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Feuille Fédérale

Berne, le 9 juin 1966

118e année

Volume I

N° 23 Parait, en règle générale, chaque semaine. Prix: 36 francs par an: 20 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à l'approbation de la convention concernant la réglementation des prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance # S T #

(Du 24 mai 1966) Monsieur le Président et Messieurs, Une convention pour réglementer les prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance a été signée le 30 avril 1966, sous réserve de ratification, par la Confédération suisse, la République fédérale d'Allemagne et la République d'Autriche.

Nous avons l'honneur de soumettre cette convention à votre approbation.

I

Introduction La consommation d'eau s'est accrue en raison de l'augmentation de la population, de la forte industrialisation, du plus haut niveau d'existence et pour d'autres causes encore. Les réserves traditionnelles, provenant des sources ou des nappes souterraines, ne suffisent plus, dans bien des régions, pour couvrir les besoins. C'est pourquoi on est bien souvent amené à utiliser les eaux de surface, particulièrement celles des nombreux lacs. Quelques lacs offrent des conditions très favorables à cet égard. Des captages relativement simples permettent d'assurer une alimentation en eau potable ou industrielle d'excellente qualité. Les apports naturels y sont abondants, de sorte que les prélèvements, en eau potable ou industrielle n'ont eu jusqu'à présent qu'une influence négligeable sur le niveau des lacs et sur l'écoulement de leurs émissaires, et cela d'autant plus qu'en général les eaux pompées font ensuite retour aux lacs servant à l'alimentation.

Les lacs constituent un facteur important de l'économie publique. Ils doivent non seulement servir à l'alimentation en eau, mais encore répondre à d'autres besoins. La pêche, la navigation, les délassements intéressent le public au premier chef. D'autres exigences tout aussi importantes, mais sans Feuille fédérale. 118-année. Vol. L

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810 doute moins apparentes, sont attachées à l'économie des eaux. On peut citer, à cet égard, la régularisation des niveaux d'un lac et des débits de son émissaire -- en vue par exemple de supprimer les inondations -- et la fonction que remplissent les lacs comme bassins naturels de purification pour les eaux usées, lesquelles, selon la législation en vigueur, ne peuvent, il est vrai, y être déversées, qu'après avoir été suffisamment clarifiées. Cette coexistence de plusieurs modes d'utilisation ne présente aucun inconvénient tant que l'un d'eux ne prend pas un développement qui limite ou exclut les autres. Sitôt qu'il apparaît que les diverses utilisations se nuisent réciproquement, l'Etat, en tant que responsable de l'ordre public, doit se demander comment il peut rétablir l'équilibre. L'intérêt public doit alors le guider. Il peut exiger que le nombre des fonctions qu'un lac est appelé à remplir soient limitées. Une telle restriction n'est toutefois imaginable que pour des lacs de faible et même de très faible superficie, situés à l'écart des agglomérations. Pour l'économie des régions lacustres, la coexistence des divers modes d'utilisation des eaux présente en général une importance décisive.

En intervenant, l'Etat doit donc régler les divers modes de façon à tenir équitablement compte de tous les besoins.

Si l'Etat doit, en pareille occurrence, agir pour des eaux qui ne dépendent pas seulement de sa seule souveraineté, mais encore de celle d'autres Etats, il devra, selon les circonstances, s'entendre avec ces derniers. Pour le lac de Constance, dont il est question ici, toute une série de conventions, que nous énumérons ci-après, ont déjà été conclues. Elles concernent: a. La régularisation de l'écoulement des eaux du lac: Convention du 31 août 1857 entre les délégués des Etats riverains du lac de Constance: Bade, la Bavière, l'Autriche, la Suisse et le Wurtemberg, touchant la régularisation de l'écoulement des eaux du lac de Constance près Constance (RS 12, 526); b. La navigation: Convention du 22 septembre 1867 entre les Etats riverains instituant un règlement international pour la navigation et le service des ports sur le lac de Constance (RS 13, 380) et protocole de Constance du 8 avril 1899 (RS 13, 443); Convention du 28 septembre 1867 entre la Suisse et le grand-duché de Bade instituant
un règlement international pour la navigation et le service des ports sur le lac Inférieur et le Rhin entre Constance et Schaffhouse (RS 13, 446) et protocole de Schaffhouse du 13 mai 1893 (RS 13, 458); c. La pêche: Convention du 18 mai 1887 entre la Suisse, le grand-duché de Bade et l'Alsace-Lorraine arrêtant des dispositions uniformes sur la pêche dans le Rhin et ses affluents, y compris le lac de Constance (RS 14, 248); Convention du 5 juillet 1893 arrêtant des dispositions uniformes sur la pêche dans le lac de Constance (RS 14, 212) avec modification du 30 mai 1959 (RO 1959, 546);

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Convention du 3 juillet 1897 concernant la pêche dans le lac Inférieur de Constance et le Rhin (RS 14, 219); d. La chasse sur l'eau: Convention du 18 décembre 1897 concernant la réglementation de la chasse aux oiseaux sur le lac Inférieur et le Rhin (RS 14, 197); e. La protection des eaux contre la pollution: Convention du 27 octobre 1960 sur la protection du lac de Constance contre la pollution (RO 1961, 924).

Si les prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance sont assez importants pour avoir des répercussions fâcheuses sur les autres modes d'utilisation du lac et toucher les intérêts et les droits des autres Etats riverains, il paraît évident que la conclusion d'une convention devient nécessaire pour réglementer aussi cet objet, II

Historique et déroulement des pourparlers Dans les années d'après guerre, la région de Stuttgart a vu sa population augmenter très vite et son industrie prendre un grand essor. Ses besoins en eau potable et industrielle sont donc devenus toujours plus considérables, de sorte qu'il n'a plus été possible de les couvrir en recourant aux seules ressources naturelles locales ou régionales. Parmi les divers projets établis pour y faire face, celui d'adduction d'eau en provenance du lac de Constance a été placé au premier plan. Les autorités suisses ont été renseignées sur ce projet en 1953; il portait sur l'établissement d'une prise d'eau sur le lac, près de Sipplingen, dans la baie d'Ueberlingen. Des pourparlers furent engagés par la suite entre les Etats riverains du lac de Constance: la Suisse, la République fédérale d'Allemagne et l'Autriche, ce qui engagea le gouvernement du pays de Bade-Wurtemberg à formuler, en date du 26 décembre 1955, une déclaration. Après s'être référé aux pourparlers qui ont eu lieu à Lindau le 28 octobre et à Munich le 1er décembre 1955, ledit gouvernement fit valoir ce qui suit: «Par lettre du 15 octobre 1954 n° VIII 2003/20, -- à laquelle était joint le texte complet d'une demande en concession datée du 26 mai 1954 -- le ministère de l'intérieur de Bade-Wurtemberg a informé l'office fédéral de l'économie hydraulique à Berne que l'association «Bodensee-Wasserversorgung » à Stuttgart avait proposé au conseil d'arrondissement d'Ueberlingen de lui concéder le droit de prélever jusqu'à 21601/s d'eau du lac, dans la baie d'Ueberlingen, près de Sipplingen, pour alimenter en eau potable un grand nombre de communes du pays de Bade-Wurtemberg; la concession, à cette fin, serait basée sur la loi badoise pour l'utilisation des eaux. Nous fondant sur l'entretien qui a eu lieu quant à ce projet le 1er décembre 1955 à Munich entre les délégués de tous les Etats riverains du lac de Constance, nous avons l'honneur de déclarer, au nom du pays de Bade-Wurtemberg, ce qui suit:

812 1. Le prélèvement d'eau sera opéré conformément au projet du 26 nai 1954 présenté aux autorités suisses; 2. Le gouvernement du pays est prêt à donner aux autorités suisses les renseignements nécessaires sur l'ampleur du prélèvement, si ces autorités en expriment le désir; 3. Le gouvernement du pays déclare que l'exécution du projet pour prélever des eaux du lac de Constance ne doit d'aucune façon rendre plus difficile l'aménagement projeté du Rhin supérieur pour la navigation; 4. Le gouvernement du pays n'entend pas se prévaloir du prélèvement de 21601/s d'eau du lac qu'opérera l'association «Bodensee-Wasserversorgung» pour prétendre, à l'égard de la Suisse, que des mesures supplémentaires doivent être prises en vue de protéger le lac de Constance contre la pollution; 5. Le gouvernement du pays admet que le projet du 26 mai 1954 ne soit pas invoqué comme constituant un précédent».

Le 1er mai 1956, nous avons accusé réception de cette déclaration et communiqué ce qui suit au gouvernement du pays de Bade-Wurtemberg: Le Conseil fédéral suisse déclare qu'il n'a, dans ces conditions, aucune objection à faire au sujet du projet du 26 mai 1954 qui a été présenté par les autorités allemandes.

Si, contre toute attente, l'exécution des travaux et l'exploitation des installations devaient provoquer des dommages, non prévisibles aujourd'hui, pour les eaux du lac de Constance et pour la navigation du Rhin supérieur, le Conseil fédéral se réserverait de revenir sur sa déclaration, Par la suite, les besoins en eau de la région de Stuttgart s'accrurent encore à un tel point que le débit prélevé de 21601/s ne permit plus de répondre à la demande. C'est pourquoi, l'on envisagea, du côté allemand, de pousser le prélèvement à 30001/s en augmentant la pression dans la conduite. Il convient de préciser que d'autres contrées pauvres en eau du pays de Bade-Wurtemberg furent progressivement aussi reliées à cette conduite. Le 10 avril 1963, l'ambassade de la République fédérale d'Allemagne transmit officiellement aux autorités suisses une demande de l'association «Bodensee-Wasserversorgung» pour obtenir l'autorisation d'effectuer un plus fort prélèvement d'eau; l'ambassade ajoutait qu'il lui semblait indiqué, avant de prendre une décision, de soumettre cette demande aussi aux autres Etats riverains du lac.

Cette
proposition fut tout d'abord examinée sérieusement, sur le plan interne suisse, en vue de déterminer ses répercussions ; à cette fin, des contacts furent pris avec les représentants de tous les cantons riverains du Rhin et du lac de Constance, depuis les Grisons jusqu'à Baie. Le 7 avril 1964 enfin, nous décidâmes d'entamer des pourparlers avec la République fédérale d'Allemagne; il s'agissait en premier lieu de discuter des conséquences que l'accroissement des prélèvements d'eau pourrait avoir sur l'économie hydraulique du lac de Constance et du Rhin, prise dans son ensemble; il convenait ensuite dé protéger les droits de la Suisse dans le sens de l'intérêt général bien compris. Le

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directeur de l'office fédéral de l'économie hydraulique, M. Oesterhaus, fut désigné comme chef de la délégation suisse chargée des négociations. Les autres représentants de la Confédération furent: MM. E. Diez

chef du service juridique du département politique fédéral, F. Chavaz ingénieur, sous-directeur de l'office fédéral de l'économie hydraulique, H. Zurbrügg sous-directeur de l'office fédéral de l'économie hydraulique, A. Matthey-Doret ingénieur, directeur du service fédéral de la protection des eaux.

En outre furent désignés pour représenter les cantons riverains du lac de Constance: le conseiller d'Etat S. Frick, Saint-Gall, et le conseiller d'Etat R. Schümperli, Frauenfeld, lequel après son transfert au département thurgovien de l'éducation, fut remplacé par M. A. Schläpfer, Frauenfeld, Le premier entretien entre les délégués de la Suisse, de la République fédérale d'Allemagne et de la République d'Autriche eut lieu les 18 et 19 juin 1964 à Ueberlingen. Les délégués de l'Allemagne fédérale déclarèrent tout d'abord que les prélèvements supplémentaires devraient pouvoir se faire à partir du 1er juillet 1964 et refusèrent d'admettre que cette mesure puisse avoir des répercussions sur les autres intérêts en cause de la région du lac de Constance. Finalement, ils reconnurent cependant la nécessité de régler la question de futurs prélèvements d'eau du lac par une convention passée entre les Etats riverains; ils acceptèrent d'engager des pourparlers à cette fin et consentirent à ce que les installations supplémentaires ne soient pas mises en service avant les pourparlers suivants.

Le 3 novembre 1964, nous remîmes à la délégation suisse d'autres instructions, en vue de préciser le contenu de la convention internationale à laquelle il fallait tenter de parvenir. Les pourparlers furent repris les 3 et 4 novembre 1964 à Rorschach. La délégation allemande chercha de nouveau à démontrer que l'augmentation prévue des prélèvements d'eau à Sipplingen n'aurait aucune répercussion fâcheuse pour les autres Etats riverains du lac. Les délégations suisse et autrichienne se référèrent alors à une décision prise le 24 novembre 1963 par le «Landtag» de Bade-Wurtemberg au sujet de la navigation sur le Rhin supérieur et de la protection des eaux du lac de Constance; cette décision signifiait, pratiquement, que la République fédérale d'Allemagne devrait intervenir afin de restreindre l'industrialisation sur les rives suisse, autrichienne et allemande du lac. Une telle action pourrait également être souhaitée quant à l'eau
potable extraite du lac pour alimenter de vastes régions du pays de BadeWurtemberg, La délégation de la République fédérale d'Allemagne fit d'autre part valoir que subordonner les prélèvements d'eau à l'approbation des autres Etats riverains équivaudrait à accorder à ceux-ci un droit de veto. Au cours des pourparlers, les délégations suisse et autrichienne tinrent toutefois largement

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compte des propositions présentées par la délégation allemande, après que celleci eut suggéré de soumettre les différends éventuels à une procédure d'arbitrage.

Finalement, cette délégation se déclara prête à conclure une convention concernant les prélèvements d'eau dans le lac. Les trois délégations fixèrent alors les points qui devaient y être traités; ceux-ci correspondent aux instructions qu'avait remises le Conseil fédéral à sa délégation. Ils figurent dans le texte de la convention qui vous est maintenant soumise.

Un accord ayant été trouvé, les délégations suisse et autrichienne déclarèrent ne plus avoir d'objection à formuler quant à l'augmentation envisagée des quantités d'eau prélevées dans le lac à Sipplingen.

Le projet de convention concernant les prélèvements d'eau dans le lac de Constance fut établi par un groupe de travail qui se réunit les 21 et 22 janvier 1965 à Berne et le 10 mars 1965 à Fribourg en Brisgau. Il fut ensuite examiné par les délégations les 19 et 20 octobre 1965 à Innsbruck, lesquelles purent alors s'entendre sur la plupart des points importants. Les questions demeurées ouvertes furent traitées les 2 et 3 mars 1966 à Munich; la convention fut ensuite paraphée. Elle fut signée à Berne le 30 avril 1966, sous réserve de ratification.

Déjà avant les entretiens de Munich, des contacts avaient été pris avec tous les cantons situés sur le Rhin et le lac de Constance, entre les Grisons et Baie, ainsi qu'avec les deux Appenzell pour les renseigner sur les résultats des pourparlers engagés. Aucun des cantons pressentis n'a eu d'objection à formuler sur le texte de la convention.

III Commentaire des dispositions de la convention

Selon l'article 1, chaque Etat riverain s'engage à observer les dispositions de la convention pour les prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance et à tenir convenablement compte des intérêts légitimes des autres Etats riverains. Du côté suisse, c'est la Confédération qui est partie contractante. Evidemment les cantons riverains du lac, savoir Saint-Gall et Thurgovie, sont directement intéressés à la conclusion de la convention; la réglementation des captages d'eau dans le lac dépend de leur compétence et de celle des communes.

Mais ces captages touchent aussi d'autres intérêts, dont certains échappent à la souveraineté cantonale, tels les intérêts des riverains du Rhin et ceux des forces hydrauliques. D'autre part, selon l'article 8 de la loi fédérale du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des forces hydrauliques, les dérivations d'eau à l'étranger sont soumises à une autorisation accordée par la Confédération.

Même si elle a fait usage des attributions qui lui sont conférées par l'article 8 de la constitution, la Confédération a traité cette affaire en étroite liaison avec les deux cantons intéressés, lesquels étaient d'ailleurs chacun représentés dans la délégation suisse par un membre de leur Conseil d'Etat.

L'article 2 indique que la convention est applicable au lac Supérieur et au lac Inférieur. Il précise en outre ce qu'il faut entendre par région du lac de

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Constance; celle-ci joue un rôle pour apprécier les intérêts en présence, selon l'article 3. Sur territoire de la République fédérale d'Allemagne et de la République d'Autriche, cette région coïncide avec le bassin versant du lac. Sur territoire suisse, elle englobe non seulement le bassin versant du lac dans les cantons des deux Appenzell, de Saint-Gall et de Thurgovie, mais encore celui de la Thur dans le canton de Thurgovie -- à l'exception toutefois du bassin de la Murg en amont de la commune de Frauenfeld -- et le bassin de la Sitter. Le bassin versant du lac sur le territoire du canton des Grisons n'est donc pas inclus dans ladite région. Si l'on avait fait coïncider, sur sol suisse, la région du lac de Constance avec le bassin versant hydrologique, on l'aurait d'une part étriquée dans les cantons de Saint-Gall et Thurgovie, qui sont directement intéressés, d'autre part étendue à une grande partie du canton des Grisons. La limite admise dans la convention correspond, pour la Suisse, à la situation de fait.

Le 3e alinéa de cet article stipule que la convention n'est applicable qu'aux prélèvements d'eau d'un débit qui est dans chaque cas supérieur à 501/s.

L'article 3 est la disposition la plus importante de la convention. Elle tend à empêcher qu'un fort prélèvement d'eau ne suscite des prétentions particulières au sujet des conditions de vie et d'économie dans les autres Etats riverains ou qu'inversement un fort prélèvement ne soit pas autorisé parce qu'il freinerait indirectement un développement économique présent ou futur dans la région du lac de Constance. Divers critères doivent être appliqués pour peser les intérêts en présence; dans cet examen il faut toutefois accorder une position privilégiée à cette région. Le protocole de clôture précise comment cette disposition doit être interprétée.

Les ayants droit aux prélèvements d'eau ne sauraient se prévaloir de l'autorisation qu'ils ont reçue pour prétendre à des apports et à des qualités d'eau restant invariables. Les mesures à prendre pour maintenir la salubrité des eaux restent fixées par la convention du 27 octobre 1960 sur la protection du. lac de Constance.

L'article 4 règle le cas où des dommages qu'on ne pouvait pas prévoir, mais qui sont réparables selon le droit des gens, sont causés par un prélèvement d'eau. En pareille
occurrence, les Etats riverains s'entendront sur la nature et l'ampleur des réparations.

L'article 5 stipule que si les effets cumulés de plusieurs prélèvements d'eau nécessitent l'application de mesures compensatoires, le versement d'indemnités ou l'octroi de dédommagements, les Etats riverains devront y participer en proportion des prélèvements opérés sur leurs territoires respectifs.

L'article 6 prévoit que les Etats riverains devront se renseigner réciproquement sur tous les prélèvements d'eau effectués dans le lac.

Selon l'article 7, les Etats riverains sont tenus de se pressentir suffisamment à temps avant d'autoriser un prélèvement qui dépasse une certaine marge.

Celle-ci est fixée à 7501/s si l'eau extraite doit être utilisée en dehors du bassin

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versant hydrologique du lac de Constance et à 15001/s si cette eau doit être utilisée à l'intérieur de ce bassin. Si l'on admet une consommation d'eau de 500 litres par jour et par habitant, les débits indiqués permettent d'alimenter des populations de l'ordre de 130 000 et de 260 000 habitants, respectivement.

Article 8. Lors des consultations prévues à l'article 7, les Etats riverains pourraient élever des objections en vertu de l'article 3. De telles objections doivent être soumises à une commission consultative, avec mandat de donner des conseils techniques et de préparer une entente. La même procédure doit être appliquée dans les cas où des dédommagements ou des compensations sont demandés. En outre, chaque Etat riverain peut exiger que la commission consultative traite d'autres questions relatives aux prélèvements d'eau.

La commission consultative est composée d'un délégué par Etat riverain; les délégués peuvent se faire accompagner de conseillers. Pour les affaires concernant exclusivement le lac Inférieur, seules comptent les voix de la Suisse et de la République fédérale d'Allemagne.

Article 9. Si les discussions au sein de la commission consultative ne conduisent pas à une entente, celle-ci devra être recherchée par la voie diplomatique.

Si cette voie ne permet pas non plus d'aboutir, l'affaire doit être soumise à une commission d'arbitrage.

Les articles 10,11 et 12 indiquent la composition de la commission d'arbitrage et la procédure qu'elle doit appliquer.

Selon l'article 13, la convention entrera en vigueur dans les trente jours qui suivent le dépôt du dernier instrument de ratification auprès du gouvernement de la Confédération. La convention pourra être dénoncée par chaque Etat riverain pour la fin d'une année, moyennant un préavis de six mois.

La présente convention est fondée sur l'article 8 de la constitution, lequel donne à la Confédération le droit de conclure des traités avec l'étranger. La compétence de l'Assemblée fédérale résulte de l'article 85, chiffre 5, de la constitution. La convention est conclue pour un temps indéterminé, mais elle peut être dénoncée n'importe quand pour la fin d'une année, moyennant un préavis de six mois. C'est pourquoi l'arrêté approuvant la convention n'est pas soumis aux dispositions de l'article 89, 4e alinéa, de la constitution, qui
prévoit le referendum pour certains traités internationaux.

La présente convention est la première qui règlent de manière détaillée les prélèvements opérés dans les eaux frontières suisses. Elle fonde expressément l'obligation des Etats riverains de s'entendre entre eux au sujet des prélèvements d'eau qui peuvent avoir des répercussions sur les autres modes d'utilisation du lac et toucher les intérêts et les droits des Etats voisins. Pour la première fois aussi en pareil cas, il est stipulé, que lorsqu'un désaccord se produit, l'affaire doit être portée devant une commission d'arbitrage.

Au cours des pourparlers, il n'a pas été facile de trouver un dénominateur commun pour des intérêts en partie divergents. En bonne conscience, l'on

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peut affirmer que la compensation des intérêts et le recours à la procédure d'arbitrage, prévus dans la convention, constituent un réel progrès dans les relations entre la Confédération suisse d'une part et la République fédérale d'Allemagne et la République d'Autriche, d'autre part. C'est pourquoi nous vous recommandons d'approuver la convention en adoptant l'arrêté fédéral ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 24 mai 1966.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Schaffner 16900

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

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(Projet)

Arrêté fédéral approuvant la convention qui concerne la réglementation des prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 8 et 85, chiffre 5, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 24 mai 1966, arrête: Article unique 1

La convention concernant la réglementation des prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance, signée à Berne le 30 avril 1966 par la Confédération suisse, la République fédérale d'Allemagne et la République d'Autriche, est approuvée.

2 Le Conseil fédéral est autorisé à ratifier cette convention.

16000

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Traduction du texte original allemand

Convention concernant les prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance

La République fédérale d'Allemagne, La République d'Autriche, La Confédération suisse animées du désir de régler les prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance d'une manière qui tienne convenablement compte des intérêts légitimes des Etats riverains, ont résolu de conclure une convention et ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir: La République fédérale d'Allemagne; Son Excellence le baron Wolfgang von Welck, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République fédérale d'Allemagne en Suisse, La République d'Autriche: Son Excellence M. Johann Georg Tursky, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Autriche en Suisse, La Confédération suisse: M. Willy Spühler, chef du département politique fédéral, lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs et les avoir trouvés en bonne et due forme, sont convenus des dispositions suivantes : Article premier 1. Les Etats riverains du lac de Constance, à savoir la République fédérale d'Allemagne, la République d'Autriche et-la Confédération suisse, s'engagent à observer les dispositions de la présente convention pour les prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance.

2. Lors de prélèvements d'eau, chaque Etat riverain s'efforcera de tenir convenablement compte des intérêts légitimes des autres Etats riverains.

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Article 2 1. Au sens de la présente convention, le lac de Constance comprend le lac Supérieur et le lac Inférieur.

2. Au sens de la présente convention, la région du lac de Constance comprend, sur le territoire de la République fédérale d'Allemagne, le bassin versant hydrologique du lac, sur Je territoire de la République d'Autriche, le bassin versant hydrologique du lac, sur le territoire de la Confédération suisse, la partie du bassin versant hydrologique du lac située dans les cantons d'Appenzell Rhodes extérieures et intérieures, de Saint-Gall et deThurgovie, ainsi que le bassin versant de la Thur sur le territoire du canton de Thurgovie -- à l'exception du bassin versant de la Murg en amont de la commune de Frauenfeld--, ainsi que le bassin versant de la Sitter.

3. Cette convention n'est applicable qu'aux prélèvements d'eau d'un débit dans chaque cas supérieur à 50'1/s.

Article 3 1. Au cas où un prélèvement d'eau projeté dans le lac de Constance léserait des intérêts importants d'autres Etats riverains et où le préjudice qui en résulterait ne pourrait être soit évité par l'application de mesures acceptables soit compensé par le versement d'indemnités, il y aura lieu d'apprécier judicieusement l'intérêt que présente le prélèvement d'eau prévu par rapport aux autres intérêts. Dans cet examen, il sera spécialement tenu compte de l'intérêt qu'il y a à maintenir et à développer les conditions de vie et d'économie. A cet égard, on se préoccupera notamment des intérêts découlant des divers modes d'utilisation des eaux du lac, tels que navigation, pêche, régularisation du lac, protection du paysage et des sites, économie énergétique.

2. Le fait de prélever des eaux du lac de Constance ne saurait justifier de prétention quelconque ni quant à l'apport d'un certain débit ni quant à la qualité de l'eau.

3. Les mesures à prendre en vue de maintenir la salubrité des eaux du lac de Constance sont fixées par la convention du 27 octobre 1960 sur la protection du lac de Constance contre la pollution.

Article 4 Si les prélèvements d'eau provoquent des dommages qu'on ne pouvait pas prévoir mais qui sont réparables selon le droit des gens, les Etats riverains s'entendront sur la nature et l'ampleur des réparations à fournir.

Article 5 Si les effets cumulés de plusieurs prélèvements d'eau imposent, en vertu des dispositions des articles 3 et 4, l'application de mesures compensatoires, le

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versement d'indemnités ou l'octroi de dédommagements, les Etats riverains devront y participer en proportion des prélèvements opérés sur leurs territoires respectifs.

Article 6 Les Etats riverains se renseigneront réciproquement et immédiatement sur tous les prélèvements d'eau opérés dans le lac, qui ne rentrent pas dans les catégories visées par l'article 7. Les autorités techniques traitent à cette fin directement entre elles.

Article 7 Dans les cas suivants, les Etats riverains se consulteront suffisamment à temps avant d'autoriser les prélèvements d'eau: a. Lorsque la quantité d'eau à prélever dépasse 7501/s et que l'eau dérivée doit être utilisée à l'extérieur du bassin versant hydrologique du lac de Constance; b. Lorsque la quantité d'eau à prélever dépasse 15001/s et que l'eau dérivée doit être utilisée à l'intérieur du bassin versant hydrologique du lac de Constance.

Article 8 1. Si la consultation faite en vertu de l'article 7 suscite des objections fondées sur l'article 3, l'affaire devra être soumise à une commission consultative, avec mandat de donner des conseils techniques et de préparer une entente. La même procédure sera appliquée dans les cas visés aux articles 4 et 5.

2. La commission consultative est composée d'un délégué par Etat riverain.

Les délégués peuvent s'adjoindre des conseillers.

· 3. Dans les affaires concernant exclusivement le lac Inférieur, seules comptent les voix de la République fédérale d'Allemagne et de la Confédération suisse.

4. Chaque Etat riverain peut exiger que la commission consultative se réunisse pour traiter d'autres questions relatives aux prélèvements d'eau.

Article 9 1. Si, au sujet d'une affaire visée par l'article 8, alinéa 1, les discussions au sein de la commission consultative ne permettent pas aux Etats riverains de parvenir à une entente, celle-ci devra être recherchée par la voie diplomatique.

2. Si la voie diplomatique ne permet pas non plus d'arriver à une entente, chaque Etat riverain intéressé pourra exiger que l'affaire soit soumise à une commission d'arbitrage.

Article 10 1. La commission d'arbitrage comprend trois membres. Ceux-ci ne doivent pas être ressortissants de l'un quelconque des Etats riverains; ils ne

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doivent pas non plus avoir déjà été mêlés d'une autre manière au cas à traiter.

2. Chacune des parties intéressées à la procédure d'arbitrage désigne un membre de la commission. Si une des parties comprend deux Etats riverains, ceux-ci s'entendent pour désigner un membre. Les deux membres choisis par les parties nomment un président.

3. Au cas où l'une des parties n'aurait pas désigné son membre dans le délai de deux mois à compter de la notification de la demande d'arbitrage, ce membre sera nommé par le président de la Cour européenne des droits de l'homme, sur proposition présentée par l'autre partie.

4. Au cas où -- dans les deux mois qui suivent leur nomination -- les deux membres ne pourraient pas s'entendre sur la personne du président, celui-ci sera nommé par le président de la Cour européenne des droits de l'homme, sur proposition présentée par l'une des parties.

5. Si dans les cas visés aux paragraphes 3 et 4, le président de la Cour européenne des droits de l'homme est empêché ou s'il est ressortissant de l'un des Etats riverains, cette nomination sera faite par le vice-président. Si celui-ci aussi est empêché ou est ressortissant de l'un des Etats riverains, cette nomination sera faite par le membre le plus ancien de la cour qui ne soit pas ressortissant de l'un des Etats riverains.

Article 11 1. A chaque stade de la procédure d'arbitrage, la commission cherche à régler à l'amiable le cas qui lui a été soumis. Si une telle issue ne peut être trouvée, la commission tranche le cas à la majorité des voix. La décision prise est définitive; elle lie tous les Etats riverains.

2. La commission d'arbitrage prend pour base de ses propositions de conciliation et de ses décisions: -- les dispositions de la présente convention; -- les accords correspondants, généraux ou particuliers, passés entre les Etats riverains ; -- les principes généraux du droit.

Article 12 1. La commission d'arbitrage fixe elle-même ses règles de procédure, à moins que les parties ne soient convenues d'en appliquer d'autres.

2. L'Etat riverain qui n'intervient pas comme partie dans la procédure d'arbitrage peut en tout temps y participer à titre accessoire.

Article 13 1, La présente convention sera ratifiée. Les instruments de ratification seront déposés dans le plus bref délai auprès du gouvernement de la Confédé-

823 ration suisse. La convention entrera en vigueur dans les trente jours suivant le dépôt du dernier instrument de ratification.

2, La convention restera en vigueur tant qu'elle n'aura pas été dénoncée par un des Etats riverains moyennant préavis donné six mois avant la fin d'une année.

En foi de quoi les plénipotentiaires des Etats riverains ont signé la présente convention.

Ainsi fait en trois exemplaires à Berne, le 30 avril 1966.

Pour la République fédérale d'Allemagne:

Pour la République d'Autriche:

Pour la Confédération suisse:

(signé) W. Frhr. v. Welck

(signé) J. Tursky

(signé) Spiihler

Protocole de clôture Les Etats riverains du lac de Constance se sont mis d'accord sur les points suivants: 1. Article 3, alinéa 1: Les intérêts que les effets des prélèvements d'eau pourraient léser ne sont pas pris en considération s'il n'y a pas un rapport de causalité adéquate entre le préjudice et le prélèvement. Ainsi, par exemple, des réclamations contre un prélèvement d'eau ne peuvent pas être basées sur le fait que l'utilisation de l'eau prélevée pourrait renforcer la puissance économique d'une région déterminée et par là léser les intérêts d'un Etat riverain.

La dernière phrase de cette disposition ne limite pas la notion de «conditions de vie et d'économie» aux intérêts qui y sont cités.

2. Article 3, alinéa 2: Les prétentions fondées sur d'autres dispositions ne sont pas touchées par cet alinéa.

824

3. Artide 3, alinéa 3: La convention du 27 octobre 1960 sur la protection du lac de Constance contre la pollution demeure intacte.

4. Article 6: Les autorités techniques, au sens de cette disposition, sont: Pour la République fédérale d'Allemagne: le ministère de l'intérieur de Bade-Wurtemberg et le ministère de l'intérieur de Bavière; pour la République d'Autriche: l'office du gouvernement du Vorarlberg ; pour la Confédération suisse: le département des travaux publics du canton de Saint-Gall et le département des travaux publics et des routes du canton de Thurgovie.

Les autorités techniques se communiqueront réciproquement, dans le délai d'une année, les prélèvements d'eau qui existent au moment de l'entrée en vigueur de la convention concernant les prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance, 5. Article 13: A l'exception de l'article 5, la présente convention n'est applicable qu'aux prélèvements d'eau futurs. Les réglementations actuelles relatives aux prélèvements d'eau existants ne sont pas touchées par cette convention.

Fait à Berne, en trois exemplaires le 30 avril 1966.

Pour la République fédérale d'Allemagne: (signé) W. Frhr. v. Welck 16900

Pour la République d'Autriche: (signé) J, Tursky

Pour la Confédération suisse: (signé) Spiihler

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à l'approbation de la convention concernant la réglementation des prélèvements d'eau opérés dans le lac de Constance (Du 24 mai 1966)

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