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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi fédérale modifiant la loi sur l'assurance-invalidité (Du 4 février 1970)

Monsieur le Président et Messieurs, Par ce message, nous avons l'honneur de vous soumettre un projet de loi fédérale modifiant la loi sur l'assurance-invalidité.

I. Introduction

Aux termes de l'article 19 de la loi fédérale du 19 juin 1959 (RO 1959 857) surl'assurance-invaliditéé (LAI), entrée en vigueur le 1er janvier 1960, et revisée partiellement le 5 octobre 1967 (RO 1968 29), des subsides sont alloués pour la formation scolaire spéciale des mineurs aptes à recevoir une instruction mais qui, par suite d'invalidité, ne peuvent suivre l'école publique ou dont on ne peut attendre qu'ils la suivent. A l'égard des débiles mentaux, l'administration a toujours interprété cette disposition ainsi : les subsides pour la formation scolaire spéciale doivent être alloués non seulement aux enfants débiles mentaux aptes au moins partiellement à acquérir des notions de lecture, d'écriture et de calcul, mais aussi à ceux qui ne peuvent être formés que sur le plan pratique et manuel (aptes à recevoir une formation pratique) ou même à ceux qui ne sont capables d'apprendre à exécuter que les actes quotidiens nécessaires tels que s'habiller, manger etc. (mineurs aptes seulement à acquérir certaines habitudes).

Dans plusieurs arrêts, le Tribunal fédéral des assurances a défini récemment de manière plus restrictive la notion de formation scolaire spéciale.

D'après lui, seuls ont droit aux subsides pour la formation scolaire spéciale les enfants aptes jusqu'à un certain point à recevoir une formation scolaire proprement dite, c'est-à-dire à acquérir certaines notions dans les branches élémentaires mentionnées ci-dessus. Respecter cette jurisprudence aurait de graves répercussions en matière de politique sociale. C'est pourquoi il apparaît

174 indispensable de clarifier la situation en modifiant immédiatement la loi. Dans notre réponse aux petites questions du conseiller national Bircher du 22 septembre 1969 et de M. Stucki, député au Conseil des Etats, du 9 octobre 1969, nous avons déjà annoncé que nous vous soumettrions un projet de loi à ce propos.

La motion du conseiller national Kurzmeyer, présentée le 26 novembre 1969, ainsi que les petites questions des conseillers nationaux Kloter (du 24 novembre 1969) et Tschopp (du 1er décembre 1969) ont aussi trait à la revision de l'article 19 LAI.

IL Nécessité de reviser la loi Selon l'article 19 LAI, des subsides pour la formation scolaire spéciale sont alloués aux mineurs «aptes à recevoir une instruction» mais qui, par suite d'invalidité, ne peuvent suivre l'école publique ou dont on ne peut attendre qu'ils la suivent. D'après les travaux préparatoires, notamment le rapport de la commission fédérale d'experts pour l'introduction de l'Ai, du 30 novembre 1956, et le message du Conseil fédéral du 24 octobre 1958 (FF 1958 II1161 s.), les débiles mentaux profonds eux aussi devraient être considérés comme aptes à recevoir une instruction et bénéficier d'une formation scolaire spéciale visant à déterminer et à développer au moyen de méthodes d'enseignement spéciales les facultés mentales et les aptitudes manuelles qui leur restent. C'est pourquoi, dans la pratique, on a toujours reconnu comme aptes à recevoir une instruction les mineurs chez lesquels il n'existe qu'une possibilité très limitée de développer encore des capacités physiques ou mentales relativement faibles.

Les lois cantonales en matière scolaire ont aussi tenu compte, de plus en plus, de cette évolution; les législateurs ont, en effet, élaboré les bases légales nécessaires à la création de classes et -d'écoles spéciales destinées aux débiles mentaux aptes à recevoir une formation pratique. Ainsi, dans le droit cantonal même, le concept initial de formation scolaire a été élargi, A l'occasion de la revision de la LAI, entrée en vigueur le 1er janvier 1968, cette nouvelle tendance a encore été renforcée. Il a été précisé à l'article 8, 2e alinéa, LAI que certaines mesures de réadaptation, telles que la formation scolaire spéciale, peuvent être accordées sans égard aux possibilités de réadaptation à la vie professionnelle. Dans
notre message du 27 février J 967 (FF 1967 I 677), nous avons indiqué à ce propos que l'Ai devait aussi prendre en considération les mesures destinées à permettre à l'assuré d'effectuer les actes les plus ordinaires de la vie et d'entretenir un certain contact avec son entourage.

La notion de formation scolaire spéciale, de même que d'autres notions, n'avaient pas été définies de manière détaillée dans la loi lors de l'introduction de l'Ai en raison du manque d'expérience pratique; il devait appartenir à la pratique administrative et à la jurisprudence d'en donner une interprétation plus précise. La révision de la LAI dont nous venons de parler semblait, en revanche, fournir une définition satisfaisante de la limite à tracer entre assurés aptes et assurés inaptes à recevoir une instruction.

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L'interprétation donnée par le Tribunal fédéral des assurances de la notion de formation scolaire spéciale aurait pour effet de restreindre considérablement l'étendue des tâches que s'était fixées l'Ai. Elle comporte également des conséquences inadmissibles, puisqu'elle remet en question le droit aux prestations de quelque 4000 débiles mentaux aptes à recevoir une formation pratique ou à acquérir certaines habitudes, c'est-à-dire d'un tiers environ de tous les bénéficiaires de subsides AI pour la formation scolaire spéciale. Le droit aux subsides individuels pour la formation scolaire spéciale n'est d'ailleurs pas seul affecté par cette jurisprudence. Les institutions qui ont accueilli, soigné et éduqué jusqu'à présent les enfants atteints de grave débilité mentale ne pourraient plus prétendre de subventions de l'Ai à la construction et aux frais d'exploitation. Ces subventions ne peuvent en effet être allouées que si des mesures de réadaptation de l'Ai sont appliquées dans la moitié au moins des cas ou des journées de séjour, ce qui implique l'octroi de subsides individuels pour la formation scolaire spéciale. On dénombre actuellement 88 écoles spéciales reconnues pour les seuls mineurs aptes à recevoir une formation pratique et 79 autres écoles spéciales reconnues à la fois pour des mineurs pouvant bénéficier d'une formation scolaire et pour ceux qui sont aptes à recevoir une formation pratique. Si les subventions précitées venaient à être supprimées, il est à prévoir qu'un grand nombre d'établissements qui n'ont pu être fondés que grâce aux prestations de l'Ai se trouveraient en difficultés financières et se verraient même contraints de cesser leur activité, car il serait difficile de réunir les fonds nécessaires d'une autre manière.

Nous avons examiné si la pratique administrative, plus large que la jurisprudence, ne pourrait pas être maintenue même sans modification de la loi.

Mais cela est impossible, car la sécurité du droit serait sérieusement menacée si l'administration ne se conformait pas à la jurisprudence.

Comme les prestations en question ne peuvent pas non plus être accordées en vertu d'autres dispositions légales, une modification de la LAI s'impose.

m. Proposition de revision Vu ce qui précède, nous proposons de compléter l'article 19, 1er alinéa, LAI par une seconde phrase prévoyant que font partie de la formation scolaire spéciale, outre la formation scolaire proprement dite, les mesures appliquées aux mineurs débiles mentaux qui sont aptes à recevoir une formation pratique ou à acquérir certaines habitudes, mais auxquels les disciplines scolaires proprement dites ne peuvent pas être enseignées. Ces mesures comprennent aussi les efforts entrepris pour rendre le débile apte à établir des contacts avec son entoura ge.

La Commission fédérale de l'AVS et de l'Ai a approuvé cette proposition à l'unanimité.

176 IV. Conséquences financières de la revision et répercussions sur les besoins de personnel

Par rapport à la réglementation en vigueur jusqu'à maintenant, la revision proposée n'entraînera aucune augmentation des charges financières; elle n'a pour but, en effet, que de consacrer le versement des subsides AI pour la formation scolaire spéciale, ainsi que celui des subventions à la construction et aux frais d'exploitation des institutions qui forment des mineurs invalides bénéficiant des subsides AI, dans la mesure où ces prestations étaient accordées jusqu'à présent. De même, il ne sera pas nécessaire d'augmenter le personnel.

V. Constitutionnalité

Le projet de loi se fonde sur l'article 34quater de la constitution fédérale, comme toute la législation en matière d'AVS et d'Aï.

Nous avons l'honneur de vous proposer d'adopter le projet de loi ciannexé.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 4 février 1970

"osa

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, Tschudi Le chancelier de la Confédération, Huber

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(Projet)

Loi fédérale modifiant la loi sur l'assurance-invalidité

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 4 février 1970, arrête:

La loi fédérale du 19 juin 19591' sur l'assurance-invalidité est modifiée comme il suit : Art. 19,1" al.

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Des subsides sont alloués pour la formation scolaire spéciale des mineurs éducables mais qui, par suite d'invalidité, ne peuvent suivre l'école publique ou dont on ne peut attendre qu'ils la suivent. La formation scolaire spéciale comprend la scolarisation proprement dite ainsi que, pour les mineurs incapables ou peu capables d'assimiler les disciplines scolaires élémentaires, des mesures destinées à développer soit leur habileté manuelle, soit leur aptitude à accomplir les actes quotidiens ou à établir des contacts avec leur entourage.

II

Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi. Il est chargé de l'exécution.

19038

l

> RO 1959 857, 1964 245 277, 1968 29, 1969 120

Feuille féaéralr. 122' anni«. Vol. I.

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10481

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20.02.1970

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