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N°36

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FEUILLE FÉDÉRALE 104e année

Berne, le 4 septembre 1952

Volume III

Paraît, en règle générale, chaque semaine. Pris: 80 francs par an; 16 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 60 Centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des Hoirs C.-J. Wyss, société anonyme, à Berne

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant les avoirs allemands en Suisse (Du 29 août 1952) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous adresser un message concernant l'approbation de l'accord avec la République fédérale d'Allemagne, du 26 août 1952 et de l'accord du 28 août 1952 avec les Etats-Unis d'Amérique, la République française et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, au sujet des avoirs allemands en Suisse. Si, au lieu de nous limiter à commenter ces nouveaux accords, nous nous étendons dans notre message sur les efforts déployés pour exécuter l'accord initial, c'est afin d'obéir à l'article 3 de l'arrêté fédéral du 27 juin 1946, qui nous donne mandat de faire rapport aux chambres sur l'exécution de l'accord du 25 mai 1946.

I. TENTATIVES D'EXÉCUTION DE L'ACCORD DE WASHINGTON L'Assemblée fédérale a été largement renseignée par notre message du 14 juin 1946 (1) sur les motifs qui ont conduit à la conclusion de l'accord de Washington. Quant aux difficultés auxquelles l'exécution de cet accord s'est heurtée dès le début, elles ont été exposées dans notre rapport du 13 avril 1949. ( 2 ) Pour montrer quelle est l'origine de la situation actuelle, il nous suffira de rappeler que la Suisse n'avait accepté l'obligation de liquider les avoirs allemands qu'à la condition -- expressément stipulée dans l'accord de Washington --- que les propriétaires allemands reçussent en monnaie allemande la contre-valeur de leurs avoirs liquidés en Suisse. Notre pays '

H FF 1946, II, 710.

(*) FF 1949, I, 769.

Feuille fédérale. 104e année. Vol. III.

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a toujours considéré que de cette condition dépendait la légitimité de l'accord. De son côté, le chef du département politique, dans les explications qu'il a données aux chambres pendant les débats relatifs à l'approbation de l'accord, a relevé plusieurs fois qu'il est bien certain que, conformément au droit international, un étranger ne peut être exproprié que contre pleine indemnité.

Avant d'aborder l'ensemble de ces questions, nous désirons tout d'abord réfuter une idée qui s'est répandue ici ou la dans l'opinion publique, à savoir que l'accord de Washington, dès le début, n'était pas exécutable.

Cette opinion est erronée ; elle ne tient pas compte des circonstances, telles qu'elles existaient en Allemagne en 3946 et qui ne souffrent aucune comparaison avec celles d'aujourd'hui. Il n'y avait, alors, pas de gouvernement allemand, ni a l'ouest, ni à l'est. Les Alliés avaient pris euxmêmes l'engagement de faire payer, par leurs « autorités compétentes », les indemnités revenant aux Allemands touchés par l'accord. Ils en avaient aussi la possibilité, car ils disposaient, en quantités pratiquement illimitées, de la monnaie allemande qui avait alors cours. La situation changea avec la réforme monétaire allemande. Les Alliés ne disposaient plus, eux-mêmes, de la nouvelle monnaie: le mark allemand.

Ils soutinrent, en revanche, la thèse qu'ils étaient en mesure, sur la base du statut d'occupation, d'imposer à la République fédérale d'Allemagne, nouvellement créée, l'obligation de payer ces indemnités d'une manière analogue à celle qu'avait prévue le traité de Versailles et les divers traités conclus ensuite entre les Alliés et des Etats neutres. Encore au mois de juin de l'année dernière, les Alliés firent savoir qu'ils étaient décidés à prendre de telles mesures. Seule la modification profonde intervenue dans les rapports politiques entre les Alliés et la République fédérale d'Allemagne a fait ressortir l'inopportunité d'imposer à celle-ci une telle obligation..

C'est alors seulement que l'exécution de l'accord de Washington, dans sa forme initiale, a été mise en question.

L'indemnité que le propriétaire allemand aurait dû recevoir pour ses avoirs expropriés en Suisse dépendait en premier lieu du cours de conversion qui serait pris en considération pour le calcul de la contre-valeur.

En conséquence
la Suisse avait, dès le début, signalé aux Alliés que l'exécution de l'accord, en ce qui concerne les avoirs allemands en Suisse, ne pourrait commencer qu'au moment où le cours de conversion aurait été fixé par entente entre les parties. La Suisse devait, pour des raisons juridiques, poser une telle condition. Le fait que celle-ci n'a pas été remplie a été la cause de ces malencontreux retards, bien connus, qui ont finalement engagé la Suisse à faire appel au tribunal arbitral international prévu dans l'accord. Par la suite, les gouvernements alliés, pour éviter une longue procédure arbitrale, proposèrent de régler les questions en suspens par voie de négociations et convoquèrent une nouvelle conférence quadripartite, à Washington, pour le 9 mai 1949.

Ces négociations ---- pour lesquelles le chef de la délégation suisse était de nouveau le ministre Stucki -- purent être conduites dans une atmosphère sensiblement meilleure qu'en 1946; elles permirent de rapprocher les opinions, mais non de s'entendre sur les questions de principe.

Les Alliés reconnaissaient la thèse de la Suisse suivant laquelle le cours de conversion du franc suisse en marks allemands ne pouvait pas être fixé unilatéralement par eux et qu'il fallait pour cela une entente entre les deux parties, us cherchaient toutefois à faire fixer immédiatement un cours de conversion définitif, ce qui devait apparaître prématuré, étant donnée la situation monétaire, alors instable, en Allemagne. La meilleure proposition aurait prévu un cours de 78 marks allemands pour 100 francs suisses, soit une amélioration sensible par rapport au calcul allié initial, de 57,8 Reichsmarks pour 100 francs suisses. Elle était, toutefois, notablement inférieure à la relation existant aujourd'hui. Ces gros écarts démontrent en tout cas clairement l'influence décisive du cours de conversion sur le montant de l'indemnité.

Une difficulté particulière surgit, au cours des négociations de Washington, de mai à juin 1049, à propos dos conflits do sequestro. Lo rôle de la Suisse dans le commerce et le trafic financier internationaux avaient eu pour conséquence qu'une série de sociétés suisses sous influence allemande prépondérante possédaient à l'étranger des participations qui y étaient séquestrées comme propriété ennemie. L'accord de Washington ayant imposé à la Suisse l'obligation de liquider l'intérêt allemand à la source, c'est-à-dire auprès de la maison-mère en Suisse, les autorités étrangères devaient libérer les participations de sociétés suisses « dégermanisées ».

Il apparut toutefois impossible d'aboutir, sur une base multilatérale, a une telle réglementation, à cause des législations nationales divergentes.

Il fut donc décidé de rechercher des solutions particulières avec les Etats alliés intéressés; aussi la conférence quadripartite fut-elle interrompue.

Malgré l'intérêt matériel considérable que la Suisse avait à un règlement satisfaisant des conflits de séquestre, elle n'en a jamais fait dépendre l'exécution de l'accord de Washington. Pourtant, nous dûmes, à cette époque, nous réserver de ne retirer
notre appel formel au tribunal arbitral que si une entente pouvait être obtenue sur cette question également. En acceptant l'invitation à ces négociations, nous avions déjà expliqué, notamment dans une note adressée aux chefs des missions alliées à Berne, que la possibilité d'une solution arbitrale devait être réservée pour le cas où les conversations ne devraient pas aplanir toutes les divergences de vues.

La manière de voir de la délégation suisse, à savoir que les différentes questions pendantes concernant l'exécution de l'accord ont entre elles un lien si étroit qu'elles ne peuvent être traitées séparément, fut ensuite approuvée par le Conseil fédéral et par les commissions des affaires étrangères des chambres.

Les modalités de l'indemnisation des propriétaires allemands gardèrent, comme auparavant, leur importance de principe pour l'exécution de l'accord de Washington. Dans une lettre adressée aux chefs des délégations alliées, le 11 juin 1949, au moment de la suspension des négociations de Washington, le ministre Stucki s'efforça d'obtenir des précisions sur ce point important et déclara: «II est particulièrement important que le gouvernement suisse sache aussitôt que possible, comment, par qui et dans quel délai les paiements en Allemagne occidentale auront lieu. » Le temps mis par les Alliés pour répondre à cette question fut, avec les conflits de séquestre, la cause des autres retards intervenus par la suite. Ce fut seulement le 5 juin 1950 que l'ambassade de France à Berne fit savoir que les Alliés étaient disposés, pour créer les conditions relatives à l'exécution de l'accord de Washington, à reprendre les négociations quadripartites interrompues à Washington l'été 1949.

Comme on le sait, ces négociations durent être différées à nouveau, à cause d'un malentendu malaisé à saisir, alors que les délégations alliées étaient déjà arrivées à Berne. Entre-temps, comme cela avait été prévu, la Suisse avait mené une écrie de négociations bilatérales sur les conflits de séquestre; ces négociations prirent, dans bien des cas, une allure nettement traînante. Pour hâter la solution de ces questions, une délégation suisse s'était rendue dans les différentes capitales des pays suivants et avait soit conclu soit paraphé des accords avec la France, la Hollande, la Norvège et les Etats-Unis d'Amérique; les pourparlers étaient restés sans résultat avec la Belgique et le Danemark, tandis que le résultat final avec l'Angleterre se faisait attendre. Comme le projet américano-suisse devait encore être mis au point, la Suisse attendit que ces divergences pussent être réglées à l'occasion des négociations quadripartites.

Contrairement aux prévisions, les chefs des délégations alliées remirent le 20 juin, à la délégation suisse, un aide-mémoire dans lequel il était demandé que la Suisse renonçât à lier les négociations, encore en souffrance concernant les conflits de séquestre, aux négociations relatives à l'exécution de l'accord de Washington. Comme les Alliés ne voulaient pas abandonner leur manière de voir et qu'il
nous était impossible de nous engager d'avance, par écrit, à ne pas tenir compte, pour apprécier le résultat dea négociations prévues, de l'état des négociations sur les conflits de séquestre, il fut décidé, d'entente avec les chefs de délégations alliées, de remettre à plus tard la conférence quadripartite de Berne. Là-dessus, en automne 1950, un accord bilatéral fut conclu avec la Grande-Bretagne, tandis qu'un accord avec la Norvège était mis au point et signé. Lorsque le congrès américain eut, à son tour, créé la base légale permettant au gouvernement de conclure l'accord sur les conflits de séquestre avec la Suisse et que le département d'Etat eut laissé entrevoir la possibilité de régler ultérieurement, par voie de négociations, les divergences encore existantes, les difficultés concernant

la reprise des négociations quadripartites purent enfin être considérées comme aplanies.

Ces négociations débutèrent le 5 mars 1961 à Berne. Elles avaient pour but de régler définitivement les conditions d'exécution de l'accord de Washington, c'est-à-dire en premier lieu les modalités du paiement des indemnités en Allemagne. Etant donnée la stabilisation de la monnaie intervenue entre-temps en Allemagne, l'entente sur le cours de conversion à appliquer put se faire rapidement. Il fut admis que ce cours serait le cours financier exact valable entre la Suisse et l'Allemagne, soit 100 francs suisses pour 95,88 marks allemands. Il fut en outre prévu de ne pas soumettre les doubles nationaux à l'accord et de créer une franchise pour les avoirs jusqu'à 10 000 francs. De grosses difficultés se produisirent cependant lorsqu'il s'agit de déterminer la manière de trouver les montants en marks allemands nécessaires pour indemniser les propriétaires des autres avoirs allemands en Suisse. Comme les Alliés, contrairement à 1946, ne disposaient plus des moyens de paiements allemands nécessaires, on résolut de laisser cette obligation au gouvernement allemand. H fallait à la fois éviter qu'il n'en résultât pour lui une charge financière insupportable et prendre en considération la situation des finances publiques de l'Allemagne occidentale sans compromettre le principe juridique consacré par l'accord de Washington, celui d'une pleine indemnisation du propriétaire allemand. Il y avait là un dilemme.

Le 20 avril 1951, on put enfin établir un plan d'indemnisation, dont les points principaux: consistaient dans le fait que l'indemnité devait être versée en Allemagne en deux parties. La moitié de la contre-valeur des avoirs liquidés en Suisse devait être payée comptant et sans délai au propriétaire allemand, franche de toute charge, cependant qu'il aurait reçu, pour la seconde partie de son droit à une indemnité, un titre à long terme, portant intérêt, qui aurait pu servir au paiement de certains impôts. Pour aider le gouvernement allemand à se procurer les ressources nécessaires, la Suisse et les Alliés se déclarèrent d'un commun accord prêts à renoncer à 25 pour cent du produit de la liquidation en francs suisses et à mettre ces devises à la disposition du gouvernement allemand. Ainsi, sur le montant de la liquidation,
estimé à 360 millions de francs suisses (déduction faite des avoirs qui appartiennent à des propriétaires domiciliés dans la zone de l'Est et des avoirs de 10 000 francs ou moins au bénéfice de la franchise), 90 millions de francs suisses -- c'est-à-dire un quart -- auraient été remis, par le débit du « pool », en devises libres, à la disposition du gouvernement de la Eépublique fédérale d'Allemagne. Celui-ci, de son côté, aurait dû trouver à bref délai un montant de 180 millions de marks allemands pour payer la première partie des indemnités. Conformément aux dispositions de l'accord de Washington, il pouvait porter, au débit de la créance suisse envers la caisse de compensation allemande (« milliard du clearing»), la moitié de l'ensemble des paiements en marks allemands.

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270 raillions de francs seraient restés à la disposition du « pool », à partager entre la Suisse et les Alliés, de telle sorte que les deux parties contractantes reçussent chacune 135 millions.

Un nouvel élément important, conséquence de l'évolution politique, apparut dans ces négociations quadripartites: pour la première fois, les Alliés déclaraient des autorités allemandes compétentes pour exécuter le plan d'indemnisation en Allemagne. Les paiements au comptant aussi bien que l'établissement des titres exigeaient l'entremise de la « Bank Deutscher Länder », c'est-à-dire, en définitive, du ministère allemand des finances. La collaboration technique de la République fédérale d'Allemagne pour l'exécution de l'accord de Washington apparaissait donc indispensable aux yeux des Alliés, quand bien même ils déclarèrent posséder comme auparavant, en vertu du statut d'occupation, la compétence d'imposer l'exécution du plan d'indemnisation.

Dans ces conditions, la Suisse, au cours des négociations, fit à plusieurs reprises la proposition d'y convier des représentants allemands. Cette requête ne fut pas agréée, mais les Alliés exprimèrent leur intention de consulter les atrfcoritéa allemandes au sujet de l'exécution technique du plan du 20 avril. Les négociations quadripartites furent interrompues à cette fin. Comme la Suisse avait, entre-temps, noué des relations diplomatiques avec la République fédérale d'Allemagne, nous jugeâmes opportun de renseigner, nous aussi, le gouvernement de la République fédérale sur l'évolution des pourparlers au résultat desquels, en. définitive, l'Allemagne était la plus intéressée. Le chef de la délégation suisse, le ministre Stucki, fut par conséquent chargé de prendre contact, à Bonn, avec le ministre fédéral des finances et de tâcher d'obtenir une collaboration allemande volontaire à l'exécution du plan d'indemnisation convenu avec les Alliés.

Malgré les avantages importants que cette réglementation eût valu à l'Allemagne, le gouvernement de la République fédérale, après un long examen, déclina toute collaboration. La manière de voir allemande fut communiquée à la Suisse, par les Alliés, le 17 juillet 1951. En même temps, les Alliés firent savoir qu'ils allaient imposer l'exécution du plan du 20 avril par le moyen d'un décret de la haute commission alliée. La Suisse fut
invitée à donner son accord et à commencer sans délai la liquidation des avoirs allemands.

Nous ne pouvions déclarer d'emblée que nous approuvions cette procédure. Le transfert, à la République fédérale d'Allemagne, d'un montant en devises de 90 millions de francs suisses, dont la moitié eût dû être constituée par une renonciation, de la Suisse à une part du produit de la liquidation, ne pouvait se justifier que si les Allemands déclaraient accepter les conditions relatives a l'utilisation de ce montant. Une signature allemande paraissait indispensable du fait également qu'on prévoyait, pour la seconde partie des indemnités, des créances inscrites au livre de la dette, à 10 ou

20 ans de terme. Nous chargeâmes alors le chef de la délégation suisse d'entamer avec les autorités allemandes des pourparlers sur la question d'une collaboration technique, à quoi devait naturellement s'ajouter une assurance allemande concernant le paiement, franc de taxes, de la première moitié des indemnités.

II. LE PLAN DE REGLEMENT Au cours de ces conversations et pour la première fois, on parla, du côté allemand, d'une liquidation des prétentions résultant de l'accord de Washington moyennant le paiement d'une somme forfaitaire. La Suisse, dès le début, considéra ce plan avec faveur, sans toutefois prendre officiellement position. Le gouvernement allemand ayant décliné la proposition du 20 avril, faite par la Suisse et les Alliés, il lui appartenait d'en formuler une autre et clé s'entendre, à ce sujet, avec les Alliés. La Suisse fit toutefois remarquer d'emblée qu'un tel plan clé liquidation ne pourrait être exécuté que si la somme forfaitaire était payée par le gouvernement allemand et que si les intérêts suisses étaient dûment pris en considération.

Le 14 septembre, le ministère allemand des finances soumit oralement le plan de liquidation aux conseillers financiers de la haute commission alliée à Bonn. Ceux-ci prièrent le gouvernement allemand de soumettre ce projet par écrit; la haute commission alliée reçut ce projet le 18 octobre.

Par la suite, les Alliés autorisèrent les Allemands à entrer, à ce sujet, en pourparlers avec la Suisse. Une première prise de contact eut heu à Berne au début de décembre entre le ministre Stucki et des représentants du ministère allemand des finances. A la suite de ces discussions, un plan fut établi le 8 décembre. Bien que ni signé ni même paraphé, il devait servir de base à une poursuite des négociations.

Un règlement des prétentions alliées fut prévu au moyen du virement d'un montant forfaitaire que le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne mettrait à la disposition du Conseil fédéral et qui devait être convenu entre les Allemands et les Alliés. Ce paiement devait éteindre les obligations assumées par la Suisse à l'égard des Alliés au sujet de la liquidation des avoirs allemands. Les Alliés devaient confirmer la chose dans un accord séparé. Pour constituer l'indemnité de règlement, les propriétaires allemands auraient été invités a mettre
un certain pourcentage de leurs avoirs en Suisse à la disposition de la République fédérale d'Allemagne. Faute d'une telle cession, les avoirs seraient réalisés et le produit crédité au compte de règlement. Les propriétaires allemands recevraient, dans ce cas, à titre d'indemnité, la contre-valeur en marks allemands.

Parallèlement à ce plan de règlement, le gouvernement fédéral allemand remettrait au Conseil fédéral suisse un montant équivalent pour

régler les prétentions suisses; ce montant serait porté au débit de l'avoir du gouvernement suisse auprès de la caisse de compensation à Berlin.

La commission de surveillance pour l'exécution de l'accord de Washington nous recommanda d'adopter ce plan du 8 décembre comme base de discussion. Nous donnâmes notre accord dans ce sens. Les Alliés confirmaient, le 13 février 1952, qu'ils étaient disposés à accepter, à titre de règlement définitif de leurs créances sur les avoirs allemands en Suisse, un versement comptant de 121,5 millions de francs suisses, dont il fallait déduire les 20 millions de francs suisses avancés par la Suisse à l'Organisation internationale des réfugiés, et ils se déclaraient prêts à conclure à ce sujet un accord avec la Suisse.

Mais comme la République fédérale d'Allemagne n'est pas partie à l'accord de Washington, il fallait aussi conclure avec elle un accord. Les Alliés autorisèrent donc le gouvernement fédéral allemand à mener avec la Suisse des négociations. Celles-ci furent ouvertes le 14 février 1952, à Berne, et aboutirent, le 22 février 1952, à un accord paraphé. Pour tenir compte de divers désirs alliés exprimés après coup, de nouvelles négociations furent reprises en avril avec IRS AllfiTna.nds et un nouveau texte fut paraphé le 24 avril. Deux fois encore, les Alliés soumirent des propositions de modifications, si bien que l'accord germano-suisse sur les avoirs allemands en Suisse n'a pu être signé que le 26 août 1952.

Les négociations relatives à l'accord parallèle avec les Alliés ont été entamées à Berne, le 5 mai. Elles durent être interrompues le 7 mai déjà, car il n'avait pas été possible de s'entendre sur la question de savoir si cet accord touchait également les dispositions de l'article IV de l'accord de Washington concernant le déblocage des avoirs suisses aux Etats-Unis et de l'article "VT relatif à la clause arbitrale. Les négociations suissesalliées ne purent être continuées qu'en août. Elles aboutirent, le 28 août 1952, à la signature de l'accord suisse-allié sur les avoirs allemands en Suisse.

Le plan de règlement, tel qu'il est exposé dans les deux accords que nous soumettons aujourd'hui à votre approbation, représente, à notre avis, la seule façon d'exécuter l'accord de Washington, conformément aux circonstances actuelles. Pour les raisons exposées
plus haut, l'exécution de cet accord, dans sa forme primitive, ne serait guère plus possible. D'autre part, les Alliés n'ont jamais pu se résoudre à prêter la main à une abrogation de l'accord. Même si le but initial de l'accord doit être considéré comme dépassé, il subsiste d'importants intérêts matériels que les Etats alliés, signataires de l'accord, et surtout les autres Etats représentés par eux, ne sont pas prêts à sacrifier. Seul ce plan de règlement permet de résoudre les difficultés à la satisfaction de tous les intéressés. Le fait que la situation politique s'est complètement modifiée depuis l'année 1946 est pris en considération en ce sens que l'Allemagne ne doit plus subir cet accord,

mais qu'elle y devient elle-même partie. Le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne n'a pas seulement promis sa collaboration volontaire, il a même proposé ce plan de règlement. Quant aux prétentions alliées, elles seront réglées par le montant qui aurait été à disposition auprès du « pool », conformément au plan du 20 avril 1951 mentionné ci-dessus, si les avoirs allemands en Suisse avaient été liquidés (135 millions de francs, moins 10% d'escompte pour un paiement anticipé: 121,5 millions de francs). Comme tout mobile politique a disparu et que seuls, dès lors, des intérêts matériels doivent être pris en considétation, ce règlement satisfait intégralement les prétentions initiales des Alliés. Le point de vue juridique de la Suisse est également respecté, puisque les propriétaires allemands ne sont pas expropriés ou, s'ils le sont, reçoivent une indemnité équitable. Certes, ü est nécessaire, pour pouvoir disposer des avoirs allemands en Suisse, de constituer un montant de règlement en faveur de la République fédérale d'Allemagne; cette cession d'un tiers apparaît, toutefois, raisonnable; elle est justifiée par la plus-value qu'ont acquise ces avoirs par suite des différentes réformes monétaires allemandes. Enfin, la substitution d'une indemnité fixe à la moitié du montant qui serait revenue aux Alliés en vertu d'un « pool », alimenté par le produit de la liquidation, permet de tenir compte, d'une manière beaucoup plus libérale, des cas impliquant des conséquences trop rigoureuses. Comme la Suisse, en fait, n'est plus tenue de réaliser, en faveur du « pool », une somme aussi élevée que possible, elle peut, d'autant mieux, recommander une franchise et des exceptions en faveur de certaines catégories de personnes, ce qui, d'ailleurs, a été prévu.

Comme le plan de règlement représente une modification fondamentale des dispositions de liquidation prévues à l'origine dans l'accord de Washington et que ce dernier a été approuvé par l'Assemblée fédérale, la décision doit à nouveau être prise par les chambres. C'est à cet effet que nous vous soumettons le texte des deux nouveaux accords que nous commenterons brièvement.

III. L'ACCORD AVEC LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE Alors que la suppression des dispositions de l'accord de Washington, qui visent les avoirs allemands en Suisse, fait
l'objet de l'accord avec les Alliés, l'accord entre la Suisse et l'Allemagne contient les dispositions sur la manière de se procurer la somme forfaitaire et sur le sort des avoirs allemands en Suisse, une fois que les Alliés auront renoncé à leurs prétentions.

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1. La constitution de l'indemnité de règlement Le montant de l'indemnité de règlement fut fixé au cours de conversations préliminaires entre la haute commission alliée et le gouvernement allemand sur la base de la somme qui serait revenue aux Alliés, conformément au plan du 20 avril 1951, par suite de l'exécution de l'accord de Washington. Cette somme, nous l'avons dit, avait été fixée à 135 millions de francs suisses. Comme ce paiement, qui aurait été effectué seulement au fur et à mesure de la liquidation des avoirs allemands, se serait espacé vraisemblablement sur une période de deux ans, les Alliés se déclarèrent prêts a accepter un escompte de 10%, en cas de paiement comptant. L'indemnité de règlement définitive fut ainsi fixé à 121 500 000 francs suisses (art. 1).

Pour que ce montant pût être versé comptant, les représentants de la République fédérale d'Allemagne s'étaient mis en rapport, en décembre dernier déjà, avec un consortium de banques suisses. L'emprunt que désire souscrire l'Allemagne serait garanti par les contributions des propriétaires allemands, qui devraient être versées à un compte (compte de règlement) ouvert auprès de la banque nationale suisse, an nom de la, « Tîanlî T)p,ut/scbfir Länder », en faveur du gouvernement de la République fédérale d'Allemagne (art. 2). Pour garantir la couverture nécessaire, ces contributions ont dû être prévues de telle manière qu'elles correspondissent à la relation existant entre l'indemnité de règlement et la valeur totale des avoirs allemands en Suisse. Cette valeur représentant, après déduction de la franchise prévue, environ 360 millions de francs suisses, la contribution a été fixée, en principe, à un tiers (art. 4, al. 1, ch. 2).

Pour que les choses soient en tout cas réglées d'une façon définitive, un délai de deux mois a été fixé, pendant lequel le propriétaire devra faire parvenir une déclaration relative au paiement de sa contribution. Les avoirs pour lesquels, à l'expiration de ce délai, une telle déclaration n'aura pas été remise ou pour lesquels, par la suite, la contribution fixée n'aura pas été versée, seront réalisés et leur produit crédité en. francs suisses au compte de règlement (art. 8). Cela constitue une garantie supplémentaire pour le financement de l'indemnité de règlement et, en. définitive, de l'avance des banques
suisses.

2. Les personnes touchées par l'accord L'accord s'applique en principe aux propriétaires allemands (« Allemands en Allemagne »), dont les avoirs en Suisse eussent été liquidés aux termes de l'accord de Washington dans sa forme initiale. La notion « Allemands en Allemagne », au sens de l'accord de Washington, a été précisée par la pratique de la commission suisse de recours. En outre, durant les négociations quadripartites, à Washington, au printemps 1949 et, à Berne, au printemps 1951, une série de questions d'interprétation ont été réglées

11 d'un commun accord par les experts suisses et alliés. Les critères ainsi établis ont servi de base aux définitions du nouvel accord. C'est ainsi que, notamment, la date du 16 février 1945 relative au blocage des avoirs allemands en Suisse et celle du 31 décembre 1947, déterminante pour la libération des avoirs nouvellement acquis, ont été choisies comme dates critères. Est donc considéré comme allemande en Allemagne toute personne physique de nationalité allemande qui résidait en Allemagne le 17 février 1945 ou qui, entre cette date et le 1er janvier 1948, a résidé deux mois en Allemagne (art. 16), Les mêmes dates critères sont valables pour lespersonnes morales (art. 18).

Conformément au plan suisse-allié du 20 avril 1951, cet accord ne s'applique pas aux avoirs en Suisse des personnes se trouvant dans l'Allemagne de l'Est (art. 19).

3. Exceptions en faveur de certaines catégories de personnes et d'avoirs Comme cela a été dit ci-dessus, la fixation d'une indemnité forfaitaire, déliant la Suisse de l'obligation d'alimenter un « pool », a permis de tenir compte de toutes les revendications déjà formulées par la Suisse, au cours de précédentes négociations, au sujet d'un traitement exceptionnel de certaines catégories de personnes et d'avoirs. En outre, sur les désirs des Alliés et des Allemands, d'autres allégements ont été prévus; ils sont toutefois maintenus dans les limites qui ne compromettent pas la couverture de l'indemnité de règlement. Ces mesures ont été dictées par l'équité ou par des raisons pratiques. Plusieurs de ces cas, à l'égard desquels un traitement particulier se justifie, vous sont déjà connus par notre rapport du 13 avril 1949 f 1 ).

A. Une première catégorie comprend les personnes et les avoirs qui, tout en étant soumis aux dispositions de l'accord, seront libérés, sur requête, de l'assujettissement à une contribution en faveur de l'indemnité de règlement; il s'agit: a. Des avoirs jusqu'à 10 000 francs suisses, en faveur desquels une franchise générale est prévue (art. 5, 1er al., ch. 1). Il est superflu, d'insister sur l'importance sociale de cette mesure, recommandée depuis longtemps par la Suisse. Notre pays avait demandé la libération immédiate de ces avoirs déjà au cours des négociations de Washington. En outre, cette franchise représente un gros allégement administratif,
car elle touche environ 15 000 personnes (les 4/5, en chiffres ronds, de tous les créanciers). Le montant des avoirs jusqu'à 10 000 francs est, en chiffres ronds, de 26 millions de francs suisses. Comme cela a déjà été dit, il n'a pas été pria en considération lors du calcul de l'indemnité de règlement; (!) FF 1949, I, 734 a.

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b. Des doubles nationaux germano-suisses. Cette catégorie a été encore élargie, de façon à comprendre les ressortissants allemands qui possèdent d'autres nationalités (art. 5, 1er al., ch. 2, lettre 6); c. Des Suissesses qui sont devenues allemandes par mariage (art. 5, 1er al., ch. 2, lettre a). La Suisse a toujours demandé, pour cette catégorie également, un traitement de faveur. Les exceptions prévues au chapitre I, A, e, de l'annexe à l'accord de Washington, que la pratique de la commission mixte avait toutefois liées à certaines conditions restrictives, ont été maintenant élargies et généralisées; d. Des personnes victimes du régime national-socialiste et des personnes qui sont au bénéfice d'une décision de restitution (art. 5, 1er al., ch. 2, lettres c et d); e. Des personnes morales dont les participations sont en majorité nonallemandes (art. 5, 1er al,, ch. 2, lettre e). La réglementation prévue correspond aux principes déjà contenus dans l'accord de Washington.

De même, seront dûment protégées les participations minoritaires substantielles non-allemandes à des personnes morales (art. 5, 1er al., ch. 2, lettre e), comme à des fondations de famille (art. 5, 2e al.).

B. Une deuxième catégorie concerne les brevets et marques de fabrique (art. 6). Cette exception concerne 18 000 brevets et marques, enregistrés en Suisse et dont le sort, aux termes de l'accord de Washington, devait faire l'objet d'un règlement ultérieur. La Suisse avait, par la suite, comme on le sait, refusé de prendre part aux négociations de Londres en 1946, dont le résultat fut que quiconque put prendre des licences sur des brevets de propriétaires allemands. La Suisse a conservé ces droits à leurs propriétaires allemands. Les brevets, marques de fabrique, etc. seront libérés sans contribution, lors de l'entrée en vigueur de cet accord (art, 13, ch. 3).

C. Une troisième catégorie concerne les personnes qui ne sont pas considérées comme allemandes en Allemagne et les avoirs qui sont expressément libérés des dispositions de l'accord. Elle comprend entre autres (art. 21) les biens de l'ancien « Reich » allemand, de la Reichsbank et de la Reichsbahn, qui avaient déjà été expressément exemptés par l'accord de Washington; sont aussi compris le lieu dit Tägermoos, les avoirs des personnes domiciliées dans les enclaves de Busingen
et de Jestetten, les usines hydro-électriques germano-suisses, déjà mentionnées dans notre rapport du 13 avril 1949 (1), les sanatoriums allemands, les montants qui doivent être versés au clearing et enfin les Allemands qui ont participé à la guerre et qui sont domiciliés en Suisse (art. 17).

f 1 ) FF 1949, I, 786.

13 4. Versement de la contribution et déblocage

Le principe du versement d'une contribution au compte de règlement en faveur de la République fédérale d'Allemagne a déjà été exposé d'une manière approfondie. Les dispositions correspondantes de l'accord (art. 2, 3, 4 et 7) n'appellent pas de nouveaux commentaires.

Dès l'entrée en vigueur de l'accord, les propriétaires intéressés seront invités, par des publications officielles en Suisse et en Allemagne, à verser la contribution, en tant qu'ils ne remplissent pas les conditions voulues pour une requête de déblocage. L'office suisse de compensation, de plus, se mettra en rapport avec les propriétaires ou leurs représentants en Suisse (art. 7, ch. 2). Les propriétaires allemands peuvent eux-mêmes ou par l'entremise d'un mandataire, dans l'espace de deux mois, déclarer par écrit à l'office suisse de compensation qu'ils sont prêts à verser la contribution. L'office suisse de compensation, de son côté, déterminera le montant de la contribution sur la base de son estimation.

Pour des raisons pratiques, il est apparu nécessaire de prévoir que le versement de la contribution aura lieu, en principe, sous la forme d'un paiement comptant, s'élevant au tiers de l'avoir en cause, et non sous la forme d'une renonciation à un tiers de l'avoir. De nombreux avoirs sont, de nature, indivisibles. Dans d'autres cas, une partie séparée de l'ensemble de l'avoir ne représenterait pas une part proportionnelle à la valeur totale.

Qu'on songe, par exemple, aux immeubles, aux bâtiments, comme aussi aux établissements stables et aux sociétés. Il incombe au propriétaire de se procurer les moyens nécessaires au versement de la contribution, ce qui peut être réalisé, par exemple, par la prise d'une hypothèque sur l'immeuble en cause. L'office suisse de compensation approuvera les dispositions ainsi prises par le propriétaire, sur ses avoirs bloqués, et nécessitées par l'apport de sa contribution (art. 7, ch. 3).

Le montant de la contribution, fixé en règle générale au tiers de la valeur de l'avoir, a été réduit, pour les avoirs entre 10 000 et 15 000 francs à la partie dépassant 10000 francs (art. 4, 1e* al., ch. 1). On évite ainsi que les propriétaires de tels avoirs n'obtiennent le déblocage d'un montant inférieur à ceux qui bénéficient de la franchise. Sans cette disposition, le propriétaire d'un avoir de 12 000 francs,
par exemple, n'aurait obtenu le déblocage que de 8000 francs.

Un pourcentage spécial est en outre applicable aux avoirs qui auraient été sauvés pour leurs propriétaires grâce à un accord concernant les conflits de séquestre conclu par la Suisse avec un pays tiers et qui, sans un tel accord, seraient totalement sujets aux mesures étrangères de séquestre (art, 4, 1« al., ch. 3).

Le déblocage des avoirs a lieu au moment du paiement de la contribution. Il est prononcé, en règle générale, au moment de la remise de la

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requête de déblocage, pour les catégories privilégiées mentionnées ci-dessus (art. 13). La libération est inconditionnelle, de telle manière que le propriétaire, ensuite, peut disposer de son avoir en toute liberté.

5. Réalisation et indemnisation Les avoirs sur lesquels aucune contribution n'aura été versée ou en faveur desquels une requête de déblocage n'aura pas été adressée à temps seront réalisés; leur produit sera versé au compte de règlement. L'office suisse de compensation communiquera, dans chaque cas, au ministère allemand des finances, les indications nécessaires sur la personne du propriétaire et sur le produit obtenu (art. 8), afin, que ce ministère puisse tenir la contre-valeur, en monnaie allemande, à la disposition du propriétaire (art. 9). S'il devait apparaître, après coup, qu'un avoir a été ainsi réalisé et transféré, alors qu'il ne tombait pas sous le coup des dispositions de l'accord, le gouvernement fédéral allemand restituera le montant correspondant en francs suisses. En outre, la République fédérale d'Allemagne renonce, en son nom et au nom clo ses ressortissants, à soulever quelque objection que ce soit contre les transformations d'avoirs entreprises sur la base de l'arrêté du Conseil fédéral du 16 février 1945 et sur la base du présent l'accord. Cette renonciation vaut aussi dans le cas où clés avoirs en pays tiers ne sont pas libérés en faveur de la Suisse (art. 10).

6. Organes d'exécution L'accord de Washington, déjà, avait réservé exclusivement à un service suisse le recensement et l'administration des avoirs allemands.

A cet effet fut créé, au sein de l'office suisse de compensation, un nouveau service: le service de la liquidation des avoirs allemands. Il n'y a aucun motif de confier à un autre service l'exécution du plan de règlement. Maintenant, comme avant, il y a une importance de principe à ce que les avoirs allemands en Suisse soient soumis exclusivement aux autorités du pays à la gérance duquel ils ont été confiés. L'office suisse de compensation exercera son activité de manière complètement indépendante, notamment qua.nt à la procédure relative au versement des contributions ; il ne livrera aucun renseignement à des autorités étrangères au sujet des cas particuliers. La commission mixte, instituée par l'accord de Washington, perd dès lors sa raison d'être ;
elle ne sera pas remplacée par une autorité germanosuisse correspondante.

La collaboration entre l'office de compensation et les organes allemands se limite à la collaboration technique, requise pour l'exécution de l'accord, comme par exemple &\i paiement en monnaie allemande de la contre-valeur des avoirs réalisés, conformément à l'article 8.

15

Nous avons l'intention de confier également la surveillance de l'exécution de cet accord a la commission de surveillance pour l'exécution de l'accord de Washington. Cette commission, dans laquelle sont dûment représentés les groupes les plus importants des chambres fédérales, fut instituée à la suite d'un postulat du Conseil national. Elle continuera, comme jusqu'ici, à exercer son activité.

Aux termes de l'accord de Washington (chapitre I, ch. 5), les frais de gérance et de liquidation des avoirs aUemands étaient à la charge de la Suisse. Celle-ci eût pu les déduire de sa part du produit de la liquidation.

Comme cette part n'existera plus, il ne conviendrait pas de couvrir ces frais au moyen des fonds de la Confédération. Aussi un émolument administratif de 2 pour cent sera-t-il prélevé lors du déblocage ou de la réalisation des avoirs allemands (art. 7, ch. 4; art. S, 1er al,). Ce taux devrait permettre de couvrir le crédit supplémentaire d'un montant de 2 865 000 francs octroyé par les chambres fédérales, en décembre dernier, au département politique pour les frais de l'accord. Il devrait permettre aussi de couvrir les frais que nécessitera encore l'exécution du présent accord.

ïj'autorité suisse du, recours, créée en vertu de l'accord de Washington et devant laquelle peuvent être attaquées les décisions de l'office de compensation, a été maintenue. Les décisions prises jusqu'à ce jour par cette autorité de recours -- on en compte environ 500 -- demeurent valables et les procédures ne peuvent pas être rouvertes (art. 14). Si des divergences devaient s'élever au sujet de l'application et de l'interprétation de l'accord, elles pourraient être soumises à un tribunal arbitral (art. 15). La délégation allemande a exprimé le voeu qu'on puisse, le cas échéant, interjeter appel, conformément à la réglementation prévue par l'accord de Washington, auprès du tribunal arbitral, contre les nouvelles décisions de l'autorité suisse de recours. Cela aura pour conséquence que toutes les décisions qui seront prises à l'avenir par la commission suisse de recours seront portées à la connaissance des autorités allemandes.

IV. L'ACCORD AVEC LES ALLIÉS La suppression des dispositions de l'accord de Washington, qui concernent la liquidation des avoirs allemands en Suisse fait l'objet de l'accord conclu, le 28 août
1952, entre la Suisse et les Alliés. Il prévoit le paiement de la somme forfaitaire de 121,5 millions de francs suisses dont sera déduite l'avance de 20 millions de francs suisses, faite par la Suisse en juillet 1948 à l'Organisation internationale des réfugiés. Ce paiement satisfera les prétentions alliées sur les avoirs allemands en Suisse dont les propriétaires habitent le territoire de la République fédérale d'Allemagne ou des secteurs ouest de Berlin (art. 1, al. 1), Quant aux avoirs dont les propriétaires résident dans d'autres parties de l'ancien Reich allemand, ils ne changent pas de statut, c'est-à-dire ils restent bloqués.

16

Les autres dispositions de l'accord de Washington demeurent en vigueur.

Il s'agit de l'engagement relatif au déblocage des avoirs suisses aux EtatsUnis et à la suppression des listes noires, ainsi que de la clause relative au tribunal arbitral. Quant à la question de la restitution de l'or spolié, les Alliés ont confirmé dans leur note du 13 février 1952, mentionnée à la page 8 de ce message, qu'ils ont reçu pleine satisfaction de la part de la Suisse. Nous aimerions ajouter qu'il a été déclaré expressément que la commission mixte, prévue par l'accord de Washington, cessera de fonctionner.

Pour que les propriétaires allemands puissent disposer pleinement de leurs avoirs libérés en Suisse, il a été convenu d'abroger la loi n° 5 du conseil de contrôle allié, ce qui avait déjà été envisagé l'année passée par les Alliés. Cette loi, édictée le 30 octobre 1945 par le conseil de contrôle allié à Berlin, ordonnait l'expropriation générale des avoirs allemands à l'étranger et formait la base des prétentions alliées sur les avoirs allemands en Suisse. Conformément à l'usage international, nous n'avons jamais reconnu les effets de ce décret sur le territoire de la Confédération. La levée de l'application de la loi 11° ö du conseil de contrôle allié en ce qui concerne les avoirs allemands en Suisse se fera par l'élimination de la Suisse de la liste annexée à la loi n° 63 de la haute commission alliée (art. 2).

Comme l'accord ne résout pas toutes les questions soulevées par l'accord de Washington, les parties contractantes réservent expressément leur position à l'égard des questions non réglées (art. 1, 3e al.). Par un échange de lettres, il fut constaté en particulier que les divergences d'interprétation des articles IV et VI de l'accord primitif ne pouvaient pas être éliminées, c'est-à-dire que les parties n'ont pas abandonné leur position. D'autres réserves limitant la portée de l'accord se trouvent aux articles 3 et 4.

L'accord ne requérant pas d'approbation parlementaire du côté allié, il entrera en vigueur au moment où le Conseil fédéral aura notifié aux Alliés son approbation par l'Assemblée fédérale. Cette notification ne pourra toutefois survenir que quand les instruments de ratification des accords entre la Suisse et la République fédérale d'Allemagne concernant les avoirs allemands en Suisse et
concernant le règlement des créances de la Confédération suisse envers l'ancien Reich allemand auront été échangés (art. 6). L'entrée en vigueur simultanée des trois accords s'explique par le fait des liens étroits existant entre eux. Pour ce qui concerne en particulier les rapports entre l'accord sur le règlement des créances de la Confédération suisse envers l'ancien Reich allemand et les accords faisant l'objet de ce message, il nous reste à dire quelques mots dans ce qui va suivre.

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Selon l'accord du 25 mai 1946, la Suisse aurait reçu la moitié du résultat de la liquidation des avoirs allemands sans aucune limitation dans l'emploi de cette part. Le plan suisse-allié d'avril 1951 susmentionné est fondé sur la présomption que cette part s'élèverait à 135 millions de francs suisses, soit 121,5 millions de francs suisses, si l'on déduit 10 pour cent. Selon les nouveaux accords soumis à votre approbation, la Suisse renonce à toutes prétentions aux avoirs allemands se trouvant dans notre pays. Cette renonciation a été facilitée par une entente avec la République fédérale d'Allemagne sur le règlement des créances de la Confédération envers l'ancien Reich allemand, entente intervenue lors des délibérations sur les deux accords. Ce règlement a reçu l'approbation nécessaire des puissances d'occupation occidentales. Selon cette entente, la République fédérale d'Allemagne fera, dans des délais relativement courts, un premier paiement de 121,5 millions de francs suisses, correspondant en quelque sorte au montant forfaitaire à payer aux Alliés. La différence essentielle est que le paiement à effectuer à la Suisse constitue l'accomplissement partiel d'une obligation reconnue et existant depuis longtemps.

Nous vous prions de bien vouloir, par l'adoption du projet d'arrêté ci-joint, approuver les deux accords relatifs à la liquidation de l'accord de Washington et autoriser en même temps le Conseil fédéral à arrêter les prescriptions nécessaires à leur exécution.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 29 août 1952.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le, président de la Confédération, KOBELT Le chancelier de la Confédération, Ch. OSER

Feuille, fédérale. 104e année. Vol. HI.

18 (Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL concernant

les accords relatifs aux avoirs allemands en Suisse

L'Assemblée, fédérale, de. la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 29 août 1952, arrête. : Article premier 1

Sont approuvés les accords conclus les 26 août 1952 et 28 août 1952 entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne, ainsi qu'entre la Confédération suisse, d'une part, et les Etats-Unis d'Amérique, la République française et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord d'autre part, au sujet des avoirs allemands en Suisse.

2

Le Conseil fédéral est autorisé à ratifier ces accords.

Art. 2 Le Conseil fédéral est autorisé à arrêter les prescriptions nécessaires à l'exécution de ces accords.

19

Traduction

Annexe I

ACCORD entre

la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne BUT les avoirs allemands en Suisse

LA CONFÉDÉRATION SUISSE et LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE eu égard au fait que le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne mettra à la disposition du Conseil fédéral suisse, deux: semaines après la notification de l'entrée en vigueur de l'accord qui doit être conclu entre la Suisse, la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis conformément au paragraphe suivant, un montant de 121 500 000 francs suisses, qu'en outre le Conseil fédéral suisse conclut avec les gouvernements de la République française, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et des Etats-Unis d'Amérique un accord relatif aux avoirs allemands en Suisse qui tombent sous les dispositions de l'accord de Washington du 25 mai 1946, sont convenus de conclure l'accord suivant.

Ont désigné à cet effet, comme plénipotentiaires : Le Conseil fédéral suisse : M. Walter Stucki, ministre plénipotentiaire, délégué du Conseil fédéral pour des missions spéciales, Le Président de la République fédérale d'Allemagne: M. Bernhard WolfF, Ministerialdirektor du ministère fédéral des finances.

Les plénipotentiaires, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs et les avoir trouvés en bonne et due forme, sont convenus des dispositions suivantes :

20 Partie I: Règlement des prétentions de la France, du Royaume-Uni et des Etats-Unis Article 1 Le Conseil fédéral suisse virera immédiatement sur un compte que désigneront les gouvernements de la République française et du RoyaumeUni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et des Etats-Unis d'Amérique, après déduction d'un montant de 20 millions de francs suisses que la Suisse a avancé à l'Organisation internationale des réfugiés, le montant de 121 500 000 francs suisses (indemnité de règlement) que le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne doit lui payer.

Partie II: Constitution de l'indemnité de règlement Article 2 En vue de constituer l'indemnité de règlement, un compte (compte de règlement) sera ouvert auprès de la banque nationale, au nom de la Bank Deutscher Lander, en faveur du gouvernement de la République fédérale d'Allemagne. Il sera alimenté comme suit: a. Par les contributions des propriétaires allemands (Allemands en Allemagne) sur leurs avoirs en Suisse; 0. Par le produit de la réalisation des avoirs des propriétaires allemands qui ne versent pas la contribution prévue à l'article 3; c. Par le produit de la réalisation des avoirs de propriétaires allemands qui remplissent les conditions de l'article 5, mais qui n'auront pas introduit de demande de déblocage dans un délai de deux mois après la publication de la sommation prévue à l'article 7, chiffre 2.

Partie III: Cession Article 3 Les propriétaires dont la totalité des avoirs en Suisse dépasse le montant de 10 000 francs suisses renoncent à la part de la valeur de leurs avoirs prévue à l'article 4 et effectuent un paiement de cette importance, en francs suisses, au compte de règlement.

Article 4 (1) La contribution qu'un propriétaire est appelé à faire pour pouvoir disposer de la partie restante de son avoir en Suisse, sera fixée: 1. Pour les avoirs dont la valeur globale se situe entre 10 000 et 15 000 francs suisses : au montant dépassant 10 000 francs ;

21

2. Pour les avoirs dont la valeur globale dépasse 15000 francs suisses: à 33% pour cent de la valeur globale; 3. Pour les avoirs qui ont été laissés à la Suisse en vertu d'accords sur les conflits de séquestre conclus par la Suisse avec des Etats tiers: à 50 pour cent de la valeur globale.

(2) L'estimation des avoirs est faite par Foffice sinsse de compensation; les montants éventuellement libérés pendant la période de blocage et mis à la disposition de l'ayant droit pour des buts personnels sont compris dans cette estimation.

Article 5 (1) II sera renoncé, à la requête du propriétaire, à la perception d'une contribution au sens des articles 3 et 4 à l'égard: 1. Des avoirs jusqu'à concurrence d'une valeur globale de 10 000 francs suisses; seront compris dans cette valeur les montants libérés par l'office suisse de compensation pendant la période de blocage pour les besoins personnels de l'ayant droit; 2. Des avoirs des catégories suivantes de propriétaires, sans tenir compte de la valeur globale des avoirs de chaque propriétaire: a. Les femmes qui sont ou étaient mariées avec des Allemands et qui, par suite de leur mariage, sont devenues des ressortissantes allemandes, mais qui, au moment de leur mariage, possédaient la nationalité suisse; 6. Les personnes qui, le 16 février 1945, outre la nationalité allemande, possédaient celle d'un autre Etat à condition que l'Etat du second indigénat appuie en leur faveur une requête appropriée; c. Les personnes qui ont perdu leur vie ou, dans une mesure considérable, leur liberté ou encore tous leurs droits de citoyens allemands en vertu d'une loi, d'un décret, d'une ordonnance ou d'une mesure du gouvernement national-socialiste allemand à cause de leur race ou pour des raisons politiques ou religieuses. Cette catégorie comprend également les personnes qui, à cause de leur race ou, pour des motifs politiques ou religieux, ont été arrêtées hors d'Allemagne par les autorités allemandes ou à leur instigation, puis conduites ou détenues en Allemagne; d. Les personnes qui, sur présentation d'un jugement rendu en Allemagne, ayant force de loi et muni d'une attestation ou sur la base d'une transaction conclue devant un tribunal en Allemagne et munie d'une attestation, peuvent prouver que leur avoir en Suisse leur a été restitué sur la base de la législation valable en Allemagne

au sujet de la restitution des biens spoliés et de l'indemnisation des victimes du gouvernement national-socialiste allemand; e. Les personnes morales de droit privé ou public, les sociétés commerciales et les communautés de personnes qui ont en Allemagne leur siège ou le lieu de leur activité économique ou de leur direction et auxquelles, le 16 février 1945, participaient directement ou indirectement, avec plus de 50 pour cent, des personnes de nationalité non allemande. Si la participation directe ou indirecte dépassait 25 pour cent, mais non 50 pour cent, des mesures appropriées seraient prises pour sauvegarder convenablement les intérêts des participants non allemands.

(2) S'il s'agit de fondations de famille auxquelles participent des bénéficiaires non allemands, les mesures nécessaires seront prises pour sauvegarder leurs intérêts.

Article 6 Une contribution au sens dea articles 3 et 4 et l'émolument administratif prévu par l'article 7, chiffre 4, ne seront pas demandés aux titulaires allemands de droits de propriété industrielle (brevets d'invention, modèles d'utilité, dessins et modèles, marques de fabrique ou de commerce), de demandes de dépôt et de droits d'auteur en tant qu'il ne s'agit pas de droits qui font partie intégrante d'une entreprise allemande en Suisse laquelle, en tant qu'avoir allemand, tombe sous l'article 3 de cet accord, ou de droits utilisés par une telle entreprise.

Article 7 Pour l'exécution des dispositions qui précèdent, l'office suisse de compensation prendra les mesures suivantes : 1. Détermination de la contribution, prévue à l'article 4, que le propriétaire doit effectuer pour pouvoir disposer de la part restante de son avoir en Suisse; 2. Sommation, dans une forme appropriée, à tous les propriétaires d'avoirs en Suisse pour les engager à introduire une requête de déblocage conformément à l'article 5, soit personnellement soit par l'entremise d'un mandataire, dans un délai de deux mois après la publication de la sommation ou à remettre une déclaration écrite attestant qu'ils payeront en faveur de la République fédérale d'Allemagne le montant déterminé à l'article 4, cependant que la part restante de leurs avoirs en Suisse sera libérée du blocage; 3. Approbation des dispositions prises par le propriétaire, sur ses avoirs en Suisse, en vue de constituer sa contribution;

23 4. Perception d'un émolument administratif de 2 pour cent sur les avoirs à libérer.

Partie IV : Transformation et transfert des avoirs allemands Article 8 (1) L'office suisse de compensation transformera, au mieux, en avoirs liquides, si cela n'a pas déjà été fait, les avoirs allemands en Suisse pour lesquels, dans l'espace de deux mois après la publication de la sommation prévue à l'article 7, chiffre 2, aucune déclaration relative au versement d'une contribution n'aura été remise ou pour lesquels aucune demande de déblocage n'aura été présentée; il veillera à ce que ces avoirs soient virés au compte de règlement après déduction d'un émolument administratif de 2 pour cent calculé sur les montants virés.

(2) L'office suisse de compensation portera les mesures prises conformément à l'alinéa 1 à la connaissance du ministère allemand des finances, en lui communiquant les précisions nécessaires sur la personne des créanciers.

Article 9 Le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne tient à la disposition des propriétaires dont les avoirs ont été transformés conformément à l'article 8 la contre-valeur totale en Deutsche Mark, telle qu'elle résulte du cours de conversion officiel du franc suisse.

Article 10 (1) La République fédérale d'Allemagne ne soulèvera aucune objection, de quelque nature que ce soit, en son nom et au nom de ses ressortissants, contre les transformations d'avoirs allemands en Suisse, entreprises ou à entreprendre par la Suisse, sur la base de l'arrêté du Conseil fédéral du 16 février 1945, avec ses modifications et compléments, ou sur la base du présent accord. Les dispositions de l'alinéa 2 de cet article sont applicables par analogie.

(2) S'il se révèle, après coup, que les conditions d'une transformation fondée sur cet accord n'ont pas été réunies, pour des avoirs transformés selon l'article 8, le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne dédommagera les débiteurs suisses ou les gérants de fortune et restituera en francs suisses le montant correspondant.

(3) La République fédérale d'Allemagne renonce, pour elle et pour ses ressortissants, à toute prétention à l'égard du gouvernement suisse et des personnes physiques ou morales suisses, sur les avoirs qui sont situés dans un pays tiers et qui n'ont pas été libérés par ce pays en faveur de la Suisse.

24

Partie V : Procédure Article 11 L'office suisse de compensation conserve les pouvoirs qui lui ont été octroyés, en vertu des dispositions du droit suisse, à l'égard des avoirs allemands, jusqu'à leur libération définitive.

Article 12 Les mesures nécessaires à l'exécution du présent accord seront prises, du côté suisse, par l'office suisse de compensation; le Conseil fédéral suisse arrête les prescriptions nécessaires a cet effet.

Article 13 L'office suisse de compensation libérera du blocage: .1. Les avoirs mentionnés à l'article 5, dès qu'une requête du propriétaire aura été présentée dans le délai de deux mois suivant la publication de la sommation prévue à l'article 7 chiffre 2; 2. Les avoirs mentionnés à l'article 3, dès que la contribution mentionnée à l'article 4 aura été versée; 3. Les droits mentionnés à l'article 6, le jour de l'entrée en vigueur de cet accord.

Article 14 (1) Les décisions que l'office suisse de compensation aura prises lors de l'exécution du présent accord pourront être attaquées devant l'autorité suisse de recours prévue à. l'article 2 de l'arrêté du Conseil fédéral du 27 décembre 1946. Les décisions de cette autorité de recours seront notifiées, dûment motivées, au ministère fédéral allemand des finances.

(2) Les décisions prises par cette autorité de recours avant l'entrée en vigueur du présent accord demeurent valables.

Article 15 (1) Si les gouvernements des deux parties contractantes ne peuvent s'entendre sur l'application ou l'interprétation du présent accord, le litige sera porté devant un tribunal arbitral. En outre, le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne pourra interjeter appel auprès du tribunal arbitral, contre les décisions de l'autorité suisse de recours, dans un délai d'un mois après leur notification.

(2) Le tribunal arbitral se compose de trois membres; chaque partie contractante en nomme un, cependant que le troisième est désigné d'un commun accord. Si les parties contractantes ne peuvent s'entendre sur le choix du troisième membre, celui-ci sera désigné par le président de la cour internationale de justice.

25

(3) Sont applicables par analogie, pour la procédure devant le tribunal arbitral, les dispositions de la convention de La Haye, du 18 octobre 1907, pour le règlement pacifique des conflits internationaux. Le tribunal arbitral statue souverainement sur la répartition des frais de la procédure arbitrale.

(4) Le tribunal arbitral statue souverainement sur le droit à appliquer.

H applique notamment le droit coutumier international comme les traités internationaux entrant en ligne de compte et, quant aux questions de droit privé, les règles concordantes du droit international privé des deux Etats ou, en l'absence de telles règles concordantes, le droit international privé de l'un des deux Etats.

(5) Les décisions du tribunal arbitral sont définitives.

Partie VI: Définitions Article 16 (1) Sont considérées comme Allemands en Allemagne les personnes physiques de nationalité allemande qui résidaient en Allemagne le 17 février 1945 ou y ont fait un séjour ininterrompu de deux mois entre cette date et le 1er janvier 1948 ou dont le séjour aura pris fin entre ces deux dates ; les membres des forces armées allemandes sont considérés comme des Allemands en Allemagne, où qu'ils se soient trouvés pendant la période déterminante.

(2) Sont considérées en outre comme Allemands en Allemagne les personnes physiques de nationalité allemande qui, avant le 1er janvier 1948, en vertu de l'article 70 de la constitution fédérale suisse ou de l'article 10 de la loi fédérale suisse du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers, ont été expulsées ou renvoyées de Suisse, ou à l'égard desquelles une telle décision a été prise avant le 1er janvier 1948 et exécutée par la suite. En outre sont considérées comme Allemands en Allemagne les personnes physiques de nationalité allemande qui, avant le 1er janvier 1948, ont été l'objet d'une décision de rapatriement fondée sur une disposition des autorités compétentes d'un pays tiers en tant que ces personnes, par la suite, ont été rapatriées en Allemagne.

Article 17 Ne sont pas considérées comme Allemands en Allemagne, au sens du présent accord, les personnes physiques de nationalité allemande qui 1. Ont perdu la nationalité allemande avant le 27 juin 1946 et ne l'ont pas recouvrée avant le 1er janvier 1948; 2. En tant que de souche allemande (Volksdeutsche) -- il s'agit notamment des Allemands des Sudètes, de Danzig ou des pays baltes --

·26 sont devenues des ressortissants allemands en vertu d'un décret générai des autorités allemandes; 3. En tant que participants à la guerre, habitaient hors d'Allemagne avant leur appartenance aux forces armées et qui, après leur licenciement ou, en tant que prisonniers de guerre, après leur libération, sont retournées sans délai à l'étranger; en outre les participants à la guerre qui avaient leur domicile en Suisse et dont les familles sont demeurées en Suisse, même si ces personnes n'y sont retournées que plus tard.

Article 18 (1) Sont également considérées comme Allemands en Allemagne toutes les personnes morales de droit privé et public, les sociétés commerciales, les communautés de personnes, les fondations, etc. : 1. Qui sont constituées selon le droit allemand ou qui ont en Allemagne leur siège ou le lieu de leur activité économique. Est réservé l'article 5 (1) chiifre 2e); ou 2. Qui sont constituées hors d'Allemagne et de la Suisse et dont la direction se trouve ou se trouvait en Allemagne; ou 3. Qui sont constituées hors d'Allemagne et de la Suisse et auxquelles participent ou participaient, le 16 février 1945, directement ou indirectement, des Allemands en Allemagne à raison de 50 pour cent ou plus.

Dans le cas d'une participation allemande de plus de 25 pour cent mais de moins de 50 pour cent, la part des avoirs en Suisse correspondant à la participation allemande sera soumise au présent accord.

(2) Les mesures de blocage ou de séquestre qui ont été prises par d'autres pays à l'égard des personnes mentionnées au paragraphe 1, chiffres 2 et 3, n'ont pas éliminé l'intérêt allemand en ce qui concerne des avoirs situés en Suisse.

(3) Sont réservées les dispositions spéciales des accords sur les conflits de séquestre et d'autres accords conclus entre la Suisse et ces pays.

Article 19 Par Allemagne au sens de cet accord on entend le territoire de la République fédérale d'Allemagne et de Berlin (Ouest).

Article 20 (1) Sont considérés comme des avoirs de propriétaires allemands, au sens du présent accord, tous les avoirs acquis avant le 1er janvier 1948 et situés en Suisse, tels que les créances libellées en monnaie suisse ou étrangère dont

les débiteurs résident en Suisse ou y ont leur siège -- à l'exception des créances garanties par des hypothèques sur des immeubles en Allemagne ou sur des navires enregistrés dans le registre allemand des navires ---, en outre, les titres, billets de banque, or, objets de valeur, marchandises, immeubles, droit, etc., participations de tout genre à des personnes morales ou à des communautés de personnes domiciliées en Suisse.

Le moment de la naissance du droit détermine celui de l'acquisition.

(2) Les avoirs acquis avant le 1er janvier 1948 tombent également sous les dispositions du présent accord si l'acquéreur tout en étant un Allemand en Allemagne au sens de l'accord, ne se trouvait plus en Allemagne au moment de l'acquisition de l'avoir.

Article 21 Ne sont pas considérés comme avoirs de propriétaires allemands au sens du présent accord: 1. Les avoirs de l'Etat allemand, de la Reichsbank et de la Reichsbahn; 2. Les avoirs allemands compris dans l'ensemble des terrains- connus sous le nom de « Tägermoos » ; 3. Les avoirs appartenant aux Allemands résidant dans les enclaves de Buesingen et de Jestetten; 4. Les avoirs des sociétés qui possèdent les usines hydroélectriques suivantes, à l'inclusion des participations allemandes dans ces sociétés : Rhyburg- Schwörstadt, Kraftübertragungswerke Rheinfelden A.-G., Albbruck-Dogern, Reckingen ; 5. Les sanatoriums suivants: Davos-Wolfgang, Agra, Agra (sanatorium d'enfants), Arosa (sanatorium d'enfants), y compris les autres avoirs de la « Stiftung deutscher Heilstätten Davos» et l'avoir de la « Burchard- Gedächtnis- Stiftung » à Davos; 6. Les avoirs dont la contre-valeur a été versée ou doit être versée dans le trafic réglementé des paiements entre la Suisse et l'Allemagne; 7. Les avoirs revenant, avant le 27 juin 1946, en vertu d'une succession db intestat ou d'un testament établi, preuves à l'appui, avant le 17 février 1945, à une personne qui n'est pas considérée comme un Allemand en Allemagne au sens du présent accord.

Article 22 Partie VII: Dispositions finales Les gouvernements des parties contractantes concluront d'éventuelles conventions supplémentaires pour l'exécution technique du présent accord.

Article 23 Le présent accord est signé, du côté suisse, également au nom de la principauté de Liechtenstein et, du côté allemand, également au nom du territoire de Berlin (Ouest).

Article 24 Le présent accord, rédigé en deux originaux en langue allemande, doit être ratifié et les instruments de ratification devront être aussitôt que possible échangés à Berne. Il entre en vigueur le jour de l'échange des instruments de ratification.

En foi de quoi les plénipotentiaires ont signé le présent accord et y ont apposé leurs sceaux.

Fait à Bonn le 26 août 19o2, en deux exemplaires.

9407

Pour la Confédération suisse :

Pour la République fédérale d'Altemagne :

(signé) STUCKI

(signé) Bernard WOLIT

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PROTOCOLE DE SIGNATURE

Lors de la signature de l'accord conclu aujourd'hui entre la Confédération Suisse et la République Fédérale d'Allemagne sur les avoirs allemands en Suisse, les plénipotentiaires soussignés sont convenus des déclarations concordantes suivantes, qui sont partie intégrante de l'accord: ad article 5: Le Gouvernement de la République Fédérale d'Allemagne peut aussi renoncer totalement ou partiellement à une contribution aux sens des aiticles 3 eu 4, à, l'égard d'autres cas que ceux qui sont énumérés aux articles 5 et 6, si cela lui paraît nécessaire pour des motifs « culturels », sociaux ou charitables. Il en informera dûment l'Office suisse de compensation.

De plus, les collections artistiques à désigner par l'une des parties contractantes seront libérées du blocage sans contribution.

S'il devait apparaître que l'application de la date critère aurait, dans des cas de double nationalité germano-étrangère, des conséquences trop dures, le Gouvernement de la République Fédérale d'Allemagne se déclare prêt à dispenser ces avoirs d'une contribution, si l'Etat auquel un ressortissant allemand appartient également en fait la demande.

ad article 6: D'éventuels contrats de licences, conclus par l'Office suisse de compensation pendant la période de blocage et encore en vigueur, relatifs à des droits de propriété visés à l'article 6, seront dénoncés par l'Office suisse de compensation et annulés, à l'exception des licences accordées conformément à l'article 22 de la loi fédérale du 22 juin 1907 concernant les brevets d'invention.

ad article 7: Eu égard à la situation spéciale des compagnies d'assurance, le Ministère fédéral allemand de l'économie se mettra en rapport avec l'Office suisse de compensation pour déterminer en détail les modalités du calcul de la contribution des compagnies d'assurances allemandes.

30

ad article 20: Les papiers-valeurs libellés en monnaie allemande, émis en Allemagne, ne sont pas considérés comme des avoirs de propriétaires allemands au sens de cet accord, même s'ils sont déposés en Suisse.

En outre, les deux parties contractantes sont d'accord d'admettre que les rapatriés suisses compensent les obligations qu'ils pourraient encore avoir à l'intérieur de l'Allemagne du temps où ils étaient domiciliés en Allemagne, au moyen de leurs avoirs allemands.

ad article 21: II est entendu de part et d'autre que les avoirs énumérés à l'article 21 seront libérés du blocage 1. Lors de l'entrée en vigueur de cet accord: les avoirs énumérés aux chiffres 3, 5 et 6; 2. De cas en cas, moyennant production de la preuve nécessaire : les avoirs éimmérés au chiffre 7; 3. A un moment qui doit encore être déterminé par les gouvernements des deux parties contractantes : les avoirs énumérés aux chiffres 2 et 4.

31 Texte original français

Annexe II

ACCORD entre

la Suisse et les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni sur les avoirs allemands en Suisse

Le Gouvernement de la Confédération suisse (dénommé ci-après le Gouvernement suisse) d'une part, et les Gouvernements des Etats-Unis d'Amérique, de la République Française et du Royaume-Uni de GrandeBretagne et d'Irlande du Nord (dénommés ci-après les Trois Gouvernements) d'autre part, ayant conclu, le 25 mai 1946, à Washington D. C. un accord (dénommé ci-aprèa l'Accord de Washington) considérant l'accord entre la Confédération suisse et la République Fédérale d'Allemagne sur les avoirs allemands en Suisse, conclu à Bonn, le 26 août 1952 (dénommé ci-après l'Accord germano-suisse) sont convenus de ce qui suit: Article premier Le Gouvernement suisse versera immédiatement en faveur des Trois Gouvernements, à un compte à ouvrir auprès d'un établissement bancaire désigné par eux, la somme de francs suisses 121 500 000 qui, conformément aux dispositions de l'Accord germano-suisse, sera payée au Gouvernement suisse par le Gouvernement Fédéral allemand dans les deux semaines suivant la réception par ce dernier de la notification de l'entrée en vigueur du présent Accord; de ce montant, toutefois, sera déduite la somme de francs suisses 20 000 000, qui a été avancée par le Gouvernement suisse conformément au Chapitre V de l'Annexe à l'Accord de Washington.

Quand ce paiement aura été fait au compte désigné, toutes les parties à r Accord de Washington seront déliées de leurs obligations relatives aux avoirs allemands en Suisse dont les propriétaires résident sur le territoire de la République Fédérale d'Allemagne ou dans les secteurs occidentaux

de Berlin, les dispositions de l'Accord de Washington et de son Annexe cesseront d'avoir effet à l'égard de ces avoirs et les revendications en ce qui les concerne des Trois Gouvernements et des Gouvernements au nom desquels ils agissent seront considérées comme réglées définitivement.

Les dispositions du présent Accord n'affectent en aucune manière la position de l'une quelconque des parties quant à l'application, l'interprétation et l'exécution de celles des dispositions de l'Accord de Washington qui ne sont pas touchées par le présent Accord.

Article 2 La législation en vigueur en Allemagne concernant la prise en charge et le recensement des avoirs allemands à l'étranger cessera d'avoir effet à l'égard des propriétaires allemands d'avoirs en Suisse. A cette fin, la Suisse cessera de figurer sur la liste de pays annexée à la Loi n° 63 de la Haute Commission Alliée.

Article 3 Les dispositions du présent Accord et de l'Accord germano-suisse ne sauraient affecter en aucune manière la position que pourrait prendre l'un quelconque des membres de l'Agence Interalliée des Eéparations à l'égard de tout accord sur les conflits de séquestre conclu ou à conclure entre le Gouvernement suisse et le pays en question.

Article 4 Aucune des dispositions du présent Accord ou de l'Accord germanosuisse ne devra être considérée comme conférant à une personne ou un gouvernement quelconques des droits sur quelque bien que ce soit soumis à la juridiction de l'un des pays qui se sont trouvés en guerre avec l'Allemagne après le 1er septembre 1939.

Article 5 Aux fins du présent Accord, le Gouvernement suisse déclare agir également au nom de la Principauté de Liechtenstein et les Trois Gouvernements déclarent agir au nom des pays membres de l'Agence Interalliée des Réparations.

Article 6 Le présent Accord entrera en vigueur lorsque a) les Trois Gouvernements auront reçu du Gouvernement suisse notification de l'approbation dudit Accord par les Autorités suisses compétentes, et que

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b) les Accords entre la Confédération suisse et la République Fédérale d'Allemagne sur les avoirs allemands en Suisse et sur le règlement des créances de la Confédération suisse à l'encontre de l'ancien Reich allemand seront entrés en vigueur.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés par leurs Gouvernements respectifs, ont signé le présent Accord et y ont apposé leur sceau.

Fait en quatre exemplaires à Bénie, le vingt-huit août 1952. en. anglais et en français, les deux textes faisant également foi.

Pour le Gouvernement de, la Suisse:

Pour le. Gouvernement de la France:

(signé) STUCKI

(signé) J. CHAUVEL

Pour le Gouvernement du Royaume-Uni:

Pour le Gouvernement des Etats-Unis:

(signé) P. SCRIVENER

(signé) R. C. PATTERSON, jr

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Feuille fédérale. 104e année. Vol. in.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant les avoirs allemands en Suisse (Du 29 août 1952)

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