# S T #

N »

2 5

1233

FEUILLE FÉDÉRALE 101e année

Berne, le 23 juin 1949

Volume I

Parait, en règle générale, chaque semaine. Pris: 2g franca par an; 15 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 50 centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des hoirs K.-J.Wyss, société anonyme, à Berne

# S T #

5643

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi révisant partiellement le code pénal suisse (Du 20 juin 1949) Monsieur le Président et Messieurs, Le code pénal du 21 décembre 1937 (RO 54, 781) est entré en vigueur le 1er janvier 1942, Après des travaux préparatoires qui durèrent des dizaines d'années, après des délibérations extraordinairement approfondies aux chambres fédérales et un referendum précédé d'une vive campagne, le peuple suisse vota le 3 juillet 1938 l'unification du droit pénal. Il serait prématuré de vouloir porter un jugement définitif sur les qualités du code pénal après quelques années d'application seulement. Mais personne ne contestera qu'en mettant fin aux législations cantonales souvent archaïques et aux inconvénients d'une telle dispersion législative, la loi unifiée a fait faire un grand progrès. Si l'on considère la situation dans son ensemble, on peut constater aujourd'hui déjà que le code pénal suisse a eu de bons résultats et qu'on ne saurait concevoir un retour à l'état antérieur.

Si nous vous proposons après un laps de temps relativement court de reviser partiellement le code, c'est pour des raisons bien déterminées. Un certain nombre d'articles doivent être modifiés et remaniés. C'est le cas en premier lieu, étant donnée l'évolution récente de la situation politique, des dispositions pour la protection de l'Etat, que nous devons renforcer. Cette tâche est urgente non seulement en raison des événements de la politique internationale, mais aussi à cause des arrêtés que nous avons pris pendant ou après la guerre en vertu de nos pouvoirs extraordinaires. Le droit d'exception doit être aboli le plus rapidement possible, quitte à en incorporer dans la législation ordinaire les dispositions indispensables. Cette règle vaut aussi en matière de protection de l'Etat, et il y a lien d'en tenir compte dans notre projet de revision du code pénal.

On a constaté en outre que plusieurs autres articles du code sont rédigés de façon plutôt malheureuse et que leur application a eu des effets peu satisFeuille fédérale. 101e année. Vol. I.

86

1234 faisants. Or, dès l'instant où le renforcement des dispositions sur la protection de l'Etat nécessite une revision partielle du code, il a paru naturel de retoucher en même temps les autres articles qui présentent des imperfections. Parmi ces autres articles à modifier, l'article 173 occupe une place particulière ; notamment son application en matière d'allégations faites par la voie de la presse a donné lieu à des difficultés qui commandent de reviser la notion pénale de la diffamation et de modifier la disposition sur la peine.

En outre, nombre d'amendements ont été proposés, surtout au sujet de dispositions de la partie générale du code concernant les crimes, les délits et les contraventions. Ces propositions méritaient sans doute d'être examinées, mais leur nombre toujours croissant devait nous inspirer la prudence si nous voulions échapper au danger de nous engager dans une revision totale que rien ne justifierait. Aussi nous sommes-nous efforcés d'emblée de limiter le plus possible la portée de la présente revision, qui tend en fait à apporter au code les quelques corrections qui s'imposent actuellement et qui peuvent être réalisées sans provoquer de résistance considérable, ni exiger trop de temps. Nous n'avons pas retenu en revanche les griefs dont le bien-fondé est discutable, ni les propositions de nature à engendrer vraisemblablement de trop longues discussions, pour ne pas dépasser les bornes d'une revision limitée à ce qui est manifestement nécessaire. On peut réserver pour l'avenir la question de savoir si le code pénal, de date encore très récente, devrait être l'objet de modifications plus importantes ; cette question ne pourra d'ailleurs pas être résolue en connaissance de cause tant qu'il n'a pas subi l'épreuve d'une application prolongée.

Dès que la nécessité de reviser le code pénal fut ainsi démontrée, le département de justice et police convoqua une commission d'experts comprenant des professeurs de droit pénal, des représentants du Tribunal fédéral et des juridictions cantonales, ainsi que des procureurs généraux, des spécialistes de l'exécution des peines et des parlementaires. Au cours de quatre sessions échelonnées pendant les années 1947 à 1949, la commission d'experts a examiné les différents articles à reviser. Les modifications que nous vous proposons aujourd'hui
reposent pour l'essentiel sur ses décisions. En plus des dispositions visées dans le présent projet, les experts ont discuté d'autres propositions d'amendement, qu'ils ont cependant rejetées. Le département de justice et police a aussi désiré connaître l'avis de la commission sur l'étendue à donner à la revision. En ce qui concerne les délibérations des experts, nous renvoyons aux procès-verbaux des différentes sessions.

Enfin, signalons que les gouvernements cantonaux ont aussi eu l'occasion de se prononcer sur le projet de revision.

Par notre arrêté du 20 novembre 1941 (KO 57, 1364), nous avons rectifié quelques erreurs dans le texte du code pénal. Il s'agit d'inexactitudes manifestes qui ont passé inaperçues lors de la rédaction définitive. Comme nous ne sommes pas compétents même dans ce cas pour modifier le texte d'une loi, nous saisissons l'occasion de la présente révision pour vous faire

1235 approuver les articles rectifiés et c'est pourquoi nous les avons incorporés dans notre projet. Les rectifications concernent les textes allemand, français et italien, mais pas toujours les mêmes articles dans les trois textes.

Dans le texte français, elles concernent les articles 27, chiffre 7 (qui doit d'ailleurs être modifié de toute manière en raison des nouvelles dispositions sur la protection de l'Etat), 38, chiffre 4, 80, 2e alinéa, HO, chiffres 6 et 7,174, chiffre 1«, 269 et 346, !<"· et 2« alinéas. Dans le texte allemand, elles se rapportent aux articles 27, 41 et 346. et dans le texte italien aux articles 27, 38, 269 et 346.

Par le présent message, nous vous soumettons en conséquence un projet de loi modifiant le code pénal suisse. Pour mieux mettre en évidence les différents motifs à l'appui de la revision et en faciliter la vue d'ensemble, nous avons divisé le message en trois parties: La première concerne la protection de l'Etat; la deuxième se rapporte à l'article 173 et la troisième traite de toutes les autres dispositions touchées par la revision. Dans le projet de loi lui-même, en revanche, les articles modifiés et les quelques dispositions nouvelles se suivent selon l'ordre numérique.

PREMIÈRE PARTIE

LA REVISION DES DISPOSITIONS SUR LA PROTECTION DE L'ÉTAT I. Remarques générales 1. La revision partielle du code pénal dans le domaine de la protection de l'Etat se limite à quelques compléments apportés aux dispositions des titres treizième « Crimes ou délits contre l'Etat et la défense nationale » (art. 266, 266bis, 272, 275, 275bis, Zlôter), quinzième «Infractions contre l'autorité publique >> (art. 285 et 286) et seizième « Crimes ou délits de nature à compromettre les relations avec l'étranger » (art. 296, 297, 302), ainsi qu'à une nouvelle rédaction de l'article 341, lettre 6 (compétence des assises fédérales). On a pris l'habitude, dans les discussions publiques, d'appeler ces différents articles « dispositions sur la protection de l'Etat ». Nous employons la même expression, bien que les articles dont il s'agit ne se rapportent pas tous à des crimes ou délits contre l'Etat.

La revision de ces dispositions a été provoquée par un postulat voté le 1er octobre 1946 par le Conseil des Etats lors de l'approbation de notre rapport sur l'activité antidémocratique exercée en relation avec la période de guerre. Ce postulat nous invitait « à examiner s'il n'y aurait pas lieu de compléter le droit pénal ordinaire dans le sens d'une protection plus efficace de l'Etat et en particulier si certaines dispositions de l'arrêté du 27 février 1945 ne devraient pas être insérées dans la législation ordinaire » (BS Conseil des Etats 1946, p. 247 s.). Dans l'esprit du postulat, les nouvelles dispositions seraient valables pour les temps ordinaires et extraordinaires.

1236 Quant à savoir si la protection de l'Etat devait être renforcée par une revision du code pénal ou par l'adoption d'une loi spéciale, c'était une question laissée à notre examen. Après les événements de Tchécoslovaquie, en février 1948, l'opinion publique réclama un rapide renforcement de la protection de l'Etat par la voie de la législation ordinaire. Le 4 mars 1948, la commission des pouvoirs extraordinaires du Conseil national vota un postulat nous invitant à préparer l'insertion des dispositions sur la protection de l'Etat dans la législation ordinaire et à renseigner la commission, dans sa prochaine séance, sur l'état des travaux. L'attitude prise par le parti du travail à l'égard des événements de Tchécoslovaquie inspira, au Conseil national (séance du 11 mars), une déclaration nous demandant de ne pas assouplir les dispositions sur la protection de l'ordre constitutionnel et contre les menées subversives et à envisager, au contraire, leur renforcement (BS Conseil national 1948, p. 68/69). Une prompte adaptation du droit ordinaire aux dangers menaçant actuellement la sécurité de l'Etat fut réclamée dans d'autres occasions encore, à savoir : Lors des débats relatifs à l'approbation de notre arrêté du 29 octobre 1948 renforçant les dispositions sur la protection de l'Etat (BS Conseil national 1948, p. 728 s.; Conseil des Etats 1949, p. 4 s.); lors des interpellations des députés Gressot et Zust concernant l'approbation par M. L, Nicole de la déclaration du chef communiste français Thorez (séances du Conseil national du 25 mars 1949, BS p. 401 s.

et du Conseil des Etats du 30 mars 1949), ainsi que lors des délibérations sur le rapport concernant les poursuites ouvertes contre des Suisses nationaux - socialistes (Conseil national, session de printemps 1949, BS p. 382 s.).

2. Le département de justice et police et la commission d'experts furent d'emblée de l'avis que ce renforcement de la protection de l'Etat devait être assuré par la revision du code pénal et non par l'adoption d'une loi spéciale. Ils considérèrent aussi que cette revision devait se limiter au strict nécessaire. Certes, une loi spéciale, applicable aussi bien en temps normal qu'aux époques critiques, aurait l'avantage d'englober non seulement toutes les dispositions pénales et administratives relevant du droit extraordinaire,
mais encore d'autres prescriptions tendant à protéger la sécurité intérieure et extérieure. Etant donné l'accueil réservé avant la guerre aux divers projets visant la protection de l'Etat, et en particulier l'aversion de notre peuple pour l'adoption de lois de ce genre à appliquer en temps ordinaire, il n'était cependant pas indiqué d'élaborer une loi spéciale. Il n'aurait d'ailleurs pas été possible de prévoir tous les dangers pouvant se produire dans une future période critique. Les membres de la commission d'experts qui appartiennent à l'Assemblée fédérale se prononcèrent aussi contre une loi spéciale et recommandèrent instamment d'éviter tout ce qui pourrait donner l'idée d'une loi d'exception ou de circonstance (voir les procès-verbaux de la commission I, 17, 22; II, 10, 15, 16; III, 2). Les chefs des départements cantonaux de justice et police approuvèrent cette

1237 ligne de conduite dans leur conférence de 1947 et 1948. Les rapports du département de justice et police aux commissions parlementaires des pouvoirs extraordinaires et nos rapports sur la gestion en 1947 et 1948 mentionnèrent qu'on envisageait de reviser le code pénal pour renforcer la protection de l'Etat. Ce n'est que dans la session de janvier/février 1949, lors des débats sur l'arrêté du 29 octobre 1948, que deux députés au Conseil des Etats proposèrent l'adoption d'une loi spéciale (BS Conseil des Etats 1949, p. 9, 11, 13).

Après avoir examiné cette question d'une façon très attentive, nous arrivons --- avec le département de justice et police et la commission d'experts -- à la conclusion qu'il y a lieu de choisir la voie d'une revision du code pénal. Les dispositions pénales qui ne doivent avoir effet qu'aux époques où le pays se trouve en état de nécessité n'ont pas leur place dans le code pénal, ni dans une loi sur la protection de l'Etat. Le droit de nécessité proprement dit, qui répond à des exigences purement temporaires de la protection de l'Etat, doit, dans l'avenir également, demeurer du droit de nécessité. Nous considérons toutefois que ces dispositions complémentaires, destinées à protéger l'Etat dans une future période critique, doivent être préparées aujourd'hui déjà. Les adjonctions proposées dans notre projet sont d'ailleurs liées si étroitement aux dispositions existantes qu'elles ne peuvent être édictées qu'avec ces dernières, c'est-à-dire dans le code lui-même. Le peuple ne comprendrait guère que nous vous soumettions, outre le projet de revision partielle du code pénal, un projet de loi spéciale tendant à protéger plus efficacement l'Etat.

3. Le code pénal actuel protège l'Etat dans une mesure beaucoup plus large que l'ancien code du 4 février 1853. Nous nous bornerons à rappeler les articles suivants: -- l'article 265 (haute trahison), qui réprime tous les actes tendant à modifier par la violence les institutions de l'Etat et s'applique également aux actes préparatoires visant manifestement à un renversement par la violence tels que la conjuration, l'accumulation d'armes, l'excitation; -- l'article 266 (trahison), disposition très générale et souvent appliquée dans les procès contre des Suisses nationaux-socialistes, qui permet de poursuivre beaucoup plus efficacement
que l'ancien code les atteintes à l'indépendance de la Confédération, qu'il s'agisse des relations avec l'étranger ou de la situation intérieure; --· l'article 275, qui vise les groupements illicites; -- les dispositions concernant les crimes ou délits contre la paix publique (art. 258: menaces alarmant la population; art. 259: provocation · publique au crime; art. 260: émeute); -- les dispositions réprimant l'espionnage (art. 272 à 274, 301) (cf. Hafter, Lehrbuch dea Schweiz. Strafrechts, partie spéciale, volume 2, p. 620 s.).

1238

Mais notre code pénal a été élaboré à une époque tranquille. Il représente un compromis, dans le domaine de la protection de l'Etat également. Les dispositions controversées des lois rejetées n'y trouvèrent pas place. Conjointement avec le code pénal militaire, il protège suffisamment l'Etat en temps normal. En revanche, il ne constituait pas une protection suffisante contre les dangers auxquels l'action déclenchée quelques années avant la guerre par les extrémistes de gauche et de droite exposait notre Etat libéral et démocratique. C'est pourquoi il fallut compléter le code par des dispositions fondées sur le droit de nécessité, en particulier: -- par notre arrêté du 5 décembre 1938 réprimant des actes contraires à l'ordre public et instituant des mesures pour protéger la démocratie (arrêté reposant sur les art. 102, ch. 9 et 10, de la constitution, EO 54, 880); -- par celui du 27 février 1945 instituant des mesures pour protéger l'ordre constitutionnel et rapportant les interdictions de partis (EO 61, 111); -- par celui du 7 mars 1947 restreignant des dispositions édictées en vue de protéger l'ordre constitutionnel (EO 63, 139); -- par celui du 29 octobre 1948 renforçant les dispositions pénales pour la protection de l'Etat (EO 1948, 1063) ; --- par celui du 4 août 1942 édictant des dispositions pénales et de procédure pour assurer la défense nationale et la sécurité de la Confédération (EO 58, 743).

Aujourd'hui encore, la sûreté extérieure et l'ordre public sont très sérieusement menacés. Nous voyons subsister intégralement les dangers de nature idéologique dont il a été question dans notre rapport sur l'activité antidémocratique (IIIe rapport, p. 60; FF 1946, II, 262), de même qu'au Conseil national dans la session de mars 1948 (BS 1948, p. 68) et dans les deux chambres lors de l'approbation de notre arrêté du 29 octobre 1948 (BS, Conseil national 1948, p. 728 s., 742, 747; Conseil des Etats 1949, p. 4, 8, 9, 11, 12) et des interpellations des députés Gressot et Zust. A l'heure actuelle, la sûreté de l'Etat est surtout menacée par les extrémistes de gauche, mais on constate aussi une reprise d'activité dans des milieux nationauxsocialistes. Comme nous l'exposions dans le rapport susmentionné, les expériences faites avec les extrémistes de droite ont montré que le concours de mouvements
idéologiquement semblables, de Suisse et de l'étranger, a des conséquences qui vont de l'infiltration des idées antidémocratiques jusqu'à l'obéissance aux consignes d'organismes étrangers et même à l'organisation d'une cinquième colonne appelée, en cas de conflit, à appuyer une armée étrangère par l'espionnage, le sabotage, etc. Rappelons aussi que le Tribunal fédéral (cour de droit public) a déclaré que le parti communiste suisse était une association dangereuse pour l'Etat, au sens de l'article 56 de la constitution, attendu qu'il tend à renverser par la violence l'ordre social, qu'il dépend de l'Internationale communiste et qu'il est obligé d'appuyer

1239 l'Union soviétique dans la paix comme dans la guerre (ATF 61, I, 264; 63, I, 281 ; notre rapport susmentionné concernant l'activité antidémocratique, IIIe partie, p. 2 et 10). Le parti du travail a révélé, ces derniers temps, des attaches inquiétantes avec le communisme international. Qu'il suffise de rappeler ses manifestations relatives aux événements révolutionnaires de Tchécoslovaquie, en particulier le télégramme de M. Nicole à M, Gottwald et l'approbation donnée par M. Nicole aux déclarations du secrétaire général du parti communiste français. Le parti du travail a ainsi prouvé qu'il est prêt à renverser les institutions démocratiques de la Suisse en usant des méthodes employées en Tchécoslovaquie et à instaurer chez nous la démocratie dite populaire, qu'il reconnaîtrait à un organisme étranger et à une puissance étrangère le droit de se mêler des affaires intérieures de notre Etat et qu'il est disposé à saboter notre propre défense nationale au cas où les forces armées d'Etats dont ils partagent l'idéologie pénétreraient en Suisse. Nous ne devons avoir aucune illusion sur ce point, quand bien même le parti du travail s'est prononcé dernièrement en faveur de la défense nationale et a paru désavouer les déclarations de M. Nicole. Notre sécurité est actuellement menacée par les menées communistes exactement comme elle l'était précédemment par des nationaux-socialistes suisses qui étaient prêts à discuter avec des autorités allemandes la question d'une Europe nouvelle et d'une Suisse nationale-socialiste.

Les communistes suisses ont observé avec un très grand intérêt les nouvelles méthodes de renversement qui, depuis la révolution de février à Prague, sont connues de chacun (conspiration, « révolution froide »). On ne déclenche plus une révolution moderne avec des combats de rues ou en délogeant par la violence un gouvernement ou un parlement. On agit selon un plan soigneusement préparé, si cela est nécessaire sous direction étrangère. Les moyens sont en particulier l'occupation des postes de commande économiques et politiques par des communistes ou des nationaux-socialistes ; l'affaiblissement de l'Etat au moyen d'attaques dirigées contre le gouvernement, la police ou l'armée; la propagande; l'éducation d'une élite; la création de comités d'entreprises et de comités d'action; la remise
d'armes à certains groupements.

Lors de la rédaction du code pénal, on ne pouvait prévoir les tensions politiques actuelles, de portée mondiale, dues en définitive au dynamisme des Etats totalitaires étrangers, ni les dangers qui en résultent pour la sécurité de notre pays. Il est donc nécessaire d'adapter le code aux nouvelles menaces qui planent sur l'Etat. Les dispositions projetées doivent permettre d'intervenir dès le début contre les menées subversives. Il faut que les autorités de répression puissent agir avant que ne se produise cette situation périlleuse dans laquelle nous avons été contraints de condamner de nombreux traîtres. Cependant, le projet s'efforce de faire une distinction nette entre les droits découlant de la liberté de pensée et de conscience d'une part, et une propagande visant à instituer des organisations totalitaires et à

1240 soutenir des mouvements étrangers dirigés contre la Suisse, d'autre part.

Il incrimine non les simples opinions, mais les agissements subversifs.

Nous savons que des dispositions pénales ne sont pas le seul moyen de protéger la sécurité de l'Etat. Une vigilance constante du peuple et des autorités, l'information du public sur les dangers qui nous menacent et la lutte par les armes de l'esprit contre les ennemis de notre démocratie et les valets de l'étranger, tels sont en premier lieu les moyens de renforcer notre volonté de défense. L'armée, les autorités et le peuple doivent agir conjointement, de manière à empêcher que des éléments douteux n'occupent des postes importants. Nous nous référons aux considérations émises par notre porte-parole lors de l'approbation de l'arrêté en vigueur sur la protection de l'Etat (BS Conseil national 1948, p. 750; Conseil des Etats, 1949, p. 11) et dans la réponse donnée aux interpellations des députés Gressot et Zust.

Aussi les nouvelles dispositions pénales n'ont-elles été établies qu'avec une très grande prudence. La présente revision tient compte des conditions particulières de la Suisse. Nous ne pouvions nous inspirer des lois anticommunistes édictées ou en préparation dans divers pays, ni des dispositions détaillées de leurs codes pénaux réprimant par exemple les atteintes à l'intégrité de l'Etat. Nous n'avons pas non plus repris les dispositions controversées des projets de loi sur la protection de l'Etat qui furent rejetés ou avortèrent. Même les dispositions édictées en vertu de nos pouvoirs extraordinaires et demeurées en vigueur n'ont pu être reprises telles quelles, car il faut conserver à notre code pénal son caractère libéral.

4. Les dispositions de notre projet qui tendent a protéger l'Etat sont agencées comme suit: L'article 266 bis élargit la notion de la trahison (art. 266: atteinte à l'indépendance de la Confédération), Les articles 275 (nouveau texte) et 275 bis, qui, avec l'article 275 ter, constituent le nouveau chapitre « mise en danger de l'ordre constitutionnel », étendent la notion de la haute trahison (art. 265). Les adjonctions apportées aux articles 266, chiffre 2, et 274, chiffre 1, renforcent les peines prévues; le texte nouveau de l'article 272, chiffre 1, élargit la notion du service de renseignements politiques.

A part
ces compléments concernant la protection de l'Etat proprement dite, le projet modifie les dispositions ci-après: un nouveau texte précise le sens des articles 285 et 286. Les articles 296 et 297 tiennent compte des changements intervenus dans les organisations internationales; la revision de l'article 302, 2e alinéa, supprime la condition de la réciprocité; la nouvelle rédaction de l'article 341, lettre b, est en relation avec la précision apportée à l'article 285.

Ont été transposées dans le projet les dispositions suivantes de l'arrêté du Conseil fédéral du 29 octobre 1948 renforçant la protection de l'Etat: les articles l«r (2e al. nouveau de l'art. 266), 2 (art. 26Gbis), 3 (art. 272,

1241 eh. 1, revisé), 4 (4e al. nouveau de l'art. 274, ch. 1), 5 (art. 275 nouveau), 6 (art. 275bis), 7 (art. 275ter). L'article 10 relatif aux actes commis à l'étranger a été inséré à l'article 4 revisé du code. La prescription spéciale de l'article 12 relative à la juridiction est déjà énoncée aux articles 340 et 342 du code pénal et aux articles 18 et 105 de la loi sur la procédure pénale.

En revanche, les articles 8, 9, 11 et 13 n'ont pas été repris dans le code pénal. Us seront donc abrogés dès l'entrée en vigueur du code revisé. Ces articles appellent les remarques ci-après: On peut renoncer à l'article 8 visant le fait de décrier les institutions politiques, étant donné qu'en temps ordinaire ce dénigrement par des extrémistes de gauche ou de droite n'a aucun effet et peut être combattu sur le terrain des idées. La disposition semblable qui figurait à l'article 13 de l'arrêté fédéral, resté à l'état de projet, du 7 décembre 1936 sur la protection de l'ordre public et de la sûreté publique fut déjà rejetée au cours des délibérations du Conseil des Etats. L'abandon de l'article 8 répond au voeu exprimé au Conseil des Etats lors de la discussion de l'arrêté du Conseil fédéral du 29 octobre 1948 (BS Conseil des Etats 1949, p. 8, 13), ainsi qu'aux idées de la commission d'experts (procès-verbal II, 28 s., 43 s.) et à la doctrine (cf. Comtesse, Der strafrechtliche Staatsschutz gegen hochverräterische Umtriebe im Schweiz. Bundesrecht, p. 65 ; Stämpfli, Ausserordentlicher Staatsschutz, Revue pendle suisse, 61, p. 161).

La disposition particulière de l'article 9 sur les contraventions aux dispositions régissant des groupements étrangers n'a pas sa place dans la législation ordinaire ; la sanction de l'article 292 et l'expulsion administrative semblent suffisantes. Au surplus, cet article a été rarement appliqué.

La commission d'experts a examiné attentivement si l'augmentation du nombre des causes de privation des droits civiques, prévue à Yartide 11 (o, l'instar de l'art. 29, 2e al., du code pénal militaire), devait être reprise dans le droit ordinaire. A l'unanimité, elle a estimé que cette extension ne se justifiait qu'aux époques où le pays se trouve en état de nécessité. Elle n'a pas pu se rallier davantage à la proposition -- faite dans la presse -- de rendre obligatoire la privation des droits
civiques en cas de délit grave contre l'Etat ; elle a estimé au contraire que cette peine accessoire ne devait être appliquée, en temps normal, qu'avec retenue, conformément à la jurisprudence de la cour pénale fédérale (procès-verbal I, 23; II, 30). Nous nous rangeons à cette opinion.

Le chef du département de justice et police a déjà expliqué au Conseil national, le 20 décembre 1948, qu'il n'était pas question de reprendre l'article 13 (BS Conseil national 1948, p. 748). L'interdiction de groupements compromettant la sûreté de l'Etat est une mesure administrative qui ne saurait figurer dans un code pénal. S'il devenait urgent, après l'abrogation des dispositions fondées sur nos pouvoirs extraordinaires, de décréter cette interdiction, elle pourrait l'être par les conseils législatifs en

1242 vertu de l'article 85, chiffres 6 et 7, de la constitution ou par le Conseil fédéral en vertu de l'article 102, chiffres 9 et 10, de la constitution.

II. les différentes dispositions 1. Ij article 4 a été complété par la mention des nouvelles dispositions réprimant l'acte commis à l'étranger (art. 266 ois, 275, 275 bis, 275 ter).

Aux infractions non touchées, selon l'article 27, chiffre 7, par l'anonymat en matière de presse (ch, 3, 2e al.) et par le délai de prescription plus court (ch. 6), il y a lieu d'ajouter les articles 2Q6bis, 275 nouveau et 275bis.

2. Le nouvel alinéa 2 de l'article 266, chiffre 2, prévoit que la peine pourra être la réclusion à vie dans les cas graves de trahison visés au chiffre 2 (rapports avec le gouvernement d'un Etat étranger dans le dessein de provoquer une guerre). D'accord avec la commission d'experts (procès-verbal II, 31; III, 9), nous considérons qu'il n'y a pas lieu de tenir compte d'un voeu exprimé dans le public, suivant lequel la réclusion à vie devrait être aussi prévue pour les cas visés sous chiffre 1er. Une disposition prévoyant la peine la plus sévère n'accentuerait pas l'effet préventif de cette disposition. Dans le public, on a recommandé également l'institution de la peine de mort.

On ne saurait donner suite à ce voeu, déjà en raison de l'article 65 de la constitution, aux termes duquel il ne peut être prononcé de condamnation à mort pour cause de délit politique. Prévoir la peine de mort serait d'ailleurs contraire aux principes posés par le code pénal au sujet du but de la peine.

3. "L'article 266bis punit le fait de prêter appui aux entreprises et menées étrangères dirigées contre la sécurité de la Suisse. H prévoit deux éléments constitutifs du délit: d'une part, les rapports noués avec le gouvernement d'un Etat étranger ou avec des partis étrangers ou avec d'autres organismes de l'étranger, ou avec leurs agents, dans le dessein de soutenir de telles entreprises et menées; d'autre part, les informations inexactes ou tendancieuses lancées ou propagées aux mêmes fins. La nouvelle disposition tend à lutter contre les dangers, décrits sous chiffre I, qui peuvent résulter de la collaboration d'extrémistes suisses avec leur correligionnaires politiques, représentant des gouvernements ou partis étrangers ou d'autres organismes du même genre à l'étranger. Les expériences faites dans la lutte contre les menées des nationaux-socialistes ont prouvé la nécessité d'une disposition pénale permettant
d'intervenir, avant que le crime plus grave de trahison ne soit consommé (art. 266), contre ceux qui soutiennent ainsi des intérêts étrangers. Nous pensons qu'un danger particulier pour notre sécurité réside, à l'heure actuelle, dans les nombreux voyages que font à l'étranger des extrémistes de gauche, dans l'obéissance aux consignes données parles centrales du communisme international et dans la propagation systématique des assertions inexactes de la presse communiste sur la situation

1243 politique en Suisse, assertions qui sont de nature à.susciter l'hostilité de l'étranger à l'égard de notre pays. « La médisance systématique et le dénigrement continuel de la Suisse à l'étranger sont des actes tout voisins de l'atteinte à l'indépendance de la Confédération au sens de l'article 266 du code pénal » (cf. rapport sur les menées antidémocratiques, IIIe partie, p. 59).

Comme nous l'avons exposé sous chiffre I, 4, et dans notre rapport du 30 novembre 1948 (p. 78) sur les poursuites engagées contre des Suisses nationaux-socialistes pour atteinte à l'indépendance de la Confédération, l'article 266 protège dans une large mesure notre indépendance. Suivant la jurisprudence de la cour pénale fédérale, le code ne réprime pas seulement les actes tendant à amener l'incorporation de la Suisse à un Etat étranger ; il punit aussi ceux qui tendent à provoquer, de la part d'une autorité étrangère, d'un parti étranger ou d'un organisme analogue de l'étranger, une i-m-miTrtion de nature à porter atteinte au droit de l'Etat de régler librement ses affaires intérieures, par exemple par une modification apportée à la constitution contrairement à la volonté du pays. La cour pénale a en outre jugé que la loi punit non seulement l'atteinte à l'indépendance, mais aussi la menace dirigée contre l'indépendance, à condition qu'il s'agisse d'un danger imminent. Les actes préparatoires sont, si cette condition est remplie, également punissables (ATT 70 IV 140; 73 IV 100). Cependant, l'article 266 n'est pas applicable lorsque la condition du danger imminent n'est pas remplie ou s'il est prouvé que les rapports noués avec l'étranger ne sont pas dirigés contre l'indépendance (considérée du point de vue externe ou interne), mais menacent d'une façon générale la sécurité intérieure ou extérieure du pays. Cette disposition n'est en particulier pas applicable à la médisance, à moins qu'elle ne tende à amener l'étranger à prendre une mesure portant atteinte à notre indépendance. C'est pourquoi l'article 266 doit être suivi d'un article 266 bis. Il s'agit là cependant d'une disposition spéciale, qui ne sera applicable que lorsque les éléments constitutifs de la trahison ne seront pas réunis. Elle ne tend aucunement à affaiblir la disposition de l'article 266.

Comme le chef du département de justice et police l'a
exposé au Conseil national lors de la discussion de notre arrêté du 29 octobre 1948 (BS Conseil national 1948, 749), il importe de pouvoir étouffer autant que possible « dans l'oeuf » les menées destinées à préparer une entreprise de l'étranger contre l'existence de notre Etat. La commission d'experts et les commissions des pouvoirs extraordinaires (lorsqu'elles furent appelées à donner leur avis sur l'article 2 de notre arrêté) se sont efforcées de rédiger la disposition dans des termes qui ne puissent s'appliquer à une collaboration licite avec l'étranger. Dans les deux chambres, on a relevé que la disposition ne saurait s'appliquer à celui qui a simplement marqué sa sympathie pour l'Etat étranger ou pour un parti ou autre organisme de l'étranger, ni à celui qui a simplement fait sienne une critique de l'étranger à l'égard de la Suisse.

Le texte du projet tient largement compte des craintes exprimées au

1244 Conseil national au sujet de l'article 2 (cf. procès-verbal de la commission d'experts II, 11, 16 à 21, 37 à 42; III, 10 à 12, 34 à 36; IV, 5, 6, 48; BS Conseil national 1948, 737, 738, 746, Conseil des Etats 1949, 5).

Le premier alinéa appelle la remarque que voici: La définition du but illicite des actes indiqués dans les deux alinéas suivants a été modifiée par rapport à l'article 2 de notre arrêté. Il n'est plus entendu que les entreprises ou menées de l'étranger doivent être dirigées contre les intérêts politiques.

Il faut désormais qu'elles soient dirigées contre la sécurité de la Suisse, ce qui signifie aussi bien la sécurité extérieure que la sécurité intérieure.

Le terme entreprises ou menées politiques de l'étranger contre la sécurité de la Suisse s'applique aussi aux menaces contre l'indépendance qui ne tombent pas sous le coup de l'article 266 (pour la notion de la sécurité intérieure et extérieure, voir Burckhardt, Kommentar, p. 630).

Au sujet du deuxième alinéa, il y a lieu de relever ce qui suit: Après les expériences faites avec les groupements nationaux-socialistes suisses en Allemagne, il a paru indiqué de remplacer les mots « autres organismes de l'étranger » par « autres organismes à l'étranger ». On a ainsi tenu compte d'une critique exprimée au Conseil national (BS Conseil national 1948, 738, 746, 750). Le terme « partis étrangers » ou « autres organismes à l'étranger » s'applique aussi aux associations internationales.

La disposition du troisième alinéa, qui vise la propagation de faux bruits tendant à mettre en danger la sûreté du pays, s'inspire de l'article 2, 1er alinéa, de notre arrêté du 27 février 1945/7 mars 1947 restreignant les dispositions édictées en vue de protéger l'ordre constitutionnel, qui avait la teneur suivante : « Celui qui, publiquement, aura lancé ou propagé une information inexacte, ou de nature à déformer des faits, tendant à mettre en danger la sûreté intérieure ou extérieure de la Confédération, en particulier à soutenir les intérêts de l'étranger au préjudice de la Suisse.. » Dans la commission du Conseil national chargée de traiter le rapport du Conseil fédéral sur le régime de la presse en Suisse avant et pendant la période de guerre de 1939 à 1945,1e voeu avait été exprimé de voir insérer dans la future législation sur la presse une
disposition réprimant la propagation intentionnelle de faux bruits (p. 48 du procès-verbal de la commission). Nous considérâmes qu'il n'était pas nécessaire d'insérer dans le code pénal une disposition sur les faux bruits, étant donné que les informations inexactes ou tendancieuses n'ont pas un grand effet en temps normal. En revanche, les informations inexactes doivent être punissables également en temps ordinaire si elles s'adressent à l'étranger. Cette forme de médisance constitue en définitive une atteinte à la sécurité du pays.

Dans un premier avant-projet, les fausses assertions de cette espèce constituaient un délit particulier, prévu par l'article 266 bis. La commission d'experts jugea préférable de définir dans le 1er alinéa l'élément de l'intention conjointement pour l'entrée en rapports avec l'étranger et pour les

1245 fausses assertions. Mais la preuve de cette intention serait souvent difficile, précisément pour les fausses assertions; Après avoir ainsi défini l'élément de l'intention, la commission estima qu'il n'était plus indiqué de limiter cette disposition aux assertions inexactes faites publiquement et de nature à déformer des faits (procès-verbal II, 11, 14, 16 à 22, 37 à 42; III, 10 à 12, 34 à 36; IV, 5, 6, 48, 49).

4. La nouvelle rédaction de l'article 272, 1er alinéa, élargit la notion pénale du service de renseignements politiques. La pratique a prouvé que les termes actuels (renseignements relatifs à l'activité politique de «personnes ou d'associations politiques ») étaient trop étroits. H y avait en particulier doute sur la question de savoir si la disposition était également applicable aux renseignements concernant les opinions politiques d'une personne, la race d'une personne, l'activité d'autorités ou de fonctionnaires, ainsi qu'aux informations sur les tendances politiques de la population ou les opinions politiques de certains milieux. La commission d'experts (procès-verbal II, 32, 33; III, 12 à 15; IV, 6) recommanda une définition plus large, que nous tenons pour absolument nécessaire étant donnée l'activité accrue exercée par ces agents. La nouvelle disposition permettra de punir tout service de renseignements pratiqué au profit d'un Etat étranger, d'un parti étranger ou d'un autre organisme de l'étranger contre la Suisse, ses ressortissants ou habitants ou organismes. Le service de renseignements pour un organisme international sera également punissable.

Se fondant sur les mots « au préjudice de », des tribunaux de première instance ont considéré que le service de renseignements devait avoir causé un préjudice ou que le préjudice devait au moins être très probable. Par ce terme, le code n'entend cependant qu'indiquer contre qui le service de renseignements doit être dirigé : il doit s'agir d'un service de renseignements dirigé contre la Suisse (ou ses ressortissants, etc.), par opposition au service de renseignements dirigé contre un Etat étranger (art. 301). Comme les juridictions supérieures des cantons interprètent la disposition dans ce sens, on peut renoncer à modifier le texte légal.

5. Le complément apporté à l'article 274 doit permettre de prononcer une peine de réclusion
dans les cas graves de services de renseignements militaires, comme cela était prévu, pour le temps de service actif, par l'article 1er, dernier alinéa, de notre arrêté du 4 août 1942 instituant des dispositions pénales et de procédure pour assurer la défense nationale et la sécurité de la Confédération et comme cela est prévu aux articles 272, cbiffre 2, et 273, 3e alinéa, du code pénal pour les services de renseignements politiques et économiques. H y a des cas graves d'espionnage militaire qui ne constituent pas une violation de secrets militaires et ne peuvent par conséquent entraîner l'application de la peine sévère prévue par l'article 86 du code pénal militaire. Cette aggravation de la peine répond

1246 à un voeu exprimé dans le public et dans la requête du Conseil d'Etat du canton de Vaud (procès-verbal de la commission d'experts I, 14; III, 16).

6. La troisième partie du titre treizième (crimes ou délits contre l'Etat et la défense nationale) n'est constituée aujourd'hui que par une disposition visant les groupements illicites (art. 275). Pour cette partie, qui portera désormais le titre « Mise en danger de l'ordre constitutionnel », le projet propose trois dispositions pénales : un article 275 nouveau (atteinte à l'ordre constitutionnel), un article 275 6ïs (propagande subversive) et un article 215ter (groupements illicites).

Le nouvel article 275 reprend mot pour mot les termes de l'article 5 de notre arrêté du 29 octobre 1948, lequel s'inspire de l'article 1er, 1er alinéa, de l'arrêté du 27 février 1945/7 mars 1947. Ce dernier article avait la teneur suivante : « Celui qui aura commis un acte tendant à modifier ou à mettre en danger d'une manière illicite l'ordre fondé sur la constitution de la Confédération ou d'un canton ... ». Notre intention première avait été de renoncer à reprendre la disposition contenue dans l'arrêté du 29 octobre 1948, pensant pouvoir la réserver pour un futur arrêté fondé sur le droit de nécessité, conformément à l'avis exprimé lors de la deuxième session de la commission d'experts (procès-verbal II, 22 à 27) et dans la doctrine. Les méthodes appliquées lors de la révolution de février en Tchécoslovaquie et leur approbation par des milieux d'extrême-gauche de notre pays nous engagèrent cependant à introduire dans notre projet les dispositions de l'arrêté du 29 octobre 1948 qui répriment les atteintes à l'ordre constitutionnel (art. 5) et la propagande subversive (art. 6). Le projet tient ainsi compte de ce voeu exprimé dans le public et aux chambres : voir renforcer la protection de l'Etat, mais aussi abroger, simultanément, les dispositions fondées sur le droit de nécessité. Dans sa troisième session, la commission d'experts est revenue sur sa décision et a adopté à l'unanimité l'article 275 figurant dans notre projet (procès-verbal III, 17 à 19).

Les articles 265 et 275 actuels ne sont pas une arme suffisante pour lutter contre les nouvelles formes de révolution et les actes préparatoires.

Le code pénal présente ce défaut de ne réprimer les atteintes à
l'ordre constitutionnel que si elles sont commises par la violence et de ne permettre que dans une mesure restreinte la poursuite des actes préparatoires de la haute trahison. La nouvelle disposition devait être rédigée avec la plus grande prudence. Si notre peuple désire un renforcement de la protection de l'Etat, il a, en revanche, une forte aversion pour les dispositions pénales qui lui paraissent de nature a restreindre les droits individuels. La jurisprudence à laquelle a donné lieu l'article 5 de l'arrêté du 29 octobre 1948 montre que le nouvel article 275 ne met en péril aucun intérêt méritant protection. La nouvelle disposition ne crée pas la notion du délit d'opinion.

Elle prévoit une infraction spéciale, et n'étend pas la notion de la haute trahison consacrée par l'article 265, ce que le Conseil national a déjà

1247 rejeté lors des débats relatifs au code pénal. L'article 265 nouveau tend à protéger l'ordre constitutionnel, ce qui signifia nos institutions politiques, notre régime libéral et démocratique et le fonctionnement normal de nos institutions. L'atteinte, aux termes de la disposition légale, est constituée par le fait de troubler ou de modifier d'une manière illicite l'ordre constitutionnel. La notion de la mise en péril, contenue dans l'arrêté de 1945/1947, n'a pas été conservée. L'atteinte doit donc être commise par des voies illégales ou des moyens illégaux. Les actes préparatoires sont déjà punissables. Peu importe à cet égard que l'atteinte doive se produire dans un avenir rapproché ou éloigné, par ou sans la violence. Une disposition ainsi rédigée permet de lutter contre la révolution « froide » se manifestant sous ses aspects les plus dangereux. Nous songeons notamment à la formation et à l'activité de comités d'action révolutionnaires, à l'élaboration de plans pour un renversement, à la distribution d'ordres, à la constitution de fonds, à l'accumulation d'armes et autre matériel, aux pressions exercées sur les autorités par des moyens illégaux, tels que le sabotage, les grèves « spontanées ». Notre projet diffère de certains arrêtés extraordinaires adoptés pendant la guerre et de lois étrangères par le fait qu'il ne punit par la simple activité d'associations politiques d'extrémistes. En temps normal, la lutte contre les dangers de cette nature doit être menée par les citoyens eux-mêmes, avec les armes de l'esprit.

Lors des délibérations du Conseil national, la formule générale adoptée pour définir le délit a suscité des critiques (BS Conseil national 1948, 738).

Or une énumération des diverses formes d'atteinte serait forcément incomplète, étant donné que les mouvements extrémistes trouveront toujours de nouveaux moyens pour miner les institutions démocratiques.

Considérant le rôle que joue à l'heure actuelle une propagande tendant à un renversement de l'ordre constitutionnel, nous tenons pour indiqué d'insérer à Y article 275 bis la disposition qui, dans l'arrêté en vigueur, vise la propagande, subversive (art. 6). Nous répondons ainsi à un voeu de la commission d'experts (procès-verbal II, 27 à 30, 42 à 45). A noter qu'une telle propagande ne sera punissable que si elle tend à
troubler ou à modifier d'une manière illicite l'ordre fondé sur la constitution. Particulièrement importante est la disposition du deuxième alinéa, qui vise celui qui aura favorisé la propagande émanant de l'étranger. Des dispositions plus rigoureuses, d'ordre administratif, contre les écrits servant à une propagande subversive sont réservées (cf. ACF du 29 décembre 1948 visant la propagande subversive. Pour la notion de la propagande, voir ATP 68 IV 145).

L'article 275ieT correspond à l'article 275 actuel, avec cette différence qu'il déclare aussi illicites les groupements qui visent à accomplir des actes réprimés par les articles 266bis, 275 (nouveau) et 2T5bis.

7. Les articles 285 et 286 de notre projet mentionnent expressément, outre les autorités et les fonctionnaires, les membres des autorités. La nou-

1248 velie rédaction permet de biffer, à l'article 341, lettre b, le renvoi à l'article 285. Cette modification mettra fin à une controverse à laquelle avait donné lieu, dans la pratique, la question de savoir si les cas de violence contre un membre d'une autorité fédérale ressortissent aux assises fédérales. En mentionnant les membres des autorités fédérales à l'article 285, on fait ressortir que la compétence des assises fédérales pour juger les cas de révolte ou de violence contre les autorités fédérales est, selon les termes de l'article 341, lettre 6, limitée aux actes dirigés contre l'autorité elle-même.

Dans 1'aflFaire de Steinen, la cour pénale fédérale a déjà constaté que les cas de violence et de menace contre des fonctionnaires de la Confédération ne relèvent pas de la juridiction des assises fédérales, mais doivent être jugés par la cour pénale fédérale (ATF 70 IV 213 s.). La même règle vaudra, à l'avenir, pour les attaques dirigées contre des membres d'une autorité fédérale. En supprimant la mention de l'article 285, on permet en outre aux autorités de décider librement dans chaque cas, sans être liées par la définition de l'article 285, s'il y a un acte de violence au sens de la disposition constitutionnelle. Ainsi les cas moins graves, tels que ceux de voies de fait, ne devront plus être déférés aux assises fédérales.

Les deux innovations permettront de ne pas mettre en branle cet appareil coûteux et compliqué. L'article 286 a été adapté à la nouvelle teneur de l'article 285.

8. "L'article 297 relatif aux outrages concernant la Société des Nations est devenu sans objet depuis que cette institution a été dissoute. Il ne peut cependant pas être simplement abrogé ; comme la Suisse est de plus en plus le siège d'organisations interétatiques ou le lieu de réunion des assemblées de ces organisations ou de conférences diplomatiques, la disposition doit être adaptée à la situation nouvelle. Notre pays a tout intérêt à ce que ses rapports avec d'autres Etats ou avec des organisations internationales ne soient pas troublés par des outrages à leurs représentants (calomnie, diffamation ou injure). Les articles 296 et 297 revisés doivent permettre de réprimer de telles atteintes, si elles sont accomplies en territoire suisse; elles seront dans tous les cas poursuivies d'office et les peines
encourues seront plus sévères que celle des délits contre l'honneur de personnes privées. Il n'est pas nécessaire de nous fonder à cet effet sur l'article 105 de la charte des Nations Unies --· à laquelle la Suisse n'a pas adhéré -- qui, comme l'article VII du pacte de la Société des Nations, dispose que l'organisation et ses agents, de même que les représentants des Etats membres, jouissent des privilèges et immunités diplomatiques, ce qui implique une protection pénale renforcée (cf. jugement des assises fédérales en la cause Justh du 25 janvier 1927, Revue pénale suisse, 40 p, 179 et les discussions du Conseil national à propos de l'article 296, BS Conseil national 1929, tirage spécial, p. 489). Les articles 296 et 297 ne protègent pas seulement les institutions des Nations Unies, mais aussi et d'une manière générale les délégués à des organisations interétatiques et à des conférences

1249 diplomatiques, ainsi que les représentants de ces organisations. Mais la protection renforcée ne sera applicable que si ces institutions ou leurs organisations ont leur siège en Suisse ou si leurs assemblées ou les conférences diplomatiques se réunissent en Suisse. Si le siège ou le lieu de la réunion n'est pas en Suisse ou si la conférence n'a pas un caractère diplomatique, les dispositions du droit commun seront seules applicables.

La protection renforcée que l'article 296 a assurée jusqu'ici aux représentants d'Etats étrangers est étendue aux délégués officiels des Etats participant à une conférence diplomatique siégeant en Suisse et à leurs représentants officiels à une institution interétatique ou à son organisation établie ou siégeant en Suisse. Parmi ces organisations, nous entendons en particulier les services que les diverses institutions interétatiques ayant leur siège à l'étranger ont établies en Suisse. Cependant, seuls les délégués ayant un caractère officiel, c'est-à-dire munis du mandat de représenter, bénéficient de la protection spéciale de l'article 296.

ïi'article 297 prévoit, dans son nouveau texte, l'outrage à une institution interétatique elle-même dans la personne d'un de ses représentants officiels. Ici aussi, l'acte ne sera punissable que si l'institution (ou l'une de ses organisations) est établie ou siège en Suisse. Est également visée l'atteinte à l'honneur du représentant officiel d'une organisation établie à l'étranger qui exerce temporairement une activité officielle en Suisse.

La commission d'experts a discuté d'une manière approfondie la nouvelle rédaction des articles 296 et 297 (procès-verbal II, 34 à 37, 45 à 47; III, 23 à 26, 37; IV, 11, 13, 48 à 50). Un échange de vues eut lieu entre le département de justice et police et le département politique, qui, sur certains points, aurait désiré aller plus loin que le projet.

Nous avons profité de la modification des articles 296 et 297 pour revoir les dispositions de l'article 302 relatives aux conditions de la poursuite. Conformément aux recommandations de la commission d'experts (procès-verbal III, 32 à 34), nous avons renoncé à exiger que la réciprocité soit assurée. La poursuite répond à l'intérêt de notre pays et il vaut mieux par conséquent qu'eUe ne dépende pas d'une législation étrangère. Il a toujours
été difficile de prouver que le droit étranger contient une disposition correspondant à celle de notre code pénal (cf. le jugement rendu en la cause Justh).

Nous croyons qu'on pourrait rarement invoquer pour la réciprocité une disposition analogue à celle du nouvel article 297 relatif à la protection d'une organisation internationale. D'accord avec la grande majorité des membres de la commission d'experts (cf. procès-verbal III, 33, 34; IV, 15, 16), nous avons maintenu la règle de la poursuite ordonnée sur requête. Une poursuite pour outrage à un Etat étranger ne doit pouvoir être ouverte qu'avec l'assentiment de cet Etat; il lui incombe donc de présenter une requête. Si c'est une organisation interétatique qui a été offensée, la requête Feuille fédérale. 101e année. Vol. I.

87

1250 sera présentée par l'un de aes organes; cela est expressément dit à l'article 302, 2e alinéa, revisé.

La commission d'experts a encore examiné si, au titre seizième, il y a lieu d'insérer une disposition réprimant le fait de favoriser des hostilités et de tenir ainsi compte de la résolution votée en juillet 1947 à Genève par le congrès de l'association internationale de droit pénal. Cette résolution demandait, en particulier, que la législation interne des Etats réprime aussi la propagande tendant à des guerres d'agression et le fait de favoriser l'Etat que les autorités internationales compétentes ont désigné comme agresseur. Dans sa dernière session, la commission a cependant décidé de renoncer à une disposition de cette nature; elle considère que les articles 300 du code pénal suisse et 92 du code pénal militaire sont suffisants et que les dispositions complémentaires de l'ordonnance sur le maintien de la neutralité ou une disposition dans le sens de la résolution susdite ne seraient pas dans l'intérêt de la neutralité suisse et pourraient mettre en péril la liberté de la presse (procès-verbaux III, 27 à 30; IV, 13 à 15). Nous sommes du même avis.

9. En ce qui concerne la modification de l'article 341, lettre b, nous avons donné les explications nécessaires à propos de l'article 285 (voir ci-dessus · chiffre 7).

DEUXIÈME PABTIE LES DÉLITS CONTRE L'HONNEUR Au début de ce message, nous avons constaté qu'il est nécessaire d'englober dans la revision partielle deux articles relatifs aux délits contre l'honneur.

1. Alors que les dispositions concernant la calomnie (art. 174) et l'injure (art. 177) ont donné satisfaction, celle qui a trait à la diffamation (art.

173) a provoqué de vives critiques.

a. L'article 151 du projet de code pénal du 23 juillet 1918 prévoyait comme éléments constitutifs de la diffamation le fait d'avoir articulé ou propagé les allégations à la légère et d'avoir, contrairement à la vérité, accusé une personne ou jeté le soupçon sur elle. Le chiffre 1 punissait le fait d'avoir, à la légère et contrairement à la vérité, en s'adressant à un tiers, accusé une personne, ou jeté le soupçon sur elle, de tenir une conduite contraire à l'honneur et le fait d'avoir propagé à la légère une pareille accusation ou un pareil soupçon. Le chiffre 2 visait celui qui a articulé ces
allégations, même si elles sont conformes à la vérité, mais sans motif plaus blé et dans le seul dessein de dire du mal d'autrui. Mais cette disposition fut abandonnée au cours des délibérations des conseils législatifs, surtout parce que la preuve de la vérité était prévue au chiffre 2 de l'artic'e 173 actuel (cf. BS Conseil national 1921, p. 117, 154; Conseil des Etats 1931,

125X p. 177). Le texte de l'article 173 issu des délibérations parlementaires n'érige pas la légèreté et la fausseté des allégations en éléments constitutifs du délit. L'auteur est donc punissable s'il a allégué ou propagé intentionnellement des imputations contraires à l'honneur. II peut cependant, aux termes du chiffre 2, être libéré de toute peine, s'il prouve que ses allégations sont conformes à la vérité. Mais il ne sera pas admis à faire cette preuve si elle n'est pas dans l'intérêt public, si ses allégations touchent à la vie privée ou à la vie de famille de l'offensé et s'il les a articulées principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui. D'après la loi en vigueur, il est indifférent que les allégations aient été articulées à la légère ou de bonne foi, la distinction établie par le projet de 1918 n'ayant pas été reprise dans le code.

Le texte issu des délibérations des chambres n'a pas eu de bons résultats pratiques. On considère en effet comme trop sévère et contraire à nos moeurs une disposition qui punit même celui qui n'a pas agi à la légère et qui a tenu de bonne foi pour vraies les allégations attentatoires à l'honneur.

En outre, la limitation de la preuve de la vérité conduit souvent à des injustices.

Dans l'arrêt bien connu rendu le 3 mars 1944 en la cause Pfändler contre Weber et coaccusés (ATF 70 IV 24 s.), la cour de cassation du Tribunal fédéral a constaté que la diffamation commise par la voie de la presse ne peut être réprimée que conformément à l'article 173 du code pénal et qu'il y a lieu d'abandonner la jurisprudence antérieure fondée sur l'article 55 de la constitution, jurisprudence selon laquelle aucune peine ne peut être infligée si la véracité des accusations est prouvée ou si l'auteur, après un examen sérieux, pouvait les tenir de bonne foi pour vraies. Le Tribunal fédéral considéra que, contrairement à l'article 151 du projet de 1918 et à certaines dispositions des anciens codes pénaux cantonaux, l'article 173 n'exige plus que l'auteur de l'accusation ou celui qui la propage ait agi par irréflexion ou par légèreté, toute personne qui a intentionnellement allégué ou propagé un fait contraire à l'honneur étant punissable. De plus, il a admis que seul peut prétendre agir dans l'intérêt public celui qui poursuit un but licite en usant d'un moyen approprié. La
presse ne saurait prétendre que la propagation d'allégations contraires à la vérité et propres à porter atteinte à la considération d'autrui soit le bon moyen d'accomplir sa tâche, même si ces allégations sont propagées de bonne foi.

Admettre sans restriction que la presse défend des intérêts légitimes reviendrait à réintroduire largement en ce qui la concerne, par une voie détournée, l'élément de la légèreté qu'on avait voulu abandonner. La cour de cassation déclara expressément dans cet arrêt et dans d'autres rendus par la suite que l'article 55 de la constitution ne crée pas un régime exceptionnel pour la presse (ATF 70 IV, loi ; 73 IV, 33).

Cette nouvelle jurisprudence suscita de sérieuses critiques, en particulier dans les milieux de la presse. Cette dernière craignait d'être entravée

1252 dans l'accomplissement de sa mission de contrôle des affaires publiques, mission particulièrement importante en démocratie; elle pensait qu'elle serait désormais contrainte d'établir d'avance la preuve de la vérité, ce qui ne lui serait pas toujours possible. Plusieurs pénalistes distingués étudièrent la situation créée par ce renversement de la jurisprudence, signalèrent lea inconvénients du texte actuel de l'article 173 et firent des propositions en vue d'une revision (cf. Farbstein, Pressefreiheit und üble Nachrede, 1944; Logoz, A propos des délits contre l'honneur, Revue pénale suisse -- numéro dédié au professeur Hafter pour son 70e anniversaire -- tome 61, p. 83 s. ; Hafter, Ueble Nachrede, paru dans la Revue suisse de jurisprudence, 43e année, p. 265 s.). Lors de son assemblée annuelle du 4 au 6 septembre 1948, à Soleure, la société suisse des juristes discuta le problème de la réforme du droit de la presse. MM. M. Feldmann, député au Conseil national, et G, Jaccottet, rédacteur, y présentèrent des rapports très fouillés sur toutes les questions relatives à ce problème, en particulier sur la revision de l'article 55 de la constitution et une nouvelle rédaction de l'article 173 du code pénal, et ils lui soumirent des propositions (cf. Zeitschrift für Schweiz. Hecht, 1948, p. las. et 123a s. et les actes de la société suisse des juristes parues dans la même revue, p. 569 a a. ). Les propositions faites par les auteurs susdits et dans ces deux rapports tendent principalement à ne plus limiter la preuve de la vérité, à prévoir que l'inculpé peut se libérer en prouvant qu'il n'a pas agi à la légère et qu'il était de bonne foi, et enfin à mieux protéger les intérêts de l'offensé. A l'assemblée de la société suisse des juristes, les avis touchant à la revision de l'article 55 de la constitution divergèrent, mais les propositions des rapporteurs pour une nouvelle rédaction de l'article 173 du code pénal furent approuvées en principe. On s'accorda à constater que les règles strictes actuelles ne pouvaient pas être assouplies par la pratique, mais qu'il fallait une revision de l'article 173 et que la nouvelle disposition devait être valable à titre général et ne pas créer un privilège pour la presse.

Se fondant sur les rapports présentés à la société suisse des juristes et sur les délibérations
de cette société, la commission mixte de politique de presse (constituée par l'association suisse des éditeurs de journaux et l'association de la presse suisse) remit au département de justice et police, le 10 décembre 1948, une proposition de nouvelle rédaction de l'article 173 du code pénal. Le comité central de l'association de la presse suisse approuva cette proposition, qui fut également acceptée, avec de légers changements, par la commission d'experts dans sa session des 27 et 28 janvier 1949 (procès-verbal IV, 17 à 23, 25 à 27).

b. Le projet que nous vous soumettons aujourd'hui a pour seul objet la revision de l'article 173 du code pénal. Les autres problèmes concernant le droit de la presse, notamment la revision de l'article 05 de la constitution et la vérité de l'information (obligation de rectifier), seront traités dans le rapport que nous vous présenterons au sujet de l'initiative « pour la

1253 laberte de la presse », lancée par le parti socialiste suisse. La commission mixte et la commission d'experts sont d'avis que l'obligation de rectifier ne doit pas être traitée en liaison avec la revision du code pénal.

Le nouveau texte de l'article 173 s'inspire largement de la proposition de la commission mixte, dans la forme que lui a donnée la commission d'experts. Il ne reprend pas l'article 151 du projet de code pénal de 1918, mais apporte seulement à la disposition en vigueur les améliorations jugées nécessaires.

Le chiffre. 1 reproduit sans changement la disposition en vigueur. Faisant nôtre l'avis de MM. Logoz et Jaccottet, nous avons renoncé à faire de la fausseté des allégations diffamatoires et de la légèreté avec laquelle elles sont articulées des éléments constitutifs du délit. Il est plus rationnel de ne pas imposer au plaignant ou à l'accusateur la preuve de la fausseté ou de la légèreté, mais d'accorder expressément à l'inculpé le droit d'administrer la preuve libératoire (chiffre 2). De cette façon la question du fardeau de la preuve est clairement résolue.

Les principales innovations sont contenues au chiffre 2. Le Ier alinéa donne à l'inculpé le droit de prouver la vérité de ses allégations et celui de prouver qu'il ne les a pas articulées à la légère. Adoptant la manière de voir exprimée dans la doctrine et par les rapporteurs de la société suisse des juristes, nous avons supprimé la restriction apportée à la preuve de la vérité par le chiffre 2 de l'article 173 actuel. Une restriction n'est plus prévue que pour le cas de la diffamation intentionnelle (chiffre 4). Jusqu'à présent, la preuve de la vérité n'était pas admise pour les allégations touchant à la vie privée ou à la vie de famille, ce qui occasionnait des difficultés extraordinaires au juge appelé à statuer sur l'admissibilité de la preuve. On constata en outre que cette défense pouvait être aussi préjudiciable à l'offensé qui a souvent intérêt à ce que la fausseté des allégations diffamatoires soit constatée.

En autorisant l'inculpé à apporter la preuve libératoire qu'il avait des motifs sérieux de tenir de bonne foi les allégations pour vraies, le projet prend aussi en considération les besoins particuliers de la presse. Désormais, le juge ne pourra plus condamner lorsque la personne tenue pour responsable
en vertu des dispositions sur la presse prouvera qu'elle a vérifié les faits avec le soin nécessaire. Les organes centraux des associations de la presse ont déclaré accepter cette solution.

Le second alinéa protège les intérêts de l'offensé. Lorsque, l'inculpé étant acquitté uniquement en raison de sa bonne foi ou l'instruction suspendue pour ce motif, il est établi que les allégations étaient fausses ou que la preuve de leur vérité n'a pas été apportée, il ne faut pas que l'offensé souffre plus longtemps des suites de ces allégations inexactes. La loi lui assure une satisfaction en prévoyant que le jugement ou un autre document constatera que l'accusation ou les soupçons sont sans fondement ou man-

1254 quent de preuvea. Une déclaration en ce sena faite par l'auteur dans une transaction aura la même valeur.

Le chiffre 3 donne une portée plus large à la disposition relative aux effets de la rétractation d'allégations diffamatoires (art. 173, eh. 3), en prévoyant que le juge pourra atténuer la peine ou exempter le délinquant de toute peine non seulement lorsque celui-ci se sera rétracté devant lui, mais encore lorsqu'il se sera rétracté sitôt après avoir reçu les explications nécessaires. La disposition tend à protéger l'offensé d'un tort plus grand en encourageant une prompte rectification.

Le chiffre 4, conformément aux propositions de la commission mixte de politique de presse et de la commission d'experts, restreint la preuve de la vérité dans les cas de diffamation intentionnelle. Celui qui, dans le dessein de médire, a articulé ou propagé sans motif plausible des allégations portant atteinte à l'honneur ne doit, en principe, pas avoir la possibilité de prouver la vérité de ses allégations et de causer un tort plus grand à l'offensé en invoquant des affaires personnelles. La preuve que les allégations sont conformes à la vérité ne sera admise qu'avec le consentement de l'offensé. Contrairement au droit en vigueur, l'autorisation de faire la preuve pourra être refusée même si l'intérêt public ne s'y oppose pas. La nouvelle disposition n'exige pas non plus que les allégations touchent à la vie privée ou à la vie de famille S'inspirant des propositions de MM. Logoz, Hafter et Jaccottet, M.

Leuch a recommandé, devant la commission d'experts, de reprendre le chiffre 2 de l'article 151 du projet de code pénal de 1918 et de prévoir une disposition spéciale envers celui qui, conformément à la vérité mais sans motif plausible et dans le seul dessein de dire du mal d'autrui, aura accusé ou rendu suspecte une personne de faits contraires à l'honneur ou aura propagé une pareille accusation ou un tel soupçon. Le département de justice et police aurait pu faire sienne cette proposition, mais elle fut rejetée à une forte majorité.

2. Le nouvel article 177bis règle une question controversée dans la pratique: celle de savoir si les autorités et les groupements de personnes peuvent être atteints dans leur honneur. La cour de cassation du Tribunal fédéral a reconnu que le code pénal vise l'atteinte à
l'honneur non seulement des personnes physiques, mais aussi des personnes morales. Se fondant sur la teneur et la genèse du code, elle a, en revanche, refusé d'admettre que les autorités puissent être atteintes dans leur honneur (ATP 69, IV, 82 s. ; 71IV 36 s. ; Logoz ibid. 84 s.). La jurisprudence n'a pas résolu jusqu'à présent l'autre question de savoir si, à côté des personnes morales, les groupements de personnes, c'est-à-dire les collectivités organisées, peuvent être atteintes dans leur honneur et par conséquent déposer une plainte pénale. En cas d'atteinte à l'honneur d'une autorité, il faut par conséquent, d'après la jurisprudence, que chacun de ses membres porte plainte comme

1255 un particulier et que, suivant la procédure cantonale applicable, il intervienne en qualité de plaignant ou d'accusateur privé ou introduise action conformément à la procédure civile. L'atteinte à l'honneur est cependant souvent dirigée contre l'autorité comme telle et non contre la personne de l'un de ses membres. Tel est en particu ier le cas lorsqu'elle tend à ébranler la confiance du peuple dans ses autorités.

L'innovation que nous proposons a pour seul but de permettre aux autorités, aux personnes morales et aux collectivités de personnes organisées de porter plainte comme telles, lorsqu'elles se décident à faire poursuivre et condamner judiciairement l'auteur d'une atteinte à leur honneur. Elle correspond à l'opinion des pénalistes (cf. en particulier Hafter, Lehrbuch, des Schweiz. Strafreckts, vol. 2, lre partie, p. 185 s ; Thormann-v. Overbeck, Kommentar, remarque 1 ad art, 173 s.; Gerwig, Ehrverletzung gegenüber juristischen Personen im Schweiz. Strafgesetzbuch). A noter que l'article 177ÖIS ne réprime pas spécialement l'atteinte à l'honneur attaché à a fonction publique, contrairement à certaines lois cantonales et à l'article 2 de notre arrêté du 27 février 1945 instituant des mesures pour protéger l'ordre constitutionnel qu'une minorité de la commission d'experts et un gouvernement cantonal auraient voulu reprendre (cf. Stampai, Ausserordentlicher Staatsschutz, Revue pénale suisse, 61, p. 152 à 154, 162, 163).

Nous entendons tenir compte des craintes exprimées envers une telle disposition lors des débats sur le code pénal et à propos de certains arrêtés concernant la protect on de l'Etat.

3. Nous avons également renoncé à insérer dans le présent projet une disposition prévoyant la poursuite d'onice, avec ou sans autorisation préalable, des atteintes à l'honneur d'une autorité, d'un membre d'une autorité ou d'un fonctionnaire (cf. art. 365, 1er al., CP et ATF 69 IV 91 s.).

En revanche, nous jugeons indiqué de compléter l'article 8 de la loi du 26 mars 1934 sur les garanties politiques et de police en faveur de la Confédération par une disposition selon laquelle les atteintes à l'honneur d'autorités de la Confédération, de membres de ces autorités ou des personnes spécialement désignées (chancelier de la Confédération, procureur général de la Confédération, juges d'instruction
fédéraux ou suppléants de ces personnes, représentants et commissaires fédéraux) seront poursuivies d'office après autorisation spéciale lorsque ces atteintes se rapportent à l'exercice des fonctions. L'article 8 susmentionné prévoit que ces délits ressortissent à la juridiction fédérale, c'est-à-dire qu'ils sont poursuivis d'office, mais sur demande de l'offensé, conformément à l'article 59 du code pénal fédéral de 1853. Depuis que cette dernière disposition a été abrogée par le nouveau code pénal, cette procédure n'est plus possible, ce qui présente des inconvénients. Les atteintes à l'honneur dont il s'agit ici touchent l'intérêt public. Il ne convient donc pas que les autorités, membres d'autorités et fonctionnaires attaqués soient assimilés dans la procédure aux accusateurs privés (cf. ch. II du projet de loi).

1256 TROISIÈME PARTIE

LES AUTRES DISPOSITIONS DU CODE PÉNAL COMPRISES DANS LA REVISION Noue passerons en revue dans cette troisième partie les amendements proposés pour des articles qui ne concernent ni la protection de l'Etat, ni la diffamation. Ces articles se trouvent presque tous dans le livre premier du code; c'est dire qu'ils se rapportent aux dispositions générales applicables aux crimes, aux délits et aux contraventions. Les propositions de revision portent en effet principalement sur ces dispositions générales.

En revanche, l'énoncé des différentes infractions énumérées dans le livre deuxième (abstraction faite des dispositions sur la protection de l'Etat) n'en est influencé que dans peu d'articles; déjà la commission d'experts s'est montrée très réservée envers les propositions d'amendement concernant la partie spéciale du code.

Des juges pénaux, procureurs généraux et professeurs de droit pénal ont critiqué certaines peines du code, qu'ils estiment inadéquates soit en elles-mêmes, soit par rapport à celles qui sont prévues pour d'autres infractions. Mentionnons en particulier l'article 184 (enlèvement d'une femme inconsciente ou sans défense), dont l'alinéa 2 prévoit, pour l'infraction qualifiée, la réclusion pour dix ans au plus. La peine est ainsi moins sévère que pour l'enlèvement qualifié en général selon l'article 183, 3e alinéa (réclusion sans maximum), alors que la relation devrait plutôt être inverse.

Les peines prévues à l'article 191, chiffre 1er (attentat à la pudeur des enfants), sont souvent jugées trop sévères (surtout le minimum de trois ans de réclusion à l'ai. 2). Aussi nous sommes-nous demandé s'il y a lieu d'étendre la présente revision à la modification de certaines sanctions fixées dans le code. Pour notre part, nous ne vous proposons aucune modification de cet ordre. D'ailleurs, il sera toujours très difficile d'équilibrer parfaitement les peines prévues dans la partie spéciale du code, car les avis peuvent être très divergents dans ce domaine. Nous préférons attendre les propositions qui pourraient être faites au sein des commissions parlementaires ou des chambres elles-mêmes.

Dans notre commentaire des dispositions à reviser, nous suivrons généralement l'ordre numérique des articles, sauf pour certaines dispositions que nous avons groupées en raison de leur connexité.

Internement et hospitalisation Art. 17

Les délinquants irresponsables ou à responsabilité restreinte qui réunissent les conditions posées aux articles 14 et 15 du code pénal doivent être internés ou placés dans un hôpital ou un hospice; l'exécution des peines n'a pas lieu lorsque le délinquant est irresponsable et elle est suspendue

1257 si sa responsabilité est restreinte. Aux termes de l'article 17, l'internement, le traitement ou l'hospitalisation est exécuté par l'autorité administrative cantonale (ch. 1er). Celle-ci y met fin dès que la cause en a disparu et le juge décide ensuite si et dans quelle mesure la peine prononcée contre un délinquant à responsabilité restreinte doit encore être exécutée (ch. 2).

Or, l'expérience a montré que l'autorité devrait disposer de règles plus souples pour mettre fin à l'internement ou à l'hospitalisation et pour préparer la sortie de l'hôpital ou de l'hospice. L'association suisse pour la réforme pénitentiaire et le patronage des détenus libérés a proposé une disposition permettant d'atténuer l'internement ou l'hospitalisation à titre d'essai et sous certaines conditions. Actuellement déjà, on obtient parfois de bons résultats en transférant dans un home le délinquant interné ou hospitalisé, puis en lui assignant un emploi déterminé avant de le libérer définitivement. Nous avons tenu compte de cette proposition en prévoyant une disposition analogue à celle de l'article 38, chiffres 3 et 4, concernant la libération conditionnelle en matière de peines privatives de liberté; l'autorité pourrait ainsi soumettre le libéré à un patronage et lui imposer certaines règles de conduite. La commission d'experts s'est ralliée à l'unanimité à cette solution (cf. procès-verbal IV, 38). Un nouvel alinéa a ainsi été ajouté au chiffre 2 de l'article 17. En ce qui concerne les délinquants à responsabilité restreinte, le juge pourra comme aujourd'hui décider finalement si et dans quelle mesure la peine devra encore être exécutée (ch. 3 du nouveau texte).

Libération conditionnelle Art. 38, 54 et 55

1. Toute une série de propositions ont été faites au sujet de la libération conditionnelle des condamnés à la réclusion ou à l'emprisonnement. Elles se rapportent en premier lieu à la condition générale de la libération selon le chiffre 1er. Le condamné doit avoir subi les deux tiers de sa peine ; ce point n'est pas contesté. Mais le code ajoute qu'en cas de condamnation à l'emprisonnement, trois mois au moins doivent avoir été subis. Ce minimum est jugé insuffisant, en particulier par les directeurs d'établissements pénitentiaires, qui considèrent que la peine privative de liberté ne peut pas exercer d'effet éducatif en trois mois seulement. Presque toutes les propositions tendent à porter à six mois la durée minimum de l'emprisonnement. Plusieurs membres de la commission d'experts se sont cependant opposés à cette prolongation (cf. procès-verbal IV, 40). C'est à raison que l'inconvénient suivant a été signalé: Si la peine d'emprisonnement ne dépasse pas six mois, la libération conditionnelle ne peut pas être prononcée et le condamné ne pourra par conséquent pas non plus bénéficier de l'institution très utile que constitue le patronage pour une période sensiblement plus longue que l'emprisonnement lui-même. On pourrait parer à cet inconvénient en prévoyant la possibilité de soumettre aussi à un patronage les

1258 condamnés libérés définitivement, mais la proposition faite en ce sens a été rejetée (cf. ci-après art. 47). La commission d'experts a admis que la durée de l'emprisonnement subi fût portée à six mois (par 7 voix seulement contre 5), et nous vous soumettons une modification conforme à sa décision.

Nous tenons à mentionner une proposition du département de justice du canton de Baie-Ville tendant à compléter le chiffre 1er de l'article 38 en ce sens que si le délai minimum était porté à six mois, le condamné devrait en avoir subi quatre ou cinq à titre d'exécution de la peine. Cette proposition est liée à la question de savoir si la détention préventive à déduire de la peine privative de liberté conformément à l'article 69 doit être prise en considération dans le calcul du délai minimum. Nous avons admis que tel est bien le cas en principe (arrêté Arrigoni du 29 février 1944 et Keller du 18 décembre 1944, dans le Bulletin de jurisprudence pénale 1944 nos 142 et 1945 n° 8; Genève, commission de libération conditionnelle, dans Semaine judiciaire 1944, p. 192). Certes, ce système a pour effet de réduire en conséquence la période passée dans l'établissement pénitentiaire avant la libération conditionnelle; mais la solution inverse n'est que difficilement conciliable avec les articles 38 et 69 combinés.

2. Si le libéré ne se conduit pas bien jusqu'à l'expiration du délai d'épreuve, il doit être réintégré dans l'établissement (art. 38, ch. 4). Cette disposition est jugée trop stricte. Il y a des cas où la réintégration paraît trop dure, alors qu'un simple avertissement, de nouvelles règles de conduite ou la prolongation du délai d'épreuve pourraient encore avoir de bons résultats. Nous croyons devoir prévoir cette possibilité en ajoutant au chiffre 4 un second alinéa que la commission d'experts a approuvé à l'unanimité.

3. Appuyé par plusieurs autres experts, le regretté professeur Hafter a en outre proposé d'ajouter à l'article 38 un chiffre 6 prévoyant que la direction de l'établissement doit examiner d'office si la libération conditionnelle du condamné peut être prononcée et adresser un rapport à l'autorité compétente. Cette proposition est aussi en rapport avec la question du patronage. Suivant les circonstances, le condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement préfère renoncer à la libération
conditionnelle, afin d'être libéré définitivement après avoir subi sa peine entière et d'échapper ainsi au patronage. Il s'agit de savoir par conséquent si l'on peut lui imposer la libération conditionnelle contre sa volonté. Cette mesure semble être souvent ordonnée précisément en vue du patronage, en sorte qu'à cet égard il serait justifié de ne pas subordonner la libération conditionnelle à une requête du condamné.

Nous hésitons néanmoins à nous rallier à cette solution, avant tout parce que la compétence de la Confédération nous paraît douteuse. II s'agit en effet d'un élément de l'exécution des peines qui incombe aux cantons et peut par conséquent leur être réservé. Les expériences faites

1259 ne permettent d'ailleurs pas d'affirmer à coup sûr que le régime actuel ne donne pas satisfaction. Tous les établissements pénitentiaires tiennent un livre dans lequel est inscrite la date à partir de laquelle chaque condamné pourrait être libéré conditionnellement. S'il présente à ce moment-là une demande formelle de libération, une décision doit être prise. Même lorsque le condamné n'agit pas, l'autorité peut ordonner la libération conditionnelle si elle estime réunies les conditions requises. On ne saurait en tout cas prétendre que cette procédure soit contraire au droit fédéral. Aussi est-il superflu de compléter le code sur ce point. La commission d'experts s'est prononcée dans le même sens à une forte majorité (procès-verbal IV, 42) 4. Dans le même ordre d'idées, il y a lieu enfin de compléter encore deux articles qui règlent les effets de la libération conditionnelle sur les peines accessoires.

"L'article 54 se rapporte à l'interdiction d'exercer une profession, une industrie ou un commerce. L'alinéa 2 prévoit qu'en cas de libération conditionnelle, l'interdiction ne sortira ses effets que si la libération n'est pas devenue définitive et après que le condamné aura subi le reste de la peine privative de liberté. Les expériences faites ont montré que cette réglementation n'est pas toujours satisfaisante et qu'elle gagnerait à être plus souple. Nous vous soumettons un texte conforme à une proposition de M. Eugster, que la commission d'experts a adoptée sans opposition (procès-verbal IV, 46). Il incombera avant tout à l'autorité compétente de décider si et à quelles conditions le condamné libéré conditionnellement pourra de nouveau être autorisé à exercer à titre d'essai sa profession, son industrie ou son commerce. Si .cette autorisation lui est accordée et qu'il se conduise bien jusqu'à l'expiration du délai d'épreuve, l'interdiction n'aura plus de raison d'être. Mais si l'autorisation est refusée, la durée de l'interdiction sera comptée à partir du jour de la libération conditionnelle. Cette nouvelle réglementation entraîne la refonte de l'article 54.

La situation est pareille en ce qui concerne les effets de la libération conditionnelle sur l'expulsion selon l'article 55. Le régime actuel n'est pas non plus satisfaisant sur ce point. Aux termes de l'alinéa 2, le juge peut révoquer
l'expulsion si l'étranger libéré conditionnellement s'est bien conduit pendant le délai d'épreuve. On ne voit pas clairement si cette disposition entend différer l'expulsion en cas de libération conditionnelle ou si elle vise la révocation subséquente de l'expulsion déjà exécutée. Le code devrait préciser qu'en ordonnant la libération conditionnelle, l'autorité compétente doit aussi décider si et à quelle condition l'expulsion est différée à titre d'essai. Lorsque dans ce cas l'étranger libéré conditionnellement s'est bien conduit pendant le délai d'épreuve, l'expulsion ne sera pas non plus exécutée.

1260

Maladie pendant l'exécution de la peine Art. 40

Le code attache de l'importance à l'exécution ininterrompue des peines privatives de liberté (art. 40, 1er al.). Même la maladie du condamné pendant l'exécution de la peine ne doit généralement provoquer aucune interruption. Aux termes de l'article 40, 2e alinéa, la durée d'un séjour dans un hôpital ou un hospice est imputée sur la peine si le condamné n'a pas agi frauduleusement. Mais cette règle, en soi juste et équitable, peut cependant conduire très loin et avoir pour résultat la remise de la plus grande partie de la peine chaque fois qu'il s'agit de maladies graves et prolongées.

Appelés à examiner la question à l'occasion de plusieurs recours, nous avons été amenés à atténuer quelque peu cette conséquence en refusant d'admettre l'imputation de la durée du séjour à l'hôpital ou au sanatorium pour le temps où le patient n'était manifestement pas en état de supporter la détention dans l'établissement pénitentiaire, c'est-à-dire était dans un état tel que la nécessité des soins et de la guérison devait passer avant celle d'exécuter la peine.

Mais l'application de l'article 40, 2e alinéa, est surtout discutable lorsque le transfert dans un hôpital a heu en raison d'une maladie dont le condamné souffrait déjà au moment de son incarcération. La commission d'experts unanime a approuvé une proposition de M. Kellerhals prévoyant que l'imputation n'aura pas lieu dans ce cas (pro ces-verbal IV, 61). Nous avons complété en conséquence dans notre projet le 2e alinéa de l'article 40, non sans nous rendre compte que cette solution pourrait, elle aussi, être trop dure envers les condamnés qui n'ont pas caché la maladie dont ils souffraient avant leur incarcération et dont l'état s'aggrave pendant la détention. On pourrait aussi se borner à prévoir la faculté de ne pas imputer la durée des maladies antérieures à l'incarcération. Quoi qu'il en soit, il demeure acquis que, conformément au principe posé à l'article 1er de l'article 40, la peine devrait être exécutée autant que possible même envers les condamnés malades. Mais dans la mesure où elle l'est, la disposition du 2e alinéa perd alors précisément de sa raison d'être. Il n'est pas facile, lorsqu'il s'agit de maladies graves, de concilier les soins appropriés à l'état du condamné avec les exigences de l'exécution de la peine. Il serait souhaitable que
dans les projets de construction ou de transformation d'établissements, et dans l'exploitation de ceux qui existent, on tînt mieux compte de la situation des condamnés malades.

Sursis conditionnel au paiement de l'amende Art. 41, ch. 1«, al. 1«

1. En permettant de surseoir à l'exécution d'une peine sous certaines conditions, le code pénal a consacré une idée du droit pénal contemporain que plusieurs cantons avaient déjà appliquée depuis les dernières années

1261 du siècle précédent. Le législateur fédéral se devait naturellement de réaliser ce progrès à l'occasion de l'unification du droit pénal. Le principe n'était pas combattu, et son application parut si urgente qu'on n'attendit même pas que le code pénal suisse fût sous toit. En 1927 en effet, le code pénal militaire (art. 32) institua le sursis à l'exécution de la peine; la procédure pénale fédérale de 1934 (art. 335 à 338) l'introduisit à son tour dans le droit commun, à titre de solution transitoire en attendant le code pénal suisse. Le sursis est dès lors appliqué très fréquemment par les tribunaux, conformément aux conditions posées par l'article 41, chiffre 1er.

Si ce problème doit être de nouveau examiné aujourd'hui, c'est parce que les peines dont l'exécution peut être suspendue sont limitées étroitement.

En règle générale, le code prévoit le sursis conditionnel pour les peines d'emprisonnement n'excédant pas un an et pour les arrêts, mais non pour les amendes. Pour ces dernières, le sursis ne peut être prononcé que si l'amende a été convertie en arrêts conformément à l'article 49, chiffre 3.

Envers les adolescents en revanche, l'article 96 permet aussi le sursis conditionnel au paiement de l'amende.

2. Il n'est pas superflu de rappeler l'évolution de cette institution dans notre pays (cf. Hafter: Lehrbuch des Schweiz. Strafrechts, allgemeiner Teil, 2e édit., p. 321). Avant l'unification du droit pénal, le sursis conditionnel au paiement de l'amende existait dans les cantons de Zurich, St-Gall, Tessin, Vaud, Neuchâtel et Genève; les cantons de Berne, Glaris et Soleure l'admettaient au moins en cas de conversion de l'amende en emprisonnement pour cause d'indigence et celui de Bâle-Vule pour toutes les amendes impayées que le juge avait converties en emprisonnement.

La question du sursis conditionnel au paiement de l'amende a donné lieu à une longue controverse aux chambres et dans les commissions parlementaires. Les adversaires du sursis en contestaient la nécessité en alléguant que le code (art. 48, ch. 2) prescrit au juge de fixer l'amende non seulement d'après la culpabilité, mais aussi d'après la situation personnelle du délinquant (revenu et capital, état civil et charges de famille, profession et gain professionnel, âge et état de santé). Le Conseil national adopta la règle du
sursis au paiement de l'amende (par 70 voix contre 54), le Conseil des Etats la rejeta (par 28 voix contre 5) et le Conseil national finit par adhérer à la décision de l'autre chambre par 70 voix contre 59 (BS, tirage à part, Conseil national p. 137 s., 169; Conseil des Etats p. 92, 96 s. et 99; Conseil national p. 624 s., 635).

Mais le problème est revenu à l'ordre du jour. Le 7 décembre 1945, le Conseil national a adopté un postulat du 8 juin 1944 par lequel M. Duby et 29 autres députés nous invitaient à dire si l'article 41 du code pénal ne devrait pas être complété par une disposition prévoyant que le sursis peut aussi être accordé pour les amendes. Après examen de ce postulat, nous avons abouti à une conclusion positive, et la présente revision nous offre

1262 précisément l'occasion de le réaliser. Sur ce point également la majorité de la commission d'experts s'est ralliée à notre manière de voir (par 14 voix contre 4; cf. procès-verbal III, 60 s. et 65).

3. S'il est vrai que les raisons qui justifient le sursis conditionnel à l'exécution d'une peine privative de liberté ne sont pas tous valables en matière d'amendes, on doit néanmoins reconnaître que le régime différentiel impliquant l'impossibilité absolue d'accorder le sursis au paiement d'amendes n'est pas satisfaisant. Il ne tient pas compte de la nécessité de pouvoir réhabiliter le délinquant. Toutes les amendes prononcées en raison d'un crime ou d'un délit, ainsi que toutes les amendes de 50 francs au moins pour une contravention prévue par le code pénal lui-même ou par une autre loi fédérale, sont inscrites au casier judiciaire (art. 360, lettres a et 6, CP; art. 9, ch. 1er et 2, de l'ordonnance du 14 novembre 1941 sur le casier judiciaire). L'auteur est ainsi considéré comme récidiviste, même à cause d'une contravention peut-être insignifiante. Il en souffre souvent dans une mesure que son manquement ne justifie pas et la seule inscription d'une condamnation, si légère soit-elle, au casier judiciaire peut compromettre sa réputation et son avenir. Alors qu'une condamnation à l'emprisonnement ou aux arrêts dont l'exécution a été suspendue est radiée si le condamné a subi l'épreuve jusqu'au bout (art. 41, cb. 4), la condamnation à l'amende reste inscrite. Ce n'est qu'à l'expiration de longs délais que le condamné peut en requérir la radiation dans les conditions fixées à l'article 80. Nous vous proposons, il est vrai, de réduire à cinq ans le délai de dix ans actuellement prescrit pour la réhabilitation en matière de condamnations à l'amende. Cette modification, supposé qu'elle soit adoptée, ne suffit cependant pas pour remédier à l'inconvénient signalé et à l'inégalité constatée par rapport aux condamnations à une peine privative de liberté.

Sous le régime actuel, il arrive souvent, et cela est significatif, que le juge prononce, à la demande du délinquant lui-même, une légère peine d'emprisonnement ou les arrêts au lieu de l'amende que les circonstances et la culpabilité de l'auteur eussent justifiée, précisément afin de pouvoir accorder le sursis conditionnel et permettre ainsi la radiation
rapide du jugement au casier judiciaire si le condamné subit l'épreuve jusqu'au bout.

A ces considérations, qui révèlent une lacune du code pénal, il faut ajouter qu'une amende peut paraître injuste lorsque le condamné est subséquemment victime de circonstances qui lui en rendent le paiement difficile, comme la maladie, des obligations imprévues, des pertes d'argent ou d'autres difficultés financières. Les éléments sur lesquels le juge s'était fondé pour fixer l'amende conformément à l'article 48 se sont alors modifiés, quelque soin qu'il ait pris pour la déterminer. Sans doute la voie du recours en grâce est toujours ouverte, mais elle est compliquée et aléatoire et elle constitue d'ailleurs une entrave à l'administration normale de la justice. Il serait regrettable que le nombre des recours en grâce contre des

1263 condamnations à l'amende augmentât à cause de rimpossibilité d'accorder le sursis conditionnel au paiement de l'amende.

Par ces motifs, nous estimons que le législateur devrait considérer à nouveau le problème. Il peut le faire avec d'autant plus de raison que pour les cantons qui connaissaient le sursis au paiement de l'amende déjà avant 1942, l'adoption du code pénal suisse a constitué un recul, alors que d'une manière générale ce code a certainement contribué à améliorer le droit pénal et à le rendre plus humain.

4. Mais si nous approuvons en principe le sursis, il reste à déterminer s'il y a lieu d'en prévoir l'application à toutes les amendes en général ou seulement à certaines d'entre elles. La commission d'experts s'est d'abord prononcée en principe pour une limitation, puis elle a discuté en particulier toute une série de propositions (procès-verbal III, 65; IV, 23 à 25, 30 à 34).

On peut en effet invoquer des arguments absolument divergents, parfois même contradictoires. D'aucuns placent au premier plan la personne du délinquant et entendent distinguer suivant la gravité de l'infraction et de la faute ou suivant la charge que l'amende représente pour le condamné.

Selon eux, il faudrait ainsi exclure le sursis dans les cas graves, comme cela se fait en matière de condamnations à l'emprisonnement et aux arrêts.

Le sursis ne pourrait pas être accordé en tout cas pour les amendes prononcées en raison d'un crime ou peut-être même d'un délit. Une solution encore plus schématique consisterait à distinguer suivant le montant de l'amende, car il serait très difficile de fixer sans arbitraire la somme déterminante; la commission d'experts a dû enfin voter sur une proposition tendant à prévoir le sursis pour les amendes jusqu'à mille francs. Une autre proposition visait à ne le prévoir que pour les amendes qui figurent au casier judiciaire, c'est-à-dire qu'il serait exclu pour les petites amendes de cinquante francs au plus, cette solution permettant de remédier aux inconvénients de l'inscription au casier judiciaire.

Une autre manière de voir procède plutôt de considérations objectives, indépendantes de la personne du délinquant. On craint en particulier que la possibilité d'accorder le sursis même en matière d'amendes prononcées en vertu d'autres lois que le code pénal ne finisse par
entraver sérieusement l'application de maintes lois administratives fédérales, en affaiblissant par trop la portée des pénalités prévues. On a aussi rappelé que nombre d'amendes pour contraventions de ce genre sont prononcées et notifiées selon une procédure administrative et sommaire, dite du mandat de répression, procédure qui ne permet guère d'examiner si le délinquant mérite de bénéficier du sursis au paiement de l'amende. Ajoutons que dans les cas de contraventions aux lois fiscales de la Confédération, qui sont presque toujours punies de l'amende, le sursis conditionnel est inapplicable, conformément à l'article 339 de la loi fédérale sur la procédure pénale (que l'art. 398, al. 2, lettre o, CP n'a pas abrogé).

1264 La commission d'experts, dont les délibérations reflètent nettement cette diversité des opinions, a fini par retenir, à raison selon nous, celle que nous avons mentionnée en dernier lieu. Elle a adopté, à une très petite majorité il est vrai (7 voix contre 6), une proposition de M. Stämpfli qui tend à limiter le sursis au paiement des seules amendes prononcées en vertu du code pénal lui-même et à l'exclure par conséquent en matière d'amendes fondées sur d'autres lois fédérales. Nous pouvons nous rallier à cette solution.

Elle sauvegarde mieux le caractère du sursis conditionnel en tant que mesure de clémence prévue par le code pénal même et élimine les inégalités existant actuellement entre les différentes catégories de peines. De plus, elle permet d'éviter les difficultés matérielles et de procédure que le sursis illimité présenterait quant à l'application des lois administratives fédérales.

5. Etant donnée la systématique du code, la question du sursis peut être réglée de deux manières différentes : on peut soit mentionner à l'article 41, chiffre 1er, les amendes prononcées en vertu du code pénal, soit y parler des amendes en général et préciser à l'article 333 que les dispositions relatives au sursis à l'exécution des peines sont inapplicables en ce qui concerne les amendes. Nous préférons la première solution, qui est plus simple.

Sursis conditionnel à l'exécution des peines privatives de liberté Art. 41, ch. 1", 3=aL, ch. 3 et 4

L'article 41 doit encore être revisé indépendamment de la question du sursis au paiement d'amendes.

1. Parmi les conditions dont dépend le sursis, le 3e alinéa du chiffre 1er prévoit que le condamné ne doit pas être en état de récidive; le sursis ne peut lui être accordé que si dans les cinq ans qui ont précédé la commission de l'infraction il n'a subi, en Suisse ou à l'étranger, aucune peine privative de liberté pour crime ou délit intentionnel. Le sursis n'est exclu par conséquent que si le condamné a effectivement subi une peine privative de liberté pendant les cinq dernières années. Si la peine n'a pas été exécutée parce qu'elle avait été suspendue ou pour d'autres raisons, elle n'empêche pas l'octroi d'un nouveau sursis. On peut se demander si le code ne se montre pas trop indulgent envers le délinquant. Quoi qu'il en soit, la commission d'experts a approuvé une proposition de l'association pour la réforme pénitentiaire et le patronage des détenus libérés et du professeur Hafter, proposition selon laquelle la condamnation à une peine privative de liberté constituerait déjà un empêchement à l'octroi du sursis (procès-verbal III, 54 à 59). Elle n'a cependant pas voulu attribuer la même conséquence à la condamnation à une amende.

2. Il y a lieu de revoir en outre le chiffre 3 de l'article 41, soit le cas du condamné qui ne se conduit pas bien pendant le délai d'épreuve. Lorsque l'une

1265 des conditions posées par cette disposition est réalisée, le juge doit ordonner que la peine soit mise à exécution. Contrairement à ce qu'on vient de voir ci-dessus à propos du chiffre 1er, 3e alinéa, le chiffre 3 de l'article 41 est jugé trop strict. Il suffit qu'un condamné commette un délit intentionnel, peut-être insignifiant et punissable d'une sanction légère, pour que la peine d'emprisonnement d'une année au plus qui a été suspendue doive être exécutée. La commission d'experts unanime a proposé d'assouplir cette disposition (procès-verbal III, 60). Elle a retenu une solution analogue à celle qu'elle a recommandée en matière de libération conditionnelle selon l'article 38, chiffre 4, et qui consiste à ajouter au chiffre 3 un second alinéa prévoyant que dans les cas de très peu de gravité l'exécution de la peine pourra être remplacée par un simple avertissement, par de nouvelles conditions ou par une prolongation du délai d'épreuve. Après une nouvelle discussion, la commission d'experts a ensuite décidé, à une faible majorité il est vrai, de rendre facultative, au chiffre 3, l'exécution de la peine suspendue (procès-verbal IV, 34 à 36). Mais cette solution est inconciliable avec l'adjonction d'un second alinéa concernant les cas de très peu de gravité. Il faut choisir l'une des deux possibilités. Nous donnons la préférence à la première qui maintient comme règle le principe actuellement en vigueur, alors que la seconde affaiblirait ce principe en le rendant facultatif.

3. Les effets bienfaisants du sursis consistent non seulement dans le fait que la peine n'est pas exécutée si le condamné se conduit bien pendant le délai d'épreuve, mais encore dans la possibilité d'obtenir la réhabilitation dans un laps de temps relativement court. Aux termes de l'article 41, chiffre 4, le juge ordonne la radiation du jugement au casier judiciaire si le condamné a subi l'épreuve jusqu'au bout, c'est-à-dire sans qu'une requête liée à de longs délais (art. 80) doive être présentée. Pour que la réhabilitation soit complète, il faut que le jugement puisse être radié en entier, compte tenu des peines accessoires. Le professeur Hafter a formulé une proposition en ce sens. Mais la radiation du jugement entier suppose que les peines accessoires prononcées sans sursis aient été exécutées. Le cas se présente en
particulier en matière d'amendes. Même si la possibilité d'accorder le sursis au paiement de l'amende est prévue, il arrivera que le juge prononce à la fois une peine privative de liberté avec sursis et une amende sans sursis. Aussi la commission d'experts a-t-elle complété le chiffre 4 de l'article 41 en prévoyant que, le condamné ayant subi l'épreuve jusqu'au bout, le jugement ne pourra être radié que si les amendes et les peines accessoires prononcées sans sursis sont exécutées (procès-verbal III, 60; IV, 34). Quant aux effets que la libération conditionnelle d'un condamné à une peine privative de liberté exercent sur des peines accessoires déterminées (interdiction d'exercer une profession et expulsion), nous les avons déjà examinés plus haut, au sujet de l'article 38.

Feuille fédérale. 101° année. Vol. I.

88

1266 Internement, éducation au travail, traitement des buveurs Art. 42, 43, 44

Quelques améliorations doivent être apportées aux dispositions concernant les mesures de sûreté, les unes étant d'ordre rédactionnel et les autres tendant à leur donner un peu plus de souplesse (procès-verbal IV, 43 à 46).

1. Envers les délinquants d'habitude plusieurs fois récidivistes, l'article 42, chiffré 1er, prévoit que la nouvelle peine prononcée sera remplacée par l'internement. Si le condamné est étranger, le juge peut prononcer l'expulsion au lieu de l'internement, mais la peine doit d'abord être subie et l'expulsion est ensuite exécutée. Le nouveau texte que nous vous proposons est plus explicite.

L'internement est prononcé pour une durée indéterminée, mais pour trois ans au moins conformément au chiffre 5 de l'article 42, Une proposition tendant à permettre la libération de l'interné avant l'expiration de ce délai n'a pas trouvé grâce devant la commission d'experts. Les directeurs d'établissements estiment que, dans les cas où il faut avoir 'recours à »l'internement, soit à une mesure de sûreté, une durée minimum de trois ans est nécessaire. En revanche, on a constaté qu'il est trop strict de prévoir au chiffre 6 que le condamné libéré conditionnellement qui ne se conduit pas bien doit être réintégré dans l'établissement d'internement pour cinq ans au moins. Cette durée doit être maintenue comme règle générale, mais la réintégration pourra être ordonnée pour un laps de temps plus court.

2. Aux termes de l'article 43, les délinquants vivant dans l'inconduite ou la fainéantise sont internés dans une maison d'éducation au travail. Le chiffre 5 se rapporte à la libération conditionnelle, qui peut être ordonnée pour un an. Mais l'expérience montre que ce délai est trop court pour permettre d'apprécier si le libéré est de nouveau apte et disposé de manière durable à travailler. Nous vous proposons de prévoir un délai de un à trois ans.

Les 2e et 3e alinéas du même chiSre 5 ont trait aux conséquences qui interviennent lorsque le condamné libéré conditionnellement rechute pendant le délai d'épreuve. Nous vous proposons d'assouplir dans une certaine mesure ces dispositions également, d'accord avec la commission d'experts.

Nous prévoyons que le fait de commettre un délit pendant le délai d'épreuve n'entraînera pas automatiquement l'exécution de la peine prononcée, mais qu'au contraire le
juge décidera si et dans quelle mesure la peine doit être exécutée. Cette atténuation correspond aussi à celle que nous avons proposée au sujet de l'article 38, chiffre 4, en matière de libération conditionnelle des condamnés à la réclusion ou à l'emprisonnement. Si le libéré se livre de nouveau à l'inconduite pendant le délai d'épreuve, le juge pourra se borner à ordonner l'exécution seulement partielle de la peine.

1267 3. En ce qui concerne les buveurs d'habitude,, nous vous proposons de biffer à l'article 44, chiffre 5, la seconde phrase qui prévoit que si le libéré s'est bien conduit pendant le délai d'épreuve la peine n'est pas exécutée.

Cette phrase ne concorde pas avec le chiffre 3, 2e alinéa, qui prévoit que le juge décide déjà avant l'élargissement de l'interné si la peine dont l'exécution avait été ajournée doit être exécutée ou remise partiellement ou totalement.

Patronage Art. 47

Dans nos considérations concernant la libération conditionnelle (art. 38), nous avons déjà mentionné la corrélation entre cette institution et le patronage et signalé que la libération conditionnelle a une valeur particulière, précisément parce qu'elle permet de soumettre le libéré à un patronage ; nous avons aussi rappelé la pratique quelque peu artificielle, mais souvent suivie, qui consiste à libérer conditionnellement le condamné, contre sa volonté, peu de temps avant l'expiration de la peine, eu égard précisément au patronage. Cette pratique a amené M. Kellerhals à proposer à la commission d'experts d'ajouter à l'article 47 un second alinéa ainsi conçu (procès-verbal IV, 42): « L'autorité compétente peut soumettre à un patronage pour un à deux ans les condamnés libérés définitivement, lorsque cette mesure paraît opportune en raison de leurs antécédents et de leur conduite dans l'établissement. S'ils se soustraient obstinément au patronage l'autorité compétente propose les mesures judiciaires ou administratives nécessaires. » Comme les expériences le montrent, une telle disposition aurait sans doute des avantages. Ainsi que l'a relevé un membre de la commission d'experts, le condamné définitivement libéré de l'établissement pénitentiaire est aussi « un convalescent qu'on doit suivre ». Mais on ne saurait passer sous silence les inconvénients de cette proposition. On doit déjà se demander, en principe, si en adoptant pareille disposition le législateur n'abandonnerait pas le terrain du droit pénal pour passer sur celui du droit administratif, qui est réservé aux cantons. Le condamné libéré qui a racheté sa faute en purgeant entièrement la peine peut-il encore être soumis à un patronage et menacé de sanctions ? A cela s'ajouteraient d'ailleurs des difficultés pratiques. Comment seraient sauvegardés les droits de la défense ?

Et que se passerait-il quand le patrone, sans commettre précisément un nouveau délit, ne se conduirait pas bien pendant le délai fixé ?

La proposition a été rejetée à une faible majorité par la commission d'experts. Elle ne mérite pas moins d'être examinée sérieusement.

1268

Interruption de la prescription. Prescription des contraventions Art. 72 et 109

En matière de contraventions, l'article 109 prévoit que l'action pénale se prescrit par six mois et la peine par un an. Ce sont précisément ces délais trop courts qui ont donné la première impulsion à la présente revision.

Leurs inconvénients se sont manifestés et ont été signalés aux chambres déjà peu de temps après l'entrée en vigueur du code. Le 22 septembre 1943 en effet, au cours de délibérations relatives à la revision des dispositions pénales des lois sur la protection des travailleurs, le Conseil des Etats a a,dopté à l'unanimité un postulat de sa commission qui nous invitait à examiner si l'article 109 ne devrait pas être modifié à l'effet de prolonger à titre général les délais de prescription en matière de contravention (cf.

ES Conseil des Etats 1943, p. 223 à 226).

Au fait que ces délais sont déjà très courts en eux-mêmes s'ajoute celui que la prescription dite absolue, s'applique en dépit de toutes les interruptions après un an pour l'action pénale (art. 72, ch. 2, 2e al.) et après une année et demie pour la peine (art. 75, 2e al.) Les expériences ont démontré que ces délais ne suffisent pas et qu'au contraire ils rendent souvent impossible la poursuite pénale ou l'exécution de la peine prononcée. Ces inconvénients se produisent en particulier lorsqu'il s'agit d'infractions visées par le code pénal lui-même, c'est-à-dire des contraventions prévues aux articles 323 à 332, ainsi que des délits peu graves des titres 1er à 18 qui sont passibles soit des arrêts ou de l'amende, soit exclusivement de l'amende et qui sont dès lors réputés contraventions (art. 101 CP). Mais les effets de ces délais de prescriptions insuffisants sont encore plus sensibles en ce qui concerne les autres lois pénales fédérales, puisqu'en vertu de l'article 333, 3e alinéa, du code pénal les infractions qu'elles prévoient ont également le caractère de contraventions, sauf si elles sont punissables d'une peine privative de liberté de plus de trois mois. Ces sanctions destinées à assurer l'application des lois administratives fédérales sont très nombreuses, et il n'est pas rare qu'une contravention soit découverte après plusieurs mois, alors qu'elle est déjà prescrite ou qu'une poursuite pénale introduite en temps utile doive être abandonnée parce que la prescription absolue est acquise avant le prononcé du jugement
exécutoire.

Enfin, les cantons eux-mêmes éprouvent des difficultés par rapport aux contraventions sur lesquelles ils ont conservé le pouvoir de légiférer en vertu de l'article 335 du code pénal. Plusieurs d'entre eux appliquent, en effet, aux contraventions de droit cantonal les dispositions générales du code pénal relatives aux contraventions et par conséquent aussi l'article 109.

Cette circonstance accentue encore la portée du problème et explique pourquoi les cantons ont aussi intérêt à voir prolonger les délais de prescription en matière de contraventions.

1269

Parmi les requêtes adressées à cet effet au département de justice et police, mentionnons celle de la ligue pour la protection de la nature, qui se rapporte surtout aux délits de chasse; dans ce domaine précisément, on considère comme particulièrement choquant que des braconniers invétérés, échappent souvent à toute peine à cause de la prescription.

Le département de justice et police a consulté plusieurs pénalistes sur cette question et a en outre demandé l'avis du Tribunal fédéral et des gouvernements cantonaux. Les professeurs Haftet et Thormann et le juge fédéral Logoz ont tous trois recommandé la prolongation des délais de prescription. Le Tribunal fédéral s'est exprimé dans le même sens en ce qui concerne les contraventions aux lois pénales fédérales, mais il est plutôt opposé à toute modification pour les contraventions visées par le code pénal luimême ; selon sa proposition, l'article 109 pourrait rester inchangé et il suffirait d'ajouter à l'article 333 une disposition spéciale sur la prescription.

La plupart des cantons sont aussi favorables à une solution différentielle.

La question a aussi été débattue par les auteurs, et les propositions faites visent toutes à prolonger les délais de prescription (cf. Zbinden: Zur Kritik an den Verjährungsbestimmungen nach Art. 109 und 70 ff StGrB; dans la Revue suisse de, jurisprudence vol. 64, p. 293; du même auteur:.

Die Verjährungsfristen in den geltenden, kantonalen Polizeistrafgesetzgebungen, dans la Revue pénale suisse vol. 58, p. 530; Schlatter: Di& Verjährung, eod. loc. vol. 62, p. 301; Kurt: Auslegungsfragen zum Schweiz.

Strafgesetzbuch, eod. loc. vol. 57, p. 202).

On ne saurait contester la nécessité de prolonger les délais de prescription au moins en ce qui concerne les lois pénales accessoires, ni par conséquent pour les contraventions cantonales auxquelles s'applique le régime du code pénal. Constatons en passant qu'en rédigeant le 3e alinéa de l'article 333, le législateur n'a pas suffisamment tenu compte de la portée de l'article 109 en matière de prescription. C'est à cet égard plus qu'à n'importe quel autre qu'on peut parler d'une lacune qu'il est urgent de combler. H est moins aisé de répondre à la question de savoir s'il y a heu de faire une différence entre les contraventions du code pénal et celles des autres lois fédérales. La
commission d'experts s'est montrée opposée à une telle distinction (procès-verbal I, 26 à 28; II, 3 à 10, 51 et 52), et nous la suivons sur ce point, quand bien même le Tribunal fédéral et la plupart des cantons sont d'un avis différent, comme on l'a rappelé plus haut. Les délais de prescription de six mois et d'une année sont en effet trop courts aussi en ce qui concerne les contraventions du code pénal et les délits peu graves réputés contraventions. D'ailleurs, il serait peu satisfaisant de faire une distinction suivant qu'une contravention est prévue dans le code luimême ou dans une autre loi fédérale. La solution la plus simple consiste à établir des délais de prescription uniformes, et ces délais se justifient, à condition de n'être pas trop longs. La poursuite des infractions de peu

1270 d'importance et l'exécution des peines ne doivent en effet pas se faire attendre trop longtemps.

Par ces motifs et nous ralliant aux décisions de la commission d'experts, nous vous proposons une modification de portée générale consistant à reviser non pas l'article 333, niais bien l'article 109 et à doubler la durée des délais actuels, en sorte que l'action pénale se prescrirait par un an et la peine par deux ans. Si cette proposition était adoptée, la prescription absolue visée aux articles 72 et 75 interviendrait après deux ans pour l'action pénale et après trois ans pour la peine.

Quant aux délais prévus par les dispositions générales concernant la prescription en matière de crimes et de délits (art. 70 s.), ils ne sont pas contestés. Un certain nombre d'amendements ont cependant été proposés en ce qui concerne la suspension et l'interruption de la prescription (art. 72, 74 et 75), La commission d'experts les a examinés avec soin, mais elle n'a retouché que l'article 72 (procès-verbal I, 28 à 33; II, 52 à 55). Aux termes du chiffre 2, 1er alinéa, la prescription de l'action pénale est interrompue « par toute citation de l'inculpé devant un juge d'instruction ou un tribunal suisse, ainsi que par tout interrogatoire de l'inculpé au cours de l'instruction ». Cette formule a souvent été jugée insuffisante en pratique. Mais les délibérations des experts ont précisément démontré qu'on ne saurait augmenter le nombre des causes d'interruption de la prescription sans risquer de porter atteinte à la nature et au but de la prescription. Il s'agit en particulier de savoir s'il faut que les actes de la poursuite pénale soient dirigés contre une personne déterminée et connue en qualité d'auteur d'une infraction, si la prescription ne peut être interrompue que par des mesures des autorités judiciaires et des organes de l'instruction ou aussi par des mesures de la police, enfin si et comment les actes mterruptifs doivent être portés à la connaissance de l'inculpé. La commission d'experts s'est montrée, à raison, très circonspecte. Elle s'est finalement bornée à n'ajouter au code que deux nouvelles causes d'interruption: d'abord la signification d'un mandat d'arrêt, qui doit interrompre la prescription au moins autant que la citation; ensuite l'exercice d'un moyen de recours ou d'opposition prévue par la
loi. Cette formule comprend l'appel à la juridiction cantonale suprême et le pourvoi en cassation au Tribunal fédéral; mais elle comprend aussi l'opposition contre un jugement rendu dans la procédure dite du mandat de répression, opposition par suite de laquelle l'affaire est déférée au juge ordinaire. Dans tous ces cas, l'usage de ces voies de droit a pour effet de retarder le prononcé du juge ; il serait choquant que ce retard dû à des causes légitimes entraînât la prescription de l'action pénale. Mais celle-ci sera toujours limitée par la prescription absolue selon le chiffre 2, 2e alinéa.

En ce qui concerne la prescription de la peine selon l'article 75, on s'est demandé s'il ne faudrait pas aussi prévoir la suspension (sans interruption et nouveau délai), en particulier pendant l'exécution d'une autre peine. La

1271 commission d'experts n'a pas admis cette manière de voir, d'autant moins que, dans ces cas, l'exécution de la peine peut être interrompue conformément à l'article 40.

Radiation au casier judiciaire Art. 80 et 81

Nous avons déjà parlé, à propos de l'article 41, chiffre 4, de la radiation du jugement au casier judiciaire après le sursis à l'exécution de la peine. Mais nous avons aussi des amendements à proposer en ce qui concerne les dispositions générales du code concernant la radiation, soit les articles 80 et 81.

Jj'article 80, 1er alinéa, fixe les délais minimums à l'expiration desquels la radiation peut être requise: En cas de condamnation à la réclusion et à l'internement quinze ans, en cas de condamnation à toute autre peine ou mesure dix ans depuis l'exécution du jugement. Personne ne conteste que le délai de dix ans est trop long quand la peine principale consiste en une amende', la réhabilitation devrait être possible plus tôt dans ce cas.

La raison d'être de cette modification sera sans doute un peu atténuée si le sursis au paiement de l'amende est institué, mais elle n'en subsistera pas moins. D'accord avec la commission d'experts (procès-verbal III, 65; IV, 37), nous vous proposons de réduire le délai à cinq ans pour les condamnations à l'amende.

Lorsqu'on plus de la peine principale des peines accessoires sans sursis ont été prononcées, la radiation ne peut être ordonnée que quand elles sont exécutées. C'est pourquoi l'adjonction proposée à l'article 41, chiffre 4, doit être mentionnée ici aussi. La commission d'experts a refusé, en revanche, d'admettre une proposition selon laquelle la radiation devrait être subordonnée à la condition que le condamné ait non seulement réparé dans la mesure du possible le dommage causé par l'acte délictueux, mais encore remboursé les frais de l'instruction et de justice. Une telle condition entraverait considérablement la réhabilitation dans bien des cas, sans parler de la question de savoir si le paiement des frais ne serait pas toujours couvert par la prescription.

L'article 80 ne précise pas si et à partir de quel moment la radiation peut être requise en cas de prescription de la peine. La même lacune a été constatée dans le code pénal militaire (art. 59) et devra aussi y être comblée.

Comment faut-il déterminer dans ce cas le délai utile pour requérir la radiation ? On pourrait le faire courir du moment où la prescription de la.

peine est acquise (art. 73 CP) et, comme les délais de cette prescription sont eux-mêmes déjà longs, leur ajouter un délai
plus court pour la demande de radiation (cf. procès-verbal III, 65). A cause des interruptions possibles de la prescription (art. 75), on ne saurait cependant pas toujours sûrement, avec ce système, quand le moment de requérir la radiation serait arrivé.

1272

Aussi est-il plus simple de partir du jour où le jugement est passé en force, qui est aussi le point de départ de la prescription (art. 74), et de fixer ensuite pour la demande de radiation un délai minimum convenable. Faisant sienne une proposition de M. Eugster, la commission d'experts a adopté cette solution et fixé le délai à dix-huit ans en cas de condamnation à la réclusion et à douze ans pour toutes les autres peines (procès-verbal IV, 37).

Une comparaison avec l'article 73 montre que ces délais minimums ne sont dépassés qu'en matière de peines de réclusion pour cinq ans au moins parce que les délais de prescription sont eux-mênes plus longs. Nous proposons de régler le cas de la prescription dans un alinéa Ibis ajouté à l'article 80.

Enfin, il y a lieu de compléter aussi Yarticle 81 pour régler la question de la radiation lorsque le, condamné a, été libéré conditionnellement et qu'il s'est bien conduit pendant le délai d'épreuve. Le 2e alinéa ne vise que le cas du condamné renvoyé dans une maison d'internement et libéré définitivement. Mais il se justifie de prévoir en outre que le délai de radiation selon l'article 80 courra du jour de la libération conditionnelle, c'est-à-dire du moment où l'exécution proprement dite de la peine aura pris fin. Nous vous proposons de compléter en ce sens le 2e alinéa de l'article 81.

Nous parlerons dans le chapitre suivant d'une modification de l'article 99 concernant la radiation des mesures prises envers des adolescents.

Dispositions concernant les adolescents Art. 94, 97 et 99

Pour les peines et les mesures applicables aux adolescents (art. 89 s.

CP), l'association suisse des magistrats et fonctionnaires des tribunaux pour enfants et adolescents a fait des propositions que la commission d'experts a généralement approuvées (procès-verbal III, 44 à 53; IV, 52 à 54).

Ces propositions se rapportent d'abord à Yarticle 94 qui règle la libération conditionnelle de l'adolescent interné dans une maison d'éducation.

Le 2e alinéa prévoit un délai d'épreuve d'au moins un an. Nous proposons de fixer aussi un maximum à ce délai, comme dans les autres cas. Ce délai serait ainsi de un à trois ans.

Conformément à une proposition de M. Schatzmann et d'accord avec la commission d'experts, nous avons atténué la rigueur du 3e alinéa de l'article 94 en prévoyant que l'adolescent libéré conditionnellement qui se conduit mal pendant le délai d'épreuve ne sera plus nécessairement réintégré dans l'établissement, mais que cette sanction pourra être prise à côté d'autres. Si, comme nous le proposons, cette atténuation est adoptée envers les adultes à l'article 38, elle se justifie à plus forte raison à l'égard des adolescents.

"L'article 97 prévoit que s'il n'est pas possible de juger l'adolescent avec certitude, l'autorité peut suspendre sa décision concernant une peine ou

1273

une mesure, en lui impartissant un délai d'épreuve de six mois à un an.

Les spécialistes estiment désirable que la période d'observation soit prolongée et ils ont proposé de la fixer à trois ans au maximum. En outre, la commission d'experts a approuvé une proposition de M. Schatzmann tendant à subordonner la possibilité de suspendre la décision à la condition que l'adolescent n'ait pas commis d'autres actes délictueux on n'en ait commis que de très peu graves; si cette condition n'est pas remplie, il est pourtant juste qu'une peine ou une mesure soit immédiatement prononcée en cas de rechute de l'adolescent.

Jj'article 99, qui règle la radiation au casier judiciaire, correspond à l'article 80 de la partie générale du code. Mais il ne parle que des mesures prises contre l'adolescent. Il n'y a pourtant pas de doute que la radiation doit être possible aussi en ce qui concerne les peines (amende et détention, art. 95). L'article 99 doit être complété en ce sens. Quant au délai à l'expiration duquel la radiation peut être requise, il est fixé à dix ans au moins, comme à l'article 80. Ce long délai a des conséquences encore plus fâcheuses pour les adolescents que pour les délinquants adultes, puisqu'il compromet souvent leur avenir. Cet inconvénient avait été relevé déjà dans la campagne qui a précédé la votation populaire sur le code pénal, mais il n'avait plus pu être réparé à l'époque. A plus forte raison doit-on le faire à l'occasion de la présente revision. Avec la majorité de la commission, nous proposons de réduire le délai à trois ans; la minorité voulait l'abaisser à deux ans (procès-verbal III, 53).

Mineurs de dix-huit à vingt ans Art. 100

L'article 100 prévoit quelques atténuations de peine particulières en faveur des délinquants de dix-huit à vingt ans. Les personnes de cet âge ne sont plus des adolescents, mais il ne serait pas indiqué de les punir avec l'entière rigueur de la loi. On s'est demandé si les quelques atténuations prévues à l'article 100 sont bien adéquates et si elles suffisent. On a surtout critiqué qu'en cas de circonstances atténuantes, la peine d'emprisonnement ne puisse être convertie qu'en arrêts (ch. 1er, 4e al.), et non en une amende, conformément à la disposition générale de l'article 65.

Le professeur Hafter avait proposé à la commission d'experts d'éliminer au moins cette divergence. Mais un amendement d'une portée plus considérable a en outre été présenté par M. Schlatter et tendait à refondre l'article 100 de manière que les délinquants de 18 à 20 ans puissent bénéficier des atténuations de peine visées à l'article 65 et de délais de prescription réduits de moitié. Cette même proposition entend, de plus, combler la lacune du code qui consiste dans l'absence de toute disposition réglant le cas de l'adolescent qui commet un acte punissable, mais qui a plus de vingt ans au moment du jugement; pour M. Schlatter, l'atténuation libre

1274 de la peine devrait être possible dans ce cas, conformément à l'article 66 (procès-verbal IV, 54, 56).

La commission d'experts n'a pas combattu le principe de la proposition Schlatter, mais elle en a réservé l'examen. Pour notre part, nous en approuvons l'idée et nous vous proposons d'ajouter à l'article 100 un renvoi à l'article 65, c'est-à-dire d'assouplir le régime actuel. En ce qui concerne le délai de prescription, il ne devrait pas être plus court que celui qui est prévu à l'article 98 en faveur des adolescents. Lorsque la moitié du délai de prescription est écoulée, l'infraction ne sera pas prescrite dans tous les cas, mais le juge pourra renoncer à toute peine ou mesure.

Quant au cas où le délinquant atteint l'âge de 18 à 20 ans entre la perpétration de l'infraction et le jugement, il est l'objet d'une règle de procédure contenue à l'article 371. Pour ce qui est du fond, nous ne croyons pas qu'il faille encore prévoir l'atténuation libre de la peine selon l'article 66.

L'application de l'article 65 s'impose ici aussi. Mais la règle transitoire de l'article 371 est toujours applicable lorsque l'infraction est commise avant l'âge de 20 ans (non seulement avant 18 ans) et que le jugement est rendu après que l'auteur a atteint l'âge de 20 ans révolus. Pour préciser ces différents cas, nous vous proposons de modifier en conséquence l'article 100.

Publications obscènes Art. 204

Au chiffre 2 de cet article, les textes ne concordent pas. Alors que le texte français prévoit la peine de l'emprisonnement et de l'amende, les textes allemand et italien parlent de l'emprisonnement ou de l'amende, comme au chiffre 1er. Cette dernière formule est exacte. Aux termes de l'article 50, 2e alinéa, le juge peut déjà, en effet, cumuler les deux peines prévues alternativement, mais il doit avoir la liberté de le faire. Il y a heu par conséquent de corriger le texte français.

Violation d'une obligation d'entretien Art. 217

Cette disposition incrimine la violation d'une obligation d'entretien si elle résulte de la mauvaise volonté, de la fainéantise ou de l'inconduite.

Au 1er alinéa, les textes français et allemand parlent des aliments ou des subsides que l'inculpé doit « à ses proches » en vertu du droit de famille (familienrechthchen Unterhalts- oder Unterstützungspflichten « gegenüber seinen Angehörigen »), tandis que le texte italien ne mentionne pas les proches (« alimenti e sussidi che gli sono imposti dal diritto di famiglia »). On s'est demandé si la violation d une obligation d'entretien envers le conjoint divorcé est aussi réprimée par l'article 217, Tel n'est pas le cas si l'on s'en tient strictement à la définition légale de l'article 110, chiffre 2 du code

1275 pénal. Mais le Tribunal fédéral en a jugé autrement dans deux arrêts en déclarant déterminante la teneur plus large du texte italien (ATF 69 IV 178; 71 IV 38). Cette interprétation est incontestablement plus satisfaisante que celle qui consiste à faire abstraction du conjoint divorcé. Approuvant cette manière de voir, la commission d'experts a recommandé de préciser le texte de l'article 217, 1er alinéa, mais elle a refusé d'adopter une proposition tendant à prévoir que le délit qui y est visé serait poursuivi non plus d'office, mais sur plainte (procès-verbal IV, 57).

Du point de vue rédactionnel, on pourrait se borner à adapter les textes français et allemand au texte italien, en biffant les mots « à ses proches » («Angehörige»). Il est cependant encore plus clair, et par conséquent préférable, de maintenir ces mots et de mentionner expressément le conjoint divorcé.

Contrefaçon et imitation de billets de banque Art. 327

Cet article .punit de l'amende celui qui contrefait ou imite du papiermonnaie, des billets de banque ou des timbres officiels de valeur de Suisse ou de l'étranger, sans dessein de commettre un faux, mais de manière à créer un danger de confusion avec le papier-monnaie, les billets ou les timbres véritables.

Le 16 septembre 1948, la direction générale de la banque nationale a signalé à notre département de justice et police que l'article 327 s'est révélé à la pratique insuffisant à plus d'un titre. Elle a rappelé en premier lieu la définition posée par l'article 70 de la loi du 7 avril 1921 sur la banque nationale, que le code pénal a abrogé : « Celui qui aura confectionné ou répandu, à titre d'annonce, de réclame ou de simple plaisanterie, des imprimés ou vignettes imitant les billets de banque»; cette formule visait en général le fait de confectionner ou de répandre des imprimés imitant les billets de banque, sans égard au danger de confusion; la peine prévue était aussi sensiblement plus sévère: emprisonnement jusqu'à trois mois ou amende.

La banque nationale s'était employée déjà en 1937 à élargir la portée de l'article 327 du code pénal qui devait remplacer l'article 70 de la loi de 1921. Mais la discussion du projet de code était déjà trop avancée pour qu'une modification puisse encore être apportée. La banque nationale renouvelle aujourd'hui sa démarche. Elle a exposé que ses craintes étaient justifiées.

Depuis l'entrée en vigueur du code, le nombre des reproductions de billets de banque dans des annonces, prospectus et autres réclames imprimées a augmenté; un cas de ce genre en provoque généralement d'autres. Or, la poursuite pénale est rendue très difficile par le critère du danger de confusion, qui ne permet pas de délimiter clairement l'acte délictueux. La question de savoir s'il faut, dans un cas déterminé, admettre ou non le danger de confusion dépend du degré d'esprit critique du destinataire. Mais des

1276 confusions ont eu lieu effectivement. Il est arrivé, par exemple, que des reproductions de billets de banque aient été découpées dans des annonces de journaux et mises en circulation, les destinataires étant ainsi induits en erreur. Le juge ne se résoudra pas aisément à condamner un inculpé qui prétend de bonne foi avoir estimé impossible tout danger de confusion, même s'il est lui-même d'un autre avis sur ce point. Ainsi l'article 327 ne permet de réprimer que les infractions manifestes et demeure inopérant dans les cas intermédiaires. De plus, la possession, de clichés reproduisant des billets de banque peut constituer une tentation de les employer à des fins criminelles, c'est-à-dire pour en faire des faux proprement dits, tandis qu'inversement celui qui fabrique les clichés avec dessein de faux (art.

247 CP) ne manquera pas d'alléguer qu'ils n'étaient destinés qu'à illustrer des réclames imprimées.

Eu égard à ces lacunes et à ces dangers, la commission d'experts (procès-verbal IV, 50) a approuvé une modification de l'article 327 tendant à élimmer l'élément du danger de confusion. Mais du fait de cette modification, il est nécessaire de réserver les cas de reproduction opérés avec autorisation ; ne sera pas punissable par conséquent le fait" de reproduire des billets de banque, du papier-monnaie ou des timbres officiels de valeur avec l'assentiment écrit de l'autorité compétente pour les émettre, à des fins officielles ou scientifiques. Songeons par exemple aux reproductions dans les publications de la police à l'effet de renseigner le public sur des faux et de le mettre en garde.

Nous avons aggravé la peine prévue en ajoutant les arrêts ; elle n'en est pas moins sensiblement plus douce que celle que prévoyait l'article 70 de la loi de 1921 sur la banque nationale.

Casier judiciaire Art. 361 et 363

Nous avons déjà parlé du casier judiciaire à propos des articles 80 à 99, en rapport avec la réhabilitation par la radiation d'une peine ou d'une mesure. Certaines propositions d'amendement ont aussi été faites en ce qui concerne le titre général relatif au casier judiciaire (art. 359 s. ; procèsverbal III, 44 à 53).

^'article 361 prévoit que les mesures prises et les peines prononcées à l'égard d'adolescents qui ont commis un crime ou un délit seront aussi inscrites au casier. L'association suisse des magistrats et fonctionnaires des tribunaux pour enfants et adolescents a proposé d'exclure au moins de l'inscription la réprimande selon l'article 95, 1er alinéa. Mais les avis ne concordent pas quant à l'étendue à donner aux inscriptions concernant les adolescents. Le canton de Vaud, par exemple, ne voudrait inscrire que les cas graves de l'article 91, chiffre 3, tandis que le canton de Lucerne est au contraire opposé à toute limitation. La commission d'experts était

1277 elle-même partagée, mais elle a finalement voté à une petite majorité le maintien sans changement de l'article 361. Nous approuvons cette solution, surtout pour le motif qu'elle est en corrélation avec l'article 363 à propos duquel nous proposons une atténuation en ce qui concerne les extraits du casier judiciaire. Cette voie est en effet préférable si l'on cherche à mieux protéger les adolescents. En revanche, il est important et conforme au but du casier judiciaire que les inscriptions renseignent très complètement les autorités, même en ce qui concerne les adolescents, sur les antécédents des personnes envers lesquelles une nouvelle instruction pénale est ouverte.

C'est dans ce sens que la commission d'experts a envisagé de modifier l'article 363, 2e alinéa. Cette disposition prohibe la délivrance d'extraits aux particuliers, mais donne à chacun le droit de se faire délivrer des extraits de son propre casier. Si naturelle que paraisse cette règle, elle peut cependant avoir des conséquences désastreuses surtout pour les jeunes gens en quête d'une place. L'employeur a en effet la possibilité d'exiger du candidat un extrait de son propre casier et d'être ainsi renseigné sur les peines ou les mesures qu'il a précédemment encourues. Ces cas seront moins fréquents si, selon notre proposition concernant l'article 99, le délai de radiation est ramené à trois ans, mais ils ne disparaîtront pas complètement.

Aussi a-t-on proposé de modifier l'article 363, 2e alinéa, de manière que les .extraits délivrés à l'intéressé lui-même ne mentionnent pas les peines ou les mesures prononcées en vertu des articles 91 à 97 ou de l'article 100. Mais la question se pose aussi à l'égard des adultes. Elle ne peut pas être appréciée unilatéralement du point de vue du délinquant qui a été inscrit précédemment au casier judiciaire. Le désir de ménager le plus possible le délinquant doit être concilié avec l'intérêt légitime que des tiers peuvent aussi avoir à être renseignés sur les inscriptions figurant au casier.

Au sein de la commission d'experts, les avis étaient partagés. Elle a .rejeté la proposition de faire une exception pour les cas visés à l'article 100, mais elle n'a pas tranché la question (7 voix contre 7) en ce qui concerne les mesures et les peines prévues aux articles 91 à 97 (procès-verbal III,
51). Nous avons cependant inséré cette limitation dans notre projet, afin de soumettre la question à vos délibérations et à votre décision.

La commission unanime a en outre approuvé l'adjonction à l'article 363 d'un nouvel alinéa Zbis nous autorisant à édicter d'autres dispositions sur les extraits délivrés pour des buts déterminés. Cette disposition permettra de tenir compte de circonstances particulières. Songeons notamment aux extraits à présenter à des autorités étrangères (par ex. pour obtenir un visa ou pour émigrer) qui parfois refusent, à cause d'inscriptions anodines au casier judiciaire, des requêtes parfaitement justifiées selon nos conceptions. D'ailleurs, l'article 16 de l'ordonnance du 14 novembre 1941 sur le casier judiciaire prévoit déjà que le département de justice et police

1278 peut donner des instructions générales concernant les communications aux autorités étrangères ; ce pouvoir devrait être accentué et inscrit dans le code.

Grâce en matière de publication du jugement Art, 396

Comme dernière disposition ayant donné lieu à discussion depuis l'entrée en vigueur du code pénal, mentionnons l'article 396, qui détermine l'étendue du droit de grâce. Il prévoit que par l'effet de la grâce toutes les peines prononcées par un jugement passé en force peuvent être remises, totalement ou partiellement, ou commuées en des peines plus douces. Cette disposition vise non seulement les peines privatives de liberté et l'amende à titre de peines principales, mais encore les peines accessoires énumérées aux articles 51 à 56, savoir : la destitution, la privation des droits civiques, la déchéance de la puissance paternelle ou de la tutelle, l'interdiction d'exercer une profession, une industrie ou un commerce, l'expulsion et l'interdiction des débits de boissons. Etant donné le système du code, la grâce est en revanche inapplicable à toutes les mesures, c'est-à-dire d'abord aux « mesures de sûreté » prévues aux articles 42 à 45 (internement, éducation au travail, traitement des buveurs d'habitude et des toxicomanes), mais aussi aux « autres mesures » des articles 57 à 61 (cautionnement préventif, confiscation d'objets dangereux, dévolution à l'Etat et publication du jugement).

Or, on a souvent critiqué que la grâce ne puisse pas s'appliquer à la publication du jugement. La question a été discutée déjà en juin 1943 au sein de la commission parlementaire des grâces. A la demande de cette commission, le département de justice et police avait présenté un rapport du 20 novembre 1943, qui, eu égard aux termes du code, concluait à l'impossibilité de faire remise de la publication du jugement par la voie de la grâce. La question a été tranchée dans le même sens dans les consultations d s professeurs Thormann et Hafter et nous avons adopté le même point de vue dans notre rapport du 17 mai 1945 concernant les recours en grâce (affaire Ludi, FF 1945, I, 625).

La genèse de l'article 396 montre que déjà la deuxième commission d'experts avait approfondi le problème (procès-verbaux vol. 9, p. 291 à 306). Alors même que le projet de 1915 dont elle délibérait parlait dea « peines et .peines accessoires », elle adopta une proposition de M. Thormann qui tendait à prévoir la grâce dans les cas de « privation de la liberté », expression qui englobait aussi les mesures de sûreté. Cette formule fut alors introduite
dans le projet de 1916. Mais la commission restreinte qui mit au point notre projet de 1918 remplaça l'expression susdite par « peines privatives de liberté ». Les chambres rétablirent finalement le terme primitif de « peines », excluant ainsi toutes les mesures.

1279 En vertu des termes du code et de la jurisprudence des autorités fédérales, les publications de jugement ordonnées en application de l'article 61 du code pénal ne peuvent actuellement pas être remises. Dans l'affaire Kunath relative à une infraction en matière d'économie de guerre (cf.

rapport du 17 novembre 1944, FF, 1279), l'Assemblée fédérale, chambres réunies, a cependant accordé la grâce ; il est vrai que la publication du jugement ordonnée à l'époque était fondée non pas sur l'article 61 du code pénal, mais sur l'article 4 de notre arrêté du 1er septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché, disposition qui place la publication du jugement sur le même plan qu'une peine privative de liberté ou une amende, en sorte qu'elle pouvait être considérée comme une peine accessoire. Mais ce cas a d'autant moins la valeur d'un précédent que dès lors est entré en vigueur notre arrêté du 17 octobre 1944 concernant le droit pénal et la procédure pénale en matière d'économie de guerre, arrêté dont l'article 2 déclare applicables les dispositions générales du code pénal et élimine ainsi la divergence signalée.

La pratique a montré que la possibilité de rapporter la publication du jugement par la voie de la grâce a sa raison d'être, surtout parce que la publication est souvent ressentie comme une sanction sensiblement plus grave que la peine principale; elle atteint l'intéressé dans l'opinion publique beaucoup plus que ne le fait une amende ou même une légère peine privative de liberté. La classification de la publication du jugement parmi les mesures prévues par le code est d'ailleurs discutable, quand bien même elle tend plutôt à protéger le public ou le lésé qu'à punir spécialement le condamné. La commission d'experts s'est opposée à l'introduction de la grâce en matière de mesures et elle a aussi refusé, à la majorité, de la prévoir en ce qui concerne la publication du jugement (procès-verbal in, 39 à 43).

Nous croyons cependant devoir la recommander, mais seulement pour la publication du jugement et non pour d'autres mesures. Les expériences faites nous paraissent justifier cette solution; il est significatif que le problème ait été discuté à plusieurs reprises par les chambres. Comme on ne peut pas procéder par la voie de l'interprétation sans faire
violence au texte du code, la question doit au moins être examinée et tranchée à l'occasion de la présente revision. Nous vous proposons par conséquent de compléter l'article 396 ; on pourrait aussi assigner à la publication du jugement une autre place dans le code et la ranger parmi les peines accessoires.

Nous avons déjà parlé plus haut, à la fin de la deuxième partie, à propos des délits contre l'honneur, de l'adjonction à faire à l'article 8 de la loi sur les garanties.

1280 Enfin, l'adoption des dispositions proposées dans la première partie du présent message entraînera l'abrogation de notre arrêté du 29 octobre, 1948 renforçant les dispositions pénales pour la protection de l'Etat. L'incorporation des dispositions sur la protection de l'Etat dans le code pénal mettra hors vigueur les arrêtés que nous avons pris dans ce domaine en vertu de nos pouvoirs extraordinaires.

Nous vous recommandons d'adopter le projet de loi ci-annexé concernant la revision du code pénal suisse, ce qui permettra d'apporter à ce dernier toute une série d'améliorations qu'il y a lieu de réaliser le plus rapidement possible.

Les modifications relatives aux dispositions de la partie générale qui figurent aussi dans le code pénal militaire devront également être effectuées dans ce code; nous vous soumettrons à cet effet un message spécial.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 20 juin 1949.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, E. NOBS 7(177

Le chancelier de la Confédération, LEIMGRUBEB

1281

(Projet)

LOI FÉDÉRALE MODIFIANT LE CODE PÉNAL SUISSE

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 20 juin 1949, arrête:

Le code pénal suisse du 21 décembre 1937 (*) est modifié et complété conformément aux dispositions qui suivent.

Les articles ci-après énumérés du code pénal sont remplacés par le nouveau texte indiqué.

Les nouvelles dispositions seront insérées dans le code.

Art. 4 1 al. Le présent code est applicable à quiconque, à l'étranger, aura commis un crime ou un délit contre l'Etat (art. 265, 266, 266bis, 267, 268, 270, 271, 275, 275bis, 275ter), se sera rendu coupable d'espionnage (art.

272 à 274) ou aura porté atteinte à la sécurité militaire (art. 276 et 277).

er

Art. 17 1. L'autorité administrative cantonale exécutera la décision du juge tendant à l'internement, au traitement ou à l'hospitalisation des délinquants irresponsables ou à responsabilité restreinte.

2. L'autorité compétente fera cesser l'internement, le traitement ou l'hospitalisation dès que la cause en aura disparu.

Elle pourra soumettre le libéré à un patronage et lui imposer certaines règles de conduite (art. 38, ch. 3). Si le libéré persiste, au mépris d'un aver(*) RO 54, 781.

Les modifications apportées au texte en vigueur sont imprimées en italiques.

Feuille fédérale. 101e année. Vol. I.

89

1282 tissement formel, à enfreindre une règle de conduite à lui imposée ou s'il se soustrait obstinément au patronage, l'autorité compétente pourra ordonner sa réintégration dans l'hôpital ou l'hospice. Le patronage et les règles de conduite seront rapportés dès qu'ils ne paraîtront plus nécessaires.

3. Le juge décidera si, et dans quelle mesure, la peine prononcée contre un délinquant à responsabilité restreinte doit encore être exécutée.

Art. 27 Ch. 7. Les dispositions des chiffres 3, 2e alinéa, et 6 ne sont pas applicables en matière de haute trahison, d'atteinte à l'indépendance de la Confédération et de trahison diplomatique (art. 265 à 267), en matière d'infractions consistant à soutenir des entreprises et menées de l'étranger contre la sécurité de la Suisse (art. 266l>is), en matière d'espionnage (art. 272 à 274), d'atteinte à l'ordre constitutionnel (art. 275), de propagande subversive (art. 275\>is) et d'atteinte à la sécurité militaire (art.276 et 277).

Art. 38 Ch. 1, 1er al. Lorsqu'un condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement aura subi les deux tiers de sa peine, mais au moins six mois en cas de condamnation à l'emprisonnement, l'autorité compétente pourra le libérer conditionnellement : Ch.,4. Si, durant le délai d'épreuve, confiance mise en lui, l'autorité compétente Ch. 4, 2e al. (nouveau). Dans les cas de très peu de gravité, la réintégration pourra être remplacée par un avertissement, par de nouvelles règles de conduite ou par la prolongation du délai d'épreuve.

Art. 40 2e al. Si, pendant l'exécution de la peine, le condamné doit être transféré dans un hôpital ou dans un hospice, la durée de ce séjour sera imputée sur la peine. Toutefois, cette imputation n'aura pas lieu si le transfert a été rendu nécessaire par une maladie ou d'autres causes antérieures à l'incarcération, ni si. le condamné a frauduleusement provoqué son transfert, ni dans la mesure où il aurait frauduleusement prolongé son séjour à l'hôpital ou dans un hospice.

Art. 41 Ch. 1, 1er al. En cas de condamnation à une peine d'emprisonnement n'excédant pas un an, aux arrêts ou à une amende prononcée en vertu du présent code, le juge pourra suspendre l'exécution de la peine: Ch. 1, 3e al. si, en outre, dans les cinq ans qui ont précédé la commission de l'infraction, le condamné n'a encouru, en Suisse ou à l'étranger, aucune peine privative de liberté pour crime ou délit intentionnel.

1283 Ch. 3, 2e al. (nouveau). Dans les cas de très peu de gravité, l'exécution de la peine pourra être remplacée par un avertissement, par de nouvelles règles de conduite ou par la prolongation du délai d'épreuve.

Ch. 4. Si le condamné a subi l'épreuve jusqu'au bout et que les amendes et les peines accessoires prononcées sans sursis sont exécutées, le juge ordonnera la radiation du jugement au casier judiciaire.

Art. 42 Ch. 1, dernière phrase. Si le condamné est étranger, le juge pourra, au lieu de l'internement, prononcer l'expulsion du territoire suisse, qui sera exécutée après que la peine aura été subie conformément à l'article So.

Ch. 6, 1er al., dernière phrase. Si, dans les trois ans qui suivent la libération conditionnelle, le condamné commet une nouvelle infraction, si, au mépris d'un avertissement formel de l'autorité de patronage, il persiste à enfreindre les règles de conduite à lui imposées, ou s'il se soustrait obstinément au patronage, l'autorité compétente pourra ordonner sa réintégration dans l'établissement. En règle générale, le nouvel internement durera cinq ans au moins.

Art. 43 Ch. 5, 1er al., lre et 2e phrases. Le condamné demeurera dans la maison au moins pendant les deux tiers de la peine prononcée et en tout cas pendant un an. Ce délai expiré, l'autorité compétente pourra le libérer conditionnellement pour un à trois ans, si elle l'estime apte et disposé à travailler.

Ch. 5, 2e al. Lorsque, pendant le délai d'épreuve, le libéré commet intentionnellement un crime ou un délit, le juge décidera si, et dans quelle mesure, la peine prononcée sera exécutée.

Ch. 5, 3e al. Si, pendant le délai d'épreuve, le libéré se livre de nouveau à l'inconduite ou à la fainéantise, si au mépris d'un avertissement formel de l'autorité de patronage, il persiste à enfreindre les règles de conduite à lui imposées, ou s'il se soustrait au patronage, l'autorité compétente pourra ordonner sa réintégration dans la maison ; elle pourra aussi requérir le juge d'ordonner l'exécution de tout ou partie de la peine prononcée.

Art. 44 Ch. 5. Si le libéré s'est bien conduit jusqu'à l'expiration du délai d'épreuve, sa libération deviendra définitive.

Art. 54 2e al. L'interdiction sortira ses effets à partir du jour où le jugement qui la prononce est passé en force. Si le condamné est libéré conditionnellement, l'autorité compétente décidera si, et à quelles conditions, il pourra exercer à l'essai sa profession, son industrie ou son commerce.

1284 3e al. (nouveau). Lorsque le condamné libéré conditionnellement s'est bien conduit jusqu'à l'expiration du délai d'épreuve, la peine accessoire ne sera plus exécutée s'il avait été autorisé à exercer à l'essai sa profession, son industrie ou son commerce. S'il n'avait pas été autorisé à le faire, la durée de l'interdiction courra du jour de sa libération conditionnelle.

4e al. (nouveau). Lorsque le condamné n'a pas été libéré conditionnellement ou que, l'ayant été, il ne s'est pas bien conduit pendant le délai d'épreuve, la durée de l'interdiction sera comptée à partir du jour où la peine privative de liberté ou la partie qui en reste aura été subie ou remise.

Art. 55 Le juge pourra expulser du territoire suisse, pour une durée de trois à quinze ans, tout étranger condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement.

En cas de récidive, l'expulsion pourra être prononcée à vie.

Lorsque le condamné est libéré conditionnellement, l'autorité compétente décidera si, et à quelles conditions, l'expulsion doit être différée à titre d'essai.

Si le condamné libéré conditionnellement s'est bien conduit pendant le délai d'épreuve, l'expulsion ne sera plus exécutée dans les cas où elle avait été différée. Lorsque l'expulsion n'avait pas été différée, sa durée courra du jour où le condamné libéré conditionnellement a quitté la Suisse.

Lorsque le condamné n'a pas été libéré conditionnellement ou que, l'ayant été, il ne s'est pas bien conduit pendant le délai d'épreuve, l'expulsion sortira ses effets du jour où la peine privative de liberté ou la partie qui en reste aura été subie ou remise.

Art. 72 Ch. 2, 1er al. La prescription est interrompue par toute citation de l'inculpé devant un juge d'instruction ou un tribunal suisse, par la signification d'un mandat d'arrêt, par tout interrogatoire de l'inculpé au cours de l'instruction, ainsi que par l'exercice de tout moyen de recours ou d'opposition prévue par la loi.

Art. 80 1er al. Lorsqu'un délinquant aura été condamné à une peine privative de liberté ou à une amende et que, depuis l'exécution du jugement, il se sera écoulé quinze ans au moins en cas de condamnation à la réclusion ou au renvoi dans une maison d'internement, dix ans au moins en cas de condamnation à toute autre peine privative de liberté ou mesure et cinq ans au moins dans le cas où la peine principale consiste en une amende, le juge pourra, à la requête du condamné, ordonner la radiation du jugement au casier judiciaire si le condamné a mérité cette mesure par sa conduite, s'il a, autant qu'on pouvait l'attendre de lui, réparé le dommage fixé judiciairement ou par accord avec le lésé et si le jugement est exécuté en ce qui concerne les peines accessoires.

1285 Al. Ibis. En cas de. 'prescription de la, peine, le, délai utile pour requérir la radiation court du jour ou le jugement est passé en force, et il est de dixhuit ans au moins pour les condamnations à la réclusion et de douze ans au moins pour les autres peines.

Al. 2. La radiation pourra être ordonnée avant l'expiration des délais normaux si un acte particulièrement méritoire du requérant le justifie.

Art. 81 2 al. Lorsqu'un condamné libéré conditionnellement a subi l'épreuve jusqu'au bout, le délai utile pour requérir la radiation court du jour de la libération conditionnelle. Si le condamné a été renvoyé dans une maison d'internement, sa réhabilitation ne pourra être prononcée qu'après un délai de cinq ans au moins à partir de sa libération définitive.

e

Art. 94 2e al., 3e phrase. Elle lui imposera un délai d'épreuve d'un à trois ans et, le cas échéant, certaines règles de conduite, telles que l'obligation d'apprendre un métier, de séjourner dans un lieu déterminé ou de s'abstenir de boissons alcooliques.

3e al. Si, durant le délai d'épreuve, l'adolescent libéré enfreint les règles de conduite à lui imposées ou si, de toute autre façon, il abuse de sa liberté, l'autorité compétente pourra ordonner sa réintégration dans l'établissement.

En cas contraire, sa libération sera définitive.

Art. 97 1er al. Lorsqu'il n'est pas possible de juger avec certitude si l'adolescent est moralement abandonné, perverti ou en danger de l'être ou s'il a besoin d'un traitement spécial, et s'il n'a pas commis d'autres actes délictueux ou n'en a commis que de très peu graves, l'autorité compétente pourra, pourvu que les conditions énoncées à l'article précédent soient aussi remplies, suspendre sa décision concernant une peine ou une mesure. L'adolescent sera soumis à un patronage. Un délai d'épreuve de trois ans au maximum lui sera imparti.

Art. 99 Note marginale: Radiation des mesures et peines au casier.

L'autorité compétente pourra, à la requête de l'intéressé, ordonner la radiation au casier judiciaire des mesures et peines prononcées contre lui, si depuis leur exécution il s'est écoulé trois ans au moins, si la conduite du requérant justifie cette radiation, et s'il a, autant qu'on, pouvait l'attendre de lui, réparé le dommage fixé par l'autorité ou par accord avec le lésé.

1286 Art. 100 er

Ch. 1 . Si, au moment où le crime ou le délit a été commis, l'auteur était âgé de plus de dix-huit ans, mais de moins de vingt ans révolus, le juge pourra atténuer la peine conformément aux dispositions de l'article 65.

La réclusion à vie sera remplacée, par la réclusion pour cinq ans au moins.

Le juge pourra renoncer à toute peine ou mesure si la moitié du délai de prescription s'est écoulée depuis le jour où l'acte a été commis.

En règle générale, ces condamnés seront séparés de tous détenus majeurs.

Ch, 2. Les présentes dispositions s'appliqueront aussi lorsque l'auteur d'un acte commis avant l'âge de vingt ans révolus sera jugé après avoir dépassé cet âge.

Art. 109 L'action pénale se prescrira par une année, la peine par deux ans.

Art. 110 Ch. 6. Le jour Ch. 7. Est considérée

Art. 173 Ch. 1er. Celui qui, en s'adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, celui qui aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon, sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement pour six mois au plus ou de l'amende.

Ch. 2. L'inculpé n'encourra aucune peine s'il prouve que les allégations qu'il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu'il avait des motifs sérieux de les tenir de bonne foi pour vraies.

Si les allégations que l'inculpé avait des motifs sérieux de tenir de bonne foi pour vraies sont contraires à la vérité ou si l'auteur n'a pas fait la preuve de leur vérité, acte en sera donné à l'offensé dans le jugement ou autrement.

Ch. 3. Si, après avoir reçu les explications nécessaires ou devant le juge, l'auteur reconnaît immédiatement la fausseté de ses allégations et les rétracte, le juge pourra atténuer la peine ou exempter l'auteur de toute peine; la rétractation sera constatée dans le jugement ou acte en sera donné autrement à l'offensé.

Ch. 4. Si les allégations ont été articulées sans motif suffisant, principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui, l'inculpé ne sera autorisé à faire la preuve de leur vérité qu'avec le consentement de l'offensé.

1287 Art. 174 Oh. I , 2 al. celui qui aura propagé de telles accusations ou de tels soupçons, alors qu'il en connaissait l'inanité, er

e

Art. 177 bis Note marginale: Délits contre l'honneur dirigés contre une autorité ou un groupement de personnes.

La diffamation, la calomnie et l'injure sont aussi punissables lorsqu'elles sont dirigées contre une autorité ou un groupement de personnes.

Art. 204 Ch. 2. Celui qui aura remis ou exhibé de tels objets à une personne âgée de moins de dix-nuit ans sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Art. 217 1 al. Celui qui, par mauvaise volonté, par fainéantise ou par inconduite, ne fournira pas les aliments ou les subsides qu'il doit à ses proches ou à son conjoint divorcé en vertu du droit de famille, er

Art. 266 Ch. 2, 2e al. (nouveau). Dans les cas graves, le juge pourra prononcer la réclusion à vie.

Art. 266 6ts Note marginale: Soutenir des entreprises et menées de l'étranger contre la sécurité de la Suisse.

Celui qui, dans le dessein de soutenir des entreprises ou menées politiques de l'étranger contre la sécurité de la Suisse, sera entré en rapport avec un Etat étranger, ou avec des partis étrangers, ou avec d'autres organismes à l'étranger, ou avec leurs agents, aura lancé ou propagé des informations inexactes ou tendancieuses, sera puni de l'emprisonnement pour cinq ans au plus.

Dans les cas graves, le juge pourra prononcer la réclusion.

Art. 269 Celui qui aura pénétré sur le territoire suisse contrairement au droit des gens sera puni de la réclusion ou de l'emprisonnement.

Art. 272 Ch. 1 . Celui qui, dans l'intérêt d'un Etat étranger, ou d'un parti étranger ou d'un autre organisme de l'étranger, et au préjudice de la Suisse ou de er

1288 ses ressortissants, habitants ou organismes, aura pratiqué un service de renseignements politiques, ou aura organisé un tel service, celui qui aura engagé autrui pour un tel service ou favorisé de tels agissements, sera puni de l'emprisonnement.

Art. 274 Gh. 1 , 4 al. (nouveau). Dans les cas graves, le juge pourra prononcer la réclusion.

Art. 275 Note marginale: Atteintes à l'ordre constitutionnel.

Celui qui aura commis un acte tendant à troubler ou à modifier d'une manière illicite l'ordre fondé sur la constitution de la Confédération ou d'un canton, sera funi de l'emprisonnement pour cinq ans au plus.

er

e

Art. 275 ois Note marginale: Propagande subversive.

Celui qui aura fait une propagande tendant à troubler ou à modifier d'une manière illicite l'ordre fondé sur la constitution de la Confédération ou d'un canton, celui qui aura favorisé une telle propagande, notamment si elle émane de l'étranger, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Art. 275 ter (ancien art. 275) Note marginale: Groupements illicites.

Celui qui aura fondé un groupement qui vise ou dont l'activité consiste à accomplir des actes réprimés par les art. 265, 266, 266bis, 271 à 274, 275 et 275bis, celui qui aura adhéré à un tel groupement ou se sera associé à ses menées, celui qui aura provoqué à la fondation d'un tel groupement ou se sera conformé à ses instructions, sera puni de l'emprisonnement.

Art. 285 Ch. 1er, Celui qui, en usant de violence ou de menace, aura empêché une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions, les aura contraints à faire un tel acte ou se sera livré à des voies de fait sur eux pendant qu'ils y procédaient, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

1289 Art. 286 Celui qui aura empêché une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions, sera puni de l'emprisonnement pour un mois au plus ou de l'amende.

Art. 296 Celui qui, publiquement, aura outragé un Etat étranger dans la personne de son chef, dans son gouvernement ou dans la personne de son agent diplomatique ou d'un de ses délégués officiels à une conférence diplomatique siégeant en Suisse ou d'un de ses représentants officiels au sein d'une institution interétatique ou de son organisation établie ou siégeant en Suisse, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Art. 297 Note marginale: Outrages concernant des institutions interétatiques.

Celui qui, publiquement, aura outragé une institution interétatique ou son organisation établie ou siégeant en Suisse dans la personne d'un de ses représentants officiels, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Art. 302 e

2 al. Le Conseil fédéral n'ordonnera la poursuite que si la demande en est faite par le gouvernement de l'Etat étranger dans les cas prévus à l'article 296 et par un organe de l'institution interétatique dans les cas visés à l'article 297. En temps de service actif, il pourra ordonner la poursuite même en l'absence d'une telle requête.

Art. 327 Note marginale: Contrefaçon et imitation de papier-monnaie, billets de banque et timbres officiels de valeur sans dessein de faux.

Ch. 1er. Celui qui, sans dessein de commettre un faux, en particulier à titre de plaisanterie ou de réclame, aura contrefait ou imité du papiermonnaie, des billets de banque ou des timbres officiels de valeur de Suisse ou de l'étranger, celui qui aura importé de telles contrefaçons ou imitations, ou les aura mises en vente ou en circulation, sera puni des arrêts ou de l'amende.

Ch. 2. Est réservée la reproduction de papier-monnaie, de billets de banque et de timbres officiels de valeur à des fins officielles ou scientifiques avec l'assentiment écrit de l'autorité compétente pour les émettre.

Ch. 3. Les objets contrefaits ou imités seront confisqués.

1290 Art. 341 Lit. b. Des cas de révolte ou de violence contre les autorités fédérales; Art. 346 1 al. L'autorité compétente pour la poursuite et le jugement d'une infraction est celle du lieu où l'auteur a agi. Si le lieu où le résultat s'est produit ou devait se produire est seul situé en Suisse, l'autorité compétente est celle de ce lieu.

2e al. Si l'auteur a agi ou si le résultat s'est produit en différents lieux, l'autorité compétente est celle du lieu où la première instruction a été ouverte.

Art. 363 e 2 al. Aucun extrait ne sera délivré aux particuliers. Chacun a cependant le droit de se faire délivrer des extraits de son propre casier. Ces extraits ne mentionneront pas les mesures et les peines prononcées en vertu des articles 91 à 97.

Al. 2 bis. Le Conseil fédéral peut édicter d'autres dispositions sur les extraits qui sont délivrés pour certains buts déterminés.

er

Art. 396 1er al. Par l'effet de la grâce, toutes les peines prononcées par un jugement passé en force, de même que la publication du jugement, peuvent être remises, totalement ou partiellement, ou commuées en des peines plus douces.

II L'article 8 de la loi du 26 mars 1934 sur les garanties politiques et de police en faveur de la Confédération (*) est complété par la disposition suivante : Al. 2bis. Ces infractions sont poursuivies d'office avec l'autorisation de la personne ou de l'autorité, attaquée.

III L'arrêté du Conseil fédéral du 29 octobre 1948 renforçant les dispositions pénales pour la protection de l'Etat (**) est abrogé.

IV La présente loi entre en vigueur le (*) RO 50, 529.

(**) KO 1948, 1063.

78TÏ

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi révisant partiellement le code pénal suisse (Du 20 juin 1949)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1949

Année Anno Band

1

Volume Volume Heft

25

Cahier Numero Geschäftsnummer

5643

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

23.06.1949

Date Data Seite

1233-1290

Page Pagina Ref. No

10 091 567

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.