05.048 Message concernant un protocole modifiant la Convention de double imposition avec le Royaume de Norvège ainsi que le protocole s'y rapportant du 3 juin 2005

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons un projet d'arrêté fédéral approuvant un protocole signé le 12 avril 2005 modifiant la Convention de double imposition en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune conclue avec le Royaume de Norvège ainsi que le protocole s'y rapportant, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

3 juin 2005

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Samuel Schmid La Chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2005-0738

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Aperçu Suite à une réforme fiscale qui prévoit l'introduction d'une imposition générale uniforme, la Norvège doit modifier sa pratique en matière d'élimination de la double imposition et passer de la méthode de l'exonération à la méthode de l'imputation. C'est pour cette raison que le présent protocole modifiant la Convention a été signé. En plus des modifications liées au changement de méthode entrepris par la Norvège (art. 23), le protocole modifiant la Convention contient de nouvelles dispositions portant sur le remboursement de l'impôt à la source (art. 28), sur un élargissement de l'échange de renseignements (désormais, l'entraide administrative sera également possible pour les fraudes fiscales et les sociétés holdings; art. 26), sur une nouvelle réglementation en matière de trafic international (introduite aux art. 2, 3, 8, 13, 15 et 22) qui prend en compte les particularités du consortium «Scandinavian Airlines System» (SAS) ainsi que sur un accord concernant le droit d'imposition exclusif de l'Etat de résidence pour imposer les dividendes de participations (art. 10).

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Message 1

Historique

Suite à une réforme fiscale qui prévoit l'introduction d'une imposition générale uniforme, la Norvège doit modifier sa pratique en matière d'élimination de la double imposition et passer de la méthode de l'exonération à la méthode de l'imputation. La Direction des impôts norvégienne s'est donc adressée à l'Administration fédérale des contributions pour demander l'ouverture de nouvelles négociations permettant de réviser la Convention du 7 septembre 1987 (RS 0.672.959.81) entre la Norvège et la Confédération suisse. Saisissant cette opportunité, la Suisse a, à son tour, demandé une suppression de l'impôt à la source sur les dividendes provenant de participations importantes et un élargissement limité de la clause de renseignements aux délits de fraude fiscale.

Après trois séries de négociations, les textes ont pu être définitivement paraphés le 12 juin 2002. Juste avant la signature du protocole de révision, la Norvège a déclaré qu'elle n'était plus prête à accepter les nouvelles dispositions sur l'entraide administrative et a exigé que soit introduite une disposition analogue à celle qui est accordée par la Suisse aux Etats-Unis d'Amérique (extension de l'échange de renseignements portant sur les délits de fraude fiscale aux délits semblables). La Suisse n'a pu accéder à cette demande puisque, selon l'accord sur la fiscalité de l'épargne, elle ne s'est engagée à appliquer une disposition analogue qu'envers les Etats de l'UE et seulement pour des faits, qui en raison de la procédure de taxation, sont considérés comme étant équivalents à une fraude fiscale. Elle s'est cependant montrée disposée à intégrer dans le protocole des dispositions concernant les sociétés holding qui sont conformes à la position qu'elle a défendue en matière d'échange de renseignements au cours des travaux de l'OCDE sur les pratiques fiscales dommageables.

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Commentaire des dispositions du protocole

Art. 1 (concerne l'art. 2 de la Convention: Impôts visés) L'art. 1 du protocole adapte la liste des impôts norvégiens établie à l'art. 2, par. 3, let. a, de la Convention à la situation actuelle, ce qui ne constitue pas une modification matérielle.

Art. 2 (concerne l'art. 3 de la Convention: Définitions générales) Prenant en compte la spécificité du consortium de transport aérien norvégien, danois et suédois «Scandinavian Airlines System» (SAS), l'art. 2 du protocole modifie l'art. 3, par. 1, let. h, de la Convention. Désormais, c'est l'Etat de résidence d'une entreprise de transport aérien, tel qu'il est défini selon les règles de l'art. 4 de la Convention, qui sera déterminant.

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Art. 3 (concerne l'art. 8 de la Convention: Navigation maritime et aérienne) Conformément à la nouvelle définition établie à l'art. 3, par. 1, de la Convention, l'art. 3 du protocole modifie l'art. 8, par. 1, de la Convention et attribue le droit d'imposer à l'Etat de résidence de l'entreprise. Le par. 4 établit en outre que les par.

1 et 2 s'appliqueront aux bénéfices du consortium «Scandinavian Airlines System» (SAS), mais uniquement en fonction de l'importance de la participation de la «SAS Norge ASA», partenaire norvégien de «Scandinavian Airlines System» (SAS), à ce consortium.

Art. 4 (concerne l'art. 10 de la Convention: Dividendes) L'art. 4 du protocole modifie l'art. 10, par. 2 et 3, de la Convention comme suit: les dividendes distribués par une filiale à sa société mère (ayant une participation de 20 % au moins au capital) seront exonérés de l'impôt à la source. Jusqu'à présent, le taux de l'impôt à la source était limité à 5 pour cent. Après l'introduction de l'exonération à la source des participations, les règles spéciales inscrites à l'art. 10, par. 3 de la Convention n'ont plus de raison d'être.

Cette disposition est remplacée par une exonération de l'impôt à la source sur les versements de dividendes aux pouvoirs publics des deux Etats, y compris à la Banque centrale de Norvège, au Fonds pétrolier du Gouvernement norvégien et, pour la Suisse, à la Banque nationale suisse.

Art. 5 (concerne l'art. 13 de la Convention: Gains en capital) Conformément à la nouvelle définition inscrite à l'art. 3, par. 1, let. h, de la Convention, l'art. 5 du protocole modifiera l'art. 13, par. 3, et attribuera le droit d'imposer à l'Etat de résidence de l'entreprise dans les cas de vente de navires ou d'aéronefs.

Art. 6 (concerne l'art. 15 de la Convention: Professions dépendantes) Suivant les nouvelles règles d'imposition instaurées aux art. 8, par. 1 et 13, par. 3, de la Convention, l'art. 6 du protocole modifie l'art. 15, par. 3, de la Convention et attribue le droit d'imposer le revenu provenant d'un emploi exercé à bord d'un navire ou d'un aéronef à l'Etat de résidence de l'entreprise concernée. L'art. 15, par.

3, de la Convention prévoit également que les revenus réalisés dans le cadre d'une activité exercée à bord d'un navire inscrit au registre international des navires norvégiens (N.I.S.) seront
imposés dans l'Etat de résidence du bénéficiaire. Enfin, le nouveau par. 4 de l'art. 15 de la Convention établit que les rémunérations perçues dans le cadre d'un emploi exercé à bord d'un aéronef exploité, en trafic international, par le consortium «Scandinavian Airlines System» (SAS) seront imposées dans l'Etat de résidence du bénéficiaire.

Art. 7 (concerne l'art. 22 de la Convention: Fortune) Suivant les nouvelles règles d'imposition instaurées aux art. 8, par. 1 et 13, par. 3, de la Convention, l'art. 7 du protocole modifie l'art. 22, par. 3, de la Convention et établit que la fortune d'une entreprise exerçant une activité de transport au niveau international ne pourra être imposée que dans l'Etat de résidence de cette entreprise.

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Art. 8 (concerne l'art. 23 de la Convention: Elimination de la double imposition) L'art. 8, par. 1, du protocole modifie l'art. 23, par. 1, de la Convention et prévoit que la Norvège appliquera la méthode de l'imputation afin d'éviter les doubles impositions dans le cadre de l'imposition de ses résidents. Par conséquent, les revenus soumis à l'imposition en Suisse ne seront plus exonérés en Norvège mais les impôts suisses y afférents seront imputés sur les impôts dus dans cet Etat. Cette nouvelle méthode signifie que l'universalité de la fortune des personnes qui résident en Norvège sera imposée aux taux prévus dans le cadre des impôts norvégiens. Le changement de système n'affectera pas le droit d'imposer attribué à la Suisse.

L'art. 8, par. 2, du protocole introduit à l'art. 23, par. 2, de la Convention la nouvelle formulation concernant la méthode suisse permettant d'éviter les doubles impositions, ce qui ne constitue toutefois pas une modification matérielle.

Art. 9 (concerne l'art. 25 de la Convention: Procédure amiable) L'art. 9 du protocole modifie la deuxième phrase de l'art. 25, par. 1, en reprenant la formulation du modèle de Convention de l'OCDE. Désormais, une procédure amiable devra être engagée dans les trois ans suivant la notification des mesures contraires à la Convention.

Art. 10 (concerne l'art. 26 de la Convention: Echange de renseignements) L'art. 26 contient maintenant une disposition qui permettra l'échange de renseignements en cas de fraude fiscale, non seulement dans le cadre de l'application de la Convention, mais également dans celui de l'application du droit interne. Le protocole définit la fraude fiscale comme un comportement frauduleux qui, selon le droit des deux Etats, constitue un délit fiscal et est passible d'une peine privative de liberté. Le droit norvégien ne fait pas de différence entre la fraude fiscale et la soustraction fiscale. En revanche, si la Suisse considère effectivement la fraude fiscale comme un délit fiscal, il n'en va pas de même pour la soustraction fiscale. Etant donné que les faits doivent être punissables dans les deux Etats contractants, l'entraide administrative n'entre en considération que si l'acte considéré aurait constitué une fraude fiscale s'il avait été commis en Suisse. Le protocole établit clairement qu'il doit y avoir un rapport
direct entre le comportement frauduleux et les mesures d'entraide demandées. Enfin, cet article exclut les mesures servant uniquement à la recherche de preuves («pêche aux renseignements»).

À la demande de la Norvège, une disposition se fondant sur la position défendue par la Suisse dans le cadre des travaux de l'OCDE sur les pratiques fiscales dommageables a été introduite sur la base du principe de réciprocité: cette disposition prévoit que la Suisse puisse échanger des renseignements nécessaires à l'application du droit interne de la Norvège, pour autant que ces renseignements portent sur une société holding au sens de l'art. 28, par. 2, de la loi sur l'harmonisation fiscale. Le protocole portant sur l'art. 26 spécifie clairement que les administrations fiscales ne pourront échanger que des renseignements dont elles disposent déjà ou qui doivent leur être remis, et qu'elles peuvent recueillir dans le cadre de la procédure de taxation ordinaire (par ex. la sommation d'adjoindre le bilan et le compte de résultats au formulaire 103). Ainsi, l'exécution de mesures spécifiques, notamment de mesures de contrainte, est explicitement exclue.

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La Norvège a objecté que le principe selon lequel les actes commis doivent être punissables dans les deux Etats contractants limite considérablement l'application de ce nouvel article et a demandé la suppression de cette disposition. La Suisse, en se fondant sur la pratique actuelle, est cependant parvenue à rejeter cette demande.

Les administrations compétentes ont fixé les dispositions nécessaires à l'exécution d'une requête déposée par la Norvège dans le protocole de négociation du 29 mars 2005; ces dispositions correspondent pour l'essentiel à celles conclues avec l'Allemagne.

Art. 11 (Introduction d'un nouvel art. 28: Remboursement de l'impôt à la source) L'art. 11 du protocole introduit un nouvel article réglant le remboursement de l'impôt à la source dans la Convention. L'introduction d'une telle disposition était nécessaire car le droit norvégien ne fixait pas de délai pour le dépôt des demandes de remboursement. Bien que la Norvège ait introduit un délai de 3 ans dans son droit depuis la conclusion des négociations en 2004, cet article doit être repris dans la Convention.

Art. 13 (concerne le protocole à la Convention) La réglementation spéciale inscrite au ch. 2 du protocole se rapportant à la Convention est désormais inutile du fait de l'introduction de la nouvelle réglementation concernant les entreprises de transport international. De même, la précision apportée à l'art. 24 de la Convention par le ch. 6 de ce protocole est désormais dépassée. La disposition concernant la fraude fiscale expliquée à l'art. 10 est également introduite au ch. 5.

Art. 14 (concerne l'entrée en vigueur) Cet article règle l'entrée en vigueur des modifications adoptées. À une exception près, les nouvelles dispositions et les modifications ne seront appliquées qu'après l'entrée en vigueur du protocole. Ce dernier entrera en vigueur à la date de la seconde notification annonçant la fin de la procédure législative interne des deux Etats. En faveur de son économie, la Suisse a réussi à faire adopter une disposition prévoyant que les dividendes versés à une société détenant une participation de 20 % ou plus seront imposés exclusivement dans l'Etat de résidence de cette société dès le 1er janvier 2005, pour autant que le protocole entre en vigueur avant la fin de l'année 2005.

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Conséquences financières

La révision prévue de la Convention est synonyme de pertes fiscales pour les deux Etats contractants. Avec la suppression de l'impôt à la source dans le cadre des relations entre sociétés-mères et filiales, la Suisse devra également supporter un allégement supplémentaire de l'impôt anticipé allant de un à deux millions de francs.

Toutefois, l'amélioration qu'apporte cette mesure au niveau de l'attrait de la place économique suisse devrait se traduire par un apport de recettes supplémentaires dans le cadre des impôts directs.

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Le passage de la Norvège à la méthode de l'imputation pour éviter les doubles impositions ne devrait pas avoir de conséquences financières, le droit d'imposer de la Suisse n'étant pas affecté par ce changement. Cette nouvelle méthode d'imputation pourrait cependant mener indirectement à des pertes fiscales car la charge fiscale sur les bénéfices des établissements stables, plus faible au niveau suisse, ne devrait plus jouer en faveur des entreprises norvégiennes puisque les impôts suisses ne seront qu'imputés sur les impôts norvégiens. Il faut toutefois souligner que les Etats peuvent choisir librement la méthode qu'ils souhaitent appliquer pour éviter les doubles impositions. C'est pourquoi la Suisse ne pouvait s'élever contre cette modification de la pratique norvégienne.

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Constitutionnalité

Le présent protocole se fonde sur l'art. 54 de la Constitution, qui attribue à la Confédération le droit de conclure des traités avec l'étranger. L'Assemblée fédérale est compétente pour approuver le protocole en vertu de l'art. 166, al. 2, de la Constitution. La Convention révisée est conclue pour une durée indéterminée, mais elle peut être dénoncée en tout temps pour la fin d'une année civile moyennant un préavis de six mois. Elle n'implique pas d'adhésion à une organisation internationale. Conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, de la Constitution, les conventions qui contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales sont sujettes au référendum facultatif en matière de traités internationaux à partir du 1er août 2003. Conformément à l'art. 22, al. 4, de la loi sur l'Assemblée fédérale, on considère qu'une disposition inscrite dans un traité international fixe des règles de droit lorsqu'elle prévoit des dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Le présent protocole de révision contient des dispositions qui adaptent la convention aux modifications législatives norvégiennes, qui créent des conditions plus avantageuses pour les dividendes provenant de participations et qui introduisent de nouvelles règles. La dernière catégorie concerne, d'une part, de nouvelles dispositions de procédure s'agissant du remboursement de l'impôt à la source et, d'autre part, l'entraide administrative élargie. L'entraide administrative est déjà convenue pour l'application du droit interne en cas de fraude fiscale, de manière comparable, avec l'Allemagne et concerne les informations qui peuvent déjà être obtenues aujourd'hui par la voie de l'entraide judiciaire. Cette clause d'échange de renseignements a déjà été soumise aux Chambres fédérales dans le contexte de l'Accord sur la fiscalité de l'épargne et elle a été définie comme nouveau standard suisse à l'égard des Etats membres de l'OCDE. Une disposition semblable pourrait par conséquent être convenue au cours des prochaines années avec la plupart des Etats de l'UE ou de l'OCDE. L'échange de renseignements pour les sociétés holding correspond aux engagements pris par la Suisse dans le
cadre des travaux de l'OCDE sur la concurrence fiscale dommageable et ne concerne que les informations qui sont déjà à la disposition des autorités fiscales ou qui devraient s'y trouver; les mesures de contrainte sont ainsi exclues et le secret bancaire demeure préservé. Le présent protocole de révision ne contient aucune obligation fiscale supplémentaire importante et correspond ainsi à la pratique décrite dans le message à la convention de double imposition avec Israël. L'Arrêté fédéral sur le protocole de révision à la Norvège ne sera par conséquent pas sujet au

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référendum facultatif en matière de traités internationaux prévu à l'art. 141, al. 1 de la Constitution.

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Conclusions

Bien que la révision de la Convention de double imposition ait été demandée par le Royaume de Norvège, les changements adoptés vont également dans le sens des intérêts de la Suisse. La nouvelle réglementation instaurée pour l'imposition des dividendes permettra de supprimer une des entraves considérées depuis longtemps comme préjudiciables au niveau de l'économie. Le présent protocole améliore considérablement la situation des entreprises suisses ayant une participation importante en Norvège et contribue ainsi à renforcer l'attrait de la Suisse en tant que site d'implantation pour les entreprises. En introduisant une clause d'entraide administrative pour les délits fiscaux, la Suisse veut éviter à l'avenir que des actes répréhensibles en matière fiscale ne soient commis à partir de son territoire. L'entraide administrative accordée pour les cas concernant les sociétés holding correspond à la position adoptée par la Suisse lors des travaux de l'OCDE. Cette entraide n'affectera pas le secret bancaire: en effet, les autorités fiscales pourront uniquement transmettre les renseignements dont elles disposent ou devraient disposer dans le cadre des demandes d'entraide concernant ces sociétés holding; elles ne pourront prendre aucune mesure de contrainte (sauf en cas de fraude fiscale). En contre-partie, la Suisse a pu obtenir une application rétroactive, très avantageuse, de l'imposition des dividendes pour les sociétés holding.

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