05.046 Message sur la participation de la Suisse à l'Agence européenne de la sécurité aérienne AESA (Modification de l'annexe de l'Accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport aérien et de la loi sur l'aviation) du 25 mai 2005

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous priant de les adopter: ­

le projet d'arrêté fédéral sur la participation de la Suisse à l'Agence européenne de la sécurité aérienne AESA (modification de l'annexe de l'Accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport aérien)

­

le projet de modification correspondante de la loi sur l'aviation.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

25 mai 2005

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Samuel Schmid La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2005-0979

3651

Condensé Par le présent message, le Conseil fédéral prie les Chambres fédérales d'entériner la participation de la Suisse à l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) et ce, en acceptant une modification de l'annexe de l'Accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport aérien et une modification de la loi fédérale sur l'aviation (LA).

La participation de la Suisse à l'AESA et la révision de la LA correspondante constituent l'aboutissement logique d'une évolution dont le point de départ remonte à la fin des années 90, lorsque la Communauté européenne décida de créer une institution européenne de l'aviation civile. Il était par trop évident que la Suisse, étant un membre à part entière des «Joint Aviation Authorities» (JAA) et jouant un rôle moteur dans l'élaboration et le développement de prescriptions techniques et opérationnelles visant à promouvoir et à harmoniser la sécurité aérienne en Europe, ne pourrait pas se soustraire à cette évolution. La création de l'AESA plaçait notre pays, qui ne fait pas partie de l'UE, devant deux options. Ou bien abandonner la voie de l'intégration européenne suivie jusqu'à présent et exposer ce faisant un secteur économique entier, traditionnellement marqué par son caractère transnational, aux risques de l'isolationnisme. Ou alors, en adoptant suffisamment tôt une stratégie de participation à l'AESA, montrer clairement d'entrée de jeu la volonté de la Suisse de participer à l'amélioration de la sécurité aérienne en Europe, ce qui garantissait également un accès optimal de l'industrie aéronautique suisse au marché européen. En souhaitant que la Suisse rejoigne l'AESA, le Conseil fédéral a clairement opté en faveur de la seconde solution.

L'objectif de faire participer la Suisse à l'AESA s'inscrit dans le droit fil de la politique suivie jusqu'à présent, laquelle vise la meilleure intégration possible de l'aviation suisse dans l'espace européen, comme en témoigne la conclusion en 1999 de l'accord bilatéral sur le transport aérien. La participation de la Suisse à l'AESA est en outre conforme aux objectifs définis par le Conseil fédéral dans son Rapport sur la politique aéronautique de la Suisse publié fin 2004. Elle garantit également la collaboration à long terme de la Suisse au sein de l'autorité européenne de sécurité
aérienne et l'accès sans restriction de son industrie au marché aéronautique européen.

Le présent message vous propose également une modification de la loi sur l'aviation ­ dans le souci d'améliorer la sécurité aérienne ­ visant à créer les bases légales d'un système de comptes rendus d'événements et d'incidents dans l'aviation civile.

Enfin, nous saisissons l'occasion de cette révision de la LA pour donner suite à une requête de la Commission de gestion du Conseil des Etats formulée le 2 décembre 2002 dans le cadre de l'examen des activités du DETEC après la déconfiture de la compagnie Swissair: c'est l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC) et non plus le département qui devrait être désormais habilité à octroyer des concessions de routes aux entreprises sises en Suisse.

3652

La formule du message global a été choisie par souci de simplification administrative et se justifie compte tenu de l'unité de matière existant entre les différents objets.

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Table des matières Condensé

3652

1 Les grandes lignes du message 1.1 Participation de la Suisse à l'AESA 1.1.1 Contexte 1.1.2 Le mandat de l'AESA 1.1.3 Des JAA à l'AESA 1.1.4 Le développement futur de l'AESA 1.1.5 La situation actuelle de la Suisse 1.1.6 Les négociations avec la Commission européenne 1.1.7 Consultations 1.2 Système de déclaration des incidents 1.3 Compétence d'octroi des concessions de routes

3656 3656 3656 3657 3658 3659 3660 3660 3661 3661 3663

2 Commentaire des dispositions 2.1 Règlement (CE) n° 1592/2002 2.1.1 Généralités 2.1.2 Principes (art. 1 à 3) 2.1.3 Exigences de fond (art. 4 à 11) 2.1.4 Missions (art. 12 à 18) 2.1.5 Structure interne (art. 19 à 42) 2.1.6 Méthodes de travail (art. 43 à 47) 2.1.7 Dispositions financières (art. 48 à 53) 2.1.8 Dispositions finales (art. 54 à 58) 2.2 Modification de la loi fédérale sur l'aviation dans l'optique d'une participation à l'AESA 2.3 Autres modifications de la loi sur l'aviation 2.3.1 Instauration d'un système de déclaration (art. 20) 2.3.2 Compétence d'octroi des concessions de routes (art. 28, al. 2)

3663 3663 3663 3664 3664 3666 3667 3668 3668 3670 3670 3671 3671 3671

3 Conséquences 3.1 Conséquences financières et effets sur le personnel de la Confédération 3.1.1 Participation à l'AESA 3.1.2 Modification de la loi fédérale sur l'aviation 3.2 Conséquences économiques et effets pour l'aviation suisse

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4 Lien avec la programme de la législature 4.1 Participation à l'AESA 4.2 Modification de la loi fédérale sur l'aviation

3673 3673 3673

5 Aspect juridiques 5.1 Constitutionnalité 5.1.1 Participation à l'AESA 5.1.2 Modification de la loi fédérale sur l'aviation 5.2 Référendum facultatif en matière de traités internationaux

3674 3674 3674 3674 3674

3654

Loi fédérale sur l'aviation (Projet)

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Arrêté fédéral sur la participation de la Suisse à l'Agence européenne de la sécurité aérienne AESA (Modification de l'annexe de l'Accord entre la Confédération suisseet la Communauté européenne sur le transport aérien) (Projet)

3679

3655

Message 1

Les grandes lignes du message

1.1

Participation de la Suisse à l'AESA

1.1.1

Contexte

La création de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) en 1944 concrétisa ce que l'on savait déjà depuis les débuts de l'aviation, à savoir que celleci ne pouvait être considérée comme un domaine relevant uniquement de la sphère nationale, qu'elle devait être considérée dans une perspective mondiale et transnationale et qu'elle devait aller de pair avec une étroite collaboration entre les pays. Le désir de faciliter le trafic international fut d'ailleurs l'une des principales raisons de la création de l'OACI. La collaboration entre les pays aboutit en Europe à la constitution, au milieu des années 50, de la Conférence européenne de l'aviation (CEAC), qui devait donner naissance vingt ans plus tard (1970) aux «Joint Aviation Authorities» (Autorités conjointes de l'aviation, JAA). Les JAA, auxquelles la Suisse est affiliée depuis 1979, ont réglementé et harmonisé ces dernières années sur le plan européen les normes de sécurité opérationnelles et techniques et ont rempli jusqu'à une date récente une indispensable fonction de standardisation dans l'aviation civile.

La Suisse s'est toujours impliquée activement au sein des JAA et elle figure aujourd'hui au nombre des Etats qui appliquent pratiquement l'intégralité des normes issues de la collaboration entre les autorités de l'aviation civile («Joint Aviation Requirements»; JAR). Etant donné que l'application de ces normes relève de la compétence exclusive des Etats, les différences entre pays ont persisté, nonobstant les efforts d'harmonisation entrepris par les JAA. Par voie de conséquence, les acteurs du transport aérien n'étaient pas soumis aux mêmes règles en matière de concurrence, ni aux mêmes exigences de sécurité. C'est parce que les JAA ne prévoyaient en principe que des moyens politiques pour faire appliquer ses normes et n'avaient aucun pouvoir juridique contraignant que la Communauté européenne (CE) a décidé à la fin des années 90 de créer une Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA), dont le règlement (CE) 1592/2002 du 15 juillet 2002 constitue l'acte de naissance officiel1. Le texte attribue notamment au nouvel organisme des moyens appropriés pour veiller à l'application du droit communautaire en matière de sécurité aérienne. L'AESA est donc un organisme de la Communauté européenne doté d'une personnalité juridique propre, indépendant dans le traitement des questions d'ordre technique, autonome sur les plans administratif et financier.

1

Règlement (CE) n° 1592/2002 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2002 concernant des règles communes dans le domaine de l'aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne (JOCE n° L 240 du 07/09/2002 p. 1­21), modifié par le règlement (CE) n° 1701/2003 de la Commission du 24 septembre 2003 (JOCE n° L 243 du 27.9.2003 page 5).

3656

1.1.2

Le mandat de l'AESA

L'AESA est entrée en fonction le 28 septembre 2003 et, après s'être provisoirement établie à Bruxelles, a pris ses quartiers définitifs à Cologne début novembre 2004.

Elle exerce des tâches de régulation et d'exécution dans les domaines de la sécurité de l'aviation civile et de la protection de l'environnement. Elle constitue un élément essentiel de la mise en place et du maintien d'un niveau élevé de sécurité et de protection de l'environnement dans le domaine de l'aviation. Son mandat s'articule autour de trois grands axes: 1.

Fournir une assistance technique à la Commission européenne dans l'élaboration de règles en matière de sécurité aérienne et de protection de l'environnement et dans la conclusion d'accords internationaux avec d'autres autorités aéronautiques ou d'autres Etats.

2.

Assumer des tâches d'exécution en relation avec la sécurité aérienne, comme par exemple la certification des aéronefs et d'autres produits aéronautiques, des organismes chargés de la conception, de la production et de la maintenance (entretien) des produits en question. L'AESA est compétente pour la certification de tous les produits de l'aviation civile, également ceux de l'aviation générale et de l'aviation d'affaires.

3.

Fournir une assistance à la Commission européenne dans le développement de règles et de normes en matière de sécurité aérienne et contrôler l'application et le respect de ces prescriptions par les Etats membres.

Les compétences de l'agence s'étendront prochainement à l'exploitation des entreprises aéronautiques, à l'admission du personnel aéronautique de même qu'à la surveillance d'avions de pays non membres de l'AESA opérant dans l'Union européenne. Les réglementations correspondantes sont en cours d'élaboration. Il est prévu, dans une phase ultérieure, de transférer à l'AESA la compétence en matière de sécurité des aéroports et de la circulation aérienne (services de la navigation aérienne).

Les normes uniformes de sécurité aérienne préparées, appliquées et développées par l'AESA visent à augmenter la sécurité de l'aviation civile en Europe. Les passagers doivent avoir la certitude que les avions à bord desquels ils voyagent répondent aux normes les plus sévères en matière de sécurité et de protection de l'environnement et qu'ils ne sont exploités que par des sociétés et du personnel hautement qualifiés. Qui plus est, l'uniformisation des normes à l'échelle de l'Europe va permettre à l'industrie aéronautique d'offrir ses produits et ses services sur le marché européen suivant des canaux plus simples, plus rapides, plus transparents et en fin de compte moins coûteux. Les certifications et les autorisations délivrées conformément aux prescriptions communautaires doivent être valables dans tous les Etats membres de l'AESA de sorte qu'il ne sera en principe plus possible de fixer des conditions sur le plan national entravant la libre circulation et la concurrence; seules seront applicables les normes communes. Il apparaît ainsi que l'AESA contribuera non seulement à améliorer la sécurité aérienne, mais également à accroître la sécurité du droit dans l'application des prescriptions. L'AESA favorise le libre commerce de marchandises et de services, de même que la libre circulation de certaines catégories de personnel travaillant dans l'aviation, autant d'éléments indispensables afin que les acteurs de l'aviation suisse puissent poursuivre sans entraves leurs activités aussi dans d'autres secteurs que le trafic aérien international.

3657

1.1.3

Des JAA à l'AESA

Comme nous le mentionnons plus haut, il existe déjà de nombreuses prescriptions européennes élaborées en commun par les autorités de l'aviation civile dans le cadre des JAA: ­

Conception, production et navigabilité des aéronefs (Design, Manufacturing and Airworthiness)

­

Maintenance et entretien des aéronefs (Maintenance)

­

Bruit et autres nuisances occasionnés par les aéronefs

­

Exploitation d'avions et d'hélicoptères (Operations)

­

Formation des pilotes (Licensing)

En adoptant les règlements n° 1702/20032 et 2042/20033, la Communauté européenne a intégré dans le droit communautaire l'essentiel des prescriptions des JAA, à l'exception de celles portant sur les opérations aériennes et la formation des pilotes. La preuve des nouvelles conditions générales et de leur dynamique, autrement dit des nouveaux rapports de force dans le contexte actuel de la régulation de la sécurité aérienne, nous est donnée par le fait que depuis l'adoption des deux règlements ci-dessus, les JAA ont transposé les modifications introduites par la Commission européenne dans leurs propres réglementations. La compétence réglementaire est donc aujourd'hui clairement détenue par les institutions communautaires. Pratiquement, il s'ensuit que dans la plupart des Etats non membres de l'UE ­ dont présentement la Suisse ­, les prescriptions des JAA continuent de s'appliquer formellement, mais que matériellement, elles correspondent déjà aux dispositions de l'AESA. On voit donc que les Etats non membres de l'UE ne peuvent échapper à l'emprise de la nouvelle agence, même s'ils n'en font pas partie, et que leurs produits et leurs services ne sont pleinement reconnus dans l'Europe des 25 que s'ils correspondent aux normes fixées par l'AESA. La Suisse, plus précisément son industrie aéronautique, a pu se faire pour la première fois une idée de ces nouveaux rapports de force à la fin de 2004 lorsqu'il a fallu trouver une solution pour que les organismes de conception, les entreprises de construction et les entreprises d'entretien des Etats affiliés aux JAA mais ne faisant partie ni de l'UE ni de l'AESA continuent d'être agréées, ainsi que leurs services, dans l'espace européen, compte tenu de l'entrée en vigueur de nouvelles prescriptions européennes. Contrairement aux 25 Etats membres de l'Union, pour lesquels la transition s'opérait de manière automatique, il a fallu adopter une procédure spéciale à l'intention des pays ne participant pas à l'AESA. Faute de quoi, les travaux d'entretien effectués par exemple par les quelque 70 entreprises suisses sur des aéronefs originaires de l'UE n'auraient plus été agréés à partir du 28 novembre 2004 ni par l'AESA ni par les Etats de l'Union. En d'autres termes, le système d'agrément, pratiqué jusque-là dans le cadre des JAA, des produits et des services d'entreprises répondant aux «ancien2

3

Règlement (CE) n° 1702/2003 de la Commission du 24 septembre 2003 établissant les règles d'application pour la certification de navigabilité et environnementale des aéronefs et produits, pièces et équipements associés, ainsi que pour la certification des organismes de conception et de production (JOCE n° L 243 du 27.9.2003. p. 6).

Règlement (CE) n° 2042/2003 de la Commission du 20 novembre 2003 relatif au maintien de la navigabilité des aéronefs et des produits, pièces et équipements aéronautiques, et relatif à l'agrément des organismes et des personnels participant à ces tâches (JOCE n° L 315 du 28/11/2003 p. 1).

3658

nes» normes des JAA a été remis en cause pour les Etats non membres de l'AESA et n'a dû en fin de compte son maintien provisoire qu'à la mise en oeuvre des normes AESA. La Suisse a pu bénéficier de ce régime spécial parce que son industrie était hautement standardisée, ayant systématiquement mis en oeuvre les normes des JAA au cours des années passées. Au total, plus de 70 entreprises suisses d'entretien détiennent à titre provisoire un agrément de l'AESA en vertu de la clause des droits acquis (grand father rights). Sans la mise en oeuvre des normes de l'AESA et donc en l'absence d'agrément, les entreprises concernées auraient subi un préjudice économique énorme, ce qui aurait également mis en péril un grand nombre d'emplois importants en Suisse. Certes, sans participation formelle de la Suisse à l'agence, les entreprises suisses pourraient tout de même bénéficier d'un agrément de l'AESA sur la base des accords de reconnaissance passés entre les autorités fédérales compétentes et l'AESA. Dans ce cas, elles jouiraient du statut de «foreign organisations» ­ organismes d'un pays tiers ­; ce qui les pénaliserait du point de vue économique et administratif. De plus, la Suisse n'étant pas membre de l'agence, ses autorités n'auraient aucun moyen de pallier ces inconvénients.

1.1.4

Le développement futur de l'AESA

Comme il l'est mentionné plus haut, l'AESA exerce déjà un certain nombre de compétences ­ octroi des certificats de type; délivrance d'agréments aux organisations de conception, aux entreprises de construction et aux entreprises d'entretien; octroi de licences au personnel et aux établissements de formation ­ qui s'étendront progressivement à d'autres domaines de la surveillance de la sécurité. A terme, elle est appelée à devenir le seul organisme compétent sur le plan européen en matière de sécurité de l'aviation civile. Cette évolution s'accompagnera d'un transfert vers elle des prérogatives actuellement dévolues aux autorités aéronautiques nationales et se soldera par la disparition complète des JAA, dont les activités dans tous les secteurs transférés à l'AESA sont déjà aujourd'hui réduites au minimum. L'AESA restera toutefois tributaire du soutien et des connaissances spécifiques des autorités nationales de l'aviation civile. Une éventuelle réduction de leurs activités ne pourra avoir lieu que lorsque l'agence se sera dotée de ressources institutionnelles, techniques et humaines suffisantes pour exécuter de manière autonome les tâches qui lui seront confiées. Ce processus devrait prendre encore quelques années, d'autant plus que le transfert des ressources financières et humaines et du savoir-faire est très complexe et est en partie conditionné par les intérêts purement nationaux des Etats membres.

Une réduction des activités de surveillance des autorités nationales ne peut s'envisager que lorsque celles-ci auront effectivement été transférées à l'AESA.

C'est ce qui explique que l'Agence peut conclure des accords de collaboration afin de s'assurer l'assistance technique et opérationnelle des autorités aéronautiques nationales. Ces accords de délégation de tâches de l'Agence aux autorités nationales ne sont toutefois pas possibles avec les autorités des pays non membres de l'AESA.

Autrement dit, faute de participation formelle à l'AESA, la Suisse, petit pays où l'aviation a depuis toujours joué un rôle économique important et qui possède une multitude d'entreprises, dont certaines ont une réputation qui va bien au-delà des frontières nationales, ne pourrait plus avoir directement accès aux progrès techniques et aux nouveautés concernant la sécurité aérienne. En fin de compte, elle ne pourrait pas correctement faire valoir ses prétentions en matière de sécurité aérienne

3659

et ses intérêts économiques. Elle serait de ce fait désavantagée par rapport aux autres pays européens.

1.1.5

La situation actuelle de la Suisse

Si la Suisse jouit à l'heure actuelle en Europe d'une large reconnaissance ­ ce qui fut globalement bénéfique pour son industrie aéronautique ­ c'est avant tout à sa participation active au sein des JAA qu'elle le doit. Dans l'optique d'une adhésion ou d'une participation ultérieures, l'AESA reconnaît également l'équivalence des certificats d'entreprises octroyés en vertu des dispositions des JAA. Cette mesure a permis d'éviter jusqu'à présent une précarisation de la situation des entreprises suisses par rapport à leurs concurrentes des Etats membres de l'AESA. Sans cette bienveillance de la part de ses partenaires et sans participation à l'AESA, non seulement elle ne pourrait plus assumer le rôle qu'elle joue actuellement, mais elle courrait également le risque de voir un des secteurs importants de son économie bridé dans ses activités en Europe.

La Suisse est déjà bien associée aux activités de l'AESA. Elle dispose depuis décembre 2002 du statut d'observateur au Conseil d'administration (Management Board), au même titre que l'Islande et la Norvège, pays membres de l'EEE; elle siège depuis février 2004 de manière informelle au sein d'un organe consultatif des parties intéressées (Advisory Group of National Authorities; AGNA). Cette participation a été rendue possible par l'action commune des trois pays et par le fait que la Norvège, l'Islande et la Suisse ont manifesté d'emblée leur intention de transformer à terme cette collaboration en une participation en bonne et due forme. Cette collaboration de la Suisse aux travaux de l'Agence doit être considérée comme une solution temporaire qui dépend largement du bon vouloir de la Commission européenne et qui est conditionnée à la promesse d'une participation future à l'Agence.

1.1.6

Les négociations avec la Commission européenne

Eu égard à l'importance économique d'une intégration de l'industrie aéronautique suisse dans les structures de l'AESA, la Suisse a fait très tôt montre de son intérêt à une participation à l'Agence. De son côté, la Communauté européenne voyait également d'un bon oeil une telle participation, dans la mesure où elle a toujours pensé que la Suisse prendrait part aux travaux de l'AESA dans le cadre de l'accord bilatéral sur le transport aérien. Après deux ans de pourparlers, d'abord au niveau des experts, puis au niveau ministériel, la Commission européenne a soumis en été 2004 une proposition concrète à la Suisse.

Le 3 décembre 2004, les deux parties, réunies dans le cadre du Comité mixte des transports aériens Communauté-Suisse, parvenaient à un accord de principe sur les modalités d'une participation, après que le Conseil fédéral in corpore eut approuvé cette procédure et les grands axes de l'accord. La forme de la participation de la Suisse au sein du Conseil d'administration et au sein du comité de l'AESA ­ un organe consultatif de la Commission européenne ­, délicate d'un point de vue institutionnel et politique, a donné lieu à d'intenses négociations. La Commission européenne est demeurée inflexible sur la question des droits de vote au sein du Conseil d'administration, étant donné que les Etats non membres ne sont pas autorisés à 3660

participer à des votes ­ qui soit dit en passant sont choses rares ­ portant sur des objets d'intérêt purement communautaire et que l'Islande et la Norvège venaient d'approuver cette solution. En contrepartie, la Suisse a obtenu que le comité de l'AESA figure également dans la liste des comités de l'UE dans lesquels la Suisse a le droit de siéger en qualité d'observateur, négociée en 1999 dans le cadre des Accords bilatéraux I. La Suisse peut ainsi faire valoir ses intérêts politiques et ses revendications, non seulement au sein des groupes d'experts de l'AESA, mais également dans le cadre du processus législatif communautaire.

Le résultat des négociations en vue de la participation de la Suisse à l'AESA, qui sera détaillé plus avant au chapitre 2 avec le commentaire des dispositions du règlement (CE) n° 1592/2002, peut être globalement qualifié d'équilibré. Il correspond aux objectifs que la Suisse s'était fixés et il est, sur le fond, pratiquement identique aux modalités négociées par les Etats de l'EEE (Islande, Liechtenstein, Norvège).

Ces modalités doivent maintenant être soumises à l'examen et à l'approbation des Chambres fédérales. Du côté de la Communauté européenne, le projet doit encore passer devant le Conseil des ministres.

1.1.7

Consultations

L'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC) a mesuré les avantages et les inconvénients, de même que la signification économique de la participation de la Suisse à l'AESA par le biais d'une enquête réalisée en 2003 auprès de l'ensemble des entreprises du secteur aéronautique suisse. Il ressortait des réponses reçues que les avantages l'emportaient nettement sur les inconvénients. Par ailleurs, la participation à l'AESA a été débattue et discutée à maintes reprises avec des représentants de l'industrie aéronautique dans le cadre de la préparation à la réunion du Comité mixte et lors des séances de la Commission fédérale de l'aviation. En outre, l'OFAC a organisé ces deux dernières années plusieurs réunions spéciales consacrées à l'AESA auxquelles les entreprises directement concernées ont toujours été invitées.

Ces réunions ont servi à présenter l'état des connaissances et des travaux liés à la mise sur pied de l'Agence et à alimenter le débat sur la participation de la Suisse.

Le Conseil fédéral constate que les milieux directement concernés ne nourrissent aujourd'hui pratiquement plus aucun doute sur la nécessité de la participation de la Suisse à l'AESA. Seule une poignée d'entreprises actives exclusivement en Suisse doit s'attendre à supporter un léger surcroît de travail administratif, alors que toutes les entreprises à vocation internationale y trouveront leur intérêt. De plus, une harmonisation de la réglementation au niveau européen devrait en fin de compte ouvrir les marchés des entreprises qui étaient jusqu'à présent uniquement actives en Suisse.

1.2

Système de déclaration des incidents

Il n'est de sécurité aérienne efficace et prévoyante que si l'autorité de surveillance est au fait de tous les incidents et événements. Le recensement le plus complet possible de tels événements permet d'en tirer les conséquences qui s'imposent et d'éviter les accidents. La prévention des accidents repose toutefois sur un système de déclaration. Afin d'en assurer la promotion optimale, l'Europe a mis en place un système où les notifications d'incidents sont enregistrées de manière anonyme et qui 3661

garantit que le notifiant ne sera pas poursuivi pénalement pour avoir signalé un incident ou un événement. On encourage ce faisant l'autodénonciation, notamment lorsque l'événement n'aurait pas pu être découvert autrement.

Il est important de souligner à cet égard que si le fait de signaler un incident ou un événement n'entraîne aucune poursuite pénale, il va de soi que la notification peut tout de même aboutir à l'ouverture d'une procédure pénale lorsque l'autorité de surveillance prend connaissance d'un événement spécifique par un autre canal que la notification anonyme. La Suisse envisage d'intégrer dans l'Accord CH-UE sur le transport aérien la directive européenne correspondante (directive 2003/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 20034 concernant les comptes rendus d'événements dans l'aviation civile y compris les modifications ultérieures) et, conformément aux exigences de cette directive, de transposer certaines de ses dispositions dans le droit suisse. La révision de la loi sur l'aviation (LA) se référant directement à cette directive, l'intégration dans l'Accord sur le transport aérien de la directive et la loi révisée devront donc entrer en vigueur en même temps.

On trouvera ci-après un bref commentaire des principales dispositions de la directive 2003/42/CE. L'art. 3 définit son champ d'application. La directive s'applique aux événements qui mettent en danger ou qui, s'ils ne sont pas corrigés, mettraient en danger un aéronef, ses occupants ou toute autre personne. Des listes d'exemples de tels événements figurent aux annexes de la directive. L'art. 4 définit les personnes (p.ex. les pilotes, le personnel assurant les tâches de conception, de construction, d'entretien d'un aéronef) qui sont tenues de communiquer aux autorités compétentes les événements couverts par l'art. 3. L'art. 5 impose aux Etats membres de désigner une ou plusieurs autorités compétentes pour mettre en place un mécanisme permettant de collecter et de stocker les événements signalés. Selon l'art. 6, les Etats membres participent à un échange mutuel d'informations en mettant à la disposition des autorités compétentes des autres Etats membres les informations stockées. De plus, afin que les entités chargées de réglementer la sécurité de l'aviation civile ou d'enquêter sur les accidents et les incidents
de l'aviation civile puissent tirer des événements signalés des enseignements en matière de sécurité, l'art. 7 leur accorde l'accès aux informations sur les événements qui sont collectées et échangées conformément aux art. 5 et 6. L'art. 8 contient un élément essentiel du système de comptes rendus, en prévoyant que les Etats membres s'abstiennent d'intenter une action en ce qui concerne les infractions à la loi non préméditées ou commises par inadvertance, qu'ils viendraient à connaître seulement parce qu'elles ont été signalées dans le cadre du système national de comptes rendus obligatoires d'événements, sauf dans les cas de négligence grave. Pour les événements qui ne doivent pas être communiqués dans le cadre du système de comptes rendus obligatoires établi par les art. 4 et 5, les Etats membres peuvent, sur la base de l'art. 9, établir un système supplémentaire de comptes rendus volontaires (où l'anonymat est garanti).

4

JOCE L 167 du 4.7.2003, p. 23.

3662

1.3

Compétence d'octroi des concessions de routes

Cette révision de la LA est également l'occasion de donner suite à une proposition présentée le 2 décembre 2002 par la commission de gestion du Conseil des Etats.

Lors d'un contrôle des activités du DETEC, la commission, constatant que la majorité des autorisations étaient délivrées sur la base d'accords bilatéraux et que la marge décisionnelle dans ce domaine était donc restreinte, avait estimé que l'attribution au DETEC de la compétence d'octroyer des concessions de routes à des entreprises sises en Suisse en vertu à l'art. 28, al. 2 LA n'avait plus de raison d'être.

Elle avait dès lors proposé de transférer cette compétence à l'OFAC, qui l'exerce déjà pour les compagnies aériennes étrangères.

2

Commentaire des dispositions

2.1

Règlement (CE) n° 1592/2002

2.1.1

Généralités

La participation de la Suisse à l'AESA est réalisée formellement dans le cadre de l'accord bilatéral sur le transport aérien (ATA) avec la CE5. En vertu d'une décision du Comité mixte6 des transports aériens, la Suisse adopte, conjointement aux modalités de la participation de la Suisse à l'AESA négociées dans le cadre du Comité mixte, le règlement (CE) n° 1592/20027 ainsi que le règlement (CE) n° 104/20038.

Le règlement relatif aux redevances perçues par l'AESA9 et publié par la Commission européenne le 30 mars 2005 dans le Journal officiel de la CE sera probablement également intégré dans la décision du Comité mixte en vertu de la compétence attribuée au Conseil fédéral par l'ATA en matière d'adoption d'actes législatifs dans le cadre du Comité mixte. Par ailleurs, l'adoption ultérieure de modifications du règlement (CE) n° 1592/2002, dont le contenu est de nature technique, relève également de la compétence du Conseil fédéral dans le cadre du règlement en vigueur pour le Comité mixte des transports aériens.

A relever que les règlements CE susmentionnés seront directement applicables en Suisse une fois intégrés à l'annexe de l'Accord sur le transport aérien, sans qu'il soit nécessaire pour cela d'adopter une nouvelle disposition d'exécution.

5 6

7

8

9

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport aérien (RS 0.748.127.192.68).

Les textes des règlements mentionnés ainsi que les modalités de participation à l'AESA négociées figurent à l'annexe de la décision correspondante du Comité mixte. Cette annexe est considérée comme un traité international.

Règlement (CE) n° 1592/2002 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2002 concernant des règles communes dans le domaine de l'aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne (JOCE L 240 du 7.9.2002, p. 1) modifié par le règlement (CE) n° 1701/2003 de la Commission du 24 septembre 2003 (JOCE L 243 du 27.9.2003, p. 5).

Règlement (CE) n° 104/2004 de la Commission du 22 janvier 2004 fixant les règles relatives à l'organisation et à la composition de la chambre de recours de l'Agence européenne de la sécurité aérienne (JOCE L 16 du 23.1.2004, p. 20).

Règlement (CE) n° 488/2005 de la Commission du 21 mars 2005 relatif aux honoraires et redevances perçus par l'Agence européenne de la sécurité aérienne (JOCE L 81 du 30.3.2005).

3663

Les modalités de la participation de la Suisse à l'Agence figurent dans une annexe à la décision précitée du Comité mixte. Elles garantissent à la Suisse une participation intégrale à l'AESA et la placent sur un pied d'égalité avec les Etats membres de l'UE dans l'application du droit communautaire, à moins que les modalités négociées n'en disposent expressément autrement. En contrepartie, la Suisse accorde à l'AESA le droit de pouvoir exercer sans restriction sur son territoire les missions et les attributions (comme par exemple l'octroi et le retrait de certificats, l'exécution d'inspections) découlant de l'acquis communautaire (capacité juridique de l'Agence en Suisse). Les modalités négociées dans le cadre du Comité mixte prévoient en outre qu'un nombre restreint de décisions précisément définies, rendues par la Commission européenne en tant qu'autorité de tutelle de l'AESA et portant sur le fonctionnement de l'Agence ou la réglementation de questions techniques, sera directement applicable en Suisse. S'agissant des engagements de la Suisse pris dans le cadre d'accords internationaux, les modalités négociées contiennent une réserve explicite indiquant que l'Agence ne peut lier notre pays.

Les chiffres qui suivent commentent les principales dispositions de l'ordonnance (CE) n° 1592/2002, tout en présentant les modalités de la participation négociées par la Suisse.

2.1.2

Principes (art. 1 à 3)

Le premier chapitre décrit le champ d'application (la production, l'entretien et l'exploitation de produits, de pièces et d'équipements aéronautiques, ainsi que les personnels et les organismes participant à la conception, la production et l'entretien de ces produits, pièces et équipements), les objectifs (notamment l'établissement et le maintien d'un niveau uniforme élevé de sécurité de l'aviation civile en Europe) ainsi que les définitions utilisées dans le règlement. L'AESA n'est toutefois pas compétente lorsque les produits, les pièces et les équipements ni les personnels et les organismes sont affectés à des opérations militaires, douanières ou policières ou à des opérations analogues, autrement dit à des tâches relevant de la puissance publique.

2.1.3

Exigences de fond (art. 4 à 11)

Le deuxième chapitre règle en détail l'applicabilité du règlement, ainsi que les exigences essentielles en matière de navigabilité à remplir en vue de l'établissement de certificats ou d'agréments AESA, documents qui conformément à l'art. 8 sont automatiquement reconnus par tous les Etats membres. L'art. 4, par. 2, renvoie à une annexe énumérant les aéronefs n'entrant pas dans le domaine de compétence de l'AESA, comme les aéronefs présentant un intérêt historique manifeste, les aéronefs construits par des amateurs pour leur usage propre, les aéronefs conçus à l'origine exclusivement à des fins militaires ou les aéronefs sans pilote dont la masse de service est inférieure à 150 kg. On songe toutefois à modifier cette annexe et il n'est donc pas exclu que les compétences de l'AESA s'étendent à l'avenir à ces catégories d'aéronefs.

3664

Ce chapitre contient également à l' art. 6 les exigences essentielles en matière de protection de l'environnement. Conformément au règlement (CE) n° 1701/2003, les aéronefs certifiés doivent satisfaire aux exigences de la protection de l'environnement de l'annexe 16 de la convention de Chicago. Les normes de l'OACI sont moins sévères que les dispositions appliquées par la Suisse qui va néanmoins s'aligner sur la pratique des pays de l'Union concernant les normes d'émissions des aéronefs afin de ne pas enfreindre le droit européen de la concurrence. Ne sont visés en l'occurrence que les petits avions d'un poids maximal au décollage inférieur à 8619 kilos. En conséquence, certains types d'avions seront à nouveau admis à la circulation dans notre pays. On estime que l'impact sur les nuisances sonores dégagées par les aéroports sera faible.

L'art. 7 laisse le champ libre à une extension des compétences de l'AESA au domaine des opérations aériennes et à la certification des équipages actuellement en cours de préparation.

L'art. 9 prévoit que par voie de dérogation aux dispositions du règlement et aux règles arrêtées pour sa mise en oeuvre, l'Agence ou les autorités aéronautiques de l'Etat membre peuvent délivrer des certificats sur la base des certificats délivrés par les autorités aéronautiques d'un pays tiers, comme prévu dans les accords de reconnaissance mutuelle entre la Communauté et ce pays tiers. Une tâche de surveillance particulière incombe à cet égard à la Commission européenne qui peut même exiger d'un Etat membre qu'il dénonce un accord avec un pays tiers au cas où les dispositions dudit accord ne garantiraient pas un niveau de sécurité équivalent à celui spécifié par l'AESA et ses règles de mise en oeuvre. Cette prérogative ne concerne toutefois pas la Suisse. La Commission européenne et la délégation de négociation suisse ont en effet admis une réserve stipulant que la Suisse conserve son autonomie dans la conclusion d'accords avec des Etats tiers (par exemple avec des partenaires importants comme les Etats-Unis). Les deux parties ont en revanche convenu que les parties qui négocient avec un Etat tiers un accord visant à simplifier le mécanisme de reconnaissance doivent s'efforcer d'inclure dans la mesure du possible l'autre partie dans les négociations, l'objectif étant de faire en
sorte que la CE et la Suisse concluent un accord à la teneur analogue avec l'Etat tiers en question, dans le souci de garantir le marché commun.

L'art. 10 contient des mesures qui autorisent les Etats membres à réagir immédiatement à un problème de sécurité et à déroger aux exigences essentielles afin de prendre les mesures qui s'imposent. Là aussi, une tâche de surveillance particulière incombe à la Commission.

L'art. 11 règle l'échange d'informations entre l'AESA et les autorités aéronautiques nationales. Il en ressort que la participation de la Suisse à l'AESA lui donnerait accès à un important réseau d'informations aéronautiques, censé être géré de manière plus systématique et plus transparente que ce n'est aujourd'hui généralement le cas. Une intensification de l'échange d'informations entre les organes de surveillance devrait en fin de compte contribuer indirectement à une augmentation de la sécurité de l'aviation civile en Europe. Par ailleurs, cette disposition stipule que l'Agence publie chaque année un rapport sur la sécurité afin d'informer le public du niveau général de sécurité.

3665

2.1.4

Missions (art. 12 à 18)

La section I du troisième chapitre du règlement décrit les différentes missions de l'AESA. Ce catalogue des tâches et des compétences devrait également trouver une application directe en Suisse. L'Agence ne se limite pas à conseiller la Commission (l'Agence est habilitée par exemple à soumettre à la Commission des projets de dispositions d'exécution) et a été conçue comme un organisme administrativement, juridiquement et financièrement indépendant disposant de compétences d'exécution qui étaient jusqu'à présent l'apanage des autorités aéronautiques des Etats membres.

Outre son rôle d'autorité de régulation, qui se traduit par la préparation de la législation communautaire et l'adoption de spécifications techniques (qui sont non contraignantes sur un plan purement juridique, mais font office de base fiable et reconnue par les industries concernées ­ à l'instar des normes industrielles), l'Agence dispose donc également des compétences décisionnelles propres.

Les missions décrites entre autres à l'art. 15 laissent transparaître les décisions applicables dans les Etats de l'UE que l'AESA est en principe habilitée à prendre depuis le 28 septembre 2003, comme l'octroi des certificats de type ou la délivrance des agréments aux organismes de conception et de production. A signaler que le règlement nécessitera des adaptations dans ce domaine à partir du moment où l'AESA étendra ses prérogatives sur le personnel aéronautique et les opérations aériennes.

L'Agence veille également au respect des prescriptions applicables et peut à cet effet mener des inspections auprès des Etats membres et peut effectuer elle-même ou charger les autorités aéronautiques nationales ou des entités qualifiées de toutes les enquêtes nécessaires dans les entreprises (art. 16 en relation avec les art. 45 et 46).

Un système analogue d'inspection des Etats membres avait déjà été mis en place dans le cadre des mécanismes de normalisation des JAA, des équipes composées d'experts issus des différents pays contrôlant à intervalles réguliers le respect des normes des JAA en vigueur dans différents domaines. Les JAA ne disposaient cependant pas de mécanismes juridiques de contrainte en cas de non respect des prescriptions, contrairement à l'AESA qui pourra le cas échéant restreindre la portée ou prononcer le retrait des agréments ou
certificats délivrés sous sa compétence. La Commission peut également introduire un recours en manquement contre les Etats membres qui faillissent à leurs obligations (mais pas contre la Suisse). En vertu du principe de réciprocité, les inspecteurs suisses pourront participer aux inspections menées par d'autres autorités aéronautiques.

En outre, l'Agence s'engage en faveur de la recherche (art. 17), assiste la Communauté et ses Etats membres dans leurs relations avec les pays tiers et peut coopérer avec les autorités aéronautiques nationales des pays tiers ainsi qu'avec les organisations internationales dans le cadre d'arrangements de travail conclus avec elles (art. 18). Elle n'a toutefois pas la personnalité juridique internationale et ne peut donc conclure aucun accord avec des sujets de droit international (p.ex. avec les Etats et les organisations internationales).

3666

2.1.5

Structure interne (art. 19 à 42)

Cette section du règlement traite de la structure interne de l'Agence, c'est-à-dire de son organisation, de ses attributions, de la nomination et du fonctionnement de ses organes (conseil d'administration, directeur exécutif, chambres de recours10), de la procédure de recours contre ses décisions devant les chambres de recours (art. 35 ss) ainsi que les recours devant la Cour de justice (art. 41 ss), ces deux possibilités de recours existent aussi pour des personnes concernées en Suisse. Cette section réglemente par ailleurs la responsabilité contractuelle de l'Agence (art. 22) et la publication des documents (art. 23).

Il convient de relever les points suivants s'agissant des modalités de participation négociées par la Suisse:

10 11

­

Art. 20, 30 et 32: toutes les fonctions au sein de l'Agence (personnel, fonctions directoriales et fonctionnaires des chambres de recours) sont accessibles aux citoyens suisses.

­

Art. 21: à l'instar de la solution adoptée dans le cadre des Bilatérales II pour la participation de la Suisse à l'Agence européenne de l'environnement (EEA)11, La Suisse s'est engagée à appliquer le Protocole du 8 avril 1965 sur les privilèges et immunités de la Communauté (PPI) à l'AESA.

L'acceptation de ce protocole est une des conditions de l'association d'Etats tiers aux agences de l'UE. Le PPI est contenu dans une annexe à la décision du Comité mixte et fait partie intégrante des modalités de participation de la Suisse à l'AESA. Un appendice fixe les modalités d'application du PPI en Suisse, tout en tenant compte des spécificités du système juridique suisse. La Suisse est assimilée à un Etat membre sauf en ce qui concerne l'art. 14 (domicile fiscal). Par ailleurs, la Suisse continuera à appliquer le principe de la progressivité de l'impôt.

­

Art. 28: les modalités négociées permettent à la Suisse de participer pleinement à l'agence. Elles prévoient une participation au conseil d'administration, aux organes de contrôle et aux organes de gestion stratégique de l'agence avec droit de parole, mais sans droit de vote, celui-ci étant, on l'a vu sous 1.1.3, réservé aux Etats membres de l'UE. Comme le vote est nécessaire uniquement pour élire le directeur exécutif de l'agence, les présidents du conseil d'administration, et que les autres décisions sont prises à l'unanimité, cette restriction est sans importance pour la participation de la Suisse aux travaux de l'agence. La représentation au conseil d'administration est autrement plus importante puisqu'elle permet à notre pays d'accéder à des informations de première main sur d'importantes décisions politiques et stratégiques en matière de sécurité de l'aviation civile et de défendre ses intérêts spécifiques devant les plus hautes instances de l'AESA.

Cf. note 8.

FF 2004 5672

3667

2.1.6

Méthodes de travail (art. 43 à 47)

Cette section décrit les procédures d'élaboration d'avis, de spécifications techniques, de décisions individuelles, etc. qui se doivent d'être transparentes et compréhensibles, et qui doivent en outre se fonder sur les connaissances spécialisées dont disposent les autorités aéronautiques nationales et garantir que les milieux intéressés soient dûment associés aux mécanismes de décision et consultés (art. 43 et 44).

Comme on l'a vu, l'AESA veille également au respect des dispositions applicables et peut à cet effet mener des inspections auprès des Etats participants (art. 46) et peut effectuer elle-même ou charger les autorités aéronautiques nationales ou des entités qualifiées de toutes les enquêtes nécessaires dans les entreprises (art. 47). Les droits des personnes habilitées à opérer ces contrôles (droit de pénétrer dans tout local ou terrain, d'examiner les dossiers, les données, etc., d'en faire des copies, de demander une explication orale sur place) figurent expressément dans le règlement.

Ils doivent être exercés en conformité avec les dispositions légales de l'Etat concerné. En vertu des dispositions contractuelles consacrées par les modalités de participation à l'AESA, les inspecteurs habilités par l'AESA peuvent également exercer de tels droits en Suisse. Les dispositions négociées remplacent la procédure d'autorisation prévue à l'art. 271, al. 1, du code pénal (CP12) pour les actes qui relèvent des pouvoirs publics accomplis sur le territoire suisse; ainsi, l'autorisation prévue par le CP pour que l'Agence puisse effectuer les inspections et les enquêtes est réputée attribuée.

Sur la base de l'art. 47, modifié par le règlement (CE) n° 1643/200313, l'AESA est enfin soumise aux prescriptions générales de la Communauté en matière de transparence, dont la mise en oeuvre incombe au Conseil d'administration.

2.1.7

Dispositions financières (art. 48 à 53)

Les dispositions financières, également modifiées par le règlement (CE) n° 1643/2003 déjà cité, visent à assurer l'autonomie et l'indépendance de l'Agence.

L'AESA dispose de son propre budget essentiellement alimenté par des contributions de la Communauté et des redevances (art. 48). Le directeur exécutif répond du budget de l'Agence (art. 49) et soumet les comptes annuels pour avis au conseil d'administration, au sein duquel la Suisse siège avec droit de parole, mais sans droit de vote.

La contribution financière de la Suisse au budget de l'AESA a fait l'objet de négociations séparées. Elle se base sur la partie du budget global de l'AESA non couverte par les redevances et elle est proportionnelle au nombre des pays participant à l'AESA (Etats non membres de l'Union compris) ainsi qu'à la contribution de la Suisse au budget de l'OACI, l'agence spécialisées de l'ONU dans le domaine de l'aviation civile, relative à la contribution des autres pays participant à l'AESA. Le mode de calcul est ainsi en substance identique à celui pratiqué dans le cadre des JAA.

12 13

RS 311.0 Règlement (CE) n° 1643/2003 du Parlement européen et du Conseil du 22 juillet 2003 portant modification du règlement (CE) n° 1592/2002 relatif aux règles communes dans le domaine de l'aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne (JOCE L 245 du 29.9.2003 p. 7).

3668

La solution négociée avec la Commission européenne peut globalement être qualifiée d'équitable et d'adéquate. Pour être complet, on ajoutera que l'AESA souhaite couvrir la totalité des coûts des services fournis à l'aide des redevances et des honoraires (publication, formation et autres prestations), de sorte qu'à moyen terme les Etats n'aient plus à verser de contribution. (art. 53). Le règlement (CE) n° 488/2005 relatif aux honoraires et redevances perçus par l'Agence européenne de la sécurité aérienne, édicté par la Commission, devrait entraîner une augmentation progressive des redevances à la charge de l'industrie qui irait de pair avec une diminution progressive des montants à la charge des Etats. Le règlement prévoit la perception d'une redevance de base pour les prestations individuelles ainsi que d'une redevance en fonction des dépenses. A cela s'ajoutent des redevances annuelles de surveillance. Il est toutefois encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur le financement de l'Agence et l'évolution des redevances.

Il incombe à la Commission européenne, qui est à l'origine du règlement (CE) n° 488/2005 susmentionné, d'élaborer les bases légales relatives à la perception de redevances. On s'attend à ce que la Commission propose à la Suisse d'adopter le règlement sur les taxes en prévision de la prochaine réunion du Comité mixte des transports aériens, ce qui donnerait également le droit à l'AESA de percevoir des redevances auprès des entreprises et des particuliers suisses. Une solution sur mesure pour la Suisse ne serait guère envisageable puisque notre pays bénéficie pratiquement des mêmes droits au sein de l'Agence qu'un pays membre de l'UE, d'autant plus que l'industrie suisse va tirer les mêmes avantages que ses concurrentes de la Communauté des agréments et des certificats délivrés par l'AESA (reconnaissance réciproque, accès sans restrictions au marché intérieur). Même si la Suisse ne participait pas à l'AESA, les entreprises suisses pourraient être tenues de verser une redevance en échange de la reconnaissance de leurs produits et de leurs services, l'AESA pouvant en effet exiger une telle redevance des industries des Etats ne participant pas à l'Agence. Si la Suisse ne devait pas participer à l'Agence, ces redevances à l'AESA s'ajouteraient pour les entreprises suisses
aux redevances versées pour les certificats et les autorisations obligatoires en Suisse établis par l'OFAC. Une non-participation de la Suisse à l'AESA engendrerait en fin de compte des coûts supplémentaires pour les entreprises suisses concernées.

Les modalités de la participation à l'AESA négociées avec la CE prévoit en matière de lutte contre la fraude (art. 50) les mêmes mesures de contrôle financier que celles figurant dans l'accord de participation à l'AEE14. En vertu de ces dispositions, les fonctionnaires de la Communauté européenne (en particulier de la Cour des comptes européenne, de l'AEE, de la Commission européenne et de l'Office européen de lutte antifraude [OLAF]) ou des personnes mandatées par elles peuvent procéder sur place à des contrôles et des vérifications financiers, technologiques auprès des participants à l'AESA établis en Suisse ou auprès d'autres destinataires de fonds communautaires (p.ex. à l'OFAC lorsque celui-ci remplit des tâches au nom ou pour le compte de l'AESA). Le Contrôle fédéral des finances sera informé à l'avance et peut prendre part aux contrôles et vérifications sur place. Dans ce cas de figure aussi, les dispositions négociées remplaceront la procédure d'autorisation prévue à l'art. 271, al. 1 CP pour les actes accomplis sur le territoire suisse.

14

Cf. FF 2004 5672 ss

3669

2.1.8

Dispositions finales (art. 54 à 58)

Les art. 54 et 55 méritent une attention particulière. Alors que l'art. 55, qui prévoit que la Communauté européenne peut conclure des arrangements avec des Etats tiers qui souhaitent adhérer à l'AESA, constitue le véritable fondement de la participation de la Suisse à l'AESA, l'art. 54 jette les bases de l'institution d'un comité chargé d'assister la Commission européenne dans l'accomplissement de ses missions (comme p. ex. l'extension du droit communautaire en matière de sécurité aérienne).

Ce «comité de l'AESA», qui garantit la participation qualifiée des Etats membres dans les différentes procédures de comité, constitue un important organe de pilotage et de contrôle, non seulement dans le cadre de la procédure législative, mais aussi lorsque la Commission est amenée à prendre d'autres décisions importantes (p.ex.

lors de l'examen d'accords d'attribution de tâches ou lors de l'application de mesures dérogatoires au sens de l'art. 10).

Consciente de l'importance de ce comité, la délégation suisse a âprement défendu la participation de la Suisse en son sein, qu'elle a fini par obtenir. Pour être formellement effective, cette participation nécessitera une adaptation de la déclaration du Conseil des ministres de l'UE contenue dans les Bilatérales I15, dans la mesure où la liste des comités au sein desquels la Suisse a le droit de siéger en qualité d'observatrice va s'enrichir du comité de l'AESA. Il s'agit là d'un résultat réjouissant des négociations puisqu'il garantit la participation de la Suisse au développement du droit communautaire relatif à l'AESA.

2.2

Modification de la loi fédérale sur l'aviation dans l'optique d'une participation à l'AESA

La participation de la Suisse à l'AESA exige une modification matérielle de deux dispositions de la loi sur l'aviation (LA; RS 748.0) ainsi qu'une modification purement rédactionnelle.

Art. 3, al. 1 L'art. 3, al. 1, attribue la compétence en matière de surveillance de l'aviation civile au Conseil fédéral, à savoir au DETEC. Comme exposé ci-dessus, l'AESA sera toutefois appelée à assumer l'essentiel de cette fonction de surveillance dans les domaines techniques et opérationnels, puis ultérieurement sur les services de la navigation aérienne. Il convient donc de compléter la dernière phrase de l'art. 3, al. 1, par une disposition attribuant au Conseil fédéral la compétence de transférer la surveillance à des organismes internationaux. C'est à dessein que la nouvelle disposition a été formulée de manière générale, car il n'est pas exclu qu'à l'avenir d'autres organismes se voient confier de telles missions de surveillance.

Art. 3a, al. 2 Il convient simultanément d'ajouter un art. 3a, al. 2, en complément de l'art. 3, al. 1.

Le transfert de la surveillance dont il est question ci-dessus suppose la conclusion de divers accords techniques. La compétence de conclure ces accords subordonnés 15

Cf. FF 1999 6264

3670

portant sur l'exécution concrète de la surveillance devrait incomber au Conseil fédéral. La norme de compétence comprend des accords sur la sécurité aérienne et les services de la navigation aérienne (collaboration et délégation de services sur les espaces aériens transfrontaliers), deux domaines qui seront placés sous le contrôle de l'AESA. L'internationalisation des normes de sécurité et la surveillance de leur application vont considérablement s'intensifier au cours des prochaines années.

Outre l'AESA, il convient également de mentionner l'harmonisation des règles dans le cadre du Ciel européen unique. En revanche, cette norme de délégation n'engloberait pas un arrangement plus restrictif qui modifierait par exemple le concept d'utilisation d'un aéroport.

Art. 3b La modification de l'art. 3b est due à des motifs purement rédactionnels. Le terme «organisme international» nouvellement employé dans les art. 3 et 3a LA doit remplacer, par souci de cohérence, le terme «organisation internationale» figurant également à l'art. 3b LA.

2.3

Autres modifications de la loi sur l'aviation

2.3.1

Instauration d'un système de déclaration (art. 20)

Comme nous l'avons déjà mentionné au ch. 1.2, la modification de l'art. 20 LA crée les bases légales sous-jacentes à l'instauration d'un système de déclaration anonyme d'incidents et d'événements conformément à la directive 2003/42 CE16 et à ses modifications.

L'al. 1 charge le Conseil fédéral d'instaurer un système de déclaration des incidents particuliers dans l'aviation civile.

L'al. 2 spécifie que ledit système devra s'inspirer du modèle préconisé par la directive 2003/42/CE.

L'al. 3 autorise le Conseil fédéral à fixer des dispositions en vertu desquelles il y a lieu de s'abstenir dans certaines circonstances d'ouvrir une procédure pénale à l'encontre des auteurs de déclarations.

2.3.2

Compétence d'octroi des concessions de routes (art. 28, al. 2)

Conformément à une proposition présentée le 2 décembre 2002 par la commission de gestion du Conseil des Etats, la compétence d'octroyer des concessions de routes détenues par le DETEC sera transférée à l'OFAC dans le cadre de la modification de l'art. 28, al. 2, LA. Dans la nouvelle teneur de l'al. 2, le terme «département» a donc été remplacée par le terme «office» (cf. ch. 1.3 du présent message).

16

Cf. note 4.

3671

3

Conséquences

3.1

Conséquences financières et effets sur le personnel de la Confédération

3.1.1

Participation à l'AESA

Les dépenses liées à la contribution de la Suisse au budget de l'AESA représentent les principales conséquences financières de la participation de la Suisse à l'AESA.

Une contribution n'étant due qu'au moment de formaliser la participation, le premier versement devrait intervenir au premier trimestre 2006, si la procédure d'approbation en Suisse et dans la Communauté suit normalement son cours, et devrait s'élever à 0,7 million de francs en l'état actuel de la planification budgétaire 2006.

Parallèlement, la contribution de la Suisse aux JAA ­ environ 0,15 million de francs par année ­ diminuera progressivement à partir de 2006 en raison du démantèlement de cette organisation. L'Agence n'en étant qu'à ses débuts, avancer des certitudes sur l'évolution de son budget et de ses besoins de financement s'avère relativement malaisé. Le budget de l'AESA devra certainement être revu à la hausse ces prochaines années au fur et à mesure que l'Agence étendra ses compétences aux opérations aériennes et au personnel aéronautique (puis à terme aux services de la navigation aérienne et à la sécurité des aéroports), avec en corollaire un accroissement probable de la participation de l'UE et des Etats non membres de l'UE. Cela dit, ainsi que nous l'avons vu, l'Agence est appelée à voler de ses propres ailes et va s'efforcer d'améliorer le financement propre de ses prestations afin que l'augmentation continuelle du budget ne soit pas automatiquement couplée à une augmentation correspondante des contributions de l'UE et des Etats non membres de l'UE. Il faut également considérer que l'AESA devra faire face ces prochaines années à un manque de personnel qualifié et à un déficit en matière de savoir-faire qu'elle devra compenser en déléguant aux Etats membres de nombreuses missions relevant de sa compétence. La Suisse devrait ainsi être remboursée pour les services rendus.

La participation de la Suisse à l'AESA n'entraîne aucune augmentation des effectifs.

Au contraire, il n'est pas exclu à terme que l'on assiste à une réduction des effectifs au niveau des autorités nationales. Cette évolution dépend de l'ampleur des tâches que l'Agence va déléguer aux Etats ces prochaines années, mais dans ce domaine on ne dispose pas d'informations plus précises pour le moment.

3.1.2

Modification de la loi fédérale sur l'aviation

Hormis les contributions annuelles à l'AESA décrites au ch. 3.1.1, les modifications envisagées n'entraîneront aucune charge supplémentaire, financière ou en personnel, pour la Confédération.

3672

3.2

Conséquences économiques et effets pour l'aviation suisse

L'industrie aéronautique suisse est majoritairement favorable à une participation de la Suisse à l'AESA comme le montre l'enquête représentative réalisée par l'OFAC en 2003 auprès de l'ensemble des entreprises du secteur (taux de réponse de près de 43 %). Les entreprises qui ont participé à l'enquête occupent environ 18 000 personnes et ont généré en 2002 un chiffre d'affaires de quelque 7 milliards de francs, dont la moitié est imputable à Swiss. Les entreprises techniques (conception, production et entretien) ont également contribué pour une grande part à ce résultat avec près de 5500 personnes occupées et un chiffre d'affaires oscillant entre 2 et 2,5 milliards de francs. Ce dernier secteur étant particulièrement tourné vers le marché européen, sa capacité concurrentielle est fortement tributaire d'une reconnaissance de ses produits et services en Europe.

On peut globalement affirmer que l'industrie aéronautique suisses revêt une grande importance pour la place économique suisse, qu'elle est fortement tournée vers l'Europe et qu'elle a besoin d'un accès sans restrictions au marché européen pour ses biens et ses services17. Une participation de la Suisse à l'AESA s'avère en fin de compte incontournable.

Il convient également d'ajouter, s'agissant du droit du travail, que les citoyens suisses auront les mêmes droits que les citoyens européens en ce qui concerne l'accès aux postes mis au concours par l'Agence.

4

Lien avec le programme de la législature

4.1

Participation à l'AESA

Le Message concernant l'adhésion de la Suisse à l'Agence européenne de la sécurité aérienne figure au ch. 1.4 de l'annexe I du Rapport sur le programme de législature 2003­2007 du 25 février 2004 sous le titre «Autres objets» 18.

4.2

Modification de la loi fédérale sur l'aviation

Le programme de la législature 2003­2007 ne prévoit pas expressément de modification de la loi sur l'aviation. Mais étant donné que celle-ci a un lien direct avec la participation de la Suisse à l'AESA, il y a lieu de réviser les art. 3, 3a et 3b LA. La modification des art. 20 et 28, al. 2 LA, s'impose par souci de simplification administrative.

17 18

Cf. le Rapport du Conseil fédéral du 10 décembre 2004 sur la politique aéronautique de la Suisse 2004, FF 2005 1655 ss.

FF 2004 1083

3673

5

Aspect juridiques

5.1

Constitutionnalité

5.1.1

Participation à l'AESA

La constitutionnalité du projet d'arrêté relatif à la participation de la Suisse à l'AESA est garantie par l'art. 54, al. 1, Cst., qui précise que les affaires étrangères relèvent de la Confédération. A ce titre, cette dernière est habilitée à conclure des traités internationaux. La compétence de l'Assemblée fédérale découle de l'art. 166, al. 2, Cst.

5.1.2

Modification de la loi fédérale sur l'aviation

La compétence de la Confédération en matière de législation aérienne découle de l'art. 87 Cst.

5.2

Référendum facultatif en matière de traités internationaux

Selon l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 1 à 3, Cst., les traités internationaux qui sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables, prévoient l'adhésion à une organisation internationale, contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales sont sujets au référendum facultatif.

La participation de la Suisse à l'AESA est dénonçable dans le respect des modalités pertinentes des Bilatérales I, c'est-à-dire de celles qui figurent dans l'Accord sur le transport aérien.19 Par contre, il est à déterminer si la décision du Comité mixte, que nous vous proposons ici d'approuver, ainsi que son annexe contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou si leur mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. Au sens de l'art. 22, al. 4, de la loi sur le Parlement20, sont réputées fixer des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Doivent également être considérées comme importantes à la lumière de l'art. 164, al. 1, Cst., les dispositions du droit interne qui doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. En s'appuyant sur cette dernière disposition dans la formulation de l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., le constituant a voulu établir une analogie entre le référendum législatif et le référendum en matière de traités internationaux21.

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20 21

Pour la CE, une agence telle que l'AESA constitue une entité du droit public européen qui n'est pas liée aux institutions communautaires (Conseil, Parlement, Commission, etc.) et qui est dotée de la personnalité juridique. La question s'il s'agit d'une organisation internationale peut rester ouverte, vu que la participation de la Suisse à l'AESA sera soumise de toute façon au référendum facultatif pour des raisons qui suivent dans le texte.

Loi du 13 décembre 2002 sur l'Assemblée fédérale (Loi sur le Parlement, RS 171.10).

Avis du Conseil fédéral du 15 juin 2001 sur l'initiative parlementaire (Commission 96.091 CE) «Suppression de carences dans les droits populaires», FF 2001 5795.

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L'annexe à la décision du Comité mixte relative à la participation de la Suisse à l'AESA régit notamment la participation financière de la Suisse à l'agence22 et autorise l'AESA à effectuer elle-même ou à charger les autorités aéronautiques nationales ou des entités qualifiées de toutes les enquêtes nécessaires dans les entreprises afin de contrôler le respect et l'application des normes communautaires23. Elle contient donc des dispositions importantes fixant des règles de droit au sens de l'art. 164, al. 1, let. c et d, Cst. À cela s'ajoute le fait que sa mise en oeuvre nécessite une adaptation de la loi sur l'aviation. Par voie de conséquence, l'arrêté d'approbation est sujet au référendum prévu par l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, pour les traités internationaux.

22 23

Art. 48 du règlement (CE) n° 1592/2002 et ch. 1, let. e) de l'annexe à la décision du Comité mixte.

Art. 46 et 47 du règlement (CE) n° 1592/2002.

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