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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (Du 3 décembre 1965)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous adresser un message concernant les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'economie laitière pour la période allant du 1er novembre 1966 au 31 octobre 1971, ainsi qu'un projet d'arrêté fédéral à ce sujet.

I. INTRODUCTION Ces dernières années, la production laitière a toujours contribué pour un tiers environ au rendement brut épuré de l'agriculture suisse (tableau n° 1). Cette proportion confère au lait une importance économique à peu près équivalente à celle de l'engraissement du bétail bovin et de l'exploitation porcine. Le rendement brut épuré dé la production laitière dépasse de beaucoup celui de la production végétale (céréales, pommes de terre, betteraves sucrières, légumes, arbres fruitiers, vignes et autres cultures). Cela explique la place particulière que tiennent la production et la vente du lait et de ses dérivés dans l'ensemble de la production agricole. A l'avenir également, l'économie laitière participera environ dans la même mesure à la formation du revenu paysan, puisque dans de vastes régions du pays, notamment au centre et à l'est, le sol et le climat ne se prêtent pas à d'autres productions.

La place prépondérante qu'occupé la production laitière dans notre agriculture explique aussi pourquoi ce secteur a exigé jusqu'ici des interventions officielles et une législation aussi nombreuses que variées. Il s'agissait avant tout de mesures propres à améliorer la qualité, à assurer le revenu des agriculteurs et à orienter la production. Mais le but était aussi de lutter contre l'influence directe ou indirecte exercée par l'évolution du marché international sur le placement du lait et des produits laitiers du pays.

Feuille fédérait. 117e année. Vol. in.

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Tableau 1 Part de la production laitière dans le rendement brut épuré de l'agriculture suisse Année civile

1936-1940 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 19641)

·

Rendement brut épuré loial Millions de fr.

Millions de fr.

Lali %

1299 2325 2389 2405 2533 2597 2526 2701 2882 3021 2970 3056 3237 3303 3597

461 812 815 864 884 891 927 955 987 996 997 1022 1086 1123 1140

35,33 34,90 34,12 35,92 34,91 34,32 36,71 35,35 34,23 32,97 33,57 33,44 33,55 34,01 31,70

') Chiffres provisoires.

II. LES FONDEMENTS LÉGAUX DES MESURES PRISES DANS L'ÉCONOMIE LAITIÈRE A. La loi sur l'agriculture et l'arrêté sur le statut du lait Par ses articles 24, 26 et 59, la loi sur l'agriculture du 3 octobre 1951 (RO 1953, 1095) ne fait qu'énoncer les principes de la réglementation laitière.

L'Assemblée fédérale, a laquelle incombait le soin d'édicter les dispositions d'exécution de l'article 26 de ladite loi, prit, le 29 septembre 1953, l'arrêté concernant le lait, les produits laitiers et les graisses comestibles (arrêté sur le statut du lait; RO 1953, 1132; 7957, 573; 1961, 847; 1965, 433), qui règle les principales mesures officielles prévues par la Confédération dans le domaine de l'économie laitière.

Lorsqu'il s'agit des mesures complémentaires d'ordre économique et financier prises par la Confédération dans le secteur laitier, seules revêtent de l'importance les dispositions de la loi relatives au financement des dépenses destinées à faciliter le placement des produits laitiers dans le pays et à l'étranger. L'article 26 de la loi et l'article 26 de l'arrêté sur le statut du lait mettent à disposition à cet effet certaines ressources, mais limitées. Il s'agit du rendement des

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taxes sur le lait et la crème de consommation, ainsi que sur les importations de beurre, de poudre de lait, de lait condensé, d'huiles et de graisses comestibles, y compris les matières premières et produits mi-finis nécessaires à leur fabrication.

A propos des ressources requises pour l'encouragement de la vente, relevons encore que l'arrêté fédéral du 19 juin 1959 sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (RO 7959, 936, 1746), crée la base autorisant la perception de suppléments de prix sur la crème et la poudre de crème d'origine étrangère. L'arrêté du 4 octobre 1962, de même intitulé (RO 7962,1178 ; 1964,236), permet de percevoir aussi de tels suppléments sur les importations de glaces comestibles (glaces, crèmes glacées et produits semblables) ; son article 8, enfin, offre la possibilité, ce qui est nouveau, de grever les succédanés du lait du pays ou d'origine étrangère. Le rendement de tous ces suppléments et taxes, tout comme les moyens financiers mis à disposition par la loi, servent aussi à réduire les prix des produits laitiers et des graisses comestibles du pays et à faciliter leur placement, A noter encore que ces taxes, bien que leur produit soit destiné à encourager la vente, ont en premier lieu le caractère de mesures de protection et d'orientation destinées à maintenir une agriculture productive et une population paysanne forte.

Le tableau n° 2 renseigne sur le produit des taxes de ces dernières années et indique, à titre de comparaison, celui qui est porté au budget des périodes de compte 1964-1965 -- dont le résultat définitif n'est pas encore connu ·-- et de 1965-1966.

En dérogation à l'article 26 de la loi sur l'agriculture, le produit des taxes sur le lait et la crème de consommation, ainsi que du supplément de prix sur les importations de lait condensé, sert tout d'abord, suivant les besoins, à alimenter la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers. Le rendement du droit de douane supplémentaire perçu sur le beurre est aussi destiné à cette caisse (art. 14, 3e al., de l'AF du 21 décembre 1960 sur les loyers des biens immobiliers et la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers; RO 1961, 291). Les fonds détournés de leur affectation doivent, il est vrai, être remplacés chaque
année; c'est le cas aussi pour la contre-valeur du produit du droit de douane supplémentaire sur le beurre lorsque -- du fait qu'il continue à être perçu en faveur de ladite caisse -- la taxe sur le beurre importé ne peut être mise que partiellement à contribution. Ce remplacement s'opère au moyen des suppléments de prix perçus sur les denrées fourragères en vertu de l'article 19 de la loi sur l'agriculture en tant qu'ils ne sont pas employés à d'autres fins prévues par la législation agricole, et, si cela ne suffit pas, à l'aide des ressources générales de la Confédération (art. 1er, 2e al., de l'arrêté sur l'économie laitière de 1962; RO 1962, 1178). On voit donc que, même pendant la durée de validité de l'arrêté sur l'économie laitière 1962, une somme équivalente aux recettes réalisées en vertu de l'article 26 de la loi sert entièrement à faciliter

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le placement des produits laitiers du pays. Ces dispositions régissant le financement de la caisse de compensation, ainsi que le remplacement des taxes utilisées en dérogation à l'article 26 cité deviendront caduques à la fin de 1965, époque à laquelle la caisse de compensation cessera d'exister (art. 3 de l'additif constitutionnel du 6 décembre 1964; RO 1964, 1441), Tableau 2 Produit des taxes et suppléments de prix par période de compte

(en millions de francs) Taxe, supplément de prix

· 196119621)

Taxe sur le lait de consommation Taxe sur la crème de consommation Droit de douane supplémentaire sur le beurre .

Taxe de compensation sur le lait de consommation Suppléments de prix sur les graisses et les huiles comestibles Taxe sur le beurre importé Suppléments de prix sur la poudre de lait écrémé Suppléments de prix sur la crème et la poudre de crème Suppléments de prix sur le lait condensé Suppléments de prix sur les succédanés du lait.

Total

19621963 ')

19631964 ')

19641965 »)

3,483 3,056 2,725 2,4 4,684 5,063 5,459 5,0 3,492 2,371 10,737 7,0

19651966 ')

1,8 6,0 7,0

0,017 0,012 0,012 0,015 0,015 21,441 20,311 23,018 21,0 4,661 7,817 20,966 13,7 1,476 0,589 2,000 1,0

23,0 11,9 0,6

0,268 0,296 0,449 0,385 0,485 2,414 3,900 2,491 1,5 2,5 -- 1,123 3,327 -- -- 41,936 44,538 71,184 52,000 43,300

!) Ces chiffres sont tirés du compte d'Etat 1962, 1963 et 1964.

3 ) Budget.

3 ) Selon notre message du 19 octobre 1965 concernant le compte d'Etat de la Confédération suisse pour l'année 1966.

La question de l'encouragement de l'exportation des produits laitiers appelle la remarque que voici : l'article 24 de la loi sur l'agriculture constitue le fondement légal qui met à disposition les moyens financiers nécessaires.

Ceux-ci, contrairement à ceux que prévoit l'article 26, ne sont pas limités.

L'exportation doit être encouragée en premier lieu à l'aide du produit des taxes et suppléments de prix perçus en vertu de la loi.

Pour la première fois depuis assez longtemps, une part du produit des taxes a dé nouveau pu être affectée, durant la période de compte 1963-1964, à la couverture des frais résultant de l'exportation de produits laitiers.

549 B. Les arrêtés fédéraux des 20 décembre 1957 et 13 juin 1958

La situation économique de l'agriculture nous a engagés à relever, le 25 octobre 1957, pour le 1er novembre de la même année, le prix de base du lait de 41 à 43 centimes par kilo/litre. Cette majoration put être reportée sur les prix du lait et de la crème de consommation, du yoghourt et d'autres spécialités, mais non pas, pour des raisons de placement, sur ceux du fromage, du beurre et des conserves de lait. Les frais accrus de placement dans le pays qui en résultèrent durent en principe être couverts, dans les limites de la législation agricole alors en vigueur, à l'aide du produit des taxes perçues en vertu de l'article 26 de la loi sur l'agriculture. Ces ressources n'ayant toutefois pas suffi, l'arrêté fédéral du 20 décembre 1957 (RO 1958, 225) concernant les mesures complémentaires propres à financer temporairement le placement des produits laitiers devait nous autoriser à consacrer pour la première fois à la couverture de ces frais des moyens financiers supérieurs à ceux que prévoit la loi. Cet.

arrêté était applicable jusqu'au 31 octobre 1958.

Il apparut bientôt que la Confédération se verrait temporairement contrainte de continuer, par des contributions supplémentaires, à faciliter le placement des produits laitiers du pays lorsque cet arrêté perdrait sa validité. En conséquence, le 13 juin 1958, l'Assemblée fédérale prit l'arrêté concernant la prorogation temporaire des mesures complémentaires propres à financer le placement des produits laitiers (RO 1958, 811), valable jusqu'au 31 octobre 1959. Les difficultés de placement et de mise en valeur du lait s'étant déjà fortement aggravées au cours de la période de compte 1957-1958 par suite de l'accroissement constant des apports de lait, l'arrêté de 1958 fut complété par une disposition obligeant les producteurs de lait commercial à prendre à leur charge une partie des contributions supplémentaires, au titre de mesure propre à orienter la production. Ces contributions étaient tout d'abord fournies, jusqu'à concurrence de 10 millions de francs, par les seules ressources de la Confédération, le solde éventuel étant couvert par moitiés par cette dernière (ressources générales) et les producteurs de lait commercial. Le but était en premier lieu d'adapter la production aux débouchés.

C. L'arrêté fédéral du 19 juin 1959

A la fin de la période de validité de l'arrêté du 13 juin 1958, il se révéla également nécessaire pour la Confédération de prendre des mesures complémentaires dans le secteur laitier. L'arrêté fédéral du 19 juin 1959 sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (arrêté sur l'économie laitière 1959;RO 1959, 936, 1746; 1960.1695;1961, 1171) nous autorisa à accorder des contributions supplémentaires pour encourager le placement dans le pays des produits laitiers indigènes, en tant que les ressources disponibles en vertu de la loi sur l'agriculture et le produit des nouveaux suppléments de prix prélevés en même temps sur la crème et la poudre de crème n'y suffisaient pas.

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Pour ce qui a trait à la couverture des frais supplémentaires, l'arrêté fédéral de 1959 différait des deux arrêtés précédents en ce sens qu'il accroissait la charge des producteurs, mettant ainsi davantage l'accent sur l'orientation de la production. Les possibilités de financement -- déjà maintes fois mentionnées -- étant épuisées, la Confédération prenait à sa charge les premiers dix millions supplémentaires nécessaires, tandis qu'un solde éventuel était couvert par les producteurs de lait commercial à raison de 50 pour cent des premiers dix millions de francs, 65 pour cent des dix millions subséquents et 80 pour cent du solde. En conséquence, la participation de ces derniers aux pertes croissait en fonction de l'augmentation des apports de lait, donc des difficultés de mise en valeur et de placement qui en résultaient. Inversement, la contribution de la Confédération, couverte par ses ressources générales, diminua. De plus, ce qui était nouveau, les producteurs de lait commercial devaient prendre à leur charge 30 pour cent des frais d'application des mesures prévues à l'article 24 de la loi sur l'agriculture en matière d'exportation de produits laitiers. Sans cette participation aux pertes, on aurait pu être tenté d'exporter le plus possible de produits laitiers, sans se soucier du résultat financier. Cette mesure tendait non seulement à orienter la production, mais aussi à amener les producteurs de lait commercial à s'intéresser davantage à une nouvelle amélioration de la qualité de notre principal produit laitier d'exportation, le fromage.

La part des producteurs aux pertes de mise en valeur était perçue de façon uniforme selon le volume des livraisons de lait commercial. Elle pouvait être assurée par une taxe conditionnelle ou une retenue opérée sur chaque kilo ou litre de lait mis dans le commerce. Le reliquat de la retenue, soit la différence entre le montant assuré et la part effective des producteurs, était déterminé chaque année lors de l'établissement des comptes de l'exercice et remboursé aux producteurs de lait commercial.

La disposition tendant à faire davantage participer aux pertes les producteurs qui, en dépit de toutes les difficultés de mise en valeur, livraient trop de lait, en particulier parce qu'ils utilisaient des denrées fourragères achetées (art. 4,4 e al.) fut abrogée,
principalement en raison des difficultés d'application, par l'arrêté fédéral du 21 décembre 1961 (RO 1961, 1171). Nous renvoyons, pour plus de détails, à notre message du 1er décembre 1961 (FF 1961, II, 1146) concernant la modification de l'arrêté sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier à prendre dans le secteur laitier.

En vue d'encourager l'approvisionnement domestique et l'utilisation du lait dans l'exploitation même et pour tenir compte des conditions de production plus difficiles à la montagne, l'arrêté sur l'économie laitière 1959 accorda en plus, chaque année, une contribution aux producteurs des régions de montagne délimitées par le cadastre de la production animale. Aux fins d'améliorer les conditions de revenu de ces régions, cette contribution fut majorée à partir du 1er novembre 1961 et accordée non seulement aux producteurs des zones II et III, mais aussi à ceux de la zone I. Il fut en outre décidé de la verser pour cinq unités de gros bétail, et non plus pour quatre. Le mode de couverture des

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dépenses qui en résultaient fut en même temps modifié à l'avantage des producteurs. Auparavant, les cinq premiers millions de francs étaient prélevés sur les ressources générales de la Confédération et le solde était fourni par. celle-ci et les producteurs. Depuis le 1er novembre 1961, la contribution est intégralement couverte par lesdites ressources générales.

Rappelons enfin que l'arrêté sur l'économie laitière 1959 nous autorisa à percevoir chaque année, auprès des producteurs de lait commercial, une taxe de 0,1 centime par kilo/litre de lait destinée à assurer le financement de mesures spéciales en faveur de la vente, comme la publicité et l'étude des marchés.

D. L'arrêté du 4 octobre 1962 sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (arrêté sur l'économie laitière 1962)

Cet arrêté, dont la validité était limitée au 31 octobre 1965, a été prorogé jusqu'au 31 octobre 1966 par l'arrêté fédéra] du 13 mars 1964 modifiant celui qui concerne les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (RO 1964, 236).

L'arrêté sur l'économie laitière 1962 nous autorise de nouveau à verser des contributions supplémentaires pour faciliter le placement dans le pays des produits laitiers indigènes, si les moyens financiers affectés à ces fins par la loi sur l'agriculture et l'arrêté sur le statut du lait, le produit des suppléments de prix sur les importations de crème, de poudre de crème et de glaces comestibles, et le rendement des taxes perçues sur les succédanés du lait importés ou fabriqués dans le pays ne suffisent pas (art. 1er, 1er al., et art. 8). Le produit de ces taxes et suppléments sert tout d'abord à couvrir les frais de mise en valeur dans le pays des produits laitiers indigènes, à l'exception du beurre, et ensuite seulement, par un solde éventuel, les frais de placement de ce produit (art. 2,1er al.).

Il est, de plus, rappelé aux producteurs de lait commercial les conditions liées à l'octroi de contributions supplémentaires, savoir: ils doivent prendre les mesures d'entraide qu'on attend équitablement d'eux (art. 1er, 3e al.); d'autre part, le Conseil fédéral peut faire en sorte que les organismes de l'économie laitière s'acquittent de manière appropriée des tâches qui leur sont confiées par l'arrêté sur le statut du lait (art. 1er, 4e al.).

Par rapport à l'arrêté sur l'économie laitière 1959, les producteurs de lait commercial participent en général dans une moins forte proportion à la couverture des dépenses supplémentaires. L'arrêté sur l'économie laitière 1962 reprend, sans la modifier, la disposition les obligeant, à titre de mesure propre à orienter la production, à participer progressivement ·-- en sus de la contribution initiale --· à la couverture d'un solde éventuel (art. 2, 3e al.). L'idée est d'insister sur un principe, énoncé dans la loi sur l'agriculture, à savoir qu'aucune mesure officielle en faveur de l'agriculture ne peut être prise sans qu'il soit tenu compte des possibilités de placement. En revanche, par suite des conditions de revenu défa-

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vorables de l'agriculture, la contribution initiale de la Confédération aux frais non couverts de mise en valeur dans le pays a été portée de 10 millions à 20 millions de francs (art. 2, 2e al.) et la part des producteurs aux pertes à l'exportation ramenée de 30 à 20 pour cent (art. 3).

L'arrêté sur l'économie laitière 1959 obligeait chaque producteur de lait à contribuer au prorata de ses livraisons à la part de l'agriculture à la couverture des dépenses supplémentaires. Celui de 1962 prévoit une participation différenciée: il concède à chaque producteur de lait commercial une quantité de base (attribution fixe) de 8000 kilos, exonérée (art. 4, 1er al.). La taxe conditionnelle de 2, dans des cas exceptionnels de 3 centimes au maximum par kilo/litre destinée à assurer la part des producteurs aux pertes n'est donc perçue que sur la quantité de lait commercial dépassant l'attribution fixe (art. 4, 2e al.), et c'est sur cette quantité seulement qu'est remboursé un reliquat éventuel du montant à assurer (art. 4, 3e al.). Il s'agit là d'une concession aux petites entreprises, qui peuvent moins facilement modifier le cours de leur production faute de possibilités de conversion. La participation aux pertes se traduit, plus directement dans leur cas que dans celui des autres exploitations (moyennes et grandes), par une diminution de leur revenu.

L'arrêté fédéral de 1962 maintient la possibilité d'imposer aux producteurs de lait commercial une taxe de 0,1 centime par kilo/litre de lait en vue du financement de mesures spéciales propres à faciliter le placement -- si l'union centrale des producteurs suisses de lait ne perçoit pas elle-même une taxe en faveur de la publicité (art. 5). La seule nouveauté par rapport à 1959 consiste en ce que cet organisme doit soumettre aux autorités compétentes un budget et les comptes sur l'utilisation de cette taxe.

La contribution en faveur des exploitations de montagne est considérée, depuis son institution, comme une aide efficace aux paysans de ces régions ; c'est pourquoi l'arrêté sur l'économie laitière 1962 en prévoit aussi le paiement (art. 6). Son versement dépendant non pas des livraisons de lait commercial, mais seulement de la garde du bétail bovin, elle profite aussi aux paysans de la montagne qui pratiquent l'élevage, engraissent des veaux, utilisent dans
leur ferme la majeure partie du lait produit ou, pour d'autres raisons, ne livrent que peu ou pas de lait. Actuellement, le versement de cette contribution, majorée depuis lors, est justifié en premier lieu par les conditions de production généralement défavorables de l'agriculture en montagne. La relation directe qui existait au début avec les frais de production de lait plus élevés a ainsi perdu beaucoup de son importance. Aussi apparut-il judicieux de consigner cette mesure dans un acte législatif de portée générale et de durée illimitée, soit la loi du 9 octobre 1964 instituant une contribution aux frais des détenteurs de bétail bovin de la région de montagne (RO 1965, 73). C'est donc en vertu de cette loi que la contribution est payée depuis le I e r janvier 1965, L'article 7 de l'arrêté sur l'économie laitière 1962 règle le versement d'une, contribution aux engraisseurs professionnels de veaux en dehors des régions"

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de montagne. La raison en est qu'ils ont en partie à faire face à des conditions de production semblables à celles des agriculteurs de la zone de montagne I.

L'arrêté fédéral du 13 mars 1964 qui modifie celui de 1962 ne mentionne plus les conditions liées à l'octroi de la contribution, soit la nécessité de pratiquer l'engraissement des veaux en raison de l'isolement de l'exploitation et le caractère professionnel de cette activité. Le premier critère ne pouvait pas tenir entièrement compte des conditions de colonisation et d'exploitation très variables dans l'agriculture, alors que le second présentait des difficultés de délimitation.

Aujourd'hui, la contribution est versée à tous les engraisseurs de veaux en dehors des régions de montagne qui ne mettent pas de lait ou de produits laitiers dans le commerce durant une période de compte.

L'article 8 a trait à l'utilisation de lait entier pour l'engraissement et l'élevage des veaux. Nous sommes chargés de prendre les mesures nécessaires et pouvons, pour encourager l'utilisation de lait entier, percevoir une taxe sur les succédanés du lait importés ou fabriqués dans le pays. Le rendement de cette taxe sert à réduire le prix des produits laitiers et des graisses comestibles indigènes, et à encourager leur placement. Par cette disposition, les chambres voulaient combattre la tendance à l'utilisation de trop grandes quantités de succédanés, qui entraîne un accroissement du volume du lait commercial et, partant, des pertes de mise en valeur, A ce sujet, nous vous renvoyons au chapitre traitant de l'utilisation de lait entier pour l'engraissement et l'élevage des veaux.

L'évolution des importations de glaces comestibles (glaces, crèmes glacées, etc.) obligea de créer, en 1962, les bases légales permettant de grever ces produits de suppléments de prix (art. 9). On n'a pas encore fait usage de cette possibilité pour des raisons de politique commerciale, les arrivages de glaces comestibles ayant de surcroît beaucoup diminué depuis lors.

Comme par le passé, l'article 10 assujettit expressément les producteurs qui livrent du lait et des produits laitiers directement aux consommateurs au paiement d'une taxe spéciale en lieu et place d'une éventuelle déduction de prix pour qualité insuffisante.

Tenant compte de la situation économique de l'agriculture à
cette époque, nous avons relevé le prix de base du lait de 45 à 47 centimes par kilo à partir du 1er novembre 1962. Pour des raisons de placement dans le pays et à l'étranger, il ne fut pas possible de reporter intégralement ces 2 centimes sur les prix de détail des produits laitiers. Quant aux frais qui en résultaient, il eût fallu, si la réglementation actuelle était maintenue, les mettre à la charge de la Confédération et des producteurs de lait commercial; mais pour que ces derniers bénéficient intégralement de cette majoration, c'est la caisse fédérale qui dût être mise à contribution pour leur totalité. Si l'article 11 de l'arrêté fédéral de 1962 fournissait les bases légales nécessaires, il ne nous permettait cependant de les appliquer qu'à la hausse prenant effet le 1er novembre de la même année. Par la suite, il apparut nécessaire de modifier cet article de façon que les augmenta-

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lions du prix.de base du lait non reportées sur les prix des produits laitiers puissent plus tard également être mises à la charge de la Confédération. C'est pourquoi fut édicté l'arrêté fédéral du 13 mars 1964 modifiant l'arrêté sur l'économie laitière 1962. Nous avons fait usage de cette compétence élargie lors des augmentations du prix du lait des 1er avril 1964 et 1er juin 1965, qui profitèrent ainsi intégralement aux producteurs de lait commercial. Quant à la part de la hausse du prix de base dès le 1er novembre 1965 qui n'a pas été reportée sur les prix de vente, elle est aussi couverte conformément à cet article 11.

III. NÉCESSITÉ D'UN NOUVEL ARRÊTÉ SUR L'ÉCONOMIE LAITIÈRE A. Appréciation de la situation économique de l'agriculture C'est pour tenir compte de la situation économique de l'agriculture que nous avons, depuis le 1er novembre 1957, relevé à plusieurs reprises le prix de base du lait, la dernière fois avec effet au 1er novembre 1965. Ce prix est fixé à présent à 53 centimes par kilo, ce qui représente une hausse de près de 30 pour cent par rapport à l'été de 1957.

Lorsqu'il s'agit de prendre des décisions en faveur de l'agriculture, en particulier de décider des améliorations de prix à la production, nous nous efforçons d'apprécier autant que possible dans l'ensemble la situation de l'agriculture, à la lumière de toute la documentation mise à notre disposition. Celle qui est établie par le secrétariat des paysans suisses est, comme on sait, une source de renseignements très importante.

Nous n'avons pas l'intention de donner, dans le présent message, une appréciation détaillée de la situation de l'agriculture ces années passées pour justifier nos décisions en matière de prix. Pour éviter des redites, nous vous renvoyons à notre troisième rapport sur la situation de l'agriculture suisse et la politique agricole de la Confédération, rapport, qui est combiné avec notre message à l'appui d'un projet de loi modifiant celle qui concerne les crédits d'investissements dans l'agriculture et l'aide aux exploitations paysannes. Ces problèmes fondamentaux y sont exposés d'une façon très détaillée. Les chiffres fournis dans ce rapport font notamment apparaître que les conditions de revenu dans l'agriculture étaient telles que des améliorations de prix, entre autres du lait, étaient indispensables,
bien que le volume des fournitures et en particulier la difficulté de reporter les hausses de prix du lait sur les prix de détail des produits laitiers dans le pays et à l'étranger aient contraint les autorités à faire preuve de la plus grande prudence dans les décisions qu'elles avaient à prendre.

Aujourd'hui encore, l'adoption d'un nouvel arrêté sur l'économie laitière oblige à nous demander derechef si, pour fixer le prix de base du lait, il faut se fonder uniquement sur les possibilités de vente ou continuer à tenir compte aussi des conditions générales de revenu dans l'agriculture, A notre avis, nous devons

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procéder comme par le passé, c'est-à-dire apprécier tous les facteurs essentiels et nous prononcer chaque fois en connaissance de cause. Des moyens financiers autres que ceux que prévoit la loi sur l'agriculture devront donc, à l'avenir également, être mis à disposition aux fins d'assurer le placement des produits laitiers dans le pays. Cela explique en principe la nécessité d'un nouvel arrêté sur l'économie laitière, valable à partir du 1er novembre 1966. Dans les chapitres qui suivent, nous exposerons encore d'autres raisons qui plaident en faveur d'un tel arrêté.

B. La production et la mise en valeur du lait.commercial depuis 1957 1, La production de lait commercial

Le tableau n° 3 donne un aperçu des quantités de lait mises, selon la statistique, dans le commerce depuis la période de compte 1957-1958. Nous y avons indiqué également la quantité présumée pour la période 1964-1965 (le résultat définitif n'est pas encore connu) et les prévisions pour la période 1965-1966.

Un autre tableau (n° 4) renseigne sur l'évolution de l'effectif des vaches depuis 1957.

Tableau 3 L'évolution de la quantité de lait mise dans le commerce Exercice G" novembrc-31 octobre)

Quantité de lait commercial (En milliuns de q.)

1957-1958 1958-1959 1959-1960 1960-1961 1961-1962 1962-1963 1963-1964 1964-1965 1965-1966

21,6 22,3 23,3 22,6 23,3 23,8 22,9 23,5 (estimation) 24,0 (estimation)

Tableau 4 L'évolution de l'effectif des vaches

(Recensement d'avril) Année

Nombre de vaches ·

1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965

891 300 900 600 916000 940000 943 000 950000 918000 897000 920000

556 Les chiffres des dernières années montrent que la production de lait commercial tend à s'accroître. Des régressions passagères imputables aux conditions atmosphériques sont toutefois parfaitement normales. Celles des périodes de compte 1960-1961 et 1963-1964 sont dues en particulier aux mauvaises récoltes de fourrages. Pour la seconde de ces périodes, la diminution du nombre des vaches consécutive à l'abandon de l'exploitation bovine ou à la pratique exclusive de l'engraissement a aussi joué un rôle.

Pour les huit premiers mois de la période 1964-1965, les livraisons de lait ont dépassé de 7,4 pour cent celles de la période correspondante de l'exercice précédent. Depuis lors, la production laitière a beaucoup moins progressé.

Mais il apparaît que les fournitures de ladite période ont été évaluées à un niveau plutôt faible. On n'a en effet pas assez tenu compte d'un bon approvisionnement en fourrage tant en quantité qu'en qualité, des prix des concentrés généralement favorables, ainsi que de l'utilisation accrue de succédanés du lait et de l'amélioration zootechnique des troupeaux. L'accroissement de la production laitière s'explique encore par une nouvelle augmentation du nombre des vaches laitières, évolution qui eût été plus sensible encore si la tendance à passer à l'engraissement et à l'exploitation sans bétail ne s'était poursuivie. La composition du troupeau bovin par catégories d'âge permet de conclure que cette évolution se maintiendra vraisemblablement durant la période 1965-1966.

D'après la documentation disponible, ce n'est pas moins de 24 millions de quintaux de lait commercial qu'il faut porter en compte pour cet exercice.

2. L'utilisation du lait commercial Le tableau n° 5 renseigne sur l'utilisation du lait commercial. Par souci de précision, nous y avons également porté les chiffres supputés pour les périodes de compte 1964-1965 et 1965-1966.

Fait à relever, la consommation de lait frais est stable. Il est réjouissant de constater que celle de yoghourt, de crème et des autres spécialités à base de lait s'accroît. Notons que la production fromagère a pris plus d'ampleur durant la période de compte 1963-1964, malgré des apports de lait commercial sensiblement inférieurs à ceux de la période précédente, et que cette évolution persiste.

Le fait de fabriquer plus de fromage
que de beurre est conforme au principe général à la base du régime de priorité dans l'utilisation du lait. Ajoutons qu'au printemps de 1964, la marge de fabrication du fromage a été majorée, tandis qu'était réduit le prix de prise en charge du beurre. La marge de fromagerie a été relevée une nouvelle fois le 1er novembre 1965. C'est pour insister sur l'importance du principe énoncé que nous avons prescrit en même temps une revalorisation du lait écrémé. Cette manière de procéder est conforme aux buts visés par le plan beurre/fromage. Le tableau montre, enfin, qu'une diminution ou un accroissement de la production de lait commercial trouve son expression en premier lieu dans la production de beurre.

557

Tableau 5 Utilisation du lait commercial par période de compte Période de compce

Lait de consommation 1 Yoghourt,spécialités [ à base de lait frais J Crème de consommation et crème pour le café Fromage Conserves dé lait . .

Beurre Lait commercial, total

19571958

19581959

19591960

6,8

6,8

6,8

6,8

6,8

6,8

6,7

6,7

0,2

0,3

0,3

0,4

0,4

0,5

0,6

0,6

1,2 7,6 0,6 5,9

1,3 7,9 0,7 6,3

1,5 7,9 0,8 5,3

1,6 7,9 0,8 5,8

1,7 8,1 0,8 6,0

1,8 8,35 0,85 4,6

1,8 8,12) 0,9 5,4

1,9 8,7 0,9 5,2

I9601961- 19621961 1962 1963 (en millions de quintaux)

19631964

1964- 196519651) 19661)

7,0

1,1 7' î~^3 0,6 5,6

21,6 22,3 23,3 22,6 23,3 23,8

22,9 23,5 24,0

*) Estimation.

2 ) La production réelle atteindra au moins celle de l'exercice précédent.

La question de la vente du beurre et du fromage exige que nous nous y arrêtions ci-après. Voici, tout d'abord, comment la consommation du beurre a évolué ces dernières années (tableau n° 6) : Tableau 6 Consommation de beurre selon les périodes de compte (1er novembre 31 octobre) 19571958

19581959

19591960

19601961

19611962

19621963

19631964

(Wagons de 10 tonnes)

Consommation totale dont: Beure spécial Beurre de cuisine frais vendu à prix réduit Beurre fondu

3346 3397

3590 3830 3700

3800 3930

1617 1554 1577 1643 1571 1649 1719 655 82

805 76

957 70

1039 1138 1149 1186 211 86 82 77

II ressort de ce tableau qu'en 1963-1964, la consommation de beurre a de nouveau augmenté de 130 wagons, ou de 3,4 pour cent, par rapport à l'exercice précédent. Il en a été de même dans les huit premiers mois de l'exercice 19641965, comparativement à la période correspondante de l'exercice précédent, mais dans une plus faible mesure (un peu plus de 1 %). C'est le beurre spécial qui contribue le plus à cet accroissement, influençant ainsi favorablement le compte laitier du fait que moins de beurre doit être déclassé. En revanche,

558 l'accroissement de la consommation de beurre meilleur marché s'est notablement ralenti. La régression des ventes de beurre fondu, dont le prix est considérablement réduit, devrait être en partie mise au compte du changement des habitudes alimentaires. L'évolution généralement favorable du placement du beurre depuis 1962-1963 serait due aussi à l'intense publicité et au fait que les majorations du prix de base du lait décrétées durant la période de validité de l'arrêté SUT l'économie laitière n'ont, pour la plupart, pas été reportées sur le prix de ce produit. Les bonnes conditions de revenus de la population ont toutefois contribué, elles aussi, à ce résultat réjouissant. On peut espérer qu'à cause de cela précisément, les hausses de prix consécutives à celles du prix de base du lait depuis le 1er novembre 1965 n'auront pas pour effet de freiner les ventes de beurre.

Quant à la consommation de fromage, la tendance à la régression constatée ces années passées pour les sortes du pays à pâte dure ne s'est plus manifestée depuis la période de compte 1963-1964. Le tableau n° 7 montre que les ventes dans le pays des fromages en meules des sortes dites «de l'union» ont sensiblement dépassé, en 1963-1964, le niveau atteint la période précédente. Cette progression s'est poursuivie en 1964-1965.

Tableau 7 Ventes de fromage en meules dans le pays par l'union suisse du commerce de fromage Exercice (1er aoÛt-31 juillet)

Quantité placée Wagons

1957-1958 1958-1959 1959-1960 1960-1961 1961-1962 1962-1963 1963-1964 1964-1965

1635 1468 1616 1683 1679 1575 1619 1733

Depuis quelques années, les consommateurs demandent toujours davantage de fromages à pâte demi-dure faciles à couper, ceux d'Appenzell en particulier.

Les fromages suisses à pâte molle, quoique fortement concurrencés par des produits étrangers meilleur marché, se sont également mieux vendus.

Concurrement avec l'étude du marché et une publicité très intense, le fait de ne pas reporter sur le prix de détail du fromage les majorations du prix de base du lait intervenues depuis les 1er novembre 1962 et 1er avril 1964 aura sans doute contribué à l'évolution favorable des ventes de fromage, comme ce fut le cas pour le beurre. La modeste augmentation du prix intervenue le 1er novembre 1965 ne devrait pas modifier sensiblement la situation.

559

Durant l'exercice 1963-1964 (exercice de. l'union), les exportations de fromages suisses à pâte dure se sont accrues de 1,3 pour cent, pour atteindre 2623 wagons de 10 tonnes. Ensuite de la raréfaction de l'offre sur le marché international du fromage, nous avons pu en exporter davantage à des prix plus favorables. Les pays de la Communauté économique européenne (CEE) ont absorbé 79,6 pour cent de ces ventes, alors que la part afférente à l'Association européenne de libre échange (AELE) n'en constitue que 3,4 pour cent. Notre plus gros client extra-européen sont les Etats-Unis d'Amérique (13 %). En comparant les exercices 1964-1965 et 1963-1964, on constate que le volume des exportations de fromages à pâte dure s'est encore accru de 5,1 pour cent, pour atteindre 2758 wagons; le ralentissement momentané constaté à la fin de 1964 a pu être compensé durant l'année en cours. On a aussi exporté, en 1964, davantage de fromage en boîtes et en pains.

C. Le commerce extérieur du lait et des produits laitiers

La récente évolution de la balance du commerce extérieur de l'économie laitière est illustrée dans le tableau qui suit (tableau n° 8).

Si l'on exclut les achats de beurre à l'étranger,, dont le rôle particulier est de fournir des recettes servant à abaisser le prix des produits laitiers et à en favoriser le placement (art. 26 de la loi sur l'agriculture), on constate que le volume des importations, exprimé en lait frais, s'est accru de 82,4 pour cent entre 1960 et 1964. Cela est notamment dû au fait que les produits laitiers étrangers sont offerts à des prix moins élevés et laissent en général une meilleure marge commerciale. Il en résulte que les produits indigènes sont d'autant plus difficiles à écouler.

Le tableau n° 8 montre comment les importations ont évolué. Par rapport à 1963, l'année 1964 est caractérisée par un accroissement notable des importations de beurre, qui est en relation directe avec la diminution de la production de lait durant les semestres d'hiver et d'été 1963-1964, ainsi que des importations de fromage (10 %).

Entre 1960 et 1964, les ventes à l'extérieur de produits laitiers du pays n'ont pas, toute proportion gardée, suivi le rythme, des entrées. Les premières, exprimées en lait frais, ont augmenté de 7,3 pour cent et les secondes de 82,4 pour cent, ainsi que nous l'avons vu. Même si l'on compare les chiffres absolus, on constate que ces exportations ont moins progressé que les importations, ce qui est illustré par la diminution de l'excédent d'exportation. Cela étant, il est intéressant notamment de voir dans quelle mesure la Confédération influe ou peut influer sur l'évolution de la balance du commerce extérieur de l'économie laitière.

Tableau 8 Balance du commerce extérieur de l'économie laitière N° du tarif douanier

0402.10: 0402,30: 0404.10/14: 0404.28: 0404.30:

Produits exportés, dont : poudre de lait lait condensé ou stérilisé fromage à pâte molle fromage à pâte dure fromage en boîtes et en pains Total des exportations1) exprimé en millions de quintaux de lait frais

Produits importés, dont : 0402.10: poudre de lait ... .

0402.20: crème et poudre de crème 0402.30: lait concentré 0403.10: beurre 0404.10/14: fromage à pâte molle '.

0404.22/28: fromage à pâte dure ..

0404.30: fromage en boîtes et en pains . .

Total des importations exprimé en millions de quintaux de lait frais do mais sans le beurre ...

.....

560

Excédent d'exportation exprimé en millions de quintaux de lait frais

I960 wagons

1961 wagons

1962 wagons

1963 wagons

1964 wagons

sire 1 " senu 1965 1964 wagons wagons

525 413 2 2320 672

505 552 2 2518 699

511 413 2 2494 632

469 470 3,4 2617 646

447 521 2,9 2599 679

232 256 1,2 1224 304

230 277 1,6 1287 294

3,96

4,18

4,12

4,26

4,25

2,00

2,08

21l 2 ) 12 573 35 234 401 35

399 2) 15 680 600 244 503 42

627 2) 27 429 361 271 570 55

456 2) 34 697 262 294 688 73

12003) 44 464 1082 310 768 83

496 2) 20 162 491 147 348 41

726 2) 28 180 97 168 377 33

1,22

2,83

2,32

2,35

4,67

2,08

1,08

1,33

1,42

1,70

1,97

0,85

1,19 0,95

2,74

1,35

1,80

1,91

0,42 3)

0,08 3)

0,89

2.28

1.15

1.13

OR do., mais sans le beurre 2,00 2.85 2.56 2.70 1 ) Sans les livraisons aux oeuvres d'entraide.

2 ) Dont: poudre de lait écrémé (wagons) I960: 0,5; Î961: 121 ; 1962: 425; 1963 ; 253; 1964: 864; 1er semestre 1964: 342; 1" semestre 1965: 567, 3) Excédent d'importation.

561 D. Les mesures de politique commerciale dans le domaine

de l'économie laitière

1. Le maintien et le développement des ventes traditionnelles à l'étranger Le volume des ventes de fromage à l'étranger, on l'a vu dans les deux chapitres qui précèdent, s'est non seulement maintenu, mais a même quelque peu augmenté malgré la compétition accrue rencontrée sur le marché mondial tant du point de vue de la qualité que par rapport aux prix. Cela est dû à la supériorité de cette qualité, avantage dont la sauvegarde continue à requérir la plus grande attention, ainsi qu'au bon renom de ces fromages hors de nos frontières. A noter en outre que l'augmentation de ces ventes doit être en majeure partie attribuée à un accroissement de la demande dans les pays de la Communauté économique européenne (CEE).

Après la mise en vigueur, le 1er novembre 1964, de la réglementation commune adoptée pour le marché du. lait par les pays membres de la Communauté, la situation s'est notablement modifiée pour plusieurs de nos dérivés du lait vendus à l'étranger. Les anciens accords bilatéraux conclus avec ces pays furent remplacés dans ce secteur, comme pour d'autres produits agricoles importants, par une réglementation commune assujettissant les importations à un régime de prélèvements, dans la mesure où le permettaient les engagements assumés par la Communauté dans les limites de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT). Autrement dit, ce système de protection contre la concurrence étrangère prévoit la perception de droits qu'il est convenu d'appeler des prélèvements et qui, dans le commerce avec des pays tiers, doivent compenser la différence entre le cours souhaité à l'intérieur du pays et le prix le plus bas offert par l'étranger. Cette nouvelle réglementation, nous le montrerons encore par la suite, constitue une sérieuse entrave au maintien de nos débouchés traditionnels, affectant en particulier les fromages fondus et les poudres de lait médicales. En revanche, nos produits d'exportation les plus importants pour le secteur laitier, à savoir les fromages en meules (emmental, gruyère et sbrinz) échappent en principe à l'application de ce régime de prélèvements.

Lors des négociations tarifaires menées en 1960 et 1961 dans le cadre du GATT, la Suisse avait obtenu que la CEE accepte d'appliquer un droit de douane spécifique de 15 unités de compte (UC -- unité de compte = dollar US)
pour l'emmental, le gruyère et le sbrinz vieux de quatre mois au moins et coûtant au minimum 95 unités de compte les 100 kilos. Les Etats membres de la CEE, se conformant au programme chronologique des autorités de cet organisme, adaptèrent à ce taux les droits de douane de leurs tarifs. L'application intégrale de ce taux se traduit, pour ce qui est des fromages exportés en Italie, par une certaine charge supplémentaire; elle n'entraîne, en revanche, aucun changement des droits dans le cas des pays du Bénélux et de la France. Elle réduit quelque peu ceux qui grèvent les fromages jeunes vendus en Allemagne fédérale, alors que le taux de la CEE (15 UC) défavorise dans une certaine mesure les produits Feuille fédérale, 117° année. Vol. IH.

38

562

de plus de huit mois, qui représentaient autrefois la majeure partie de nos ventes à ce pays. En France, la mise en vigueur de la réglementation commune a mis fin au régime de contingentement. Tout bien considéré, le système des droits de douane fixé par l'accord conclu avec la CEE dans le cadre du GATT en ce qui concerne l'emmental, le gruyère et le sbrinz constitue une sérieuse garantie pour nos débouchés traditionnels dans les pays membres. La convention adoptée nous a permis de maintenir nos exportations de fromage après la mise en vigueur de la réglementation commune de la CEE concernant le marché laitier ; cela nous autorise, en ce qui concerne les importations de fromage -- dont plus de 80 pour cent nous parviennent des pays de la CEE --· à poursuivre une politique libérale.

Le système de prélèvements importants institué par la nouvelle réglementation du marché laitier de la CEE entrave considérablement l'exportation de notre fromage fondu. L'Italie, qui est notre principal client, a absorbé à elle seule, en 1964, 26,5 pour cent de nos ventes totales. Indépendamment de la libération des importations de fromage décrétée au début de 1950, ce pays, lors des premières négociations tarifaires au sein du GATT en 1958, consentit à la Suisse, en compensation de certaines concessions douanières, une consolidation tarifaire, pour le fromage fondu, de 11 pour cent sous le numéro 31 ex c de l'ancien tarif douanier italien. La réalisation du marché commun ayant contraint les six partenaires d'adapter leurs tarifs douaniers nationaux au tarif extérieur commun, des négociations dites de compensation eurent lieu, en 1960-1961, dans le cadre du GATT avec la CEE; elles avaient pour but de faire compenser par des concessions douanières dans le tarif extérieur commun celles que les différents membres avaient faites à l'égard des pays tiers. Ces négociations n'ont pas permis d'obtenir de la CEE la consolidation tarifaire pour le fromage fondu, la CEE ayant voulu conserver son entière liberté d'action dans ce domaine. C'est la raison pour laquelle la réglementation du marché laitier, mise en vigueur par la CEE le 1er novembre 1964 pour les positions non consolidées dans son tarif, ainsi que le système des prélèvements qui s'y rapporte, s'appliquent au fromage fondu.

Le prélèvement se calcule sur le cours mondial
d'un fromage à la coupe représentatif (le gouda), que notre industrie des fromages fondus n'a pas à sa disposition. Le prélèvement ainsi calculé étant opéré sur tous les produits de ce genre sans qu'il soit tenu compte du niveau des prix du produit de fabrication, la vente en Italie de nos sortes de fromage fondu, dont la fabrication est onéreuse, se trouve grevée d'une charge représentant environ 44 pour cent ad valorem.

Les produits rivaux d'origine allemande furent certes, eux aussi, frappés plus lourdement; pour ces derniers toutefois, les prélèvements seront réduits au fur et à mesure du développement du marché commun dans les six pays membres, tandis qu'ils continueront à s'appliquer sans changement à la marchandise provenant d'un pays tiers. Afin d'obtenir pour son fromage fondu un régime plus favorable, la Suisse a adressé mainte requête orale ou écrite au siège de la Communauté économique européenne à Bruxelles dès le printemps 1964 déjà,

563 donc bien avant l'entrée en vigueur de la réglementation commune adoptée pour le secteur laitier. La crise survenue dans la CEE à la fin de juin 1965 contraignit les autorités de cet organisme à remettre à plus tard toute réponse définitive à nos démarches. Nos propositions tendent à obtenir de la CEE que le montant du prélèvement perçu pour le fromage fondu fabriqué au moyen de nos sortes traditionnelles se calcule en fonction du cours mondial du fromage d'emmental, la Suisse pouvant, quant à elle, donner les garanties d'authenticité voulues pour ces produits.

La situation se présente en principe de façon analogue pour ce qui est des poudres de lait médicales exportées en majeure partie en France. De 1960 à 1964, nos ventes à ce pays voisin s'élevèrent en moyenne à quelque 3000 tonnes par année. Depuis la mise en vigueur de la réglementation commune, cet aliment pour enfants est grevé d'un droit d'entrée beaucoup plus élevé, ce qui affecte dans une forte mesure son prix et, partant, sa capacité de concurrence sur le marché français. Avant le 1er novembre 1964, les droits de douane perçus par la France s'élevaient à 23 pour cent ad valorem, tandis que le prélèvement actuel peut aller jusqu'à 49 pour cent suivant la teneur en matière grasse et le prix du produit. Le taux de prélèvement se fonde en effet sur les données calculées pour la poudre de lait entier ordinaire, à usage industriel, d'une teneur de 26 pour cent de matière grasse sur extrait sec, et vendue sous emballage commercial usuel; à cela s'ajoute que les poudres de lait médicales doivent satisfaire à des exigences beaucoup plus élevées quant à la qualité de la matière première et que la fabrication et l'emballage sont sensiblement plus coûteux. Nos requêtes tendent à obtenir, par la spécification du produit et la création d'une sousposition spéciale, une réduction des taux applicables.

Les difficultés auxquelles se heurtent depuis le 1er novembre 1964 nos exportations de fromage fondu et de laits médicaux destinés aux pays du marché commun ne se manifestent pas encore par une diminution du volume des ventes de ces derniers mois. Les fabricants suisses ont en effet mis en oeuvre de grands moyens financiers pour préserver leurs débouchés dans ces pays. Il est dès lors urgent d'arriver à établir des arrangements satisfaisants avec
la Communauté économique européenne, car l'octroi de primes fédérales supplémentaires à l'exportation ne saurait être une solution acceptable à la longue.

2. Le régime des importations Nous avons déjà relevé ailleurs que les achats de dérivés du lait étrangers rivalisant avec notre production indigène ont beaucoup augmenté dans l'ensemble depuis 1960. On notera en particulier l'accroissement continu des importations de fromage, de poudre de crème et de poudre de lait écrémé (tableau n° 8). De 1960 à 1964, les achats de fromages à pâte dure ont augmenté de 92 pour cent, atteignant ainsi 768 wagons de 10 tonnes, alors que, pendant la même période, cette tendance était moins marquée pour ce qui est des fromages à pâte molle (32 % seulement). Il faut attribuer ce développement au fait que

564

certains pays producteurs, par l'octroi d'importantes primes à l'exportation, s'efforcent et sont à même d'offrir leurs produits à des prix nettement inférieurs à ceux de la marchandise indigène comparable, ce qui permet aussi au commerce de s'assurer de plus larges marges de bénéfice. C'est pourquoi les producteurs ne. cessent de proposer l'adoption de mesures propres à freiner ces importations.

Or il ne saurait être question pour nous d'imposer des restrictions quantitatives dans ce domaine, étant donnés les engagements pris à l'égard de l'OECD et du GATT en vue d'une libération des échanges internationaux. Quant aux autres mesures qui pourraient être prises contre l'importation de fromage, elles ne paraissent pas non plus opportunes, vu l'importance que présente, pour notre économie laitière, dans les conditions actuelles du marché, des débouchés s'ouvrant pour ce produit à l'étranger. Il n'en incombera pas moins aux autorités de continuer à surveiller avec attention l'ampleur prise par ces arrivages, les fluctuations de prix enregistrées pour le fromage importé, ainsi que l'incidence des primes à l'exportation octroyées par les pays vendeurs.

Nous proposons, en revanche, de reprendre dans le nouvel arrêté sur l'économie laitière les dispositions qui autorisent depuis le 1er novembre 1959 la perception de suppléments de prix sur la crème et la poudre de crème importées. On constate en effet que les arrivages de produits à base de crème tendent à prendre plus d'ampleur, encore qu'il s'agisse pour ainsi dire exclusivement de la poudre de crème. La loi sur l'agriculture contient les bases légales qui permettent de grever de suppléments de prix le lait condensé et la poudre de lait écrémé d'origine étrangère, ainsi que les dispositions sur lesquelles se fonde le système de prise en charge adopté pour la poudre de lait entier. Dans l'intérêt d'une mise en valeur du lait aussi rationnelle et économique que possible, il est prévu, depuis le 1er mai 1961, que la marchandise du pays doit être prise en charge dans la proportion de 2 à 1 par rapport à celle de l'étranger.

Les dispositions introduites dans l'arrêté sur l'économie laitière 1962 pour régler la perception d'un supplément de prix sur les glaces comestibles avaient un caractère plutôt préventif, motivé par le fort accroissement des importations
entre 1958 et 1961. Des raisons de politique commerciale, ainsi que le fléchissement enregistré dans les quantités importées, nous ont dissuadés d'en faire usage. Nous proposons néanmoins de les reprendre dans le nouvel arrêté, attendu que, pendant les cinq ans de sa validité, la situation peut changer au point d'exiger l'application de mesures de ce genre.

3. Résumé II n'est souvent pas facile d'assurer efficacement, dans les échanges économiques internationaux, le maintien de la protection souhaitée par les producteurs notamment sans nuire aux intérêts de notre économie en général et même à ceux de l'agriculture. Les efforts faits pour renforcer la coopération économique sur le plan international, but que visent en particulier l'abaissement des barrières douanières et. la suppression des entraves à 1'iinportation, ne facilitent pas la

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tâche de protéger convenablement le secteur laitier. L'adoption d'un régime plus libéral n'a toutefois pas seulement favorisé les importations; la vente de nos produits laitiers à l'étranger en a aussi largement profité. La balance quanti tati ve du commerce extérieur de la Suisse portant sur des produits laitiers (sans le beurre) continue, ainsi qu'on l'a vu plus haut, à révéler un important excédent des exportations. Ces dernières jouent ainsi un rôle essentiel pour notre économie laitière, orientée vers l'exportation. La sauvegarde de ses intérêts requiert donc toujours une grande prudence dans l'application de mesures de politique commerciale étrangère. La nécessité de surveiller de façon continue les variations de cette balance quantitative de manière à pouvoir intervenir, au besoin, par l'application de mesures adéquates n'en subsiste pas moins.

E. Evolution probable de )a production de lait commercial et des possibilités de placement du lait et de ses dérivés 1. Evolution probable de la production de lait commercial

La production de lait commercial pour la période de compte 1964-1965 a été supputée à 23,5 millions de quintaux. En fait, elle dépassera ce volume, pour atteindre quelque 24,2 millions de quintaux. Cet exemple montre combien il est difficile de procéder à des évaluations exactes pour une année seulement.

L'évolution dépend du nombre des vaches et de leur productivité, comme aussi d'une quantité d'autres facteurs dont il n'est pas aisé de déterminer l'influence.

Nous pensons aux concentrés et aux succédanés du lait utilisés, au volume de lait consommé dans Je ménage et à l'étable, à la possibilité d'étendre la culture des champs pour adopter le système de l'exploitation sans bétail, ainsi qu'à la rentabilité de la production laitière. Deux éléments encore ne sont pas négligeables: l'abandon de la garde du bétail laitier pour la pratique de l'engraissement et l'influence de la quantité et de la qualité du fourrage brut. Des fluctuations annuelles de la production de lait commercial jusqu'à un million de quintaux sont donc tout à fait possibles.

Dans les années à venir, il faudra s'attendre qu'elles augmenteront encore quelque peu sous l'effet de l'amélioration souhaitée de la productivité consécutive à la sélection zootechnique, ainsi que d'un affouragement plus rationnel.

La faible quantité de lait utilisé à la ferme agira encore dans le même sens.

Cette évolution pourra toutefois être freinée par la diminution de la surface des terres cultivables ou encore par la transformation de l'entreprise (engraissement, exploitations sans bétail). Tout cela laisse entrevoir, dans un proche avenir, une production de lait commercial qui aura tendance à s'accroître. Le problème des débouchés revêtira donc une importance décisive.

2. Evolution probable de la demande de lait et de produits laitiers

Supputer l'évolution future des possibilités de placement du lait et des produits laitiers rencontre diverses difficultés. On en est réduit à des hypothèses

566

pour ce qui est du degré d'occupation, du pouvoir d'achat du produit du travail, de l'accroissement de la population, des débouchés étrangers, de la relation qui existe entre le prix du lait et des produits laitiers et celui des denrées de remplacement. La question du revenu revêtira en l'occurrence une importance primordiale.

L'évolution de la consommation ces dernières années fait apparaître un net déplacement des besoins traditionnels courants en faveur des spécialités relativement coûteuses demandées en période de bien-être matériel. Ainsi, pour ce qui est du lait, le lait en vrac cède de plus en plus le pas au lait pasteurisé, qui est plus cher. Les possibilités de gain demeurant favorables, cette évolution devrait se poursuivre. Mais en raison de tendances diverses, parfois contraires, il est difficile d'envisager dans l'ensemble l'avenir de la vente du lait de consommation. Tous ceux que cela concerne devraient se laisser guider par l'intérêt d'offrir aux consommateurs un lait de qualité irréprochable en mettant l'accent sur la haute valeur nutritive de cette denrée. Rappelons en outre que les consommateurs achètent toujours davantage de spécialités telles que la crème de consommation ou pour le café, les yoghourts, ice-cream, etc. On peut s'attendre que la consommation de spécialités laitières, dont les prix couvrent d'ailleurs les frais, continuera à augmenter au cours des années à venir. Pour ce qui est, en revanche, du lait de consommation, la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers verse encore certaines subventions. Cette aide -- indépendamment de la participation fédérale aux frais de lait de secours qui doit subsister encore quelque temps -- cessera toutefois dès la fin de 1965 avec la suppression de la caisse de compensation, A ce sujet, nous renvoyons à notre message du 4 juin 1965 relatif à la contribution de la Confédération aux frais de lait de secours (FF 1965,1, 1670).

Pour ce qui est du placement du beurre, le degré de saturation ne semble pas atteint. Si les conditions de revenu demeurent bonnes, tout laisse prévoir une évolution favorable de la consommation. En raison de la différence considérable entre le prix du beurre et celui des graisses végétales, il ne sera pas non plus possible, à l'avenir, de vendre le beurre à des prix couvrant les
frais. Il en résultera inévitalement des pertes. De pins, on ne saurait dire aujourd'hui déjà dans quelle mesure d'éventuelles hausses du prix de base du lait pourraient ou non être reportées sur le prix de détail du beurre. Toute fluctuation de la production indigène de lait commercial influençant en premier lieu la fabrication de beurre, on doit s'attendre que les pertes de la mise en valeur continueront à varier très sensiblement d'une année à l'autre. Elles pourront cependant être réduites dans l'ensemble si, conformément au plan beurre/fromage, on fabrique encore davantage de fromage de bonne qualité.

Le placement à l'étranger de conserves de lait du pays ne se conçoit pas non plus sans des subventions qui en réduisent les prix. Dans le pays, elles s'écoulent à des cours couvrant en général les frais.

Au sujet de la mise en valeur du lait commercial sous la forme de fromage, il y a Heu de préciser que ce produit se vend dans le pays à des prix qui ne couvrent

567

pas entièrement les coûts de fabrication. Rappelons simplement que les majorations du prix de base du lait décidées depuis le 1er novembre 1962 et qui n'ont pas été reportées sur les prix de détail s'élèvent jusqu'à 6 centimes par kilo/litre.

Le placement en Suisse du fromage du pays et la conquête des derniers débouchés entraîneront encore d'importantes dépenses. Enfin, il ne sera pas moins nécessaire de continuer à réduire les prix du fromage de cuisine et du fromage déclassé en matière première pour la fonte et destiné aux fabriques de fromages en boîtes. Les coûts et prix du fromage étant souvent plus élevés chez nous que sur les marchés étrangers, il n'est en général possible d'en exporter qu'à l'aide de subventions.

Qu'il s'agisse de la vente dans le pays ou à l'étranger, la qualité joue un rôle décisif. Plus elle est élevée, plus le produit des ventes s'accroît et plus les frais de la mise en valeur diminuent. Mais les mesures propres à l'améliorer doivent aussi être maintenues, pour la bonne raison que la qualité détermine le volume des transactions. Nous pensons ici non seulement au placement dans le pays, où la qualité joue un rôle décisif, mais encore à l'exportation, les possibilités de placement de notre fromage, rapportées aux conditions actuelles du marché international, étant taxées de bonnes. L'évolution du chiffre de nos ventes à l'étranger et de leur produit le prouvent.

Il est indéniable que les pays qui disposent d'un large assortiment de fromages en consomment beaucoup, la demande s'en trouvant stimulée. S'il est tenu compte de ce fait chez nous, la consommation par habitant peut être maintenue à un niveau élevé. Un élargissement de la gamme des produits et une amélioration de leur qualité font augmenter le mouvement des achats et la capacité de concurrence à l'égard des produits étrangers. Il est certain que toutes les possibilités ne sont pas encore épuisées et qu'on est en droit d'attendre un effort supplémentaire de la part des groupements laitiers et des milieux s'occupant de la mise en valeur du lait.

5. Etude des marchés et publicité II est évident que la composition de l'assortiment n'est pas le seul facteur qui détermine la tendance du marché. Bien d'autres facteurs jouent aussi un rôle important, notamment le «marketing», qui implique toutefois l'étude adéquate
des marchés. Une publicité efficace n'est concevable que si le marché qu'elle vise est parfaitement connu. Une étude des marchés et une publicité très poussées contribueront puissamment à assurer et à améliorer les possibilités de placement du lait et de ses dérivés. On doit donc appliquer sans relâche les mesures prises jusqu'à présent dans ce secteur et même les intensifier si les circonstances l'exigent, n appartient en premier lieu aux associations de producteurs et de commerçants d'en prendre l'initiative. La Confédération continuera elle aussi, de manière appropriée, à encourager de tels efforts.

L'étude des marchés ne doit toutefois pas seulement servir la publicité; elle est également un instrument devant permettre d'adapter la production aux

568 débouchés. Cela vaut pour les produits agricoles en général et plus particulièrement pour ceux de l'économie laitière, qui doit être capable, à l'avenir, de s'adapter plus rapidement aux nécessités de l'heure* La connaissance des tendances momentanées ou durables du marché peut diminuer le risque de décisions irrationnelles et, partant, réduire les risques du commerce. Pour cette raison également, l'affectation de moyens financiers, à l'étude du marché est donc justifiée.

F. Les pertes de mise en valeur survenues jusqu'à présent et leur couverture Le tableau n° 9 renseigne sur les dépenses pour la mise en valeur des produits laitiers depuis la période de compte 1961-1962 et sur celles qui sont portées au budget des exercices 1964-1965 et 1965-1966.

Tableau 9 Dépenses pour la mise en valeur des produits laitiers et dépenses totales du «compte laitier » (Périodes de compte) >) (Budget) ») (Budget) ") 1961-1962 1962-1963 1963-1964 1964-1965 1965-1966 En mlUions de francs

Mise en valeur du beurre 44,362 Mise en valeur du fromage.., 43,417 Mise en valeur des conserves de lait...

0,755 Dépenses pour la mise en valeur des produits laitiers 88,534 Contributions aux détenteurs de bétail bovin des régions de montagne 18,969 Contributions aux cngraisseurs de veaux en dehors des régions de montagne .

-- Coût de détermination des producteurs livrant trop de lait 0,277 Dépense totale 107,780 dont:

56,151 44,240 60,0 59,374 66,051 87,7 1,155 1,505 2,3

66,3 98,8 2,5

116,680 111,796 150,0

167,6

19,301

18,635

--

--

0,159

0,377

0,4

0,4

-- -- -- 136,140 130,808 150,4

-- 168,0

- Dans le pays pour: a. Produits laitiers b. Autres . . . . . . .

50,248 19,107

67,218 19,460

57,316 19,012

86,8 0,4

Total

69,355

86,678

76,328

87,2 . 100,0

38,425

49,462

54,480

63,2

- A l'exportation

99,6 0,4 68,0

0 Ces chiffres figurent dans les comptes d'Etat de 1962, 1963 et 1964.

2 ) Sans la hausse du prix de base du lait du 1er juin 1965.

3 ) Selon notre message du 19 octobre 1965 relatif au budget de la Confédération suisse pour 1966; compte tenu de la majoration du prix de base du lait du 1er novembre 1965.

569 A propos de la période de compte 1964-1965, ajoutons que les dépenses totales pour la mise en valeur de la production de lait commercial se rapportent à un volume estimé pour cette période à 23,5 millions de quintaux (tableaux noa 3 et 5), Celles qui ont été portées au budget pour assurer le prix du lait ne suffisent toutefois plus aujourd'hui; la production, comme on l'a vu, s'est en effet encore accrue et nous avons décidé de mettre à la charge de la Confédération les frais résultant de ce que la majoration du prix de base du lait au 1er juin 1965 (1 c.) n'a pas été reportée sur les prix du beurre, du fromage et, en partie, sur celui des conserves de lait (art. 11 de l'arrêté sur l'économie laitière 1962).

Cette hausse du prix de base fera monter de quelque 14 millions les dépenses annuelles; pour les derniers mois de la période de compte 1964-1965, les pertes résultant de la mise en valeur augmenteront, il est vrai, dans une plus faible proportion.

La comparaison des dépenses pour la mise en valeur des produits laitiers dans le pays (tableau n° 9) et du rendement des taxes et suppléments de prix prévus par la loi sur l'agriculture, y compris les fonds versés à la caisse de compensation des prix du lait, montre la somme que doivent procurer les mesures complémentaires d'ordre financier prises par la Confédération afin que les producteurs obtiennent pour leur lait un prix de base couvrant les frais (tableau n° 10).

Tableau 10 1961-1962 ') 1962-19631) 1963-1964 0 1964-1965") 1965-1966 3) (Période (Période (Période de compte) de compie) de compte) (Budget) (Budget) En millions de francs

Dépenses pour le placement des produits laitiers dans le pays ./. taxes et suppléments de prix selon la loi sur l'agriculture Montant total à fournir

50,248

67,218

57,316

86,800

99,600

41,668

43,119

67,408

51,615

52,815

8,580

24,099

--

35,185

46,785

!) Ces chiffres figurent dans les comptes d'Etat de 1962, 1963 et 1964.

2 ) Sans la hausse du prix de base du lait du 1e* juin 1965.

3 ) Selon notre message du 19 octobre 1965 relatif au budget de la Confédération suisse pour 1966; compte tenu de la majoration du prix de base du lait du 1er novembre 1965.

La somme des fonds à fournir varie ainsi, ces dernières années, entre zéro et une cinquantaine de millions de francs. Sans l'application des arrêtés sur l'économie laitière, les producteurs de lait commercial auraient enregistré, suivant la période de compte, un manque à gagner atteignant dans la moyenne jusqu'à 4 centimes par kilo de lait à transformer. Cela aussi prouve avec toute la netteté voulue que les interventions actuelles et futures répondent à une nécessité.

570 Le tableau n° 11 montre comment sont couvertes les dépenses pour le placement des produits laitiers selon la réglementation applicable. Les contributions aux détenteurs de bétail bovin des régions de montagne et aux éleveurs de veaux en dehors de ces régions y sont incluses dans la mesure où elles sont ou ont été mises à la charge du compte laitier. Ajoutons enfin que si les producteurs ont peu contribué à la couverture des pertes durant la période de compte 19631964, cela est dû à une production laitière relativement peu élevée et à l'ampleur des charges imposées à la Confédération par l'article 11 de l'arrêté sur l'économie laitière 1962.

Tableau 11 Couverture des dépenses totales (Périodes de compte) '}

(Budget) ') (Budget) ')

1961-196Z 1962-1963 1963-1964 1964-1965 1905-1966 En millions de francs

1. Part des producteurs aux pertes: - dans le pays - à l'exportation 2. Produit des taxes et suppléments de prix après déduction des montants versés à la CCL 3. Suppléments de prix sur les denrées fourragères 4. Ressources générales de la Confédération : - remplacement des fonds détournés de leur but au profit de la CCL ..

- subventions prévues à l'article 11 de l'arrêté sur l'économie laitière de 1962 - part de la Confédération (art. 2 et 3 de l'arrêté sur l'économie laitière) Total des dépenses pour la mise en valeur des produits laitiers..

- contributions aux détenteurs de bovins et aux engraisseurs de veaux Total des ressources générales de la Confédération mises à disposition

11,527

9.536

30.278 30,148

1,190

8.6

8,4

56,111 42,0

53,3

7,303

--

--

--

--

11,658

14,390

15,074

10,0

~

15,976 34,660

55,0

72,1

4,761 34,4

33,8

--

28.345 46,629 40,003 76,995

54,495

99,4

105,9

18,669

19.012

0.4

0,4

58,672 96,456 73,507 99,8

106,3

Dépenses totales 107,780 136,140 130,808 150,4

168,0

19.461

!) Ces chiffres figurent dans les comptes d'Etat de 1962, 1963 et 1964.

£ ) Sans la hausse du prix de base du lait du lel juin 1965.

3 ) Selon notre message du 19 octobre 1965 relatif au budget de la Confédération suisse pour 1966; compte tenu de la majoration du prix de base du lait du 1er novembre 1965.

571 G. Résumé et conclusion

Dans l'introduction, nous avons attiré l'attention sur le rôle important que joue l'économie laitière dans l'agriculture suisse. Nous relevions que la production laitière lui procurait environ le tiers de son rendement annuel brut épuré et qu'elle constituait donc un facteur déterminant du revenu paysan.

La loi sur l'agriculture et l'arrêté sur le statut du lait exigent que le prix du lait payé aux producteurs soit en principe fixé à un niveau couvrant les frais.

Des fonds spéciaux peuvent être mis à disposition à cet effet, en vertu de la loi.

Mais depuis 1957, ces moyens ne suffirent plus pour couvrir l'ensemble des frais de la mise en valeur dans le pays de nos produits laitiers lorsque le prix de base du lait est fixé à un niveau équitable. C'est pourquoi l'Assemblée fédérale, en complément aux principes de la loi sur l'agriculture, a maintes fois prévu la possibilité de recourir temporairement aux ressources générales de la Confédération pour maintenir et encourager la vente des produits laitiers dans le pays, afin que le prix de base du lait soit ainsi assuré aux producteurs.

Diverses mesures d'ordre économique ont été prises en même temps dans le secteur laitier.

Nous avons vu que les moyens financiers prévus à ces fins par la loi sur l'agriculture ne suffiront pas non plus, à l'avenir, pour garantir un prix de base du lait couvrant à peu près, dans la moyenne des années, les frais de production.

Les efforts que fait l'agriculture pour améliorer sa productivité et réduire les coûts de production ne nous dispenseront pas non plus de prendre, à plus ou moins brève échéance, des mesures complémentaires d'ordre économique et financier dans le secteur laitier. Si l'on voulait assurer le volume actuel des ventes de produits laitiers tout en renonçant à ces mesures complémentaires, il faudrait réduire le prix de base du lait, et donc aussi les coûts de production des produits laitiers, à un niveau tel que les moyens mis à disposition en vertu de la loi sur l'agriculture suffisent à couvrir les pertes de mise en valeur dans le pays. Une telle façon de procéder serait toutefois en contradiction avec les efforts faits jusqu'à présent par la Confédération pour maintenir une agriculture productive et une population paysanne forte. Il est donc nécessaire que des mesures complémentaires d'ordre
économique et financier soient également prises lorsque l'arrêté de 1962 arrivera à échéance.

IV. LE PROJET D'UN NOUVEL ARRÊTÉ SUR L'ÉCONOMIE LAITIÈRE Nous avons, ci-dessus, insisté sur la nécessité de prendre, même lorsque l'arrêté de 1962 aura perdu sa validité, des mesures complémentaires d'ordre économique et financier. Nous indiquerons ci-après et commenterons, au besoin, les mesures qui, à notre avis, s'imposeront à partir du 1er novembre 1966. Notre intention est de conserver la conception actuelle, sous réserve de quelques modifications indispensables.

572

A. Le projet d'arrêté Les dispositions d'ordre économique et financier du projet d'arrêté se -fondent sur un des «articles économiques» de la constitution (art. 31 bis, 3e al., lettre b). L'article 32 de la constitution est la base qui permet d'appeler les cantons et les groupements intéressés à coopérer à l'exécution de l'arrêté.

Les dispositions pénales reposent sur l'article 64bis de la constitution.

L'article premier, 1er alinéa, est d'importance fondamentale du fait qu'il nous autorise à verser des contributions complémentaires pour encourager le placement dans le pays des produits laitiers indigènes, si le rendement des taxes perçues en vertu de l'article 26, 1er alinéa, lettre b, de la loi sur l'agriculture ne suffit pas. Les suppléments de prix perçus sur là crème, la poudre de crème et les glaces comestibles en vertu de l'article 6 du projet sont assimilés, comme jusqu'ici, à ces taxes.

Le 2e" alinéa prescrit que les contributions complémentaires nécessaires doivent être prélevées avant tout sur le produit des suppléments de prix perçus en vertu de l'article 19 de la loi sur l'agriculture, s'il n'est pas affecté à d'autres fins que celles que prévoit la législation agricole. On ne pourra recourir aux ressources générales de la Confédération que si ces prélèvements ne suffisent pas.

Cette réglementation correspond en principe à l'ancienne, mais tient compte des modifications qu'entraînera la suppression de la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers à la fin de 1965. Actuellement, les fonds disponibles en vertu de l'article 19 ont une autre affectation.

Le 3e alinéa rappelle la disposition de la constitution selon laquelle l'adoption de prescriptions fédérales tendant au maintien d'une population paysanne forte et à l'encouragement d'une agriculture productive implique pour celle-ci toute mesure d'entraide adéquate. A titre d'exemple, l'arrêté mentionne la reprise de produits laitiers et l'encouragement de leur vente (étude du marché, publicité et mise en vente de nouveaux produits). Relevons toutefois que d'autres mesures d'entraide encore, non indiquées dans l'arrêté, peuvent être exigées si elles concourent à une utilisation rationnelle et économique du lait et de ses dérivés au sens de la législation laitière en vigueur. Le sens de cette disposition est en
corrélation étroite avec l'idée fondamentale exprimée au 4e alinéa de ce même article.

A propos de ce 4e alinéa, rappelons qu'en 1959, la commission de gestion du Conseil national s'est penchée sur la question des conflits qui pourraient se produire tôt ou tard entre les intérêts économiques des groupements laitiers (union centrale des producteurs suisses de lait et ses sections) et les tâches de droit public qui leur sont confiées en vertu de l'arrêté sur le statut du lait ou de l'ordonnance concernant l'utilisation du lait commercial. Le département de l'économie publique a fait soumettre ce problème à un examen approfondi.

Le rapport, remis aux autorités à fin octobre 1961, concluait à la possibilité de tels conflits. Invoquant ces faits, on a proposé, au Conseil national, lors des délibérations relatives à l'arrêté sur l'économie laitière de 1962, que le Conseil fédéral fût habilité à prendre des dispositions obligeant les groupements laitiers

573

à remplir judicieusement les tâches qui découlent pour eux dudit arrêté. Le but essentiel était de réduire à un minimum les risques de conflits en étendant expressément la surveillance du Conseil fédéral aux affaires d'appréciation.

Cette proposition fut acceptée par le Conseil national comme par le Conseil des Etats, et insérée dans l'arrêté en vigueur. Nous proposons de transcrire telle quelle cette disposition dans le nouvel arrêté.

Mous ne pouvons, à vrai dire, faire un usage judicieux de cette compétence que lorsque nous savons si la mise en valeur du lait et de ses dérivés est assez bien organisée pour que les frais de placement, élevés en fait, soient maintenus au niveau le plus bas possible. C'est alors seulement qu'on verra si, pour remplir leurs tâches de droit public, les groupements laitiers épuisent réellement toutes les possibilités de rationalisation et s'ils exécutent correctement ces tâches à tous égards. Nous regrettons que cette étude n'ait pu se faire, faute de temps et de personnel. Il a fallu, dans l'intervalle, mettre en chantier d'autres travaux qui ne souffraient plus aucune attente (modification de l'arrêté sur l'économie laitière en vigueur, libération de la vente du lait pasteurisé, élaboration du projet de participation de la Confédération aux frais de lait de secours, examen de la réglementation du marché du fromage, préparation du projet d'arrêté sur l'économie laitière qui est l'objet du présent message). Les travaux de réorganisation de la réglementation du marché du fromage mettront temporairement l'administration à forte contribution, mais il sera possible, dans les mois qui viennent, de faire procéder à l'étude des problèmes en rapport avec l'article premier, 4e alinéa; la division de l'agriculture l'a confiée à un groupe de travail spécial.

Quant aux conflits d'intérêts évoqués, notons qu'ils s'expliquent par l'organisation du marché laitier adoptée par la Confédération. Il s'agira donc d'examiner comment on pourra les ramener au minimum, le cas échéant en modifiant les bases légales existantes.

Les groupements laitiers, il faut le reconnaître, remplissent une mission importante, souvent difficile, en menant à chef les tâches de droit public qui leur ont été confiées. Les fluctuations dans la production, d'une part, et dans la demande de lait et de produits
laitiers, d'autre part, obligent sans cesse les fédérations responsables à prendre les mesures appropriées. Il leur incombe en outre de rester en contact avec les producteurs ou les sociétés de laiterie et, enfin, d'arrêter les importantes décisions que requière l'orientation de la production.

Par suite des recours, des demandes de subventions fondées sur la législation concernant les améliorations foncières ou les crédits d'investissements, ou pour d'autres raisons encore, les autorités ont connaissance de situations qui ne donnent pas satisfaction et qui montrent la nécessité de l'examen du pro blême de la mise en valeur du lait. En maints endroits, on a notamment tendance à étudier les problèmes individuellement et à les résoudre sous le seul angle local, au lieu de tenir compte des besoins de régions plus étendues et des impératifs de l'économie publique considérée dans son ensemble. Les limites assignées aux fède-

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rations laitières régionales constituent souvent un frein, voire un obstacle aux décisions judicieuses. La faible étendue du rayon de diverses fédérations aggrave encore la situation. Force est de constater en outre que les fédérations régionales ne sont souvent pas ou pas suffisamment disposées à coopérer efficacement, dans les limites de l'activité générale de l'union centrale, à la solution des problèmes d'autres fédérations. Cela explique pourquoi l'approvisionnement en lait et la mise en valeur de ce produit n'ont pas encore atteint le niveau souhaité dans maintes parties du pays. Nous nous rendons bien compte que cet état de choses est le fruit non pas d'une mauvaise volonté, mais en premier lieu d'une évolution historique. Or il est absolument nécessaire d'y apporter remède, du moment que la Confédération est toujours davantage mise à contribution. Nous tenons toutefois à souligner qu'en face des problèmes de réorganisation qui se posent, il n'est pas seulement question d'améliorer la situation à l'échelon des producteurs de lait ou des sociétés de laiterie. C'est surtout au niveau des fédérations qu'il faudra résoudre les principaux problèmes à l'ordre du jour.

L'article 2 règle la participation des producteurs de lait commercial à la couverture des pertes de la mise en valeur. La loi sur l'agriculture ne prévoit en principe aucune mesure qui permette d'assurer des prix couvrant les frais s'il n'est pas tenu compte des possibilités de placement. C'est pourquoi la disposition qui oblige, à titre de mesure propre à orienter la production, les producteurs à participer à la couverture des pertes de la mise en valeur doit être maintenue dans le nouvel arrêté. L'orientation de la production exige cependant que l'on déroge sciemment au principe de la formation normale des prix, à moins qu'on ne veuille recourir à des limitations quantitatives, ce que les expériences faites ne permettent toutefois plus d'envisager. La participation à la couverture des pertes doit en outre contribuer à rendre les agriculteurs sensibles à leurs responsabilités en matière de production laitière et en particulier conscients des conséquences financières et économiques qui en découlent. Cette mesure, enfin, doit tenir constamment en éveil l'esprit individuel d'initiative et de responsabilité.

Notre projet confère à la
vente dans le pays et à l'étranger un caractère d'unité, car la réglementation actuelle du commerce extérieur ne laisse plus au producteur la possibilité d'influer sur un grand nombre de facteurs qui détermine le marche, tant intérieur qu'extérieur. Ce problème en soulève un autre, celui de savoir s'il faut faire une distinction entre les divers modes d'utilisation du lait pour calculer la part des pertes qui incombe aux producteurs de lait commercial. Nous avons tranché ce problème dans le sens du régime de priorité selon l'arrêté sur le statut du lait, sans modifier en principe la pratique suivie jusqu'ici. L'arrêté actuel sur l'économie laitière prescrit aussi que le produit des taxes perçues en vertu de ses articles 8 et 9 et de l'article 26 de la loi sur l'agriculture sert tout d'abord à couvrir les dépenses résultant de la mise en valeur dans le pays des produits laitiers indigènes, à l'exception du beurre, et ensuite seulement les frais de placement de ce produit. Cette disposition n'a cependant

575

pas d'effet pratique notable. Cet état de choses oblige à prendre désormais en considération les frais de mise en valeur du beurre de la façon suivante: la part des producteurs de lait commercial aux pertes non couvertes par le produit des taxes perçues en application de l'article premier, 1er alinéa, du projet, par la contribution initiale de la Confédération (1er al.) et par ses ressources générales disponibles en yertu de l'article 4, est fixée à 60 pour cent dans le cas du beurre, et à 10 pour cent seulement dans celui du fromage et des conserves de lait (3e al.).

Le fromage et les conserves de lait étant presque les seuls produits laitiers du pays qui soient exportés, les producteurs de lait commercial sont moins mis à contribution qu'auparavant. En outre, la charge des producteurs dans le commerce d'exportation est quelque peu allégée par les dispositions des 1er et 2e alinéas, selon lesquelles le produit des taxes et la contribution initiale de la Confédération (10 millions de francs) pourront toujours être déduits de la dépense totale pour la mise en valeur du fromage, des conserves de lait et du beurre, ce qui n'est pas le cas actuellement. Afin de déterminer leur part aux pertes, il faut répartir le solde des frais non couvert proportionnellement entre les frais totaux de placement du fromage et des conserves de lait, d'une part, et ceux du beurre, d'autre part. Cette solution aide à mettre un terme à une situation peu satisfaisante du fait que le régime actuel des exportations ne permet pas de profiter de la contribution initiale de la Confédération et pas dans chaque cas des moyens financiers mis à disposition en vertu de l'article 26 de la loi sur l'agriculture et des articles 8 et 9 de l'arrêté de 1962. Cet allégement des charges des producteurs dans le cas de l'exportation se justifie; considérant les choses du point de vue de l'économie nationale, nous portons en effet un grand intérêt à l'accroissement de la production de fromage; or les quantités supplémentaires fabriquées ne peuvent, pour la plus grande partie, être absorbées que par le marché extérieur. On ne doit toutefois pas abandonner le principe d'une certaine participation des producteurs de lait aux pertes à l'exportation, le but étant, d'une part, de prévenir toute velléité d'exporter le plus possible de produits laitiers
sans se préoccuper du rendement des ventes et, d'autre part, de soutenir les efforts des producteurs visant à améliorer la qualité de notre principal produit laitier d'exportation, le fromage.

Au sujet de la contribution initiale de la Confédération (10 millions de francs), précisons qu'on ne peut pas la comparer purement et simplement à l'avance de 20 millions, ni y voir par conséquent l'idée d'une réduction. Le montant actuel sert exclusivement à couvrir les frais de placement dans le pays des produits laitiers indigènes. D'autre part, la Confédération ne doit verser cette contribution que si le rendement des taxes et suppléments de prix perçus en vertu des articles premier et 8 de l'arrêté 1962 ne suffit pas. Ces recettes ayant suffi, pour la période de compte 1963-1964, à couvrir les pertes résultant de la mise en valeur dans le pays, les producteurs de lait commercial n'ont pu tirer aucun profit de la contribution initiale de la Confédération. D'après le budget, il en sera de même pour la période de compte 1964-1965 et 1965-1966. Les producteurs profiteront en revanche intégralement, à chaque période de compte,

576 de la nouvelle contribution initiale de 10 millions de francs, car ce montant pourra être affecté aussi bien à la couverture des pertes à l'exportation qu'à celle des dépenses résultant de la mise en valeur dans le pays. Ajoutons que le fait de substituer à l'article 2 actuel la version que nous venons de commenter modifiera le système de la prise en charge des pertes; cette modification entraînera une réduction de la contribution initiale.

Le tableau suivant indique la participation des producteurs de lait commercial aux pertes de la mise en valeur selon l'arrêté de 1962 et ce qu'elle sera d'après le régime institué par notre projet d'arrêté.

Tableau 12 Participation des producteurs de lait commercial aux pertes de la mise en valeur

Période de compte

Bases légales

1959-1960 !)

1961-1962 !)

1962-1963 !)

1963-19641) 2

1964-1965 ) (budget) 1965-19663) (budget)

"

Arrêté 1962 Projet 1966 Arrêté 1962 Projet 1966 Arrêté 1962 Projet 1966 Arrêté 1962 Projet 1966 Arrêté 1962 Projet 1966 Arrêté 1962 Projet 1966

Participation des producteurs (en ralliions de francs) aux pênes résultant des ventes dans le pays, des exportations, Total de la mise en valeur de la mise en valeur du beurre (nouveau) du fromage et des conserves de ]ait (nouveau)

30,3 29,8 -- 11,0 .-- 12,4 -- -- -- 6,6 -- 6,7

6,7 3,7 7,6 1,8 9,5 2,5 1,2 -- 8,6 2,2 8,4 2,1

37,0 33,5 7,6 12,8 9,5 14,9 1,2 ' -- 8,6 8,8 8,4 8,8

1

) Ces chiffres figurent dans les comptes d'Etat de 1960,1962, 1963 et 1964.

) Sans la hausse du prix de base du lait du 1er juin 1965.

3 ) Selon notre message du 19 octobre 1965 relatif au budget de la Confédération suisse pour 1966; compte tenu de la hausse du prix de base du lait du 1er novembre 1965.

2

Le projet d'arrêté prévoit que les producteurs de lait commercial; ainsi qu'il ressort du tableau n° 12, seront mis à contribution à peu près comme jusqu'ici. Pour ce qui est de leur quote-part des pertes, la nouvelle réglementation ne pourra pas, bien entendu, imposer chaque année une charge exactement équivalente à celle que fixait l'ancienne réglementation; des écarts seront inévitables. Ce qui importe, c'est de connaître la répartition de cette quote-part entre la fabrication du beurre et celle de fromage et de conserves de lait. Outre l'avantage dû au fait que la fabrication du beurre est placée indirectement en second rang, relevons que la réglementation proposée est facile à appliquer.

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Précisons que, selon notre projet, la contribution de la Confédération aux frais d'encouragement de l'exportation demeure régie par l'article 24 de la loi sur l'agriculture et n'est donc pas limitée.

L'article 3 du projet règle l'encaissement du montant à assurer et le calcul de la part des producteurs de lait commercial aux pertes de la mise en valeur.

Il maintient à 8000 kilos/litres l'attribution fixe concédée actuellement à chacun d'eux. Bien que la part des producteurs aux pertes de la mise en valeur n'ait parfois pas atteint un demi-centime par kilo/litre de lait grevé de la taxe conditionnelle (montant à assurer) au cours des dernières années, nous proposons de conserver la disposition autorisant la perception d'une telle taxe de 2 centimes au plus par kilo/litre de lait commercial, le droit devant nous être accordé de la porter jusqu'à 3 centimes si des pertes extraordinaires de la mise en valeur l'exigeaient. Si le montant à assurer était fixé à un taux moins élevé, nous pourrions être amenés, en cas de circonstances momentanément plus difficiles, soit à reviser l'arrêté sur l'économie laitière, soit à abaisser le prix de base du lait et, par là même, les prix des produits laitiers-jusqu'au niveau où la part des producteurs est couverte par le montant à assurer.

Comme jusqu'ici, nous taxons de judicieuse l'attribution fixe de 8000 kilos/ litres, bien qu'on ne cesse de suggérer qu'elle soit relevée. Ce régime spécial profite aux agriculteurs qui livrent peu de lait. L'effet qu'on attend de la participation aux pertes (orientation de la production) serait rendu grandement illusoire si le cercle des producteurs touchés se rétrécissait sans cesse.

Ajoutons, enfin, que l'article 3 est la conséquence logique de l'article 2.

Il ne concerne que l'aspect technique de l'encaissement de la part des producteurs de lait commercial, L'article 4 offre la possibilité de recourir annuellement, jusqu'à concurrence de 80 millions de francs, aux ressources générales de la Confédération pour compenser, durant la période de validité du nouvel arrêté, les hausses du prix de base du lait décidées depuis le 1er novembre 1962 qui ne sont pas reportées sur les prix de détail des produits laitiers. Les producteurs de lait Commercial ne contribuent dès lors pas à ces dépenses. Contrairement à ce que prévoit
l'article 11 de l'arrêté sur l'économie laitière 1962, le nouvel arrêté limitera à l'avenir le recours aux ressources générales de la Confédération pour couvrir les pertes de la mise en valeur des produits laitiers dues au non-transfert des majorations du prix de base du lait sur les prix de détail. En renonçant à une reconduction partielle dudit article 11, on devrait, dès le 1er novembre 1966, imposer aux consommateurs ou porter au compte laitier (participation de la Confédération et des producteurs) les quelque 70 millions que ces hausses représentent annuellement. Nous pourrions aussi imaginer une solution combinant ces deux variantes. Les solutions décrites équivaudraient l'une et l'autre à une modification fondamentale de la situation actuelle. Elles doivent donc être considérées comme inadéquates, d'autant plus qu'il en résulterait de regrettables perturbations sur le marché ou une diminution sensible du revenu des producteurs, ou tous les deux simultanément. Cela serait contraire au principe Feuille fédérale. HT année. Vol. III.

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du maintien d'une agriculture productive et d'une population paysanne forte.

La formule proposée permettra, en revanche, de continuer à recourir aux ressources générales de la Confédération pour couvrir les frais résultant des majorations du prix de base du lait non reportées jusqu'ici sur les prix de détail pendant la durée de validité de l'arrêté 1962 et, occasionnellement, à imposer la totalité ou une partie de ces hausses aux consommateurs. Les perturbations du marché auxquelles nous faisions allusion et leurs fâcheuses répercussions pourront ainsi être évitées. Le fait de réduire les dépenses crée la possibilité de mettre à l'avenir des fonds à disposition pour les mêmes buts, s'il se révélait impossible de reporter purement et simplement de nouveaux relèvements nécessaires du prix de base du lait sur les prix de détail des produits laitiers et inopportun d'en inclure les frais dans le compte laitier en raison de la charge qui en découlerait pour les producteurs. Ajoutons cependant que la prudence s'imposera dans l'application de cet article, malgré la compétence limitée, par rapport au régime en vigueur, de recourir aux ressources générales de la Confédération pour couvrir les hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix des produits laitiers. Par cette réserve et par le plafonnement proposé desdites ressources, nous voudrions faire ressortir que le non-transfert d'éventuelles majorations du prix de base ne doit nullement avoir le sens d'une règle.

Cela ressort de la pratique suivie jusqu'ici. Cette façon de formuler l'article 4 s'impose aussi pour des raisons de politique financière. Autre but, enfin, qu'on se propose d'atteindre, c'est de prévenir le risque que ne s'affaiblisse, avec le temps, l'effet attendu de l'article 2 du projet (orientation de la production) et, par là même, la volonté des producteurs de fournir un effort personnel et de prendre leurs responsabilités.

L'article 5 concerne la contribution que paient les producteurs de lait commercial en faveur de la publicité. Cette contribution fournit les moyens servant à encourager diverses mesures propres à faciliter le placement (étude du marché, publicité, mise en vente de nouveaux produits). Si l'union centrale des producteurs suisses de lait exige elle-même que les producteurs affiliés à ses sections versent
une contribution par kilo/litre de lait commercial pour financer lesdites mesures, le 1er alinéa nous autorisera à percevoir, en faveur de Ja publicité, une taxe équivalente auprès des producteurs non fédérés, cela dans le sens d'une compensation des avantages et des charges. Le produit de cette taxe sera mis à la disposition de l'union centrale au titre de contribution de ces producteurs aux frais résultant de l'exécution de mesures spéciales en faveur du placement.

Nous renonçons, en revanche, à la compétence de percevoir une taxe en faveur de la publicité auprès de tous les producteurs. Jusqu'à présent, nous n'avons jamais prescrit le paiement d'une telle taxe parce que l'union centrale en perçoit elle-même une auprès de ses membres depuis 1958. Ce faisant, cette dernière a manifestement institué une mesure d'entraide supportable au sens de l'article premier, 3e alinéa, du projet d'arrêté ci-joint. En ce qui concerne les producteurs de lait commercial non affiliés à l'union centrale,

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il ne reste donc plus qu'à créer la base légale qui permettra de percevoir auprès d'eux une contribution dite de solidarité, au titre de taxe de droit public.

Dans les circonstances actuelles, nous considérons comme un minimum une contribution en faveur de la publicité de 0,1 centime par kilo/litre de lait commercial qui sera affectée exclusivement à l'encouragement de la vente.

Selon le 2e alinéa, l'union centrale doit soumettre aux autorités compétentes, comme par le passé, un budget et les comptes relatifs à l'utilisation du produit de la taxe en faveur de la publicité versée par ses membres, ainsi que de la contribution dite de solidarité des producteurs non fédérés. On pourra ainsi voir si les fonds à affectation spéciale ont réellement servi aux fins prévues. Nous renvoyons encore, en terminant, aux explications fournies dans le chapitre consacré à l'étude du marché et à la publicité.

L'article 6 nous autorise à percevoir des suppléments de prix sur les importations de crème, de poudre de crème et de glaces comestibles. Il correspond à l'article 9 de l'arrêté actuel, qui doit être repris sans modification. Jusqu'ici, nous n'avons fait usage de cette compétence que pour la crème et la poudre de crème. A notre avis, il ne faudrait pas renoncer aux bases légales permettant de grever de tels suppléments aussi les glaces comestibles; au besoin, ils pourront ainsi être prescrits sans délai.

La disposition obligeant les producteurs qui mettent directement dans le commerce du lait et des produits laitiers de verser une taxe spéciale en lieu et place d'une éventuelle déduction de prix pour qualité insuffisante (art. 7 du projet) a été intégralement reprise de l'article 10 de l'arrêté 1962.

Les articles 8, 9, 10 et 11 du projet contiennent les dispositions pénales.

Actuellement, la loi sur l'agriculture, l'arrêté sur le statut du lait et l'arrêté sur l'économie laitière ont des dispositions pénales ayant trait à la réglementation du marché laitier. Il serait plus judicieux de réunir ces dispositions dans un arrêté ou dans une loi, pour leur donner plus d'uniformité. La revision de l'arrêté sur l'économie laitière nous en fournit l'occasion. Mais cela implique l'abrogation de l'article 111, 2e et 3e alinéas, de la loi sur l'agriculture et de l'article 47 de l'arrêté sur le statut du lait durant
la période d'application du nouvel arrêté sur l'économie laitière (art, 12, 4e al.).

On a constaté combien il est difficile de rétablir, au moyen des dispositions pénales actuelles, l'ordre légal lors d'infractions aux prescriptions relatives à l'économie laitière. Leur manque d'efficacité apparaît en particulier dans les cas où aucune mesure administrative supplémentaire ne peut être prise. C'est pourquoi l'article 8 prévoit la possibilité de porter de 300 à 1000 francs le maximum de l'amende qui peut être infligée. En même temps, le paragraphe 2 du 1er alinéa comble une lacune en déclarant punissable celui qui, intentionnellement, contrevient aux dispositions régissant non seulement le captage et la distribution, mais aussi la vente du lait. Cette modification est imposée par l'entrée en vigueur de l'article 21 bis de l'arrêté sur le statut du lait, qui autorise les organes officiels à fixer le prix de vente minimum du lait pasteurisé. Or toute

580 décision de cet ordre équivaut indiscutablement à une prescription en matière de vente de lait de consommation. La version actuelle des articles 111, 2e alinéa, de la loi sur l'agriculture et 47 de l'arrêté sur le statut du lait ne permettaient pas de déterminer si le terme «distribution» comprend aussi la vente du lait aux consommateurs. Notre projet clarifiera cette situation.

Les dispositions des articles 9 et 10 du projet ont été reprises telles quelles de l'arrêté sur l'économie laitière 1962. Elles ne donnent lieu à aucune remarque.

L'article 11, qui permettra de lutter contre l'emploi abusif de certificats reconnus par les autorités, comblera une lacune de la législation concernant l'économie laitière.

L'article 12 limite à cinq ans la durée de validité du nouvel arrêté. Les arrêtés de 1957 et 1958 sur le financement, ainsi que les arrêtés sur l'économie laitière de 1959 et 1962, ne prévoyaient pas une aussi longue durée. Les premiers perdirent leur validité une année déjà après leur entrée en vigueur, alors que celle de l'arrêté de 1959 fut portée à trois ans; l'arrêté de 1962, en revanche, est applicable plus longtemps, ayant été prorogé d'une année en 1964. La durée de validité relativement courte des arrêtés édictés jusqu'à présent s'explique par le fait qu'on ne savait pas si les mesures complémentaires seraient nécessaires moins longtemps, ni quel serait leur effet. Puisqu'il est maintenant certain qu'on ne saurait y renoncer à brève échéance et que sont connues leurs répercussions pour les producteurs, les consommateurs et la Confédération, il nous semble indiqué de prévoir une durée de validité plus longue. En conséquence, nous proposons de la fixer à cinq ans, ce qui laisserait un certain répit, tout en assurant la continuité du régime. Les mesures prévues pourraient en outre développer leurs effets dans diverses conditions de production et de placement.

B, Les dispositions de l'arrêté 1962 non reprises dans le projet

1. Contribution aux frais des détenteurs de bétail bovin de la région de montagne Les dispositions en la matière figurent actuellement dans la loi du 9 octobre 1964 instituant une contribution aux frais des détenteurs de bétail bovin de la région de montagne (RO 1965, 73). Elles ne doivent donc plus être reprises dans un nouvel arrêté sur l'économie laitière, A ce sujet, nous renvoyons encore au chapitre consacré à l'arrêté en vigueur.

2. Contribution aux engraisseurs de veaux en dehors de la région de montagne Dans sa forme primitive, l'article 7 de l'arrêté 1962 instituant une contribution aux frais des: engraisseurs. professionnels de veaux en dehors de la région de montagne, qui,, du fait de leur isolement, devaient utiliser leur lait pour l'engraissement et. ne pouvaient mettre dans le commerce ni lait ni produits

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laitiers. La raison pour laquelle cette disposition n'a été incluse dans l'arrêté susmentionné que lors de l'examen du projet par les chambres était que ces encaisseurs ont à faire face à des conditions de production pareilles ou semblables à celles des agriculteurs de la zone de montagne I, qui touchaient la contribution. En 1964, des difficultés de délimitation obligèrent d'abandonner les critères valables pour le versement de la contribution (caractère professionnel de l'engraissement, éloignement de l'exploitation). Le cercle des bénéficiaires en fut élargi, mais en même temps, l'argument des conditions de production plus difficiles perdit de son importance. Actuellement, c'est l'idée de l'utilisation de lait entier pour l'engraissement qui prévaut, puisque les engraisseurs de veaux en dehors de la région de montagne ne touchent la contribution que s'ils ne mettent ni lait ni produits laitiers dans le commerce durant l'exercice.

Le maintien en vigueur de l'article 7 a également perdu de sa signification du fait que nous avons exonéré les succédanés du lait importés ou fabriqués dans le pays des taxes qui avaient été prescrites à l'époque afin d'encourager l'utilisation de lait entier pour l'engraissement et l'élevage des veaux. Depuis lors, les encaisseurs de veaux en dehors de ladite région recourent d'ailleurs, eux aussi, davantage aux succédanés du lait pour accroître le volume de leur production. Ils peuvent sans préjudice utiliser leur lait entier pour l'engraissement dans leur propre exploitation.

La contribution fédérale aux frais des engraisseurs de veaux en dehors de la région de montagne atteint aujourd'hui 0,4 million de francs par année. Elle n'a en général eu que peu d'effet jusqu'à présent. Du reste, à notre avis, cette mesure a peu de portée dans notre économie agricole; nous tenons à souligner à ce sujet que la Confédération doit en principe, dans sa politique agricole, se borner à en définir les grandes lignes. Il faudrait aussi renoncer à toute mesure occasionnant un travail administratif sans rapport avec leur effet. Etant donné le manque de personnel et de moyens financiers, nous jugeons indiqué d'apporter certaines simplifications.

Nous fondant sur ces considérations, nous renonçons à inclure dans le nouvel arrêté les bases légales instituant une contribution aux frais
des engraisseurs de veaux en dehors de la région de montagne.

3. Utilisation de lait entier pour l'élevage et l'engraissement des veaux En vertu de l'article 8 de l'arrêté 1962, nous prenons les mesures nécessaires en vue d'assurer l'utilisation du lait entier pour l'engraissement et l'élevage des veaux. A cet effet, nous pouvons percevoir des taxes sur les succédanés du lait importés ou fabriqués dans le pays, prévoir les mesures administratives nécessaires et notamment prescrire des contrôles. Invoquant cette disposition, nous avons, en mars 1963, frappé ces succédanés d'une taxe de 35 francs par quintal (RO 1963, 223 et 228), qui fut réduite à 25 francs en janvier 1964 (RO 1964, 21 et 24).

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Quant à savoir si les taxes prévues à l'article 8 permettront d'atteindre le but fixé, c'est une question controversée pour des raisons relevant de l'économie d'entreprise. Leur recouvrement présente en outre des difficultés. L'expérience montre aussi que l'emploi judicieux de succédanés du lait pour l'engraissement n'entraîne pas une diminution notable de la qualité de la viande. Pour ces raisons, mais plus particulièrement dans l'intérêt d'une production de viande de veau moins onéreuse, nous avons, par nos arrêtés du 5 octobre 1964 (RO 1964, 879 et 880), applicables avec effet au 1er du même mois, renoncé à cette taxe. Les mêmes raisons s'opposent à l'insertion d'un texte légal correspondant.

V. LES CONSÉQUENCES FINANCIÈRES DU PROJET D'ARRÊTÉ La nouvelle manière de calculer la part des pertes à la charge des producteurs de lait commercial aura certaines conséquences d'ordre financier. Comme ce fut le cas jusqu'ici, elles ne concernent en principe que la couverture, par la Confédération et les producteurs, des pertes supplémentaires de la mise en valeur qui subsisteront après que seront épuisés le produit des taxes perçues en vertu de l'article 26 de la loi sur l'agriculture et de l'article 6 de notre projet, la contribution initiale de la Confédération et les moyens financiers engagés conformément à l'article 4 dudit projet. Ces conséquences sont illustrées par le tableau n° 12. La charge supplémentaire ou réduite des producteurs de lait commercial qui y est indiquée se traduit inversement, pour la Confédération, par une participation correspondante. L'une ou l'autre des possibilités dépend dans une large mesure des conditions de production et de placement.

Rien ne permet de prévoir les conséquences d'ordre financier qui découleront de l'article 4. Comme on sait, cet article équivaut à une reconduction partielle de l'article 11 de l'arrêté de 1962. Ainsi que nous l'avons vu ailleurs, l'article 11 oblige la Confédération à prélever chaque année sur ses ressources générales environ 70 millions de francs pour contribuer aux frais résultant de la mise en valeur des produits laitiers. On ne sait pas encore si et de combien cette somme pourra être réduite à l'avenir. D'autre part, on ne peut dire maintenant déjà comment, au cas où il faudrait majorer le prix de base du lait, nous ferons ultérieurement
usage de notre compétence d'imposer à la caisse publique, jusqu'à concurrence de 80 millions de francs, les hausses du prix de base non reportées sur les prix des produits laitiers. Cela dépendra de ce que la limite des 80 millions sera atteinte ou non; d'autre part cependant, les conditions de placement à l'époque pour ce qui est des produits laitiers seront déterminantes.

Nous avons vu qu'il fallait renoncer à verser la contribution aux engraisseurs de veaux en dehors de la région de montagne, ce qui réduira les dépenses de la Confédération de quelque 0,4 million de francs.

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VI. LES TRAVAUX PRÉPARATOIRES EN VUE DU NOUVEL ARRÊTÉ SUR L'ÉCONOMIE LAITIÈRE A. L'avant-projet de la division de l'agriculture du 22 juillet 1965 Le 22 juillet 1965, le département de l'économie publique a soumis à l'appréciation des gouvernements cantonaux et des associations économiques un rapport de la division de l'agriculture sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier de la Confédération dans le secteur laitier à dater du 1er novembre 1966, ainsi qu'un projet d'arrêté fédéral.

L'avant-projet différait sur les points suivants de celui que nous vous présentons: il proposait que les producteurs de lait commercial participent jusqu'à concurrence de 20 pour cent aux dépenses non couvertes résultant de la mise en valeur du fromage et des conserves de lait et de 50 pour cent dans le cas du beurre. En outre, la disposition régissant la couverture des pertes de la mise en valeur des produits laitiers par suite du non-report des hausses du prix de base du lait ne prévoyait aucune limite au montant à prélever , sur les ressources générales de la Confédération. L'avant-projet contenait aussi une disposition qui devait nous autoriser à percevoir auprès de tous les producteurs de lait commercial une taxe de 0,1 à 0,2 centime par kilo/litre en vue du financement de mesures spéciales en faveur du placement. Enfin, la disposition de l'article 11 de notre projet (dispositions spéciales concernant les certificats reconnus par les gouvernements) n'y figurait pas.

Les gouvernements cantonaux et lesdites associations furent invités en même temps à répondre aux trois questions ci-après : La première question, qui portait sur la couverture des dépenses résultant des hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix de détail des produits laitiers, était ainsi conçue: Approuvez-vous l'adjonction, dans l'arrêté sur l'économie laitière 1966, de la disposition de l'article 4 de l'avant-projet ? Si tel n'est pas le cas, pour quelles raisons refusez-vous une reconduction de l'article 11 de l'arrêté fédéral de 1962? Comment, à votre avis, faudrait-il formuler cet article 4?

La seconde question, ayant trait à la perception d'une taxe sur le lait de consommation partiellement écrémé, était la suivante : Estimez-vous nécessaire et opportun de percevoir une taxe supplémentaire sur le lait de
consommation partiellement écrémé ou sur la crème laissée par la standardisation ? Si tel est le cas, faut-il lui donner le sens d'une contribution à la couverture des dépenses supplémentaires ou lui attribuer un caractère prohibitif ?

La troisième question avait pour objet le paiement, par la Confédération, d'une contribution initiale variable -- proposée par l'union centrale des producteurs suisses de lait -- aux dépenses supplémentaires. Aux yeux de l'union centrale, cette contribution devrait être calculée d'après la quantité de lait importée, durant la période de compte entrant en considération, sous la forme de produits, à l'exception du beurre, déduction faite d'une quantité de base d'un

584 million de quintaux par an. On obtiendra la contribution initiale de la Confédération en multipliant la quantité de lait restante par le prix de base du lait réduit de moitié. Les milieux consultés furent invités à motiver de façon détaillée l'acceptation ou le rejet de cette proposition.

B. Les avis des cantons et des associations économiques 1. Les avis des cantons Vingt-trois cantons ont répondu. Le principe de la mise à disposition, comme par le passé, de moyens financiers supplémentaires pour encourager le placement dans le pays n'est pas contesté. Celui de la participation des producteurs de lait commercial aux pertes est aussi largement approuvé. Dans la majorité des avis exprimés, on considère qu'il n'est pas souhaitable de modifier le système de répartition (moyenne) des charges au détriment des producteurs.

La plupart des cantons ont approuvé l'idée de différencier le système de participation des producteurs aux pertes scion le mode d'utilisation du lait (fromage, conserves de lait, beurre). Un canton souhaite le maintien du système, appliqué avec succès jusqu'ici, de la répartition d'après l'origine des pertes (ventes dans le pays/exportation) ; une petite minorité, en revanche, accepte la nouvelle formule à la seule condition que le prix de garantie pour le beurre ne soit plus amputé, La contribution initiale de 10 millions de francs fixée au 1er alinéa de l'article 2 est taxée de trop faible par presque tous les cantons consultés dû fait que, comparée à l'avance consentie actuellement, elle met les producteurs en plus mauvaise posture. La plupart des cantons parlent d'une contribution initiale de 20 millions, mais la considèrent à la fois comme un maximum et un minimum. L'un ou l'autre avancent le chiffre de 40 millions; dans un cas, on parle même de 50 millions de francs. Un canton souhaite que la contribution soit limitée à 10 millions, alléguant que le fait de la fixer à un niveau trop élevé risquerait d'affaiblir le sens de la participation des producteurs aux pertes (orientation de la production). Mais la plupart des cantons préfèrent à la contribution initiale fixe un système, préconisé par l'union centrale des producteurs suisses de lait, de contribution variant selon l'ampleur des importations de produits laitiers concurrents; ils invoquent à l'appui le caractère d'interdépendance qui existe entre l'importation de produits laitiers et les dépenses qui résultent de la mise en valeur de produits indigènes de même genre. Un gouvernement cantonal s'en inspire d'ailleurs pour proposer la perception d'un supplément de prix sur le fromage d'origine étrangère. Trois
cantons s'opposent énergiquement à toute connexion de la contribution initiale et des importations de produits laitiers pour les raisons que voici : ils l'assimilent à une mesure de nature à freiner les importations; les produits importés ne sont pas nécessaire-

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ment un obstacle au placement des produits du pays à des prix couvrant les frais, et, enfin, il n'est pas possible d'établir une relation mathématique incontestable entre les importations et la contribution initiale.

Le principe de la perception d'une taxe conditionnelle de 3 centimes au plus par kilo/litre de lait commercial sur lequel est perçu le montant à assurer (art. 3, 2e al.) a été rejeté par douze cantons. Leur proposition de limiter cette taxe, y compris la taxe en faveur de la publicité, à 1,5 centime (onze cantons) ou à 2 centimes (un canton), a principalement pour but de réduire la part des pertes imposée aux producteurs. C'est la raison pour laquelle on a demandé de divers côtés que les pertes résultant de la mise en valeur des produits, et dont l'ampleur implique la nécessité de majorer la taxe au-delà de la limite indiquée, soient couvertes à l'aide des ressources générales de la Confédération. Un canton de la Suisse centrale défend l'idée que les producteurs qui livrent beaucoup de lait devraient être mis à plus forte contribution. Aussi propose-t-il que l'attribution fixe soit portée à 15 000 kilos/litres par exploitation et que la taxe soit échelonnée d'après le volume de lait sur lequel est perçu le montant que doit assurer un producteur. Un autre canton, où prédomine la petite exploitation paysanne, souhaite aussi que l'attribution fixe soit équitablement relevée.

Quant aux autres cantons, ils ont accepté expressément ou tacitement le principe actuel d'une attribution fixe de 8000 kilos/litres (art. 3, 1er al.).

Comme on sait, l'avant-projet prévoyait la reconduction illimitée de la disposition de l'article 11 de l'arrêté et) vigueur, qui n'imposait aucun plafond au montant qui pouvait être prélevé sur les ressources générales de la Confédération pour couvrir les pertes de la mise en valeur des produits laitiers par suite du non-report des hausses du prix de base du lait. Les cantons ont approuvé une telle réglementation pour diverses raisons (état du marché, question d'ordre social et commercial), ou encore pour des considérations purement politiques. Un seul grand canton urbain exprime quelques appréhensions de principe: par cette disposition, on devrait, estime-t-il, chercher à réduire progressivement les fonds que la Confédération prélève sur ses ressources générales au
titre de la garantie des prix. Divers cantons soulignent que la solution qui leur a été soumise tient compte de toutes les éventualités et qu'en outre, suivant la situation, elle permet de reporter successivement sur les prix des produits laitiers les hausses du prix de base du lait non imposées aux consommateurs. Un canton souhaite que l'article 4 soit rédigé de façon à illustrer le fait que les bénéficiaires de cette disposition sont bien plus les consommateurs que les agriculteurs. Cinq cantons proposent que les hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix de détail non seulement puissent, mais encore doivent être supportées par la caisse publique.

Les autres dispositions de l'avant-projet d'arrêté ont été approuvées sans restriction par les gouvernements cantonaux. Un canton suggère une durée de validité de l'arrêté fixée à dix ans.

586 Invoquant le fait que l'emploi de succédanés du lait pour l'engraissement et l'élevage des veaux accroît la production de lait commercial et par là même les pertes résultant de la mise en valeur, quatre cantons se sont prononcés pour le maintien de la base légale permettant de percevoir une taxe sur ces produits.

D'autre part, trois cantons désapprouvent l'idée de renoncer au paiement de la contribution aux engraisseurs de veaux en dehors de la région de montagne.

A deux exceptions près, tous les cantons approuvent pour le moins la création de la base légale autorisant la perception d'une taxe sur le lait de consona mation partiellement écrémé, faisant valoir le fait que la préparation d'un lait de consommation standard augmente la production de crème et de beurre et par conséquent les pertes de la mise en valeur dans le compte laitier. Au lieu d'être prohibitive, la taxe devrait revêtir le caractère d'une péréquation financière.

2. Les avis des associations économiques Les avis des groupements économiques présentent moins d'uniformité que ceux des cantons. La nécessité de mesures complémentaires d'ordre économique et financier n'est pas contestée. Le principe de faire participer les producteurs aux pertes, au titre de mesure propre à orienter Ja production, est généralement approuvé. Pour ce qui est de l'ampleur de la quote-part, les 24 groupements .

économiques qui ont exprimé leur avis ont naturellement émis des propositions divergentes.

Les groupements non paysans comme les représentants de l'agriculture ont en principe approuvé le nouveau barème de répartition des pertes résultant de la mise en valeur (art. 2 du projet). Les associations paysannes et celles qui leur sont rattachées le considèrent cependant comme difficilement applicable du fait que des raisons d'ordre technique et d'organisation empêchent d'augmenter la fabrication de fromage et de conserves de lait et que, dès qu'un volume donné est dépassé comparativement à celui de beurre fabriqué, il ne faut plus guère en attendre des avantages pécuniaires. Mais les groupements centraux de l'agriculture tiennent la nouvelle réglementation prévue pour plus acceptable que le système actuel de différenciation entre les pertes de la mise en valeur dans le pays et celles qui résultent de l'exportation; aussi exigent-ils qu'elle n'entraîne
plus aucune diminution de la garantie du prix du beurre. Quant aux acheteurs de lait, ils voient dans le nouveau régime le moyen de désavantager la fabrication de beurre, qui ne tient nullement compte de la situation réelle.

Les milieux syndicaux, commerciaux, industriels et patronaux appprouvent la nouvelle méthode de calculer la part des pertes imposées aux producteurs, en particulier parce qu'elle place la fabrication du beurre au second plan. Divers cercles, à vrai dire, taxent d'inefficaces la clé de répartition proposée pour atteindre ce but, comme aussi le principe de faire participer, à titre de mesure propre à orienter la production, les producteurs aux pertes résultant de la mise en valeur. Ils estiment nécessaire de porter cette quote-part à 30 pour cent dans le cas du fromage et des conserves de lait, et progressivement jusqu'à 80 pour cent dans celui du beurre qui est vendu dans le pays.

587

La question de la contribution initiale de la Confédération a, elle aussi, donné lieu à des avis très divergents. Les groupements paysans et les milieux qui ont des liens étroits avec eux proposent un montant qui varierait d'après le volume des importations de produits agricoles concurrents ; ils en voient la raison dans le fait que les dépenses en faveur du placement des produits laitiers dépendraient non seulement de l'attitude des producteurs, mais encore dans une très forte mesure de ce que des produits semblables nous parviennent de l'étranger à des prix en partie sensiblement réduits par les fonds publics des pays fournisseurs.

Si une protection insuffisante ou des produits étrangers concurrents offerts à prix réduits mettaient davantage encore en péril le prix de base du lait, la Confédération se verrait contrainte d'accroître d'office ses prestations pour stimuler le placement et couvrir la différence de prix. Cette proposition étant écartée, les producteurs exigent, invoquant l'évolution incertaine de la politique commerciale internationale, que la contribution initiale de la Confédération soit portée de 10 jusqu'à. 40 millions de francs. Un groupement des consommateurs n'accepte le montant de 10 millions que si l'attribution fixe est relevée à 10 000 kilos/ litres. Elle rejette l'idée d'une contribution initiale variable, notamment pour des raisons de politique commerciale. Les autres associations économiques également qui n'ont pas d'intérêts paysans à défendre s'opposent à une contribution initiale variable, et cela pour différents motifs. Certaines doutent qu'il y ait un rapport réel entre les importations de produits laitiers concurrents et la contribution initiale. On ne voit en outre pas dans ces importations un obstacle permanent à la mise en valeur du lait à des prix couvrant les frais. Quant aux représentants des consommateurs, ils estiment que ce système offrirait une meilleure protection contre les lois régissant la liberté du commerce. Us ajoutent encore que la contribution initiale proposée par l'union centrale des producteurs suisses de lait obligerait la Confédération à trop s'engager financièrement et paralyserait ainsi la volonté des producteurs de rationaliser leur entreprise, comme aussi le sens de leurs responsabilités dans les domaines de la production et de la
politique des prix dans le secteur laitier. A peu près la moitié des groupements économiques qui n'ont pas d'intérêts paysans à défendre se prononcent expressément pour une contribution initiale de 10 millions de francs, qui pourrait servir aussi à couvrir les dépenses à l'exportation.

Les représentants des producteurs de lait et les milieux qui ont des liens étroits avec eux demandent que la taxe conditionnelle prévue à l'article 3 du projet soit fixée à 1,5 centime au plus par kilo/litre de lait sur lequel est perçu le montant à assurer. C'est à l'aide exclusive des ressources générales de la Confédération qu'il faudrait, ajoutent-ils, couvrir les pertes qui provoqueraient une hausse de cette taxe. Cette proposition tend à atténuer la part des pertes imposées aux producteurs. La plupart des autres groupements économiques ne s'opposent pas à la réglementation prévue régissant la taxe conditionnelle. Une association se demande, certes, si le capital d'exploitation des paysans ne s'en trouverait pas inutilement affecté, alors qu'un autre groupement se rallie à notre proposition à la seule condition que l'attribution fixe soit portée à 10 000

588

kilos/litres. Il donnerait, à vrai dire, la préférence à une taxe conditionnelle de 2 centimes au maximum. Quant aux représentantes de l'association des paysannes, elles se demandent si, l'attribution fixe étant portée à 15 000 kilos/ litres, il ne serait pas possible d'échelonner la taxe conditionnelle de 3 centimes par kilo/litre d'après les fournitures d'un producteur.

Près de la moitié des groupements économiques approuvent la formule de l'article 4 qui leur a été soumise (en particulier les représentants des consommateurs, des milieux syndicaux et des producteurs), ou même une version qui engage la Confédération à prendre à sa charge dans tous les cas les hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix de détail (producteurs). Ils invoquent à l'appui les conditions de vente pour les produits laitiers, la lutte contre le renchérissement et la prise en considération de la situation des consommateurs. On n'a pas manqué d'insister sur les conséquences d'une renonciation à l'article 4 sur le revenu des producteurs. Bien qu'on accepte cette disposition de l'avant-projet, on relève clairement, dans certains avis, que si elle est maintenue, son application exigera la plus grande prudence et qu'il faudra créer les conditions qui permettront de supprimer par étapes les hausses du prix de base du lait non reportées sur les produits laitiers. Six groupements qui défendent notamment les intérêts des salariés, des importateurs et des maisons du commerce de gros souhaitent que les contributions fédérales soient limitées à 70-80 millions de francs par année; deux d'entre eux estiment que les moyens financiers excédant ce montant devraient être mis à la charge des producteurs. Un autre groupement, enfin, demande que ces contributions soient supprimées d'ici à fin 1971. Les milieux du commerce, de l'industrie et du patronat rejettent en principe l'idée de l'affectation des ressources générales de la Confédération pour soutenir le marché indigène. Ils exigent par conséquent que les futures hausses du prix de base du lait soient dans tous les cas mises à la charge des consommateurs et que la contribution fédérale versée depuis 1962 soit supprimée par étapes. De l'avis de deux groupements économiques, les hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix des produits laitiers devraient être
couvertes par les ressources générales de la Confédération et par les producteurs. Une association voudrait qu'on renonce à l'article 4, ce qui, à ses yeux, n'aurait pas pour effet de perturber durablement le marché.

La disposition, proposée dans l'avant-projet, concernant la taxe en faveur de la publicité a rencontré l'approbation générale. Une grande maison du commerce de détail demande à ce propos un contrôle plus efficace; elle souhaite en outre que soit connue l'affectation de la taxe en faveur de la publicité et que le budget en question soit soumis à la commission consultative pour l'exécution de la loi sur l'agriculture. Les représentants du commerce du lait proposent que cette taxe perçue auprès des producteurs soit portée à 0,2 centime par kilo/litre et qu'une partie soit mise à la disposition de leurs groupements en faveur de leur propre publicité.

Deux groupements des consommateurs souhaitent que les suppléments de prix ne soient plus perçus sur la glace comestible (art. 6).

589

Les autres dispositions du projet n'ont en principe donné Jieu à aucune observation. Toutefois, deux groupements économiques n'ont pu approuver que sous certaines réserves la durée de validité du projet (5 ans).

Une grande entreprise du commerce de détail demande la suppression de la taxe sur la crème (art. 26 de la loi sur l'agriculture; art. 26 et 27 de l'arrêté sur le statut du lait). Quant aux associations centrales des producteurs, elles demandent que la contribution aux frais des engraisseurs de veaux en dehors de la région de montagne continue à être versée, et que soit maintenue la disposition assurant l'utilisation de lait entier pour l'engraissement et l'élevage des veaux.

Les partisans et les adversaires de la base légale grevant d'une taxe le lait de consommation partiellement écrémé sont d'un nombre à peu près égal. Les premiers relèvent que le fait de préparer un lait standard accroît la production beurrière; c'est pourquoi, à leurs yeux, il conviendrait de faire participer les fabricants aux frais supplémentaires qui en résultent en les obligeant en cas de nécessité à acquitter une taxe qui n'aurait toutefois pas un caractère prohibitif.

Quant aux adversaires, ils font valoir que le lait standard répond à un besoin des consommateurs et qu'il est de nature à favoriser la vente du lait de boisson.

Ils estiment en outre que les conditions actuelles de placement sont telles, pour ce qui est du lait de consommation partiellement écrémé, qu'elles ne justifient nullement la perception d'une taxe compensatoire, qui pourrait de surcroît grever l'arrêté sur l'économie laitière d'une hypothèque politique.

C. Recommandations de la commission consultative

La commission consultative pour l'exécution de la loi sur l'agriculture s'est prononcée après avoir pris connaissance des avis formulés par la commission de spécialistes du lait, par les cantons et par les groupements économiques.

L'appréciation des diverses dispositions du projet variant en général dans les mêmes limites que les avis déjà exposés, les recommandations de la commission peuvent se résumer ainsi : Le principe de l'octroi, en cas de nécessité, de contributions fédérales supplémentaires pour faciliter le placement dans le pays des produits laitiers indigènes et celui d'une participation des producteurs de lait commercial aux pertes de la mise en valeur, au titre de mesure propre à régulariser la production, ne furent pas contestés. La commission approuva en principe le nouveau mode de calcul envisagé pour répartir ces pertes. Les milieux de l'industrie et du commerce proposèrent toutefois, afin de régulariser plus efficacement la production, de rédiger l'article 2 de manière à prévoir une participation progressive qui soit fonction de la production de lait. Cette proposition, tout comme celle des producteurs qui auraient voulu faire varier la contribution initiale de la Confédération suivant le volume de produits laitiers concurrents d?origine étrangère, ou tout au moins la maintenir à son montant actuel de 20 millions de francs, fut rejetée par la majorité des voix au profit de la solution préconisée par le

590 projet. Les producteurs exprimèrent une fois de plus le voeu de voir la taxe conditionnelle (art. 3) limitée à 2 centimes par kilo/litre de lait commercial sur lequel est perçu le montant à assurer, et les pertes qui auraient impliqué son augmentation mises à la charge de la Confédération.

De fortes divergences de vues apparurent à propos de l'article 4 tel qu'il était formulé dans Favant-projet. Selon l'avis d'un représentant de l'industrie et du commerce, il faut en principe rejeter toute idée de faire appel aux ressources générales de la Confédération pour couvrir les pertes résultant de hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix de vente des produits laitiers dans le pays; ces hausses se feraient ainsi désormais aux dépens du consommateur. Il faudrait aussi réduire par étapes les contributions fédérales, qui ont pris de plus en plus d'ampleur par suite de l'application de l'article 11 de l'arrêté sur l'économie laitière 1962. Le représentant du patronat aurait voulu que la Confédération les supprime d'ici à 1971. Un membre de la commission, parlant au nom des milieux de consommateurs, souhaita que les pertes dues aux hausses non reportées soient couvertes à l'aide des ressources générales de la Confédération et par une contribution des producteurs. Les représentants de ces derniers se rallièrent à la version de l'article 4 proposée par l'avantprojet, attendu qz'elle laisse toute latitude de couvrir les pertes dues à ces hausses soit par report sur les prix de détail des produits laitiers, soit intégralement au moyen des ressources générales de la Confédération soit encore par ses ressources générales et par une contribution des producteurs.

L'augmentation jusqu'à 0,2 centime par kilo/litre de lait commercial, de la taxe de 0,1 centime en faveur de la publicité (art. 5 de l'avant-projet) ne suscita aucune opposition. Un membre de la commission demanda que des comptes soient publiés sur l'emploi des fonds ainsi récoltés.

Le maintien des bases légales permettant de percevoir des taxes sur les succédanés du lait (art, 8 de l'arrêté sur l'économie laitière 1962) fut recommandé par les représentants des producteurs, tandis que la plupart de ceux des milieux non paysans s'abstinrent de se prononcer. Quant à la proposition faite par des groupements paysans en vue de conserver
l'octroi de contributions aux frais des engraisseurs de veaux en dehors des régions de montagne (art. 7 de l'arrêté sur l'économie laitière 1962), elle fut rejetée à faible une majorité.

La commission, ralliant les voix des producteurs, du commerce, de l'industrie et du patronat, recommanda, à la majorité, d'instituer les bases légales qui autoriseraient la perception d'une taxe non prohibitive sur le lait de consommation partiellement écrémé, D. Appréciation des avis exprimés

Certaines vues exprimées lors des consultations appellent des remarques.

/. La participation des producteurs aux pertes Le chapitre IV a mis en évidence l'opportunité de maintenir en principe le système actuel, qui a donné satisfaction. On peutj dans l'absolu, en dire autant

591

des proportions fixées pour la participation des producteurs de lait commercial aux pertes de la mise en valeur. Mais il faut bien, sur certains points, nous écarter de la solution adoptée jusqu'ici puisque, pour déterminer cette participation, nous souhaitons abandonner la méthode fondée sur l'origine des pertes (distinction entre ventes opérées dans le pays ou à l'étranger) et proposons d'appliquer désormais celle qui repose sur une différenciation des modes de mise en valeur. La production beurrière se trouverait ainsi effectivement désavantagée par rapport à la fabrication'de fromages et de conserves de lait, ce qui nous fournit un moyen un peu plus efficace de régulariser la production sans que la participation des producteurs aux pertes doive, dans la moyenne des années, dépasser son niveau actuel. En améliorant cet instrument destiné à orienter la production, nous répondons en partie aux voeux exprimés par divers milieux.

2. Le montant de la taxe conditionnelle La demande de limiter la taxe conditionnelle à 1,5 centime par kilo/litre tend certes à alléger le poids de la participation aux pertes imposées aux producteurs de lait commercial, mais nous ne pouvons y donner suite. En effet, la limite de 3 centimes par kilo/litre qui est proposée pour la taxe résulte, en toute logique, des dispositions de l'article 2. Si nous voulions accéder à la requête, il nous faudrait les retoucher en conséquence, ce qui restreindrait leur portée régulatrice dans une mesure inadmissible. A l'avenir comme par le passé, la participation doit se régler sur les pertes de la mise en valeur. Les risques que ces dispositions font courir à l'agriculture, on l'a vu plus haut par les statistiques fournies à l'appui de nos considérations, ne sont pas très grands si la production laitière se maintient dans des limites raisonnables.

3, La contribution initiale de la Confédération Toute majoration du montant de la contribution initiale de la Confédération comme aussi l'adoption du système de contributions variables proposé par l'union centrale auraient également pour effet de restreindre dans des proportions inacceptables la portée conférée par notre projet à l'article 2 en tant qu'instrument destiné à régulariser la production. Notre message du 1er juin 1962 concernant les mesures complémentaires d'ordre économique et
financier à prendre dans le secteur laitier (FF 1962,1, 1197) avait déjà écarté toute idée de fixer un montant initial variable. Notre avis n'a pas changé. Aujourd'hui encore, nous considérons qu'il n'y a guère moyen d'établir une relation mathématique incontestable entre les importations et ce montant initial, que ces importations n'excluent pas nécessairement une utilisation du lait indigène qui couvre les frais de production et que l'augmentation du montant initial ne se justifierait pas toujours en cas d'accroissement des importations. De plus, la méthode préconisée par l'union centrale pour le calcul du montant initial est conçue de telle manière que les producteurs ne seraient pour ainsi dire jamais tenus de participer aux pertes de la mise en valeur même en présence de

592 nouvelles hausses du prix de base du lait et d'un déficit global encore beaucoup plus élevé; des raisons évidentes nous dissuadent de nous rallier à ces vues.

4, La couverture des hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix de détail Dans les avis émis par les cantons et les groupements économiques, ainsi que par la commission consultative, on a vu combien était différemment appréciée la question du recours aux ressources générales de la Confédération pour couvrir les hausses du prix de base du lait non reportées sur les prix des produits laitiers au sens de l'article 4 de l'avant-projet. Notre proposition d'en mettre à disposition à cet effet dans une mesure limitée constitue un compromis. Il donne en effet la possibilité de continuer à recourir auxdites ressources pour couvrir les majorations non reportées sur les prix de détail depuis le 1er novembre 1962. On préviendra ainsi tout marasme, comme aussi une diminution du revenu des producteurs de lait commercial, ce qui risquerait de se produire si l'on renonçait à l'article 4 de notre projet. En réduisant et c'est là le but visé - l'ampleur des dépenses actuelles, on crée en outre la possibilité de couvrir au besoin, au moyen des ressources générales de la Confédération et sans le concours des producteurs de lait commercial, de futures majorations non reportées sur les prix de détail des produits laitiers.

Nous considérons cependant, soit dit une fois encore, qu'il faudra faire preuve de réserve en usant de cette compétence, qui est limitée comparativement à la réglementation actuelle. Ainsi que nous l'avons déjà relevé dans un:autre ordre d'idées, ce sont des raisons de politique financière, comme aussi la nécessité d'orienter la production qui obligent à s'écarter du régime en vigueur.

5. La perception d'une taxe sur le lait de consommation standard L'étude du nouvel arrêté sur l'économie laitière 1966 a amené divers milieux à demander la création d'une base légale permettant de prélever une taxe non prohibitive sur le lait partiellement écrémé.

En cas de pénurie, la standardisation du lait de consommation permettrait simultanément, par l'écrémage partiel, d'obtenir d'importantes quantités de beurre et de vendre ensuite ce lait à bas prix pour la boisson. Le placement du beurre s'étant révélé difficile dans plusieurs pays
européens, ceux-ci tentèrent, après la guerre, de relever la teneur en matière grasse du lait de consommation, qui avait été abaissée, ou d'implanter sur le marché la vente d'une seconde qualité de lait additionné de matières grasses ou ayant une teneur normale.

En Suisse, nous avons de tout temps eu à coeur de fournir à la consommation du lait entier. Même pendant la guerre, nous nous sommes abstenus de le standardiser. Le lait pasteurisé standard mis sur le marché vers la fin de septembre 1964 par une grande entreprise de vente en détail puis traité et distribué par des fédérations régionales permet, par abaissement de sa teneur en matière'

593

grasse d'environ 3,8 à 2,8 pour cent, d'obtenir à peu près 12 grammes de beurre par kilo de lait. La vente de lait de consommation standard ne grève toutefois pas nécessairement le compte laitier. C'est même exactement l'effet inverse qui se produit quand elle fait augmenter la consommation. Mais il se pourrait que l'écrémage partiel du lait de consommation soit une source de difficultés accrues sur le plan général de la mise en valeur. A l'origine, on a cru voir s'ouvrir des perspectives favorables au placement de ce lait parce qu'il coûte moins cher que le lait pasteurisé entier, offre, pour une différence de prix minime, des avantages sur le lait ouvert et ne se distingue, pour la plupart des consommateurs, du lait pasteurisé entier ni à la vue ni au goût. Or la vente de ce lait standard a pris moins d'essor qu'il n'était prévu. En juin 1965, elle atteignit environ 2 pour cent de la consommation totale, proportion qui tend en général à baisser depuis lors. Le placement du lait pasteurisé partiellement écrémé n'implique pas, à l'heure actuelle, la nécessité impérieuse d'instituer une taxe visant à contribuer à la couverture de pertes supplémentaires de mise en valeur, et ce ne sera probablement pas davantage le cas ces prochaines années. A notre avis, il est donc préférable de renoncer à la création de la base légale requise pour la perception de cette taxe.

*

*

*

Nous fondant sur les considérations qui précèdent, nous avons l'honneur de vous recommander d'adopter le projet ci-joint d'arrêté fédéral sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (arrêté sur l'économie laitière 1966).

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 3 décembre 1965.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Tschudi 16589

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

Feuille fédérale. 117« année. Vol. III.

40

594 (Projet)

Arrêté fédéral sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (Arrêté sur l'économie laitière 1966)

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 31 bis, 3e alinéa, lettre b, 32 et 64bis de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 3 décembre 1965, arrête: Article premier Généralités 1

Le Conseil fédéral peut verser des contributions supplémentaires pour faciliter le placement dans le pays des produits laitiers indigènes, si le rendement des taxes perçues en vertu de l'article 26, 1er alinéa, lettre b, de la loi sur l'agriculture du 3 octobre 1951l), ainsi que de l'article 6 du présent arrêté ne suffit pas.

2 Les fonds nécessaires à cet effet sont fournis avant tout par le produit des suppléments de prix perçus en vertu de l'article 19 de la loi sur l'agriculture en tant qu'il n'est pas affecté à d'autres fins que précise la législation agricole et, s'il ne suffit pas, par les ressources, générales de la Confédération.

3 L'octroi de contributions supplémentaires implique pour les producteurs de lait commercial l'obligation de prendre les mesures d'entraide qu'on peut attendre d'eux (reprise de quantités normales de produits laitiers à des prix raisonnables) et pour l'union centrale des producteurs suisses de lait et ses sections, celle d'arrêter des mesures spéciales en faveur du placement (étude des marchés, publicité et mise en vente de nouveaux produits).

4 Le Conseil fédéral peut prendre des dispositions pour que les groupements de l'économie laitière s'acquittent de manière appropriée des tâches qui leur sont confiées par -l'arrêté sur le statut du lait.

!) RO 1953, 1095.

595

Art, 2 Participation des producteurs aux pertes 1 Le produit des taxes prévues à l'article premier, 1er alinéa, du présent arrêté sert en premier lieu à couvrir les dépenses de la Confédération pour le placement des produits laitiers dans le pays et à l'étranger. La Confédération verse ensuite une contribution initiale de 10 millions de francs.

2 Un solde de dépenses éventuel après épuisement des moyens prévus au 1er alinéa est couvert à l'aide des ressources générales de la Confédération et, au titre de mesure propre à orienter la production, par une contribution des producteurs de lait commercial. Il est réparti en proportion de la dépense totale résultant du placement du fromage et des conserves de lait, d'une part, et du beurre, d'autre part, 3 Les producteurs de lait commercial assument : a. 10 pour cent de la dépense non couverte résultant de la mise en valeur du fromage et des conserves de lait; b. 60 pour cent de la dépense non couverte résultant de la mise en valeur du beurre, 4 L'article 4 est réservé.

Art. 3

Calcul et encaissement de la part des producteurs 1

La part éventuelle des producteurs à la couverture des contributions supplémentaires nécessaires au sens de l'article 2 est payée par chacun d'eux en proportion de la quantité de lait mise dans le commerce au cours d'une période de compte. L'attribution fixe de 8000 kilos/litres est exceptée. La période de compte commence le 1er novembre et se termine le 31 octobre de l'année suivante.

2 Pour assurer la part des producteurs au sens du 1er alinéa, il peut être prescrit une taxe conditionnelle de 2 centimes au plus par kilo/litre de tout le lait mis dans le commerce par un producteur. Si, par suite de pertes extraordinaires de la mise en valeur, la part présumée des producteurs excède 2 centimes, la taxe conditionnelle pourra être portée jusqu'à 3 centimes par kilo/litre. La part de cette taxe afférente à l'attribution fixe de 8000 kilos/litres est remboursée après la période de compte.

3 La différence entre le montant à assurer et la part prévue au 1er alinéa (reliquat du montant à assurer) est fixée après chaque période de compte, puis remboursée aux producteurs pour le lait commercial qu'ils ont livré en plus de l'attribution fixe de 8000 kilos/litres.

4 Le Conseil fédéral fixe le montant à assurer au début et, s'il y a lieu, au milieu de chaque période de compte. Il détermine après la fin de la période de compte le reliquat du montant à assurer qui doit être remboursé.

596

Art. 4

Majorations du prix de base du lait depuis le 1ST novembre 1962 Si les majorations du prix de base du lait effectuées depuis le 1er novembre 1962 ne sont pas reportées sur les prix de détail des produits laitiers, les pertes peuvent être couvertes annuellement jusqu'à concurrence de 80 millions de francs par les ressources générales de la Confédération.

Contribution en faveur de la publicité

Art. 5 1

Si l'union centrale des producteurs suisses de lait perçoit, auprès des producteurs affiliés à ses sections, une contribution par kilo/litre de Jait commercial pour l'exécution de mesures spéciales en faveur du placement, telles que l'étude du marché, la publicité et la. mise en vente de nouveaux produits (art. 1er, · 3e al.), le Conseil fédéral peut, dans le sens d'une compensation équitable des avantages et des charges, prescrire la perception, auprès des producteurs non fédérés, d'une taxe équivalente dont le rendement est mis à la disposition de l'union centrale au titre de contribution des producteurs non fédérés aux frais de ces mesures.

2

L'union centrale soumet aux autorités compétentes un budget et des comptes relatifs à l'utilisation du rendement de la contribution en faveur de la publicité, payée par les producteurs fédérés et non fédérés, 3 Le Conseil fédéral décide de l'affectation d'un reliquat éventuel de la taxe à laquelle il a assujetti les producteurs non fédérés.

Art. 6 Suppléments de prix sur la crème, la poudre de crème et les glaces comestibles importées 1

Le Conseil fédéral, après avoir entendu les intéressés et la commission consultative prévue à l'article 3 de la loi sur l'agriculture, peut grever de suppléments de prix les importations de crème des numéros 0401.20 et 0402.20 du tarif douanier, de glaces comestibles (glaces, crèmes glacées, etc.) et de poudre pour la préparation de glaces comestibles des numéros 1806.01 et 2107.20 dudit tarif.

2

Les suppléments de prix ne doivent pas excéder la différence existant entre les prix moyens à l'importation, marchandise rendue dédouanée franco frontière suisse, et les prix de gros moyens des produits comparables du pays.

3

L'Assemblée fédérale décide dans sa prochaine session si et dans quelle mesure les suppléments de prix doivent demeurer applicables.

597 4

Les modalités sont régies par l'article 31, 3° alinéa, de l'arrêté du 29 septembre 1953 !) sur le statut du lait.

5 Le rendement de ces suppléments de prix sert à réduire les prix des produits laitiers et des graisses comestibles du pays, comme aussi à faciliter leur placement.

Art. 7 Taxe spéciale pour qualité insuffisante Les producteurs qui mettent directement dans le commerce du lait ou des produits laitiers sans passer de comptes avec un centre collecteur sont tenus, conformément aux instructions sur le paiement du lait commercial selon ses qualités, de verser une taxe spéciale en lieu et place d'une éventuelle déduction de prix pour qualité insuffisante.

Art. 8 Dispositions pénales a. En général 1

Sera puni d'une amende de mille francs au plus, s'il ne s'agit pas d'une infraction plus grave, celui qui, intentionnellement, contrevient au présent arrêté ou aux prescriptions d'exécution qui s'y rapportent, celui qui, intentionnellement, contrevient aux prescriptions de l'Assemblée fédérale ou du Conseil fédéral concernant la production, la qualité, la livraison et l'utilisation du lait et des produits laitiers, ainsi que le captage, la distribution et la vente de lait de consommation (art. 26, 1er al., lettres a et d, de la loi sur l'agriculture), celui qui, intentionnellement, contrevient aux prescriptions de l'Assemblée fédérale ou du Conseil fédéral sur le prélèvement des taxes et suppléments de prix prévus à l'article 26, 1er alinéa, lettre b, de la loi sur l'agriculture et à l'article 6 du présent arrêté, celui qui, intentionnellement, contrevient aux prescriptions de l'Assemblée fédérale ou du Conseil fédéral en rapport avec les dispositions légales réservant à un organisme central le droit d'importer du beurre (art. 26, 1er al., lettre c, de la loi sur l'agriculture), celui qui, intentionnellement, produit ou met dans le commerce du lait ou des produits laitiers au mépris des prescriptions officielles ou approuvées par la Confédération (art. 59, 2e al., de la loi sur l'agriculture).

3 Si le contrevenant a agi par négligence, il est passible d'une amende de trois cents francs au plus.

!) RO 1953, 1132.

598 3

Celui qui, au sujet des contributions, donne intentionnellement des indications fausses ou fallacieuses sera puni des arrêts ou d'une amende de mille francs au plus, s'il ne s'agit pas d'une infraction plus grave. Si le contrevenant a agi par négligence, il est passible d'une amende de trois cents francs au plus.

4 Les articles 113 et 114 de la loi sur l'agriculture sont applicables.

5 Les avantages pécuniaires illicites et les contributions perçues indûment seront remboursés nonobstant l'application des dispositions pénales.

Art. 9 b. Infractions commises par des personnes morales, des sociétés et des entreprises individuelles 1

Lorsqu'une infraction a été commise dans la gestion d'une personne morale, d'une société en nom collectif ou en commandite, ou d'une entreprise individuelle, les dispositions pénales sont applicables aux personnes qui ont agi ou qui auraient dû agir en leur nom; la personne morale, la société ou le propriétaire de l'entreprise individuelle répondent toutefois solidairement du paiement de l'amende et des frais, à moins que la direction responsable ne prouve qu'elle n'a rien négligé pour que les personnes en cause observent les prescriptions.

2 Le 1er alinéa s'applique par analogie aux infractions commises dans les établissements et les administrations des collectivités de droit public.

3 Les personnes solidairement responsables ont les mêmes droits que les inculpés.

4 Une peine accessoire au sens de l'article 114 de la loi sur l'agriculture s'applique à la personne morale, à la société, à l'entreprise individuelle ou à la collectivité de droit public.

Art. 10 c. Poursuite pénale La poursuite pénale incombe aux cantons.

Art. 11 d. Dispositions spéciales concernant les certificats reconnus par les gouvernements 1 Le fait de proposer, de délivrer et d'utiliser, ainsi que de contrefaire ou de falsifier des certificats reconnus par les gouvernements, que la Suisse établit dans les limites de sa collaboration lors de l'importation, à un tarif de faveur, de produits laitiers dans des pays tiers, sera poursuivi et puni conformément aux dispositions concernant les certificats d'origine.

2 S'il y a présomption d'infraction aux dispositions relatives à ces certificats, le service chargé de les délivrer procède aux enquêtes nécessaires et

599 transmet le dossier, avec les moyens de preuve, à la division du commerce du département de l'économie publique. Ladite division procède, au besoin, à un complément d'enquête.

8 L'article 9, 1er à 3e alinéas, est applicable par analogie.

Art. 12

Durée de validité, dispositions transitoires 1 Le présent arrêté entre en vigueur le 1er novembre 1966 et a effet jusqu'au 31 octobre 1971.

2 Les dispositions d'exécution de la loi sur l'agriculture qui sont contenues dans l'arrêté sur le statut du lait et les ordonnances d'exécution de cet arrêté sont applicables, à moins que le présent arrêté et ses prescriptions d'exécution ne prévoient le contraire, 3 Les dispositions des arrêtés fédéraux du 19 juin 1959 *) et du 4 octobre 19622) sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière et les prescriptions d'exécution qui s'y rapportent restent applicables à tous les faits qui se sont produits durant leur validité.

4 Toutes les dispositions contraires au présent arrêté sont abrogées durant sa période de validité, en particulier les articles 111, 2e et 3e alinéas, de la loi sur l'agriculture et 47 de l'arrêté sur le statut du lait.

Art. 13

Exécution 1

Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution. Il peut faire appel à la collaboration des cantons et de la société coopérative suisse des céréales et matières fourragères, ainsi que des groupements économiques compétents.

2 Le Conseil fédéral est chargé de publier le présent arrêté conformément aux dispositions de la loi du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux.

16569

!) RO 1959, 936, 1746; 1960, 1695; 1961, 1171.

3) RO 1962, 1178; 1964, 236; 1965, 73.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (Du 3 décembre 1965)

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Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1965

Année Anno Band

3

Volume Volume Heft

52

Cahier Numero Geschäftsnummer

9367

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

31.12.1965

Date Data Seite

545-599

Page Pagina Ref. No

10 097 940

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