#ST#

N O

7

1 8 5

FEUILLE FÉDÉRALE 91e année

Berne, le 15 février 1939

Volume I

Paraît une fois par semaine. Prix: 20 francs par an; 10 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement.

Avis: 50 Centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des hoirs K.-J. Wyss, société anonyme, à Berne. .

# S T #

3829

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant une loi sur la garantie contre les risques à l'exportation.

(Du 8 février 1939.)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre en annexe un projet de loi sur la garantie contre les risques à l'exportation, en vous recommandant de l'adopter pour les raisons que nous développons ci-après.

I. LA GARANTIE CONTRE LES RISQUES A L'EXPORTATION, TELLE QU'ELLE A ÉTË INSTITUÉE ET APPLIQUÉE JUSQU'A PRÉSENT 1. Sa base légale et son objet.

La garantie qui est accordée par la Confédération contre les risques à l'exportation a été instituée par votre arrêté du 28 mars 1934 (1) pour soutenir l'exportation de produits de l'industrie des moyens de production (industrie des métaux et machines, y compris les véhicules, instruments et appareils). Elle est présentement régie par votre arrêté du 8 octobre 1936 tendant à développer les exportations ( 2 ) et par notre ordonnance du 24 novembre 1936 relative à la garantie contre les risques à l'exportation (3).

La Confédération accorde la garantie dont il s'agit pour aider l'industrie des moyens de production à accepter des commandes venant de l'étranger qui présentent un risque particulier. En définitive, elle le fait donc en vue de maintenir et de développer les possibilités de travail dans le pays.

Cette garantie couvre une partie de la perte que l'exportateur pourrait (1) RO 50, 261.

O KO 52, 790.

(») KO 52, 871.

Feuille fédérale. 91e année. Vol. I.

15

186 être dans le cas d'éprouver. Par risques particuliers on entend ici les dangers que comporte le recouvrement d'une créance, notamment, par suite des longs délais de paiement en corrélation avec l'état d'incertitude qui caractérise à l'heure actuelle les conditions politiques et économiques. La garantie de la Confédération s'applique, en premier lieu, aux pertes causées par la dépréciation de monnaies étrangères, par des difficultés de transfert et des moratoires, ainsi que par la défaillance d'Etats, de communes ou d'autres institutions de droit public qui ont commandé des marchandises, mais ne peuvent pas ou ne veulent pas les payer. Elle peut aussi s'étendre aux dommages engendrés par des circonstances particulières à l'acheteur qui empêchent de livrer la totalité ou une partie de la marchandise commandée.

Peuvent, d'autre part, être exclues, selon les circonstances, du bénéfice de la garantie les pertes qui seraient normalement couvertes par elle, mais qui sont la conséquence de catastrophes politiques, telles qu'une guerre, une révolution ou des divisions intestines. La garantie n'est accordée en aucun cas pour couvrir les pertes qui proviennent de l'insolvabilité de particuliers, d'un état défectueux des produits livrés, de leur détérioration, de leur disparition avant la livraison ou de l'inobservation des délais de livraison convenus. Elle est seulement accordée poiir des commandes qui procurent de l'ouvrage dans une mesure notable. Elle couvre, en règle générale, 50 pour cent, au maximum 80 pour cent de la perte éprouvée, considérée par rapport au prix de la marchandise fixé dans le contrat.

(A l'origine, c'est-à-dire d'après l'arrêté fédéral du "28 mars 1934, la limite ordinaire était 35 pour cent et la limite maximum 50 pour cent.) Si le prix de la marchandise comprend un bénéfice net, celui-ci n'entre pas en ligne de compte et il est déduit dès l'abord.

La garantie contre les risques à l'exportation doit donc abriter partiellement l'exportateur contre le risque de perte et, par cela même, lui permettre de prendre des commandes qu'il ne pourrait pas accepter à défaut de cette garantie. Mais elle remplit en même temps un second office: elle aide l'exportateur à se procurer du crédit et, partant, l'argent nécessaire à ses affaires d'exportation.'

Le crédit affecté par la Confédération
à la couverture financière des garanties a été fixé à l'origine à 10 millions, ensuite à 30 millions et finalement (dans l'arrêté fédéral du 31 mars 1938 élevant la limite du crédit affecté aux garanties contre les risques à l'exportation) à 50 millions de francs.

2. Son application.

Les chiffres suivants montrent quelle était la situation au 8 décembre 1938; nous rappelons entre parenthèses les chiffres de fin novembre 1937, qui figuraient dans notre message du 14 janvier 1938 concernant l'élévation de la limite du crédit affecté aux garanties contre les risques à l'exportation.

187

Jusqu'au 8 décembre 1938, la Confédération a accepté 484 (330) demandes de garantie. 387 (254) d'entre elles se rapportaient à des affaires définitivement conclues, montant à un prix global de 96,5 (50,1) millions de francs, et 97 (76) à des affaires en tractation, montant à une offre globale de 47,1 (35,7) millions de francs. Les garanties assumées pour les affaires conclues atteignaient une somme de 44,6 (23,0) millions de francs, et les garanties promises pour les affaires en tractation une somme de 23,1 (16,7) millions de francs. Toutefois, comme les engagements qui sont pris par la Confédération vont en décroissant, lorsque la perte éprouvée est inférieure à la moitié du prix de la livraison, les sommes qui indiquent dans le présent message l'étendue de ces engagements doivent être regardées comme des maxima.

Pour l'exécution des 387 commandes prises ferme qui ont donné lieu à garantie, les maisons bénéficiaires ont payé et payeront environ 27,1 millions de francs au titre de salaires productifs et improductifs. Et l'on peut estimer à une somme presque égale les traitements du personnel technique et commercial qui restent en dehors du calcul et les salaires et traitements qu'ont payés et que payeront les maisons suisses sous-traitantes.

Garanties assumées et garanties promises atteignaient donc ensemble, au 8 décembre 1938, une somme de 67,7 (39,7) millions de francs, et les affaires entrant en considération représentaient une valeur de 143,6 (85,8) millions de francs. Ces, garanties se répartissaient entre 68 (56) maisons dans 14 (13) cantons, et concernaient des livraisons à destination de 37 (35) pays. Sur les 387 (254) affaires conclues, 199 (120) sont maintenant réglées, le prix s'y rapportant ayant été acquitté. Compte tenu des acomptes reçus pour des affaires dont le règlement est soumis à des délais qui courent encore, les exportateurs suisses ont reçu de ce chef de leurs clients étrangers 34.4 (13,6) millions de francs, libérant des garanties pour une somme de 15.5 (4,9) millions de francs. De plus, 69 (48) demandes qui avaient été présentées pour des affaires en tractation d'une valeur globale de 32,1 (23,1) millions de francs et qui furent suivies de promesses de garanties pour une somme de 13,6 (9,3) millions de francs, sont devenues sans objet, les affaires en cause n'ayant pas
abouti. D'où il suit que, sur les 67,7 (39,7) millions de francs qui engageaient les finances fédérales, 29,1 (14,2) millions sont redevenus disponibles. En résultat final, une somme de 38,6 (25,5) millions de francs se trouvait donc engagée au 8 décembre 1938. Si l'on englobe dans les engagements pris les garanties qui, à cette date, n'étaient pas encore formellement promises, mais avaient déjà fait l'objet d'une proposition affirmative de la commission consultative, on atteint 46,7 millions de francs.

Des pertes ont été subies jusqu'à présent dans 5 (3) cas, pour lesquels la Confédération, en exécution de ses engagements, a dû verser 39 433 francs (37 535). Ces pertes provenaient, dans une proportion prépondérante, de

188

difficultés de transfert; il s'est révélé dans la suite qu'elles n'avaient, en partie du moins, qu'un caractère transitoire. En conséquence, la Confédération n'a eu jusqu'ici, déduction faite des sommes qui lui ont été remboursées, que 9147 francs (12 910) à payer, et encore cette somme ne saurait-elle être tenue, en tout état de cause, pour définitivement perdue.

.Dans notre message précité du 14 janvier 1938, nous écrivions, en présence des chiffres qui résultaient alors de l'application de la mesure, que la garantie contre les risques à l'exportation s'était révélée un moyen efficace en même temps que peu coûteux de favoriser les exportations.

Il est toutefois à prévoir --- ajoutions-nous -- que son application ultérieure fera essuyer à la Confédération de plus grandes pertes. Nous pensions surtout aux engagements pris pour des exportations en Espagne. Et nous en inférions que le rapport entre la dépense et le résultat, qui était alors particulièrement favorable, pourrait devenir dans la suite moins satisfaisant. Or, il ne s'est pas produit jusqu'à présent d'aggravation. Nous tenons cependant, précisément pour cette raison, à réitérer ici notre remarque d'alors, car elle se justifie tout autant à l'heure actuelle. En effet, des garanties d'un montant considérable sont aujourd'hui liées à des exportations dont le prix n'est pas acquitté ou ne l'est que partiellement. Il est très probable qu'il y aura là des pertes à essuyer dont la Confédération devra prendre sa part et qui, sans doute, la mettront bien plus fortement à contribution que les quelques affaires peu importantes pour lesquelles elle a été jusqu'ici appelée à participer à la couverture d'une perte.

II. LA GARANTIE CONTRE LES RISQUES A L'EXPORTATION, TELLE QU'ELLE SERAIT INSTITUÉE POUR L'AVENIR 1. Généralités.

L'arrêté fédéral du 8 octobre 1936 tendant à développer les exportations, qui forme actuellement la base légale de la garantie contré les risques à l'exportation, cessera de sortir ses effets le 31 décembre 1939. Il faudrait donc, de toute façon, décider jusque là si l'application de cette mesure sera poursuivie et, dans l'affirmative, si sa structure actuelle doit être modifiée.

A l'occasion des délibérations qui se sont instituées le printemps dernier dans les conseils de l'Assemblée fédérale au sujet de la limite du crédit
affecté aux garanties contre les risques à l'exportation, le chef du département de l'économie publique a montré combien cette mesure de --soutien sera encore nécessaire dans l'avenir, et cela sans doute pendant longtemps, c'est-à-dire tant que la situation politique fera peser un risque sur les exportations, que la stabilité des monnaies ne sera pas redevenue générale et que les paiements internationaux ne pourront pas de nouveau s'opérer

189

librement. D'ailleurs, tous les pays exportateurs -- ou peu s'en faut -- avec lesquels la Suisse se trouve en compétition sur le marché mondial appliquent des mesures analogues. Certains d'entre eux sont même en train de développer la portée de ces mesures. Ne voit-on pas, justement maintenant, de grands pays exportateurs augmenter dans de notables proportions les moyens financiers qu'ils consacrent de la sorte à soutenir leur industrie ? Ces circonstances également nous commandent de maintenir en vigueur la garantie contre les risques, qui a donné la preuve de son efficacité en tant que moyen de favoriser les exportations. Et puisqu'il s'agit ici d'une institution de caractère durable, nous estimons le moment venu d'en sanctionner les principes par une loi. A cette occasion, il y a lieu d'examiner si la réglementation actuelle doit être reprise telle quelle ou s'il y a avantage à, la modifier sur certains points.

2. La forme de garantie.

D'après la forme actuelle de garantie, la Confédération s'astreint à une prestation, sans en exiger une en retour de l'exportateur. Celui-ci n ayant pas de prime à payer, la garantie ne revêt pas le caractère d'une assurance proprement dite. On s'est demandé de divers côtés si, au cas où des prescriptions nouvelles seraient édictées, il ne faudrait pas en même temps modifier le système actuel en prévoyant le paiement d'une prime par l'exportateur comme équivalent de l'aide qui lui est prêtée par la Confédération. On s'est même demandé s'il ne conviendrait pas de fonder une compagnie d'assurance et d'asseoir ainsi l'institution, sur une base totalement différente. Après avoir examiné cette question de près, nous sommes toutefois arrivés à la conclusion qu'il ne serait pas opportun de s'écarter à ce point du mode actuel de garantie.

, II ne fait pas de doute qu'un système d'assurance à caractère essentiellement privé serait beaucoup plus coûteux. Si plusieurs pays ont institué une aide où la forme de l'assurance est bien plus marquée et où l'exportateur est par conséquent astreint au paiement d'une prime, c'est surtout parce que dans la plupart de ces pays, sinon dans tous, la garantie couvre le risque commercial, c'est-à-dire la perte que subit l'exportateur, en dehors de tout cas de force majeure, du fait personnel de l'acheteur. Or, la garantie de la Confédération
ne couvre pas ce risque-là. Elle ne saurait -le couvrir sans l'organisation préalable d'un vaste service d'informations commerciales. Les représentants autorisés de l'industrie "estiment, comme nous, que le risque purement commercial doit rester à la charge de l'exportateur. On continuera donc, en Suisse, à distinguer nettement : d'une part, le risque, d'ordre privé, qui provient de l'acheteur, et qui, échappant aux moyens d'information de l'Etat, doit être sxipportc par l'exportateur : d'autre part, le risque, d'ordre politique, que l'exportateur est moins en situation de reconnaître et de supporter et qui forme l'objet de la garantie

190 assumée par la Confédération. Partant, il est légitime que la Confédération accorde à titre gracieux son aide limitée comme il vient d'être dit et que, selon l'opinion des milieux industriels eux-mêmes, elle conserve à cette aide la forme simple sous laquelle elle s'est jusqu'ici révélée efficace.

D'après les dispositions en vigueur, la garantie contre les risques à l'exportation ne s'applique en principe qu'aux livraisons de l'industrie des moyens de production, c'est-à-dire de l'industrie des métaux et machines, y compris les véhicules, instruments et appareils. A vrai dire, une disposition, insérée à l'article 4 de l'arrêté fédéral du 8 octobre 1936 tendant à développer l'exportation de marchandises, prévoit, à la différence des dispositions originaires, que, au cas où des conditions particulières le justifient, la garantie peut être exceptionnellement assumée pour des commandes obtenues par des industries autres que celle des moyens de production. Mais le caractère exceptionnel de cette disposition et le montant restreint du crédit ouvert nous ont jusqu'ici empêchés d'accorder la garantie pour des livraisons autres que celles de l'industrie des moyens de production.

D'ailleurs, la préférence témoignée à cette industrie se justifie en fait, si l'on considère que l'exportateur de machines, à la différence de l'exportateur de biens de consommation, doit consentir à ses clients des délais de paiement qui s'étendent souvent sur des années entières. Il n'en demeure pas moins que, ces derniers temps, le besoin s'est parfois sérieusement fait sentir dans d'autres industries exportatrices d'être protégées dans une certaine mesure contre le risque d'ordre politique. Aussi devons-nous envisager la possibilité d'étendre la garantie de la Confédération au-delà de son champ d'application actuel. Cette extension porterait principalement sur le risque de transfert, auquel nous nous arrêterons plus longuement dans le paragraphe suivant. Cela étant, nous n'avons plus repris dans le projet de loi ci-joint la distinction que nous faisions jusqu'ici entre industrie des moyens de production et autres industries.

3. Les variétés de risques.

La couverture du risque, d'après les dispositions en vigueur. -- D'après l'article 2 de l'ordonnance du 24 novembre 1936 relative à la garantie contre les risques à
l'exportation, la garantie -- nous l'avons relevé plus haut -- couvre partiellement les pertes causées par la dépréciation de monnaies étrangères, par des difficultés de transfert et des moratoires, ainsi que par la défaillance d'Etats, de communes ou d'autres institutions de droit public qui ont commandé des marchandises, mais ne peuvent pas ou ne veulent pas les payer. D'autre part, la garantie ne couvre pas les pertes qui proviennent de l'insolvabilité de particuliers, ni les pertes qui proviennent soit d'un état défectueux des produits livrés, soit de leur détérioration ou de leur disparition avant la livraison, soit de l'inobser-

191

vation des délais de livraison convenus. Lorsque des circonstances particulières le justifient, peuvent aussi être exclues, dans certains cas, du bénéfice de la garantie, des pertes qui seraient en principe couvertes par elle, en tant qu'elles sont la conséquence de catastrophes politiques, telles qu'une guerre, une révolution ou des divisions intestines.

Les risques de transfert. -- Le comité directeur de l'union suisse du commerce et de l'industrie a proposé, il y a quelques années, d'instituer une « garantie contre les risques de transfert ». Cette garantie s'appliquerait aux exportations dans les pays à clearing. Voici en quoi elle consisterait.

La Confédération supporterait, pour une certaine proportion de la valeur exportée, tous les risques de perte dérivant du change ou d'autres causes à partir du jour du versement au clearing; elle paierait à l'exportateur la somme couverte par la garantie au cas où il n'entrerait pas en possession de son argent dans un délai convenable à compter du versement au clearing.

Or, la garantie actuelle couvre déjà ces risques pour les exportations de l'industrie des moyens de production, de sorte que l'institution d'une garantie portant spécialement sur les risques de transfert n'aurait pas d'autre effet que l'extension de la garantie actuelle aux exportations des autres industries.

Si, parmi les industries qui produisent des articles destinés à la consommation, uii certain besoin se fait sentir d'être protégé contre les risques à courir dans les affaires d'exportation, c'est avant tout de risques de transfert qu'il s'agit. Aussi lorsque nous songeons à faire bénéficier, sous certaines conditions, de la garantie actuelle les exportations d'autres industries que celles de l'industrie des moyens de production, envisageonsnous plus particulièrement la garantie contre les risques de transfert.

Mais lorsque les risques de transfert ne sont rien de plus que le danger d'être payé en retard, il n'y a pas à craindre de dommage durable, abstraction faite de la perte d'intérêt. La garantie qui couvre cette partie des risques de transfert n'a donc pas pour objet de protéger contre une perte, mais seulement contre le retard que pourrait subir le recouvrement d'une créance* Ces considérations nous ont amenés à prévoir expressément, à l'article 2 de notre projet de loi,
que les risques donnant lieu à garantie pourront provenir non seulement des longs délais de paiement, mais aussi des longs délais de transfert. Puis à l'article 3, nous prévoyons que la garantie sera accordée à l'exportateur non seulement en cas de perte de sa créance, mais aussi en cas de retard dans le recouvrement de celle-ci; cette dernière éventualité se rapporte précisément aux risques de transfert. Et ces dispositions s'appliqueront en principe aux industries produisant des biens de consommation comme aux industries produisant des moyens de production, puisque notre projet de loi abandonne toute distinction entre les unes et les autres.

192

Le risque d'être astreint, dans le trafic de compensation, au paieviwnt d'une prime dépassant le montant prévu. -- Certains pays ne peuvent être des débouchés pour nos exportations que par la voie du trafic de compensation, et encore l'exportateur suisse doit-il le plus souvent payer une prime plus ou moins élevée pour les marchandises à importer en compensation. Or, cette prime ne peut pas se déterminer longtemps à l'avance parce qu'elle est subordonnée à l'offre et la demande,, au rendement des récoltes et à divers autres facteurs. Le danger de devoir payer une prime plus élevée que celle que l'exportateur a supputée dans ses calculs constitue pour lui un risque à peine moindre que celui d'une dévaluation monétaire.

Aussi la Confédération a-t-elle été sollicitée déjà plusieurs fois de garantir l'exportateur contre le risque de devoir payer, dans le trafic de compen.sation, une prime plus élevée que celle qu'il avait supputée lors de la conclusion de l'affaire. Et ce risque est d'autant plus grand que le délai de paiement est plus long, ce dont l'industrie des moyens de production ressent le plus vivement les effets, elle qui doit généralement accorder des crédits à long terme. La garantie actuelle couvre déjà ce risque pour la branche des métaux et machines, tout en permettant de tenir pleinement compte de.

la diversité des conditions propres à chaque pays. Les articles 2 et 3 do notre projet de loi sont conçus de manière à pouvoir s'appliquer, en eas de besoin, au risque d'être astreint, dans le trafic de compensation, au paiement d'une prime plus élevée que celle prévue.

4. L'étendue de la garantie.

o" Suivant l'arrêté fédéral qui régissait à l'origine la garantie contre les risques à l'exportation, celle-ci ne pouvait dépasser, en règle générale, 35 pour cent ou, exceptionnellement, 50 pour cent de la perte éprouvée.

Puis l'arrêté tendant à développer l'exportation de marchandises que vous avez adopté le 8 octobre 1936 a élevé ces taux à 50 et 80 pour cent.

Cette nouvelle délimitation de la garantie n'a pas tardé à donner lieu à certaines réclamations de la part de l'industrie. Lorsque le franc suisse eut été dévalué, -- ce qui intervint à peu près dans le même temps qu'entra en vigueur l'arrêté précité du 8 octobre 1936 -- les cantons qui accordaient, de leur côté, une garantie additionnelle, -- et ils le firent toujours de leur propre volonté -- ont en général cessé de l'accorder. Que devait taire alors l'autorité fédérale ? Appliquer strictement l'arrêté en vigueur qui prévoyait, comme règle générale, une garantie de 50 pour cent, c'était exposer nos industries exportatrices à se trouver moins soutenues qu'auparavant, dès lors qu'elles devaient se passer de la garantie additionnelle des cantons.

Ou bien s'attacher à parer à cette conséquence, selon l'esprit dudit arrêté, qui voulait pourtant développer et renforcer l'aide prêtée jusque là, c'était risquer de se mettre en désaccord avec la lettre de cet acte législatif. Les organes d'exécution se trouvaient donc pris entre deux ccueils, ce qui ne

193 laissait pas de rendre leur tâche malaisée. Le projet que nous vous soumettons tend à remédier à cette situation par un texte plus souple. En effet, il se borne à disposer que la garantie ne doit pas aller au delà de 80 pour cent de la somme qui est perdue ou dont le paiement est en retard (art. 4, 1er al.), en laissant à l'autorité le soin de déterminer dans chaque cas l'étendue effective de la garantie qui, cela va de soi, n'atteindra le maximum prévu que dans certains cas particuliers (art. 4, 2e al.).

Jusqu'à présent, la garantie était accordée dans chaque cas sur la base d'une échelle dégressive partant, par exemple, de 60 pour cent, que la Confédération garantissait seulement si la perte atteignait au moins la moitié du prix de vente conyenu (déduction faite d'un bénéfice net éventuel), et s'abaissant graduellement dans la proportion où la perte diminuait.

A quoi l'on a objecté du côté de l'industrie que, la garantie accordée pour la même affaire étant ainsi susceptible de varier, l'ouverture d'un crédit en banque était rendue de ce fait sensiblement plus difficile, ce qui allait à l'encontre de l'arrêté qui veut précisément faciliter le financement des exportations. On nous a demandé en conséquence d'abandonner le principe de la dégressivité. Nous sommes d'avis que satisfaction devrait être donnée à cette demande, car il est évident qu'une garantie qui peut varier pour une seule et même affaire fait planer sur l'aide offerte par la Confédération une certaine insécurité, qui empêche d'en mesurer l'amplitude exacte et entrave dès lors son utilisation en banque. Renoncer à une telle variabilité du pourcentage de garantie pour lui substituer, dans chaque affaire, un pourcentage invariable, de telle sorte que la somme garantie, seule, aille en diminuant à proportion de la perte éprouvée, nous paraît d'autant plus admissible que, selon la pratique actuelle, le pourcentage de garantie ne s'abaisse beaucoup que quand la perte est relativement petite; d'où l'on peut conclure que cette dégressivité n'allège pas sensiblement les engagements de la Confédération. Ce changement ne nécessite pas, d'ailleurs, de modification des dispositions légales, parce que la réglementation, actuelle ne prévoit nulle part expressément la dégressivité du pourcentage de garantie.

5. Autres formes de garanties contre
les risques à l'exportation.

L'article 5 de notre projet de loi prévoit que, lorsque des circonstances particulières le justifient, le Conseil fédéral peut instituer d'autres formes de garanties contre les risques à l'exportation ou en faciliter l'application..

L'arrêté fédéral tendant à développer l'exportation de marchandises, présentement en vigueur, contient déjà une disposition analogue (art. 5).

Dans le message que nous vous avons adressé à l'époque avec ledit arrêté à l'état de projet, nous exprimions notre intention d'examiner, au moment opportun, toute possibilité et forme de garantie pouvant entrer en considération et d'adopter la solution la meilleure. Si nous parlons d'« encou-

194

ragement », -- ajoutions-nous un peu plus loin, -- c'est parce que nous envisagerions aussi, selon les circonstances, une solution avec le concours des compagnies d'assurance privées. La Confédération pourrait alors se borner à créer une assurance supplémentaire, à contribuer au paiement de la prime ou à fournir une certaine garantie. Bien que cette disposition soit restée jusqu'à présent lettre morte, il se justifie pleinement, pensonsnous, de se réserver dans une loi, pour faire face à toute éventualité, les possibilités que nous venons d'évoquer, d'autant plus que les conditions sont aujourd'hui souvent sujettes à de rapides fluctuations.

6. La limite du crédit.

Nous croyons pouvoir nous abstenir de fixer pour l'avenir une limite au crédit de couverture qui a été arrêté en dernier lieu à 50 millions de francs. Ce crédit ne remplit en somme que l'office d'une sorte de « fonds de roulement », qui se renouvelle de soi à mesure que les affaires réalisées sans perte libèrent les garanties assumées. En fait, ce n'est pas ce crédit-là qui grève les finances fédérales ; c'est le crédit qui est affecté chaque année aux paiements à effectuer en exécution des garanties accordées et qui, suivant l'article 9 de notre projet de loi, doit être chaque fois inscrit dans le budget de la Confédération. D'après les dispositions en vigueur, ce crédit s'élève à 1,5 million de francs. S'il n'est pas pleinement employé au cours de l'année, le solde disponible sera versé, comme jusqu'ici, au « fonds pour les garanties contre les risques à l'exportation », afin que se constitue ainsi une réserve pour procurer les ressources nécessaires aux paiements qui dépasseraient le crédit budgétaire dans les années à venir.

7. Le mode de procéder.

Les demandes de garantie devaient être présentées jusqu'ici à une commission fédérale ad hoc, composée de représentants de l'administration et de l'industrie. Cette commission examinait les demandes reçues, puis faisait connaître son avis sur la suite à y donner. Ce mode de procéder s'est révélé satisfaisant. Lorsqu'on désire que des demandes soient traitées à plus bref délai que d'ordinaire, il n'y a aucune difficulté à réunir la commission plus fréquemment, s'il s'avère nécessaire d'y satisfaire pour maintenir à la garantie sa pleine efficacité. Il est même arrivé maintes fois que
des demandes urgentes aient été réglées sur-le-champ, à la suite de communications téléphoniques entre les membres de la commission.

En conclusion, nous tenons à faire remarquer que le nouveau système de garantie, motivé dans le présent message et fixé dans le projet de loi ci-annexé, a été approuvé, après des délibérations approfondies, par les représentants autorisés de l'industrie.

195

III. NOTES EXPLICATIVES SUR LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI

Art. lei.

Comme d'après l'article 1er de l'arrêté fédéral en vigueur (arrêté fédéral du 8 octobre 1936 tendant à développer l'exportation de marchandises), procurer de l'ouvrage demeure le but de la garantie contre les risques à l'exportation. Ce but ne sera, toutefois, plus limité, comme jusqu'ici, à l'industrie des moyens de production (voir p. 190).

Art. 2.

La désignation des « risques particuliers » donnant lieu à garantie correspond en gros à la disposition enunciative de l'article 1er, 1er alinéa, de l'ordonnance en vigueur (ordonnance du 24 novembre 1936 relative à la garantie contre les risques à l'exportation). Toutefois, il n'y a plus seulement les longs délais de paiement qui soient considérés comme générateurs du risque donnant lieu à garantie; il y a aussi les longs délais de transfert (voir p. 191).

Art. 3.

lel alinéa : A la couverture partielle d'une créance perdue, que l'article 1er de l'arrêté fédéral en vigueur assigne déjà comme fonction à la garantie, notre projet ajoute, pour tenir compte des risques de transfert, la couverture partielle d'une créance dont le recouvrement subit un retard (voir p. 191).

2e et 3e alinéas : Ces dispositions correspondent à l'article 2, 1er et 3e alinéas, de l'ordonnance en vigueur.

Art. 4.

leT alinéa : Nous vous avons fait connaître plus haut, en vous en donnant la raison, la modification que les milieux industriels désiraient voir apporter à la disposition actuelle, suivant laquelle la garantie peut monter, en règle générale, à 50 pour cent de la perte et, exceptionnellement, à 80 pour cent (voir p. 192). La disposition nouvelle n'indique plus de limite pour les cas ordinaires ; elle reprend seulement la limite maximum de 80 pour cent. Comme jusqu'ici (art. 2 de l'arrêté fédéral et art. 3 de l'ordonnance), il n'est pas tenu compte d'un bénéfice net pour la détermination de la garantie.

2e alinéa : Lés 80 pour cent, prévus au 1er alinéa, marquent le maximum que la garantie ne devra jamais dépasser. Dans la plupart des cas, une garantie moindre pourra suffire. L'étendue effective delà garantie sera fixée lors de l'octroi de celle-ci.

Î96 Art. .">.

Nous avons expliqué à la page 193 pourquoi cette disposition, qui est énoncée à l'article 5 de l'arrêté fédéral en vigueur, a été reprise.

Art. 6.

er

Correspond à l'article 3, 1 alinéa, de l'arrêté fédéral en vigueur.

Art. 7.

Correspond à l'article. 6 de l'arrêté fédéral en vigueur.

Art. 8.

Correspond à la première phrase de l'article 14, 2e alinéa, de l'ordonnance en vigueur.

Art. 0.

Cette disposition concorde, pour ce qui est du crédit affecté au paiement des garanties assumées, avec l'article 7, 2e et 3e alinéas, de l'arrêté fédéral en vigueur, à cette différence près que ledit crédit n'est plus arrêté d'emblée et de façon globale à une somme fixe, mais doit être déterminé chaque année à propos de l'établissement du budget de la Confédération.

Art. 10 à 12.

Les dispositions pénales sont conçues comme d'ordinaire.

Art. 13.

Le Conseil fédéral fixera la date de l'entrée en vigueur de la loi. Vu que l'arrêté fédéral qui régit actuellement la matière cessera de sortii' ses effets !e 31 décembre 1939, la loi devra entrer en vigueur le 1er janvier 1940 au plus tard. Il serait toutefois à souhaiter, eu égard aux besoins de l'industrie, que la réglementation pût déjà être appliquée avant cette date.

Art. 14.

Le Conseil fédéral édictera, par voie d'ordonnance, les dispositions nécessaires a l'exécution de la loi. L ordonnance actuelle pourra, sur bien des points, être prise comme base, mais il faudra adapter l'exécution aux modifications et à l'extension du champ d'application qu'apportera la loi.

197

En vous recommandant d'adopter le projet de loi ci-annexé, nous saisissons l'occasion de vous renouveler. Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 8 février 1939.

Au .nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, ETTER.

Le chancelier de la Confédération, G. BOVET.

(Projet.)

Loi fédérale sur

la garantie contre les risques à l'exportation.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

CONFÉDÉRATION SUISSE, vu l'article 34 ter de la constitution fédérale ; vu le message du Conseil fédéral du 8 février 1939, arrête : Article premier.

Lorsqu'un exportateur, en acceptant une commande venant de l'étranger, court un risque particulier pour le recouvrement de sa créance, la Confédération peut, en vue de maintenir et de développer les possibilités de travail, lui en faciliter l'acceptation en lui accordant une garantie contre ce risque.

Art. 2.

Ont, notamment, le caractère de risque particulier au sens de l'article premier les dangers que comporte le recouvrement d'une créance par suite

198

des longs délais de paiement ou de transfert en corrélation avec l'insécurité des conditions politiques ou économiques.

Art. 3.

Par la garantie contre les risques, l'exportateur est assuré, pour des commandes déterminées, de recouvrer une partie de sa créance en cas de perte ou de retard dans le paiement.

2 Sont, notamment, couvertes en partie les pertes causées par la dépréciation de monnaies étrangères, par des difficultés de transfert et des moratoires, ainsi que par la défaillance d'Etats, de communes ou d'autres institutions de droit public qui sont incapables de payer des marchandises commandées ou s'y refusent.

3 Les pertes dues à l'insolvabilité de particuliers ne sont pas couvertes par la garantie. Il en est de même de celles qui proviennent soit d'un état défectueux des produits livrés, soit de leur détérioration ou de leur disparition avant la livraison, soit de l'inobservation des délais de livraison convenus.

Art. 4.

1 La garantie ne doit pas s'appliquer à plus de quatre-vingts pour cent de la somme perdue ou dont le paiement est en retard. Dans la détermination de la garantie, il n'est pas tenu compte d'un bénéfice net.

2 La limite effective sera déterminée dans chaque cas d'espèce à l'occasion de l'octroi de la garantie.

1

Art. 5.

Lorsque des circonstances particulières le justifient, le Conseil fédéral peut instituer d'autres formes de garantie contre les risques ou en faciliter l'application.

Art. 6.

L'exportateur qui demande la garantie de la Confédération doit prendre toutes les précautions qui lui sont commandées par les circonstances pour prévenir des pertes.

Art. 7.

L'exportateur doit fournir les renseignements requis pour l'examen de sa demande et se prêter à la vérification de ces renseignements.

Art. 8.

Si, après avoir effectivement bénéficié de la garantie dans un cas donné, l'exportateur recouvre en tout ou en partie la somme qu'il croyait perdue ou dont le paiement était en retard, il doit restituer à la Confédération la part qui lui revient, à proportion de sa prestation, sur la somme recouvrée.

199

Art. 9.

Chaque année, un crédit sera ouvert au budget de la Confédération pour être affecté aux paiements à effectuer en exécution des garanties assumées. Si ce crédit n'est pas pleinement employé au cours de l'exercice, le solde sera versé au « fonds pour les garanties contre les risques à l'exportation ». -Ce fonds procurera les ressources nécessaires aux paiements qui dépasseraient en cours d'exercice le crédit budgétaire. La caisse fédérale ne servira pas d'intérêt à la fortune du fonds.

Art. 10.

Celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, obtient ou tente d'obtenir pour soi-même ou pour un tiers une garantie contre les risques est passible de l'emprisonnement pour un an au plus ou d'une amende de dix mille francs au plus. Les deux peines peuvent être cumulées.

Art. 11.

Si l'infraction est commise dans la gestion d'une personne morale ou d'une société en nom collectif ou en commandite, les dispositions pénales s'appliquent aux personnes qui ont agi ou auraient dû agir en son nom.

Toutefois, la personne morale ou la société ' répond solidairement des amendes et des frais.

Art. 12.

1 Les dispositions générales du codé pénal fédéral du 4 février 1853 sont applicables.

2 La poursuite et le jugement des infractions sont du ressort des cantons.

Les gouvernements cantonaux communiqueront au département fédéral de l'économie publique les jugements des tribunaux et les ordonnances de non-lieu aussitôt qu'ils auront été rendus.

Art. 13.

Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi. Les dispositions des articles 1 à 10 de l'arrêté fédéral du 8 octobre 1936 tendant à développer les exportations, qui seront dès lors abrogées, continueront toutefois à régir les garanties promises sous leur empire.

Art. 14.

Le Conseil fédéral est chargé d'assurer l'exécution de la présente loi.

1142

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant une loi sur la garantie contre les risques à l'exportation. (Du 8 février 1939.)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1939

Année Anno Band

1

Volume Volume Heft

07

Cahier Numero Geschäftsnummer

3829

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

15.02.1939

Date Data Seite

185-199

Page Pagina Ref. No

10 088 804

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.