse ou qui y ont fait à cette fin des préparatifs spéciaux au moment du premier dépôt fait à l'étranger.

Art. 18 (qualité requise pour faire valoir le droit de priorité) Le _?er alinéa correspond à l'article 2 de la loi sur les droits de priorité.

Cependant, il met en outre au bénéfice du droit de priorité les étrangers ressortissants d'un Etat qui n'est pas membre de l'union internationale, mais qui a conclu avec la Suisse un accord spécial.

Le 2e alinéa englobe les deux premiers alinéas de l'article 3 de la loi sur les droits de priorité. Quant à la disposition contenue au 3e alinéa dudit article 3, selon laquelle « est nulle toute disposition contraire aux dispositions qui précèdent », elle va de soi et n'a pas été reprise dans le projet.

Le 3K alinéa correspond, sous une forme un peu modifiée, à l'article 4 de la loi sur les droits de priorité.

Art. 19 (formalités) 7 et 2 alinéas : Pour juger de l'état de la technique qui doit décider de la nouveauté de l'invention et du progrès technique réalisé, il importe de savoir
dès le début de l'examen de la demande de brevet s'il faut prendre en considération la date dn dépôt de la, demande en Suisse ou celle d'une éventuelle priorité. Vu l'article 4, lettre D, 3e alinéa de la convention er

e

977 d'union (texte de Londres, 1934), le délai durant lequel doit être remise la déclaration de priorité a été fixé à trois mois à partir du dépôt de la demande de brevet ; quant aux « pièces justificatives », qui demandent parfois un certain temps pour être réunies, elles devront être présentées dans le délai de six mois à partir du dépôt de la demande.

Si la personne qui dépose la demande de brevet en Suisse n'est pas la même que celle qui a fait le premier dépôt à l'étranger, son droit de revendiquer la priorité en Suisse sera présumé, conformément à l'article 4.

3e alìnea : II semble indiqué de régler non seulement dans le règlement d'exécution, mais dans la loi elle-même les conséquences de l'inobservation des délais indiqués (voir art. 5, 1er al., et 6, 3e al., du règlement d'exécution de la loi sur les droits de priorité).

Art. 20 (fardeau de la preuve) Cet article correspond, pour le fond, à l'article 6, 3e alinéa, de la loi sur les droits de priorité.

Art. 21 (priorité dérivée d'une exposition) 7er et 2S alinéas : Le projet présente sur le droit actuel (art. 7 de la loi sur les droits de priorité) une différence fondamentale, en ce sens qu'aucun droit de priorité ne pourra plus naître de l'exposition de l'objet de l'invention dans une exposition nationale suisse ou étrangère; le droit de priorité ne pourra plus naître que dans le cas d'une exposition internationale, suisse ou étrangère. Cette modification, proposée par la commission des experts, est motivée de la façon suivante: L'article 11 de la convention d'union prévoit que les pays de l'union accorderont une protection temporaire pour les inventions dont l'objet figurera dans une exposition internationale. La convention ne contient aucune disposition en ce qui concerne les expositions nationales. C'est pourquoi différents pays de l'union n'accordent un droit de priorité que dans le cas d'une exposition internationale. De nombreux inventeurs l'ignorent. Ils croient pouvoir revendiquer dans tous les pays de l'union la priorité dérivée de l'exposition de leur invention à l'une de nos foires suisses par exemple, et sont désolés d'apprendre dans la suite que non seulement ils ne peuvent invoquer un droit de priorité dans ces pays, mais encore que leur invention, le cas échéant, n'y est plus considérée comme nouvelle. De telles surprises
devraient être épargnées notamment aux inventeurs inexpérimentés. Le meilleur moyen d'y parvenir consiste à ne pas reconnaître de droit de priorité dans le cas d'une exposition nationale et de forcer ainsi les inventeurs à déposer aussi tôt que possible pour leurs inventions une demande de brevet, qui seule leur donnera la possibilité d'être protégés en Suisse et d'acquérir un droit de priorité à l'étranger.

978

Selon la règle proposée, l'industriel qui expose l'objet de son invention à la foire aux échantillons de Baie, au comptoir suisse de Lausanne, à la foire de Lugano ou à 1'« Olma » de St-Gall ne pourra donc plus, lors d'une demande ultérieure de brevet, revendiquer un droit de priorité. Il courra donc le risque de voir son invention portée, par sa propre faute, à la connaissance d'autres personnes et de ne plus pouvoir obtenir pour elle un brevet valable. S'il désire que son invention soit brevetée, il devra donc, en même temps qu'il fera parvenir l'objet de l'invention sur la place de l'exposition, déposer une demande de brevet.

La proposition des experts a été adoptée notamment pour les raisons suivantes : L'utilité pratique de la priorité dérivée d'une exposition dépend dans une large mesure de la possibilité de prouver l'identité du contenu de la demande de brevet et de l'objet exposé. Il sera très souvent difficile ou même impossible d'apporter cette preuve. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral disait déjà, dans son message relatif au projet de la future loi de 1914 sur les droits de priorité, qu'« un inventeur tant soi peu prudent n'utilise pas le droit de priorité basé sur une exposition ».

Enfin, le projet s'écarte encore de l'article 7 de la loi sur les droits de priorité en ce que la réserve en faveur des droits des tiers a été supprimée, pour les mêmes raisons qu'à l'article 17, 1er alinéa, 3e alinéa : Selon l'article 7, 2e alinéa, en liaison avec l'article 5 de la loi sur les droits de priorité, aucun droit dérivé d'un usage antérieur ne peut être acquis « durant le délai de priorité » et ce délai commence à courir, selon l'article 7, 1er alinéa, à partir du jour de l'ouverture de l'exposition. Le projet prévoit, quant à lui, qu'il ne peut plus être acquis de droit dérivé d'un usage antérieur « à partir du jour entrant en ligne de compte selon le 2e alinéa »; il ne serait pas logique en effet qu'un tel droit puisse être encore acquis après le jour déterminant pour constater s'il y a ou non une invention brevetable.

Art. 22 (formalités) Comme actuellement (art. 9, 1er al,, de la loi sur les droits de priorité), le déposant n'aura tout d'abord qu'à remettre, au bureau de la propriété intellectuelle, une déclaration sur le nom, le siège, etc. de l'exposition, sans avoir à
présenter immédiatement des moyens de preuve. Il ne peut être question, en particulier, d'exiger qu'il présente une attestation de la direction de l'exposition sur la nature de l'invention qui a été exposée.

En pratique, la direction d'une exposition sera rarement en mesure de donner une déclaration sur les caractéristiques essentielles de l'invention.

Dans ces conditions, ou bien elle signera sans l'examiner le texte présenté par l'exposant, ou bien elle refusera de signer quoi que ce soit, et l'exposant pourra manquer des moyens de preuve nécessaire». Dana l'un et l'autre cas, on aboutit à des résultats regrettables.

979 H sera d'autant plus facile de se contenter d'abord d'une simple déclaration du déposant que cette déclaration suffit à remplir les conditions nécessaires pour entreprendre l'examen de la demande. S'il apparaît au cours de l'examen qu'il existe des publications propres à mettre en question la nouveauté de l'invention, alors seulement le déposant devra, à la demande de l'examinateur, apporter la preuve de la priorité qu'il revendique, preuve qu'il pourra fournir par tous moyens appropriés.

Art. 23 (application de prescriptions relatives à la priorité dérivée d'un dépôt antérieur) La réglementation prévue ici concorde avec celle du droit actuel (art. 7, 2e al., et 9, 3e al., de la loi sur les droits de priorité).

Chapitre 3 Modifications touchant à l'existence du brevet Art, 24 et 25 (renonciation partielle) II peut arriver que la revendication d'un brevet soit trop large et de ce fait définisse une invention qui n'est pas digne d'être protégée. Dans ce cas, le titulaire du brevet a intérêt, pour éviter une action en nullité, à « renoncer partiellement » au brevet, en limitant la revendication à ce qui était digne d'être protégé au moment du dépôt de la demande. C'est à quoi sert l'article 19 de la loi actuelle. Cependant, cette disposition n'a pas donné satisfaction dans la pratique. C'est pourquoi divers changements sont proposés: 1. Il ne sera plus possible de réunir plusieurs sous-revendications en une sous-revendication nouvelle. Outre qu'on ne voit pas l'intérêt réel qu'il peut y avoir à le faire, cette opération ne limiterait en rien l'étendue de la protection conférée par le brevet (voir les remarques à l'art. 63, 2e al.).

2. Jusqu'ici, les sous-revendications subsistant après la réunion d'une revendication avec une sous-revendication devaient être supprimées si elles n'étaient pas compatibles avec la sous-revendication transformée en revendication. Il en était de même des sous-revendications qui, liées à la nouvelle revendication, eussent constitué une combinaison non revendiquée auparavant. La renonciation partielle ne doit en effet que restreindre et non pas étendre la protection conférée par le brevet. Cependant, l'obligation de supprimer des sous-revendications dans des cas de ce genre a été souvent ressentie comme une dure exigence ; il peut arriver, le cas échéant, que ces
sous-revendications définissent justement une invention susceptible d'être protégée.

Aussi, l'article 25 donne-t-il la possibilité, dans des cas de ce genre, de constituer, pour les sous-rovendications qui doivent être éliminées, de nouveaux brevets spéciaux qui garderont comme date de dépôt celle du

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brevet initial, mais qui donneront lieu à des taxes spéciales (voir art. 44, 2e al., et 46, 2" al.).

3. L'article 19 de la loi actuelle exclut la possibilité d'une renonciation partielle lorsque le brevet n'a qu'une seule revendication sans sous-revendication. Cette règle avait été adoptée pour des raisons de sécurité juridique : on a voulu épargner aux tiers d'avoir sans cesse à tenir compte d'éventuels changements apportés à la revendication. Mais cette solution a été critiquée, elle aussi, pour sa rigidité. Effectivement, le titulaire du brevet peut avoir également un intérêt légitime à prévenir une action en nullité en limitant .sa revendication de façon appropriée. Mais il peut en outre avoir le même intérêt dans le cas où il existe des sous-revendications, notamment lorsqu'aucune des sous-revendications ne définit l'invention pour laquelle le brevet pourrait être le plus facilement maintenu. Aussi, l'article 24, lettre c, donne-t-il la possibilité de compléter la revendication en y ajoutant des caractères figurant dans la description (l'étendue de la protection est d'autant plus restreinte que les caractères de l'invention figurant dans la revendication sont plus nombreux). Il convient cependant de veiller à ce que seuls soient ajoutés dans la revendication des caractères qui figuraient dès le début dans la description de l'invention et auxquels le titulaire du brevet n'a pas renoncé avant même que le brevet ait été délivré; sinon, nous aurions affaire, encore une fois, non plus à une limitation, mais en réalité à une extension de la protection conférée par le brevet.

On ne peut nier que cette solution entraînera une certaine insécurité juridique. Tant qu'il sera possible de modifier de cette manière la revendication, les tiers ne sauront jamais avec certitude où ils en sont. Aussi, la proposition avait-elle d'abord été faite de fixer un terme à cette insécurité en prescrivant que la revendication ne pourrait être complétée qu'une seule fois et qu'elle ne pourrait plus l'être du tout après l'expiration des deux ans qui suivent la délivrance du brevet. La commission des experts s'est toutefois prononcée contre de telles restrictions.

Art. 26 (action en nullité) _Zer alinéa : 1. Il est expressément prévu dans le préambule que la nullité sera déclarée « sur demande ».

2. Les différentes
causes de nullité sont les mêmes que celles qui sont prévues dans la loi actuelle. Leur énumération en a seulement été quelque peu simplifiée, en ce sens que les chiffres 1, 3 et 4 de l'article 16 actuel ont été réunis sous un même chiffre 1, avec un renvoi à l'article 1er, 1er alinéa, où sont énumérées les trois conditions de validité dont il s'agit (existence d'une invention, nouvelle et utilisable industriellement).

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3. Le chiffre 5 (selon lequel le brevet est nul s'il existe pour la même invention un brevet valable délivré par suite d'un dépôt antérieur ou d'un dépôt jouissant d'une priorité antérieure) donne lieu aux deux observations suivantes : a. Il convient tout d'abord d'approuver expressément l'interprétation du Tribunal fédéral selon laquelle il faut entendre ici par brevet « valable » un brevet qui n'est entaché d'aucune cause de nullité et non pas un brevet « encore en vigueur » (voir ATF 57, II, 237 s.). Si, pour une raison ou pour une autre, le brevet plus ancien est nul, il ne peut pas causer encore la nullité d'un brevet plus récent délivré pour la même invention. En revanche, s'il n'était pas entaché de nullité, il s'opposera à la validité du brevet plus récent même si, pour une raison ou pour une autre (renonciation du titulaire ou non paiement d'une annuité échue; voir art. 15), il était déjà tombé en déchéance avant la délivrance du brevet plus récent.

b. Au Heu de réserver les dispositions relatives à la priorité comme le fait l'actuel article 16, chiffre 5, le projet reprend la terminologie adoptée à l'article 3, 3e alinéa, et indique comme cause de nullité l'existence d'un « dépôt antérieur ou d'un dépôt jouissant d'une priorité antérieure ».

2K alinéa, : Pour permettre au jugo de réunir un dossier le plus complet possible avant de se prononcer sur l'existence d'une cause de nullité, le titulaire du brevet qui invoque la priorité dérivée d'un dépôt à l'étranger devra, à la demande du juge, le renseigner sur les raisons pour lesquelles, le cas échéant, le dépôt fait à l'étranger n'a pas abouti à la délivrance du brevet. Si les renseignements qu'il demande lui sont donnés, le juge devra décider si les raisons indiquées sont valables aussi selon le droit suisse.

S'ils lui sont au contraire refusés, il en tirera les conséquences qui s'imposent, selon sa libre appréciation et en tenant compte des circonstances du cas.

La commission des experts s'est opposée dans sa majorité à une telle solution, faisant valoir essentiellement que l'on ne saurait imposer au titulaire du brevet de fournir lui-même à son adversaire les moyens de preuve destinés à détruire son brevet. Ce serait en outre désavantager de façon injuste les titulaires de brevet qui ont déposé leur invention tout d'abord dans un
pays connaissant l'examen préalable, par rapport à ceux qui l'ont déposée en premier lieu dans un pays sans examen préalable.

A ces arguments, il faut répondre ceci: Le brevet confère à son titulaire un monopole d'exploitation. L'Etat qui accorde le monopole est en droit de le soumettre à certaines conditions exigées par l'intérêt public. Or, l'intérêt public exige qu'un brevet soit détruit lorsque les conditions légales de nullité sont remplies, et que le titulaire du brevet ne puisse continuer à profiter des apparences lorsqu'il sait, par le sort qui a été fait à sa demande de brevet à l'étranger, qu'en réalité son invention ne peut pas être protégée.

Ainsi, seul en réalité se trouvera «désavantagé» le titulaire de brevet de mauvaise foi. On peut en prendre son parti sans scrupules.

Feuille fédérale. 102e année. Vol. I.

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982 Du consentement de la commission des experts, aucune disposition n'a été prévue concernant la répartition du fardeau de la preuve; le juge en décidera selon les règles générales de procédure.

Art. 27 (nullité partielle) Lorsqu'une partie seulement de l'invention brevetée est entachée de nullité, le brevet devra être limité en conséquence. Cet article s'écarte des règles prévues par l'actuel article 16, 2e alinéa, sur les points suivants: Tout d'abord, il dispose expressément qu'il appartient au juge de limiter le brevet. On veut empêcher par là que le juge se borne à constater la nullité partielle du brevet et qu'il réserve au bureau de la propriété intellectuelle le soin de rédiger la nouvelle revendication. Le bureau n'est pas en mesure d'obliger le déposant à donner à sa revendication tel contenu déterminé. Il ne peut qu'indiquer, à rencontre des propositions faites par le déposant ou le titulaire du brevet, les objections auxquelles donnent lieu les dispositions de la loi et rejeter la demande de brevet si l'intéressé ne tient pas compte de ses observations. Seul le juge peut donner à la revendication un contenu indépendant des propositions faites par le titulaire du brevet. Certes, c'est là une tâche d'ordre technique avant tout. Mais le juge a la possibilité de faire appel à des experts. Il pourra en outre, selon le 2e alinéa, demander l'avis du bureau de la propriété intellectuelle.

D'après la loi actuelle, la limitation du brevet doit sauvegarder l'unité de l'invention; c'est dire qu'il fallait, le cas échéant, supprimer des revendications ou des sous-revendications. Il peut y avoir là, comme on l'a déjà dit à propos de la renonciation partielle prévue par les articles 24 et 25, une rigueur excessive. C'est pourquoi, le 3e alinéa prévoit aussi la possibilité de constituer de nouveaux brevets, comme dans le cas de la renonciation partielle. En conséquence, au moment où elle recevra un jugement prononçant la nullité partielle d'un brevet, la section des brevets (voir art, 52, 1er al.) fixera à son titulaire un délai durant lequel il pourra demander la constitution de nouveaux brevets.

Art. 28 (qualité pour agir) La qualité pour intenter l'action en nullité est réglée de la même façon que dans le droit actuel, sauf que l'action dérivée de l'article 26, 1er alinéa, chiffre 6, n'appartiendra
qu'à l'ayant droit. Il n'y a pas de raison de permettre à des tiers qui n'ont aucun droit à la délivrance du brevet d'invoquer aussi cette cause de nullité.

En ce qui concerne les autres causes de nullité, on pourrait se demander s'il ne conviendrait pas de conférer à n'importe qui la qualité pour agir, sans exiger la preuve d'un intérêt particulier, puisqu'aussi bien il y a en fin de compte un intérêt public à ce que les brevets entachés de nullité soient éliminés. La commission des experts a voulu, pour les raisons sui-

983 vantes, maintenir la nécessité de prouver un intérêt : Les expériences faites à l'étranger ont montré qu'en admettant l'action populaire, on court le risque de voir certaines gens faire métier d'intenter des actions en nullité; que, d'autre part, des personnes ayant pris une licence et désireuses de se débarrasser d'un contrat qui les gêne, recourent à un homme de paille pour attaquer le brevet. C'est pour prévenir des manoeuvres de ce genre que l'on veut exiger la preuve d'un intérêt. Il est d'autant plus facile de renoncer à l'action populaire proprement dite qu'il suffit, pour intenter l'action en nullité, d'un intérêt très divers, qu'il soit d'ordre juridique ou qu'il s'agisse d'un simple intérêt de fait.

Chapitre 4 Modifications concernant le droit à la délivrance du brevet et le droit au brevet; octroi de licences Art. 29 (action en cession) er .2 alinéa : Selon l'article 20 de la loi actuelle, l'action en cession ne peut être intentée qu'une fois le brevet délivré. Il est cependant justifié, semble-t-il, de donner à l'ayant droit, avant même que le brevet soit délivré, la possibilité de demander la cession de la demande de brevet. Il devra toutefois reprendre la demande dans l'état où elle se trouve. Si, par exemple, la procédure en opposition est déjà close, il ne pourra plus apporter aucun changement à la revendication, sauf ceux qui seraient justifiés par les résultats de la procédure en opposition (art. 76).

Le 2e alinéa règle de la même manière que la loi actuelle (art, 20, 1er al., 2e phrase) le sort des éventuelles demandes de brevet additionnel ou brevets additionnels; il renvoie de plus à l'article 10, 3e alinéa; les brevets additionnels supposent en effet l'existence d'un brevet principal.

Au 3e alinéa, la réglementation prévue par l'actuel article 20, 2e alinéa, a été élargie en ce sens qu'il n'est plus seulement question de ceux qui ont obtenu une licence ou qui ont acquis le brevet, mais qu'on parle d'une façon générale des licences ou autres droits accordés sur le brevet; parmi ces autres droits figure en particulier le gage. En outre, le juge est déclaré compétent, pour le cas où les parties ne pourront s'entendre, pour fixer l'indemnité due pour l'octroi de la licence.

Pour qu'aucun doute ne puisse subsister, le 4e alinéa réserve expressément « toutes demandes en
dommages-intérêts ». Que l'on songe, par exemple, aux dommages-intérêts que peut réclamer du « voleur » le demandeur qui a obtenu gain de cause, pour le dommage subi du fait de la licence accordée conformément au 3e alinéa, dommage qui ne sera peut-être pas complètement couvert par l'indemnité versée par le bénéficiaire de la licence; ou aussi, lorsque l'action en cession n'est pas intentée contre le

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voleur lui-même, mais contre son ayant cause, aux dommages-intérêts que ce dernier est en droit de réclamer du voleur, etc.

Art. 30 (cession partielle) Tandis que l'article 29, 2e alinéa, traitait du cas où des brevets additionnels sont séparés du brevet principal, cet article, nouveau, s'occupe du cas où le même brevet comprend des revendications, dont une partie seulement se rapporte à des inventions faites par le demandeur. Dans un cas semblable, il ne serait pas juste d'attribuer le brevet tout entier au demandeur. C'est pourquoi le projet prévoit d'en éliminer les revendications ou sous-revendications à l'égard desquelles le demandeur n'aura pu justifier de son droit et de donner au défendeur (jusque-là titulaire du brevet) la possibilité, telle qu'elle est prévue à l'article 25 pour le cas d'une renonciation partielle, de demander la constitution de nouveaux brevets pour les revendications et sous-revendications ainsi éliminées.

Art. 31 (délai pour intenter action) Le délai actuel pour intenter l'action en cession, fixé à trois ans à partir du dépôt de la, demande de brevet (art. 20, 3e al.), est apparu comme trop court, d'autant plus que l'ayant droit pourra n'avoir connaissance du vol qu'au moment où l'exposé d'invention est publié, et que toutes ces dernières années le brevet n'a pu en général être délivré qu'un ou deux ans après le dépôt de la demande. Il semble indiqué de fixer le délai à deux ans à compter de la date de la publication de l'exposé d'invention.

Seul cependant le titulaire du brevet de bonne foi n'aura plus, une fois le délai écoulé, d'action en cession à craindre. Il ne serait pas justifié de prévoir une prescription pour intenter l'action en cession contre un défendeur de mauvaise foi.

Art. 32 (expropriation du brevet) Les dispositions contenues dans cet article s'écartent du droit en vigueur (art. 23) sur les points suivants: 1. Tout d'abord, elles ne prévoient plus de «retrait » du brevet, mais seulement l'expropriation proprement dite. La seule différence entre le retrait et l'expropriation consiste en ce que, dans le premier cas, le brevet est radié, l'invention pouvant dès lors être utilisée librement par n'importe qui, tandis que dans le cas de l'expropriation les effets du brevet sont maintenus en faveur de l'Etat expropriant. Pour le reste, les conditions
préalables (intérêt public) et les conséquences (indemnisation obligatoire) sont les mêmes dans l'un et l'autre cas, si bien qu'il n'y a en réalité aucun intérêt à maintenir le retrait. Si l'Etat n'a pas lui-même d'intérêt à maintenir le brevet, il peut y renoncer (art. 15) une fois l'expropriation faite, ot obtenir ainsi le même résultat que s'il y avait eu retrait du brevet.

985 2. Le pouvoir d'exproprier a été réservé au Conseil fédéral (1er al.)

et non plus, comme jusqu'ici, à l'Assemblée fédérale. Il n'y a pas là une affaire si importante qu'elle doive mobiliser l'appareil imposant de l'autorité législative.

3. La loi actuelle prévoit en faveur du titulaire du brevet « une indemnité », dont le montant devait être fixé par le Tribunal fédéral. Le Conseil national avait d'abord prévu de donner à l'exproprié un droit à une indemnité « pleine et entière », selon les règles ordinaires de l'expropriation.

Cette proposition n'a cependant pas pu être adoptée, le Conseil des Etats ayant été d'avis qu'il fallait réserver une certaine liberté d'appréciation pour fixer l'indemnité, étant donné l'intérêt public en jeu lors de l'expropriation d'un brevet (voir BS., CE 1907, p. 285; rapport présenté par M. Hoffmann, député au Conseil des Etats, lors de l'examen des divergences). Depuis lors est entrée en vigueur la loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation, dont l'article 16 prévoit que « l'expropriation ne peut avoir lieu que moyennant indemnité pleine et entière ». Pourtant, là aussi, l'intérêt public est en jeu. Il convient donc d'adopter le même principe en cas d'expropriation d'un brevet et de renvoyer pour le reste à la loi sur l'expropriation. Le Tribunal fédéral aura ainsi toutes les indications nécessaires pour flxer l'indemnité. Le renvoi au « chapitre II » de la loi sur l'expropriation doit en particulier permettre à des personnes autres que le titulaire du brevet, par exemple à celles qui sont au bénéfice d'une licence ou aux créanciers gagistes, de faire valoir aussi leur droit à la réparation du dommage qu'ils pourraient avoir subi.

Ajoutons encore que depuis 1888, soit depuis qu'il existe en Suisse des brevets d'invention, il n'y a jamais eu ni retrait ni expropriation d'un seul brevet.

Art. 33 (cession du brevet) Ici, différentes questions semblent devoir être traitées de façon un peu plus détaillée que dans la loi en vigueur; l'octroi de licences fait en particulier l'objet d'un article spécial (34).

Le 1BT alinéa précise que non seulement « le brevet », mais le « droit à la délivrance du brevet » et le « droit au brevet » (sur le sens à donner à ces termes, voir les remarques aux art. 3 et 4) passent aux héritiers et peuvent être transférés à des
tiers. Ce qui en réalité est négociable, c'est l'invention, et l'on peut disposer de l'invention avant même que le brevet soit délivré, au moment où il n'y a encore qu'une demande de brevet.

Il convenait en outre de prévoir expressément la possibilité d'une cession partielle.

Au 2e alinéa, il n'est plus question des « droits conférés par le brevet », les mêmes règles devant être applicables dans le cas où le brevet n'a pas encore été délivré.

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Le 3e alinéa maintient le principe selon lequel la validité de la cession du brevet ou de l'octroi de droits partiels sur le brevet, tels que des droits de gage, n'est pas subordonnée, pour les parties au contrat, à une inscription au registre des brevets. Si les droits ainsi cédés ne sont pas enregistrés, il se peut que des tiers, après avoir consulté le registre et se fiant à sa véracité, en viennent à conclure avec les ayants droit inscrits au registre des contrats dont ils se fussent abstenus s'ils avaient connu l'ensemble des faits. Pour éviter que des cas de ce genre ne se produisent, il ne suffit pas de prescrire, comme le fait la loi actuelle, que les tiers sont en droit de considérer comme ayant droit la personne inscrite comme « propriétaire » (titulaire du brevet) au registre des brevets. Il convient plutôt de déclarer, de façon générale, que les droits des tiers (propriété, gages ou licences) non inscrits au registre des brevets ne sont pas opposables à celui qui, de bonne foi, acquiert des droits sur le brevet (que ce soit un droit de propriété ou un simple gage par exemple). Supposons qu'un gage soit constitué le 1er mai 1950. Une licence, exclusive ou non, accordée le 1er février 1950 et inscrite immédiatement au registre sera opposable au créancier gagiste. En revanche, si la licence n'est pas inscrite le 1er mai 1950 au plus tard, le créancier gagiste pourra, en cas de poursuite, obtenir la réalisation du brevet sans qu'il soit tenu compte de la licence ; chaque licence diminue en effet la valeur du gage. Il est donc dans l'intérêt de chaque partie de faire inscrire au registre tous les changements apportés à la situation de droit.

Aucune inscription ne pourra cependant être faite au registre avant la délivrance du brevet. Il n'existe pas de registre public des demandes de brevet, dans lequel pourraient être inscrits les droits de gage, etc. avant même que le brevet fût délivré. Les raisons suivantes s'opposent à la création d'un tel registre : Un registre public suppose quelles droits qui y sont inscrits sont fixés de façon certaine dans leur existence et dans leur étendue.

Tant que le brevet n'est pas délivré, le déposant peut modifier à son gré le contenu de la demande de brevet, en particulier les revendications. En outre, le contenu de la demande reste en principe secret,
au moins jusqu'au moment de sa publication (art. 70). En conséquence, tout ce que les tiers pourraient apprendre, c'est que certains droits ont été accordés à des tiers sur une demande de brevet relative à une invention portant un titre déterminé, sans qu'ils puissent cependant connaître les revendications contenues dans la demande. On ne saurait donc pas à quels éléments devrait se rapporter la bonne foi des tiers pour que les droits inscrits ne pussent leur être opposés.

Il ressort déjà de l'article 13 que le mandataire conserve ses droits et ses obligations tant qu'il est inscrit au registre (voir les remarques à l'art, 13).

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Art. 34 (octroi de. licences) L'octroi de licences est soumis aux mêmes règles que celles qui sont prévues à l'article 33 pour la cession d'autres droits sur l'invention.

Chapitre 5 Restrictions légales aux droits découlant du brevet Art. 35 (droit dérivé d'un usage antérieur) Les exceptions au monopole dont jouit le titulaire du brevet sont réglées de la même façon que dans la loi actuelle (art. 8), abstraction faite de quelques changements de rédaction, Art, 36 (inventions dépendantes) Les rapports entre le titulaire d'un brevet accordé pour une invention qui ne peut être exploitée sans utiliser une invention brevetée antérieurement et le titulaire de ce brevet antérieur sont réglés de la même façon que dans la loi actuelle (art. 22). Le projet contient cependant une disposition nouvelle, selon laquelle une licence pour l'utilisation de la première invention peut être demandée, non seulement dans le cas où la seconde invention présente par rapport à la première un progrès technique notable, mais aussi dans le cas où elle sert à un tout autre but. Il se peut en effet qu'une invention consiste à utiliser à un but tout nouveau un dispositif déjà connu (voir à ce sujet les remarques à l'art. 61). Jusqu'ici, une telle invention ne pouvait pas être exploitée du tout, tant que le dispositif était protégé par un brevet et que le titulaire du brevet n'accordait pas de son bon gré une licence. C'était là une solution peu équitable. Aussi ce cas a-t-il été assimilé à celui où la seconde invention constitue un développement technique de la première.

Art. 37 à 39 (exploitation de l'invention en Suisse) Selon la loi actuelle (art, 18), toute personne qui Justine d'un intérêt peut demander au juge de prononcer la déchéance du brevet si l'invention n'est pas exécutée en Suisse dans les trois ans qui suivent la délivrance du brevet. Au heu de prononcer la déchéance du brevet, le juge peut, il est vrai, accorder simplement une licence, s'il estime que cette mesure suffit pour assurer une exploitation convenable de l'invention en Suisse.

En 1934, la convention d'union de Paris a été revisée en ce sens qu'il était désormais interdit de prononcer du premier coup la déchéance du brevet faute d'exploitation de l'invention dans le pays. La déchéance ne pouvait plus être prononcée que si l'octroi de licences obligatoires se montrait, pendant deux ans au moins, insuffisant pour assurer une exploitation convenable de l'invention dans le pays. Les décisions prises par la confé-

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renée de Londres ont été approuvées par la Suisse (RO 55, 1275), mais sans que la loi sur les brevets d'invention eût été préalablement adaptée. Cette adaptation doit être maintenant faite. L'action en déchéance ne sera dono admise que deux ans après l'octroi de la première « licence accordée conformément à l'article 37 ». Cette première licence ne devra pas nécessairement avoir été accordée par le juge ; il suffira, par exemple, que le titulaire du brevet ait passé expédient ou que, pour éviter le procès, il ait accordé une licence par contrat.

Il y a lieu de signaler en outre les deux dispositions suivantes, qui sont nouvelles : Selon l'article 37, 3e alinéa, du projet, le juge pourra, sous certaines conditions, accorder la licence sitôt l'action introduite. On veut par là prévenir toute tentative de faire traîner le procès en longueur.

L'article 38, 2e alinéa, donne au juge la possibilité de prononcer tout de suite la déchéance du brevet, lorsque la législation du pays dont le titulaire est ressortissant admet dès le début l'action en déchéance. Cela ne sera cependant possible qu'à l'égard des ressortissants des pays qui n'auront pas adhéré au texte de la convention revisée à Londres.

Ajoutons, pour être complets, que jusqu'ici le Conseil fédéral a, en vertu de l'article 18, 4e alinéa, de la loi actuelle, déclaré les dispositions relatives à l'exécution de l'invention en Suisse inapplicables à l'égard de deux pays, l'Allemagne et les Etats-Unis d'Amérique. On ne songe pas à revenir sur cette décision, mais on envisage au contraire de l'étendre à d'autres pays, par la conclusion d'accords du même genre. Cette mesure aurait pour but d'empêcher que certaines industries suisses ne s'expatrient.

Art. 40 (licence dans l'intérêt public) Cette disposition, qui pour le fond concorde avec l'article 22 bis de la loi actuelle, doit permettre de sauvegarder l'intérêt public même dans le cas où ni une licence ni la déchéance du brevet ne peuvent être demandées, par suite de la suppression de l'obligation d'exploiter l'invention dans le pays (art. 39 du projet). L'intérêt public peut être en jeu par exemple lorsque des produits importants pour le bien-être public sont mis sur le marché à des prix inabordables pour de larges couches de la population.

Il n'était pas nécessaire de reprendre ici la condition
mise par l'article 22 bis de la loi actuelle à l'octroi de la licence, selon laquelle la licence doit avoir été refusée « malgré l'offre d'une indemnité équitable >>. Cette disposition est inutile. De toute façon, le juge, qui devra se prononcer sur le point de savoir si le refus d'accorder la licence était justifié ou non, devra tenir compte de toutes les circonstances du cas et, en particulier, du montant de l'indemnité offerte par le demandeur.

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Chapitre 6 Taxes et délais de paiement II convient tout d'abord de rappeler les observations faites plus haut (p. 943) concernant le taux des taxes à fixer sous le régime de l'examen préalable. En principe, les dépenses du bureau, agrandi, doivent être couvertes par ses recettes. D'autre part, il faut se rappeler qu'en général le profit matériel tiré de l'invention est modeste durant les premières années.

Il importe enfin de tenir compte de la dévaluation de l'argent intervenue depuis 1907.

Art. 41 (taxe de dépôt) Selon la loi actuelle, les taxes à verser lors du dépôt de la demande de brevet se montent au total à 40 francs. Une augmentation à 60 francs doit être considérée comme un minimum Celui qui ne serait pas en mesure de verser cette somme pourra obtenir un sursis pour le paiement de la moitié de la taxe (art. 45).

Art. 42 (taxes perçues au cours de la procédure d'examen)

Lo projet prévoit do fixer lo montant do la taxe do publication dans la loi elle-même. Il sera ainsi possible, au vu du texte de la loi, de connaître le montant des taxes indispensables pour obtenir un brevet.

Le déposant qui ne sera pas en mesure de la payer pourra aussi obtenir un sursis pour cette taxe (art. 45).

Art. 43 (annuités) L'expérience a montré qu'il s'écoule d'un à deux ans depuis le dépôt de la demande jusqu'à la délivrance du brevet. Il convient en conséquence de renoncer à percevoir des annuités pour les deux premières années qui suivent le dépôt de la demande. Avant la délivrance du brevet, le déposant n'aura donc à payer que la taxe de dépôt et la taxe de publication.

En ce qui concerne le taux des différentes annuités, voir les remarques faites dans l'introduction générale, spécialement à la page 943.

Dans certains pays (Allemagne et Angleterre), le déposant peut obtenir une réduction des annuités de moitié s'il se déclare prêt à autoriser toute personne qui lui en fera la demande a utiliser son invention, moyennant une indemnité équitable. Cette déclaration, irrévocable, doit être faite par écrit et présentée au bureau des brevets. La proposition a été faite au sein de la commission des experts d'introduire la même institution en Suisse, Cependant, les expériences faites à l'étranger ne sont pas très encourageantes. De grosses maisons industrielles auraient surtout profité de la possibilité qui leur était offerte, mais pour une partie seulement de Jeurs brevets, d'autres brevets, pour lesquels elles payaient les taxes entières,

990 empêchant en fait toute autre personne d'utiliser les premiers. Nous voudrions nous abstenir de donner suite à cette proposition, avant tout parce qu'il faudrait s'attendre, en l'acceptant, à une importante diminution des taxes et que l'équilibre que l'on veut en principe chercher à obtenir entre les recettes et les dépenses du bureau serait par avance compromis.

Le montant total des taxes que le titulaire d'un brevet aura à payer jusqu'à l'expiration de la durée légale de protection se montera à 6300 francs (y compris les taxes de dépôt et de publication).

Art. 44 (annuités à payer après transformation de brevets additionnels en brevets principaux) Le 1er alinéa correspond au droit actuel.

Selon le 2e alinéa, le même principe sera appliqué aux nouveaux brevets constitués en vertu des articles 25, 27, 3e alinéa, ou 30.

Illustrons par un exemple la disposition contenue au 3e alinéa : Date de dépôt du brevet initial: 1er juillet 1945; Constitution du nouveau brevet: 1er décembre 1949; er le 1 juillet 1950 viendra à échéance, pour le nouveau brevet, la 6e annuité.

Il sera perçu une taxe spéciale pour la constitution elle-même du nouveau brevet; voir article 46, 2e alinéa.

Art. 45 (sursis) Selon l'article 13 de la loi actuelle, le sursis peut être accordé « à des demandeurs indigents domiciliés en Suisse ».

Le projet apporte à ce texte les modifications suivantes: 1. Vu l'article 2 de la convention d'union de Paris, selon lequel les ressortissants des pays de l'union doivent jouir des mêmes avantages que les nationaux, l'obligation d'avoir un domicile en Suisse a été supprimée.

2. Le sursis doit pouvoir être accordé non seulement à un déposant, mais aussi au titulaire d'un brevet. Il pourra donc être accordé même lorsqu'il est sollicité après la délivrance du brevet; cependant, le sursis ne s'étendra plus, dans ce cas, aux taxes payées avant la délivrance du brevet.

3. Dans le texte allemand, on n'exige plus, comme condition du sursis, la « Mittellosigkeit » du requérant, mais sa « Bedürftigkeit ». L'indigence du requérant devra être admise lorsque le paiement des taxes constituerait pour lui, étant données ses conditions de revenus et de fortune, un sacrifice que l'on ne saurait équitablement lui imposer.

991 4. Le temps pour lequel le sursis peut être accordé a été porté de trois à cinq ans. Aucune taxe ne devant être payée pour les deux premières années (voir art. 43), le sursis s'appliquera aux annuités dues pour les 3e, 4e et 5e années. On peut s'attendre qu'après cinq ans le titulaire du brevet aura pu se rendre compte de la valeur économique de son invention et que^ si elle a quelque valeur, il aura déjà pu en tirer un profit qui lui permette de payer une partie au moins des taxes touchées par le sursis.

5. Le total des taxes pour lesquelles le sursis peut être accordé se monte à 395 francs. Si l'on y ajoute les 150 francs dus pour la 6e annuité échue à ce moment, le titulaire du brevet aurait à payer, à l'expiration du sursis, un montant de 545 francs pour maintenir son brevet. Dans de nombreux cas, cette somme pourra constituer une charge trop lourde. C'est pourquoi, le projet n'impose au titulaire du brevet, pour le maintien de son brevet, que le paiement, outre de la 6e annuité, de la moitié des 3e, 4e et 5e annuités, soit au total 302 fr. 50. Les autres montants ayant fait l'objet du sursis, soit la moitié de la taxe de dépôt, la taxe de publication et la moitié des 3e à 5e annuités, se montant au total à 242 fr. 50, lui seront remis.

Si, avant la fin de la 5e année, le brevet est cédé à un tiers qui n'a pas lui-même droit au sursis conformément à l'article 45, 1er alinéa, le sursis tombe et tous les montants touchés par lui devront être payés avant l'enregistrement de la cession.

6. Il n'est pas nécessaire de prévoir un sursis pour le paiement de la taxe de recours, étant donné que, selon l'article 77, 4e alinéa, le recourant indigent n'aura pas à payer cette taxe (voir les remarques a l'art. 77, 4e al).

Art. 46 (taxes pour la transformation de brevets additionnels, etc.)

Le 1er alinéa correspond aux règles actuellement en vigueur (art. 15, 2 al.).

Le 2K alinéa fixe le taux de la taxe à laquelle donnera lieu la constitution de nouveaux brevets. Il s'agit des cas où des revendications ou des sous-revendications doivent être éliminées du brevet initial (voir art. 25, 27 et 30). Le projet prévoit qu'il sera perçu, pour chaque nouveau brevet constitué, une taxe égale à la somme des taxes du brevet initial échues jusqus-là. Ainsi, le titulaire du brevet ne sera pas traité plus
défavorablement que s'il avait, dès le début, requis un brevet pour chaque invention.

D'autre part, on veut empêcher qu'un déposant désireux d'économiser des annuités ne renferme d'abord plusieurs inventions dans un seul et même brevet, pour ne faire que sous la pression d'une action en nullité ou en cession la Separation qui s'imposait dès le début.

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Exemple : Dépôt de la demande du brevet principal initial : 1er mars 1945 ; Délivrance du brevet principal: 31 août 1947; Présentation de la requête pour la constitution de nouveaux brevets: 10 juillet 1950.

Avant la présentation de cette requête, les annuités du brevet initial venues à échéance sont les suivantes: Au 1er mars 1947, la 3e annuité = 80 francs » 1er » 1948, » 4e » =100 » » 1" » 1949, » 5^ )> =125 » » 1« » 1950, » 6e » = 150 » La taxe due pour la constitution d'un nouveau brevet sera donc de 455 francs Art. 47 (rétablissement de brevets tombes en déchéance) Cet article correspond aux dispositions de la loi en vigueur (art, 17, 2e al.).

Le rétablissement diffère de la « réintégration en l'état antérieur » (art. 48) en ce sens qu'il est admis même dans les cas où l'inobservation du délai de paiement est due à une faute de l'intéressé; il donnera lieu cependant au paiement d'une taxe supplémentaire.

Chapitre 7 Réintégration en l'état antérieur Une fois passé le délai de rétablissement, le brevet tombé en déchéance ne pouvait plus, selon la loi actuelle, être remis en vigueur, même lorsque l'inobservation du délai ne pouvait en aucune façon être imputée à faute au titulaire du brevet. Cette règle a donné lieu assez souvent à des récriminations. Elle semble en effet trop rigide. Les articles 48 et 49 doivent y remédier.

Art. 48 (conditions et effets) _7er alinéa : La réintégration sera accordée si le déposant, ou le titulaire du brevet, rend vraisemblable qu'il a été empêché, sans sa faute, d'observer le délai. Cette condition ne sera pas remplie si l'on peut lui reprocher qu'il aurait observé le délai en prenant les soins que l'on pouvait raisonnablement, selon les circonstances, exiger de lui. S'il a constitué un mandataire chargé de le représenter devant le bureau, il devra supporter les conséquences d'une négligence de la part du mandataire.

2e alinéa : La réintégration sera admise pour tous délais fixés pur la loi ou le règlement d'exécution eux-mêmes ou qui seront impartis par

993 le bureau sous peine de déchéance d'un droit. Seuls seront exceptés les délais pendant lesquels les tiers pourront le cas échéant, et autant que la loi le leur permettra, intervenir dans le cours de la procédure d'examen de la demande de brevet. Sera excepté aussi, naturellement, le délai imparti pour demander la réintégration, 3e alinéa : La possibilité de demander la réintégration doit être ellemême limitée dans le temps. Il s'ensuivrait autrement une insécurité juridique intolérable. Pour que le délai soit observé, il faudra non seulement que la demande de réintégration soit présentée, mais encore que l'acte omis soit exécuté (par exemple paiement de l'annuité arriérée; régularisation des pièces techniques accompagnant la demande de brevet, etc.).

Cet acte sera considéré comme exécuté « en même temps » s'il est accompli lui aussi durant le délai fixé au présent alinéa.

5e alinéa : II sera par exemple nécessaire de répéter la publication de la demande et la procédure en opposition lorsque le déposant aura obtenu la réintégration pour le délai prévu pour la présentation des pièces justificatives de la priorité (art. 19, 2e al.), puisqu'auparavant on n'aura pas tenu compte de la priorité, à défaut des pièces justificatives. Les frais entraînés par une telle répétition doivent être mis à la charge du déposant, dont la réintégration doit sauvegarder les intérêts.

Art. 49 (réserve en faveur des tiers) La réintégration accordée pour un délai de priorité ou pour le délai de paiement d'une annuité peut porter atteinte aux intérêts des tiers. Si l'on reconnaît après coup une priorité en faveur du brevet, le temps durant lequel un droit dérivé d'un usage antérieur pouvait être acquis (voir art. 17, 3e al.) s'en trouve raccourci. D'autre part, les tiers ont le droit d'utiliser l'invention sitôt le brevet tombé en déchéance; une fois le délai de rétablissement passé (art. 47), ils n'ont plus à se soucier par avance d'une éventuelle restauration du brevet. Les intérêts des tiers doivent être sauvegardés par l'octroi d'un droit dérivé d'un usage antérieur, analogue à celui qui est accordé par l'article 35, sauf l'exception suivante: II y a lieu d'admettre que le tiers, qui en cas de restauration d'un brevet tombé en déchéance revendique un droit dérivé d'un usage antérieur, n'est pas lui-même l'auteur
de l'invention dont il s'agit, mais qu'il en a eu connaissance par la publication de l'exposé d'invention. Il ne serait pas équitable, en ce cas, de lui accorder un droit dérivé d'un usage antérieur, sans qu'il ait aucune indemnité à payer. C'est pourquoi, le projet prévoit qu'il aura à verser une indemnité équitable, à partir du moment où le brevet aura été remis en vigueur.

La situation est différente lorsqu'une priorité est reconnue après coup.

Dans ce cas, il n'y a pas encore eu de publication de l'exposé d'invention qui ait pu faire connaître l'invention à des tiers. On peut donc admettre,

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en ce cas, que les tiers qui revendiquent un droit dérivé d'un usage antérieur ont fait eux-mêmes la même invention. Il ne serait donc pas indiqué de prévoir ici l'obligation de verser une indemnité.

TITRE DEUXIÈME

De la délivrance du brevet Chapitre premier Organisation du bureau de la propriété intellectuelle en matière de brevets Le bureau doit être organisé, compte tenu de la procédure d'examen telle qu'elle est prévue par le présent projet. Cette procédure a été reprise en grande partie de celle qui était suivie devant le bureau allemand des brevets. Elle peut être décrite de la façon suivante: Dans un premier stade de la procédure, la demande est examinée par un examinateur unique. Selon le résultat de cet examen, l'examinateur ordonne le rejet de la demande ou sa publication (art. 68 et 69).

Le déposant peut recourir contre le rejet de la demande (art. 77).

Une fois la demande publiée, les tiers peuvent s'opposer à la délivrance du brevet (art. 72). S'il n'y a pas d'opposition, l'examinateur délivre le brevet (art. 73). S'il y a opposition, nous entrons dans un deuxième stade de Zoe procédure. L'affaire passe à un collège de trois membres, appelé section des brevets (art. 73, 2e al.) ; celle-ci devra décider si l'opposition est justifiée ou non. Si elle trouve que l'opposition n'est pas fondée, la section des brevets délivre le brevet; l'opposant peut recourir contre cette décision. Si l'opposition est admise, la demande de brevet est rejetée; le déposant peut aussi recourir contre cette décision. Si l'opposition est fondée en partie, le brevet sera délivré, mais sa portée sera limitée dans la mesure nécessaire; l'opposant aussi bien que le déposant peuvent recourir contre cette décision (art. 74 et 77).

Les décisions, tant de l'examinateur que de la section des brevets, peuvent être portées devant une section des recours, formée d'un collège de trois membres. Si elle trouve que le recours est fondé, en tout ou en partie, la section des recours annule la décision attaquée et prend la décision qui s'impose ; si le dossier n'est pas en état, l'affaire est renvoyée à l'examinateur ou à la section des brevets (art. 78). La décision prise par la section des recours est définitive (art. 54).

Art. 50 (composition du bureau) II paraît indiqué de nommer au préalable les différents organes appelés à traiter la demande de brevet. Dans le texte allemand, on a jugé nécessaire

995 de désigner aussi l'autorité chargée dans le premier stade de la procédure d'examiner la demande, et qui est constituée par un examinateur unique, par un terme (« Prüfungsstelle ») qui montre bien qu'il ne s'agit pas tant de la personne de l'examinateur que de la fonction qu'il représente, Art. 51 (examinateurs) Pas de remarques.

Art. 52 (sections des brevets) 7 alinéa : Dès que l'on doit prévoir des organes différents, la compétence de chacun d'eux doit être fixée clairement. II importe aussi d'éviter des lacunes ou des chevauchements. C'est pourquoi le projet déclare la section des brevets compétente dans tous les cas où la compétence d'un autre organe n'a pas été prévue.

Il y a lieu de considérer en outre que des décisions devront être prises non seulement sur des requêtes présentées au cours de la procédure en délivrance du brevet, mais aussi, à l'occasion, sur des requêtes présentées après la délivrance du brevet; ainsi, en cas de renonciation partielle au brevet (art. 24), ou d'une demande de constitution de nouveaux brevets (art. 25), ou lorsque le véritable inventeur est désigné après coup (art. 5, 3e al.), etc.

2e et 3* alinéas : H importe d'avoir à disposition, pour former les sections des brevets, aussi bien des techniciens que des juristes, qui puissent être réunis selon les besoins de chaque cas particulier. Dans tel cas, il sera indiqué de former le collège, chargé de statuer, de trois techniciens, tandis que dans un autre, il conviendra de réunir deux techniciens et un juriste.

Il ne serait guère indiqué de prévoir à ce sujet des prescriptions obligatoires dans la loi elle-même; ce sera là plutôt l'affaire du règlement d'exécution.

Une disposition importante est celle qui prescrit que l'examinateur, soit celui qui a traité le cas dans le premier stade de la procédure, fera partie du collège de trois membres appelés à statuer. H lui sera ainsi possible de mettre à profit la connaissance qu'il a du dossier, au lieu d'obliger, à sa place, un autre technicien à étudier toute l'affaire. Il n'y a pas lieu de craindre que l'examinateur se sente lié par l'opinion qu'il s'est faite précédemment sur la demande de brevet; comme membre de la section des brevets, il aura à décider sur des faits nouveaux, soit sur les faits avancés à l'appui de l'opposition.

Etant donné que les membres
des sections des recours bénéficieront d'un statut spécial (art. 54), il importe d'interdire de faire appel à des membres (techniciens ou juristes) des sections des recours pour traiter d'affaires relevant d'une section des brevets et inversement, d'interdire de faire appel à des membres des sections des brevets pour traiter d'affaires relevant d'une section des recours (art. 53, 4e al.).

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Art. 53 {sections des recours) Ici aussi, le projet dorme la possibilité de former le collège, appelé à statuer, de techniciens ou de juristes, ou de techniciens et de juristes, selon les besoins du cas à traiter.

Art. 54 (indépendance des sections des recours) Le projet crée en faveur des sections des recours un statut spécial, qui fait de la section des recours un véritable tribunal administratif (1er et 2e al.). Ce statut doit permettre de déclarer définitives les décisions prises par les sections des recours (3e al.), c'est-à-dire d'exclure tout recours à une juridiction supérieure constituée en dehors du bureau. Les raisons suivantes militent en faveur d'une telle solution: La décision à prendre sur le point de savoir si un brevet doit être accordé ou non suppose de la part des techniciens appelés à statuer une certaine intelligence des questions de droit et de la part des juristes une certaine intelligence des problèmes techniques. Le Tribunal fédéral, qui dans la procédure actuelle en délivrance du brevet peut être appelé, par la voie du recours de droit administratif, à se prononcer en dernière instance, se compose exclusivement de juristes. Cette situation peut ne donner Heu à aucune difficulté sous le régime actuel d'examen, où ni la question de la nouveauté de l'invention, ni celle du progrès technique réalisé, ni celle du niveau de l'invention n'ont à être résolues. Il en sera autrement lorsque l'invention devra être jugée sous les trois aspects que l'on vient d'indiquer. A ce moment, il ne sera plus guère possible de faire revoir par un tribunal composé exclusivement de juristes une décision prise par une autorité formée pour la plus grande partie, sinon exclusivement, de techniciens. Le Tribunal fédéral lui-même s'est expressément rallié à cette opinion. La commission des experts s'est également déclarée d'accord de renoncer à ce que le Tribunal fédéral fût constitué comme juridiction de dernière instance en matière de brevets. Elle hésitait cependant à renoncer à ce que les décisions des sections des recours fussent revues par une juridiction indépendante de l'administration. C'est pourquoi elle a proposé de créer, en dehors des organes administratifs prévus, une commission de recours en matière de brevets, chargée de se prononcer en dernière instance et composée de techniciens et
de juristes. Elle était d'avis qu'un organe administratif chargé de statuer en derniers instance ne présentait pas les garanties suffisantes d'une justice objective. En admettant que les décisions des sections des recours fussent définitives, on créerait, selon l'opinion exprimée par la commission des experts, un précédent fâcheux dans la voie d'une extension de la justice administrative.

Cette proposition n'a pas été suivie pour les raisons suivantes: La procedure en délivrance du brevet doit être Ja plus rapide possible et occasionner le moins ds frais possible. Plus on prévoit d'instances, plus

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longue aussi sera cette procédure et plus grandes seront les dépensas de temps et d'argent que les parties devront y consacrer. La section des recours elle-même se prononcera déjà en troisième instance sur la demande de brevet, et en seconda instance sur les faits avancés à l'appui de l'opposition. Ainsi, toute garantie est donnée que les parties en cause auront suffisamment l'occasion de se faire entendre. Quant aux craintes exprimées par la commission des experts, qui voudrait, par principe, éviter de créer un «précédent dans la voie d'une extension de la justice administrative », il convient de faire remarquer que les sections des recours n'auront pas à se prononcer sur des prétentions que l'Etat ferait valoir contre le citoyen, mais bien plutôt sur le droit du déposant à obtenir un monopole à faire valoir contre ses concurrents; il n'y a donc pas ici de collision d'intérêts, et il n'y a pas lieu de craindre que les intérêts du citoyen soient négligés au profit de ceux de l'Etat. Quoi qu'il en soit, il est possible de tenir compte des craintes exprimées, sans pour autant allonger et renchérir la procédure et sans créer un appareil administratif supplémentaire, H suffit de donner aux sections des recours un statut spécial, en les déclarant « indépendantes dans les limites de leur compétence, et soumises à la présente loi seulement ».

Ainsi, il n'y aura plus de danger que les décisions des sections des recours soient soumises à l'influence des supérieurs administratifs. Cette disposition a été empruntée de l'article 21 de la loi fédérale d'organisation judiciaire, qui traite de l'indépendance du Tribunal fédéral à l'égard de l'Assemblée fédérale. Etant donnée la situation indépendante des sections des recours, il convient d'appliquer à leurs membres, par analogie, les dispositions de la loi d'organisation judiciaire concernant les récusations. -- Même la Hollande et l'Allemagne, dont le bureau des brevets, dans son organisation, a pour le reste servi de modèle à la commission des experts elle-même, ne connaissent que deux instances, sans recours possible à une juridiction de troisième instance, constituée en dehors du bureau. Seule la Suède permet encore de recourir devant le roi contre les décisions prises par la section des recours (organe de seconde instance).

Etant donné le statut qui leur
est conféré, les sections des recours doivent être considérées comme une juridiction de recours au sens de l'article 103, 2e alinéa, de la constitution. Dès lors, le 3e alinéa déclare définitives les décisions prises par les sections des recours, et ces décisions ne peuvent, selon l'article 115, faire l'objet d'un recours de droit administratif.

Art. 55 (sections des recours réunies) Pour le cas où il y aura plusieurs sections des recours, il est nécessaire d'établir une règle fixant la procédure à suivre lorsqu'une section voudra s'écarter d'une décision de principe prise par une autre section. Il importe en effet de veiller que les différentes sections suivent une pratique uniFeuille fédérale. 102« année. Vol. I.

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forme. Les règles établies ici correspondent à celles que l'article 16 de la loi fédérale d'organisation judiciaire a prévues pour le Tribunal fédéral.

Art. 56 (recrutement) Cette disposition a été empruntée de la loi hollandaise. Le bureau hollandais comprend, à côté des membres « ordinaires », des membres « extraordinaires ». Sont nommés comme tels des spécialistes de la science et de la pratique, ayant des connaissances spéciales dans certains domaines de la technique, notamment des professeurs des hautes écoles techniques.

Il est pratiquement impossible, étant donné le développement actuel de la technique, d'avoir parmi le personnel ordinaire du bureau de véritables spécialistes pour chaque domaine spécial. D'autre part, le nombre des demandes de brevet exigeant des connaissances particulières n'est pas assez grand pour occuper entièrement un spécialiste. L'appel à des spécialistes de la pratique, n'ayant pas la situation d'un « expert », mais auxquels sont conférés tous les droits appartenant aux membres des sections des brevets ou des sections des recours, est considéré en Hollande comme une solution heureuse. Cette solution, qui devra s'appliquer aussi bien aux techniciens qu'aux juristes, peut être également recommandée pour la Suisse.

Art. 57 (communication des décisions) Pas de remarques.

Chapitre 2 La demande de brevet Art. 58 (forme de la demande) Cet article correspond aux dispositions de la loi actuelle (art. 25 et 26, 1er al.), à la seule exception près qu'il n'y aura plus de première annuité à payer (voir art. 43 du projet).

Betenons que par « dépôt de la demande », il faut entendre l'action de déposer la demande et par « demande de brevet », l'ensemble des pièces déposées.

Art. 59 (description) Cet article correspond lui aussi aux dispositions de la loi actuelle (art. 26 et 5, 3e al.).

Art. 60 (revendication) Le Ier alinéa s'en tient à la réglementation actuelle en ce sens que le déposant devra, dans une revendication, définir l'invention. Cette exigence a été critiquée, à l'occasion, parce qu'elle imposerait à l'inventeur une tâche pour laquelle, dans de nombreux cas, il ne serait pas fait. Il ne serait pas équitable, par exemple, de lier l'inventeur à une revendication rédigée

999 de façon trop étroite par suite d'une évidente maladresse. Il est possible que la règle imposée ici conduise parfois à des résultats peu équitables.

Mais cet inconvénient est largement compensé par la grande sécurité juridique qu'elle assure. Les tiers, et en particulier les concurrents du titulaire du brevet, doivent pouvoir se rendre compte sans difficulté de ce qui est protégé et de ce qui ne l'est pas. Ce résultat ne peut être obtenu que par l'établissement d'une revendication fixant la portée de la protection conférée par le brevet. S'il apparaît en cours d'examen que la revendication a été rédigée de façon manifestement trop étroite, l'examinateur, cela va sans dire, en avertira le déposant. Le principe n'en est pas moins maintenu que c'est au déposant de présenter une revendication: c'est à lui, en premier lieu, qu'il appartient de savoir en quoi consiste son invention.

Le projet s'écarte cependant du droit actuel sur deux points : il n'exige plus que l'invention soit définie « par les propriétés jugées nécessaires et suffisantes pour la déterminer » (voir art. 5, 1er al., de la loi actuelle) ; la commission des experts a estimé que cette précision était superflue. De même semble-t-il superflu de constater que la revendication est concluante, non seulement quant à l'étendue de la protection accordée par le brevet, mais encore quant à la nouveauté de l'invention. En réalité, la revendication sert de critère pour juger non seulement de la nouveauté, mais encore du progrès technique réalisé et de l'idée créatrice sur laquelle repose l'invention. Outre la nouveauté, la loi devrait donc mentionner aussi ces deux autres conditions, ou alors ne plus mentionner la nouveauté non plus. La préférence a été donnée à cette dernière solution, parce que, du moment que la revendication est déclarée concluante quant à l'étendue de la protection conférée par le brevet, on ne voit pas, en dehors d'elle, sur quoi l'on pourrait se fonder pour juger tant de la nouveauté de l'invention que de la question de savoir si les deux autres conditions sont remplies.

Ces deux modifications apportées au texte de l'article n'en changent pas le sens quant au fond.

La revendication ne constitue pas un élément nécessaire de la demande de brevet (au sens de l'art. 58, 2e al.); si elle est présentée plus tard que la
description, la date de dépôt (art. 64 combiné avec l'art. 58) n'en sera pas touchée. C'est pourquoi l'article 82, qui détermine le contenu qu'aura l'exposé d'invention, mentionne spécialement, à côté de la description, les revendications et sous-revendications.

Art, 61 (contenu et nombre des revendications) 7er alinéa : 1. En principe, toute invention qui satisfait aux exigences de l'article premier, c'est-à-dire toute invention utilisable industriellement, qui constitue un progrès technique et repose sur une idée créatrice, peut faire l'objet d'une revendication. Ces conditions posées, le fait d'utiliser à une fin nou-

1000 velie un procédé ou un produit déjà connus peut aussi constituer une invention susceptible d'être protégée (voir à ce sujet ATP 69, II, 188). Cependant, selon l'article 26 de la loi actuelle, une revendication ne peut être formulée que pour un procédé ou pour un produit, mais non pas pour l'utilisation d'un produit ou pour l'application d'un procédé. Ainsi, le déposant qui avait par exemple trouvé qu'une substance (connue) convient bien comme moyen de lutte contre les parasites devait choisir pour sa revendication une forme telle que celle-ci: «procédé de lutte contre les parasites, caractérisé par l'utilisation de la substance X ». Et pourtant, ce n'est pas ici le « procédé » qui constitue en réalité l'invention, mais bien le choix du moyen employé. H serait mieux par conséquent d'adapter aux conditions de fait les dispositions relatives au contenu des revendications et de prévoir expressément la possibilité de formuler aussi une revendication pour l'application d'un procédé ou pour l'utilisation d'un produit (voir aussi à ce sujet ATF 65, II, 94).

2. En tant qu'il s'agit de substances chimiques, il convient d'examiner encore si, en admettant la possibilité de formuler une revendication portant sur l'utilisation de la substance, on ne créerait pas la possibilité d'éluder l'inteT-diction de protéger les substances chimiques. Le brevet accordé dans un tel cas donne à son titulaire le droit exclusif d'utiliser ou de faire utiliser la substance aux fins indiquées dans la revendication, quel que soit le procédé de fabrication de la substance. Mais chacun pourra, comme auparavant, fabriquer la substance et l'utiliser aux mêmes fins que jusque-là, ou à toute fin autre que celle qui est indiquée dans le brevet. Il est vrai que si la substance elle-même est nouvelle et que l'on ne connaisse aucune autre possibilité d'utilisation, le titulaire du brevet obtiendra en fait un monopole semblable à celui qui lui serait accordé si la substance elle-même était protégée par le brevet. Mais il n'en sera plus ainsi dès le moment où un tiers aura trouvé pour la substance une autre possibilité d'utilisation. C'est pourquoi l'on ne saurait dire en réalité que la protection envisagée ici permettra d'éluder l'interdiction de protéger la substance.

Il n'y a donc pas de raison de ne pas admettre de revendications
pour l'utilisation d'une substance.

3. Bappelons dans ce même ordre d'idées que l'article 36 supposait déjà la possibilité de faire breveter des inventions ayant pour objet l'utilisation d'un produit ou l'application d'un procédé à de nouvelles fins; l'article 36, en effet, accorde au titulaire d'un brevet délivré pour une invention de ce genre le droit d'obtenir une licence (licence obligatoire prévue en cas d'invention dépendante).

4. La règle selon laquelle «un brevet ne peut comprendre plusieurs inventions » (art. 6, 1er al., de la loi actuelle) n'a pas été reprise, parce qu'en réalité elle ne peut être appliquée de façon conséquente, comme ce fut déjà le cas dang la loi actuelle; en effet, selon l'article 26, 3e et 4« alinéas,

1001 un seul et même brevet peut contenir plusieurs revendications, dont chacune peut définir une invention. Il est donc plus exact de dire qu'une revendication (et non pas le brevet) ne peut définir qu'une seule invention.

5. Au premier abord, il peut sembler superflu de mentionner qu'un « moyen pour la mise en oeuvre d'un procédé » et un « dispositif » peuvent faire l'objet d'une revendication, tous deux étant des « produits ». Ce sont toutefois des produits d'un genre spécial, qui font l'objet, au 2e alinéa, d'ime réglementation particulière. Il est dès lors préférable de les mentionner aussi expressément au 1er alinéa.

2e alinéa ; 1. Le nombre des revendications admises pour un seul et même brevet a été porté de trois à quatre. Cette augmentation était nécessaire, une fois admise expressément la possibilité de formuler une revendication pour l'application d'un procédé ou pour l'utilisation d'un produit (voir lettres a à c).

2. La lettre d apporte encore une autre combinaison, qui n'était pas admise jusqu'ici: outre la revendication pour un dispositif, elle admet une revendication pour un procédé de mise en action du dispositif.

3. Le projet renonce à indiquer des exemples de moyens pour la mise en oeuvre d'un procédé (voir art. 26, 3e al., de la loi actuelle: « Installation, machine, outil, etc. »), parce que ces exemples obligent à interpréter la notion du moyen pour la mise en oeuvre d'un procédé de façon trop restrictive. Il sera ainsi possible, à l'avenir, de formuler des revendications pour des moyens pour la mise en oeuvre d'un procédé (défini par une revendication précédente) tels que, par exemple, une électrode (même si, en soudant, une partie de l'électrode passe dans la soudure); un bain de développement pour plaques photographiques (même si certains éléments du bain passent dans les couches développées); l'armature d'un tuyau en béton (malgré que cette armature devienne partie intégrante du tuyau), 4. II importe en revanche de maintenir le principe, appliqué dans la loi actuelle, selon lequel la loi elle-même détermine, de façon limitative, les différentes combinaisons admises dans l'établissement des revendications. Le déposant ne pourra donc pas choisir à son gré l'objet de chacune des quatre revendications admises par la loi. Les lettres a à d fixent les variantes qui pourront
être utilisées. Celles-ci ne groupent que des revendications dont on peut dire qu'elles présentent entre elles, de par leur objet, un rapport intrinsèque et objectif, qui justifie leur réunion dans un seul et même brevet. Une clause générale, disant, par exemple, qu'un même brevet peut comprendre quatre revendications au plus, si elles présentent entre elles, de par leur objet, un rapport objectif, ne serait pas heureuse; elle entraînerait des discussions continuelles entre los déposants et le bureau pour savoir si, dans un cas déterminé, ce rapport existe ou pas. --

1002 Naturellement, le déposant sera libre de formuler, en plus par exemple d'une revendication pour un procédé, une ou deux revendications seulement parmi les trois qu'admettent encore les lettres a ou o; cette possibilité ressort de la rédaction donnée au début du 2e alinéa (« mais au plus quatre »).

Art. 62 (revendication pour des procédés chimiques)

1. A la demande des représentants de l'industrie chimique suisse, le principe de l'unité de l'invention (un brevet ne peut comprendre plus d'une invention) a été, en ça qui concerne les procédés chimiques, réglé d'une façon particulièrement sévère par l'article 6, 2e alinéa, de la loi actuelle. Selon cette dernière disposition, le brevet ne peut avoir pour objet qu'un seul procédé, qui, par la mise en oeuvre de matières premières nettement déterminées, aboutit à une seule substance. Si le produit résultant du procédé est une nouvelle substance chimique, la revendication devra donner la caratéristique de la nouvelle substance ; en outre, un échantillon de celle-ci devra être déposé (art. 26 de la loi actuelle).

On avait voulu, par ces dispositions, limiter la protection, en cas de procédés pour la fabrication de substances chimiques, à ce que l'inventeur avait réellement expérimenté. Seul, l'article 14, 2e alinéa, apporte à cette réglementation rigoureuse une certaine atténuation, en donnant la possibilité d'obtenir un brevet additionnel, non soumis au paiement des annuités, pour l'invention consistant à remplacer dans le procédé du brevet principal les matières premières par des équivalents, qui permettent d'obtenir un produit identique ou analogue, du point de vue de son application, à celui du brevet principal.

2. La réglementation qui vient d'être décrite est aujourd'hui jugée peu satisfaisante, même par les représentants de l'industrie chimique de notre pays. Souvent, l'inventeur n'est en mesure d'expérimenter son procédé que pour une petite partie seulement des variantes entrant en ligne de compte; ces variantes peuvent fréquemment, en théorie, se présenter par dizaines, voire par centaines. Pratiquement, il ne saurait être question, la plupart du temps, de formuler des revendications pour les nombreuses variantes non expérimentées. Il se peut donc que l'invention ne soit protégée que partiellement, abstraction faite de l'inconvénient fâcheux d'avoir à demander un brevet pour chaque variante, expérimentée, dans le choix des matières premières.

3. Selon le projet, il sera désormais possible de formuler des revendications définissant un procédé déterminé en ce qui concerne le processus chimique, lequel pourra s'appliquer à des groupes de substances dont les membres sont équivalents quant à
ce processus. Cela veut dire que les inventions de procédés de fabrication de substances chimiques, dans lesquels les matières premières peuvent varier et qui permettent d'obtenir, par une même réaction chimique ou par une même suite de réactions chi-

1003 nuques, une série de produits différents, pourront être protégées par un seul et même brevet qui les embrassera tout entières. En revanche, et comme auparavant, il ne sera pas possible de formuler des revendications qui définissent bien les matières premières et les produits finaux, mais qui ne déterminent pas ou ne déterminent qu'en partie le processus chimique nécessaire pour transformer les matières premières en produits finaux.

4. Au cours des travaux de préparation du projet, certains ont fait des objections à cette nouvelle réglementation qiu, à leur avis, serait trop large. Ils ont proposé de la remplacer par une disposition selon laquelle les variantes, expérimentées, dans le choix des matières premières pouraient être protégées par un brevet unique, la portée de la revendication devant toutefois être limitée au cadre des matières premières expérimentées; le fait de dépasser ce cadre entraînerait la nullité totale du brevet.

En ce qui concerne tout d'abord la sanction prévue, on ne voit pas pour quelles raisons on n'appliquerait pas ici aussi la règle générale selon laquelle la revendication qui apparaît comme trop large n'est pas annulée, mais limitée au domaine effectivement touché par l'invention (voir art. 27, 1er al.). Cette proposition n'est pas satisfaisante non plus, du fait que la revendication ne pourrait comprendre, outre les variantes, expérimentées, dans le choix des matières premières, que les variantes immédiatement apparentées; il se pourrait dès lors, dans certaines conditions, qu'une partie seulement de l'invention réellement faite fût protégée. Il serait en outre extrêmement difficile de rédiger les revendications en les délimitant selon les exigences imposées. La commission des experts, elle aussi, a partagé le même avis et a rejeté la proposition dont il s'agit.

5. Du moment que toutes les variantes dans le choix des matières premières peuvent être embrassées par une revendication unique, il n'est plus nécessaire, comme l'a fait l'article 14, 2e alinéa, de la loi actuelle, de régler spécialement les conditions dans lesquelles un brevet additionnel pourra être obtenu. Et si l'on ne veut plus, en cette matière, limiter la protection à ce que l'inventeur a réellement expérimenté, les dispositions prévues par l'article 26 de la loi actuelle, relatives à la
caractéristique à. donner, dans la revendication, de la nouvelle substance et au dépôt d'un échantillon de la nouvelle substance, ne sont plus à leur place non plus. Il n'est d'ailleurs jamais arrivé jusqu'ici qu'un échantillon fût, dans un procès, produit devant le tribunal, en sorte que l'obligation de déposer un échantillon est apparue uniquement comme une charge, sans utilité pratique. La possibilité de déposer d'autres échantillons (art. 26, 6e et 7e al., de la loi actuelle) n'a pour ainsi dire jamais été utilisée jusque-là; aussi le projet y a-t-il renoncé également.

1004 Art. 63 (sous-revendications) 1 alinéa : Au lieu de compléments à la définition que la revendication donne de l'invention, le projet parle ici de « formes spéciales d'exécution de l'invention définie par la revendication », pour bien montrer en quoi doit consister le complément apporté à la revendication.

2e alinéa : L'introduction d'une taxe pour le cas où il y aurait un grand nombre de sous-revendications vise à parer à l'abus consistant à formuler une sous-revendication pour la moindre modification apportée aux caractères de l'invention, et à réunir ainsi jusqu'à 100 sous-revendications dans un même brevet. Cette pratique ne peut s'expliquer, la plupart du temps, que par la méconnaissance du rôle joué par la sousrevendication, rôle qui consiste à compléter la revendication, s'il se révèle qu'elle est entachée de nullité, de telle sorte qu'elle définisse une invention susceptible d'être protégée. Tant que la revendication doit être considérée comme valable, les sous-revendications ne jouent aucun rôle.

er

Art. 64 (date de dépôt) La loi actuelle ne contient aucune disposition relative à la date de dépôt. Etant donnée l'importance que revêt cette date, il semble cependant nécessaire de dire dans la loi elle-même ce qu'il y a lieu de faire pour s'assurer la date de dépôt d'une demande de brevet. Quant au fond, les règles prévues correspondent à celles qui sont actuellement en vigueur (voir l'art. 15 combiné avec l'art. 6, 1er al., de même que l'art. 4, 1er et 4e al., du règlement d'exécution).

Art. 65 (en cas de scission de la demande) Contrairement aux dispositions de la loi actuelle (art. 29, 1er al., dernière phrase), la demande scindée devra, lors de son dépôt, être désignée expressément comme telle, sinon elle recevra comme date de dépôt la date de son dépôt effectif et non celle du dépôt de la demande initiale. H arrive que longtemps après que l'examen de la demande scindée ait commencé, le déposant présente une requête tendant à faire admettre comme date de dépôt celle de la demande initiale. N'ayant eu aucune raison, en commençant l'examen, d'admettre qu'il s'agissait d'une demande scindée, l'examinateur sera obligé de reprendre l'examen sur une autre base. C'est ce que veut éviter la règle prévue ici.

La demande scindée pourra être désignée comme telle, soit dans la requête sollicitant la délivrance du brevet, soit en tête de la description.

Il était nécessaire de dire, dans la loi actuelle (art. 29, 1er al.), que la transformation d'une demande de brevet additionnel en demande de brevet principal ne modifie pas la date de dépôt, étant donné que les formalités n'y sont pas les mêmes pour le dépôt d'une demande de brevet principal

1005 et pour le dépôt d'une demande de brevet additionnel (pour cette dernière, il n'y a pas d'annuité à payer; seule doit être versée la taxe de dépôt).

Selon l'article 9 du projet, les formalités du dépôt seront les mêmes dans les deux cas. Aussi, la règle que nous venons d'indiquer va de soi et il n'est pas nécessaire de la reprendre ici. Il n'est pas davantage nécessaire de dire expressément que la demande de brevet additionnel ne peut avoir une date de dépôt antérieure à celle du brevet principal auquel elle est subordonnée.

Art. 66 (report de la date de dépôt) Cet article traite des cas où la date de dépôt d'une demande de brevet doit être remplacée par la suite par une date postérieure. Sur certains points, le projet apporte des modifications importantes par rapport à la loi actuelle (art. 29, 2e et 3e al.) : 1. Il n'a pas repris la disposition selon laquelle un changement, dans Je sens d'une extension ou d'une restriction, apporté dans la désignation de l'objet de l'invention n'entraîne pas de report de date. Selon les cas, même une simple modification du titre peut changer, et en particulier restreindre, la portée de la protection conférée par le brevet; lorsqu'il en est réellement ainsi, le report de la date s'impose comme dans les autres cas.

2. Il n'a pas repris non plus, comme allant de soi, la disposition selon laquelle la transmission du droit à l'invention (cession de la demande de brevet) n'entraîne aucun changement de date.

3. Le report de date dit arbitraire, c'est-à-dire qui n'est pas fondé sur un changement apporté à la revendication (art. 29, 2e al., de la loi actuelle), ne sera plus admis. En soi, cette institution implique certains risques, dont les déposants ne se rendent pas toujours compte (perte de la nouveauté de l'invention). En général, le but recherché par un tel report de date était d'obtenir un nouveau point de départ pour le calcul du délai de priorité (durant lequel les dépôts à l'étranger peuvent être faits sous bénéfice de la priorité). Un tel jeu avec le délai de priorité n'est pas désirable et ne va pas non plus sans danger, certains bureaux étrangers des brevets n'admettant pas que la date de dépôt ainsi reportée serve de point de départ pour le calcul du délai de priorité. Il vaut mieux éviter tout cela.

4. Dorénavant, un changement de date ne sera
plus admis qu'aux conditions suivantes: a. Il faudra que la revendication ou une sous-revendication ait été modifiée. Ces modifications ne pourront cependant pas être apportées en tout temps, au gré du déposant; une fois la demande de brevet publiée, elles ne seront plus admises que si elles sont justifiées par les résultats de

1006 la procédure en opposition (art. 76). Une autre solution irait à l'encontre d'une procédure économique, b. Il devra s'agir de modifications au sujet desquelles les pièces qui accompagnaient primitivement la demande de brevet ne contiennent pas d'indications. Si les modifications apportées peuvent être étayées sur les pièces primitives accompagnant la demande, la date de dépôt ne sera pas changée. Les indications dont il s'agit pourront être recherchées non seulement dans la « description » présentée primitivement, mais aussi dans toute pièce écrite présentée en même temps qu'elle; ainsi, par exemple, dans les pièces justificatives de la priorité; à condition que ces pièces soient rédigées dans une langue officielle suisse. On ne prendra donc pas en considération des pièces justificatives de la priorité rédigées en anglais, mais seulement leur traduction, présentée en même temps, dans une langue officielle suisse. En revanche, la traduction n'aura pas besoin d'être légalisée.

5. La règle, selon laquelle la date de dépôt initiale perd tout effet légal en cas d'un report de date, doit être entendue en ce sens que seule la date plus récente sera déterminante, aussi bien lors de l'examen de la demande de brevet que plus tard, lorsqu'il s'agira de juger de la validité du brevet. Cette règle ne saurait en revanche empêcher le bureau de délivrer des attestations comme quoi, à la date primitive, une demande de brevet a été déposée (pièces justificatives de la priorité). Aussi bien, ce fait ne saurait être détruit par le report de date opéré dans la suite.

6. Signalons encore qu'il existe un rapport entre les dispositions relatives au report de la date de dépôt et celles qui concernent la renonciation partielle, spécialement l'article 24, lettre c. Celui qui voudra après coup insérer dans la description de nouveaux caractères de l'invention au sujet desquels les pièces présentées primitivement ne contiennent pas d'indications devra, s'il veut se réserver la possibilité de restreindre subséquemment sa demande de brevet, formuler pour ces nouveaux caractères des sous-revendications, ce qui aura pour effet d'entraîner un report de la date de dépôt.

Chapitre 3 L'examen de la demande de brevet Art. 67 (devant l'examinateur) Cet article fixe l'étendue de l'examen auquel l'examinateur devra soumettre la
demande de brevet.

En se référant à l'article 1er, le 2* alinéa prescrit tout d'abord que l'examen devra porter sur la question de savoir si l'invention formant l'objet de la demande est utilisable industriellement, si elle constitue un progrès technique et si elle repose sur une idée créatrice, enfin si elle est encore nouvelle; en se référant à, l'article 7, il précise quand l'invention ne pourra plus être considérée comme nouvelle.

1007 En outre, l'invention devra ne pas être exclue de la protection en vertu de l'article 2, et enfin, le déposant devra avoir droit à la délivrance du brevet, conformément à l'article 3, 3e alinéa; c'est dire qu'il devra s'agir de la première demande de brevet déposée pour l'invention dont il s'agit. Si l'examinateur sait que la même invention a déjà fait l'objet d'une demande de brevet antérieure, il devra suspendre l'examen de la demande plus récente jusqu'à ce que la demande antérieure ait abouti à la délivrance d'un brevet ou qu'elle ait été rejetée ou retirée.

Le 2e alinéa traite exclusivement des cas où un brevet valable ne peut pas être délivré et où, par conséquent, il ne saurait être question de fixer un délai pour corriger des défauts de forme. Malgré cela, le déposant devra avoir l'occasion de se prononcer sur les objections faites par l'examinateur.

Selon le 3e alinéa, l'examinateur devra encore vérifier si les conditions de forme prescrites par la loi ou par le règlement d'exécution ont été observées. Si ce n'est pas le cas, il impartira au déposant un délai pour corriger les défauts constatés. Entrent ici en ligne de compte les articles 59 (exposition de l'invention de manière qu'elle puisse être exécutée par l'homme du métier); 60 (présentation d'une revendication); 61 et 62 (caractère admissible du contenu des revendications); 63 (caractère admissible du contenu des sous-revendications); 9 (relation additionnelle).

Comme jusqu'ici, le règlement d'exécution édietera les prescriptions de détail sur la façon de rédiger clairement la description et les revendications (von- notamment l'art. 7 de l'actuel règlement d'exécution). La clarté exigée n'est pas seulement dans l'intérêt du déposant lui-même (voir la cause de nullité dérivée de l'art. 26, ch. 4), mais aussi des tiers ; ceux-ci ont le droit de savoir en quoi la protection est revendiquée et quel est le domaine qui ne sera pas touché par le brevet.

Cette mise au net des pièces accompagnant la demande de brevet devra ee faire encore avant la publication de la demande (art. 70). Elle pourra être réalisée par voie de correspondance, mais aussi par un entretien oral entre l'examinateur et le déposant ou son mandataire.

On s'est demandé s'il ne conviendrait pas d'obliger expressément le déposant à faire devant les organes du
bureau, sur les circonstances de fait, des déclarations complètes et véridiques; en particulier, s'il ne conviendrait pas de l'obliger, sur demande, à reproduire fidèlement dans la description 1'« état de la technique » tel qu'il lui est connu. La commission des experts n'a pas voulu d'une telle prescription qui, ainsi qu'elle le craignait, aurait pu amener 1s bureau à faire des inquisitions allant trop loin.

Art, 68 (rejet de la demande) Cet article correspond à la réglementation actuellement en vigueur (art. 27, 1" et 2« al.).

1008

Art. 69 (publication de la demande) _Z et 2 alinéas : Pas de remarques.

3e alinéa : II est indispensable de prévoir une sanction pour assurer l'observation de ce délai. Le rejet immédiat de la demande de brevet serait cependant trop rigoureux. C'est pourquoi le projet prévoit un délai de grâce d'un mois; mais ce délai supplémentaire ne pourra être accordé qu'une fois et ne sera pas prolongé; il sera en outre soumis au paiement d'une surtaxe.

Art. 70 (forme de la publication) La publication, prévue au Jfer alinéa, du contenu essentiel de la demande se fera dans une publication périodique du bureau, analogue à l'actuelle « liste des brevets ». La publication du contenu essentiel de la demande doit être entendue dans le sens d'un bref exposé de l'objet de l'invention; il importera d'éviter, en particulier, que cet exposé ne soit trop détaillé et ne puisse détruire la nouveauté de l'invention à l'étranger.

Celui qui voudra connaître des détails devra consulter le dossier exposé au bureau, conformément au 2e alinéa.

Selon le 2e alinéa, le bureau devra mettre à la disposition du public, outre la description de l'invention et les revendications, les pièces justificatives de la priorité et, en particulier, une liste des publications opposées par l'examinateur à la demande de brevet au cours de l'examen, mais qui dans la suite n'ont pas été considérées comme pouvant nuire à la nouveauté de l'invention. Les tiers pourront ainsi, en consultant la liste, connaître les publications qui ne constitueraient probablement pas une cause suffisante d'opposition.

D'autre part, le bureau n'exposera pas le dossier complet de la demande, en particulier pas la correspondance échangée entre le bureau et le déposant.

Il exposera seulement, dans leur rédaction définitive, la description (dessins compris) et les revendications. Il appartiendra au déposant de veiller à ce que la rédaction définitive ne contienne rien qu'il veuille soustraire à la connaissance des tiers; il ne saurait charger le bureau de rendre illisibles sur les pièces exposées les parties de la description auxquelles il aurait renoncé au cours de l'examen.

L'article 93 introduit une protection provisoire de l'invention, comme pendant nécessaire de la publication prévue ici (voir les remarques a l'art. 93).

Art. 71 (ajournement de la publication)
Le déposant peut avoir dans certaines conditions un intérêt à faire ajourner la publication, lorsque, par exemple, il veut modifier la revendication. Les demandes d'ajournement pourront être présentées pendant la durée du délai fixé à l'article 69, 2e alinéa. L'ajournement ne pourra dépasser six mois.

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1009 Art. 72 (opposition) Seuls sont reconnus comme causes d'opposition les défauts qui entraînent le rejet de la demande, conformément à l'article i>7, 2e alinéa.

Aussi la procédure en opposition a-t-elle pour but de fournir au bureau, qui ne dispose pour l'examen de la demande que d'une documentation incomplète, une documentation supplémentaire pour la recherche des causes pouvant entraîner le rejet de la demande.

L'allégation que le déposant ne serait pas le véritable ayant droit ne constitue pas une cause d'opposition; voir à ce propos les remarques faites aux articles 3 et 4.

L'« opposition » ne sera prise en considération que si elle satisfait aux conditions posées par le 3e alinéa. Les faits sur lesquels se fondent les causes d'opposition admises par la loi devront, avant l'expiration du délai d'opposition, être communiqués au bureau par un acte écrit. L'opposant indiquera en même temps tous les moyens de preuve dont il entend se servir. Il ne devra cependant les présenter que si la section des brevets le demande.

Art. 73 (absence d'opposition) Pas de remarques.

Art. 74 (procédure probatoire) Ier et 2e alinéas : A chaque instance (devant l'examinateur, la section des brevets et la section des recours), il sera peut-être nécessaire de procéder à des preuves. Si l'opposant affirme par exemple que l'invention a déjà été divulguée, la nouveauté de l'invention sera mise en question.

L'opposant pourra présenter à ce sujet une déclaration écrite faite par un tiers; si le déposant en conteste l'exactitude, il faudra forcément entendre comme témoin l'auteur de la déclaration. Ou bien, si le déposant donne des faits et du résultat de ses essais une description qui n'emporte pas sans plus la conviction, il faudra pouvoir l'entendre ou entendre d'autres personnes qui auraient participé aux essais, ou aussi faire une inspection locale. Enfin, il sera peut-être nécessaire de demander une expertise, lorsque la décision à prendre suppose des connaissances spéciales que le personnel du bureau ne possédera pas ; ce cas pourra se produire par exemple lorsqu'il s'agira de savoir si l'invention est utilisable industriellement. S'il n'était pas à même de procéder à des preuves de ce genre, le bureau ne pourrait s'acquitter convenablement de son devoir, qui consiste à ne délivrer un brevet que lorsque les
conditions légales sont remplies. Dans la plupart des autres pays connaissant l'examen préalable, de tels pouvoirs ont aussi été accordés au bureau des brevets. Il est dono nécessaire d'édicter des règles relatives à la procédure probatoire. Le plus simple, semble-t-il,

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est de déclarer applicables par analogie les dispositions du titre septième de la loi de procédure civile fédérale du 4 décembre 1947, Entrent en ligne de compte les articles 36 à 65 y compris. Seul est excepté l'article 64 (sanctions pénales en cas de fausse déclaration). L'interrogatoire simple, au sens des articles 62 et 63, c'est-à-dire sans menace de sanctions pénales, doit pouvoir suffire.

Une autre exception doit être faite en ce qui concerne l'article 42 de la loi de procédure civile fédérale. Les agents de brevets et leurs auxiliaires doivent avoir le droit de refuser de témoigner, comme les personnes mentionnées à l'article 321, chiffre 1, du code pénal (avocats, etc.). A cet égard, la situation des agents de brevets à l'égard de leurs clients est assez semblable à celle des avocats.

Dans sa majorité, la commission des experts éprouvait quelque scrupule à confier à l'examinateur et à la section des brevets le droit d'interroger les parties et d'entendre des témoins. Elle ne put s'y résoudre qu'à certaines conditions, qu'elle exprima de la façon suivante: L'examinateur et la section des brevets prennent les mesures propres à élucider les faits. Si, par exception, il devait être nécessaire, pour une constatation objective des faits, d'engager une procédure probatoire, par audition An témoins, inspection locale, expertise ou interrogatoire des parties, cette procédure pourra être ouverte avec le consentement du président de la chambre des recours et avec la collaboration d'un juriste du bureau des brevets. En ce cas, les dispositions du titre septième de la loi de procédure civile fédérale seront, à l'exception de l'article 64, applicables par analogie.

On fit valoir qu'il serait dangereux de confier une compétence judiciaire à des autorités administratives; cela pourrait, encore une fois, constituer un précédent fâcheux dans la voie d'un développement de la justice administrative. Il importerait de veiller -- et c'est à quoi tendaient les restrictions proposées --· à ce que cette procédure probatoire n'intervînt qu'exceptionnellement et qu'elle fût confiée à des personnes capables.

Encore une fois (voir les remarques à l'art. 54), il convient de répondre à cela que la procédure probatoire n'interviendra pas sur des faits devant emporter la décision sur des prétentions que l'Etat ferait valoir contre le citoyen. D'ailleurs, il n'y a guère lieu de craindre que l'examinateur ou la section des brevets procèdent à des preuves inutiles. Ils sauront que toute la procédure en délivrance du brevet doit être la plus simple, la plus rapide et entraîner le moins de frais possible. Aussi une procédure probatoire ne sera-t-elle engagée que lorsqu'elle sera réellement nécessaire pour établir si les conditions requises pour la délivrance du brevet sont remplies. Il n'y a donc pas de raison non plus de prévoir, pour l'ouverture d'une procédure probatoire, le consentement d'un organe supérieur.

Une telle prescription ne serait guère justifiée non plus pour la raison suivante: l'organe supérieur devrait étudier tout le dossier de l'affaire, pour n'intervenir que dans une décision relativement peu importante (ouverture

1011 d'une procédure probatoire), tandis qu'il n'aurait plus aucun mot à dire, selon la proposition même de la commission des experts et pour des raisons bien compréhensibles, dans la procédure probatoire elle-même et dans l'appréciation des résultats obtenus, opérations qui revêtent toutes deux une importance bien plus grande. Il n'existe aucune restriction de ce genre non plus en Hollande ou en Allemagne.

La proposition de faire appel pour la procédure probatoire à un juriste du bureau peut être acceptée en principe. Cependant, une telle prescription peut être abandonnée au règlement d'exécution, tout comme la désignation des cas où des juristes devront collaborer dans les sections des brevets ou les sections des recours.

3e et 4e alinéas : Pas de remarques.

Art. 75 (frais) En principe, la procédure en délivrance du brevet fondée sur l'examen préalable est régie par la maxime de l'intervention (Omzialmaxime), c'està-dire que le bureau devra examiner d'office si les conditions légales requises pour la délivrance du brevet existent ou non, et qu'il devra aussi d'office tenir compte des faits qui lui sont connus, par exemple, des faits destructeurs de nouveauté que lui aura signalés un opposant, même si, dans la suite, l'opposition est retirée. D'autre part, le principe de l'intervention ne peut signifier que le bureau doive, sur de simples affirmations, engager d'office une procédure probatoire. Il ne suffira pas par exemple à un opposant d'affirmer que l'invention a déjà été divulguée; il lui faudra en outre apporter des faits concrets et indiquer les moyens de preuve.

Quant aux frais entraînés par une procédure probatoire engagée à la suite de telles offres de preuves, il faut laisser à l'appréciation du bureau le soin de dire qui aura finalement à les supporter. Il faudra sans doute partir du principe que l'opposant n'aura à supporter les frais que si son opposition est téméraire; sinon, il y aurait un certain danger que l'on ne se montrât par trop réservé pour faire opposition et qu'ainsi le but recherché par la publication de la demande ne pût être entièrement atteint. Le cas échéant, les frais pourront être mis à la charge du déposant: si l'examinateur lui objecte qu'il est impossible que l'invention atteigne le but indiqué, le déposant pourra demander une expertise ; si l'expertise se
prononce en sa défaveur, il devra en supporter les frais. Il n'est pas possible d'établir des règles fixes relatives à la répartition des frais. Il faut laisser aux organes appelés à se prononcer le soin d'apprécier et de rendre à ce sujet une décision équitable, selon les circonstances du cas. La décision relative aux frais peut être revue par la section des recours (art. 77).

Conformément à l'article 162 de la loi d'organisation judiciaire, la décision relative aux frais, une fois passée en force, sera assimilée à un jugement exécutoire au sens de l'article 80 de la loi sur la poursuite pour

1012 dettes et la faillite; il n'est donc pas nécessaire de prévoir ici une disposition spéciale à ce sujet.

Art. 76 (modification des revendications) II pourra arriver que le déposant se voie obligé, au vu des résultats de la procédure en opposition, de modifier ses revendications de telle sorte que la publication de la demande et la procédure en opposition doivent être répétées; ainsi en sera-t-il s'il y a lieu d'admettre que la nouvelle rédaction fera surgir de nouveaux opposants. De telles modifications ne seront cependant admises que si le déposant fournit auparavant des sûretés pour les frais entraînés par la répétition de la procédure. Il ne serait pas justifié de mettre ces frais supplémentaires à la charge de l'Etat.

Art. 77 (conditions du recours) 7 et 2 alinéas : Chaque partie, qui n'aura pas obtenu gain de cause devant l'examinateur ou la section des brevets, pourra faire revoir par la section des recours la décision prise en première instance, même s'il ne devait s'agir que de la question des frais.

3e alinéa : Le but recherché par l'examen préalable ne pourra être atteint que si la section des recours elle-même est en mesure de tenir compte de tout ce qui peut, en vertu de la loi, s'opposer à la délivrance du brevet.

Elle ne saurait donc se borner à examiner les motifs indiqués par le recourant. Si le projet prescrit que le recours indiquera les motifs, cela ne veut dire ni que la section des recours ne pourra examiner que les motifs invoqués par le recourant, ni qu'un recours non motivé ne sera pas recevable.

Cette disposition vise plutôt à engager les parties non seulement à réfléchir avant de recourir, mais encore à réfléchir sur les motifs pour lesquels elles veulent recourir. Elle permettra d'empêcher des recours qui n'ont aucune chance de succès et facilitera aussi la tâche de la section des recours.

4e alinéa : Le recours à une seconde instance entraîne des frais supplémentaires et il est justifié de ne l'admettra que moyennant paiement, par avance, d'une taxe spéciale. Cette taxe pourra (selon l'art. 78, 3e al.) être remboursée au recourant; celui-ci n'aura cependant pas un droit au remboursement en cas d'admission du recours; la taxe ne sera remboursée que dans des cas exceptionnels, pour des raisons d'équité.

Le déposant qui aura obtenu un sursis, conformément à l'article 45, n'aura pas à payer de taxe de recours. Il n'y a pas de raison, en revanche, d'accorder la même facilité à l'opposant.

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Art. 78 (-procédure) Dans la procédure de recours, ü sera peut-être aussi nécessaire de procéder à des preuves, de même que de modifier les revendications. C'est

1013

pourquoi, le 1er alinéa déclare applicables par analogie les dispositions des articles 74 et 76.

En ce qui concerne le remboursement de la taxe de recours (3e al.), voir les remarques faites à l'article 77, 4e alinéa.

Chapitre 4 Le registre des brevets; publications faites par le bureau Art. 79 (registre des brevets) Cet article correspond, pour l'essentiel, aux prescriptions de la loi actuelle (art. 30).

Art. 80 (publications faites 'par le bureau) Les chiffres 2 à 4 correspondent aux dispositions de la loi actuelle (art. 31, 1er et 2e al.). Le chiffre 1 est nouveau; le public doit pouvoir connaître le sort réservé à la demande de brevet, dont il a eu connaissance par la publication.

Art. 81 (ajournement de la publication) Si le département militaire fédéral, par exemple, acquiert une licence sur un brevet, il devra, pour qu'elle soit opposable aux tiers, faire inscrire cette licence au registre des brevets (voir art. 34, 3e al.). Le cas échéant, U pourra y avoir un intérêt à ne pas attirer l'attention de tout le monde, par la publication de l'inscription portée au registre, sur l'acquisition d'un droit semblable sur un brevet déterminé. Celui qui voudra savoir si la Confédération a acquis une licence sur un brevet déterminé pourra consulter le registre des brevets.

Art. 82 (exposé d'invention) Comme jusqu'ici, le bureau publiera, une fois le brevet délivré, un exposé d'invention imprimé, contenant la description, dessins compris, ainsi que les revendications et sous-revendications. En outre, l'exposé d'invention comprendra dorénavant une liste des publications -- écrits ou images -- opposées à la demande au cours de la procédure d'examen.

H sera ainsi possible, à la lecture de l'exposé d'invention, de savoir si l'invention a déjà été examinée sur certains points déterminés.

Les prescriptions relatives au prix de l'exposé d'invention (art. 31, 3e al., de la loi actuelle) et à la possibilité de faire ajourner la publication de l'exposé (art. 31, 4e al., de la loi actuelle) sont l'affaire du règlement d'exécution. Il faudra reculer quelque peu le terme, actuel de l'ajournement et, en outre, prévoir expressément que l'ajournement ne sera accordé Feuille fédérale. 102e année. Vol. I.

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que si le titulaire du brevet autorise le bureau à donner à des tiers connaissance du contenu de l'exposé d'invention avant même qu'il soit publié, lorsque ces tiers s'enquièrent du contenu de l'exposé d'invention une fois le brevet délivré.

Art. 83 (document du brevet) Pas de remarques.

Art, Sd (conservation du dossier) Le juge peut avoir besoin de consulter le dossier du brevet même après que ce dernier est tombé en déchéance. En portant à cinq ans à compter de la déchéance du brevet le délai durant lequel le dossier devra être conservé, on tient sans doute suffisamment compte des délais de prescription en matière civile et pénale (art. 60 CO et 70 CPS).

TITRE TROISIEME Sanction civile et pénale II a paru utile de réunir dans deux chapitres distincts, d'une part les dispositions relatives à la protection de droit civil et, d'autre part, celles qui concernent la protection de droit pénal. Il sera ainsi plus facile de s'orienter sur chacun de ces deux domaines différents. Afin d'éviter des répétitions, les dispositions qui touchent aux deux domaines ont été insérées dans un premier chapitre.

Chapitre premier Dispositions communes à la protection de droit civil et de droit pénal Art. 85 (conditions de la responsabilité) Lettre a : Au lieu de reprendre la casuistique de l'article 38, chiffres 1 à 3, de la loi actuelle, le projet s'en tient, pour définir les conditions de la, responsabilité, à une formule générale, qui se réfère au monopole conféré par le brevet en vertu de l'article 8; dans les différents cas qui peuvent se présenter ici, nous avons en effet affaire à une utilisation de l'invention, réservée en vertu de l'article 8 au titulaire du brevet. Pour enlever toute possibilité de doute, il est dit expressément que l'imitation est considérée comme une utilisation.

L'illicéité fait défaut, par exemple, lorsque l'invention est utilisée en vertu d'un droit dérivé d'un usage antérieur (art. 35 ou 49), ou lorsque le produit breveté est mis en circulation par le titulaire du brevet, ou avec son consentement, et que l'acquéreur en fasse un usage conforme à sa.

destination.

1015 Lettre b : Correspond à l'article 38, chiffre 5, de la loi actuelle.

Lettre c : Correspond à l'article 46, 3e alinéa, de la loi actuelle.

Lettre d : Correspond à l'article 38, chiffre 4, de la loi actuelle ; cette disposition a cependant été élargie par la mention de l'instigation. Il n'y a pas de raison en effet de traiter l'instigateur moins sévèrement que le complice. Il sera possible, en vertu de cette disposition, de poursuivre l'instigateur ou le complice même si l'auteur principal ne peut pas être puni, faute ds plainte par exemple. Nous avons affaire ici à l'une des dérogations au code pénal suisse, telles que les prévoit l'article 103, notamment au principe, consacré par l'article 30 de ce code, de l'indivisibilité de la plainte. Au sein de la commission des experts, les représentants de l'industrie ont insisté pour donner au titulaire du brevet la possibilité de porter plainte seulement contre certaines personnes ayant participé à la violation du brevet. Si cette possibilité ne lui était pas accordée, le titulaire du brevet serait contraint d'agir contre chacun des participants, au risque de perdre des clients actuels ou futurs, ou alors, s'il veut éviter ce risque, d'assister passivement à la violation de son brevet. Ces conséquences seraient peu équitables dans les deux cas. La réglementation proposée permettra de les empôulier.

Au reste, l'instigation ne sera punissable que si l'instigué a réellement agi, et la tentative d'instigation ne sera pas punissable (art. 24 CPS).

Art. 86 (renversement du fardeau de la preuve) L'article 7, 3e alinéa, de la loi actuelle dispose que si l'invention a trait à un procédé pour la fabrication d'une substance chimique nouvelle, toute substance de même composition sera présumée, jusqu'à preuve du contraire, fabriquée par le procédé breveté. On a voulu, par cette disposition, tenir compte du fait qu'en général les substances chimiques peuvent être fabriquées par des procédés différents, mais que la plupart du temps la substance elle-même ne permet pas de reconnaître par quel procédé elle a été fabriquée. S'il ne bénéficiait pas de cette présomption, le titulaire du brevet risquerait dès lors de manquer de moyens de preuve au moment où il voudrait actionner un tiers pour violation de son brevet.

Cette disposition doit être maintenue, tout en
étant élargie sur deux points: Tout d'abord, il n'est pas justifié de limiter la présomption aux cas relatifs à la fabrication do substances chimiques. Les moyens de preuve peuvent manquer aussi lorsqu'il s'agit de substances non chimiques, obtenues par un procédé physique, ou même s'il s'agit de produits mécaniques quelconques, si le produit final ne permet pas de reconnaître par quel procédé il a été fabriqué. La présomption sera donc étendue à tout procédé de fabrication « d'un produit nouveau » (1er al.).

1016 Mais les moyens de preuve peuvent manquer de la même façon lorsque le brevet se rapporte à un nouveau procédé de fabrication d'un produit connu. Il est vrai qu'ici, contrairement au cas précédent, il est possible d'admettre par avance que le produit prétendument fabriqué en violation du brevet ait pu être obtenu par un procédé déjà connu. Il est dès lors justifié d'obliger d'abord le titulaire du brevet à fournir tout au moins des indices de la violation de son brevet. Si ces indices sont fournis, il incombera au défendeur de prouver que son produit a été fabriqué par un procédé ne tombant pas sous le coup du brevet. Un exemple: un brevet a pour objet un nouveau procédé de fabrication, qui permet de diminuer les frais de production dans une mesure telle que le produit peut être mis sur le marché à un prix considérablement réduit. Si un autre fabricant met sur le marcbé le même produit à un prix réduit dans une mesure semblable, le titulaire du brevet pourra, devant le juge, montrer qu'en aucun cas ce prix ne permettrait de couvrir les frais de production si le produit devait être obtenu par un des procédés quelconques utilisés jusque-là. Le second fabricant sera dès lors présumé avoir employé le procédé breveté et meilleur marché. Il lui restera cependant la possibilité d'apporter la preuve du contraire.

On iie saurait objecter qu'en élargissant ainsi le champ d'application de la règle relative au fardeau de la preuve, les tiers accusés d'avoir violé un brevet fussent mis dans une situation par trop défavorable. L'article 87, 2e alinéa, leur permettra de faire leur contre-preuve sans que le demandeur puisse prendre connaissance de leurs secrets de fabrication.

Art. 87 (sauvegarde du secret d'affaires) Cet article a pour but, en particulier, d'empêcher que par le détour d'une action en violation d'un brevet, le demandeur ne puisse, alors qu'il n'y a aucun droit, prendre connaissance des méthodes de travail, des listes de clients, etc. de son adversaire. Le cas échéant, le juge pourra par exemple, en vertu du 2e alinéa, tenir le demandeur à l'écart lorsqu'il s'agira de consulter la comptabilité du défendeur ou de procéder à une inspection locale.

Art. 8S (réalisation des objets confisqués) '.

Cet article correspond, sauf quelques changements rédactionnels, à l'article 44 de la loi actuelle.
Art. 89 (publication du jugement) La partie accusée d'avoir violé un brevet, et acquittée, peut avoir elle aussi, dans certaines conditions, un intérêt à ce que le jugement soit public. C'est pourquoi, le 1er alinéa ne dispose plus, comme l'axlicle 45 de la loi actuelle, que le jugement pourra être publié « aux frais du con-

1017 damné », mais qu'il pourra l'être en faveur de la « partie qui a obtenu gain de cause » (voir à ce sujet ATF 67, II, 58).

En matière pénale, l'article 61 du code pénal restera applicable; il permettra en particulier de tenir compte de l'intérêt public éventuellement en jeu.

Art. 90 (interdiction d'accumuler les actions) Comme l'expérience l'a montré, il arrive, dans la lutte économique livrée entre concurrents, que certains d'entre eus, disposant de capitaux importants et titulaires de plusieurs brevets, actionnent à réitérées fois les mêmes personnes, économiquement plus faibles, en raison d'une même violation d'un brevet ou d'un acte analogue, en se fondant chaque fois sur un autre brevet. Ils arrivent ainsi à les mettre dans la gêne, du simple fait des frais de procès qui se répètent. Une telle tactique doit être empêchée et c'est à quoi tend la présente disposition. On avait d'abord proposé comme sanction d'exclure purement et simplement toute nouvelle action.

La commission des experts a cependant jugé suffisant d'en mettre à la charge du demandeur les frais judiciaires et les dépens.

Chapitre 2 Dispositions spéciales à la protection de droit civil La loi actuelle ne prévoit que l'action en dommages-intérêts (art. 39 et 40), mais non pas l'action en cessation de l'acte, ni l'action en constatation. Selon la jurisprudence actuelle du Tribunal fédéral, l'admissibilité de l'action en constatation et les conditions auxquelles elle est soumise sont régies par la procédure cantonale; cependant, cette action doit pouvoir être intentée, en vertu du droit fédéral et sans égard aux dispositions de la procédure cantonale, dans tous les cas où elle est reconnue, de façon expresse ou tacite, par le droit fédéral (ATF 69, II, 77; 64, II, 223). Le Tribunal fédéral a jugé qu'en matière de brevets, le législateur avait admis tacitement aussi bien l'action en constatation que l'action en cessation de l'acte (ATF 71, II, 44).

Il peut arriver que l'action en cessation de l'acte, comme l'action en constatation, soit indispensable pour sauvegarder efficacement les droits conférés par le brevet. Il semble donc indiqué d'exclure par avance toute possibilité de doute quant à leur admissibilité et de les régler expressément dans la loi.

Art. 91 (action en cessation de l'acte) Contrairement à l'action en
dommages-intérêts, cette action n'est pas conditionnée par une faute du défendeur (voir à ce sujet ATP 71, Ti, 46, et art. 2, lettres b et d, de la loi sur la concurrence déloyale).

1018

Le titulaire du brevet a le choix, selon les circonstances du cas, d'intenter l'action tendant à supprimer les conséquences d'un acte déjà commis, ou celle qui tend à prévenir le trouble que le défendeur s'apprête à provoquer, ou les deux à la fois.

Art. 92 (action en dommages-intérêts) .7 alinéa : En déclarant applicables non seulement la partie générale du code des obligations, mais « les dispositions du code des obligations », le projet tend en particulier à sanctionner la pratique du Tribunal fédéral qui, lors du calcul de l'indemnité, tient compte aussi, le cas échéant, des dispositions relatives à la gestion d'affaires, spécialement de l'article 423 du code des obligations (voir ATF 49, II, 518; 63, II, 280).

Contrairement à la loi actuelle (art. 48, 1er al.), le projet ne contient aucune disposition relative à la prescription. Celle-ci sera donc réglée par l'article 60 du code des obligations, c'est-à-dire que l'action sera prescrite « par un an à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne qui en est l'auteur, et, dans tous les cas, par dix ans dès le jour où le fait dommageable s'est produit ». Il n'existe aucune raison impérieuse de déroger sur ce point aux dispositions du droit commun.

er

2e alinéa : II peut arriver que le lésé, sans qu'il y ait faute de sa part, ne soit pas en mesure d'indiquer par avance le montant exact de l'indemnité qu'il entend réclamer. Il sait que son brevet a été violé, mais il ne sait pas combien de fois, ni quel gain l'auteur de la violation en a retiré (cf. art. 423 CO). Selon la plupart des procédures cantonales, il devra malgré tout indiquer un chiffre, au hasard, et supporter ensuite des frais de procès si ce chiffre apparaît comme trop élevé, ou au contraire ne rien obtenir pour le dommage qui pourrait surpasser le chiffre indiqué. Ce sont là des conséquences toutes deux fâcheuses et que la disposition proposée ici tend à empêcher. Certes, cette disposition constitue un certain empiétement sur la procédure cantonale; mais cet empiétement paraît nécessaire et justifié par les conditions spéciales propres au droit relatif aux brevets d'invention. Il est beaucoup plus difficile de se rendre compte des conséquences de la violation d'un droit lorsqu'il s'agit de la violation d'un monopole d'exploitation industrielle que lorsqu'il s'agit de la violation d'un autre droit quelconque. Il importe d'en tenir compte par un certain assouplissement des règles de procédure.

Cet assouplissement aura-t-il pour effet de modifier le point de départ du délai de prescription ? (Selon l'article 60 CO, le lésé doit avoir du dommage une connaissance suffisante pour qu'on puisse admettre qu'il est en mesure d'intenter l'action; voir ATE 42, II, 46 et 74, II, 33.) Cette question n'a pas à être résolue ici. Au cas où les tribunaux lui donneraient une réponse affirmative, et que la prescription commençât dès lors à courir

1019

plus tôt, le lésé à qui une année ne suffirait pas pour préparer le procès pourra, par mesure de précaution, interrompre la prescription de façon très simple (voir art. 135, ch. 2 CO).

La disposition contenue dans ce 2e alinéa ne saurait cependant autoriser le lésé à demander simplement au juge de fixer selon sa libre appréciation le montant de l'indemnité. De toute façon, le lésé devra exposer les faits et indiquer les moyens de preuve qui permettront au juge de procéder aux preuves en vue de fixer le montant du dommage.

Art. 93 (protection provisoire) Les dispositions relatives à la sanction civile et pénale supposent l'existence d'un brevet. Avant même que le brevet soit délivré, une protection n'est accordée que si elle est prescrite par une disposition spéciale.

Une telle disposition manque dans la loi actuelle (voir à ce sujet ATT 59, I, 100). Dorénavant, le contenu de la demande de brevet sera, en vertu de la loi, publié avant que le brevet soit délivré (art. 70) ; aussi, la création d'une protection provisoire s'impose. Conformément aux propositions faites par la commission des experts, le projet s'est borné à prévoir une protection de droit civil.

Une différence a été faite entre l'action en cessation de l'acte, admise avant même que le brevet soit délivré (lettre a), et l'action en dommagesintérêts, qui ne pourra être intentée qu'une fois le brevet délivré, mais avec effet rétroactif (lettre b).

Lettre a: L'action en cessation de l'acte (tendant par exemple à faire cesser la fabrication d'un produit) peut, selon les circonstances, constituer une mesure très grave. C'est pourquoi, elle ne sera admise que si le demandeur fournit au défendeur des sûretés suffisantes, à fixer par le juge. S'il apparaît dans la suite que l'action a été intentée sans droit (si, par exemple, la demande de brevet est subséquemment retirée ou rejetée ou que le brevet délivré entre temps est déclaré nul), celui qui aura demandé la protection provisoire devra être tenu pour responsable. H convient de renvoyer à ce sujet à l'article qui traite de la responsabilité encourue pour le dommage causé par des mesures provisionnelles (voir art. 100 et les remarques qui le concernent).

Lettre b : L'action en dommages-intérêts ne sera admise qu'une fois le brevet délivré. On peut bien admettre que le défendeur puisse
être obligé de suspendre certains actes jusqu'au moment où l'on saura si un brevet est délivré ou non ; mais ce serait aller trop loin que de l'obliger à payer des dommages-intérêts, tout en courant le risque de voir le brevet refusé dans la suite.

Il ne serait pas juste, d'autre part, de rendre le défendeur responsable seulement du dommage survenu a.près la délivrance du brevet et de le laisser ainsi jouir d'un avantage auquel il n'a jamais eu droit. C'est pourquoi des

1020 dommages-intérêts pourront être réclamés rétroactivement, depuis le moment où le défendeur a eu connaissance du contenu de la demande de brevet. Il appartiendra au demandeur de prouver quand se situe ce moment. H pourra s'assurer cette preuve, par exemple, en envoyant immédiatement au tiers qu'il suppose utiliser l'invention une copie de la description de l'invention, sous pli recommandé.

Art. 94 (action en constatation) . Cette action est accordée pour les seuls cas où il s'agit de faire constater l'existence ou l'absence de faits ou de droits prévus par la présente loi elle-même. Sont exclues en particulier les actions tendant à faire constater l'existence ou l'absence de droits contractuels, même s'ils se rapportent à des brevets (par exemple l'action en constatation de la validité d'un contrat de vente d'un brevet, ou en constatation du contenu d'un contrat de licence, ou en paiement de l'indemnité convenue pour l'octroi d'une licence, etc.). En cette matière, la situation actuelle peut être maintenue, c'est-à-dire que l'admissibilité de l'action dépendra des règles de la procédure cantonale.

L'article 94 contient une clause générale, illustrée par divers exemples : Chiffre 1 : H est le pendant de l'action en nullité. Le titulaire du brevet peut avoir un intérêt à une telle constatation, par exemple à l'encontre du preneur de licence qui conteste après coup la validité du brevet.

Chiffre 2 : Le cas échéant, le titulaire du brevet qui n'est pas en mesure de prouver qu'une violation de son brevet lui a causé un dommage, et qui ne peut dès lors intenter l'action prévue par l'article 92, peut avoir un intérêt à faire constater pour le moins que son brevet a été violé.

Chiffre 3 : Dans le cas inverse, le tiers que le titulaire du brevet accuse d'avoir violé ses droits peut avoir un intérêt à faire constater que tel n'est pas le cas.

Chiffre 4 : Le tiers qui prétend avoir sur le brevet, conformément aux articles 35 ou 49, un droit dérivé d'un usage antérieur doit pouvoir intenter l'action en constatation de ce droit, contre le titulaire du brevet qui le lui conteste.

Chiffre 5 : La même possibilité est prévue en ce qui concerne la licence octroyée en cas d'invention dépendante (art. 36).

Chiffre 6 : L'action en constatation pourra être intentée par un tiers qui prétend que c'est lui qui
est l'auteur de l'invention et non pas la personne indiquée par le déposant (voir à ce sujet les remarques faites aux art. 5 et 6).

Le demandeur devra dans cbaque cas justifier de son intérêt à la constatation judiciaire qu'il demande. Selon l'opinion généralement admise, le

1021 juge refusera d'admettre l'existence d'un tel intérêt si le demandeur est en mesure de revendiquer immédiatement en justice les droits auxquels il prétend, par exemple d'intenter immédiatement l'action en dommagesintérêts ou l'action en octroi d'une licence en cas d'invention dépendante.

Art. 95 (for) 1. La loi actuelle ne règle expressément la question du for que pour les « demandes en indemnité » (art. 42, 3e al.). Comme elle ne prévoit ni l'action en cessation de l'acte, ni l'action en constatation, elle ne contient aucune disposition non plus sur le for de ces actions. Ces dernières sont désormais réglées expressément dans le présent projet et il importe de régler aussi la question de leur for.

2. La loi actuelle ne contient aucune disposition non plus sur le for des autres actions qu'elle prévoit et qui peuvent être intentées contre le titulaire du brevet; ce sont notamment les actions en nullité du brevet (art. 16), en cession du brevet (art. 20), en octroi d'une licence en cas d'invention dépendante (art. 22), en octroi d'une licence ou en déchéance du brevet faute d'exécution de l'invention en Suisse (art. 18) et en octroi d'une licence dans l'intérêt public (art. 226is). Il est dans l'intérêt roa/mfeste des futurs demandeurs que le for de ces actions soit également réglé par la loi; c'est ce qu'a fait le projet, par une disposition générale réglant le for « des actions prévues par la présente loi ».

3. Il y a lieu de distinguer selon que le déposant ou le titulaire du brevet actionne un tiers ou qu'un tiers actionne le déposant ou le titulaire du brevet.

a. Dans le premier cas, le déposant ou le titulaire du brevet doit avoir comme jusqu'ici le choix entre le for du domicile du défendeur et celui du heu où l'acte a été commis. La commission des experts a jugé désirable et nécessaire d'admettre en outre le for du lieu où le résultat s'est produit.

Ce for supplémentaire permettra par exemple au titulaire du brevet d'actionner en Suisse, au heu de destination de la marchandise, le tiers qui aura fabriqué à l'étranger un produit breveté en Suisse et qu'il aura écoulé en Suisse. Cependant, l'exécution à l'étranger, au domicile du défendeur, du jugement rendu à la suite de cette action sera régie par d'autres règles de droit.

b. En revanche, si un tiers veut actionner le déposant ou le titulaire du brevet, deux cas doivent être à nouveau distingués: Si le défendeur est domicilié en Suisse, l'action devra être intentée au domicile du défendeur. Il n'y a pas de raison, dans ce cas, de prévoir un autre for que celui qui est garanti par la constitution.

En revanche, si le
défendeur n'a pas de domicile en Suisse, le juge compétent sera celui du lifiii où le mandataire, constitué conformément à l'article 13, exerce son activité et, à défaut de mandataire, le juge du

1022 lieu où le bureau de la propriété intellectuelle a son siège. Ces règles correspondent à celles de la loi actuelle (art. 24, 2e al.), à la seule exception près que le domicile du mandataire est remplacé par le lieu oii le mandataire exerce son activité. Si l'un et l'autre ne sont pas identiques et sont situés dans deux cantons différents, la préférence sera ainsi donnée au domicile d'affaires; il est permis de supposer que ce dernier se trouvera dans un centre des affaires et que le juge de l'endroit aura une plus grande expérience en matière de litiges portant sur des brevets d'invention. S'il n'y a aucun lieu particulier où le mandataire exerce son activité, sera considéré comme tel, au sens de la loi, le domicile du mandataire.

4. Si différents lieux entrent en même temps en ligne de compte, le juge compétent sera comme en matière pénale (voir art. 104) celui qui le premier aura été saisi de l'action.

5. Les remarques qui précèdent se rapportent à l'action civile intentés de façon indépendante. La possibilité, conformément aux dispositions de la procédure cantonale, de déposer des conclusions civiles au cours de la procédure pénale est réservée. Les prescriptions de la présente loi ne modifieront rien non plus aux fors constitués en vertu d'autres lois, par exemple en vertu de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite (voir ATI171, III, 197).

Art. 96 (juridiction cantonale unique) L'article 49 de la loi actuelle imposait aux cantons l'obligation de désigner « une instance cantonale unique chargée de juger des contestations civiles relatives aux brevets d'invention ». Cette disposition est modifiée sur deux points: 1. L'expression de « contestations civiles relatives aux brevets d'invention » n'est pas sans équivoque et par conséquent ne fixe pas clairement jusqu'où va l'obligation imposée aux cantons. Elle a déjà été interprétée en ce sens qu'elle ne comprendrait pas seulement les actions prévues par la loi sur les brevets elle-même, mais qu'elle engloberait également les cas où le procès a été intenté à un autre titre, mais dans lequel interviendraient des questions préjudicielles ou des exceptions touchant au domaine des brevets d'invention. Le Tribunal fédéral a cependant prononcé que seules les conclusions de la demande ou de la demande reconventionnelle peuvent permettre
de qualifier une contestation de contestation relative aux brevets d'invention au sens de l'article 49, mais non pas les questions préjudicielles ou les exceptions qui peuvent surgir (ATF 74, II, 188; voir aussi ATP 71, III, 196). Au vu des raisons avancées par le Tribunal fédéral, il paraît indiqué de maintenir cette solution pour l'avenir. Il convient donc d'adapter à cette interprétation plus étroite le texte de la disposition dont il s'agit et de parler, plutôt que des « contestations relatives aux brevets d'invention », des « actions prévues par la présente loi ».

1023 II n'est pas contestable que le juge devra aussi, parfois, posséder des connaissances spéciales pour se prononcer sur des questions préjudicielles ou des exceptions qui se rapportent au domaine des brevets d'invention.

Il n'est aucunement nécessaire pour autant d'assimiler ces cas aux procès touchant à proprement parler au domaine des brevets d'invention et il importe de ne pas empiéter sans nécessité sur l'organisation judiciaire des cantons. Les parties auront toute liberté, le cas échéant, d'intenter un procès spécial pour résoudre la question touchant au domaine des brevets d'invention, au lieu de la soulever simplement par la voie d'une question préjudicielle ou d'une exception. Ainsi, la juridiction cantonale unique sera compétente pour la résoudre. Les cantons resteront libres, de leur côté, de déclarer cette juridiction unique compétente pour d'autres cas non visés par l'article 96 (voir ATP 74, II, 190, considérant 3).

2. L'article 49 de la loi actuelle ne s'opposait pas à ce que certains cantons désignent comme juridiction cantonale unique leurs tribunaux de première instance, dont les jugements pouvaient être portés directement devant le Tribunal fédéral en passant par dessus la juridiction cantonale supérieure. L'article 49 n'avait en effet pour but, à l'origine, que de simplifier les instances de recours. Cependant, si les procès intentés dans un canton en matière de brevets sont répartis outre plusieurs tribunaux, chacun de ces tribunaux ne pourra pas, dans la même mesure que si tous ces procès étaient portés devant lui, acquérir dans ce domaine spécial l'expérience désirable et nécessaire. C'est là pourtant, dans la situation actuelle, un tel avantage qu'il est justifié, dans l'intérêt d'une application uniforme de la loi, d'exiger l'institution d'un seul et même tribunal << pour l'ensemble du territoire » du canton.

Art. 97 à 100 (mesures provisionnelles) La loi fédérale du 30 septembre 1943 sur la concurrence déloyale contient aux articles 9 à 12 des dispositions détaillées sur les mesures provisionnelles en matière civile. Il importe d'éviter qu'il y ait dans le domaine de la protection de la propriété industrielle plusieurs réglementations différentes les unes des autres en ce qui concerne les mesures provisionnelles.

C'est pourquoi les dispositions du projet ont été
reprises dans une large mesure, quant au fond, de la loi sur la concurrence déloyale. Certaines modifications furent cependant nécessaires, étant données les particularités du droit relatif aux brevets d'invention, notamment dans les cas suivants : L'article 97, 7er alinéa cite des exemples particuliers de mesures provisionnelles, repris de l'article 43 de la loi actuelle.

A l'article 97, 4e alinéa, le délai pour intenter action a été porté à 60 jours, avant tout pour tf»nir compte du fait qu'une grande partie des brevets appartiennent à des étrangers, pour qui un délai de 30 jours ne

1024 serait guère suffisant pour donner à leur mandataire les instructions nécessaires pour intenter le procès. En outre, le juge n'aura pas à impartir un délai dans chaque cas, comme le prescrit l'article 12 de la loi sur la concurrence déloyale, mais seulement « le cas échéant ». Il peut se produire des cas où il ne saurait aucunement être question d'intenter une action; ainsi en sera-t-il, par exemple, si des mesures provisionnelles sont ordonnées simplement pour assurer l'administration des preuves et que dans la suite il n'y a plus de motifs d'intenter l'action.

Selon l'article 99, lei alinéa, le requérant sera tenu, « en règle générale », de fournir des sûretés « suffisantes », tandis que selon l'article 10, 1er alinéa, de la loi sur la concurrence déloyale le requérant « peut être tenu de fournir des sûretés ». La commission des experts a jugé nécessaire de limiter de cette façon la liberté d'appréciation du juge.

A l'article 100, la responsabilité du requérant est réglée autrement que dans la loi sur la concurrence déloyale. Cette réglementation appelle les remarques suivantes: 1** alinéa : Les mesures provisionnelles ordonnées peuvent dans certaines conditions causer à la partie adverse un dommage considérable.

C'est pourquoi le requérant sera, en règle géiiérale, tenu de fournir des sûretés suffisantes (conformément à l'art. 99, 1er al.). Il importe de fixer encore sous quelles conditions la partie adverse pourra mettre à contribution les sûretés fournies par le requérant, c'est-à-dire quand le requérant sera tenu pour responsable du dommage causé. Selon l'article 12, 2e alinéa, de la loi sur la concurrence déloyale, « le juge peut obliger le requérant à réparer le dommage si l'action n'est pas intentée en temps utue, ou si elle est retirée ou rejetée ». Cette disposition permet au juge, par exemple, de rendre le requérant responsable du dommage s'il n'intente pas l'action en temps utile, quand bien même, en soi, l'action serait fondée en droit. C'est là, semble-t-il, une solution non justifiée. Seule doit être déterminante la question de savoir si le requérant avait ou non envers la partie adverse une prétention de droit matériel (résultant d'une violation du brevet, etc.). Si tel est le cas, il ne doit pas être tenu pour responsable.

Dans le cas contraire, le requérant sera, par
principe, tenu pour responsable, même si en requérant les mesures provisionnelles il croyait de bonne foi avoir contre la partie adverse une prétention de droit matériel. De toute façon, cette solution sera moins injuste que celle qui oblige la partie adverse à supporter elle-même le dommage qu'elle a subi et qui n'est pas justifié par une prétention de droit matériel du requérant. Le fait que les mesures provisionnelles sont ordonnées par le juge ne peut rien changer à cela.

Le juge, en effet, n'ordonne pas les mesures provisionnelles d'office, mais sur requête et il doit, en le faisant, supposer exactes les déclarations faites par le requérant. TTne certaine marge d'appréciation ne eera laissée au juge, conformément à la proposition faite par la commission des experts, qu'en

1025 ce qui concerne la fixation du montant de l'indemnité. Elle lui permettra de tenir compte de toutes les circonstances du cas, notamment de l'attitude réciproque adoptée par les deux parties.

2e alinéa : De même que le prévoit l'article 12, 2e alinéa, de la loi sur Ja concurrence déloyale, l'action en dommages-intérêts sera prescrite au bout d'une année. IL importe cependant de fixer aussi le point de départ de ce délai. Sera déterminant le moment où les mesures provisionnelles seront tombées. Cette solution tient compte des cas possibles où un procès n'est pas du tout engagé et de ceux où les mesures provisionnelles sont révoquées avant la fin du procès qui doit décider de l'existence d'une prétention de droit matériel.

3e alinéa : Pas de remarques.

Chapitre 3 Dispositions spéciales à la protection de droit pénal Art. 101 (violation du brevet) lei alinéa : 1. Les délits poursuivis sur plainte, traités par la loi actuelle dans deux articles différents (art. 39 et 46, 3e al.), sont soumis dans le présent projet à la même sanction pénale. Par conséquent, celui qui fera disparaître illicitement le signe du brevet sera passible non seulement de l'amende, comme jusqu'ici, mais encore de l'emprisonnement. Il ne peut en résulter cependant aucune difficulté sérieuse ; n'étant nullement obligé de prononcer l'emprisonnement, le juge pourra s'en tenir à l'amende.

2. Etant donné l'article 18,1er alinéa, du code pénal, il pourrait sembler superflu de dire expressément que l'intention est requise. II convient cependant de répéter ici cette disposition importante, à l'usage des profanes et des lecteurs étrangers de la loi, qui ne sont pas familiarisés avec le texte du code pénal. La proposition a été faite de punir également les négligences grossières; elle a cependant été repoussée par la commission des experts.

3. En ce qui concerne le cadre de la peine, la durée maximum de l'emprisonnement a été fixée comme jusqu'ici à une année. En revanche, le montant maximum de l'amende a été porté de 10 000 à 20 000 francs, pour tenir compte de la dévaluation de l'argent intervenue depuis 1907.

La possibilité de cumuler l'emprisonnement et l'amende résulte de l'article 50, 2e alinéa, du code pénal. Il n'est donc pas nécessaire de la prévoir ici. Le montant des amendes sera échu aux cantons, en vertu de l'article
253 de la loi fédérale sur la procédure pénale, et il n'est pas nécessaire non plus de le dire spécialement ici. Enfin, une disposition concernant la conversion de l'amende impayée en arrêts est également superflue, vu l'article 49, chiffre 3, du code pénal.

1026 2e alinéa : En dérogation à l'article 29 du code pénal, le délai pour porter plainte a été fixé à six mois, afin de permettre en particulier aux étrangers titulaires d'un brevet de disposer d'un temps suffisant pour donner leurs instructions au mandataire chargé de l'action pénale. La commission des experts, dans sa majorité, aurait voulu augmenter encore ce délai; les six mois proposés ici devraient cependant suffire.

Du consentement de la commission des experts, le texte de la loi ne se prononcera pas sur la question de savoir si, outre le titulaire du brevet, la personne qui est au bénéfice d'une licence exclusive doit avoir le droit de porter plainte; il appartiendra au juge d'en décider, en tenant compte de toutes les circonstances du cas.

Art. 102 (allusion fallacieuse à l'existence d'une protection) Par rapport à l'article 46 de la loi actuelle, les éléments constitutifs de l'infraction ont été précisés, en ce sens que l'intention est expressément requise, eu égard à l'article 333, 3e alinéa, du code pénal, et que le simple fait de « munir » la marchandise de la fausse mention ne constitue pas encore l'infraction; celle-ci sera seulement donnée par la mise en vente ou en circulation (intentionnelle) de la marchandise munie de la fausse mention. D'autre part, il sera indifférent que l'auteur ait ou n'ait pas apposé lui-même la fausse mention. Le revendeur, qui sait que la mention apposée sur la marchandise par le fabricant est fausse, sera donc punissable lui aussi.

De même qu'à l'article 101, le montant maximum de l'amende a été doublé par rapport à la loi actuelle.

Comme jusqu'ici, la tentative et la complicité ne seront pas punissables (voir art. 104, 1" al., CPS).

Art. 103 (application du code pénal) Cette disposition ne serait pas indispensable non plus, eu égard à l'article 333 du code pénal. Elle a cependant été reprise ici, par égard, encore une fois, pour les lecteurs étrangers de la loi, En vertu de cette disposition, seront en particulier applicables dans la poursuite pour violation d'un brevet: a. Concernant la forme de la culpabilité: les articles 18 à 20, donc en particulier l'article 19 (infraction commise à la suite d'une erreur); les conséquences pénales que le droit commun attache à l'erreur ne doivent pas être différentes en matière de droit relatif aux brevets d'invention ; b. Concernant la tentative: les articles 21 à 23;

1027 c. Concernant la participation (art. 24 et 25), il y a lieu de rappeler cependant qu'en vertu de l'article 85, lettre d, en liaison avec l'article 101, l'instigation aussi bien que la complicité constituent des délits indépendants et que la complicité est en principe punissable de la même peine que le délit principal; d. Concernant la plainte : les articles 28 à 31, avec cependant les exceptions suivantes: Le délai pour porter plainte est de sis mois, conformément à l'article 101, 2e alinéa. En outre, l'instigation et la complicité étant des délits indépendants, le lésé aura le droit de poursuivre uniquement l'instigateur ou le complice et de s'abstenir d'actionner l'auteur de la violation du brevet; e. Concernant le cumul de l'emprisonnement et de l'amende : l'article 50 ; /. Concernant la récidive : l'article 67 ; g. Concernant la prescription : les articles 70 à 75 (5 ans, au maximum 7% ans à partir du moment où l'infraction a été commise).

Art..104 (for)

.

Contrairement à la loi actuelle (art. 42, 2e al.), le projet ne prévoit pas, outre le for du lieu où l'auteur a agi, celui du domicile du délinquant.

Il concorde en cela avec le code pénal (art. 346), II déroge en revanche aux dispositions du code pénal en déclarant compétente aussi l'autorité du lieu où le résultat s'est produit. Selon l'article 346, 1er alinéa, du code pénal, cette dernière autorité n'est compétente que si le lieu où l'auteur a agi est situé à l'étranger (voir à ce sujet ATF 68, IV, 54). La commission des experts a jugé que cette dérogation au code pénal était nécessaire, afin de permettre de choisir, entre deux juges, celui qui possède le plus d'expérience dans ce domaine spécial.

La disposition réglant la priorité en cas de concours de fors différents concorde avec les articles 346, 2e alinéa, et 349, 2e alinéa, du code pénal; elle a dû cependant être répétée ici, les articles 346 et 349 ne figurant pas dans la partie générale du code pénal déclarée applicable par l'article 103 du projet.

Il en est de même de la disposition contenue au 2e alinéa, concernant le for de la poursuite des instigateurs et complices (voir l'art. 349, 1er al., CPS). Rappelons à nouveau que l'instigation et la complicité sont traitées en délits indépendants. Cette disposition ne sera donc applicable que dans les cas où le lésé porte plainte à la fois contre l'auteur principal et contre l'instigateur ou le complice. En revanche, si la plainte est dirigée uniquement contre l'instigateur ou le complice, le for sera réglé par le 1er alinéa.

1028

Art. 105 (compétence des autorités cantonales) 1 alinéa : Etant donné l'article 247, 1er alinéa, de la loi fédérale sur la procédure pénale, il importe de constater expressément que la poursuite pénale incombe aux cantons.

2e alinéa : II existe un arrêté du Conseil fédéral, renouvelé tous les cinq ans, et réglant la communication, au ministère public fédéral, des décisions prises par les autorités cantonales en matière pénale. Doivent être communiquées, entre autres, les décisions prises en vertu de la loi sur les brevets d'invention. L'expérience a montré cependant que cet arrêté est facilement oublié et il est justifié de prévoir cette même obligation dans la loi elle-mémo, SI

Art. 106 (exception de la nullité du brevet) _7er alinéa : Sauf dans des cas très simples, la procédure pénale ne convient guère pour examiner l'exception de la nullité du brevet. Il paraît donc indiqué de donner au juge pénal la possibilité de se décharger de cette tâcbe. Il pourra donc fixer aux parties un délai pour intenter action devant le juge civil, et suspendre la procédure pénale. L'autorité chargée de l'instruction pénale appréciera si elle veut se prononcer elle-même sur l'exception de nullité ou si elle veut fixer aux parties un délai pour intenter action devant le juge civil; elle appréciera de même, dans ce dernier cas, si elle veut assigner le rôle de demandeur au dénonciateur ou à l'inculpé.

Elle se fondera pour ce faire sur les indices, fournis jusque-là par les parties, concernant l'existence de causes de nullité, l'existence d'éléments constitutifs de la violation du brevet ou le caractère intentionnel de l'infraction.

Le cas échéant, elle tiendra compte aussi de la situation financière des parties ; elle pourra par exemple impartir à un titulaire de brevet financièrement fort un délai pour intenter l'action en constatation de la validité du brevet, plutôt que d'obliger un petit artisan à intenter l'action en nullité.

2e alinéa: II est d'expérience qu'un procès civil peut dans certaines conditions durer très longtemps avant d'aboutir à un jugement définitif.

Il importe donc de veiller qu'entre temps l'action pénale ne se prescrive point. L'article 72, chiffre 2, 2e alinéa, du code pénal prévoit un délai maximum de prescription même en cas d'interruption de la prescription et il est possible que ce délai maximum se montre lui-même trop court.

C'est pourquoi le projet prévoit non pas une interruption, mais une suspension de la prescription. Ainsi, la prescription cessera de courir, de toute façon, jusqu'au moment où le jugement civil sera rendu et devenu définitif.

A partir de ce moment, la prescription continuera à courir pour la partie du délai non encore écoulée lors de la suspension de la procédure pénale.

3e alinéa, : Si lo délai pour intenter l'action est imparti à l'inculpé, celui-ci devrait, selon l'article 95, lettre b, actionner le titulaire du brevet

1029 au domicile de ce dernier. S'il appartient au titulaire du brevet d'intenter l'action en constatation de la validité de son brevet, le juge compétent sera celui du domicile de l'inculpé (art. 95, lettre a ; le for du lieu où « l'acte a été commis » ou du lieu où « le résultat s'est produit » n'entre pas en ligne de compte ici). De son côté, la procédure pénale a été introduite au lieu où l'auteur a agi ou au lieu où le résultat s'est produit. Ce lieu ne sera pas nécessairement identique à celui du domicile du titulaire du brevet, ni à celui du domicile de l'inculpé. Les deux parties ont cependant un intérêt manifeste à pouvoir mener les deux procès au même endroit (dans un même canton), bien que devant des juges différents, et à ne pas être obligées de procéder ou de constituer un mandataire dans deux cantons différents. De là, la disposition prévue au 3e alinéa.

TITRE FESTAL DISPOSITIONS D'EXÉCUTION ET TRANSITOIRES Art, 107 (entrée en vigueur) el

l

alinéa, : Pas de remarques.

e

2 alinéa : La loi sur les droits de priorité est abrogée en tant seulement qu'elle se rapporte aux brevets d'invention. Les dispositions relatives aux droits de priorité pour le dépôt des dessins et modèles industriels sont maintenues, jusqu'à ce qu'elles soient elles-mêmes reprises dans une nouvelle loi, revisée, sur les dessins et modèles industriels.

Même après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, les dispositions de l'ancien droit resteront applicables dans certains cas, dont il est question aux articles 110 et 114; il importe donc de faire une réserve à ce sujet.

Art. 108 (mesures d'exécution) L'énumération contenue au 2e alinéa ne serait en soi pas nécessaire.

Il peut être indiqué cependant de mentionner expressément, à titre d'exemples, ces cas où la compétence du Conseil fédéral est réservée.

3e alinéa : H n'est pas possible de calculer par avance et de façon sûre, d'une part les frais qu'entraînera la nouvelle organisation et, d'autre part, les recettes que le bureau retirera de la nouvelle réglementation des taxes. On en est réduit à des estimations, qui pourront être démenties par les faits. Cependant, étant donné l'état actuel des finances fédérales, il importe de veiller à ce que la nouvelle organisation n'impose pas à la Confédération un excédent constant de dépenses. H importe donc de réserver la possibilité d'adapter les taxes aux dépenses, par la voie d'un arrêté du Conseil fédéral.

Feuille fédérale. 102e année. Vol. I.

71

1030 Selon l'habitude, les principaux organismes des milieux intéressés à la protection des brevets d'invention auront l'occasion de se prononcer sur les mesures d'exécution envisagées par le Conseil fédéral.

Art. 109 (introduction par étapes de l'examen préalable) II ne sera pas possible, au moment même où la nouvelle loi pourra entrer en vigueur, de mettre à la disposition du bureau de la propriété intellectuelle le personnel et la documentation nécessaires à un examen préalable appliqué à toutes les demandes de brevet. D'autre part, renvoyer l'entrée en vigueur de la loi jusqu'au moment où tous ces préparatifs seront terminés équivaudrait à un renvoi à une date indéfinie. Il est dès lors indispensable de prévoir une réglementation transitoire. Cette transition peut être assurée en ce sens que l'examen préalable ne sera d'abord institué que pour un domaine relativement restreint de la technique; dans la mesure où le personnel nécessaire pourra être augmenté, il s'étendra peu à peu à d'autres domaines de la technique, jusqu'à les englober finalement tous.

On prévoit que l'examen préalable sera appliqué pour commencer aux inventions actuellement encore exclues de la protection selon l'article 2, chiffre 4, de la loi actuelle, mais qui seront brevetables selon le projet.

Comme il a déjà été dit plus haut (p. 965), une grande partie des représentants de l'industrie suisse du textile n'ont consenti à l'abrogation du paragraphe dit textile qu'à la condition que l'examen préalable fût en même temps introduit pour le domaine qui les concerne. On peut estimer à 15 personnes environ l'augmentation du personnel, technique et administratif, que nécessitera l'institution de l'examen préalable dans ce secteur.

Aucune place n'étant plus disponible au bureau de la propriété intellectuelle, il faudra mettre à la disposition de cette institution partielle, jusqu'au moment où le bureau disposera de son propre bâtiment, d'autres locaux administratifs de la Confédération (y compris les locaux nécessaires aux débats, etc.).

Pour les autres inventions seront applicables, durant la période transitoire qui précédera l'introduction de l'examen préalable, les dispositions de la nouvelle loi, avec les modifications que le Conseil fédéral fixera dans une ordonnance spéciale. Il s'agira essentiellement de remplacer les
dispositions du titre deuxième, chapitre 3, relatives à l'examen de la demande de brevet (art. 67 à 78), par des dispositions analogues à celles de l'article 27 de la loi actuelle et aux dispositions d'exécution prises en vertu de cet article ; en outre, les annuités devront être fixées conformément aux taux prévus par l'article 110, lettre d. On envisage aussi d'instituer ce qu'on a appelé la procédure d'opposition, comme premier degré de l'examen préalable (voir à ce sujet les remarques faites dans l'introduction, à la p. 946).

1031 Art. 110 (passage de, l'ancien au nouveau droit) En principe, les brevets délivrés sous l'empire de l'ancien droit, et qui ne seront pas encore tombés en déchéance au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, seront également soumis aux dispositions de la nouvelle loi. Il y a lieu cependant de prévoir les exceptions suivantes: 1. Les conditions de la brevetabilité ne sont pas identiques dans les deux lois (voir les remarques faites à l'art. 2). Le brevet délivré sous l'empire de l'ancien droit pour une invention exclue de la protection selon l'ancien article 2 devra pouvoir être attaqué, même si l'invention devait être brevetable selon la nouvelle loi ; sinon, ce serait donner à cette dernière, par ce détour, un effet rétroactif qui n'aurait pas été voulu.

2. Les situations juridiques acquises valablement sous l'empire de l'ancien droit, mais qui ne correspondent plus aux dispositions de la nouvelle loi, devront être respectées, mais non pas renforcées. C'est pourquoi la durée du brevet continuera, dans un cas de ce genre, à être régie par l'ancien droit.

3. Il n'y a guère d'intérêt suffisant à déclarer applicables aux brevets déjà délivrés les dispositions relatives à la mention de l'inventeur.

4. Bien qu'en général les brevets délivrés n'occasionnent plus aucun travail pour l'administration, le projet prévoit pour eux aussi, étant donnée la dévaluation de l'argent intervenue depuis 1907, une augmentation modeste des annuités, du moins pour les 11e à 15e années (il faudra payer pour la 15e année 225 fr. au lieu de 160 comme jusqu'ici). Pour les trois dernières années dues à la prolongation de la durée de protection, il prévoit dea taux qui correspondent à la progression actuelle et qui peuvent être encore considérés comms modestes.

Art. 111 (demandes de brevet pendantes) Après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, aucun brevet ne devra plus être délivré si les conditions prévues par le nouveau droit ne sont pas remplies. C'est pourquoi, les demandes de brevet qui se rapporteront à des inventions brevetables selon l'ancien droit, mais non d'après la nouvelle loi, devront être rejetées, même si elles ont été déposées avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

Dans le cas inverse, où l'invention n'était pas brevetable selon l'ancien droit, alors qu'elle l'est d'après le nouveau
(ce qui sera le cas, par exemple, après l'abrogation du paragraphe textile), la première solution à envisager serait de rejeter la demande avant même que la nouvelle loi entrât en vigueur, quitte au déposant à faire un nouveau dépôt après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Cette solution serait cependant difficilement réalisable en pratique. Elle obligerait le bureau à prendre eu mains, avant même que la nouvelle loi entrât en vigueur, tout le stock des demandes

1032 en suspens, pour rechercher celles d'entre elles qui seraient dans le cas envisagé ici, laissant aux intéressés le soin de déposer le cas échéant une nouvelle demande, une fois la nouvelle loi entrée en vigueur. Le bureau ne serait pas en mesure de faire ce travail en temps utile. C'est pourquoi le 2e alinéa, prévoit que les demandes de ce genre pourront être maintenues, à condition que leur date de dépôt soit reportée au jour de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Ainsi, le résultat sera pratiquement le même que si ces demandes étaient déposées au jour de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Il faut s'attendre cependant à un assez grand nombre de demandes semblables, qui recevront toutes la même date de dépôt. Il importe par conséquent de fixer le rang que ces demandes auront les unes par rapport aux autres. A ce point de vue, niais à ce point de vue seulement, la date du dépôt effectif sera déterminante. Si, pour l'une de ces demandes, la priorité dérivée d'un dépôt à l'étranger peut être invoquée, le rang sera déterminé par la date de priorité. En revanche, pour fixer l'état de la technique qui doit décider de la nouveauté de l'invention et pour apprécier le progrès technique réalisé, la date la plus ancienne qui pourra entrer en ligne de compte sera celle de l'entrée en vigueur de la loi et non pas l'éventuelle date antérieure du dépôt effectif de la demande, ni même la date d'une priorité éventuelle ; sinon, ce serait à nouveau donner à la loi un effet rétroactif qui n'aurait pas été voulu. Illustrons ces règles par un exemple, dans lequel nous supposerons que la nouvelle loi entre en vigueur le 1er janvier 1951, et que toutes les demandes de brevet concernent la même invention, appartenant au domaine dont il est question à l'article 2, chiffre 4, de la loi actuelle: lre demande déposée le 1er janvier 1951.

2e » » » 1er janvier 1951, avec revendication d'une priorité, du 1er mars 1950.

e 3 » » » 1er octobre 1950, avec revendication d'une priorité, du 1er mai 1950.

e 4 » » » 1er avril 1950.

a. Pour toutes les quatre demandes, le 1er janvier 1951 sera déterminant pour fixer l'état de la technique.

6. La demande n° 2 aura le pas sur les demandes n° 1, 3 et 4, c. La demande n° 4 aura le pas sur les demandes n° 1 et 3.

d. La demande n° 3 aura le pas sur la demande n° 1.

Art. 112
(passage, à l'examen préalable) Les brevets délivrés après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, mais sans examen préalable, resteront soumis au régime en vigueur lors de leur délivrance, même si dans la suite l'examen préalable est introduit pour

1033 le domaine technique auquel ils appartiennent. En particulier, l'échelle des annuités moins élevée continuera a leur être applicable.

Art. 113 (demandes de, brevet) Pas de remarques Art. lia (responsabilité civile et pénale) Cet article traite des cas où la loi en vigueur lors de l'accomplissement d'un acte ne l'est plus au moment où le même acte vient à être jugé. Il convient de distinguer selon que la responsabilité encourue par l'auteur de l'acte est civile ou pénale. En principe, le droit en vigueur au moment de l'accomplissement de l'acte est applicable. En matière pénale, le droit applicable sera toutefois celui qui est le plus favorable à l'auteur (voir art. 2 GPS).

Art. 115 (recours de droit administratif) Selon l'article 99, chiffre I, lettre a, de la loi d'organisation judiciaire, « les décisions du bureau fédéral de la propriété intellectuelle en matière de brevets » peuvent être portées devant le Tribunal fédéral par la voie du recours de droit administratif. 11 faudra en excepter dorénavant les décisions prises par les sections des recours durant la procédure d'examen (voir les remarques faites à l'art. 54).

La question qui se pose encore est celle de savoir comment il conviendra de régler l'instance de recours dans les cas où l'examen préalable ne sera pas appliqué, conformément à l'article 109. Deux solutions peuvent être envisagées: ou bien admettre ici aussi le recours jusque devant la section des recours, ou alors maintenir le recours de droit administratif au Tribunal fédéral. Bien que la première solution puisse se justifier aussi (le Tribunal fédéral lui-même lui a donné la préférence), c'est la deuxième que l'on envisage d'adopter. Tant que le système actuel d'examen doit être maintenu, il convient de ne rien changer non plus aux voies de recours.

G. Postulats en relation avec la revision de la loi sur les brevets d'invention Un postulat Speiser, du 27 mars 1946, adopté par le Conseil national le 12 juin 1946, invite le Conseil fédéral à examiner s'il n'y aurait pas lieu de créer les bases légales nécessaires à. l'institution d'une cour fédérale des brevets, comprenant des techniciens. Veuillez vous reporter à ce sujet aux remarques faites dans l'introduction, sous lettre E, chiffre 1, p. 949.

Un postulat Perrin, du 19 septembre 1949, adopté par le Conseil national le 22 mars 1950, invite le Conseil fédéral à présenter un rapport sur la question de l'adhésion de la Suisse à l'accord, conclu à La Haye le 6 juin

1034 1947 et entré en vigueur le 10 juin 1949, relatif à la création d'un bureau international des brevets. Veuillez voir à ce sujet les remarques faites à la page 944, sous lettre c.

H. Remarques finales On ne s'est pas contenté, dans le présent projet, de donner à la loi sur les brevets d'invention une forme qui corresponde mieux aux besoins actuels, tout en maintenant le système actuel d'examen. On propose en même temps une réforme du système d'examen qui non seulement entraînera des frais considérables, mais exigera en outre une forte augmentation du personnel du bureau de la propriété intellectuelle. Il peut y avoir là de quoi surprendre, en un temps où la Confédération a le devoir d'observer la plus stricte économie et, en particulier, de poursuivre ses efforts en vue de réduire son appareil administratif. Aussi, ce n'est pas à la légère que nous avons passé outre à ces scrupules. Si nous avons pu finalement nous résoudre à vous soumettre ce projet, c'est sur la recommandation claire et catégorique de la commission des experts et dans l'idée que le bureau, même agrandi, pourra selon toute probabilité se subvenir à lui-même. Les raisons que nous avons avancées dans l'introduction en faveur de l'examen préalable justifient à notre avis d'accepter aussi, malgré tout, ce voeu.

Nous avons l'honneur, par conséquent, de vous recommander d'adopter le projet de loi ci-annexé, et saisissons cette occasion pour vous assurer, Monsieur le Président et Messieurs, de notre haute considération.

Berne, le 25 avril 1950.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Max PETITPIERRE Le chancelier de la Confédération, LEIMGBTJBER

1035

TABLEAU I

Brevetabilité, dans la législation étrangère, des substances chimiques, des remèdes et des aliments, ainsi que de leurs procédés de fabrication (Etat à fin 1949) Substance» chimiques Substance

Etats-Unis d'Amérique . , Grande-Bretagne Italie

Pays-Bas Suède Tchécoslovaquie URSS

. . . .

non non oui oui oui oui oui oui(**) non oui non non non oui non non non.

Prooédé

oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui

Bemêdes Substance

non non non oui(*) non oui non oui(**) non non non non non non non non non

(") Si la substance est obtenue par un procédé chimique(**) Eu tant que la substance est obtenue par un procédé brève table.

Piooédé

oui oui oui oui oui oui oui oui oui non non oui oui oui oui oui oui

Alimenta Substance

non non non oui(*) non oui oui oui(**) non oui non non non non non non non

Procédé

oui oui oui oui non oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui

1036

TABLEAU II

Brevets maintenus jusqu'à la fin de la durée légale de protection

1938

1946

1946

1947

1948

1949

49 3

356

164 2

69 3

67

41 g

10

g 1

1

1

4

3 1

2

3

20 1

36

38

1 73

67

8 26 1 5

25 24 1 7

28 33 3 3

A, Titulaires domiciliés à l'étranger :

6 4. Brésil 5* Canada 6. Danemark , . .

7 . Efirvute . . . . . . , . , .

9. Etats-Unis d'Amérique . . .

10. Finlande

1 6 . Liechtenstein 17. Luxembourg 18. Norvège 10. Pays-Bas 20. Pologne 21. Suède 2 3 Yougoslavie

5 10

1 2 22

4

1 3

53 27 1

0

1

41 54 4 11 2

. . , . . . , 1 1

4 4

. . . . . . .

20

2

12 15

14. Italie

9 15

1 21

3 13

15 4

27

15

3

5

1

2 8

7

21 10

2 13 1 15 6

1

Total de l'étranger

127

492

300

57

159

176

243 222

285 242

290

B. Titulaires domiciliés en Suisse

184

«Si

476

4fiS

!Î27

fil 2

Total

322

1037

TABLEAU III Durée de protection à l'étranger (Etat à fin 1949) La durée de protection est dans les pays suivants de: a. 10 ans à compter de la délivrance du brevet : Pérou.

6. 12 ans à compter de la délivrance du brevet : Equateur.

c. 15 ans à compter du dépôt de la demande : Bulgarie Chine Grèce Italie Maroc (zone française) Roumanie U.R.S.S.

d. 15 ans à compter de la publication de la demande : Japon Tchécoslovaquie.

e. 15 ans à compter de la délivrance du brevet : Argentine Bolivie Brésil Guatemala Irak Panama Paraguay Pologne Portugal Yougoslavie.

/. 16 aux à compter du dépôt de la demande : Grande-Bretagne

1038 g. 16 ans à compter de la délivrance du brevet : Australie.

h. 17 ans à compter du dépôt de la demande : Danemark Norvège Suède i. 17 ans à compter de la délivrance du brevet : Canada Cuba Etats-Unis d'Amérique Philippines.

Je. 18 ans à compter du dépôt de la demande : Allemagne.

l. 18 ans à compter de la publication de la demande.

Autriche.

m. 18 ans à compter de la délivrance du brevet : Pays-Bas.

n. 20 ans à compter du dépôt de la demande : Belgique Finlande France Hongrie.

o. 20 ans à compter de la délivrance du brevet : Espagne Luxembourg

1039

TABLEAU IV Protection accordée en Suisse aux étrangers (Répartition des demandes et des brevets selon le domicile du déposant au moment du dépôt de la demande ou de la délivrance du brevet) Brevets délivrés

Demandée déposées

1933 1934 1935 1936 1937 1938 1939 1940 1941 1942 1943 1944 1945 1946 1947 1948 1949

Total

Suisse

%

Etranger

%

Total

Suisse

%

Etranger

%

8294 8538 7637 7879 9911 9032

4214 4338

51

4080 4180 3518 3693 5436 4644 4054 2760 3895 4878 5553 5664 2929 4443 6186 4638 5398

49 49

7082 7871 7448 6822 6447 7180 5960 4866 5818 6282 5339 5508 4626 5850 6052 6552 6991

3298 3806 3567 3229 3060 3163 2667 2184 2669 \ 2797 2332 2308 2741 3828 4087 3825 3556

46 48 48 47 47 44 45 45 46 45

3784 4065 3881 3593 3387 4017 3293 2682 3149 3485 3007 3200 1885 2022 1965 2727 3435

54 52 52 53 53 56 55

7 663 5978 7631 9248 10021 10726 8733 10650 12232 10027 11334

4119 4186 4475 4388 3609

3218 3736 4370 4468 5062 5804 6207 6046 5389 5936

51 54 53 45

49 47 54

49 47 45 47

66 58 49 54 52

46 47 55 51

53 46

51 53 55 53

34 42 51

46 48

44 42

59 65 68 58 51

55 54 55 56 58

41 35 32 42 49

1040 (Projet) (Les chiffres indiqués entre parenthèses se rapportent aux articles correspondants de la loi actuelle)

LOI FÉDÉRALE SUR LES BREVETS D'INVENTION

L'Assemblée, fédérale de la Confédération suisse, vu l'article 64 de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 25 avril 1950, arrête : TITRE PREMIER Dispositions générales

Chapitre premier Conditions requises pour l'obtention du brevet et effets du brevet A» Conditions générales requises pour l'obtention du brevet

B. Inventions non brevetables

Article premier (1er, 3) Les brevets d'invention sont délivrés pour les inventions nouvelles utilisables industriellement.

2 Les brevets sont principaux ou additionnels.

3 Ils sont délivrés sans garantie de l'Etat.

1

Art. 2 (2) Ne peuvent être brevetées : 1° Les inventions dont l'exploitation serait contraire aux lois ou aux bonnes moeurs; 2° Les inventions de remèdes et les inventions de procédés non chimiques pour la fabrication de remèdes; 3° Les inventions d'aliments, de denrées fourragères et de boissons; 4° Les inventions de substances chimiques, en tant qu'elles ne sont pas déjà exclues de la protection par Ics chiffres 2 et 3 ; cette disposition ne s'étend pas aux alliages.

1041 Art. 3 Le droit à la délivrance du brevet appartient à l'inventeur, à son ayant cause ou au tiers à qui l'invention appartient à un autre titre.

2 Si plusieurs personnes ont fait ensemble une invention, ce droit leur appartient en commun.

3 Si la même invention a été faite par plusieurs personnes de façon indépendante, il appartient à celui qui peut invoquer un dépôt antérieur ou un dépôt jouissant d'une priorité antérieure.

1

Art. 4 Au cours de la procédure devant le bureau de la propriété intellectuelle, celui qui dépose la demande de brevet est considéré comme étant en droit de requérir la délivrance du brevet.

Art. 5 Le déposant doit donner par écrit au bureau de la propriété intellectuelle une désignation exacte de l'inventeur, avant la, publication de la demande de brevet (art. 69), 2 La personne désignée par le déposant sera mentionnée comme inventeur au registre des brevets, dans la publication relative à la délivrance du brevet et sur l'exposé d'invention.

3 Le 2e alinéa est applicable par analogie lorsqu'un tiers produit un jugement exécutoire établissant que c'est lui qui est l'inventeur et non pas la personne désignée par le déposant.

1

Art. 6 Les mesures prescrites par l'article 5, 2e alinéa, ne seront pas prises si l'inventeur désigné par le déposant y renonce.

2 La renonciation de l'inventeur à être mentionné comme tel restera sans effet si elle ne se rapporte pas à une invention déterminée.

1

Art. 7 (4) Sera réputée nouvelle l'invention qui, avant le dépôt de la demande de brevet, a. N'aura pas été divulguée en Suisse de manière à pouvoir être exécutée par l'homme du métier, ou b. N'aura pas été exposée dans des publications, par l'écrit ou par l'image, de manière à pouvoir être exécutée par l'homme du métier.

1

C. Droit à la délivrance du brevet I. Principe

II. En OOUIB d'examen

D, Mention de l'inventeur I. Droit de l'inventeur

II. Eononoiation à la mention

E. Nouveauté de l'ïuvflntion

1042 2 Sont réservées les dispositions relatives à la priorité dérivée d'un dépôt antérieur et à la priorité dérivée de l'exposition de l'invention.

F. Effets du brevet

G. Brevet additionnel I. Conditions

IL Transformation en brevet prinflipal

Art. 8 (7, 1er et 2<> al.)

Le brevet confère à son titulaire le droit exclusif d'utiliser l'invention professionnellement.

2 Outre l'emploi et l'exécution de l'invention, l'utilisation comprend notamment la mise en vente, la vente et la mise en circulation.

3 Si l'invention se rapporte à un procédé, les effets du brevet s'étendent aux produits directs du procédé.

1

Art. 9 (14, 1« et 3e al.)

Le titulaire d'un brevet principal peut obtenir un brevet additionnel pour toute invention d'un perfectionnement ou de tout autre développement de l'invention définie dans une revendication du brevet principal; pour ce brevet additionnel, il ne sera pas perçu d'annuités; seules seront exigées la taxe de dépôt et la taxe de publication.

2 Le brevet additionnel suit de plein droit le brevet principal; sont réservées les dispositions relatives à la transformation des brevets additionnels en brevets principaux et à l'action en cession.

1

Art. 10 (15, 1« al., 1TM et 2e phrases; 21, 2e al.)

Le brevet additionnel peut être transformé en tout temps en brevet principal, sur requête du titulaire.

2 Si plusieurs brevets additionnels sont subordonnés à un même brevet principal, et que l'un d'entre eux soit transformé en brevet principal, les autres brevets additionnels, ou quelques-uns d'entre eux, ou encore de nouveaux brevets additionnels pourront, dans les conditions énoncées à l'article 9, 1er alinéa, être subordonnés au nouveau brevet principal.

3 Si le brevet principal est déclaré nul ou si, par jugement ou par renonciation partielle, il est limité de telle sorte que le brevet additionnel ne pourrait plus être délivré, le bureau de la propriété intellectuelle, une fois la modification inscrite au registre des brevets, impartit au titulaire du brevet un délai de trois mois pour demander la transformation du brevet additionnel en brevet principal, avec ou sans subordination de brevets addiliumiols déjà existants; si ce délai n'est pas utilisé, le brevet additionnel tombe.

1

1043 Art. 11 (34, 35) 1

Les produits protégés par un brevet, ou leur emballage, peuvent être munis du signe du brevet, qui se compose de la croix fédérale et du numéro du brevet.

2 Le titulaire du brevet peut exiger de ceux qui ont le droit d'utiliser son invention, en vertu d'un usage antérieur ou d'une licence qu'ils apposent le signe du brevet sur les produits qu'ils fabriquent ou sur leur emballage.

H. Références à l'existence d'une protection I. Signe dn brevet

3

S'ils ne se conforment pas à la demande du titulaire du brevet, ils répondent envers lui du dommage qui en résulte, sans préjudice du droit du titulaire du brevet d'exiger l'apposition du signe.

Art. 12 1

Celui qui met en circulation ou en vente ses papiers de commerce, annonces de toutes sortes, produits ou marchandises en les revêtant d'une autre mention relative à l'existence d'une protection est tenu d'indiquer à tuuto personne qui lui eu fera la, demando lo numéro de la demande de brevet ou du brevet auxquels se réfère la mention.

2 Celui qui accuse des tiers de porter atteinte à ses droits ou qui les met en garde d'y porter atteinte devra, sur demande, donner le même renseignement.

II. Autres références

Art. 13 (24) 1

Celui qui n'a pas de domicile en Suisse doit, pour demander la délivrance d'un brevet et faire valoir les droits découlant du brevet, avoir un mandataire établi en Suisse.

J, Domîûild à l'étranger

2

Le mandataire représente le déposant ou le titulaire du brevet dans les procédures engagées conformément à la présente loi devant les autorités administratives et devant le juge; sont réservées les dispositions réglant l'exercice de la profession d'avocat.

Art. 14 (10; 15, 1er al., dernière phrase) 1

Le brevet principal dure au plus jusqu'à l'expiration de dixhuit ans à compter de la date du dépôt de la demande.

2

Le brevet principal issu de la transformation d'un brevet additionnel dure au plus jusqu'à l'expiration de dix-huit âne à compter de la date du dépôt du premier brevet principal.

K. Durée du brevet I. Durée maximum

1044

II. Déchéance prématurée

L. Héaerve en faveur des traités

Art. 15 (17, 1er al.; 21, 1« al.)

1 Le brevet principal expire: a. Lorsque le titulaire y renonce par une déclaration écrite adressée au bureau de la propriété intellectuelle; b. Lorsqu'une annuité échue n'est pas payée en temps utile.

2 Le brevet additionnel expire avec le brevet principal; sont r éservées les dispositions relatives à la transformation des brevets additionnels en brevets principaux.

Art. 16 Les titulaires de brevet de nationalité suisse peuvent invoquer les dispositions du texte, ratifié en dernier lieu par la Suisse, de la convention d'Union de Paris pour la protection de la propriété industrielle, lorsque ces dispositions sont plus favorables que celles de la présente loi.

Chapitre 2 Droit de priorité

A. Priorité dérivée d'un dépôt antérieur I. Conditions et effets

II. Qualité f. requise ^ pour laîre valoir lo droit de priorité

Art. 17 (loi prior. 1, 5) Les ressortissants des pays de l'Union internationale pour la protection de la propriété industrielle, qui ont régulièrement déposé pour leurs inventions, dans un pays de l'Union autre que la Suisse, une demande de brevet ou un modèle d'utilité, jouissent, pendant douze mois à partir de ce premier dépôt, d'un droit de priorité pour déposer en Suisse une demande de brevet pour les mêmes inventions.

2 Le droit de priorité a pour effet de rendre non opposables au dépôt les faits survenus depuis le premier dépôt.

3 Aucun droit dérivé d'un usage antérieur ne peut être acquis durant le délai mentionné au 1er alinéa.

1

Art. 18 (loi prior. 2; 3, 1er et 2° al.; 4) 1 Sont assimilés aux ressortissants des pays de l'Union les ressortissants d'autres pays, qui ont leur domicile ou un établissement industriel ou commercial dans un des pays de l'Union, ainsi que les ressortissants d'autres pays qui accordent la réciprocité à la Suisse.

2 Celui qui a acquis le droit appartenant au premier déposant de déposer en Suisse une demande de brevet pour la même invention peut faire valoir le droit de priorité même s'il n'est pas ressortissant ou ne peut être assimilé à un ressortissant d'un des pays de l'Union.

1045 3

Si le premier dépôt à l'étranger, le dépôt en Suisse ou l'un et l'autre ont été faits par une personne qui n'avait pas droit à la délivrance du brevet, l'ayant droit peut se prévaloir de la priorité dérivée du premier dépôt.

Art. 19 (loi prior. 6) 1 Celui qui veut se prévaloir d'un droit de priorité remettra au ni. Formalité bureau de la propriété intellectuelle, dans le délai de trois mois à partir du dépôt de la demande de brevet, une déclaration écrite indiquant la date et le pays du premier dépôt.

2 Le déposant présentera, dans le délai de six mois à partir du dépôt de la demande, une copie des pièces techniques jointes au premier dépôt; il produira en même temps une attestation, émanant de l'autorité qui aura reçu ce dépôt, sur la conformité de la copie et des pièces originales, avec certificat de la date du dépôt.

3 Si l'un ou l'autre de ces délais n'est pas observé, le droit à la priorité s'éteint.

Art. 20 (loi prior. 6, 3e al.)

1 La reconnaissance du droit de priorité au cours de la procédure iv. Fardeau en délivrance du brevet ne dispense pas lo titulaire du brevet de prou- eil "aaVo^raiùa ver, en cas de procès, l'existence de ce droit.

8 Le dépôt à l'étranger invoqué par le déposant est présumé être le premier qui ait été fait sur le territoire de l'Union internationale.

Art. 21 (loi prior. 7) Les ressortissants des pays de l'Union, qui ont exposé leurs B. Priorité inventions ou modèles d'utilité, en Suisse ou dans un autre pays d.unedée"position de l'Union, dans une exposition internationale officielle ou officielle- I. Conditions et effets ment reconnue, jouissent, pendant six mois à partir du jour de l'ouverture de l'exposition, d'un droit de priorité pour déposer en Suisse une demande de brevet pour les mêmes inventions ou modèles d'utilité.

2 Ce droit a pour effet de rendre non opposables au dépôt les faits survenus depuis le jour où l'objet du dépôt est arrivé sur la place de l'exposition; ces faits ne devront cependant pas remonter à plus de trois mois avant le jour de l'ouverture de l'exposition.

3 Aucun droit dérivé d'un usage antérieur ne peut plus être acquis à partir du jour entrant en ligne de compte selon le 2e alinéa.

1

Art. 22 (loi prior. 9, 1er al.)

1 Celui qui veut se prévaloir d'un droit de priorité selon l'article 21 remettra au bureau de la propriété intellectuelle, dans le délai de trois mois à partir du dépôt de la demande de brevet, une déclaration Feuille fédérale. 102e année. Vol. I.

72

II. Formalités

1046 écrite indiquant le nom et le siège de l'exposition, le jour de son ouverture et le jour où l'objet du dépôt est arrivé sur la place de l'exposition; si ce délai n'est pas observé, le droit à la priorité s'éteint.

2 A la demande de l'examinateur (art. 67), le déposant prouvera la véracité de cette déclaration.

111. Application de proscriptions relatives :1 lu priorité dérivée d'un dépôt antcriour

Art. 23 (loi prior. 7, 2e al. et 9, 3« al.)

Les prescriptions relatives à la qualité requise pour faire valoir le droit de priorité, et celles qui concernent le fardeau de la preuve en cas de procès, sont applicables par analogie à la priorité dérivée d'une exposition.

Chapitre 3 Modifications touchant à l'existence du brevet

A. Rcnonuiation partielle I. Conditions

II. Constitution de nouveaux brevets

Art. 24 (19) Le titulaire du brevet peut renoncer partiellement au brevet en demandant au bureau de la propriété intellectuelle : a. De supprimer une revendication (art. 60) ou une sous-revendication (art. 63) ; b. Ou de limiter une revendication en y réunissant une ou plusieurs sous-revendications ; c. Ou de limiter une revendication d'une autre manière, en tant que la revendication ainsi limitée se rapporte à la même invention et définit une forme d'exécution prévue aussi bien dans l'exposé d'invention qui a été publié que dans la description en possession du bureau à la date du dépôt de la demande de brevet.

Art. 25 S'il devait présenter de la sorte des revendications ou des sousrevendications qui ne sauraient coexister dans le même brevet, d'après les articles 61, 62 ou 63, le brevet sera limité en conséquence.

2 Le titulaire du brevet pourra demander, pour les revendications ou les sous-revendications ainsi éliminées, la constitution d'un ou de plusieurs brevets nouveaux, qui recevront comme date de dépôt celle du brevet initial.

3 Une fois la renonciation partielle inscrite au registre des brevets, le bureau de la propriété intallectuelle impartit au titulaire du brevet un délai de trois mois pour demander la constitution de nouveaux brevets coiiToriuéiuent au 2e alinéa ; passé ce délai, une telle requête ne sera plus admise.

1

1047 Art. 26 (16, 1er al.)

1

Sur demande, le Jjuge f prononcera la nullité du brevet : ° lo Lorsque les conditions fixées au Ier alinéa de l'article premier ne sont pas remplies; 2° Lorsque l'invention n'est pas brevetable selon l'article 2; 3° Lorsque l'invention n'est pas exposée, dans l'exposé d'invention, de manière à pouvoir être exécutée par l'homme du métier; 4° Lorsque la revendication, même à la lumière de la description, ne donne pas une définition claire de l'invention; 5° Lorsqu'un brevet valable a été délivré pour la même invention, par suite d'un dépôt antérieur ou d'un dépôt jouissant d'une priorité antérieure; 6° Lorsque le titulaire du brevet n'est ni l'inventeur, ni son ayant cause et qu'il n'avait pas droit non plus, à un autre titre, à la délivrance du brevet.

B. Action L causes "· Bullité

en nullité

2

Lorsqu'un brevet a été délivré avec reconnaissance de la priorité dérivée d'un dépôt à l'étranger, sans que cependant le brevet étranger ait été obtenu, le titulaire du brevet pourra être astreint à fournir, avec preuves à l'appui, tout renseignement sur les raisons pour lesquelles le brevet étranger n'a pas été délivré. S'il s'y refuse, le juge appréciera librement cette attitude.

Art. 27 (16, 2e al.)

1

Lorsque seule une partie de l'invention brevetée est entachée de nullité, le juge limitera le brevet en conséquence.

n. Nullité partielle

2

II donnera aux parties l'occasion de se prononcer sur la rédaction nouvelle qu'il entend donner à la revendication; il pourra en outre demander l'avis du bureau de la propriété intellectuelle.

3

L'article 25 est applicable par analogie.

Art. 28 (16, 3e al.)

Toute personne qui justifie d'un intérêt peut intenter l'action en nullité ; l'action dérivée de l'article 26, 1er alinéa, chiffre 6, n'appartient cependant qu'à l'ayant drqit.

ni. Qualité

1048 Chapitre 4 Modifications concernant le droit à la délivrance du brevet et le droit au brevet; octroi de licences A. Action en cession I. Conditions et effets envers les tiors

II. Cession partielle

III. Délai pour intenter action

B. Expropriation du brevet

Art. 29 (20, 1er et 2e al. ; 21, 3e al.)

Lorsque la demande de brevet a été déposée par une personne qui, selon l'article 3, n'avait pas droit à la délivrance du brevet, l'ayant droit peut demander la cession de la demande de brevet ou, si le brevet a déjà été délivré, en demander la cession ou intenter l'action en nullité.

2 Si le défendeur possède en outre des demandes de brevet additionnel ou des brevets additionnels et que le demandeur n'est pas en droit de demander qu'ils lui soient tous cédés, le juge pourra les attribuer à l'une ou à l'autre des parties, même sans la demande de brevet principal ou sans le brevet principal; en ce cas, l'article 10, 3e alinéa, est applicable par analogie.

3 Si le juge ordonne la cession, les licences ou autres droits accordés dans l'intervalle à des tiers tombent; ceux-ci pourront toutefois, lorsqu'ils auront déjà, de bonne foi, utilisé l'invention professionnellement en Suisse ou y auront fait à cette fin des préparatifs spéciaux, demander l'octroi d'une licence, moyennant une indemnité équitable, fixée en cas de litige par le juge.

4 Toutes demandes en dommages-intérêts restent réservées.

1

Art. 30 Lorsque le demandeur ne pourra justifier de son droit à l'égard de toutes les revendications et sous-revendications, le juge ordonnera la cession de la demande de brevet ou du brevet, en éliminant les revendications et les sous-revendications pour lesquelles le demandeur n'aura pas établi son droit.

2 En ce cas, l'article 25 est applicable par analogie.

1

Art. 31 (20, 3e al.)

L'action en cession doit être intentée dans les deux ans à compter de la date officielle de la publication de l'exposé d'invention.

2 L'action dirigée contre un défendeur de mauvaise foi n'est liée à aucun délai.

Art. 32 (23) 1 Lorsque l'intérêt public l'exige, le Conseil fédéral peut ordonner l'expropriation totale ou partielle du brevet.

2 L'exproprié a droit à une indemnité pleine et entière, fixée en cas de litige par le Tribunal fédéral; les dispositions du chapitre II 1

1049 de la loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation sont applicables par analogie.

Art. 33 (9) 1 Le droit à la délivrance du brevet et le droit au brevet passent aux héritiers; ils peuvent être transférés à des tiers, en tout ou en partie.

2 Lorsqus ces droits appartiennent à plusieurs, chaque ayant droit ne peut les exercer qu'avec le consentement des autres; chacun peut cependant, de façon indépendante, disposer de sa part et intenter action pour violation du brevet.

3 Les droits des tiers non inscrits au registre des brevets ne sont pas opposables à celui qui, de bonne foi, acquiert des droits sur le brevet.

Art. 34 (9) 1 Le déposant ou le titulaire du brevet peuvent autoriser des tiers à utiliser l'invention (octroi de licences).

2 Lorsque la demande de brevet ou le brevet appartiennent à plusieurs, une licence ne peut être accordée sans le consentement de tous les ayants droit.

3 Les licences non inscrites au registre des brevets no sont pas opposables à celui qui, de bonne foi, acquiert des droits sur le brevet.

C. Transfert du droit il la délivrance du brevet et du droit au brevet

D. Octroi de licences

Chapitre 6 Restrictions légales aux droits découlant du brevet

Art. 35 (8) Le brevet ne peut être opposé a celui qui, de bonne foi, au moment du dépôt de la demande, utilisait l'invention professionnellement en Suisse ou y avait fait à cette fin des préparatifs spéciaux.

2 Celui-ci pourra utiliser l'invention pour les besoins de son entreprise ; ce droit ne peut être transmis, entre vifs ou par succession, qu'avec l'entreprise.

3 Les effets du brevet ne s'étendent pas aux véhicules qui ne séjournent que temporairement en Suisse, ni aux dispositifs appliqués à ces véhicules.

Art. 36 (22) 1 Si l'invention faisant l'objet d'un brevet ne peut être utilisée sans violer un brevet délivré antérieurement, le titulaire du brevet plus récent a droit à l'octroi d'une licence dans la mesure nécessaire à l'exploitation de son invention, lorsque cette invention, par rapport à celle qui fait l'objet du premier brevet, sert à un tout autre but ou 1

A. Droit d es tiers dérivé d'un usage antérieur; véhicules étrangers

B. Inventions dépendantes

1050 présente un progrès technique notable; toutefois, ce droit ne peut être invoqué avant l'expiration de trois ans à compter de la date officielle de l'enregistrement du premier brevet.

2 Lorsque les deux inventions répondent à un même besoin économique, le titulaire du premier brevet peut lier l'octroi de la licence à la condition que le titulaire du second brevet lui accorde à son tour une licence pour l'utilisation de son invention.

3 En cas de litige, le juge statue sur l'octroi des licences, sur leur étendue et leur durée, ainsi que sur le montant des indemnités à verser.

Art. 37 (18) 1 C. Exploitation Après un délai de trois ans à compter de la date officielle de do l'invention l'enregistrement du brevet, toute personne qui justifie d'un intérêt en Suisse i. Action en octroi peut demander au juge l'octroi d'une licence pour utiliser l'invention, d une licence &? jusqu'à l'introduction de l'action le titulaire du brevet n'a pas exploité l'invention en Suisse dans une mesure suffisante et qu'il ne justifie pas son inaction.

2 Le juge fixe l'étendue et la durée de la licence, ainsi que le montant de l'indemnité à verser.

3 II peut, sur requête du demandeur, lui accorder une licence sitôt l'action introduite, sous réserve du jugement au fond, lorsque, outre les conditions énoncées au premier alinéa, le demandeur rend vraisemblable qu'il a un intérêt à utiliser immédiatement l'invention et qu'il fournit au défendeur des sûretés suffisantes; auparavant, le défendeur sera entendu.

IL Action eu déchéance du brevet

III. Exceptions

Art. 38 (18) Si l'octroi de licences ne suffit pas pour satisfaire les besoins du marché suisse, toute personne qui justifie d'un intérêt peut, après un délai de deux ans à partir de l'octroi de la première licence accordée conformément à l'article 37, 1er alinéa, demander au juge de prononcer la déchéance du brevet.

2 Lorsque la législation du pays dont le titulaire du brevet est ressortissant ou dans lequel il est établi admet, après un délai de trois ans déjà à partir de la délivrance du brevet, l'action en déchéance faute d'exploitation de l'invention dans le pays, l'action en déchéance sera admise en lieu et place de l'action en octroi d'une licence, aux conditions énoncées à l'article 37 pour l'octroi de la licence.

1

Art. 39 (18, 4e al.)

Le Conseil fédéral peut déclarer lös articles 37 et 38 inapplicables à l'égard des ressortissants des pays qui accordent la réciprocité.

1051

Art. 40 (22 bis) Après un délai de trois ans à compter de la date officielle de l'enregistrement du brevet, l'octroi d'une licence pour l'utilisation de l'invention peut être demandé en tout temps devant le juge, lorsque l'intérêt public l'exige et que le titulaire du brevet a refusé, sans raisons suffisantes, d'accorder la licence requise par le demandeur.

2 Le juge fixe l'étendue et la durée de la licence, ainsi que le montant de l'indemnité à verser.

1

D. Licence dans l'intérêt public

Chapitre 6 Taxes et délais de paiement

Art. 41 (11) Pour chaque brevet principal ou additionnel, il sera perçu, au moment du dépôt de la demande, une taxe de dépôt de soixante francs.

Art. 42 Pour la publication de la demande de brevet, il sera perçu par avance une taxe de soixante francs.

2 Pour chaque recours, il sera perçu par avance une taxe dont le montant sera fixé par le règlement d'exécution.

1

Art. 43 (11, 12) Tout brevet principal donne heu chaque année, à partir du début de la troisième année qui suit la date du dépôt de la demande, au paiement d'une taxe, exigible par avance, savoir: 80 francs pour la 3e année » 100 » » » 4e » » » 5e 125 » » » 6e » 150 » » » 7e » 175 » » 200 » » » 8e » 250 » » » 9e » » » 10e 300 » » 350 » » » 11e » » » 12e 400 » » » » 13e 475 » » » » 14e 550 t> » » 15« » 625 » » » 16e » 700 » » » 17e » 800 » » » » 18e 900 » 1

A. Taxe de dépôt

B. Taxes perçues au e Ours

de la procédure d'examen

C. Annuités I. Montant, échéance et délai de paiement en général

1052 2

Les annuités échoient au jour du dépôt de la demande et doivent être payées dans les trois mois qui suivent l'échéance.

3 S'il s'écoule plus de deux ans entre la date du dépôt de la demande et la délivrance du brevet principal, les annuités échues dans l'intervalle pourront être encore payées dans les trois mois qui suivent la date officielle de l'enregistrement du brevet.

Iï. Après transformation do brevets additionnels et constitution do nouveaux brevets

D. Sursis

E. Taxes pò ur la trinaiOrmution de breveta additionnels et pour la constitution de nouveaux brevets

Art. 44 (15, 2e al.)

1 Les annuités du brevet principal issu de la transformation d'un brevet additionnel échoient au jour du dépôt du premier brevet principal.

2 Les annuités des nouveaux brevets constitués à la suite d'une renonciation partielle ou d'une action en cession ou en nullité partiellement admise échoient au jour du dépôt du brevet initial.

3 Dans les cas mentionnés ci-dessus, le montant des taxes se calcule conformément à l'article 43, d'après le temps écoulé depuis le dépôt du premier brevet ou du brevet initial.

Art. 45 (13) Les déposants et les titulaires do brevet qui établissent leur état d'indigence peuvent bénéficier du sursis pour le paiement de la moitié de la taxe de dépôt, pour le paiement de la taxe de publication et pour celui des annuités de la troisième, quatrième et cinquième année.

2 A l'expiration de la cinquième année, le titulaire de brevet qui veut maintenir son brevet devra payer, outre la sixième annuité, la moitié de la troisième, de la quatrième et de la cinquième annuité; les autres montants ayant fait l'objet du sursis ne seront pas réclamés.

3 Si le brevet n'est pas maintenu au-delà de cinq ans à compter de la date du dépôt, les montants qui ont fait l'objet du sursis ne seront pas réclamés.

1

Art. 46 (15, 2e al.)

Pour la transformation d'un brevet additionnel en brevet principal, il sera perçu une taxe, égale au montant de la dernière annuité échue pour le premier brevet principal avant la présentation de la demande de transformation.

z Pour tout nouveau brevet constitué conformément aux articles 25, e 2 alinéa, 27 et 30, il sera perçu une taxe, égale à la somme de toutes les annuités échues pour le brevet initial avant la présentation de la, requête sollicitant la constitution du nouveau brevet.

1

1053 Art. 47 (17, 2e et 3e al.)

Le brevet principal tombé en déchéance faute de paiement d'une annuité en temps utile peut être rétabli moyennant paiement, dans les trois mois qui suivent l'expiration du délai non observé, de l'annuité échue, ainsi que d'une taxe de rétablissement, dont le montant sera fixé par le règlement d'exécution.

2 En cas de rétablissement du brevet principal, les brevets additionnels sont également rétablis, de même que les licences et autres droits que les tiers avaient acquis sur ce brevet.

1

F. Rétablissement do brevets tombés en déchéance

Chapitre 7 Réintégration en l'état antérieur

Art. 48 Lorsque le déposant ou le titulaire du brevet rendent vraisemblable qu'ils ont été empêchés, sans leur faute, d'observer un délai prescrit par la loi ou par le règlement d'exécution ou imparti par le bureau de la propriété intellectuelle, ils seront, sur leur demande, réintégrés en l'état antérieur.

2 La réintégration n'est pas admise dans les cas suivants : a. Article 72 (délai pour former opposition); b. Article 77 (délai pour recourir contre la décision relative à l'opposition).

3 La demande doit être présentée dans les deux mois dès la fin de l'empêchement, mais au plus tard dans le délai d'un an à compter de l'expiration du délai non observé, à l'autorité auprès de laquelle l'acte omis devait être accompli ; en même temps, l'acte omis doit être exécuté.

4 L'acceptation de la demande a pour effet de rétablir la situation qui eût résulté de l'accomplissement de l'acte en temps utile; l'article 49 est réservé.

5 Lorsque, par suite de la réintégration, la publication de la demande de brevet et la procédure en opposition doivent être répétées, il sera imparti au requérant, dans la décision qui lui accorde la réintégration, un délai de trente jours pour garantir les frais qui en résulteront pour le bureau et pour la partie adverse; la réintégration tombe si les sûretés ne sont pas fournies en temps utile.

1

Art. 49 Le brevet ne peut être opposé à celui qui, durant les périodes indiquées ci-après, a de bonne foi utilisé l'invention, professionnellement en Suisse ou y a fait à cette fin des préparatifs spéciaux, savoir : 1

A. Condili Olia et effets

B. Réacrvo «n favour des tiers

1054

a. Entre le dernier jour du délai de rétablissement (art. 47) et le jour où la demande de réintégration a été présentée (art. 48) ; b. Entre le dernier jour du délai de priorité (art. 17 ou 21) et le jour où la demande de brevet a été déposée.

2 Le droit ainsi acquis par un tiers est régi par l'article 35, 2e alinéa.

3 Celui qui revendique un droit fondé sur le premier alinéa, lettre a, versera au titulaire du brevet une indemnité équitablCj à partir du moment où le brevet a été remis en vigueur.

4 En cas de litige, le juge statue sur l'existence et l'étendue des droits revendiqués par un tiers et fixe le montant de l'indemnité prévue au 3e alinéa.

TITRE DEUXIÈME De la délivrance du brevet Chapitre premier Organisation du bureau de la propriété intellectuelle en matière de brevets A. Composition du bureau

B. Examinateurs; compétence

C. Sections des brevets; compétence et composition

Art. 50 Le bureau de la propriété intellectuelle comprend: 1° Des examinateurs; 2° Des sections des brevets; 3° Des sections des recours.

Art. 51 Les examinateurs examinent les demandes de brevet et, dans les cas où cette compétence n'appartient pas aux sections des brevets ou aux sections des recours, délivrent les brevets.

2 Chaque examinateur est seul à exercer ces fonctions ; il possédera une formation technique.

s Les examinateurs ne peuvent fonctionner dans les sections des recours.

Art. 52 1 Les sections des brevets statuent sur toutes requêtes relatives aux demandes de brevet ou aux brevets délivrés, en tant que cette compétence n'est pas attribuée à d'autres.

2 Elles comprennent des juristes et des techniciens.

3 Elles doivent, pour prendre leurs décisions, se composer de trois membres, y compris l'examinateur.

1

1055 4

Les membres des sections des brevets ne peuvent fonctionner dans les sections des recours.

Art. 53 Les sections des recours statuent sur les recours formés contre les décisions des examinateurs et des sections des brevets.

2 Elles comprennent des juristes et des techniciens.

3 Elles doivent, pour prendre leurs décisions, se composer de trois membres.

4 Les membres des sections des recours ne peuvent fonctionner dans les sections des brevets.

1

Art. 54 Dans les limites de leur compétence, les sections des recours sont indépendantes et ne sont soumises qu'à la présente loi.

2 Les dispositions de la loi fédérale d'organisation judiciaire, du 16 décembre 1943, concernant les récusations sont applicables par analogie aux membres des sections des recours.

3 Les décisions prises par les sections des recours sont définitives.

1

Art. 55 Lorsqu'une section des recours entend déroger à une décision de principe prise par une autre section des recours, elle ne peut le faire qu'avec le consentement de l'autre section ou à la suite d'une décision des sections intéressées. Cette décision est prise sans débats; elle lie la section qui doit statuer sur le litige.

2 La réunion de plusieurs sections des recours comprend l'ensemble des membres attribués à chaque section, sous la présidence du président de section le plus ancien; pour délibérer valablement, deux tiers au moins des membres doivent être présents.

1

Art. 56 Le Conseil fédéral peut nommer comme membres des sections des brevets ou des sections des recours des personnes en dehors du bureau de la propriété intellectuelle ou de l'administration fédérale.

Art. 57 Les décisions des examinateurs, des sections des brevets et des sections des recours seront, duement motivées, communiquées par écrit à tous les intéressés.

D, Sections dea recours I. Compêtence et composition

II- Indépendance juridictionnelle ; décision définitive

III. Sections · réunies

E. Recrutement

F. Communication dos décisions

1056 Chapitre 2 La demande de brevet A. Forme

B. Description

C. Revendication I. Portée de la revndicution

II. Contenu et nombre des revendication

Art. 58 (25; 26, 1" al.)

Celui qui veut obtenir un brevet d'invention doit déposer une demande de brevet auprès du bureau fédéral de la propriété intellectuelle.

2 La demande de brevet se compose d'une requête sollicitant la délivrance du brevet, et d'une description de l'invention; font partie intégrante de la description les dessins nécessaires à son intelligence, 3 En même temps, la taxe de dépôt (art. 41) doit être payée au bureau ; seule la moitié de cette taxe devra être payée si la demande de brevet est accompagnée d'une demande de sursis suffisamment motivée (art. 45).

Art. 59 (26; 5, 3e al.)

1 L'invention devra être exposée, dans la description, de manière à pouvoir être exécutée par l'homme du métier.

2 La description peut servir à interpréter la revendication et les sous-revendications.

Art. 60 (5, 1er et2e« al.)

1 Pour chaque brevet, le déposant devra formuler une revendication, dans laquelle il définira l'invention.

2 La revendication est concluante quant à l'étendue de la protection conférée par le brevet.

1

Art. 61 (6, 1" al.; 26, 3e et 4e al) La revendication ne pourra définir qu'une seule invention, savoir : ou bien un procédé, ou un produit, un moyen pour la mise en oeuvre d'un procédé ou un dispositif, ou l'application d'un procédé, ou l'utilisation d'un produit.

2 Plusieurs revendications, mais au plus quatre, seront admises dans les cas suivants : a. En plus d'une revendication pour un procédé : une revendication pour un. moyen pour la mise en oeuvre du procédé, une revendication pour le produit résultant du procédé et une revendication pour une utilisation du produit résultant du procédé; 1

1057 b. En plus d'une revendication pour un procédé : une revendication pour un moyen pour la mise en oeuvre du procédé, une revendication pour le produit résultant du procédé et une revendication pour une application du procédé; c. En plus d'une revendication pour un produit : une revendication pour un procédé de fabrication du produit, une revendication pour un moyen pour la mise en oeuvre du procédé et une revendication pour une utilisation du produit; d. En plus d'une revendication pour un dispositif: une revendication pour un procédé de mise en action du dispositif et une revendication pour un procédé de fabrication du dispositif.

Art. 62 (6, 2e al.)

Les revendications pour des procédés de fabrication de substances chimiques doivent définir un procédé déterminé en ce qui concerne le processus chimique, lequel peut s'appliquer à des groupes de substances dont les membres sont équivalents quant à ce processus.

III. Pour les procédés de fabrication de substances chimiques

Art. 63 (5, 4<> al.; 26, 5e al.)

Les formes spéciales d'exécution de l'invention définie par la D. Sousrovendioatiûns revendication peuvent faire l'objet de sous-revendications.

a Chaque revendication peut être suivie de cinq sous-revendications exemptes de taxe; s'il y a plus de cinq sous-revendications, chacune d'elles sera soumise, à partir de la sixième, à une taxe, payable avant la délivrance du brevet et dont le montant sera fixé par le règlement d'exécution.

Art. 64 1 Sera considéré comme date de dépôt le moment où les pièces E. Date de dépôt exigées par l'article 58 auront été déposées et la taxe nécessaire payée. I, En général 2 Pour les envois postaux, le moment déterminant sera celui où ils auront été remis à la poste suisse à l'adresse du bureau de la propriété intellectuelle.

1

Art. 65 (29, 1er al., dernière phrase) Une demande de brevet issue de la scission d'une première demande comprenant plusieurs inventions recevra comme date de dépôt celle de la demande initiale si, lors de son dépôt, elle a été désignée expressément comme demande scindée et qu'à ce moment la demande initiale n'a pas encore fait l'objet d'une décision définitive; sinon, elle recevra comme date de dépôt la date où elle a été présentée.

II. En CM de scission de lu demande

1058

III. Report de d
Art. 66 (29, 3e al.)

1 Tant que le brevet n'est pas enregistré, le déposant pourra, modifier la revendication ou les sous-revendications; une fois la demande publiée, de telles modifications ne seront admises qu'aux conditions fixées à l'article 76.

a Lorsque la description initiale ou un autre écrit présenté en même temps qu'elle au bureau ne contiennent pas d'indications au sujet des modifications apportées, la date du dépôt de la demande sera reportée au moment où ces modifications ou ces indications auront été communiquées par écrit, pour la demande envisagée, au bureau de la propriété intellectuelle; dans ce cas la date de dépôt initiale perd tout effet légal.

3 Seuls les écrits rédigés en une langue officielle peuvent être pris en considération.

Chapitre 3 L'examen de la demande de brevet A. Devant l'examinateur I, EU général

Art. 67 (27, 1er et 2e al.)

1 La demande de brevet est examinée par un examinateur.

2 Si l'examinateur estime que l'invention ne peut être brevetée selon les articles 1er, 2 et 7 ou que le déposant n'a pas droit à la délivrance du brevet conformément à l'article 3,3e alinéa, il en informe le déposant, en lui en indiquant les raisons, et lui impartit un délai pour répondre.

s Si l'examinateur estime que la demande ne répond pas à d'autres prescriptions de la loi ou du règlement d'exécution, il impartit au déposant un délai pour en corriger les défauts.

Art. 68 (27, 1« et 2« al.)

IL Rejet dy lu demando

B. Publication de )a domando I. Cûnditiona

Si la demande n'est pas retirée, bien qu'un brevet ne puisse pas être délivré pour les raisons indiquées à l'article 67, 2e alinéa, ou si les défauts signalés conformément à l'article 67, 3e alinéa, ne sont pas corrigés en temps utile, l'examinateur rejette la demande.

Art. 69 Si aucune des raisons mentionnées à l'article 67, 2e alinéa, ne paraît s'opposer à la délivrance du brevet et qu'en outre la demande satisfait aux autres prescriptions de la loi et du règlement d'exécution, l'examinateur ordonne la publication de la demande.

1

1059 2

En même temps, il impartit au déposant qui n'est pas au bénéfice d'un sursis un délai d'un mois pour payer la taxe de publication (art. 42), 3

Si la taxe de publication n'est pas payée en temps utile, le bureau de la propriété intellectuelle avisera le déposant que la taxe, majorée du quart de son montant, peut être payée dans le mois qui suit la réception de l'avis et que la demande sera considérée comme retirée si la taxe et la surtaxe ne sont pas payées dans le nouveau délai.

Art. 70 1

La publication se fait par la publication du contenu essentiel de la demande.

n. Formo

2

En même temps, et tant que court le délai d'opposition, la demande sera exposée au bureau de la propriété intellectuelle, pour que chacun puisse en prendre connaissance; elle sera accompagnée d'une liste des publications ·-- écrits ou images -- opposées par l'examinateur, ainsi que, le cas échéant, des pièces justificatives de la priorité.

Art. 71 Sur requête du déposant, la publication peut être ajournée de m. Ajournement six mois au plus à compter de la date où elle a été ordonnée.

Art. 72 1

Chacun peut, dans les trois mois qui suivent la publication, s'opposer à la délivrance du brevet.

c. Opposition i- Conditions

3

La seule cause d'opposition admise est que l'invention ne peut pas être brevetée selon les articles 1er, 2 et 7, ou que le déposant n'a pas droit à la délivrance du brevet conformément à l'article 3, 3e alinéa.

3 L'opposition doit être faite par écrit; elle exposera d'une manière complète les faits sur lesquels se fondent les allégations de l'opposant et indiquera les moyens de preuve; si la section des brevets le demande, ces moyens de preuve seront présentés.

Art. 73 1

a

S'il n'y a pas d'oppositon, l'examinateur délivre le brevet. H- Conséquences

S'il y a opposition, l'affaire, y compris la décision relative à la délivrance du brevet, passe à la section des brevets.

de l'opposition

"^'OST

1060

D. Procédure probatoire I. En général

II. Répartition dea frais

E. Modification des revendications et sonsrevendications

F. Recours I. Conditions et forme

Art. 74 L'examinateur, de même que la section dea brevets, prennent les mesures propres à élucider les faits; les dispositions du titre septième de la loi de procédure civile fédérale, du 4 décembre 1947, sont applicables par analogie, à l'exception de l'article 64.

2 Ls> droit de refuser de témoigner, prévu par l'article 42 de la loi de procédure civile fédérale, appartient également aux mandataires professionnels en matière de brevets, ainsi qu'à leurs auxiliaires.

3 A chaque degré de la procédure, déposant et opposant doivent, sur leur demande, être entendus.

4 Les tribunaux cantonaux sont tenus de prêter assistance.

1

Art. 75 L'examinateur ou la section des brevets fixent librement, dans la décision relative à la délivrance du brevet, de même qu'à la suite d'un retrait, total ou partiel, de la demande de brevet ou de l'opposition, dans quelle mesure les frais doivent être mis à la charge des intéressés.

Art. 76 1 Une fois la demande de brevet publiée, des modifications ne pourront être apportées à la revendication ou aux sous-revendications que si elles sont justifiées par les résultats de la procédure en opposition, 2 Si ces modifications rendent nécessaires une nouvelle publication de la demande et une nouvelle procédure en opposition, elles ne seront admises que si le déposant fournit auparavant des sûretés pour les frais, dans le délai qui lui sera imparti.

3 Est réservé le report de la date du dépôt de la demande, conformément à l'article 66.

Art. 77 1 Peuvent recourir, dans le délai de deux mois à partir de la communication de la décision : le déposant, contre la décision rejetant la demande en tout ou en partie ; l'opposant, contre la décision rejetant l'opposition en tout ou en partie.

2 Le recours est également admis contre la décision relative à la répartition des frais.

3 Le recours doit être présenté par écrit ; il indiquera les motifs et les moyens de preuve.

* Le recourant qui n'est pas au bénéfice d'un sursis conformément à l'article 45 payera, dans le délai fixé pour le recuurs, la taxe de recours prévue par le règlement d'exécution; s'il ne s'exécute pas, il lui

1061 sera imparti un nouveau délai de dix jours, avec l'avertissement que si la taxe n'est pas payée dans ce nouveau délai le recoure sera considéré comme nul et non avenu.

Art. 78 Les articles 74 et 76 sont applicables par analogie dans la procédure devant la section des recours.

2 Si le recours se révèle fondé, en tout ou en partie, la section des recours annule la décision et renvoie l'affaire à l'examinateur ou à la section des brevets, pour nouvel examen; si le dossier est en état, elle statue elle-même.

3 La ssction des recours fixe librement dans quelle mesure les frais doivent être mis à la charge des intéressés; elle peut ordonner le remboursement de la taxe (art, 77, 4e al.).

4 Le 3e alinéa est également applicable aux cas où le recours, la demande de brevet ou l'opposition sont retirés, en tout ou en partie.

1

II. Procédure et décision sur le renoms

Chapitre 4 Le registre des brevets; publications faites par le bureau

Art. 79 (30) Le bureau de la propriété intellectuelle tient un registre des brevets ; il y inscrit le brevet, avec les indications nécessaires, notamment: le numéro d'ordre et la classe de l'invention; le titre de l'exposé d'invention; la date de dépôt et, le cas échéant, 1s pays et la date de priorité ; le nom et le domicile du titulaire du brevet ; le nom et le domicile d'affaires du mandataire; le cas échéant, le nom de l'inventeur.

2 H y inscrit en outre toutes les modifications concernant l'existence du brevet ou le droit au brevet.

3 Les tribunaux devront remettre gratuitement au bureau, en expédition intégrale, pour inscription au registre, les jugements définitifs entraînant de telles modifications.

1

Art. 80 (31, 1er et 2« al.)

Le bureau de la propriété intellectuelle publie: 1° Le retrait ou le rejet de la demande de brevet déjà publiée; 2° L'enregistrement du brevet au registre des brevets, avec les indications mentionnées à l'article 79, 1er alinéa; Feuille fédérale. 102= année. Vol. I.

73

A. Registre dos breveta

B. Publications I. Concernant les demandes de brQvet et les brevets enregistrés

1062

3° La radiation du brevet au registre des brevets ; 4° Les modifications inscrites au registre, concernant l'existence du brevet et le droit au brevet.

II. Ajournement de la publication

III. Exposé d'invention

Art. 81 Lorsque la Confédération acquiert des droits sur un brevet, la publication de l'inscription faite au registre peut, à la demande du département compétent, être renvoyée à une date indéterminée.

Art. 82 (31, 3e et 4e al.)

Le bureau de la propriété intellectuelle publie des exposés d'invention imprimés, reproduisant la description de l'invention, dessins compris, les revendications et les sous-revendications, ainsi qu'une liste des publications -- écrits ou images -- qui ont été opposées au cours de la procédure d'examen.

Art. 83 (32) Dès que l'exposé d'invention est prêt à être publié, le bureau de la propriété intellectuelle délivre le brevet.

2 Ge document se compose de l'attestation que les conditions requises par la loi pour obtenir le brevet ont été remplies, et d'un exemplaire de l'exposé d'invention.

1

C. Document dû brôvet

D. Conservation du dossier

Art. 84 (33) Le bureau de la propriété intellectuelle conserve le dossier du brevet, en original ou en copie, jusqu'à l'expiration de cinq ans à compter de la déchéance du brevet.

TITRE TROISIÈME Sanction civile et pénale

Chapitre premier Dispositions communes à la protection de droit civil et de droit pénal A. Conditions de la responsabilité

Art. 85 (38; 46, 3e al.)

Est passible de poursuites civiles et pénales, conformément aux dispositions ci-après: a. Celui qui utilise illicitement l'invention brevetée; l'imitation est considérée comme une utilisation; 6. Celui qui se refuse à déclarer à l'autorité compétente la provenance des produits, fabriqués illioitement, qui ee trouvent en sa possession;

1063 c. Celui qui, sans le consentement du titulaire du brevet ou de celui qui est au bénéfice d'une licence, enlève le signe du brevet apposé sur un produit ou sur son emballage; d. Celui qui incite à commettre l'un de ces actes, qui y collabore, en favorise ou facilite l'exécution.

Art. 86 (7, 3e al.)

Lorsque l'invention se rapporte à un procédé de fabrication d'un produit nouveau, tout produit de même composition sera présumé, jusqu'à preuve du contraire, fabriqué d'après le procédé breveté.

2 Le 1er alinéa est applicable par analogie au cas d'un procédé de fabrication d'un produit connu, lorsque le titulaire du brevet rend vraisemblable que le brevet a été violé.

1

Art. 87 Les secrets de fabrication ou d'affaires des parties seront sauvegardés, 2 IL ne sera donné connaissance à la partie adverse des moyens de preuve capables de révéler de tels secrets que dans la mesure compatible avec leur sauvegarde.

1

Art. 88 (44) En cas de condamnation, le juge peut ordonner la confiscation et la vente ou la destruction des produits fabriqués illicitement ou des installations, de l'outillage, etc. servant à leur fabrication.

2 Le produit net de la vente servira d'abord à payer l'amende, puis les frais d'enquête et les frais judiciaires, et enfin à régler la créance, définitivement fixée, de la partie adverse en dommages-intérêts et en couverture de ses frais de procès; l'excédent reviendra à l'ancien propriétaire des objets vendus.

3 Même en cas de rejet de l'action ou en cas d'acquittement, le juge peut ordonner la destruction des installations, de l'outillage, etc.

servant exclusivement à la violation du brevet.

1

Art. 89 (45) Le juge peut autoriser la partie qui a obtenu gain de cause à publier le jugement aux frais de l'autre partie; il fixe les modalités et le moment de la publication.

2 En matière pénale (art. 101 et 102), la publication du jugement est réglée par l'article 61 du code pénal suisse.

1

B. Renversement du fardeau de la preuve

C. Sauvegarda du aeoret de fabrication ou_d'aff aires

D. Vente ou destruction de produits ou d'installations

B. Pnblioation du jugement

1064

F* Interdiction d'accumuler les actions

Art. 90 Celui qui a intenté une des actions prévues aux articles 91, 92, 93, 94 ou 101 et qui, dans la suite, en se fondant sur un autre brevet, actionne à nouveau la même personne en raison du même acte ou d'un acte analogue, supportera les frais judiciaires et les dépens qu'entraînera le nouveau procès, à moins qu'il ne rende vraisemblable qu'il n'a pas été en mesure, sans qu'il y ait eu faute de sa part, de faire valoir aussi l'autre brevet dans la procédure antérieure.

Chapitre 2 Dispositions spéciales à la protection de droit civil

A. Awtion en cessation de l'atte Ou en suppression de l'état de fait

B. Action en dommagesintérêts

C. Protection provisoire

Art. 91 Celui qui est menacé ou atteint dans ses droits par l'un des actes mentionnés à l'article 85 peut demander la cessation de cet acte ou la suppression de l'état de fait qui en résulte.

Art. 92 (39, 40) Celui qui, intentionnellement ou par négligence, commet l'un des actes mentionnés à l'article 85 est tenu selon les dispositions du code des obligations de réparer le dommage causé.

2 S'il n'est pas en mesure d'indiquer par avance le montant du dommage qu'il a subi, le lésé peut demander au juge de fixer l'indemnité selon sa libre appréciation, au vu des preuves intervenues pour déterminer l'étendue du dommage.

1

Art. 93 A compter de la date du dépôt de la demande et avant la délivrance du brevet, une protection provisoire est accordée, conformément aux dispositions suivantes: a. Le déposant peut intenter l'action en cessation de l'acte ou en suppression de l'état de fait (art. 91), s'il fournit à la partie adverse des sûretés suffisantes; l'article 100 est applicable par analogie ; b. L'action en dommages-intérêts (art. 92) ne peut être intentée qu'une fois le brevet délivré; mais le titulaire du brevet peut alors demander la réparation du dommage causé par le défendeur depuis le moment où il a eu connaissance du contenu de la demande de brevet.

1065 Art. 94 Celui qui justifie d'un intérêt peut intenter une action tendant à faire constater l'existence ou l'absence d'un état de fait ou d'un rapport de droit auxquels la présente loi attache des effets, notamment: 1° Qu'un brevet déterminé existe à bon droit; 2° Que le défendeur a commis l'un des actes mentionnés à l'article 85; 3° Que le demandeur n'a commis aucun des actes mentionnés à l'article 85; 4° Qu'un brevet déterminé ne peut, en application des articles 35 ou 49, être opposé au demandeur; 5° Que pour deux brevets déterminés, les conditions fixées par l'article 36 pour l'octroi d'une licence sont remplies ou ne le sont pas; 6° Que le demandeur est l'auteur de l'invention faisant l'objet d'une demande de brevet ou d'un brevet déterminé.

Art. 95 (24, 2« al.; 42, 3e al.)

1 Est compétent pour connaître des actions prévues par la présente loi : a. Pour les actions intentées par le déposant ou le titulaire d'un brevet contre des tiers: le juge du domicile du défendeur, ou du lieu où l'acte a été commis, ou du lieu où le résultat s'est produit ; 6. Pour les actions intentées par des tiers contre le titulaire d'un brevet: le juge du domicile du défendeur; si ce domicile n'est pas situé en Suisse, le juge compétent est celui du lieu où le mandataire exerce son activité ou s'il n'y a pas de mandataire, celui du lieu où le bureau de la propriété intellectuelle a son siège,

D. Àotion en constatation

E. For

2

Si différents lieux entrent en ligne de compte, le juge compétent sera celui qui le premier aura été saisi de l'action.

Art. 96 (49) Les cantons désignent pour l'ensemble de leur territoire un tribunal chargé de connaître en instance cantonale unique des actions civiles prévues par la présente loi.

2 Le recours au Tribunal fédéral est reeevable sans égard à la valeur litigieuse.

1

F. Juridiction "^q^8

1066

G. Mesures provisionnelles I. Conditions

II. Compétence

III. Sûretés

IV, Responsabilité du requérant

Art. 97 (43) A la requête de la personne qui a qualité pour intenter action, l'autorité compétente, en vue d'assurer l'administration des preuves, le maintien de l'état de fait ou l'exercice provisoire de droits litigieux relatifs à la cessation d'un acte ou à la suppression de l'état de fait qui en résulte, ordonne des mesures provisionnelles, notamment une description précise des produits prétendus fabriqués illicitement, ainsi que des installations, outillage, etc. servant à leur fabrication, ou la saisie de ces objets.

2 Le requérant devra rendre vraisemblable que la partie adverse a commis ou a l'intention de commettre un acte contraire à la présente loi, et qu'il est en conséquence menacé d'un dommage difficilement réparable et que peuvent seules prévenir des mesures provisinelles.

3 Avant d'ordonner les mesures provisionnelles, l'autorité entendra la partie adverse ; s'il y a péril en la demeure ,elle pourra auparavant déjà prendre des mesures d'urgence.

4 Le cas échéant, l'autorité, en même temps qu'elle admet la requête, impartira au requérant un délai de soixante jours au plus pour intenter action, en l'avisant que les mesures ordonnées tomberont s'il n'agit pas dans ce délai.

1

Art. 98 L'autorité compétente est celle du lieu où l'action civile doit être intentée, conformément à l'article 95; après l'introduction du procès, le juge saisi de l'action est seul compétent pour ordonner ou révoquer les mesures provisionnelles.

a Les cantons désignent l'autorité compétente pour statuer et, en cas de besoin, édictent les dispositions complémentaires de procédure.

Art. 99 1 Le requérant sera tenu, en règle générale, de fournir des sûretés suffisantes, a L'autorité compétente pourra refuser les mesures provisionnelles ou révoquer, en tout ou en partie, celles qu'elle aurait ordonnées si la partie adverse fournit au requérant des sûretés suffisantes.

1

Art. 100 S'il se révèle que la requête sollicitant une mesure provisionnelle ne reposait pas sur une prétention de droit matériel, le requérant devra, dans la mesure fixée par le juge, réparer le dommage causé à la partie adverse par la mesure qui aura été prise.

1

1067 8

L'action en dommage-intérêts se prescrit par un an à compter du moment où les mesures provisionnelles sont tombées.

3 Les sûretés fourmes par le requérant ne lui seront rendues qu'une fois la certitude acquise qu'une action en dommages-intérêts ne sera pas intentée; l'autorité peut fixer à la partie adverse un délai convenable pour intenter action, en l'avisant que si elle n'agit pas dans ce délai les sûretés seront rendues au requérant.

Chapitre 3 Dispositions spéciales à la protection de droit pénal Art. 101 (39; 46, 3e al.)

Celui qui, intentionnellement, commet l'un des actes mentionnés à l'article 85 sera, sur plainte du lésé, puni de l'emprisonnement jusqu'à une année ou de l'amende jusqu'à 20 000 francs.

1

A. Dispositions L violation du brevet

2

Le droit de porter plainte se prescrit par six mois à compter du jour où le lésé a connu l'auteur de l'infraction.

Art. 102 (46, 1« al.)

Celui qui, intentionnellement, met en vente ou en circulation ses papiers de commerce, annonces de toutes sortes, produits ou marchandises munis d'une mention propre à faire croire, à tort, que les produits ou marchandises sont protégés par la présente loi sera puni de l'amende jusqu'à 2000 francs, 2 Le juge pourra ordonner la publication du jugement.

1

Art. 103 Les dispositions générales du code pénal suisse sont applicables en tant que la présente loi n'en dispose pas autrement.

Art. 104 (42, 2« al.)

L'autorité compétente pour la poursuite et le jugement d'une infraction est celle du lieu où l'auteur a agi ou celle du lieu où le résultat s'est produit; si différents lieux entrent en ligne de compte, ou si l'infraction a été commise par plusieurs coauteurs, l'autorité compétente est celle du lieu où la première instruction a été ouverte.

2 L'autorité compétente pour poursuivre et juger l'auteur principal est aussi compétente pour poursuivre et juger l'instigateur et le complice.

1

IL Allusion fallacieuse à l'existence dllme 1 40 41011

P» "

B. Application des dispositions générales du CP8

C. For

1068

D» Compétence doa autorités cantonales I. En général

II. Exception.

do la nullità du brevet

Art. 105 (41) La poursuite et le jugement des infractions incombent aux autorités cantonales.

2 Les jugements, prononcés administratifs et ordonnances de nonlieu doivent être communiqués en expédition intégrale au procureur général de la Confédération, immédiatement et sans frais.

1

Art. 106 Si l'inculpé soulève l'exception de la nullité du brevet, le juge peut impartir un délai convenable, en les avertissant des conséquences de leur inaction, soit à l'inculpé pour intenter l'action en nullité, soit au lésé pour intenter l'action tendant à faire constater que le brevet existe à bon droit.

2 Si l'action est introduite en temps utile, la procédure pénale sera suspendue jusqu'à ce que l'action ait fait l'objet d'une décision définitive; entre-temps la prescription sera suspendue.

3 L'action peut être intentée soit devant le juge du domicile du défendeur, soit devant le juge du lieu où la procédure pénale a été engagée.

1

TITRE FINAL Dispositions d'exécution et transitoires

A. Entrée en vigueur

B. Mesures d'exécution

Art. 107 Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi.

2 Dès cette date seront abrogées, sous réserve des articles 110 et 114: 1° La loi fédérale du 21 juin 1907 sur les brevets d'invention, modifiée par les lois des 9 octobre 1926 et 21 décembre 1928; 2° La loi fédérale du 3 avril 1914 sur les droits de priorité relatifs aux brevets d'invention et aux dessins ou modèles industriels, modifiée par la loi du 21 décembre 1928, -- en tant qu'elle se rapporte aux brevets d'invention.

1

Art. 108 Le Conseil fédéral prendra les mesures nécessaires à l'exécution de la présente loi.

2 II est autorisé en particulier à édicter des prescriptions sur la formation des différents organes: eTraminateiirs, sections des breveta et sections des recours, sur-la répartition des affaires entre eux et 1

1069 la procédure à suivre devant eux; en outre, sur la perception des taxes.

3 II est autorisé en outre à augmenter les taxes prévues par la présente loi, si cela est nécessaire pour couvrir les frais qu'entraîné son exécution.

Art. 109 Au cas où l'exécution de la présente loi ne pourrait être assurée c. introduction dès le début pour tous les domaines de la technique, le Conseil fédéral dïï'oeamen préalable est autorisé à ne mettre d'abord en vigueur les dispositions qui prévoient ou qui présupposent l'examen préalable que pour les inventions qui ne pouvaient être brevetées selon l'article 2, chiffre 4, de l'ancienne loi.

2 Pour les autres inventions seront applicables en ce cas, jusqu'au moment où elles seront soumises à l'examen préalable, les dispositions de la présente loi, avec les modifications que le Conseil fédéral fixera dans une ordonnance spéciale.

1

Art. 110 Les brevets délivrés avant l'entrée en vigueur de la présente loi et qui ne seront pas encore tombés en déchéance seront soumis dès cette date au nouveau droit, sous réserve des dispositions suivantes: a. Les causes de nullité continueront à être régies par l'ancien droit ; 6. La durée des brevets se rapportant à des inventions non brèvetables d'après le nouveau droit restera régie par l'ancien droit; c. Les dispositions concernant la mention de l'inventeur (art. 5 et 6) ne seront pas applicables; d. Les annuités seront de 30 francs pour la 2e année 40 » » » 3e » et ainsi de suite jusqu'à la 10e année, pour laquelle la taxe sera de 110 francs; les annuités suivantes seront de 130 francs pour la 11e année e )> » 12 150 » e » » 13 175 » » » 14e 200 » 225 » » » 15 15ee » » » 16 250 » 16ee » » » 17e 300 » » » 18e 350 »

D. Passage de l'anoion su nouveau droit I. Breveta

1070

II. Demandes do brevet

E. Passage à l'examen préalable I. Brevets II. Demandes de brevet

F. Responsabilité" civile et pénale

G. Recours de droit administratif

Art. 111 Les demandes de brevet déjà pendantes au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi seront à partir de cette date soumises au nouveau droit.

2 Si elles se rapportent à des inventions qui n'étaient pas brèvetables d'après l'ancien droit, mais le sont d'après le nouveau, ces demandes pourront être maintenues, à condition que la date de dépôt soit reportée au jour de l'entrée en vigueur de la présente loi; toutefois, la date initiale ou la date de priorité reste déterminante pour fixer le rang au sens de l'article 26, chiffre 5.

1

Art. 112 Les brevets délivrés sous le régime de l'article 109, 2e alinéa, resteront soumis à ce régime après l'introduction de l'examen préalable.

Art. 113 Les demandes de brevet déjà pendantes au moment de l'introduction de l'examen préalable seront à partir de cette date soumises au nouveau droit.

Art. 114 1 La responsabilité civile est réglée par les dispositions en vigueur lors de l'accomplissement de l'acte.

2 La responsabilité pénale pour les infractions commises sous l'empire de l'ancien droit, mais jugées sous l'empire du nouveau, est régie par le droit le plus favorable.

Art. 115 L'article 99, chiffre I, lettre a, de la loi fédérale d'organisation judiciaire, du 16 décembre 1945, aura la teneur suivante: a. Les décisions du bureau fédéral de la propriété intellectuelle en matière de brevets -- à l'exception de celles qui sont prises par les sections des recours --, de dessins et modèles et de marques, ainsi que les décisions du département de justice et police portant radiation d'office d'une marque.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la revision de la loi sur les brevets d'invention (Du 25 avril 1950)

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04.05.1950

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