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Message du

conseil fédéral à l'assemblée fédérale concernant un projet de loi sur le commerce des déchets d'or et d'argent.

(Du 27 novembre 1885.)

Monsieur le président et messieurs, Le 12 décembre 1884, le conseil national a adopté la motion de MM. Charles-Emile Tissot et consorts, ainsi conçue : « Le conseil fédéral est invité à examiner s'il n'y aurait pas lieu d'élaborer une loi fédérale concernant l'achat et la vente de matières d'or et d'argent, afin de donner la sécurité nécessaire à l'industrie, ainsi qu'aux patrons et ouvriers qui travaillent ces matières ».

La demande d'une loi fédérale est essentiellement motivée par les considérations suivantes : L'industrie horlogère et bijoutière met en oeuvre des métaux précieux qui représentent chaque année des valeurs s'élevant à plusieurs dizaines de" millions clé francs. Ces métaux sont travaillés soit dans des ateliers, soit chez l'ouvrier à domicile. Dans les ateliers de bijoutiers et de monteurs de boites, le métal est fourni par le patron, qui l'achète directement chez le banquier ou à l'usine de dégrossissage. Aux ouvriers qui travaillent à domicile, le fabricant, bijoutier

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ou horloger livre de confiance la matière précieuse qui est déjà façonnée le plus souvent et qui doit subir encore un travail d'ajustage ou de perfectionnement.

Il est évident que, dans un cas comme dans l'autre, qu'il s'agisse de travail d'atelier ou de travail à domicile, un contrôle soigneux doit, pour éviter des pertes sensibles, être exercé sur le maniement des métaux précieux et en particulier sur les déchets qui résultent des opérations de montage, de ciselage, de guillocliage, de gravure, d'ajustage, de polissage et de finissage. Un grand nombre de ces travaux sont rétribués essentiellement ou exclusivement au moyen de ces déchets que le fabricant porte en décompte à l'ouvrier ; si la valeur des déchets dépasse celle du travail, l'ouvrier devient le débiteur du fabricant. Chaque pièce ou groupe de pièces est pesé avant et après chaque opération spéciale, et le déchet est porté au débit de l'ouvrier (ou chef d'atelier) d'après le poids manquant et d'après le titre du métal.

Le déchet se présente ou se retrouve sous des formes diverses ; tantôt il consiste en limailles, bûchilles, rognures, morceaux détachés de l'ouvrage comme c'est le cas dans les travaux de montage, de ciselage, guillochage et ajustage ; tantôt, au contraire, il est absorbé dans des meules, pierres, eaux, essences, bains, chiffons, etc., servant au polissage ou à d'autres opérations ; il se trouve aussi dans les balayures d'atelier, dans les eaux servant aux soins de propreté des ouvriers, dans les blouses et tabliers de travail, etc. On comprend que les soins les plus minutieux soient pris pour qu'aucune partie importante du déchet ne se perde.

Lorsque le chef d'atelier ou l'ouvrier a une certaine quantité de métal précieux tombé dans le travail, il procède à ce qu'on appelle le « rassemblage du déchet ». On réunit alors les parcelles do métal recueillies soigneusement chaque jour et mises de côté, on brûlo les chiffons, les balayures, on dessèche les eaux de travail et do propreté de manière à n'avoir plus que les résidus, etc., et l'on porte le tout à la fonte. Le culot ou lingot sorti du creuset est donné à, l'essayeur, puis vendu au marchand de matières d'or ou d'argent, ou bien remis au laminoir pour de nouveaux ouvrages.

Le commerce et la fonte des déchets constitue une industrie assez importante, qui malheureusement a souvent donné lieu à des Feuille fédérale suisse. Année XXXVII.

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tractations interlopes et frauduleuses. D'un côté, des commerçants et fondeurs peu scrupuleux ont cherché à réaliser des bénéfices illicites en trompant les vendeurs ou ceux qui leur donnaient à fondre. D'un autre côté, la tentation est grande pour les ouvriers et les apprentis occupés à la manutention des métaux précieux de s'approprier des déchets et de les vendre s'ils trouvent des receleurs chez d'autres personnes travaillant ces métaun ou chez celles qui s'occupent d'achat et de fonte.

Des faits graves et nombreux sont venus souvent émouvoir l'opinion publique. C'est surtout dans l'industrie horlogère qu'ils sesont produits, car les fraudes et les soustractions y sont plus faciles que dans le travail de la bijouterie. Depuis longtemps le canton de Neuchâtel a édicté une loi sur la matière ; mais les mesures prises sont et resteront inefficaces aussi longtemps qu'elles seront limitées à un seul canton.

Déjà, le 23 décembre 1876, le conseil des états avait adopté une motion de M. Bodenheimer demandant une loi fédérale réglant: « 1° le contrôle sur la fabrication et le commerce des métaux précieux ; « 2° la protection des marques de fabrique ».

A ce postulat ont répondu : 1° la loi du 19 décembre 1879 sur les marques de fabrique et decommerce ; 2° la loi du 23 décembre 1880 sur le contrôle et la garantie des ouvrages d'or et d'argent.

Ces lois ont donné les meilleurs résultats et sont généralement appréciées.

Si nous avons renoncé alors à présenter aussi une loi réglant le commerce des métaux précieux, c'est parce que nous supposions que les cantons intéressés pourraient légiférer eux-mCmes sur la matière. Cet espoir ne s'est pas réalisé : il y a à cela divers motifs, dont le principal est que l'horlogerie n'a pour plusieurs cantons qu'une importance relative et que le soin de ses intérêts ne préoccupe que fort peu l'autorité législative de ces cantons, qui aurait d'ailleurs une certaine difficulté à se rendre véritablement compte des besoins qu'il s'agit de satisfaire. Or, toute législation qui laissera

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de côté une partie quelconque du territoire suisse où l'industrie horlogère et bijoutière s'exerce, ne donnera pas des résultats satisfaisants. Les fraudeurs qui voudraient se livrer au commerce et à la fonte des déchets sans avoir à se conformer aux prescriptions qui les gênent se retireraient sur le territoire d'un canton voisin et y pratiqueraient le recel en toute sécurité.

L'adoption de la motion Tissot nous a donc engagés à reprendre la question et à l'examiner soit au point de vue constitutionnel, soit au point de vue des dispositions législatives et réglementaires qu'il serait possible d'édicter pour remédier d'une manière efficace aux abus criants dont on se plaint.

Sous le rapport constitutionnel, on peut se demander si la Confédération est compétente pour intervenir dans ce domaine. Notre réponse doit être affirmative, car la question a déjà été résolue à l'occasion de la loi sur le eontrôle des ouvrages d'or et d'argent du 23 décembre 1880.

Voici ce que nous disions à cet égard dans notre message du 28 novembre 1879 (F. féd. 1879,.III. 876): « La question de savoir si la Confédération a le droit de légiférer sur la matière est à nos yeux complètement hors de doute. Aux termes de l'article 64 de la constitution fédérale, la législation fédérale est prévue pour « toutes les matières du droit se rapportant au commerce et aux transactions mobilières». Evidemment, les conditions auxquelles doit être soumise la vente des ouvrages d'or et d'argent, rentrent dans les matières du droit commercial, aussi bien que les conditions relatives au commerce des bestiaux (voir projet de code fédéral des obligations, article 276), et, par exemple aussi, celles concernant l'emploi des marques de fabrique. On ne peut demander que ces matières spéciales soient réglées par le code fédéral des obligations, car ce code doit renfermer uniquement les principes généraux du droit; par conséquent, une loi spéciale est nécessaire aussi bien pour la vente des ouvrages d'or et d'argent que pour les autres matières que nous venons de mentionner.

t La réglementation de la vente des ouvrages d'or et d'argent n'a pas de base solide si elle ne s'appuie pas sur des prescriptions de police industrielle. La règle ordinaire de droit que « la facture

382 fait preuve entre parties», même complétée par la présomption légale «qu'en l'absence de facture, l'ouvrage est vendu, au titre supérieur», -- cette règle, disons-nous, est tout à fait impuissante à remédier aux abus, comme une longue expérience faite en Suisse et ailleurs le prouve irréfutablement. Aussi tous les états qui ont voulu mettre un peu d'ordre dans cette branche de commerce, ont-ils prescrit que les ouvrages en question, pour pouvoir être mis en vente, devaient passer au préalable devant les employés du contrôle et être munis par eux d'un poinçon officiel constatant que la matière précieuse est au titre indiqué. Une telle mesure limite évidemment la liberté absolue^de commerce et d'industrie. Cette liberté est garantie par l'article 31 de la constitution fédérale, mais sous réserve entre autres, litt, c: «des dispositions touchant l'exercice des professions commerciales et industrielles». De telles dispositions, la Confédération a le droit d'en prendre aussi bien que les cantons. (Comparer, pour s'en convaincre, le texte de la constitution fédérale de 1848, qui portait article 29, i>: «les dispositions des cantons touchant la police du commerce et de l'industrie » ; les mots « des cantons » ont été supprimés dans la constitution de 1874, d'où résulte la compétence fédérale.).» Ces motifs ont été acceptés sans contestation par l'assemblée fédérale. Ils s'appliquent exactement et en plein à la loi qui vous est proposée aujourd'hui. Les prescriptions de police prévues dans cette loi ont aussi une analogie complète avec celles qui enjoignent aux commerçants de se faire inscrire au registre de commerce et qui punissent ceux qui ne se conforment pas à cette formalité.

Sans doute, en général, le domaine des lois de police doit être réservé aux cantons, mais, outre le registre du commerce dont nous venons de parler, nous avons de nombreuses lois fédérales qui font exception à cette règle : lois sur la police des épizooties, des eaux, des forêts, des fabriques, de la chasse, de la pêche, du phylloxéra, du contrôle des ouvrages d'or et d'argent, de la fabrication des allumettes, etc. Plusieurs de ces lois ne sont pas expressément prévues par la constitution fédérale.

Il va sans dire, toutefois, que les lois de police fédérales ne doivent en aucune manière empiéter sur le droit pénal et l'organi-

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sation judiciaire qui sont exclusivement réservés aux cantons. Les seules contraventions pour lesquelles la législation fédérale puisse prescrire des pénalités, sont celles qui résultent de la violation des prescriptions de police édictées par elle. Mais les délits en général, tels que le vol, l'abus de confiance, le recel et la complicité, demeurent frappés par la législation pénale des cantons, et la répression en a lieu suivant la procédure et dans les limites que cette législation détermine.

En élaborant le projet de loi, une première question qui s'est présentée à nous est celle de savoir s'il faudrait régler tout ce qui se rapporte au commerce des métaux précieux en général. Nous comprenons par là l'achat et la vente des ouvrages d'or et d'argent soit en gros, soit en détail, ainsi que des objets démodés ou hors d'usage, commerce qui embrasserait ainsi non seulement les fabricants, mais aussi les marchands-horlogers, bijoutiers, rhabilleurs, etc., établis dans chacune de nos villes.

Il nous a paru que cela n'était pas nécessaire et présenterait d'ailleurs des difficultés spéciales qu'il vaut mieux éviter. D'abord, les relations entre fabricants et marchands sont déjà réglées, dans la chose essentielle, par la loi sur le contrôle qui garantit à l'acheteur en gros le titre exact des ouvrages qu'il achète. Ensuite, aucune plainte ne s'est fait jour contre les magasins d'horlogerie, d'orfèvrerie ou de bijouterie qui achètent fréquemment ou échangent des montres, des bijoux, des pièces d'orfèvrerie dont le propriétaire veut se défaire. Si des vols ou du recel se produisent dans ces tractations, la loi commune peut suffire à les réprinjer. Nous ne jugeons donc pas qu'il y ait lieu, de la part de la Confédération, ni de prescrire à ces marchands la tenue de registres spéciaux pour leurs achats et leurs ventes, ni d'imposer aux vendeurs des formalités telles que, par exemple, la production d'un certificat de provenance.

Mais il va sans dire que si ces marchands font le commerce des déchets proprement dits ou qu'ils les acceptent pour la fonte, ils tombent sous le coup des dispositions de la loi fédérale.

En limitant exclusivement cette loi au commerce des déchets d'or et d'argent (on pourrait y ajouter le platine si cette matière était d'un emploi important, ce qui n'est pas le cas), nous croyons

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répondre au seul besoin qui se soit fait véritablement jour et pour la satisfaction duquel la Confédération doit intervenir.

De plusieurs côtés, on nous a soumis des propositions pour la loi à faire. C'est en particulier le cas de la part d'une réunion d'intéressés de Bienne (requête en date du 20 février 1885). Nous avons utilisé avec plaisir ces travaux. Mais il nous a paru, contrairement à la plupart de ces propositions, qu'il ne fallait pas que la loi entrât dans des détails qui, par leur nature, appartiennent plutôt à la réglementation. Cela présentait de sérieux inconvénients, entre autres celui, très essentiel, de rendre beaucoup plus difficiles les modifications que l'expérience pourrait faire reconnaître indispensables. La loi doit renfermer les principes généraux qui doivent en quelque sorte rester immuables. Le reste doit être renvoyé au pouvoir exécutif, qui en fera l'objet de règlements et d'ordonnances variant suivant les circonstances. Dans toute matière de police, où l'on peut généralement appliquer le proverbe italien : fatta la legge, trovato l'inganno, il faut que l'autorité de surveillance puisse agir rapidement pour mettre en quelque sorte le verrou aux issues que la fraude est habile à découvrir.

C'est en s'inspirant de ces considérations que notre département du commerce a préparé un avant-projet de loi sur le commerce des déchets d'or et d'argent, et l'a soumis, avec l'indication des dispositions réglementaires qui devraient en résulter, à l'examen des administrations des bureaux de contrôle. Les observations présentées par elles ont ensuite été examinées, ainsi que l'avant-projet lui-même, dans une réunion qui a eu lieu à Neuchâtel le 17 octobre sous la présidence du chef du département fédéral du commerce et de l'agriculture, et à laquelle le département avait convoqué, outre les délégués des administrations de contrôle, les personnes suivantes : MM. R. Comtesse, conseiller d'état et conseiller national, à Neuchâtel ; H. Etienne, président du bureau fédéral de contrôle, à Neuchâtel ; E. Prancillon, conseiller national, à St-Imier ; A. Grosjean, conseiller national, à la Chaux-de-fonds ; de Steiger, conseiller d'état, à Berne ;

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MM. G. Thommen, conseiller national, à Waldenbourg ; Ch.-E. Tissot, conseiller national, au Locle ; Viollier-Rey, conseiller d'état, à Genève ; J.-F. Viquerat, conseiller d'état et conseiller national, Lausanne.

à

L'administration du bureau de contrôle de Genève, seule, envisage qu'une loi fédérale sur le commerce des déchets d'or et d'argent n'est pas nécessaire, attendu que, dans son opinion, les cantons sont compétents pour édicter une telle loi et qu'ils peuvent, dans son élaboration, tenir compte, mieux que la Confédération ne peut le faire, des conditions spéciales et locales dans lesquelles chacun d'eux se trouve placé.

Toutefois, le représentant du gouvernement de ce canton à la réunion du 17 octobre, a déclaré que le conseil d'état genevois ne partage pas absolument cette manière de voir et qu'il reconnaît, au contraire, la grande utilité d'une loi fédérale sur la matière.

Il résulte, en conséquence, de cette consultation que les intéressés, dans leur très grande majorité, sollicitent vivement l'élaboration d'une loi fédérale sur le commerce des déchets d'or et d'argent.

Nous -allons maintenant examiner succinctement les motifs à l'appui des principales dispositions du projet de loi.

Art. 1er. Nous limitons bien exactement la portée de la loi en l'appliquant seulement à ceux qui achètent, fondent ou essayent des déchets et lingots provenant de personnes qui travaillent des matières d'or et d'argent, et qui ont par conséquent des déchets en leur possession. Ainsi, ni le commerce de l'horlogerie et de la bijouterie, ni l'achat ou l'échange, par les marchands-horlogers ou bijoutiers, de vieux ouvrages d'or et d'argent, ni le commerce des lingots par les banques qui les font venir de grands établissements pour les revendre aux bijoutiers et aux monteurs de boîtes, ne sont touchés par notre projet. Mais il est bien entendu que si l'un ou l'autre de ces commerçants achetait directement des personnes qui produisent des déchets, la loi deviendrait applicable.

Il a paru indispensable de placer les essayeurs de commerce sous le régime de la loi ; car ils pourraient favoriser considérablement les

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abus de confiance et recels, en déterminant le titre des lingots et de& culots, et en en rendant ainsi la vente plus facile. Exiger d'eux un examen et un diplôme, c'est les considérer comme des officiers publics, ce qu'ils doivent être en réalité. Du reste, examens et diplômes sont déjà institués en exécution de la loi fédérale sur le contrôle, du 23 décembre 1880.

La prescription que les postulants doivent jouir des droits civils et politiques nous paraît juste. Un commerce aussi délicat que celui qu'il s'agit de réglementer ne doit pouvoir être exercé que par des personnes qui présentent des garanties morales sérieuses. On a déjà établi ailleurs le même principe, entre autres pour les agents et sous-agents d'émigration.

Art. 2. Une tenue de livres régulière est la première garantie à exiger. Ensuite, on doit prescrire des précautions pour empêcher les détournements de déchets ; l'expérience a montré que la plus utile précaution consiste à interdire d'acheter de toute personne qui ne peut légitimer la provenance des déchets ou lingots.

La recherche des déchets à domicile par l'acheteur ou le fondeur favorise la fraude : c'est pourquoi il faut l'interdire.

L'obligation de l'estampille est aussi une sauvegarde nécessaire.

Rappelons que les monteurs de boîtes sont déjà tenus, par les règlements sur le contrôle, de se conformer à cette disposition.

Art. 5. L'organisation de la surveillance est assez difficile. Si l'on veut aboutir à un résultat favorable, il faut que la surveillance soit centralisée jusqu'à un certain point. S'en remettre uniquement aux autorités cantonales du soin de l'exercer, serait rendre la loi passablement illusoire, car il s'agit d'une matière spéciale à laquelle la plupart des cantons n'auraient aucun motif de s'intéresser ; par conséquent lu loi resterait chez eux à l'état de lettre morte.

Les bureaux de contrôle sont particulièrement bien placés pour rendre sous ce rapport les plus grands services. Sans leur concoursla surveillance serait à peu près impossible.

Les autres dispositions que nous proposons trouvent en elles-même ou dans ce qui précède leur commentaire, ce qui nous dispense de les justifier.

^

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En résumé, il faut faire une loi efficace ou n'en point faire.

Nous croyons qu'elle le sera avec les moyens que nous proposons.

Affaiblir ces moyens, ce serait élaborer une oeuvre législative à peu près sans utilité, et qui, mal exécutée, ne contribuerait pas à développer le prestige de la législation fédérale.

Nous recommandons en conséquence le projet de loi ci-après à votre approbation, et nous saisissons cette occasion pour vous présenter, monsieur le président et messieurs, l'assurance de notre considération très distinguée.

Berne, le 27 novembre 1885.

Au nom du conseil fédéral suisse, Le président de la Confédération : SCHENK.

Le chancelier de la Confédération : RlNGIBK.

Loi fédérale sur

le commerce des déchets d'or et d'argent.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE

de la CONFÉDÉRATION

SUISSE,

en exécution des articles 64 et 31, lettre c, de la constitution fédérale ; vu le message du conseil fédéral en date du -- novembre 1885, décrète : Art. 1er. Celui qui veut faire métier d'acheter, de la part de personnes qui, dans l'industrie horlogère et bijoutière, travaillent des matières d'or et d'argent, les ·déchets, les culots ou lingots résultant de ce travail, ou ·de fondre ces déchets, ou qui veut s'établir comme essayeur de commerce pour les matières dont il s'agit, doit en faire la déclaration au département fédéral du commerce, en justifiant qu'il jouit de ses droits civils et politiques. L'essayeur doit en outre être en possession du diplôme fédéral délivré en exécution de la loi fédérale du 23 décembre 1880 sur le contrôle et la garantie du titre des ouvrages d'or et d'argent.

Le département délivre aux postulants remplissant les conditions prescrites, un registre à souche timbré et paginé, et publie leurs noms dans la Feuille officielle du commerce.

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Les émoluments à tion sont fixés par Les postulants de se faire inscrire

payer pour ce registre et cette publicale conseil fédéral.

dont la demande est accordée sont tenus au registre du commerce.

Art. 2. Les obligations de celui qui fait métier d'acheter ou de fondre des déchets sont les suivantes : II doit inscrire régulièrement et sur-le-champ chaque achat ou fonte dans le registre à souche et se conformer d'ailleurs aux prescriptions de l'autorité fédérale quant à la tenue du registre et aux extraits qu'il doit lui en fournir.

Les autorités administratives et judiciaires fédérales ou cantonales ont en outre le droit de prendre connaissance du registre en tout temps.

Il lui est enjoint de n'acheter ou de n'accepter des déchets à la fonte que de la part de personnes 'connues, qui peuvent en légitimer la provenance ; si ce sont des personnes mineures ou en sous-ordre qui les lui présentent, il doit s'assurer qu'elles sont dûment autorisées à cet effet. Il doit se conformer sous ce rapport aux dispositions spéciales édictées par le conseil fédéral.

Il lui est interdit d'aller de maison en maison pour acheter des déchets ou en demander à fondre.

Il lui est interdit d'acheter des lingots ou culots qui.

n'ont pas été essayés par un bureau de contrôle ou par un «ssayeur de commerce et qui ne sont pas revôtus du poinçon dudit bureau ou essayeur.

Chaque fondeur doit avoir une marque ou estampille qu'il doit d'abord faire insculper dans le bureau de contrôle le plus rapproché de son domicile. Il munit chaque lingot qu'il fond de cette estampille. Tout lingot non revêtu de l'estampille d'un fondeur doit être provisoirement séquestré au bureau de contrôle ou chez l'essayeur de commerce jusqu'à ce que sa provenance soit dûment constatée. Les lingots des monteurs de boîtes doivent être munis de leur propre «stampille.

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Art. 3. Les obligations de l'essayeur ile commerce sont les suivantes : II doit inscrire régulièrement et sur-le-champ chaque essai dans le registre à souche suivant les prescriptions qu'il recevra de l'autorité fédérale. Le règlement d'exécution pourra statuer, en ce qui concerne les lingots dits de travail, des exceptions à cette règle.

Il doit fournir les extraits de ce registre qui lui sont demandés par l'autorité compétente et laisser prendre conr naissance du registre par les autorités administratives et judiciaires fédérales et cantonales.

Il doit se conformer strictement à la disposition contenue au dernier paragraphe de l'article 2, ainsi qu'aux autres prescriptions édictées par l'autorité fédérale en exécution dela présente loi.

Art. 4. Les personnes établies à l'étranger qui veulent faire en Suisse des achats de déchets ou lingots ou prendre des commandes pour la fonte, ne peuvent se livrer à ces opérations que par l'intermédiaire d'un représentant responsable domicilié en Suisse, lequel doit remplir les formalités prescrites à l'article 1er et se conformer en tous points aux dispositions de la présente loi.

Les essais de lingots faits à l'étranger ne sont pas reconnus valables en Suisse, à moins qu'ils ne proviennent d'un des établissements officiels désignes par le conseil fédéral.

Art. 5. Le conseil fédéral exerce, avec le concours des autorités cantonales et des administrations des bureaux d& contrôle des ouvrages d'or et d'argent, la surveillance sur le commerce, la fonte et l'essai des déchets et lingots.

Il détermine, par voie de règlement, la participation des bureaux de contrôle à l'exercice de cette surveillance.

Il a le droit de prescrire les formalités de police nécessaires pour établir la qualité et l'identité des personnes qui, à raison de leur profession, ont le droit de vendre ou

391 de faire fondre des déchets ou de remettre des lingots à l'essai.

Art. 6. Toute contravention aux dispositions qui précèdent et aux règlements et ordonnances qui en découlent sera déférée, d'office ou sur plainte, aux tribunaux compétents du canton, et punie d'une amende de 10 à 500 francs.

Le produit des amendes entre dans la caisse désignée par le canton.

Le jugement devra prévoir, pour le cas de non-payement de l'amende, la transformation de celle-ci en un emprisonnement équivalent, en comptant 5 francs d'amende pour un jour de prison.

Communication du jugement sera faite au conseil fédéral.

En cas de condamnation, le conseil fédéral pourra interdire à une personne faisant métier d'acheter, de fondre ou d'essayer des déchets et lingots, la continuation de ce commerce ou de cette profession.

Art. 7. Les dispositions de l'article 6 ne portent aucun préjudice aux actions de droit civil que les personnes lésées peuvent intenter pour toute infraction à la présente loi ou aux règlements et ordonnances qui en découlent.

Demeurent également réservées, les dispositions pénales cantonales relatives avi voi, à l'abus de confiance, au recel et à la complicité.

Art. 8. Le conseil fédéral est chargé de l'exécution de la présente loi.

Il édicté les règlements nécessaires à cet effet.

Art. 9. Le conseil fédéral est chargé, conformément aux dispositions de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant la votation populaire sur les lois et arrêtés fédéraux, de publier la présente loi fédérale et de fixer l'époque où eli« entrera en vigueur.

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Message du conseil fédéral à l'assemblée fédérale concernant un projet de loi sur le commerce des déchets d'or et d'argent. (Du 27 novembre 1885.)

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