Adéquation du personnel au service diplomatique Rapport de la Commission de gestion du Conseil des Etats du 26 février 2016

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Rapport 1

Introduction

En janvier 2014, les Commissions de gestion des Chambres fédérales (CdG) ont chargé le Contrôle parlementaire de l'administration (CPA) de procéder à une évaluation portant sur le personnel du service diplomatique.

Ce mandat était motivé par une remise en question répétée, au cours des dernières années, du processus et des instruments ordinaires de recrutement du personnel diplomatique dont dispose le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et de sa capacité à recruter et à fidéliser par ces moyens du personnel adéquat en nombre suffisant. Les doutes exprimés étaient fondés sur le constat des changements considérables intervenus tant dans le champ d'activité des personnes travaillant pour le service diplomatique que dans leurs intérêts personnels et surtout dans leurs modèles de vie (notamment pour ce qui est de la compatibilité de leur vie professionnelle avec leur vie familiale). Par opposition, le concours diplomatique, qui est une procédure de sélection en plusieurs étapes, ainsi que le système de carrière, qui détermine l'évolution professionnelle des personnes recrutées au sein de la filière diplomatique, n'ont guère évolué depuis les années 1950. On a dès lors supposé que la difficulté de concilier vie professionnelle et vie familiale était une raison majeure qui poussait les collaborateurs à quitter le service diplomatique prématurément.

Responsable du dossier, la sous-commission DFAE/DDPS de la CdG du Conseil des Etats (CdG-E) a décidé en août 2014 de charger le CPA de conduire son évaluation en examinant plus spécifiquement s'il était possible de recruter du personnel ayant un profil adéquat pour le service diplomatique et si ces personnes pouvaient être fidélisées. Les principales questions qu'il devait se poser se rapportaient aux compétences exigées de la part des collaborateurs du service diplomatique et visaient plus précisément à déterminer si le DFAE définissait ces compétences de manière adéquate, si les collaborateurs étaient bien recrutés en fonction du profil défini et si le DFAE parvenait effectivement à recruter des personnes ayant les compétences recherchées et à les fidéliser. Le CPA n'a par contre pas été chargé d'évaluer si la mission à remplir, à savoir la défense des intérêts de la Suisse à l'étranger, pouvait être accomplie de manière satisfaisante avec
le personnel existant.

Le CPA a clos l'évaluation par la présentation de son rapport du 10 août 20151, que la CdG-E a ensuite traité et valorisé. Dans le présent rapport, la commission expose les observations les plus importantes à ses yeux et présente les conclusions et les recommandations qui en résultent. Le présent rapport vient donc compléter le rapport du CPA et n'en reprend les résultats que dans la mesure où la compréhension du propos l'exige. Partant du rapport du CPA, la CdG-E s'est cependant aussi penchée sur des questions plus générales se rapportant à la politique du personnel du DFAE, qui n'avaient pas fait l'objet de l'évaluation à proprement parler.

1

Evaluation du personnel du service diplomatique, rapport du CPA à l'intention de la CdG-E du 10.8.2015 (en annexe)

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Lors de sa séance du 26 février, la CdG-E a décidé de publier son rapport conjointement avec l'évaluation du CPA2.

Les chapitres suivants portent, d'une part, sur l'adéquation du système actuel de développement de carrière au service diplomatique aux besoins d'aujourd'hui (chap. 2) et, d'autre part, sur le potentiel d'optimisation existant dans le cadre du système (chap. 3). En outre, la question de la pertinence du système de rémunération a été examinée (chap. 4).

2

La question de l'adéquation du système de carrière et du système de rémunération semi-fonctionnel reste sans réponse

Le service diplomatique est un service de carrière: en règle générale3, les collaborateurs du service diplomatique sont recrutés sur concours4; ils poursuivent alors une carrière qui peut les conduire jusqu'à la direction d'une représentation à l'étranger.

Ils sont soumis à la discipline des transferts 5, ce qui signifie qu'ils peuvent en tout temps être mutés à un poste à l'étranger ou à la centrale à Berne 6. Dans la pratique, cela implique un système de rotation. En règle générale, les collaborateurs du service diplomatique changent ainsi de poste ou de lieu d'affectation tous les quatre ans.

Le principe sur lequel est fondé le système de carrière veut que le parcours professionnel des personnes qui s'y engagent reste confiné à une seule et même organisation. Ce système implique la sécurité de l'emploi ainsi qu'une progression de salaire quasi-automatique puisque liée à l'ancienneté de service. Le système de rémunération semi-fonctionnel7 repose en effet sur les promotions et, plus précisément, sur le passage dans la classe de traitement supérieure8. Pendant longtemps, ces avantages ont été considérés comme contrepartie indispensable de la disponibilité exigée,

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8

La documentation du rapport du CPA est publiée sur le site Internet du CPA.

Près de 2 % des collaborateurs actuels du service diplomatique ont été engagés sans avoir passé le concours. L'engagement de personnes extérieures à la filière diplomatique représente ainsi un phénomène marginal (évaluation du CPA en annexe, chap. 2.2).

Art. 13 de l'ordonnance du DFAE du 20.9.2002 concernant l'ordonnance sur le personnel de la Confédération (O-OPers ­ DFAE ; RS 172.220.111.343.3) Art. 13, al. 1, let. d, et art. 132, al. 1, O-OPers ­ DFAE Art. 25, al. 4, de l'ordonnance du 3.7.2001 sur le personnel de la Confédération (OPers, RS 172.220.111.3) et art. 3, let. a, O-OPers ­ DFAE Art. 114, al. 2, let. h, OPers et art. 34, al. 1, ainsi qu'annexe 2 O-OPers ­ DFAE. Contrairement au système basé sur les fonctions, le système semi-fonctionnel implique que les collaborateurs ne sont pas forcément rémunérés selon la fonction qu'ils occupent. Il peut donc arriver que la classe de traitement d'une personne soit trop élevée ou trop basse par rapport à sa fonction. Comme les fonctions qui se libèrent à la faveur de la rotation du personnel ne correspondent pas toujours aux classes de traitement des collaborateurs disponibles pour les occuper, ce décalage est parfois inévitable. Les différentes fonctions sont cependant regroupées dans des bandes de fonction et le passage dans une classe de traitement correspondant à la bande de fonction supérieure n'est dès lors possible que si le collaborateur reprend une fonction correspondant à cette bande de fonction supérieure.

Art. 27, al. 1, O-OPers ­ DFAE. Cf. aussi chap. 3.3.

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puisque les personnes s'engageant au service diplomatique doivent être prêtes à travailler n'importe où dans le monde et à être mutées régulièrement.

La CdG du Conseil national (CdG-N) s'était déjà penchée sur la politique du personnel au service diplomatique dans le cadre d'une inspection conduite en 20029.

Elle avait conclu qu'il n'existait pas d'alternative sérieuse au système de carrière, estimant que c'était le seul moyen de pourvoir en personnel de manière adéquate toutes les représentations suisses à l'étranger10. Elle avait cependant recommandé le remplacement du système de rémunération semi-fonctionnel par un système combinant un traitement de base avec une indemnité de fonction11.

Aujourd'hui, un cinquième des postes de défense des intérêts sont occupés par des personnes qui ne font pas partie du service diplomatique12. Par ailleurs, le personnel de rotation de la Direction du développement et de la coopération (DDC) a été assujetti à la discipline des transferts au 1er mars 201513 sans que cette mesure ait eu pour corollaire l'introduction d'un système de carrière avec rémunération semifonctionnelle. Compte tenu de ce constat et des résultats parfois mitigés que le CPA a présentés dans son évaluation (par ex. lorsqu'il estime que le mécanisme des promotions quasi-automatiques avait atteint certaines limites en raison du nombre restreint des postes haut placés et de la réduction latente des ressources 14), la CdG-E est aujourd'hui d'avis que la discipline des transferts, qui continue d'être jugée nécessaire pour que tous les postes des représentations suisses à l'étranger puissent être pourvus, ne doit pas forcément s'accompagner d'un système de carrière prévoyant une évolution automatique des salaires. Cette conclusion se base aussi sur une étude sur la politique du personnel du DFAE que le département avait commandée en 2010. Les auteurs y formulaient le soupçon que le système de rémunération semi-fonctionnel aboutisse en fait à une surpaie sur l'ensemble de la carrière professionnelle15.

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Politique du personnel de carrière et organisation du service extérieur au Département fédéral des affaires étrangères, rapport de la CdG-N du 22.8.2002 (FF 2003 2667) FF 2003 2667 2685 FF 2003 2667 2694 Evaluation du CPA en annexe, chap. 4.3 Direction des ressources, Communication de la directrice, Discipline des transferts pour le personnel de rotation, 17.12.2014 Evaluation du CPA en annexe, chap. 5.1. Cf. aussi art. 34, al. 4, O-OPers ­ DFAE, selon lequel le DFAE, en accord avec le DFF, fixe un contingent de postes pour les bandes de fonction 3 à 6 du service diplomatique.

HENNEBERGER-SUDJANA, Sarah, HENNEBERGER, Fred, GEISER, Thomas, «Evaluation der Personalpolitik des EDA», Saint-Gall, 2012, p. 14

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Par conséquent, elle recommande au Conseil fédéral de reconsidérer une nouvelle fois16 les éléments de la politique du personnel du DFAE en question et d'examiner s'il ne serait pas plus judicieux, à la lumière des critiques émises, que le DFAE abandonne le système de carrière très formaliste, tel qu'il existe actuellement, pour le remplacer par un système de carrière et de rémunération qui soit fondé sur la fonction occupée, comme celui qui est appliqué par la très grande majorité des entités de l'administration fédérale en conformité avec les principes de la loi sur le personnel de la Confédération17. Une telle réforme devrait bien évidemment aussi être étudiée pour les autres services de carrière du département.

Recommandation 1: examen de l'abandon du service de carrière La CdG-E invite le Conseil fédéral à reconsidérer l'opportunité d'abandonner le système du service de carrière et de le remplacer par un système de carrière et de rémunération fondé sur la fonction occupée.

3

Optimisations possibles dans le cadre du système en place

La CdG-E prend acte du fait que les procédures actuelles de recrutement et de fidélisation du personnel permettent aujourd'hui non seulement de trouver des collaborateurs ayant les compétences appropriées pour accomplir les tâches diplomatiques, mais aussi de les motiver à poursuivre leur carrière au DFAE18. Elle estime néanmoins que le potentiel d'optimisation mis en exergue par le CPA doit être exploité notamment dans la perspective d'évolutions futures, indépendamment de la question du changement de système.

3.1

Amélioration de la concordance entre profils d'exigences recherchés et tâches du service diplomatique

L'évaluation du CPA a révélé une concordance insuffisante entre, d'une part, les profils d'exigences standard recherchés pour le service diplomatique et, d'autre part,

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17 18

Dans l'évaluation susmentionnée du Forschungsinstitut für Arbeit und Arbeitsrecht de l'Université de Saint-Gall de 2010, les auteurs sont notamment parvenus à la conclusion que le passage à un système de rémunération basé sur la fonction pour tous les services transférables serait plus juste que la situation actuelle, dans laquelle coexistent deux systèmes de rémunération différents (cf. HENNEBERGER-SUDJANA, Sarah, HENNEBERGER, Fred, GEISER, Thomas, «Evaluation der Personalpolitik des EDA», Saint-Gall, 2012, pp. 38 ss). Le DFAE avait mandaté cette étude dans le contexte d'un projet de réforme de la politique du personnel du DFAE. Ce projet de réforme a cependant été stoppé en 2011, manifestement à la suite de résistances au sein du personnel, notamment du service diplomatique.

Cf. notamment l'art. 15 de la loi du 24.3.2000 sur le personnel (LPers ; RS 172.220.1) Evaluation du CPA en annexe, chap. 4 et 5

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les tâches devant être accomplies19 et les aptitudes de conduite croissantes requises dans les différentes fonctions20. La CdG-E estime très clairement que le recrutement, mais aussi la promotion, des collaborateurs sur la base de profils d'exigences sont judicieux uniquement à la condition que les profils en question correspondent de très près aux tâches à accomplir, dans le présent et dans le futur.

Vis-à-vis du CPA, le DFAE a exprimé sa volonté de différencier les cahiers des charges afin d'obtenir une meilleure adéquation avec la fonction. La commission en prend acte, mais tient à préciser que de tels ajustements ne peuvent être utiles que s'ils ont lieu par rapport aux tâches effectives. Selon elle, il importe en outre de veiller à ce que les compétences particulièrement importantes dans le contexte d'une activité au service diplomatique (en particulier pour ce qui est des compétences personnelles et des compétences sociales) obtiennent l'attention qu'elles méritent lors de l'attribution des postes. A l'heure actuelle, cela ne semble pas encore être le cas21. Compte tenu de ce qui précède, la commission estime qu'il est nécessaire non seulement de répertorier toutes les tâches que le personnel diplomatique assume à l'heure actuelle, mais aussi d'analyser la situation à la lumière des défis du futur.

Les mesures annoncées par le DFAE ne commenceront à avoir un impact réel sur le service diplomatique qu'à partir du moment où les nouveaux cahiers des charges serviront effectivement de base aux décisions en matière de personnel. La CdG-E estime inadmissible que les compétences jugées nécessaires pour les candidats au concours d'admission ou à une promotion à l'intérieur du service ne soient que partiellement évaluées en fonction du profil d'exigences standard22.

Recommandation 2: concordance des compétences avec les tâches La CdG-E demande au Conseil fédéral de veiller à ce que les décisions en matière de ressources humaines au service diplomatique soient prises en fonction de profils d'exigences établis compte tenu non seulement des tâches actuelles et futures, mais aussi des compétences spécifiques requises pour les accomplir.

La CdG-E suggère en outre de davantage tenir compte, dans le développement du personnel, des mutations auxquelles sont soumises les tâches du service diplomatique (par ex. dans la perspective de spécialisations dans les domaines de l'environnement, des nouvelles technologies et de la fiscalité)23.

3.2

Niveau hiérarchique inapproprié pour les décisions d'admission

Contrairement aux décisions de transfert24 et de promotion25, qui sont prises à différents niveaux hiérarchiques du DFAE en fonction de leur importance, les décisions 19 20 21 22 23 24

Evaluation du CPA en annexe, chap. 3.2 Evaluation du CPA en annexe, chap. 3.1 Evaluation du CPA en annexe, chap. 3.3 Evaluation du CPA en annexe, chap. 3.3 et 4.1 Voir aussi l'évaluation du CPA en annexe, chap. 5.4 Art. 2, al. 2, OPers et art. 6 O-OPers ­ DFAE

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d'admission à la formation et au service diplomatique sont ­ au mépris de la réglementation en vigueur26 ­ toujours prises en dernier ressort par la cheffe ou le chef du département27.

C'est donc à juste titre, de l'avis de la CdG-E, que le CPA soulève dans son évaluation la question du niveau auquel sont prises les décisions d'admission. La commission ne voit en effet aucune raison objective justifiant que pareilles décisions relèvent du chef du département. Il est d'ailleurs révélateur que celui-ci suive normalement les recommandations de la commission d'admission28.

La CdG-E demande donc au Conseil fédéral de veiller à ce que les décisions du DFAE en matière de ressources humaines soient prises à un niveau hiérarchique adéquat29. De l'avis de la commission, cette requête n'empêche pas que la disposition dérogatoire donnant au chef du département le pouvoir «de recruter des personnes aux aptitudes exceptionnelles»30 continue de s'appliquer.

Dans son évaluation, le CPA a conclu que les auditions face à la commission d'admission jouaient un rôle prépondérant dans le processus d'admission au service diplomatique31. La CdG-E suggère donc que le Conseil fédéral saisisse l'occasion du réaménagement des compétences en matière de décisions d'admission pour étudier s'il ne serait pas judicieux de confier la compétence de décision directement à la commission d'admission. Si tel devait être le cas, il serait toutefois nécessaire, de l'avis de la CdG-E, d'assurer la transparence de la composition de cette commission.

Recommandation 3: niveau hiérarchique approprié pour les décisions d'admission La CdG-E demande au Conseil fédéral de s'assurer que les décisions d'admission au service diplomatique sont prises à un niveau hiérarchique adéquat et que la cheffe ou le chef du DFAE ne se prononce à leur sujet qu'à titre exceptionnel.

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Art. 2, al. 1, let. f, OPers et art. 5 O-OPers ­ DFAE. A relever que, dans la pratique, le chef du département prend manifestement plus de décisions de promotion lui-même que le prévoit le cadre normatif en vigueur (cf. évaluation du CPA en annexe, chap. 5.1).

Aux termes de l'art. 4 O-OPers ­ DFAE, ces décisions relèveraient, selon la classe de traitement, soit du chef du département, soit de la Direction des ressources.

Evaluation du CPA en annexe, chap. 2.2 et 4.2 Rappelons cependant que, sous l'ancienne cheffe du DFAE, il est arrivé à plusieurs reprises que les recommandations ne soient pas suivies. Cf. par ex. Tagesanzeiger, «Das ist keine Banalität, das ist gefährlich», article paru le 8.2.2011.

Voir aussi le postulat 1 de la CdG-N portant sur le pilotage de la politique du personnel (cf. Po. CdG-N 12.3644, «Répartition des tâches en matière de personnel au sein de la Confédération et des départements» du 19.6.2012). La commission y demande au Conseil fédéral, en termes généraux, de faire en sorte que les compétences dans le domaine de la politique des ressources humaines soient exercées au niveau hiérarchique qui convient.

Art. 13, al. 5, O-OPers ­ DFAE Evaluation du CPA en annexe, chap. 4.1

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3.3

Incertitude quant aux effets du formalisme caractéristique de la procédure de promotion

Pour accéder à une classe de traitement supérieure, les collaborateurs du service diplomatique doivent être promus. Au service diplomatique, une promotion est possible tous les trois ans32. Comme indiqué précédemment, la promotion (et avec elle l'augmentation de salaire entraînée par le passage dans une classe de salaire supérieure) est en principe accordée, dans le cadre du service de carrière, indépendamment de la fonction effectivement occupée.

Les promotions sont accordées à deux autres conditions: premièrement, elles doivent répondre à un besoin au sein du service; deuxièmement, la personne candidate à la promotion doit avoir les aptitudes requises33.

Aptitudes personnelles comme condition à la promotion Les aptitudes personnelles des collaborateurs comme condition à leur promotion sont vérifiées sur la base de dossiers constitués et mis à jour pour chacun d'entre eux. On y trouve différents documents dans lesquels les compétences des candidats sont évaluées (en premier lieu les évaluations de leur potentiel et les échelons obtenus dans le cadre des évaluations annuelles de leurs performances). Les dossiers sont remis à la commission de promotion compétente, qui adresse sa recommandation au service ayant le pouvoir de décision34. Par ailleurs, les commissions de promotion35 sont informées oralement des évaluations externes requises, le cas échéant, pour le passage de la bande de fonction 1 à la bande de fonction 2 et de la bande de fonction 2 à la bande de fonction 3. Dans le cadre de son évaluation, le CPA s'est penché sur un certain nombre de dossiers de promotion et s'est demandé, dans le cas de certains, quelles étaient les bases précises sur lesquelles les commissions de promotion avaient fondé leurs recommandations. Elle n'a cependant pas trouvé de réponse à cette question dans tous les cas étudiés. Manifestement, les promotions à l'intérieur des bandes de fonction 1 et 2 et à partir de la bande de fonction 3 sont accordées de façon quasi-automatique. Si cet automatisme n'existe pas entre les bandes de fonction 1 et 2 ainsi qu'entre les bandes de fonction 2 et 3, puisque les collaborateurs sont soumis à une évaluation plus précise à ce moment de leur carrière, les instruments axés sur les compétences que le CPA a analysés n'ont que partiellement permis d'expliquer les décisions de
promotion prises dans les dossiers considérés. Il ne lui a donc pas été possible de clarifier les motifs pour lesquels les décisions de promotion avaient été prises en définitive, ni d'ailleurs le rôle que la commission de promotion responsable a joué dans ce contexte36.

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Art. 27, al. 3, let. b, O-OPers ­ DFAE Art. 30, al. 1, O-OPers ­ DFAE Art. 31 et 32 O-OPers ­ DFAE Il existe au DFAE deux commissions de promotion différentes. Leurs champs de compétence se distinguent en fonction du service et de la classe de salaire. Cf. art. 32 O-OPers ­ DFAE Evaluation du CPA en annexe, chap. 5.1. Dans le cadre de l'enquête qu'elle avait conduite en 2002 au sujet de la politique du personnel au service diplomatique, la CdG-N avait elle aussi constaté des insuffisances concernant la transparence du système de promotion. FF 2003 2667, ici: 2694

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Besoins du service comme condition à la promotion La promotion ne dépend toutefois pas uniquement des compétences du candidat, mais aussi des besoins du service. Or, un tel besoin n'est reconnu que «lorsque des employés seront vraisemblablement appelés à exercer de façon durable des fonctions relevant d'une classe de salaire plus élevée [...]. Parmi les critères pris en compte figurent notamment l'existence d'un nombre limité de fonctions plus élevées disponibles [...]»37. Compte tenu de cette disposition, il importe de souligner que les promotions ne sont pas, malgré tout, accordées sans rapport aucun avec les fonctions futures.

Critique et exigences de la CdG-E De l'avis de la CdG-E, les résultats de l'évaluation à laquelle a procédé le CPA tendent à indiquer que le degré de formalisme relativement élevé constaté dans la procédure de promotion38 masque essentiellement le fait que les décisions de promotion rythmant la carrière des collaborateurs sont généralement prises en fonction de leur ancienneté et n'aboutissent donc pas à une sélection à proprement parler39.

Malgré la clarté des conditions applicables, certaines promotions sont apparues carrément arbitraires40. D'après la CdG-E, il est particulièrement important que la sélection des membres du service diplomatique, en tant que service de carrière qui se distingue par son caractère corporatiste, se fonde sur des critères pertinents, car les réactions aux promotions «indues» sont particulièrement vives du fait qu'il est très facile de comparer les profils des différents candidats.

Au cas où le Conseil fédéral choisirait de maintenir le système actuel du service de carrière (cf. recommandation 1), il importerait de clarifier le rôle des différents instruments et organes de décision dans la procédure de promotion actuelle et d'en accroître la transparence. Il faudrait aussi, à cette occasion, réfléchir s'il ne serait pas judicieux de faire dépendre les promotions plus directement de la planification des affectations41.

Recommandation 4: optimisation de la procédure de promotion La CdG-E demande au Conseil fédéral de veiller à la transparence de la procédure de promotion au service diplomatique de sorte que les instruments à disposition et les conditions générales permettent de motiver les décisions prises.

37 38

39 40

41

Art. 30, al. 3, O-OPers ­ DFAE Constatation que l'on retrouve explicitement chez HENNEBERGER-SUDJANA, Sarah, HENNEBERGER, Fred, GEISER, Thomas, «Evaluation der Personalpolitik des EDA», Saint-Gall, 2012, p. 34.

Avis partagé par HENNEBERGER-SUDJANA, Sarah, HENNEBERGER, Fred, GEISER, Thomas, «Evaluation der Personalpolitik des EDA», Saint-Gall, 2012, p. 48 Le CPA a ainsi pu établir que des personnes avaient été promues alors que l'analyse de potentiel avait montré qu'elles ne disposaient pas de toutes les compétences requises et même, dans un cas, que l'«assessment» n'aboutissait pas à une recommandation, tandis que d'autres personnes n'avaient pas été promues alors que ces deux critères étaient remplis (évaluation du CPA en annexe, chap. 5.1).

Cf. aussi HENNEBERGER-SUDJANA, Sarah, HENNEBERGER, Fred, GEISER, Thomas, «Evaluation der Personalpolitik des EDA», Saint-Gall, 2012, p. 55

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3.4

Problématique des personnes accompagnantes reconnue, lacunes dans les données de pilotage du personnel

Pour les collaborateurs du service diplomatique, la discipline des transferts représente un défi de taille. Les personnes qui partagent leur vie ainsi que leurs enfants sont aussi directement concernés. Dans l'intérêt d'une fidélisation du personnel au service diplomatique, la CdG-E estime donc éminemment important que le DFAE lutte activement contre les désagréments supportés par les accompagnants dans le cadre de la discipline des transferts. La commission prend acte du fait que le DFAE semble avoir reconnu l'importance de la situation des accompagnants42 et que différentes mesures ont été prises ces dernières années pour l'améliorer. La CdG-E tient à souligner que cette problématique représente un défi permanent, dont la portée risque encore d'augmenter avec l'évolution des modèles familiaux et de la perception des rôles. Elle estime donc important que le DFAE s'assure de l'efficacité des mesures prises en faveur des personnes accompagnantes.

Si l'on veut pouvoir juger de l'efficacité des mesures prises pour fidéliser le personnel ­ notamment à la lumière de la situation des personnes accompagnantes ­ il est indispensable, aux yeux de la commission, de relever systématiquement les raisons qui poussent les collaborateurs à quitter le service diplomatique. Or, le DFAE n'a pas été en mesure de fournir au CPA des données fiables ­ pour ces quelques dernières années ­ qui lui auraient permis de déterminer la proportion des départs prématurés au service diplomatique qui étaient motivés par la situation des personnes accompagnantes43. La CdG-E ne peut que s'en étonner et constater que le DFAE s'accommode d'une situation dans laquelle des mesures prometteuses destinées à fidéliser le personnel sont, dans les faits, laissées au hasard.

Recommandation 5: données de pilotage du personnel La CdG-E invite le Conseil fédéral à faire en sorte que les données nécessaires à l'évaluation de l'efficacité des dispositions prises dans le domaine des ressources humaines (notamment dans la perspective d'une fidélisation des collaborateurs) soient recueillies et utilisées.

42 43

Evaluation du CPA en annexe, chap. 5.3 Evaluation du CPA en annexe, chap. 5.3

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La question de l'adéquation du système de rémunération reste sans réponse

Dans le contexte de son évaluation, le CPA s'est penché sur le système de rémunération, pour déterminer dans quelle mesure le salaire pouvait contribuer à fidéliser les collaborateurs44. A cette occasion, il a pu constater une certaine insatisfaction chez une partie du personnel (un résultat qui ressort également du sondage ordinaire réalisé auprès du personnel du DFAE).

Selon l'évaluation du CPA, ce résultat pourrait s'expliquer en partie par le niveau jugé trop bas des salaires de départ. Néanmoins, du fait que le service diplomatique est conçu comme un service de carrière, les collaborateurs concernés peuvent actuellement compter sur un passage quasi-automatique dans des classes de salaire supérieures; aussi la CdG-E estime-t-elle qu'une intervention sur ce point ne s'impose pas.

C'est un autre élément qui a retenu l'attention de la commission: selon les constatations du CPA, le degré de satisfaction des collaborateurs concernant leur rémunération dépend en particulier de leur lieu d'affectation. Les collaborateurs du service diplomatique en poste à l'étranger semblent ainsi être nettement plus satisfaits de leur rémunération que leurs collègues travaillant en Suisse. Cette situation pourrait s'expliquer par les indemnités complémentaires allouées à l'étranger. En 2009, les indemnités versées aux personnes à l'étranger représentaient ainsi en moyenne entre 22 % et 30 % du salaire total45. Eu égard à ce qui précède et aux restrictions budgétaires qui frappent le domaine du personnel, la CdG-E considère qu'il faut non seulement se demander si ces indemnités sont adéquates, mais aussi si elles respectent le principe d'égalité de traitement des collaborateurs de l'administration fédérale. Aussi la commission demande-t-elle au Conseil fédéral de lui remettre un rapport concernant les différents suppléments, indemnités pour frais et privilèges fiscaux octroyés aux collaborateurs du service diplomatique à l'étranger. Elle souhaiterait en particulier savoir s'il y a variation des revenus (y.c. l'ensemble des suppléments et les éventuels privilèges fiscaux) en fonction du lieu d'affectation ­ en Suisse ou à l'étranger ­ et, dans l'affirmative, quelle est son ampleur. En outre, la commission demande au Conseil fédéral de comparer, en Suisse et à l'étranger, également les indemnités versées aux collaborateurs
du service diplomatique par rapport à celles versées à d'autres collaborateurs de l'administration fédérale en poste à l'étranger qui sont indemnisés selon leur fonction (notamment les indemnités versées aux collaborateurs de la Direction du développement et de la coopération ainsi que celles versées aux collaborateurs occupant des postes de défense des intérêts sans pour autant faire partie du service diplomatique).

44 45

Evaluation du CPA en annexe, chap. 5.2 HENNEBERGER-SUDJANA, Sarah, HENNEBERGER, Fred, GEISER, Thomas, «Evaluation der Personalpolitik des EDA», Saint-Gall, 2012, Henneberger-Sudjana, p. 36, note de bas de page 226

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Recommandation 6: examen de la rémunération des collaborateurs du service diplomatique La CdG-E invite le Conseil fédéral à lui présenter un rapport dans lequel il indiquera quelle est la rémunération effectivement perçue par le personnel du service diplomatique en Suisse et à l'étranger (traitement, y.c. les différents suppléments et indemnités pour frais, compte tenu des éventuels privilèges fiscaux).

Sur cette base, il examinera, d'une part, dans quelle mesure les indemnités perçues sont adéquates et, d'autre part, si leur versement n'occasionne pas une inégalité de traitement des collaborateurs employés à l'étranger et rattachés ou non au service diplomatique et des collaborateurs de l'administration fédérale en général.

5

Suite de la procédure

La CdG-E invite le Conseil fédéral à répondre à ses réflexions et recommandations ainsi qu'aux considérations du CPA sur lesquelles elles reposent d'ici au 23 mai 2016. Elle le prie aussi d'indiquer au moyen de quelles mesures et dans quels délais il envisage de mettre en oeuvre les recommandations de la commission.

26 février 2015

Pour la Commission de gestion du Conseil des Etats: Le président, Hans Stöckli La secrétaire, Beatrice Meli Andres

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Liste des abréviations al.

alinéa

art.

article

CdG

Commissions de gestion des Chambres fédérales

CdG-E

Commission de gestion du Conseil des Etats

CdG-N

Commission de gestion du Conseil national

CPA

Contrôle parlementaire de l'administration

DDC

Direction du développement et de la coopération

DDPS

Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports

DFAE

Département fédéral des affaires étrangères

DFF

Département fédéral des finances

FF

Feuille fédérale

let.

lettre

LPers

Loi du 24 mars 2000 sur le personnel (RS 172.220.1)

O-OPers ­ DFAE

Ordonnance du DFAE du 20 septembre 2002 concernant l'ordonnance sur le personnel de la Confédération (RS 172.220.111.343.3)

OPers

Ordonnance du 3 juillet 2001 sur le personnel (RS 172.220.111.3)

RS

Recueil systématique

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