06.441 Initiative parlementaire Pour une protection du consommateur contre les abus du démarchage téléphonique Rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats du 14 novembre 2013

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons un projet de modification du code des obligations, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

14 novembre 2013

Pour la commission: La présidente, Anne Seydoux-Christe

2013-2945

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Vue d'ensemble Le droit des obligations en vigueur reconnaît actuellement aux consommateurs un droit de révocation légal pour ce que l'on appelle le démarchage à domicile (art. 40a ss CO), exclusivement. Il existe certes d'autres droits de révocation pour certains types de contrat, mais il manque encore un droit de révocation général pour les contrats conclus à distance, incluant notamment les contrats conclus par téléphone ou par Internet. La commission estime que les personnes concluant ce type de contrats, qui sont de plus en plus courants, ont aussi besoin d'être mieux protégées. C'est pourquoi elle propose d'introduire un droit de révocation général pour l'ensemble des contrats conclus à distance, autrement dit pour tous les contrats conclus sans que les parties se rencontrent physiquement. Il convient néanmoins d'exclure du champ d'application du dispositif proposé certains domaines et contrats pour lesquels un droit de révocation ne se justifierait objectivement pas ou ne serait pas judicieux d'un point de vue pratique. D'une manière générale, le projet prévoit une harmonisation des définitions, des délais et des conséquences des droits de révocation dans l'ensemble du droit des contrats. Il tient notamment compte, à cet égard, de l'évolution du droit international.

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Rapport 1

Historique

1.1

Initiative parlementaire

Le 21 juin 2006, Pierre Bonhôte, alors conseiller aux Etats, déposait une initiative parlementaire demandant que le code des obligations (CO)1 soit modifié de telle manière que le droit de révocation en vigueur pour le démarchage à domicile (art. 40a ss CO) soit étendu au démarchage téléphonique. Le 2 juin 2008, le Conseil des Etats décidait, par 23 voix contre 12, de donner suite à l'initiative2; conformément à l'art. 109, al. 3, de la loi sur le Parlement (LParl)3, cette décision a été soumise au Conseil national, qui l'a approuvée le 21 septembre 2009 grâce à la voix prépondérante de sa présidente (77 voix contre 77 et 9 abstentions)4.

1.2

Travaux de la commission

Entre 2010 et 2012, la commission a consacré cinq séances à la mise en oeuvre de l'initiative parlementaire. Le 23 août 2012, elle a adopté à l'unanimité un avantprojet d'acte, lequel a ensuite été mis en consultation du 17 septembre au 21 décembre 2012.

Le 3 mai 2013, la commission a pris acte des résultats de la consultation. Le 14 novembre 2013, elle a approuvé, par 8 voix contre 2, le projet d'acte ci-joint.

En vertu de l'art. 112, al. 1, LParl, la commission a été secondée dans ses travaux par le Département fédéral de justice et police (DFJP).

2

Contexte

2.1

Droit en vigueur

Le code des obligations prévoit actuellement un droit de révocation pour les contrats conclus dans le cadre de ce que l'on appelle le démarchage à domicile (art. 40a ss CO). Un acte juridique est considéré comme relevant du démarchage à domicile au sens de la loi lorsque l'acquéreur a été invité à prendre un engagement à son lieu de travail, dans des locaux d'habitation ou dans leurs alentours immédiats, dans les transports publics, sur la voie publique ou lors d'une manifestation publicitaire (art. 40b CO). Certaines exceptions sont prévues par la loi. Il convient de noter que le droit en vigueur ne règle que dans les grandes lignes les questions de l'exercice du droit de révocation et des conséquences d'une révocation. Ainsi, il ne précise pas si un contrat peut également être révoqué lorsque le fournisseur fait sa proposition par téléphone. Une partie de la doctrine répond par l'affirmative à cette question, puisque dans le cas d'un contrat conclu par téléphone, l'acquéreur court là aussi le risque 1 2 3 4

RS 220 BO 2008 E 371 RS 171.10 BO 2009 N 1645

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d'être pris de court5. Le projet du Conseil fédéral évoquait explicitement la possibilité de révoquer un contrat conclu par téléphone (art. 40a, al. 1, let. a, ch. 3, P-CO)6, mais le Conseil national a par la suite reformulé le texte et supprimé dans la foulée la référence aux contrats conclus par téléphone7. De son côté, le Conseil des Etats a repris la version du Conseil national pratiquement telle quelle8. La question de savoir si un contrat conclu par téléphone était assimilable à un contrat de démarchage à domicile au sens de l'art. 40a ss CO n'a pas été discutée au sein des conseils. Le droit en vigueur ne prévoit pas de droit de révocation pour les contrats conclus au moyen d'autres techniques de télécommunication, en particulier au moyen d'Internet.

Le nouvel art. 3, al. 1, let. s, de la loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD)9, qui énumère les conditions que doit remplir le fournisseur pour conclure un contrat au moyen du commerce électronique, est en outre entré en vigueur le 1er avril 2012. Aux termes de cette disposition, le fournisseur doit indiquer de manière claire et complète son identité et son adresse de contact. Il doit en outre préciser les différentes étapes techniques conduisant à la conclusion d'un contrat, et fournir les outils techniques appropriés permettant de détecter et de corriger les erreurs de saisie avant l'envoi d'une commande. Il doit enfin confirmer sans délai la commande du client par courrier électronique.

2.2

Problèmes posés par la situation juridique actuelle

Dans le cas de transactions conclues à distance, l'acquéreur ne peut, par définition, pas voir ni examiner directement la marchandise commandée avant de passer un contrat10. Eu égard au type de vente, les parties au contrat ne disposent pas des mêmes informations. Par ailleurs, le risque qualifié qu'un contrat soit passé dans la précipitation est réel. Dans le cadre de la vente par téléphone ­ tout comme dans le cas du démarchage à domicile ­, l'effet de surprise joue également un rôle; en outre, l'acquéreur n'a qu'une période de réflexion limitée pour prendre sa décision. Ainsi, il n'est pas rare que des personnes soient poussées par téléphone à conclure des contrats qu'elles n'ont jamais voulu conclure ou qu'elles n'auraient jamais conclus si elles avaient disposé d'un temps de réflexion suffisant. La commission tient à cet égard à souligner que de plus en plus de biens de consommation onéreux (des bijoux, par exemple) sont aujourd'hui commercialisés en ligne11. C'est également le cas pour la multitude de services pour lesquelles les droits de résiliation contractuels sont flous sous le droit actuel12. La consommation, via Internet, de contenus numériques tels que morceaux de musique, sonneries de téléphone, films, journaux, livres 5

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7 8 9 10 11 12

896

Koller-Tumler (cf. bibliographie), p. 85, en particulier note de bas de page 343; Gonzenbach/Koller-Tumler, N 8 concernant l'art. 40b; Dornier thèse, n. 343; Dornier commentaire, N 70 concernant l'art. 40b; pour le point de vue inverse, cf. notamment Stauder/ Stauder, N 20a concernant l'art. 40b; Marchand, p. 170 s.

Message du Conseil fédéral concernant une loi fédérale sur l'information des consommatrices et des consommateurs et sur une loi fédérale modifiant le code des obligations (De la formation des obligations) du 7 mai 1986, FF 1986 II 360 ss, 411.

BO 1990 N 572 ss BO 1990 E 307 ss RS 241 Cf. notamment Marchand, p. 181.

Wölfle/Leimstoll, p. 9.

Marchand, p. 166.

et jeux en ligne est par ailleurs devenue un acte aussi courant que naturel13. Pour toutes ces raisons, la commission estime que les personnes concluant des transactions à distance ont besoin d'un niveau de protection supérieur à celui qui est accordé dans le commerce traditionnel. Comme dans le cas du démarchage à domicile, les consommateurs devraient avoir la possibilité, après la conclusion d'un contrat ou après l'examen de la prestation du fournisseur concerné, de disposer d'une période de réflexion (dite de «cooling off») et, le cas échéant, de révoquer la demande de conclusion de contrat ou l'acceptation14.

La commission souligne en outre que, à partir du mois de juin 2014 au plus tard, les consommateurs de l'Union européenne bénéficieront d'un droit de révocation général de quatorze jours pour les contrats conclus à distance ou hors établissement (cf.

infra, ch. 4.1). Eu égard à la dimension fortement internationale du commerce en ligne, elle considère qu'une inégalité de traitement entre les consommateurs suisses et européens dans ce domaine serait difficilement justifiable. Il ne serait pas non plus souhaitable que les fournisseurs suisses accordent des droits de révocation plus étendus à leurs clients sis dans l'espace européen qu'à leurs clients domiciliés en Suisse.

3

Grandes lignes du projet

3.1

Droit de révocation pour les transactions à distance

Sur le modèle du droit en vigueur en matière de démarchage à domicile (art. 40a ss CO), la commission propose d'introduire un droit de révocation de quatorze jours pour les contrats conclus à distance. Cette durée correspond au délai qui sera en vigueur dans l'ensemble du marché intérieur européen à partir de juin 2014 au plus tard pour le démarchage à domicile et les contrats conclus à distance. La notion de «contrat conclu à distance» ne se réfère pas à une technologie en particulier (elle est donc «technologiquement neutre») et offre la marge d'appréciation permettant d'inclure par la suite de nouveaux modèles commerciaux, quel que soit le moyen de communication utilisé. Il apparaît déjà aujourd'hui que, du point de vue technique, la distinction entre vente par téléphone et commerce en ligne deviendra de moins en moins nette (téléphonie par Internet)15. Une transaction à distance se caractérise par le fait qu'à la conclusion du contrat, les parties ne sont pas présentes physiquement au même endroit. Ainsi, les négociations et l'échange des déclarations d'intention s'effectuent uniquement par télécommunication, autrement dit par téléphone, Internet, etc. En introduisant un droit de révocation pour les transactions à distance, la commission vise à renforcer d'une manière simple la position des consommateurs, en veillant à l'équilibre des intérêts entre les parties au contrat. Les consommateurs doivent pouvoir conclure un contrat en toute connaissance de cause ­ en ayant connaissance en particulier des caractéristiques de l'objet du contrat ­, librement et de manière réfléchie. La commission ne considère pas le droit de révocation qu'elle souhaite introduire comme une exception au principe général qui veut que les ac13 14

15

Loos/Helberger/Guibault/Mak, p. 737 ss Cf. rapport du 9 novembre 2004 de la Commission de gestion du Conseil national «La protection du consommateur dans le commerce électronique: aspects contractuels et protection des données», FF 2005 4689 ss, 4707 et recommandations de la Commission fédérale de la consommation du 6 mars 2007.

Morscher, p. 177 ss

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cords doivent être respectés (pacta sunt servanda), mais comme une condition essentielle et une justification de ce principe16. C'est pour ce motif que le droit de révocation en faveur des consommateurs en matière de démarchage à domicile et de contrats conclus à distance figure, du point de vue de la systématique juridique et conformément au droit en vigueur, sous le titre «De la formation des obligations».

La commission propose de limiter le droit de révoquer des transactions à distance aux consommateurs, autrement dit aux personnes qui ont conclu un contrat avec un fournisseur commercial à des fins privées ou familiales. Le droit de révocation ne peut en revanche toujours pas être invoqué pour des contrats passés entre consommateurs ou entre fournisseurs commerciaux. Par ailleurs, il importe de veiller à l'équilibre des intérêts entre fournisseurs et consommateurs. C'est pourquoi il faut prévoir différentes exceptions lorsque, pour des raisons objectives ou pratiques, le droit de révocation ne paraît pas justifié, par exemple pour certaines marchandises (denrées alimentaires, biens confectionnés selon les spécifications du consommateur, etc.), pour certaines prestations de services (hébergement ou transport de personnes, notamment) ou dans des situations précises liées à la conclusion du contrat (par ex. enlèvement ou réception d'une marchandise dans un établissement du fournisseur ou fourniture expressément convenue d'une prestation avant l'expiration du délai de révocation). De plus, le droit de révocation doit être assorti d'un certain nombre de conditions ­ la marchandise doit en particulier ne pas avoir été utilisée, exception faite de la vérification de la conformité au contrat et du bon fonctionnement ­ et son octroi doit également entraîner pour le consommateur des obligations et des conséquences bien précises (obligation de rendre et de renvoyer la marchandise, notamment), de manière que les charges liées au droit de révocation n'incombent pas uniquement au fournisseur.

Le projet de la commission correspond ainsi en partie à l'avant-projet de loi fédérale sur le commerce électronique17 que le Conseil fédéral avait envoyé en consultation le 17 janvier 2001. Ce projet prévoyait notamment d'étendre le droit de révocation en matière de démarchage à domicile aux contrats conclus à distance. En
décembre 2002, le Conseil fédéral a pris acte des résultats (contradictoires) de la consultation et chargé le DFJP d'élaborer un message. Le 9 novembre 2005, il a toutefois décidé de suspendre les travaux législatifs. Aux yeux de la commission, il est à ce jour indiqué, pour les raisons qui ont été évoquées, d'introduire un droit de révocation général allant au-delà de la vente par téléphone. Le projet de révision totale de la partie générale du CO («CO 2020») présenté récemment par un groupe de professeurs de droit suisses prévoit également d'introduire, aux art. 16 à 18 du CO 2020, un droit de révocation général de quatorze jours; or, ce droit serait plus étendu que le droit souhaité par la commission: il s'appliquerait sans exception à tous les contrats de consommation ­ et donc pas uniquement au démarchage à domicile ou aux transactions conclues à distance ­ pour lesquels le consommateur ne peut pas procéder à un examen suffisant de la prestation proposée ou de ses risques18.

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Voir aussi le message du Conseil fédéral concernant une loi fédérale sur l'information des consommatrices et des consommateurs et concernant une loi fédérale modifiant le code des obligations (De la formation des obligations) du 7 mai 1986, FF 1986 II 360 ss, 392 ss et en particulier 393; voir aussi ATF 137 III 243, considérant 4.5 concernant le droit de révocation en matière de démarchage à domicile.

Disponible sur: www. bj.admin.ch > Thèmes > Economie > Législation > Projets terminés > Protection des consommateurs (commerce électronique).

Cf. à ce propos Probst, N 4 concernant l'art. 17 CO 2020.

3.2

Adaptation des droits de révocation existants

Dans un souci de simplification, de sécurité du droit et de protection des consommateurs, la commission propose d'harmoniser les droits de révocation des consommateurs dans l'ensemble du droit des contrats. Ces droits doivent par ailleurs être désignés comme tels et différenciés tant terminologiquement que dogmatiquement19 du droit de résiliation, comme le prévoit la loi fédérale sur les voyages à forfait20 (art. 10, al. 1 et 2). La commission propose par conséquent de soumettre les contrats conclus par démarchage à domicile et tout autre contrat semblable aux mêmes règles que les contrats conclus à distance. Le projet prévoit en outre de prolonger de sept à quatorze jours le délai relatif au droit de révocation en vigueur pour les mandats visant à la conclusion d'un mariage ou à l'établissement d'un partenariat. Le délai de révocation prévu par l'art. 16 de la loi sur le crédit à la consommation (LCC)21 doit également être prolongé. Une harmonisation s'impose aussi du point de vue des conséquences juridiques des droits de révocation: la révocation doit en principe déployer ses effets ex tunc, une réglementation devant être prévue tant pour les obligations réciproques de remboursement des prestations que pour les coûts qui en résultent.

3.3

Résultats de la procédure de consultation

L'avant-projet de loi de la commission du 23 août 2012 a été mis en consultation du 17 septembre 2012 au 21 décembre 2012. Vingt-deux cantons, cinq partis politiques ainsi que quinze associations faîtières et organisations officiellement invitées à prendre position sur le projet ont envoyé une réponse; 18 autres personnes et organisations ont par ailleurs spontanément fait part de leur avis22.

La révision proposée a, dans l'ensemble, été positivement accueillie par 31 des 60 participants à la consultation et, plus précisément, par la majorité des cantons et des partis politiques. Elle a par contre été rejetée par une minorité des participants, qu'il s'agisse d'associations faîtières, d'organisations ou de particuliers. La majorité des participants souscrit à l'introduction d'un droit de révocation des contrats conclus par téléphone, à la proposition de porter de sept à quatorze jours le délai de révocation et à l'harmonisation du droit suisse en la matière avec celui de l'UE. La proposition d'étendre le droit de révocation aux transactions conclues à distance et, notamment, au commerce en ligne, a été diversement appréciée. La majorité, composée de cantons, de partis politiques et d'organisations (de consommateurs), a approuvé cette proposition, estimant qu'il était nécessaire de réformer la législation en la matière. A l'inverse, une minorité issue principalement de l'économie et du secteur du commerce s'est prononcée contre la révision proposée. Certains des participants ont rejeté toute extension du droit de révocation aux transactions conclues à distance 19

20 21 22

Cf. ATF 137 III 243, considérant 4.3, qui évoque la question de savoir si, en cas d'annulation d'un contrat révoqué, la prescription en matière contractuelle ou relative à l'enrichissement illégitime s'applique.

RS 944.3 RS 221.214.1 Cf. rapport sur les résultats de la procédure de consultation, avril 2013, disponible sur: www.parlement.ch > Documentation > Rapports > Procédures de consultation > 2012 > 06.441 Iv.pa. Pour une protection du consommateur contre les abus du démarchage téléphonique.

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et d'autres se sont opposés à l'assujettissement du commerce en ligne à la nouvelle réglementation. Selon ces derniers, il n'y a pas de raison suffisante d'améliorer la protection du consommateur en ligne, car on ne peut pas parler en l'occurrence d'asymétrie de l'information; et d'ajouter que la modification voulue par la commission aurait des conséquences indésirables.

Après avoir pris acte des résultats de la consultation, la commission a entièrement remanié le projet de loi en tenant compte des diverses critiques dont ce dernier a fait l'objet. Ainsi, de nouvelles exceptions au droit de révocation seront prévues pour les cas où, pour diverses raisons, un tel droit ne serait pas indiqué ou pas applicable. Le consommateur ne disposera d'un droit de révocation qu'à partir d'une prestation coûtant plus de 100 francs suisses, ainsi que le prévoit le droit en vigueur pour le démarchage à domicile. De plus, les enchères publiques seront exclues du champ d'application du droit de révocation. Le projet prévoit désormais, en outre, des motifs justifiant l'extinction du droit de révocation, tels que l'emploi, par le consommateur, de la marchandise pour un usage allant au-delà de l'examen de la conformité au contrat ou du bon fonctionnement du produit en question. Par ces modifications, la commission apporte une réponse appropriée aux nombreux doutes qui ont été exprimés quant aux possibilités d'abus qui découleraient d'un droit de révocation général. Pour des raisons liées à la sécurité des contrats et du commerce, il s'agira par ailleurs de limiter dans tous les cas le délai de révocation à trois mois à compter de l'échéance du délai de révocation de quatorze jours. Enfin, les conséquences d'une révocation par le consommateur sont réglées plus précisément, notamment en ce qui concerne les obligations incombant alors au consommateur et les autres contrats liés au contrat qui fait l'objet de la révocation. La commission s'oppose toutefois à une limitation du droit de révocation au seul démarchage téléphonique. Elle estime en effet qu'il est également nécessaire de mieux protéger les consommateurs en ligne (cf. ch. 2.2). Elle craint en outre que, si l'on opte pour un traitement différencié entre la vente par téléphone et la vente en ligne, il ne soit par la suite difficile de délimiter ces deux formes de vente.

4

Droit comparé

4.1

Droit européen

Citons pour commencer la directive de l'UE relative aux droits des consommateurs23, qui a pour but d'améliorer et d'harmoniser la protection des consommateurs au sein de l'UE. Le projet d'harmonisation complète a été partiellement assoupli: les Etats membres peuvent maintenir ou introduire des dispositions s'écartant de celles fixées par la directive relative aux droits des consommateurs, dans les cas où cette possibilité est explicitement prévue (art. 4). Les dispositions portant sur le droit de révocation (art. 9), appelé ici «droit de rétractation», font toutefois partie des nouveautés strictement réglementées par la directive. Celle-ci prévoit dans son champ d'application (art. 3) un droit de rétractation de quatorze jours pour les contrats conclus hors établissement ou à distance entre le consommateur et un fournisseur 23

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Directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 304/64, ci-après: directive de l'UE relative aux droits des consommateurs).

commercial (art. 9, al. 1). Elle règle en outre les obligations des parties en cas de rétractation (art. 13 et 14) et les effets de l'exercice du droit de rétractation sur les contrats accessoires (art. 15). Enfin, elle prévoit de nombreuses exceptions dans les cas de contrats pour lesquels un droit de rétractation serait inapproprié ou inopportun (art. 16 et considération 49). La directive de l'UE est entrée en vigueur le 12 décembre 2011 (art. 34). Les Etats membres ont jusqu'au 13 décembre 2013 pour introduire ces dispositions dans leur droit national. Les dispositions de la directive de l'UE s'appliquent aux contrats conclus après le 13 juin 2014 (art. 28). Les directives 85/577/CEE du Conseil concernant les contrats négociés en dehors des établissements commerciaux24 (traduite en Suisse par l'art. 40a ss CO) et 97/7/CE concernant les contrats à distance25 (non mise en oeuvre en Suisse; elle prévoit un droit de rétractation de sept jours et l'obligation de fournir des informations au consommateur) sont abrogées à compter du 13 juin 2014 (art. 31).

S'agissant de contrats de banque et d'assurance, la directive sur les contrats à distance est complétée par la directive concernant les services financiers26. Celle-ci prévoit notamment pour les services financiers un droit de rétractation spécifique de quatorze jours (art. 6). Sont exclus du champ d'application de cette directive les contrats portant sur une période très courte (moins d'un mois) ou sur des services financiers dont le prix est soumis à fluctuations, ainsi que les contrats exécutés intégralement à la demande du consommateur avant que ce dernier n'exerce son droit de rétractation. Le délai est porté à trente jours pour les contrats à distance ayant pour objet les assurances sur la vie et les opérations portant sur les retraites individuelles (art. 6, al. 1). Les contrats portant sur des services financiers conclus hors établissement ou à distance continuent d'obéir à la directive concernant les services financiers après la mise en oeuvre de la directive relative aux droits des consommateurs, puisque celle-ci exclut expressément ces services de son champ d'application (art. 3, al. 3, let. d).

4.2

Législations étrangères27

Le droit des obligations allemand prévoit, à des fins de protection des consommateurs, un droit de rétractation applicable aux contrats de démarchage à domicile et aux contrats conclus à distance, y compris ceux portant sur des services financiers.

L'exercice et les conséquences juridiques, en particulier le délai de rétractation de quatorze jours, sont réglés uniformément pour l'ensemble des droits de révocation.

Depuis 2010, la réglementation modèle relative au droit de rétractation et d'infor-

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26

27

Directive 85/577/CEE du Conseil concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux (JO L 372/31).

Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance (ci-après directive sur les contrats à distance).

Directive 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives 90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE (JO L 271, ci-après directive concernant les services financiers).

A la demande de l'Office fédéral de la justice, l'Institut suisse de droit comparé a réalisé au 31 janvier 2012 une expertise de droit comparé en matière de droit des consommateurs sur laquelle se fondent les explications suivantes.

901

mation sur le devoir de restitution a acquis le statut de norme formelle28. D'autres droits de rétractation sont prévus pour les contrats de jouissance d'immeuble à temps partagé, pour les contrats de crédit à la consommation et pour les contrats de livraison échelonnée. De plus, des lois spéciales prévoient par exemple un droit de rétractation pour les contrats d'enseignement à distance, les contrats d'assurance ou les activités de placement29. En application de la directive de l'UE relative aux droits des consommateurs, le droit de rétractation relatif aux contrats de consommation sera entièrement reformulé et réglementé de manière uniforme à compter du 13 juin 201430. A l'avenir, le droit de rétractation s'éteindra également douze mois et quatorze jours, au plus tard, après réception de la marchandise ou après conclusion du contrat et le consommateur devra en principe assumer les coûts liés au renvoi de la marchandise.

La loi autrichienne de protection des consommateurs reconnaît un droit de rétractation pour les contrats de démarchage à domicile et les contrats conclus à distance.

Une loi spéciale prévoit également un tel droit pour les services financiers à distance. Selon le droit en vigueur, le consommateur a la possibilité de révoquer n'importe quel contrat portant sur une transaction à distance ou une déclaration d'acceptation à distance dans un délai de sept jours. Pour les contrats relatifs à la livraison de marchandises, le délai commence à courir le jour de la livraison chez le consommateur, tandis que pour les contrats portant sur des prestations, il court à partir du jour de la conclusion du contrat. L'Autriche connaît encore d'autres dispositions de protection du consommateur dans le domaine de l'acquisition de biens de consommation et diverses dispositions spéciales, par exemple dans le domaine immobilier ou financier, ainsi que dans les contrats de longue durée (p. ex. un droit de résiliation spécial pour les contrats de livraison d'électricité et les contrats d'assurance). Il est prévu que la mise en oeuvre de la directive de l'UE relative aux droits des consommateurs se fasse au moyen d'une loi d'application de ladite directive; la loi en question prévoit notamment l'édiction d'une loi sur les transactions conclues à distance et à l'extérieur, laquelle accorderait au consommateur,
pour les contrats conclus à distance ou hors établissement, un droit de résiliation limité dans le temps mais non assorti de conditions.

Le droit français prévoit à l'art. L121-20 du Code de la consommation un droit de rétractation de sept jours correspondant aux prescriptions actuelles de la directive concernant les contrats à distance. La mise en oeuvre de la directive de l'UE relative aux droits des consommateurs se fera au moyen d'une nouvelle loi relative à la consommation, qui est en cours d'examen au Parlement français31.

La Grande-Bretagne a repris le droit communautaire sur la protection des consommateurs dans une loi spéciale intitulée «Consumer Protection [Distance Selling] Regulations 2000», qui prévoit notamment un droit de rétractation de sept jours pour 28 29 30

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902

Annexes 1 et 2 de la loi d'introduction du Code civil allemand (Einführungsgesetz zum bürgerlichen Gesetzbuch, Anlagen 1 und 2).

Hotz, p. 206 ss Cf. la loi du 14 juin 2013 concernant la mise en oeuvre de la directive relative aux droits des consommateurs et la modification de la loi pour la réglementation des agences immobilières («Gesetz zur Umsetzung der Verbraucherrechterichtlinie und zur Änderung des Gesetzes zur Regelung der Wohnungsvermittlung»), BT Drucksache 17/12737 (projet de loi) et 17/13951 (recommandation de décision et rapport).

Cf. projet de loi relatif à la consommation, no 1015, déposé le 2 mai 2013, adopté en 1re lecture par l'Assemblée nationale le 3 juillet 2013, et no 1357, modifié par le Sénat, déposé le 16 septembre 2013.

les contrats conclus à distance. La spécificité du système anglais réside dans l'institution d'un ombudsman pour les questions de protection des consommateurs, doté de très larges compétences. La mise en oeuvre de la directive de l'UE relative aux droits des consommateurs se fera au moyen d'une loi spéciale intitulée «Consumer Contracts [Information, Cancellation and Additional Payments) Regulations 2013»32.

Aux Etats-Unis (New York et Californie), il n'y a aucun droit de révocation pour les transactions en ligne. En matière de télémarketing, une facturation n'est possible qu'avec l'accord exprès écrit du client. La règle fédérale des trois jours de réflexion (3-day cooling off rule)33 est en revanche limitée au démarchage à domicile à proprement parler (door-to-door sale) et ne s'applique pas aux contrats conclus à distance.

4.3

Importance pour la Suisse

En tant qu'Etat non membre de l'Union européenne, la Suisse n'est pas tenue par l'acquis communautaire en matière de droit sur la protection des consommateurs et demeure libre de régler à son gré le droit de la consommation et les droits de révocation. La reprise des développements de l'acquis communautaire dans les futurs accords bilatéraux entre la Suisse et l'UE et la prise en compte de la jurisprudence correspondante de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sont abordés dans le cadre du dialogue institutionnel courant entre la Suisse et l'UE34. L'interprétation conforme au droit européen est par ailleurs reconnue dans la jurisprudence35.

La comparaison du droit montre que dans toute l'Europe et au delà, d'autres Etats connaissent des droits de révocation ou des droits équivalents que les consommateurs peuvent faire valoir pour leurs transactions à distance, en particulier les transactions électroniques. Parmi les Etats membres de l'UE, bon nombre connaissent déjà un droit de rétractation de quatorze jours ou plus dans leur législation actuelle.

C'est le cas du Danemark, de l'Allemagne, de l'Estonie, de la Finlande, de la Lituanie, du Portugal, de la Suède, de Chypre, de Malte, de la Slovénie et de la Tchéquie36. Des réglementations semblables figurent en outre dans toutes les lois types modernes élaborées par l'UE, entre autres37. Selon la commission, en introduisant un droit de révocation général pour les contrats conclus à distance, la Suisse suit une évolution internationale générale, que le projet «CO 2020», notamment, prône également (cf. supra, ch. 3.1). Elle offre ainsi aux consommateurs helvétiques l'assurance de ne pas être moins bien protégés que les consommateurs d'autres pays.

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36 37

Cf. Department for Business Innovation & Skills, The Consumer Contracts (Information, Cancellation and Additional Payments) Regulations 2013, Draft Regulations, août 2013.

16 Code of Federal Regulations 429 et seq.

Voir notamment la réponse du Conseil fédéral du 22 février 2012 à l'interpellation Barthassat 11.4085. La jurisprudence de la CJUE et son impact sur l'application de l'article 208 alinéa 2 CO.

Concernant l'interprétation conforme aux directives de l'UE: ATF 129 III 335, considérant 6; ATF 130 III 182, considérant 5.5.1; concernant l'interprétation conforme aux arrêts de la CJUE: ATF 136 II 65, considérant 3.1.

Schulte-Nölke/Börger, p. 345 ss, 347.

Cf. par ex. le Draft Common Frame of Reference (DCFR) de 2009 ou le Draft Common European Sales Law (DCESL) du 11 octobre 2011, KOM/2011 635 final 2011/0284 (COD).

903

Sans compter que, à l'inverse, les entreprises suisses doivent d'ores et déjà tenir compte des dispositions étrangères correspondantes dans leurs activités commerciales internationales38.

5

Commentaire par article

5.1

Code des obligations

Art. 40a

Principe

Cet article établit à son alinéa premier le principe selon lequel le consommateur peut révoquer sa manifestation de volonté visant à contracter s'il s'agit d'un contrat conclu par démarchage à domicile ou d'un contrat conclu à distance. Ce droit général de révocation permet au consommateur qui se trouve dans une situation commerciale risquée de reconsidérer la conclusion du contrat pendant une période limitée dans le temps et, le cas échéant, de révoquer son offre ou son acceptation. Comme sous le droit en vigueur (cf. art. 40b CO), le droit de révocation est un droit formateur unilatéral de révoquer la manifestation de volonté (et non le contrat)39. Le contrat concerné par la révocation doit porter sur des choses mobilières au sens de l'art. 713 du Code civil suisse (CC)40 ou sur des services. Notamment les contrats de travail ou de bail restent en revanche exclus du droit de révocation.

Une minorité de la commission estime que les consommateurs ne devraient pas disposer d'un droit de révocation légal pour tous les contrats conclus à distance. Si, tout comme la majorité, elle approuve l'instauration d'un tel droit pour la vente par téléphone, elle ne souhaite pas que ce droit s'applique au commerce en ligne; d'après elle, les consommateurs ont peu de risques d'avoir une mauvaise surprise et n'ont par conséquent pas besoin d'un niveau de protection élevé. Elle rappelle en outre que l'initiative parlementaire se limite au démarchage téléphonique.

L'al. 2 a pour but d'éviter les contradictions et les doublons, et de contribuer ainsi à l'unification et à l'amélioration de la protection des consommateurs. Les droits de révocation découlant de dispositions spéciales priment. A l'inverse, la deuxième phrase de cet alinéa précise que les dispositions des art. 40j ss P-CO s'appliquent également à d'autres droits de révocation de manière complémentaire.

L'al. 3 énonce, conformément au droit en vigueur, que les dispositions des art. 40a ss P-CO constituent du droit impératif en faveur de l'une des parties41. Il n'est donc possible de les modifier qu'au bénéfice du consommateur. Les parties doivent pouvoir étendre le champ d'application matériel et temporel du droit de révocation. Ainsi, comme auparavant, les fournisseurs sont libres de concéder des 38

39 40 41

904

Selon l'art. 120 de la loi fédérale sur le droit international privé (LDIP; RS 291), le droit de l'Etat de la résidence habituelle du consommateur peut s'appliquer. Le droit communautaire européen comprend lui aussi une disposition selon laquelle un choix de la loi applicable est autorisé à condition qu'il n'ait pas pour résultat de priver le consommateur de la protection à laquelle il a droit (art. 6 du Règlement (CE) No 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008).

ATF 137 III 243, consid. 4.5; Gonzenbach/Koller-Tumler, no 11 ad art. 40b; Kut, no 55 ad art. 40a­40g.

RS 210 A propos du droit en vigueur, voir Kut, no 9 aux art. 40a­40g CO; Stauder/Stauder, no 8 aux art. 40a­40f CO.

droits de révocation plus étendus, en particulier lorsque la loi n'en prévoit aucun.

Comme sous le droit en vigueur, la renonciation au droit de révocation au moment de la conclusion du contrat est également exclue42.

Le projet prévoit d'utiliser le terme de «consommateur». Il doit être préféré au terme de «client» ou d'«acquéreur» utilisés dans le droit en vigueur, parce qu'au contraire du consommateur, le client ou l'acquéreur peut aussi être une personne morale. De plus, le droit des obligations utilise le terme de client en rapport avec le droit des voyageurs de commerce et le droit des contrats d'agence, où il désigne alors également celui qui n'est pas le consommateur final43. Il s'agira donc désormais de distinguer, au plan terminologique, la protection du client et la protection du consommateur (voir également les remarques relatives à l'art. 40d P-CO).

Art. 40b

Contrat conclu par démarchage à domicile

Contrairement au droit communautaire actuel, en particulier à la directive relative aux droits des consommateurs, et bien qu'étant conscient que le véritable contrat conclu par démarchage à domicile tende à disparaître, le terme de démarchage à domicile est maintenu à l'al. 1, car il est à la fois connu et parlant. Comme suggéré lors de la procédure de consultation44, la terminologie plus synthétique du droit communautaire (cf. art. 2, ch. 8 de la directive relative aux droits des consommateurs) est reprise, à la place du catalogue de l'art. 40b, al. 1, lit. a et b CO. Ainsi, la question contestée en droit actuel de savoir si l'énumération est exhaustive ou non45 est clarifiée: au delà des cas d'invitation et d'offre typiques mentionnés par le texte en vigueur, d'autres situations de démarchage à domicile peuvent être visées. Par ailleurs, le cas atypique de l'invitation à conclure un engagement faite à l'occasion d'une manifestation publicitaire reste expressément mentionné (cf. également l'art.

2, ch. 8, lit. d de la directive relative aux droits des consommateurs).

Aux termes de l'al. 2, il n'est pas question de démarchage à domicile lorsque l'initiative de la conclusion du contrat a été clairement prise par le consommateur.

La charge de la preuve revient toutefois, et c'est nouveau, au fournisseur. Suite aux avis exprimés lors de la procédure de consultation46, à la différence de ce que prévoyait l'avant-projet, les contrats conclus à un stand de marché ou de foire ne doivent pas être considérés comme des contrats conclus par démarchage à domicile, conformément à la réglementation en vigueur qui a fait ses preuves. Sur ce point, le projet s'écarte volontairement de la directive communautaire relative aux droits des consommateurs. Le stand de marché ou de foire peut représenter une extension de la surface de vente classique et la vente dans ce cadre mérite donc d'être assimilée à la vente en magasin. Les stands de vente installés seulement temporairement dans l'espace public ne doivent pas être considérés comme des stands de marché ou de foire47.

42 43 44 45

46 47

Hartmann, p. 307 ss, 311.

Gonzenbach/Koller-Tumler, no 3 ad art. 40a CO.

Rapport sur les résultats de la procédure de consultation, p. 10.

Pour une énumération exhaustive, cf. p.ex. Gonzenbach/Koller-Tumler, no 1 ad art. 40b CO; pour une énumération, au contraire, non-exhaustive, c.f. p.ex. Stauder/Stauder, no 7 ad art. 40b CO; Dornier commentaire, no 69 ad art. 40b CO; Kut, no 38 ad art. 40a­40g CO.

Rapport sur les résultats de la procédure de consultation, p. 9 ss Marchand, p. 171.

905

Art. 40c

Contrat conclu à distance

Le contrat conclu à distance est défini comme dans le droit communautaire (art. 2, ch. 7, dir. UE droits des consommateurs). Sa particularité réside dans la manière dont il est passé. Il se caractérise par le fait d'être conclu sans que les parties ou leurs représentants soient physiquement en présence l'un de l'autre. Par conséquent, le recours à une ou plusieurs techniques de communication à distance est nécessaire. Compte tenu des futurs développements technologiques, il a été renoncé ici à préciser la notion de communication à distance. A l'heure actuelle, le courrier postal, le téléphone, le fax ou Internet (également sous forme de courriel électronique) sont notamment considérés comme des moyens de communication à distance. Il est possible d'associer plusieurs de ces moyens.

Les contrats qui ne sont conclus que partiellement à l'aide de moyens de communication à distance ne sont pas considérés comme des contrats conclus à distance.

Lorsqu'un contrat est préparé via Internet, dans le sens où ce canal est utilisé pour prendre des informations ou passer une réservation, mais qu'il est conclu dans les locaux du fournisseur, il ne s'agit alors pas d'un contrat conclu à distance. Un contrat, à l'inverse, entièrement négocié dans les locaux du fournisseur et ensuite confirmé en ligne n'est pas non plus considéré comme conclu à distance. Par contre, si le contrat est conclu exclusivement par un moyen de télécommunication, mais que l'objet est récupéré dans des locaux commerciaux du fournisseur, alors le contrat est réputé conclu à distance (voir les remarques relatives à l'art. 40i P-CO).

L'usage unique ou occasionnel d'un moyen de communication à distance pour passer un contrat ne suffit pas à qualifier ce dernier de contrat conclu à distance; pour que cela puisse être le cas, il faut que le fournisseur ait employé des moyens de communication à distance dans le cadre d'un système de commercialisation visant la distribution à distance. A coté des formes traditionnelles de vente par correspondance, le commerce en ligne par l'intermédiaire de plateformes et de systèmes entre ici aussi en considération.

Vu sa proposition concernant l'art. 40a, une minorité de la commission qui s'oppose à l'introduction d'un droit de révocation légal pour tous les contrats conclus à distance propose de renoncer à cette disposition.

Art. 40d

Consommateur et fournisseur

La législation suisse fourmille de définitions parfois divergentes de la notion de «consommateur» (art. 3 LCC) ou du «contrat conclu avec un consommateur» (art. 32, al. 2, CPC48)49. Le texte révisé de l'art. 210 CO, approuvé le 16 mars 2012 par les deux chambres, définit à l'al. 4 le contrat conclu avec le consommateur comme un contrat où «la chose est destinée à l'usage personnel ou familial de l'acheteur» et où «le vendeur agit dans le cadre d'une activité professionnelle ou commerciale»50. La définition choisie ici suit sur le fond cette formulation et celle de l'art. 32 CPC: la notion de consommateur y est décrite positivement. Un consommateur est une personne physique qui conclut un contrat dans un but personnel ou familial (al. 1). Un consommateur conclut un contrat directement à des fins 48 49 50

906

RS 272 Cf. p.ex. Marchand, p. 15 ss et renvois, pour les différentes notions de consommateurs utilisées.

RO 2012 5415 ss

privées et représente toujours le consommateur final. Dans la mesure où un contrat sert à la fois à des fins privées et commerciales (contrats à double finalité)51, il y a usage personnel dès lors que le bien ou la prestation acquise sert principalement à des fins privées. Le fait que le consommateur ait effectivement besoin d'une protection ne joue aucun rôle.

S'agissant du fournisseur, la conclusion du contrat doit relever, du point de vue fonctionnel, de son activité professionnelle ou commerciale (al. 2), qu'elle soit exercée à titre principal ou accessoire, à titre exclusif ou en même temps que d'autres activités. La loi ne prévoit donc par exemple pas de droit de révocation lorsqu'un particulier vend des habits d'enfants à un autre particulier sur un site Internet, lorsqu'un entrepreneur en transport achète un véhicule à une société concurrente ou lorsqu'il vend à l'un de ses clients un tableau provenant de sa collection privée.

Art. 40e

Exceptions en général

La portée pratique du droit de révocation général dépend de la liste d'exceptions des contrats et des circonstances dans lesquelles un contrat ne peut être révoqué. Du point de vue de la protection des consommateurs tout comme de celui de la clarté et de la sécurité du droit, il est souhaitable de limiter autant que possible le nombre des exceptions. Toutefois, il existe de nombreux cas dans lesquels, pour des raisons objectives ou pratiques, il n'apparaît ni utile, ni justifié de prévoir un droit de révocation. Dans ces cas, il est justifié de prévoir des exceptions spécifiques. Cela permet également de tenir compte des intérêts légitimes des fournisseurs, de façon à ce que le droit général de révocation n'aie pas d'effets disproportionnés à leur encontre.

Le projet tient compte des critiques formulées sur ce point lors de la procédure de consultation, prévoit plus d'exceptions que l'avant-projet, les résume et les classe en exceptions générales d'une part (art. 40e P-CO) et exceptions spécifiques d'autre part (art. 40f à 40h P-CO; voir aussi l'art. 16, let. a à m, dir. UE droits des consommateurs). De façon générale, pour ce qui concerne les exceptions au droit de révocation, il en résulte une meilleure cohérence avec la directive de l'UE relative au droit des consommateurs.

A la différence de ce que prévoyait l'avant-projet, l'ancienne limitation du droit de révocation pour les contrats conclus par démarchage à domicile à ceux, dont la valeur de la prestation du consommateur excède 100 francs, est conservée et désormais prévue à la lettre a, et valable de façon générale tant pour les contrats conclus par démarchage à domicile que pour les contrats conclus à distance. Comme auparavant, ce montant comprend l'entier du prix devant être payé par le consommateur52, c'est à dire également les éventuels frais de port et taxes dont le contrat prévoit qu'ils doivent être assumés par le consommateur, ainsi que la TVA si elle est due.

Cela permet d'apporter une réponse à une préoccupation importante exprimée par de

51

52

Cf. également le considérant 17 de la directive relative aux droits des consommateurs ainsi que § 13 du BGB dans sa version selon la loi du 14 juin 2013 concernant la mise en oeuvre de la directive relative aux droits des consommateurs et la modification de la loi pour la réglementation des agences immobilières («Gesetz zur Umsetzung der Verbraucherrechterichtlinie und zur Änderung des Gesetzes zur Regelung der Wohnungsvermittlung»).

Cf. Kut, no 29 ad art. 40a-40g CO; Dornier commentaire, no 60 ad art. 40a CO; Stauder/Stauder, no 22 ad art. 40a CO; Marchand, p. 168.

907

nombreux participants lors de la procédure de consultation53. D'un point de vue économique et pratique, il apparaît en effet inutile et disproportionné aux dépens du fournisseur, de prévoir un droit de révocation pour les contrats dont la valeur est objectivement faible. De plus, la protection du consommateur n'est pas réduite excessivement par cette clause d'exclusion valable pour les cas de peu d'importance.

A la différence du droit en vigueur, faute de signification pratique, l'on renonce à reprendre dans le nouveau droit la faculté du Conseil fédéral d'adapter le montant, prévue à l'actuel art. 40a, al. 3 CO. L'on retrouve une telle clause d'exclusion pour les cas de peu d'importance dans la directive relative aux droits des consommateurs, dans la mesure où son art. 3, al. 4 laisse la possibilité aux Etats membres d'exclure du champ d'application de la directive les contrats dans lesquels la prestation du consommateur n'excède pas 50 euros ­ toutefois uniquement pour les contrats conclus en dehors des locaux commerciaux.

La let. b prévoit que les contrats faits en la forme authentique ne peuvent être révoqués­ sans égard à leur objet. Un acte authentique est une preuve suffisante qu'un contrat n'a pas été conclu de manière irréfléchie ou dans la précipitation (cf. également art. 3, al. 3, let i dir. UE droits des consommateurs).

L'exception mentionnée à la let. c ne pose aucun problème. Il en ressort que le consommateur ne peut faire valoir un droit de révocation pour les contrats comportant un élément aléatoire, par exemple lorsque le prix de la chose ou du service est soumis à des fluctuations de marché sur lesquelles le fournisseur n'a pas d'influence (art. 16, let. b, dir. UE droits des consommateurs).

A la différence de l'avant-projet, qui renonçait expressément à formuler une exception pour les ventes aux enchères, et en accord avec le droit communautaire (cf.

art. 16, let. k dir. UE droits des consommateurs), la lettre d prévoit désormais expressément que le droit de révocation ne s'applique pas aux contrats conclus lors d'enchères publiques. Il s'agit des contrats au sens de l'art. 229, al. 2 CO, conclus par l'adjudication de la chose au plus offrant, ce qui ­ en fonction des conditions de ventes applicables ­ n'est pas obligatoirement, ou pas du tout le cas lors d'«enchères en
lignes»54. Cela permet également de répondre à l'une des préoccupations exprimées lors de la procédure de consultation55. Il est vrai que les conséquences pratiques d'une vente aux enchères en ligne sont très similaires à celles d'un simple achat en ligne. Il est toutefois justifié de prévoir une exception pour les contrats conclus lors d'enchères publiques, dans la mesure où un droit de révocation empêcherait le bon fonctionnement du processus de détermination du prix et la formation du contrat par l'adjudication au plus offrant impliquant l'exclusion des autres participants, car les conséquences d'une révocation par le plus offrant seraient inadéquates et insatisfaisantes56.

53 54

55 56

908

Rapport sur les résultats de la procédure de consultation, p. 8.

Cf. notamment la jurisprudence allemande à ce sujet, arrêt du Bundesgerichtshof du 3 novembre 2004, NJW 2005, p. 53 ss; voir également le considérant 24 de la directive relative aux droits des consommateurs.

Rapport sur les résultats de la procédure de consultation, p. 12.

Cf. également Marchand, p. 183.

Art. 40f

Choses

L'al. 1, let. a exclut le droit de révocation pour le cas où la chose sur laquelle porte le contrat ne peut, en tant que telle, être ni renvoyée ni restituée. Cela peut être le cas, d'une part, en raison de la nature ou de la durée de conservation du produit, comme pour les fleurs et certains autres produits naturels, par ailleurs pour les mêmes raisons qu'un droit de révocation n'est pas envisageable pour les contrats portant sur des denrées alimentaires (cf. al. 2). D'autre part, certains objets ne se prêtent pas à une restitution, pour des raisons relevant de la santé et de l'hygiène comme par exemple les médicaments ou les produits cosmétiques ou d'hygiène.

L'al. 1, let. b exclut aussi le droit de révocation pour les choses qui sont confectionnées selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisées. Dans un tel cas, on peut considérer que le consommateur a eu le loisir de réfléchir d'une manière qualifiée à l'achat qu'il allait effectuer; de plus, la réutilisation de la marchandise par le fournisseur est très difficile, voire impossible (voir aussi art. 16, let. c, dir. UE droits des consommateurs). Le droit de révocation existe cependant lorsque, par exemple, seule la couleur du vêtement acheté a été choisie à partir d'une palette de couleurs prédéterminée.

Indépendamment des remarques formulées précédemment ainsi que de la limite minimale du montant, fixée à l'art. 40e, let. l P-CO, l'al. 2 exclut expressément le droit de révocation pour les contrats portant sur des denrées alimentaires. En raison de leur qualité et de leur nature particulière, un droit de révocation aurait des effets inappropriés et non souhaitables: généralement, en cas de révocation, les aliments perdraient toute valeur et devraient être détruits. Le droit communautaire prévoit également certaines exceptions pour les denrées alimentaires (cf. art. 3, al. 3, let. j et art. 16, let. g dir. UE droits des consommateurs), toutefois pas d'une telle façon générale. En effet, la notion de denrée alimentaire est déterminée par la législation alimentaire et est indépendante du caractère périssable.

Art. 40g

Services

La mise en oeuvre du droit de révocation pour les contrats de services peut causer des difficultés particulières. D'une part, les services ne peuvent plus être restitués dès lors qu'ils ont déjà été fournis (voir à ce sujet les remarques relatives à l'art. 40i P-CO). D'autre part, pour différentes raisons, certains types de services ayant une grande signification pratique ne se prêtent pas à une révocation. Dans les domaines des prestations de transport, gastronomiques, touristiques ou de loisirs, un tel droit serait inadapté au vu des conséquences (économiques) qu'il entraînerait pour le prestataire, ou parce qu'elles font déjà l'objet d'une réglementation spéciale, de façon à ce qu'un droit de révocation général ne semble pas nécessaire.

La let. a exclut le droit de révocation pour la fourniture de services d'hébergement, de transport de personnes ou de marchandises, de location de véhicules, de livraison de nourriture et de boissons, ainsi que de loisirs, pour autant que le fournisseur s'engage, lors de la conclusion du contrat, à fournir ces prestations à une date déterminée ou à une période spécifiée (cf. également art. 3, al. 3, let. k et art. 16, let. l dir. UE droits des consommateurs). Cette exception se justifie par le fait que l'usage d'un droit de révocation placerait les fournisseurs exerçant dans les branches de la restauration, du tourisme et du transport, compte tenu des délais serrés et de la nature de leurs produits, face à des contraintes excessives. Même s'ils ne constituent pas des voyages à forfait (voir à ce sujet les remarques relatives à la let. d), le droit 909

de révocation ne s'applique pas en matière de services d'hébergement et de transport (par exemple pour les réservations d'hôtels et de vols57). Un contrat de fitness n'est en revanche pas concerné par cette exception, car le consommateur choisit dans ce cas lui-même le calendrier qui lui convient.

En complément de ce que prévoit l'avant-projet, ainsi qu'en accord avec le droit communautaire (cf. art. 16, let. h dir. UE droits des consommateurs), la let. b dispose qu'il n'y a pas de droit de révocation pour les travaux urgents d'entretien ou de réparation. Dans ces cas, la mise en oeuvre d'un droit de révocation serait très difficile en pratique et ne tiendrait pas compte des intérêts légitimes du fournisseur.

La let. c précise que les services financiers sont exclus du droit de révocation. Les services financiers incluent en principe la totalité des services bancaires ainsi que toute prestation en matière d'octroi de crédit, d'assurances, de prévoyance professionnelle individuelle, de placements financiers ou de paiements. Comme en droit communautaire (cf. art. 3, lit. d dir. UE droits des consommateurs), le contenu, l'objet et les effets d'un éventuel droit de révocation pour les services financiers devraient être réglementés de façon spécifique. En Suisse, cela pourrait être fait dans le projet de loi sur les services financiers (LSF). Au vu des critiques, nombreuses et compréhensibles, formulées lors de la procédure de consultation à l'encontre du projet d'introduction d'un droit de révocation pour les contrats d'assurance obligatoire, celui-ci est abandonné. Ainsi, l'exception vaut en principe également pour les contrats d'assurance, dans la mesure où il s'agit de services financiers. S'agissant des contrats d'assurance, l'art. 7 du projet du Conseil fédéral de révision totale de la loi sur le contrat d'assurance prévoit un droit de révocation (art. 7, P-LCA)58. Après l'échec de la révision totale, il y a notamment lieu de prévoir un droit de révocation adapté aux circonstances dans le cadre d'une révision partielle de la LCA59.

La let. d prévoit également une exception au droit général de révocation pour les voyages à forfait. Cela se justifie par le fait que ces derniers sont soumis aux dispositions de protection des consommateurs prévus par la loi sur les voyages à forfait du 18 juin 199360. La notion de voyage à forfait correspond à celle de l'art. 1 de cette loi.

Art. 40h

Contenus numériques

Cette disposition contient une règle spécifique aux données numériques (logiciels, fichiers sons, images et textes) offertes sans support matériel (en particulier les téléchargements via Internet ou le réseau de téléphonie mobile). Dans la littérature, les avis divergent sur la question de savoir si une telle transaction portant sur des produits numériques doit être considérée comme un contrat d'achat relatif à un bien économique immatériel ou comme un contrat de service61. La clarification proposée ici lève l'insécurité relative au traitement à réserver à de tels contrats concernant le droit de révocation: ce droit ne peut être invoqué par le consommateur dans les cas où il acquiert un droit d'utilisation par paiement direct de l'intégralité du prix convenu et où il suffit au fournisseur, pour s'acquitter de son devoir de prestation, d'effectuer une livraison de données unique et immédiate. Le consommateur doit en 57 58 59 60 61

910

Au sujet de la directive relative aux droits des consommateurs, cf. Marchand, p. 183.

FF 2011 7091 7199 BO 2012 N 2203 ss et BO 2013 E 261 ss RS 944.3 Honsell, p. 221 s., avec renvois.

outre avoir été informé de la perte de son droit de révocation et avoir donné son accord exprès. Dans le cas contraire, le fournisseur ne pourrait pas s'assurer, en cas de rétractation du consommateur, si les données ont déjà été utilisées ou si elles continueront de l'être. Le libellé de l'article a été précisé par rapport à la version de l'avant-projet et correspond à présent sur le fond à l'art. 16, let. m, de la directive de l'UE relative aux droits des consommateurs.

Une minorité de la commission propose de renoncer à l'obligation pour le fournisseur d'indiquer au consommateur qu'il perd son droit de révocation et d'avoir reçu l'accord préalable exprès du consommateur.

Art. 40i

Extinction du droit de révocation

Alors que les art. 40e à 40h P-CO prévoient une série d'exceptions fondées essentiellement sur des caractéristiques propres à l'objet du contrat, qui font qu'une révocation n'est pas envisageable et excluent ce droit d'emblée, cette disposition couvre différentes situations qui, sans écarter par principe la possibilité du consommateur de se rétracter, entraînent l'extinction de ce droit. En effet, dans les cas de figure exposés dans cet article, l'extinction du droit de révocation apparaît comme étant une conséquence adéquate d'un comportement déterminé du consommateur, qui rend la restitution ou le renvoi de l'objet du contrat pratiquement impossible (par ex. des éléments indissociables d'autres objets ou une prestation déjà fournie) ou inapproprié (par ex. un objet utilisé).

Le droit de révocation vise à protéger les consommateurs des conséquences d'un contrat passé dans la précipitation ou sous l'effet de la surprise en leur donnant une période de réflexion pendant laquelle ils peuvent revenir sur leur offre ou leur acceptation. Le délai de révocation doit leur permettre de reconsidérer la transaction conclue. Pour que la révocation reste possible, l'utilisation qui est faite de la chose ne doit pas aller au-delà de l'examen de la conformité de la chose avec le contrat ou de son bon fonctionnement. La let. a prescrit donc de manière générale que le droit de révocation du consommateur s'éteint dès lors que celui-ci a fait usage de la chose dans une mesure allant au-delà de ce simple examen. L'avant-projet prévoyait ici que le consommateur devait une indemnité appropriée au fournisseur en cas de révocation (cf. art. 40k, al. 3, AP-CO). La réglementation proposée, qui n'a pas d'équivalent expresse dans le droit communautaire (cf. le considérant 47, mais aussi l'art. 14, al. 2, dir. UE droits des consommateurs), tient compte de la réserve exprimée à juste titre durant la consultation; selon laquelle l'instauration d'un droit de révocation qui ne s'éteindrait pas en cas d'usage de la chose au-delà du simple examen de sa conformité ou de son bon fonctionnement pénaliserait de manière excessive les fournisseurs. En effet, les consommateurs pourraient invoquer abusivement leur droit de se rétracter et renvoyer des objets coûteux commandés à distance dont ils ont fait un usage certes unique, mais allant
au-delà de l'utilisation strictement nécessaire pour vérifier leur bon fonctionnement.

Aux termes de la let. b, le droit de révocation s'éteint aussi lorsque le contrat porte sur une chose mobilière qui, selon l'usage qui est prévu, a été mélangée ou liée de manière indissociable à d'autres choses après la livraison. Dans les objets tels que la colle, des tapis et des plaques de sol, une rétraction du consommateur et la restitution de ces objets, lorsqu'ils sont associés à d'autres articles, n'est guère (plus) envisageable. Il en va de même des biens mobiliers comme les huiles de chauffage

911

qui ont été mélangés au moment de la livraison (cf. aussi l'art. 16, let. f, dir. UE droits des consommateurs).

La let. c décrit la situation, toujours plus fréquente, dans laquelle le contrat est conclu en utilisant un moyen de télécommunication, mais où les parties conviennent que le consommateur prendra possession de l'article commandé dans les locaux commerciaux du fournisseur. En pareil cas, le consommateur dispose non seulement d'un délai de réflexion jusqu'au moment où il récupère la marchandise, mais il a aussi la possibilité de l'examiner lorsque celle-ci lui est remise. Il est donc justifié que le droit de révocation s'éteigne dès que le consommateur a pris possession de la chose en déclarant expressément l'accepter.

La let. d se fonde sur la réglementation du droit communautaire (art. 16, let. a, dir.

UE droits des consommateurs), qui arrête que le consommateur ne pourra pas faire usage de son droit de révocation concernant les contrats de service si le service a été pleinement exécuté et que l'exécution a commencé avec l'accord préalable exprès du consommateur, lequel devra avoir donné son consentement en sachant qu'il perdra ce droit une fois le contrat entièrement exécuté. A la différence toutefois de la réglementation européenne et de ce que prévoyait l'avant-projet (art. 40g, al. 1, AP-CO), la fourniture de la prestation avant la fin du délai de révocation ne doit pas conduire à une exclusion absolue de ce droit de révocation, mais à son extinction dans le cas où le consommateur a consenti expressément à l'exécution avant que l'écoulement du délai, la prestation a bien été fournie et que le contrat a donc été pleinement exécuté. Si l'extinction semble ici plus logique et plus appropriée que l'exclusion, les effets pratiques restent inchangés, puisque le droit de révocation cesse d'exister au plus tard après que la prestation a été exécutée, même si à ce moment-là, le délai de révocation n'est pas encore écoulé. La prestation est réputée avoir été pleinement exécutée par exemple lorsque le consommateur a bénéficié du massage convenu ou que la retouche demandée sur un vêtement a été effectuée; ce n'est en revanche pas le cas lorsqu'il réserve un cours de langue pour ses prochaines vacances ou qu'il s'inscrit à un cours d'une durée de six mois et qu'au moment où expire le délai de
révocation, seule la première heure a eu lieu. Si un client achète un bon lui donnant droit, dans un délai d'une année, à une prestation (par ex. un massage), la pleine exécution n'est réalisée qu'une fois que la prestation payée à l'avance a été fournie.

La let. e prévoit que le droit de révocation du consommateur s'éteint lorsque celui-ci a descellé l'emballage scellé contenant un logiciel ou un autre contenu numérique ou un enregistrement audio ou vidéo qui lui a été livré sur un support de données matériel. Cette réglementation, que l'on retrouve dans le droit communautaire (cf. art. 16, let. i, dir. UE droits des consommateurs), répond à une demande formulée durant la procédure de consultation62 et vise à tenir compte des intérêts particuliers des fournisseurs de ce type de contenus protégés par le droit d'auteur et, plus spécifiquement, aussi des intérêts des auteurs de ces oeuvres. A défaut d'une telle règle, et malgré la révocation et la restitution du support de données, le contenu a peut-être déjà pu être entièrement utilisé ou pourrait encore l'être à l'avenir, sans qu'une indemnité appropriée ne soit garantie. Une minorité de la commission propose que le droit de révocation s'éteigne non seulement lorsque le contrat porte sur un logiciel ou sur un autre contenu numérique ou sur un enregistrement audio ou vidéo, mais

62

912

Rapport sur les résultats de la consultation, p. 12 s.

également lorsqu'il porte sur d'autres produits protégés par un droit d'auteur livrés au consommateur sur un support de données matériel contenu dans un emballage scellé.

Art. 40j

Délai

Contrairement à ce que prévoit le droit en vigueur, mais par analogie presque parfaite avec le droit communautaire (art. 9, al. 1, dir. UE droits des consommateurs), l'avant-projet propose un délai de révocation uniforme de quatorze jours (al. 1).

Conformément à l'al. 2, le délai de révocation pour les choses mobilières commence à courir le jour de la livraison, autrement dit au moment où le consommateur ou son représentant entre physiquement en possession de la chose. En ce qui concerne les services et les contenus numériques proposés sans support de données matériel (art. 40h P-CO), il commence à courir le jour de la conclusion du contrat. Le délai ne commence pas à courir avant que le consommateur ne soit informé du droit de révocation. Cette exigence correspond au droit en vigueur (art. 40e, al. 2, CO). Le consommateur dispose d'un droit légal à être informé au sujet du droit de révocation et du délai en la matière (let. a), ainsi qu'à connaître la raison commerciale et l'adresse du fournisseur (let. b), de manière à savoir à qui et où il doit, le cas échéant, faire parvenir la révocation.

L'avant-projet ne fixait pas une limite de temps maximale pour la révocation si le fournisseur n'avait pas rempli son devoir d'information. On avait estimé qu'une telle réglementation n'était pas nécessaire, car l'interdiction de l'abus de droit (art. 2, al. 2, CC) offrait un garde-fou suffisant. Cette approche a été critiquée par une majorité des participants à la consultation63. L'al. 3 pose donc une limite absolue à l'exercice du droit de révocation: si le fournisseur omet de donner les informations visées à l'al. 2, le délai dont dispose le consommateur pour se rétracter expire dans tous les cas au plus tard trois mois et quatorze jours après la réception de la chose ou après la conclusion du contrat pour les services et pour les contenus numériques qui ne sont pas offerts sur un support de données matériel. Ainsi, toute omission de la part du fournisseur entraîne une prolongation de trois mois du délai de révocation.

Un recours est par conséquent envisageable au plus pendant trois mois et quatorze jours après la réception de la chose ou, dans les autres cas, après la conclusion du contrat. Conférer aux consommateurs un délai de révocation plus long ne serait pas approprié et compromettrait la sécurité
du droit. À noter que le droit communautaire prévoit également une limite de temps maximale (cf. art. 10 dir. UE droits des consommateurs; le délai supplémentaire s'élève à un an).

L'al. 4 précise à quelles conditions le délai de quatorze jours est respecté. Le consommateur doit informer le fournisseur de sa décision avant la fin du délai de révocation. Le délai est respecté lorsque la révocation a été envoyée le dernier jour du délai: si la révocation est faite par écrit, c'est alors la date du cachet postal qui fait foi, et si elle est faite par voie électronique, c'est la date de sa délivrance qui est déterminante.

63

Rapport sur les résultats de la consultation, p. 15.

913

Art. 40k

Forme et preuve

L'al. 1 dispose que la révocation peut en règle générale prendre n'importe quelle forme. Cette règle s'applique aussi lorsque le fournisseur procure au consommateur un formulaire de révocation type. A la différence de la solution retenue dans le droit communautaire, aucune exigence n'est prévue dans la loi concernant ces formulaires types. Le consommateur ne doit pas être limité dans la manière d'invoquer son droit de révocation; le droit en vigueur exige à l'art. 40e, al. 1, CO la forme écrite. Bien que critiquée durant la consultation, cette liberté de forme se justifie par le fait que c'est au consommateur qu'il incombe de prouver que la révocation a eu lieu dans les délais (cf. al. 3).

Aux termes de l'al. 2, les informations au sens de l'art. 40j, al. 2, P-CO doivent être fournies sous une forme susceptible de constituer une preuve. En règle générale, cela signifie qu'elles doivent être remises sur papier ou sur un autre support de données durable. Une information sous forme numérique pouvant être imprimée est également acceptée. Les contrats à distance peuvent aussi être conclus par téléphone, et donc oralement. Cette possibilité ne doit pas être entravée par une obligation d'information soumise à une forme spécifique. Une information orale au sens de l'art. 40j, al. 2, P-CO doit donc être autorisée. Cette solution, qui s'écarte du droit communautaire, se justifie dans la mesure où la charge de la preuve de l'information légale incombe au fournisseur. En pratique, dans la vente par téléphone, cette exigence a déjà aujourd'hui pour conséquence que les conversations sont enregistrées avec l'accord du consommateur. C'est en définitive au fournisseur de décider de la forme qu'il veut donner à la preuve qu'il a bien informé le consommateur conformément à l'art. 40j, al. 2, P-CO.

Selon l'al. 3, le fardeau de la preuve que la révocation a été délivrée dans les délais continuera d'incomber au consommateur64.

Art. 40l

Conséquences en général

Quatre articles règlent ici les conséquences de la révocation par le consommateur, alors que l'avant-projet n'en prévoyait qu'un (art. 40k AP-CO). L'art. 40l P-CO traite des conséquences en général de la révocation.

L'al. 1 pose le principe selon lequel le consommateur n'est plus lié par son acceptation de l'offre censée aboutir à la conclusion du contrat. Les parties se retrouvent dans la situation ex ante, précédant l'acceptation du contrat. Les prestations fournies l'ont été sans base valable, de sorte que la restitution doit s'effectuer conformément aux règles relatives à l'enrichissement illégitime (art. 62 ss CO)65.

64 65

914

Hartmann, p. 307 ss, 316; Dornier commentaire, no 129 ad art. 40e CO.

ATF 137 III 243, considérant 4.5 avec renvois, qui évoque la question de savoir si en cas de prétentions découlant de la révocation, c'est la prescription en matière contractuelle ou celle relative à l'enrichissement illégitime qui s'applique; von der Crone/Monferrini, p. 492: les auteurs relèvent le côté délicat de ce point, tout en se ralliant finalement aux conclusions ci-dessus. Le droit des obligations allemand a résolu la question autrement, en réglant le droit de rétractation et de restitution sous le même titre que le droit de se départir (§§ 346 ss, §§ 355 ss BGB) et en considérant donc qu'ils relèvent des règles applicables aux prétentions découlant d'une révocation.

L'al. 2 dispose que les prestations déjà fournies doivent être restituées. Le consommateur doit en particulier restituer les prestations reçues, par exemple la chose achetée ou la marchandise acquise en leasing66 (cf. à ce sujet les explications relatives à l'art. 40n P-CO). Le fournisseur doit, quant à lui, rembourser les paiements déjà effectués par le consommateur (cf. art. 40m P-CO). Afin de garantir une résolution aussi rapide que possible, l'al. 2 complète l'avant-projet en fixant aux parties un délai maximal de quatorze jours pour la restitution des prestations reçues (cf. aussi les art. 13 et 14 dir. UE droits des consommateurs).

Art. 40m

Obligations du fournisseur

Cet article règle les obligations du fournisseur en cas de révocation. L'al. 1 concrétise l'art. 40l, al. 2, P-CO en disposant que le fournisseur doit rembourser les paiements déjà effectués par le consommateur, et cela en principe dans un délai de quatorze jours. Il découle de l'art. 40n, al. 4, P-CO que le fournisseur ne peut prétendre à aucun autre dédommagement.

Tenant compte du droit communautaire (cf. art. 13, al. 3, dir. UE droits des consommateurs), l'al. 2 a été complété par rapport à la version de l'avant-projet et donne au fournisseur le droit de différer le remboursement jusqu'à la récupération de la chose ou jusqu'à l'obtention de la preuve qu'elle lui a été réexpédiée. Cette disposition vise à protéger de manière appropriée les intérêts des fournisseurs dans les cas où les consommateurs exercent leur droit de révocation.

Art. 40n

Obligations du consommateur

Compte tenu de l'importance qu'elles revêtent, les obligations que le consommateur doit respecter lorsqu'il exerce son droit de révocation sont réglées de manière claire et expresse. Il s'agit aussi, indirectement, de prévenir les abus.

L'al. 1 concrétise l'art. 40l, al. 2, P-CO en arrêtant que le consommateur doit restituer les articles qu'il aurait déjà reçus s'il décide de révoquer le contrat. La disposition controversée de l'avant-projet, qui prévoyait le versement d'une indemnité appropriée au fournisseur, a été abandonnée ici, car tout usage de la chose allant au-delà du simple examen de sa conformité au contrat ou de son bon fonctionnement entraîne, conformément à l'art. 40i, let. a, P-CO, l'extinction du droit de révocation (cf. explications relatives à l'art. 40i P-CO).

Aux termes de l'al. 2, le consommateur doit payer les frais de réexpédition de la chose. Ces coûts étant une conséquence directe de la révocation du contrat, il est logique qu'ils soient à la charge du consommateur. Cette règle ne concerne toutefois que les frais directs engendrés par le renvoi du bien et non d'autres dépenses ou coûts éventuels que le fournisseur aurait à supporter et pour lesquels aucun dédommagement ne lui est dû (cf. aussi l'al. 4). Ainsi, on évite de restreindre le droit de révocation de manière excessive, voire de l'exclure de fait. L'al. 2 se distingue ici de la formulation de l'avant-projet (art. 40k, al. 2, AP-CO, «en règle générale») en ne prévoyant que deux exceptions à cette obligation: premièrement, si le fournisseur a fait part de sa disposition à prendre les frais de réexpédition à sa charge ou à se déplacer pour récupérer la chose et, deuxièmement, s'il a omis d'informer préala66

Dans certaines circonstances, le droit de révocation s'applique également aux contrats de leasing, en vertu de l'art. 16, al. 3 en relation avec l'art. 1, al. 2, let. a, LCC.

915

blement le consommateur que ces frais sont à sa charge. La disposition proposée suit en cela le droit communautaire (cf. art. 14, al. 1, dir. UE droits des consommateurs).

Une minorité de la commission propose que, s'il révoque le contrat, le consommateur paie non seulement les frais de réexpédition de la marchandise, mais également ­ en règle générale ­ les frais d'envoi s'il ne les a pas déjà payés.

L'al. 3 définit les obligations du consommateur lorsqu'il révoque un contrat ayant pour objet une prestation de service, pour autant qu'une révocation soit envisageable (cf. explications relatives aux art. 40g et 40i). Une prestation dont une partie au moins a déjà été fournie ne pouvant, par définition, être restituée, le consommateur doit au fournisseur une compensation à hauteur de la valeur de la prestation qu'il a déjà reçue ou utilisée. Cette compensation prend la forme d'un dédommagement proportionnel au prix total convenu par contrat (cf. aussi l'art. 14, al. 3, dir. UE droits des consommateurs). Il est ainsi possible de tenir compte de manière appropriée des intérêts légitimes tant du consommateur que du fournisseur. Au cas où le prix total serait excessif, les règles de droit générales réprimant le dol, la lésion et l'abus de droit s'appliquent.

L'al. 4, enfin, dispose que le consommateur ne doit au fournisseur aucun autre dédommagement (par exemple des intérêts) en cas de révocation.

Art. 40o

Effet sur les contrats liés

L'art. 40o est complété, par rapport à la version de l'avant-projet, d'une réglementation sur les effets d'une révocation sur d'autres contrats qui présentent un lien avec l'objet révoqué. Le droit communautaire contient une disposition analogue à l'art. 15 de la directive de l'UE relative aux droits des consommateurs.

L'al. 1 dispose que la révocation par le consommateur de son offre ou de son acceptation entraîne l'annulation de l'ensemble des autres contrats liés au contrat révoqué, la condition étant qu'il existe un lien matériel entre les différents objets. C'est le cas, par exemple, d'un contrat portant sur l'octroi d'un crédit pour l'acquisition d'une chose ou de plusieurs acquisitions séparées concernant une même installation composée de plusieurs éléments. Il n'est en revanche pas nécessaire que les parties soient les mêmes dans tous les contrats liés.

L'al. 2 prévoit expressément que les dispositions des art. 40l à 40n P-CO relatives aux conséquences de la révocation s'appliquent par analogie aux contrats liés. Il s'ensuit, notamment, que les choses et les paiements reçus doivent être restitués.

Art. 406d, 406e et 406f Dans un souci d'harmonisation des droits de révocation, les dispositions correspondantes relatives aux mandats visant à la conclusion d'un mariage ou à l'établissement d'un partenariat sont également adaptées. Jusqu'à l'expiration du délai de révocation, le contrat existe mais sous réserve que le mandant ne fasse pas usage de son droit de révocation; il ne serait pas possible de révoquer un contrat qui n'existerait pas67.

67

916

Schwenzer, ch. 26.63 et 28.75; Pietruszak, no 10 ss ad art. 406e CO; Hartmann, p. 307 ss, 308.

5.2

Loi fédérale sur le crédit à la consommation

Art. 16, al. 1, 1re phrase, al. 2, 2e phrase, al. 3, 2e phrase Malgré l'opposition d'une partie des participants à la consultation68, il y a lieu d'adapter également la loi fédérale sur le crédit à la consommation. Le délai de révocation uniforme de quatorze jours s'appliquera donc aussi aux contrats de crédit à la consommation. L'intérêt d'une harmonisation des délais de révocation prime en effet les intérêts spécifiques que pourraient avoir certaines parties à une exécution rapide du contrat.

6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération, les cantons et les communes

Les modifications proposées n'ont pas d'incidences financières ou en matière de personnel pour la Confédération, les cantons et les communes.

6.2

Conséquences pour l'économie

Tant le commerce en ligne, que la vente par correspondance et par téléphone affichent une forte croissance. En 2012, le commerce en ligne et par correspondance a progressé de 7,5 %, totalisant près de 6 % du volume total du commerce de détail69.

Selon les données de 2010 de l'Office fédéral de la statistique (OFS), 47 % des adultes dans les ménages suisses utilisent Internet pour y acheter des biens et des services; la moyenne européenne est de 31 %70. Le chiffres d'affaires global généré en Suisse par le commerce en ligne et la vente par correspondance est chiffré, par la

68 69

70

Rapport sur les résultats de la consultation, p. 17.

Données tirées du communiqué de presse du 8 mars 2013 de l'Association suisse de vente à distance (ASVAD) et de l'institut GfK Switzerland AG, 1re page (disponible sous http://vsv-versandhandel.ch/files/cms/tiny/News/2013_MM_Statistik.pdf; [en allemand; dernière consultation le 22 octobre 2013]).

Cf. www.bfs.admin.ch > Thèmes > 16 ­ Culture, médias, société de l'information, sport > Société de l'information > Données, indicateurs > Société de l'information ­ indicateurs > Ménages et population > E-commerce dans les ménages privés (graphique 2).

Parmi les entreprises suisses comptant cinq employés et plus, 33 % utilisent Internet pour la vente et 73 % pour des achats; ce dernier taux est nettement supérieur à la moyenne européenne (données OFS de 2011, disponibles sous: http://www.bfs.admin.ch > Thèmes > 16 ­ Culture, médias, société de l'information, sport > Société de l'information > Données, indicateurs > Société de l'information ­ indicateurs > Entreprises > Commerce électronique (graphique 2).

D'autres statistiques de l'OFS de 2010 permettent de constater combien l'utilisation qui est faite d'Internet par les ménages suisses est diversifiée: 55 % utilisent internet pour des achats et des commandes, 54 % pour des prestations de voyage et d'hébergement, 50 % pour le trafic de paiements, 44 % pour y visionner et y télécharger des films et des vidéos, 40 % pour y écouter de la musique, 37 % pour y regarder la télévision et y écouter la radio, ces taux variant considérablement en fonction de l'âge (données disponibles sous: www.bfs.admin.ch > Thèmes > 16 ­ Culture, médias, société de l'information, sport > Société de l'information > Données, indicateurs > Société de l'information ­ indicateurs > Ménages et population > Utilisation de l'internet > Motifs d'utilisation).

917

branche, à 5,7 milliards de francs en 201271; sur ce montant, 4,250 milliards correspondent à des achats ­ sur Internet et par correspondance ­ de particuliers en Suisse.

Les achats en ligne effectués par des clients privés et commerciaux suisses à l'étranger représentent à eux seuls 600 millions de francs. Même s'il n'est pas connu, le chiffre d'affaires dégagé par l'ensemble du secteur du commerce à distance et le démarchage à domicile ne devrait être guère plus élevé.

L'instauration d'un délai général de révocation de quatorze jours pour les transactions conclues à distance concernera au premier chef le commerce de détail et, plus particulièrement, les secteurs du multimédia/haute fidélité/appareils électriques, du textile, du logement et des CD/DVD/livres/audio, qui représentent aujourd'hui déjà en termes de valeur la plus grande partie des transactions du commerce électronique et de la vente par correspondance72. Par contraste, le secteur alimentaire, qui représente une proportion d'environ 16,6 % des transactions pour une valeur de 700 millions de francs, ne sera pas touché, puisqu'aux termes de l'art. 40f, al. 2, P-CO, le consommateur ne dispose pas du droit de révocation pour les contrats portant sur des denrées alimentaires. L'octroi d'un droit de retour convenu contractuellement d'au moins dix jours est aujourd'hui déjà une pratique courante dans le commerce à distance, comme le prévoit le code de déontologie de l'Association suisse de vente à distance (ASVAD), dont les membres génèrent la plus grande partie du volume total des transactions du commerce en ligne et de la vente à distance. Enfin, la prolongation de sept à quatorze jours du délai de révocation pour le démarchage à domicile ne devrait avoir que des conséquences limitées sur le plan économique.

Il ressort de sondages effectués en Allemagne auprès de sociétés de commerce en ligne qu'à peine 10 % des consommateurs font usage de leur droit de révocation (la part du chiffre d'affaires concerné est sensiblement la même); les taux effectifs varient toutefois de 5 % à plus de 60 % en fonction du secteur73. Si l'on part de taux de révocation comparables pour la Suisse, le chiffre d'affaires concerné serait de quelque 425 millions de francs au plus. Il n'est toutefois pas possible de quantifier précisément les coûts supplémentaires
effectifs qui en découleront pour les entreprises par rapport à aujourd'hui, d'autant que ces coûts risquent d'être différents d'une branche d'activité et d'une entreprise à l'autre. Les entreprises pourraient encourir des coûts supplémentaires, non justifiables par les buts du droit de révocation, dans les cas où l'exercice de ce droit peut être considéré comme abusif. La réglementation proposée offre cependant une protection dans les situations où la révocation est considérée comme abusive parce que le consommateur a utilisé la chose, ce qui concernerait jusqu'à 30 % des cas74, en excluant dans ce cas la possibilité pour le consommateur de révoquer le contrat (cf. explications relatives à l'art. 40i, let. a, P-CO).

71 72 73

74

918

Données tirées du communiqué de presse du 8 mars 2013 de l'Association suisse de vente à distance (ASVAD) et de l'institut GfK Switzerland AG, 1re page.

Données tirées du communiqué de presse du 8 mars 2013de l'Association suisse de vente à distance (ASVAD) et de l'institut GfK Switzerland AG, page 2.

Cf. Trusted Shops, Umfrage zum Widerrufsrecht im Online-Handel 2012. On observe des variations similaires en Suisse concernant l'exercice du droit de retour, qui pour l'heure n'est convenu que sur une base contractuelle: les taux vont de 3 % pour les articles multimédia et les CD / DVD / livres à 39 % dans le secteur du textile, cf. statistiques 2012 de l'ASVAD.

Vgl. Trusted Shops, Umfrage zum Widerrufsrecht im Online-Handel 2012 (disponible à l'adresse suivante: http://www.pressebox.de/pressemitteilung/trusted-shopsgmbh/Umfrage-zum-Widerrufsrecht-im-Online-Handel-2012/boxid/535733 [en allemand; dernière consultation le 22 octobre 2013]).

7

Constitutionnalité

La compétence de légiférer en matière de droit civil et de protection des consommateurs est attribuée à la Confédération en vertu des art. 122, al. 1, et 97 de la Constitution fédérale.

919

Bibliographie Roger Dornier, Das Widerrufsrechts bei Haustürgeschäften und ähnlichen Verträgen (Art. 40a­40g OR), thèse Fribourg 1994 (document cité «Dornier thèse»).

Roger Dornier, Art. 40a­40f OR, in: Jörg Schmid (éd.), Zürcher Kommentar zum schweizerischen Zivilrecht, Teilband V/1b/3, Zurich 2010 (document cité «Dornier commentaire»).

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Ingeborg Schwenzer, Das Schweizerische Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 6e édition, Berne 2012.

920

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2012.

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921

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