16.056 Message relatif à la modification de la loi sur le génie génétique (Prolongation du moratoire, intégration des résultats du PNR 59 et «zones avec OGM») du 29 juin 2016

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet de modification de la loi fédérale sur l'application du génie génétique au domaine non humain (loi sur le génie génétique, LGG; RS 814.91), en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

29 juin 2016

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Johann N. Schneider-Ammann Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2012-1630

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Condensé Le Conseil fédéral propose de prolonger de quatre ans le moratoire sur la culture d'organismes génétiquement modifiés (OGM) dans l'agriculture. Il propose en outre de compléter les bases légales régissant la coexistence entre OGM et nonOGM, et de créer des «zones avec OGM» permettant de concentrer la culture des OGM une fois le moratoire échu.

Contexte Le présent message relatif aux propositions de modification de la LGG reprend des éléments du projet de réglementation intitulé «Intégration des résultats du PNR59 et des régions sans OGM» soumis à la consultation publique en 2013. En revanche consécutivement aux résultats de l'audition publique et aux consultations des milieux concernés sur les options pour la coexistence, les dispositions pour la prolongation du moratoire et la structure, le rôle et le fonctionnement des zones avec OGM ont remplacé les dispositions initiales relatives aux régions sans OGM.

Contenu du projet Le Conseil fédéral propose de compléter la loi sur le génie génétique de façon à poursuivre simultanément et parallèlement deux objectifs. Il propose de prolonger le moratoire pour tenir compte des nombreuses incertitudes qui demeurent. L'utilisation des OGM dans la production agricole n'est, pour l'instant, pas acceptée, ni du côté des agriculteurs et de leurs partenaires dans le secteur agroalimentaire, ni des consommateurs. Il subsiste des doutes quant à l'intérêt porté à l'utilisation des OGM dans l'agriculture, quant à la complexité de la mise en oeuvre dans le contexte d'une agriculture à petite échelle ou encore quant aux coûts de la coexistence pour les cultivateurs d'OGM (respect des distances avec les cultures conventionnelles, séparation des machines, outils, isolation des lieux de stockage). De plus, demeurent auprès de la population des doutes concernant la sécurité et la durabilité de la culture des OGM.

En revanche, s'il s'avérait que ces incertitudes étaient réduites dans le futur, que des variétés OGM trouvaient un écho positif pour l'agriculture et rencontraient une acceptation suffisante pour le consommateur, le Conseil fédéral se devrait de fixer les principes et normes de coexistence. Pour ce cas de figure, il envisage que la culture des OGM s'intègre sans dommage à l'agriculture à petite échelle et de proximité, et que la sécurité juridique en
matière de coexistence soit assurée. C'est la raison pour laquelle il propose une solution spécifique pour la coexistence et veut l'assujettir à des règles visant la concentration de production des OGM en des zones dédiées «zones avec OGM».

Le Conseil fédéral est d'avis que la concentration des parcelles dédiées à la culture d'OGM en zones avec OGM offre la possibilité de mettre en place des filières de production étanches de manière à garantir les standards en matière de choix du consommateur. La réglementation «zones avec OGM» proposée respecte la culture

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conventionnelle par l'application du principe du pollueur-payeur tout en conservant la disponibilité des produits non-OGM. Pour les producteurs d'OGM, la centralisation de leur production leur permet une économie d'échelle, l'exercice de la coexistence ne s'appliquant qu'en bordure des zones avec OGM comme bandeau étanche pour protéger les cultures sans OGM avoisinantes. Elle leur offre la possibilité de consacrer des filières spécifiques aux produits OGM dont la traçabilité est facilitée du champ à l'assiette.

Dans le contexte actuel, le Conseil fédéral trouve légitime de prolonger le moratoire. En revanche pour se préparer au mieux pour l'avenir et si les OGM bénéficiaient d'un certain intérêt, il se doit de proposer une alternative crédible et rationnelle. Pour ce cas de figure, le Conseil fédéral propose de concentrer la culture des OGM en «zones avec OGM», ce qui à son avis représente une solution cohérente pour surveiller l'exercice de la coexistence au cas par cas, sans être disproportionnée.

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Table des matières Condensé

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1

Présentation du projet 1.1 Contexte 1.1.1 Le génie génétique en Suisse 1.1.2 La situation juridique actuelle 1.1.2.1 La législation en vigueur 1.1.2.2 Le moratoire 1.1.2.3 Initiatives des cantons 1.1.2.4 Les nouvelles techniques de sélection des plantes 1.1.2.5 Projets de réglementation antérieurs 1.2 La nouvelle réglementation demandée 1.2.1 Prolongation du moratoire 1.2.2 Régler la coexistence 1.2.2.1 La coexistence entre OGM et non-OGM 1.2.2.2 Finalisation de la réglementation au vu des résultats PNR 59 1.2.2.3 Les zones avec OGM 1.3 Consultation et participation 1.4 Adéquation entre les tâches et les moyens financiers 1.5 Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

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2

Commentaire des dispositions

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3

Conséquences 3.1 Conséquences pour la Confédération 3.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les villes, les agglomérations et les régions de montagne 3.3 Conséquences économiques 3.3.1 Conséquences économiques pour les acteurs de la production agricole 3.3.2 Conséquences économiques pour les entreprises semencières 3.3.3 Conséquences pour le commerce de détail 3.3.4 Conséquences pour les entreprises actives dans le secteur du traitement des produits agricoles 3.3.5 Conséquences pour les consommateurs 3.3.6 Conséquences pour la recherche dans le domaine des biotechnologies vertes 3.3.7 Conséquences sur la société dans son ensemble 3.4 Conséquences sanitaires et sociales 3.5 Conséquences environnementales

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4

5

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies nationales du Conseil fédéral 4.1 Relation avec le programme de la législature 4.2 Relation avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

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Aspects juridiques 5.1 Constitutionnalité et conformité aux lois 5.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 5.2.1 Organisation mondiale du commerce (OMC) 5.2.2 Union européenne 5.3 Forme de l'acte à adopter 5.4 Frein aux dépenses 5.5 Respect des principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale 5.6 Délégation de compétences législatives 5.7 Conformité à la législation sur la protection des données

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Loi fédérale sur l'application du génie génétique au domaine non humain (Loi sur le génie génétique, LGG) (Projet)

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Message 1

Présentation du projet

Par le présent projet, le Conseil fédéral propose une architecture législative pour le court et moyen termes, destinée à répondre aux incertitudes, aux doutes et au rejet concernant la coexistence, c'est-à-dire l'utilisation simultanée des organismes génétiquement modifiés (OGM) et non-OGM dans l'agriculture. Les deux éléments importants de la révision de la loi sur le génie génétique proposée aux Chambres fédérales pour approbation sont, d'une part la prolongation du moratoire et d'autre part les principes de la réglementation concernant la coexistence entre OGM et nonOGM. Ce dispositif comprend également l'ajout relatif à la centralisation de l'utilisation des OGM dans l'agriculture suisse en des zones avec OGM.

Depuis l'adoption en 2003 de la loi du 21 mars 2001 sur le génie génétique (LGG) 1 qui pose les principes d'utilisation des OGM, des étapes significatives pour leur mise en oeuvre dans l'environnement ont été franchies. En 2008, les prescriptions détaillées de l'ordonnance du 10 septembre 2008 sur la dissémination dans l'environnement (ODE)2 concernant les disséminations expérimentales avec des OGM, ainsi que les questions de sécurité biologique et de santé humaine et animale relatives aux produits issus du génie génétique ont été révisées par le Conseil fédéral.

Depuis lors, la question de l'utilité et du risque de l'utilisation des produits OGM dans l'agriculture suisse est âprement discutée, entraînant des retards successifs dans la concrétisation des principes de la LGG, notamment la protection de la production exempte d'OGM et les mesures destinées à garantir le libre choix du consommateur.

Un projet d'ordonnance sur la coexistence a été préparé et soumis à consultation en 2005. Ce dernier a été ensuite retiré, faute d'intérêt suite à l'acceptation par le peuple et les cantons, le 27 novembre 2005, de l'initiative populaire interdisant l'utilisation d'OGM dans l'agriculture pendant cinq ans (moratoire).

En 2010, le législateur a décidé d'une prolongation de ce moratoire de trois ans sur l'utilisation d'OGM, motivée en premier lieu par la nécessité d'attendre les résultats du Programme National de Recherche 59 «Utilité et risques de la dissémination des plantes génétiquement modifiées» (PNR 59) dans le but de répondre aux questions non encore résolues et de légiférer sur la base
des plus récentes connaissances. Le législateur a lié cette interdiction temporaire à l'obligation de compléter le droit en matière de coexistence. En fin 2012, par le biais de la politique agricole 2014­2017 (PA 2014­2017) le Parlement a réitéré le renouvellement du moratoire pour quatre ans, mettant ainsi à disposition le temps pour la finalisation du régime sur la coexistence. Il a également attribué au Conseil fédéral le mandat d'élaborer une méthode applicable à l'évaluation de l'utilité des plantes génétiquement modifiées (PGM) et d'établir un bilan des coûts et bénéfice des plantes génétiquement modifiées pour l'agriculture (art. 187d LAgr3). Ce rapport dont la livraison est fixée pour la mi-2016 1 2 3

RS 814.91 RS 814.911 Loi fédérale du 29 avril 1998 sur l'agriculture (LAgr; RS 910.1).

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doit examiner la question des avantages potentiels des OGM par rapport aux produits et moyens de production agricoles conventionnels, tant pour l'environnement que pour les producteurs et consommateurs. Ce rapport complète le présent projet, fournissant une documentation détaillée pour la discussion parlementaire à venir.

En 2013, un projet de modification de la loi sur le génie génétique «Intégration des résultats du PNR 59 et des régions sans OGM» accompagnée d'un projet d'ordonnance sur la coexistence a été préparé et soumis à consultation publique. Ce dernier a été rejeté par la majorité des organisations du domaine de l'agriculture, de l'environnement et des consommateurs, ainsi que des cantons. D'une part ils ont refusé la production agricole d'OGM et d'autre part ont critiqué la proposition concernant les régions sans OGM, arguant que la charge de la coexistence devrait être supportée par les producteurs d'OGM selon le principe du pollueur-payeur.

Sur la base d'une expertise approfondie, des avis exprimés notamment lors de la consultation publique et des options de coexistence envisageables, le Conseil fédéral propose une réglementation bimodale: ­

Pour le court terme et tenant compte de l'avis de la population, de la majorité des cantons et des partenaires qui refusent l'ouverture de la Suisse à la culture des OGM, le Conseil fédéral entend prolonger le moratoire sur la base d'une justification plus large que celle faisant appel aux questions sanitaires.

­

Pour le moyen terme, il vise à ouvrir le débat sans tarder sur les options de coexistence envisageables pour la Suisse. En plus d'apporter la sécurité juridique nécessaire à la coexistence, le Conseil fédéral veut proposer un modèle pour la cohabitation de différents modes d'agriculture qui tienne compte du principe du pollueur-payeur. Il propose de gérer la culture des OGM en unités fonctionnelles sur des zones dédiées «zones avec OGM». La concentration de la production devrait permettre la mise en place de filières dédiées, minimisant ainsi le risque de mélanges involontaires entre production OGM et non-OGM et facilitant la traçabilité. De plus, pour les producteurs d'OGM parties prenantes de l'unité, l'exercice de la coexistence sera allégé, puisqu'il ne s'appliquera que dans la bordure intérieure des zones avec OGM comme bandeau étanche pour protéger les cultures sans OGM avoisinantes.

De cette manière, jusqu'à l'échéance du moratoire, le Conseil fédéral compte doter la Suisse d'une réglementation de la coexistence adaptée à la structure agricole, favorisant le développement de filières de production dédiées aux OGM, dans le but de protéger la diversité des autres filières exemptes d'OGM. En contrepartie et grâce à la planification et la gestion commune de la culture en zones avec OGM, les producteurs d'OGM bénéficieront de facilités relatives à la mise en oeuvre des mesures techniques et organisationnelles.

Le Conseil fédéral est d'avis que sa proposition bimodale, permettant le cas échéant d'ouvrir la voie d'une manière graduelle et contrôlée vers un mode de culture nouveau, tout en garantissant la disponibilité et protection de la culture sans OGM a l'avantage de défendre une agriculture diversifiée, à petite échelle qui tient compte de l'avis des acteurs concernés. Elle offre une alternative crédible au moratoire et 6307

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représente aussi une solution intégrative innovante. Visant la plus grande transparence, le Conseil fédéral entend séparer le débat de principe sur la culture des OGM et d'options pour la coexistence de celui relatif aux mesures d'ordre purement technique de la coexistence. Il a donc renoncé à formuler dans le cadre du présent projet une ordonnance détaillée sur la coexistence et présentera une proposition dans ce sens après le débat de principe.

1.1

Contexte

1.1.1

Le génie génétique en Suisse

La recherche en génie génétique, en particulier dans les domaines de la santé et de l'industrie pharmaceutique, jouit en Suisse d'une longue tradition qui remonte aux années 1970, époque des premières expériences de génie génétique en milieu confiné (laboratoires, installations de production, serres). Comme l'indiquent l'enregistrement des projets avec des OGM4 et la statistique selon l'ordonnance du 9 mai 2012 sur l'utilisation confinée (OUC)5, les activités (projets de recherche, analyses de diagnostic, production) avec des OGM n'ont cessé d'augmenter entre 1999 et 20156.

Il n'existe en Suisse que peu d'activités avec des plantes (biotechnologie verte) menées dans l'environnement, par rapport aux nombreuses activités utilisant des OGM en milieu confiné. Des demandes de disséminations expérimentales ont été déposées de manière sporadique jusqu'en 2012 (une demande en 2003, trois en 2007). Dès 2013, le nombre de demandes a augmenté (une par an entre 2013 et 2016) grâce au soutien financier décidé par le Parlement pour l'installation d'un site sécurisé à Zurich-Reckenholz (protected site) afin de soutenir la recherche dans le domaine de la biotechnologie verte (FRI 2013­20167):

4 5 6 7

­

En 2003, une demande de dissémination expérimentale de blé génétiquement modifié déposée par l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) a été autorisée (dissémination ayant eu lieu à Lindau de 2004 à 2005).

­

Dans le cadre du Programme national de recherche 59 «Utilité et risques de la dissémination des plantes génétiquement modifiées» (PNR 59), une demande de l'EPFZ et deux demandes de l'Université de Zurich ont été déposées et autorisées en 2007. Ces demandes portaient sur du blé génétiquement modifié et des plantes hybrides (croisement entre du blé génétiquement modifié et une plante sauvage Aegilops cylindrica).

Pratique mise en oeuvre par la Commission suisse de sécurité biologique [CSSB] au début des années 1980 (dès 1996: Commission fédérale de sécurité biologique CFSB).

RS 814.912 Rapport sur l'environnement 2011, publié par l'OFEV sur www.bafu.admin.ch/umwelt/10822/10823/index.html?lang=fr.

12.033 Message relatif à l'encouragement de la formation, de la recherche et de l'innovation pendant les années 2013 à 2016, FF 2012 2857.

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­

En 2016 trois disséminations expérimentales sont en cours: ­ dissémination expérimentale de lignées de blé génétiquement modifié avec une résistance améliorée contre l'oïdium dans le but d'étudier le fonctionnement des gènes de résistance des plantes et de clarifier des aspects relatifs à la biosécurité; ­ dissémination expérimentale de lignées de pommes de terre génétiquement modifiées (cisgéniques) avec une résistance améliorée contre le mildiou dans le but de vérifier la résistance contre les isolats locaux (Suisses) du pathogène, d'analyser les propriétés phénotypiques et de clarifier des aspects relatifs à la biosécurité; ­ dissémination expérimentale de pommiers génétiquement modifiés (cisgéniques) avec une résistance améliorée contre le feu bactérien dans le but d'évaluer si la lignée cisgénique présente des différences morphologiques, physiologiques et génétiques par rapport à la variété initiale Gala Galaxy et à clarifier certains aspects relatifs à la biosécurité.

Le nombre de produits OGM8 dont la mise en circulation a été autorisée est, lui aussi, relativement restreint à l'heure actuelle. Sont autorisés à ce jour quatre produits OGM au titre de denrées alimentaires et d'aliments pour animaux (maïs et soja), quatre enzymes, vitamines et autres produits OGM. En dépit des autorisations actuelles, on ne trouve pour l'instant aucune denrée alimentaire génétiquement modifiée dans les rayons des magasins, et, depuis fin 2007, plus aucun aliment pour animaux génétiquement modifié n'a été importé9.

1.1.2

La situation juridique actuelle

1.1.2.1

La législation en vigueur

L'art. 120 de la Constitution fédérale (Cst.), qui remonte à 1992, protège l'être humain et son environnement contre les abus en matière de génie génétique (al. 1).

La Confédération a pour mandat de légiférer sur l'utilisation du patrimoine germinal et génétique des animaux, des végétaux et des autres organismes; ce faisant, elle est tenue de respecter l'intégrité des organismes vivants et la sécurité de l'être humain, de l'animal et de l'environnement et de protéger la diversité biologique des espèces animales et végétales (al. 2).

En exécution de ce mandat, les Chambres fédérales ont adopté la LGG le 21 mars 2003. Le Conseil fédéral a fixé au 1er janvier 2004 l'entrée en vigueur de cette loi et des diverses modifications apportées aux lois et ordonnances régissant notamment l'utilisation d'OGM. La LGG prévoit différents principes relatifs à l'utilisation des OGM: selon le principe de précaution, les dangers et les atteintes liés aux OGM doivent être limités le plus tôt possible10. Le principe de précaution est concrétisé par l'obligation légale d'évaluer les risques par étapes successives (principe du 8 9 10

Registre des autorisation OSAV: www.blv.admin.ch/themen/04678/04817/04833/04840/index.html?lang=fr.

Statistique des importations d'aliments OGM pour animaux, établie par l'OFAG.

Art. 2, al. 1 LGG

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«step-by-step»). L'application de la procédure par étapes permet de générer le savoir nécessaire afin de tester progressivement et précautionneusement les risques d'une exposition à un OGM d'un milieu très contrôlé (milieu confiné) à un milieu ouvert (l'environnement). En procédant de cette manière, il est possible de combler les lacunes en matière de données scientifiques pour évaluer les risques lorsque les technologies sont récentes et que l'expérience fait défaut. Concrètement la LGG exige que l'utilisation d'un OGM donné dans l'environnement ne soit autorisée que si des essais préalables en milieu confiné et des disséminations expérimentales ont établi que la sécurité biologique est garantie11. En revanche la LGG interdit que les vertébrés dont le patrimoine génétique a été modifié soient élevés et mis en circulation hormis à des fins scientifiques, thérapeutiques ou de diagnostic médical ou vétérinaire12.

Ainsi, les activités utilisant des OGM qui ne sont pas encore autorisées doivent se dérouler en milieu confiné13. Selon l'évaluation du risque, l'activité concernée est soumise à notification ou à autorisation14, les détails et la procédure étant réglés par l'ordonnance sur l'utilisation confinée, qui a fait l'objet d'une révision totale en 2012.

Si les résultats recherchés ne peuvent être obtenus par des essais réalisés en milieu confiné, les OGM peuvent être disséminés à titre expérimental pour autant que la sécurité de l'être humain, de l'animal et de l'environnement ainsi que la diversité biologique soient garanties15. Les disséminations expérimentales sont soumises à l'autorisation de la Confédération16, les détails et la procédure étant réglés par l'ODE, qui a fait l'objet d'une révision totale en 2008.

Enfin, la mise en circulation d'OGM est, elle aussi, soumise à l'autorisation de la Confédération17, les détails et la procédure étant également réglés par l'ODE.

L'autorisation est subordonnée à une évaluation exhaustive des risques pour la santé et l'environnement qui doit établir que l'organisme concerné n'a pas d'effet indésirable sur l'environnement, et notamment qu'il ne porte pas atteinte à une population d'organismes protégés, qu'il ne provoque pas la disparition involontaire d'une espèce, qu'il ne perturbe pas gravement ou à long terme l'équilibre des composantes de
l'environnement ou des fonctions importantes de l'écosystème et qu'il ne se propage pas ni ne propage ses propriétés de manière indésirable18. Dans le cadre de la mise en circulation d'OGM, il convient en outre de garantir en tout temps la protection d'une production exempte d'OGM et le libre choix des consommateurs 19.

À l'heure actuelle, l'art. 9 ODE concrétise la protection d'une production d'organismes exempte d'OGM et fixe, dans les grandes lignes, certaines conditions relatives à la culture d'OGM à l'échéance du moratoire: il exige notamment que des 11 12 13 14 15 16 17 18 19

Art. 6, LGG Art. 9, LGG Art. 10, al. 1, LGG Art. 10, al. 2, LGG Art. 6, al. 2, LGG Art. 11, al. 1, LGG Art. 12, al. 1, LGG Art. 6, al. 3, LGG Art. 7 et 15 à 17 LGG

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distances entre cultures avec OGM et cultures sans OGM soient respectées (al. 1, let. a), que des mesures soient prises pour minimiser les pertes d'organismes génétiquement modifiés (al. 1, let. c) et qu'un système d'assurance de la qualité soit aménagé en cas de mise en circulation d'OGM (al. 3); il fixe également une obligation de documentation étendue (al. 1 à 5). Est interdite l'utilisation directe d'OGM, notamment leur culture, dans des biotopes et des paysages particulièrement sensibles ou dignes d'être protégés, c'est-à-dire dans des zones où la nature ou le paysage sont protégés en vertu du droit fédéral ou cantonal, dans les cours d'eau et les plans d'eau, dans les forêts et les districts francs de chasse20.

1.1.2.2

Le moratoire

Avec, pour toile de fond, la situation juridique telle qu'elle vient d'être décrite, le peuple et les cantons ont approuvé, le 27 novembre 2005, l'art. 197, ch. 7, Cst., lequel prévoit que l'agriculture suisse n'utilise pas d'OGM durant cinq ans. Le 10 mars 2010, les Chambres ont décidé de prolonger de trois ans le moratoire constitutionnel qui a été transposé sous forme d'un nouvel article, sans modification de sa portée matérielle, dans la loi sur le génie génétique21, la conséquence étant que certaines parties de la loi ne sont pas applicables durant ce délai. Parallèlement à l'interdiction temporaire, est ancré dans cet article le mandat au Conseil fédéral d'élaborer dans le délai imparti (jusqu'au 27 novembre 2013), les dispositions d'exécution nécessaires à la culture des OGM (cf. aussi la réponse à l'interpellation Amacker 09.374222 et le message 09.05623).

Le 28 février 2012, la motion Ritter (12.3028) a été déposée au Conseil national, appuyée par 121 signataires. Elle demandait au Conseil fédéral de préparer les bases légales pour prolonger le moratoire actuel sur l'utilisation des OGM dans l'agriculture. Les raisons invoquées étaient: le scepticisme de la population vis-à-vis des OGM, l'absence d'avantages pour l'agriculture suisse des variétés OGM actuellement disponibles ou à venir et les coûts engendrés par les mesures de coexistence.

Finalement la motion se référait à la tâche constitutionnelle de l'agriculture, qui est de répondre aux exigences du développement durable et du marché. Elle voyait dans le moratoire un moyen de profiler l'agriculture suisse sans OGM comme une agriculture de qualité.

Lors de l'examen de la PA 2014­2017, l'objet de la motion Ritter (proposition Walter 98) a été soumis par la CERN, incitant le Conseil national à accepter une prolongation du moratoire de quatre ans le 26 septembre 2012 (par 112 voix contre 62), sans procédure de consultation. La motion Ritter a en outre été acceptée par le même conseil le 28 septembre 2012 par 123 voix contre 62.

20 21 22 23

Art. 8, ODE Art. 37a, LGG Réponse du CF à l'interpellation Amaker 09.3742, https://www.parlament.ch/f/suche/pages/geschaefte.aspx?gesch_id=20093742.

Message 09.056 relatif à une prolongation du moratoire sur l'utilisation des OGM dans l'agriculture: www.news.admin.ch/NSBSubscriber/message/attachments/16388.pdf.

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Le 5 décembre 2012, en ligne avec le Conseil national, le Conseil des États a également voté une prolongation du moratoire de quatre ans. Dans ses débats, il a privilégié par 22 voix contre 12 la proposition Walter à celle de Gutzwiler (prolongation de trois ans) soutenue par le Conseil fédéral. Ainsi le traitement de la motion Ritter, tel que proposé par le Conseil fédéral, est devenue caduc.

Au travers de la prolongation du moratoire (renouvellement de l'art. 37a LGG) le mandat donné par le Parlement d'élaborer une réglementation de la coexistence s'est vu automatiquement prolongé. À ce mandat ont été ajoutés l'examen et la prise en compte des résultats du PNR 59 dans le but de finaliser une réglementation de la coexistence basée sur l'état récent de la science et sur une base juridique suffisamment sûre.

1.1.2.3

Initiatives des cantons

En phase avec la première discussion relative à la prolongation du moratoire, les cantons de Genève, de Berne, du Jura et de Neuchâtel avaient déposé des initiatives, respectivement le 2 mai, le 14 mai, le 18 décembre 2008 et le 30 mars 2009 qui proposaient de prolonger le moratoire alors fixé à l'art. 197, ch. 7, Cst.

Début 2016, quatre cantons avaient interdit l'utilisation des OGM dans leur agriculture (TI, FR, GE, JU,) en vertu de leur droit cantonal, sous réserve de la primauté du droit fédéral24. Jugeant positif le fait de renoncer à la culture des PGM, tant du point de vue de l'agriculture que de celui des consommateurs, ces cantons ont clairement exprimé leur réserve envers l'utilisation de cette technologie dans l'agriculture. Ils ont réclamé, avant tout, plus de temps afin que soit élucidée la question de la coexistence des cultures OGM et des cultures conventionnelles, notamment en faisant référence aux structures agricoles à petite échelle de leur agriculture. D'autres cantons (BE, GR, VD, ZH) soutiennent l'option nationale du moratoire ou sont en discussion d'options cantonales ou régionales. En 2013, 85 communes s'étaient déclarées sans OGM.

1.1.2.4

Les nouvelles techniques de sélection des plantes

Les «ciseaux à ADN» sont l'outil clé de cette nouvelle génération de technologies de sélection végétale (New Plant Breeding Techniques, NPBT). Ces techniques permettent d'améliorer les caractéristiques des organismes via l'ingénierie génétique.

Comparées aux techniques de transgénèse traditionnelles, les NPBT permettent de modifier le génome de plantes avec une facilité et une précision sans précédent. Les produits issus de ces technologies pourront voir l'expression de leurs gènes altérées (activation, inhibition, mutation), et offrent ainsi de nouvelles modalités de modification des génomes. Parmi celles-ci figure l'édition de gènes qui utilise la nucléase CRISPR-Cas9 (nucléases associées à un guide de type ARN), dont l'utilisation est 24

Pour un survol, cf. Epiney/Waldmann/Oeschger/Heuck, p. 132 ss.; pour la problématique de la compatibilité de ces dispositions cantonales avec le droit fédéral, cf. p. 141 s et p.146 www.bafu.admin.ch/biotechnologie/13902/13908/index.html?lang=de.

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particulièrement prometteuse, mais aussi ses techniques cousines, ZFN (nucléases à doigts de zinc), TALENs (nucléases effectrices de type activateur de transcription), la mutagenèse dirigée par oligonucléotides et la sous-activation de gènes par interférence ARN. Bien que peu onéreuses, précises et rapides, les modifications induites par les NPBT ne sont pas totalement fiables (effets hors-site, «off targets») et on ne dispose pas d'assez de recul sur leur utilisation. Ainsi, d'autres sites du génome peuvent être modifiés (mutations), avec toutes les difficultés liées à la localisation de ces modifications secondaires involontaires et aux conséquences éventuelles sur l'organisme. Théoriquement, il serait possible de détecter n'importe quelle mutation existante, mais son origine (naturelle ou induite par une NPBT) est invérifiable, ce qui pose un problème de traçabilité évident. Dès lors ces nouvelles techniques de transformation du vivant pourraient créer des organismes génétiquement modifiés sans transgènes. Leur statut juridique désormais dépassé, en particulier en ce qui concerne les définitions (ODE; Directive 2001/18/CE25) et la difficile traçabilité de leurs produits pourraient rendre ces techniques attractives pour l'industrie, si elles permettent d'échapper à l'obligation d'étiquetage.

La Commission européenne a lancé dès 2007 un groupe de travail dédié aux NPBT.

Pourtant à ce jour, les deux directions compétentes, celles de l'environnement et de la consommation, n'annoncent aucune prise de position rapide, alors que cette urgence était mise en avant lors de la présentation des travaux du groupe de travail du comité scientifique. La Commission n'étant pas décisionnaire, c'est la Cour de justice européenne qui pourra seule trancher, si elle est saisie par un industriel, une association, ou par l'effet d'une question spécifique préjudicielle sur la qualification OGM des NPBT.

Le Conseil fédéral est conscient des défis posés par le développement fulgurant de l'application de ces nouvelles technologies (notamment concernant la technologie CRISPR-Cas9, dont les premières publications datent seulement de 2012), tant au niveau des potentiels d'utilisation et des risques encourus, que de leur statut juridique. Il est aussi d'avis que certaines nouvelles techniques de sélection des variétés
végétales mettent en question la limite entre sélection conventionnelle et génie génétique. Le domaine d'application fixé dans le droit en vigueur ne reflète plus l'évolution technique dans le domaine du génie génétique. Comme il l'a exprimé dans sa réponse à la question parlementaire (15.1022 Munz intitulée: «Besoin de ré1glementation) dans le domaine du génie génétique. Comment définir un OGM?», il attend les résultats des expertises et des réflexions entamées au sein des administrations compétentes et il observe également la situation dans les pays avoisinants avant de se déterminer sur cette question. S'agissant du présent projet, la définition du statut des NPBT est pertinente car elle définira si leur utilisation est soumise aux règles de la coexistence. On peut néanmoins souligner que dans le cas hypothétique d'une demande de mise sur le marché de produits issus de NPBT, les outils réglementaires et légaux existants permettraient de statuer au cas par cas: les art. 159 et 160 de la LAgr permettent en effet au Conseil fédéral de réguler la mise en circulation de ces produits. Bien que le cadre légal puisse être temporairement suffisant, une prise de position est néanmoins en cours d'élaboration au sein des offices concernés.

25

OJ L 106, 17.4.2001, p. 1­39

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1.1.2.5

Projets de réglementation antérieurs

Ordonnance sur la coexistence Bien qu'aucune demande pour la mise en circulation de semences génétiquement modifiées n'ait encore été déposée26 suite à l'entrée en vigueur de la LGG en 2004, il manquait la concrétisation des dispositions de la LGG et de la LAgr relatives à la coexistence, notamment celles concernant la question emblématique des distances d'isolement à respecter entre cultures OGM et cultures conventionnelles. Ce fut chose faite avec l'élaboration d'un projet d'ordonnance sur la coexistence 27 mis en consultation publique en octobre 2005.

Au regard des avis émis lors de la consultation publique qui réclamaient un réexamen du projet à l'échéance du moratoire, le département concerné a décidé de suspendre les travaux jusqu'à l'échéance du programme national de recherche PNR 59 lancé en 2005, afin qu'il soit possible de prendre en compte les résultats de ce dernier.

Programme national de recherche PNR 59 Le 2 décembre 2005, peu après l'acceptation de l'initiative populaire «pour des aliments produits sans manipulations génétiques», le PNR 5928 intitulé «Utilité et risques de la dissémination des plantes génétiquement modifiées» a été lancé afin d'acquérir des connaissances supplémentaires sur l'utilité et les risques potentiels des PGM. Il s'agissait alors de préciser certains aspects particulièrement pertinents pour l'agriculture suisse, constituée essentiellement de petites exploitations: la coexistence de cultures conventionnelles avec celles issues du génie génétique. En outre, d'autres aspects liés à une agriculture utilisant des PGM ont également été étudiés, afin de déterminer dans quelle mesure une telle agriculture serait acceptée par la société helvétique, si elle serait économiquement plus rentable et plus écologique, et finalement si les consommateurs pourraient aussi en tirer bénéfice.

Projet de réglementation de la coexistence «Intégration des résultats du PNR 59» et des «régions sans OGM» Considérant les résultats d'un projet juridique du PNR 5929, démontrant que la LGG actuellement en vigueur ne peut pas servir de base légale exhaustive pour une ordonnance centralisant toutes les mesures techniques agricoles s'appliquant à la coexistence, le Conseil fédéral a trouvé légitime de modifier la LGG. Il a ainsi voulu créer d'une part une assise légale au régime de coexistence envisagé et d'autre part, intégrer toutes les mesures nécessaires à garantir la coexistence entre OGM et non26 27

28 29

Ordonnance du 7 décembre 1998 sur la production et la mise en circulation du matériel végétal de multiplication (Ordonnance sur le matériel de multiplication, RS 916.151).

Ordonnance sur les mesures de coexistence lors de la culture de plantes génétiquement modifiées et lors de l'utilisation du produit de la récolte (projet du 3 octobre 2005) www.admin.ch/ch/f/gg/pc/documents/1292/Vorlage_f.pdf.

Programme national de recherche 59 (PNR 59): www.nfp59.ch/f_portrait_details.cfm.

Schweizer et al., Koexistenz der Produktion mit und ohne gentechnisch veränderte Organismen in der Landwirtschaft, Rechtsvergleich sowie Grundlagen und Vorschläge für die künftige Regulierung der Schweiz, Zürich/St.Gallen 2012.

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OGM et la séparation des filières du lieu de production à la distribution, à l'exclusion de ce qui est déjà réglé dans le droit spécifique (denrées alimentaires ou aliments pour animaux par exemple).

En 201230, le Conseil fédéral a proposé un nouveau projet de réglementation de la coexistence comprenant la création de régions avec une agriculture exempte d'OGM «régions sans OGM» ainsi qu'une nouvelle ordonnance sur la coexistence.

Il a chargé le DETEC et le DEFR de procéder à une consultation publique qui a été menée du 31 janvier 2013 au 15 mai 201331, dont les résultats ont montré un fort rejet du projet de réglementation proposée.

1.2

La nouvelle réglementation demandée

1.2.1

Prolongation du moratoire

Au-delà du débat sur la faisabilité de la coexistence, la question de la culture simultanée d'OGM et non-OGM ouvre un débat sur les modèles de production agricoles et l'organisation des activités agricoles au sein des territoires ruraux. A l'étranger, dans les pays grands producteurs d'OGM, l'agriculture s'inscrit dans une logique d'industrialisation, visant la compétitivité. Or, en Suisse l'application de ce type de modèle de production agricole est fortement remis en cause. En effet, outre les aspects quantitatifs (rendements), l'agriculture suisse doit également répondre à des exigences en termes de sécurité sanitaire (réduction des utilisations de pesticides), et doit prendre en compte les impacts environnementaux.

Diverses consultations publiques32 et enquêtes33 ont montré la réticence toujours grandissante des partenaires34 et de la population vis-à-vis des OGM.

Les objections formulées par la majorité des citoyens, des cantons et des partenaires quant à l'introduction de la production d'OGM dans l'agriculture suisse ne font pas référence à une potentielle insécurité juridique actuelle, mais aux réticences d'ouvrir la production suisse aux OGM et ce pour des raisons qui dépassent largement l'aspect sanitaire initialement invoqué. Elles sont motivées par les nombreuses questions encore ouvertes, telles que la menace de la sécurité biologique, les risques pour la biodiversité, les eaux et le sol, les risques résiduels inexplorés, la complexité 30 31

32

33

34

Art. 37a LGG Rapport sur les résultats de la procédure de consultation relative à la modification de la loi fédérale sur le génie génétique (Intégration des résultats du PNR 59 et des régions sans OGM) et à l'ordonnance sur la coexistence, www.news.admin.ch/NSBSubscriber/ message/attachments/42317.pdf.

Rapport sur les résultats de la procédure de consultation relative à la modification de la loi fédérale sur le génie génétique (Intégration des résultats du PNR 59 et des régions sans OGM) et à l'ordonnance sur la coexistence, www.news.admin.ch/NSBSubscriber/ message/attachments/42317.pdf.

Bericht über die Stakeholder-Workshops zu den überarbeiteten Koexistenzregelungen zwischen GVO und nicht-GVO www.news.admin.ch/NSBSubscriber/message/ attachments/42319.pdf.

Associations non gouvernementales et des consommateurs, représentants de l'agriculture, de la production alimentaire, de la recherche, de l'économie et les commission extraparlementaires concernées.

6315

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de la mise en oeuvre dans le contexte d'une agriculture à petite échelle ou les coûts de la coexistence pour les cultivateurs d'OGM (perte de surface agricole pour respecter les distances par rapport aux cultures conventionnelles, séparation des machines, et outils, lieux de stockage séparés), l'inadéquation des variétés OGM actuellement à disposition pour l'agriculture suisse ou les craintes des consommateurs de ne plus pouvoir choisir entre produits OGM et non-OGM.

Tenant compte de ces objections, le Conseil fédéral entend prolonger le moratoire sur la base d'une justification plus large que celle faisant appel aux questions sanitaires. Il est d'avis que sans discussion de fond, les conditions techniques et matérielles de la coexistence ne peuvent pas être abordées, et conduiront de facto à un refus ou à un ralentissement du processus réglementaire. Par la prolongation du moratoire de quatre ans, il offre au législateur la possibilité de débattre de manière approfondie, objective et sereine des avantages et inconvénients liés l'introduction des OGM ou de toute autre innovation, en termes d'impacts économiques et environnementaux. Le Conseil fédéral a toujours considéré qu'il n'était pas approprié d'interdire définitivement l'utilisation d'une technologie, ce qui, à son avis, représenterait un obstacle à l'innovation. Il pense nécessaire que la discussion porte sur la possibilité pour l'agriculture d'utiliser des technologies de pointe pour produire à l'avenir des biens contribuant à résoudre les enjeux futurs (impératifs de production, raréfaction des ressources, énergie, effet de serre, diminution des impacts environnementaux). C'est la raison pour laquelle il associe sa proposition de prolongation du moratoire à des propositions concernant la coexistence, qu'il estime raisonnables et proportionnelles pour l'avenir. En outre, la LGG prévoit l'encouragement du dialogue et l'implication des partenaires et des experts, en tant que concrétisation du principe de précaution. Les propositions de moratoire et les «zones avec OGM» sont donc en ligne avec l'intention de la LGG.

1.2.2

Régler la coexistence

Après avoir examiné dans le détail de nombreuses variantes possibles pour la réglementation de la coexistence et pris bonne note des résultats des différentes consultations publiques menées sur le sujet, le Conseil fédéral est d'avis qu'une prolongation de moratoire ne peut être envisagée sans proposer simultanément une alternative.

Celle-ci consiste en une réglementation de la culture des OGM répondant à des standards exigeants.

Considérant l'expertise juridique du PNR 59 (voir sous 1.1.2.3), le Conseil fédéral maintient que la LGG actuellement en vigueur ne peut pas servir de base légale exhaustive pour ordonner toutes les mesures techniques agricoles pour la coexistence. Dès lors, il propose de compléter la LGG, de façon à légitimer le régime de coexistence envisagé et à intégrer toutes les mesures nécessaires à garantir la coexistence entre OGM et non OGM et la séparation des filières du lieu de production à la distribution, à l'exclusion de ce qui est déjà réglé dans le droit spécifique (denrées alimentaires ou aliments pour animaux par exemple).

La culture des OGM telle que pratiquée actuellement répond à des impératifs d'intensification et de mécanisation. En effet l'énorme majorité des OGM commer6316

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cialisés aujourd'hui ont été développés afin de répondre à un besoin de stabilisation des rendements et de flexibilisation des itinéraires techniques (réduction du temps de travail à l'hectare) sur un modèle d'agriculture intensive répandue sur le continent américain. On constate également dans les pays concernés la domination progressive et inévitable de ce mode de culture. Or l'agriculture suisse se pratique sur des surfaces relativement petites, elle est diversifiée et se veut une agriculture de proximité et de qualité, des spécificités qui rendent les OGM peu attractifs pour les agrosystèmes suisses. Se basant sur ces faits, la question se pose de savoir si la culture d'OGM pratiquée au niveau individuel et de facto disséminée sur le territoire serait compatible avec le maintien des valeurs de l'agriculture suisse.

La coexistence de modes de production selon des cahiers des charges distincts (entre la production conventionnelle, production intégrée et production biologique) est pratiquée avec succès par l'agriculture suisse. En revanche la coexistence de la culture de différentes variétés OGM vis-à-vis de l'ensemble des autres variétés produites sans OGM est d'une autre nature. Dans le premier cas la reconnaissance de la pureté des produits est volontaire, même si elle répond à des standards fixés.

Dans le cas de la coexistence entre OGM et autres cultures, garantir la pureté des variétés non-OGM est une obligation, dont le non-respect est punissable. L'instauration d'éventuelles filières OGM devra avant tout préserver la liberté de choix et l'identité des agriculteurs de toutes les autres filières.

La complexité du système met en lumière la nécessité de coordonner les activités des agriculteurs et de leurs partenaires à l'échelle des bassins de production. Le Conseil fédéral est persuadé que si coexistence il y a, elle doit être envisagée d'une manière spécifique à la situation en Suisse. À son avis, la coexistence doit être administrée non pas sur un mode individuel, mais sur un mode collectif avec l'appui d'un organe de contrôle. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral propose les «zones avec OGM».

1.2.2.1

La coexistence entre OGM et non-OGM

Il est établi que, pour rendre les filières de production étanches «de la fourche à la fourchette» comme l'impose la LGG déjà aujourd'hui (art. 7 et 16)35, des mesures doivent être prises tout au long de la filière de production: en champs, dans les lieux de stockage et exploitations agricoles, dans les lieux de transformation (moulins etc.)

et de distribution, et lors des transports. Les mesures les plus emblématiques de la coexistence, également largement discutées, sont les distances d'isolation entre cultures OGM et non-OGM. Comme mentionné, la LGG impose déjà à l'heure actuelle de prendre des précautions particulières pour éviter les mélanges entre OGM et non-OGM et pour protéger les cultures conventionnelles. Le présent projet de modification de la LGG définit les exigences requises, notamment le respect des distances d'isolation par rapport aux cultures conventionnelles. S'ajoutent à cette obligation d'autres mesures de coexistence pour éviter les mélanges accidentels entre OGM et non-OGM, qui dépendent des variétés considérées, du type de produc35

Voir aussi: Elemente zum Verständnis von Art. 7 GTG vom Christoph Erass, dans Collection de droit rural, Ed Dike, en préparation.

6317

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tion, ainsi que de facteurs exogènes prédictibles (surface du champ OGM, configuration paysagère et topographique), et d'autres paramètres moins maîtrisables et répondant à des spécificités locales et temporaires comme la direction ou la puissance des courants locaux qui affectent la dispersion du pollen. Il existe une étroite corrélation entre le morcellement des parcelles, le nombre d'agriculteurs et la complexité, le coût de l'application des mesures de coexistence autour des parcelles cultivées avec des OGM36.

Au regard des conditions d'application pour garantir la coexistence au lieu de production et le long de la filière de production, la coexistence sur le lieu de production est actuellement réglementée d'une manière rudimentaire (art. 9 ODE). En ce qui concerne la séparation des flux de marchandises, elle est réglée au sein du droit sur l'alimentation37. La coexistence entre systèmes de production basés sur une même espèce n'est pas nouvelle en soi pour l'agriculture, et de nombreuses filières classiques sont déjà confrontées à cette problématique. En revanche, dans le cas des OGM, le but visé n'est pas le même puisqu'il s'agit de protéger l'ensemble de la production agricole contre des mélanges provenant de la production des OGM.

La coexistence doit définir des modalités d'agencement des parcelles dans le temps et dans l'espace, afin de limiter les croisements ou les mélanges fortuits entre cultures génétiquement modifiées et cultures conventionnelles ou biologiques. Les mesures de coexistence doivent inclure des mesures techniques, physiques et organisationnelles pour éviter le mélange entre OGM et non-OGM ainsi que la dissémination non volontaire au niveau de la parcelle agricole et de ses environs (distances d'isolation, arrachage des repousses). À ces dernières s'ajoutent des mesures d'isolement sur les lieux de stockage et de transformation permettant de garantir la séparation des filières. Doivent également être prévues des mesures organisationnelles adéquates (annonce préalable de la culture des OGM, registre en ligne) et des mesures de communication (information sur le produit et le mode d'utilisation). La coexistence de différents modes de production met en lumière la nécessité de coordonner les activités des agriculteurs et de leurs partenaires à l'échelle des bassins de production.
Le Conseil fédéral entend ouvrir un débat de fond sur l'architecture du futur régime de coexistence. Ainsi, il juge opportun de séparer les discussions de principe des discussions techniques sur la coexistence. C'est la raison pour laquelle la présente proposition ne détaille pas les prescriptions techniques nécessaires à l'application de la coexistence (notamment les distances de séparation, le décalage de la floraison, les itinéraires techniques), qui feront, le cas échéant, l'objet d'un projet ultérieur (ordonnance sur la coexistence).

36 37

Modèle évaluation des coûts de la coexistence Forschunginstitut für Biolandbau FiBL: www.bioaktuell.ch/de/pflanzenbau/gvo-bedeutung.html.

Loi fédérale du 9 octobre 1992 sur les denrées alimentaires et les objets usuels (LDAI; RS 817.0) et ordonnances spécifiques.

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1.2.2.2

Finalisation de la réglementation au vu des résultats PNR 59

L'adaptation des dispositions de la loi sur le génie génétique prévue par le présent projet se fonde à la fois sur les connaissances scientifiques acquises dans le cadre des projets du PNR 59, qui sont avant tout importantes pour l'élaboration d'une réglementation de la coexistence au niveau de l'ordonnance, et sur les résultats du projet du PNR 59 intitulé «Coexistence de la production de plantes avec et sans technique génétique ­ possibilités de régularisation juridique et réalisation dans la pratique» (projet de coexistence), mené sous la direction du Prof. Rainer J. Schweizer38. Il convient avant tout, parallèlement à l'examen détaillé de la législation suisse actuelle dans le domaine de la coexistence et aux comparaisons avec le droit européen et international, de prendre en considération les recommandations des auteurs concernant un éventuel règlement de la coexistence.

Les auteurs proposent de conserver la norme ciblée de l'art. 7 LGG mais de créer en outre, dans la LGG, une norme détaillée de délégation de compétence au Conseil fédéral pour édicter des dispositions visant à garantir la coexistence de différentes formes de production39. La formulation générale de l'art. 7 LGG, ainsi que les éventuelles autres normes de délégation de la LGG qui peuvent également s'appliquer ponctuellement (p. ex. art. 12, art. 16, al. 2, art. 19 LGG), permettent de conclure que seule une réglementation très rudimentaire de la coexistence pourrait s'appuyer sur les bases légales actuelles de la LGG40. Le Conseil fédéral est d'avis que la LGG doit être complétée par des normes de délégation choisies afin que le régime de coexistence puisse être mis en oeuvre de manière cohérente et définitive, ne serait-ce que pour garantir une plus grande sécurité juridique dans ce domaine. Le projet prévoit donc une adaptation de l'art. 7 par l'intégration d'un nouvel al. 2, selon lequel le Conseil fédéral est habilité à édicter des dispositions visant à protéger la production de produits exempts d'organismes génétiquement modifiés et le libre choix des consommateurs (cf. chap. 2). L'étendue de la norme de délégation de l'art. 16, al. 2, LGG relative à la séparation des flux des produits doit également être précisée. Une norme de délégation dans le domaine de la formation des personnes utilisant des organismes génétiquement
modifiés est en outre prévue (art. 15a). Le Conseil fédéral tient ainsi compte des résultats du PNR 59.

Par ailleurs, les auteurs d'une autre étude du PNR 59, intitulée «Concepts relatifs à l'accomplissement de l'information publique conformément à la loi sur le génie génétique» (projet d'information) estiment que des mesures doivent également être prises dans d'autres domaines. Ils proposent de mieux séparer les dispositions relatives aux possibilités d'information existant dans le cadre du droit de la procédure administrative (p. ex. la consultation des dossiers) de celles qui touchent à l'infor38

39 40

Projet intitulé «Koexistenz von Pflanzenproduktion mit und ohne Gentechnik ­ Möglichkeiten der rechtlichen Regulierung und der praktischen Umsetzung», cf. résumés en allemand et en anglais sous: www.nfp59.ch/files/dokumente/Schweizer_Rainer_J._2_Summary_D_E.pdf; cf. Rainer Schweizer et.al., Koexistenz der Produktion mit und ohne gentechnisch veränderte Organismen in der Landwirtschaft, Zürich / St. Gallen 2012.

Schweizer et.al., Koexistenz, N 53.

Cf. ibid., N 91

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mation et au dialogue avec le public. Qui plus est, ils relèvent un potentiel d'amélioration dans les activités de communication des commissions et dans l'utilisation des moyens de communication modernes41. Le Conseil fédéral estime que, dans ce domaine, les bases existant dans la LGG, en particulier l'art. 18, ainsi que les dispositions de la loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (LTrans) 42 sont suffisantes.

Il a par ailleurs déjà exposé, dans son rapport donnant suite au postulat Leumann43, dans quelle mesure il mène et promeut le dialogue dans le domaine du génie génétique.

Les auteurs du projet d'information proposent, en outre, une nouvelle réglementation de la désignation des produits génétiquement modifiés et des valeurs-seuils qui s'y rapportent. Ils suggèrent d'introduire, dans la LGG (art. 17), une définition générale des traces involontaires d'OGM que les ordonnances concernées (ordonnance sur la dissémination dans l'environnement, ordonnance sur le matériel végétal de multiplication, ordonnance sur les denrées alimentaires, etc.) pourraient à l'avenir utiliser comme base dans leur propre réglementation; ils prévoient également un renvoi aux organismes génétiquement modifiés autorisés dans des pays tiers. Le Conseil fédéral est d'avis que les dispositions actuelles concernant la désignation et les valeurs-seuils n'ont pas besoin de faire l'objet d'une harmonisation aussi étendue que celle proposée par les auteurs car les conditions de mise en circulation et de désignation ne sont pas les mêmes, en particulier pour les semences, les aliments pour animaux et les denrées alimentaires, et qu'il faut, par ailleurs, faire une distinction entre l'utilisation directe et indirecte dans l'environnement.

Les auteurs du projet de coexistence estiment que les dispositions relatives à la responsabilité civile figurant dans la LGG (art. 30 ss) doivent également être adaptées. Outre une critique de principe du «privilège de l'agriculteur» (canalisation de la responsabilité sur le détenteur de l'autorisation), ils regrettent avant tout le manque de clarté de la notion de dommage. Ils considèrent que les dommages potentiels lors de croisements de PGM avec des variétés non génétiquement modifiées sont des dommages purement économiques qui ne peuvent, selon la LGG, donner lieu à un dédommagement
que s'ils résultent d'un acte illicite. La LGG ne comportant pas de norme de protection à cet égard, ces dommages ne sont pas couverts, et les dispositions générales du droit de la responsabilité civile (art. 41 CO) sont dépourvues d'utilité44. Le Conseil fédéral considère que les dispositions relatives à la responsabilité sont le fruit d'un compromis soigneusement pesé lors des longues délibérations menées dans le cadre du projet de loi initial (Gen-Lex) et qu'il n'est pas nécessaire de les adapter dans l'immédiat. Même si cela ne ressort pas expressément des travaux préparatoires45, le Parlement semble être parti, dans ses débats, du principe 41

42 43

44 45

«Konzepte zum Vollzug der öffentlichen Information gemäss GTG: Harmonisierung politisch-sozialer Bedenken, Rechtsvorschriften undwissenschaftlicher Erkenntnisse» cf. résumés en allemand et en anglais sous: www.nfp59.ch/files/dokumente/Schweizer_Rainer_J._1_Summary_D_E.pdf.

RS 152.3 09.3794 ­ Promouvoir le débat public sur le génie génétique dans le domaine non humain; rapport disponible sous: www.news.admin.ch/NSBSubscriber/message/attachments/24252.pdf.

Schweizer et.al., Koexistenz, N 242 ss Cf. p. ex. le message relatif à une modification de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE), FF 2000 2283 2323 ss.

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que les dommages aux plantes cultivées dus à des croisements avec des variétés génétiquement modifiées, par exemple lorsque la récolte ne peut plus être vendue en tant que produit non OGM, ne constituent pas des dommages purement économiques, mais des dommages matériels ou, à tout le moins, des dommages pécuniaires induits par des dommages matériels. Cette opinion est également défendue dans la doctrine46. Les dommages purement économiques, par exemple lorsque la production d'un agriculteur voisin non touchée par un croisement se vend moins bien à cause de la mauvaise image de la région, ne seront pas non plus couverts à l'avenir par les dispositions relatives à la responsabilité civile; le Conseil fédéral ne voit en tout cas pas la nécessité d'une norme de protection à cette fin.

Enfin, les auteurs du projet de coexistence considèrent qu'il y a lieu d'adapter les dispositions pénales de la loi sur le génie génétique. Ils estiment que les sanctions prévues sont imprécises et insuffisamment nuancées. Le Conseil fédéral est d'avis que les éventuelles carences de la LGG dans le domaine des dispositions pénales sont un sujet qui concerne non seulement la loi sur le génie génétique, mais bien plus encore d'autres actes législatifs relevant du droit environnemental et administratif. Aussi, il ne voit pas la nécessité d'intervenir spécifiquement au niveau du droit du génie génétique mais propose d'examiner en temps voulu les dispositions pénales du droit de l'environnement d'un point de vue global et de les adapter, le cas échéant.

1.2.2.3

Les zones avec OGM

Le Conseil fédéral est d'avis que la coexistence doit être envisagée en unités fonctionnelles comme stratégie collective (pour de plus amples détails, cf. 1.2.2).

Le regroupement des parcelles en zones avec OGM tend à réduire l'effort pour la mise en oeuvre de la coexistence, les surfaces de contact entre cultures OGM et cultures traditionnelles étant plus restreintes et les unités de commercialisation moins nombreuses. Les zones avec OGM sont donc un moyen d'alléger les coûts liés à la coexistence tout en confiant aux exploitants la mise en oeuvrede la production avec OGM selon le principe du pollueur-payeur, reflétant ainsi à la lettre l'intention de la LGG.

La centralisation en zones avec OGM permet un contrôle efficace à la source de l'application des mesures de coexistence, simplifie la traçabilité des produits OGM, tout en respectant pleinement les buts de protection fixés par la loi en matière de liberté de choix du consommateur et de protection des filières sans OGM et les obligations d'information47 visées par le droit sur le génie génétique.

Il est clair que le fait d'imposer aux producteurs d'OGM de se regrouper en zones avec OGM interfère avec le droit fondamental de l'agriculteur de choisir le lieu et les variétés à cultiver à sa guise (garantie de la propriété et de la liberté écono46

47

Christian Hediger, Die Haftungsbestimmungen des Gentechnikgesetzes (Art. 30­34 GTG), Beurteilung und Vergleich mit der Haftungsregelung des deutschen Gentechnikgesetzes, thèse, Lucerne, Zurich/Bâle/Genève 2009.

Art. 18 et 24 LGG (RS 814.91)

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mique). Le Conseil fédéral considère que dans le cas où un agriculteur est empêché de cultiver des OGM de manière individuelle, la restriction de ses droits fondamentaux peut être justifiée par un intérêt public prépondérant tel que la garantie d'une mise en oeuvre correcte et efficace de la coexistence, point de départ indispensable pour garantir la production sans OGM, dont les prémices commencent en champs.

En outre, le Conseil fédéral considère que l'atteinte subie reste proportionnée dans la mesure où l'agriculteur peut tout de même cultiver des OGM dans une zone avec OGM, à l'intérieur de laquelle l'exercice de la coexistence est pour lui plus avantageuse.

Fonctionnement des zones avec OGM La responsabilité de la mise en oeuvre de la coexistence vis-à-vis des autres modes de production exempts d'OGM incombe aux agriculteurs de la zone avec OGM.

Le modèle de zone avec OGM prévoit que des exploitants volontaires qui souhaitent cultiver des variétés OGM autorisées s'associent avec d'autres intéressés sous l'égide d'un organe responsable, mettant ainsi en commun une surface en tant que zone avec OGM. Afin d'assurer une certaine homogénéité, une cohérence et une crédibilité, la zone avec OGM doit répondre à des critères spécifiques fixés par la Confédération. L'unicité (surface d'un seul tenant sans enclaves) de la zone avec OGM, la durée de l'association et les conditions d'exception et de suspension, et l'attribution des compétences et responsabilités sont des éléments définis par la loi.

Les agriculteurs s'engagent contractuellement à associer leurs efforts, leurs surfaces et leur production. Ils fonctionnent en unité de production du champ à la distribution, en respectant les mesures de coexistence vis-à-vis des cultures exemptes d'OGM à l'extérieur de la zone avec OGM. En l'espèce, tous les agriculteurs qui cultivent la surface de cette zone (100 %) doivent documenter comment ils comptent produire conformément aux obligations de désignation des produits OGM en vigueur et s'engager à respecter les standards de production exigés par les cahiers des charges des producteurs hors de la zone avec OGM. Selon leur choix (intérêt, singularité) ou selon la nécessité (conditions du marché, rotation des cultures), ils peuvent y cultiver les variétés OGM autorisées sans mesures particulières de
ségrégation entre les parcelles de culture similaires. Ces mesures deviennent caduques lorsque la récolte est mise en commun sous la même dénomination (OGM).

Par le biais d'un organe responsable, le concept de fonctionnement de même que les détails de l'engagement contractuel des praticiens de la zone avec OGM peuvent être déposés auprès des autorités fédérales. Ces dernières jugent de sa conformité en prenant note de l'avis des cantons concernés et octroient ou non une reconnaissance.

Dans leurs avis, les cantons évaluent le projet de zone avec OGM compte tenu des particularités du site dont ils ont la connaissance et qui pourraient être prises en compte dans le processus de reconnaissance de la zone avec OGM, dans le but par exemple de protéger des structures agricoles particulières ou de promouvoir des surfaces à forte valeur naturelle dans une région donnée. Les cantons peuvent utiliser cette possibilité pour annoncer divers biotopes ou paysages particulièrement sensibles (art. 8 ODE) où la production agricole avec des OGM est interdite ou non souhaitable. Ils peuvent également tenir compte de certaines pratiques, comme

6322

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l'apiculture, quand cette dernière vise une production de miel exempt de traces de pollen OGM. Un registre sera établi afin d'assurer la traçabilité des cultures OGM.

Les coûts résultants de la séparation des filières et itinéraires entre une production d'OGM et une production exempte d'OGM sont internalisés et assurés par l'unité fonctionnelle. L'effort de coordination devrait être compensé par le bénéfice de la gestion commune et l'économie d'échelle.

La culture en zones avec OGM vise à regrouper la production des OGM dans des territoires dédiés, de même que les circuits de production. Ce regroupement devrait favoriser la coordination entre les agriculteurs concernés et permettre de simplifier certaines mesures techniques relatives à la séparation des filières de production à l'intérieur du territoire ainsi formé. Grâce au regroupement, les produits agricoles issus des zones avec OGM peuvent suivre une filière spécifique du champ à la distribution en passant par le stockage. La visibilité et traçabilité du processus devraient être augmentées, tout en ayant pour effet de minimiser les risques de mélanges involontaires à la source.

Dans le but de favoriser ce regroupement, la Confédération peut émettre des critères spécifiques supplémentaires au cas par cas, par exemple une surface ou un volume de production minimaux ou encore des critères plus spécifiques au type de culture ou aux variétés cultivées (production de semences, caractéristiques agronomiques ou biologique) dans les zones avec OGM. Bénéficiant d'une aide pour la gestion et d'une surveillance accrue de la mise en oeuvre des mesures techniques et organisationnelles, la production en zones avec OGM offre une garantie supplémentaire de respect des standards de pureté des produits. En outre, les praticiens bénéficient d'une plus-value grâce à l'économie d'échelle et à la simplification de l'organisation.

1.3

Consultation et participation

Le projet de réglementation sous sa forme actuelle répond aux avis majoritaires émis lors des consultations ainsi qu'aux demandes consolidées des milieux agricoles et des consommateurs.

Résultats de la procédure de consultation Un premier projet de réglementation de la coexistence, tenant compte des résultats du programme national de recherche PNR 59 a fait l'objet d'une audition publique au cours du premier semestre 2013. Les résultats de cette consultation sont résumés dans un rapport dont le Conseil fédéral a pris connaissance le 18 décembre 201548.

Les propositions du présent projet concernant la réglementation de la coexistence tiennent compte des commentaires issus de la consultation publique. De plus les options de réglementation de la coexistence, notamment les zones avec OGM et le 48

Rapport sur les résultats de la procédure de consultation relative à la modification de la loi fédérale sur le génie génétique (Intégration des résultats du PNR 59 et des régions sans OGM) et à l'ordonnance sur la coexistence www.news.admin.ch/NSBSubscriber/message/attachments/42317.pdf.

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moratoire sur la production des OGM en Suisse avaient fait l'objet d'une consultation des milieux concernés en juillet 2014, consultation dont les résultats sont condensés dans un rapport séparé. Tenant compte des auditions déjà réalisées, de la reprise dans le présent projet des propositions et des commentaires des organisations consultées, le Conseil fédéral a décidé dans sa séance du 18 décembre 2015 de procéder à la transmission du présent projet sans nouvelle consultation publique, les partenaires ayant été consultés sur les différentes options lors de tables rondes49. Un récent sondage montre une augmentation du refus des OGM dans l'alimentation entre 2009 et 2015 en Suisse.

Position des milieux agricoles et des consommateurs Les documents précités permettent d'évaluer comment le présent projet serait reçu par les milieux concernés, notamment le milieu agricole et les consommateurs.

Comme ils l'ont exprimé, ils sont opposés à la production d'OGM en Suisse, les uns considérant que les OGM disponibles sur le marché à l'heure actuelle ne représentent aucun intérêt pour l'agriculture suisse, les autres refusant de consommer des OGM et de voir la disponibilité en produits exempts d'OGM se restreindre à cause de l'introduction d'OGM dans l'agriculture suisse (pour de plus amples détails, cf.

ch. 1.2.1).

1.4

Adéquation entre les tâches et les moyens financiers

Le projet actuel ne modifie pas fondamentalement la répartition des tâches de la Confédération et celles des organes chargés de l'exécution; tout au plus induirait-il une légère extension de ces dernières. En effet, dans le présent projet, des prescriptions précises remplacent celles du droit en vigueur (art. 19 actuel) et visent le respect des principes des art. 6 à 9 actuels. En ce sens, les précisions amenées dans le nouvel art. 19a ne donnent pas lieu à de nouvelles tâches à proprement parler, mais à des tâches déjà définies par la loi, dont l'application est actuellement suspendue par le moratoire. En revanche, les moyens destinés à financer leur réalisation concrète (analyse des dossiers) seront demandés par la voie d'ordonnance. Ces tâches sont réglées dans une logique de complémentarité entre les administrations compétentes.

Le présent projet ne prévoit aucun nouvel objet de subventionnement, ni moyens financiers pour les nouvelles obligations qui y sont fixées.

1.5

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

En dehors de l'Union européenne, peu de pays ­ hormis le Brésil et l'Inde ­ parmi les principaux pays producteurs d'OGM ont mis en place une législation contraignante concernant la coexistence. Cette absence de réglementation concernant la 49

Bericht über die Stakeholder-Workshops zu den überarbeiteten Koexistenzregelungen zwischen GVO und nicht-GVO www.news.admin.ch/NSBSubscriber/message/attachments/42319.pdf.

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coexistence s'explique par le fait que dans la plupart de ces pays, les OGM ne sont pas considérés comme des produits commerciaux particuliers parce qu'ils ont subi une modification génétique. Ils sont réglementés de façon identique à ceux obtenus grâce à l'agriculture conventionnelle, c'est-à-dire en fonction de leur nouvelle propriété et de leur composition. Si des mesures d'isolement ou de séparation doivent s'appliquer entre différentes variétés cultivées, elles n'ont pour but que de conserver la pureté variétale. Le fait que les variétés (OGM) ne soient autorisées ni simultanément ni dans tous les pays partenaires commerciaux (asynchronie temporelle ou spatiale), pose néanmoins un problème d'harmonisation des seuils de pureté des variétés. Des questions de coexistence d'une autre nature se posent donc aussi pour ces pays.

Il faut souligner que la question de la coexistence est liée à l'obligation de déclaration de la présence d'OGM50 dans les produits lors des échanges commerciaux. En effet, la demande du marché ou des consommateurs pour une meilleure transparence en ce qui concerne l'origine des produits a induit la nécessité de mettre en place des mesures de coexistence. Avec la décision du 5 juillet 2011 du Comité du Codex alimentarius51 qui a reconnu que l'on pouvait, sans caractère obligatoire, étiqueter des denrées alimentaires contenant ou produits à partir d'OGM, un pas dans le sens d'une plus grande transparence vis-à-vis de l'utilisation des OGM a été franchi. Pas qui est crucial puisque le Codex définit les normes internationalement reconnues en cas de conflit économique (auprès de l'OMC) entre deux pays.

Bien que leur contenu soit confidentiel, les discussions bilatérales actuelles entre l'UE et les États-Unis dans le cadre du Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP Transatlantic Trade and Investment Partnership) portent sur l'établissement des réglementations communes entre l'Union européenne (UE) et les États-Unis concernant notamment la protection des consommateurs. Même si elles portent sur l'élimination des entraves au commerce entre l'UE et les États-Unis, elles ne remettront pas en question la législation européenne sur les OGM. L'UE l'a fait valoir clairement dans sa position officielle.

Situation dans l'Union européenne L'UE base sa définition
de la coexistence sur le choix éclairé du consommateur, lui permettant de choisir entre les différents types de production traditionnelle, biologique ou avec des OGM, et ceci en conformité avec les obligations d'étiquetage définies par la législation communautaire. La présence non intentionnelle de produits OGM dans des produits non-OGM ne pouvant être exclue, des mesures appropriées doivent être prises lors de la culture, de la récolte, de l'entreposage et du traitement afin de garantir la coexistence. La coexistence dans l'UE a donc pour but d'obtenir une séparation suffisante entre production OGM et non-OGM, exclusivement pour les OGM considérés comme suffisamment sûrs après leur évaluation dans

50 51

Directive 2001/18/CE Le Codex Alimentarius est un recueil de recommandations relatives à la sécurité alimentaire, la protection des consommateurs et des travailleurs des filières alimentaires, et la préservation de l'environnement, établies par deux organisations mondialement reconnues (FAO, OMS).

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le cadre d'une procédure standardisée. Par conséquent les règles de coexistence ne considèrent pas la gestion des risques potentiels des OGM.

En 2003, la Commission européenne (CE) a adopté une recommandation sur les lignes directrices pour le développement de stratégies nationales et de bonnes pratiques pour aider les États membres à développer un cadre législatif national ou d'autres instruments pour la coexistence52. Soutenant l'idée que la coexistence doit être réglementée par les États membres, car la réalité agricole de chaque État, voire de chaque région, est différente et considérant qu'une réglementation communautaire ne pourrait être adaptée à tous les cas, la Commission européenne a revu la recommandation en 2010 en l'assouplissant. Ces lignes directrices sont des recommandations non contraignantes qui doivent permettre de limiter les différences entre les réglementations nationales (2010/C 200/01)53.

Cette recommandation permet aux États membres d'envisager la liberté d'autoriser, de restreindre ou d'interdire la culture d'OGM sur la totalité ou une partie de leur territoire. Selon cette recommandation, il serait également possible de définir des zones sans OGM lorsque les conditions climatiques, les modes de culture ou les structures des exploitations ne permettent pas la mise en place de mesures efficaces à un coût raisonnable. En outre, elle fixe des conditions particulières à une interdiction, notamment ses buts légitimes, à savoir d'éviter la présence accidentelle d'OGM dans les cultures conventionnelles et biologiques. Cependant, de telles interdictions devront reposer sur la démonstration par les États membres que, pour ces régions, d'autres mesures ne suffisent pas pour atteindre des niveaux de pureté suffisants.

Suite à des discussions initiées en 2010, la possibilité pour les États membres de restreindre ou d'interdire la culture d'OGM sur leur territoire (clause «opt-out») a fait l'objet d'une proposition de modification de la directive 2001/18/CE âprement discutée. Par sa directive (UE) 2015/41254 la Commission a accepté cette proposition le 11 mars 2015. Car l'objectif de la nouvelle directive était, en laissant la liberté à chaque État de se prononcer pour son territoire, d'empêcher les blocages au niveau communautaire. Déjà le 3 octobre 2015, date butoir pour le dépôt
d'une demande à la Commission, 17 pays membres et quatre régions avaient proscrit la culture des OGM sur leur territoire. Le Portugal, l'Espagne, la République tchèque, la Slovaquie et la Roumanie sont les seuls à ne pas bannir la culture d'OGM sur leur territoire. À ce jour, seul le maïs MON810 est cultivé en Europe55.

52

53

54

55

Recommandation de la Commission établissant des lignes directrices pour l'élaboration de stratégies nationales et de meilleures pratiques visant à assurer la coexistence des cultures génétiquement modifiées, conventionnelles et biologiques, JO L 189 du 29 juillet 2003, p. 36.

Recommandation de la Commission établissant des lignes directrices pour l'élaboration de mesures de coexistence visant à éviter la présence accidentelle d'OGM dans les cultures conventionnelles et biologiques, JO C 200 du 22 juillet 2010, p. 1.

Directive (UE) 2015/412 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2015 modifiant la directive 2001/18/CE en ce qui concerne la possibilité pour les États membres de restreindre ou d'interdire la culture d'organismes génétiquement modifiés (OGM) sur leur territoire.

Liste des pays membres et régions ayant demandé une restriction d'autorisation ou interdiction de culture des OGM: http://ec.europa.eu/food/plant/gmo/authorisation/cultivation/geographical_scope_en.htm.

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En 2015, l'Espagne (107 749,24 hectares), le Portugal (801,11 hectares), la Roumanie (2,5 hectares), la Slovaquie (104,07 hectares), la République tchèque (997 hectares) mettaient en oeuvre la coexistence entre cultures de maïs conventionnel et de maïs OGM (MON810) sur la base du droit européen en vigueur et des réglementations nationales spécifiques.

À ce jour, huit dossiers de maïs OGM attendent une autorisation européenne de culture, le MON810 (demande de renouvellement), le TC1507 de l'américain Pioneer, proposé à la culture par la Commission en novembre 2013 sous la pression d'un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne, ainsi que six autres maïs de Pioneer, de Dow AgroSciences et de Syngenta. Les premières mises en culture ne devraient pas intervenir avant 2016, au vu des délais pour la mise en oeuvre de la nouvelle législation.

Toutefois, en octobre 2015, le Parlement de l'UE a rejeté un projet législatif européen qui permettrait à tout Etat membre de restreindre ou d'interdire sur son territoire la vente et l'utilisation de denrées alimentaires ou d'aliments pour animaux contenant des OGM approuvés par l'UE.

Situation dans les principaux pays producteurs d'OGM Aux États-Unis comme au Canada, la culture des OGM et les produits issus d'OGM sont réglementés de la même manière que les produits obtenus par des méthodes classiques ou conventionnelles, puisque c'est le principe d'équivalence substantielle qui est appliqué. La question de la coexistence est cependant récemment devenue un sujet d'actualité, la très forte progression des surfaces cultivées en OGM de ces dernières années s'opposant à une demande croissante de la part des consommateurs pour des produits alimentaires issus de la culture biologique ou élaborés sans l'aide des biotechnologies ou encore, plus simplement, transmettant l'image d'une agriculture «proche de la nature». Depuis 2013, on assiste au Canada à une controverse à propos de l'autorisation de la culture de luzerne OGM, qui a conduit au renoncement par l'entreprise «Forage Genetics International» de commercialiser l'alfalfa génétiquement modifiée dans le but de tolérer l'herbicide glyphosate. Ces récentes actions citoyennes réclamant une transparence et une traçabilité des OGM n'ont abouti ni à une modification de la réglementation visant la coexistence,
ni à l'obligation d'étiquetage des produits OGM. Pour rappel, les droits canadien et étatsunien exigent l'étiquetage obligatoire d'un produit (OGM ou non-OGM) lorsqu'il présente un risque pour la santé, lié à la présence de substances allergènes ou à un changement dans la composition de l'aliment.

Depuis quelques années la demande d'établissement de standards nationaux pour mieux informer les consommateurs sur les OGM se fait entendre aux États-Unis notamment. Dans ce pays, trois États (Connecticut56, Maine57, Vermont58) ont d'ores et déjà adopté des lois en faveur d'une information des consommateurs con56 57 58

Connecticut Act concerning the labelling of genetically engineered food: https://www.cga.ct.gov/2013/act/pa/pdf/2013PA-00183-R00HB-06527-PA.pdf.

An Act to Amend Maine's Genetically Modified Food Products Labeling Law: https://www.mainelegislature.org/legis/bills/bills_127th/billtexts/HP068601.asp.

Vermont GMO labeling regulations (07.01.2016): www.foodpolitics.com/wp-content/ uploads/Final-Rule-CP-121_Vermont_15.pdf.

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cernant les OGM et dans une vingtaine d'autres, des projets de loi ont été déposés.

En 2014, deux comtés ont adopté un moratoire. Bien que la validité juridique ait été contestée par les États concernés, le débat est largement ouvert.

Un pas décisif vers l'étiquetage des OGM a été franchi aux États-Unis le 7 janvier 2016, la multinationale de l'agroalimentaire Campbell ayant annoncé soutenir la mise en place d'une loi fédérale qui uniformiserait l'étiquetage des OGM et qu'elle appliquerait un étiquetage des OGM pour ses produits vendus aux États-Unis.

Récemment, la question brûlante de la réglementation couvrant le produit ou le processus a fait surface aux États-Unis. Suite à l'émergence des nouvelles technologies, qui permettent de modifier le génome d'une manière indétectable, certaines autorités américaines (USDA) réclament une description détaillée au niveau moléculaire du système produisant l'organisme faisant l'objet de l'évaluation59, arguant que les nouvelles caractéristiques dommageables ou non, dépendent en partie de la manière dont elles ont été intégrées.

Autres pays En 2015, 170 États avaient ratifié le protocole de Cartagena60 qui fixe, entre autres, les normes pour l'identification des OGM lors du transfert entre et vers des Parties du Protocole. Certains ont transcrit l'obligation de déclaration de la présence de produits OGM dans leur législation nationale à des degrés divers concernant le caractère obligatoire de la déclaration, dépendant à la fois de la nature de l'OGM, du seuil de tolérance, et du type de produit. Par contre, en dehors de l'UE, aucun pays n'a encore mis en place de réglementation concernant la coexistence proprement dite. Dans les principaux pays exportateurs de produits OGM et de produits conventionnels (Argentine, Brésil, Canada), ce sont les exploitants eux-mêmes qui prennent les mesures nécessaires pour éviter les mélanges au-dessus d'un seuil contractuel, d'où des surcoûts à l'exportation pour les produits issus de l'agriculture conventionnelle. En revanche, il faut noter que dans ces pays, la production se fait à une échelle largement supérieure, une grande unité de production (ferme) en Argentine comptabilisant 2000 hectares, ce qui de facto diminue les interactions avec le voisinage.

Cas des régions sans OGM en Europe Des régions sans OGM existent
déjà sur une base volontaire au sein de l'UE depuis 2003. Cette année-là, dix autorités régionales européennes ont signé une déclaration conjointe dans le but de sauvegarder leurs productions locales ou régionales, qu'elles estiment menacées par l'introduction des OGM. L'action de leur réseau est fondée sur des principes réunis en février 2005, au sein de la Charte de Florence 61. A l'heure actuelle il existe des régions sans OGM dans la plupart des pays européens.62 59

60 61 62

Policy: Reboot the debate on genetic engineering, Jennifer Kuzma, 10 mars 2016, Nature 531:165 www.nature.com/news/policy-reboot-the-debate-on-genetic-engineering-1.19506.

Protocole de Cartagena sur la biosécurité: https://bch.cbd.int/protocol/default.shtml.

Lien à la Charte de Florence: www.gmo-free-regions.org/ Liste des régions sans OGM 2010: www.gmo-free-regions.org/fileadmin/files/gmo-free-regions/full_list/List_GMOfree_regions_Europe_update_September_2010.pdf

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Sur une base juridiquement contraignante, Madère est depuis début mai 2010 la première région européenne déclarée officiellement «zone sans OGM» par la Commission européenne, en vertu de la nouvelle recommandation de la Commission (2010/C 200/01). En effet, le 5 mai 2009, et conformément à l'art. 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le Portugal avait notifié à la Commission le projet de décret législatif de Madère, au motif que les OGM pouvaient potentiellement menacer la biodiversité de l'île.

Mettant en oeuvre la réglementation «opt out»63 en matière de culture des OGM, au début mai 2016, 19 des 28 membres de l'UE ont déposé auprès de la Commission la demande d'interdiction de la culture d'OGM à la date butoir du 3 octobre 2015.

L'Allemagne, l'Autriche, la Bulgarie, la Croatie, Chypre, le Danemark, la France, la Grèce, la Hongrie, l'Irlande, l'Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne et la Slovénie se sont déclarés région sans OGM, tandis que la Belgique et la Grande-Bretagne ont opté pour une interdiction partielle de la culture des OGM sur leur territoire.

2

Commentaire des dispositions

Préambule La réglementation des «zones avec OGM» (art. 19a à 19c LGG) s'appuie sur les bases déjà citées dans le préambule ainsi que sur l'art. 104 Cst., base constitutionnelle régissant l'agriculture (cf. 5.1). Cette base constitutionnelle doit donc être intégrée dans le préambule.

Art. 6, al. 2, let. c Pour faire suite aux demandes et remarques formulées par le PNR 59, le Conseil fédéral veut apporter un allégement significatif pour la recherche fondamentale (disséminations expérimentales) en abolissant l'interdiction de l'utilisation des gènes de résistance aux antibiotiques utilisés en médecine humaine et vétérinaire. En effet, il s'est avéré que cette restriction représente un frein à l'échange international de matériel entre les chercheurs et un investissement financier démesuré pour le développement de marqueurs alternatifs dans des projets de recherche fondamentale ne concernant pas le développement d'une variété OGM commercialisable. En ce sens la modification proposée ne s'inscrit pas en faux par rapport à la Stratégie nationale contre la résistance aux antibiotiques (STAR). En outre, les obligations en la matière sont dès lors harmonisées avec le droit européen.

Art. 7, al. 1 Cette disposition est nouvellement formulée de manière neutre.

63

Directive (UE) 2015/412 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2015 modifiant la directive 2001/18/CE en ce qui concerne la possibilité pour les États membres de restreindre ou d'interdire la culture d'organismes génétiquement modifiés (OGM) sur leur territoire.

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Art. 7, al. 2 Ajoutée à l'objectif de la loi sur le génie génétique majoritairement sécuritaire, cette loi a pour vocation la protection de la production exempte d'organismes génétiquement modifiés de même que celle du libre choix des consommateurs. C'est ce principe qui est fixé dans l'art. 7. Le nouvel al. 2 n'apporte pas d'éléments supplémentaires par rapport à la coexistence, mais définit une base légale claire pour des mesures concrètes, qui sont déjà contenues de manière rudimentaire dans l'ODE, et qui devront être précisées et à complétées par le Conseil fédéral dans la future ordonnance sur la coexistence.

Comme mesure capitale de gestion du risque, le Conseil fédéral est appelé à fixer des distances d'isolation entre culture OGM et non-OGM (let. a). Sous cette lettre a été ajoutée la possibilité d'édicter d'autres mesures techniques telles que les zones tampons. Les zones tampons sont des surfaces cultivées avec une variété naturelle qui jouxtent les parcelles d'OGM et dont le rôle est de servir de barrière biologique, ses plantes étant censées capter le pollen OGM.

La let. b traite des obligations d'information et de documentation des cultivateurs de plantes OGM vis-à-vis de leurs voisins et des autorités, obligations qui figurent déjà dans l'ODE. Avec cette nouvelle disposition, le Conseil fédéral a choisi l'option d'introduire des obligations de coordination directes entre des acteurs privés, y compris les apiculteurs. Ces derniers sont des acteurs importants pour l'agriculture et leurs produits ont une image positive d'authenticité. Or, la présence de parcelles cultivées avec des PGM mellifères proches des ruches pourrait interférer avec la volonté de produire du miel sans traces d'OGM.

La lettre c introduit dans la loi la possibilité pour le Conseil fédéral de fixer niveau de l'ordonnance l'obligation de contrôler les repousses, qui est une pratique agricole efficace et reconnue pour détruire les PGM qui pourraient subsister hors parcelle et en dehors des périodes des cultures et être à l'origine de mélanges involontaires subséquents. Avec cet ajout, on étendra les obligations pour la coexistence temporellement (après la culture) et géographiquement (en dehors de la parcelle cultivée).

L'analyse des prescriptions en vigueur pour la coexistence a révélé une possible lacune dans
les clauses techniques pour certifier une filière garantie exempte d'OGM. Dans la pratique actuelle avec les produits issus de l'agriculture conventionnelle, le développement de processus et de normes en matière de contrôle de qualité tout au long de la filière de production repose sur les différents acteurs à leur satisfaction et à celle des consommateurs. En ce qui concerne les produits OGM, non seulement l'expérience est insuffisante pour savoir si un système identique peut fonctionner, mais cette question suscite en outre de nombreuses inquiétude et interrogations. C'est la raison pour laquelle la lettre d prévoit la mise en place d'éventuelles dispositions techniques adéquates par voie d'ordonnance.

Art. 7, al. 3 L'art. 2, al. 2, attribue la charge des mesures à prendre en application de la LGG à celui qui en est la cause. Mais encore, les dispositions de la LGG (art. 30, al. 2 et 3) exposent en premier lieu le détenteur de l'autorisation à la responsabilité des dommages consécutifs à l'utilisation des OGM, qu'elle soit conforme ou non; ce principe 6330

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est communément appelé privilège de l'exploitant. Si le détenteur de l'autorisation peut prouver la non-conformité de l'utilisation par l'utilisateur, il peut entamer une action récursoire contre l'utilisateur fautif. Ces clauses couvrent les frais engendrés par des dommages effectifs. En revanche, lorsqu'un producteur non-OGM constate le non-respect des conditions d'application selon l'art. 7, al. 2, qu'il fait confirmer cet état de fait par l'autorité compétente, il peut faire vérifier si l'utilisation fautive (p. ex: distances non conformes) a causé un dégât (p. ex: dépassement des seuils autorisés). Dans le cas où aucun dégât n'est constaté, les coûts liés au contrôle ne sont pris en compte ni par le détenteur de l'autorisation ni par l'utilisateur fautif, selon le droit actuel. L'al. 3 comble cette lacune en obligeant l'exploitant fautif (non-respect des conditions d'application) à prendre en charge les coûts supplémentaires engendrés par le contrôle de la qualité des produits de la personne concernée.

Pour prévenir les querelles entre exploitants, il est prévu que l'état de fait soit constaté par l'autorité compétente, voire par une autorité cantonale qui en est chargée, conformément à l'art. 20, al. 2, LGG.

Art. 15a L'art. 15 LGG prévoit que l'acquéreur soit non seulement informé des caractéristiques particulières des PGM qu'il se propose d'utiliser, mais aussi qu'il soit suffisamment instruit, pour qu'il respecte en utilisateur éclairé les clauses d'utilisation du produit dont il fait l'acquisition (al. 1). Cette formation sert à transmettre activement les recommandations spécifiques au produit, réserves et les autres conditions d'utilisation, fixées lors de la demande et de l'autorisation pour la mise sur le marché dudit produit, en premier lieu pour éviter une atteinte aux objectifs visés par la loi sur le génie génétique (art. 1 LGG). L'acquéreur est tenu d'observer les instructions du fabricant et de l'importateur (art. 15, al. 2, LGG).

En corrélation avec l'obligation d'information et d'instruction de la part du détenteur de l'autorisation (ou d'intermédiaires), l'utilisateur doit pouvoir comprendre les mesures nécessaires afin de les mettre en oeuvre correctement. Ce principe, qui fixe la nécessité pour l'utilisateur d'avoir les connaissances et les capacités requises pour
l'utilisation d'OGM fait l'objet du nouvel art. 15a LGG. En même temps, le Conseil fédéral doit être habilité à prescrire les mesures de formation nécessaires, c'est-àdire le type, le contenu et la durée de la formation à dispenser là où des lacunes en la matière sont constatées. A l'heure actuelle, cela ne concerne pas les connaissances acquises par les agriculteurs dans le cadre de leur formation professionnelle, qui semble suffisante pour assurer une mise en pratique correcte des instructions d'utilisation des OGM.

L'art. 15a LGG ne change pas le fait que le type et le contenu de la formation à dispenser relève a priori de la responsabilité de celui qui commercialise la plante génétiquement modifiée. Une formation existe déjà pour les personnes responsables de la sécurité biologique (biosafety officers, BSO) en milieu confiné (laboratoires, institutions de recherche, hôpitaux etc.). Les cours dispensés pour les BSO 64, actuellement sur une base volontaire, répondent à un besoin et ont fait leurs preuves en tant qu'instrument pour la sécurité biologique. De même, dans le cadre de la coexis64

www.bafu.admin.ch/biotechnologie/01744/02964/index.html?lang=fr

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tence, l'harmonisation des normes en matière de formation pourrait devenir une question pertinente pour sa mise en oeuvre. Renvoyant aux buts sécuritaires de la LGG, le nouvel art. 15a transpose au sein de la loi la possibilité de mettre en place un tel instrument.

Art. 16, al. 2 La coexistence représente l'ensemble des mesures destinées à préserver la qualité des filières sans OGM. Afin de garantir, que le produit commercialisable respecte les normes en vigueur sur la désignation, des mesures techniques, biologiques et organisationnelles doivent être mises en oeuvre. Déjà aujourd'hui, l'art. 16 de la LGG prévoit l'application de telles mesures le long des filières de production, se référant aux flux de produits, mais sans mentionner explicitement le lieu de production. Dans le cas des produits utilisés comme denrées alimentaires, les conditions prévues dans le droit spécifique65 sont valables. Or, dans la pratique agricole, les produits OGM issus des récoltes destinés à l'agriculture (p. ex: semences) ou l'alimentation animale sont fréquemment entreposés temporairement en de multiples endroits (champ, véhicules, ferme) avant d'entrer dans la chaine de production proprement dite. L'al. 2 exige désormais que des mesures soient prises pour ces derniers également sur les lieux de production ou d'entreposage intermédiaires.

Une légère modification rédactionnelle a également été apportée par l'harmonisation de la terminologie entre les al. 1 et 2, le terme contamination ayant été remplacé par mélange indésirable.

Ici encore, il ne s'agit pas véritablement d'un nouvel objet de réglementation, mais plutôt d'une précision du libellé d'une norme existante, dans le but de garantir la séparation en amont et le long des filières de production.

Titre de section: Section 3 Zones avec OGM Les principes et les prescriptions précises des art. 19a, 19b, 19c précisent les conditions du droit actuel mentionnés d'une manière énumérative non exhaustive à l'art. 19. En la matière, et sous sa nouvelle forme cet article vise au respect des principes des art. 6 à 9.

Le principe fondamental vise à structurer et concentrer la culture des OGM en unités fonctionnelles nommées «zones avec OGM», dont la forme juridique est volontairement laissée libre. La concrétisation de ces articles est prévue par voie d'ordonnances.
Art. 19a Al. 1: Dans le but d'organiser la coexistence d'une manière structurée et respectant l'intention du principe de causalité fixé à l'art. 2, l'art. 19a rend obligatoire de condenser les utilisations d'OGM en unité fonctionnelles dites zones avec OGM.

Pour ce faire les praticiens désireux d'orienter leur production vers la culture 65

Ordonnance du 23 novembre 2005 sur les denrées alimentaires génétiquement modifiées (ODAlGM, RS 817.022.51).

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d'OGM doivent s'associer, planifier et documenter la production et les itinéraires de production séparément de ceux dédiés à la production exempte d'OGM. La culture individuelle d'OGM disséminée sur le territoire est proscrite par cet alinéa. Bien que l'obligation d'association constitue une légère restriction de la liberté individuelle des praticiens associés en zones avec OGM, elle constitue une atteinte acceptable au regard d'autres intérêts prépondérants telle qu'une séparation suffisante et conforme de la production d'OGM vis-à-vis des autres modes de production exempts d'OGM.

En outre, la coordination imposée aux praticiens peut représenter une contrepartie positive à l'exercice individuel de la coexistence dans une structure agricole ou paysagère à petite échelle ou morcelée.

Dans le but de pouvoir tenir compte par exemple de l'expérience acquise ou de spécificités culturales (rotation des cultures, variétés utilisées) ou encore de pouvoir surseoir à certaines obligations dans le cas de la production de semences par exemple, l'art. 19b, al. 2, délègue au Conseil fédéral la possibilité d'édicter normes et des critères au niveau du droit des ordonnances.

Al. 2: les disséminations expérimentales d'OGM ne sont pas soumises à l'obligation fixée à l'al. 1, l'art. 11 du droit actuel reste valable.

Art. 19b L'al. 1 liste les conditions structurelles et organisationnelles des zones avec OGM dans le but de garantir une certaine harmonisation entre elles et d'éviter leur éparpillement.

Ainsi il est possible de cultiver une ou plusieurs variétés culturales OGM, à l'intérieur d'une zone avec OGM (let. a et b). La zone doit obligatoirement être d'un seul tenant. En revanche, les parcelles peuvent être ou non regroupées en fonction du choix des praticiens concernés, d'obligations agricoles (p. ex: rotation des cultures, qualité agronomique des surfaces) ou d'autre nature, mais obligatoirement sur un territoire dédié.

La let. c précise la délimitation des zones avec OGM. Les frontières naturelles, les éléments paysagers ou d'infrastructures stables aisément reconnaissables, doivent, dans la mesure du possible, servir de délimitation sur le terrain en lieu et place des limites de propriétés (cadastre, par exemple).

Au sens de l'art. 19b, let. d, les praticiens d'une zone avec OGM ont l'obligation de
recourir aux services d'un organe responsable. Celui-ci fixe et documente les conditions générales pour les opérateurs et les cultivateurs, coordonne l'application des mesures, organise le contrôle des engagements définis aux art. 19a, 19b et 19c. En cas de nécessité ou de doutes, l'organe responsable peut confier le contrôle des produits à un prestataire reconnu. Ceci afin de vérifier la conformité aux obligations relatives à la zone avec OGM ou d'apporter la preuve de la conformité aux prescriptions concernant la désignation des produits et des mélanges, les seuils de désignation et les traces d'OGM, y compris les modalités selon lesquelles les organismes non génétiquement modifiés peuvent être désignés comme tels. Un agriculteur peut théoriquement endosser le rôle d'organe de contrôle s'il est l'unique praticien de la zone avec OGM, aucune surface minimale n'étant légalement définie.

6333

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La durée de l'attribution de la reconnaissance de la zone avec OGM est fixée à au moins quatre ans (let. e), dans le but d'octroyer à ce mode de culture la possibilité de tirer un bilan positif ou au contraire de permettre aux acteurs de se repositionner.

Le but poursuivi par la concentration de la culture en zone avec OGM est d'optimiser l'utilisation des surfaces cultivables et de favoriser la mise en place d'itinéraires de production spécialisés. L'al. 2 offre au Conseil fédéral la possibilité d'édicter des critères, dans le but de rendre les consignes d'exécution adaptées aux buts poursuivis. Il peut fixer notamment une surface minimale pour les parcelles cultivées avec la même variété au sein de la zone avec OGM. Ainsi déterminée, cette valeur permet d'éviter un morcellement trop important des surfaces agricoles, qui ferait perdre leur bénéfice auxzones avec OGM. Il peut également édicter des conditions supplémentaires spécifiques pour les producteurs de semences (p. ex: volume de production, filière de production OGM assurée, distances de séparation, ou représentation par un organe responsable indépendant conformément à l'art. 20, al. 3, LGG).

Art. 19c Cet article énumère les conditions de reconnaissance d'une zone avec OGM. L'al. 1 oblige les praticiens désireux de cultiver des variétés OGM (mode de production et produits) de se faire représenter par un organe de contrôle (voir aussi art. 19b, al. 1, let. d) auprès de la Confédération en vue d'obtenir une reconnaissance de la zone avec OGM. Le rôle qui est attribué à l'organe de contrôle est notamment d'être garant et de faire respecter les obligations concernant la protection de la production exempte d'OGM et du choix du consommateur (al. 2).

L'al. 3 élargit le mandat déjà attribué à la Confédération par l'art. 24 relatif à l'obligation d'informer et d'établir des relevés, concrétisée à l'art. 56 de l'ODE. La tenue d'un registre des épandages d'OGM autorisés dans les zones avec OGM est rendue obligatoire et sa responsabilité incombe à la Confédération. Cette clause permet en outre de contribuer à la traçabilité des parcelles avec OGM et le cas échéant de remonter la cascade des causalités en cas de mélange accidentel ou autre problème mettant en cause la conformité aux règles établies notamment à l'art. 19b.

En outre, comme l'accès à
de telles informations doit être garanti à ceux qui ont un intérêt légitime, comme aux différents acteurs de l'agriculture, notamment les apiculteurs. Ceux-ci pourraient prendre les mesures qu'ils jugent appropriées pour préserver la qualité ou l'authenticité de leur produit.

Art. 24a En ligne avec le principe de précaution et conformément au devoir général de surveillance de l'état de l'environnement, il est proposé d'ancrer explicitement la tâche de la Confédération consistant à mettre en place une surveillance de l'environnement et de la diversité biologique, en relation avec l'utilisation et la propagation d'OGM, notamment pour identifier aussi tôt que possible les effets éventuels dus à la présence involontaire d'OGM ou de matériel génétique transgénique dans l'environnement. L'intention de la surveillance est d'identifier les atteintes singulières et cumulées directes ou indirectes qui pourraient résulter de l'utilisation des OGM à court et 6334

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à long terme. Doivent être surveillés par exemple la présence de plantes transgéniques en dehors des zones où elles seraient autorisées, l'effet de PGM produisant des pesticides (par ex: la toxine Bt sur les organismes non visés ou sur la biodiversité). L'al. 2 de l'article proposé oblige les cantons à transmettre à la Confédération les données pertinentes, notamment issues de leurs contrôles sur l'efficacité des mesures de sécurité fixées par voie de décisions. L'art. 24a n'est pas une nouvelle réglementation en soi, mais introduit une base légale explicite au monitoring de l'environnement, tel que le prévoit déjà l'art. 51 de l'ODE. Néanmoins, la terminologie de l'article de l'ordonnance en vigueur a été légèrement modifiée afin de définir les buts du monitoring de manière cohérente et neutre. Les termes de «risques» et d' «atteintes» ont été remplacés par «effets», étant donné que le monitoring sert à observer certains effets, l'identification d'une atteinte ou d'un dommage étant le fruit d'une analyse qui n'est pas couverte par le monitoring en tant que tel.

En revanche l'art. 24a ne règle ni ne fixe les critères et conditions du plan de surveillance que doit prévoir et effectuer un titulaire d'une demande d'autorisation pour un produit OGM selon le droit en vigueur (art. 28, al. 2, let. e, ODE). Dans ce dernier cas, il s'agit d'examiner, pour un produit donné, si les hypothèses de l'évaluation du risque et si les mesures de sécurité sont correctement appliquées. Cette obligation incombant au titulaire de la demande est déjà couverte par l'art. 12 de la LGG.

Titre de chapitre: Chapitre 6 Dispositions pénales et mesures administratives L'ajout du nouvel art. 35a requiert une adaptation du titre du chap. 6. Sont désormais également contenues dans ce chapitre, en plus des dispositions concernant les peines, des dispositions concernant les mesures administratives. L'actuel art. 35 est complété par l'ajout d'un titre («Mesures administratives»).

Art. 35a Jusqu'alors, les mesures concrètes à prendre en cas de préjudice, d'abus ou de nonrespect des prescriptions de la présente loi et des décisions qui en sont issues n'étaient pas énumérées de manière explicite. Les mesures prévues par ce nouvel article sont fonction de la gravité de la violation. Elles vont de l'interdiction d'une activité à
l'astreinte à payer un montant de 10 000 francs ou de rendre la recette provenant d'un produit non autorisé, en passant par le retrait de l'autorisation, l'exécution par substitution aux frais du contrevenant ou de l'organisation responsable, la saisie et la destruction du produit de l'activité illégale.

Art. 37a Cet article légitime la prolongation du moratoire. La formulation de sa première phrase est identique à la clause du moratoire du droit actuel. Par contre, la deuxième phrase est supprimée. En transmettant à ce jour un projet de réglementation de la coexistence en tant qu'option alternative au moratoire, la justification de cette dernière devient caduc. Pour la justification matérielle du moratoire, voir le ch. 1.2.1 ci-dessus.

6335

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3

Conséquences

3.1

Conséquences pour la Confédération

Avec la prolongation du moratoire sur l'utilisation d'OGM dans l'agriculture, les tâches d'exécution sont caduques. La situation après la légalisation de la prolongation du moratoire sera identique à la situation actuelle.

Si des PGM étaient introduites dans l'agriculture suisse, les tâches d'exécution déjà fixées dans la LGG, mais dont l'application est ajournée du fait du moratoire (notamment les procédures d'autorisation) seraient prises en charge par l'administration fédérale. Bien que cela représente un surcroît de charges administratives, il ne s'agit pas à proprement parler de nouvelles tâches consécutives au présent projet de révision de la LGG.

En ce qui concerne les nouvelles dispositions de la LGG concernant les zones avec OGM, les tâches de mise en oeuvre incombant à la Confédération seront limitées à l'analyse technique et à la gestion des dossiers concernant la reconnaissance de la zone. Le processus d'autorisation des demandes de disséminations dans l'environnement est déjà conduit par la Confédération. La reconnaissance d'une zone avec OGM suivra une procédure similaire de façon à profiter d'un système existant et de l'expérience acquise, diminuant ainsi les ressources nécessaires à la mise en place d'une nouvelle procédure. Une ordonnance d'application de la coexistence comprenant les critères pour les zones avec OGM fixera les conditions d'application. Les coûts directs induits par l'établissement des zones avec OGM, les moyens prévus pour couvrir ces coûts ainsi que les conséquences en matière de dotation en personnel seront détaillés dans le rapport explicatif concerné et ne peuvent à ce jour pas faire l'objet d'une analyse quantitative détaillée.

On peut grossièrement estimer entre zéro et cinq le nombre de dossiers déposés pour des zones avec OGM sur une période de cinq ans. La charge supplémentaire pour la Confédération découlant de cette nouvelle réglementation est estimée à moins d'un poste à 100 % sur le long terme, sans compter la charge découlant de l'élaboration du droit au niveau des ordonnances et des autres documents d'aide à l'exécution.

Une externalisation du travail n'est toutefois pas exclue. De plus aucun subside n'est prévu pour la mise en place des zones avec OGM, la charge financière de leur mise en oeuvre reposant sur la Confédération est donc limitée.
Pour les raisons citées, les modifications législatives prévues dans le présent projet concernant le moratoire et la coexistence sous forme de zones avec OGM n'ont pas de conséquences significatives pour la Confédération, ni sur le plan financier ni sur celui du personnel.

6336

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3.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les villes, les agglomérations et les régions de montagne

En l'état, la prolongation du moratoire ne doit pas avoir un impact qui soit différent de la situation actuelle sur les cantons et communes, la majorité d'entre eux soutenant l'option du moratoire.

Dans le cas où le moratoire s'achève, la possibilité de désigner des zones avec OGM aura des effets sur les cantons qui en compteraient sur leur territoire, dans la mesure où ils seront appelés à être consultés au cas par cas suivant les dossiers déposés. Au regard des dispositions prévues, bien que la LGG prévoit que leur exécution relève de la compétence de la Confédération, les cantons pourront porter une certaine responsabilité dans le cadre de la gestion de ces zones avec OGM et de la vérification du respect des obligations. Il est aussi envisageable que les cantons jouent un rôle plus modeste de relais et de suivi. En ce qui concerne les communes, elles pourraient être associées au canton lors de la mise en place et du contrôle du respect des obligations. Cela étant, les effets en termes de coûts financiers supplémentaires ou de dotation en personnel à charge des cantons et des communes dépendent de l'engagement des cantons et sont, en conséquence, difficiles à évaluer.

Les villes et les agglomérations ne sont de prime abord pas concernées par cette nouvelle réglementation, les zones avec OGM étant situées en zone agricole.

3.3

Conséquences économiques

Le présent projet vise la prolongation du moratoire et le règlement de la coexistence.

Les deux objets sont traités séparément pour chacune des conséquences examinées.

3.3.1

Conséquences économiques pour les acteurs de la production agricole

À ce jour, les acteurs de la production agricole ne voient que peu d'avantages économiques et agronomiques à intégrer la culture des OGM dans l'agriculture suisse.

Pour l'USP, par exemple, l'opinion des consommateurs, qui rejettent en majorité les denrées alimentaires génétiquement modifiées, reste un argument cardinal pour le choix du mode de production. Pour les acteurs de la production agricole, le moratoire devrait donc avoir des conséquences plutôt positives.

Le présent projet de réglementation de la coexistence complète l'ancrage légal et finalise les principes de la coexistence, ces derniers servant à leur tour de base légale aux mesures de coexistence et aux conditions techniques dans l'agriculture. Pour cette raison, la présente analyse détaille les conséquences de l'application de la coexistence en zones avec OGM.

Les mesures de ségrégation nécessaires à la coexistence en général sont négativement appréciées par les acteurs de la production agricole car jugées contraignantes et complexes, comme l'a d'ailleurs souligné la Chambre d'agriculture de l'USP dans 6337

FF 2016

sa prise de position du 23 février 2012 en faveur d'un renouvellement du moratoire66. Un des projets du PNR 59 a procédé à une évaluation des coûts liés à la coexistence au niveau de l'exploitation individuelle et à chaque étape de la production. Sur la base des éléments considérés dans l'évaluation (p. ex. temps pour le nettoyage des véhicules de transport et des sites de stockage, établissement d'une zone-tampon autour d'un champ de PGM) et en tenant compte de l'offre existante de variétés OGM et des particularités de la structure paysagère et agricole suisse, le projet conclut que l'introduction des PGM existant sur le marché à ce jour n'est pas profitable pour l'ensemble du secteur agricole. Les coûts inhérents aux mesures de coexistence resteraient généralement bas en comparaison des coûts totaux de production, mais dépendent en grande partie de la structure de la chaine de transformation en aval du produit (voir rapport coûts et bénéfices, cf. ch. 1).

Concernant les zones avec OGM, les agriculteurs s'engagent à assumer les coûts liés à l'organisation, à la concertation ainsi que, le cas échéant, au changement de mode de fonctionnement de leur exploitation, y compris des filières de production et d'écoulement des produits. Pour des raisons de praticabilité ils doivent être prêts à renoncer à la ségrégation de variétés identiques cultivées dans les zones avec OGM et par là même à désigner l'ensemble de la production de la variété concernée comme OGM. Néanmoins, les conséquences économiques pour les acteurs de la production agricole avec OGM peuvent être considérées comme limitées au regard de l'avantage économique et organisationnel que la coopération en zone avec OGM leur apporte.

3.3.2

Conséquences économiques pour les entreprises semencières

La prolongation du moratoire avantage les entreprises semencières suisses de semences conventionnelles, dans la mesure où elles n'ont pas à se préoccuper d'éventuelles contaminations avec des OGM d'origine autochtone, comme c'est le cas actuellement, ni d'effectuer des contrôles coûteux pour éliminer les doutes sur d'éventuelles contaminations. Le cas échéant, l'obligation de produire les OGM dans des zones avec OGM peut être considérée comme un avantage pour les entreprises semencières de semences conventionnelles, qui voient les risques de contamination diminuer comme conséquence de l'interdiction de la culture d'OGM sur des parcelles individuelles.

3.3.3

Conséquences pour le commerce de détail

Avec le moratoire, les produits suisses exempts d'OGM conservent une ouverture sur tout le marché européen et mondial et bénéficient d'une image positive, les risques de contamination des flux de production par des OGM pouvant être exclus.

66

Prise de position de l'USP du 23 février 2012: www.sbv-usp.ch/fr/medias/ communiques-de-presse/archive-2015/181215-le-genie-genetique/.

6338

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La culture d'OGM issus de zones spécifiquement prévues à cet effet devra être économiquement compétitive malgré les surcoûts induits par la mise en place de ces zones et les mesures de coexistence et de séparation des flux. Actuellement, les produits agricoles suisses profitent d'une plus-value associée à leur caractère nonOGM. De plus, la plupart des labels de qualité excluent l'utilisation de produits issus du génie génétique. Les produits OGM seraient donc viables si les coûts de production étaient moins élevé que leur équivalent conventionnel (rendements plus stables, moins de pesticides utilisés, par exemple), ou si une plus-value spécifique leur permettait d'accéder à des marchés spécifiques (avantages nutritionnels ou gustatifs, par exemple). L'apparition de nouvelles générations d'OGM dont les propriétés sont orientées vers les besoins des détaillants ou des consommateurs verra peut-être augmenter la durabilité économique des lignées issues du génie génétique.

3.3.4

Conséquences pour les entreprises actives dans le secteur du traitement des produits agricoles

De manière générale, les entreprises actives dans le secteur du traitement des produits agricoles doivent respecter la séparation des filières des produits conventionnels selon les standards de pureté en vigueur. Le moratoire légal ne touche que la production domestique, alors que l'importation des produits OGM autorisés est inexistante sur la base d'un renoncement volontaire (moratoire de facto). On note que le renoncement à l'importation de marchandises OGM entraîne des coûts supplémentaires (en particulier dans l'alimentation animale) qu'il est difficile pour la branche de répercuter sur les prix de vente. Le marché de l'importation représentant une part plus importante que celui de la production domestique, c'est la suppression du moratoire de facto qui pourrait entraîner des conséquences négatives en termes de coûts liés à la séparation des flux. Le moratoire légal n'a que peu d'impact sur les entreprises actives dans le secteur du traitement des produits agricoles qui ne doivent supporter aucune conséquence supplémentaire (renoncement volontaire). Les conséquences sur les entreprises de traitement dépendent fortement de la culture à laquelle on se réfère. Par exemple, la pomme OGM ne changerait rien, mais la betterave OGM aurait une forte influence négative sur la branche. L'influence de ces mesures devrait donc être évaluée au cas par cas et l'impact sur la viabilité de la culture OGM déterminé (pour de plus amples informations, cf. rapport coûts bénéfices, ch. 1).

La délimitation de zones avec OGM a des conséquences de nature économique pour les entreprises actives dans le secteur du traitement des produits agricoles puisqu'elle les oblige à garantir la séparation des flux de produits ou à se spécialiser dans une filière spécifique. Il est important de noter que la séparation des flux existe déjà pour un certain nombre de denrées, par exemple dans le cas des produits issus de l'agriculture biologique.

6339

FF 2016

3.3.5

Conséquences pour les consommateurs

Avec le moratoire, les produits issus de la production suisse non-OGM conservent la même place sur le marché. Les consommateurs ne devraient pas souffrir de fluctuations en matière de prix des produits, du moins ceux facturés en Suisse. Cependant ils sont privés du choix de produits OGM importés, qui pourraient éventuellement être meilleur marché que les produits domestiques.

Au cas où la culture des OGM s'ouvrirait en Suisse, les produits issus de zones avec OGM pourraient éventuellement présenter des avantages en termes de prix pour les consommateurs, si leur efficacité en termes de rendement et de profitabilité est avérée. Il est possible que les consommateurs bénéficient d'une séparation des flux de produits simplifiée dans les zones avec OGM et que les coûts se répercutent moins fortement sur les prix.

3.3.6

Conséquences pour la recherche dans le domaine des biotechnologies vertes

La réglementation proposant une prolongation du moratoire, tout comme celle concernant la coexistence ne doivent pas modifier la situation pour la recherche, puisque les interdictions en vigueur ne concernent explicitement pas les disséminations expérimentales.

Dans sa réponse à l'interpellation du groupe libéral radical déposée au Conseil national (08.3291: Le moratoire sur le génie génétique met en péril la recherche en Suisse), le Conseil fédéral a indiqué que non seulement il ne partageait pas cette crainte, mais qu'il était de plus convaincu que la recherche suisse sur les risques liés aux OGM a pu bénéficier ces dernières années de ressources financières plus importantes (PNR 59). Dans le but d'assurer la pérennité du savoir-faire existant en matière de génie génétique dans le domaine végétal (message FRI 2013­201667), les Chambres ont accepté la mise en place d'un site sécurisé en Suisse, pérennisant ainsi l'installation de la Station fédérale de recherche de Recken-holz. Pour preuve, on observe même une légère augmentation du nombre de disséminations expérimentales, que l'on peut imputer à la mise à disposition du site protégé.

Comme le confirment les données statistiques68, la modification législative concernant les zones avec OGM ne change pas significativement la situation décrite ci-dessus, puisqu'elle ne concerne pas la dissémination expérimentale.

En revanche, la suppression de l'interdiction d'utilisation de gènes de résistance aux antibiotiques pour la recherche uniquement (disséminations expérimentales) allège les obligations financières et permet l'échange international de matériel pour les chercheurs (cf. ch. 2, commentaire des dispositions).

67 68

FF 2012 3278 s.

Indicateurs de base OFEV: www.bafu.admin.ch/umwelt/indikatoren/08575/08578/index.html?lang=fr.

6340

FF 2016

3.3.7

Conséquences sur la société dans son ensemble

Il est peu probable que la culture d'OGM prenne beaucoup d'essor en Suisse au cours des dix années suivant l'issue du moratoire. Premièrement, on ne sait pas très bien dans quelle mesure il est viable d'un point de vue commercial, d'utiliser des OGM dans l'agriculture (gains de productivité incertains, petitesse des structures, coût des mesures de coexistence, risques en matière de responsabilité civile). Deuxièmement, l'Europe, et en particulier les pays limitrophes ont une attitude très critique vis-à-vis de la culture d'OGM (cf. ch. 1.5: Comparaison avec le droit étranger, notamment européen). Ainsi, bien que deux variétés d'OGM soient autorisées pour la culture au sein de l'UE, seul le maïs MON810 est cultivé sur des surfaces qui vont en décroissant. Troisièmement, la procédure de mise en circulation en Suisse prendra plusieurs années. Le développement de nouvelles variétés OGM particulièrement adaptées ou intéressantes pour la Suisse (blé, pomme de terre, etc.) pourrait toutefois modifier ce scénario.

A l'heure actuelle, la reconnaissance de «zones avec OGM» ne devrait pas avoir d'effet significatif sur la société dans son ensemble. En revanche, elle pourrait être critiquée, à la fois par ceux qui souhaitent l'ouverture de la culture suisse aux OGM et par ceux qui s'y refusent. Les uns voyant comme une entrave la coexistence restreinte en zones avec OGM, les autres trouvant que, même restreinte en zones avec OGM, elle constitue une pression sur la pureté des produits exempts d'OGM.

3.4

Conséquences sanitaires et sociales

La prolongation du moratoire ne devrait avoir aucune conséquence sanitaire et sociale en comparaison de la situation actuelle, les variétés potentiellement cultivées ayant subi en amont une évaluation des risques en termes sanitaires notamment. La concentration de l'éventuelle culture des OGM en zones avec OGM permet un meilleur contrôle de la séparation des filières. En ce sens, cette option soutient de façon générale la filière sans OGM. En revanche ces avantages peuvent difficilement être évalués en termes monétaires.

3.5

Conséquences environnementales

Avec la prolongation du moratoire, l'environnement ne subit pas d'impact plus important que celui lié à l'agriculture conventionnelle.

Le regroupement de la culture d'OGM en zones avec OGM a pour conséquence que l'impact sur l'environnement est circonscrit. En effet, comparaison faite avec des cultures d'OGM et des itinéraires de productions disséminés sur les surfaces agricoles, l'impact de la culture d'OGM concentrée en zones avec OGM peut être considéré comme réduit. Il n'en demeure pas moins que les conséquences environnementales dépendent fortement du type de variété, des nouvelles caractéristiques et de la pratique agricole associée. Par exemple, la vaste majorité des OGM cultivés aujourd'hui sont tolérants à des herbicides. On sait que leur utilisation a largement 6341

FF 2016

facilité certains itinéraires techniques mais a également induit l'apparition de résistances à ces herbicides systémiques dans de nombreuses familles végétales. Dès lors, il est très important, au-delà de l'évaluation de la sécurité des techniques utilisées, de se concentrer aussi sur l'étendue des conséquences possibles sur l'environnement de l'intégration de nouvelles propriétés chez des espèces végétales. L'introduction de ces variétés uniquement dans les zones avec OGM permettra une surveillance adaptée et précise ainsi que l'acquisition des connaissances nécessaires sur les modifications des itinéraires techniques, les possibilités de rotations, la durabilité et l'efficacité des nouvelles propriétés des plantes OGM dans les agroécosystèmes.

4

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

4.1

Relation avec le programme de la législature

Le présent projet n'a été annoncé ni dans le message sur le programme de la législature 2015­201969 ni dans le projet d'arrêté fédéral sur le programme de la législature 2015­2019, tous deux datés du 27 janvier 2016. Afin de répondre au mandat constitutionnel selon lequel toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale, il est indiqué d'édicter la LGG, d'autant que le moratoire actuel expire en 2017. Il est toutefois conforme aux objectifs no 2 et 7 du programme de la législature, qui visent à ce que la Suisse crée un environnement économique optimal à l'intérieur du pays et renforce ainsi sa compétitivité et qu'elle fasse une utilisation rationnelle du sol et des ressources naturelles et garantisse un approvisionnement énergétique durable la réglementation de la coexistence, y compris les zones avec OGM concrétise un des objectifs importants de cette stratégie.

4.2

Relation avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

Bien que n'y étant pas explicitement nommé, le présent projet s'insère dans plusieurs des grands axes de la politique agricole 2014­201770. Tout d'abord en offrant une flexibilisation des modes de production, la coexistence vise à garantir une production et un approvisionnement sûrs en denrées alimentaires. Le principe de souveraineté alimentaire, une des pierres angulaires de la politique agricole 2014­2017 en est renforcé.

Le présent projet est en ligne avec la prolongation du moratoire, fixée légalement par le Parlement lors de la discussion de la PA 2014­2017. De plus il propose de régler la coexistence d'une manière structurée en zone avec OGM de manière à préserver la filière conventionnelle selon le principe de causalité. En réglant les deux 69 70

FF 2016 981, ici 1113; https://www.bk.admin.ch/themen/planung/04622/index.html?lang=fr.

Message concernant l'évolution future de la politique agricole 2014­2017 www.blw.admin.ch/themen/00005/00044/01178/index.html?lang=fr.

6342

FF 2016

éléments simultanément, à savoir la prolongation du moratoire et la coexistence dans des zones avec OGM, la réglementation proposée remplit pleinement les objectifs des axes stratégiques 3 et 4 en renforçant la vitalité de l'espace rural et en encourageant l'innovation et l'esprit d'entreprise dans l'agriculture.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et conformité aux lois

Sur le fond, le projet regroupe trois approches réglementaires différentes. La première consiste en une nouvelle prolongation de quatre ans du moratoire actuel. La deuxième vise à adapter plusieurs dispositions de la loi sur le génie génétique sur la base des résultats et des recommandations du PNR 59: les normes de délégation sont précisées, concrétisées et complétées de manière à permettre ­ sans extension de celles-ci ­ la création d'un régime de coexistence opérationnel et exempt de lacunes au niveau du droit des ordonnances. Enfin, l'introduction d'une troisième section dans la loi sur le génie génétique fixe les conditions pour l'instauration de zones dédiées à la culture d'OGM (zones avec OGM).

Prolongation du moratoire Le moratoire inscrit dans l'actuel art. 37a LGG a déjà été prolongé à deux reprises, de trois ans (de 2010 à 2013) et de quatre ans (de 2013 à 2017), pour des motifs différents: la première prolongation était motivée par la nécessité d'attendre les résultats des recherches du PNR 59, par le temps nécessaire à l'élaboration des bases légales d'un régime de coexistence et par le rejet des OGM par les agriculteurs et les consommateurs71, alors que, pour la seconde, parallèlement à ces aspects, les intérêts économiques des agriculteurs étaient avancés, notamment la crainte des coûts supplémentaires liés aux mesures de coexistence72. Certaines réserves ont été émises quant à la compatibilité d'une (nouvelle) prolongation du moratoire avec la Constitution, notamment au cas où elle serait de longue durée73. En effet, dès que la poursuite d'une interdiction de la culture d'OGM ne pourrait plus être justifiée par la protection de l'être humain, des animaux, de l'environnement et de la diversité biologique ainsi que par la protection des produits exempts d'OGM, il ne serait plus possible de s'appuyer sur l'art. 120 Cst. car il faudrait alors admettre que la mesure vise un objectif de politique économique. De plus, les différentes formes de production ­ avec et sans OGM ­ devraient être traitées de manière équivalente. L'art. 104, 71

72

73

Message du 1er juillet 2009 relatif à la modification de la loi sur le génie génétique (Prolongation du moratoire sur l'utilisation d'OGM dans l'agriculture), FF 2009 4887 4892 ss.

Cf. motion Ritter (12.3028) et projet du 28 juin 2012 concernant le message relatif à la modification de la loi sur le génie génétique (Deuxième prolongation du moratoire sur l'utilisation d'OGM dans l'agriculture), p. 4 ss; https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20123028.

Résumé de Schweizer Rainer J./Errass Christoph/Kohler Stefan/Burkert Herbert/Gasser Urs, Perspektiven des schweizerischen Gentechnikrechts, PNR 59 sous «www.nfp59.ch/d_resultate.cfm?kat=18»; courrier du 18 octobre 2012 de l'Office fédéral de la justice (OFJ) adressé à la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil des États (CSEC-E).

6343

FF 2016

al. 2, Cst, notamment, ne pourrait pas servir de base à une dérogation au principe de liberté économique étant donné qu'une interdiction du génie génétique dans l'agriculture n'est pas nécessaire pour atteindre les objectifs visés à l'art. 104, al. 1, Cst.74. Ainsi, seule une modification de la Constitution permettrait une prolongation plus étendue du moratoire75.

Un autre argument avancé est qu'il appartient au législateur, lors de l'application de son mandat de protection fixé à l'art. 120 Cst., d'effectuer une pesée d'intérêts complexes entre les risques que présente le génie génétique sous toutes ses formes et les possibilités qu'il offre. Dans le cadre de cette appréciation, il doit évaluer les risques et déterminer ceux qui sont encore acceptables et ceux qui ne le sont pas au regard du poids des biens juridiques concernés et de l'éventuelle irréversibilité des décisions. Une reconduction du moratoire en tant qu'interdiction matérielle et limitée dans le temps de la mise en circulation d'OGM, telle que fixée à l'art. 37a LGG, n'excède pas la marge d'appréciation laissée au législateur par l'art. 120 Cst.; l'effet cumulé d'un moratoire prolongé à plusieurs reprises n'entraîne pas une interdiction générale irrecevable, étant donné qu'à chaque prolongation, le législateur doit réévaluer si elle est justifiée76.

Dans ce contexte, les arguments suivants plaident en faveur de l'admissibilité d'un moratoire dans le cadre du droit constitutionnel en vigueur:

74 75 76

­

Les données scientifiques sur lesquelles se fondent les analyses des risques présentés par la culture d'OGM font toujours l'objet de vives discussions bien que les travaux du PNR 59 soient achevés et qu'ils aient conclu que, selon état actuel des connaissances scientifiques, aucun risque inhérent aux PGM pour la santé humaine et animale n'a été décelé. Les résultats de la consultation montrent toutefois à l'évidence que le PNR 59 n'a pas permis de lever les doutes concernant la protection d'une production exempte d'OGM et de l'environnement subsistant au sein de la société. Cette dernière pourrait alors ­ indépendamment de l'évaluation faite dans d'autres domaines (p. ex. médicaments, médecine, industrie) ­ arriver à la conclusion que chaque incertitude, aussi faible soit-elle, doit être exclue et qu'il faut par conséquent renoncer à cultiver des OGM.

­

La protection de la production exempte d'OGM et la séparation totale des flux de marchandises doivent être assurées afin de garantir le libre choix des consommateurs. S'agissant de la production domestique, des réserves ont été émises quant à la mise en oeuvre pratique des mesures de coexistence et leur rentabilité, notamment en raison des structures agricoles à petite échelle que l'on connaît en Suisse. De l'avis de certains acteurs importants de l'économie agricole et agroalimentaire, il n'est pas possible de transposer à la Cf. le courrier de l'OFJ à la CSEC-E, p. 3.

Cf. Schweizer et al., PNR 59, loc. cit. (page Internet), tout à la fin.

Cf. Mahlmann Matthias, Verfassungsrechtliche Handlungsoptionen der Gestaltung der Gentechnologie, expertise du 22 décembre 2014 à l'intention de l'OFEV et de l'OFAG, p. 47; cf. aussi l'avis de droit de Rausch Heribert, Rechtsgutachten zur Verfassungsmässigkeit eines Verbots des Anbaus von gentechnisch veränderten Pflanzen, du 31 janvier 2014 à l'intention de l'Union suisse des paysans et du groupe de travail suisse pour le génie génétique.

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Suisse les expériences en matière de culture d'OGM et de séparation des flux de marchandises après la récolte faites dans les pays européens ayant une réglementation comparable de la coexistence. En revanche, la mise en circulation des denrées alimentaires, qui est déjà suffisamment réglée, n'est pas incluse dans ce débat.

­

Actuellement, les milieux concernés ne voient aucun intérêt à cultiver des OGM ni à consommer des produits issus de ces cultures77. Une majorité de la population doute toujours de l'innocuité des OGM ainsi que de leur écocompatibilité lorsqu'ils sont cultivés. La solution d'«opt-out» proposée par l'UE à ses États membres contribue également au sentiment d'insécurité prévalant chez les consommateurs suisses.

­

De par sa limitation matérielle à la culture d'OGM dans l'agriculture, l'horticulture productrice et la sylviculture, le moratoire ne touche pas des pans importants du génie génétique, notamment la recherche, le développement, la production industrielle et pharmaceutique, la mise en circulation des denrées alimentaires et des aliments pour animaux, ainsi que les disséminations expérimentales78.

­

Une éventuelle restriction des droits fondamentaux (p. ex. de la liberté économique, art. 27 Cst.) semble justifiée pour les motifs évoqués.

Une prolongation de quatre ans du moratoire ne pose donc pas de problème sous l'angle constitutionnel.

Adaptation des normes de délégation Les adaptations portent sur les dispositions relatives à la protection d'une production exempte d'OGM et du libre choix des consommateurs en donnant au Conseil fédéral la possibilité de fixer des prescriptions en matière d'assurance qualité, ainsi que sur la disposition concernant la séparation des flux des produits, qui devra prendre en compte l'ensemble de la filière de production. De nouvelles normes de délégation concernant les connaissances et les compétences nécessaires pour travailler avec des organismes génétiquement modifiés ainsi qu'en vue de la mise en place et de l'exploitation d'un système de monitoring sont créées. Pour ces adaptations, le projet s'appuie sur le plan formel sur l'art. 120, al. 2, Cst. qui confère à la Confédération la compétence de légiférer sur l'utilisation du patrimoine germinal et génétique des animaux, des végétaux et des autres organismes. Cette même disposition constitutionnelle a déjà servi de base lors de la création de la LGG. L'adaptation des normes de délégation se limitant à des domaines déjà réglés dans les grandes lignes dans la LGG et tombant dans le champ d'application de l'art. 120, al. 2, Cst., cette base constitutionnelle peut être qualifiée de suffisante.

Zones avec OGM L'introduction d'un nouveau titre intermédiaire Section 3 Zones avec OGM permet d'intégrer trois nouvelles dispositions dans la loi sur le génie génétique. Les art. 19a, 19b et 19c fixent les conditions dans lesquelles doit être réalisée la culture de 77 78

Cf. le rapport de consultation et les résultats de la discussion avec les parties concernées.

Cf. également Mahlmann Matthias, loc. cit., p. 47.

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semences et d'autre matériel végétal de multiplication constitués d'organismes génétiquement modifiés, qui en contiennent ou qui sont produits à partir d'organismes génétiquement modifiés. Notamment, ce type de culture ne peut avoir lieu que dans des zones délimitées à cet effet, dites zones avec OGM (art. 19a, al. 1). Les disséminations expérimentales d'organismes génétiquement modifiés ne sont pas touchées par cette disposition (art. 19a, al. 2). Les zones avec OGM doivent répondre aux exigences de l'art. 19b, al. 1: elles doivent porter sur la culture d'une ou de plusieurs variétés déterminées, former une surface continue et être autant que possible délimitées par des éléments structurels paysagers naturels ou artificiels aisément reconnaissables. Les zones avec OGM doivent, en outre, être gérées par un organe responsable et être maintenues par des mesures appropriées pendant au moins quatre ans. L'organe responsable ne doit pas revêtir de forme juridique particulière; il peut s'agir d'une société simple. Le Conseil fédéral concrétise ces exigences dans l'ordonnance correspondante. Il peut, notamment, fixer une surface agricole utile minimale dédiée à la culture d'une variété déterminée dans le but de garantir des filières de production propres à ces zones (art. 19b, al. 2). Il incombe à la Confédération (art. 19c, al. 1) de reconnaître les zones avec OGM, ceci lorsqu'un organe responsable représentant l'ensemble des exploitants produisant des produits agricoles et des produits transformés issus de ces derniers dans la zone concernée en fait la demande. L'organe responsable peut également représenter des transformateurs de produits agricoles issus des zones avec OGM (p. ex. des meuniers). Dans sa demande de reconnaissance, l'organe responsable doit démontrer la manière dont il satisfait aux exigences de l'art. 7 (art. 19c, al. 2). La Confédération tient un registre des cultures d'organismes génétiquement modifiés dans les zones avec OGM.

L'accès au registre est accordé aux personnes justifiant d'un intérêt légitime à la consultation (art. 19c, al. 3).

La réglementation de la délimitation de zones avec OGM vise à créer la plus grande transparence possible en ce qui concerne la culture des OGM. En vertu du principe du pollueur-payeur, les cultivateurs d'OGM auront en outre, l'obligation d'exposer
au préalable de quelle manière ils comptent concrètement garantir le respect des exigences relatives à la protection d'une production exempte d'organismes génétiquement modifiés et du libre choix des consommateurs, mais la délimitation de zones avec OGM leur conférera, par ailleurs, aussi l'avantage de pouvoir renoncer à des mesures de coexistence à l'intérieur de ces zones. De plus, l'instauration de la culture des OGM en zones dédiées permettra de faciliter la mise en place de la coexistence. La culture des OGM n'est pas interdite sur le territoire suisse, mais organisée. Ainsi, les zones avec OGM restent conformes aux normes constitutionnelles en vigueur.

Le projet s'appuie sur différentes bases constitutionnelles: tout d'abord, sur l'art. 120 Cst., article constitutionnel régissant le génie génétique dans le domaine non humain. L'al. 2 de cette disposition habilite la Confédération à légiférer sur l'utilisation du patrimoine germinal et génétique des animaux, des végétaux et des autres organismes aux fins de protection contre les abus en matière de génie génétique. Cette protection implique non seulement que les OGM ne doivent présenter de risques ni pour la santé ni pour l'environnement, mais également que la coexistence de la production agricole avec et sans OGM doit être garantie en tout temps, et notamment aussi pour ce qui est de la protection de la propriété. Dans ce domaine, 6346

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on peut à tout le moins imaginer que l'utilisation de semences génétiquement modifiées dans l'agriculture puisse à long terme restreindre la possibilité de produire des produits exempts d'OGM. La possibilité d'autoriser la culture d'OGM dans des zones délimitées à cet effet va donc dans le sens de l'objectif de protection visé par l'art. 120 Cst. L'instrument proposé est en outre utile aux exploitants: ils peuvent renoncer aux mesures de coexistence prescrites à l'intérieur d'une zone avec OGM.

L'exigence relative à la délimitation d'une zone avec OGM reconnue par la Confédération pour que les agriculteurs puissent effectivement cultiver des organismes génétiquement modifiés les restreint néanmoins dans l'exercice de leur profession.

Les exigences posées aux zones avec OGM ne sont toutefois pas particulièrement contraignantes. C'est pourquoi le projet s'appuie non seulement sur les art. 120 et 74 Cst., mais aussi sur l'art. 104 Cst., qui est la base constitutionnelle régissant l'agriculture.

La délimitation obligatoire d'une zone spécifiquement dédiée à la culture des OGM peut restreindre la liberté économique (art. 27 Cst.) ainsi que la liberté de propriété (art. 26 Cst.) des exploitants souhaitant cultiver des OGM. Une telle restriction des droits fondamentaux n'est admise que dans le cadre de l'art. 36 Cst. Les exigences, qui sont principalement fixées pour des motifs de transparence, ne sont néanmoins pas particulièrement élevées, de sorte que l'atteinte peut être qualifiée de légère.

En vertu de l'art. 36, al. 1, Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale. En l'occurrence, cette exigence est remplie par les art. 19a à 19c. De plus, selon l'al. 2 du même article constitutionnel, toute restriction d'un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui. Peuvent être considérés comme un intérêt public pour exiger la délimitation de zones spécifiquement dédiées à la culture d'OGM (zones avec OGM) la protection de la production agricole biologique et intégrée, en invoquant les structures à faible échelle de l'agriculture qui ne permettent pas toujours de respecter les règles de coexistence prescrites, de même que l'intérêt du public à une transparence en matière de respect des prescriptions
légales concernant la protection d'une production exempte d'organismes génétiquement modifiés et du libre choix des consommateurs. La délimitation de zones avec OGM permet une protection des exploitations bio et IP, ce qui est notamment conforme au mandat d'encouragement défini à l'art. 104, al. 3, let. b, Cst. Les intérêts des consommateurs doivent également être pris en compte. L'exigence de zones délimitées spécifiquement dédiées à la culture d'OGM (zones avec OGM), ainsi que le registre des cultures d'organismes génétiquement modifiés dans les zones avec OGM, notamment, contribuent, à cet égard, également à plus grande transparence et à la possibilité de mettre en place une coexistence (p. ex. pour les apiculteurs).

Selon l'art. 36, al. 3, Cst., les restrictions doivent être proportionnées, ce qui signifie que l'exigence s'appliquant à la délimitation d'une zone spécifiquement dédiée à la culture d'OGM (zone avec OGM) doit être appropriée, nécessaire et raisonnable.

Comme déjà mentionné plus haut, cette exigence peut restreindre la liberté économique et la liberté de propriété des exploitants et des propriétaires. Dans le cadre de la proportionnalité, il convient donc de procéder à une pesée entre l'intérêt de l'exploitant à pouvoir cultiver des OGM n'importe où et l'intérêt public de créer une transparence en exigeant une délimitation des zones dédiées à la culture des OGM.

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Différents facteurs compliquent le respect des mesures de coexistence: les coûts liés à la mise en oeuvre des mesures exigées afin de garantir la coexistence sont beaucoup plus importants dans les exploitations à petite échelle que dans de grandes exploitations dont les surfaces sont supérieures à la moyenne suisse. La principale raison motivant les exploitants à cultiver des organismes génétiquement modifiés pourrait être une augmentation du rendement et, partant, de leur revenu. Comparé à celui d'une culture conventionnelle, le rendement de la culture d'OGM ne devrait pas être très élevé si l'exploitant doit s'engager dans des clarifications complexes et conclure des accords en vue de respecter les mesures de coexistence dans des structures à petite échelle. Aussi, dans des régions comportant des structures de ce type, différents intérêts publics devraient prévaloir sur l'intérêt personnel de l'exploitant à cultiver des OGM, et l'exigence d'une délimitation de zones avec OGM semble également proportionnée au regard de ce qui est économiquement supportable. En effet, vu le nombre important de voisins et vu la situation générale plutôt confuse de par les structures agricoles à petite échelle de par l'imbrication des parcelles, il se pourrait que les exploitants commettent des erreurs lors de l'application des mesures de coexistence. Du point de vue financier et eu égard à la transparence requise en vue d'accroître l'acceptation, il serait même dans l'intérêt de l'exploitant de produire dans une zone avec OGM et de commercialiser ses produits comme tels, les prescriptions en matière de coexistence étant plus faciles à respecter à l'intérieur d'une zone dédiée à la culture d'OGM. Compte tenu de l'intérêt public en matière de sécurité alimentaire, la proposition de délimiter des zones spécifiquement dédiées à la culture d'OGM permet notamment de protéger la production de semences d'une éventuelle contamination par des organismes génétiquement modifiés, dont les coûts et les conséquences éventuelles peuvent s'avérer importants. Dans ce cas précis, l'intérêt public de disposer de zones de ce type devrait primer sur l'intérêt privé de pouvoir cultiver librement des OGM n'importe où; la proportionnalité serait ainsi garantie. Les exigences posées à la délimitation d'une zone de culture spécifique en tant
que zone avec OGM ne sont, par ailleurs, pas particulièrement élevées, de sorte que la restriction des droits fondamentaux touchés peut être qualifiée de proportionnée. L'application pratique de la réglementation n'entraîne notamment pas ­ de manière directe ou indirecte ­ une interdiction générale de la culture d'OGM.

La réglementation d'une délimitation de zones spécifiquement dédiées à la culture d'OGM (zones avec OGM) qui est proposée ne touche pas à l'essence de la liberté économique et de la liberté de propriété (art. 36, al. 4, Cst).

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Le projet est compatible avec les obligations internationales de la Suisse. Les nouvelles dispositions proposées ne sont en contradiction ni avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce, ni avec les obligations résultant des accords bilatéraux conclus avec l'Union européenne. Par ailleurs, le projet ne touche aucune des obligations contractées par la Suisse en lien avec son appartenance à des organisations internationales ou avec des traités internationaux.

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5.2.1

Organisation mondiale du commerce (OMC)

L'adaptation des normes de délégation relatives à la coexistence prévue par le projet ne pose aucun problème au regard du droit du commerce international. Un moratoire a toutefois incontestablement un effet restrictif sur la mise en circulation de plantes et de parties de végétaux génétiquement modifiées, sur les semences et autre matériel de multiplication génétiquement modifiés ainsi que sur les animaux génétiquement modifiés. C'est pourquoi la compatibilité de la prolongation du moratoire et de l'exigence de zones spécifiquement dédiées à la culture d'OGM (zones avec OGM) avec différentes dispositions du droit de l'OMC, notamment l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce GATT et l'accord de l'OMC sur les obstacles techniques au commerce (OTC), doit être examinée.

Prolongation du moratoire La compatibilité d'un moratoire avec le droit du commerce international, et plus particulièrement le droit de l'OMC, a déjà été discutée dans le message relatif à l'introduction du moratoire79. Les conclusions du litige porté devant l'OMC (CE ­ Approbation et commercialisation des produits biotechnologiques80) ont été exposées dans le message de 2009 relatif à la première prolongation du moratoire81.

Selon la décision, l'UE a violé l'obligation de statuer dans un délai raisonnable dans le cadre de la procédure d'autorisation d'OGM et elle a, par ailleurs, pris des mesures protectrices à l'encontre des OGM sans évaluation des risques et de preuves scientifiques suffisantes. Le message relevait également les critiques émises par les États-Unis et le Canada à l'encontre du moratoire suisse suite à sa notification auprès de l'OMC, notamment en raison de l'absence d'une évaluation au cas par cas des risques présentés par les OGM. Le Conseil fédéral était dès lors arrivé à la conclusion qu'il n'était pas possible de dire de manière définitive si le moratoire posait problème du point de vue du droit de l'OMC, mais que l'on pouvait néanmoins s'appuyer, pendant une période limitée dans le temps, sur le principe de précaution de l'accord de l'OMC relatif aux mesures sanitaires et phytosanitaires (art. 5, ch. 7, SPS), et ce jusqu'à ce que l'on dispose des informations supplémentaires et des résultats scientifiques nécessaires à une évaluation objective des risques.

Il fallait par conséquent attendre les
résultats du PNR 59. Dans ce contexte, le Conseil fédéral relevait déjà, dans sa réponse à la motion Ritter (12.3028) concernant la deuxième prolongation du moratoire, qu'un moratoire renouvelé à plusieurs reprises ou fixé à long terme pourrait s'avérer problématique sous l'angle de la constitution et du droit commercial international.

Les résultats du PNR 59 sont maintenant disponibles82. S'agissant de la santé humaine et animale, le PNR 59 arrive à la conclusion, après avoir passé en revue de nombreuses études, qu'aucun effet négatif lié aux PGM n'a été décelé jusqu'ici mais 79 80 81 82

Cf. message du 18 août 2004 concernant l'initiative populaire «pour des aliments produits sans manipulations génétiques» FF 2004 4629.

WT/DS291-293, Communautés européennes ­ Mesures affectant l'approbation et la commercialisation des produits biotechnologiques.

Message du 1er juillet 2009 relatif à la modification de la loi sur le génie génétique (Prolongation du moratoire sur l'utilisation d'OGM dans l'agriculture), FF 2009 4887.

Cf. www.nfp59.ch

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que quelques effets positifs des OGM ont été mis en évidence. En ce qui concerne des effets néfastes précis de certains OGM sur l'environnement, le PNR arrive à la conclusion qu'ils ne sont pas tous une conséquence spécifique du génie génétique; ils se manifestent également dans la culture conventionnelle ou dans le cadre d'une exploitation agricole inappropriée. Toutefois, lors de son appréciation, le législateur peut prendre en compte, parallèlement à ces résultats, d'autres intérêts généraux, des motifs socio-économiques ou des considérations éthiques en faveur ou contre une prolongation du moratoire, mais il doit respecter les engagements de la Suisse au plan international. La nouvelle réglementation de l'UE offre aussi aux États membres la possibilité d'édicter des interdictions de culture des OGM en raison d'intérêts publics prépondérants (opt-out), mais est critiquée au sein de l'OMC, notamment par les États-Unis. La compatibilité de la prolongation du moratoire avec le droit commercial international doit être examinée en gardant à l'esprit que, selon le présent projet, la culture d'OGM et, partant, l'importation et l'accès au marché ­ aspects pertinents du point de vue du droit du commerce international ­ de semences OGM autorisées selon le droit suisse ne doivent pas être exclus par principe.

Il y a également lieu de considérer que la décision précitée du groupe spécial de l'OMC prononcée contre l'UE touchait les OGM d'une manière générale et que le cas présent n'est, par conséquent, pas directement comparable. Bien que le système de règlement des différends de l'OMC ne se soit encore jamais prononcé sur la question de l'éventuelle similitude entre des OGM et des denrées alimentaires ou des plantes cultivées de manière conventionnelle, il existe de bonnes raisons pour que les produits englobés par le moratoire concernant la culture d'OGM ne soient pas considérés comme similaires et les produits issus d'une culture conventionnelle au sens des accords GATT et OTC. Même si la similarité était établie en cas de litige, il n'y aurait pas de discrimination en faveur d'OGM d'origine nationale. Ceci ne signifie toutefois pas que des prolongations supplémentaires d'un moratoire qui ne porterait pas spécifiquement sur des variétés définies constituent nécessairement des entraves proportionnées au
commerce et qu'elles seraient, par conséquent, compatibles avec les obligations envers l'OMC. On peut admettre que le moratoire est compatible avec le droit commercial international si sa durée est effectivement utilisée pour créer un régime de coexistence susceptible de rassembler une majorité des suffrages.

La prolongation du moratoire proposée par le présent projet doit, comme les deux précédentes, être notifiée et motivée auprès de l'OMC, ce qui pourrait générer des critiques des États membres de l'OMC, les États-Unis en tête. On ne peut donc pas totalement exclure que d'autres pays membres de l'OMC demandent des consultations susceptibles, en l'absence d'un accord, de donner lieu à une plainte contre la Suisse auprès de l'OMC. La probabilité qu'un tel cas puisse se produire est difficile à évaluer en l'état actuel des connaissances et l'issue incertaine selon la situation. Si la Suisse devait faire l'objet d'une procédure de règlement des différends de l'OMC, elle pourrait être tenue d'adapter sa législation.

Zones avec OGM L'exigence de l'instauration de zones dédiées à la culture d'OGM (zones avec OGM) est une mesure qui concerne la production et non le produit. L'importation, le 6350

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commerce et la culture des OGM restent possibles, cette dernière toutefois avec certaines restrictions.

5.2.2

Union européenne

Le projet correspond aux engagements pris par la Suisse dans le cadre des accords bilatéraux avec l'Union européenne tant en ce qui concerne la prolongation du moratoire que l'adaptation des normes de délégation et la réglementation relative aux zones avec OGM. L'accord du 21 juin 1999 relatif aux échanges de produits agricoles83 exclut expressément les variétés génétiquement modifiées des dispositions relatives au commerce bilatéral de semences, lequel est en principe libéralisé (annexe 6, art. 5, al. 3).

Le commentaire sous 5.2.1 est transposable par analogie à l'accord du 22 juillet 197284 de libre-échange: la délimitation de zones avec OGM constitue une mesure concernant la production, qui n'est par principe pas couverte par l'accord. La culture d'organismes génétiquement modifiés reste néanmoins possible en Suisse malgré cette mesure.

5.3

Forme de l'acte à adopter

La mise en oeuvre du projet s'effectuera par l'adaptation de plusieurs dispositions de la loi sur le génie génétique ainsi que par l'ajout, dans cette même loi, d'une section relative aux zones avec OGM. L'adaptation et la concrétisation des normes de délégation, de même que la création de l'instrument que constituent les zones avec OGM, doivent être réglées au niveau de la loi. La loi sur le génie génétique a été choisie comme l'acte à modifier, son contenu thématique étant proche de celui de la nouvelle réglementation.

5.4

Frein aux dépenses

L'adaptation proposée de la loi sur le génie génétique n'entraîne pas de dépense unique de plus de 20 millions de francs ni de dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs.

5.5

Respect des principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

Le projet ne contient aucune disposition relative à des subventions.

83 84

RS 0.916.026.81 RS 0.632.401

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5.6

Délégation de compétences législatives

L'art. 20, al. 1, confère d'une manière générale au Conseil fédéral la compétence d'édicter des prescriptions d'exécution en lien avec l'exécution de la loi sur le génie génétique. Par ailleurs, d'autres articles habilitent également le Conseil fédéral à édicter des dispositions d'exécution. Les lignes directrices figurant dans les divers articles de la loi concrétisent donc suffisamment la délégation des compétences législatives.

En vertu du principe selon lequel on ne peut utiliser des organismes génétiquement modifiés que si ces organismes, leur métabolites ou leurs déchets ne peuvent porter atteinte à une production exempte d'OGM ni au libre choix des consommateurs, le Conseil fédéral est habilité par le nouvel art. 7, al. 2, à édicter des dispositions en vue de protéger les droits précités. La liste des mesures d'assurance qualité pouvant être prises (let. a à d) n'est pas exhaustive.

L'art. 15a habilite le Conseil fédéral à édicter des prescriptions concernant l'étendue, le contenu et la durée de la formation nécessaire pour utiliser des organismes génétiquement modifiés. Les personnes qui travaillent avec des OGM doivent disposer des connaissances et des compétences requises pour exercer leur activité. Au vu des objectifs de protection poursuivis par la loi sur le génie génétique, il semble judicieux de déléguer au Conseil fédéral la compétence de fixer les normes minimales pour cette formation.

La modification de l'art. 16, al. 2, prévue par le projet porte uniquement sur le champ d'application des dispositions d'exécution à édicter, qui est étendu. En précisant que le Conseil fédéral doit tenir compte de l'ensemble de la filière de production lorsqu'il édicte des dispositions concernant la séparation des flux des produits, on garantit également la possibilité d'arrêter des mesures portant sur la phase précédant la récolte effective d'un produit. Le projet ne propose pas de nouvelle norme de délégation dans ce sens. L'art. 24a ne contient pas non plus de norme de délégation: il intègre dans la loi le mandat concernant la mise en place et l'utilisation d'un système de monitoring, jusqu'à présent uniquement inscrit à l'art. 51 de l'ordonnance sur la dissémination dans l'environnement.

Dans le cadre de la délimitation des zones avec OGM, l'art. 19b, al. 2, charge le Conseil fédéral d'édicter
les dispositions d'exécution. Il doit définir les modalités de la reconnaissance d'une zone avec OGM, par exemple les exigences concernant la manière dont doit être organisé l'organe responsable ainsi que les mécanismes de reconnaissance et de contrôle. Il peut notamment prescrire une surface agricole utile minimale dédiée à la culture d'une variété déterminée dans le but de garantir des filières de production propres à ces zones. Le contrôle peut également être délégué à des organisations ou à des personnes morales de droit public ou privé en vertu de l'art. 20, al. 3, LGG.

En vertu du droit constitutionnel, les délégations législatives doivent se restreindre à un objet déterminé; elles ne peuvent pas être illimitées. Les délégations de compétences législatives prévues par le projet se limitent toutes à un objet déterminé et leur contenu, leur but et leur ampleur sont précisés de manière suffisante (cf. aussi le commentaire des dispositions au ch. 2). La compétence de légiférer par voie

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d'ordonnance conférée au Conseil fédéral est donc conforme au principe de précision et suffisamment définie au regard du droit constitutionnel.

5.7

Conformité à la législation sur la protection des données

Pour protéger la production exempte d'OGM et le libre choix des consommateurs, le projet prévoit que le Conseil fédéral peut introduire une obligation d'information et de documentation (cf. art. 7, al. 2, let. b). L'accès aux dossiers pertinents et l'information du public sont déjà régis par l'art. 18 LGG. La norme de délégation crée, en outre, la base légale pour une obligation d'information et de documentation entre les exploitants. Le Conseil fédéral tient un registre permettant de consulter certaines informations fournies par les exploitants de parcelles cultivées avec des organismes génétiquement modifiés (art. 19c, al. 3). L'accès au registre sera accordé aux personnes justifiant d'un intérêt légitime à la consultation (art. 19c, al. 3). Ce registre ne contiendra pas de données personnelles sensibles au sens de l'art. 3, let. C, de la loi du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD)85. Il servira à l'information préalable des autorités ainsi que des exploitants et apiculteurs avoisinants concernés, leur permettant ainsi de prendre volontairement des mesures de sécurité supplémentaires pour éviter une éventuelle contamination par des organismes génétiquement modifiés. L'accès au registre sera refusé si l'intérêt légitime de l'exploitant à garder les informations confidentielles l'emporte (art. 19c, al. 2). La norme de délégation proposée pour l'obligation d'information et de documentation est donc compatible avec les principes de la protection des données (art. 4 LPD).

85

RS 235.1

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