05.057 Message concernant l'approbation du montant de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles du 22 juin 2005

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons avec le présent message un projet d'arrêté fédéral concernant l'approbation du montant de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles en vous proposant de l'adopter.

Nous vous demandons par ailleurs de classer les interventions parlementaires suivantes: 2001 P

01.3178

Loi sur le CO2. Mesures d'accompagnement.

(N 5.10.01, Rechsteiner Bâle)

2001 P

01.3371

Loi sur le CO2. Base de décision.

(N 5.10.01, Leutenegger)

2004 M 03.3012

Prise en compte des puits de carbone dans le Protocole de Kyoto.

(N 18.3.04, E 29.9.04, CEATE-N)

2004 P

Renforcement des mesures de lutte contre les rejets de CO2.

(S 29.9.04, Stähelin)

04.3316

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

22 juin 2005

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Samuel Schmid La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2005-0801

4621

Condensé La communauté internationale a adopté le Protocole de Kyoto en 1997 pour enrayer les perturbations du climat qui menacent la planète. Dans ce contexte, la Suisse s'est engagée à réduire, pour la période 2008­2012, ses émissions de six gaz à effet de serre de 8 % par rapport à leur niveau de 1990. Depuis l'entrée en vigueur du protocole, le 16 février 2005, cet engagement est contraignant pour la Suisse.

Principale base légale pour l'application du Protocole de Kyoto en Suisse, la loi sur le CO2, en vigueur depuis le 1er mai 2000, fixe des objectifs de réduction pour les émissions de CO2 dues aux énergies fossiles. Pour que ces objectifs soient respectés, elle prévoit, à titre de mesure subsidiaire, l'introduction d'une taxe sur le CO2. Les perspectives d'émissions de CO2 montrent que les efforts déployés volontairement par les milieux économiques et les autres mesures mises en oeuvre ne suffiront pas pour atteindre les objectifs. Le Conseil fédéral a donc décidé, le 23 mars 2005, de frapper les combustibles d'une taxe de 35 francs par tonne de CO2. Selon l'art. 7, al. 4, de la loi, le montant de cette taxe est soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale. Pour les carburants, le Conseil fédéral a choisi de donner une chance au centime climatique prélevé par l'économie privée, dont les effets prévus pour la période 2008­2012 seront évalués en 2007. S'il apparaît alors qu'il ne peut pas produire les effets nécessaires, le Conseil fédéral étendra la taxe sur le CO2 à l'essence.

La taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et le centime climatique doivent contribuer largement au respect des objectifs fixés par la loi sur le CO2 et le Protocole de Kyoto.

La taxe sur le CO2 est un instrument incitatif conforme aux principes de l'économie de marché, qui doit faire baisser la consommation de combustibles fossiles en agissant sur les prix, pour obtenir une réduction de 0,7 million de tonnes de CO2 d'ici à 2010. Les recettes, estimées à 650 millions de francs par an, seront redistribuées à la population par l'intermédiaire des assureurs-maladie et aux entreprises, sur la base de leur masse salariale AVS, par les caisses de compensation AVS. Les entreprises très touchées par la taxe peuvent s'en faire exempter si elles s'engagent formellement envers la Confédération à limiter leurs émissions de CO2. Le montant, l'objet, la perception, l'exemption et la redistribution de la taxe sont régis par l'ordonnance du 22 juin 2005 sur la taxe sur le CO2.

4622

Table des matières Condensé

4622

1 Partie générale 1.1 Réchauffement climatique 1.2 Protection internationale du climat: le Protocole de Kyoto 1.3 Mise en oeuvre du Protocole de Kyoto en Suisse 1.3.1 Situation actuelle 1.3.2 Autres mesures prévues pour atteindre l'objectif du Protocole de Kyoto 1.3.3 Gestion des risques en cas de non-réalisation de l'objectif selon le Protocole de Kyoto 1.4 Taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et centime climatique 1.5 Approbation du montant de la taxe par le Parlement 1.6 Autres mesures 1.6.1 Carburants 1.6.2 Combustibles 1.6.3 Puits de carbone 1.6.4 Utilisation des mécanismes de flexibilité 1.7 Résultats de la consultation 1.8 Classement d'interventions parlementaires

4625 4625 4626 4627 4627

2 Partie spéciale: application de la taxe sur le CO2 et du centime climatique prélevé par l'économie privée 2.1 Mesures librement consenties et écarts par rapport aux objectifs de la loi sur le CO2 2.2 Taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles 2.2.1 Montant, exemption et redistribution de la taxe 2.2.2 Effet incitatif 2.2.3 Echange de droits d'émission 2.3 Centime climatique sur les carburants

4629 4630 4631 4632 4633 4633 4634 4634 4636 4637 4638 4639 4639 4641 4641 4643 4644 4645

3 Conséquences 3.1 Conséquences économiques 3.1.1 Conséquences macroéconomiques 3.1.2 Effets de la redistribution 3.2 Conséquences financières et effets sur l'état du personnel 3.2.1 Confédération 3.2.2 Cantons et communes

4646 4646 4646 4646 4647 4647 4648

4 Programme de la législature

4649

5 Rapports avec le droit européen

4649

6 Bases légales

4650

4623

Arrête fédéral concernant l'approbation du montant de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles fossiles (Projet) 4653 Ordonnance sur la taxe sur le CO2 (Annexe)

4624

4654

Message 1

Partie générale

1.1

Réchauffement climatique

Les climatologues s'accordent à penser que les émissions de gaz à effet de serre d'origine humaine provoquent un changement climatique. L'impact des phénomènes naturels et des activités de l'homme pouvant être clairement différencié, ces dernières sont sans conteste la cause de l'évolution climatique, qui se manifeste principalement par une hausse de la température moyenne globale ainsi que par une augmentation des événements météorologiques extrêmes et des catastrophes naturelles.

Selon les analyses les plus récentes, l'Europe devrait connaître un réchauffement supérieur à la moyenne. Les modèles climatiques prévoient en effet que, dès la seconde moitié du siècle, un été sur quatre sera aussi chaud que celui de 2003. Un changement climatique d'une telle ampleur a des répercussions sur la nature, sur l'homme, sur les infrastructures et sur la vie économique, qui se traduisent par des problèmes de santé, des mauvaises récoltes, des perturbations dans la production d'énergie et des incendies de forêts. En Suisse, la vague de chaleur de 2003 a fait 975 victimes, soit une mortalité de 30 % supérieure à la moyenne pluriannuelle. Les coûts engendrés par la canicule sont estimés, pour l'Europe, entre 10 et 17 milliards d'euros1. À long terme, selon l'ONU, le réchauffement climatique entraînera en Europe une baisse du PIB pouvant aller jusqu'à 2,8 %2. Pour la Suisse, cela équivaudrait à des pertes de plus de 12 milliards de francs.

Pour enrayer le changement climatique, il importe de diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Les climatologues estiment que, dans les pays industrialisés, une réduction de 60 à 80 % serait nécessaire d'ici à 2100. Sachant que ces gaz ont une longue durée de vie dans l'atmosphère, les Etats doivent agir au plus vite. Selon les économistes, les mesures de politique climatique peuvent être considérées comme un investissement, car elles contribuent à prévenir les dommages économiques.

Parallèlement, il s'agit de mettre en place des stratégies d'adaptation au changement climatique, notamment en renforçant la protection contre les dangers naturels tels que fonte des neiges et du permafrost, fortes précipitations, éboulements, coulées de boue et glissements de terrain, provoqués par les températures élevées et l'évolution du régime des précipitations.

1 2

Claudia Kemfert et Dietmar Pfeifer: The Economic Impact Assessment of Extreme Weather Events. In: Zeitschrift für Versicherungswirtschaft. En cours d'impression.

Convention-cadre des nations Unies sur les changements climatiques / Programme des Nations Unies pour l'environnement: Climate change information kit.

4625

1.2

Protection internationale du climat: le Protocole de Kyoto

Lors du Sommet de la terre de 1992 à Rio de Janeiro, la communauté internationale a adopté la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (Convention sur le climat)3, afin de stabiliser les concentrations atmosphériques des gaz à effet de serre à un niveau excluant les perturbations dangereuses du système climatique. Ratifiée par la Suisse en décembre 1993, la convention est entrée en vigueur en mars 1994.

Le Protocole de Kyoto4 a été adopté en 1997. Cet accord additionnel à la Convention sur le climat fixe des objectifs de réduction chiffrés pour les émissions de six gaz à effet de serre. Dans un premier temps, les objectifs sont contraignants uniquement pour les pays industrialisés, ce qui revient à dire que les pays en développement n'y sont pas encore soumis. Le Protocole de Kyoto n'impose pas de mesures concrètes pour atteindre les objectifs et autorise les pays industrialisés à se faire créditer des réductions pour les émissions obtenues à l'étranger (certificats étrangers), en complément aux mesures prises sur leur territoire. Les «mécanismes de flexibilité» leur permettent en effet de participer à des projets de protection du climat dans d'autres pays industrialisés (application conjointe; Joint Implementation, JI) ou dans des pays en développement (mécanisme pour un développement propre; Clean Development Mechanism, CDM) ainsi qu'au commerce international des droits d'émission. Le protocole prévoit également la prise en compte des puits de carbone. Réservoirs qui absorbent davantage de CO2 qu'ils n'en émettent, les puits de carbone potentiels sont les océans, le sol et la végétation, en particulier les forêts qui peuvent fixer de grandes quantités de CO2 dans leur biomasse.

En ratifiant le Protocole de Kyoto en été 2003, la Suisse s'est engagée à réduire, durant la période de 2008 à 2012, ses émissions de six gaz à effet de serre de 8 % par rapport à 1990. Depuis l'entrée en vigueur du protocole le 16 février 2005, cet objectif est contraignant pour la Suisse. En cas de non-respect de leur obligation, les Parties verront leur participation aux mécanismes de flexibilité limitée et leurs dépassements reportés sur la période d'engagement suivante, majorés d'une pénalité de 30 %.

Le Protocole de Kyoto exige que les Etats Parties négocient de nouvelles réductions de
leurs émissions en 2005 au plus tard. Cette disposition est reprise dans la loi du 8 octobre 1999 sur le CO25, qui charge le Conseil fédéral de soumettre «en temps voulu à l'Assemblée fédérale des propositions quant aux objectifs postérieurs à l'an 2010». Les principales bases de discussion en vue de l'adoption d'autres mesures de politique climatique sont élaborées dans le cadre des perspectives énergétiques établies par l'Office fédéral de l'énergie (OFEN) ainsi que du pôle de recherche national sur le climat (PRN Climat). Le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) présentera au Conseil fédéral un rapport sur les possibilités de réductions d'émissions supplémentaires dans les différents secteurs d'ici à fin 2006.

3 4 5

RS 0.814.01 RS 0.814.011 Art. 2, al 6; RS 641.71

4626

1.3

Mise en oeuvre du Protocole de Kyoto en Suisse

1.3.1

Situation actuelle

Le Protocole de Kyoto porte sur six gaz à effet de serre: le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l'oxyde nitreux (N2O), les hydrofluorocarbones (HFC), les hydrocarbures perfluorés (PFC) et l'hexafluorure de soufre (SF6).

Le principal gaz à effet de serre est le CO2 auquel, en 2003, 85,5 % des émissions totales étaient imputables en Suisse. Plus précisément, 76,7 % sont dus à la combustion des énergies fossiles que sont les combustibles et les carburants, les 8,8 % restants émanant de la production de ciment, de l'incinération des déchets et des procédés chimiques. Le méthane et l'oxyde nitreux représentent respectivement 7 % et 6 % du total des émissions de gaz à effet de serre du pays. La principale source de ces deux gaz est l'agriculture: le méthane est pour une très large part rejeté dans l'atmosphère par les bovins ­ et, dans une moindre mesure, par les décharges ­, l'oxyde nitreux provenant essentiellement des engrais minéraux et des engrais de ferme. Les trois gaz synthétiques (HFC, PFC, SF6), utilisés dans la technique du froid et les installations à haute tension ainsi que comme gaz propulseurs et comme produits de nettoyage, sont responsables de 1,5 % du total des émissions.

Figure 1 Proportions d'émissions des gaz à effet de serre (2003)

CO2 énergétique 76,7%

CO2 non Méthane énergétique Gaz Oxyde 7,0% 8,8% synthétiques nitreux 1,5% 6,0%

Les actions menées jusqu'ici ont permis d'enregistrer une légère baisse des émissions de CO2 par rapport à 1990. Cette évolution est due à plusieurs instruments mis sur pied dans le cadre des lois sur le CO2 et sur l'énergie, à savoir le Programme Energie2000 et son programme subséquent, SuisseEnergie, les mesures librement consenties par l'économie, les efforts des cantons dans le domaine de la construction et la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP). Le résultat est attribuable essentiellement à la diminution des émissions dues aux combustibles.

Les émissions de CO2 dues aux carburants ont fortement augmenté, malgré les mesures librement consenties et la RPLP.

4627

Les émissions de méthane et d'oxyde nitreux d'origine agricole ont nettement diminué depuis les années 90, période à laquelle ont été introduits les principes de production intégrée et d'agriculture biologique. L'évolution du marché, les progrès techniques ainsi que la subordination des paiements directs aux prestations écologiques requises ont entraîné un recul aussi bien du cheptel que du recours aux engrais.

Les émissions de méthane dues à l'incinération des déchets ont elles aussi baissé ces dernières années, suite à l'interdiction en vigueur depuis 2000 de mettre en décharge les déchets urbains combustibles. Ceux-ci doivent désormais être incinérés.

L'utilisation des gaz synthétiques (HFC, PFC et SF6) a beaucoup augmenté durant les années 90. Soucieux d'enrayer cette progression, le Conseil fédéral a révisé l'ordonnance du 9 juin 1986 sur les substances (Osubst)6 en 2003. Ces gaz sont depuis lors interdits d'emploi, à de rares exceptions près.

Les perspectives d'émissions pour 20107, résumées dans le tableau 1, montrent l'évolution probable des émissions sans autres mesures que celles qui ont été mises en oeuvre avant la fin 2004. Les effets de la taxe sur le CO2 du centime climatique ou d'autres mesures prévues ne sont pas pris en compte.

Tableau 1 Emissions des gaz à effet de serre au sens du Protocole de Kyoto (valeurs exprimées en millions de tonnes CO2eq8)

Dioxyde de carbone ­ dont combustibles (sans correction en fonction du climat) ­ carburants ­ autres (CO2 non énergétique)

1990

2000

20101

44,37 23,83

43,66 22,18

43,45 22,11

15,46 5,08

16,86 4,62

16,69 4,65

Méthane

4,45

3,74

3,45

Oxyde nitreux

3,34

3,19

2,88

Gaz synthétiques

0,28

0,67

0,99

52,45

51,26

50,77

Total Objectif selon le Protocole de Kyoto Ecart 1

6 7 8

48,25 2,52

Seules les mesures mises en oeuvre avant la fin 2004 sont prises en compte.

RS 814.013 OFEFP (2005): Émissions de gaz à effet de serre au sens du Protocole de Kyoto. Perspectives d'émissions pour 2010; Berne.

Les effets climatiques des six gaz à effet de serre sont exprimés en équivalents CO2 sur la base du potentiel de réchauffement global. Ainsi, une tonne de méthane, dont les effets dans l'atmosphère sont 21 fois supérieurs à ceux du CO2, correspond à 21 tonnes d'équivalents CO2.

4628

Selon ce scénario de référence, les émissions de gaz à effet de serre reculent de 3,2 % entre 1990 et 2010. L'écart par rapport à l'objectif du Protocole de Kyoto se monte à environ 2,5 millions de tonnes d'équivalents CO2 (CO2eq). Contrairement à la loi sur le CO2, le Protocole de Kyoto ne corrige pas les émissions de CO2 liées aux combustibles en fonction du nombre de degrés-jours unifiés de chauffage9.

De ce fait, l'écart par rapport à l'objectif selon le Protocole de Kyoto (2,5 millions de tonnes) est légèrement inférieur à celui selon la loi sur le CO2 (2,9 millions de tonnes; voir ch. 2.1).

1.3.2

Autres mesures prévues pour atteindre l'objectif du Protocole de Kyoto

Le Conseil fédéral entend réaliser l'objectif du Protocole de Kyoto en prenant les mesures supplémentaires suivantes: Mise en oeuvre de la loi sur le CO2 Elément essentiel de la politique climatique suisse, la loi sur le CO2, en vigueur depuis le 1er mai 2000, fixe des objectifs de réduction pour les émissions de CO2 dues à la consommation d'énergie. D'ici à 2010, celles-ci doivent baisser de 10 % par rapport à 1990. L'introduction d'une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et du centime climatique prélevé sur les carburants devrait entraîner une diminution des émissions de 2,5 millions de tonnes, pour autant que la mise en oeuvre intervienne rapidement (voir ch. 2.2 et 2.3).

Autres mesures dans le domaine des carburants La taxe sur le CO2 ne s'appliquant pas aux carburants, deux mesures importantes permettraient de réduire les émissions de CO2 qu'ils génèrent: ­

La promotion du gaz naturel utilisé comme carburant et des carburants biologiques. Cette mesure, qui doit être sans incidences sur les rentrées fiscales, requiert une modification de la loi sur l'imposition des huiles minérales (voir ch. 1.6.1).

­

L'encouragement du recours aux véhicules à basse consommation et faibles émissions. Cette mesure passe par une révision de la loi sur l'imposition des véhicules automobiles (voir ch. 1.6.1).

Ces deux mesures, en cours d'élaboration, doivent être concrétisées le plus vite possible. Elles devraient contribuer à réduire les émissions de CO2 à hauteur d'environ 0,4 million de tonnes.

Utilisation des mécanismes de flexibilité Pour atteindre l'objectif du Protocole de Kyoto, le Conseil fédéral compte utiliser les mécanismes de flexibilité, qui permettent d'acheter des certificats et des droits d'émissions à d'autres Etats Parties au Protocole de Kyoto. À cet effet, il a édicté l'ordonnance du 22 juin 2005 régissant l'imputation des réductions d'émissions

9

Les degrés-jours unifiés de chauffage sont les jours durant lesquels la température est inférieure à 12 °C.

4629

opérées à l'étranger (voir ch. 1.6.4). Tant le Protocole de Kyoto que la loi sur le CO2 autorisent le recours à cet instrument.

Toute personne physique ou morale peut participer aux mécanismes de flexibilité.

Ceux-ci seront utilisés avant tout par la fondation pour le centime climatique (voir ch. 2.3) et par les entreprises qui se sont engagées formellement vis-à-vis de la Confédération à réduire leurs émissions de CO2 pour être exemptées de la taxe (voir ch. 2.2). Cet instrument est l'option ultime dont dispose la Confédération pour remplir l'objectif selon le Protocole de Kyoto s'il n'est pas atteint à la fin de la période 2008­2012.

Prise en compte des puits de carbone Conformément au Protocole de Kyoto, la Suisse peut comptabiliser un éventuel accroissement des puits de carbone pour atteindre son objectif. Si elle décide de le faire, elle doit annoncer officiellement à la Convention sur le climat avant mi-2006 les activités et les surfaces qu'elle veut prendre en compte pour la période 2008­ 2012. En transmettant la motion CEATE-N (03.3012), les deux Chambres se sont prononcées en faveur de la prise en compte des puits de carbone. Il n'est pour l'heure pas possible d'estimer leur contribution à la réduction des émissions. Il faut attendre la fin de l'évaluation de l'inventaire forestier national, qui devrait durer jusqu'à fin 2006.

Si, au vu des résultats et compte tenu des risques, cette contribution se révèle positive, le Conseil fédéral envisage d'imputer l'activité des puits de carbone au cas où le volume effectif d'émissions dépasserait les prévisions (voir ch. 1.3.3).

1.3.3

Gestion des risques en cas de non-réalisation de l'objectif selon le Protocole de Kyoto

L'évolution probable présentée dans les perspectives d'émissions pour 2010 (scénario de référence) repose sur un grand nombre d'hypothèses portant sur différents facteurs: modifications du cadre économique et démographique, évolution de la politique énergétique, développement technique, comportement des consommateurs d'énergie, conditions climatiques durant la période d'engagement. Ces hypothèses sont inévitablement entachées d'incertitudes plus ou moins importantes, mais les analyses de sensibilité permettent de savoir quelle serait l'évolution si les conditions générales étaient différentes de celles admises pour le scénario de référence. Si les scénarios qui sont proches des limites extérieures de la marge d'évolution sont relativement peu vraisemblables, ils n'en restent pas moins possibles. Il va cependant de soi que le scénario le plus probable sera pris en compte pour la planification et la mise en oeuvre des mesures.

Même si, selon les estimations, les mesures prévues devraient permettre de dépasser légèrement l'objectif visé par le Protocole de Kyoto, le Conseil fédéral veut mettre en oeuvre la totalité des mesures possibles, et ce rapidement, pour plusieurs raisons: ­

La protection du climat étant un objectif à long terme, les efforts devront être intensifiés après la première période d'engagement.

­

Les considérations économiques plaident en faveur d'une réduction de la dépendance par rapport aux agents fossiles.

4630

­

Il n'est pas exclu que la Suisse doive, avant 2012 déjà, mettre en service une centrale à gaz pour la production d'électricité. Celle-ci générera un volume d'émissions de CO2 considérable qui n'est pas pris en compte dans les perspectives.

­

Si la Suisse connaît des hivers froids, elle risque de ne pas atteindre l'objectif fixé par le Protocole de Kyoto, car celui-ci, contrairement à la loi sur le CO2, ne corrige pas les émissions en fonction du climat et prescrit qu'elles doivent être compensées ailleurs. Résultat: en 2003, par exemple, les émissions étaient de 0,75 million de tonnes supérieures au volume calculé conformément à la loi sur le CO2.

­

La contribution de la forêt comme puits de carbone comporte des incertitudes liées non seulement aux méthodes de mesure et à la fixation effective du CO2, mais aussi au risque de libération du CO2 par des tempêtes, le bostryche ou le feu.

­

Dans une situation favorable, les mesures permettent de dépasser l'objectif de Kyoto et des droits d'émission («assigned amount units») peuvent être reportés sur la période d'engagement suivante ou vendus sur le marché international. Par contre, si la situation est défavorable, l'écart par rapport à l'objectif augmente et la Suisse doit alors acheter des certificats à l'étranger.

1.4

Taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et centime climatique

La loi sur le CO2 prescrit des objectifs de réduction des émissions d'origine énergétique par rapport à 1990 devant être atteints d'ici à 2010. D'ici là, les émissions totales de CO2 dues à la consommation d'énergies fossiles doivent être réduites de 10 %. La part est fixée à 15 % pour les combustibles et à 8 % pour les carburants. Si les mesures librement consenties et les autres mesures agissant sur les émissions de CO2 se révèlent insuffisantes, la loi prévoit que le Conseil fédéral doit introduire une taxe sur le CO2 (art. 3 de la loi sur le CO2) et en soumettre le montant à l'approbation de l'Assemblée fédérale (art. 7, al. 4, de la loi sur le CO2).

Le 11 juin 2004, le Conseil fédéral a décidé de mettre en consultation quatre variantes devant permettre d'atteindre les objectifs de réduction: (1) une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et aux carburants, (2) une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et aux carburants, avec affectation partielle des recettes à l'achat de certificats d'émission étrangers, (3) une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles, avec centime climatique prélevé sur les carburants et (4) un centime climatique prélevé uniquement sur les carburants. Le rapport envoyé en consultation mettait en parallèle les effets climatiques, économiques et financiers des quatre variantes et présentait en annexe les principaux éléments des actes législatifs nécessaires à leur mise en oeuvre10. Les participants se sont pour la plupart prononcés en faveur de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles. Pas de nette majorité, en revanche, pour une taxe sur le CO2 ou un centime climatique en ce qui concerne les carburants.

10

DETEC (2004): Mesures requises pour atteindre les objectifs de réduction des émissions fixés dans la loi sur le CO2. Consultation portant sur quatre variantes; Berne, 20.10.04.

4631

Fort de ces résultats, le Conseil fédéral a décidé, le 23 mars 2005: ­

d'introduire une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles fossiles;

­

de laisser une chance au centime climatique prélevé sur les carburants jusqu'à fin 2007;

­

d'instaurer une taxe sur le CO2 pour l'essence si le centime climatique ne permet pas d'atteindre l'objectif escompté d'ici là.

La taxe sur le CO2 et le centime climatique doivent permettre, d'ici à 2010, d'abaisser les émissions de CO2 de 2,5 millions de tonnes afin d'atteindre, conjointement avec d'autres mesures, les objectifs de la loi et du Protocole de Kyoto (voir ch. 2.1).

Se fondant sur les prévisions sur le CO2 des experts de Prognos, le Conseil fédéral a fixé le montant de la taxe appliquée aux combustibles à 35 francs par tonne de CO2.

Cette taxe d'incitation, qui complète les mesures librement consenties, les mesures de droit privé ainsi que d'autres mesures ayant un effet sur les émissions de CO2, a pour but de réduire la consommation d'agents fossiles et, partant, les émissions de CO2. La hausse du prix des combustibles constitue une incitation à en diminuer la consommation et à utiliser davantage d'agents énergétiques n'émettant pas ou que peu de CO2. La réduction des émissions ainsi obtenue devrait atteindre environ 0,7 million de tonnes en 2010. Le 22 juin 2005, le Conseil fédéral a édicté l'ordonnance sur la taxe sur le CO2 (ordonnance sur le CO2) pour en régler la mise en oeuvre.

Le centime climatique étant une mesure volontaire de l'économie privée, la Confédération ne peut en prescrire ni le montant ni l'affectation des sommes encaissées ni la date d'introduction. Il est prélevé par le secteur pétrolier et ses recettes sont gérées par une fondation privée et utilisées pour financer des réductions d'émissions en Suisse et à l'étranger. Il est prévu de percevoir une taxe de 1,3 à 1,9 centime par litre d'essence et de diesel, ce qui devrait, selon la fondation, générer des recettes de l'ordre de 100 millions de francs par année. Le centime climatique doit contribuer à réduire les émissions de CO2 à hauteur de 1,8 million de tonnes jusqu'en 2010. S'il apparaît d'ici à 2007 que cet objectif ne peut pas être atteint, le Conseil fédéral introduira une taxe sur l'essence. Il n'est en revanche pas prévu d'imposer le diesel, notamment parce que le niveau des prix en Suisse ­ contrairement à celui de l'essence ­ est déjà aussi élevé que dans les pays voisins.

1.5

Approbation du montant de la taxe par le Parlement

Conformément à l'art. 7, al. 4, de la loi sur le CO2, le montant de la taxe est soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale. Cela étant, le Conseil fédéral demande au Parlement, par le présent message, d'approuver le montant de 35 francs par tonne de CO2 pour les combustibles. L'arrêté fédéral résultant de cette décision n'est pas sujet au référendum.

Le montant de la taxe a été déterminé de manière à atteindre l'objectif fixé (voir ch. 2.1 et 2.2). Quant à la taxe elle-même, elle répond aux critères définis à l'art. 6, al. 2, let. a à d, de la loi sur le CO2:

4632

­

Aucune nouvelle taxe n'a été introduite sur les combustibles et les taxes existantes n'ont pas été augmentées depuis l'entrée en vigueur de la loi (let. a).

­

La majorité des pays industrialisés mettent en oeuvre le Protocole de Kyoto, ont adopté des mesures et, pour certains, introduit une taxe d'incitation (let. b, voir également ch. 5).

­

Les prix appliqués par la Suisse pour l'huile de chauffage extra-légère sont les plus bas d'Europe (let. c.).

­

Pour garantir leur capacité concurrentielle, plus de 300 entreprises ont déjà signé des conventions avec la Confédération, aux termes desquelles elles sont exemptées de la taxe pour autant qu'elles réduisent leurs émissions de CO2. Des conventions avec d'autres entreprises sont en préparation (let. d.).

1.6

Autres mesures

1.6.1

Carburants

L'entrée en vigueur de la modification de la loi du 21 juin 1996 sur l'imposition des huiles minérales11 visant à promouvoir l'utilisation du gaz naturel comme carburant et à exonérer les biocarburants, sans incidences sur les rentrées fiscales, est prévue pour le 1er janvier 2007. Mise en consultation jusqu'au 21 janvier 2005, la mesure, qui prévoit de majorer le prix de l'essence de 2 à 3 centimes par litre d'ici à 201012, n'a pas été contestée.

Une révision de la loi fédérale du 21 juin 1996 sur l'imposition des véhicules automobiles13 est en préparation, afin d'encourager la construction de véhicules à basse consommation et faibles émissions. Cette mesure instaure des incitations à l'achat de nouveaux véhicules. Celles-ci doivent être suffisantes pour que la consommation spécifique et les émissions des nouveaux véhicules continuent d'être abaissées et que le plus grand nombre possible de voitures diesel soient équipées de filtres à particules. L'élaboration du message relatif à la modification de la loi sur l'imposition des véhicules automobiles figure dans les objectifs du Conseil fédéral pour 2005.

La création d'une incitation par le biais de l'impôt sur les véhicules automobiles ainsi que l'encouragement du gaz naturel utilisé comme carburant et des biocarburants par celui de l'impôt sur les huiles minérales apporteraient une contribution non négligeable à la réalisation de l'objectif fixé par la loi sur le CO2 pour les carburants.

Mises en oeuvre à temps, ces mesures devraient permettre de réduire les émissions de 0,4 million de tonnes.

Un autre moyen efficace de limiter les rejets de CO2 dus au trafic serait d'édicter des prescriptions sur les émissions ou sur la consommation. De fait, le Conseil fédéral y serait habilité en vertu de la loi sur l'énergie, mais elles représentent une entrave technique au commerce au sens des accords OMC et violeraient l'Accord entre la 11 12 13

RS 641.61 Si tout le potentiel de cette mesure est exploité, la majoration pourrait aller jusqu'à 6 centimes par litre.

RS 641.51

4633

Communauté européenne et la Confédération suisse relatif à la reconnaissance mutuelle en matière d'évaluation de la conformité. C'est pourquoi il convient de privilégier la solution des incitations (impôts sur les véhicules et sur les huiles minérales et, éventuellement, taxe sur le CO2).

À long terme, il y aura lieu de prendre d'autres mesures dans le domaine du trafic afin d'inverser la tendance à l'augmentation des émissions de CO2, entre autres au niveau du trafic combiné, de la gestion de la mobilité et de la locomotion douce. À titre d'exemple, effectuer 1 % des trajets à pied ou à vélo plutôt qu'en voiture ou en moto ­ ce qui représente le potentiel de la locomotion douce à moyen terme ­, permettrait d'économiser au moins 0,1 million de tonnes de CO2.

1.6.2

Combustibles

Le secteur de la construction présentant un important potentiel d'économie d'énergie inexploité, le groupe stratégique de SuisseEnergie recommande, pour la seconde moitié du programme, de lancer une action nationale d'assainissement des bâtiments. Il s'agit notamment de réduire les sources de déperdition de chaleur en modernisant l'enveloppe des immeubles et d'encourager les innovations en matière de technique énergétique et d'énergies renouvelables. Sachant que ces mesures ne pourront déployer pleinement leurs effets qu'à moyen et à long terme, la réduction des émissions de CO2 dues aux combustibles d'ici à 2010 devrait être faible.

L'initiative parlementaire Hegetschweiler (02.473), à laquelle les deux Chambres ont donné suite, engage elle aussi à mieux exploiter le potentiel d'économie d'énergie dans le bâtiment. L'introduction du centime climatique permettrait de répondre rapidement à cette initiative, du moins en partie. Celle-ci pourrait également être mise en oeuvre en prélevant des fonds sur les recettes de la taxe sur le CO2.

La loi sur le CO2 prévoit toutefois la redistribution du produit de la taxe à la population et aux milieux économiques. L'affectation d'une part du produit de la taxe à des mesures dans le secteur de la construction nécessiterait une modification de la loi sur le CO2. Contrairement à une taxe d'incitation à affectation partielle, une redevance de financement nécessiterait une base constitutionnelle.

1.6.3

Puits de carbone

Les puits de carbone sont des écosystèmes (p. ex. les forêts, le sol, la végétation) qui absorbent plus de CO2 qu'ils n'en rejettent. Ils peuvent donc ralentir l'accroissement de la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Le Protocole de Kyoto réglemente la comptabilisation des puits de carbone comme suit: ­

L'art. 3, al. 3, prescrit que les variations liées à la foresterie intervenues depuis 1990 doivent être compensées, les boisements entraînant une réduction et les déboisements une augmentation des émissions.

­

L'art. 3, al. 4, dispose que les Etats Parties peuvent également prendre en compte des variations de stocks de carbone enregistrées dans les écosystèmes existants, à savoir les puits de carbone résultant d'activités forestières et agricoles telles que l'exploitation des forêts, des pâturages et des terres cultivées ainsi que la restauration du couvert végétal. Les pays qui entendent

4634

imputer les réductions d'émissions obtenues selon l'art. 3, al. 4, doivent indiquer d'ici à 2006 les activités, les surfaces et les méthodes de mesure prévues à cette fin.

Les puits de carbone sont imputés sous forme de droits d'émission supplémentaires autorisant à rejeter davantage de gaz à effet de serre entre 2008 et 2012. Si, durant cette période, les puits libèrent tout de même du CO2, les émissions supplémentaires doivent être compensées par des mesures de réduction ou par l'achat de certificats.

Sachant que les puits ne peuvent fixer du CO2 que pendant une période limitée, leur contribution à la réduction des émissions est passagère. Tôt ou tard, tous les puits deviennent des sources, car le CO2 ne peut pas y être stocké définitivement (risque de non-permanence). À un moment ou à un autre, les pertes de carbone dues à des changements d'exploitation, à la réduction de la biomasse, à des incendies ou à des tempêtes devront être comptabilisées en tant qu'émissions de CO2. L'obligation de rendre compte de la concentration en CO2 des puits imputés aux objectifs de réduction reste valable au-delà de la période d'engagement 2008­2012. Pour l'instant, leur contribution comporte encore de grandes incertitudes quant aux méthodes de mesure et à la fixation effective du CO2 selon le type de forêt, de végétation ou de sol.

Afin de respecter l'objectif visé par le Protocole de Kyoto, la CEATE-N a chargé le Conseil fédéral de prendre en compte les puits de CO2. Les deux Chambres ayant transmis la motion ­ et s'étant donc prononcées en faveur de cette requête ­, des analyses sont en cours afin d'en déterminer le potentiel de réduction effectif.

­

Le bilan des boisements et des déboisements au sens de l'art. 3, al. 3, du Protocole de Kyoto est quasiment équilibré14.

­

Conformément aux réglementations internationales, la Suisse peut imputer un contingent de 1,83 million de tonnes de CO2 résultant des puits de carbone et de la gestion des forêts au sens de l'art. 3, al. 4, du Protocole de Kyoto. La croissance effective est déterminée dans le cadre de l'inventaire forestier national. Selon les premiers résultats des relevés en cours pour les années 1995 à 2005, l'effet de puits est beaucoup plus faible que pour la période 1985­1995.

­

La Station fédérale de recherches en agroécologie et agriculture (FAL)15 a étudié le potentiel d'accroissement des stocks de carbone dans les prairies, les pâturages et les champs. Il en ressort que la contribution de ces écosystèmes agricoles pour la période 2008­2012 est nettement inférieure à 0,1 million de tonnes de CO2.

Le Conseil fédéral est favorable à la prise en compte des puits de carbone dès lors qu'ils ne vont pas à l'encontre de l'intérêt général et des objectifs à long terme de la politique climatique, de l'exploitation des forêts et de l'agriculture. Pour réaliser l'objectif selon le Protocole de Kyoto, il entend utiliser l'effet de puits possible de la Suisse de la manière suivante:

14 15

Les boisements sont recensés sur la base de la statistique de la superficie et les déboisements sur celle des statistiques cantonales des défrichements.

Leifeld/Bassin/Fuhrer (2003): Carbon stocks and carbon sequestration potentials in agricultural soils in Switzerland; Les cahiers de la FAL 44.

4635

Tableau 2 Puits de carbone en Suisse Effet de puits

Contribution possible 2008­2012

Protocole de Kyoto

Réalisation de l'objectif en Suisse

Boisements et déboi- ± 0,1 million t CO2 sements

Obligatoire (art. 3, al. 3)

Economie forestière

Question ouverte

Optionnel, max.

1,8 million t CO2 (art. 3, al. 4)

Agriculture

0,1 million t CO2

Optionnel (art. 3, al. 4)

Mise en oeuvre obligatoire.

Adaptation aux exigences du Protocole de Kyoto et définition de la forêt indispensables.

Déclaration d'ici à mi-2006.

Relevés de l'inventaire forestier national et exploitation de la statistique de la superficie indispensables.

Question ouverte (étude de l'investissement nécessaire pour le relevé des données)

La loi sur le CO2 ne tient pas compte d'une hausse des stocks de carbone résultant de l'activité des puits. L'UDC a déposé une initiative parlementaire (01.421) demandant de modifier la loi en ce sens, mais elle a été rejetée. Les puits de carbone ne peuvent donc pas remplacer les mesures prévues dans le domaine des combustibles et des carburants pour combler l'écart de 2,9 millions de tonnes de CO2. Vu les incertitudes concernant l'accroissement effectif des puits, la fiabilité de certaines données et le risque de non-permanence, il ne paraît en effet pas indiqué de tabler sur cette méthode. Il convient cependant de la garder en réserve et d'y recourir en cas d'évolution défavorable des émissions qui mettraient en péril la réalisation de l'objectif (voir ch. 1.3.3).

Il est en revanche possible de contribuer à la réalisation des objectifs de réduction en améliorant l'utilisation du bois qui, neutre du point de vue du CO2, peut remplacer d'autres matériaux fabriqués avec de l'énergie fossile et fournir de l'énergie. Actuellement, elle permet d'éviter chaque année la production de plus de 2 millions de tonnes de CO2 en Suisse, un chiffre qui pourrait être pratiquement doublé. Toutefois, qui dit utilisation du bois dit évacuation hors de la forêt d'une masse de bois et, partant, diminution de l'effet de puits. À relever que la prise en compte du bois utilisé pour la construction, demandée par les motions Hess (04.3572) et Lustenberger (04.3595), n'est pas autorisée par le Protocole de Kyoto.

1.6.4

Utilisation des mécanismes de flexibilité

Vu que l'art. 2, al. 7, de la loi sur le CO2 habilite le Conseil fédéral à tenir compte de manière appropriée des réductions d'émissions opérées à l'étranger, ce dernier entend imputer les mécanismes de flexibilité du Protocole de Kyoto à la réalisation de l'objectif en complément aux mesures prises sur le territoire suisse. Pour ce faire, il a édicté le 22 juin 2005 l'ordonnance régissant l'imputation des réductions d'émissions opérées à l'étranger (ordonnance sur l'imputation)16, qui entrera en vigueur le 16

4636

RS 641.711; RO 2005 3581

1er janvier 2006. Cet acte législatif fixe les exigences de qualité et le volume de certificats étrangers pouvant être imputés à l'objectif de réduction, sur la base des réglementations internationales. Les certificats et les droits d'émission doivent provenir d'Etats ayant ratifié le Protocole de Kyoto. En ce qui concerne les projets de protection du climat réalisés dans des pays en développement (CDM), ils doivent être validés, vérifiés et certifiés par des organes de contrôle accrédités. Quant aux projets réalisés dans d'autres pays industrialisés (JI), ils peuvent faire l'objet d'une procédure simplifiée pour autant que leur «additionnalité» soit clairement démontrée, c'est-à-dire que les émissions ne puissent pas être réduites sans leur mise en place. L'effort principal devant être consenti en Suisse, l'imputation de certificats étrangers est limitée à environ 2 millions de tonnes de CO2, soit la moitié du volume de réduction prévu par la loi sur le CO2 et le Protocole de Kyoto. Ce contingent est réparti entre le centime climatique (1,6 million de tonnes au maximum) et les entreprises qui se sont engagées formellement à réduire leurs émissions (0,4 million de tonnes).

Ouvert à toutes les personnes physiques et morales, le recours aux mécanismes de flexibilité est subordonné à l'enregistrement de ces dernières auprès du secrétariat national SwissFlex, rattaché l'OFEFP17, qui est en train de constituer le registre national des droits d'émission et des transactions. La demande de certificats étrangers émanera en grande partie de la fondation pour le centime climatique (voir ch. 2.3), mais également d'entreprises s'étant formellement engagées vis-à-vis de la Confédération à réduire leurs émissions de CO2 pour être exemptées de la taxe (voir ch. 2.2).

1.7

Résultats de la consultation

La tendance se dégageant de la consultation sur les quatre variantes proposées pour atteindre les objectifs de réduction des émissions fixés dans la loi sur le CO2 est nette: la quasi-totalité des participants soutiennent les objectifs de la politique climatique de la Confédération. Les avis sur les mesures à prendre pour atteindre les objectifs, en revanche, sont très partagés18. Ainsi, le PS, le PE, le PCS, les organisations environnementales, les syndicats, les associations de locataires et les organisations de consommateurs se prononcent en faveur de la variante 1, à savoir la perception unique d'une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et aux carburants. Le PDC est, lui, favorable à la variante 3 (taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et centime climatique sur les carburants), sous réserve que le problème de la base juridique soit éclairci et que les recettes servent en priorité à des mesures de réduction des émissions en Suisse. Pour leur part, le PRD et l'UDF privilégient la variante 4 (centime climatique sur les carburants uniquement), alors que le PLS et l'UDC rejettent toutes les variantes. Dans les milieux de l'économie, la préférence va à la variante 4 pour nombre de participants, dont economiesuisse, l'Union suisse des arts et métiers, l'Union suisse des paysans, la Société suisse des propriétaires fonciers, l'Union pétrolière et les associations de transports. En revanche, les grandes banques, les assurances, la Société suisse des industries chimiques (SSIC), 17 18

mailto:swissflex@buwal.admin.ch DETEC (2005): Analyse des résultats de la procédure de consultation sur les mesures requises pour atteindre les objectifs de réduction des émissions fixés dans la loi sur le CO2; Berne, 23.3.05.

4637

Migros et Coop préconisent les variantes 1 ou 2 (mais sans affectation partielle des recettes à l'achat de certificats d'émission étrangers). Quant aux cantons, dix d'entre eux soutiennent la variante 1 et quatorze la variante 3, avec un centime climatique assorti d'un taux plus élevé et davantage de mesures en Suisse.

Si aucune variante ne l'emporte, les participants à la consultation s'accordent à penser qu'il est impératif de prendre des mesures dans le domaine des carburants et la majorité d'entre eux soutiennent l'introduction d'une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles. Les réglementations sur la perception, la redistribution et l'exemption de la taxe n'ayant pas été contestées, elles ont été reprises quasiment telles quelles dans l'ordonnance sur le CO2.

L'utilisation des mécanismes de flexibilité a été très favorablement accueillie, mais les avis divergent sur le volume de réductions d'émissions opérées à l'étranger imputable à cet instrument: les partisans de la variante 4 exigent qu'il soit plus élevé, alors que ceux des variantes 1 et 3 ­ notamment la majorité des cantons ­ demandent de l'abaisser et de renforcer les mesures en Suisse.

1.8

Classement d'interventions parlementaires

L'adoption du présent message et de l'ordonnance sur le CO2 permet de classer les interventions parlementaires suivantes:

19 20

­

La motion Rechsteiner du 23 mars 2001 («Loi sur le CO2. Mesures d'accompagnement»)19, transmise sous forme de postulat, qui demandait que les petites et moyennes entreprises ne soient pas désavantagées dans le cadre de l'exemption de la taxe sur le CO2 et que les dépenses extraordinaires engagées en vue d'accroître l'efficacité en matière énergétique et l'utilisation d'énergies renouvelables puissent être imputées à l'objectif de réduction des émissions. L'auteur de la motion exigeait en outre que l'exécution en la matière soit réglée en collaboration avec les cantons. Ces deux requêtes sont satisfaites: d'une part, la section 2 de l'ordonnance sur le CO2 règle la procédure d'exemption de la taxe et, d'autre part, l'instrument découlant des conventions universelles a été élaboré avec les cantons afin que les conventions portant sur les mesures librement consenties au sens des lois sur l'énergie et sur le CO2 soient reconnues dans le cadre des législations cantonales sur l'énergie.

­

Le postulat Leutenegger du 21 juin 2001 («Loi sur le CO2. Base de décision»)20, qui invite le Conseil fédéral à proposer des mesures allant dans le sens de la réduction des émissions de CO2 sans paiement de la taxe et à préparer une base de décision transparente pour son introduction et la fixation de son montant. Le Conseil fédéral s'étant prononcé en faveur du centime climatique, de l'encouragement du gaz naturel comme carburant et des biocarburants ainsi que d'un impôt sur les automobiles différencié pour encourager les véhicules efficaces du point de vue énergétique, il est pour l'instant possible de renoncer à une taxe sur les carburants. Le Conseil fédéral évalue-

01.3178; N 5.10.01 01.3371; N 5.10.01

4638

ra l'évolution de la situation en se fondant sur les perspectives sur le CO2, régulièrement mises à jour par les experts de Prognos.

­

La motion CEATE-N du 26 février 2003 («Prise en compte des puits de carbone dans le Protocole de Kyoto»)21, qui engage le Conseil fédéral à prendre en compte les puits de CO2 visés par le Protocole de Kyoto. Ce dernier a exposé dans le présent message comment il envisageait de comptabiliser les puits de carbone.

­

Le postulat Stähelin du 15 juin 2004 («Renforcement des mesures de lutte contre les rejets de CO2»)22, qui charge le Conseil fédéral d'examiner les possibilités d'absorption du CO2 par les cultures agricoles et sylvicoles ainsi que leur financement par le centime climatique et leur compatibilité avec les réglementations de l'OMC. Le présent message du Conseil fédéral résume les résultats de plusieurs études sur les potentiels de réduction des émissions de CO2 en Suisse et explique la mise en oeuvre du centime climatique.

2

Partie spéciale: application de la taxe sur le CO2 et du centime climatique prélevé par l'économie privée

2.1

Mesures librement consenties et écarts par rapport aux objectifs de la loi sur le CO2

Les mesures librement consenties occupent une place importante dans la loi sur le CO2 et dans la loi sur l'énergie. Leur mise en oeuvre est coordonnée par le programme SuisseEnergie, adopté par le Conseil fédéral en janvier 2001 pour succéder à Energie2000. A l'instar de la loi sur le CO2, le programme SuisseEnergie poursuit des objectifs quantitatifs précis de politique énergétique et de politique climatique: réduire la consommation d'énergies fossiles de 10 % et contenir la hausse de la consommation d'électricité à 5 % d'ici à 2010. Les mesures visant à accroître l'efficacité énergétique et à encourager les énergies renouvelables reposent sur un large partenariat entre Confédération, cantons, milieux économiques et organisations de protection de l'environnement. L'efficacité du programme SuisseEnergie augmente d'année en année. Sans lui, les émissions de CO2 seraient aujourd'hui supérieures de 6,9 %.

La Confédération a, dans le cadre d'un contrat de prestations, délégué d'importantes tâches d'exécution des mesures volontaires au sens de la loi sur le CO2 et de la loi sur l'énergie à l'Agence de l'énergie pour l'économie (AEnEC). Dans les domaines de l'industrie, de l'artisanat et des services, en particulier, des progrès réjouissants ont été enregistrés. Une première convention visant à réduire les émissions de CO2 a été signée en février 2003 avec l'industrie du ciment. À fin avril 2004, des conventions de ce type avaient été conclues avec 45 groupes d'entreprises englobant environ 600 exploitations actives dans toutes sortes de secteurs: céramique, verre, papier, hôtellerie, banque, chimie, métallurgie, construction de machines, plastique, aluminium, transports, alimentation, chaux, fonte, industrie graphique, grands distributeurs, sociétés de services, fromageries, installations de séchage d'herbe et autres PME. Quelque 400 autres entreprises sont en train d'élaborer des conventions.

21 22

03.3012; N 18.3.04, S 29.9.04 04.3316; E 29.9.04

4639

L'objectif de l'AEnEC est de conclure des conventions couvrant 40 % de la quantité totale de CO2 rejetée par l'économie.

Parmi les entreprises ayant déjà conclu une convention, plus de 300 cherchent à être exemptées de la taxe sur le CO2. A cette fin, elles ont conclu des conventions au sens de l'art. 9 de la loi sur le CO2, qui fixent des exigences plus élevées en matière de réduction des émissions de CO2 et qui seront transformées, par voie de décision, en engagements juridiquement contraignants au moment de l'introduction de la taxe sur le CO2.

Dans le domaine des bâtiments, où les cantons sont compétents, les incitations viennent surtout des lois cantonales sur l'énergie, renforcées dans le sens du Modèle de prescriptions énergétiques des cantons (MoPEC) de la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie, ainsi que des programmes d'encouragement cantonaux financés par des subventions globales de la Confédération. Ces programmes portent notamment sur l'énergie du bois, les pompes à chaleur, le label Minergie et l'utilisation de la chaleur environnementale. SuisseEnergie a chargé l'association Minergie, dans le cadre d'un contrat de prestations, de faire passer la part de marché de Minergie à 15 % pour les nouveaux bâtiments et à 4 % pour les assainissements complets.

Les Cités de l'énergie, dont le nombre s'élève actuellement à 120, ont une valeur d'exemple. Elles assurent la gestion énergétiquement efficace de 13 000 bâtiments.

Pour les propriétaires privés, par contre, les incitations à réduire les émissions de CO2 et à conclure des conventions sont faibles. Ce peu d'empressement s'explique notamment par le droit de bail. Selon celui-ci, les propriétaires sont autorisés à répercuter sur les locataires une partie seulement des investissements dans des installations d'économie d'énergie, mais l'intégralité des frais de chauffage et, partant, de la taxe sur le CO2.

Dans le domaine des carburants, les mesures librement consenties ne déploient pas des effets suffisants. Les efforts de SuisseEnergie sont destinés à promouvoir le trafic lent et le trafic combiné et à populariser Eco-Drive®, une technique de conduite économique et écologique. En février 2002, le DETEC a signé avec autosuisse, l'Association des importateurs suisses d'automobiles, une convention visant à réduire la consommation
spécifique de carburants de 3 % par année. La consommation moyenne de carburants des véhicules neufs doit passer de 8,4 à 6,4 litres aux 100 km d'ici à 2008. L'étiquetteEnergie, obligatoire pour les voitures de tourisme depuis le 1er janvier 2003, contribue à mettre en oeuvre la convention et aide les acheteurs à faire leur choix. À fin 2004, la consommation spécifique (7,82 l aux 100 km) était toutefois encore supérieure à la valeur cible annuelle de 7,4 l aux 100 km, en dépit des améliorations techniques et de l'augmentation continue du nombre de véhicules diesel, énergétiquement plus efficaces que les véhicules à essence. Au vu des données disponibles à ce jour, auto-suisse ne pourra pas atteindre son objectif si d'autres incitations ne sont pas introduites.

Les perspectives énergétiques actualisées23 par l'Office fédéral de l'énergie en mars 2005 ont confirmé les résultats de travaux précédents. Il en ressort que les mesures librement consenties, les incitations et les prescriptions édictées dans le cadre de SuisseEnergie ainsi que les réductions de CO2 dans d'autres domaines politiques ne suffiront pas à réaliser les objectifs de la loi sur le CO2. Si, compte tenu de ces 23

Prognos (2005): Bundesratsvarianten zur Umsetzung des CO2-Gesetzes; Bâle.

4640

mesures, les émissions de combustibles tendent à reculer et devraient diminuer, d'ici à 2010, de 11,4 % par rapport à 1990, les rejets dus aux carburants augmenteront probablement de 7,9 %. La loi sur le CO2 visant une réduction globale des émissions de CO2 de 10 %, l'écart par rapport à l'objectif se monte, selon les estimations, à 2,9 millions de tonnes de CO2.

Tableau 3 Evolution des émissions de CO2 selon la loi sur le CO2, par rapport à 1990 Jusqu'en 2003 (selon statistique sur le CO2)

Jusqu'en 2010 (selon scénario de référence Prognos)

Valeur cible 2010

Combustibles

­ 4,6 %

­ 11,4 %

­ 15 %

Carburants

+ 8,1 %

+ 7,9 %

­ 8%

Total

+ 0,2 %

­ 4,1 %

­ 10 %

Ecart par rapport à l'objectif 2010

2,9 millions t CO2

Il est prévu de combler l'écart de 2,9 millions de tonnes de CO2 en prenant les mesures suivantes: Taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles

0,7 million t CO2

Centime climatique sur les carburants

1,8 million t CO2

Promotion des carburants gazeux et des biocarburants, incitations par l'impôt automobile

0,4 million t CO2 2,9 millions t CO2

2.2

Taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles

2.2.1

Montant, exemption et redistribution de la taxe

Le montant de la taxe est de 35 francs par tonne de CO2. Elle sera prélevée sur les combustibles fossiles, comme l'huile de chauffage, le gaz naturel ou le charbon, pour autant que ceux-ci soient commercialisés à des fins énergétiques. L'utilisation énergétique comprend la production de chaleur aussi bien que d'électricité. Le bois et les autres combustibles issus de la biomasse ne sont pas soumis à la taxe, car ils n'influencent pas le bilan de CO2. Le taux de la taxe par unité de négoce est déterminé par la teneur en carbone de l'agent énergétique.

4641

Tableau 4 Montant de la taxe pour les principaux combustibles CHF par MWh CHF par 1000 kg24 CHF par mesure de capacité24

Huile de chauffage extra-légère

9,29

Huile de chauffage lourde

9,70

Gaz naturel

92,90 par 1000 litres 111,10

6,93

89,60

Houille

11,84

92,50

Houille brune

13,10

73,20

Coke de pétrole

11,84

115,20

Coke

13,23

99,30

L'introduction de la taxe sur le CO2 fera augmenter les prix des principaux agents énergétiques. En fonction des quantités commandées et sur la base de la moyenne des prix 2004, le renchérissement se situera entre 15 % et 20 % pour l'huile de chauffage extra-légère et entre 10 % et 12 % pour le gaz naturel.

Pour préserver leur compétitivité, les entreprises ont la possibilité de se faire exempter de la taxe sur le CO2. Pour ce faire, la loi exige qu'elles s'engagent formellement à limiter leurs émissions de CO2. L'exemption prend la forme d'un remboursement de la taxe sur le CO2 qui a été payée. À ce jour, plus de 300 entreprises se sont engagées à réduire leurs émissions de CO2 pour pouvoir être exemptées de la taxe au moment de son introduction (voir ch. 2.1).

La taxe sur le CO2 est une taxe d'incitation dont le produit est redistribué. Les recettes, estimées à quelque 650 millions de francs, sont reversées à la population et aux entreprises. La part revenant à la population est répartie de façon égale par les assureurs-maladie. Le montant, qui devrait atteindre environ 50 francs par an et par habitant, est déduit de la prime de l'assurance de base. La part revenant à l'économie est versée aux entreprises par les caisses de compensation AVS, proportionnellement à la masse salariale AVS. Le montant devrait s'élever, par année, à 110 francs pour 100 000 francs de masse salariale AVS. Les entreprises qui sont exemptées de la taxe sur le CO2 ne sont pas prises en compte pour la répartition.

Le montant, l'objet, la perception, l'exemption et la redistribution de la taxe sont régis par l'ordonnance sur la taxe sur le CO2 (ordonnance sur le CO2)25, qui a été adoptée par le Conseil fédéral le 22 juin 2005 (voir annexe).

24 25

Arrondis à la dizaine de centimes supérieure selon la loi sur l'imposition des huiles minérales.

Cette ordonnance ne sera publiée dans le RO et le RS qu'après adoption de l'arrêté fédéral concernant l'approbation du montant de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles fossiles.

4642

2.2.2

Effet incitatif

La taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles est un instrument incitatif conforme aux principes de l'économie de marché et du pollueur-payeur. En renchérissant les combustibles fossiles, elle incite les entreprises et la population à utiliser l'énergie de manière plus rationnelle et plus efficace et à privilégier des agents énergétiques qui émettent moins de CO2 (p. ex. gaz naturel) ou qui n'influencent pas le bilan de CO2 (p. ex. bois). La taxe d'incitation provoque des changements d'habitudes (meilleure aération, abaissement de la température des locaux, diminution de la consommation d'eau chaude). La hausse des prix influe également sur les décisions d'investissement. Comme la taxe réduit les durées d'amortissement, il devient plus attrayant d'investir dans des installations de protection thermique et d'isolation et de remplacer des systèmes de chauffage par des techniques plus efficaces. Le renchérissement tend aussi à encourager l'utilisation de combustibles qui dégagent moins de CO2. Les énergies alternatives, comme la biomasse et l'énergie solaire pour les installations d'eau chaude, deviennent ainsi plus compétitives du fait des variations de prix relatives.

L'élasticité des prix permet de mesurer l'effet d'une hausse des prix sur la demande26. Les valeurs de l'élasticité diffèrent selon l'horizon temporel et les catégories de consommateurs. La demande réagit moins fortement à court terme qu'à long terme, lorsque la hausse des prix influe non seulement sur le comportement, mais aussi sur les décisions d'investissement. L'élasticité est plus faible dans l'économie que dans les ménages. Dans l'industrie, en effet, les décisions d'investissement obéissent à des critères de rentabilité sévères qui exigent des durées d'amortissement plus courtes.

Pour évaluer l'effet incitatif de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles, le Conseil fédéral s'appuie sur les valeurs de l'élasticité retenues par Prognos27. Le montant de la taxe a été défini de manière à ce que celle-ci puisse déployer l'effet incitatif requis d'ici à 2010. Pour cet horizon temporel, les valeurs de l'élasticité à moyen terme ont été définies à -0,12 pour l'industrie et à -0,18 pour les ménages. Il s'agit là de chiffres prudents pour que l'effet incitatif ne soit pas surévalué. En effet, une partie de l'effet incitatif
potentiel de la taxe est déjà contenue dans d'autres mesures, notamment les mesures librement consenties par l'économie. Dans ce domaine, la taxe appuie les efforts en cours et assure que les mesures convenues avec l'économie seront effectivement mises en oeuvre. Etant donné que les conventions volontaires ont déjà été prises en considération dans le calcul des écarts par rapport aux objectifs, seules les nouvelles mesures de réduction des émissions de CO2 sont mises sur le compte de l'effet incitatif de la taxe. L'effet isolé de la taxe sur le CO2 a été estimé par Prognos à 0,7 million de tonnes de CO2 jusqu'en 2010.

Dans les ménages, l'élasticité dépend des adaptations possibles dans les domaines de l'énergie de chauffage et de la consommation d'eau chaude. S'il est dans l'intérêt des personnes qui sont propriétaires de leur logement (env. 40 %) d'investir dans des biens d'équipement, les structures d'incitation sont quelque peu différentes pour les locataires (env. 60 %). Selon le droit de bail actuel, les propriétaires d'immeubles 26

27

Pour déterminer l'effet incitatif, l'élasticité des prix de la demande est déterminante. Elle correspond au rapport entre la variation de la demande relative et la variation des prix relative. Exemple pour une valeur de l'élasticité de -0,5: la demande recule de 5 % si les prix augmentent de 10 %.

Prognos (2003): CO2-Abgabe bei Brennstoffen, Bâle.

4643

sont autorisés à répercuter intégralement sur les locataires les frais de chauffage, mais non les investissements dans des installations énergétiquement plus efficaces.

Un effet incitatif peut néanmoins aussi être obtenu pour les appartements en location. Les propriétaires qui doivent installer un nouveau chauffage ou assainir un bâtiment tiennent compte des prix de l'énergie dans leurs décisions d'investissement. Les pompes à chaleur ou les installations de chauffage au bois, par exemple, deviendront rapidement intéressantes d'un point de vue économique. Il va de soi que l'effet incitatif serait plus important si le droit de bail était conçu différemment ou si les décomptes de chauffage individuels étaient obligatoires dans les anciens bâtiments.

Les consommateurs ne réagiront pas de la même manière si la hausse des prix est perçue comme provisoire ou comme durable. Une hausse des prix exerce un effet incitatif quand les consommateurs estiment qu'elle sera durable.

Une hausse des prix due à l'introduction d'une taxe d'incitation prélevée par l'Etat est considérée comme durable. Les consommateurs réagissent par conséquent rapidement et tiennent compte de l'augmentation des prix dans leurs décisions d'investissement. Lors de fluctuations de cours sur le marché, très fréquentes pour l'huile de chauffage, les prix doivent, selon les experts, se maintenir à un niveau élevé pendant au moins un à deux ans avant que les consommateurs ne commencent à ajuster leur comportement.

2.2.3

Echange de droits d'émission

Les entreprises qui veulent être exemptées de la taxe sur le CO2 doivent s'engager formellement envers la Confédération à limiter leurs émissions de CO2. Cet engagement fixe le nombre de tonnes que les entreprises sont autorisées à émettre au maximum en moyenne des années 2008 à 2012. Les objectifs de limitation des émissions de CO2 négociés avec les entreprises constituent la base du système suisse d'échange des droits d'émission (principe cap-and-trade). Les entreprises qui participent au système sont autorisées à échanger des droits d'émission et à acquérir des certificats étrangers, ce qui leur confère une plus grande marge de manoeuvre pour atteindre leur objectif: ­

Les entreprises qui ont conclu un engagement se voient attribuer des droits d'émission correspondant à la quantité de CO2 qu'elles sont autorisées à émettre pendant les années 2008 à 2012.

­

Si les émissions sont inférieures aux valeurs autorisées, les entreprises peuvent vendre les droits d'émission excédentaires.

­

Si les émissions dépassent les valeurs maximales autorisées, les entreprises peuvent acheter les droits d'émission excédentaires d'autres entreprises exemptées.

­

Les entreprises peuvent aussi recourir aux mécanismes de flexibilité.

Contrairement aux droits d'émission suisses, les certificats étrangers ne peuvent toutefois pas être imputés de manière illimitée (voir ch. 1.6.4).

L'introduction de la taxe sur le CO2 met en place un mécanisme de sanctions efficace. Une entreprise qui ne respecte pas ses engagements doit s'acquitter de la taxe sur le CO2 a posteriori. Ce mécanisme de sanctions, indispensable au bon fonction4644

nement du système d'échange des droits d'émission, est également une condition importante pour pouvoir s'associer au système d'échange des quotas d'émission entré en vigueur dans l'UE au début de 2005.

2.3

Centime climatique sur les carburants

Le centime climatique est une mesure volontaire qui peut être rangée au nombre des mesures librement consenties au sens de l'art. 4 de la loi sur le CO2. Il ne nécessite aucune base légale supplémentaire dans la mesure où il est prélevé par une fondation de droit privé soutenue par l'économie privée. Il est toutefois soumis au droit des cartels28, car il constitue un accord sectoriel (voir chiffre 6).

Les promoteurs du centime climatique ont l'intention de créer une fondation autonome pour le centime climatique. Cette fondation fixera le niveau du centime climatique et décidera de l'affectation des recettes. Le centime climatique sera prélevé sur l'essence et le diesel le plus rapidement possible, mais au plus tard le 1er janvier 2006. Son montant sera compris entre 1,3 et 1,9 centime par litre d'essence ou de diesel. Le centime climatique devrait rapporter environ 100 millions de francs par an. La majeure partie des recettes du centime climatique sera destinée à financer des mesures en Suisse, en particulier des programmes d'encouragement dans les domaines de la mobilité et des bâtiments. La fondation pour le centime climatique pourra assurer une partie importante de la contribution à la réalisation des objectifs par l'achat de certificats étrangers.

Le centime climatique complète la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles. Il doit permettre de réduire les émissions de CO2 de 1,8 million de tonnes et contribuer ainsi, avec la taxe sur le CO2, à abaisser les émissions de CO2 de 2,5 millions de tonnes d'ici à 2010. Au moins 0,2 million de tonnes de réductions (sur 1,8 million) doivent être obtenues en Suisse. Ce cadre clair a été fixé par le Conseil fédéral dans l'ordonnance régissant l'imputation des réductions d'émissions opérées à l'étranger.

Selon cette ordonnance, les certificats étrangers peuvent être imputés à l'objectif de réduction à hauteur de 1,6 million de tonnes de CO2.

Le Conseil fédéral a limité le centime climatique jusqu'à fin 2007. D'ici là, la fondation devra fournir la preuve, au moyen d'un plan de mesures, que le centime climatique permet d'atteindre l'objectif de réduction visé pour la période d'engagement 2008-2012. S'il apparaît que l'objectif ne sera pas réalisé, le Conseil fédéral étendra la taxe sur le CO2 à l'essence. Pour que les effets déployés soient suffisants,
l'introduction de la taxe devrait être préparée en 2007 pour pouvoir être prélevée sur l'essence dès 2008.

La Confédération mesurera les prestations du centime climatique sur la base de critères qui seront fixés dans une convention conclue entre le DETEC et la fondation. Les négociations, ouvertes le 30 mai 2005, devraient s'achever fin août 2005.

Selon le modèle économique, la convention devra être coordonnée avec le contrat de prestations existant avec l'Agence de l'énergie pour l'économie (AEnEC). La convention portera sur le montant de l'objectif, la part des mesures à réaliser en Suisse, le monitoring et l'analyse de l'efficacité. En ce qui concerne les exigences de qualité et les preuves des réductions d'émissions opérées à l'étranger, les réglementations 28

RS 251

4645

internationales s'appliquent. Ainsi, les projets de protection du climat dans les pays en développement (CDM) doivent être vérifiés, contrôlés et validés par des organismes de contrôle accrédités.

3

Conséquences

3.1

Conséquences économiques

3.1.1

Conséquences macroéconomiques

Selon différentes études (Prognos, CEPE/EPF, KOF), les conséquences macroéconomiques d'une taxe de 35 francs par tonne de CO2 restent marginales. D'abord, parce que le produit de la taxe est redistribué et, ensuite, parce que les entreprises qui consomment beaucoup d'énergie peuvent demander à être exemptées de la taxe.

Dans une perspective à long terme, la taxe sur le CO2 et le centime climatique devraient bénéficier à l'économie nationale. Comme la consommation de combustibles fossiles fléchira, la dépendance du pays vis-à-vis de l'étranger diminuera et, avec elle, la vulnérabilité aux fluctuations des cours du pétrole. Les retombées sur l'innovation seront positives. Les coûts diminueront dans le domaine de la santé.

Les conséquences sont plutôt positives ou plutôt négatives selon les modèles mathématiques et les hypothèses qui les sous-tendent. Dans les estimations réalisées avec le modèle du Centre de recherches conjoncturelles de l'EPFZ (KOF), la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles (avec le montant proposé) et le centime climatique ont des incidences légèrement négatives sur la demande macroéconomique. Jusqu'en 2009, ils entraîneraient une diminution de 0,1 % (effets cumulés) du produit intérieur brut. Comme les auteurs le concèdent eux-mêmes, le modèle ne reflète toutefois pas les effets positifs de la taxe sur l'innovation et sur l'environnement, qui se traduiront par une diminution des coûts de la santé et des autres dommages.

3.1.2

Effets de la redistribution

De par sa conception (la taxe sur le CO2 frappe la consommation de combustibles fossiles et son produit est redistribué aux entreprises proportionnellement à la masse salariale AVS), la taxe sur le CO2 avantage les entreprises qui consomment peu d'énergie et, parmi elles, les sociétés de services. Pour préserver leur compétitivité, les entreprises qui consomment beaucoup d'énergie ont la possibilité d'être exemptées de la taxe. L'exemption des entreprises à forte consommation d'énergie permet de contenir l'effet redistributif de la taxe sur le CO2 du secteur industriel et artisanal au secteur tertiaire, où la consommation d'énergie est plus faible. L'effet redistributif est évalué à environ 50 millions de francs.

Des pertes de valeur ajoutée non négligeables sont à attendre dans le secteur de l'énergie, alors que les domaines des services et de la construction, surtout, enregistreront des gains de valeur ajoutée. La taxe aura également une incidence positive sur l'innovation et sur le progrès technologique. En profiteront notamment les entreprises actives dans le secteur de la technologie énergétique.

4646

Environ 50 francs par an et par habitant seront redistribués à la population par l'intermédiaire des caisses-maladie. Ce mécanisme favorise les personnes qui ont une consommation de combustibles fossiles inférieure à la moyenne ainsi que les familles avec enfants. Les chiffres sur la consommation de combustibles dans les différentes catégories de revenus doivent être maniés avec prudence. Selon une première évaluation l'OcCC29, les dépenses de combustibles des ménages ayant les revenus les plus bas sont légèrement supérieures à la moyenne par personne. Les autres catégories de revenus ne s'écartent pas significativement de la moyenne. La redistribution du produit de la taxe par habitant permet d'amortir sensiblement l'effet souvent régressif d'une taxe d'incitation. La même étude montre que la taxe sur le CO2 tend à alléger le budget des ménages ruraux et à alourdir les charges des ménages urbains. Selon l'enquête sur les revenus et la consommation de l'Office fédéral de la statistique, les ménages vivant à la campagne occupent en moyenne moins de surface habitable par habitant. L'efficacité énergétique dans le domaine des combustibles y est par conséquent plus élevée.

3.2

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

3.2.1

Confédération

Selon les estimations, la taxe sur le CO2 devrait rapporter environ 650 millions de francs en moyenne durant les années où elle sera perçue. Dans un premier temps, les recettes atteindront près de 700 millions de francs. Elles diminueront ensuite peu à peu au fur et à mesure du recul de la consommation des combustibles fossiles. La Confédération encaissera en moyenne 50 millions de francs de plus par an pour la TVA. En revanche, les recettes issues de l'imposition des huiles minérales diminueront d'un million de francs par an environ. Le budget 2006 et le plan financier 2007­2009 n'incluent pas encore les recettes et les dépenses. Elles figurent dans la liste des recettes et dépenses supplémentaires éventuelles du rapport concernant le plan financier 2007­2009. Pour éviter des distorsions temporaires de la politique financière, les recettes et les dépenses liées à la redistribution seront considérées comme extraordinaires au sens du frein à l'endettement pendant la phase d'introduction de deux ans.

L'introduction de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles et le contrôle de l'efficacité du centime climatique engendrent de nouvelles tâches pour la Confédération. La perception, l'exemption et la redistribution de la taxe ainsi que le contrôle de l'efficacité de la taxe et du centime climatique occasionnent des frais de personnel et de matériel. Les frais d'exécution atteignent 9 à 10 millions de francs par an.

Ils seront financés par 1,5 % des recettes de la taxe sur le CO2.

Le travail d'exécution comprend les tâches suivantes: ­

29

Tâche d'exécution actuelle pour les mesures librement consenties par l'économie: plus d'un tiers du travail d'exécution accompli aujourd'hui est déjà consacré à la mise en oeuvre des mesures librement consenties par l'économie. Entrent en particulier dans ce cadre l'élaboration des conventions et la mise en place d'un système de contrôle pour vérifier la réalisation OcCC (2004): Soziale Auswirkungen von CO2-Abgabe und Klimarappen, Faktenblatt.

4647

des objectifs. La majeure partie de ces tâches est assumée aujourd'hui par l'Agence de l'énergie pour l'économie. Un tiers de ses frais d'exploitation, soit 2 millions de francs par an, est financé par SuisseEnergie.

­

Frais de personnel: treize nouveaux postes devront être créés dans l'administration fédérale, soit huit à la Direction générale des douanes (DGD), trois à l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP) et deux à l'Office fédéral de l'énergie (OFEN). Au sein de la Direction générale des douanes, les tâches d'exécution comprennent la perception de la taxe et le remboursement de celle-ci aux entreprises exemptées. Les postes supplémentaires à l'OFEFP et à l'OFEN sont nécessaires pour accompagner les engagements et contrôler leur respect. L'OFEN aura également pour tâche de vérifier l'efficacité de la taxe et du centime climatique dans le cadre du controlling de SuisseEnergie. L'OFEFP sera chargé de gérer les mécanismes de flexibilité selon le Protocole de Kyoto, auxquels peuvent recourir aussi bien le centime climatique que les entreprises exemptées de la taxe, d'instaurer un système d'échange des droits d'émission et de s'associer au système de l'UE.

­

Frais de matériel: la Direction générale des douanes devra disposer de moyens supplémentaires pour développer et entretenir les applications informatiques nécessaires à la perception de la taxe et au remboursement de celle-ci aux entreprises exemptées. L'OFEN et l'OFEFP cofinanceront la création et l'entretien du système de contrôle qui mesurera l'évolution des émissions de CO2 des entreprises exemptées. Les deux offices partageront également les coûts des auditeurs et des experts indépendants qui seront appelés pour évaluer les engagements. L'OFEFP devra également établir un registre des droits d'émission pour que la Suisse puisse participer aux mécanismes de flexibilité.

Frais de personnel et de matériel en dehors de l'administration fédérale: La redistribution des recettes de la taxe sur le CO2 à la population peut s'appuyer sur un système reconnu qui a déjà fait ses preuves avec d'autres taxes d'incitation, comme la taxe sur les COV. La redistribution à l'économie a lieu par l'intermédiaire des caisses de compensation AVS où les systèmes informatiques devront être adaptés.

Ces frais d'introduction seront remboursés moyennant un forfait unique. La redistribution à l'économie est un peu plus compliquée, car les entreprises qui sont exemptées de la taxe sur le CO2 ne doivent pas être prises en compte pour la répartition.

3.2.2

Cantons et communes

Les cantons ne sont concernés ni directement ni indirectement par le budget de la Confédération dans le cadre de l'exécution de la taxe sur le CO2. Ils participent toutefois déjà activement à la mise en oeuvre de la loi sur le CO2, de la loi sur l'énergie et, en particulier, du programme SuisseEnergie. Les services cantonaux de l'énergie et de l'environnement emploient plus de 100 personnes dans ces domaines.

Selon l'utilisation du produit du centime climatique, les cantons devront faire face à des tâches supplémentaires dans le domaine du bâtiment. Les dédommagements éventuels sont du ressort de la fondation pour le centime climatique.

4648

4

Programme de la législature

Le message concernant l'approbation du montant de la taxe sur le CO2 figure en tant qu'objet des Grandes lignes dans le rapport sur le programme de la législature 2003­200730.

5

Rapports avec le droit européen

L'UE s'est, comme la Suisse, engagée à abaisser ses émissions de gaz à effet de serre de 8 % par rapport à leur niveau de 1990, pour la période de 2008 à 2012. Elle a pris différentes mesures de politique climatique pour respecter cet engagement.

Les mesures prévues en Suisse, en particulier l'introduction d'une taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles, sont compatibles avec le droit européen.

En introduisant une taxe sur le CO2, la Suisse ne fait nullement cavalier seul. Plusieurs pays d'Europe prélèvent déjà des taxes sur le CO2 ou d'autres taxes d'incitation sur les énergies fossiles dans le but de réduire leurs émissions de CO2 et d'autres substances polluantes. Ces pays sont l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, la Finlande, la Grande-Bretagne, la Norvège, les Pays-Bas et la Suède.

L'introduction d'une telle taxe a été discutée en France, en Italie et en Irlande, mais le projet a finalement été abandonné.

Les mesures prises à l'échelle de l'UE au cours de ces dernières années pour respecter l'objectif de Kyoto sont notamment les suivantes: ­

Directive sur les énergies renouvelables (2001/77)

­

Directive «cogénération» (2004/8)

­

Directive sur la performance énergétique des bâtiments (2002/91)

­

Accords avec l'industrie automobile en matière d'efficacité énergétique

­

Directive biocarburants (2003/30)

­

Réduction des gaz fluorés dans les climatisations

­

Réduction du méthane produit par les décharges

­

Directive établissant un système d'échange de quotas d'émission (2003/87)

­

Directive visant à lier le système d'échange de quotas d'émission aux mécanismes de projet (2004/101)

­

Mesures supplémentaires visant à promouvoir les énergies renouvelables dans le domaine de la chaleur

L'instrument principal est constitué par le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre, qui a démarré le 1er janvier 2005. La directive qui l'établit oblige les Etats membres à fixer des objectifs de réduction pour les grandes entreprises des secteurs industriels qui consomment beaucoup d'énergie. Sur la base des objectifs de CO2, les entreprises se voient attribuer des quotas d'émission qu'elles peuvent échanger entre elles pour atteindre les objectifs fixés. Il est prévu de lier le système suisse des droits d'émission avec le système européen. Selon l'art. 25 de la directive 2003/87/CE, il est possible de conclure des accords avec des pays tiers 30

FF 2004 1035 1082

4649

ayant ratifié le Protocole de Kyoto afin d'assurer la reconnaissance mutuelle des quotas.

La réglementation régissant l'utilisation des mécanismes de flexibilité est également compatible avec le droit européen. L'UE n'a encore fixé aucune limite quantitative pour l'utilisation des mécanismes de flexibilité. Selon les conclusions du Conseil européen de mai 1999, la contribution des mécanismes de flexibilité aux objectifs nationaux de réduction par rapport à 1990 pourrait atteindre 50 %. Jusqu'à présent, neuf Etats européens ont annoncé leur intention d'utiliser les mécanismes de flexibilité pour atteindre leur objectif de limitation selon le Protocole de Kyoto31: l'Autriche (7 millions t CO2), la Belgique (8,2 millions t CO2), le Danemark (3,7 millions t CO2), l'Espagne (20 millions t CO2), l'Irlande (3,7 millions t CO2), l'Italie (12-69,2 millions t CO2), le Luxembourg (3 millions t CO2), les Pays-Bas (20 millions t CO2) et le Portugal (0,63-1,3 million t CO2).

Pour les entreprises qui participent au système d'échange des quotas d'émission dans l'UE, une valeur indicative a été fixée. Les entreprises ne doivent pas imputer plus de 8 % des quotas attribués. D'ici à 2008, les pays membres de l'UE devront définir dans leurs plans nationaux d'allocation dans quelles proportions les mécanismes de flexibilité peuvent être imputés. Les Pays-Bas, par exemple, ont fixé une limite de 8 %. La même réglementation est prévue pour les entreprises suisses qui concluent des engagements formels et sont ainsi exemptées de la taxe sur le CO2.

6

Bases légales

L'art. 6 de la loi sur le CO2 autorise le Conseil fédéral à introduire une taxe sur le CO2. Selon l'art. 7, al. 4, de la loi sur le CO2, le montant de la taxe est soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale. L'utilisation du produit de la taxe est réglée à l'art. 10 de la loi sur le CO2. Il est prévu de redistribuer le produit de la taxe à la population et à l'économie. Le montant de la taxe sur le CO2 appliquée aux combustibles est fixé dans un arrêté fédéral simple selon l'art. 163, al. 2, Cst. Cet arrêté n'est pas soumis au référendum facultatif.

Le 22 juin 2005, le Conseil fédéral a adopté deux ordonnances pour mettre en oeuvre la loi sur le CO2. L'ordonnance sur la taxe sur le CO2 (ordonnance sur le CO2) précise les art. 7 à 11 de la loi sur le CO2. Elle règle l'introduction de la taxe, les conditions d'exemption et la redistribution du produit de la taxe à l'économie et à la population. L'ordonnance régissant l'imputation des réductions d'émissions opérées à l'étranger (ordonnance sur l'imputation) précise l'art. 2, al. 7, de la loi et règle le volume maximal et les conditions des réductions d'émissions opérées à l'étranger.

Le centime climatique est une mesure volontaire qui peut être rangée au nombre des mesures librement consenties au sens de l'art. 4 de la loi sur le CO2. Il ne nécessite aucune base légale, car il sera prélevé par une fondation de droit privé soutenue par l'économie privée. Il est toutefois soumis au droit des cartels, car il constitue un accord sectoriel. Dans son avis du 20 décembre 2004, la Commission de la concurrence a estimé que le centime climatique représente une restriction considérable à la 31

AEE (2004): Analysis of greenhouse gas emission trends and projections in Europe 2004; Agence européenne de l'environnement, rapport technique n° 7/2004 (en anglais), http://reports.eea.eu.int/technical_report_2004_7/en/ Analysis_of_GHG_trends_and_projections_in_Europe.pdf

4650

concurrence, mais non une entente sur les prix, car la composante prix est trop faible. La Commission de la concurrence a confirmé son appréciation dans un nouvel avis du 7 mars 2005 après examen de l'acte de fondation et du règlement d'organisation fournis par l'Union pétrolière. Selon l'art. 8 de la loi sur les cartels, le Conseil fédéral peut autoriser à titre exceptionnel, à la demande des entreprises concernées, les accords en matière de concurrence dont la Commission de la concurrence a constaté le caractère illicite, s'ils sont nécessaires à la sauvegarde d'intérêts publics prépondérants. Selon l'art. 31, al. 3, de la loi sur les cartels, toutefois, l'autorisation exceptionnelle est de durée limitée. Pour des raisons de droit de la concurrence, la perception du centime climatique nécessiterait une base légale à partir du moment où cet instrument de droit privé s'appliquerait de manière illimitée.

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