Deuxième contrôle de suivi élargi concernant le rapport «Recours à des experts par l'administration fédérale» Rapport de la Commission de gestion du Conseil des Etats du 6 octobre 2015

2015-2836

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Condensé Neuf ans après la publication de son rapport sur le recours à des experts par l'administration fédérale du 13 octobre 2006, la Commission de gestion du Conseil des Etats (CdG-E) a procédé à un examen détaillé des mesures prises par l'administration fédérale depuis lors. Dans le cadre du deuxième contrôle de suivi élargi qui est l'objet du présent rapport, la CdG-E s'est penchée sur l'état de la mise en oeuvre des dix recommandations qu'elle avait formulées en 2006, a apprécié les progrès réalisés dans la mise en place d'un controlling des acquisitions applicable à l'ensemble de l'administration fédérale et a examiné deux incidents qui se sont produits dans le contexte des marchés publics de la Confédération ­ l'affaire de corruption au Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) et l'affaire TDcost à l'Office fédéral des routes (OFROU) ­ afin de mettre en lumière les enseignements que l'on peut en tirer.

Etat de la mise en oeuvre des dix recommandations de la CdG-E de 2006 (ch. 2) Dans sa recommandation 1, la CdG-E avait demandé au Conseil fédéral plus de transparence au sujet des consultants politiques externes et de leurs mandats. Une analyse des chiffres récents révèle que le Conseil fédéral n'y a pas donné suite à ce jour: on ignore toujours le montant total des dépenses consenties au titre des mandats de conseil politique et le Conseil fédéral ne maîtrise toujours pas la hausse continuelle des coûts dans ce domaine (cf. chapitre spécial au ch. 3 avec les nouvelles recommandations 4 et 5).

La recommandation 2 visait à obtenir du Conseil fédéral qu'il intègre les mandats d'expertise dans la planification et la politique du personnel et qu'il veille à ce que de tels mandats soient attribués uniquement dans les cas où l'avantage qu'ils présentent en comparaison avec l'utilisation de ressources internes permet de dégager une plus-value. La CdG-E constate que le Conseil fédéral est disposé à suivre la recommandation 2 tout au plus dans ses grandes lignes, mais qu'il n'a pas pris de mesures contraignantes pour en assurer la mise en oeuvre.

La CdG-E juge insuffisantes les mesures prises par le Conseil fédéral en réponse à la recommandation 3, dans laquelle il était prié de mieux exploiter les compétences internes avant d'attribuer des mandats à des consultants externes. Dans sa nouvelle
recommandation 1, elle attend du Conseil fédéral une intervention plus résolue.

Dans sa recommandation 5, la CdG-E avait invité le Conseil fédéral à examiner l'opportunité de prendre des mesures appropriées pour prévenir le phénomène dit de la «fièvre de décembre». En étudiant, dans le cadre de son contrôle de suivi, la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA), la CdG-E a constaté qu'au mois de décembre, les paiements étaient toujours nettement supérieurs à la moyenne. Elle demande donc au Conseil fédéral dans sa nouvelle recommandation 2 d'examiner plus à fond le phénomène de la fièvre de décembre à l'aide des nouveaux instruments du controlling des acquisitions.

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Par sa recommandation 6, la CdG-E avait demandé au Conseil fédéral de prendre des mesures appropriées pour renforcer la concurrence lors de l'adjudication de mandats d'expertise à des consultants externes. La CdG-E constate que le Conseil fédéral a déployé un certain nombre d'efforts pour mettre en oeuvre sa recommandation 6 et que la Délégation des finances (DélFin) y a contribué en suivant de près la mise en place et le perfectionnement du controlling stratégique des acquisitions. Si la CdG-E salue l'intention du Conseil fédéral d'obtenir une justification écrite et une clarification juridique pour toutes les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil, elle estime que la proportion des mandats de conseil qui dépassent le seuil et qui sont adjugés de gré à gré reste généralement importante, même si certaines améliorations sont incontestables. La CdG-E espère que la concurrence dans l'adjudication des mandats pourra continuer d'être améliorée avec l'introduction généralisée de l'outil de gestion des contrats (GCo Adm.féd.), qui devrait permettre d'augmenter la transparence des acquisitions de la Confédération et des modes d'adjudication dès 2016.

Dans la recommandation 9, le Conseil fédéral avait été appelé à déterminer s'il existait un rapport entre l'absence de concurrence et la part importante de mandats subséquents dans le contexte de l'adjudication des mandats d'expertise; il devait également s'assurer que l'administration n'entretenait pas de «réseaux de fournisseurs attitrés». La CdG-E se réjouit de constater que les instruments de controlling mis en place ont permis une amélioration de la surveillance. Elle relève cependant que le Conseil fédéral n'a pas, à ce jour, procédé à une étude approfondie de cette question, comme elle le lui avait demandé. Dans sa nouvelle recommandation 3, la CdG-E attend donc du Conseil fédéral qu'il fasse toute la lumière sur ce point en se servant des nouveaux instruments de controlling.

Au moyen de sa recommandation 10, la CdG-E avait demandé au Conseil fédéral d'examiner la possibilité d'introduire dans toute l'administration fédérale un système de reporting uniforme sur les acquisitions. Avec la mise en place de la StatPA et avec l'introduction de la GCo Adm.féd. dans tous les services de l'administration fédérale (ch. 4), la CdG-E estime que sa
recommandation 10 a été en grande partie mise en oeuvre.

La recommandation 4 sera examinée dans le cadre d'un autre rapport de la CdG-E et les recommandations 7 et 8 ont été mises en oeuvre (ch. 2).

Introduction de l'outil de gestion des contrats de l'administration fédérale (ch. 4) Le bilan que la CdG-E dresse de l'introduction de la GCo Adm.féd. dans les services de l'administration fédérale révèle que le projet est très avancé. Au ch. 4, la CdG-E suggère certaines améliorations et formule une nouvelle recommandation 6.

Enseignements tirés de l'affaire de corruption au SECO et de l'affaire TDcost à l'OFROU (ch. 5) L'affaire de corruption au SECO a démontré l'importance non seulement d'une séparation stricte des responsabilités, dans le processus d'acquisition, entre l'unité administrative qui a besoin de la prestation et l'entité chargée de son acquisition,

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mais aussi des instruments de controlling et de surveillance, indispensables dans ce contexte. Elle a également montré très clairement la nécessité de contrer les comportements intentionnellement fautifs de collaborateurs par l'intervention des supérieurs hiérarchiques, qui doivent avant toutes choses assumer leurs responsabilités en la matière. Dans le cas examiné ici, il est difficilement concevable que les supérieurs hiérarchiques aient pu ignorer tous les signaux d'alarme et faire aveuglément confiance à leurs subordonnés.

Les rapports de dépendance graves vis-à-vis des fournisseurs de prestations informatiques mis à jour dans l'affaire TDcost à l'OFROU soulignent la nécessité d'un système de gestion des contrats valable pour l'ensemble de l'administration fédérale (cf. ch. 4). Des liens étroits existent entre le problème que pose cette dépendance et la recommandation 9 formulée par la CdG-E dans son rapport du 13 octobre 2006 ainsi que la nouvelle recommandation 3 qui figure dans le présent rapport en ce qui concerne les fournisseurs attitrés (cf. ch. 2). La CdG-E suggère en outre de profiter de la prochaine révision totale de la législation sur les marchés publics pour limiter la durée des contrats lors de l'adjudication de mandats périodiques et pour créer une norme juridique prévoyant que les soumissionnaires n'ayant aucune concurrence (notamment dans le cadre des procédures d'adjudication de gré à gré) doivent accorder un droit de regard sur leur calcul des prix.

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Table des matières Condensé

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1

Introduction 1.1 Contexte 1.2 Mandat 444 1.3 Procédure

443 443

2

Résultats du deuxième contrôle de suivi concernant le rapport «Recours à des experts par l'administration fédérale» 2.1 Contexte 2.2 Etat de la mise en oeuvre des dix recommandations formulées par la CdG-E le 13 octobre 2006

3

4

Transparence relative aux consultants politiques externes: analyse des données provenant de la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions 3.1 Contexte 3.2 Analyse des données 3.2.1 Evolution des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA (Confédération dans son ensemble) 3.2.2 Transfert de la catégorie 22.0 vers la catégorie 18.1 3.2.3 Evolution des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA (départements et Chancellerie fédérale) 3.2.4 Résultat cumulé des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA 3.2.5 Evolution des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA entre 2012 et 2013 3.2.6 Evolution de la catégorie 18.1 de la StatPA en 2014 3.3 Conclusions de la CdG-E et actions encore requises Introduction de la gestion des contrats de l'administration fédérale et mise en oeuvre de la motion «Introduction urgente de mesures aptes à garantir la surveillance de l'adjudication de mandats par la Confédération» 4.1 Contexte 4.2 Etat de l'introduction de la gestion des contrats dans l'administration fédérale 4.3 Gestion des contrats de l'administration fédérale: pratique actuelle 4.3.1 Montant minimum pour l'enregistrement des contrats 4.3.2 Qualité des données enregistrées 4.3.3 Documentation et règlements 4.3.4 Responsabilités et ressources 4.3.5 Formation et perfectionnement 4.3.6 Actions encore requises

445 445 445 446

456 456 457 457 459 461 461 462 464 464

467 467 468 470 470 470 471 472 472 473

441

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4.4 4.5 5

6

Gestion des contrats de l'administration fédérale: bilan dans l'optique des départements et de la Chancellerie fédérale Mise en place d'un système de gestion des adjudications

Problèmes particuliers dans le domaine des marchés publics: enseignements pour l'avenir 5.1 Affaire de corruption au SECO 5.2 Application informatique TDcost en usage à l'Office fédéral des routes 481 Suite de la procédure

474 475 476 477

484

Liste des abréviations

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Annexe 1: Personnes entendues

487

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Rapport 1

Introduction

1.1

Contexte

Les résultats de la première enquête que la Commission de gestion du Conseil des Etats (CdG-E) avait conduite sur l'ampleur du recours à des experts externes dans l'administration fédérale en 20061 avaient suscité un vif intérêt tant dans les médias que dans le public. L'évaluation2 à laquelle le Contrôle parlementaire de l'administration (CPA) avait procédé sur mandat de la CdG-E avait en effet révélé pour la première fois que le volume des mandats attribués à des experts externes par la Confédération avait pris des proportions considérables: il était alors question, pour l'année 2004, de plus de 6100 mandats d'experts3 pour un montant de quelque 490 millions de francs. Comme les relevés n'étaient pas exhaustifs, les dépenses de l'administration fédérale centrale au titre de mandats d'experts avaient alors été estimées à un montant se situant entre 600 et 700 millions de francs.

Dans l'intervalle, le Conseil fédéral a mis en place la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA). Depuis 2009, cet outil permet entre autres l'enregistrement systématique des mandats d'experts adjugés par l'administration fédérale centrale. Selon cette statistique, les «prestations de service» externes4 ont coûté 858 millions de francs à l'administration fédérale en 2013, ce qui représente 16 % du volume total de ses acquisitions (5,3 milliards de francs).

Dans son rapport de 2006, la CdG-E avait formulé dix recommandations à l'adresse du Conseil fédéral. Elle lui avait notamment demandé la mise en place d'un système de reporting unique pour toutes les prestations de services acquises par l'administration fédérale, plus de transparence sur les mandats attribués à des consultants politiques externes, des mesures de lutte contre ce que l'on avait appelé la «fièvre de décembre», un renforcement de la concurrence lors de l'adjudication de mandats ainsi que la prévention de réseaux de fournisseurs attitrés, de même que différentes mesures relevant de la politique du personnel5.

1 2 3

4 5

Recours à des experts par l'administration fédérale: ampleur, concurrence et pilotage.

Rapport de la CdG-E du 13.10.2006 (FF 2007 1561) Recours à des experts externes par l'administration fédérale. Rapport du CPA du 16.6.2006 à l'attention de la CdG-E (FF 2007 1575) Les mandats d'expertise dont le CPA a tenu compte dans son évaluation de 2006 englobaient tous les «achats de services basés sur le savoir», soit des mandats de conseil et de recherche dans le domaine politique, des mandats portant sur le développement de l'organisation et du personnel, sur des services informatiques, sur des activités de relations publiques ou sur d'autres prestations de conseil (cf. FF 2007 1575 1586 et FF 2007 1575 1595). Dans le présent rapport, les termes «mandats d'expertise» et «mandats de conseil» sont considérés comme des synonymes.

Les «services» classés dans la catégorie 18 de la StatPA correspondent en grande partie aux mandats d'experts que le CPA avait recensés dans son évaluation.

Pour plus d'informations sur la terminologie utilisée et les progrès réalisés dans la mise en oeuvre des recommandations, cf. ch. 2.

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La CdG-E s'est penchée sur la mise en oeuvre de ses recommandations en procédant à un premier contrôle de suivi. Dans son courrier du 30 novembre 2011 rédigé en conclusion de ce contrôle de suivi, elle a constaté que le nouvel outil créé par le Conseil fédéral sous la forme de la StatPA pouvait encore être amélioré. Elle lui a notamment reproché de laisser de nombreux paiements sans catégorisation claire et a émis certains doutes quant à la volonté du Conseil fédéral d'étendre à l'ensemble de l'administration fédérale le système de gestion des contrats annoncé. Dans la foulée, la CdG-E a annoncé son intention de contrôler une nouvelle fois la mise en oeuvre de ses recommandations à une date ultérieure.

Après la révélation de différents faits problématiques en rapport avec l'adjudication de marchés publics (affaire de corruption au Secrétariat d'Etat à l'économie [SECO], affaire de l'Office fédéral des routes [OFROU] et affaire de la Centrale de compensation [CdC]), les CdG ont, au printemps 2014, déposé chacune de leur côté une motion aux libellés identiques intitulée «Introduction urgente de mesures aptes à garantir la surveillance de l'adjudication de mandats par la Confédération» (14.3018 et 14.3289). Ces motions, demandant l'introduction accélérée d'un outil de gestion des contrats couvrant l'ensemble de l'administration fédérale avant le début de 2015, ont toutes deux été adoptées par les conseils respectifs au cours de la session d'été 2014.

Dans une action commune lancée en avril 2014, les deux CdG sont intervenues auprès de tous les départements, y compris la Chancellerie fédérale, pour recueillir des données sur les contrats de prestations de services en cours d'une valeur de plus de 150 000 francs, sur la procédure d'adjudication ayant conduit à leur conclusion ainsi que sur les personnes et entreprises mandatées. En mai 2014, elles se sont entretenues au sujet des données recueillies avec les chefs de départements ainsi qu'avec la chancelière de la Confédération dans le cadre de l'examen du rapport de gestion 2013 du Conseil fédéral.

1.2

Mandat

Le 26 juin 2014, la CdG-E a chargé sa sous-commission DFJP/ChF6 de procéder à un deuxième contrôle de suivi élargi de l'inspection ayant porté sur le recours à des experts externes par l'administration fédérale, de lui rendre compte de ses conclusions et de lui faire une proposition. Le mandat portait sur les éléments suivants: ­

contrôle de la mise en oeuvre des dix recommandations formulées par la CdG-E le 13 octobre 2006 (deuxième contrôle de suivi);

­

contrôle de la mise en oeuvre des motions «Introduction urgente de mesures aptes à garantir la surveillance de l'adjudication de mandats par la Confédération» (14. 3018 et 14.3289);

6

444

La sous-commission DFJP/ChF est composée des députés suivants: René Imoberdorf (président), Joachim Eder, Peter Föhn, Hans Hess, Claude Janiak et Paul Niederberger.

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­

prise en compte de l'analyse des données recueillies en avril 2014 dans les départements et à la Chancellerie fédérale au sujet des contrats de prestations de services en cours ainsi qu'un

­

examen des affaires récemment révélées dans le domaine des marchés publics (affaire de corruption au SECO, affaire OFROU et affaire CdC) à la lumière des failles potentielles inhérentes au système d'adjudication des marchés publics.

1.3

Procédure

La CdG-E a lancé le deuxième contrôle de suivi élargi par lettre du 27 juin 2014 au Conseil fédéral. Elle y a invité le Conseil fédéral, d'une part, à l'informer de l'avancement de la mise en oeuvre des dix recommandations qu'elle avait formulées et, d'autre part, à détailler les mesures qu'il entendait prendre pour mettre en oeuvre les motions 14.3018 et 14.3289.

La CdG-E a aussi chargé le CPA d'analyser les données sur les contrats de prestations de services en cours prélevées en avril 20147.

La sous-commission a consacré cinq séances au contrôle de suivi élargi, a auditionné deux membres du Conseil fédéral ainsi que neuf personnes employées dans l'administration fédérale et s'est aussi procuré des rapports et d'autres documents supplémentaires. Elle a en outre demandé au Département fédéral des finances (DFF) de lui remettre différentes données contenues dans la StatPA et a chargé son secrétariat de les analyser.

Le présent rapport a été approuvé par la sous-commission à l'attention de la CdG-E le 21 août 2015. Il a ensuite été soumis à l'avis du Conseil fédéral et a finalement été adopté par la CdG-E le 6 octobre 2015.

2

Résultats du deuxième contrôle de suivi concernant le rapport «Recours à des experts par l'administration fédérale»

2.1

Contexte

Par son courrier du 27 juin 2014 mentionné plus haut, la CdG-E a demandé au Conseil fédéral de lui rendre compte de l'état de la mise en oeuvre des dix recommandations qu'elle avait formulées dans son rapport du 13 octobre 2006 sur l'ampleur, la concurrence et le pilotage du recours à des experts par l'administration fédérale. Dans son rapport du 8 octobre 2014, le Conseil fédéral a répondu aux différentes recommandations. Des informations complémentaires ont été apportées à la sous-commission par la cheffe du DFF le 24 février 2015.

7

Les résultats de cette analyse ne sont pas approfondis systématiquement dans le cadre du présent rapport. Nous y faisons néanmoins référence ponctuellement, lorsque cela paraît judicieux.

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2.2

Etat de la mise en oeuvre des dix recommandations formulées par la CdG-E le 13 octobre 2006

Recommandation 1 du 13 octobre 2006: Transparence relative aux consultants politiques externes Le Conseil fédéral veille à l'instauration de la transparence en ce qui concerne, d'une part, les consultants politiques externes qui exercent une influence directe et déterminante sur les décisions et orientations politiques des départements et des offices, et d'autre part, les mandats qui sont confiés à ces experts.

Après avoir pris acte de la réponse du Conseil fédéral du 8 octobre 2014 ainsi que des informations complémentaires fournies par la cheffe du DFF, la CdG-E s'est procuré des données supplémentaires relatives aux consultants politiques externes.

Se fondant sur les informations fournies par le Conseil fédéral ainsi que sur une analyse des paiements effectués pour des acquisitions de 2009 à 2013, la CdG-E est forcée de conclure que le Conseil fédéral n'a pas mis en oeuvre la recommandation 1 (pour plus de détails sur l'analyse et les conclusions de la CdG-E, cf. ch. 3).

Recommandation 2 du 13 octobre 2006: Intégrer les mandats d'expertise dans la planification et la politique du personnel Le Conseil fédéral intègre les mandats d'expertise dans sa planification et sa politique du personnel et veille à ce que de tels mandats ne soient attribués que lorsqu'ils permettent de dégager une plus-value financière, organisationnelle ou qualitative en comparaison à des rapports de travail d'une durée indéterminée.

Dans son rapport du 8 octobre 2014, le Conseil fédéral a estimé que le recours à des prestations externes se justifiait lorsque les capacités ou compétences internes étaient insuffisantes ou lorsque leur extension n'était pas économique. Il peut donc ­ selon lui ­ être judicieux de faire absorber les pics de travail par des ressources externes. Ce ne sont pas les quatre centrales d'acquisition de la Confédération (armasuisse, Office fédéral des constructions et de la logistique [OFCL], OFROU et Centrale des voyages de la Confédération) qui attribuent les mandats d'experts, mais les départements et offices eux-mêmes. Du point de vue du Conseil fédéral, ces achats décentralisés sont opportuns «car on sait d'expérience que la très grande diversité des tâches ne permet pas d'obtenir les synergies ou les effets recherchés à travers une centralisation».

La réponse du Conseil fédéral laisse
transparaître son intention de ne pas mettre en oeuvre la recommandation 2 de manière stricte pour ne pas priver les départements et les offices de la flexibilité dont ils bénéficient dans l'attribution des mandats d'expertise. La notice «Le recours à des experts» du 31 août 2010 (état: 1er mai 2014), destinée à l'administration fédérale, contient tout de même la recommandation suivante: «N'attribuez pas de mandats d'expertise pour des tâches qui relèvent de la mission fondamentale de votre unité administrative ou lui incombent durablement (tâches permanentes). Les mandats d'expertise sont avant tout admissibles lorsqu'ils apportent une plus-value financière, organisationnelle ou qualitative par rapport à l'exécution de la tâche concernée par des collaborateurs internes.» Si le 446

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Conseil fédéral a bien repris les grands axes de la recommandation 2 dans cette notice, il reste que la valeur d'un tel document n'est guère contraignante.

Avec le nouveau modèle de gestion de l'administration fédérale (NMG), la gestion administrative et financière sera de plus en plus axée sur le résultat. En conséquence, la gestion du Conseil fédéral ou des départements et des offices exercée au moyen de la politique du personnel aura tendance à perdre de l'importance. L'introduction d'enveloppes budgétaires devrait avoir un effet sur le plan financier, dans la mesure où le recours au personnel interne devrait être privilégié par rapport à la solution coûteuse des mandats d'expertise.

La CdG-E prend acte du fait que le Conseil fédéral est disposé à suivre la recommandation 2 tout au plus dans ses grandes lignes, mais qu'il n'a pas pris de mesures contraignantes pour en assurer la mise en oeuvre.

Recommandation 3 du 13 octobre 2006: Exploiter les compétences internes plutôt que recourir à des consultants externes Le Conseil fédéral examine les différentes options permettant de mieux exploiter les compétences des spécialistes et experts internes afin de remplacer les consultants externes lorsque c'est possible.

Les départements sont tenus d'examiner périodiquement si certaines tâches confiées à des consultants externes ne pourraient pas être assumées par des collaborateurs internes. Pour 2015, le Conseil fédéral a décidé de fournir en interne différentes prestations qui étaient jusqu'ici l'objet de mandats externes. Il est ainsi prévu de reprendre en interne des prestations jusque-là confiées à des fournisseurs externes pour un montant de quelque 20 millions de francs, soit l'équivalent de 150 postes à plein temps. Entre autres mesures, le plan de mise en oeuvre de la Stratégie de l'Administration fédérale en matière de personnel 2011-2015 prévoit en outre un encouragement des transferts et rotations internes ainsi qu'un abaissement des obstacles juridiques.

La CdG-E estime que le Conseil fédéral a fait un premier pas dans la bonne direction en prenant ces mesures et plus particulièrement en annonçant concrètement son intention de prendre de nouveau en charge en interne des prestations auparavant confiées à des fournisseurs externes. Elle relève cependant que le volume prévu des tâches reprises
en charge par des services internes (20 millions de francs) ne représente que 2,33 % des 858 millions de francs dépensés au titre de mandats d'expertise en 2013. La CdG-E souhaite que le Conseil fédéral agisse de manière encore plus résolue.

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Recommandation 1

Mieux exploiter les compétences internes au lieu de recourir à des consultants externes

Le Conseil fédéral renforce les mesures prises pour mieux exploiter les compétences des spécialistes et experts internes et pour remplacer les mandats de conseil externes dans toute la mesure du possible. L'objectif est de parvenir à reprendre en charge en interne 10 % des dépenses effectuées au titre des mandats d'expertise externes.

Recommandation 4 du 13 octobre 2006: Contrats dits de mise à disposition de personnel Le Conseil fédéral veille à la présentation des charges induites par les contrats dits de mise à disposition de personnel dans la documentation complémentaire de l'Office fédéral du personnel (OFPER) relative aux charges de personnel de la Confédération.

La CdG-E a approfondi le sujet des contrats de mise à disposition de personnel dans son rapport du 7 octobre 2014 relatif aux collaborateurs externes de l'administration fédérale8. La recommandation 4 sera examinée dans le cadre de cette enquête spécifique et n'est donc pas traitée dans le contexte du présent rapport.

Recommandation 5 du 13 octobre 2006: Prévention de la «fièvre de décembre»9 Le Conseil fédéral examine l'opportunité de mesures de prévention appropriées de la fièvre de décembre. Il veille en particulier à ce que les départements et les offices assument mieux leurs fonctions de conduite et de contrôle. La CdG-E demande en outre au Conseil fédéral de bien vouloir examiner si les avances relevées constituent des cas particuliers justifiés ou s'il y a lieu de prendre des mesures dans le but d'empêcher que des avances soient indûment versées afin de solder les crédits budgétaires.

Dans son évaluation de 2006 portant sur l'année 2004, le CPA avait trouvé des indices révélant clairement que des mandats avaient été octroyés en décembre afin d'épuiser des soldes de crédit. Par rapport à la période très courte durant laquelle ils avaient couru avant la fin de l'année, les mandats attribués en décembre avaient généré un volume de paiements nettement supérieur à la moyenne. Dans le cas de quinze unités administratives, le CPA avait même trouvé dans la comptabilité de 2004 des paiements pour des mandats qui ne devaient commencer à courir qu'en 2005 (39 mandats au total pour des paiements de plus de cinq millions de francs)10.

8 9

10

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Collaborateurs externes de l'administration fédérale. Rapport de la CdG-E du 7.10.2014 (FF 2015 3311) Par «fièvre de décembre», on entend la pratique consistant à attribuer des mandats peu avant la fin de l'année et à verser des avances pour des prestations ne devant être fournies que l'année suivante afin d'épuiser les soldes de crédit.

Recours à des experts externes par l'administration fédérale. Rapport du CPA à l'attention de la CdG-E du 16.6.2006 (FF 2007 1575 1602)

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Dans sa recommandation 5, la CdG-E avait donc demandé une amélioration des contrôles ainsi que des éclaircissements au sujet des avances mises en cause. Les 39 cas relevés (qui n'en étaient en fait que 37, comme l'enquête l'a révélé par la suite), ont finalement pu être clarifiés par le Conseil fédéral11.

Dans sa réponse au premier contrôle de suivi de la CdG-E, le Conseil fédéral a souligné que la simplification des reports de crédits introduite avec le nouveau modèle comptable représentait un instrument extrêmement efficace pour prévenir le versement d'avances. Avec la mise en place de l'outil de gestion des contrats de la Confédération (GCo Adm.féd.), il a en outre estimé que l'administration allait se donner de nouveaux moyens de reconnaître les comportements potentiellement inadéquats au moyen d'instruments efficaces12.

Il ressort de la StatPA de 2013 que le volume des paiements en décembre 2013 a dépassé la moyenne des autres mois de l'année de 89 %. Selon le Conseil fédéral, le fait que les paiements de décembre soient supérieurs à la moyenne s'explique essentiellement par la clôture de l'exercice13. Selon les directives du Nouveau modèle comptable de la Confédération (NMC), le versement d'avances sans que la prestation ou la marchandise soit fournie n'est plus admis. Avec l'introduction prévue du NMG, les unités administratives pourront cependant avoir recours à la constitution de réserves, au dépassement de crédits en cas d'excédent de recettes ou à la dissolution de réserves.

De l'avis de la CdG-E, le problème de la «fièvre de décembre» devrait pouvoir être au moins atténué à l'aide des nouveaux instruments du NMC et du NMG, car les crédits ne devront plus obligatoirement être soldés à la fin de l'année. Elle estime cependant que le Conseil fédéral ne devrait pas se satisfaire de supposer que le volume très important des paiements de décembre s'explique simplement par la clôture des comptes.

La CdG-E recommande donc au Conseil fédéral d'étudier la question plus à fond et d'examiner si les nouveaux instruments du controlling des acquisitions (StatPA et GCo Adm.féd.) se prêtent à la lutte contre le phénomène de la «fièvre de décembre».

Recommandation 2

Analyser l'augmentation massive des paiements en décembre

Le Conseil fédéral examine s'il existe dans l'administration fédérale des tendances à une augmentation indésirable ou irrégulière du volume des paiements en décembre et vérifie si les nouveaux instruments du controlling des acquisitions sont adéquats pour détecter la «fièvre de décembre» et lutter contre celle-ci.

11 12

13

Rapport annuel 2007 des CdG et de la DélCdG des Chambres fédérales du 25.1.2008 (FF 2008 4579 4634) Suivi du rapport de la CdG-E du 13.10.2006 concernant le recours à des experts par l'administration fédérale: ampleur, concurrence et pilotage; réponse du Conseil fédéral du 14.10.2009 «Controlling des achats. Set de reporting pour l'année 2013 ­ Conseil fédéral», rapport du DFF du 25.7.2014, p. 8

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Recommandation 6 du 13 octobre 2006: Mesures destinées à renforcer la concurrence La CdG-E invite le Conseil fédéral à prendre des mesures appropriées destinées à renforcer la concurrence lors de l'adjudication de mandats d'expertise à des consultants externes.

Au vu des résultats de l'enquête réalisée par le CPA en 2006, la CdG-E avait conclu que l'administration fédérale n'était pas très soucieuse de faire jouer la concurrence lors de l'adjudication de mandats à des consultants externes. Six francs sur dix avaient en effet été dépensés pour des mandats attribués de gré à gré. Même les mandats portant sur un montant supérieur à 50 000 francs, qui auraient donc en principe dû être adjugés sur la base d'une procédure de concours, avaient été attribués de gré à gré dans un nombre de cas totalisant plus de la moitié du volume de paiement14. Quant aux mandats de prestations de services dépassant la valeur seuil, la proportion des adjudications de gré à gré dépassait même 60 % pour atteindre presque deux tiers. Dans sa recommandation 6, la CdG-E avait donc demandé que des mesures soient prises afin de renforcer la concurrence lors de l'adjudication de mandats à des consultants externes.

Dans sa réponse du 8 octobre 2014, le Conseil fédéral a souligné que, depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle ordonnance sur l'organisation des marchés publics (Org-OMP)15 au début de 2013, l'acquisition de marchandises relevait des services d'achat centraux, ce qui permettait de réaliser des économies substantielles.

Selon le Conseil fédéral, il n'est cependant pas possible d'obtenir un effet comparable dans le domaine de l'acquisition de services étant donné que celui-ci n'a pas été centralisé, mais relève toujours de la responsabilité des unités administratives.

De l'avis du Conseil fédéral, celles-ci connaissent toutefois les exigences requises et peuvent acquérir les prestations souhaitées à un prix économique en appliquant la procédure d'acquisition exigée par la loi. La surveillance et les évaluations prévues dans le cadre du controlling des acquisitions permettent, selon lui, de s'assurer de la mise en concurrence des mandats attribués.

Depuis 2009, la mise en place d'un controlling stratégique des acquisitions et la pratique d'acquisition de l'administration fédérale pour ce qui est des adjudications de
gré à gré dépassant la valeur seuil sont régulièrement suivies par la Délégation des finances (DélFin)16. L'administration fédérale fournit chaque année à la DélFin les données relatives à toutes les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil pour les 22 catégories de la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions 14 15 16

450

Recours à des experts par l'administration fédérale: ampleur, concurrence et pilotage, Rapport de la CdG-E du 13.10.2006 (FF 2007 1561 1569) Ordonnance du 24.10.2012 sur l'organisation des marchés publics de l'administration fédérale (Org-OMP; RS 172.056.15) Le seuil pour l'adjudication de marchés publics dans le domaine des services est actuellement fixé à 230 000 francs. Pour les marchés publics dépassant les valeurs seuils de l'OMC selon l'Accord sur les marchés publics (AMP-OMC; RS 0.632.231.422), la loi fédérale du 16.12.1994 sur les marchés publics (LMP; RS 172.056.1) prévoit l'obligation de lancer un appel d'offres. Dans le cas des exceptions prévues par la législation (LMP/OMP), une procédure de gré à gré est admise.

FF 2016

(StatPA). Il ressort de ces données que les adjudications de gré à gré ont fortement augmenté au cours des dernières années17. La DélFin n'a pas caché son inquiétude face à cette évolution et attend que le volume et le nombre des adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil diminuent à moyen terme et cessent en tous cas d'augmenter18.

S'agissant de l'évolution des adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil dans le domaine spécifique des mandats d'expertise (correspondant essentiellement à la catégorie 18 «Services» dans la StatPA), les données demandées par la DélFin19 permettent le constat suivant: Dans la catégorie Services (cat. 18 StatPA dans son ensemble), les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil ont totalisé 163,3 millions de francs en 2009, 207 millions en 2011 et 201,7 millions en 2012. En 2013, elles ont grimpé à 309 millions pour revenir à 247,6 millions de francs en 2014.

Dans les deux principales sous-catégories de la catégorie Services, la situation est la suivante: les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil entrant dans la catégorie Services de conseil généraux, qui comprend les mandats de consultants politiques (cat. 18.1 StatPA; voir aussi ch. 3), ont totalisé 77,4 millions de francs en 2009, 99,3 millions en 2011, 77,8 millions en 2012 et 107 millions en 2013. En 2014, elles ont diminué considérablement pour n'atteindre plus que 41 millions de francs.

Dans la catégorie Services informatiques (cat. 18.2 StatPA), les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil n'ont cessé d'augmenter: de 81 millions de francs en 2009, elles sont passées à 93,1 millions en 2011, puis à 114,7 millions en 2012 et à 169,3 millions en 2013 pour totaliser 189,6 millions de francs en 2014.

Les données recueillies annuellement à l'attention de la DélFin permettent aussi de connaître le nombre de cas d'adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil ayant fait l'objet d'une justification écrite et d'une clarification juridique afin de déterminer s'ils relevaient bien des exceptions à l'obligation de lancer un appel d'offres prévues par la loi. De ce point de vue, l'évolution au sein de l'administration fédérale a été plutôt positive dans l'ensemble: en 2013, 85 % des adjudications dépassant la valeur seuil ont fait l'objet d'une justification
écrite et 66 % ont donné lieu à une clarification juridique. En 2014, ces chiffres étaient de 92 % pour les justifications écrites et de 80 % pour les clarifications juridiques20. Le 19 septembre 2014, le Conseil fédéral a décidé que toutes les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil devaient dès lors être justifiées par écrit et clarifiées sous l'angle juridique.

17

18 19 20

D'une valeur de 370,7 millions de francs (364 adjudications) en 2009, elles sont passées à 1 167,5 millions de francs (639 adjudications) en 2014 pour l'ensemble de l'administration fédérale. Source: Rapport du Conseil fédéral à la DélFin du 15.4.2015 (non publié).

Lettre de la DélFin au Conseil fédéral du 5.6.2014 (non publiée) Rapport du DFF du 26.3.2015, annexe à la lettre du Conseil fédéral à la DélFin du 15.4.2015 (non publié) Rapport du Conseil fédéral à la DélFin du 15.4.2015 (non publié)

451

FF 2016

La CdG-E ne dispose pas des chiffres se rapportant spécifiquement aux justifications écrites et aux clarifications juridiques dans la catégorie des Services (cat. 18 StatPA). Compte tenu de l'évolution générale relevée dans l'administration fédérale, il est toutefois vraisemblable que l'évolution dans cette catégorie a elle aussi été positive.

La CdG-E constate que le Conseil fédéral a déployé un certain nombre d'efforts pour mettre en oeuvre sa recommandation 6 relative au renforcement de la concurrence lors de l'adjudication de mandats d'expertise à des consultants externes. La DélFin y a elle aussi contribué en soutenant et en suivant de près la mise en place et le perfectionnement du controlling stratégique des acquisitions. Si la CdG-E salue l'intention du Conseil fédéral d'obtenir une justification écrite et une clarification juridique de toutes les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil, elle estime que la proportion des mandats de conseil adjugés de gré à gré reste généralement importante malgré les diminutions constatées dans certaines catégories (notamment dans la cat. 18.1 Services de conseil généraux, qui a connu une baisse très nette). Elle s'inquiète notamment de la tendance à la hausse des adjudications de gré à gré en matière de services informatiques21. La CdG-E espère que la concurrence dans l'adjudication des mandats continuera d'être améliorée avec l'introduction généralisée de l'outil de gestion des contrats (GCo Adm.féd.), qui devrait permettre d'augmenter la transparence des acquisitions de la Confédération et des modes d'adjudication dès 2016. La CdG-E constate avec satisfaction que la DélFin a l'intention de continuer d'accompagner ce processus. Compte tenu de ce qui précède, elle considère sa recommandation 6 du 13 octobre 2006 comme étant une tâche permanente du Conseil fédéral.

Recommandation 7 du 13 octobre 2006: Clarification du champ d'application du droit des marchés publics La CdG-E invite le Conseil fédéral à mettre à profit la révision du droit des marchés publics en cours, d'une part pour clarifier les modalités relatives aux mandats d'expertise et d'autre part pour renforcer la concurrence dans ce domaine. Il examinera en outre dans quelle mesure la révision du droit des marchés publics permettra au législateur de mieux tenir compte des particularités
des mandats d'expertise.

Le Conseil fédéral considère que la législation en vigueur est suffisante. Il souligne que, depuis le 1er janvier 2010, tous les mandats de prestations entrent dans le champ d'application de l'ordonnance sur les marchés publics (OMP)22, ce qui implique que les mandats d'expertise doivent eux aussi être attribués dans le respect des règles fixées dans le droit des marchés publics. Il en conclut que tous les mandats d'expertise d'une valeur estimée à plus de 230 000 francs doivent, par principe, faire l'objet d'un appel d'offres sur la plate-forme électronique publique simap, l'adjudication devant également être publiée.

21

22

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Il n'est pas possible de déterminer la part que représentent les adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil par rapport au total des paiements enregistrés par catégorie, car ces chiffres ne sont pas disponibles.

Ordonnance du 11.12.1995 sur les marchés publics (OMP; RS 172.056.11)

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Le Conseil fédéral estime que la réglementation en vigueur permet de tenir dûment compte des particularités des mandats de conseil ou d'expertise et notamment ­ comme pour toutes les autres acquisitions soumises à l'OMP ­ de définir des critères qui doivent être impérativement respectés (critères de qualification) ainsi que des critères qui permettent de déterminer, parmi les concurrents, celui qui se verra adjuger le marché (critères d'adjudication).

La CdG-E est d'avis que le Conseil fédéral a répondu en principe à la demande de clarification législative qui avait été formulée à l'époque. S'il devait se révéler que la proportion des mandats de prestations de services dépassant la valeur seuil qui sont adjugés selon une procédure de gré à gré se justifiant du point de vue tant économique que juridique continue de stagner à un niveau élevé, il conviendrait de saisir l'occasion de la prochaine révision de la législation sur les marchés publics pour déterminer dans quelle mesure la réglementation en vigueur, selon laquelle un appel d'offres doit être lancé pour tous les mandats de prestations de services dépassant la valeur seuil, répond bien aux besoins réels de l'administration ou dans quelle mesure elle peut, au contraire, être à l'origine de problèmes d'efficience et donc d'une augmentation des coûts.

Recommandation 8 du 13 octobre 2006: Amélioration de l'information et formation La CdG-E invite le Conseil fédéral à prendre les dispositions nécessaires pour améliorer l'information et la communication au sein de l'administration et former les responsables de l'adjudication de mandats d'expertise de manière ciblée afin de les sensibiliser aux avantages de la concurrence et, partant, d'induire un changement de mentalité dans ce domaine.

Le service de formation et de perfectionnement du Centre de compétence des marchés publics de la Confédération (CCMP) propose désormais un programme de formation complet. De 2010 à 2013, le nombre de journées de formation proposées et le nombre de participants ont presque doublé. A intervalles réguliers, des experts en acquisitions de l'OFCL abordent le sujet des marchés publics dans le cadre des cours d'économie d'entreprise organisés par l'Office fédéral du personnel (OFPER).

Depuis 2015, un cours spécifiquement axé sur le droit des marchés publics est en outre
proposé aux cadres. De plus, les départements participent à l'effort de sensibilisation en établissant leurs propres directives et en organisant leurs propres manifestations d'information.

La CdG-E reconnaît que le Conseil fédéral a, au cours des dernières années, pris des dispositions utiles pour améliorer l'information et la communication au sein de l'administration. Elle considère donc que sa recommandation 8 a été mise en oeuvre.

453

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Recommandation 9 du 13 octobre 2006: Examen relatif à l'existence de réseaux de fournisseurs attitrés23 La CdG-E demande au Conseil fédéral de se pencher de manière approfondie sur la question de l'existence d'un rapport entre absence de concurrence et importance des mandats subséquents et de veiller à ce que l'administration n'entretienne pas de réseaux de fournisseurs attitrés.

Se fondant sur l'évaluation du CPA, la CdG-E avait constaté en 2006 non seulement que de nombreux services de la Confédération ne faisaient pas suffisamment jouer la concurrence, mais aussi qu'un franc sur six consacrés à des mandats d'expertise était dépensé pour des mandats subséquents et que ce rapport pouvait même augmenter à 40 % ou plus des dépenses globales dans certains offices ou services. Elle avait en outre relevé une forte concentration des moyens sur quelques mandataires seulement: les principaux bénéficiaires, qui ne représentaient que 3 % de tous les mandataires, drainaient ainsi près de la moitié de l'ensemble des moyens consacrés aux mandats d'expertise. La conjonction de ces deux éléments (absence de concurrence et importance des mandats subséquents) avait alimenté le soupçon de l'existence, au sein de l'administration fédérale, de réseaux de fournisseurs attitrés.

La CdG-E avait cependant aussi souligné que le CPA n'avait pas apporté la preuve définitive de l'existence de tels réseaux de fournisseurs attitrés dans son évaluation et qu'il n'avait pas non plus examiné les mandats subséquents dans la perspective d'une transgression du droit des marchés publics. En conséquence, elle avait demandé au Conseil fédéral d'étudier cette question de manière circonstanciée, notamment en chargeant le Contrôle fédéral des finances (CDF) de lui remettre un rapport à ce sujet24.

Dans son rapport du 8 octobre 2014 relatif au deuxième contrôle de suivi, le Conseil fédéral a souligné que, grâce à la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA) et au système de gestion des contrats de l'administration fédérale (GCo Adm.féd.), il était déjà possible d'analyser les contrats passés avec les fournisseurs. Selon lui, les activités de controlling menées au niveau fédéral par l'OFCL ou dans les départements permettent également d'identifier les anomalies dans les séries chronologiques et de prendre des mesures.
La CdG-E se réjouit de constater que les instruments de controlling mis en place ont permis une amélioration de la surveillance. Elle relève cependant aussi que le Conseil fédéral n'a pas, à ce jour, procédé à l'étude approfondie de la pratique d'attribution des mandats d'expertise qu'elle lui avait demandé pour déterminer s'il existait un rapport entre l'absence de concurrence et la part importante de mandats subséquents dans le contexte de l'adjudication des mandats d'expertise. La CdG-E requiert donc encore une fois une analyse circonstanciée de cette question. Elle souhaite plus particulièrement savoir si les nouveaux instruments du controlling des acquisitions (Statistique des paiements effectués pour des acquisitions et gestion des 23

24

454

Par «fournisseurs attitrés», la CdG-E entend des fournisseurs de biens ou de services qui, une fois qu'ils ont pris pied dans un office, continuent de se voir confier de nouveaux mandats (mandats subséquents) au mépris de la concurrence.

Recours à des experts par l'administration fédérale: ampleur, concurrence et pilotage, rapport de la CdG-E du 13.10.2006 (FF 2007 1561 1570)

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contrats de l'administration fédérale) peuvent servir à déceler l'existence de réseaux de fournisseurs attitrés et à lutter contre le phénomène des mandats subséquents attribués au mépris de la concurrence.

Recommandation 3

Déterminer s'il existe des réseaux de fournisseurs attitrés

Le Conseil fédéral examine s'il existe un rapport entre l'absence de concurrence et l'importance des mandats subséquents dans le contexte de l'attribution des mandats d'expertise et détermine si les nouveaux instruments du controlling des acquisitions se prêtent à la lutte contre le phénomène des mandats subséquents attribués au mépris de la concurrence (réseaux de fournisseurs attitrés).

Recommandation 10 du 13 octobre 2006: Introduction d'un système de rapports uniforme dans toute l'administration fédérale et coordination des contrats de services dans tous les domaines Le Conseil fédéral examine la possibilité d'introduire dans toute l'administration fédérale un système de rapports uniforme sur l'acquisition de prestations de service.

Il veille à ce que les départements aient en permanence une vue d'ensemble de tous les mandats d'expertise adjugés dans leur domaine et assure une coordination efficace des contrats d'acquisition de services dans tous les domaines.

En 2007, le Conseil fédéral a lancé le projet «Controlling stratégique des acquisitions» afin d'améliorer le contrôle et le pilotage des marchés publics de la Confédération. Depuis janvier 2009, les paiements effectués pour des acquisitions sont enregistrés par l'administration fédérale centrale et analysés par l'OFCL.

Le 19 décembre 2012, le Conseil fédéral a approuvé le concept de controlling des achats de l'administration fédérale, dont le but était d'assurer le contrôle et le pilotage des acquisitions non pas au niveau des départements, mais pour l'ensemble des services de la Confédération. Les bases légales nécessaires pour sa mise en oeuvre sont entrées en vigueur le 1er janvier 2013 avec l'Org-OMP. Le projet comprend les trois éléments suivants: ­

Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA): cette statistique, aujourd'hui en place, répertorie les paiements effectués pour les acquisitions de l'ensemble de l'administration fédérale; elle porte donc non seulement sur les mandats d'expertise, qui ont été l'objet du rapport de la CdG-E du 13 octobre 2006, mais également sur tous les types d'acquisitions, classées en 22 catégories et de nombreuses sous-catégories.

­

Gestion des contrats de l'administration fédérale (GCo Adm.féd.): il s'agit là d'un outil informatique de gestion des contrats destiné à permettre des analyses ciblées de contrats et de fournisseurs pour l'ensemble de l'administration fédérale. La GCo Adm.féd., qui est déjà largement opérationnelle à l'heure actuelle et qui devrait fournir des données pour tous les services de l'administration fédérale dès 2016, est l'objet d'un chapitre spécial dans le présent rapport (cf. ch. 4).

455

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­

Monitoring de la durabilité des achats (MDA): parti d'un projet pilote en 2013, cet instrument est destiné à rendre compte du respect des dimensions économique, écologique et sociale des acquisitions (n'est pas étudié dans le cadre du présent rapport).

La CdG-E estime que la recommandation 10 a été en grande partie mise en oeuvre.

3

Transparence relative aux consultants politiques externes: analyse des données provenant de la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions

3.1

Contexte

Dans la Recommandation 1 de son inspection du 13 octobre 2006 relative au recours à des experts par l'administration fédérale, la CdG-E avait demandé au Conseil fédéral plus de transparence en ce qui concerne les consultants politiques externes qui exercent une influence directe et déterminante sur les décisions politiques25. Elle avait en effet jugé potentiellement problématique «le fait que, contrairement aux offices et services fédéraux, les consultants externes qui exercent une influence non négligeable sur les orientations politiques ne soient ni soumis à un contrôle parlementaire ni exposés à la publicité assurée par les médias»26.

La CdG-E avait alors non seulement critiqué le manque de transparence concernant le volume des mandats confiés à des consultants politiques externes ainsi que le manque de précision général constaté dans l'affectation des paiements à une catégorie d'acquisitions, mais avait aussi à coeur d'empêcher une croissance incontrôlée des frais de conseil politique, qui, selon l'évaluation du CPA, totalisaient 144 millions de francs en 2004.

Dans son rapport du 8 octobre 2014 à la CdG-E relatif au deuxième contrôle de suivi, le Conseil fédéral note que le controlling des paiements aux consultants politiques repose sur la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions de la Confédération (StatPA)27. Dans la StatPA, les paiements concernant des mandats de consultants politiques relèvent de la catégorie d'acquisitions 18.1 (Services de conseil généraux) au même titre que tous les autres paiements correspondant à des 25

26 27

456

Recommandation 1, rapport de la CdG-E du 13.10.2006: Le Conseil fédéral veille à l'instauration de la transparence en ce qui concerne, d'une part, les consultants politiques externes qui exercent une influence directe et déterminante sur les décisions et orientations politiques des départements et des offices, et d'autre part, les mandats qui sont confiés à ces experts. A ce propos, voir aussi ch. 2.2.

FF 2007 1561 1566 La Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA) fait partie du controlling des achats de la Confédération (avec le Système de gestion des contrats et le Monitoring de la durabilité des achats). Cet instrument, qui fonctionne depuis 2009, est rattaché au système financier de la Confédération. Il permet l'enregistrement des paiements par départements et indique qui (quel office) a payé quoi (catégorie de biens ou de services) à qui (fournisseur extérieur à la Confédération) et pour quel montant (en CHF, TVA incluse). Les paiements sont ainsi classés en 22 catégories. Cette base de données permet à l'OFCL de réaliser chaque année différentes analyses des paiements effectués.

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prestations ne pouvant pas être attribuées clairement à une autre sous-catégorie de la catégorie 18 (Services)28.

La CdG-E constate avec étonnement que, neuf ans après son premier rapport sur le recours à des experts, le critère de transparence concernant les mandats de consultants politiques n'est toujours pas rempli. Sur la base des données de la StatPA, il n'est actuellement possible de définir ni la part ni le montant exacts des mandats de consultants politiques au sein de la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux), même si l'on peut supposer que ceux-ci représentent une proportion non négligeable29.

Malgré ce manque de transparence, la CdG-E a choisi d'analyser, dans le présent chapitre, l'évolution de la catégorie 18.1 entre 2009 et 2013 afin de voir dans quelle mesure les différents arguments avancés à ce sujet par le Conseil fédéral pouvaient être confirmés30.

3.2

Analyse des données

3.2.1

Evolution des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA (Confédération dans son ensemble)

Au cours des années 2009 à 2013, les paiements classés dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) ont connu une très forte hausse puisqu'ils ont passé de 129 millions à 419 millions de francs (tableau 1). Selon le Conseil fédéral, cette augmentation massive de la catégorie 18.1 serait en lien direct avec la «réduction notable» du poste 22.0 (Non classable dans une catégorie existante), qui s'explique ­ selon lui ­ par une amélioration régulière de la qualité de la statistique ayant «permis une affectation plus précise et plus complète» des paiements. En d'autres termes, le Conseil fédéral est d'avis que la progression constatée dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) durant les années 2009 à 2013 est essentiellement une conséquence de la diminution relevée dans la catégorie 22.0 (Non classable dans une catégorie existante).

Face à la CdG-E31, la cheffe du DFF a réitéré cette position en soulignant que, cumulées, les catégories 18.1 et 22.0 affichaient même une tendance à la baisse.

Désireuse de vérifier les affirmations du Conseil fédéral, la CdG-E a demandé au DFF la mise à disposition de toutes les données contenues dans les rubriques 18.1 et 22.0 de la StatPA (de 2009 à 2013) pour les départements et la Chancellerie fédé28

29 30

31

Les autres catégories d'acquisition de prestations prévues dans la StatPA sont: 18.2: Services informatiques, 18.3: Services de conseil en gestion, 18.4: Relations publiques et campagnes et 18.5: Services linguistiques et de traduction.

Par conséquent, dans la suite du rapport, la catégorie de paiements 18.1 sera intitulée «Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques».

Comme les données pour l'année 2014 n'étaient pas encore disponibles au moment de la rédaction du rapport, elles ne sont pas prises en compte dans l'analyse qui suit. Pour ce qui est de l'évolution des dépenses de la catégorie 18.1 en 2014, cf. ch. 3.2.6.

Audition de Madame Eveline Widmer-Schlumpf, conseillère fédérale, cheffe du DFF, 24.2.2015

457

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rale32. Cette base de données a permis une analyse détaillée de l'évolution et de la catégorisation des paiements effectués au titre de prestations de services.

Si l'on considère les montants des catégories 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) et 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) de manière générale pour l'administration fédérale centrale, les données de la StatPA confirment les affirmations du Conseil fédéral concernant l'évolution des paiements (tableau 1). Entre 2009 et 2013, les paiements non classables dans une catégorie existante ont en effet diminué considérablement (de 563 à 187 millions de francs) alors même que le total des services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques a augmenté fortement (de 129 à 419 millions de francs).

Tableau 1: Evolution des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA (2009­2013)

32

458

Lettre à la cheffe du DFF du 12.3.2015

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3.2.2

Transfert de la catégorie 22.0 vers la catégorie 18.1

Selon le rapport du Conseil fédéral et les précisions fournies par la cheffe du DFF, l'augmentation enregistrée dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) s'explique par la réaffectation de nombreux paiements de la catégorie 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) dans la catégorie 18.1, du fait de l'amélioration de la précision statistique.

Les données de la StatPA (tableau 1) révèlent pourtant qu'il n'y a pas de rapport direct entre l'évolution des deux catégories en question: entre 2009 et 2011, par exemple, les paiements non classables dans une catégorie existante (catégorie 22.0) ont diminué fortement, alors que les services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques (catégorie 18.1), n'ont pas augmenté dans la même proportion33. Inversement, la hausse de la catégorie 18.1 a été très forte entre 2012 et 2013, alors même que les chiffres dans la catégorie 22.0 sont restés pratiquement inchangés34. Cette absence de rapport dans l'évolution des catégories 18.1 et 22.0 est encore plus marquée au niveau des départements, ce qui montre bien que l'augmentation dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) n'est pas directement liée à l'évolution de la catégorie 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) [cf. ch. 3.2.3].

Une analyse détaillée des grands fournisseurs (tableau 2)35 révèle que les transferts de la catégorie 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) vers la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) ne concernent en fait qu'un petit nombre de cas entre 2009 et 2013 (8,20 %). La majorité des grands fournisseurs (88 %) n'ont pas été réaffectés à une nouvelle catégorie. Bien que partielle36, l'analyse révèle une tendance claire indiquant que l'argument de «l'affinement de la classification» doit être assorti d'une sérieuse réserve.

33 34 35

36

En d'autres termes: certains fournisseurs qui figuraient dans la catégorie 22.0 ont soit disparu, soit été affectés à des catégories autres que la catégorie 18.1 durant cette période.

Pour une analyse détaillée de l'évolution de 2012 à 2013, cf. ch. 3.2.5.

Pour les années 2009 à 2013, tous les fournisseurs représentant un total d'adjudications de plus de 100 000 francs (par département et par année) ont été pris en compte (nombre de cas: 1926) et rassemblés dans un tableau récapitulatif. Sur la base de ce tableau, il a été possible non seulement de présenter clairement pour chaque département l'évolution de la catégorisation de ses grands fournisseurs (cat. 18.1 et 22.0), mais aussi de comparer cette évolution entre les départements.

N'ont été pris en compte que les fournisseurs représentant un total d'adjudications de plus de 100 000 francs (par département et par année). Il est fort probable que de nombreux mandats de consultants politiques se situent en dessous de cette limite. On n'a en outre répertorié ici que le nombre de cas (et non le montant pour chaque fournisseur). Comme la StatPA ne contient pas d'indication relative au type de service fourni, il n'a par ailleurs pas été possible de vérifier la pertinence de l'affectation sur le fond. Soulignons aussi que la grande majorité des fournisseurs ne figurent au tableau qu'occasionnellement (ne sont pas recensés chaque année). Soit ces fournisseurs n'ont effectivement été mandatés que de temps à autre, soit ils présentent pour certaines années des totaux d'adjudications inférieurs à 100 000 francs. Une autre possibilité est qu'une partie d'entre eux aient été classés périodiquement dans d'autres catégories n'ayant pas été prises en considération dans la présente analyse.

459

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En termes de montants, une analyse détaillée des grands fournisseurs pour les années 2012 et 2013 montre que les transferts en provenance de la catégorie 22.0 n'expliquent qu'un tiers environ de l'augmentation des dépenses de la catégorie 18.1 durant cette période (cf. ch. 3.2.5).

Tableau 2: Grands fournisseurs ­ Evolution de leur catégorisation dans la StatPA (2009­2013)

Grands fournisseurs: Évolution de leur catégorisation dans la StatPA (2009-2013, Confédération dans son ensemble) Les fournisseurs représentant un total d'adjudications de plus de 100 000 francs (par année et par département) ont été pris en compte.

Le fournisseur a été répertorié...

Uniquement dans la cat. 18.1 (services de conseil généraux)

860 cas (44,65 %)

D'abord dans la cat. 22.0 (non classable) puis dans la cat. 18.1 (services de conseil généraux)

158 cas (8,20 %)

Uniquement dans la cat. 22.0 (non classable)

835 cas (43,35 %)

D'abord dans la cat. 18.1 (services de conseil généraux) puis dans la cat. 22.0 (non classable)

24 cas (1,25 %)

Évolution confuse

49 cas (2,54 %)

Total

1926 cas (100 %) Source: DFF / Analyse: CdG-E

Se fondant sur cette analyse, la CdG-E conclut que la réaffectation de paiements provenant de la catégorie 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) ne peut pas être considérée comme étant la raison principale de l'augmentation constatée dans cette catégorie. Les chiffres des grands fournisseurs ne confirment ce lien de cause à effet que dans une mesure très limitée. La forte hausse des paiements de la catégorie 18.1 est due à d'autres facteurs (affectation de paie-

460

FF 2016

ments provenant d'autres catégories de la StatPA, multiplication des nouveaux fournisseurs)37.

3.2.3

Evolution des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA (départements et Chancellerie fédérale)

L'évolution des catégories 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) et 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) a ensuite été étudiée séparément pour chaque département et pour la Chancellerie fédérale. Si la tendance générale (diminution de la catégorie 22.0 et augmentation de la catégorie 18.1) peut être observée presque partout entre 2009 et 201338, l'évolution est loin d'avoir été la même dans tous les départements: dans certains cas, les fluctuations ont été considérables. L'analyse révèle en outre clairement que l'évolution des catégories 18.1 et 22.0 n'a pas été complémentaire dans les différents départements, ce qui fragilise encore une fois l'hypothèse de «l'affinement de la classification» des fournisseurs (cf. ch. 3.2.1).

Après un recul bienvenu depuis 2009, les paiements non classables dans une catégorie existante (catégorie 22.0) ont recommencé à augmenter dans quatre départements39 et à la Chancellerie fédérale en 2012 et 2013. Dans certains cas, cette augmentation a même été considérable. Cette évolution va à l'encontre de la volonté du Conseil fédéral et de la CdG-E d'améliorer la transparence des paiements en aspirant à une affectation plus précise des fournisseurs dans la StatPA.

3.2.4

Résultat cumulé des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA

La cheffe du DFF a souligné vis-à vis de la CdG-E que le résultat cumulé des catégories 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) et 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) était globalement en baisse. Au vu des données de la StatPA (cf. tableau 1), cette affirmation doit être relativisée. Bien que le résultat total ait effectivement diminué entre 2009 et 2012 (de 692 à 471 millions de francs), il a de nouveau connu une forte hausse en 2013.

Le résultat cumulé des catégories 18.1 et 22.0 était dès lors de nouveau plus élevé en 2013 (606 millions) qu'il ne l'était en 2010 (603 millions). Ce rebond significatif s'explique essentiellement par la hausse enregistrée dans la catégorie 18.1 (+145 millions de francs entre 2012 et 2013).

37

38

39

Reconstituer les affectations et transferts de chaque fournisseur représenterait un travail énorme. A l'heure actuelle, il n'est dès lors pas possible d'avoir une vue d'ensemble de la catégorisation des paiements et de l'évolution des catégories 18.1 et 22.0 pour l'administration fédérale.

Il y a deux exceptions: au DFJP, le niveau de la catégorie 22.0 est plus élevé en 2013 qu'il ne l'était en 2009 (avec une brusque hausse entre 2012 et 2013). Au DETEC, la catégorie 22.0 est restée quasiment inchangée entre 2009 et 2013.

DFAE, DFI, DFJP et DEFR

461

FF 2016

3.2.5

Evolution des catégories 18.1 et 22.0 de la StatPA entre 2012 et 2013

Les analyses réalisées indiquent que les catégories 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) et 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) n'ont pas évolué de manière satisfaisante entre 2012 et 2013.

Durant cette période, la part des paiements non classables n'a connu qu'une faible diminution (et a même augmenté dans certains départements, cf. ch. 3.2.3); en outre, la part des services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques, a fortement augmenté. Afin de pouvoir juger de manière détaillée de l'évolution de ces deux catégories40, la commission a étudié de plus près les données de la StatPA (grands fournisseurs41) pour les années 2012 et 2013.

40

41

462

Cette analyse a porté sur tous les fournisseurs représentant un total d'adjudications de plus de 100 000 francs (par année et par département). Ces fournisseurs représentent env. 65 % de tous les paiements enregistrés. Il est fort probable que de nombreux mandats de consultants politiques se situent au-dessous de cette limite.

Sur la base d'une comparaison entre les chiffres détaillés de 2012 et de 2013, chaque grand fournisseur a été classé dans l'une des treize catégories prises en considération (cf. tableau 3). A relever que cette analyse des données se situe toujours à un niveau synthétique, ce qui signifie que les circonstances de la catégorisation et son évolution n'ont pas pu être étudiées individuellement pour chaque grand fournisseur. Rappelons aussi que l'objet concret des contrats ne figure pas dans la StatPA et qu'il n'est donc pas possible de vérifier la pertinence du classement des contrats dans les différentes catégories de la StatPA. Les résultats doivent donc être compris comme représentant des tendances.

FF 2016

Tableau 3: Grands fournisseurs ­ Evolution de leur catégorisation dans la StatPA (2012­2013) Grands fournisseurs: Évolution de leur catégorisation dans la StatPA (2012-2013, Confédération dans son ensemble) Les fournisseurs représentant un total d'adjudications de plus de 100 000 francs (par année et par département) ont été pris en compte.

2012:

(en francs)

2013:

(en francs)

152 cas

Cat. 18.1

89 825 674

Cat. 18.1

85 723 827

203 cas

Cat. 18.1

68 978 568

Ne figure pas parmi les grands fournisseurs Cat. 18.1

146 240 992

7 cas

Cat. 18.1

9 204 021

Cat. 22.0

10 014 977

5 cas

Cat. 18.1

5 129 109

Simultanément cat. 18.1 et 22.0

7 211 338

42 cas

Cat. 22.0

23 153 421

Cat. 22.0

23 870 824

99 cas

Cat. 22.0

24 122 203

Ne figure pas parmi les grands fournisseurs

335 cas

Ne figure pas parmi les grands fournisseurs

Cat. 22.0

51 446 943

22 cas

Cat. 22.0

40 653 409

Cat. 18.1

46 929 112

2 cas

Cat. 22.0

1 295 030

Simultanément cat. 18.1 et 22.0

12 397 967

8 cas

Simultanément cat. 18.1 et 22.0

32 420 453

Ne figure pas parmi les grands fournisseurs

97 cas

16 cas 12 cas

Ne figure pas parmi les grands fournisseurs

Ne figure pas parmi les grands fournisseurs Simultanément cat. 18.1 et 22.0

11 193 523

GPK-S

Simultanément cat. 18.1 et 22.0

30 852 023

Cat. 18.1

9 169 739

Source: DFF / Analyse: CdG-E

Le tableau révèle les tendances suivantes:

42 43

­

L'augmentation constatée dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) entre 2012 et 2013 est due essentiellement à une forte croissance du nombre de nouveaux grands fournisseurs (335 cas pour à peu près 146 millions de francs)42. En d'autres termes, les «nouveaux» grands fournisseurs de services de conseil ont coûté beaucoup plus cher en 2013 que les grands fournisseurs «disparus» en 2012 (la différence est d'environ 77 millions de francs). Cette tendance existe dans tous les départements, à l'exception du DFJP et du DEFR43.

­

Les paiements aux grands fournisseurs «inchangés» de la catégorie 18.1 (152 cas) ont diminué dans presque tous les départements (réduction globale de 90 à 86 millions de francs).

­

En comparaison avec ces phénomènes, le transfert de grands fournisseurs de la catégorie 22.0 (Non classable dans une catégorie existante) dans la catéEnv. 2/3 de ces «nouveaux» grands fournisseurs (273 cas, pour env. 100 millions de francs) ne figuraient pas dans la liste des grands fournisseurs en 2009, 2010 et 2011.

Au DFAE, au DFI, au DETEC et au DDPS, la hausse est particulièrement marquée (plus de 10 millions de francs par département).

463

FF 2016

gorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) joue un rôle nettement moins important (22 cas pour env.

47 millions de francs, soit à peu près un tiers seulement de l'augmentation enregistrée dans la catégorie 18.1)44.

­

Relevons encore que sept grands fournisseurs ont été transférés en bloc en sens inverse, puisqu'on les retrouve dans la catégorie 22.0 en 2013.

Dans l'ensemble, les résultats de l'analyse révèlent que ­ contrairement à l'hypothèse du Conseil fédéral ­ l'amélioration de la précision statistique ayant permis le classement de mandats de prestation de services «non classables» jusqu'ici n'est très probablement pas la raison principale de la hausse massive des dépenses au titre des services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques (catégorie 18.1), enregistrée en 2013. L'augmentation est principalement due à l'adjudication de nombreux nouveaux mandats de conseil, respectivement de consultants politiques.

3.2.6

Evolution de la catégorie 18.1 de la StatPA en 2014

Les données statistiques se rapportant aux acquisitions pour l'année 2014 n'avaient pas encore été publiées au moment de la rédaction du présent rapport et n'ont donc pas été prises en compte dans l'analyse susmentionnée. Selon les premières informations obtenues au sujet de la StatPA 201445, on constate toutefois une nette diminution des paiements classés dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) puisqu'ils ne totalisaient plus que 245 millions de francs au lieu de 419 millions en 2013. Cette tendance semble indiquer que la politique des dépenses dans ce domaine a été plus restrictive. La CdG-E s'en réjouit.

3.3

Conclusions de la CdG-E et actions encore requises

La CdG-E constate que sa Recommandation 1 du 13 octobre 2006 n'a pas été mise en oeuvre de manière satisfaisante par le Conseil fédéral.

Comme elle l'a déjà souligné plus haut, la CdG-E est forcée de conclure que, durant les neuf dernières années, le Conseil fédéral ne s'est guère soucié de sa volonté de transparence sur les mandats de consultants politiques externes. Dans la Statistique des paiements liés aux achats de la Confédération (StatPA), les mandats de consultants politiques sont classés dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux) avec les autres services de conseil ne pouvant pas être affectés à une autre catégorie

44 45

464

Pour la période de 2012 à 2013, il s'est en outre révélé que ce type de transferts ne concernait que deux départements (DETEC et DDPS).

Données classées par départements relatives aux paiements de l'administration fédérale effectués pour des acquisitions de la catégorie 18 Services durant la période d'analyse du 1.1.2014 au 31.12.2014, DFF, 11.8.2015.

FF 2016

de services46. On ne connaît donc toujours pas le montant effectif des dépenses engagées au titre des mandats de conseil politique.

Dans son rapport du 8 octobre 2014 à la CdG-E, le Conseil fédéral admet que «la subdivision actuelle de la catégorie d'acquisitions Services n'est pas assez détaillée», en particulier la catégorie 18.1. Il se dit disposé à faire étudier, «par exemple, si une sous-catégorie spécifique doit être créée pour les mandats de consultants politiques, les expertises ou la recherche sous contrat». Selon les informations fournies par la cheffe du DFF, cet affinement de l'affectation devrait être opérationnel au 1er janvier 2016.

Bien que saluant les efforts du Conseil fédéral visant à faire figurer les mandats attribués aux consultants politiques dans une catégorie séparée dans la statistique, la CdG-E estime que cette mesure aurait déjà dû être mise en oeuvre il y a longtemps, au plus tard lors de la mise en place de la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA) en 2009. La CdG-E est forcée de constater que les efforts du Conseil fédéral n'ont permis d'atteindre l'objectif fixé que dans une mesure très limitée. Elle attend dès lors du Conseil fédéral que sa requête soit maintenant satisfaite sans délai.

L'analyse circonstanciée des données de la StatPA tend en outre à indiquer que le Conseil fédéral a présenté l'évolution des services de conseil généraux (y compris mandats de consultants politiques) sous un jour plus favorable qu'elle ne le méritait en réalité. Le soi-disant «transfert» de la catégorie 22.0 vers la catégorie 18.1 n'a eu lieu que dans une mesure très limitée et ne saurait être invoqué comme raison principale de la forte augmentation des paiements pour services de conseil généraux, respectivement pour mandats de consultants politiques (ch. 3.2.2, 3.2.3 et 3.2.5).

L'enquête tend à indiquer que des nouveaux mandats pour services de conseil généraux, respectivement de conseil politique, ont été adjugés en très grand nombre, en particulier entre 2012 et 2013 (ch. 3.2.5).

La CdG-E s'inquiète de l'évolution du nombre des mandats attribués à des consultants politiques. Dans son évaluation de 2006, le CPA avait établi que les paiements effectués au titre de mandats de conseil politique avaient totalisé quelque 144 millions de francs en
2004. Selon la StatPA, les services de conseil généraux (y compris mandats de consultants politiques) sont passés de 129 à 419 millions de francs entre 2009 et 2013. Rappelons ­ la présente analyse l'a démontré ­ que seule une petite partie de cette augmentation s'explique par une amélioration de la précision statistique. Même si la pertinence de la comparaison entre l'évaluation du CPA et la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions est limitée, puisque la base de données n'est pas la même dans les deux cas, il est indéniable que les dépenses au titre des mandats de conseil politique ont augmenté jusqu'en 2013 sans que cette évolution soit accompagnée de la transparence requise. L'évolution récente des dépenses dans la catégorie 18.1 (Services de conseil généraux, y compris mandats de consultants politiques) indique toutefois une amélioration dans ce domaine pour 2014 (ch. 3.2.6). Cette tendance devra toutefois être confirmée à plus long terme.

46

Cf. note 28 ci-devant

465

FF 2016

La CdG-E attend en outre du Conseil fédéral qu'il prenne des mesures permettant d'instaurer une réglementation et une motivation plus strictes des paiements aux consultants politiques. D'un point de vue démocratique, il serait souhaitable que non seulement la transparence, mais aussi l'opportunité des mandats de conseil politique soient garanties.

Finalement, la CdG-E estime que les dépenses dues aux mandats de conseil politique doivent être stabilisées à un niveau modeste à moyen terme.

Recommandation 4

Améliorer la transparence, la réglementation et la justification des mandats de consultants politiques

1.

Le Conseil fédéral crée une catégorie spéciale au sein de la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA) pour les acquisitions, les expertises et la recherche sur mandat relatives à des questions politiques. Il envisage des mesures complémentaires destinées à améliorer la transparence des mandats attribués à des consultants politiques.

2.

Le Conseil fédéral propose une définition claire de ce qu'il entend par «relatif à des questions politiques» et s'assure que la catégorisation des mandats d'experts se fera bien en fonction de cette définition.

3.

Le Conseil fédéral veille à ce que l'adjudication de mandats à des consultants politiques soit réglementée de manière appropriée et doive être dûment motivée.

4.

Le Conseil fédéral veille à ce que la somme des dépenses consenties pour la rémunération de consultants politiques externes se stabilise à un niveau modeste à moyen terme.

La CdG-E s'inquiète aussi de l'évolution récente de la catégorie 22.0: après un recul bienvenu depuis 2009, les paiements non classables dans une catégorie existante ont recommencé à augmenter dans quatre départements et à la Chancellerie fédérale entre 2012 et 2013. Dans certains cas, cette augmentation a même été considérable (ch. 3.2.3). Cette évolution va à l'encontre de la volonté du Conseil fédéral et de la CdG-E d'améliorer la transparence des paiements en encourageant une affectation plus précise des fournisseurs dans la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA). La CdG demande donc au Conseil fédéral de prendre les mesures nécessaires pour obtenir une réduction proportionnelle de la catégorie 22.0 dans tous les départements.

466

FF 2016

Recommandation 5

Affiner le classement des paiements dans la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions

Le Conseil fédéral prend les mesures nécessaires à l'amélioration de la qualité du classement des paiements dans la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA).

1.

Il s'efforce de réduire durablement et notablement le nombre des paiements «non classables dans une catégorie existante» (cat. 22.0).

2.

Une fois classé dans une catégorie, chaque fournisseur doit ensuite continuer d'être classé dans la même catégorie pour la même prestation.

Par ailleurs, la présente analyse a montré que les données provenant de la StatPA ne permettaient pas de juger du contenu des mandats et contrats répertoriés. Comme les prestations d'un fournisseur peuvent varier d'une année à l'autre, le simple nom de l'entreprise ne permet pas de juger de la pertinence de la classification et n'est pas une base suffisante pour une analyse approfondie des dépenses. La CdG-E espère donc que l'introduction d'un système de gestion des contrats à l'échelle de la Confédération permettra d'améliorer la situation (voir ch. suivant).

4

Introduction de la gestion des contrats de l'administration fédérale et mise en oeuvre de la motion «Introduction urgente de mesures aptes à garantir la surveillance de l'adjudication de mandats par la Confédération»

4.1

Contexte

Dans le cadre du controlling des acquisitions de la Confédération, la mise en place de la Statistique des paiements effectués pour des acquisitions (StatPA) a été complétée en 2009/2010 par la Gestion des contrats de la Confédération (GCo Adm.féd.), créée dans un souci d'harmonisation de l'administration des contrats. Cet outil informatique devait permettre d'enregistrer tous les contrats conclus par l'administration fédérale, de les documenter et de les doter de paramètres d'analyse donnant la possibilité de procéder à un contrôle de gestion complet47.

L'exploitation et l'entretien du système sont coordonnés par l'OFCL.

47

L'objet et le contenu de la GCo Adm.féd. sont spécifiés à l'art. 6 de l'Org-OMP: tous les contrats doivent figurer dans le système de GCo Adm.féd. avec leur date, le type de procédure d'adjudication, le nom du partenaire contractuel, la catégorie dont relève l'acquisition selon la classification CPV (Vocabulaire commun pour les marchés publics de l'UE) et la valeur du contrat. Dans le cas des marchés d'une valeur supérieure au seuil déterminant, doivent également être indiqués dans le système l'objet du marché ainsi que les informations concernant la publication sur la plate-forme électronique d'appel d'offres publiques simap.ch.

467

FF 2016

L'introduction de cet instrument dans l'administration fédérale n'a pas été rendue obligatoire dès le départ. Dans un premier temps, 35 unités administratives ont adhéré au programme.

Avec l'entrée en vigueur de l'Org-OMP au 1er janvier 2013, l'introduction de la GCo Adm.féd. est devenue obligatoire pour toutes les unités administratives de la Confédération. A la suite des événements survenus au SECO, à la CdC et à l'OFROU au début de 2014 (cf. ch. 5), la CdG-E a pourtant constaté que la gestion des contrats n'avait pas encore été introduite avec la rigueur requise. Les deux CdG ont donc déposé deux motions identiques48 chargeant le Conseil fédéral d'introduire la GCo Adm.féd. dans l'ensemble de l'administration fédérale d'ici au 1er janvier 2015 afin de permettre «des analyses ciblées des contrats passés avec des sociétés externes». Contre la volonté du Conseil fédéral, les Chambres fédérales ont adopté les deux motions à une nette majorité en juin 201449.

Dans le cadre du deuxième contrôle de suivi portant sur l'inspection «Recours à des experts par l'administration fédérale», la CdG-E a recueilli des informations sur l'état de réalisation des motions ainsi que sur les expériences faites dans les départements avec le système de GCo Adm.féd. Ces questions ont été abordées notamment dans le rapport du Conseil fédéral du 8 octobre 2014 ainsi que dans le courrier complémentaire du 30 janvier 2015 rédigé par la cheffe du DFF. Quatre membres du Groupe de travail interdépartemental Controlling des achats de la Confédération (GTI CA), le directeur et le vice-directeur de l'OFCL ainsi que la cheffe et le secrétaire général suppléant du DFF ont également été entendus à ce sujet50. Finalement, la CdG-E a encore envoyé aux départements et à la Chancellerie fédérale une liste de questions complémentaires portant sur le controlling des acquisitions et sur l'introduction du système de GCo Adm.féd.51. Les synthèses qui suivent ­ d'une part, sur l'avancement de l'introduction de la GCo Adm.féd. dans l'administration fédérale et, d'autre part, sur les premiers retours des départements ­ reposent sur ces sources.

4.2

Etat de l'introduction de la gestion des contrats dans l'administration fédérale

Selon la décision du Parlement de juin 2014 (motions CdG 14.3289 et 14.3018), le système de gestion des contrats aurait dû être opérationnel dans toutes les unités administratives de la Confédération au 1er janvier 2015. La CdG-E se réjouit de constater que cette exigence a été satisfaite dans pratiquement toutes les entités de l'administration fédérale. Dans la plupart des départements, un enregistrement systématique de toutes les données utiles a été possible dès 2015. La première analyse

48

49 50 51

468

Motion CdG-N du 28.2.2014 (14.3018) et motion CdG-E du 25.3.2014 (14.3289), «Introduction urgente de mesures aptes à garantir la surveillance de l'adjudication de mandats par la Confédération» BO 2014 N 893-894 et BO 2014 E 606-607 La liste des personnes entendues se trouve à l'Annexe 1.

Lettres aux Secrétariats généraux et à la Chancellerie fédérale du 28.5.2015

FF 2016

complète peut être attendue au printemps 2016. Les quelques exceptions qui subsistent devraient disparaître au cours des prochains mois: ­

Au DFAE, l'outil informatique GCo Adm.féd. n'a pas encore été introduit.

Depuis 2001, le département dispose de son propre instrument de gestion des contrats (ESPRIT). Grâce à une interface manuelle avec la GCo Adm.féd., une analyse informatique des données du DFAE est toutefois possible depuis le début de 2015. L'introduction de l'outil GCo Adm.féd. est prévue entre la fin de 2015 (unités centralisées et représentations suisses à l'étranger) et la fin de 2017 (entités décentralisées)52.

­

Au DETEC, les contrats de l'OFROU sont administrés dans un système à part (TDcost), qui sera intégré au système GCo Adm.féd. d'ici 2018.

­

Au DDPS, la Pharmacie de l'Armée, les Forces aériennes et armasuisse Immobilier ne sont pas encore entièrement intégrées au système, mais devraient l'être dans le courant de l'année 2015. Le département rapporte en outre certains problèmes techniques pour ce qui est de l'application de l'outil dans le domaine informatique. Des solutions provisoires ont toutefois été trouvées, qui seront remplacées au début de 2016.

­

Au DEFR, le SECO et Agroscope introduiront l'outil de gestion des contrats (sous la forme d'une «gestion des adjudications», cf. ch. 4.5) d'ici à la fin de 2015.

­

Selon les renseignements fournis par la cheffe du DFF, la procédure d'introduction de la GCo Adm.féd. n'a pas encore pu être achevée dans les unités administratives suivantes: Fonds de l'assurance-chômage, Ministère public de la Confédération et Autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération, Tribunal fédéral, Tribunal pénal fédéral, Tribunal administratif fédéral, Tribunal fédéral des brevets, Fonds d'infrastructure ferroviaire et Fonds d'infrastructure.

En résumé, le système GCo Adm.féd. est donc opérationnel dans la plupart des unités de l'administration; dans les autres, sa mise en place est en bonne voie.

Le coût de l'introduction varie d'un département à l'autre, car certaines unités administratives ont dû procéder à des ajustements spécifiques du système (solutions dites «personnalisées»). Il se situe entre 70 000 francs (Chancellerie fédérale) et 2,2 millions de francs (DDPS)53.

52

53

Dans ses réponses à la CdG-E, le DFAE a critiqué le remplacement d'ESPRIT par l'outil informatique de gestion des contrats, dans lequel certaines fonctions-clés manqueraient (désignation des parties contractantes, connexion avec d'autres instruments et systèmes, décompte des honoraires perçus etc.). Selon le DFAE, la mise en place d'une version personnalisée du système GCo Adm.féd. ayant les mêmes fonctionnalités qu'ESPRIT coûterait plus de 2,6 millions de francs.

ChF env. 72 000 CHF; DFAE env. 200 000 Deutsche Mark (acquisition d'ESPRIT en 2001); DFI env. 833 000 CHF; DFF env. 1 044 000 CHF; DFJP env. 603 000 CHF; DETEC env. 650 000 CHF; DDPS env. 2 208 000 CHF; DEFR env. 1 400 000 CHF.

469

FF 2016

4.3

Gestion des contrats de l'administration fédérale: pratique actuelle

4.3.1

Montant minimum pour l'enregistrement des contrats

Conformément à la réglementation s'appliquant uniformément à l'ensemble de la Confédération54, doivent être enregistrés dans le système GCo Adm.féd. tous les contrats d'un montant d'au moins 5 000 francs. Selon les informations obtenues des départements, ce seuil est respecté presque partout. Certaines unités ont même établi des règles plus strictes, usant de leur liberté d'enregistrer aussi des contrats d'un montant inférieur55.

La CdG-E a pourtant aussi constaté l'existence de dérogations spécifiques au montant minimum officiel: au DFAE, les notes d'hôtel, de restaurant, de traiteur et de taxi ainsi que les cotisations de membres et les abonnements, par exemple, ne sont enregistrés qu'à partir de 10 000 francs. La Commission fédérale des maisons de jeu (DFJP) et le Secrétariat d'Etat aux migrations (DFJP), pour leur part, renoncent complètement à l'enregistrement des factures de fournisseurs centraux (CFF, AirPlus, etc.). Quant au Centre de services informatiques CSI-DFJP, il n'enregistre pas les contrats dans les domaines de la formation et de la logistique.

De l'avis de la CdG-E, ce type de dérogations fait obstacle à une application uniforme des normes fixées et affaiblit donc la valeur des analyses faites sur la base des données contenues dans le système.

4.3.2

Qualité des données enregistrées

La plupart des départements se disent satisfaits de la qualité des données figurant dans le système GCo Adm.féd. Selon différents échos obtenus, cette qualité a pu être continuellement accrue. Il a été constaté de manière répétée que l'introduction de champs obligatoires dans l'outil de gestion des contrats a permis d'améliorer l'enregistrement des données. Grâce à l'intégration totale de l'instrument dans les systèmes SAP, les données peuvent être examinées et évaluées sans délai avec la promesse de bons résultats.

Plusieurs départements déplorent cependant encore l'absence de règles d'enregistrement généralement valables pour l'ensemble des services de la Confédération.

Comme les contrats sont le plus souvent enregistrés de manière décentralisée dans 54 55

470

Décision du comité de coordination GCo Adm.féd. (CC) et de la commission d'exploitation de l'OFCL (Cex GCo Adm.féd.)

ChF, DFAE, DFF (engagements contractuels réguliers portant sur de petits montants dépensés pour des acquisitions identiques). A l'avenir, le DDPS souhaite enregistrer tous les contrats de plus de 500 CHF. L'option d'un enregistrement généralisé de tous les paiements (y compris ceux de moins de 5 000 CHF) est considérée d'un oeil critique par le DFJP, qui estime qu'il ne faut pas perdre de vue l'aspect économique.

Selon lui, il importe de définir clairement les acquisitions devant être enregistrées et le but poursuivi avec la GCo Adm.féd. De l'avis du DFJP, il est nécessaire de se concentrer sur l'adjudication correcte des acquisitions d'importance moyenne ou grande.

FF 2016

les unités administratives, on ne peut pas exclure un certain risque de différences qualitatives entre les données des départements. La CdG-E estime donc qu'une harmonisation des règles est nécessaire à l'échelle de la Confédération si l'on veut pouvoir garantir que les chiffres sont bien comparables.

Différents départements ont aussi relevé que les sources dont proviennent les données alimentant les instruments de controlling des acquisitions de la Confédération (avant tout la GCo Adm.féd. et la StatPA) pourraient être mieux coordonnées afin d'éviter les redondances dans l'enregistrement des contrats56.

4.3.3

Documentation et règlements

La CdG-E a demandé aux départements de lui fournir toutes les informations utiles sur les règlements, directives, procédures ainsi que sur tous les autres documents en vigueur se rapportant aux marchés publics. Elle a pu constater avec satisfaction que l'administration fédérale avait manifestement entrepris récemment de gros efforts sur ce point.

La plupart des départements possèdent déjà ou sont en train de préparer des directives, manuels ou lignes de conduite se rapportant aux acquisitions. Les compétences et les droits de signature en la matière ont souvent été réglés. De nombreux départements ont aussi mis en place des procédures spécifiques avec des descriptions détaillées des acquisitions. Un grand nombre de règlements et de documents spécifiques sont en outre prévus dans les différentes unités administratives (par ex. rapport de pilotage de la Direction du développement et de la coopération [DDC], demande d'acquisition de l'OFROU, etc.).

Au titre des instruments de rapport et de contrôle de gestion, les départements ont à leur disposition non seulement la procédure de controlling annuelle «classique»57, mais aussi des documents et des procédures qui leur sont souvent propres58. Le traitement réservé aux acquisitions dans le cadre des grands projets TIC varie d'un département à l'autre59.

56 57

58

59

A ce sujet, voir aussi le rapport du CDF du 17.4.2015 relatif à la gestion des contrats de la Confédération.

Controlling annuel des acquisitions à l'intention du GTI CA, de la Conférence des secrétaires généraux et du Conseil fédéral ainsi que liste annuelle des adjudications de gré à gré dépassant la valeur seuil à l'intention de la DélFin.

Des systèmes de controlling spécifiques ont notamment été introduits au DFI et au DETEC ainsi qu'à la ChF. Au DDPS, le contrôle de la gestion des projets est échelonné sur les différents niveaux du département, alors que le contrôle de la gestion des projets stratégiques est assuré par le chef du département. Le DFF est en train de mettre en place une «organisation de controlling propre au département» et le DEFR tient une liste de tous les contrats conclus par le département et annonce le développement de nouvelles analyses qui lui sont spécifiques avant la fin de 2015.

Le DFI, le DETEC et la Chancellerie fédérale ont soumis les acquisitions faisant partie de grands projets TIC à des règles spécifiques. Au DEFR et au DETEC, les projets TIC sont traités séparément au moyen d'un Cockpit-TIC. Les autres départements s'en tiennent aux instruments de la Confédération (LMP et OMP, HERMES) ou aux directives départementales générales relatives aux acquisitions.

471

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Pour ce qui est de la documentation des acquisitions, la CdG-E déplore un certain manque de cohérence entre les départements. Comme chaque département est libre de compléter les prescriptions de l'OFCL par ses propres directives, procédures ou règlements, les documents diffèrent fortement d'un département à l'autre: les départements ont développé de nombreuses spécificités, qui sont autant d'obstacles rendant la vue d'ensemble et la comparaison entre eux très difficiles. En l'état, la CdGE n'est donc pas en mesure de juger si les réglementations actuelles sont suffisantes.

4.3.4

Responsabilités et ressources

Les responsabilités et les ressources sont également des questions auxquelles chaque département a apporté sa propre réponse. Tous les départements (à l'exception de la Chancellerie fédérale) possèdent un service de coordination sous la forme d'un centre de compétence, d'un organisme de gestion des contrats ou d'un chargé de compliance.

Le nombre des postes mis à disposition ainsi que la configuration des responsabilités varient cependant fortement d'un département à l'autre. Généralement, le nombre de postes prévus pour la coordination et le pilotage de la GCo Adm.féd. se situe entre un et trois. Certains départements ont créé un poste par office afin d'assurer le suivi de la gestion des contrats. Selon les départements, le service juridique ou le service financier est également impliqué dans le processus.

Dans la plupart des départements, la gestion des contrats n'a pas, jusqu'ici, grevé trop lourdement les ressources (personnel et finances), puisque les nouveaux postes ont pu être créés par des compensations internes. Le DFF, le DFJP et le DDPS expriment toutefois certaines craintes face à la charge de travail supplémentaire. La plupart des personnes entendues sont cependant convaincues qu'en fin de compte, la GCo Adm.féd. permettra certaines économies au niveau des ressources en personnel.

Si la GCo Adm.féd. devait continuer d'être développée (par ex. gestion des adjudications, cf. ch. 4.5), les ressources en personnel pourraient finir par poser problème.

Le DFF estime que l'OFCL ne pourra pas fournir davantage de prestations transversales sans ressources supplémentaires. Partageant cet avis, le DFJP considère que, suivant l'évolution de la gestion des contrats et du controlling des acquisitions, des ressources supplémentaires seront indispensables dans le domaine du personnel et qu'il est donc important de faire preuve de modération lors de la définition des données devant être enregistrées dans le système.

4.3.5

Formation et perfectionnement

La plupart des départements de même que la Chancellerie fédérale renvoient aux formations proposées par le centre de compétence des marchés publics (CCMP), qui offre toute une gamme de cours de perfectionnement. Selon le DFF, l'offre du CCMP en jours de formation, comme le nombre de participants aux formations proposées, ont doublé entre 2010 et 2013.

472

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Différentes formations spécialisées sont aussi organisées en interne par les départements, notamment par le DFAE (Centre de compétence en contrats et marchés publics), par le DEFR (chargé de compliance) ou par l'OFROU (service juridique et service des finances). Selon les informations fournies par certains départements, le sujet des «acquisitions» serait aussi traité dans le cadre de séminaires ou de séances d'information internes.

Si la CdG-E se réjouit du succès rencontré par les formations du CCMP, elle tient aussi à relever que des différences subsistent entre les départements. Elle est persuadée qu'une sensibilisation optimale des collaborateurs et des cadres de l'administration fédérale ne sera pas possible tant que les règles en matière de formation ne seront pas les mêmes dans tous les départements.

4.3.6

Actions encore requises

Se fondant sur les informations fournies par les départements, la CdG-E constate que la pratique de l'administration fédérale se rapportant à la GCo Adm.féd. va dans le sens voulu, même si toutes les difficultés initiales n'ont pas encore pu être surmontées. Il est normal que les unités administratives aient besoin d'un temps d'adaptation avant d'atteindre le régime de croisière, qui permettra finalement de réaliser les économies de personnel mises en perspective.

Selon la CdG-E, les problèmes actuels sont essentiellement dus au fait que chaque département a mis en pratique la GCo Adm.féd. de manière plus ou moins individualisée, que ce soit en ce qui concerne la documentation, les procédures, l'enregistrement des données ou l'organisation du personnel ainsi que ­ dans une moindre mesure ­ la formation. Par souci de cohérence et d'efficacité, la CdG-E est favorable à une harmonisation et à une consolidation des règles de gestion des contrats à l'échelle de la Confédération. Elle estime que les efforts d'échange d'expériences et d'harmonisation des procédures existant déjà tant à l'intérieur des départements qu'entre les départements (commission d'exploitation, comité de coordination générale) doivent être renforcés de manière ciblée.

La CdG-E prend acte du fait qu'un projet d'harmonisation, de standardisation et d'instrumentalisation des procédures d'acquisition à l'échelle de la Confédération est actuellement à l'étude à l'OFCL. Cet effort d'harmonisation est soutenu par plusieurs départements. La CdG-E recommande au Conseil fédéral d'accorder toute son attention aux questions de montant minimum, d'enregistrement des données, de documentation, de ressources en personnel et de formation évoquées plus haut ainsi que d'encourager activement le principe de best practice.

473

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Recommandation 6

Harmoniser les règles et la pratique de la gestion des contrats à l'échelle de la Confédération

Le Conseil fédéral veille à ce que, dans tous les services de la Confédération, l'administration des acquisitions (gestion des contrats, GCo Adm.féd.) réponde à des normes harmonisées et standardisées et que ces dernières soient assorties des instruments nécessaires.

Dans le cadre de cet effort d'harmonisation, il accorde une attention particulière aux points suivants: montant minimum pour l'enregistrement des contrats, critères d'enregistrement des données, documentation requise, ressources en personnel et formation.

4.4

Gestion des contrats de l'administration fédérale: bilan dans l'optique des départements et de la Chancellerie fédérale

Dans le contexte du présent contrôle de suivi, les départements et la Chancellerie fédérale ont estimé que la gestion des contrats présentait les avantages suivants: ­

les contrats sont enregistrés de manière centralisée, uniforme et structurée au niveau fédéral; cela permet d'avoir un bon aperçu général de tous les contrats;

­

transparence: le système permet de consulter les documents, de suivre les adjudications et de les analyser; l'enregistrement, l'administration et l'analyse systématiques des contrats garantissent la sécurité juridique;

­

simplicité et cohérence de l'analyse; possibilité de choisir le niveau d'analyse et donc d'obtenir des résultats pertinents; l'uniformité des rapports est garantie à tous les niveaux;

­

réduction des frais de controlling des acquisitions; optimisation des frais de licence et de maintenance;

­

meilleure exploitation des contrats; possibilité de reconnaître le potentiel de regroupement et d'en tirer parti;

­

système simple et rapide, qui est compréhensible aussi pour les nonspécialistes, mais qui peut malgré tout être adapté aux cas spéciaux;

­

le système oblige l'utilisateur à réglementer clairement les responsabilités et les compétences et contraint les responsables à rendre des comptes; il permet une meilleure sensibilisation des cadres;

­

amélioration sensible du controlling des acquisitions: multiplication des motivations écrites étayées par des arguments juridiques, réduction considérable des adjudications de gré à gré.

Au chapitre des inconvénients de la gestion des contrats, ils ont évoqué les points suivants: 474

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­

lenteur du système; redondance de l'enregistrement des données dans différents instruments; les données contenues dans simap ne peuvent pas être transférées et exploitées automatiquement;

­

l'enregistrement des données prend beaucoup de temps; il augmente la bureaucratie et les besoins en personnel; la maintenance du système est fastidieuse;

­

les fonctionnalités du système sont limitées en comparaison avec ESPRIT (DFAE)60;

­

la GCo Adm.féd. n'offre qu'une vision rétroactive; l'outil est axé sur la transparence, mais ne se prête pas à un contrôle préventif; il ne permet pas de garantir une conformité absolue de la politique d'adjudication avec la LMP et l'OMP61.

Selon les départements et la Chancellerie fédérale, le système pourrait encore être optimisé grâce aux mesures suivantes: ­

amélioration du confort d'utilisation (convivialité, rapidité, synergies);

­

suppression des redondances dans l'enregistrement des données dans les différents outils de controlling; amélioration de la synchronisation avec la StatPA ainsi que de la coordination entre GEVER et SAP;

­

éclaircissement des règles d'acquisition en rapport avec les contrats-cadres de l'administration fédérale (CFF, La Poste, AirPlus etc.);

­

multiplication des efforts d'harmonisation des procédures d'acquisition entre les départements (requête déjà traitée par l'OFCL, cf. ch. 4.3.6 et Recommandation 6).

4.5

Mise en place d'un système de gestion des adjudications

Certains départements sont d'avis que la gestion des contrats ne suffit pas à contrôler la procédure d'adjudication dans sa totalité, étant donné que cet outil ne permet qu'une analyse rétroactive et ne peut donc pas être à l'origine d'une intervention préventive. Soucieux de combler cette lacune, le DEFR a décidé de saisir l'occasion de l'introduction de la GCo Adm.féd. pour se doter aussi d'un outil de gestion des adjudications. Cet instrument est opérationnel dans presque toutes les unités administratives du département depuis le 1er janvier 2015. Selon le DFF, ce système doit permettre la couverture du processus d'acquisition dans son intégralité, soit non seulement l'administration des contrats, mais aussi les phases antérieures telles que l'évaluation du besoin et des offres ainsi que l'adjudication du marché.

60

61

Depuis 2001, le DFAE dispose d'ESPRIT, un système qui lui est propre et qui remplit différentes fonctions. Il est prévu que cet outil soit remplacé par la GCo Adm.féd. d'ici à la fin de 2017 (cf. ch. 4.2).

Partant de ce constat, différents départements ont proposé de faire évoluer le système en un outil de gestion des adjudications (cf. ch. 4.5).

475

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Les réactions des départements à la mise en place de cet outil additionnel divergent.

Si le DFF salue en principe l'objectif poursuivi, le DFI et le DETEC ont mis en attente les demandes d'introduction d'un système de gestion des adjudications, car ils préfèrent attendre que le projet d'harmonisation des procédures d'acquisition au niveau de la Confédération, préparé à l'OFCL (ch. 4.3.6), ait été mis en oeuvre.

Le DFAE, le DDPS et la Chancellerie fédérale ont accueilli avec une certaine réserve l'idée de faire évoluer la gestion des contrats en une gestion des adjudications: le DFAE suit le processus et le considère «en principe positif», mais souhaite que ses besoins spécifiques soient pris en compte. Pour le DDPS, une gestion des adjudications ferait double emploi avec les procédures d'acquisition en place chez armasuisse, mais serait utile dans d'autres entités. Quant à la Chancellerie fédérale, elle ne compte que peu d'acquisitions et se pose donc la question du rapport coût/utilité d'une telle introduction.

Le DFJP, finalement, accueille la perspective d'une introduction généralisée de cet instrument avec un certain scepticisme, estimant qu'elle serait trop coûteuse en ressources humaines pour les petites unités administratives. Le département estime qu'il serait préférable de renoncer à la mise en place de nouveaux instruments pour mettre l'accent sur une consolidation du statu quo.

L'échange d'informations relatives à cet outil a lieu dans le cadre du Comité de coordination global de la Confédération. Cet organisme, dans lequel sont représentés tous les départements, assure la coordination des besoins et des activités en matière de gestion des contrats à l'échelle de la Confédération. Dans ce cadre, le DEFR rend compte régulièrement de l'introduction de la gestion des adjudications ainsi que de la pratique dans ce domaine.

De l'avis de la CdG-E, la gestion des adjudications est une façon judicieuse de perfectionner la GCo Adm.féd. Cet outil permet en effet d'accompagner toutes les étapes du processus d'acquisition et de mettre au jour les irrégularités, voire de les prévenir. Il reste cependant à déterminer s'il est bien nécessaire d'introduire cet instrument dans toutes les unités administratives de la Confédération compte tenu des heures de travail qui seraient nécessaires et donc du
personnel qui devrait être mobilisé à cet effet. Il ressort des réactions des départements que les ressources en personnel dans le domaine du controlling des acquisitions atteignent aujourd'hui déjà leurs limites (cf. ch. 4.3.4). En conséquence, la CdG-E estime qu'il est judicieux de commencer par mener à bien l'effort d'harmonisation des procédures d'acquisition entamé par l'OFCL avant de passer à l'étape de l'introduction d'un outil de gestion des adjudications. La CdG-E est en effet d'avis qu'un tel développement ne doit être envisagé que sur la base de procédures d'acquisition normalisées dans l'ensemble de l'administration fédérale et dans le cadre de la solution standard qui pourrait en résulter.

5

Problèmes particuliers dans le domaine des marchés publics: enseignements pour l'avenir

La CdG-E a décidé d'inclure dans son deuxième contrôle de suivi sur le recours à des experts par l'administration fédérale les derniers incidents relevés en rapport 476

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avec les marchés publics (affaire de corruption au SECO, affaire OFROU et affaire CdC62) pour les examiner sous l'angle des failles subsistant dans le système d'acquisitions. Dans ce contexte, elle s'est intéressée plus spécifiquement à l'aspect de l'efficacité des instruments de controlling et de surveillance. Les conclusions tirées de l'analyse de ces incidents visent à améliorer les instruments de contrôle.

Voici un bref résumé des événements en cause au SECO et à l'OFROU:

5.1

Affaire de corruption au SECO

A la mi-janvier 2014, des soupçons d'irrégularités dans l'adjudication de mandats par le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) ont fait les titres de différents médias63. Selon un document interne à l'administration, le SECO aurait, entre 2009 et 2011, attribué sans appel d'offres des mandats dont le montant (d'environ 34 millions de francs au total) dépassait la valeur seuil fixée par l'OMC pour les adjudications de gré à gré. Ces mandats avaient pour objet le système informatique de l'organe de compensation de l'assurance-chômage.

Le 27 janvier 2014, le DEFR a décidé d'ouvrir une enquête administrative sur cette affaire. C'est le professeur Urs Saxer de Zurich qui a été chargé de la diriger64. Une task force départementale a en outre été constituée pour coordonner les activités d'enquête et mettre en oeuvre les recommandations qui devaient en résulter. En réponse à la parution d'articles de presse faisant état de soupçons concrets de corruption le 30 janvier 201465, le SECO a déposé une plainte pénale auprès du Ministère public de la Confédération. Le collaborateur indélicat a été identifié et suspendu. Au début du mois de février 2014, le suppléant du chef de la Direction du travail au SECO, qui était aussi le supérieur direct du chef de secteur mis en cause, a démissionné pour des raisons de santé66. En sa qualité de centrale d'achat de l'administration fédérale, l'OFCL a en outre réagi en révoquant sa délégation de compétences au SECO pour les acquisitions destinées à l'organe de compensation de l'assurancechômage.

62

63

64 65 66

Dans un échange de lettres avec la DélFin portant sur la coordination de la haute surveillance qu'elle exerce actuellement sur les acquisitions de la Confédération, la CdG-E a convenu de laisser à la Commission des finances du Conseil national (CdF-N) le soin de se pencher sur l'affaire CdC (lettre de la DélFin du 17.12.2014; lettre de la CdG-E du 24.3.2015). En conséquence, la CdG-E renonce à traiter cette affaire dans le cadre du présent rapport.

«Das Seco vergab Millionenaufträge unter der Hand» (trad.: Le SECO a attribué en sous main des mandats pour une valeur de plusieurs millions de francs), Tages-Anzeiger, 15.1.2014 «Le conseiller fédéral Schneider-Ammann charge le professeur Saxer de l'enquête administrative au SECO», communiqué de presse du DEFR du 7.2.2014 «Im Seco laufen seit Jahren mutmasslich korrupte Geschäfte» (trad.: Corruption au SECO: les pratiques suspectes durent depuis des années), Tages-Anzeiger, 30.1.2014 «Kadermann verlässt das SECO» (trad.: Un cadre quitte le SECO), Neue Zürcher Zeitung, 13.2.2014

477

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En août 2014, le DEFR a publié les résultats de l'enquête administrative menée par le professeur Saxer67. Dans son rapport, celui-ci conclut que le chef de secteur a profité de sa position pour obtenir de fournisseurs informatiques des avantages personnels d'une valeur substantielle. En plus d'avoir reçu directement des sommes d'argent, le chef de secteur a présenté aux fournisseurs informatiques des factures pour diverses prestations, que les entreprises mettaient ensuite en compte au SECO sous la forme d'heures de travail fictives. Le chef de secteur a bénéficié de prestations de nature très variée: équipements électroniques, billets pour des concerts ou des manifestations sportives, contributions (p. ex. nouveaux uniformes) à la société de musique à laquelle il appartenait et bien d'autres choses encore. Il est bien précisé dans le rapport que toute la lumière sur les événements serait faite dans le cadre de l'instruction pénale et que le principe de la présomption d'innocence continuait donc de s'appliquer jusque-là. La procédure pénale engagée contre l'ancien chef de secteur ­ il a été congédié en mars 2014 ­ ainsi que contre des responsables des entreprises informatiques impliquées est toujours en cours au MPC.

Le professeur Saxer a en outre constaté, dans l'ensemble, des infractions multiples et notables aux dispositions applicables du droit fédéral sur les marchés publics et aux directives internes qui s'y rapportent. Entre 2006 et 2012, notamment, aucun appel d'offres n'a ainsi été publié, alors qu'une publication aurait été obligatoire. Même l'obligation de publier les adjudications de gré à gré sur la plate-forme électronique d'appel d'offres publiques simap n'a pas été respectée, en dépit de rappels à l'ordre répétés. Selon les résultats de l'enquête, le chef de secteur en cause a aussi contrevenu aux procédures internes, notamment en négligeant de requérir les signatures nécessaires.

Toujours selon les résultats de l'enquête, ce ne sont pas l'organisation des procédures d'acquisition ou les directives internes en vigueur à l'époque qui étaient directement responsables des dysfonctionnements constatés, mais le comportement du chef de secteur, qui ne les a pas respectées. La structure complexe de l'exécution dans le domaine de l'assurance-chômage et le flou qui entoure le rôle de la
Commission de surveillance du fonds de compensation, mais aussi les défaillances dans la surveillance exercée par la hiérarchie ­ en rapport avec les problèmes de santé du supérieur direct ­ sont venus compliquer le contrôle de ce secteur. Le responsable de l'enquête souligne que le respect des normes juridiques était considéré comme accessoire par rapport à la garantie du fonctionnement du système.

Il ressort par ailleurs de l'enquête administrative que le comportement singulier du chef de secteur n'était pas un fait nouveau: en 1992 déjà, ce collaborateur avait été l'objet d'une enquête administrative, mais on en ignore la raison. En 1997, son nom a resurgi dans le contexte d'une enquête administrative qui portait non seulement sur des irrégularités financières et ­ à l'époque déjà ­ sur des cadeaux de fournisseurs ainsi que sur ce que l'on avait appelé des caisses noires, mais aussi sur des transactions financières en rapport avec l'acquisition d'immeubles en Espagne par le colla67

478

«Enquête administrative au sein du SECO. Attribution de mandats dans le domaine informatique et contrôle de la légalité des procédures d'acquisition de l'organe de compensation de l'assurance-chômage», Rapport rédigé par le responsable de l'enquête, Prof. Urs Saxer LL.M., avocat, Zurich, 26.7.2014 (résumé du rapport complet, qui n'existe qu'en allemand)

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borateur en cause et par son épouse. Même si le responsable de l'enquête avait alors blanchi le collaborateur, une note interne à l'OFIAMT68, rédigée avant même que l'enquête ait été ordonnée, fait état d'une requête au directeur de l'OFIAMT alors en fonction, lui demandant de muter le fonctionnaire en question à un poste impliquant des responsabilités financières moins conséquentes. Cette demande, qui était notamment motivée par le fait que le collaborateur en cause avait procédé à des acquisitions importantes sans l'accord de sa hiérarchie et qu'il était en outre coresponsable de dépenses douteuses, n'a toutefois pas été prise en compte69. En 2005, finalement, le MPC a ouvert une instruction pénale contre le chef de secteur, qui était alors soupçonné de gestion déloyale et de corruption passive. Il s'agissait de déterminer s'il avait accepté de l'argent d'IBM à titre personnel en contrepartie de contrats qu'il avait attribués dans le contexte de son activité pour le compte du SECO. Près de deux ans plus tard, la procédure a abouti à une ordonnance de nonlieu après que le chef de secteur avait manifestement réussi à expliquer les versements suspects sur son compte de manière suffisamment crédible.

L'enquête administrative du SECO contient différentes recommandations: amélioration de la régularité des achats, tenue stricte et propre des dossiers, mise à jour régulière de la banque de données relative aux marchés publics, centralisation et professionnalisation des acquisitions, examen juridique systématique des acquisitions prévues et double contrôle des commandes. A moyen terme, l'auteur du rapport recommande de réorganiser le centre de prestations et de procéder à l'examen des modalités d'application de l'assurance-chômage.

Après la publication du rapport, le DEFR a fait savoir qu'il avait déjà pris une série de mesures en vue de redéfinir les règles en matière d'achat et de renforcer le controlling financier. Il a également annoncé la mise en oeuvre de mesures supplémentaires avant la fin de 2014. Le chef de département a aussi informé qu'il allait désigner un expert chargé de la réorganisation du fonds de compensation de l'assurance-chômage70.

Devant la sous-commission, le chef du DEFR a par ailleurs annoncé que les structures informatiques de l'assurance-chômage étaient examinées par un
consultant externe depuis février 2014. Finalement, l'Office fédéral de la justice a été chargé d'analyser le rôle de la Commission de surveillance de l'assurance-chômage et c'est son rapport qui a servi de base à la réorganisation du secteur de prestation. L'OFCL a pris part à ce processus et toutes les acquisitions pour le secteur marché du travail/assurance-chômage ont été centralisées.

Selon les informations fournies par le chef du DEFR, le département a soutenu pratiquement toutes les mesures proposées par le professeur Saxer et les a mises en oeuvre autant que possible71. D'après lui, une amélioration a été obtenue du fait d'une meilleure délimitation des responsabilités et du suivi permanent des projets 68 69 70 71

L'ancien Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail (jusqu'à 1999) «Enquête administrative au sein du SECO», p. 3 du rapport complet (cet élément n'est pas mentionné dans le résumé français) «Présentation des mesures prises suite à l'enquête administrative au sein du SECO», communiqué de presse du SECO du 21.8.2014 La seule recommandation rejetée concernait la mise en place d'une banque de données rassemblant toutes les informations sur les cadeaux reçus.

479

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informatiques par les organes de pilotage du Secrétariat général du DEFR. La réorganisation du secteur de prestation en question devait être terminée au milieu de l'année 2015. Le chef du département a annoncé que les lacunes constatées pouvaient être considérées comme comblées et a assuré qu'une culture de transparence régnait désormais au SECO. Quelques autres points ont été présentés comme n'ayant pas encore pu être réglés.

Par ailleurs, le chef du DEFR a fait savoir à la sous-commission qu'il avait mandaté Monsieur Klaus Hug pour réaliser une étude sur le futur statut de l'assurancechômage (indépendance ou incorporation complète au SECO). Ce rapport fournira aussi des recommandations dans le domaine de la good governance.

Du point de vue de la CdG-E, les principaux enseignements qui peuvent être tirés de cette affaire sont les suivants: ­

Il importe d'abord de souligner l'importance d'une séparation stricte des responsabilités dans le processus d'acquisition entre l'entité qui demande l'acquisition et celle qui en est chargée. S'il est souhaitable que cette séparation soit mise en oeuvre notamment par la création de centrales d'acquisition et par la mise en place de procédures standardisées, il s'agit de la réaliser aussi dans tous les cas où les compétences d'acquisition sont déléguées aux unités administratives.

­

L'incident a cependant aussi montré que des instruments de controlling et de surveillance efficaces étaient absolument indispensables. A l'époque, ces instruments étaient en effet clairement insuffisants au SECO. Il existe un lien étroit entre ce point et la recommandation 10 formulée par la CdG-E dans son rapport du 13 octobre 2006 sur le recours à des experts externes (cf. ch. 2 et 4). Avec la mise en place du controlling stratégique des acquisitions, la mise en oeuvre de cette recommandation a déjà bien progressé, même si l'aménagement et le fonctionnement concrets de la gestion des contrats doivent encore passer l'épreuve du feu. Le DEFR, pour sa part, a fait un pas de plus dans ce domaine en introduisant un nouveau système de «gestion des adjudications» (cf. ch. 4.5), qui permet de suivre toutes les étapes de la procédure d'acquisition.

­

Finalement, cette affaire montre très clairement que les armes les plus efficaces contre les comportements volontairement fautifs de collaborateurs sont détenues en premier lieu par les supérieurs hiérarchiques, qui se doivent d'assumer leurs responsabilités. Dans le cas qui nous préoccupe, il est difficile de comprendre comment les supérieurs hiérarchiques ont pu ignorer tous les signaux d'alarme et faire aveuglément confiance à leurs subordonnés.

La CdG-E en conclut que le DEFR a réagi à cette affaire de corruption en prenant des mesures appropriées. Dans l'absolu, elle se demande cependant si les instruments de controlling des acquisitions mis en place suffiront à empêcher la répétition de tels événements et dans quelle mesure les futures infractions à la législation sur les marchés publics seront vraiment contrôlées et sanctionnées par les départements.

La CdG-E se réserve donc de réévaluer l'évolution du controlling des acquisitions dans les départements et son efficacité face aux irrégularités potentielles à une date ultérieure.

480

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5.2

Application informatique TDcost en usage à l'Office fédéral des routes72

En février 2014, un rapport du CDF relatif à l'application informatique TDcost en usage à l'Office fédéral des routes (OFROU)73 a fait grand bruit après être parvenu à la presse prématurément74. L'OFROU a introduit le système TDcost en 2008, après que la Confédération avait repris la gestion des routes nationales, jusque-là du ressort des cantons, dans le sillage de la réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons (RPT). Le système TDcost, qui est en constante évolution depuis lors, sert à la gestion des devis, des crédits, des contrats et des factures, à la planification des investissements et des adjudications ainsi qu'à l'administration du budget annuel. TDcost est un système auxiliaire à la comptabilité financière de la Confédération qui permet de traiter chaque année plus de 22 000 factures pour un montant total dépassant 1,5 milliard de francs. Le système de paiement et de comptabilité de la Confédération repose toutefois sur un logiciel SAP.

Le CDF a constaté dans son rapport que le produit standard d'origine, qui avait coûté 1,6 million de francs, avait été transformé en une application individuelle de l'OFROU moyennant un investissement de 4,2 millions de francs. Selon le CDF, ce choix a induit une forte dépendance non seulement vis-à-vis du fournisseur (techdata), mais aussi vis-à-vis du sous-traitant (TRIVADIS), tant sur le plan technique que sur le plan du personnel. Il a souligné que cette relation triangulaire était très coûteuse et qu'elle limitait à l'extrême la marge de manoeuvre de l'OFROU lors des négociations de prix, étant donné qu'il n'existait pas, pour le moment, d'autre solution de développement pour cette application. Finalement, le CDF a encore relevé que les connaissances sur TDcost étaient détenues par un cercle de personnes très limité, non seulement chez techdata, mais aussi chez TRIVADIS et à l'OFROU luimême.

Compte tenu du monopole détenu par le fournisseur, celui-ci a obtenu plusieurs mandats subséquents à la faveur d'une procédure de gré à gré, ce qui, aux termes de l'art. 13 de l'OMP, est en principe admissible dans ce genre de situation. Selon les informations fournies à la CdG-N par le secrétaire général du DETEC, tous les mandats adjugés par l'OFROU selon une procédure de gré à gré sont motivés et

72

73 74

Pour son évaluation des critiques dont a été l'objet le système TDcost, la CdG-E a pu se fonder sur des informations rassemblées par la CdG-N, qui a auditionné différentes personnes à ce sujet.

Rapport du CDF du 27.8.2013, «Audit des processus de la génération de projets et de gestion des créanciers dans TDcost» «Ex Firma des Amtsdirektors profitiert von Insiderwissen» (trad.: L'ancienne entreprise du directeur d'office profite d'informations d'initiés), Berner Zeitung, 13.2.2014

481

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évalués sur le plan juridique, puis publiés sur simap, la plate-forme électronique d'appel d'offres de la Confédération et des cantons pour les marchés publics75.

Dans son rapport, le CDF a mis à jour différents autres risques et lacunes. Il a estimé que TDcost ne satisfaisait pas aux critères de qualité que doit remplir un système auxiliaire à la comptabilité de la Confédération, car les exigences liées à la sécurité des données, à la sécurité des justificatifs comptables, à la journalisation et au système de contrôle interne sont insuffisantes. Compte tenu des lacunes existant dans le système de sécurité, il est tout à fait possible, selon le CDF, que des factures fictives soient comptabilisées et payées. Il est donc d'avis que les lacunes au niveau du contrôle dans ce domaine doivent être comblées sans délai. Il est toutefois aussi précisé dans le rapport qu'aucun indice d'abus concrets n'avait été trouvé. En conclusion du rapport, le CDF a recommandé d'envisager le remplacement de TDcost à moyen terme au lieu de continuer de payer le prix fort pour de nouvelles adaptations du système.

Le CDF a aussi attiré l'attention sur le fait que les entreprises informatiques chargées de la maintenance du système avaient largement accès à toutes les informations et données contenues dans l'application TDcost, ce qui leur permettait ­ selon les conclusions du CDF ­ de savoir si la concurrence avait elle aussi reçu des mandats ou non. De l'avis du CDF, les entreprises qui ont fourni le système auraient ainsi eu la possibilité d'obtenir des renseignements de manière déloyale. Le CDF a toutefois précisé qu'elle n'avait pas pu déterminer si ces entreprises avaient effectivement tiré avantage de ces informations dans certains cas.

Les médias ont aussi avancé l'hypothèse selon laquelle le directeur de l'OFROU au moment des faits, qui avait dirigé techdata jusqu'en 1996, aurait pu réserver un traitement privilégié à cette entreprise.

A l'occasion de l'audition du 4 avril 2014, la cheffe du DETEC a informé la CdG-N que les améliorations requises allaient être apportées dès 2018 sous la forme d'un remplacement de TDcost par un système basé sur SAP. Elle a ajouté que les recommandations du CDF avaient été mises en oeuvre en grande partie, le contrôle et le paiement des factures faisant, par exemple, désormais
l'objet d'un double contrôle.

S'agissant du rôle joué par l'ancien directeur de l'OFROU, elle a souligné que le département avait enquêté sur les reproches dont il était l'objet. Selon les résultats de ces recherches, le premier mandat attribué à techdata remontait à l'an 2000 et était donc antérieur à l'entrée en fonction du directeur. Ce n'est en outre que dix ans après qu'il avait quitté techdata que l'OFROU a donné à cette entreprise le premier mandat en rapport avec TDcost. La cheffe du DETEC a encore souligné que le directeur de l'OFROU s'était récusé lors de l'adjudication de ces marchés et que techdata n'avait pas eu accès aux informations opérationnelles de l'OFROU. Selon elle, l'accusation selon laquelle techdata aurait pu être favorisée était donc infondée.

75

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Selon les données sur les mandats de prestation en cours d'un montant de plus de 150 000 francs que les deux CdG ont prélevées en avril 2014 auprès de tous les départements et de la Chancellerie fédérale, le domaine des routes nationales a, dans l'ensemble, fait bonne figure en comparaison avec le reste de l'administration fédérale: dans la catégorie des routes nationales, 5 % du montant de 994 millions de francs que totalisent les mandats dépassant le seuil de 230 000 francs ont été attribués de gré à gré contre une moyenne de 31 % pour le reste de l'administration fédérale.

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La récusation du directeur de l'OFROU lors de l'adjudication des mandats à techdata a d'ailleurs été confirmée à la CdG-N par le CDF.

A relever que le DETEC a été le premier département à centraliser la gestion des contrats dans le domaine des TIC, en 2014. L'objectif visé était d'obtenir des données statistiques sur le respect des coûts prévus (cf. ch. 4). Lors de son audition par la CdG-N, le secrétaire général du DETEC a précisé que l'une des raisons pour lesquelles la gestion des contrats avait été introduite dans l'ensemble du DETEC était la perspective de pouvoir comparer les offres des fournisseurs et les travaux de suivi non inclus dans l'offre initiale sur tout le département. Comme les mêmes entreprises travaillent souvent pour plusieurs offices fédéraux, ce système devait permettre de mieux contrôler le respect des devis par les fournisseurs.

Du point de vue de la CdG-E, les principaux enseignements qui peuvent être tirés de cette affaire sont les suivants:

76

77

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Les rapports de dépendance importants vis-à-vis des fournisseurs informatiques révélés par l'affaire TDcost viennent rappeler la nécessité d'introduire un système de gestion des contrats couvrant l'ensemble de l'administration fédérale (cf. ch. 4). La recommandation 9 contenue dans le rapport de la CdG-E du 13 octobre 2006 ainsi que la nouvelle recommandation 3 relative aux fournisseurs attitrés qui se trouve dans le présent rapport (cf. ch. 2) sont étroitement liées à ce problème de dépendance.

­

Pour ce qui est des mandats subséquents, il serait utile, dans le cadre de la prochaine révision totale de la LMP, d'examiner l'opportunité d'une disposition obligeant la centrale d'achat à limiter par principe la durée du contratcadre lors de l'adjudication de mandats de prestation périodiques. Une telle réglementation permettrait de rétablir la concurrence au terme du délai fixé.

Toute dérogation à cette disposition devrait être motivée76.

­

La CdG-E appuie la proposition du CDF77 visant à obliger les fournisseurs qui ne sont pas soumis aux règles de la concurrence (notamment lorsque des mandats sont attribués de gré à gré) à donner un droit de regard sur le calcul de leurs prix. Ce droit de regard devrait être prévu par la loi et ne pas être subordonné à la signature d'une convention distincte comme jusqu'à présent.

Le Conseil fédéral avait inclus cette proposition dans son premier projet de révision totale de la LMP (avant-projet du 30.5.2008). Cette disposition ne figurait toutefois plus dans le projet de LMP du 1.4.2015 envoyé en consultation.

Le CDF avait présenté cette proposition à la CdG-N à l'occasion de son audition du 28.2.2014. L'idée a ensuite été reprise dans le projet de LMP envoyé en consultation (art. 18).

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Suite de la procédure

La CdG-E transmet au Conseil fédéral le présent rapport assorti de recommandations en le priant de donner son avis d'ici à la fin de février 2016. Elle invite également le Conseil fédéral à indiquer les mesures qu'il entend prendre ainsi que le délai qu'il se fixe pour mettre en oeuvre les recommandations.

6 octobre 2015

Au nom de la Commission de gestion du Conseil des Etats : Le président, Hans Hess, député au Conseil des Etats La secrétaire, Beatrice Meli Andres Le président de la sous-commission DFJP/ChF, René Imoberdorf, député au Conseil des Etats La secrétaire de la sous-commission, Irene Moser

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Liste des abréviations AC AMP-OMC CC CCMP CdC CDF CdF-N CdG-E Cex CFF ChF CHF CPA CPV CSI-DFJP DDC DDPS DEFR DélFin DETEC DFAE DFF DFI DFJP ESPRIT FF GCo Adm.féd.

GEVER GTI CA HERMES

Assurance-chômage Accord du 15 avril 1994 sur les marchés publics (RS 0.632.231.422) Comité de coordination GCo Adm.féd.

Centre de compétence des marchés publics de la Confédération Centrale de compensation Contrôle fédéral des finances Commission des finances du Conseil national Commission de gestion du Conseil des Etats Commission d'exploitation Chemins de fer fédéraux Chancellerie fédérale francs suisses Contrôle parlementaire de l'administration Vocabulaire commun pour les marchés publics de l'UE Centre de services informatiques du DFJP Direction du développement et de la coopération (DFAE) Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche Délégation des finances des Chambres fédérales Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication Département fédéral des affaires étrangères Département fédéral des finances Département fédéral de l'intérieur Département fédéral de justice et police Instrument de gestion des contrats du DFAE (Einkauf von Serviceleistungen für Projekte, Rechnungsprüfung, Information und Terminsteuerung) Feuille fédérale Gestion des contrats de l'administration fédérale Gestion électronique des dossiers de l'administration fédérale Groupe de travail interdépartemental Controlling des acquisitions Méthode de gestion de projet de la Confédération pour les projets informatiques, de développement de prestations ou de produits, ainsi que d'adaptation de l'organisation (Handbuch der Elektro-

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LMP MDA MPC NMC NMG OFCL OFIAMT OFJ OFPER OFROU OMP Org-OMP RPT RS SAP SECO SG simap StatPA TDcost TIC TVA UE

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nischen Rechenzentren des Bundes, eine Methode zur Entwicklung von Systemen) Loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics (RS 172.056.1) Monitoring de la durabilité des achats Ministère public de la Confédération Nouveau modèle comptable de la Confédération Nouveau modèle de gestion de la Confédération Office fédéral des constructions et de la logistique (DFF) Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail (jusqu'en 1999) Office fédéral de la justice (OFJP) Office fédéral du personnel (DFF) Office fédéral des routes (DETEC) Ordonnance du 11 décembre 1995 sur les marchés publics (RS 172.056.11) Ordonnance du 24 octobre 2012 sur l'organisation des marchés publics de l'administration fédérale Nouvelle péréquation financière (réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons) Recueil systématique Progiciel de gestion intégré standard de la maison SAP (Systeme, Anwendungen und Produkte) Secrétariat d'Etat à l'économie (DEFR) Secrétariat général Plate-forme électronique d'appel d'offres publiques de la Confédération et des cantons, www.simap.ch Statistique des paiements effectués pour des acquisitions de l'administration fédérale Système de gestion de projets (routes nationales) en usage à l'OFROU Technologies de l'information et de la communication Taxe sur la valeur ajoutée Union européenne

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Annexe 1

Personnes entendues ­

Graf René, vice-directeur de l'OFCL et président du GTI CA

­

Hänni Silvio, secrétaire général suppléant au DFF

­

Imhof Rolf, chef Finances et logistique au SG-DEFR, membre du GTI CA

­

Marchand Gustave-Ernest, directeur de l'OFCL

­

Müller Kaspar, chef Finances et controlling au SG-DETEC, membre du GTI CA

­

Rivera Anne, cheffe du Centre de compétence en contrats et marchés publics au SG-DFAE, membre du GTI CA

­

Schärli Oliver, chef de la division Marché du travail et assurance-chômage au SECO

­

Schneider-Ammann Johann N., chef du DEFR

­

Widmer-Schlumpf Eveline, cheffe du DFF

­

Zentner Alain, chef des Finances DFI, membre du GTI CA

­

Zürcher Boris, chef de la Direction du travail au SECO

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