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FEUILLE FÉDÉRALE 102e année

Berne, le 27 juillet 1950

Volume II

Paraît, en règle générale, chaque semaine- Prix: 28 francs par an; 15 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 60 centime« la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des hoirs C.-J,Wyss, société anonyme, à Berne

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le régime financier de 1951 à 1954 (Du 19 juillet 1950) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet d'arrêté fédéral concernant le régime financier de 1951 à 1954.

I. LA SITUATION QUI SE PRÉSENTE COMME POINT DE DÉPART Le peuple et les cantons ont rejeté, le 4 juin 1950, l'arrêté fédéral du 21 mars 1950 qui visait à réorganiser de façon conforme à la constitution le régime financier de la Confédération. Ainsi qu'il ressort des commentaires sur le résultat de cette votation, les partisans et les adversaires du projet, dans l'opinion publique comme dans les milieux parlementaires, s'entendent dans l'ensemble sur les points suivants: 1, Qu'il faut résolument continuer à rechercher pour les finances fédéraies une base durable et fondée sur la volonté du peuple et des cantons; et 2. Qu'il faut en attendant assurer à la Confédération les recettes nécessaires en instituant un régime transitoire constitutionnel de durée limitée.

Le chef du département des finances et des douanes a déclaré au Conseil national dans la dernière session d'été, lors de la discussion de l'interpellation de M. le conseiller national Spühler et des postulats de MM. les conseillers nationaux Münz, Philippe Schmid et Häberlin, que le Conseil fédéral est du même avis.

Le rejet du projet de conciliation réclame impérieusement une solution temporaire qui intervienne au plus tôt. Une grande partie des recettes fédérales est encore fondée sur le droit extraordinaire, qui n'a plus cepenFeuille fédérale. 102» année. Vol. II.

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dant qu'une validité limitée, de sorte que la Confédération est menacée de perdre prochainement des moyens financiers indispensables à sa subsistance.

Quand ont commencé, au début de 1948, les délibérations sur la réforme des finances fédérales, la perception de l'impôt pour la défense nationale, de l'impôt anticipé, de l'impôt sur le chiffre d'affaires, de l'impôt sur le luxe et d'autres contributions instituées par la voie extraordinaire, ainsi que certaines autres mesures de nécessité, telles que la réduction des subventions fédérales, étaient assurées jusqu'à la fin de 1949. Lorsque le cours des délibérations parlementaires sur le projet constitutionnel eut montré qu'il ne serait pas possible de faire aboutir les nouvelles dispositions et leurs lois d'exécution avant le 1er janvier 1950, on prit deux mesures pour assurer la continuité des ressources financières de la Confédération. On prorogea la durée du droit fiscal de nécessité jusqu'à la fin de 1951 par l'arrêté fédéral urgent du 21 décembre 1949 concernant le régime transitoire des finances fédérales (régime financier de 1950 et 1951); en outre, dans l'arrêté fédéral du 21 mars 1950 instituant de nouvelles dispositions constitutionnelles sur le régime financier de la Confédération, étaient prévues la prorogation des impôts antérieurement institués en vertu du droit de nécessité jusqu'à l'entrée en vigueur des lois d'exécution des nouvelles dispositions constitutionnelles ou jusqu'au 31 décembre 1954, ainsi que des dispositions transitoires analogues pour les subventions fédérales. Cette nouvelle prorogation du régime financier extraordinaire n'a pas abouti, en raison du vote négatif du 4 juin, et il ne subsiste donc pour l'instant que la réglementation de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949.

Le régime financier de 1950 et 1951 (arrêté fédéral du 21 décembre 1949) est entré en vigueur le l«r janvier 1950. Ce régime subsiste, d'après l'article 2 de cet arrêté, jusqu'au 31 décembre 1951 s'il est ratifié par le peuple et les cantons dans l'année qui suit son adoption par l'Assemblée fédérale (art. &Qbis, 3e al., Cst.): à ce défaut, il perdra sa validité à l'expiration de ce délai. N'ayant pas encore été soumis à la votation populaire, le régime financier de 1950 et 1951 n'est donc valable que pour l'année 1950. S'il est accepté avant ce
moment en votation populaire, il demeure applicable jusqu'au 31 décembre 1951.

Si le vote du peuple était négatif, les recettes fédérales seraient réduites à la fin de 1950 d'un montant annuel de 665 millions de francs.

Il est évident que le régime financier de la Confédération en serait bouleversé d'une manière extrêmement grave. Ce péril ne pourrait être évité en prorogeant la réglementation devenue caduque par un autre arrêté fédéral urgent, car l'article SQbis, 3e alinéa, de la constitution interdit qu'un arrêté de ce genre soit renouvelé.

Si le vote du peuple était affirmatif, le régime financier de 1950 et 1951 resterait bien en vigueur au-delà de 1950, mais seulement jusqu'au

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31 décembre 1951. Ce délai est insuffisant; même en y appliquant toutes ses forces, on ne peut faire aboutir avant la iSn de 1951 la réforme des, finances, c'est-à-dire la revision constitutionnelle et la législation d'exécution nécessaire pour assurer les nouvelles ressources fiscales. Aussi précieuses que soient à cet effet les expériences faites lors de la première tentative de réforme et aussi considérables les progrès de l'opinion quant à la conscience du sérieux de la situation et quant à la conviction qu'il est urgent d'y remédier, il ne sera guère possible de: terminer tous ces travaux avant quatre ou cinq ans.

Pour tous ces motifs, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il faut renoncer à soumettre au peuple le régime financier de 1950 et 1951 et assurer la continuité des ressources fédérales, pendant la période nécessaire à réaliser la réforme des finances, par une nouvelle réglementation, intermédiaire remplaçant celle de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949.

Cette solution offre en outre l'avantage de marquer dès à présent la volonté de ne plus recourir au droit de nécessité, du fait que le nouveau régime transitoire aura la forme d'une disposition complémentaire à la constitution qui sera soumise au vote du peuple et des cantons. Nous comptons que le peuple suisse comprendra les mesures passagères que nous proposons et.

la signification importante de la décision à prendre. Nous rappelons quel'échec de la tentative de réforme financière en 1938 a amené une situation analogue, la réglementation fondée sur le droit de nécessité étant sur le^ point de devenir caduque, et que, grâce à la ferme attitude de l'Assembléefedérale, le projet de régime transitoire constitutionnel qui lui fut soumis; dans le message du 19 avril 1938 a pu être traité par les chambres en un temps très court et a reçu à une impressionnante majorité l'approbation, du peuple et des cantons, lors de la votation du 27 novembre 1938.

Le choix de la forme juridique ne changera rien, il est vrai, quant au fond du nouveau régime transitoire, qui doit reprendre les éléments essentiels du régime actuel. On ne peut songer à renoncer, dans la nouvelle réglementation provisoire, aux sources de recettes déjà existantes et à.

les remplacer par d'autres.

II. LE BUT DU RÉGIME TKA1VSITOIRE

Le nouveau régime transitoire doit, tout en sauvegardant le droit du peuple et des cantons à se faire entendre, procurer à la Confédération les ressources dont elle a besoin pour accomplir ses tâches jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle réglementation générale de ses finances; mais on attend aussi qu'il assure dans l'intervalle, en tena,nt compte des besoins des cantons, un régime fiscal satisfaisant et des économies dans le budget de l'Etat.

Les opinions divergent quant au contenu du nouveau régime transitoire. Toutefois, la tendance au maintien provisoire du droit en vigueur-

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domine manifestement. Le postulat de M. le conseiller national Haberlin attend de la nouvelle réglementation transitoire qu'elle s'en tienne essentiellement à ce qui existe déjà. Le postulat de M. le conseiller national Philippe Schmid établit des lignes générales qui aboutissent principalement à la conservation du droit en vigueur (continuation de l'impôt pour la défense nationale, maintien des parts cantonales aux impôts fédéraux) ou qui peuvent être prises en considération de manière appropriée dans le régime transitoire (allégements en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, création d'une péréquation financière intercantonale équitable, contrôle des dépenses). En revanche, le postulat de M. le conseiller national Münz demande des remaniements considérables du système fiscal de la Confédération. Des innovations ont aussi été suggérées par les partis politiques et les associations économiques. Dans le chapitre suivant, nous exprimerons notre avis sur ces propositions qui visent à des dégrèvements.

Le régime financier actuel tient déjà compte des critiques faites au sujet de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires. Nous rappelons l'augmentation de la déduction exonérée (déduction en raison du renchérissement), qui a été portée de 1000 francs à 2000 francs en matière d'impôt pour la défense nationale sur le revenu, ainsi que la franchise de l'impôt sur le chiffre d'affaires accordée aux denrées alimentaires de première nécessité.

Depuis l'arrêté concernant le régime financier de 1950 et 1951, c'est-àdire depuis la fin de 1949, la situation ne s'est pas modifiée à tel point qu'il soit urgent de prendre des mesures radicales nouvelles. Les demandes présentées ont trait principalement à des allégements fiscaux et à des simplifications dans la perception des impôts. Nous en avons tenu compte dans notre projet, en tant qu'elles nous ont paru justifiées et urgentes. Nous vous proposons en outre que la compétence déjà donnée à l'Assemblée fédérale, sous le régime transitoire actuel (art. 1er, lettre B, eh. 4, de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949), de modifier les arrêtés fiscaux en vigueur, afin de les adoucir ou de les simplifier, s'il devait paraître plus tard nécessaire de le faire, soit aussi inscrite dans le nouveau projet concernant le régime transitoire
(art. 5 du projet d'arrêté). Cette compétence doit être limitée aux arrêtés décidant des modifications qui ne visent pas une augmentation du rendement de l'impôt. Ce qui ne veut pas dire que l'Assemblée fédérale se verrait interdire toute correction des dispositions en vigueur qui pourrait amener, en l'espèce, une augmentation des prestations fiscales. L'Assemblée fédérale doit, par exemple, pouvoir prendre les mesures qui s'imposent pour supprimer des inégalités choquantes dans la charge fiscale ou simplifier la perception des impôts, même s'il s'ensuit un surplus de charge pour certains contribuables ; doivent seuls être exclus les arrêtés qui tendent, d'une manière générale, à accroître les recettes par de nouveaux impôts ou des impôts plus élevés.

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II ressort clairement du chapitre VI que les ressources mises à la disposition de la Confédération par le régime transitoire sont tout juste suffisantes. Il est donc absolument indiqué de freiner l'octroi d'allégements fiscaux. La situation actuellement tendue des finances fédérales exige que chaque adoucissement d'un impôt, qui va plus loin que le projet le prévoit, soit contrebalancé par le renforcement d'un autre impôt, afin de compenser la diminution de recettes à laquelle il faut s'attendre. Mais à ce moment se présente le problème central de la réforme des finances fédérales, celui où s'affrontent les opinions divergentes, la répartition des charges fiscales. Les questions de grande portée doivent être réservées à la réorganisation constitutionnelle des finances fédérales, qui doit être étudiée à fond et sous tous ses aspects ; elles ne doivent pas être préjugées par le régime transitoire, qui doit être traité dans le plus bref délai.

Le problème de la réforme des finances fédérales est, on le sait, très compliqué. Il comprend une foule de problèmes particuliers au sujet desquels les opinions divergent parfois profondément. On peut donc craindre que des groupements d'intérêts particuliers ne fassent dépendre leur approbation définitive de la manière dont sera traitée telle ou telle demande et qu'ils ne compliquent ou ne rendent impossible une réglementation constitutionnelle en maintenant obstinément leur pomt de vue. Plus il est présenté de demandes, plus le programme financier est surchargé, plus aussi il sera difficile de trouver une solution de conciliation. Nous devons mettre en garde contre ce danger et rappeler énergiquement que le régime transitoire réclamé par tous les milieux conscients de leurs responsabilités ne doit pas être condamné à échouer parce que tous les désirs et tous les espoirs, aussi justifiés qu'ils puissent paraître, ne sauraient être réalisés.

Lorsqu'on 1938 l'échec de la réforme des finances fédérales créa une situation analogue à celle d'aujourd'hui, les partis s'entendirent pour accepter une solution transitoire, en renonçant à modifier quant au fond les arrêtés fiscaux en vigueur. Il serait prudent également de procéder de cette manière dans l'état actuel des choses.

Pour les raisons exposées, nous devons nous: refuser à admettre dans le régime transitoire
un remaniement du système fiscal de la Confédération tel que le propose le postulat de M, le conseiller national Münz. Les modifications demandées quant à l'imposition de la consommation, la création d'un impôt fédéral direct à fort rendement et s'accordant autant que possible aux impôts cantonaux sur le revenu et sur la fortune, la suppression des droits de timbre, du droit sur les coupons, de l'impôt anticipé et de l'impôt compensatoire, le renforcement de l'imposition de l'alcool, sont des mesures de portée considérable. M. le conseiller national Münz met le législateur devant des problèmes qu'il est impossible de résoudre dans le peu de temps dont on dispose pour établir le régime transitoire et dont l'examen ne peut se faire que lors de la préparation d'une réforme complète. Quant

426 :aux postulats de MM. les conseillers nationaux Philippe Schmid et Häberlin, le projet d'arrêté ci-annexé semble en tenir compte de manière convenable.

III. LE CONTEmi DU RÉGIME TRANSITOffiE 1. La transformation du droit fiscal extraordinaire actuel en droit transitoire fondé sur la constitution Le régime transitoire prévu dans le projet ci-joint d'un arrêté fédéral sur le régime financier de 1951 à 1954 tend principalement à donner une base constitutionnelle aux mesures fiscales mentionnées dans l'arrêté fédéral du 21 décembre T949 concernant le régime transitoire des finances fédérales (régime financier de 1950 et 1951) et à proroger la durée de cea mesures.

L'article 1er du projet d'arrêté reprend la réglementation du régime financier de 1939 à 1941, avec les modifications qu'y a apportées le régime financier de 1946 à 1949, en tant que, dans l'intervalle, elle n'a pas été abrogée ou n'est pas devenue sans objet. Ainsi que l'exposait en détail notre message du 22 juillet 1949 concernant le régime transitoire des finances de la Confédération (FF 1942, II, 79 s, et 90 s.), il s'agit de certaines ·économies, de divers compléments et modifications du droit de timbre, de l'impôt sur la bière, des suppléments de prix sur les huiles et les graisses comestibles et des mesures pour maintenir le crédit du pays.

L'article 2 du projet d'arrêté a pour but de proroger par la voie constitutionnelle la perception des impôts institués, en vertu des arrêtés de l'Assemblée fédérale du 30 août 1939 et du 6 décembre 1945, par des arrêtés du Conseil fédéral, et encore prélevés on 1950, conformément au régime financier du 21 décembre 1949, savoir l'impôt pour la défense nationale -(sans l'impôt supplémentaire), l'impôt sur le chiffre d'affaires, l'impôt sur le luxe, l'impôt anticipé et l'impôt sur les prestations faites en vertu ·d'assurances sur la vie.

Les arrêtés fédéraux et arrêtés du Conseil fédéral qui seront prorogés ·doivent rester applicables dans leur teneur actuelle, en tant que des modifications ne sont pas prévues à leur sujet aux articles 3 et 4 du projet d'arrêté et en tant que l'Assemblée fédérale n'use pas la compétence qui lui est donnée par l'article 1er, lettre B, chiffre 4, de l'arrêté du 21 décembre 1949 et par l'article 5 analogue du projet d'arrêté ci-annexé, de procéder ultérieurement à des changements. Les chapitres suivants traitent des modifications les plus importantes qu'il y aurait lieu, à notre avis, d'envisager.

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2. La durée du régime transitoire Avant d'entrer en matière sur la modification de divers arrêtés d'ordre fiscal, il nous paraît judicieux d'exposer quelques considérations sur la durée du nouveau régime transitoire.

Le but de la réglementation transitoire est de garantir la continuité des ressources fédérales jusqu'au moment où la réforme des finances aura été réalisée. Cela ne saurait signifier, naturellement, qu'on entend déclarer cette réglementation applicable, dès le début et en' toutes ses parties, jusqu'au moment où le nouveau régime constitutionnel envisagé comme durable pourra déployer tous ses effets. Il faut, en revanche, que le régime transitoire soit établi au moins pour le temps nécessaire à donner leur nouveau fondement constitutionnel aux finances fédérales.

On ne peut prévoir encore aujourd'hui le temps qui sera nécessaire pour que le nouveau régime considéré comme définitif puisse être inscrit dans la constitution. Il n'existe pas encore d'indices permettant de conclure que le législateur surmontera rapidement les difficultés qui surgissent en ce domaine. Mais on peut supposer, d'autre part, que la grandeur de la tâche à mener à chef sera un stimulant à des efforts persévérants et que, chacun comprenant la nécessité de la collaboration, il sera plus aisé d'aboutir.

Si l'on pèse toutes les circonstances, il ne paraît pas impossible que le Conseil fédéral ait préparé la revision constitutionnelle, qu'elle ait été discutée par le Conseil national et le Conseil des Etats et qu'elle ait été soumise au peuple avant la fin de 1954. Nous vous proposons dès lors de déclarer le régime transitoire applicable pour quatre ans, ou, de façon plus précise, jusqu'au 31 décembre 1954.

Ce sera à l'arrêté fédéral concernant le régime définitif des finances fédérales (revision des articles financiers de la constitution) qu'il incombera de prolonger la durée du régime transitoire, pendant la période nécessaire, après l'acceptation des dispositions constitutionnelles revisées, pour créer la législation fédérale et cantonale d'exécution des nouveaux articles financiers; l'article 4 du projet rejeté le 4 juin 1950 aurait eu le même effet par rapport au régime transitoire actuel.

Le régime transitoire à créer actuellement doit remplacer l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949. Nous estimons qu'il n'y
a plus lieu de solliciter subséquemment l'approbation de cet arrêté par le peuple et les cantons, celui-ci cessant d'être en vigueur après l'expiration d'une année, conformément à l'article SQbia, 3e alinéa, de la constitution. Suivant la teneur même de la constitution, le régime transitoire actuel cesserait d'être en vigueur le 21 décembre 1950; il faudrait donc que le nouveau régime transitoire entre en vigueur dès le 22 décembre 1950 et non pas seulement dès le 1er janvier 1951. Dans ces conditions, il est indiqué de déclarer appli-

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cable le régime financier de 1951 à 1954 à partir de l'expiration du régime financier de 1950 et 1951 (ch. II, 1er al., du projet). Mais il faut préciser que les nouvelles modifications de fond à apporter aux arrêtés dont la durée d'application doit être prorogée par le nouveau régime transitoire n'entrent en tout cas en vigueur qu'à partir du 1er janvier 1951, car ces modifications doivent concorder avec la taxation afférente aux impôts fédéraux qui sont l'objet du régime transitoire, taxation reposant sur des années civiles et des trimestres civils (art. 3, lettre b, et 4 du projet).

3. Modification de l'arrêté relatif à l'impôt pour la défense nationale A. INNOVATIONS A DÉCIDER DANS L'ARRÊTÉ CONCERNANT LE RÉGIME FINANCIER DE 1951 à 1954 a. Prorogation de la durée de validité Le but du régime transitoire exige que la durée de validité de l'arrêté relatif à l'impôt pour la défense nationale soit prorogée (art. 2, lettre a, du projet d'arrêté). La conséquence de cette prorogation est que l'impôt pour la défense nationale devra être perçu au delà de 1950, soit de 1951 à 1954; après 1954, en revanche, l'arrêté ne restera applicable que pour faire valoir des prétentions nées avant le 1er janvier 1955.

La prorogation de la durée de perception de l'impôt pour la défense nationale a comme conséquence que la déduction supplémentaire du revenu selon l'article 25, 1er alinéa, lettre a, de l'arrêté relatif à l'impôt pour la défense nationale, qui ne vaut actuellement que pour le régime financier de 1950 et 1951 (art. 1er, lettre B, ch. 2, lettre b), doit également être autorisée dans les taxations des périodes suivantes (art. 2, lettre a, du projet d'arrêté).

b. Déduction exonérée en matière d'impôt complémentaire sur la fortune Dans notre message du 22 janvier 1948, nous avons proposé, pour le cas où la Confédération serait autorisée à lever un impôt direct, un impôt d'amortissement qui eût présenté des modifications essentielles par rapport à l'impôt pour la défense nationale. Tenant compte de la charge généralement très lourde dont la fortune et son rendement sont frappés par les impôts cantonaux et communaux, nous n'avions envisagé, pour les personnes physiques, qu'un impôt sur le revenu et nous avions renoncé à l'impôt complémentaire sur la fortune. Pour tenir compte de la diminution de valeur de l'argent, il avait été prévu des minimums nécessaires à l'existence plus élevés et un nouveau tarif établi d'après le principe de la progression par

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tranches successives. Pour les personnes morales, une charge proportionnelle avait été proposée, dans l'idée de contribuer ainsi, en ce domaine également, à une meilleure péréquation de l'ensemble de la charge fiscale suisse.

Le Conseil national voulait d'abord tenir compte de la critique faite à l'impôt pour la défense nationale, ainsi qu'à l'impôt d'amortissement prévu par le Conseil fédéral, en proposant un tarif fortement réduit. On peut se demander s'il y a lieu, dans l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 comprenant l'impôt pour la défense nationale, de tenir compte de considérations de ce genre, tendant à améliorer ou adoucir les dispositions en vigueur.

La réponse doit être en principe négative. Le régime transitoire, dans le bref délai à disposition, ne peut être discuté pai: les chambres et soumis à la votation populaire que si l'on renonce à toutes modifications essentielles et que l'on évite tout ce qui pourrait être considéré comme préjugeant le régime financier définitif. On ne peut également prendre en considération une réduction générale des tarifs. Le Conseil national avait admis à l'époque une forte diminution du tarif applicable à l'impôt sur le revenu, mais il avait simultanément envisagé la suppression des parts cantonales à différentes recettes de la Confédération pour un montant total d'environ 70 millions de francs, en même temps que l'institution d'un impôt sur les boissons rapportant annuellement 40 millions de francs. Aussi longtemps qu'on ne sait pas ce que sera le régime financier définitif de la Confédération et tant que les cantons ne connaissent pas les dispositions à prendre pour l'application de ce régime, on ne peut demander à ces derniers de renoncer à leur part aux impôts fédéraux. D'autre part, pendant le régime financier provisoire, la Confédération ne peut pas non plus abandonner une partie importante des recettes que lui procure l'impôt pour la défense nationale.

Le refus d'apporter des modifications essentielles à l'impôt pour la défense nationale ou de réduire cet impôt d'une manière générale n'exclut cependant pas certaines adaptations de l'arrêté relatif à l'impôt pour la défense nationale, tenant compte des conditionä modifiées, et n'empêche pas de combler quelques déficiences qui se soni; révélées dans cet arrêté.

Des amendements
de ce genre ont déjà eu lieu précédemment. C'est ainsi qu'on a introduit une déduction de 1000 francs du revenu imposable (arrêté du Conseil fédéral du 19 octobre 1949); puis, cette somme ayant été portée à 2000 francs (régime financier de 1950 à 1951), l'augmentation relative des charges, due à la diminution de la valeur de l'argent, a été notablement compensée. Ce dégrèvement intervient pour toutes les catégories de contribuables. Il a replacé les montants du revenu francs d'impôts au niveau de la valeur effective qu'ils avaient à l'origine et a tenu compte de l'ascension dans des classes supérieures, due à l'accroissement du revenu nominal alors que pratiquement le revenu réel ne s'est pas modifié.

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Ces allégements sont également favorables à ceux qui reçoivent un revenu de capitaux et ils constituent un dégrèvement notable pour lea petits rentiers. Cependant, contrairement à l'impôt sur le revenu, l'impôt complémentaire sur la fortune non seulement est resté sans changement quant à son montant nominal, mais, en fait, il est même devenu plus lourd à un double point de vue. En règle générale, les personnes qui doivent tirer leur subsistance du rendement de leur fortune ne peuvent rien contre la diminution de valeur réelle, due au renchérissement, de cette fortune et de son rendement; elles doivent en plus se résigner, vu la diminution des taux d'intérêt, à l'amoindrissement du rendement nominal de leurs capitaux. Le fait suivant illustre le développement de cette situation: le rendement moyen des obligations suisses, qui était considérablement au-dessus de 3 pour cent pour la moyenne des années 1944 à 1948 (3,42 % en 1948), est tombé en 1950 à 2,55 pour cent de la valeur de cours déterminante pour le calcul de l'impôt complémentaire. La charge provenant de l'impôt complémentaire, mesurée sur le rendement des capitaux, s'est donc accrue de plus d'un tiers au cours de quelques années.

Cette augmentation relative des charges fiscales est d'autant plus lourde qu'elle se manifeste aussi, pour les mêmes motifs, dans les impôts élevés sur la fortune que perçoivent les cantons et les communes. Le tableau suivant montre la mesure de ces charges et le profond écart entre celles qui grèvent le produit du travail et le revenu du capital, singulièrement pour les petits et moyens revenus.

Pour un revenu (personne mariée, sans cnfaDts)

de

La charg-e provenant dcg impôts fédéraux, cantonaux et, communaux sur le revenu et sur la fortune s'élève, poni1 la moyenne deg chels-lieux do cantons sur lo revenu du travail Canton et commune

Confédération

lianes 3000 6000 15000 30000 60 000

sur le rendement (3%) de la fortune

Total

Canton et commune

Confédération

Total

en pour-cent du revenu

1,8

--

4,3

0,8

5,1

9,2

2,1

11,3

4,6

17,8 26,0

13,2 15,4

10,6

1,8

23,6 28,1 34,8 40,5 43,5

7,3 8,8

12,1 17,5 24,3

30,9 36,9 46;9 58,0 67,8

Pour les motifs indiqués, on ne peut procéder à des modifications profondes dans le régime transitoire de 1951 à 1954. Il serait cependant justifié de corriger aussi en quelque manière l'impôt complémentaire, puisque l'on a tenu compte des effets de la dépréciation de l'argent pour l'impôt sur le revenu.

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D'après le régime financier de 1950 et 1951, un montant de 2000 francs est exempt de l'impôt sur le revenu. Nous vous proposons de prévoir aussi un allégement analogue pour l'impôt complémentaire, c'est-à-dire d'admettre que l'on puisse déduire de la fortune un montant de 20 000 francs exempt d'impôt (art. 3, lettre b, du projet d'arrêté).

Cet allégement déploierait ses effets pour toutes les personnes assujetties à l'impôt complémentaire, mais il serait particulièrement sensible, comme le montre le tableau suivant, pour les possesseurs de petites fortunes.

Impôt complémentaire Fortune Ir.

jusqu'à 10 000 10 000 15000 20000 25000 30000 40000 50000 100 000 500 000 1 000 000

Actuel

Nouveau

Ir.

Îr.

--

-- -- .--

S. --

7.50 10.-- 12.50 15.-- 20.--

30.-- 70.-- 750. -- 2500.--

.-- --.

S.-- 10.-- 15.-- 48.-- 672. -- 2353.--

Réduction fr.

---

en % --

5---

100

7.50 10.-- 13.50 10.-- 10.-- 15.-- 22.-- 78--- 148.--

100 100 100 66 50 50 30 12 6

Bien que l'allégement proposé soit modeste et qu'il n'entraîne pour la Confédération qu'une diminution de recettes de 3,8 millions de francs, il serait cependant considéré comme un. témoignage clé bonne volonté et contribuerait ainsi à calmer le mécontentement qui s'est fait jour dans de larges milieux: de petits et moyens possédants.

B. AUTRES MODIFICATIONS En plus des modifications dont il a été question plus haut et qui devraient être ordonnées, vu leur importance particulière, par l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954, il y a encore d'autres adoucissements à envisager en matière d'impôt pour la défense nationale. En outre, les dispositions de l'arrêté relatif à cet impôt qui concernent les périodes de taxation (art. 7 de cet arrêté) et les périodes de calcul (art. 41 et 58 de cet arrêté) doivent être adaptées à la durée de perception de l'impôt qui est prorogée.

Ces rectifications et adoucissements devraient cependant être réservés à -des arrêtés ultérieurs de l'Assemblée fédérale, compétente en vertu de l'article 5 du projet.

432 Tenant compte des critiques formulées lors des discussions sur la réforme des finances, nous estimons qu'il s'agirait en particulier -- sans compter la fixation des périodes de taxation et de calcul -- des modifications suivantes.

a. Amortissements et réserves d'amortissement (provisions) Selon les principes qui ont été énoncés en vue de l'impôt d'amortissement dans notre message du 22 janvier 1948 concernant la réforme constitutionnelle des finances de la Confédération (FF 1948,1, 521), l'arrêté relatif à l'impôt pour la défense nationale (art. 22, 1er al., lettre ô) doit être modifié de manière que les autorités fiscales puissent adopter une pratique plus libérale en matière d'amortissements et de réserves d'amortissements. A la suite de la suppression de l'impôt particulièrement élevé sur les bénéfices de guerre, dont la perception n'était prévue que pour quelques années, et de l'impôt supplémentaire pour la défense nationale, on pourra notamment renoncer à la disposition restrictive selon laquelle les diminutions de valeur ne peuvent être prises en considérations que si elles sont intervenues pendant la période de calcul.

Une pratique plus large en matière d'amortissements permettra aussi de considérer convenablement les besoins des détenteurs de stocks obligatoires. Cela rendra inutile des dispositions spéciales à ce sujet et permettra en conséquence de supprimer l'arrêté du Conseil fédéral du 30 novembre 1948 sur le traitement des stocks obligatoires en matière d'impôt pour la défense nationale.

D'autre part, vu l'élargissement de la pratique en mantière d'amortissements, il y aura lieu de décider que, pour les sociétés de capitaux, les réserves provenant de bénéfices non imposés ne doivent pas être ajoutées au capital proportionnel déterminant pour fixer le taux applicable au calcul de l'impôt sur le bénéfice net, b. Cotisations des membres d'associations Conformément à l'article 21 de l'arrêté concernant l'impôt pour la défense nationale et aux arrêts rendus à ce sujet par le Tribunal fédéral, les cotisations des membres ont été comptées jusqu'ici dans le revenu imposable des associations, en tant que celles-ci ne les avaient pas employées à couvrir des dépenses au cours de l'année où elles les avaient encaissées. Cette pratique a été critiquée ; les charges résultant de son application
ont effectivement été inégales pour les diverses associations, suivant leur nature, leur but et le genre de membres qui en faisaient partie. Il y aura lieu en conséquence d'envisager dans une disposition spéciale l'exonération des cotisations statutaires des membres d'associations.

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c. Taxations intermédiaires Afin d'empêcher les conséquences particulièrement dures et les inégalités des charges fiscales pouvant résulter de l'application du principe selon lequel la taxation est déterminante pour toute la durée de la période de taxation, c'est-à-dire pour deux ans (art. 7, 2e al., de l'arrêté concernant l'impôt pour la défense nationale), il sera indiqué de prévoir la possibilité de procéder à des taxations intermédiaires. Une correction de la taxation primitive pour le reste de la période de taxation devra être prévue notamment en cas de modification sensible des revenus du contribuable (décès, cessation de l'activité à but lucratif, etc.).

C. DEMANDES QUI N'ONT PAS ÉTÉ PRISES EN CONSIDÉRATION Suppression de l'impôt pour la défense nationale sur les ristournes et les rabais Dans le projet d'arrêté concernant le régime financier des années 1951 à 1954, le postulat demandant la suppression de l'impôt pour la défense nationale sur les ristournes et les rabais n'a pas été pris en considération.

Quant à savoir si et dans quelle mesure les ristournes de sociétés coopératives de consommation et d'associations de vente au rabais doivent être imposées, c'est là une question de peu d'importance du point de vue fiscal (les recettes annuelles provenant de l'impôt sur les ristournes et les rabais atteignent environ 600 000 francs), mais elle est très délicate du point de vue politique, et vivement discutée. Les essais de concilier les opinions opposées en proposant de nouveaux compromis ont malheureusement échoué.

Il serait regrettable que les délibérations sur un objet aussi important et urgent que le régime financier transitoire fussent compliquées par la discussion d'un problème auquel aussi bien les coopératives de consommation, d'une part, que l'artisanat et le commerce de détail non organisé sous la forme de sociétés coopératives, d'autre part, attribuent une importance de principe, plutôt que d'ordre pratique. Nous estimons qu'une question de détail comme celle de l'imposition ou de l'exonération des ristournes ne peut être réglée dans un projet tendant à modifier la constitution et qu'une décision à ce sujet devrait être renvoyée jusqu'au moment où l'Assemblée fédérale aura à s'occuper de la revision de l'arrêté relatif à l'impôt pour la défense nationale. Nous prions instamment
les milieux particulièrement intéressés de ne pas faire de la question des ristournes et rabais un des points où se jouera le sort du régime financier transitoire.

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4. Les modifications de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires A. INNOVATIONS A INTRODUIRE DANS LE RÉGIME FINANCIER DE 1951 à 1954 a. Prorogation de la durée de validité La perception de l'impôt sur le chiffre d'affaires au delà de l'année 1950 est indispensable. Il est impossible de remplacer cet impôt, sous le régime d'une réglementation intérimaire, par une autre source de recettes de même rendement. L'article 2, lettre b, du projet d'arrêté prévoit dès lors la prorogation de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires jusqu'au 31 décembre 1954.

b. Extension de la liste des marchandises franches d'impôt L'article 1er, lettre B, chiffre 3, de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949 concernant le régime financier de 1950 et 1951 exclut l'imposition de la livraison, de la consommation particulière, de l'acquisition et de l'importation des denrées alimentaires de première nécessité. L'application de cette prescription a révélé qu'il était non seulement très difficile, mais tout à fait impossible de trouver, dans le domaine des aliments, une discrimination satisfaisante et pratiquement utilisable entre les denrées alimentaires de première nécessité et celles qui ne le sont pas. Les exonérations introduites ont dès lors provoqué dans la boulangerie-pâtisserie les différences de charge fiscale intolérables qui ont été exposées dans notre message du 21 avril 1950, et qui exigeaient une rectification immédiate. Celle-ci est intervenue en ce sens que l'arrêté fédéral du 22 juin 1950 a affranchi des obligations qui leur incombaient jusqu'alors comme contribuablesgrossistes les entreprises de boulangerie et pâtisserie, ainsi que les entreprises de fabrication qui se livrent à la confection de produits de boulangerie, de confiserie et de chocolat. Les marchandises fabriquées par ces entreprises ne sont dès lors grevées de l'impôt sur le chiffre d'affaires qu'en tant que leurs producteurs doivent acquérir avec la charge de l'impôt quelques rares matières premières et produits auxiliaires.

A la suite de cette évolution, la liste des aliments faisant l'objet de transactions encore soumises à l'impôt s'est réduite à quelques catégories de marchandises. Elle ne comprend plus, outre quelques espèces de marchandises sans intérêt fiscal (gibier, volaille, coquillages et crustacés, miel)
que les conserves de légumes, de fruits, de viande et de lait. Il s'agit là de marchandises dont l'assujettissement à l'impôt se justifie difficilement, du moment que la confiserie fine, le chocolat et les sucreries de tout genre peuvent pratiquement faire l'objet de transactions franches d'impôt.

Il est compréhensible que les entreprises qui se livrent à la fabrication et

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à la vente de conserves se sentent désavantagées et réclament l'égalité de traitement. En outre, le calcul des prix est rendu beaucoup plus difficile, chez les détaillants en denrées alimentaires qui transfèrent l'impôt sur le chiare d'affaires sous forme apparente, lorsqu'il faut constamment tenir compte de différences de charge fiscale.

Il ne sera pas possible, dans ces conditions, de maintenir longtemps dans son état actuel la liste des marchandises qui peuvent faire l'objet do transactions franches d'impôt. L'évolution introduite par l'arrêté concernant le régime financier de 1950 et 1951 et continuée par l'arrêté de l'Assemblée fédérale du 22 juin 1950 doit se poursuivre pour ainsi dire irrémédiablement jusqu'au terme que constitue la franchise fiscale de toutes les transactions portant sur les aliments, auxquels il faudrait, conformément à la réglementation actuelle, assimiler le café et, par égalité de traitement, le thé. Ce dernier pas, que le Conseil fédéral, à l'article 4, lettre a, de son projet, recommande maintenant de franchir, n'a plus une grande portée fiscale. La nouvelle diminution de rendement ne portera annuellement que sur 4 millions de francs en nombre rond, alors qu'on a déjà renoncé, par les deux arrêtés susmentionnés, à une recette annuelle de l'ordre de 37 millions de francs.

Les expériences que l'extension de la liste des marchandises franches d'impôt a permis de faire démontrent la facilité avec laquelle l'émiettement de l'impôt sur le chiffre d'affaires peut être entrepris et la difficulté de mettre fin à un tel processus.

La liste des denrées alimentaires franches d'impôt doit se limiter aux aliments, café et thé et ne pas comprendre les boissons, à l'exception du lait qui fait l'objet de transactions franches d'impôt depuis l'introduction de l'impôt sur le chiffre d'affaires.

c. Réduction de l'impôt sur les transactions en produits auxiliaires pour l'agriculture Aux termes de l'article 19, 1er alinéa, lettre a, de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires, les transactions portant sur les engrais, litières et fourrages dont l'espèce est déterminée sous les nos 161 à 170 et 211 à 217 du tarif suisse d'usage douanier, ainsi que sur les fourrages verts et la cellulose fourragère, sont soumises à l'impôt aux taux réduits de 2 pour cent pour les livraisons
au détail et de 2% pour cent pour les livraisons en gros.

Une ancienne revendication de l'agriculture suisse tend à ce que le même régime fiscal soit appliqué non seulement aux transactions portant sur les engrais, litières et fourrages qui ne sont pas rangés sous les numéros susmentionnés du tarif douanier, mais en outre aux transactions portant sur les produits pour la protection des plantes (produits chimiques pour

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la lutte contre les parasites) et sur les semences. Nous avons promis maintes fois d'examiner ces demandes et accepté à ce sujet, au cours de la session de juin passé, un postulat de M. le conseiller national Müller-Olten.

On doit convenir que la différence dans le traitement fiscal d'importants produits auxiliaires de l'agriculture ne se justifie guère et donne lieu dans le commerce à certaines difficultés pratiques. Nous sommes dès lors d'avis qu'il y a lieu de donner suite au postulat et d'introduire une disposition correspondante dans l'arrêté concernant le régime transitoire (art. 4, lettre b).

La diminution de recettes qui résultera de la réduction d'impôt prévue doit être estimée à environ 2 millions de francs.

B. AUTRES MODIFICATIONS Interdiction du transfert apparent de l'impôt dans les transactions au détail

L'impôt sur le chiffre d'affaires a été jusqu'ici, en règle générale, ajouté au prix des marchandises d'une manière visible pour l'acheteur. Ce procédé ne saurait satisfaire à la longue, pour les raisons suivantes. La charge fiscale ne peut être graduée d'après les différences de qualité, et cela pour des motifs techniques; on ne peut, en effet demander aux entreprises contribuables comme grossistes au sens de l'arrêté instituant l'impôt sur le chiffre d'affaires l'utilisation de tarifs compliqués. L'appréciation de l'impôt sur le chiffre d'affaires du point de vue économique et social ne doit cependant pas se fonder sur la transaction particulière et la charge qui la grève, mais sur l'effet général, sur la somme des charges qui, dans leur variété, se répartissent pour chaque consommateur, au cours d'une période prolongée, sur les acquisitions de marchandises de nécessité plus ou moins urgente. A cette appréciation erronée, le consommateur est cependant amené plus ou moins directement, par le fait que l'impôt sur le chiffre d'affaires est toujours encore, d'une manière générale, dans le commerce de détail, l'objet d'un transfert apparent, c'est-à-dire qu'il est facturé séparément au client, à côté du pris. Ce procédé n'est pas, il est vrai, inadmissible aux termes de l'article 29 de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires, mais il s'est révélé nécessaire de le modifier.

Pour les détaillants, l'impôt sur le chiffre d'affaires représente un élément du coût de revient comme bien d'autres (tels que frais commerciaux, frais de douane, de transport, d'assurance, de réclame, etc.) qui sont calculés dans le prix de la marchandise et ne sont dès lors pas facturés séparément au client. La mise en compte séparée de l'impôt sur le chiffre d'affaires constitue, pour le petit commerce, non pas une simplification, mais une surcharge considérable; il est en effet certainement plus simple de calculer l'impôt sur le chiffre d'affaires une fois pour toutes, en fixant le prix d'une

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marchandise, que de refaire ce calcul lors de chaque transaction particulière et de facturer séparément le montant d'impôt, ce qui provoque, d'après l'expérience, de nombreuses erreurs de calcul. Pour le consommateur, l'inclusion de l'impôt dans le prix présente l'avantage de le renseigner plus rapidement et plus sûrement sur le prix véritable d'une marchandise. On épargne ainsi des complications et de l'humeur tant au détaillant qu'au consommateur. La charge d'impôt n'est plus guère ressentie comme telle et provoque dès lors moins de mécontentement.

Les avantages du transfert implicite dans les transactions au détail ont déjà été reconnus par de nombreuses entreprises détaillantes et le nombre des maisons qui incluent l'impôt dans le prix de vente augmente dès lors constamment. Or, précisément, cette pratique manquant d'uniformité et la difficulté pour le consommateur de s'orienter provoquent de nouveaux désagréments. Il serait dès lors reconunaiidable de suivre l'exemple d'autres Etats en interdisant la mise en compte' séparée de l'impôt sur le chiffre d'affaires dans les transactions au détail. Les dispositions nécessaires à cet effet devraient être réservées à un arrêté ultérieur de l'Assemblée fédérale, conformément à l'article 5 du projet.

C. DEMANDES QUI N'ONT PAS ÉTÉ PRISES EN CONSIDÉRATION L'impôt sur le chiffre d'affaires a fait l'objet d'une série de demandes de portée très considérable, mais dont la réalisation, selon nous, ne peut entrer en ligne de compte ou du moins ne peut être prise en considération dans le régime financier de 1951 à 1954.

a. Initiative tendant à la suppression do l'impôt sur le chiffre d'affaires La demande la plus radicale provient de l'initiative du parti du travail concernant l'impôt sur le chiffre d'affaires, qui a abouti ainsi qu'il ressort de notre rapport du 12 mai 1950. Cette initiative propose l'adoption d'un nouvel article 42, 2e alinéa, de la constitution, en vertu duquel la Confédération ne serait pas autorisée à prélever d'impôts portant sur le chiffre d'affaires.

Nous vous adresserons prochainement un rapport au sujet de cette initiative. Les chambres auront à décider dans le délai d'une année, c'està-dire jusqu'en mai 1951, si elles approuvent ou non le projet d'initiative (art. 8 de la loi fédérale du 27 janvier 1892 concernant le mode de
procéder pour les demandes d'initiative populaire et les votations relatives à la revision de la constitution fédérale).

Il ne saurait y avoir de doute quant au fait qu'on ne peut donner suite à cette initiative dans le cadre du régime financier de 1951 à 1954.

Feuille fédérale. 102° année. Vol. II.

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L'initiative ne tend pas seulement à la suppression de l'impôt actuel sur le chiffre d'affaires ; elle entend enlever à la Confédération, d'une manière générale, le pouvoir de prélever des impôts portant sur le chiffre d'affaires.

L'adoption de la disposition constitutionnelle proposée n'empêcherait donc pas seulement de continuer à percevoir l'impôt sur le chiffre d'affaires, mais également l'impôt sur le luxe, l'impôt sur les tabacs et l'impôt sur la bière, ce qui représenterait la renonciation à des sources de recettes qui ont rapporté, ensemble, 527 millions de francs à la Confédération en 1949.

En outre, la perception future d'un impôt sur les boissons serait exclue.

Une telle diminution de recettes, point n'est besoin de l'expliquer davantage, ne pourrait être compensée en temps utile, même imparfaitement, par la création d'autres sources de recettes, et constituerait donc une catastrophe pour les finances fédérales.

b. Postulat Münz Dans le postulat qu'il a présenté le 6 juin 1950, M. le conseiller national Münz propose de prévoir pour le régime financier de 1951 à 1954 une imposition très réduite de la consommation, épargnant avant tout les objets de nécessité vitale. Nous estimons avoir fait droit essentiellement à ce postulat en proposant d'exclure de l'impôt les transactions portant sur tous les aliments et réduire l'impôt quant aux transactions portant sur des produits auxiliaires pour l'agriculture. On ne saurait recommander de faire un pas de plus et d'instituer d'autres allégements dans l'arrêté concernant le régime financier pour 1951 à 1954, étant donné que la Confédération ne peut renoncer aux recettes qu'elle tire encore de l'impôt sur le chiffre d'affaires. Les expériences faites à propos de la dernière extension de la liste des marchandises franches d'impôt ont d'ailleurs montré quelles lourdes conséquences pouvait avoir l'introduction d'exceptions.

5. La défense contre les mesures fiscales de l'étranger Les besoins financiers de tous les Etats avec lesquels la Suisse entretient d'étroites relations économiques se sont accrus depuis la seconde guerre mondiale, ce qui a conduit partout au développement de la législation fiscale et à une application plus serrée des dispositions en la matière.

Les limites de l'assujettissement subjectif à l'impôt ont été, elles aussi,
étendues dans une mesure extraordinaire, au mépris souvent des principes, que le droit fiscal avait universellement admis jusqu'alors quant aux limites territoriales de la souveraineté en matière d'impôts et quant à l'appartenance fiscale des personnes et des choses. Notre économie a été atteinte ainsi de plus en plus par des prétentions de souveraineté fiscales étrangères qui lui semblent injustes. Cet état de choses a manifesté de façon toujours plus évidente la disproportion des moyens dont nous dis-

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posons, comparativement à l'étranger, pour protéger, sur ce. terrain, nos intérêts économiques. Alors que le droit fiscal d'autres Etats accuse nettement des tendances extensives et se distingue par la diversité des rapports personnels ou économiques, entre souveraineté fiscale et sujet, qui sont susceptibles d'entraîner l'imposition, le droit fiscal suisse respecte en général, même vis-à-vis de l'étranger, les principes établis pour empêcher la double imposition dans le domaine intercantonal. Les souverainetés fiscales suisses ne sont donc pas en mesure de s'opposer, par des mesures analogues, aux empiétements des Etats étrangers sur le terrain fiscal.

Cet état d'infériorité se manifeste tout particulièrement à l'occasion des pourparlers tendant à la conclusion de conventions internationales en vue d'empêcher la double imposition; les négociateurs suisses doivent, chaque fois, y demander beaucoup, tout en ayant peu à offrir.

La recherche de la prospérité commune et les propres intérêts fiscaux d'un Etat exigent que celui-ci protège ses ressortissants contre une imposition injuste de la part de l'étranger. On peut s'opposer à des empiétements de l'étranger en concluant des conventions internationales et en pratiquant la rétorsion fiscale. H est donc urgent, vu le cours que prennent les choses, de parer aux mesures fiscales d'autres Etats qui sont contraires à la tradition suisse, quant à la limitation territoriale des attributions en matière d'imposition, en octroyant à la Confédération la faculté de prendre des mesures de rétorsion dans le domaine fiscal. La possibilité de percevoir à titre de représailles, dans les relations avec l'étranger, des impôts fédéraux spéciaux, est limitée actuellement au domaine des droits de timbre (art. 9 de la loi sur le timbre). Mais ce moyen est sans portée lorsqu'il s'agit de parer aux énormes impôts que l'étranger perçoit sur le revenu et la fortune et à l'égard desquels notre économie sollicite protection. Le succès ne peut être obtenu que par des moyens qui soient adéquats aux mesures d'imposition auxquelles il y a lieu de s'opposer. l'armi ces moyens rentrent en premier lieu l'imposition à la source, par voie de rétorsion, du revenu que reçoivent, de Suisse, des personnes domiciliées à l'étranger, ainsi que l'imposition de la fortune mobilière se trouvant
en Suisse et appartenant à des personnes domiciliées dans un Etat qui impose une fortune de ce genre suivant le lieu où elle est située.

Le but de tels impôts protecteurs et de rétorsion n'est pas de procurer au fisc de nouvelles sources de recettes, mais de parer à des empiétements commis par l'étranger. A en juger par les expériences acquises lors des pourparlers en vue de la conclusion de conventions tendant à empêcher la double imposition, on peut être certain que la seule existence d'une disposition octroyant une compétence en ce domaine sera de nature à exercer un effet préventif considérable. C'est pourquoi, lors de la discussion sur la réforme constitutionnelle des finances fédérales, notre proposition tendant à l'adoption d'une disposition adéquate à ce sujet trouva l'agrément

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de l'Assemblée fédérale. L'arrêté fédéral du 21 mars 1950 s'est borné, il est vrai, à accorder la compétence d'instituer des impôts à la source (art. 42 bis, 1er alinéa, lettre c, du projet constitutionnel), l'imposition, par mesure de rétorsion, de la fortune appartenant à des étrangers, que l'on envisageait comme partie intégrante de l'impôt d'amortissement (chapitre II, art. 4, 1er alinéa, lettre e, de la décision du Conseil national) étant tombée avec cet impôt lui-même.

On peut se demander s'il se justifie d'introduire la compétence d'ordonner des impôts protecteurs et de rétorsion dans un régime transitoire qui n'est établi que pour un nombre restreint d'années. Toutefois, le besoin de protection et de défense revêt un caractère des plus actuels, et comme, à l'heure où nous sommes, il n'est pas possible d'y satisfaire par une réglementation durable, on ne saurait prendre sur soi de négliger l'occasion qui se présente de le faire en insérant les prescriptions y relatives parmi celles d'un régime à court terme. Il ne faut pas perdre de vue à ce sujet que des pourparlers tendant à la conclusion de conventions en vue d'éviter la double imposition avec des Etats qui perçoivent des impôts à la source inconnus dans notre pays et frappant notre économie, ainsi que des impôts sur la fortune prélevés suivant des règles qui nous sont étrangères, ou sont déjà en cours (avec les Pays-Bas et les Etats-Unis) ou vont commencer (avec l'Italie et la Grande-Bretagne). Il serait dès lors extrêmement désirable que la Confédération reçût prochainement la compétence d'instituer des impôts de rétorsion, ce qui ne manquerait pas de fortifier la position de notre pays lors de ces négociations.

L'autorisation de pratiquer la rétorsion fiscale peut être délimitée de façon si générale qu'elle laisse au législateur, soit quant à la nature des impôts à instituer et aux conditions objectives et subjectives de l'assujettissement à l'impôt, soit quant aux taux de l'impôt, entière liberté de prendre, dans les rapports avec des Etats étrangers, toute mesure fiscale de rétorsion qui lui paraîtra indiquée. Mais elle peut aussi énumérer en détail les mesures envisagées et tendre ainsi à l'institution de certains types d'imposition, ce qui serait certainement de nature à accroître l'effet préventif et psychologique de ces
dispositions. Notre projet prévoit, à l'article 6, une combinaison d'attributions générales et spéciales, c'est-à-dire une solution particulièrement judicieuse pour la Suisse.

IV. DISPOSITIONS PLUS RIGOUREUSES RELATIVES AUX DÉPENSES Le projet d'arrêté fédéral concernant la réforme constitutionnelle des finances de la Confédération, qui fut rejeté le 24 juin 1938 par le Conseil national, contenait déjà une disposition selon laquelle les crédits alloués par des arrêtés fédéraux soustraits au referendum ne peuvent être supé-

441, rieurs aux montants demandés par le Conseil fédéral ni être affectés à d'autres buts. Cette disposition aurait ainsi empêché les conseils législatifs 'de fixer dans leurs arrêtés des dépenses supérieures à celles qui sont proposées par le Conseil fédéral.

Dans notre message du 22 janvier 1948, nous prévoyions (art. 1er i art. 42ter, 3e al., du projet d'arrêté) que la majorité absolue des membres de chacun des deux conseils législatifs était requise pour édicter les arrêtés concernant une augmentation des dépenses proposées par le Conseil fédéral ou de nouvelles dépenses. Tandis que le Conseil des Etats approuva cette restriction des attributions parlementaires, le Conseil national la rejeta par 108 voix contre 35. La commission de ce dernier conseil considérait que les arrêtés relatifs à des dépenses, non soumis au referendum mais ayant toutefois une certaine importance pour les finances fédérales, devaient, pour être valables, avoir été adoptés par la majorité absolue des membres des deux conseils. Le Conseil national se rallia à cette manière de voir (85 voix contre 81). Mais, une entente n'ayant pu intervenir entre le Conseil des Etats et le Conseil national, cette divergence fut soumise à la conférence de conciliation qui, après de longs débats, décida par 35 voix contre 15 (ces derniers membres recommandaient de biffer toute restriction des attributions parlementaires) d'adopter un texte selon lequel la majorité absolue des membres de chacun des deux conseils législatifs est requise pour édicter les arrêtés qui concernent l'approbation de dépenses uniques supérieures à un million de francs ou de dépenses périodiques de plus de cent mille francs, ainsi que l'augmentation, dans les mêmes limites, de dépenses déjà décidées, si la votation populaire ne peut pas être demandée pour ces arrêtés ou s'ils ne se fondent pas sur des lois fédérales ou arrêtés fédéraux de portée générale déjà en vigueur.

Le régime transitoire du 21 décembre 19-19 actuellement en vigueur contient aussi à l'article 1er, lettre D, une disposition analogue.

L'expérience montre que l'importance pratique de telles prescriptions est assez problématique. Elles ont plutôt un caractère psychologique et tactique.

H est incontestable qu'une telle disposition restreint les attributions parlementaires fixées par l'article 89
de la constitution. Eu égard au principe de la séparation des pouvoirs, principe qui appartient aux règles fondamentales de la Confédération, il paraît en tout cas juste que l'initiative tendant à restreindre ces droits doive émaner non pas du Conseil fédéral, maisdes conseils législatifs eux-mêmes.

Nous estimons qu'il suffit d'attirer votre attention sur ces questions ;.

nous ne faisons par conséquent à ce sujet aucune proposition dans le projet d'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954.

442 V. PROPOSITIONS QUI NE RENTRENT PAS »ANS LE RÉGIME TRANSITOIRE

1. Le financement des mesures destinées à combattre la crise Dans la session de juin 1950, M. le conseiller national Spühler a proposé, en liaison avec son postulat concernant le régime transitoire pour la réforme des finances fédérales, que le nouveau projet prévoie l'ouverture d'un crédit de quelques centaines de millions de francs pour la création de possibilités de travail.

Notre rapport intermédiaire du 12 juin 1950 expose de façon détaillée les mesures propres à créer de telles possibilités. Il contient un chapitre spécial sur le degré de préparation financière de la Confédération à la fin de 1949 (FF 1950, II, 111 s.). Il en ressort qu'à cette époque les ressources disponibles pour les mesures prises en vue de créer des possibilités de travail s'élevaient encore à 74,5 millions de francs. Ce rapport mentionne en outre les deux réserves constituées avec le produit de l'impôt sur les bénéfices de guerre et de l'impôt anticipé. On pourrait ainsi consacrer à la création de possibilités de travail environ 100 millions de francs à prélever sur la réserve provenant de l'impôt sur les bénéfices de guerre et quelque 215 millions à imputer sur la réserve constituée avec le produit de l'impôt anticipé. Un prélèvement sur la réserve constituée avec le produit de l'impôt anticipé ne pourra toutefois se faire que si cet impôt devient une source de recettes permanente prévue par la constitution. La Confédération dispose donc, sous certaines réserves, d'environ 400 millions de francs pouvant être affectés à la création de possibilités de travail. L'Assemblée fédérale peut ainsi allouer, pour combattre une crise économique, des crédits dans le cadre de cette somme sans amoindrir en quoi que ce soit l'état de fortune de la Confédération.

Dans ces circonstances, la Confédération ne serait financièrement pas prise au dépourvu en cas de crise économique. Mais il y a lieu de relever que la situation s'est profondément modifiée depuis la crise qui eut lieu après 1930. Inséré dans la constitution à la suite de la votation populaire du 6 juillet 1947, le nouvel article %\quinquies prescrit que la Confédération prend conjointement avec les cantons et l'économie privée des mesures tendant à prévenir des crises économiques et, au besoin, à combattre le chômage et qu'elle édictera des dispositions sur les moyens de
procurer du travail. Le département de l'économique publique élabore présentement un projet de loi se fondant sur cette disposition. La création de possibilités de travail est donc actuellement déjà réglée par la constitution, de sorte qu'il n'est point nécessaire d'y insérer un nouvel article, même de caractère transitoire. Si les mesures destinées à créer des possibilités de travail devaient être mises à exécution en raison de la situation

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économique, l'Assemblée fédérale pourrait accorder sans retard les crédits nécessaires.

Si, eu égard à la situation financière et juridique, nous n'avons pas tenu compte de la proposition de M, le conseiller national Spuhler dans le projet d'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954, nous déclarons toutefois nettement que nous sommes prêts à prendre en temps utile toutes les mesures propres à lutter efficacement contre une menace de chômage. Cependant, pour que nous soyons en mesure de le faire, il est nécessaire que le régime transitoire mette au moins à la disposition de la Confédération les ressources lui permettant de faire face en temps ordinaire à ses dépenses courantes. En aucun cas, les recettes de la Confédération ne doivent être réduites à un degré tel qu'elle ne puisse plus couvrir ses besoins financiers normaux. Bien qu'aujourd'hui encore la situation économique de notre pays soit généralement très satisfaisante, nul ne peut toutefois prévoir ce que nous réservent les quatre années à venir. Si la Confédération devait entrer dans une période de crise avec des comptes déficitaires, on ne voit pas bien comment elle serait à même de financer les mesures destinées à créer des possibilités de travail sans aggraver considérablement l'état des finances fédérales et, partant, notre situation monétaire. Ce qui importe pour lutter efficacement contre le chômage, c'est donc moins le fait d'ouvrir des crédits que d'assurer l'équilibre de nos finances en tout cas dans une période économique normale.

Bien que nous soyons parfaitement favorables à la suggestion de M. le conseiller national Spuhler, nous en venons donc à la conclusion que le nouvel arrêté sur le régime transitoire ne doit contenir aucune disposition relative à la création de possibilités de travail, attendu que les mesures à prendre sont déjà prévues par la constitution, que les conseils législatifs ont déjà la compétence de prendre des arrêtés dans ce domaine et que plusieurs centaines de millions sont disponibles à cet effet. Si ce montant devrait être insuffisant, on pourrait, pour créer des possibilités de travail, faire appel aux recettes encaissées en vertu de l'arrêté que nous proposons.

2. Aide fédérale aux entreprises de transport Une requête signée par six gouvernements cantonaux, ainsi que par l'union d'entreprises
suisses de transport et la fédération suisse des cheminots, recommande au Conseil fédéral d'assurer la péréquation financière, conformément à la lettre C de l'arrêté du 21 mars 1949, non seulement dans le domaine routier, mais aussi dans celui des transports. Ils estiment que les dispositions actuellement en vigueur devraient être complétées comme il suit dans l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954: 3e alinéa. La Confédération alloue aux entreprises de transport d'intérêt général, qui ne sont pas en mesure de faire face elles-mêmes aux tâches leur incoia, bant, des subsides convenables pour les années 1951 à 1955. Elle peut subor-

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donner l'allocation de ces subsides à une contribution des cantons intéressés, compte tenu de leur capacité financière, 4e alinéa. En vue d'assurer l'emploi aussi rationnel que possible et un traitement égal de tous les moyens de transport, la Confédération encourage leur coordination, conformément aux intérêts économiques, financiers et militaires du pays.

Des considérations identiques à celles que nous vous avons exposées au sujet de l'ouverture d'un crédit spécial destiné à créer des possibilités de travail nous ont aussi persuadés qu'il n'est point nécessaire d'ajouter quoi que ce soit aux dispositions relatives à la péréquation financière.

En ce qui concerne les chemins dé fer fédéraux, l'article 16, 2e alinéa, de la loi fédérale du 23 juin 1944 offre déjà une garantie suffisante. En effet, lorsque le déficit est supérieur à la réserve, l'Assemblée fédérale doit statuer sur la façon de le combler, aucun déficit ne pouvant être reporté à compte nouveau. Ainsi, la revendication contenue au 3e alinéa précité peut uniquement avoir trait aux entreprises de transport privées. Or la constitution permet déjà à la Confédération de leur allouer des subsides. La loi fédérale du 6 avril 1939 sur l'aide aux entreprises privées de chemins de fer et de navigation, complétée par celle du 21 décembre 1949, a été édictée en vertu des articles 23 et 26 de la constitution. Une nouvelle attribution constitutionnelle n'est donc pas du tout nécessaire; Nous ne nous dissimulons nullement que le problème des entreprises de transport privées doit être résolu dans son ensemble. La commission d'experts, instituée par le département des postes et des chemins de fer et chargée d'examiner s'il y a lieu de racheter des chemins de fer privés ou de leur accorder une aide plus considérable, est unanime à proposer en principe au Conseil fédéral la nationalisation de nouvelles voies ferrées.

Nous vous soumettrons nos propositions dès que les plans auront été élaborés.

Etant donné que, de l'avis de la commission d'experts et du Conseil fédéral, seules peuvent entrer en ligne de compte les principales entreprises intéressant le pays tout entier ou une grande partie du territoire suisse, la nouvelle loi en préparation sur l'établissement et l'exploitation des chemins de fer sur le territoire de la Confédération (loi sur les chemins de fer) jouera un très grand rôle quant à l'aide qui pourrait être éventuellement accordée aux autres entreprises de transport privées. Un premier avant-projet, qui a été soumis aux services fédéraux et cantonaux intéressés, ainsi qu'aux principaux représentants des entreprises de transport, contient un article spécial relatif aux subventions. Comme c'est
le cas pour la navigation aérienne, la Confédération aurait la possibilité d'accorder des subsides ou des prêts aux entreprises dans la gêne pour leur permettre de maintenir leur exploitation.

Nous sommes aussi disposés à examiner avec bienveillance la suggestion des six gouvernements cantonaux ; mais la réglementation transitoire des finances fédérales n'est pas le lieu où elle peut être réalisée. Pour mener

445

à chef les efforts dans ce domaine, l'essentiel est que les finances fédérales soient bonnes. Le régime transitoire que nous vous proposons dans le projet d'arrêté ci-annexé permettra aussi d'assainir les entreprises de transport dans la gêne.

TI. L'IMPORTANCE FISCALE DÛ BEGEHE TRANSITOIRE 1. Plan financier pour la période transitoire Les tableaux ci-après montrent comment s'établissent les finances de la Confédération.

Et , , Etat des finances Recettes Dépenses en millions de francs

Compte d'Etat 1949 Budget 1950 Régime transitoire 1951 à 1954 . .

1516 1583 1359

1523 1446 1350

Détail des recettes et des dépenses Compte d'Etat 1919

Budget 1950

Bearne transitoire 1951/1964

en millions de francs

.Recette* :

375 Taxes d'importation et d'exportation Droits sur la benzine Droits sur le tabac

256 74 45

378 131 370 55 10 35

165 143 435 63 11 38 286

Régie des alcools Bénéfice des PTT Office de compensation , Intérêt du capital de dotation des CFF . . .

. . .

Bénéfice net de la Banque nationale Rendement de la fortune Total

256 75 45 979

855 Impôt pour la défense nationale ou impôt d'amortissement (1) . . , .

Droits de timbre et impôt anticipé .

Impôt sur le chiffre d'afiaires . . .

Impôt sur le tabac Impôt sur les boissons (bière) . . .

9 40 10

9 40

375

385 280 65 40

805 166 142 385 63 11 38 179

219 9 50

7 56 174 (»)

41 119

1516

45 75

1583

1359

(') Y compris sacrifice pour la défense nationale et impôt sur les bénéfice de guerre.

(2s ) Impôt sur le luxe, impôt compensatoire, taxe d'exemption du service militaire.

( ) Sans )es 48 millions de francs provenant de la vente de marchandises de l'économie de guerre

446 Compte d'Etat 1949

Budget 1950

en millions de franca

Dépenses ;

311

319

Intérêts de la dette publique . . .

Intérêts versés aux exploitations fédéDépôts d'intérêts aux provisions. .

. . . .

240

212

38 34

38 33

42 33

233 149 84

149 85C)

107 345

101 384 338

Assurance-vieillesse et survivants .

120 218

Perte de salaire ou de gain . . . .

101 36 10

346

339 118 221

104 57 32 15

1523

462 109 353

121 225 147

Total

230 146 84

452

485

Dépenses pour le matériel . . . .

287

247

234

Dépenses pour le matériel

Régime transitoire 1951/1954

32 32

1446

1350

C1) Sans les achats de céréales (59 millions de fr.) et les achats de marchandises de l'économie de guerre (4 millions de fr.).

II ressort des tableaux ci-devant qu'il semble possible, pour la moyenne des années 1951 à 1954, d'équilibrer le budget à un total de dépenses et de recettes de 1350 millions de francs environ. Quant aux frais de la défense militaire du pays, il faut ajouter ce qui suit. Dans le plan financier ci-devant, les dépenses du département militaire interviennent en moyenne pour 460 millions de francs. Outre ce budget militaire ordinaire, il faut considérer les dépenses pour l'armement. Dans l'état actuel des estimations, on envisage qu'elles oscilleront entre 1,4 et 1,5 milliard de francs et s'étendront sur environ 5 ans, ce qui représente une charge annuelle d'à peu près 300 millions de francs; ces dépenses ne sont pas comprises dans l'estimation ci-devant. Manquent également dans le nouveau régime transitoire les 150 millions de dépenses pour mesures extraordinaires et en vue de prévenir les crises que le message du 22 janvier 1948 concernant la réforme constitutionnell des finances de la Confédération prévoyait dans le plan financier pour la moyenne des années 1950 et suivantes. Enfin, le projet ne prévoit

447

pas de ressources spéciales destinées à amortir méthodiquement les dettes de la mobilisation, but auquel le même plan financier réservait au début 30 millions de francs.

2. Les recettes fiscales Parmi les recettes prévues dans le régime transitoire de 1951 à 1954, celles qui proviennent des impôts (y compris l'impôt sur le tabac et l'impôt sur la bière, mais non compris les droits de douane) s'élèvent à 805 millions de francs. De ce montant, 665 millions de francs, donc à peu près la moitié des recettes totales de la Confédération, proviennent d'impôts fondés à l'heure actuelle sur le droit de nécessité.

La comparaison des recettes fiscales présumées avec celles du projet rejeté le 4 juin 1950 et du régime transitoire de 1950 et 1951, fait ressortir, comme le montre le tableau ci-après, certaines différences dans le total et dans le détail de ces recettes.

Impôts

Droits de timbre . . .

Impôt anticipé . . . .

Impôt pour la défense Impôt dû par les personnes morales . . .

Projet rejeté le 4 juin

102 (*) 70

Régime tranRégime transitoire 1950/1951 sitoire 1951/1954

Sana le régime transitoire 1951/1954

72

72

62

70

70

--

170

166

40 70

--

Impôt sur le chiffre d'afIrnpôt sur le luxe . . .

Impôt · compensatoire . .

Taxe d'exemption du service militaire . . . .

Impôt sur le tabac . .

Impôt sur la bière. . .

Impôt sur les boissons

385 18 13

385 18 13

14

7

63 11

(40)

63 11 --

7 63 11 --

786

809

805

385 18 13

18 7 63 -- -- 140

(*) Pont 12 millions de francs provenant do l'extension des droits de timbre.

L'estimation des recettes énumérées ci-dessus appelle les observations générales suivantes. Elle suppose que les circonstances économiques sont celles de 1949. Notre message du 22 janvier 1948 avait admis au contraire, comme base d'estimation des recettes fiscales, une situation écono-

448

mique moyenne, c'est-à-dire correspondant à la moyenne entre de bonnes et de mauvaises années. S'agissant du régime transitoire, ce procédé ne paraît pas devoir être appliqué, puisque le régime envisagé doit se limiter à quatre ans et qu'il est donc permis de compter, pour ce laps de temps, sur des conditions économiques à peu près stables. C'est à cause de ce changement de méthode que les recettes fiscales envisagées par le projet rejeté le 4 juin ne correspondent pas à celles dont fait état notre message du 22 janvier 1948. Les estimations ci-dessus sont plus élevées, parce qu'elles reposent sur les résultats de 1949 et non pas sur ceux d'une période de conjoncture moyenne.

L'estimation des recettes énumérées plus haut appelle d'autre part les observations particulières suivantes: Droits de timbre,. -- Le nouvel arrêté concernant le régime transitoire ne change rien à la législation actuelle en matière de droits de timbre. On peut donc attendre de cette imposition le même rendement annuel qu'en 1949 (72 millions de francs). Ce résultat est sensiblement inférieur à celui qu'envisageait le projet rejeté le 4 juin, ce qui provient du maintien des parts cantonales (1949: 18 millions de francs) et de la renonciation à l'extension, des droits de timbre, dont on attendait 12 millions de francs (augmentation des droits de timbre sur titres négociés, sur effets de change et sur quittances de primes d'assurance; institution d'un droit sur les documents de transport employés dans le trafic professionnel au moyen de véhicules automobiles, d'un droit sur les billets de loterie, ainsi que d'un droit de timbre fixe sur les chèques, assignations à vue, rescriptions, mandats généraux de la Banque nationale, chèques postaux et ordres de virement).

Impôt pour la défense, nationale. -- On attend de cet impôt, pour 1950, un rendement de 240 millions de francs en nombre rond; de ce montant, 170 millions échoient à la Confédération et 70 aux cantons. L'institution, en matière d'impôt complémentaire sur la fortune, d'un montant exonéré de 20 000 francs, envisagée par le nouveau régime transitoire, entraîne au total une diminution des recettes de 5,5 millions de francs, savoir 3,8 millions au détriment de la Confédération et 1,7 million au détriment des cantons. Par conséquent, si le nouveau régime transitoire est
adopté, la Confédération ne pourra plus attendre de l'impôt pour la défense nationale qu'un montant d'environ 166 millions de francs. Le projet de compromis rejeté le 4 juin comprenait, pour remplacer l'impôt pour la défense nationale, un impôt fédéral sur les personnes morales, dont le rendement eut été de 40 millions de francs, et des contingents d'argent fournis par les cantons pour un montant de 70 millions de francs.

Impôt sur le chiffre d'affaires. -- En 1949, cet impôt a rapporté 435 millions de francs. Le régime transitoire de 1950 et 1951 ayant étendu la liste des marchandises franches d'impôt aux denrées alimentaires indispensables, extension qu'on prévoyait d'introduire dans le régime définitif, il en

449

résultera vraisemblablement pour 1950 une diminution des recettes d'environ 30 millions de francs. Les inégalités de traitement que cette extension de la liste des marchandises exonérées a provoquées dans la boulangerie ont été supprimées par l'arrêté fédéral du 22 juin 1950, en ce sens que les entreprises de boulangerie artisanales et industrielles, les confiseries, les fabriques de chocolat, etc. sont réputées non-grossistes et, partant, libérées de l'obligation d'acquitter l'impôt sur le chiffre d'affaires. Cette mesure entraîne une nouvelle diminution des recettes de 7 millions de francs en nombre rond. On envisage, dans le projet d'arrêté, d'exonérer complètement tous les aliments. La perte supplémentaire qui en résultera peut être estimée à 4 millions de francs. Quant à la réduction des taux applicables aux transactions portant sur les produits auxiliaires de l'agriculture, elle provoquera une nouvelle diminution des recettes de 2 millions de francs. Toutes ces mesures, jointes à d'autres aménagements envisagés (par ex. nouvelles prescriptions relatives à l'emballage des marchandises) auront pour résultat probable de réduire le rendement de l'impôt sur le chiffre d'affaires, par rapport à 1949, d'environ 50 millions de francs.

Ainsi, à supposer que la situation économique soit la même qu'en 1949, on peut compter, pour ces prochaines années, sur un rendement annuel de l'impôt sur le chiffre d'affaires de 385 millions de francs. Même si la votation populaire du 4 juin avait eu un résultat positif, les allégements fiscaux évoqués plus haut auraient certainement dû être adoptés. C'est pourquoi le régime transitoire envisagé ne diffère pas, en ce qui concerne les recettes provenant de l'impôt sur le chiffre d'affaires, du plan financier pour les années 1950 et suivantes, qui servit de base aux discussions sur la réforme des finances. Dans le message du Conseil fédéral du 22 janvier 1948, à vrai dire, le rendement de l'impôt sur le chiffre d'affaires ne figurait que pour 350 millions de francs. Mais eette somme a été fixée en tenant compte des fluctuations de la situation économique, qui, s'agissant d'un impôt aussi sensible à la conjoncture, peuvent être considérables. On observe à ce propos que la légère baisse constatée en 1949 par rapport à la situation économique très favorable de 1948 a
provoqué une réduction du rendement de l'impôt sur le chiffre d'affaires de près de 10 pour cent.

Taxe d'exemption du service militaire. ·-- Le nouveau régime transitoire n'y change rien. La Confédération peut donc continuer à attendre de cette taxe le rendement de 7 millions de francs qu'elle a rapporté en 1949. Le projet de revision constitutionnelle rejeté le 4 juin prévoyait la suppression des parts cantonales au produit de la taxe. On n'aurait plus accordé aux cantons qu'une commission d'encaissement. La Confédération aurait ainsi gardé pour elle environ 90 pour cent du produit de la taxe, savoir 14,4 mil, lions de francs (rendement 1949: 16,7 millions de francs).

Impôt anticipé, impôt sur le luxe, impôt compensatoire, imposition de la bière et du tabac. -- Ces impôts ne subissent, dans le nouveau régime transi-

450

toire, aucune modification pouvant agir sur le montant des recettes. Les prévisions peuvent donc se fonder sur le rendement de 1949.

En ce qui concerne l'impôt compensatoire, on observe qu'un écartant le régime transitoire et en supprimant le droit fiscal de nécessité, on aboutirait à ce phénomène singulier que cet impôt verrait son rendement s'accroître : en effet, du fait de la disparition de l'impôt sur le chiffre d'affaires, l'impôt compensatoire serait calculé au taux plein, et non pas seulement aux deux tiers.

Impôt sur les boissons. -- Le plan financier pour les années 1950 et suivantes prévoyait l'institution d'un impôt sur les boissons ayant un rendement de 40 millions de francs. Le projet de revision constitutionnelle rejeté le 4 juin aurait permis l'institution d'un tel impôt combiné avec l'impôt sur le chiffre d'affaires. Mais, à supposer que ce projet eût été admis, il est fort douteux qu'on eût pu, au cours des prochaines années, introduire dans la loi d'exécution relative à l'impôt sur le chiffre d'affaires une imposition supplémentaire des boissons. C'est pourquoi le rendement de l'impôt sur les boissons n'est indiqué que pour mémoire dans le tableau comparatif des recettes fiscales.

TH. L'IMPORTANCE POLITIQUE Dû RÉGIME TRANSITOIRE

Le régime transitoire assure à la Confédération 665 millions de francs de recettes fiscales fondées sur des arrêtés fédéraux urgents ou sur des arrêtés pris par le Conseil fédéral en vertu de ses pouvoirs extraordinaires. Si l'on ne réussissait pas à maintenir provisoirement les sources de recettes fondées sur ce droit fiscal de nécessité, l'équilibre des finances fédérales serait bouleversé. La Confédération se verrait privée des ressources indispensables pour l'exécution de ses tâches sociales, économiques et militaires. Tous les projets actuellement soumis aux chambres ou encore à l'étude qui ont pour conséquence de nouvelles tâches se trouveraient mis en question. Les finances cantonales ne seraient pas sans en ressentir les effets et il s'ensuivrait des troubles profonds dans l'économie générale du pays.

Celui qui verrait dans la diminution radicale des tâches de la Confédération une conséquence heureuse du rejet du régime transitoire ne doit pas oublier que les finances fédérales sont en liaison étroite avec l'ensemble de l'économie suisse. Une réduction massive des recettes et dépenses mettrait en péril l'équilibre économique. La diminution des traitements, des subventions et des commandes à l'industrie et à l'artisanat se ferait rapidement sentir. Sans doute, à la réduction des dépenses correspondrait une réduction des impôts, qui constituerait un dégrèvement pour l'économie, mais ce fait n'empêcherait pas que l'équilibre économique ne soit troublé pour assez longtemps. Il s'y ajouterait indubitablement de fortes tensions politiques, dont les effets seraient également fâcheux pour la vie économique.

451

La réforme des finances fédérales est vue affaire de politique intérieure suisse. Cependant il n'échapperait pas à l'étranger que la politique financière suisse suit un cours aventureux. On pourrait y voir, au détriment de notre pays, un signe de faiblesse, et notre monnaie pourrait s'en trouver menacée.

Ce qui serait d'autant plus regrettable que l'économie suisse est parfaitement en mesure de procurer les ressources nécessaires à de saines finances publiques.

On pourrait répondre à ces considérations que l'échec du régime transitoire et la renonciation au maintien du droit fiscal de nécessité n'entraînerait pas forcément une diminution radicale des tâches de la Confédération. On pourrait couvrir la perte de recettes en faisant appel au crédit. Les capitaux disponibles, étant donné la situation actuelle du marché, trouveraient leur compte dans l'émission d'un emprunt fédéral important. On pourrait aussi faire appel au fonds de l'assurance-vieillesse et survivants.

En raisonnant ainsi, on oublie que le compte de la Confédération est déjà grevé actuellement de dépenses considérables pour l'amortissement et le service d'intérêt des dettes. Cette charge augmentera encore à l'avenir, car l'équipement militaire envisagé ne peut être financé au moyen des recettes courantes et la Confédération doit faire appel au crédit public pour les mesures servant à créer des occasions de travail dans les périodes de dépression économique. La grande liquidité actuelle sur le marché des capitaux ne doit pas induire à suivre avec légèreté une politique de dettes.

Si l'on voulait s'engager sans nécessité dans la voie des dettes, le retour à un régime financier normal serait d'autant plus difficile.

Depuis 1933, nous avons toujours exprimé notre conviction que le droit fiscal de nécessité devait être remplacé par le droit constitutionnel, dès que la situation le permettrait. Nous rappelons les projets que nous vous avons soumis en 1938, 1940 et 1948 et dont le but était le retour à la constitution. Le présent projet de régime transitoire est une nouvelle tentative de se rapprocher de ce but.

Il y a bien unanimité sur le point que le régime transitoire doit mettre fin au droit fiscal de nécessité. Mais, à l'acceptation de ce régime transitoire, on pose de divers côtés des conditions qui sont difficilement conciliables,
si les milieux responsables ne reconnaissent pas avant tout que le retour à la constitution est à l'heure actuelle la nécessité la plus urgente, devant laquelle les considérations idéologiques et économiques qui mettent en péril l'heureuse issue de l'oeuvre de conciliation doivent s'effacer pour un temps.

Ce qui a réussi en 1938 devrait aussi être possible aujourd'hui.

Nous fondant sur les considérations exposées dans le présent message, nous estimons que le projet de régime financier tient compte, en tant qu'il est possible de le faire dans une réglementation transitoire de durée limitée,

452

dea suggestions présentées par MM. les conseillers nationaux Münz, le 6 juin, Philippe Schmid, le 9 juin, et Häberlin le 14 juin 1950. Nous vous proposons par conséquent de classer ces postulats.

Nous avons l'honneur de vous prier d'approuver le projet d'arrêté fédéral ci-annexé concernant le régime financier de 1951 à 1954 et saisissons cette occasion pour vous renouveler, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 19 juillet 1950.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de. la Confédération, Max PETITPIEEEE 8313

Le chancelier de la Confédération, LEIMGRUBER

453

(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL concernant le régime financier de 1951

à

1954

L'Assemblée, fédérale de la Confédération suisse,

vu les articles 85, chiffre 14, 118 et 121, 1er alinéa, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 19 juillet 1950 ; afin de proroger les mesures financières extraordinaires indispensables à la préparation militaire et économique du pays et à la lutte contre les crises ; afin de fournir à cet effet à la Confédération les ressources qui lui sont nécessaires, pour faire face à ses tâches, jusqu'à l'entrée en vigueur du nouveau régime constitutionnel ordinaire des finances; afin d'affermir le crédit du pays et d'assurer l'application de principes d'économie dans les finances de l'Etat, arrête:

I La constitution fédérale est complétée par les dispositions suivantes:

Article premier Le régime financier de 1939 à 1941 (!), avec les modifications qu'y a apportées l'arrêté sur le régime financier de 1946 à 1949 (2), ainsi que l'arrêté de 1947 relatif aux mesures d'économie (3), sont, en tant que l'Assemblée fédérale ne les a pas modifiés en vertu de sa compétence, prorogés jusqu'au 31 décembre 1954.

(*) Arrêté fédéral du 22 décembre 1938 assurant l'application du régime transitoire des finances fédérales.

( a ) Arrêté fédéral du 21 décembre 1945 prorogeant pour la seconde fois le régime financier de 1939 à 1941.

( s ) Arrêté fédéral du 20 juin 1947 instituant des mesures spéciales propres à réduire les dépenses de la Confédération.

Feuille fédérale. 102e année. Vol. II.

32

454

a.

b.

c.

d.

e.

Art. 2 Sont prorogés jusqu'au 31 décembre 1954 les arrêtés suivants: L'arrêté du Conseil fédéral du 9 décembre 1940/11 octobre 1949 instituant un impôt pour la défense nationale ; L'arrêté du Conseil fédéral du 29 juillet 1941/22 juin 1950 instituant un impôt sur le chiffre d'affaires ; L'arrêté du Conseil fédéral du 13 octobre/29 décembre 1942 instituant un impôt sur le luxe; L'arrêté du Conseil fédéral du 1er septembre 1943/31 octobre 1944 instituant un impôt anticipé; et L'arrêté du Conseil fédéral du 13 février 1945 tendant à garantir les droits du fisc en matière d'assurance (impôt sur les prestations faites en vertu d'assurances sur la vie).

Art. 3 L'arrêté du Conseil fédéral instituant un impôt pour la défense nationale est modifié comme il suit : a. La déduction du revenu net selon l'article 25, 1er alinéa, lettre a, s'élève à 2000 francs ; b. Lors de la taxation en vue de l'impôt complémentaire dû par les personnes physiques pour les années 1951 à 1954, un montant de 20 000 francs est déduit de la fortune entrant en ligne de compte dans le calcul de l'impôt selon l'article 27, 1er alinéa.

Art. 4 L'arrêté du Conseil fédéral instituant un impôt sur le chiffre d'affaires est modifié comme il suit, avec effet dès le 1er janvier 1951 : a. Les chiffres d'affaires en aliments, café et thé sont francs d'impôt; b. Les chiffres d'affaires en litières, fourrages et produits pour la protection des plantes, en semences et engrais, sont imposés aux taux prévus à l'article 19, 1er alinéa, lettres a et c.

Art. 5 L'Assemblée fédérale peut modifier les arrêtés désignés aux articles 1er et 2, si ces modifications n'ont pas pour but une augmentation du rendement.2 L'Assemblée fédérale peut déléguer au Conseil fédéral la compétence qui lui appartient en vertu du 1er alinéa.

1

Art. 6 Pour parer aux mesures fiscales prises par les Etats étrangers, l'Assemblée fédérale a la faculté d'ordonner la perception d'impôts spéciaux à 1

455

la charge de personnes domiciliées à l'étranger. Elle peut notamment frapper d'une imposition spéciale : a. Les prestations dues par une personne domiciliée en Suisse à une personne domiciliée à l'étranger, si l'Etat où est domicilié le bénéficiaire effectif de la prestation soumet à une imposition les prestations de même nature revenant à des bénéficiaires suisses; b. La fortune sise en Suisse, y compris les créances sur des débiteurs suisses et les participations a des sociétés suisses, qui appartient à des personnes domiciliées à l'étranger, si l'Etat où est domicilié le propriétaire effectif de la fortune soumet à une imposition la fortune de même nature appartenant à des personnes domiciliées en Suisse.

3 L'Assemblée fédérale peut charger le Conseil fédéral de prendre des mesures fiscales de ce genre.

Art. 7 1 La Confédération cède aux cantons, pour les années 1951 à 1954, la moitié du produit net des droits d'entrée perçus sur les carburants pour moteurs. Cette cession se fait sous forme; a. De versements à raison des dépenses générales résultant de l'ouverture de routes aux véhicules automobiles; b. De versements à raison des dépenses consécutives à l'amélioration et à la construction de routes principales appartenant à un réseau à désigner par le Conseil fédéral et dont l'exécution satisfait à certaines exigences techniques : c. De versements supplémentaires à raison des charges résultant de la construction de routes par les cantons financièrement faibles.

2 Les indemnités que les cantons d'Uri, des Grisons, dn Tessin et du Valais reçoivent annuellement à raison de leurs routes alpestres internationale, en vertu de l'article 30, 3e alinéa, de la constitution, sont portées pour les années 1951 à 1954 aux montants suivants: Uri 240 000 francs; Grisons 600 000 francs ; Tessin 600 000 francs ; Valais .

150 000 francs.

II 1

Le présent arrêté a effet dès l'expiration du régime financier de 1950 et 1951 jusqu'au 31 décembre 1954.

2 H sera soumis au vote du peuple et des cantons.

3 Le Conseil fédéral est chargé d'en assurer l'exécution.

8313

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le régime financier de 1951 à 1954 (Du 19 juillet 1950)

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