Admission et réexamen des médicaments figurant sur la liste des spécialités Rapport de la Commission de gestion du Conseil des Etats du 25 mars 2014

2014-1537

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L'essentiel en bref L'assurance obligatoire des soins suisse ne rembourse que les médicaments qui sont inscrits sur la liste des spécialités (LS). L'évaluation réalisée par le Contrôle parlementaire de l'administration (CPA) sur mandat des deux Commissions de gestion (CdG) des Chambres fédérales se penche sur la procédure d'admission et de réexamen des médicaments figurant sur la LS.

La Commission de gestion du Conseil des Etats (CdG-E) salue les différentes mesures prises durant ces dernières années ainsi que celles qui sont en cours de planification en vue d'améliorer cette procédure. Parmi celles-ci figurent en particulier des baisses des prix dans le cadre des réexamens périodiques des médicaments remboursés, l'augmentation des ressources des institutions compétentes et l'accélération de la procédure d'admission.

L'évaluation du CPA met cependant aussi en évidence certaines lacunes de la procédure et en particulier du système de détermination des prix. Elle montre clairement que les critères qu'un médicament doit remplir pour être admis dans la LS sont insuffisants et n'ont pas été assez précisés. La procédure ne comporte notamment pas d'analyse satisfaisante du rapport coût-bénéfice des médicaments. Les mécanismes servant à déterminer les prix des médicaments ­ la comparaison thérapeutique (CT) et la comparaison de prix avec l'étranger (CPE) ­ présentent également des lacunes. De l'avis de la CdG-E, le système actuel ne permet pas de réellement garantir qu'un prix plus élevé sera accompagné d'une efficacité des médicaments elle aussi plus élevée.

Il ressort en outre de l'évaluation que la Suisse ne prévoit pas de séparation claire entre les différentes étapes de la procédure, contrairement à ce qui se fait au niveau international ­ «évaluation thérapeutique» (assessment), «évaluation en termes de santé publique» (appraisal) et «décision politique» (decision) ­, et que les compétences dont bénéficient les institutions impliquées ­ Commission fédérale des médicaments (CFM) et Office fédéral de la santé publique (OFSP) ­ ne sont pas délimitées de façon suffisamment précise. Par ailleurs, à la lecture de l'évaluation du CPA, il peut être constaté que les résultats de la procédure ne sont consignés et rendus publics que superficiellement.

L'évaluation montre également que, en raison des critères
d'évaluation restreints et des ressources limitées dont dispose la section compétente de l'OFSP, le réexamen périodique des médicaments déjà admis dans la LS, effectué depuis peu, n'est pas suffisant pour garantir que les médicaments continuent de satisfaire aux critères pertinents après leur admission dans la LS. La CdG-E constate au contraire que, même lorsque le rapport coût-bénéfice d'un médicament figurant sur la liste perd de son intérêt ­ en raison notamment de l'introduction de médicaments plus efficaces ­, le prix de celui-ci ne subit pas de réduction et le médicament en question n'est pas radié de la LS. Dans les faits, l'admission d'un médicament dans la LS équivaut à garantir au fabricant que son médicament sera toujours pris en charge par l'assurance obligatoire des soins.

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L'évaluation montre clairement que, même en ce qui concerne les médicaments non protégés par un brevet, le système actuel n'accorde pas suffisamment d'importance à l'économicité des médicaments. La CdG-E constate que, en raison de la réglementation du prix des génériques en vigueur en Suisse, les prix des génériques et des préparations originales dans notre pays sont plus élevés en comparaison internationale, ce qui a pour effet que la part des génériques reste faible sur le marché du médicament.

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Rapport 1

Introduction

Pour qu'un médicament soit remboursé par l'assurance obligatoire des soins (AOS), il doit avoir été autorisé par l'Institut suisse des produits thérapeutiques (Swissmedic) et inscrit sur la liste des spécialités (LS) par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP). Cette liste énumère de façon exhaustive les médicaments devant être remboursés par les caisses-maladie et fixe pour chacun d'eux un montant maximal à la charge de l'AOS.

Au cours des dernières années, la procédure d'admission et de réexamen des médicaments figurant sur la LS a souvent prêté le flanc à la critique. Le manque de précision des critères d'évaluation sur lesquels se base la décision d'admission, l'appréciation insuffisante desdits critères ou encore les prix généralement trop élevés des médicaments en Suisse ont été jugés problématiques1. Le prix élevé des génériques en comparaison internationale a également fait l'objet de critiques2. Quant aux fabricants de médicaments, ils ont à plusieurs reprises déploré le manque de transparence des décisions des autorités et la durée excessive de la procédure. Les nombreuses modifications apportées ces dernières années à des ordonnances portant sur les médicaments ­ augmentation du nombre de pays pris en compte pour comparer les prix ou introduction d'un réexamen périodique des médicaments de la LS ­ reflètent bien les reproches visant la procédure.

Les montants considérables déboursés en Suisse pour les médicaments expliquent également les critiques et les nombreuses mesures prises dans ce domaine. Les dépenses liées aux médicaments constituent en effet le troisième poste de dépenses de l'AOS, avec une proportion d'environ 20 %. La progression réelle des coûts a été d'environ 14 % au cours de la dernière décennie; cette évolution correspond à peu près à la moyenne de la hausse générale des coûts dans le domaine de la santé3.

Dans ce contexte, les Commissions de gestion (CdG) des Chambres fédérales ont décidé, le 7 janvier 2012, de charger le Contrôle parlementaire de l'administration (CPA) d'évaluer la procédure d'admission et de réexamen des médicaments figurant sur la LS. Sur la base des propositions élaborées par le CPA, la sous-commission DFI/DETEC de la Commission de gestion du Conseil des Etats (CdG-E), compétente en la matière, a décidé, le 19 avril 2012, que l'évaluation
porterait sur les médicaments et génériques de la médecine tant classique que complémentaire et qu'elle étudierait en particulier la procédure de détermination des prix. Le 13 juin 2013, le CPA a consigné les résultats de son évaluation dans un rapport intitulé

1

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3

Cf. interventions parlementaires 08.3670 «Contrôle régulier du prix des médicaments», 09.3088 «Formation du prix des médicaments. Révision de la LAMal», 09.3539 «Le prix des médicaments doit baisser», 12.3342 «Nouvelle fixation du prix des médicaments», 12.3396 «Adaptation du système de formation du prix des médicaments» et 12.3614 «Revoir le système de formation du prix des médicaments».

Cf. rapport de la Surveillance des prix d'août 2013 «Schweizer Medikamentenmarkt im internationalen Vergleich ­ Handlungsbedarf im patentfreien Bereich»; rapport de l'Obsan d'octobre 2013 «Influence des génériques sur le marché des médicaments».

Procès-verbal de l'audition des représentants de l'OFSP menée par la CdG-E le 4.11.2013.

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«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins» (cf. annexe).

Le présent rapport de la CdG-E se fonde sur l'évaluation du CPA et sur les auditions des représentants de l'OFSP et des représentants de la Surveillance des prix, réalisées par la sous-commission4. Considérant ce rapport comme un complément à ladite évaluation, la CdG-E se contente d'y exposer ses principales conclusions et recommandations.

2

Lacunes dans la procédure d'admission et dans la répartition des tâches

2.1

Aperçu de la procédure d'admission

L'autorisation de mise sur le marché suisse délivrée par Swissmedic est une condition pour l'admission d'un médicament dans la LS5. Une fois que le fabricant de médicaments ou l'importateur a reçu une décision d'autorisation ou au moins un préavis de la part de Swissmedic, il peut déposer une demande pour l'inscription d'un médicament sur la LS.

En bref, l'OFSP décide d'admettre un médicament dans la liste après audition de la Commission fédérale des médicaments (CFM)6. Que ce soit dans le cadre de la procédure ordinaire ou dans celui de la procédure accélérée, l'OFSP soumet la demande d'admission à la CFM, qui l'examine sur la base des critères légaux d'efficacité, d'adéquation et d'économicité (critères EAE) et formule une recommandation à l'intention de l'OFSP. La CFM n'est pas associée aux procédures simples, notamment utilisées pour l'admission des génériques. Sur la base de la recommandation de la CFM, l'OFSP évalue à son tour les critères EAE ­ en particulier celui de l'économicité ­ et fixe un prix maximal. Si l'OFSP estime que le médicament respecte tous les critères EAE, il rend une décision d'admission du médicament dans la LS. S'il estime que le prix proposé est trop élevé ou que les autres critères EAE ne sont pas remplis, il renvoie la demande au requérant pour qu'il la modifie7. L'OFSP peut assortir l'admission de charges ou la limiter dans le temps.

Lorsqu'une nouvelle indication ou une modification de la limitation est fixée pour une préparation, l'OFSP examine une nouvelle fois si la préparation remplit les critères EAE.

4 5

6

7

Cf. appendice.

L'évaluation du CPA ne s'est pas intéressée à la procédure d'autorisation de mise sur le marché de Swissmedic; elle n'a pas non plus traité la question de la définition des marges de distribution des médicaments.

Le déroulement de la procédure d'admission des médicaments est présenté de manière schématique dans le rapport du CPA (cf. «Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 2).

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 5.3.

7535

2.2

Manque de clarté dans la répartition des tâches entre la CFM et l'OFSP

Il ressort de l'évaluation du CPA que les tâches de la CFM et de l'OFSP dans le cadre de la procédure d'admission ne sont pas clairement définies8. La seule certitude est que la CFM assume uniquement une fonction consultative, alors que l'OFSP dispose de la compétence décisionnelle pour ce qui est de l'admission des médicaments dans la LS.

Le respect des critères EAE fixés dans la loi est examiné deux fois, soit une fois par la CFM et une fois par l'OFSP. Les instructions concernant la LS précisent simplement que l'OFSP évalue en particulier le critère de l'économicité. Par contre, la façon dont cette évaluation doit être réalisée n'est pas réglée de manière transparente.

La comparaison internationale9 effectuée par le CPA montre que, à l'étranger, une séparation plus stricte est opérée entre les différentes étapes de la procédure et les domaines de compétences des services impliqués; dans les autres pays, la procédure de l'admission comprend généralement trois étapes: l'«évaluation thérapeutique» (assessment), l'«évaluation en termes de santé publique» (appraisal) et la «décision politique» (decision). La séparation institutionnelle, qui découle de cette distinction, entre l'évaluation thérapeutique, effectuée par un groupe d'experts, et l'évaluation des résultats en termes de santé publique, menée par un organe composé de représentants de groupes d'intérêts, vise à fournir des bases de décision techniques distinctes afin que le service public concerné puisse se prononcer sur l'admission d'un médicament dans le catalogue des prestations remboursées par l'assurance.

En Suisse, seule l'étape de la décision est clairement du ressort d'une seule institution, en l'occurrence l'OFSP. Comme le montre le rapport du CPA, les étapes de l'évaluation thérapeutique (assessment) et de l'évaluation en termes de santé publique (appraisal) sont réalisées aussi bien par l'OFSP que par la CFM.

La CdG-E juge problématiques la séparation institutionnelle insuffisante des étapes de la procédure et la multiplication des fonctions exercées par l'OFSP au cours de la procédure d'admission. Elle estime qu'un renforcement de cette séparation contribuerait à améliorer les bases de décision concernant l'admission d'un médicament dans la LS et à les rendre plus transparentes. De plus, la question de la composition et du
mandat de la CFM devrait être réexaminée.

Recommandation 1 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'examiner si l'actuelle séparation des tâches entre la CFM et l'OFSP est pertinente et optimisée en fonction du processus ainsi qu'en adéquation avec la composition de ces entités. Le Conseil fédéral est notamment prié d'examiner l'opportunité d'introduire une séparation nette des compétences, conformément à la procédure en trois étapes (assessment, appraisal et decision) reconnue sur le plan international.

8 9

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 3.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 3.1.

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2.3

Absence de catégorisation des médicaments

Selon l'art. 31, al. 3, de l'ordonnance sur les prestations de l'assurance des soins (OPAS10), la CFM est censée classer chaque médicament dans l'une des catégories suivantes: (a) percée médico-thérapeutique; (b) progrès thérapeutique; (c) économie par rapport à d'autres médicaments; (d) aucun progrès thérapeutique ni économie; (e) inadéquat pour l'assurance-maladie sociale. Les instructions concernant la LS introduisent en outre la catégorie «dP», dans laquelle sont classés les médicaments qui sont considérés comme trop chers et qui ne respectent donc pas le critère de l'économicité.

Dans son évaluation, le CPA constate que, en pratique, la CFM ne classe pas explicitement les médicaments dans l'une des catégories prévues par l'ordonnance11. C'est l'OFSP qui effectue ce classement en se fondant sur les discussions de la CFM. Pour justifier cette pratique, l'OFSP fait valoir que les catégories ne sont pas appropriées et que la plupart des demandes devraient de toute façon être classées dans la catégorie supplémentaire «dP»12.

La CdG-E s'étonne du fait que l'OFSP ne se conforme pas à ce que prévoit la loi.

Outre le respect du principe de légalité, qui nécessiterait une adaptation de l'OPAS, la commission estime que la question de l'indépendance institutionnelle de la CFM doit également être posée; celle-ci s'en trouverait renforcée si la CFM procédait ellemême à la catégorisation des médicaments.

Recommandation 2 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'examiner la pertinence et l'applicabilité de la catégorisation prévue à l'art. 31, al. 3, OPAS et de procéder, au besoin, aux adaptations nécessaires.

2.4

Pénurie de ressources au sein de la CFM et de l'OFSP

En plus de mettre en évidence le manque de poids de la CFM en tant qu'institution, l'évaluation du CPA relève la faiblesse des ressources dont celle-ci dispose13. Face au nombre élevé de demandes et à leur complexité, le système de commission de milice extraparlementaire atteint ses limites. Par ailleurs, la CFM ne dispose pas de son propre secrétariat; les tâches correspondantes sont assurées par l'OFSP. En comparaison internationale, il apparaît que les autorités d'évaluation autonomes étrangères sont dotées de ressources plus importantes, sans compter que ces dernières leur sont propres.

10 11 12 13

Ordonnance du DFI du 29 septembre 1995 sur les prestations dans l'assurance obligatoire des soins en cas de maladie, RS 832.112.31.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 3.2.

D'après la lettre adressée par l'OFSP à la CdG-E le 19.12.2013, ces catégories sont, depuis 2012, la plupart du temps à nouveau utilisées.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 3.3.

7537

La commission se félicite de la décision, prise au début de l'année 2014, de porter le nombre de séances de la CFM de quatre à six par année. Elle constate par ailleurs que les membres de la CFM apprécient le soutien que leur apporte l'OFSP. Comme ce dernier l'a annoncé, il souhaite, à partir de 2014, faciliter la tâche de la CFM en s'acquittant de travaux préparatoires supplémentaires, notamment en élaborant des fiches d'information à son intention et en procédant à un premier examen formel et matériel des dossiers déposés.

Vu le rôle déjà prépondérant de l'OFSP dans la procédure d'admission, la CdG-E se demande si ces mesures ne risquent pas de restreindre davantage l'indépendance de la CFM. Elle salue cependant le fait que, depuis janvier 2012, la présidence des séances de la CFM n'est plus assurée par l'OFSP, mais par un membre de la CFM extérieur à l'administration.

L'évaluation du CPA révèle également que la section compétente de l'OFSP ne dispose pas des ressources suffisantes pour procéder à une étude approfondie des demandes14. Selon la CdG-E, ce manque d'effectifs apparaît de manière particulièrement flagrante lors des réexamens périodiques des médicaments figurant sur la LS15. C'est pourquoi la commission salue l'augmentation de trois postes à plein temps auprès de la section compétente de l'OFSP; cette mesure avait été adoptée pour anticiper la hausse de la charge de travail que la décision prise en mai 2013 et consistant à réduire la durée de la procédure d'admission à 60 jours au maximum risquait d'occasionner pour la section en question.

Recommandation 3 La CdG-E demande au Conseil fédéral de garantir que la CFM et la section compétente de l'OFSP soient dotées des ressources nécessaires à l'accomplissement de leur mandat, en fonction des rôles que ces deux institutions joueront à l'avenir et en tenant compte des résultats de l'examen d'efficacité de l'OFSP en cours. Dans ce contexte, le Conseil fédéral tiendra notamment compte de l'indépendance de la CFM et veillera à une séparation organisationnelle appropriée entre la CFM et l'OFSP.

2.5

Collaboration entre Swissmedic et l'OFSP: aucune transmission de rapports à l'OFSP

Pour examiner une demande, l'OFSP et la CFM se basent sur les documents soumis par le requérant. L'OFSP peut joindre à la demande d'autres documents pertinents, qui n'émanent pas du requérant.

14 15

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 3.3.

Cf. ch. 5.

7538

En vertu du droit en vigueur, l'OFSP n'a pas accès aux rapports établis par Swissmedic pour l'examen de la sécurité des médicaments et ainsi pour l'autorisation de mise sur le marché16. Ces rapports contiennent les résultats de l'évaluation d'un nombre considérable d'études. Ainsi, l'OFSP et le CFM ne disposent pas de certaines informations importantes qui ont déjà été traitées par Swissmedic dans la procédure d'autorisation de mise sur le marché17.

La CdG-E constate avec satisfaction qu'il est prévu, dans le cadre de l'actuelle révision de la loi sur les produits thérapeutiques, d'accorder au Conseil fédéral la compétence de communiquer les données de Swissmedic aux autres autorités fédérales du domaine de la santé18. La commission estime que, du fait de la situation juridique actuelle, les synergies entre l'OFSP et Swissmedic ne peuvent être exploitées de manière optimale.

3

Critères d'évaluation insuffisants et imprécis

3.1

Manque de précision des critères d'efficacité et d'adéquation

Dans son évaluation, le CPA constate qu'en Suisse les critères EAE ne sont pas suffisamment précisés et que cela complique leur mise en oeuvre19; la formulation des critères de l'efficacité et de l'adéquation, en particulier, est bien plus vague que dans des pays tels que l'Allemagne et l'Autriche. La Suisse ne dispose pas, en effet, de norme spécifique pour évaluer le bénéfice thérapeutique d'un médicament; une norme de ce type permettrait de garantir l'application uniforme des critères20.

Quant à l'efficacité d'un médicament ­ c'est-à-dire le bénéfice individuel d'un médicament pour un patient ­, les bases légales en vigueur ne prévoient aucun indicateur clair (par ex. la concrétisation de la qualité de vie), ni aucune comparaison avec d'autres médicaments ou prestations non médicamenteuses. Le requérant n'a pas à apporter la preuve de l'effet bénéfique supplémentaire d'un nouveau médicament pour les patients, de sorte que cet aspect est insuffisamment pris en considération21. Les critères appliqués pour juger de l'adéquation d'un médicament sont également imprécis; ils ne permettent pas d'évaluer ni de déterminer le bénéfice

16

17 18 19 20

21

L'OFSP n'est pas considéré comme une autorité d'exécution de la loi sur les produits thérapeutiques et n'est donc pas autorisé, conformément à la situation juridique actuelle, à consulter les données de Swissmedic; cf. art. 63 de la loi fédérale du 15 décembre 2000 sur les médicaments et les dispositifs médicaux (loi sur les produits thérapeutiques, LPTh), RS 812.21.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.1.

Cf. art. 63 P-LPTh (projet de loi fédérale du 7 nov. 2012 sur les médicaments et les dispositifs médicaux, FF 2013 131).

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.

Le CPA a notamment constaté qu'aucun critère d'évaluation n'avait été défini pour évaluer l'efficacité des médicaments dans le domaine de la médecine complémentaire.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.5.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.1.

7539

thérapeutique d'un médicament ou son utilité pour la collectivité (prise en charge justifiée d'une prestation par l'assurance obligatoire des soins)22.

La CdG-E déplore le manque de précision des critères EAE et juge la situation insatisfaisante. Elle estime que des critères d'évaluation plus détaillés favoriseraient une application uniforme de la procédure d'admission des médicaments et rendraient les décisions des autorités d'exécution plus compréhensibles aux yeux des acteurs impliqués.

La commission considère également que l'analyse du bénéfice thérapeutique d'un médicament n'est, actuellement, pas suffisamment prise en considération dans le cadre de l'évaluation. Comme le montre le rapport du CPA, la plupart des pays de l'Union européenne (UE) ont fixé des exigences claires concernant la preuve de l'efficacité pour un médicament remboursé par l'assurance-maladie obligatoire. Le CPA relève par ailleurs une tendance, à l'étranger, qui consiste à réaliser des études sur l'approvisionnement ainsi que des évaluations complètes des technologies de santé (Health Technology Assessments), lesquelles incluent des aspects de la santé publique, du droit et de l'éthique ainsi que des aspects sociaux, qui sont systématiquement évalués à l'aide d'indicateurs. La CdG-E est consciente que des procédures d'examen aussi poussées peuvent être complexes et nécessiter d'importantes ressources. Elle estime toutefois que la procédure actuelle ne tient pas assez compte de la plus-value thérapeutique d'un nouveau médicament pour la santé individuelle et collective.

Postulat 1 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'examiner l'opportunité de préciser et de compléter les critères utilisés pour évaluer l'efficacité et l'adéquation des médicaments et de présenter un rapport à ce sujet. Elle le prie en particulier de veiller à ce que le bénéfice thérapeutique du médicament soit davantage pris en considération.

3.2

Economicité: valeurs de référence insuffisantes

Un médicament est considéré comme économique lorsqu'il produit l'effet thérapeutique recherché à un coût aussi réduit que possible. L'économicité est évaluée de deux façons: au moyen de la comparaison thérapeutique (CT) ­ comparaison avec d'autres médicaments dont les indications sont identiques ou les effets similaires ­ et de la comparaison avec le prix pratiqué à l'étranger (CPE). Dans son évaluation, le CPA conclut que ces deux instruments ne sont que partiellement appropriés à l'évaluation de l'économicité et que leur application pose de sérieux problèmes. En outre, il constate que les dispositions légales ne précisent pas comment pondérer les résultats de la CT et de la CPE23.

22 23

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.2.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.3 et 5.2.

7540

Par rapport à d'autres pays, dans lesquels des groupes de produits sont clairement définis, la Suisse ne détermine pas précisément les médicaments avec lesquels un médicament donné doit être comparé dans le cadre de la CT. En outre, comme expliqué plus haut, une analyse fiable du bénéfice thérapeutique d'un médicament fait défaut en Suisse. Comme le relève le CPA, le requérant n'est pas contraint de déposer des études mettant le coût d'un médicament en rapport avec son effet bénéfique supplémentaire; de telles études faciliteraient la comparaison avec d'autres médicaments.

Le CPA indique en outre que la pertinence de la CPE, qui repose sur les prix courants des médicaments à l'étranger, est limitée. Il arrive en effet que des rabais, parfois importants, soient octroyés par les fabricants de médicaments sur les prix affichés à l'étranger ou que le prix effectivement remboursé par les assurancesmaladie soit nettement inférieur au prix affiché parce que seul un forfait est remboursé pour un médicament donné. Certes, ces rabais ne sont souvent pas rendus publics et leur montant est donc difficile à chiffrer, mais même dans les cas où ils sont prévus par la loi et par conséquent connus du public (comme c'est le cas en Allemagne), les rabais ne sont pas pris en considération par l'OFSP.

Le CPA constate également que les principes régissant l'octroi des primes à l'innovation, qui visent à compenser les coûts de recherche et de développement, ne sont pas suffisamment précis24.

Postulat 2 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'examiner l'optimisation des critères d'évaluation de l'économicité et de présenter un rapport à ce sujet. S'agissant de la comparaison thérapeutique, le Conseil fédéral est invité à se pencher en particulier sur la délimitation des groupes utilisés pour la comparaison et sur le développement de l'analyse coût-bénéfice. Pour ce qui est de la comparaison avec le prix pratiqué à l'étranger, le Conseil fédéral est prié d'examiner l'opportunité d'une meilleure prise en considération des prix des médicaments effectivement remboursés par les caisses-maladie à l'étranger. Enfin, la commission demande au Conseil fédéral de veiller à une application uniforme des instructions concernant la prime à l'innovation en précisant les conditions d'octroi d'une telle prime.

3.3

Problème des admissions temporaires

Si, lors du dépôt de la demande d'admission d'un médicament dans la LS, les preuves de son efficacité sont encore insuffisantes, l'OFSP peut admettre le médicament pour une durée limitée. Comme l'explique le CPA25, le problème de l'admission temporaire réside dans le fait que, souvent, les preuves irréfutables de l'efficacité du médicament manquent toujours à l'expiration du délai et que, malgré cela, le médi24 25

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 5.2.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 5.2.

7541

cament admis à titre provisoire ne peut que difficilement être radié de la LS, car les patients se sont déjà habitués au médicament en question, dont l'arrêt pourrait se révéler pénible pour eux. Si la CdG-E salue la flexibilité qu'offre la possibilité d'admettre provisoirement de nouveaux médicaments au sujet desquels peu de données sont encore disponibles, elle estime que cette admission temporaire risque également de créer un précédent problématique pour l'admission définitive ultérieure. Aussi la CdG-E estime-t-elle qu'il est important que la pratique de l'admission temporaire soit menée en toute transparence.

Recommandation 4 La CdG-E recommande au Conseil fédéral de communiquer les décisions d'admission temporaire de médicaments dans la LS de manière transparente et de veiller à ce que les médicaments qui, après évaluation, ne satisfont pas aux critères légaux EAE soient exclus de la prise en charge par l'assurance obligatoire des soins de manière conséquente.

3.4

Fixation de certains rabais dans la «limitation»

Alors que la section «limitation», prévue par la loi, restreint l'étendue de l'obligation ordinaire de prise en charge des coûts par l'AOS à une certaine utilisation du médicament (notamment par rapport à la quantité ou aux indications médicales)26, le CPA fait état de cas isolés dans lesquels l'OFSP a déterminé un prix relativement élevé, tout en fixant dans la limitation un rabais aux caisses-maladie27. Le CPA explique ces cas où la limitation ne porte pas sur une restriction d'utilisation, mais sur l'octroi d'un rabais, par le fait que le prix des médicaments prévu dans la LS influe sur la détermination des prix à l'étranger, la Suisse étant représentée dans le panier de référence de nombreux pays. Les fabricants cherchent par conséquent à obtenir un prix aussi élevé que possible pour leurs médicaments.

La CdG-E s'étonne de cette utilisation, visiblement détournée, de la limitation dans la LS. L'admission d'un médicament sur lequel il a été décidé au préalable d'octroyer un rabais aux assureurs maladie soulève la question de savoir si un prix courant ­ qui ne correspond pas au prix effectivement remboursé ­ remplit le critère d'économicité. Dans une lettre adressée à la CdG-E, l'OFSP évoque plusieurs raisons pour lesquelles il était nécessaire de garantir, au moyen d'un remboursement fixé dans la limitation, que les coûts du médicament correspondent au bénéfice thérapeutique de celui-ci28. La CdG-E ne comprend cependant pas pourquoi le critère d'économicité n'est pas directement pris en considération au moment de la détermination des prix courants des médicaments. En outre, la commission se demande si la charge de travail supplémentaire occasionnée dans les caisses-maladie par la demande de remboursement se justifie.

26 27 28

Cf. art. 73 de l'ordonnance du 27 juin 1995 sur l'assurance-maladie (OAMal), RS 832.102.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 5.3.

Lettre de l'OFSP à la CdG-E du 19.12.2013.

7542

Recommandation 5 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'examiner la pratique des rabais fixés dans la limitation d'un médicament.

4

Manque de transparence de la procédure d'admission

L'évaluation du CPA montre que la procédure d'admission et les décisions de l'OFSP manquent de transparence29. Au contraire de ce qui se fait dans certains autres pays tels que l'Allemagne, où les résultats de chaque étape de la procédure sont publiés sur Internet, en Suisse, les résultats des différentes étapes de l'évaluation ne sont consignés que superficiellement. Vu l'absence de séparation claire entre les différentes étapes de la procédure d'admission suisse, le manque de clarté dans la répartition des tâches entre la CFM et l'OFSP30, et l'absence de catégorisation explicite des médicaments par la CFM31, la CdG-E estime que les étapes successives de la procédure ne sont pas suffisamment documentées.

En plus d'une communication interne déficiente, le CPA relève un manque de transparence vis-à-vis du public. En effet, l'OFSP mentionne uniquement le médicament autorisé, son prix et une éventuelle limitation. Pour justifier sa réserve à l'égard de la publication des documents, l'OFSP avance le secret commercial. Peu de documents y sont toutefois soumis, comme le souligne le CPA. Rien ne s'oppose, par exemple, à la publication des rapports concernant les étapes de l'assessment et de l'appraisal, c'est-à-dire des informations portant sur l'évaluation thérapeutique et l'évaluation en termes de santé publique. La CdG-E est convaincue que davantage de transparence dans la procédure d'admission permettrait une meilleure compréhension des décisions de l'OFSP et la transmission d'informations précieuses aux fournisseurs de prestations et aux patients.

Recommandation 6 La CdG-E recommande au Conseil fédéral d'examiner comment les étapes de la procédure et la décision d'admission d'un médicament dans la LS pourraient être mieux documentées et communiquées au public intéressé. Elle l'invite à tenir compte pour cela aussi bien de l'intérêt du public et des fournisseurs de prestations à connaître l'évaluation du bénéfice thérapeutique du médicament ainsi que des intérêts des fabricants de médicaments concernant le respect du secret commercial. Dans ce contexte, le Conseil fédéral veille à ce que l'OFSP justifie suffisamment les décisions qui s'écartent des appréciations de la CFM.

29 30 31

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 5.4.

Cf. ch. 2.2.

Cf. ch. 2.3.

7543

5

Réexamen périodique: lacunes

En 2009, le Conseil fédéral a adopté l'art. 65d de l'ordonnance sur l'assurancemaladie (OAMal), qui prévoit la réalisation d'un examen des conditions d'admission des médicaments dans la LS tous les trois ans. Sur la base de cet article, l'OFSP examine ainsi chaque année environ un tiers des médicaments remboursés par les caisses-maladie. S'il conclut, dans ce cadre, que le critère de l'économicité n'est plus rempli, il ordonne une baisse du prix du médicament concerné.

Les premiers réexamens périodiques ont eu lieu en 2012 et 2013: les deux fois, sur quelque 800 médicaments examinés, environ 500 ont vu leur prix baisser.

5.1

Evaluation limitée dans le cadre du réexamen

Conformément aux dispositions légales en vigueur, l'efficacité, l'adéquation et le caractère économique de toutes les prestations de l'AOS doivent être réexaminés périodiquement32. Le CPA indique dans son évaluation que l'OFSP évalue uniquement le critère de l'économicité dans le cadre du réexamen33. L'efficacité et l'adéquation ne sont pas prises en considération, bien que leur réexamen soit lui aussi prescrit par la loi.

Lorsqu'il évalue le caractère économique, l'OFSP ne procède en général qu'à une CPE; une CT n'est réalisée que si le médicament n'est pas commercialisé à l'étranger (art. 65d, al. 1bis, OAMal). Comme le montre le CPA, les baisses de prix d'environ 20 % ordonnées lors du premier réexamen correspondent approximativement à l'adaptation du taux de change appliqué à la CPE34.

L'OFSP justifie son évaluation limitée lors du réexamen périodique par le fait que l'effet bénéfique d'un médicament par rapport à d'autres médicaments ne change généralement pas. En outre, les ressources dont disposent l'OFSP ne suffiraient pas pour effectuer systématiquement une CT. Enfin, une telle comparaison augmenterait la probabilité que les baisses de prix décidées par l'OFSP fassent l'objet de recours35.

Le CPA constate que, pour le moment, le réexamen périodique permet seulement d'éviter que l'écart de prix ne se creuse avec l'étranger36. Etant donné que la procédure de réexamen repose uniquement sur une CPE, l'évaluation ne tient compte ni des critères d'efficacité et d'adéquation, ni de la plus-value thérapeutique et donc du rapport coût-bénéfice par rapport à d'autres médicaments. Tel que le réexamen périodique est constitué à l'heure actuelle, il ne permet pas de baisser le prix des anciens médicaments lorsque de produits innovants sont introduits sur le marché.

32

33 34 35 36

Cf. art. 32, al. 2, de la loi du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal), RS 832.10.

Avant la modification de l'ordonnance et l'ajout de l'art. 65d OAMal, le réexamen avait lieu à intervalles irréguliers et plus espacés.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 6.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 6.2.

Lettre de l'OFSP à la CdG-E du 19.12.2013.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 6.3 et 8.3.

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La commission constate avec satisfaction que les réexamens périodiques effectués depuis 2012 ont entraîné des baisses de coûts considérables sur le marché du médicament (le réexamen de 2012 conduit probablement à des économies annuelles d'environ 240 millions de francs, et celui de 2013 à des économies annuelles supplémentaires d'au moins 200 millions de francs). Eu égard à la situation dépeinte par le CPA, force est de constater pour la CdG-E que le réexamen périodique dans le domaine des médicaments n'est pas conforme aux conditions prévues à l'art. 32, al. 2, LAMal, car il ne tient pas entièrement compte des critères d'efficacité, d'adéquation et d'économicité. De l'avis de la commission, le réexamen triennal des médicaments figurant sur la LS, qui se limite à une comparaison avec les prix pratiqués à l'étranger, n'est pas une mesure suffisante pour garantir un rapport coûtbénéfice adéquat des médicaments remboursés. En outre, comme indiqué plus haut37, la pertinence de la CPE est limitée. Pour la CdG-E, il est intéressant d'apprendre que, dans d'autres pays, l'obligation de prise en charge des médicaments par les caisses-maladie fait l'objet d'un réexamen régulier plus poussé, qui va au-delà de la simple question des prix, puisqu'il prend aussi en considération la question du bénéfice thérapeutique sous les angles de l'efficacité et de l'adéquation38.

Recommandation 7 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'expliquer comment le mandat légal, défini à l'art. 32, al. 2, LAMal, qui exige la réalisation d'un examen périodique dans le domaine des médicaments, pourra à l'avenir être entièrement rempli.

5.2

Pas de radiation des médicaments malgré des résultats négatifs lors de l'évaluation

Le CPA note que, au cours des dix à quinze dernières années, aucun médicament n'a été radié de la LS sur la base d'une évaluation négative des critères EAE rendue par l'OFSP39. Ce dernier radie un médicament de la liste uniquement si l'autorisation de mise sur le marché a été retirée par Swissmedic ou si le fabricant du médicament en a fait la demande. L'OFSP défend la réserve dont il fait preuve au sujet de la radiation de médicaments en invoquant la difficulté pour lui de prouver qu'un médicament ne satisfait plus aux critères EAE. Le fardeau de la preuve incombant à l'OFSP et la procédure de radiation étant longue et compliquée, il serait d'après celui-ci impossible de radier un médicament de la LS.

37 38 39

Cf. ch. 3.2.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 8.3.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 6.3.

7545

Postulat 3 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'examiner quelles mesures permettraient de radier effectivement de la LS les médicaments qui ne satisfont plus aux critères EAE et de présenter un rapport à ce sujet.

6

Génériques: manque d'incitation à baisser les prix dans le domaine des médicaments non protégés par des brevets

A l'expiration de la protection conférée aux préparations originales par les brevets, ces dernières sont soumises à la concurrence des génériques meilleur marché. Est considéré comme générique un médicament qui est interchangeable avec la préparation originale parce qu'il contient les mêmes principes actifs et présente les mêmes formes galéniques et les mêmes dosages qu'elle. Lors de l'admission des génériques dans la LS, l'OFSP n'examine pas séparément leur efficacité, car il part du principe qu'elle est la même que pour la préparation originale. Le générique est réputé adéquat lorsqu'il est proposé aux adultes avec les mêmes modes d'administration, dans le même emballage et au même dosage que la préparation originale. L'évaluation du caractère économique d'un générique est effectuée par l'OFSP sur la base de l'art. 65c OAMal, qui exige un écart de prix fixe entre le générique et la préparation originale. Selon le volume de marché de la préparation originale, le prix du générique doit être de 10 à 60 % inférieur à celui de cette dernière.

Comme le montre la comparaison que le CPA a effectuée avec d'autres pays, la règle de l'écart de prix fixe entre génériques et préparations originales est une particularité du système suisse40. Tandis que, dans d'autres pays, le montant remboursé par les caisses-maladie pour les préparations originales est souvent revu à la baisse lors de l'introduction de génériques, en Suisse, deux produits interchangeables ayant la même valeur thérapeutique sont remboursés par l'AOS à des tarifs différents.

Certes, depuis l'introduction de l'art. 38a dans l'OPAS, les patients doivent prendre en charge une quote-part plus élevée des frais consentis pour l'achat d'une préparation originale pour laquelle il existe un générique (20 % au lieu de 10 %) ­ ce qui incite parfois les fabricants des préparations originales à diminuer leurs prix afin de contourner l'inconvénient de la quote-part plus élevée ­ mais selon le CPA les effets de cette quote-part différenciée ne peuvent encore être clairement évalués41. Dans son rapport sur le marché des médicaments, le Surveillant des prix juge quant à lui que ces effets sont trop faibles42.

Malgré cette quote-part différenciée, le CPA relève une contradiction fondamentale avec l'objectif légal de l'économicité, puisque les caisses-maladie ne paient pas uniquement la préparation la moins chère, mais également la préparation originale,

40 41 42

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.4.

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.4.

Rapport de la Surveillance des prix d'août 2013 «Schweizer Medikamentenmarkt im internationalen Vergleich ­ Handlungsbedarf im patentfreien Bereich», p. 5.

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qui coûte plus cher43. Le générique étant par définition interchangeable avec la préparation originale, l'AOS devrait, si le principe de l'économicité était respecté, rembourser un médicament à hauteur du prix du générique le meilleur marché.

La CdG-E constate que, du fait de la réglementation du prix des génériques appliquée en Suisse, les prix des génériques et des préparations originales y sont beaucoup plus élevés qu'à l'étranger et que la part des génériques sur le marché du médicament y est faible44. Etant donné les particularités de la réglementation suisse, la commission se demande si d'autres mécanismes de détermination des prix, comme par exemple un système de prix de référence (comme celui proposé par le Surveillant des prix ou sous une autre forme), permettraient de mieux tenir compte de l'exigence légale d'économicité. Dans ce système, qui a déjà été introduit sous différentes formes dans 22 pays européens selon le Surveillant des prix45, les médicaments contenant les mêmes principes actifs ne sont remboursés par les caissesmaladie qu'à hauteur du prix de la préparation la meilleur marché.

Recommandation 8 La CdG-E demande au Conseil fédéral d'examiner, dans le domaine des médicaments hors brevets, quelles mesures permettraient de créer des incitations plus efficaces pour faire baisser les prix des préparations originales et des génériques ainsi que pour promouvoir la prescription de génériques. Dans ce contexte, il se prononce en particulier sur la possibilité d'introduire un système de prix de référence.

7

Conclusions

De l'avis de la CdG-E, l'évaluation montre globalement que l'organisation actuelle de la procédure d'admission et de réexamen des médicaments figurant sur la LS comporte plusieurs lacunes. La commission prie ainsi le Conseil fédéral de bien vouloir prendre position, d'ici au 31 août 2014 au plus tard, sur ses constats et ses recommandations ainsi que sur l'évaluation du CPA. Elle l'invite en outre à indiquer au moyen de quelles mesures et dans quel délai il envisage de mettre en oeuvre les recommandations de la commission.

25 mars 2014

Pour la Commission de gestion du Conseil des Etats: Le président, Hans Hess La secrétaire, Beatrice Meli Andres

43 44

45

«Evaluation de l'admission et du réexamen des médicaments dans l'assurance obligatoire des soins», rapport du CPA, ch. 4.4.

Ce constat émane du rapport de la Surveillance des prix d'août 2013 «Schweizer Medikamentenmarkt im internationalen Vergleich ­ Handlungsbedarf im patentfreien Bereich» et du rapport de l'Obsan d'octobre 2013 «Influence des génériques sur le marché des médicaments».

Bericht des Preisüberwachers vom August 2013 «Schweizer Medikamentenmarkt im internationalen Vergleich ­ Handlungsbedarf im patentfreien Bereich», Seite 8.

7547

Appendice

Liste des personnes entendues Pascal Strupler

Directeur de l'OFSP

Sandra Schneider

Responsable de la division Prestations de l'unité de direction Assurance maladie et accidents, OFSP

Andrea Frey

Responsable de la section Médicaments de l'unité de direction Assurance maladie et accidents, OFSP

Stefan Meierhans

Surveillant des prix

Manuel Jung

Responsable Domaine de la santé, Surveillance des prix

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