14.087 Message relatif à l'initiative populaire «AVSplus: pour une AVS forte» du 19 novembre 2014

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre au vote du peuple et des cantons l'initiative populaire «AVSplus: pour une AVS forte», en leur recommandant de la rejeter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

19 novembre 2014

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Didier Burkhalter La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2014-1554

9083

Condensé L'Union syndicale suisse veut augmenter les rentes de vieillesse de l'AVS au moyen de l'initiative populaire «AVSplus: pour une AVS forte». Le texte demande le versement d'un supplément de 10 % sur la rente. Le but est de contrer l'érosion du taux de remplacement AVS et de répondre à la pression sur les rentes de la prévoyance professionnelle redoutée par les auteurs de l'initiative.

Contenu de l'initiative L'initiative demande une augmentation de 10 % de toutes les rentes de vieillesse AVS, qui serait servie sous forme de supplément sur la rente.

Avantages et inconvénients de l'initiative L'initiative aurait des conséquences positives pour une grande partie des bénéficiaires de rente AVS. Ces retraités toucheraient des prestations AVS plus élevées et leur situation financière s'améliorerait. En corollaire, le taux de remplacement AVS connaîtrait une augmentation unique. Par ailleurs, l'initiative réduirait le nombre de retraités tributaires des prestations complémentaires. Le principe de l'assurance qui a cours dans l'AVS serait renforcé par rapport au principe de l'indemnisation fondée sur les besoins, appliqué pour les prestations complémentaires.

Les conséquences positives de l'initiative doivent être mises en balance avec ses inconvénients, s'agissant du financement notamment. En cas d'acceptation de l'initiative, les dépenses annuelles de l'AVS augmenteraient d'environ 4,1 milliards de francs au moment de l'entrée en vigueur en 2018, et même de quelque 5,5 milliards d'ici 2030. Des charges supplémentaires de cet ordre accentueraient les problèmes financiers prévisibles de l'AVS liés à l'allongement de l'espérance de vie et au fait que la génération du baby-boom atteindra progressivement l'âge de la retraite. En l'état, il faut déjà s'attendre à un déficit de répartition de l'AVS de 8,3 milliards de francs par an d'ici 2030. Pour couvrir les coûts produits par l'initiative, des adaptations majeures du financement de l'AVS seraient nécessaires (augmentation des taux de cotisation par ex.). L'initiative ferait, en outre, peser une charge importante sur le budget fédéral.

Un supplément pour les retraités comme celui demandé par l'initiative n'améliore pas nécessairement la situation financière des classes de revenu basses. Le supplément sur la rente AVS serait compensé pour tout ou
partie, chez ces personnes, par la réduction de leurs prestations complémentaires. A l'inverse, sous l'angle sociopolitique, l'allocation du supplément aux retraités des classes de revenus plus élevées ne se justifie guère, voire aucunement.

Proposition du Conseil fédéral Le Conseil fédéral propose aux Chambres fédérales de soumettre l'initiative populaire «AVSplus: pour une AVS forte» au vote du peuple et des cantons sans proposer de contre-projet direct ou indirect et en leur recommandant de la rejeter.

9084

Message 1

Aspects formels et validité de l'initiative

1.1

Texte

L'initiative populaire «AVSplus: pour une AVS forte» a la teneur suivante: Les dispositions transitoires de la Constitution1 sont modifiées comme suit: Art. 197, ch. 102 10. Disposition transitoire ad art. 112 (Assurance-vieillesse, survivants et invalidité) Les bénéficiaires d'une rente de vieillesse ont droit à un supplément de 10 % sur leur rente.

1

Le supplément leur sera versé à compter du début de la deuxième année civile qui suit l'acceptation de la présente disposition par le peuple et les cantons au plus tard.

2

1.2

Aboutissement et délais de traitement

L'initiative populaire «AVSplus: pour une AVS forte» a fait l'objet d'un examen préliminaire par la Chancellerie fédérale le 26 février 20133, et elle a été déposée le 17 décembre 2013 avec le nombre requis de signatures.

Par décision du 15 janvier 2014, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative avait recueilli 111 683 signatures valables et qu'elle avait donc abouti4.

L'initiative est présentée sous la forme d'un projet rédigé. Le Conseil fédéral ne lui oppose pas de contre-projet. Conformément à l'art. 97, al. 1, let. a, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)5, le Conseil fédéral avait jusqu'au 17 décembre 2014 pour soumettre à l'Assemblée fédérale un projet d'arrêté fédéral accompagné d'un message. Conformément à l'art. 100 LParl, l'Assemblée fédérale a jusqu'au 17 juin 2016 pour adopter la recommandation de vote qu'elle présentera au peuple et aux cantons.

1.3

Validité

L'initiative remplit les critères de validité énumérés à l'art. 139, al. 3, de la Constitution (Cst.): a)

1 2 3 4 5

elle obéit au principe de l'unité de la forme, puisqu'elle revêt entièrement la forme d'un projet rédigé;

RS 101 Le chiffre définitif de la présente disposition transitoire sera fixé par la Chancellerie fédérale après le scrutin.

FF 2013 1669 FF 2014 933 RS 171.10

9085

b)

elle obéit au principe de l'unité de la matière, puisqu'il existe un rapport intrinsèque entre ses différentes parties;

c)

elle obéit au principe de la conformité aux règles impératives du droit international, puisqu'elle ne contrevient à aucune d'elles.

2

Contexte

La fonction constitutionnelle assignée aux prestations de l'AVS est au coeur des préoccupations des auteurs de l'initiative. En vertu de la Constitution, les rentes de vieillesse du 1er pilier doivent couvrir les besoins vitaux de manière appropriée (art. 112, al. 2, let. b, Cst.). Or les auteurs de l'initiative considèrent que le montant actuel des rentes de vieillesse AVS est trop bas pour les classes de revenu inférieures à moyennes (en 2014: rente minimale de 1170 francs par mois, rente maximale de 2340 francs); la rente ne garantirait pas une sécurité financière appropriée aux personnes partant à la retraite.

Les auteurs de l'initiative sont d'avis que le mécanisme utilisé pour adapter périodiquement les rentes ne rend que plus nécessaire l'introduction d'un supplément. Le mécanisme est le suivant: en général, le Conseil fédéral adapte les rentes de l'AVS bisanuellement en fonction d'un indice mixte tenant compte à parts égales de l'évolution des salaires et du renchérissement. L'indice mixte utilisé à cet effet correspond à la moyenne de l'indice des prix et de l'indice des salaires depuis 1980.

L'indice des salaires rend compte de l'évolution annuelle des salaires, l'indice des prix rend compte du renchérissement déterminé au moyen de l'indice des prix à la consommation. Ce mode de calcul a pour conséquence que le niveau des rentes n'évolue pas au même rythme que les salaires; en général, la croissance est moindre (voir graphique 1).

Graphique 1 Indice des salaires, indice des prix, indice mixte [1980-2013, 1980 = 100]

9086

Par conséquent, le taux de remplacement AVS, c'est-à-dire le rapport entre la rente AVS et le dernier salaire, diminue au fil du temps. Malgré l'adaptation périodique des rentes, la part du revenu remplacé par la rente AVS baisse pour chaque nouvelle cohorte de personnes partant à la retraite (voir tableau 1).

Tableau 1 Rente minimale, indice des salaires, taux de remplacement Année

Rente minimale

1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2014

550 690 800 970 1005 1075 1140 1170

Indice des salaires

1004 1283 1507 1862 1938 2095 2266 2343

Taux de remplacement (1980 = 100)

100 98 97 95 95 94 92 91

Les auteurs de l'initiative veulent y remédier par l'introduction d'un supplément forfaitaire. Il est censé combler en partie l'écart entre les rentes de vieillesse et l'indice des salaires.

Pour apprécier l'initiative, il faut aussi tenir compte du 2e pilier de la prévoyance vieillesse, c'est-à-dire de la prévoyance professionnelle conformément à la loi fédérale du 25 juin 1982 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP)6. Les auteurs de l'initiative considèrent que, toute chose égale par ailleurs, les assurés dont le revenu du travail est bas sont davantage tributaires de l'AVS, car souvent, ils jouissent d'une moins bonne couverture par le 2e pilier et parviennent à constituer un capital de prévoyance moins important. L'une des causes possibles est que ces personnes ont souvent des rapports de travail à temps partiel. Il se peut aussi que leur salaire ne dépasse pas le seuil d'entrée LPP ou que leurs cotisations d'épargne au 2e pilier soient modestes à cause de leur bas salaire moyen.

Le capital constitué au titre de la prévoyance professionnelle étant moindre, l'AVS revêt une importance accrue pour ces personnes, ce qui justifierait un supplément sur les rentes de vieillesse AVS. Par ailleurs, les rentes du 2e pilier sont calculées au moyen d'un taux de conversion. S'agissant du salaire assuré à titre obligatoire, un taux minimal inscrit dans la loi s'applique; en revanche, l'érosion des rendements sur le marché des capitaux exercerait une pression à la baisse sur les taux de conversion utilisés dans le domaine surobligatoire. Les auteurs de l'initiative redoutent une baisse de la rémunération de l'épargne dans la prévoyance professionnelle qui justifie, à leurs yeux, le renforcement de l'AVS par rapport à la prévoyance professionnelle.

L'initiative populaire a aussi un rapport matériel avec la réforme Prévoyance vieillesse 2020. Les projets du Conseil fédéral en la matière ont pour but de maintenir le niveau des prestations dans le 1er pilier et dans la partie obligatoire du 2e pilier. En 6

RS 831.40

9087

même temps, la réforme doit permettre de mieux asseoir le financement de la prévoyance vieillesse et de l'adapter aux mutations intervenues dans l'économie et à l'évolution démographique. Dans l'AVS, l'enjeu est notamment de garantir un passage souple de la vie active à la retraite et de maintenir le niveau des prestations, et ce moyennant une harmonisation de l'âge de référence à 65 ans pour les hommes et les femmes dans les deux piliers de la prévoyance vieillesse. Dans la prévoyance professionnelle, le taux de conversion minimal doit être réduit; des mesures de compensation sont prévues afin que, dans le 2e pilier également, le niveau des prestations soit maintenu. Le projet propose encore de réorganiser la contribution de la Confédération à l'AVS et de relever la TVA pour combler la lacune de financement dans l'AVS. Les recettes supplémentaires et les mesures du côté des prestations sont liées par un mécanisme qui empêche l'entrée en vigueur des premières sans les secondes et inversement. Le message doit être transmis au Parlement fin 2014. Alors que l'un des buts principaux des propositions du Conseil fédéral est de maintenir le niveau des prestations, les auteurs de l'initiative considèrent qu'il faut aller plus loin et développer en plus les prestations dans le 1er pilier.

3

Buts et contenu

3.1

Buts

Le supplément demandé par l'initiative doit profiter notamment aux retraités qui réalisaient de bas revenus durant leur vie active. En cas d'acceptation, la rente de vieillesse AVS augmenterait de 200 francs en moyenne et celle des couples mariés de 350 francs selon les calculs des auteurs de l'initiative. Cette hausse doit permettre de mieux répondre à l'exigence constitutionnelle fixée à l'AVS de couvrir les besoins vitaux de façon appropriée, et de réduire ainsi le nombre de personnes tributaires de prestations complémentaires (PC), ainsi que le risque de pauvreté parmi les personnes âgées.

Les auteurs de l'initiative veulent modifier le poids respectif des rentes du 1er pilier et du 2e pilier. L'augmentation des prestations de vieillesse de l'AVS renforcerait leur poids par rapport à la prévoyance professionnelle.

3.2

Commentaire et interprétation du texte de l'initiative

Le supplément sur les rentes de vieillesse augmenterait le niveau des prestations versées, mais la dynamique de l'évolution des rentes et des salaires demeurerait inchangée. Lors de son introduction, le supplément entraînerait une augmentation unique du taux de remplacement du revenu par les prestations de vieillesse AVS, mais le taux de remplacement recommencerait à baisser les années suivantes.

Les rentes de vieillesse de l'AVS servent de référence pour d'autres prestations des assurances sociales, par exemple pour les rentes dérivées de l'AVS, telles que les rentes de l'assurance-invalidité (AI). Dans le droit en vigueur, elle sert aussi de référence pour la déduction de coordination dans la prévoyance professionnelle.

L'initiative demande uniquement un supplément sur les rentes de vieillesse effectivement versées. Par conséquent, la prestation de référence pour le calcul de la rente de vieillesse AVS et des rentes dérivées n'inclurait pas le supplément. Le supplé9088

ment de 10 % serait ajouté dans un deuxième temps à la rente de vieillesse proprement dite, et à cette seule rente. La coordination des différentes rentes dont les montants sont interdépendants ne serait donc pas concernée.

Pour financer les dépenses supplémentaires produites par l'initiative, ses auteurs tablent en premier lieu sur l'acceptation de l'initiative populaire «Imposer les successions de plusieurs millions pour financer notre AVS (Réforme de la fiscalité successorale)»7. Les auteurs de cette initiative estiment que les recettes potentielles sont de l'ordre de 3 milliards de francs. Le texte prévoit que les deux tiers, soit quelque 2 milliards de francs, soient versés à l'AVS.

En plus des recettes provenant de l'imposition des successions, les auteurs de la présente initiative proposent que l'intégralité du point de TVA lié à l'évolution démographique ainsi que le produit de l'impôt sur le tabac et de l'imposition des boissons distillées ne soient plus crédités au budget fédéral, mais versés directement à l'AVS (et ce sans modifier le taux de contribution de la Confédération à ses dépenses). Les auteurs de l'initiative ne disent pas comment couvrir ces pertes de recettes dans le budget fédéral et comment financer la charge supplémentaire pour la Confédération due à sa participation aux dépenses accrues de l'AVS. A titre subsidiaire, il est proposé de relever les cotisations à l'AVS des employeurs et des salariés.

4

Appréciation de l'initiative

4.1

Appréciation des buts de l'initiative

La couverture des besoins vitaux par les rentes de vieillesse AVS est l'un des fondements du système de prévoyance vieillesse en Suisse. L'initiative vise l'amélioration générale de la situation financière des retraités par l'augmentation de leurs revenus au titre du 1er pilier. Le but est de garantir que tous les rentiers puissent continuer à vivre de l'AVS. L'initiative aurait aussi pour conséquence de relever le taux de remplacement AVS qui a baissé d'environ 9 % depuis l'introduction de l'indice mixte au 1er janvier 1980. Il en résulterait simultanément le renforcement du 1er pilier comme souhaité par l'initiative et, partant, de la solidarité et de la répartition, composantes essentielles de cette assurance sociale.

Grâce au supplément sur la rente AVS, les retraités des classes de revenu basses dépendraient moins des PC. Si leurs rentes de vieillesse augmentaient de 10 %, leurs besoins vitaux seraient mieux couverts par l'AVS et ils seraient moins nombreux à solliciter des PC. Cela déchargerait par conséquent la Confédération et les cantons qui financent ces prestations (mais la charge supplémentaire pesant sur la Confédération, en cas d'acceptation de l'initiative, l'emporterait largement sur les économies découlant de la baisse des PC, voir ch. 4.2.4).

7

FF 2014 121

9089

4.2

Conséquences en cas d'acceptation de l'initiative

Les conséquences de l'initiative pour les différentes catégories de la population et pour l'économie dépendent de la façon dont seraient financées les dépenses supplémentaires. L'initiative étant muette sur le financement, il importerait de prendre des décisions politiques à ce sujet. L'évaluation à laquelle il est procédé ci-après se fonde sur l'hypothèse que les dépenses supplémentaires seront couvertes par des sources de financement existantes, à savoir une hausse de la contribution de la Confédération aux dépenses et un relèvement des taux de cotisation AVS. L'annexe présente le budget de l'AVS pour la période 2013 à 2030 sous le régime actuel et pour le scénario prévu si l'initiative est acceptée8 ­ dans ce cas, on suppose que la disposition entrerait en vigueur en 2018. Les conséquences qui découleraient des propositions de financement présentées par les auteurs de l'initiative sont exposées au ch. 4.2.5.

4.2.1

Conséquences pour les assurances sociales

AVS En cas de hausse de 10 % des rentes de vieillesse, les dépenses de l'AVS augmenteraient de 4,1 milliards de francs en 2018. Etant donné que cette hausse entraînerait une augmentation de la contribution de la Confédération et donc des recettes supplémentaires pour l'AVS de l'ordre de 800 millions de francs, le résultat de répartition ne se détériorerait pas de 4,1, mais de 3,3 milliards de francs. Ce déficit de répartition représenterait l'équivalent de 0,85 % de cotisation salariale toutes parts confondues, ou de plus d'un point de TVA (si l'augmentation est proportionnelle).

Sous le régime de financement actuel, l'initiative creuserait un important déficit de répartition structurel dans l'AVS dès son entrée en vigueur.

Par ailleurs, les dépenses supplémentaires augmenteraient à chaque adaptation bisannuelle des rentes. On estime en outre que l'allongement de l'espérance de vie et le passage à la retraite de la génération du baby-boom produiront un déficit de répartition annuel atteignant 12,7 milliards de francs d'ici 2030 (voir l'annexe). En 2030, le déficit de l'AVS serait donc de 4,4 milliards de francs supérieur à ce qu'il serait en cas de rejet de l'initiative.

PC à l'AVS La mise en oeuvre de l'initiative réduirait les charges des PC à l'AVS parce que la hausse des rentes de vieillesse AVS ferait diminuer le nombre de bénéficiaires de PC et donc les dépenses pour PC, et ce à concurrence de la hausse des rentes AVS. Au total, les dépenses au titre des PC à l'AVS se chiffreraient à 2,8 milliards de francs en 2018, ce qui représente une réduction de 329 millions de francs. En 2030, cette réduction s'établirait à 428 millions de francs.

8

Les chiffres se fondent sur la deuxième version du budget AVS établie par l'OFAS le 12.6.2014, qui peut être consultée à l'adresse suivante: www.ofas.admin.ch > Documentation > Faits et chiffres > Chiffres clés > AVS

9090

Coordination avec d'autres assurances sociales Différentes prestations d'assurances sociales sont calculées d'après le montant des rentes de vieillesse AVS. Ainsi, au sein du 1er pilier, les prestations de survivant (rente de veuf et de veuve, supplément de veuvage, rente d'orphelin) et les rentes pour enfant correspondent à un pourcentage de la rente de vieillesse AVS (art. 35bis, 35ter, 36 et 37 de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance vieillesse et survivants9). Des explications des auteurs de l'initiative, il ressort qu'il s'agit uniquement d'augmenter la rente de vieillesse AVS. Le rapport entre la rente de vieillesse AVS proprement dite (c.-à-d. hors supplément) et les autres rentes demeurerait donc inchangé. En revanche, le rapport entre la rente de vieillesse effectivement versée (c.-à-d. supplément compris) et les rentes de survivants serait modifié.

Dans la prévoyance professionnelle, le salaire coordonné, c'est-à-dire le salaire assuré LPP, correspond au salaire après déduction de la part du salaire déjà assuré par l'AVS. Cette déduction dite de coordination correspond aux sept huitièmes de la rente AVS annuelle maximale selon le droit en vigueur (art. 8, al. 1, LPP). L'initiative n'altérant pas le système de rentes de l'AVS, elle n'a pas d'incidence sur la LPP. Le supplément s'ajouterait à la rente AVS versée, mais n'affecterait pas la part du salaire déduite dans la LPP (salaire assuré par l'AVS). La réforme Prévoyance vieillesse 2020 prévoit de toute façon de supprimer la déduction de coordination dans la LPP.

Selon le droit en vigueur, les bénéficiaires de rente AVS ont droit à une rente complémentaire à concurrence de 90 % du gain assuré au titre de prestations d'assurance couvertes par l'assurance-accidents (art. 20 de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'assurance-accidents10). L'acceptation de l'initiative nécessite un aménagement de cette coordination. En effet, si la rente complémentaire est adaptée, l'assuranceaccidents réalisera des économies; dans le cas contraire, l'allocataire sera surassuré.

4.2.2

Conséquences pour les ménages

Bénéficiaires de rente Tous les retraités auraient droit au supplément sur la rente de vieillesse AVS. Ils toucheraient une rente de vieillesse plus élevée grâce au supplément. Le revenu total de la plupart des personnes concernées et, partant, leur situation financière s'améliorerait. Le revenu des retraités ne touchant pas de PC augmenterait à hauteur du supplément. S'agissant des personnes dont les prestations de la caisse de pension sont basses et qui sont par conséquent davantage tributaires de l'AVS, la rente de vieillesse AVS représenterait une part plus importante de leur revenu en raison du supplément. L'augmentation des rentes de vieillesse versées occasionnerait une hausse unique du taux de remplacement AVS. Une part plus importante du revenu du travail serait à nouveau couverte par la rente de vieillesse de l'AVS.

Grâce au supplément sur les rentes, le revenu des retraités ayant réalisé un salaire moyen ou élevé durant leur vie active progresserait, tandis que le revenu des rentiers dont la moyenne de salaire est basse n'augmenterait pas dans tous les cas. Ces derniers peuvent parfois prétendre à des PC à l'AVS octroyées sous condition de 9 10

RS 831.10 RS 832.20

9091

ressources. Leur octroi dépend des dépenses et des revenus pouvant être pris en compte. De ce fait, en cas d'augmentation de la rente de vieillesse AVS de 10 %, le montant des PC serait en principe réduit à hauteur de cette augmentation. 88 % des bénéficiaires de PC devraient être dans cette situation, de sorte que le supplément sur la rente AVS demandé par l'initiative n'améliorerait pas leur situation financière.

Il ne ferait que produire un transfert de prestations des PC vers l'AVS.

La hausse des rentes AVS ferait perdre leur droit aux PC à 12 % des bénéficiaires, dont la situation financière s'en trouverait même détériorée, car les PC sont franches d'impôt. Les personnes bénéficiant de PC dans le cadre de la garantie minimale perçoivent au moins un montant équivalant à la prime moyenne de la caisse-maladie applicable dans le canton au titre des PC. Si elles n'ont plus droit aux PC, elles ne peuvent plus faire valoir de droit à la prime moyenne et la réduction de primes diminue. Par ailleurs, elles perdraient d'autres avantages, tels que l'exonération de la redevance encaissée par Billag ou le remboursement des frais de maladie et d'invalidité.

Personnes soumises à cotisation Si l'on finançait la totalité des dépenses supplémentaires dues à l'initiative par les cotisations et par la participation de 19,55 % de la Confédération aux dépenses de l'AVS (voir ch. 4.2.4), il faudrait, en 2018, majorer les cotisations de 0,42 point chacun pour les salariés et les employeurs selon le budget de l'AVS. Dès l'entrée en vigueur de l'initiative, le taux de cotisation grimperait ainsi à 4,62 % pour chaque cotisant. Sur un salaire médian de 6118 francs de salaire par mois11, le salarié et l'employeur cotiseraient alors chacun 282 fr. 65 par mois à l'AVS, soit 25 fr. 70 de plus. Le salaire net baisserait de ce montant. Le taux de cotisation des salariés et des employeurs nécessaire d'ici 2030 augmenterait de 0,5 point chacun selon les scénarios actuels de l'évolution démographique; le montant de la cotisation s'élèverait alors à 287 fr 55 dans l'exemple susmentionné. Le barème applicable aux cotisations des indépendants devrait aussi être augmenté.

Les personnes sans activité lucrative étant aussi astreintes au versement de cotisations AVS, ces dernières devraient être majorées dans la même mesure.

4.2.3

Conséquences économiques

Si les dépenses supplémentaires résultant de l'acceptation de l'initiative étaient entièrement financées par les cotisations et par la contribution de la Confédération aux dépenses, les entreprises seraient touchées dans la même mesure que les salariés. La part patronale augmenterait aussi de 0,42 point à 4,62 % du salaire. Cette hausse des charges salariales renchérirait le coût du travail et affecterait certes la compétitivité des entreprises, mais probablement dans une faible mesure. L'augmentation des coûts salariaux freinerait la demande de travail par les entreprises. De plus, le renchérissement du travail inciterait à économiser des frais de personnel et à accroître la part du facteur capital dans la production.

11

Office fédéral de la statistique, Enquête suisse sur la structure des salaires 2012.

Cette enquête peut être consultée à l'adresse suivante: www.bfs.admin.ch > Français > Thèmes > 03 ­ travail, rémunération.

9092

Dans la plupart des cas, le revenu disponible des retraités augmenterait grâce au supplément et une grande part de ce revenu supplémentaire serait consacrée à la consommation. Quand bien même une partie de cette consommation accrue porterait sur des importations (l'OFS estime qu'un quart de la consommation globale concerne des biens et services importés12), le développement de la demande devrait néanmoins avoir un effet positif sur l'économie suisse.

4.2.4

Conséquences pour la Confédération, les cantons et les communes

Sous le régime de financement actuel, l'acceptation de l'initiative aurait des conséquences directes sur la contribution de la Confédération à l'AVS. En cas d'entrée en vigueur de l'initiative en 2018, les dépenses de l'AVS augmenteraient de 4,1 milliards de francs et la contribution de la Confédération croîtrait de 800 millions de francs, puisque la Confédération finance 19,55 % des dépenses de l'AVS. (Dans son message sur la réforme de la prévoyance vieillesse 2020, le Conseil fédéral propose une réduction de la contribution de la Confédération). En 2030, les dépenses supplémentaires de l'AVS s'élèveraient à 5,5 milliards de francs et la hausse de la contribution de la Confédération se chiffrerait à 1,1 milliard de francs.

S'il était fait appel aux cotisations pour financer l'initiative, les charges sur salaire de la Confédération augmenteraient de plus de 20 millions de francs.

En revanche, le budget fédéral serait allégé de 178 millions de francs du côté des PC (voir tableau 2). En tenant compte de l'augmentation de la contribution de la Confédération, de celle des cotisations patronales et de l'allègement du côté des PC, la Confédération aurait ainsi à faire face au total à des dépenses annuelles supplémentaires de plus de 600 millions de francs en 2018 sous le régime de financement en vigueur.

Les cantons peuvent également espérer un allègement financier dans le domaine des PC. En l'état, leur participation au financement des PC à l'AVS s'élèvera à 2 milliards de francs en 2018. En cas d'acceptation de l'initiative AVSplus, ils réaliseraient une économie de 151 millions de francs (voir tableau 2).

Certes, au cas où l'initiative est acceptée, les bénéficiaires de PC percevront des rentes AVS plus élevées, mais les montants qui leur seront versés au titre de PC diminueront parallèlement (voir ch. 4.2.2). Contrairement aux rentes AVS, les PC sont franches d'impôt. Les autorités publiques bénéficieraient donc de recettes fiscales supplémentaires aux niveaux fédéral, cantonal et communal.

Le recours aux cotisations pour financer l'initiative affecterait toutefois aussi les cantons et les communes en leur qualité d'employeurs, car leurs dépenses au titre des frais de personnel augmenteraient.

12

Office fédéral de la statistique, Indice suisse des prix à la consommation (pondération 2014). Ce document peut être consulté à l'adresse suivante: www.bfs.admin.ch > Français > Thèmes > 05 ­ Prix > Indice des prix à la consommation.

9093

Tableau 2 Conséquences financières pour la Confédération et les cantons Montants en millions de francs, aux prix de 2014 Année

Frais supplémentaires Confédération

Allègement Confédération (PC)

Allègement cantons (PC)

2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030

797 821 825 864 870 911 917 959 966 1009 1018 1067 1074

178 184 190 196 203 209 216 224 231 239 247 255 264

151 152 153 155 156 157 158 159 160 161 162 163 164

4.2.5

Conséquences du financement proposé par les auteurs de l'initiative

En cas d'acceptation de l'initiative, ses auteurs comptent couvrir les dépenses supplémentaires qui en résulteraient en recourant prioritairement à un impôt sur les successions et à une réallocation des recettes de la Confédération (voir ch. 3.2) en faveur de l'AVS. A titre subsidiaire, les cotisations des employeurs et des employés à l'AVS devraient être relevées.

La votation sur l'initiative populaire «Imposer les successions de plusieurs millions pour financer notre AVS (Réforme de la fiscalité successorale)» aura lieu début 2015 au plus tôt. Le Conseil fédéral propose de rejeter cette initiative, parce qu'elle porterait atteinte à la souveraineté fiscale des cantons et que ces derniers subiraient des pertes financières, même s'ils recevaient une partie des recettes provenant de l'impôt sur les successions.

Aujourd'hui, la Confédération couvre près d'un quart de sa contribution aux assurances sociales par des recettes à affectation liée provenant de l'imposition de l'alcool et du tabac et par une part de 17 % du point de TVA en faveur de l'AVS.

Pour affecter ces recettes directement à l'AVS, il faudrait modifier la Constitution, car l'art. 112, al. 5, Cst.13 prévoit expressément l'affectation du produit des impôts sur l'alcool et le tabac au financement de la contribution de la Confédération.

13

RS 101

9094

Pour la Confédération, le financement tel que le proposent les auteurs de l'initiative occasionnerait une baisse des recettes de l'ordre de 2,9 milliards de francs en termes réels en 2018. Compte tenu de la hausse de la contribution de la Confédération à l'AVS, les dépenses supplémentaires pour le budget fédéral se chiffreraient en termes réels à 3,6 milliards de francs (voir ch. 4.2.4). La charge serait ainsi reportée sur le budget fédéral. Toutefois, le frein à l'endettement exige qu'à moyen terme, les dépenses de la Confédération ne doivent pas dépasser ses recettes. Vu la charge supplémentaire de 3,6 milliards de francs qu'occasionnerait l'initiative, cette exigence ne pourrait être satisfaite qu'en adoptant un vaste programme d'allègement budgétaire ou en relevant la TVA d'un bon point. D'ailleurs, ce mode de financement ne couvrirait pas même tous les coûts supplémentaires à prévoir. Pour financer l'ensemble des dépenses supplémentaires de 4,1 milliards de francs, il faudrait vraisemblablement aussi recourir à une hausse du taux de cotisation (estimée à 0,2 point) afin de combler la lacune restante de 500 millions de francs.

4.3

Avantages et inconvénients de l'initiative

4.3.1

Bénéficiaires de rente

Suite à l'acceptation de l'initiative, le revenu des bénéficiaires de rentes AVS ne percevant pas de PC augmenterait et leur situation financière s'améliorerait. Au regard de la finalité constitutionnelle de l'AVS de couvrir les besoins vitaux, il faut admettre que les objectifs visés par les auteurs de l'initiative ont une certaine raison d'être, vu l'érosion continue de la part du dernier salaire couvert par la rente de vieillesse versée aux nouveaux retraités. En outre, l'augmentation du taux de remplacement réduirait la perte de revenu au passage à la retraite. Par le transfert des prestations PC vers l'AVS, le principe de l'assurance, qui a cours dans l'AVS, serait renforcé par rapport au principe du besoin, appliqué pour les PC. Le nombre de rentiers contraints de solliciter des PC et de faire état de leur situation financière baisserait.

Par contre, la situation financière des personnes ayant un revenu bas ou moyen durant leur vie active ne s'améliorerait pas nécessairement avec l'acceptation de l'initiative, alors même qu'elles sont spécialement visées par celle-ci (voir ch 4.2.2), car elles verraient avant tout le montant de leurs PC diminuer. A titre d'illustration, en Suisse, 31 % des retraités (sans partenaire ayant droit à la rente) perçoivent la rente maximale AVS et 58 % des couples mariés la rente maximale plafonnée. On peut s'attendre à ce que ces personnes aient moins besoin d'une augmentation de leur rente que les allocataires dans le domaine de la rente minimale. De façon générale, la situation financière des retraités est bonne en Suisse. Une grande partie d'entre eux disposent d'une fortune générant des revenus complémentaires. Grâce au système d'assurances sociales en place, les retraités sont moins touchés par la pauvreté que d'autres catégories de la population (familles monoparentales et familles

9095

nombreuses, par ex.)14. Ainsi, le nombre de rentiers tributaires de l'aide sociale est relativement faible15.

Les rentes du 1er pilier sont censées couvrir les besoins vitaux de manière appropriée. Cette exigence constitutionnelle s'applique explicitement à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité. C'est pourquoi le montant des rentes de l'assuranceinvalidité (AI) coïncide avec celui des rentes de vieillesse de l'AVS (art. 37, al. 1, de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité16). Si l'initiative était acceptée, les différentes rentes versées dans le cadre du 1er pilier ne seraient plus harmonisées entre elles. Or il n'existe pas de raison objective de traiter différemment la couverture des besoins vitaux des retraités et celle des invalides. Le même raisonnement vaut pour les rentes de survivants.

Il doit être tenu compte aussi de l'aspect intergénérationnel. Pour maintenir le niveau actuel des prestations des retraités, les personnes actives (actuelles et futures) seront mises toujours davantage à contribution au fil du temps. Et ces charges sont plus importantes que celles que la majorité des retraités actuels ont dû supporter pendant leur vie active.

4.3.2

Financement

L'acceptation de l'initiative aurait d'importantes retombées sur le financement de l'AVS. Le développement des prestations visé par l'initiative accentuerait considérablement les problèmes financiers liés à l'évolution démographique auxquels l'AVS doit déjà faire face. Le déficit de répartition accru causé par l'initiative (voir ch. 4.2.1) serait un risque supplémentaire pour la stabilité financière de l'AVS, car en cas d'acceptation, les prestations augmenteraient sans que leur financement soit adapté en conséquence.

Sous le régime de financement actuel, la Confédération devrait couvrir près d'un cinquième des dépenses supplémentaires. A défaut de recettes supplémentaires, il faudrait couvrir ce montant par des économies réalisées dans d'autres domaines (voir ch. 4.2.4). Pour le besoin de financement restant, plusieurs approches peuvent être envisagées.

Si l'on optait pour un relèvement des cotisations, les charges salariales augmenteraient, ce qui aurait un impact négatif sur le marché du travail et la participation à celui-ci. Les coûts progresseraient encore d'une adaptation périodique des rentes à l'autre, exerçant une pression à la hausse sur les cotisations et sur les charges salariales.

Le mode de financement proposé par les auteurs de l'initiative comprend de nombreux désavantages: son premier élément, la réallocation des recettes provenant tant de l'impôt sur l'alcool et sur le tabac que de la part de la Confédération au point de TVA destiné à l'AVS ne constitue pas une vraie solution; au contraire, la hausse de 14

15

16

Office fédéral des assurances sociales, La situation économique des actifs et des retraités, 2008. Ce document peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofas.admin.ch > Documentation > Publications > Rapports de recherche.

Office fédéral de la statistique, Statistique de l'aide sociale 2012. Ce document peut être consulté à l'adresse suivante: www.bfs.admin.ch > Français > Thèmes > 13 ­ Protection sociale > Prestations sous condition de ressources > Aide sociale.

RS 831.20

9096

la contribution de la Confédération qui s'ensuivrait ne ferait que grever le budget fédéral d'environ 3,6 milliards de francs supplémentaires (voir ch. 4.2.4). Ce montant représente 5,7 % des dépenses de la Confédération en 2013, ou plus de 10 % des dépenses pour lesquelles le Parlement dispose d'une marge de manoeuvre à court terme. Il correspond à peu près aux dépenses de la Confédération pour l'agriculture ou à la moitié des fonds qu'elle consacre à la formation et à la recherche. Or ces montants devraient être économisés ou obtenus par d'autres moyens.

Par ailleurs, l'impôt national sur les successions et les donations à l'échelon fédéral, qui constitue le deuxième élément de la proposition de financement des auteurs de l'initiative, doit être rejeté aux yeux du Conseil fédéral en raison de son immixtion dans l'organisation fédéraliste des compétences, des pertes de recettes qu'essuieraient les cantons et de problèmes non résolus s'agissant des modalités.

L'option d'un financement supplémentaire par le biais de la TVA est présentée dans le contexte de la réforme Prévoyance vieillesse 2020 ci-après.

4.3.3

Réforme Prévoyance vieillesse 2020

L'initiative ne peut pas être évaluée isolément, mais doit être appréciée dans le contexte de l'actuelle réforme Prévoyance vieillesse 2020. Le financement additionnel par la TVA prévu dans celle-ci ne serait pas suffisant pour couvrir ce développement des prestations demandé par l'initiative. Le relèvement prévu de la TVA (de 1,5 point) devrait être augmenté d'un point supplémentaire pour atteindre 2,5 points au total (voir ch. 4.2.1). Dans ces conditions, la méthode proposée pour financer la réforme Prévoyance vieillesse 2020 serait potentiellement remise en question (voir ch. 2).

Si l'initiative était financée par une hausse supplémentaire des cotisations salariales, celle-ci s'ajouterait au relèvement des cotisations d'épargne LPP prévu dans le cadre de la réforme Prévoyance vieillesse 2020 pour compenser l'adaptation du taux de conversion minimal LPP. L'augmentation simultanée des cotisations à l'AVS alourdirait encore la charge. L'autre inconvénient que présenterait une augmentation des cotisations est qu'elle ne grève que les personnes actives; il en va différemment dans la réforme Prévoyance vieillesse 2020, où la TVA est proposée comme une source de financement à même de répartir la charge financière supplémentaire sur l'ensemble de la population.

La réforme prévoit une baisse du taux de conversion minimal dans la LPP. Le développement des rentes AVS qui résulterait d'une acceptation de l'initiative AVSplus ne saurait compenser la baisse du taux de conversion LPP, car AVSplus vise un renforcement des prestations du 1er pilier. Aussi la baisse du taux de conversion LPP doit-elle de toute façon être compensée par des mesures spécifiques prévues par la réforme dans le cadre du 2e pilier. Par ailleurs, la baisse du taux de conversion minimal ne toucherait qu'un septième des personnes actives, tandis que l'initiative AVSplus aurait des effets pour toutes les personnes, y compris les retraités actuels, qu'une baisse du taux de conversion minimal n'affecte aucunement.

9097

4.4

Compatibilité du projet avec les obligations internationales

4.4.1

Instruments des Nations Unies

Le Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (Pacte I) est entré en vigueur pour la Suisse le 18 septembre 199217. Il prévoit à son art. 9 le droit de toute personne à la sécurité sociale, y compris les assurances sociales18.

4.4.2

Instruments de l'Organisation internationale du Travail

La Convention no 128 du 29 juin 1967 concernant les prestations d'invalidité, de vieillesse et de survivants19 a été ratifiée par la Suisse le 13 septembre 1977. La partie III porte sur les prestations de vieillesse; la Convention définit l'éventualité couverte, fixe le pourcentage des personnes à protéger, les conditions d'ouverture du droit aux prestations, ainsi que le niveau minimum et la durée de versement de celles-ci. Elle prévoit également que le montant des prestations doit être révisé à la suite de variations sensibles du niveau général des gains ou de variations sensibles du coût de la vie (art. 29, par. 1).

4.4.3

Instruments du Conseil de l'Europe

Le Code européen de sécurité sociale du 16 avril 196420 a été ratifié par la Suisse le 16 septembre 1977. La Suisse en a accepté notamment la partie V, portant sur les prestations de vieillesse. Cette partie définit l'éventualité couverte, fixe le pourcentage des personnes à protéger, les conditions d'ouverture du droit aux prestations, le niveau minimum et la durée de versement de celles-ci. Le Code prévoit également que le montant des prestations doit être révisé à la suite de variations sensibles du niveau général des gains qui résultent de variations sensibles du coût de la vie (art. 65, par. 10).

Pour ce qui est du financement des systèmes de sécurité sociale, le Code impose notamment aux Etats de s'assurer le cas échéant que les études et calculs actuariels nécessaires concernant l'équilibre financier sont établis préalablement à toute modification des prestations, du taux des cotisations d'assurance ou des impôts affectés à la couverture des éventualités en question (art. 70, par. 3).

17 18 19 20

RS 0.103.1 Voir à ce sujet l'observation générale no 19 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, E/C.12/GC/19, du 4.2.2008.

RS 0.831.105 RS 0.831.104

9098

4.4.4

Droit de l'Union européenne

L'art. 48 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne implique l'établissement d'un système de coordination des régimes nationaux de sécurité sociale pour faciliter la libre circulation des travailleurs salariés, des travailleurs non salariés et des membres de leur famille. Cette coordination fait l'objet du règlement (CE) no 883/200421 et du règlement (CE) no 987/200922. Ces deux règlements visent uniquement la coordination des régimes nationaux de sécurité sociale, en se fondant sur les principes internationaux de coordination que sont, notamment, l'égalité de traitement entre nationaux et ressortissants des autres Etats partis, la conservation des droits acquis et le paiement des prestations sur l'ensemble du territoire européen.

Le droit de l'UE ne prévoit pas l'harmonisation des régimes nationaux de sécurité sociale, les Etats membres, conservant la faculté d'en déterminer la conception, le champ d'application personnel, les modalités de financement et l'organisation, sous réserve des principes de coordination du droit de l'UE. Depuis que l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes23 (ALCP) est entrée en vigueur le 1er juin 2002, la Suisse participe à ce système de coordination et applique aujourd'hui dans ce contexte les deux règlements susmentionnés (cf. annexe II à l'ALCP, Coordination des systèmes de sécurité sociale).

4.4.5

Compatibilité avec le droit international

L'augmentation du niveau de toutes les rentes de vieillesse envisagée par l'initiative est compatible, quant au résultat, avec les conventions de l'ONU, de l'OIT et du Conseil de l'Europe ratifiées par la Suisse, dès lors que ces instruments fixent des minima. Par contre, les études et calculs actuariels prescrits par le Code européen de sécurité sociale avant la modification des prestations, notamment, font défaut.

L'initiative ne pose pas de problème au regard du droit de la coordination de l'UE.

5

Conclusions

Le supplément de 10 % augmenterait les rentes de vieillesse AVS versées et le taux de remplacement du revenu des retraités. Néanmoins, l'aspect déterminant pour apprécier l'initiative est celui des ressources. L'initiative entraînerait une augmentation du déficit de répartition de 3,3 milliards de francs. L'acceptation de l'initiative accentuerait considérablement les problèmes financiers liés à l'évolution démographique auxquels l'AVS devra faire face. Il faudrait probablement augmenter les taux de cotisation pour couvrir les dépenses supplémentaires et le coût du travail s'en ressentirait de manière significative. Or les propositions de financement avancées 21

22

23

Règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale; JO L 166 du 30.4.2004, p.1; RS 0.831.109.268.1 Règlement (CE) no 987/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 fixant les modalités d'application du règlement (CE) no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale; JO L 284 du 30.10.2009, p.1; RS 0.831.109.268.11 RS 0.142.112.681

9099

par les auteurs de l'initiative ne constituent pas à cet égard des options satisfaisantes.

L'introduction d'un impôt national sur les successions ­ qui fera l'objet d'une votation ­ engendrerait des pertes de recettes pour les cantons et des problèmes de mise en oeuvre, et remettrait en cause la répartition des compétences propre au système fédéraliste, de sorte que le Conseil fédéral recommande de rejeter le projet. La réallocation des produits de l'impôt sur le tabac et sur les boissons distillées reviendrait de fait à confier au budget fédéral la tâche de combler la lacune de financement.

Par ailleurs, le supplément sur la rente AVS serait neutralisé, chez les bas revenus, par la baisse de leurs PC, et son allocation aux retraités des classes de revenus plus élevés ne se justifie guère, voire aucunement, sur le plan de la politique sociale. Aux yeux du Conseil fédéral, le développement des prestations proposé ne profiterait donc pas réellement au groupe cible visé.

L'AVS doit de toute façon être réformée. A cet effet, l'accent doit être mis sur la flexibilisation de l'âge de la retraite, ainsi que sur la stabilité financière. La vaste réforme Prévoyance vieillesse 2020 engagée par le Conseil fédéral est une révision équilibrée des 1er et 2e piliers. Son but est de maintenir et de pérenniser ces deux piliers. Des mesures unilatérales telles que l'initiative «AVSplus: pour une AVS forte» font fi de l'approche globale de la réforme.

Dans ces conditions, les arguments pour le rejet de l'initiative sans contre-projet direct ou indirect l'emportent. Aussi, le Conseil fédéral propose-t-il aux Chambres fédérales, par le présent message, de recommander au peuple et aux cantons de rejeter l'initiative «AVSplus: pour une AVS forte» et de ne pas opposer de contreprojet à l'initiative.

9100

Annexe

Budget de l'AVS, régime en vigueur Montants en millions de francs Année

2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030

Dépenses

aux prix de 2014

Recettes

Droit en vigueur

Total

39 976 40 884 41 766 42 246 43 456 43 924 45 306 45 621 47 839 48 218 50 498 50 928 53 459 53 924 56 383 56 928 59 664 60 117

39 976 40 884 41 766 42 246 43 456 43 924 45 306 45 621 47 839 48 218 50 498 50 928 53 459 53 924 56 383 56 928 59 664 60 117

Résultat de répartition

Cotisations TVA 1) et recours

29 548 30 187 30 728 31 114 31 617 32 098 32 577 33 037 33 470 33 885 34 266 34 638 34 987 35 336 35 678 36 038 36 413 36 803

2 318 2 372 2 437 2 493 2 541 2 594 2 633 2 670 2 705 2 739 2 769 2 799 2 828 2 856 2 884 2 913 2 943 2 975

Décompte 2013 - scénario A-17-2010 Hypothèses concernant l'évolution économique en %: Année 2014 2015 Indice des salaires (ISS) 0.9 1.0 Changement structurel Renchérissement Adaptation des rentes tous les deux ans

9101

0.3 0.2

0.3 0.4

Pouvoirs publics droit actuel

Total

8 123 8 293 8 464 8 555 8 789 8 877 9 149 9 213 9 649 9 725 10 172 10 258 10 755 10 849 11 332 11 440 11 977 12 068

39 989 40 852 41 629 42 162 42 947 43 569 44 359 44 920 45 824 46 349 47 207 47 695 48 570 49 041 49 894 50 391 51 333 51 846

2016 1.2

2017 1.6

2018 1.6

ab 2019 2.2

0.3 1.0

0.3 1.0

0.3 1.0

0.3 1.5

14 - 32 - 137 - 84 - 509 - 355 - 947 - 701 -2 015 -1 869 -3 291 -3 233 -4 889 -4 883 -6 489 -6 537 -8 331 -8 271

sans les dettesIndice du taux de remplacement de l'AI

Compte de capital de l'AVS En points de TVA

Intérêts des placements

0.0 0.0 0.0 0.0 -0.2 -0.1 -0.3 -0.2 -0.6 -0.6 -1.0 -1.0 -1.4 -1.4 -1.9 -1.9 -2.3 -2.3

894 718 871 1 013 1 030 1 190 1 227 1 217 1 185 1 137 1 062 968 838 685 496 280 23 -

Variation annuelle

908 686 734 929 521 835 280 516 - 830 - 732 -2 229 -2 265 -4 051 -4 198 -5 993 -6 257 -8 308 -

Etat à la fin de l'année

43 081 43 767 44 327 44 817 44 894 45 285 44 896 44 748 43 257 41 886 39 038 36 196 31 610 26 945 20 554 13 993 5 478 -

en % des dépenses

108 107 106 106 103 103 99 98 90 87 77 71 59 50 36 25 9 -

en % des dépenses

1980=100

73 75 78 81 82 82 79 80 73 71 63 59 49 41 30 20 7 -

92 91 91 90 90 89 90 88 89 87 89 87 88 86 88 86 87 85

dépenses en % de la masse salariale AVS

11.2 11.2 11.3 11.3 11.4 11.4 11.5 11.5 11.9 11.8 12.2 12.2 12.7 12.7 13.1 13.1 13.6 13.6

1) 1,0 point (proportionnel) ; part de l'assurance 83 %, part de la Confédération 17 %

OFAS / version 2 / état 12.6.2014

Budget de l'AVS avec prestations selon l'initiative Montants en millions de francs Année

2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030

Dépenses

aux prix de 2014

Recettes

Droit en vigueur

Total

39 976 40 885 41 767 42 247 43 457 47 998 49 504 49 843 52 261 52 671 55 156 55 620 58 366 58 867 61 547 62 137 65 120 65 609

39 976 40 885 41 767 42 247 43 457 47 998 49 504 49 843 52 261 52 671 55 156 55 620 58 366 58 867 61 547 62 137 65 120 65 609

Résultat de répartition

Cotisations TVA 1) et recours

29 548 30 187 30 728 31 114 31 617 32 098 32 577 33 037 33 470 33 885 34 266 34 638 34 987 35 336 35 678 36 038 36 413 36 803

2 318 2 372 2 437 2 493 2 541 2 594 2 633 2 670 2 705 2 739 2 769 2 799 2 828 2 856 2 884 2 913 2 943 2 975

Décompte 2013 - scénario A-17-2010 Hypothèses concernant l'évolution économique en %: Année 2014 2015 Indice des salaires (ISS) 0.9 1.0 Changement structurel Renchérissement Adaptation des rentes tous les deux ans

9102

0.3 0.2

0.3 0.4

Pouvoirs publics droit actuel

Total

8 123 8 293 8 464 8 555 8 789 9 674 9 970 10 038 10 513 10 595 11 083 11 176 11 714 11 815 12 341 12 459 13 044 13 142

39 989 40 852 41 629 42 162 42 947 44 366 45 180 45 745 46 688 47 219 48 118 48 613 49 529 50 007 50 903 51 410 52 400 52 920

2016 1.2

2017 1.6

2018 1.6

ab 2019 2.2

0.3 1.0

0.3 1.0

0.3 1.0

0.3 1.5

14 - 33 - 138 - 85 - 510 -3 632 -4 324 -4 098 -5 573 -5 452 -7 038 -7 007 -8 837 -8 860 -10 644 -10 727 -12 720 -12 689

sans les dettesIndice du taux de remplacement de l'AI

Compte de capital de l'AVS En points de TVA

Intérêts des placements

0.0 0.0 0.0 0.0 -0.2 -1.2 -1.4 -1.3 -1.7 -1.7 -2.1 -2.1 -2.6 -2.6 -3.1 -3.1 -3.6 -3.5

894 718 871 1 013 1 030 1 118 1 037 905 745 564 350 110 -

Variation annuelle

908 685 733 928 520 -2 514 -3 287 -3 192 -4 828 -4 888 -6 687 -6 897 -

Etat à la fin de l'année

43 081 43 766 44 325 44 814 44 890 41 932 38 025 34 271 28 936 23 621 16 585 9 442 -

en % des dépenses

108 107 106 106 103 87 77 69 55 45 30 17 -

en % des dépenses

1980=100

73 75 78 81 82 68 59 52 40 31 17 6 -

92 91 91 90 90 98 99 96 98 96 98 96 97 95 96 94 96 94

dépenses en % de la masse salariale AVS

11.2 11.2 11.3 11.3 11.4 12.4 12.6 12.5 13.0 12.9 13.4 13.3 13.9 13.8 14.3 14.3 14.8 14.8

1) 1,0 point (proportionnel) ; part de l'assurance 83 %, part de la Confédération 17 %

OFAS / version 2 / état 12.6.2014