13.418/13.419/13.420/13.421/13.422 Initiatives parlementaires Egalité du partenariat enregistré et du mariage devant la procédure de naturalisation Rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 5 novembre 2015

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons des projets de modification de la Constitution fédérale ainsi que de la loi fédérale sur la nationalité, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter les projets de l'acte ci-joints.

5 novembre 2015

Pour la commission: La présidente, Cesla Amarelle

2015-3067

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Condensé En ce qui concerne la naturalisation, les étrangers vivant sous le régime du partenariat enregistré ne doivent plus être désavantagés par rapport aux étrangers vivant sous le régime du mariage, qui ont la possibilité d'acquérir la nationalité suisse selon une procédure simplifiée. Les étrangers vivant sous le régime du partenariat enregistré doivent en effet suivre la procédure de la naturalisation ordinaire, qui est plus lourde.

Se fondant sur cinq initiatives parlementaires de même teneur, la Commission des institutions politiques du Conseil national a élaboré un projet de modification constitutionnelle et légale visant à assurer une parfaite égalité de traitement entre le régime du mariage et celui du partenariat enregistré en ce qui concerne le droit de cité.

La modification constitutionnelle octroie à la Confédération la compétence de régler l'acquisition et la perte de la nationalité et des droits de cité non seulement par filiation, par mariage et par adoption, mais également par enregistrement d'un partenariat. En parallèle, la loi sur la nationalité est modifiée de sorte que les dispositions relatives à la naturalisation facilitée s'appliquent également aux étrangers liés à des citoyens suisses par des partenariats enregistrés.

La commission souhaite ainsi garantir l'égalité des droits entre les étrangers vivant sous le régime du mariage et les étrangers vivant sous le régime du partenariat enregistré afin que ces derniers ne soient plus discriminés.

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Rapport 1

Genèse du projet

1.1

Initiatives parlementaires concernant l'égalité du partenariat enregistré et du mariage devant la procédure de naturalisation

Cinq initiatives parlementaires déposées par le groupe vert-libéral, le groupe du parti bourgeois-démocratique, le groupe des Verts, le groupe socialiste et la conseillère nationale Doris Fiala (PLR, ZH) à la session de printemps 2013 demandent à l'Assemblée fédérale de modifier les bases juridiques de manière à garantir l'égalité entre le partenariat enregistré et le mariage devant la procédure de naturalisation.

Les auteurs des initiatives ont notamment souligné que cette proposition avait été rejetée lors des délibérations relatives à la révision totale de la loi sur la nationalité (11.022), au motif qu'une réglementation au niveau de la loi aurait été anticonstitutionnelle étant donné que l'art. 38, al. 1, de la Constitution (Cst.; RS 101) limitait strictement la compétence de la Confédération à régler directement l'acquisition et la perte de la nationalité aux trois cas suivants: la filiation, le mariage et l'adoption.

Pour cette raison, ils ont demandé de modifier la Constitution de manière à élargir la compétence de la Confédération à la réglementation de la naturalisation en cas de partenariat enregistré, précisant que cet élargissement s'imposait également de manière pressante sous l'angle de l'interdiction de toute discrimination (art. 8 Cst.).

1.2

Examens préalables effectués par les Commissions des institutions politiques

Le 30 août 2013, la Commission des institutions politiques du Conseil national (CIP-N) a donné suite aux initiatives par 14 voix contre 0 et 9 abstentions. Son homologue du Conseil des Etats (CIP-E) a pris la même décision le 27 janvier 2014, par 5 voix contre 1 et 4 abstentions.

Les commissions se sont largement ralliées aux arguments avancés par les auteurs des initiatives: dans la loi sur la nationalité, les étrangers vivant sous le régime du partenariat enregistré sont nettement désavantagés par rapport à ceux qui vivent sous le régime du mariage. Au contraire des étrangers mariés à des citoyens suisses, qui peuvent obtenir la naturalisation facilitée s'ils vivent depuis trois ans en union conjugale avec leurs conjoints et s'ils ont séjourné en Suisse pendant cinq ans en tout, les étrangers liés à des citoyens suisses par des partenariats enregistrés doivent suivre la procédure plus lourde de la naturalisation ordinaire. Eu égard à la Constitution, qui interdit toute discrimination, les commissions ont estimé qu'il y avait lieu d'élaborer un projet qui élimine cette inégalité de traitement.

Certains membres des CIP ont souligné que l'objectif des initiatives parlementaires avait été clairement rejeté lors des délibérations relatives à la loi sur le partenariat; ainsi, ils ont préféré s'abstenir. Selon eux, le législateur avait sciemment renoncé à 29

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accorder aux partenaires enregistrés les mêmes droits qu'aux personnes mariées dans le domaine du droit de cité. Par conséquent, ils ont estimé discutable de tenter une nouvelle fois de faire passer cette proposition.

1.3

Mise en oeuvre des initiatives par la commission

1.3.1

Conceptions juridiques divergentes

La question de savoir si seule une modification au niveau de la loi était possible, ou si une révision de la Constitution était également nécessaire, avait déjà été évoquée par la commission lors de l'examen préalable des initiatives.

Sur ce point, les avis divergent parmi les spécialistes en droit. D'aucuns estiment que l'art. 38, al. 1, de la Constitution fédérale doit être interprété en relation avec l'art. 8 Cst., dans le sens d'une harmonisation et que, par conséquent, l'égalité des droits établie par l'art. 8 peut être appliquée aux couples de même sexe par une révision de la loi sur la nationalité1.

D'autres considèrent qu'il est nécessaire de modifier la Constitution pour créer l'égalité des droits: il s'agirait que la Confédération soit compétente en matière de naturalisation par enregistrement d'un partenariat au même titre qu'elle l'est déjà en matière de naturalisation par filiation, par mariage ou par adoption. Dans son message relatif à la loi sur le partenariat2, le Conseil fédéral est arrivé à la même conclusion, expliquant que, selon une interprétation téléologique, la notion de mariage ne pouvait pas être tout simplement appliquée au partenariat enregistré.

D'autres commentateurs de la Constitution partagent cet avis3.

1.3.2

Deux avis de droit

En raison de ces conceptions juridiques divergentes, la présidente de la CIP-N a demandé à l'Office fédéral de la justice (OFJ), par lettre du 20 mars 2014, de lui présenter un avis de droit4. Avant de prendre une décision, elle souhaitait en effet que la commission connaisse les avantages et les inconvénients respectifs de la mise en oeuvre des initiatives par une modification de la loi accompagnée ou non d'une modification de la Constitution. Dans son avis du 28 avril 2014, l'OFJ explique que la notion de mariage au sens de l'art. 38, al. 1, Cst. n'inclut pas le partenariat enregistré tel qu'il est institué par la loi fédérale du 18 juin 2014 sur le partenariat enre-

1 2 3

4

30

Cf. Pulver, Bernhard: Art. 15 BüG, in: Geiser/Gremper (Hrsg.), Zürcher Kommentar zum Partnerschaftsgesetz, 2007 02.090 Message relatif à la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe (FF 2003 1218) Cf. Auer/Malinverni/Hottelier: Droit constitutionnel suisse, Vol. I, ch. marg. 391; Biaggini: Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft, Art. 38 Erwerb und Verlust der Bürgerrechte, ch. marg. 10.

Office fédéral de la justice: Avis de droit ­ Portée de l'art. 38 al. 1 Cst. concernant les partenariats enregistrés (28.4.2014)

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gistré entre personnes du même sexe (loi sur le partenariat, LPart) 5. Selon l'office, la plupart des méthodes d'interprétation aboutissent à la conclusion que cet article contient une liste exhaustive des cas dans lesquels le législateur fédéral peut prévoir une naturalisation facilitée en relation avec le droit de la famille: le partenariat enregistré ne peut donc guère être considéré comme implicitement visé par l'art. 38, al. 1, Cst. Enfin, l'OFJ montre que les travaux préparatoires de la révision totale de la Constitution et, plus clairement encore, ceux relatifs à la loi sur le partenariat 6 plaident contre la possibilité d'introduire une naturalisation facilitée similaire à celle qui est prévue pour les conjoints étrangers de citoyens suisses à l'art. 21 de la loi sur la nationalité suisse, qui a été totalement révisée.

Après avoir pris acte de cet avis de droit, la CIP-N a décidé, à sa séance du 28 août 2014, de demander un second avis pour savoir si l'adoption d'une nouvelle disposition légale en la matière nécessitait une modification constitutionnelle. La présidente de la commission a alors chargé M. Andreas R. Ziegler, professeur ordinaire à la faculté de droit de l'Université de Lausanne, de lui présenter une expertise. Dans son bref avis du 15 octobre 20147, M. Ziegler a expliqué que, en considérant la Constitution comme un tout, l'interprétation de l'art. 38, al. 1, Cst. permettait sans aucun doute de parvenir à la conclusion que la Confédération avait également la compétence de réglementer l'acquisition et la perte de la nationalité et des droits de cité dans le cadre du partenariat enregistré. Selon lui, cet article ne peut être lu autrement, eu égard à l'interdiction de discriminer du fait du mode de vie (art. 8, al. 2, Cst.) introduite lors de la révision totale de la Constitution de 1999. M. Ziegler a également précisé que si l'on estimait toutefois que l'art. 38, al. 1, Cst. ne pouvait à lui seul constituer une base suffisante, il était alors possible de considérer que la Confédération pouvait se fonder sur l'art. 122 Cst. (compétence de la Confédération pour édicter des dispositions en matière de droit civil) pour réglementer l'acquisition du droit de cité dans le cadre du partenariat enregistré. Considérer que la norme constitutionnelle créée avant l'adoption de la loi sur
le partenariat est exhaustive et que la compétence générale en matière de droit civil contenue à l'art. 122 Cst. n'est pas applicable aux partenariats enregistrés est une erreur, selon lui: non seulement cela contredirait la volonté du constituant de confier à la Confédération les domaines de la réglementation du droit de cité relatifs au droit de la famille, mais cela serait méconnaître la portée de l'interdiction de discriminer du fait du mode de vie prévue à l'art. 8 Cst.

A sa séance du 31 octobre 2014, la CIP-N s'est penchée sur les deux avis de droit et a décidé, par 14 voix contre 8, d'élaborer un projet de modification législative et constitutionnelle. Elle est parvenue à la conclusion que seule une modification constitutionnelle assurerait une égalité de traitement complète entre conjoints étrangers et partenaires enregistrés étrangers dans le domaine du droit de cité. La Suisse ne connaissant aucune juridiction constitutionnelle, il incombe au Parlement d'adopter exclusivement des lois qui peuvent se fonder sur une base constitution5 6 7

RS 211.231 02.090 n Message relatif à la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, ch. 1.7.3 (FF 2003 1216­1218) Ziegler, Andreas R.: Kurzgutachten zur Tragweite von Art. 38 Abs. 1 BV in Bezug auf die eingetragene Partnerschaft (15.10.2014)

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nelle solide. En l'espèce, la procédure sera donc plus lourde qu'une simple modification légale, étant donné que le projet sera soumis au référendum (le peuple et les cantons devront se prononcer). Au contraire, la commission n'a pas été convaincue par le deuxième avis de droit, selon lequel le fait d'interpréter l'art. 38, al. 1 conjointement avec l'art. 8, al. 2, Cst. (interdiction de discriminer) et l'art. 122, al. 2 (compétence de la Confédération pour édicter des dispositions en matière de droit civil) rend superflue toute modification constitutionnelle: que l'interprétation soit grammaticale, historique ou systématique, rien n'indique que, aux yeux du constituant, le partenariat enregistré peut être assimilé au mariage.

1.3.3

Adoption de l'avant-projet en vue de la procédure de consultation

Le 26 mars 2015, la commission a approuvé par 13 voix contre 7 et 4 abstenstions l'avant-projet préparé par son secrétariat et par l'administration, qui vise à modifier la Constitution et la loi sur la nationalité. Une minorité proposait de ne pas entrer en matière, estimant que la loi sur la nationalité prévoyait déjà une procédure simplifiée à l'intention des groupes de personnes concernés sous forme de délais plus courts.

Au cours de la discussion par article, la commission a décidé, par 13 voix contre 10 et 1 abstention, de compléter la disposition constitutionnelle selon laquelle la Confédération peut régler l'acquisition et la perte de la nationalité et des droits de cité par filiation, par mariage ou par adoption en ajoutant un autre état de fait relevant du droit de la famille, à savoir l'enregistrement d'un partenariat. Par 14 voix contre 10, elle a refusé d'opter pour une formulation plus ouverte qui permettrait d'anticiper d'éventuels développements dans le droit de la famille, rejetant une proposition visant à étendre la compétence de la Confédération à tous les liens enregistrés auprès de l'état civil.

1.3.4

Analyse des résultats de la consultation et approbation à l'intention du Conseil national

Jusqu'à l'expiration du délai de consultation, fixé au 6 juillet 2015, 46 avis provenant des cantons, des partis, des associations et des milieux intéressés ont été déposés à la commission. Une grande majorité des avis exprimés étaient favorables au projet de la CIP. Seuls le canton de Schwyz, l'Union démocratique du centre (UDC) et le Centre Patronal (CP) ont rejeté le projet. La modification de la Constitution proposée par la CIP (art. 38, al. 1, P-Cst.; projet 1) a été approuvée par 24 cantons, par le PBD, le PDC, le PLR, le FPE et le PVL ainsi que par l'ACS, l'UVS et Travail Suisse. Le canton d'Obwald et le PS se sont prononcés en faveur de la minorité Schenker, soit pour une formulation plus ouverte de cet article constitutionnel. Les milieux intéressés étaient pour la plupart d'avis qu'une modification de la Constitution n'était pas nécessaire et que le projet 1 pouvait être abandonné (CFM, LOS, NETWORK, Pink Cross et CSDE). Ces organisations préféraient en effet à cela l'utilisation de l'expression «liens enregistrés auprès de l'état civil», au cas où la proposition de modifier la Constitution serait retenue. Le 32

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remplacement de l'expression «dispositions minimales» dans l'art. 38, al. 2, P-Cst., proposé par la CIP, a été approuvé par 23 cantons, seuls les cantons d'OW, de SG et de SZ s'y opposant. Les autres participants à cette consultation ­ à l'exception de l'UDC et du CP ­ ont également approuvé cette modification.

Le projet de la CIP concernant la révision de la loi sur la nationalité (art. 10 et 21, al. 5, P-LN; projet 2) a remporté l'adhésion de tous les cantons, à l'exception de celui de Schwyz, et celle de la grande majorité des partis, des associations et des autres participants. L'UDC et le CP se sont opposés par principe à la modification de la loi.

À sa séance du 5 novembre 2015, la CIP-N a pris acte des résultats positifs de la consultation et, par 17 voix contre 6, approuvé le projet sans modifications.

2

Grandes lignes du projet

La CIP-N soumet à l'Assemblée fédérale un projet de modification légale et constitutionnelle visant à ce que les étrangers vivant sous le régime du partenariat enregistré soient traités comme les étrangers vivant sous le régime du mariage en ce qui concerne le droit de cité. Ces personnes doivent aussi avoir la possibilité de bénéficier d'une procédure de naturalisation facilitée si elles vivent depuis trois ans en partenariat enregistré et si elles ont séjourné en Suisse pendant cinq ans. La discrimination actuelle qui frappe ces personnes est en contradiction avec l'art. 8, al. 2, Cst., qui interdit explicitement la discrimination fondée sur le «mode de vie».

La commission propose que la Constitution octroie à la Confédération la compétence de régler l'acquisition et la perte de la nationalité et des droits de cité non seulement par filiation, par mariage ou par adoption, mais également par enregistrement d'un partenariat (projet 1).

Parallèlement, la CIP-N prévoit d'étendre sans restriction les dispositions de la loi du 20 juin 2014 sur la nationalité suisse (qui a été totalement révisée mais n'est pas encore entrée en vigueur) relatives à la naturalisation facilitée aux partenaires enregistrés et d'abroger la disposition spéciale applicable à ces personnes (projet 2).

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Commentaire des dispositions

3.1

Arrêté fédéral concernant la naturalisation facilitée des personnes liées par un partenariat enregistré (projet 1)

Art. 38

Acquisition et perte de la nationalité et des droits de cité

Al. 1 Selon l'actuel al. 1, la Confédération règle l'acquisition et la perte de la nationalité et des droits de cité uniquement par filiation, par mariage ou par adoption. Comme

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exposé au ch. 1.3.2, cette formulation n'englobe pas le partenariat enregistré au sens de la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe 8.

Pour mettre en oeuvre les initiatives parlementaires, la première phrase de l'al. 1 doit être complétée par un autre état de fait relevant du droit de la famille, à savoir l'enregistrement du partenariat. Par analogie avec le terme «mariage», qui désigne la conclusion du mariage devant un officier de l'état civil et, par conséquent, le fait d'état civil, il y a donc lieu d'ajouter l'expression «enregistrement du partenariat» dans la disposition constitutionnelle en vigueur.

La proposition de modification répond aux initiatives parlementaires, qui demandent que la Confédération puisse régler la naturalisation des partenaires enregistrés au même titre que celle des conjoints mariés.

Une minorité de la commission propose de retenir une formulation plus souple selon laquelle la Confédération peut régler l'acquisition et la perte de la nationalité et des droits de cité fondées sur des liens enregistrés auprès de l'état civil, comme la filiation, le mariage, l'enregistrement d'un partenariat et l'adoption.

Une autre minorité propose que la disposition constitutionnelle concernée contienne uniquement la notion de «liens enregistrés auprès de l'état civil», car celle-ci englobe par nature tous les types de liens, indépendamment de savoir s'ils sont déjà prévus par la loi s'ils pourraient l'être ultérieurement.

Les deux formulations proposées par les minorités présentent l'avantage d'anticiper d'éventuels développements dans le droit de la famille. Compte tenu de l'évolution sociétale des dernières décennies, il est en effet possible que de nouvelles formes de vie en couple pertinentes sous l'angle du droit apparaissent en dehors du mariage et du partenariat enregistré. La majorité de la commission ne souhaite toutefois pas prendre de mesures anticipatives, étant donné qu'il est impossible de définir concrètement quels seront ces développements. Elle souligne que le présent projet ne doit pas d'ores et déjà prévoir un élément supplémentaire qui, le moment venu, risque d'être controversé.

La réglementation prévue accordera à la Confédération la compétence de régler également de manière uniforme l'acquisition et la perte de la nationalité
et des droits de cité pour les partenaires enregistrés de citoyens suisses. La Constitution laissera au législateur fédéral le soin de décider, comme pour les autres cas mentionnés à l'al. 1 (filiation, mariage, adoption), si la nationalité et les droits de cité peuvent être acquis du fait de la loi ou d'un acte administratif, c'est-à-dire une naturalisation. Le projet de révision constitutionnelle va donc plus loin que les initiatives parlementaires, qui veulent habiliter la Confédération à réglementer uniquement la naturalisation facilitée des partenaires enregistrés. La mise en oeuvre de la modification constitutionnelle proposée intervient à l'art. 21 P-LN. Elle répond à la demande des initiatives parlementaires en alignant la réglementation des conditions d'accès à la naturalisation facilitée des partenaires enregistrés sur celle applicable aux conjoints mariés (voir ch. 3.2).

Comme dans le droit en vigueur, la Confédération pourra encore régler la perte de la nationalité suisse pour d'autres motifs ainsi que la réintégration dans cette dernière.

8

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RS 211.231

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La seconde phrase de l'art. 38, al. 1, est reprise telle quelle dans le projet de révision de la Constitution fédérale.

Si l'Assemblée fédérale adopte la modification de l'art. 38, al. 1, Cst. (arrêté fédéral concernant la naturalisation facilitée des étrangers de la troisième génération9) que la CIP-N lui a soumise le 30 octobre 2014, le présent projet devra en tenir compte au moyen d'une disposition de coordination.

Al. 2 Dans l'al. 2, l'expression «dispositions minimales» est remplacée par le terme «principes». Cette substitution n'est pas directement liée aux exigences des initiatives parlementaires. Par économie de procédure, il convient cependant de saisir l'opportunité en procédant également à cette adaptation supplémentaire qui n'est pas sujette à controverse.

Aujourd'hui, il est largement admis dans la doctrine que la Confédération est habilitée, en dépit de la teneur de l'al. 2, à édicter, dans l'intérêt d'une pratique uniforme en matière de naturalisation, des principes contraignants pour les cantons et pas seulement des prescriptions minimales. La Confédération a déjà usé à plusieurs reprises de cette compétence et instauré des règles uniformes dans le domaine de la naturalisation ordinaire, par exemple en plafonnant les émoluments fédéraux, cantonaux et communaux conformément au principe de la couverture des frais, en formulant des dispositions sur les naturalisations soumises à une assemblée communale ou en harmonisant la durée de séjour cantonale et communale requise pour une naturalisation.

Cette adaptation terminologique avait déjà été proposée dans le cadre d'un projet de loi du Conseil fédéral de 2001 (01.076; FF 2002 1815), qui visait à poser les bases de la naturalisation facilitée des étrangers de la deuxième génération et de l'acquisition automatique de la nationalité suisse à la naissance en Suisse pour les étrangers de la troisième génération. Dans le message, il était précisé à ce sujet: «Comme la Confédération dispose déjà d'une compétence de légiférer dans le domaine de la naturalisation ordinaire, à savoir celle d'édicter des lignes directrices fondamentales, il est indiqué, pour plus de clarté, de remplacer le terme de par celui de ». Cette adaptation terminologique n'avait fait l'objet d'aucune contestation en amont de la votation,
mais le projet a été intégralement rejeté par le peuple et les cantons le 26 septembre 200410.

Il faut noter que le remplacement du terme restrictif «dispositions minimales» par «principes» est également proposé dans le cadre de la mise en oeuvre de l'initiative parlementaire Marra «La Suisse doit reconnaître ses enfants» (08.432). Lors de sa séance du 30 octobre 2014, la CIP-N a adopté le projet de modification constitutionnelle et le projet de loi à l'intention du conseil. Vu qu'il n'est pas sûr que l'initiative parlementaire Marra puisse être mise en oeuvre, cette proposition est également reprise dans le présent projet.

9 10

FF 2015 757 ss Cf. www.admin.ch > Documentation > Votations > Répertoire chronologique > 2001­2010 > 26.09.2004.

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3.2

Modification de la loi sur la nationalité suisse (projet 2)

Art. 10

Durée de séjour spéciale en cas de partenariat enregistré

Déterminante pour la présente révision, cette disposition de la révision totale de la loi sur la nationalité suisse du 20 juin 2014, qui n'est pas encore entrée en vigueur, réglemente la naturalisation ordinaire des personnes ayant contracté un partenariat enregistré avec un citoyen suisse (art. 10 n-LN). Le droit en vigueur contient une clause analogue à l'art. 15, al. 5, LN, selon lequel le partenaire enregistré d'un citoyen suisse bénéficie de délais de naturalisation raccourcis pour la naturalisation ordinaire.

Les initiatives parlementaires visent à ce que ce groupe de personnes puisse également accéder à une naturalisation facilitée, à l'instar des conjoints de citoyens suisses. A cette fin, l'art. 38, al. 1, Cst. attribue à la Confédération la compétence de régler de manière uniforme, au niveau suisse, l'acquisition de la nationalité et des droits de cité par enregistrement d'un partenariat (voir ch. 3.1). Elle exerce cette compétence en introduisant une disposition d'exécution en ce sens dans la loi sur la nationalité (voir ci-après l'art. 21, al. 5, P-LN).

Par conséquent, les personnes liées par un partenariat enregistré ne pourront plus faire l'objet d'une naturalisation ordinaire dans le cadre d'une procédure cantonale.

L'art. 10 n-LN doit donc être abrogé.

Art. 21

Conjoint d'un citoyen suisse

Al. 5 Conformément au mandat des initiatives parlementaires, le partenariat enregistré doit être mis sur un pied d'égalité avec le mariage en ce qui concerne la procédure de naturalisation. Afin d'inscrire cette égalité au niveau de la loi, l'art. 21 est complété par un al. 5, selon lequel la réglementation de la naturalisation facilitée du conjoint étranger d'un citoyen suisse est élargie par analogie aux partenaires enregistrés. Il est à noter que des renvois similaires se trouvent par exemple dans le code civil suisse11 (art. 112a CC) ou dans la loi fédérale sur les étrangers12 (art. 52 LEtr).

4

Conséquences

4.1

Conséquences pour la Confédération

Du fait des modifications proposées de la Constitution et de la loi, la Confédération aura également compétence pour la naturalisation facilitée en cas de partenariat enregistré et plus uniquement en cas de mariage.

11 12

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RS 210 RS 142.20

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Entre 2010 et 2013, 266 partenaires enregistrés de citoyens suisses ont été naturalisés par la voie ordinaire. Durant la même période, 38 388 personnes ont bénéficié d'une naturalisation facilitée. Partant de l'hypothèse que le nombre de demandes de naturalisation de partenaires enregistrés de même sexe ne va guère croître en dépit des facilités prévues, la Confédération n'aura à assumer d'importantes charges supplémentaires ni sur le plan financier ni en matière de personnel.

4.2

Conséquences pour les cantons

Les modifications constitutionnelles et légales prévues ne déchargeront que modérément les cantons. Comme expliqué au ch. 4.1, le nombre de demandes de naturalisation qui devront désormais être traitées par la Confédération et non plus par les cantons est faible. Par ailleurs, le Secrétariat d'Etat aux migrations charge l'autorité cantonale de naturalisation d'effectuer les enquêtes nécessaires pour déterminer si les conditions de la naturalisation facilitée sont remplies (art. 34, al. 2, n-LN; droit en vigueur: art. 37 LN). Par conséquent, les cantons devront continuer de procéder à des investigations en lien avec les demandes de naturalisation émanant de personnes vivant en partenariat enregistré.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et légalité

La modification proposée de la loi sur la nationalité présuppose une révision partielle de la Constitution (art. 38, al. 1 et 2, Cst.), qui doit être acceptée par le peuple et les cantons. En cas d'acceptation, la modification proposée pourra entrer en vigueur sous réserve du référendum facultatif.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales

Les modifications proposées sont compatibles avec les obligations internationales de la Suisse.

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