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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à la modification de l'arrêté du Conseil fédéral instituant un impôt sur le chiffre d'affaires (Du 2l avril 1950)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous proposer de modifier l'arrêté du Conseil fédéral du 29 juillet 1941/27 novembre 1915 instituant un impôt sur le chiffre d'affaires. Cette modification se révèle nécessaire, étant donné que l'extension de la liste des marchandises franches d'impôt [art, 1er, lettre B, chiffre 3, de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949 concernant le régime transitoire des finances fédérales (*)] a gravement compromis l'équilibre des rapports de concurrence dans la boulangerie-pâtisserie.

L'article 1er, lettre B, chiffre 4, de l'arrêté instituant le régime transitoire des finances fédérales, réserve à l'Assemblée fédérale la compétence pour modifier l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires (**).

1. Nature et fonction du système de l'impôt sur le chiffre d'affaires en Suisse Pour faire comprendre les difficultés qui se sont produites, il est nécessaire de rappeler la nature et la fonction de notre système d'impôt sur le chiffre d'affaires.

(*) RO 1949, 1913.

(**) Les chiffres 3 et 4 de l'article 1«, lettre B, de l'arrêté concernant le régime transitoire ont la teneur suivante: 3. L'arrêté du Conseil fédéral instituant un impôt sur le chiffre d'affaires est modifié en ce sons que la livraison, la consommation particulière, l'acquisition et l'importation des denrées alimentaires de première nécessité sont franches d'impôt.

4. L'Assemblée fédérale peut modifier les arrêtés du Conseil fédéral mentionnés au chiffre 1er, à condition qu'il n'en résulte pas d'accroissement de la charge fiscale. Elle peut charger le Conseil fédéral d'édicter des dispositions de ce genre.

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En élaborant cet impôt, on a recherché un système de perception qui occasionne le moins de frais possible à l'économie et à l'administration.

On a pris soin d'atteindre le trafic de marchandises au passage le plus étroit, c'est-à-dire là où la marchandise, sur le parcours qu'elle accomplit entre le producteur et le consommateur, est remise au détaillant ou au consommateur par le dernier des grossistes participant à la chaîne des transactions. C'est ainsi que 60 000 entreprises seulement, en chiffre rond, doivent rendre compte à l'administration, tandis qu'avec le système de l'impôt général sur le chiffre d'affaires ou de l'impôt perçu chez le détaillant, il faudrait compter avec un multiple de ce nombre d'entreprises contribuables et avec un appareil administratif augmenté en proportion.

Ont été désignés comme grossistes, en vertu de l'article 9 de l'arrêté instituant l'impôt sur le chiffre d'affaires: a. Le commerçant qui livre annuellement sur territoire suisse pour plus de 35 000 francs de marchandises, en tant que les livraisons de gros constituent plus de la moitié de son chiffre d'affaires réalisé sur territoire suisse; b. Le fabricant qui, annuellement, livre sur territoire suisse pour plus de 35 000 francs de marchandises ; c. Les entreprises qui se livrent tant à la revente qu'à la fabrication de marchandises sont réputées grossistes, aux termes de l'article 10, 3e alinéa, de l'arrêté, si plus de 25 pour cent de leurs livraisons annuelles portent sur des marchandises qu'elles ont fabriquées elles-mêmes.

Le grossiste peut acquérir en franchise d'impôt toutes les marchandises destinées à la revente ou à l'emploi comme matières premières; il doit en revanche acquitter l'impôt auprès de l'administration fédérale des contributions sur toutes les marchandises, ne figurant pas sur la Uste des marchandises franches d'impôt, qu'il livre à des non-grossistes (p. ex. aux détaillants ou consommateurs).

Le non-grossiste acquiert grevées de l'impôt toutes les marchandises ne figurant pas sur la liste des marchandises franches d'impôt et doit, s'il s'agit de matières premières ou de marchandises destinées à la revente, acquitter cet impôt au taux de gros, qui est, pour les denrées alimentaires, de 25 pour cent supérieur au taux pour livraisons au détail. La différence de taux tend à obtenir que la
charge fiscale soit en définitive la même.

Une charge de 2% pour cent des prix de gros correspond à une charge de 2 pour cent du prix de détail des denrées alimentaires, comprenant la marge du commerce de détail de 25 pour cent en moyenne.

Dans des conditions normales, cette réglementation (acquisition en franchise d'impôt et livraison imposable des marchandises pour le grossiste ; acquisition avec charge de l'impôt et IÌVTAÌSOTI franche d'impôt pour le détaillant; différence des taux de l'impôt pour les livraisons en gros et Feuille fédérale. 102° année. Vol. I.

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les livraisons au détail) assure largement l'égalité de la charge entre grossistes et non-grossistes.

2, L'extension de la liste des marchandises franches d'impôt de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires Par l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949, la liste des marchandises dont la livraison est exonérée de l'impôt sur le chiffre d'affaires a été étendue à toutes les denrées alimentaires de première nécessité. Le département des finances et des douanes avait, en vertu de l'article 54, 1er alinéa, de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires, la charge d'appliquer l'arrêté fédéral. Dans une ordonnance n° 9 du 21 décembre 1949, il a dressé une liste des marchandises qui doivent être considérées comme denrées alimentaires de première nécessité. Vu les difficultés rencontrées et la portée économique de cette disposition d'exécution, il avait pourvu à ce que cette liste fût préalablement examinée dans ses détails par le Conseil fédéral.

La difficulté du problème à résoudre résidait en ce que les avis divergent considérablement quant aux marchandises à considérer comme denrées alimentaires de première nécessité. Il y avait en outre lieu de tenir compte des exigences de la technique fiscale. L'impôt sur le chiffre d'affaires est un impôt fondé sur le principe de la taxation opérée par le contribuable lui-même. Il ne fait pas, comme les droits de douane, l'objet d'une taxation effectuée par des fonctionnaires spécialement formés à cette fin. Il doit être calculé et acquitté par le contribuable, sous sa propre responsabilité.

On ne saurait cependant exiger de ce dernier qu'il applique des tarifs compliqués et résolve de délicates questions de classification. C'est pourquoi on devait, si possible ne faire une délimitation qu'entre les catégories générales de marchandises. Sans méconnaître qu'une qualification d'après le degré de nécessité faisait en principe apparaître souhaitable une différenciation dans les divers genres de marchandises, on renonça donc à prévoir, sur la base de simples critères qualitatifs, des différences de charge dans le cadre de ces catégories. C'est ainsi que pour la viande et la charcuterie, par exemple, seule une différenciation assez rudimentaire d'après le mode de conservation s'est révélée réalisable.

En ce qui concerne les produits de la boulangerie
et la pâtisserie, la différenciation fondée sur le critère de la « denrée alimentaire de première nécessité » a été plus aisée. Aussi a-t-on pu maintenir jusqu'ici la réglementation en vigueur, vu que le pain, y compris les ballons, était déjà livrable en franchise d'impôt, tandis que les autres produits de boulangerie fine, ainsi que les sucreries et produits de confiserie, ne peuvent, dans leur ensemble, être classés parmi les denrées alimentaires de première nécessité. Seules les biscottes (zwiebacks) ont été nouvellement portées

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sur la liste des marchandises franches d'impôt, vu leur emploi comme produits d'alimentation pour malades et enfants.

Sans doute aurait-il été justifié en principe d'exonérer également la livraison de certains articles de boulangerie fine bon marché. Une telle différenciation n'a cependant pas été possible, pour des raisons techniques.

Entre la boulangerie fine bon marché et la pâtisserie fine, il y a tant de degrés intermédiaires que l'on n'a pu trouver dans ce groupe de marchandises une ligne de séparation d'une valeur pratique.

La liste des marchandises dont la livraison a été déclarée franche d'impôt à partir du 1er janvier 1950 comprend les positions suivantes: farine alimentaire pour enfants, biscottes (zwiebacks), pâtes alimentaires, articles pour soupes, oeufs en conserve, huiles comestibles, graisses comestibles, viande et charcuterie, poissons, sucre, café et cacao.

3. Les effets de l'extension de la liste des marchandises franches d'impôt sur la boulangerie-pâtisserie Si cette extension de la liste a eu des répercussions indésirables et de portée imprévue sur les rapports de concurrence dans la boulangeriepâtisserie, cela n'est pas dû au fait que la liste n'a été étendue, récemment, dans ces branches, qu'aux biscottes. La cause en est que la plupart des matières premières servant à la fabrication des produits de boulangerie et de pâtisserie peuvent être livrées désormais en franchise d'impôt.

Jusqu'au 1er janvier 1950, les entreprises de boulangerie-pâtisserie considérées comme grossistes acquéraient en franchise d'impôt leurs matières premières et produits destinés à la revente; elles devaient en revanche payer l'impôt pour toutes leurs livraisons de produits de boulangerie (à l'exception du pain). Tant qu'il ne s'agissait pas de marchandises déjà franches d'impôt, telles que la farine, les entreprises non-grossistes acquéraient leurs matières premières au taux d'impôt des livraisons de gros. Elles n'avaient pas, en revanche, à percevoir l'impôt pour leurs livraisons de produits de boulangerie. La charge fiscale des livraisons d'entreprises grossistes et non-grossistes s'équilibrait à peu près.

A partir du 1er janvier 1950, la liste des marchandises franches d'impôt comprend presque toutes les matières premières de la boulangeriepâtisserie : outre la farine, le lait et le beurre,
qui y figuraient déjà, on y a porté le sucre, les huiles et graisses comestibles et le cacao. Il s'ensuit que les non-grossistes ne sont pratiquement atteints par l'impôt ni en acquérant leurs matières premières, ni en vendant leurs produits. Us peuvent dès lors livrer aux consommateurs, sans charge d'impôt, tous leurs produits de boulangerie et de confiserie. Les boulangeries et pâtisseries qui sont grossistes doivent en revanche percevoir l'impôt pour leurs livraisons de produits de boulangerie, sauf le pain et les biscottes. Il en résulte un dés-

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équilibre des charges fiscales et des conditions de concurrence. Une circonstance particulièrement lourde de conséquences réside dans le fait que cet avantage profite non seulement aux petites entreprises ayant un chiffre d'affaires annuel inférieur à 35 000 francs, mais aussi à une série d'entreprises mixtes qui, outre des marchandises diverses, vendent de la boulangerie-pâtisserie, parfois en quantités très grandes (et ne paient pas l'impôt lorsque les transactions en marchandises fabriquées par elles ne dépassent pas 25% du chiffre d'affaires annuel total). Il s'agit là spécialement des entreprises de boulangerie de grandes coopératives de consommation et des entreprises de pâtisserie de quelques grands magasins.

On comprend que les grossistes de la boulangerie-pâtisserie se sentent menacés dans leur capacité de concurrence par ces grandes entreprises favorisées fiscalement et demandent la suppression de ce; fâcheuses inégalités de charge entre grossistes et non-grossistes. Ce sont là des conséquences qui n'ont été ni prévues par les chambres, ni voulues par le Conseil fédéral, le département des finances et des douanes ou l'administration des contributions. Nous reconnaissons qu'il convient d'y remédier le plus rapidement possible.

4. Moyens à envisager pour supprimer les inégalités de la charge fiscale H existe en principe trois possibilités de rétablir l'égalité de la charge fiscale entre entreprises de boulangerie-pâtisserie contribuables et noncontribuables : a. Affranchir les boulangers et pâtissiers des dispositions auxquelles le droit en vigueur les assujettit comme grossistes; b. Etendre la liste des marchandises franches d'impôt à tous les produits de boulangerie et pâtisserie, en supprimant conjointement l'assujettissement des entreprises fabriquant de tels produits; c. Assujettir les boulangeries et pâtisseries des grandes entreprises aux dispositions instituées pour les grossistes.

a. L'association suisse des maîtres boulangers et pâtissiers et l'union suisse des arts et métiers ont proposé, lors de diverses conférences avec le département des finances et des douanes et avec l'administration des contributions, de libérer de l'assujettissement les boulangers et pâtissiers par une ordonnance du département fondée sur l'article 54, 2e alinéa, lettre d, de l'arrêté instituant un
impôt sur le chiffre d'affaires (*).

(*) L'article 54, 2e alinéa, lettre d, de l'arrêté a la teneur suivante: Le département dea financée et des douanes peut . . . . . d. compléter l'état des fabricants autres que des grossistes (art. 11), en tant que la perception de l'impôt peut être ainsi essentiellement simplifiée sans diminution notable du rendement de l'impôt.

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Cette solution offrirait l'avantage de ne nécessiter aucune décision de l'Assemblée fédérale, de sorte que l'inégalité incriminée pourrait être supprimée sans délai. Elle aurait encore l'avantage de réduire de quelque 5 à 6000 le nombre des grossistes, ce qui représenterait une diminution notable et aussi une décharge sensible pour l'administration des contributions. Il faudrait compter en revanche avec une diminution d'impôt qui s'élèverait, en chiffre brut, à 6 millions de francs par an au minimum; elle serait, il est vrai, quelque peu atténuée par l'impôt frappant les matières premières que les boulangers et pâtissiers ne pourraient plus acquérir en franchise d'impôt (produits accessoires pour la pâtisserie, certains matériaux d'emballage et combustibles), mais ne serait guère inférieure à 5 millions de francs net.

Cette solution se heurte cependant déjà aux règles sur la compétence, car l'article 54, 2e alinéa, lettre d, de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires n'autorise le département des finances et des douanes à prendre une mesure du genre proposé que si la perception de l'impôt peut en être essentiellement simplifiée sans diminution notable du rendement de l'impôt. La diminution susmentionnée, prudemment calculée, représenterait certainement une diminution notable du rendement de l'impôt; c'est pourquoi le département des finances et des douanes ne s'estime pas compétent pour édicter l'ordonnance proposée.

L'union suisse des arts et métiers a proposé, il est vrai, de compenser la diminution d'impôt en radiant le café de la liste des marchandises franches d'impôt. Le département des finances et des douanes ne peut cependant décider une telle modification. L'usage du pays fait du café une denrée alimentaire de première nécessité, notamment en raison de son emploi dans le café au lait. Il est généralement considéré, sous cette forme, comme plus indispensable que la boulangerie fine, la pâtisserie et les sucreries, qui seraient pratiquement exonérées si les boulangers et pâtissiers n'étaient plus assujettis.

Si l'on supprimait l'assujettissement pour toutes les entreprises de boulangerie et pâtisserie, il serait nécessaire d'inscrire, sur la liste des marchandises franches d'impôt, les produits de boulangerie et de pâtisserie en général, si l'on veut éviter de nouvelles
inégalités de charge insupportables. Les transactions des boulangers et pâtissiers demeureraient franches, en opposition à celles des autres entreprises, restées contribuables, qui fabriquent des produits de même genre. Les entreprises désavantagées seraient les entreprises mixtes avec boulangerie et pâtisserie, qui ne pourraient être exonérées en raison de leurs autres transactions (p. ex. boulangeries avec commerce de marchandises d'autre genre, en gros ou détail), ainsi que toutes les entreprises se livrant à la fabrication industrielle de produits de boulangerie (biscuits, gaufrettes, bretzels, confiserie, etc.) de même que de produits en chocolat ou de confiserie. On ne saurait par

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conséquent éviter d'exonérer également ces fabricants ni de porter leurs produits dans la liste des marchandises franches d'impôt.

b. L'exonération de tous les produits de boulangerie et pâtisserie aurait l'inconvénient de soustraire également à l'impôt les transactions portant sur des marchandises telles que la pâtisserie, les pralinés et d'autres produits de confiserie fine, pour lesquelles l'application de l'impôt sur le luxe a déjà été demandée. Il faudrait s'attendre à des demandes d'exonération pour d'autres denrées alimentaires, telles que conserves de lait, légumes, fruits, viande et poissons, confitures et produits semblables, dont l'exonération (en comparaison avec la boulangerie fine et les produits de confiserie) ne serait, certes, pas moins fondée, et à propos desquelles on pourrait faire valoir qu'elles sont également fabriquées avec des marchandises franches d'impôt (lait, légumes, fruits, viande, poissons). II serait impossible d'arrêter l'extension de la liste des marchandises franches d'impôt avant que toutes les denrées alimentaires soient exonérées. Il s'ensuivrait une nouvelle diminution du rendement de l'impôt, de 12 millions de francs par an.

L'affranchissement des transactions portant sur toutes les denrées a.limenta.iYes a/ura.it Va.va.nta.gfi, certes appréciable, de permettre l'exonération de plus de 10 000 grossistes. L'économie faite par l'administration et l'impôt sur les matières premières non affranchies servant à la fabrication des denrées alimentaires (combustibles, matériaux d'emballage, etc.) ne saurait cependant compenser que dans une faible mesure (guère plus de 10%) la diminution du rendement de l'impôt. Nous sommes d'avis que la situation financière de la Confédération ne permet pas une telle perte. Celle-ci se justifierait d'autant moins que la troisième solution envisagée permet de supprimer les inégalités de charge existant dans la boulangerie et la pâtisserie, sans diminuer le rendement de l'impôt et sans créer de nouvelles inégalités.

c. La cause de la disparité de charge qui s'est manifestée dans la boulangerie et la pâtisserie peut être supprimée si l'on assujettit à l'impôt les grandes entreprises du commerce de détail et les entreprises mixtes "dont les transactions en produits de boulangerie et pâtisserie de leur propre fabrication dépassent 35
000 francs. Ce n'est, en effet, pas en raison de l'assujettissement des boulangers et pâtissiers comme grossistes que la réglementation actuelle se révèle insuffisante. C'est parce que les grandes entreprises possédant des exploitations de ce genre peuvent livrer en franchise leurs produits de boulangerie et confiserie. Il paraît dès lors juste de soumettre ces entreprises aux mêmes obligations que les entreprises grossistes.

Le même problème se pose d'ailleurs pour d'autres branches, dans lesquelles les grossistes subissent la concurrence dea fabriques exploitées par les grandes entreprises non contribuables. C'est ainsi que, par exemple,

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les tailleurs, tailleuses, modistes, assujettis à l'impôt, sont désavantagés par rapport aux ateliers de commerces de confection et de grands magasins non assujettis. Si la fabrication nécessite peu de matériel, ou seulement le matériel mis à disposition par le client, l'avantage fiscal du non-grossiste peut être considérable.

Si l'impôt sur le chiffre d'affaires doit subsister, on ne peut supprimer lesdites inégalités en affranchissant toutes ces branches de l'économie ou en exonérant leurs produits. La seule voie qui s'ouvre consiste à assujettir les services de fabrication des grandes entreprises. L'extension de l'assujettissement aux boulangeries et pâtisseries exploitées par des entreprises du commerce de détail ou des entreprises mixtes non contribuables représente dès lors un premier pas dans une direction qui devra probablement être suivie un jour pour d'autres branches, si l'on veut supprimer des inégalités semblables.

Le seul inconvénient, sans grande importance pratique, de cette solution réside dans le fait que l'inégalité subsiste entre les grossistes et les petites entreprises non-grossistes de la boulangerie et de la pâtisserie.

L'avantage fiscal dont bénéficient ces petites entreprises au chiffre d'affaires inférieur à 35 000 francs par an ne saurait toutefois mettre sérieusement en danger les boulangeries et pâtisseries contribuables comme grossistes. Les produits qui font dans les grandes entreprises l'objet de transactions imposables représentent à peine, dans ces petites boulangeries, en moyenne, la moitié de leur chiffre d'affaires total. L'avantage fiscal dont bénéficie le petit boulanger par rapport au grossiste est donc au maximum de 350 francs par an. On avait conscience de ces inégalités lors de l'institution de l'impôt sur le chiffre d'affaires, mais on les a admises afin d'éviter que la perception de l'impôt ne soit rendue irrationnelle par l'assujettissement de très petites entreprises. Un avantage fiscal aussi modeste en faveur de ces entreprises nous paraît aussi acceptable du point de vue de la politique artisanale. A cet égard, l'institution d'un régime d'exception pour la boulangerie-pâtisserie ne se justifierait en tout cas pas.

Afin de mettre fin à l'inégalité existant dans la boulangerie-pâtisserie, le département des finances et des douanes a tenté d'amener
les coopératives de consommation et les grands magasins à un assujettissement volontaire de leurs entreprises de boulangerie-pâtisserie. La direction de l'union suisse des coopératives de consommation et celle de l'association des grands magasins ont recommandé à leurs membres une telle solution.

Les coopératives de boulangerie ont toutefois estimé ne pouvoir accepter pour leurs membres le principe d'un assujettissement volontaire. Une réglementation légale est dès lors inévitable.

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5. Les modifications de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires a. Si l'on veut étendre l'assujettissement aux boulangeries et pâtisseries exploitées par des entreprises jusqu'ici non contribuables ayant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 35 000 francs en produits de boulangerie-pâtisserie de leur propre fabrication, on doit modifier l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires. Comme la réglementation envisagée ne doit toucher pour l'instant qu'une seule branche de l'économie, il convient de ne pas l'introduire d'emblée dans l'arrêté susmentionné, mais d'en faire l'objet d'un arrêté spécial.

L'impôt sur le chiffre d'affaires était régi jusqu'ici par le principe selon lequel l'assujettissement s'étendait à toute l'activité commerciale déployée par une entreprise dans ses diverses exploitations et branches d'exploitation. Pour rétablir l'égalité fiscale dans la boulangerie-pâtisserie, il suffit cependant d'atteindre les transactions en produits de boulangeriepâtisserie fabriqués par l'entreprise elle-même. Pour toutes ses autres transactions, l'entreprise doit continuer à partager le sort des autres nongrossistes. Cela veut dire qu'elle doit, dans ce domaine, acquérir les marchandises grevées de l'impôt, tandis que ses livraisons demeurent franches et ne font pas l'objet de décomptes.

On ne peut prévoir à quel moment il sera nécessaire de supprimer les inégalités existant dans d'autres branches. L'émotion que cette inégalité a provoquée ces derniers mois dans la boulangerie-pâtisserie montre qu'une intervention rapide est souhaitable en pareil cas. Si votre décision y pourvoit pour la boulangerie, des mesures analogues se révéleront peutêtre bientôt nécessaires pour d'autres branches économiques. La question n'étant pas mûre, nous recommandons une solution qui laisse au Conseil fédéral le soin d'étendre, le cas échéant, à d'autres branches la réglementation prévue pour la boulangerie-pâtisserie. L'article premier, lettre B, chiffre 4, de l'arrêté du 21 décembre 1949 concernant le régime transitoire des finances fédérales prévoit la possibilité d'une telle délégation de compétence.

Aux termes de cette disposition, l'Assemblée fédérale ne peut modifier l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires que s'il n'en résulte pas d'accroissement de la charge
fiscale. Cette restriction ne signifie toutefois pas que la charge fiscale ne doit augmenter pour aucun contribuable.

Une proposition Deonna, formulée dans ce sens, a été rejetée par le Conseil national (BS, Conseil national, octobre 1949, p. 833/34). Le système de perception doit, par exemple, pouvoir être modifié en ce sens que l'impôt, au lieu d'être perçu chez le fournisseur, le soit auprès de l'acquéreur de la marchandise. Notre proposition ne vise aucune augmentation du rendement de l'impôt. Elle tend seulement à supprimer des inégalités dans

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les limites de la charge fiscale prévue par l'arrêté instituant l'impôt. Si la modification proposée a pour résultat de frapper les produits des entreprises nouvellement assujetties de la même façon que ceux des entreprises déjà contribuables, on ne saurait parler d'une augmentation de la charge fiscale au sens de la prescription mentionnée. L'Assemblée fédérale est dès lors compétente pour arrêter, dans la boulangerie-pâtisserie, la réglementation prévue et pour autoriser le Conseil fédéral à l'étendre à d'autres branches.

6. L'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires est susceptible d'amélioration sur d'autres points encore. Vu le court laps de temps disponible pour les délibérations, nous nous bornons toutefois à saisir l'occasion d'une revision de l'arrêté pour proposer deux modifications particulièrement urgentes, propres à apporter aux contribuables des allégements techniques notables.

aa. En vertu de la réglementation en vigueur, le grossiste doit acquérir grevés de l'impôt les emballages de marchandises qu'il ne destine ni à la revente, ni à l'emploi comme matières premières dans la fabrication de marchandises. Lors de l'acquisition de ce matériel ou de son emploi pour les livraisons de marchandises, cela provoque dans de nombreux cas, pour le contribuable comme pour l'administration, des difficultés de différenciation et des complications disproportionnées à l'importance fiscale de la distinction établie. Un régime identique pour tous les emballages de marchandises, en ce sens qu'ils partageraient toujours le sort fiscal de la marchandise qu'ils enveloppent lors de sa livraison, s'impose dès lors, et les associations économiques dirigeantes le considèrent comme hautement souhaitable.

bb. L'impôt à l'importation est actuellement perçu sans égard au fait que l'importateur est ou non grossiste. Le grossiste peut déduire de l'impôt dû sur ses transactions sur territoire suisse l'impôt acquitté à la douane sur des marchandises qu'il affecte à la revente ou à l'emploi comme matières premières dans la fabrication professionnelle de marchandises ou l'exécution professionnelle de constructions (art. 23 de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires). Cette réglementation entraîne pour les grossistes des complications et des pertes d'intérêts. Il y a dès lors lieu de leur
permettre d'importer en franchise d'impôt les marchandises destinées à la revente et les matières premières. Cette modification entraîne également une diminution des frais administratifs. Les contrôles supplémentaires de radministration des contributions nécessiteront bien moins de personnel que l'administration des douanes n'en économisera grâce à la simplification du régime applicable à l'importation des marchandises. C'est pour ce motif que l'administration des douanes approuve, elle aussi, la modification proposée.

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6, Les diverses dispositions du projet d'arrêté L'article premier règle l'assujettissement des entreprises qui livrent annuellement pour plus de 35 000 francs de produits de boulangerie et pâtisserie de leur propre fabrication, sans être réputées grossistes en vertu des dispositions de l'arrêté instituant l'impôt sur le chiffre d'affaires. Leur assujettissement est limité aux transactions (livraisons et consommation particulière) portant sur les produits de boulangerie et pâtisserie de leur propre fabrication, de sorte qu'elles ne bénéficient de la franchise d'impôt que pour l'acquisition des matières premières destinées à la fabrication de ces produits. Pour les transactions portant sur toutes les autres marchandises, l'entreprise continue d'être réputée non-grossiste et ne peut faire valoir sa qualité de grossiste pour acquérir de telles marchandises. En revanche, elle n'a pas à. imposer la livraison de ces marchandises, ni rendre compte à leur propos à l'administration des contributions.

L'article 2 autorise le Conseil fédéral à étendre, au besoin, à d'autres branches de l'économie la réglementation prévue à l'article premier pour la boulangerie-pâtisserie.

L'article 3, 1er alinéa, charge le Conseil fédéral d'édicter les dispositions d'exécution nécessaires.

L'article 3, 2e alinéa, l'autorise à apporter à l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires les deux simplifications citées plus haut, en exonérant l'importation, par des grossistes, de marchandises destinées à la revente ou à l'emploi comme matières premières dans la fabrication professionnelle de marchandises ou l'exécution professionnelle de constructions et en édictant des prescriptions spéciales concernant le régime fiscal des emballages de marchandises.

Nous fondant sur ce qui précède, nous avons l'honneur de vous prier d'approuver notre projet d'arrêté ci-joint de l'Assemblée fédérale modifiant l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires.

Nous saisissons l'occasion pour vous renouveler, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 21 avril 1950.

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Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Max PETITPIERRE LÉ chancelier de la Confédération, LEIMGEUBER

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(Projet)

ARRÊTÉ DE L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE modifiant

l'arrêté du Conseil fédéral du 29 juillet 1941/27 novembre 1945 qui institue un impôt sur le chiffre d'affaires

L'Assemblée, fédérale, de la Confédération suisse,

vu l'article 1er, lettre B, chiffre 4, de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1949 concernant le régime transitoire des finances fédérales (régime financier de 1950 et 1951); vu le message du Conseil fédéral du 21 avril 1050, arrête :

Article premier Même si les conditions fixées par l'article 9, 1er alinéa, de l'arrêté instituant un impôt sur le Chiffra d'affaires ne sont pas remplies, quiconque livre annuellement sur territoire suisse ou affecte à la consommation particulière pour plus de 35 000 francs de produits de boulangerie et pâtisserie (pain et autres produits de boulangerie, pâtisserie, sucreries et autres articles de confiserie) de sa propre fabrication est réputé grossiste pour les transactions portant sur des produits de boulangerie et pâtisserie fabriqués par lui et pour l'acquisition des matières premières destinées à leur fabrication.

Art. 2 Si, dans un autre domaine que la boulangerie, apparaissent des inégalités considérables de la charge fiscale entre les entreprises contribuables comme grossistes en vertu de l'article 9 de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires et celles qui se livrent à la fabrication de marchandises sans toutefois remplir les conditions fixées par ledit article 9, le Conseil fédéral peut assujettir ces dernières comme grossistes, au sens de l'article premier, pour leur entreprise de fabrication, lorsque les livraisons de produits fabriqués par elles dépassent 35 000 francs par an.

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Art. 3 1

Le Conseil fédéral édicté les dispositions nécessaires à l'exécution du présent arrêté.

2

II peut en outre déroger à l'arrêté qui institue un impôt sur le chiffre d'affaires : a. Pour exonérer l'importation par des grossistes de marchandises destinées à être revendues ou employées comme matières premières dans la fabrication professionnelle de marchandises ou l'exécution de constructions ; b. Pour édicter des prescriptions spéciales sur le régime fiscal des emballages de marchandises.

Art. 4 Le présent arrêté entre en vigueur le 1er juillet 1950.

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