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FEUILLE FÉDÉRALE 104e année

Berne, le 15 mai 1952

Volume II

Paraît, en règle generale, chaque semaine. Prix: 80 francs par an; 16 francs pour six mois plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 50 centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des Hoirs C.-J, Wyss, société anonyme, à Berne

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le maintien temporaire du contrôle des prix (Du 2 mai 1952) Monsieur le Président et Messieurs, Aux termes de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 supprimant les pouvoirs extraordinaires du Conseil fédéral, tous les arrêtés pris par ce dernier en vertu des pouvoirs extraordinaires conférés par les arrêtés fédéraux du 30 août 1939 et du 6 décembre 1945 cessent leurs effets à fin 1952.

Au nombre de ces arrêtés figure celui du 1er septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché. Cet arrêté dispose que le département fédéral de l'économie publique est autorisé à édicter des prescriptions sur les prix aux fins de prévenir une hausse injustifiée du coût de la vie, de faciliter son adaptation à la situation économique et de protéger l'approvisionnement régulier du marché. En raison de la situation internationale actuelle et de son évolution incertaine, nous ne croyons pas pouvoir renoncer dès la fin de l'année à toutes les mesures en matière de prix. Aussi avons-nous l'honneur de vous soumettre un message avec projet d'arrêté fédéral sur le maintien temporaire du contrôle des prix.

I. L'HISTORIQUE DES MESURES OFFICIELLES EN MATIÈRE DE PRIX Lorsque la guerre éclata en août 1914, rien n'était préparé en matière d'économie de guerre. Personne n'escomptait alors que la conflagration durerai plusieurs années, Il fallut donc tout improviser, sans pouvoir --- comme en 1939 ·-- tirer parti d'expériences antérieures, l'économie de guerre n'ayant jamais existé en Suisse avant 1914. Le 10 août 1914, le Conseil fédéral édicta une ordonnance contre le renchérissement des denrées alimentaires et d'autres articles indispensables, qui fut complotée en 1016. La disposition fondamentale était ainsi conçue: « Sera puni de l'emprisonnement et de l'amende de 10 000 francs Feuille fédérale. 104e année. Vol. II.

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au plus ou de l'amende seule, pour usure dans le commerce des denrées alimentaires et d'autres articles indispensables: « Celui qui aura exigé, en échange de denrées alimentaires ou d'autres articles indispensables, un prix comportant, en raison du prix d'achat, un gain supérieur au bénéfice commercial d'usage. » L'ordonnance ne s'appliquait donc qu'aux commerçants ayant fait un bénéfice usuraire. Une autorité centrale habilitée à intervenir dans le domaine des prix faisait alors défaut. Les cantons furent autorisés « à fixer le prix maximum des diverses denrées alimentaires et d'autres articles indispensables ». Us pouvaient déléguer leurs attributions aux autorités des districts et des communes. Les cantons et les communes n'ont pas exercé d'une façon uniforme le droit qui leur était conféré. Des prix de portée locale ont généralement été fixés pour le pain, le lait, la viande et le pétrole; il s'agissait uniquement de prix de vente aux consommateurs. La fixation de prix sous une forme décentralisée par suite de la délégation des pouvoirs à l'autorité subordonnée s'est souvent révélée inopportune. C'est ainsi que le Conseil fédéral a été amené, au cours de la guerre, à fixer, pour tout le territoire de la Confédération, les prix maximums des principales denrées alimentaires.

Si l'on admet que l'indice du coût de la vie ( x ) s'établissait à 100 en 1914, il marquait 204 en 1918, 224 en 1920. Quant à l'indice (*) des prix de gros, il s'est élevé, pour les aimées correspondantes, à 283 et 285 respectivement. Par la suite, l'indice du coût de la vie, de 224 (moyenne annuelle) qu'il était en 1920, baissa de 74 points pour tomber à 150 en 1930. Il n'en demeure pas moins qu'au début de la grande crise économique, le niveau des prix en Suisse était encore trop élevé par rapport à l'étranger. C'est la raison pour laquelle il a fallu protéger la production nationale et lutter contre le chômage en ordonnant des restrictions à l'importation frappant environ 400 positions du tarif douanier, dont 50 partiellement ( 2 ). Ces restrictions affectaient une grande partie des importations artisanales et industrielles.

La production agricole bénéficia de mesures spéciales de protection et de soutien contre la concurrence étrangère; elles contribuèrent considérablement à faciliter l'écoulement de la production
destinée au marché intérieur et à combattre le chômage. Toutefois ces mesures avaient simultanément pour effet de favoriser le maintien de nos prix et du coût de la vie à un niveau élevé et, partant, d'entraver nos exportations. Pour remédier à cet état de choses et à certaines inégalités qui en sont la conséquence, nous avons institué à fin février 1932 un office du contrôle des prix relevant du département fédéral de l'économie publique. Les prix de gros suivirent en Suisse (*) Chiffres non officiels.

( 2 ) La nécessité de ces restrictions à l'importation a étó motivóo dome les meseages du Conseil fédéral concernant les arrêtés fédéraux du 23 décembre 1931 et du 30 septembre 1932 sur la limitation des importations et l'arrêté du 14 octobre 1933 sur les mesures de défense économique contre l'étranger.

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le mouvement de baisse qui s'était manifesté sur les marchés internationaux, alors que les prix de détail demeuraient plus élevés que dans nombre d'autres pays.

A la fin de 1934, le chef du département fédéral de l'économie publique institua une commission composée de MM. Wetter, ancien conseiller fédéral (alors conseiller national et vice-président de l'union suisse du commerce et de l'industrie), Schirmer, ancien conseiller national (alors président de l'union suisse des arts et métiers), Borei, sous-directeur de l'union suisse des paysans, Caspar Jenny, industriel, et Weber, conseiller fédéral (alors collaborateur scientifique de l'union syndicale). Cette commission, chargée de se prononcer sur les problèmes que posaient les diverses restrictions à l'importation alors en vigueur, a déclaré ce qui suit dans les conclusions de son rapport du 20 février 1935: « La commission constate que Je fait de limiter les importations et de soumettre des marchandises au trafic de compensation entraîne une réglementation qui peut amener le producteur et l'intermédiaire à maintenir leurs prix à un niveau trop élevé. Elle attire l'attention sur les grands avantagea dont jouissent les producteurs protégés, par rapport à ceux qui supportent intégralement le poids de la concurrence étrangère ou qui doivent écouler Innre pmrlnits sur les marchés étrangers. La situation privilégiée dos premiers exige que, dans la détermination des prix des marchandises contingentées, on tienne équitablement compte des autres producteurs et des consommateurs.

Vu les expériences faites, la commission est d'avis que les prix des marchandises dont l'importation est limitée ou réglementée, ainsi que les accords syndicaux relatifs à ces prix, doivent être nécessairement soumis à un contrôle plus efficace. »

C'est à la suite de ce rapport et d'autres travaux préparatoires de la commission d'experts des questions douanières que fut édicté l'arrêté fédéral du 20 juin 1936 sur le contrôle des prix des marchandises, complété le 29 juin 1936 par l'ordonnance du Conseil fédéral sur le contrôle des prix des marchandises. L'article premier de l'arrêté fédéral du 20 juin 1936 est ainsi conçu : « Un contrôle officiel est exercé sur les prix des marchandises dont la production, l'importation, l'exportation ou la vente à l'intérieur du pays sont réglées par les dispositions de l'arrêté fédéral du 14 octobre 1933 concernant les mesures de défense économique contre l'étranger.

Le Conseil fédéral peut aussi soumettre au contrôle officiel les prix dont la libre formation, est limitée par d'autres mesures de protection ou de secours édictées par la Confédération.

Il est également autorisé à ordonner ce contrôle lorsque la libre formation des prix est empêchée ou injustement limitée par des coalitions d'intérêts ou par des accords à caractère de cartel.

Le contrôle a pour but d'empêcher que les prix ne se forment d'une façon injuste pour le producteur, pour le vendeur et spécialement pour le consommateur. A cet effet, le Conseil fédéral peut, au besoin, édicter des prescriptions sur les prix et prendre les mesures d'exécution appropriées. »

Nos efforts tendant à adapter nos prix à ceux du marché mondial furent cependant toujours contrecarrés par des mesures prises à l'étranger

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(dévaluations, droits de douane prohibitifs, contingentements, entraves au trafic des paiements). C'est ainsi que s'est produite en septembre 1936 la brusque dévaluation du franc français, après que l'Angleterre eut déjà abandonné l'étalon or en 1931 et que l'on eut enregistré en 1933 la dévaluation du dollar américain et, par la suite, celle de plus de 30 autres monnaies.

Un nouveau concurrent sur le marché mondial était ainsi parvenu à réduire sensiblement ses prix à l'exportation. La dévaluation du franc français s'était opérée avec l'assentiment des Etats-Unis d'Amérique et de l'Angleterre, et ces Etats avaient pris la décision de s'engager dans une politique de stabilisation internationale du cours des changes ; cette situation obligea la Suisse à ajuster sa monnaie aux nouvelles parités. Ne se laissant guider que par des considérations d'ordre économique, elle dévalua le franc de 30 pour cent environ.

Le Conseil fédéral ne se dissimula pas, ainsi qu'il le faisait remarquer dans son rapport du 28 septembre 1936 au sujet de ses décisions des 26 et 27 septembre 1936 concernant la dévaluation du franc suisse « qu'une dévaluation entraîne avec elle aussi certains désavantages, qui, en. particulier, sous la forme d'une hausse des prix, ont des effets indésirables », Et il ajoutait: « II faut faire en sorte que la dévaluation, qui nous est imposée par les circonstances, n'entraîne pas seulement les inconvénients inhérents à tout remaniement monétaire, mais procure aussi les avantagea possibles à notre économie dans le marasme. La dévaluation doit nous permettre d'adapter enfin nos conditions économiques à. celles du marché mondial. »

C'est pourquoi le département fédéral de l'économie publique fut autorisé par le Conseil fédéral à édicter, en liaison avec la dévaluation du franc suisse, des prescriptions spéciales en matière de prix, dont l'application fut à nouveau confiée au service du contrôle des prix. L'ordonnance I du département fédéral de l'économie publique du 27 septembre 1936 sur les mesures extraordinaires concernant le coût de la vie subordonna à une autorisation l'augmentation des prix des marchandises de tout genre, des tarifs des hôtels, des honoraires, des tarifs du gaz et de l'électricité, ainsi que des loyers et des fermages.

Les mesures de contrôle permirent de contenir efficacement les hausses de prix consécutives àia dévaluation du franc suisse. De 1935 à 1938, l'indice du coût de la vie (1929 -- 100) ne s'éleva en moyenne que de 80 à 85 points (= 6,25%) en Suisse, alors qu'il s'était accru en France de 87 à 126 points (= 44,8%), en Angleterre de 87 à 95 points (= 9,2%) et en Italie de 77 à 98 points (= 27,3%).

Une fois que notre économie se fut à peu près adaptée aux nouvelles conditions créées par la dévaluation, le service fédéral du contrôle des prix appliqua jusqu'au 1er septembre 1939 l'arrêté fédéral déjà cité

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du 20 juin 1936 sur le contrôle des pris des marchandises; il fut appelé, à titre d'organe consultatif des autorités fédérales, à étudier les problèmes que posent la formation et la surveillance des prix. Les mesures instituées à la suite de la dévaluation furent sensiblement atténuées en 1937 après avoir atteint leur but; toutefois, le contrôle des loyers et des fermages subsista.

II. LE CONTRÔLE DES PRIX PENDANT LA GUERRE DE 1939 A 1945 On pouvait prévoir qu'une nouvelle conflagration modifierait profondément l'économie des pays belligérants. Aussi notre étroite dépendance de l'étranger dans le domaine économique faisait-elle redouter des perturbations dans notre approvisionnement et, par contre-coup, une hausse du niveau des prix. Aux fins de prévenir ce renchérissement, le Conseil fédéral, par son arrêté du 1er septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché, autorisa le département fédéral de l'économie publique à édicter de nouvelles prescriptions sur les prix.

C'est pour que la pulitique des prix puisse s'adapter constamment pendant la guerre aux nouvelles circonstances et exigences économiques que fut interdite formellement toute hausse sans autorisation préalable. L'ordonnance du département fédéral de l'économie publique du 2 septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché décrétait, avec effet dès le 4 septembre 1939, l'interdiction d'augmenter sans autorisation, au delà de leur niveau effectif du 31 août 1939, les prix de gros et de détail des marchandises de tout genre, les loyers et les fermages, les tarifs des hôtels, des pensions, des maisons d'éducation et d'instruction, des hôpitaux et établissements de cure, les tarifs du gaz et de l'électricité, les tarifs d'honoraires et d'entreprises, ainsi que tous les autres tarifs (hormis ceux des entreprises de transport concessionnaires).

Il était en outre défendu, à l'intérieur du pays, d'accepter ou d'exiger, pour une prestation quelconque, une contre-prestation qui, compte tenu du prix de revient usuel de la branche en cause, procurerait un bénéfice incompatible avec la situation économique générale.

L'arrêté du Conseil fédéral du 1CT septembre 1939 et l'ordonnance du département fédéral de l'économie publique du 2 septembre 1939 constituèrent
pendant toute la guerre et les années suivantes le fondement juridique des mesures prises en matière de prix. Le contrôle des prix fut appliqué avec toute la souplesse voulue, c'est-à-dire intensifié ou atténué selon les fluctuations de la situation économique. Cependant, l'interdiction générale d'augmenter les prix sans autorisation fut toujours maintenue comme base solide, permettant d'effectuer sans trop de risques les adaptations appropriées aux circonstances. Inutile de dire que cette entrave à la liberté du commerce et de l'industrie ne correspondait nullement aux conceptions

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économiques du Conseil fédéral, mais qu'elle lui fut imposée par les événements internationaux et la situation spéciale en ce qui concerne l'évolution des prix.

Il est superflu de donner dans ce message des précisions sur l'exécution du contrôle des prix pendant la guerre. Le département fédéral de l'économie publique a fourni à ce sujet des renseignements détaillés dans son rapport sur l'économie de guerre, au chapitre intitulé « Office fédéral du contrôle des prix ». Relevons simplement que l'octroi des autorisations d'augmenter les prix fut subordonné à des critères plus rigoureux au fur et à mesure que le renchérissement s'accentuait. Il fut possible notamment de mieux tenir compte des facteurs suisses de formation des prix.

L'augmentation de 51 pour cent de l'indice du coût de la vie resta, compte tenu des facteurs suisses de hausse, bien inférieure au renchérissement des produits importés.

Indice des prix de gros indigènes

Janvier/août 1939 . . 100 Fin 1939 130 Fin 1940 188 Fin 1941 239 Fin 1942 260 Fin 1943 262 Fin 1944 261 Fin 1945 240

Marchandises étrangères

Total

100 110 132 154 165 172 175 177

100 118 154 187 202 207 208 202

, ,.

,Indlc.6, dn coût TM

Indice des salaires horaires Ti£UOur dans Industrie

100 104 117 135 146 150 152 151

100 100 106 116 127 135 141 151

de la

Modification en pour-cent par rapport à l'année précédente Indie e dos prix de gros indigènes

Fin Fin Fin Fin Fin Fin

1940 1941 . . .

1942 1943 1944 1945

+ 44,5 + 27,1 + 8,7 + 0,8 -- 0,4 -- 8,0

Marchandises étrangères

+ + + + + +

20,7 16,1 7,4 4,2 1,7 1,1

Total

+ 30,9 + 21,4 + 8,0 + 2,5 + 0,5 -- 2,9

Indice du coût de la vie

+ 12,6 + 15,2 + 8,3 + 2,7 + 1,3 -- 0,7

Indice des salaires en viguuur dans l'industrie

+ 5,6 + 9,8 + 9,1 + 6,3 + 4,4 + 7,1

Si l'on songe aux difficultés auxquelles notre approvisionnement s'est heurté pendant la guerre, on peut considérer cette évolution des prix comme relativement favorable. Un coup d'oeil sur le renchérissement au cours de la première et de la seconde guerre mondiale démontre, sans que de plus amples commentaires soient nécessaires, l'efficacité des mesures

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prises de 1939 à 1945 par la Confédération pour freiner la hausse. Il convient encore de relever que les difficultés d'approvisionnement ont été plus grandes au cours de la seconde conflagration que de la première.

Juin/juillet'1914 1915 " 1916 1917 1918 1919 1920

100 113 131 163 204 222 224

Août 1939 100 1940 110 1941 127 1942 141 1943 148 1944 151 1945 152

III. LE CONTRÔLE DES PRIX PENDANT L'APRÈS-GUERRE L'arrêt des hostilités ne mit pas fin à la situation qui, en 1939, avait incité les autorités à faire du contrôle des prix un instrument de l'économie de guerre. La pénurie et les déséquilibres économiques consécutifs à la guerre subsistaient.

On pouvait cependant prévoir le rétablissement prochain d'un fonctionnement normal des mécanismes des marchés; il suffisait à cet effet que fussent atténuées les restrictions décrétées par les gouvernements étrangers et couvert dans une certaine mesure le déficit de consommation accumulé pendant la guerre. La Suisse devait donc s'efforcer de sortir aussi rapidement que possible de son isolement et d'adapter ses prix à ceux de l'étranger. Le service fédéral du contrôle des prix fut donc chargé de prendre les mesures propres à faire bénéficier sans tarder les consommateurs des baisses intervenues sur les marchés mondiaux. Dans certains cas, les autorités ont même provoqué avant terme, au moyen de subventions, les baisses envisagées. Ces interventions ont permis de réduire sensiblement, dès l'automne 1945, les prix des pâtes alimentaires, de l'avoine, de l'orge, du maïs, du riz, des huiles comestibles, des légumineuses, du pain et de la farine et, dès le début de 1946, ceux des graisses alimentaires et, par la suite, du saindoux.

Parmi les produits pour lesquels le service fédéral du contrôle des prix a décrété, en se fondant sur le fléchissement des prix à l'importation, des baisses générales de prix, mentionnons les articles en aluminium, les produits chimiques et les carburants. En outre, du printemps 1946 à la fin de 1947, le service fédéral du contrôle des pris a ordonné diverses réductions des marges dans le commerce des textiles.

De juillet 1945 à juillet 1946, ces diverses mesures provoquèrent un fléchissement de l'indice du coût de la vie de 153,4 à 150,9 points. Ce renversement de la tendance, qui avait été constamment à la hausse au cours des cinq années précédentes, a créé un « climat » psychologique propre à

68 faciliter le passage de l'économie de guerre à l'économie de paix, comme aussi à renforcer la capacité de concurrence du pays.

Parallèlement, les baisses de prix ont contribué à asseoir la paix sociale sur des bases plus solides en accélérant le rétablissement du salaire réel.

Malheureusement, pour des raisons indépendantes de notre volonté, le fléchissement des cours des marchandises importées enregistré immédiatement après la guerre ne fut que de courte durée. Dans son rapport sur l'économie de guerre (1), le département fédéral de l'économie publique a commenté comme suit cette situation: « Dans d'importants centres de production, les installations furent démontées au lieu d'être remises en état. Des entités économiques entières furent disloquées, cependant que des restrictions étaient édictées en matière de devises. Et si la demande de produits suisses d'exportation s'accrut considérablement, les possibilités d'obtenir des marchandises étrangères en retour furent d'abord très restreintes. Nos exportations prirent un grand essor, à telle enseigne qu'elles dépassèrent sensiblement, dès le milieu de 1946, leur volume d'avant-gueire.

Une partie d'ontre elles se fit aux dépens de l'approvisionnement du pays, soit rHrflrttflmant, lorsqu'il ft'flgîflflfl.it rie produits Hefit.ìnés un frvnrl H. In. consommation ultérieure, soit indirectement quand elles avaient requis des moyens de production et de la main-d'oeuvre qui auraient été affectés autrement à la couverture des besoins indigènes. Entre la cessation des hostilités et la fin de 1947, l'indice des prix à l'exportation des produits finis passa de 202,5 à 280,8 points (1938 = 100).

Ainsi, l'industrie d'exportation voyait s'ouvrir devant elle des possibilités de gain qui risquaient de provoquer un déplacement de la production au détriment de l'approvisionnement du pays et une nouvelle hausse des prix. Or, l'accroissement des importations avait pour pendant une augmentation des besoins indigènes. D'autre part, la proportion des matières premières étrangères partiellement transformées et réexportées était plus grande qu'avant la guerre. Quant aux importations de denrées alimentaires et de produits manufacturés, elles restaient sensiblement inférieures aux exportations, d'où un net déséquilibre.

Après un fléchissement initial, les prix à
l'importation se mirent à monter, parfois dans une assez forte mesure. Sur le marché mondial, d'importantes marchandises pondéreuses demeuraient rares, si bien que plusieurs pays fournisseurs ne se gênaient pas de profiter à fond des circonstances. Pour remédier à leur manque de devises, certaines nations recoururent à des mesures appelées à affecter particulièrement un pays qui, comme la Suisse, possédait une monnaie forte et avait besoin de leurs produits. De même, les cours de clearing fixés dans les traités de commerce, forcément bilatéraux, ne correspondaient pas toujours au pouvoir d'achat des monnaies, ce qui contribua à renchérir de manière non négligeable les marchandises importées. i> La pénurie sensible de travailleurs et le volume élevé des commandes déclenchèrent une véritable chasse à la main-d'oeuvre. L'indice des salaires nominaux des ouvriers d'industrie monta rapidement: de 144,2 à 172,4 de la fin de la guerre à la fin du second trimestre 1947; pour les salaires réels, la progression a été de 94 à 109. Tl va, sa.ns dire que cette évolution ne pouvait rester sans effet sur les coûts de production et les prix. Dans f 1 ) Page 928.

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l'industrie du bâtiment, où la main-d'oeuvre joue un rôle considérable, l'indice des frais de construction est passé de 165 à 195 d'août 1945 à août 1947 (1938 = 100). Cette hausse a provoqué un relèvement sensible des loyers des nouveaux logements. Les augmentations de salaire ont également eu des répercussions sur les prix agricoles. En effet, la migration constante de main-d'oeuvre rurale vers l'industrie a contraint l'agriculture à relever ses prix. Il est évident que la mise en marche de la spirale des prix et des salaires menaçait le niveau des prix. Et pourtant, malgré l'intensité de la reprise économique et des tendances nettement inflationnistes, il a été possible de limiter à 3 pour cent la montée de l'indice du coût de la vie du milieu de 1945 au milieu de 1947.

Evolution du coût de la vie enregistrée dans divers pays après la guerre Juin 1945 = 100 Suisse

Juin 1946 . .

Juin 1947 . .

99 103

Suèdû

100 107

Canada

103 113

Etats-Unis

103 121

Grande-Bretagne

100 100

Ce tableau démontre l'efficacité des mesures prises par le service du contrôle des prix. II convient encore de relever que le Canada et la Suède avaient réévalué leur monnaie, le premier de ces pays de 10 pour cent et le second de 14 pour cent, ce qui avait eu pour effet d'abaisser dans une même proportion les prix des marchandises importées. Quant au gouvernement des Etats-Unis, il avait renoncé au système de la surveillance des prix ; cette décision fut suivie d'une forte hausse de l'indice. Pour apprécier comme il convient l'évolution des prix en Grande-Bretagne, il faut prendre en considération le fait que, parallèlement au contrôle des prix, le rationnement avait été maintenu dans une large mesure et que le gouvernement consacrait d'amples subventions à l'abaissement du coût de la vie.

Ainsi donc, le rapport entre le pouvoir d'achat inférieur du franc suisse et celui des autres monnaies avait été tant soit peu rétabli à la fin de la seconde année d'après-guerre. Par son activité, le service fédéral du contrôle des prix a efficacement contribué à la lutte contre la dépréciation de la monnaie, l'un des problèmes économiques essentiels auxquels tous les pays ont eu à faire face au lendemain de la seconde conflagration mondiale. Vers le milieu de 1947, l'amélioration des salaires réels moyens -- qui avaient fléchi jusqu'à concurrence de 14 pour cent pendant la guerre -- s'établissait à 8 pour cent au regard de 1939.

Cependant, le relèvement des salaires réels a fini par se heurter à des limites précises. Les hausses de salaire exerçaient une influence toujours plus nette sur les prix.

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Evolution des prix et des salaires en 1946/47 A la un du trimestre

Cottt de la -vie

Indice des salaires horaires nominaux réels Janvier -- Août 1939 = 100

1946, 2e trimestre . . . .

3e trimestre . . . .

4e trimestre . . . .

151,6 151,6 155,1

159,4 163,6 166,1

105,1 107,9 107,1

1947, 1er trimestre.

2e trimestre .

3e trimestre .

4e trimestre .

155,3 109,0 159,3 163,4

170,3 172,4 174,6 178,0

109,7 108,4 109,6 109,0

.

.

.

.

.

.

.

.

.

.

.

.

Les prix sont montés de 5 pour cent de l'automne 1946 à l'automne 1947. Depuis 1943, c'est la plus forte augmentation que nous ayons enregistrée dans l'espace d'un an.

Pour maîtriser cette situation, il fallait que l'économie elle-même appuyât efficacement les efforts déployés par les autorités en vue de juguler l'inflation. Donnant suite à notre initiative, les associations économiques centrales finirent par se mettre d'accord, après de longues délibérations : elle s'engagèrent à renoncer à toute hausse générale des prix et des salaires jusqu'au 31 octobre 1948. L'accord dit de stabilisation ne visait cependant pas à un.

blocage rigide des prix et des salaires; il tendait uniquement à empêcher les augmentations de prix que l'évolution des coûts de revient ne justifiait pas et les relèvements de salaire qui ne répondaient pas à une nécessité sociale. Pour assurer l'application de cet accord, on a institué une commission de stabilisation, composée de représentants des employeurs et des travailleurs et chargée d'assister le service fédéral du contrôle des prix en qualité d'organe consultatif. Cette convention a fait ses preuves. L'activité de la commission a été appréciée à sa juste valeur. Cet organisme a secondé efficacement le service fédéral du contrôle des prix dans sa tâche.

Il convient aussi de noter que cette innovation permettait, pour la première fois en Suisse, d'exercer une influence sur l'évolution des salaires, grâce à la collaboration des employeurs, des employés et des autorités. Dans l'ensemble, ce mécanisme a permis de freiner efficacement le mouvement de la spirale inflationniste. A l'expiration de l'accord, les parties contractantes décidèrent de le proroger pour un an, soit jusqu'à la un de 1949. Malgré le voeu exprimé par le département fédéral de l'économie publique, les associations d'employeurs s'opposèrent à une seconde reconduction clé l'accord à la fin de 1949, en faisant valoir que le danger d'une nouvelle hausse générale des prix et des salaires était écarté et qu'un maintien de la commission de stabilisation était dès lors superflu.

71 Indico des salaires nominaux réela 3e trimestre 1030 = 100

Coût de la ..vie août 1939 « 100

Fin du trimestre

1947, 4e trimestre 1948, 1« trimestre 2e trimestre 3e trimestre 4e trimestre 1949, 1er trimestre 2e trimestre 3e trimestre 4e trimestre

162,8 162,5 163,0 162,6 163,7 161,8 161,8 161,8 160,6

178,0 180,4 181,4 182,5 183,0 183,4 183,5 183,6 183,7

109,4 111,0 111,3 112,3 111,8 113,8 113,4 113,5 114,4

L'évolution des pris e* des salaires enregistrée en liaison avec l'activité de la commission de stabilisation indique qu'il a été possible de bloquer la hausse des prix et de ralentir nettement la montée des salaires. A l'étranger, le mouvement des prix a continué de suivre l'évolution économique.

1937 = 100 1947 1948 1949

Suisse

Suède

159 164 162

156 166 170

Gr.-Bretagne1) Etats-Unis Hollande

102 108 111

155 167 165

199 206 219

Belgique

Canada.

340 390 378

134 153 159

Une fois encore, les mesures prises par la Suisse dans le domaine des prix lui ont permis d'améliorer sa position au regard de l'étranger.

IV. LE PASSAGE DU CONTRÔLE DES PRIX, INSTRUMENT DE L'ÉCONOMIE DE GUERRE, A LA SURVEILLANCE DES PRIX Vers le milieu de 1949, hormis quelques exceptions, l'offre de marchandises était de nouveau suffisante. Les prix de diverses matières premières, des produits agricoles notamment, avaient sensiblement baissé. Les cours des métaux, du charbon et de quelques dérivés du pétrole commençaient à fléchir. Le degré d'occupation restant élevé, la population disposait d'un pouvoir d'achat appréciable. Le déficit de consommation résultant de la guerre était en grande partie couvert, de sorte que les besoins, sans que la demande ait fléchi pour autant, étaient devenus moins urgents et la pression qu'ils exerçaient sur les prix moins forte. Quant à la clientèle, elle n'était plus disposée à acheter à n'importe quel prix. Ainsi donc, tant du oôto de la production que de la demande, les conditions nécessaires à un rétaJ

) Juin 1947 = 100,

72

blissement de la libre concurrence étaient remplies et les prix pouvaient se former normalement selon le jeu d'une offre et d'une demande équilibrées.

Comme il était conforme aux principes fondamentaux qui régissent notre économie de renoncer aussi rapidement que les circonstances le permettaient aux interventions de l'Etat dans le domaine des prix, le service fédéral du contrôle des prix a été invité à saisir toutes les possibilités qui s'offraient de supprimer ou d'assouplir les prescriptions relatives aux prix, à la. condition cependant qu'il n'en résulte pas de nouveaux dangers de hausse. De la fin de la guerre au début de 1948, déjà, ces prescriptions ont été assouplies dans divers secteurs; dans d'autres, la liberté en matière de prix a été rétablie, mais toutefois sous la surveillance du service fédéral du contrôle des prix afin de prévenir toute augmentation abusive.

En 1949, l'assouplissement et l'abrogation des dispositions sur les prix maximums pouvaient être entrepris sur une plus grande échelle.

A cet effet, le département fédéral de l'économie publique institua une commission composée de membres de la commission fédérale du contrôle des prix et de la commission de stabilisation. Cet organisme avait mandat d'examiner la situation et de présenter un rapport au département de l'économie publique.

Conformément aux recommandations de cette commission, les maximums furent successivement supprimés pour les prix de la plupart des marchandises et services au cours de la période s'étendant du milieu de 1949 au milieu de 1950. Cependant, la commission tint pour nécessaire de soumettre à une surveillance les prix, ainsi libérés. C'est pourquoi le service fédéral du contrôle des prix, avec l'assentiment préalable du chef du département de l'économie publique, se réserva le droit (*) de procéder à des enquêtes et d'intervenir à nouveau par des prescriptions en cas d'évolution anormale des prix et des marges. En outre, l'obligation d'afficher les pris de détail ( a ) a été maintenue.

La libération des prix a coïncidé avec la dévaluation de la livre sterling et des monnaies de divers pays qui entretenaient des relations économiques étroites avec le bloc sterling. Ces manipulations ont donné une forte impulsion à la concurrence, tant à l'intérieur que sur les marchés étrangers. L'économie suisse
a donc été contrainte de prêter plus d'attention au calcul des coûts et des prix. Les baisses des cours des matières premières et auxiliaires enregistrées à l'étranger à la suite des dévaluations permettaient d'espérer un fléchissement de l'indice dès le moment où, ces produits ayant traversé toutes les phases de la fabrication et de la distribution, les baisses se transmettraient aux prix de détail. De plus, dans la mesure où l'offre augmentait, (*) Prescriptions nu 822 A/49 du service fédéral du contrôle dea prix, uujumsruaiil la modification de la surveillance des prix, du 15 juillet 1949.

( a ) Prescriptions n" 572 A/44 du service fédéral du contrôle des pris, concernant l'affichage et l'impression des prix de détail, du 29 septembre 1944.

73

on pouvait escompter la disparition du système des doubles prix, qui imposait à la Suisse des charges plus élevées qu'aux autres pays.Enrevanche, les dévaluations monétaires ont eu pour effet de rendre plus précaire la situation de l'agriculture et d'exiger l'application des mesures protectionnistes.

De juin 1949 à juin 1950, alors que la libération des pris se poursuivait, le coût de la vie a baissé de 2 pour cent. Parallèlement, l'accroissement de la concurrence étrangère, allemande notamment, a rendu difficile l'existence de différentes branches travaillant avant tout pour le marché intérieur; les demandes de protection et de limitation des importations se sont multipliées.

Le service fédéral du contrôle des prix avait pour tâche de surveiller l'évolution des prix dans les secteurs libérés afin de déceler si l'adaptation aux conditions nouvelles se faisait normalement ou si, au contraire, elle était insuffisante ou trop lente. A cet effet, il invita les entreprises ou les associations économiques à lui communiquer toutes modifications de prix et de coûts, afin de pouvoir examiner avec les intéressés si elles étaient appropriées.

La baisse de l'indice du coût de la vie permit d'aborder le problème posé par l'écart entre les loyers des logements de construction ancienne et ceux des nouvelles habitations. Comme il l'avait fait pour les prix des marchandises, le service fédéral du contrôle des prix fixait également les loyers sur la base des prix de revient. De cette manière, la hausse de l'indice des loyers n'a pas dépassé 9 pour cent de 1939 à 1950. Les frais de construction des immeubles variant fortement selon la date de leur érection, l'écart entre les loyers des immeubles achevés jusqu'en 1942 et ceux des habitations construites plus tard grandissait au fur et à mesure que le renchérissement s'aggravait. Pour atténuer les inconvénients résultant de cette situation, on autorisa, le 30 août 1950, à certaines conditions, un relèvement de 10 pour cent des loyers des logements achevés avant 1943.

Aujourd'hui, les prix ne sont prescrits par les autorités que dans quelques rares secteurs, tels que les loyers et fermages, les combustibles et carburants liquides, le charbon destiné à la consommation domestique, l'électricité, le bois de sapin/épicéa, les tarifs d'entrepôt et de manutention, ainsi
que quelques denrées alimentaires essentielles dont l'importation ou la distribution est réglementée (pain, farine, lait et produits laitiers, fruits, légumes, pommes de terre et oeufs).

Dans les domaines où les prix ont été libérés, l'intensification de l'activité économique provoquée par le conflit coréen a contraint le service fédéral du contrôle des prix: à renforcer sa surveillance en 1951.

Pour stimuler la concurrence, protéger les consommateurs et faciliter le contrôle des prix, l'aflichage des prix de détail a fait l'objet d'une nou-

74

velie réglementation (1), L'ancien système a été simplifié, son application devenant difficile du fait de la réduction du personnel du service fédéral du contrôle des pris et des offices cantonaux à la suite de l'atténuation du contrôle. L'obligation d'afficher a été limitée aux marchandises et aux services les plus importants. Par cette limitation à l'essentiel, le nouveau système a été rendu plus efficace.

Pour surveiller les pris avec l'attention nécessaire, le service fédéral du contrôle des prix a invité diverses branches à lui communiquer les informations dont il pouvait avoir besoin. Dans la mesure où cet examen paraissait nécessaire, le service fédéral du contrôle des prix et la branche intéressée analysaient en commun la structure des prix et des coûts.

Le rétablissement de maximums pour les prix a été envisagé pour les textiles et les bois en grumes. Les diverses branches du textile ont finalement conclu des conventions par lesquelles elles s'engagaient à limiter ellesmêmes les prix de manière appropriée. Dans le secteur du bois, les producteurs ont accepté de conclure un accord en vue de freiner la hausse. Malheureusement, cette convention n'a fonctionné do manière satisfaisante que très peu de temps. Les prix excessifs exigés par les vendeurs dans divers cantons ont contraint le service fédéral du contrôle des prix à fixer, au début de 1952, des prix maximums pour les bois de sapin/épicéa.

Si l'on songe à la circonspection avec laquelle elle a été appliquée et au peu de personnel dont le service fédéral du contrôle des prix disposait, on conviendra que cette surveillance a été relativement efficace. La compétence que détient cette administration de décréter des normes maximums lorsque les prix demandés lui paraissent abusifs, n'a pas laissé d'exercer un effet modérateur. Plusieurs branches ont pris de plein gré contact avec le service fédéral du contrôle des prix pour déterminer avec lui l'ampleur des adaptations nécessaires.

La collaboration, le plus souvent confiante, qui s'est établie entre l'économie privée et le service fédéral du contrôle des prix a été fructueuse.

Tandis qu'ailleurs les hausses intervenues sur les marchés mondiaux par suite de la guerre en Extrême-Orient ont provoqué des augmentations massives des prix, l'indice suisse n'est monté que de manière relativement
lente et nettement moins marquée que dans les principaux pays concurrents.

Par rapport à 1950 (moyenne de l'année), le coût de la vie accusait, à la fin de 1951, la progression suivante dans les divers pays, dont plusieurs ont dévalué leur monnaie: (1) Prescriptions n° 572 A/50 du service fédéral du contrôle des pris concernant l'affichage et l'impression des pris de détail, du 27 décembre 1950.

75 Pour cent

Suisse Suède Pays-Bas Danemark Belgique Autriche Allemagne France (Paris) Italie Grande-Bretagne Etats-Unis Canada

. . . .

7 22 10 13 12 45 13 29 12 13 10 15

(novembre 1951) (novembre 1951) (octobre 1951)

(novembre 1951)

Ainsi donc, malgré la suppression de la plupart des prescriptions relatives aux pris maximums et leur remplacement par un système de surveillance générale, le service fédéral du contrôle des prix a apporté une contribution non négligeable à la stabilisation du coût de la vie, à la défense du franc et à l'amélioration de notre capacité de nnnmrrence.

L'assouplissement progressif du contrôle des prix a eu pour corollaire une forte diminution de l'effectif du personnel du service fédéral du contrôle des prix; il est actuellement de 78 personnes, contre 389 en décembre 1943 (maximum).

V. LE CONTRÔLE DES PRIX A L'ÉTRANGER Sauf quelques rares exceptions, tous les pays étrangers ont reconnu la nécessité de contrôler les prix. Le contrôle institué pendant la guerre a été maintenu de manière générale, toutefois avec quelques tempéraments. Depuis le conflit coréen, plusieurs Etats ont renforcé les pouvoirs de l'administration.

En Allemagne occidentale, la loi sur les prix promulguée en 1948 est encore en vigueur. L'Etat fixe les prix des denrées alimentaires et des produits agricoles les plus importants, de même que ceux des principales matières premières industrielles. Des prescriptions relatives aux prix: sont applicables à la branche du bâtiment dans la mesure où il s'agit de constructions exécutées à l'aide de subsides officiels. Le contrôle des loyers ne s'exerce pas sur les nouveaux logements. Les tarifs des principaux services (transports, soins aux malades, certaines assurances) sont contrôlés par l'Etat. A la suite de la diminution de l'offre, des prix indicatifs ont été décrétés au début de 1951 pour les métaux non ferreux et le bois, qui n'étaient pas soumis au contrôle des prix: jusqu'à ce moment. Cette réglementation s'étant révélée trop souple pour le bois, on envisage rétablissement de prix maximums. On examine actuellement la possibilité de libérer les prix du fer et de la ferraille.

76

La Belgique a entièrement abrogé, en 1947, les prescriptions relatives au contrôle des prix édictées pendant l'occupation. En 1950, une tentative de stabilisation au moyen d'ententes librement consenties a échoué. Les dispositions sur les prix maximums réintroduites dans l'intervalle ont été abrogées. Actuellement, des prix maximums ne sont en vigueur que pour le ciment et les viandes de boeuf et de porc. Des dispositions spéciales régissent les loyers et les fermages.

Le Canada a supprimé le contrôle des prix au début de 1950. Le gouvernement n'a pas l'intention de le rétablir bien qu'il en ait obtenu récemment le pouvoir. Toutefois, des accords ont été conclus avec l'économie privée au sujet des prix des principales matières premières. Aux termes de ces accords, les prix ne sont modifiés que d'entente avec les autorités.

Le contrôle fédéral des loyers a été également aboli; les provinces ont cependant maintenu en vigueur des réglementations locales.

Depuis la fin de la guerre, le Danemarlc a modifié à plusieurs reprises le contrôle des prix, mais sans jamais l'abroger. L'année dernière, les pouvoirs de l'office de contrôle ont été renforcés. La loi sur le contrôle des prix, arrivée à expiration le 30 avril 1952, a été prorogée sans grand changement. Aux termes de cette loi, le contrôle des prix doit intervenir dès que la concurrence n'est pas en état d'assurer une formation normale des prix.

La loi mentionne expressément les accords privés à caractère de cartel de nature à influencer les prix et elle interdit toute manoeuvre de spéculation exécutée pour profiter abusivement de circonstances extraordinaires.

Sont actuellement soumis au contrôle des prix: le papier, les chaussures, les denrées alimentaires les plus importantes, les tarifs des hôtels et restaurants, les matériaux de construction, le bois, les combustibles solides et liquides, le fer et l'acier, de même que les tarifs de certains services. Les loyers sont l'objet de prescriptions officielles; il n'en est pas de même des fermages.

En Espagne, le contrôle des prix, qui englobe les principaux produits agricoles, la production industrielle, l'importation et l'exportation, a pour corollaire diverses mesures de contingentement et de réglementation. L'Etat détermine les prix et les marges maximums et fixe les normes de prise en
charge. Le contrôle des loyers s'exerce sur les habitations achevées avant 1942. Les loyers des nouveaux logements ne sont soumis à une autorisation que dans la mesure où la construction a été subventionnée par l'Etat.

Les Etats-Unis d'Amérique, qui, à l'exception des prescriptions relatives aux loyers, avaient démobilisé radicalement le contrôle des prix, ont décrété, en janvier 1951, un blocage général des prix et des salaires. Les accords volontaires conclus précédemment par l'économie privée aux fins de stabiliser le coût de la vie avaient échoué. Aujourd'hui, sauf pour quelques produits qui n'exercent qu'une influence insignifiante sur l'indice, tous les prix sont de nouveau soumis au contrôle, ou du moins à une surveillance.

Les prix maximums fixés pour l'industrie, l'artisanat et le commerce sont calculés compte tenu des marges et des bénéfices réalisés par les entreprises au cours de périodes de référence s'inscrivant avant la guerre de Corée.

Des prescriptions particulières ont été édictées pour les prix agricoles.

Elles sont appliquées dès que les prix garantis par l'Etat -- qui sont d'ailleurs adaptés régulièrement aux fluctuations des coûts de production -- sont dépassés. Le contrôle fédéral des loyers, qui subsiste sans changement depuis la guerre, fonctionne dans les régions où sévit une crise du logement ou encore dans celles où les autorités régionales et locales n'ont pas expressément déclaré qu'un contrôle est superflu.

La Finlande a rétabli partiellement le contrôle des prix vers le milieu de 1950. Une nouvelle loi, instituant un contrôle plus sévère, a été promulguée au début de 1951. Par la suite, le gouvernement a conclu avec les associations de l'économie privée un accord de stabilisation instituant, à côté d'un blocage des salaires, un blocage partiel des prix. Un grand nombre de marchandises importées et toutes les denrées alimentaires sont soumises au contrôle des prix. L'industrie, le commerce de gros et de détail sont tenus de calculer les prix selon des normes très précises. Les bénéfices des entreprises sont limités par l'Etat. Les tarifs des services de toute sorte font l'objet de prescriptions officielles. Une loi spéciale règle le contrôle des loyers dans les villes et les grandes communes; les fermages ne font l'objet d'aucune réglementation; le gouvernement a cependant la faculté de les fixer à nouveau s'il l'estime nécessaire.

En France, le régime de l'économie de guerre a été démobilisé moins rapidement qu'en Suisse. Après avoir été provisoirement libérées, certaines marchandises ont été de nouveau soumises au contrôle des prix. Les prescriptions du temps de guerre restent applicables sans changement aux produits agricoles, aux denrées alimentaires, au charbon, à l'électricité, à l'acier, au fer et aux produits mi-finis de la sidérurgie. L'Etat influence également la formation des prix des marchandises importées, dont un mécanisme de compensation garantit runiformité pour l'ensemble du territoire.

Les loyers et les fermages sont également soumis au contrôle.

En Grande-Bretagne,
le contrôle des prix institué pendant la guerre n'a pas été assoupli. L'office de contrôle, créé en 1939, édicté les prescriptions nécessaires en liaison avec les chambres de commerce, qui ont un caractère semi-officiel.

En Italie, le contrôle des prix a été maintenu en grande partie. Les prix des principales matières premières et auxiliaires industrielles, ceux des produits mi-finis et de certaines denrées alimentaires sont soumis à une autorisation. Les prix des moyens de production agricoles, les tarifs des services publics et des hôtels et restaurants sont contrôlés. Le contrôle des loyers est limité aux logements de construction ancienne. Une revision Feuille fédérale. 104» année. Vol. II.

'

6

78

est actuellement étudiée en liaison avec un projet de loi soumis au parlement. Les fermages sont fixés par des commissions techniques adjointes aux préfets. Lss autorités provinciales fixent, selon les besoins, les prix des marchandises, des denrées alimentaires avant tout, dont les prix ne sont pas établis à Borne.

Depuis la fin de la guerre, la Norvège, n'a pas atténué sensiblement le contrôle des prix et des loyers.

Aux Pays-Bas, les prescriptions du temps de guerre, y compris une partie de celles qui ont été décrétées par l'occupant, sont encore en vigueur.

Les attributions des commissions régionales, qui ont avant tout pour tâche de régler les différends relatifs aux prix, ont été étendues. A la fin de 1950, le gouvernement a remis en vigueur la loi sur la spéculation et l'accaparement promulguée en 1939. Les prix de toutes les sortes de combustibles, des matériaux de construction, de la ferraille, des produits chimiques, des articles de ménage, les tarifs des transports-marchandises, etc. sont actuellement réglementés. Les mesures prises à la suite du conflit coréen aux fins de renforcer le contrôle, en particulier les dispositions qui ont trait au calcul des prix dans le commerce, ont été abrogées depuis. Cependant, le gouvernement néerlandais est d'avis qu'il n'est pas indiqué de démobiliser davantage le contrôle des prix. Il estime, étant données les tensions internationales, qu'il doit rester en mesure de faire face à toute situation. Pour les mêmes raisons, la législation en la matière doit être maintenue. Il est vrai que l'on envisage une nouvelle réglementation, mieux adaptées aux circonstances, dont l'entrée en vigueur serait prévue pour février 1953. La loi sur les loyers promulguée en février 1951 -- et qui a remplacé les prescriptions datant du temps de l'occupation -- s'applique avant tout aux habitations construites avant la guerre ou édifiées à l'aide de subventions officielles.

Les fermages sont soumis à une autorisation; les aliénations de biens-fonds destinés à la production agricole et les constructions doivent être autorisées par les organes officiels.

Le Portugal & maintenu le contrôle des prix institué pendant la guerre.

Il s'étend à tous les secteurs, à l'exception des articles de luxe. II est complété par un contrôle des salaires, des mesures visant à canaliser
les investissements, des subventions destinées à abaisser les prix et par diverses réglementations concernant la répartition, des marchandises. Le contrôle des loyers date de la première guerre mondiale.

En Suède, la loi sur le contrôle des prix de 1942 soumet à des prix maximums environ la moitié des marchandises indigènes et importées, de même que les tarifs des services. Pour le reste, le gouvernement se contente de surveiller les prix. Les prescriptions relatives aux loyers sont assez semblables aux nôtres.

79

Ce tableau récapitulatif n'a qu'un caractère d'information. Le Conseil fédéral n'ignore pas que les mesures en vigueur à l'étranger sont souvent commandées par des circonstances qui ne sont pas toujours comparables à la situation en Suisse. Il est néanmoins intéressant de constater que la plupart des pays considèrent encore comme nécessaire un contrôle des prix.

VI. LES LOYERS ET LES FERMAGES 1. Les loyers et les fermages des biens-fonds qui ne sont pas destinés à la production agricole C'est sans aucun doute dans le domaine des loyers que les conséquences de la guerre sont encore les plus sensibles et que le maintien du contrôle des prix apparaît le plus nécessaire. Sur le marché locatif, la détente que l'on espérait ne s'est malheureusement pas encore produite.

Cependant, la construction de nouveaux logements ayant atteint des chiffres record au cours des dernières années, on a enregistré une légère amélioration en 1950 et en 1951.

Nouveaux logements

1939 . . . . . 8 997 1940 4867 1941 4664 1942 5186 1943 6150 1944 8 771 1945 8 412

1946 11022 1947 13842 1948 19315 1949 15038 1950 19374 1951 1. . . . 23 201 1951 ( a ). . . . 24 384

La situation s'est de nouveau aggravée ces derniers temps. Lé recensement de décembre 1951 révèle une nouvelle diminution très marquée du nombre des logements vacants:

1 Dons 382 communes, comme les années précédentes.

( 2 ) Dans 461 communes.

80

Logements vacants en décembre 1950 et 1951 Logements vacants Villes et communes

Pour-cent de l'effectif total des logements

Total

1950

1. Villes de plus de 100 000 hab.

Baie Berne Genève ' . ' Lausanne Zurich Total des 5 villes

1951

1950

1951

0,08 0.67 0,24 0,11 0,19 0,24

433 506 806 67 107 1921

50 315 124 40 235

0.66 1,12 1,45 0,20 0,09

764

0,60

0 7 25 0

0 2

0 0,23 0,65 0 0,21 0,27 0 1,10 0,98 0,36 0,44 0,36 0,03 0,59 0 1,39 0,07 0,03 0 0,84 0 0,17 0,65 0,26 0,61 0 0,04 0,03 0,21 0,49 0,60 0,03 0,22 0,22 0,98 J.,01 0,32 0,50

0 0,07 0,25 0 0,30 0,25

0,64

0,41

0,53

0,30

2. Autres villes

Aarau Baden Bellinzone Bienne Berthoud -

.

-

-

-

:

- -

7

L e Châtelard-Montreux . . . .

La Chaux-de-Fonds Coire Davos lammen Frauenfeld Fribourg Granges Herisau

- ·- -

.

10 0 56 16 10 14 25 1 24

Horgen*

Köniz Kreuzungen Le Locle .'

Lugano ·'.·· Lucerne.

, , Neuchâtel Ölten Korschach Schaffhouse .

Sehwyz Sion Soleure .

Saint-Gall.

Thoune Uster Vevey Wadenswil Wettingen Wintertbout Yverdoix 7nng Total des 36 autres villes 3. Grandes communes rurales .

4. Petites communes rurales . .

5. Total pour la Suisse

0

. .

. . .

. .

· ." .

.

. .

. .

78 -- 1 0 J.47 0 8 22 20 14 0 :, ^ V" 5 15 16 28 l 7 43 39 37 678 741 1341 4681

9 0 10 9 0 10 5 0 35 40 0 7 5 62 16 0 0 102 22 11 1 13 12 0 4 6 15 16 29 2 5 17 21 11

497 550

1055 2866

0

0,19 0,30 0 1,06 0,57 0 0,18 0,17 1,04 0,51 0 0 0,57 0,25 0,22 0,03 0,17 0,52 0 0,09 0,03 0,21 0,48 0,59 0,07 0,15 0.09 0,51 0,31 0,23 0,35

81 II ressort de ce tableau que plusieurs villes et localités de moyenne importance, telles qu'Aarau, Bienne, La Chaux-de-Fonds, Emmen, Granges, Le Lode, Lugano et Sion, ne disposaient d'aucun logement vacant le jour de référence. Notons encore qu'une partie considérable des appartements ou habitations libres enregistrés par la statistique étaient déjà loués le jour du recensement, ou encore réservés au propriétaire ou destinés à être vendus. Le tableau ci-dessous indique le nombre des logements vacants dans les villes de Zurich, Berne et Baie en décembre 1951 : Logements

w

non d i D i s p o n i b l e s D i s p o m b l e s Ä pour cent c h i f f r e s p o u r

A Zurich . . . . 235 Berne . . . . 315 Baie 50

81 103 28

34,5 32,7 56,0

154 212 22

65,5 67,3 44,0

L'impression que l'offre est insuffisante se renforce encore si l'on considère la répartition des logements vacants entre les diverses catégories de loyers. La plupart des appartements disponibles, presque tous achevés récemment, sont hors de prix: pour la majeure partie des locataires. C'est ce qui ressort du tableau ci-dessous: Logements vacants et loyers annuels à la fin de 1951 Nombre de pièces

Zurich

Berne

Bâle

jusqu'à 1000

2 i 2 2 -- 3 -- 4 5 et plus -- total 4 1 6 2 6 1 3 4 5 et plus -- -- total 13 1 1 2 2 1 3 4 5 et plus -- total 4

10011500 1

Loyer annuel en frano,s: 2001- 2501- 3001- plus de logements 1501à louer 3500 3000 2500 3500 2000 ,-- 4 1

2 2 6 3 9 3 -- -- 12 14 5 3 3 27 4 70 -- 2 -- 1 12 103

3 3 -- -- G

-- 4 1 .-- 5

17 14 1 -- 33 ,

8 36 11 -- 55 , -- 4 1 -- 5

6 45 10 2 63 _

_--

13 19 -- 32 -- -- 13 3 2 3 -- -- 16 5 . ^ -- -- -- -- 1 1 1 -- 1 2

29 2 83 46 88 16 18 64 222 14 44 -- 1 128 6 24 4 3 10 214 1 5 -- -- 12 12 16 6 5 17 40

--

cen



On constate donc que la situation n'est pas encore redevenue normale sur le marché du logement. Rien ne permet encore d'espérer une amélioration prochaine. Au contraire, certains signes donnent à penser que les circonstances actuelles sont appelées à durer encore un certain temps.

Depuis le mois de septembre 1951, le nombre des autorisations de construire octroyées dans 41 villes est en nette diminution par rapport au mois correspondant de l'année précédente: janvier/août 1950 septembre octobre novembre décembre janvier 1951 H février 5(l) (i) Dana 42 villes.

1950/til

1951/53

11 280 1410 1452 1 671 1 169 1 548 1690

12 309 1 184 1 065 737, 623 1 170 1381

20 220

18 469

Si le contrôle des loyers était aboli dès le 1er janvier 1953, l'insuffisance de l'offre aurait pour effet de provoquer une adaptation des loyers dea logements de construction ancienne à ceux des nouvelles habitations. Le tableau suivant, qui concerne les villes de Zurich, Berne et Baie ( l ) , montre l'écart qui existe entre les loyers des immeubles achevés avant la guerre et ceux qui sont exigés pour les logements construits ultérieurement: Période de construction

Zurich avant 1917

de 1917 à 1939 de 1940 à 1951 en 1951 (loyers autorisés par le SFCP) Berne avant 1917 de 1917 à 1939 de 1940 à 1950 1" semestre 1951

Baie

avant 1920 de 1921 à 1930 de 1931 à 1941 de 1942 à 1950 1er semestre 1951

Logements de 3 pièces fr.

4 pièces fr.

858

1166

1589

1190 1663

1369 1847

1684 2215

2 pièces fr.

.2278 O 924 1232 1562 1741

704 879 1064 1259 1682

2818 (2) 3572 (*) 1341 1752 1621 2222 1984 2413 2036 2758

983 1199 1416 1656 1848

1420 1532 1965 2027 2894

(*) L'analyse tles résulLy-ty du recensement des logements exécute on 1950 n'étant pas encore achevée, nous avons utilisé les chiffres de l'enquête intermédiaire destinée à calculer l'indice des loyers de novembre 1951.

(-) Y compris les logements de 2%, 3% et 4% pièces.

83

L'évolution des loyers dépend toutefois de tant de facteurs qu'il n'est pas possible de faire des pronostics précis. On peut tout au plus se livrer à des estimations. Nous croyons cependant qu'une appréciation prudente des données statistiques à notre disposition et des divers éléments qui doivent être pris en considération permet de conclure que, si le contrôle des loyers était supprimé, les loyers des anciens immeubles appartenant à des particuliers augmenteraient d'environ 45 pour cent par rapport à 1939 ou de 30 pour cent au regard du niveau actuel. Certaines expertises font même redouter des augmentations plus considérables encore. Supposé même que cette hausse soit échelonnée sur plusieurs années, le Conseil fédéral ne saurait prendre la responsabilité de rétablir brusquement la liberté sur le marché locatif.

Si l'on ne peut pas faire des pronostics exacts quant à l'ampleur des relèvements qui suivraient une abolition du contrôle des loyers, il n'est cependant pas douteux que les propriétaires d'immeubles tenteraient de profiter le plus possible de la liberté reconquise. Il est assez conforme à la nature humaine qu'un groupement économique libéré de la tutelle de l'Etat s'efforce, dans la mesure où la situation du marché le permet, de compenser dans le plus bref délai le manque à gagner qu'il estime avoir subi pendant les années où il a été soumis à un contrôle. Les mutations de biens-fonds contribueront également à la hausse des loyers. En prévision d'un assouplissement, voire d'une suppression du contrôle des loyers, on paie d'ores et déjà pour les immeubles des prix qui, compte tenu des loyers actuellement autorisés, assurent tout au plus un rendement brut de 5 pour cent, et parfois même de 4 pour cent seulement. Si le contrôle des loyers était aboli, ces propriétaires s'empresseraient certainement de majorer les loyers dans une mesure qui couvre non seulement les charges, mais qui assure aussi un rendement approprié des capitaux correspondant au prix d'achat élevé. II suffit d'ailleurs de jeter un coup d'oeil sur l'évolution des loyers au lendemain de la première guerre mondiale pour se convaincre qu'une disparition du contrôle serait suivie d'une augmentation massive des loyers.

Le graphique ci-après, qui permet de suivre l'évolution de l'indice des loyers de 1914 à 1952, indique que
ces derniers accusent, de 1915 à 1932, une hausse assez uniforme dans l'ensemble du pays.

Pour les logements achevés avant 1914, le relèvement a été de 78 pour cent en moyenne. Pour cette catégorie d'habitations, l'indice était inférieur de 9 points ou de 4,8 pour cent seulement par rapport à l'indice global (ensemble des logements anciens et nouveaux). Lies loyers des anciens logements ont donc été largement adaptés à ceux qui étaient exigés dans les immeubles de construction récente. Bien que ces majorations aient été en partie une conséquence de la modernisation des immeubles, il n'est pas moins intéressant de constater qu'elles se sont poursuivies après 1920, alors que les frais de construction et le coût de la vie avaient très fortement

84 Variation de l'indice des dépenses de construction, des loyers et du coût de la vie dès 1914 300

pOO

BAUKOSTENINDEX DER STACT ZÜRICH f-~^ INDICE DE CONSTRUCTION DELA \ / \ VILLE DE ZÜRICH / \l Z50

200

ISO

100

100

baissé. Il convient aussi de relever qu'aujourd'hui, la pénurie, ainsi que l'écart entre les loyers des logements anciens et de construction récente, sont beaucoup plus marqués qu'à l'issue de la première guerre. C'est dire qu'une suppression prématurée du contrôle des loyers pourrait avoir des répercussions plus graves qu'alors sur le coût de la vie et, par voie de conséquence, sur notre économie en général.

Une prorogation du contrôle des loyers exige le maintien des mesures visant à protéger les locataires contre toute résiliation abusive des baux à loyer. Il va sans dire que l'écart entre les loyers des anciens et des nouveaux logements pousse les locataires à rechercher avant tout des appartements d'avant-guerre, car leurs loyers n'ont été majorés que de 10 pour cent environ par rapport à 1939. Dans ces conditions, chaque logement de construction ancienne est l'objet d'une vive concurrence. Point n'est besoin que le propriétaire la stimule. Il serait tenté, si le contrôle des prix était supprimé, de laisser le logement au plus offrant, ce qui impliquerait des hausses -- directes ou indirectes -- des loyers. Il est évidemment impossible de prévenir radicalement de telles opérations. On peut cependant les limiter

85

très sensiblement et empêcher ainsi le propriétaire de susciter la concurrence en dénonçant le bail aux fins de profiter de l'afflux de la demande pour majorer indûment le loyer. Une certaine protection contre la résiliation abusive des baux paraît donc être le complément nécessaire d'un contrôle efficace des loyers.

Si nous nous refusons aujourd'hui à laisser libre cours a l'évolution des loyers, cela ne veut pas dire que nous croyons pouvoir maintenir indéfiniment l'écart entre les loyers des anciens et des nouveaux logements.

Mais il s'agit là d'un problème que nous n'avons pas à examiner ici sous ses différents aspects; une solution devra être recherchée en temps donné.

Bornons-nous à préciser l'objectif final de notre politique en matière de loyers : rendre peu à peu à la liberté le marché du logement et faire en sorte que le niveau des loyers corresponde à la valeur effective de la chose louée.

On peut se demander dès maintenant s'il ne conviendrait pas de libérer de tout contrôle les loyers des immeubles qui seront construits à l'avenir.

2. Les fermages des biens-fonds destinés à la production agricole Dans notre message du 30 décembre 1947 à l'appui d'une loi fédérale sur le maintien de la propriété- foncière rurale, nous estimions que les prescriptions relatives aux fermages, fondées sur la législative consécutive à la dévaluation monétaire et qui s'intègrent aux dispositions sur le contrôle des prix (l), sont étrangères aux règles du droit foncier. Le Conseil national décida néanmoins, a la requête des organisations de fermiers, d'insérer dans le droit foncier un article qui eût attribué au fermier le droit de réclamer la réduction d'un fermage manifestement exagéré. Toutefois, le Conseil des Etats limita fortement la portée de cette disposition. L'article 25 de la loi fédérale du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété foncière rurale a la teneur suivante: « Lorsque, par suite de circonstances nouvelles, le fermage convenu, y compris, s'il y en a, les prestations accessoires, se révèle être manifestement exagéré et que le fermier se trouverait ou risquerait de se trouver, de ce fait, aux prises avec des difficultés financières, il peut demander à l'autorité compétente de réduire ce fermage de sorte que, compte tenu de la valeur de rendement de la chose affermée, il puisse
disposer de moyens d'existence suffisants. « (*) L'article 1er, 2e alinéa de l'ordonnance I du département de l'économie publique concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché, du 2 septembre 1939, est ainsi conçu: fl En co q\ïi ooneorno los baux à. ferme, los droits do paeago ot los droits d'estivage, les dispositions de l'ordonnance XI«, du 11 juillet 1938, du département fédéral de l'économie publique sur les mesures extraordinaires concernant le coût de la vie, sont applicables par analogie. »

86

Cette disposition aura force de loi pour un temps illimité dès que le nouveau droit foncier sera entré en vigueur, c'est-à-dire dès le 1er janvier 1953. Son application est toutefois subordonnée à l'existence de circonstances nouvelles. Le fermage convenu ne peut être réduit que si, par suite de telles circonstances (par exemple une crise économique), il se révèle manifestement exagéré et à la condition qu'il mette en danger la situation financière du fermier. L'article 25 de la loi sur la propriété foncière rurale a un caractère analogue à la clausura rebus sic stantibus. Il est également apparenté à l'article 287 du code des obligations (remise du fermage en cas d'accidents extraordinaires) sans lui être cependant identique. En pratique, l'article 25 laisse donc une entière liberté contractuelle dans le secteur des fermages. Sous le régime du droit foncier, rien ne pourra empêcher que les fermages soient augmentés ou fixés selon la libre volonté des parties. En outre, le fermier n'aura aucun moyen, à moins que des circonstances nouvelles ne se présentent, de faire réduire à un niveau supportable un fermage manifestement exagéré. Il est ainsi clairement établi que l'article sur les fermages inséré dans le droit foncier ne remplace ni ne rend superflu le contrôle exercé sur les fermages, en vertu des pouvoirs extraordinaires, depuis la dévaluation du franc suisse.

Vu les tendances à la hausse qui se manifestent en ce domaine, nous ne pourrions prendre la responsabilité d'abandonner toute possibilité d'intervention dès le 31 décembre 1952. Nous estimons indispensable d'incorporer les fermages dans le projet d'arrêté constitutionnel sur le maintien temporaire du contrôle des prix. L'affermage dans notre pays a une telle importance qu'on ne saurait sous-estimer son influence sur les prix des produits agricoles, sur le coût de la vie en général et, il va sans dire, sur les prix des biens-fonds.

Le recensement des entreprises agricoles opéré en 1939 démontre que sur un total de 234 913 entreprises, 100 781 exploitaient en tout ou en partie du terrain affermé. Une entreprise sur deux environ se trouvait donc dans ce cas. D'après le recensement de 1939, il existait 42 251 exploitations ayant exclusivement du terrain pris à bail ou dans une proportion dépassant 50 pour cent. Ces 42 251 exploitations
représentaient, à elles seules, 18 pour cent de toutes les exploitations agricoles. En Suisse, la surface des exploitations représente 1 342 697 hectares (sans les pâturages des Alpes et du Jura) ; selon le dernier recensement, cette surface englobait 294 660 hectares de terrain affermé, soit 22 pour cent de cette surface.

Il ne faut pas perdre de vue que par exemple l'établissement des voies de communication, la construction de logements, de bâtiments et installations à usage industriel exigent du terrain et que, dès lors, la surface du sol productif est en constante régression. De 1905 à 1939, le nombre des entreprises agricoles a marqué un recul de 33 383 unités, c'est-à-dire, en moyenne, de 1000 unités par an. C'est surtout en raison de cette évolution,

87

dont on ne voit pas la fin, que la demande de propriétés agricoles est de beaucoup supérieure à l'offre. Bien que le degré d'occupation dans l'industrie et le bâtiment soit élevé, le nombre des personnes qui cherchent à prendre à ferme des biens-fonds demeure important. Il serait encore plus considérable en cas de fléchissement de l'emploi, car l'exode des populations rurales s'atténuerait sans doute sensiblement. Nous rappelons en outre que le nouveau droit foncier ne prévoit plus de limitation du prix de vente à l'égard de ceux qui ne sont pas au bénéfice du droit de préemption (1). De plus, il existe une propension fâcheuse, inspirée par la spéculation, à donner à ferme des parcelles d'exploitations formant un tout. En cas de mutations, notre législation vise à conserver des exploitations agricoles viables; or, des dispositions de ce genre font défaut en matière d'affermage. Toutefois, le contrôle des fermages a permis jusqu'à présent d'entraver dans une certaine mesure l'intérêt que peut avoir le propriétaire à donner à ferme des parcelles de biens-fonds. La supressiori du contrôle aurait sans doute pour conséquence, dans bien des cas, le morcellement des domaines viables, car il permettrait d'obtenir des fermages plus élevés.

D'une manière générale, les prescriptions édictées sur les fermages après la dévaluation du franc suisse, confirmées au début de la guerre, ont fait leurs preuves; elles étaient propres à tenir les fermages dans des limites raisonnables. Elles ont contribué à créer pour les fermiers des conditions satisfaisantes que l'on devrait s'efforcer de maintenir. Nous craindrions beaucoup de rendre du jour au lendemain les fermages à la liberté, qui, fatalement, conduirait à la hausse. En tout état de cause, il nous paraît nécessaire de proroger temporairement le régime qui subordonne à une autorisation la fixation et l'augmentation des fermages. Ce régime a donné de bons résultats. La possibilité de réduire le fermage à la requête du fermier ne permet pas, à elle seule, d'atteindre le but visé. La procédure prévue à cette fin n'est pas satisfaisante, parce qu'elle est de nature à troubler la bonne entente entre parties et à inciter le bailleur à résilier le contrat pour le plus prochain terme.

Dès le moment où les dispositions concernant le contrôle des fermages, fondées
aujourd'hui sur la législation relative à la dévaluation, auront une base juridique nouvelle, il conviendra d'examiner si elles doivent être modifiées sur certains points. A ce propos, on pourra mettre à profit les expériences que les autorités cantonales et fédérales ont rassemblées pendant plus de treize ans.

Nous constatons encore que, d'une manière générale, la réglementation actuelle des fermages a rencontré de la compréhension parmi les ( l ) (Cf. art, 6 à 17 de la loi fédérale du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété fondete rurale.)

ss propriétaires. Jusqu'à présent, on n'a noté aucune opposition formelle à la règle selon laquelle les fermages doivent être équitablement proportionnés à la valeur de rendement.

VII. LA JUSTIFICATION DU MAINTIEN TEMPORAIRE DU CONTRÔLE DES PRIX Lorsque les hostilités prirent fin, en 1945, les milieux économiques escomptaient un retour rapide à la normale, un recul sensible de la production et l'apparition du chômage. On sait que ces prévisions ne se sont pas réalisées. Au contraire, la demande étrangère a donné à l'activité économique une impulsion sans précédent et a provoqué un renchérissement très sensible. Le fléchissement intervenu en 1949 n'a pas été suivi par la dépression que l'on craignait. Dès le milieu de 1950, la guerre de Corée et ses conséquences ont porté la production et le renchérissement à des niveaux qui n'avaient encore jamais été atteints. La hausse des prix des marchandises importées a été considérable jusqu'à l'été de 1951. Depuis quelques moie seulement, on note des fluctuations et une certaine tendance à la baisse.

Les exemples ci-après mentionnés renseignent à ce sujet.

En. Suisse, les prix de détail ont haussé lentement, mais de manière constante. Ils sont aujourd'hui supérieurs de 8 pour cent au niveau atteint avant la guerre de Corée:

total

Mai 1950 Décembre 1950 . . .

Décembre 1951 . . .

Mars 1952

196,8 218,1 227,6 222,4

Indice des prix de gros nnmh&ndi9ce indigènes étrangères

186,8 191,0 197,2 196,6

211,8 259,3 274,0 261,8

Indice du coût de la vie

158,2 160,8 171,0 170,8

89 Prix moyens du commerce de gros (franco frontière, marchandise dédouanée) 1939 = 100

90

L'indice des prix de gros reflète l'évolution des prix mondiaux avec un certain retard, le mouvement ascensionnel étant atténué par la stabilité relative du prix des marchandises produites en Suisse. Le recul enregistré depuis le milieu de 1951 est également la conséquence de la baisse du prix des marchandises importées. En revanche, les cours des marchandises produites à l'intérieur et le coût de la vie n'ont pas encore suivi le mouvement de baisse qui s'est produit à l'étranger. On peut en conclure que les augmentations de prix et de salaires intervenues en Suisse depuis l'automne dernier ont eu pour effet de maintenir le coût de la vie à son niveau du début de l'année.

La production a considérablement augmenté depuis le début du conflit coréen. L'année dernière, le volume des exportations et le degré d'activité dans le bâtiment ont atteint des chiffres record. Il n'est guère probable que l'on enregistre un fléchissement sensible en 1952. De son côté, l'exécution du programme d'armement contribuera à maintenir à la longue une activité qui se poursuit à un rythme que le Conseil fédéral a jugé nécessaire de tempérer par diverses mesures prises en vue de réduire les investissements.

En dépit de la prospérité, les salaires et les prix dans certains secteurs, notamment dans l'agriculture, n'ont pas tout à fait suivi l'évolution générale ; c'est la raison pour laquelle d'aucuns tendent à réaliser un équilibre dans ce domaine. Depuis quelque temps, toutefois, on note un certain ralentissement dans divers secteurs de la production de biens de consommation. Ce phénomène est dû à la réserve dont fait preuve la clientèle et aux difficultés d'exportation. Dans la mesure où ce ralentissement aurait pour effet de ramener l'activité à un niveau inférieur au rythme normal, il ne pourrait être qu'éphémère.

Si donc l'on considère les principaux facteurs d'ordre interne qui déterminent les prix -- exportation, bâtiment, armement, salaires, produits agricoles -- un recul des indices apparaît peu probable prochainement.

Pourtant, le degré d'activité dépend avant tout de l'évolution enregistrée à l'étranger, et cette dernière est commandée de manière essentielle par la situation politique.

Cette situation est très instable. Il est impossible de faire des pronostics, pas même à courte échéance. Les tensions sont
constamment alimentées par trois sortes de conflits: les affrontements au sujet du statut des puis* sances vaincues ; la liquidation du régime colonial et enfin les antagonismes idéologiques que l'on sait ; elles ont des répercussions sur tous les problèmes politiques et économiques.

Cette instabilité peut provoquer à tout instant des conflits localisés ou une guerre générale, ou encore donner une nouvelle impulsion à la course aux armements. L'affaire de Corée montre les conséquences économiques que même un conflit localisé peut entraîner à l'échelle mondiale. Elle a

Prix moyens de gros, franco frontière, en francs, marchandises dédouanées Fin 47

Produit»

Coton brut 1 kg^ Laine Mérinos . . . .

1 kg Cuir à dessus. . 1 pied^carré

Milieu 48

Ma 48

Milieu 49

Fin 49

Milieu 50

Fin 50

Milieu 51

Fio 51

6.12 16.75 3.20

Mars 62

4.69 18.83 3.30

4.08 15.83 3.10

4.14 14.17 3.10

Fer rond 100 kg 53.38 53.38 53.38 Etain (Straits) . . . . 1 0 0 k g 915.-- 1005.-- 1005.-- 232.50 237,50 200.-- Cuivre électrolytique . 100 kg

51.68 990.-- 179.--

Î8.22 743.33 202.67

Briquettes de lignite union 1 t, Coke concassé . . . .

1t.

84.18 146.60

68.50 149.50

72.63 146.30

68.63 120.50

67.63 125.50

56.-- 93.40

59.50 96.40

70.15 117.40

70.15 117.40

70.15 117.40

Café vert, Santos.

Sucré cristallisé. .

Fèves, de cacao . .

Coprah, . . .

,

3.28 101.33 440.-- 98. --

3.28 100.-- 385.-- 98.

3.33 88.58 350.-- 136.

3.42 88.79 325.-- 106.

5.07 88.88 262,-- 107,

5.30 85.41 330.-- 94.

6.12 96.60 333.-- 134.

6.11 123,67 370,-- 138.

5.68 98.25 337.-- 107. --

5.97 90.91 394.-- 80

, .

1 kg , . 100 kg , . 100 kg .

100 kg

4.50 14.70 5.20

5.35 17.00 4.25

4 04 16.75 3.10

6.46 27.50 4.15

6.09 19.50 3.80

5 11 13,75 3.--

46.47 58.97 62.97 33.47 62.97 754.-- 1444.-- 1188.33 1126.67 1200.-- 239.-- 368.33 433.33 451.67 378.33

92

été la seule cause de la pénurie de matières premières et de la forte hausse clés prix notées depuis le milieu de 1950. Certes, nous sommes actuellement- en présence d'une légère amélioration de l'offre, liée a une certaine baisse des prix:. Mais la moindre aggravation des tensions pourrait renverser cette situation. Il suffirait aujourd'hui d'un événement de nature secondaire pour déclencher une nouvelle course aux armements et une vague d'accaparement. Les accumulations de stocks et le réarmement opérés à l'étranger ont contraint la Suisse à utiliser au maximum sa capacité de production industrielle, au moment même où les pris; montaient fortement. Rien ne permet d'admettre que l'impulsion donnée à l'activité par l'exécution des programmes militaires touche à sa fin; les ralentissements que l'on observe ici et là pourraient ne pas avoir un caractère durable.

Les Etats-Unis et les divers pays d'Europe occidentale continueront d'absorber de très fortes quantités de matières premières et de machines.

L'instabilité politique dans certaines régions d'Afrique ou d'Asie qui fournissent des matières importantes pour le réarmement fait craindre des perturbations économiques. La guerre moderne étant un énorme consommateur de matériel, l'élimination de l'un ou clé l'autre producteur entraînerait une nouvelle raréfaction des matières premières et de nouvelles hausses de pris.

Pour le moment, la réserve dont fait preuve la clientèle constitue un autre élément d'incertitude sur les marchés internationaux. Ce comportement et les efforts que déploie actuellement l'économie privée pour écouler les stocks de produits finis n'ont encore d'incidences que dans certains secteurs de la production de biens de consommation. Les restrictions à l'importation décrétées par la France, la Grande-Bretagne et les autres pays du bloc sterling agissent dans le même sens. Il serait cependant prématuré de conclure du recul de l'activité dans ces branches ou de restrictions frappant l'importation de marchandises non indispensables que nous allons au devant d'un fléchissement durable de la conjoncture. D'ailleurs, le comportement des consommateurs est déterminé largement par des facteurs psychologiques, extrêmement instables et pouvant se modifier d'un instant à l'autre.

Ainsi donc:, la situation économique et politique laisse
ouvertes toutes les possibilités. Des modifications vers le mieux ou vers le pire, vers la baisse ou vers la hausse peuvent intervenir brusquement. Dans ces conditions, l'Etat doit rester à même de surveiller l'évolution des prix et de prendre ; les mesures qui lui paraissent appropriées pour empêcher des hausses abusives. Cependant, les interventions de l'Etat ne seront opérées au moment opportun et elles ne seront efficaces que si l'on connaît exactement la situation. L'évolution des prix doit donc être l'objet d'une surveillance constante. Cette surveillance doit être toutefois discrète et limitée aux secteurs essentiels. Lorsqu'elles constatent des hausses de prix qui

93

leur paraissent excessives, les autorités apprécieront avec les intéressés les divers éléments qui déterminent les prix et les engageront, le cas échéant, à ramener ces derniers à un niveau normal. De cette manière le système de la surveillance des prix, par son existence même, favorisera une modération librement consentie. Pour ce qui est des produits qui bénéficient d'une protection contre la concurrence étrangère, les interventions en matière de pris seront également limitées au strict nécessaire.

La tendance à la hausse subsiste pour diverses prestations et marchandises. Une suppression, brusque, a la fin de l'année, de toutes les prescriptions en vigueur serait suivie d'une hausse sensible du coût de la vie, avec les conséquences fâcheuses qu'une telle hausse comporterait pour nos industries d'exportation, et provoquerait brusquement une rupture de l'équilibre social. En conséquence, les dispositions encore applicables à divers secteurs doivent être prorogées, mais fondées sur de nouvelles bases légales. Il va sans dire que l'Etat adaptera ses interventions à la situation du moment; dès qu'elle le permettra, les prescriptions seront atténuées ou abrogées.

Nous avons démontré, en 1949 et en 1950, que nous n'hésitons pas à les supprimer dès que nous croyons pouvoir en endosser la responsabilité.

Nous espérons que la nécessité ne nous contraindra pas à édicter de nouvelles dispositions sur les prix et que nous pourrons, pour l'essentiel, nous contenter de surveiller l'évolution des principaux d'entre eux. Nous n'entendons pas modifier notre conception libérale de l'économie, une conception qui a fait ses preuves. Mais il n'en reste pas moins que la prudence commande de maintenir la surveillance des prix, moyen à la fois simple et efficace.

VIII. L'AVIS DES CANTONS ET DES ASSOCIATIONS ÉCONOMIQUES 1. Le 8 février 1952, le département de l'économie publique a soumis a l'appréciation des cantons et des associations économiques un premier projet d'arrêté. En voici la teneur: Arrêté fédéral sur le contrôle des prix (Avant-projet du 6 février 1952)

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 85, ch. 14, 118 et 121, al. 1, de la constitution fédérale, vu le message du Conseil fédéral, du considérant que l'arrêté fédéral da 18 déecinbro 1950, supprimant les pouvoirs extraordinaires du Conseil fédéral abroge dès le 31 décembre 1952 l'arrêté du Conseil fédéral du 1er septembre 1939 concernant le coût de la vie et mesures destinées à protéger le marché, Feuille fédérale. 104« année. Vol. II.

7

94 voulant éviter que cette abrogation n'ait de fâcheux effets sur le coût de la vie, arrête :

La constitution fédérale du 29 mai 1874 est complétée par les dispositions suivantes : Article premier 1 Les prix des marchandises, les loyers d'immeubles et locaux, les fermages des biens-fonds destinés à la production agricole sont soumis au contrôle de la Confédération.

2 Sont toutefois exceptées de ce contrôle les transactions concernant les exportations directes.

Art. 2 1 En vue de maintenu- le coût de la vie à nu niveau convenable, le Conseil fédéral peut édicter des dispositions sur les prix, les loyers et les fermages, mentionnés à l'article 1er, al. 1, et prendre tonte mesure propre à en assurer l'efficacité.

a A cet effet et en règle générale, il consultera préalablement une commission composée de représentants des divers milieux économiques du pays.

Art. 3 Avec l'assentiment préalable de l'Assemblée fédérale, le Conseil fédéral peut étendre à d'autres objets le contrôle prévu à l'article 1er, alinéa 1 et les dispositions et mesures prévues à l'article 2.

Art. 4 Le Conseil fédéral peut déléguer au département de l'économie publique les pouvoirs que lui confèrent l'article 2, al. 1, et l'article 3.

2 II peut aussi déléguer certains de ces pouvoirs aux cantons.

3 Le département de l'économie publique peut autoriser le service fédéral du contrôle des prix à édicter des prescriptions pour l'exécution des ordonnances dudit département.

Art. 5 1 Chacun est tenu de fournir au département de l'économie publique, à ses organes ou à ceux des cantons tout renseignement et toute pièce utile pourlés objets visés à l'article 1er.

2 Cette disposition est également applicable lorsque le Conseil fédéral juge nécessaire d'ordonner une enquête dans un secteur autre que ceux énumérés.

à l'article 1er, al. 1.

Art. 6 1 Le Conseil fédéral peut édicter des peines d'amende et d'emprisonnement jusqu'à un an, pour réprimer les infractions aux prescriptions et mesures édictées en vertu du présent arrêté.

a La poursuite et le jugement de ces infractions incombent aux cantons, 3 Si l'inculpé, le tiers dans l'exploitation duquel l'iiifiaction a été commise ou leurs ayants-cause ont acquis du fait de cette infraction un avantage pécuniaire illicite, le juge peut les condamner à payer à la Confédération une somme correspondant à cet avantage, alors même que personne n'est punissable.

1

95 Art. 7 Le Conseil fédéral présentera chaque année à l'Assemblée fédérale un rapport sur les mesures que lui-même et le département de l'économie publique auront prises en exécution du présent arrêté.

2 L'Assemblée fédérale décidera si ces mesures doivent être maintenues, complétées ou modifiées.

Art. 8 Demeurent en vigueur jusqu'au 30 juin 1953 les prescriptions non abrogées avant le 31 décembre 1952 et qui sont fondées sur l'arrêté du Conseil fédéral du 1" septembre 1939.

II Le présent arrêté aura force de loi du 1er janvier 1953 au 31 décembre 1957.

Il sera soumis à la votation du peuple et des cantons.

Le Conseil fédéral est chargé de son exécution.

1

2, Dana la circulaire qui accompagnait ce projet, le département de l'économie publique précisait que, dans la situation actuelle, la Confédération ne saurait prendre la responsabilité de se dessaisir, dès le 1er janvier 1953, de toute attribution en matière de contrôle des prix. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral se voit dans l'obligation de demander la faculté de continuer à exercer au delà du 31 décembre 1952 certaines attributions dans ce domaine. L'évolution du coût de la vie et la situation sur le marché locatif démontrent amplement qu'il sera probablement difficile, au cours des prochaines années, de se tirer d'affaire sans recourir à des prescriptions relatives aux prix maximums. La constitution ne permet pas aux autorités d'instituer un contrôle des prix. II sied donc, en premier lieu, de créer la base constitutionnelle nécessaire. Aussi, déclarait la circulaire, le Conseil fédéral a-t-il donné son agrément de principe à une solution visant à ajouter, pour une durée limitée, quelques articles à la constitution.

Si l'on donnait la préférence à un arrêté fédéral urgent, on pourrait objecter avec raison que les autorités créent artificiellement un état d'urgence que les circonstances ne justifient pas du moment que l'on dispose du temps nécessaire pour mettre sur pied un arrêté constitutionnel.

S'exprimant au nom du Conseil fédéral, le département de l'économie publique a donné l'assurance formelle que les autorités ne feraient usage des pouvoirs qu'elles sollicitent que dans la mesure indispensable à la sauvegarde des intérêts de la communauté. Des prescriptions de droit public au sens de l'article 2 du projet ne seront édictées que lorsque toutes les autres possibilités qui s'offrent de stabiliser les prix de plein gré, par exemple au moyen d'accords directs avec les intéressés, auront été épuisées.

Il ne paraît pas possible de mettre sur pied, pour le 1er janvier 1953, les prescriptions qui seront encore nécessaires et devront se fonder sur l'arrêté constitutionnel que nous proposons. C'est pourquoi nous recom-

96

mandons aux chambres fédérales de proroger, au plus tard jusqu'au 30 juin 1953, les prescriptions actuellement en. vigueur en matière de contrôle des prix.

3. Les réponses des cantons et des associations économiques sont très diverses. Entre les avis extrêmes de ceux: qui exigent strictement l'abolition de tout contrôle des prix dès le 1er janvier 1953 et de ceux qui demandent une réglementation nettement plus sévère que celle que prévoit notre projet, toutes les nuances sont représentées. Cette diversité illustre la complexité du problème et démontre l'impossibilité de solutions à l'emporte-pièce.

La plupart des réponses qui nous sont parvenues traitent, d'une part, de l'aspect matériel d'une prorogation du contrôle des prix et, de l'autre, de l'aspect juridique de l'arrêté envisagé. C'est sous ces deux aspects que nous résumerons ci-dessous l'essentiel des avis des cantons et des associations.

Les avis relatifs au maintien du contrôle des prix A. Cantons 1. La plupart des cantons sont en principe favorables au maintien du contrôle des prix. Quelques-uns d'entre eux, toutefois, font des réserves -- sur lesquelles nous reviendrons ·-- quant à la forme juridique. Deux cantons et trois demi-cantons seulement, Lucerne Uri, Unterwald le Haut et le Bas et Appenzell Kh. Ext. s'opposent à toute prolongation du contrôle des prix.

2 a. La plupart des cantons estiment que les circonstances ne permettent pas encore de renoncer entièrement à un contrôle des prix et que sa suppression complète serait préjudiciable à l'économie nationale. Pour ce qui est du champ d'application des nouvelles dispositions, les réponses font valoir, de manière générale, que c'est dans le secteur des loyers que le maintien, d'un contrôle apparaît le plus nécessaire. De l'avis de divers cantons, cette nécessité est confirmée par la pénurie sensible de logements qui subsiste dans les grandes villes et dans les régions industrielles. Ils craignent que la suppression de tout contrôle dans ce domaine n'ait des répercussions fâcheuses sur le coût de la vie.

Ils ajoutent que les dispositions relatives à la protection des locataires doivent être prorogées conjointement avec le contrôle des prix.

b. Pour ce qui a trait au contrôle des fermages, les avis sont partagés.

Quelques cantons estiment que la nouvelle loi fédérale du 12 juin
1951 sur le maintien de la propriété foncière rurale le rend superflu. On doute d'autre part que cette loi offre une base suffisante à l'institution d'un contrôle dans ce domaine. On relève également que ce contrôle devrait se limiter aux biens-fonds d'une superfìcie suffisante pour assurer l'existence d'une famille paysanne.

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o. La plupart des cantons qui ont adopté une attitude positive à l'égard de notre projet tiennent pour nécessaire le maintien du contrôle des pris pour certaines marchandises. Ils relèvent cependant que les dispositions y relatives doivent être prises avec la plus grande circonspection. Le canton de Zurich, notamment, trouve que l'article premier de l'avant-projet devrait être rédigé de manière à restreindre le champ d'application.

d. Les avis diffèrent également en ce qui concerne l'assujettissement des marchandises exportées au contrôle des prix. Tandis que le canton de Saint-Gali propose de libérer de ce contrôle même les exportations indirectes, Unterwald-le-Bas et Appenzell Rh. Int. suggèrent d'y assujettir toutes les exportations directes. Ce dernier canton est également d'avis qu'un maintien éventuel du contrôle des prix devrait avoir pour corollaire un contrôle des salaires.

3. Les diverses dispositions du projet n'ont pas provoqué de la part des cantons des remarques de nature fondamentale. Le canton de Berne redoute toutefois que la proposition de fixer à cinq ans la validité de l'arrêté n'en compromette l'acceptation. Aussi suggère-t-il qu'elle soit limitée à deux ou trois ans. Le canton de Neuchâtel, en revanche, estime qu'un arrêté constitutionnel ne saurait être limité dans le temps. Les cantons de Genève et de Schwyz expriment l'avis que le régime actuel de la procédure pénale et les commissions pénales instituées en liaison avec l'économie de guerre devraient être maintenus; cette mesure se justifie d'autant plus que la prolongation du contrôle des prix n'est envisagée que pour une durée limitée.

B. Associations économiques 1. Les associations ont émis, à propos de l'avant-projet, des avis forts différents. L'union suisse du commerce et de l'industrie, l'union centrale des associations patronales suisses, l'union suisse des arts et métiers, l'union suisse des syndicats autonomes, les associations de médecins, la société suisse des entrepreneurs, l'union centrale de sociétés suisses de propriétaires ont repoussé toute reconduction du contrôle des prix au delà du 31 décembre 1952. Les trois organisations mentionnées en premier lieu ont même demandé expressément que l'on renonce à la revision constitutionnelle envisagée. Bien qu'elle se soit prononcée négativement à l'égard du projet,
l'union suisse des paysans estime que le contrôle devrait être maintenu pour les loyers et les fermages. Cependant, à l'instar des cantons qui ont repoussé l'avant-projet, ces associations ne s'opposeraient pas au maintien du contrôle dans certains secteurs bien délimités -- le marché locatif par exemple -- si les circonstances l'exigeaient encore impérieusement à la fin de 1952. Elles ajoutent cependant que ces mesures devraient être prises à l'aide d'arrêtés fédéraux urgents de durée limitée, au sens de l'article S9bis de la constitution. Si ces associations

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s'opposent à la solution envisagée, c'est aussi parce que l'on n'est pas encore à même, à leur avis, d'apprécier si et dans quels domaines une prorogation du contrôle des prix apparaîtra nécessaire à la fin de 1952.

Quant aux organisations qui ont adopté une attitude positive, elles se recrutent avant tout parmi les associations de salariés. Ce sont: l'union syndicale suisse, la fédération suisse des sociétés d'employés, l'union suisse des coopératives de consommation, l'association suisse des syndicats évangéliques, la fédération suisse des syndicats chrétiens-nationaux, l'union suisse des locataires, l'union suisse pour l'amélioration du logement et l'alliance des sociétés féminines suisses.

2, Les avis ne laissent cependant pas de diverger parmi les associations qui se rallient à notre projet. L'unité de vues se limite en quelque sorte au principe même du maintien du contrôle des prix. S'il y a unité de vues quant au principe du maintien de ce contrôle, les opinions divergent sensiblement au sujet de son aménagement et de l'ampleur qu'il doit avoir.

Voici quelques-unes des principales réserves et propositions formulées par ces associations: a. La notion de « prix des marchandises » qui figure dans l'arrêté est considérée comme trop générale, des dispositions sur les prix n'apparaissant nécessaires que pour les marchandises et les matières premières essentielles.

b. Dans le secteur des loyers, domaine où l'on requiert le plus expressément un contrôle, on exige une limitation du champ d'application.

Les loyers des locaux commerciaux de tout genre et des logements de construction récente achevés sans subventions devraient être libérés de tout contrôle; ce dernier devrait se limiter exclusivement aux logements de construction ancienne et aux immeubles subventionnés.

Une association suggère même de laisser aux cantons la faculté, lorsque les rapports entre l'offre et la demande le justifient, d'assouplir, voire d'abolir tout contrôle pour ces deux catégories d'habitations. Plusieurs organisations donnent à entendre que le contrôle des loyers ne peut être efficace que si les mesures visant à protéger les locataires contre une dénonciation abusive des baux sont maintenues parallèlement.

c. L'union suisse des paysans estime que la loi fédérale du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété
foncière rurale n'offre pas une base suffisante à l'institution d'un contrôle des fermages ; aussi suggère-t-elle de conserver les dispositions actuelles, lesquelles, à son avis, constituent un complément nécessaire au nouveau droit foncier.

d. Diverses associations suggèrent d'étendre le contrôle aux tarifs et aux services.

Les autres dispositions du projet ne suscitent que peu de remarques de nature fondamentale. On désire que la commission prévue à l'ar-

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ticle 2 soit consultée dans tous les cas et non pas seulement « en règle générale ». Plusieurs associations demandent à être représentées dans cet organisme.

/, Pour ce qui est des dispositions d'exécution, on souhaite, de manière générale, qu'elles soient réservées exclusivement au département fédéral de l'économie publique et que celui-ci s'abstienne de déléguer ses attributions au service du contrôle des prix, afin que ce dernier ne dispose pas de pouvoirs trop étendus. On suggère également de limiter la délégation d'attributions aux cantons.

3. La banque nationale suisse souhaite que le contrôle des prix, instrument propre à empêcher une hausse indésirable du coût de la vie, soit maintenu et que soient créées les bases constitutionnelles nécessaires à cet effet.

Les avis relatifs à la forme juridique 1. La plupart des cantons et des associations qui se sont ralliés à l'idée d'un maintien du contrôle des prix acceptent également la solution juridique proposée, c'est-à-dire l'arrêté constitutionnel. Plusieurs d'entre eux font toutefois des réserves et donnent à entendre qu'il serait peut-être préférable de recouru- à la forme de l'arrêté fédéral urgent. On paraît estimer, en quelque sorte, qu'il y a une certaine contradiction entre le caractère provisoire de la prolongation du contrôle des prix et le caractère généralement permanent de la revision constitutionnelle.

2. Le Tribunal fédéral s'est prononcé de manière circonstanciée sur le problème de la forme juridique. Il arrive à la conclusion nette que la solution qui vise à compléter temporairement la constitution est parfaitement admissible du point de vue juridique. Du moment qu'il n'est pas nécessaire que les dispositions envisagées entrent en vigueur avant le 1er janvier 1953, il estime que le recours au régime de l'arrêté fédéral urgent, au sens de l'article 89 bis de la constitution, ne se justifie pas, le temps à disposition étant suffisant pour mettre sur pied un arrêté constitutionnel de durée limitée.

3. Dans la plupart des cas, les cantons et associations qui donnent la préférence à l'arrêté fédéral urgent et s'opposent à l'arrêté constitutionnel ne motivent pas leur attitude. Les associations qui se prononcent contre cette procédure invoquent, pour l'essentiel, les raisons suivantes: a. L'expérience démontre que les modifications
apportées provisoirement à la constitution ont tendance à devenir permanentes. La solution proposée par le Conseil fédéral risque d'ouvrir la voie au dirigisme; 6. L'arrêté proposé est contraire à la nature même de la constitution.

La seule solution possible consisterait donc à insérer dans la constitution un nouvel article délimitant les pouvoirs conférés à l'autorité, puis à édicter la loi d'exécution.

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c. Aux termes de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 supprimant les pouvoirs extraordinaires du Conseil fédéral, les arrêtés pris par le Conseil fédéral en vertu des pouvoirs extraordinaires ne peuvent être prorogés que s'ils sont confirmés par des arrêtés fédéraux adoptés dans les formes prévues à l'article 89, 2e alinéa, ou à l'article 89 bis de la constitution. On en conclut à l'impossibilité de transférer par une autre voie dans la législation ordinaire des dispositions prises en vertu des pouvoirs extraordinaires.

d. Seul un arrêté fédéral urgent est conforme au caractère extraordinaire que revêt une prolongation provisoire du contrôle des prix au delà de 1952.

IX. LA FORME JURIDIQUE Au cours des chapitres précédents, nous avons exposé les raisons pour lesquelles nous ne pouvons prendre la responsabilité de nous dessaisir, à la fin de cette année, de toute attribution en matière de contrôle des prix. Il s'agit dès lors de rechercher sur quelles bases juridiques pourront être fondées les mesures qui se révéleront encore indispensables après l'échéance des pouvoirs extraordinaires et quelle forme juridique devront revêtir les dispositions attributives de compétence qu'il sera, le cas échéant, nécessaire d'édicter.

1. Dans l'aperçu historique (cf. chapitre I), nous avons rappelé que durant la décennie de 1930 à 1940, la Confédération a déjà disposé de certains pouvoirs en matière de contrôle des prix. Ne serait-il pas possible de maintenir temporairement ce contrôle en le fondant sur l'un ou l'autre des actes législatifs de cette époque ? A ce sujet, nous constatons ce qui suit : a. L'arrêté fédéral du 20 juin 1936 sur la surveillance des prix des marchandises était destiné, selon la teneur primitive de son article 4, à rester en vigueur aussi longtemps que l'arrêté fédéral du 14 octobre 1933 concernant les mesures de défense économique contre l'étranger.

La validité de ce dernier arrêté était limitée à fin 1937 (AF du 11 décembre 1930).

Le 23 décembre 1937, les chambres prorogèrent jusqu'à la fin de 1939 l'arrêté fédéral du 14 octobre 1933/11 décembre 1935. A la même date elles prorogèrent aussi, jusqu'à la fin de 1939, l'arrêté fédéral du 20 juin 1936 sur le contrôle des prix des marchandises, et cela par un acte législatif indépendant de l'arrêté fédéral du 14 octobre 1933. L'article 4
précité se trouva ainsi abrogé, ou plutôt modifié, bien que l'arrêté du 23 décembre 1937 ne le déclare pas expressément.

Lorsque le 22 juin 1936, l'arrêté fédéral concernant les mesures de défense économique contre l'étranger fut prolongé, avec certaines modifications, jusqu'à la fin de 1942, on s'abstint de renouveler l'arrêté

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sur le contrôle des prix des marchandises. Ce dernier arrêté a donc cessé d'être en vigueur dès le 1er janvier 1940. A ce propos, nous vous renvoyons à notre rapport sur la gestion en 1940, chapitre « Département de l'économie, publique, secrétariat général », 6. L'arrêté fédéral du 29 septembre 1936 sur les mesures extraordinaires d'ordre économique, devait avoir effet jusqu'au 31 décembre 1937. Il fut successivement prorogé le 23 décembre 1937 jusqu'à la fin de 1939, puis le 21 septembre 1939 jusqu'à la fin de 1942, date à laquelle il devint caduc. Notre rapport sur la gestion en 1942 indique les raisons pour lesquelles on a renoncé à prolonger sa validité au delà de 1942.

c. L'arrêté du Conseil fédéral du 27 septembre 1936 sur les mesures extraordinaires concernant le coût de la vie est le corollaire de l'arrêté sur la dévaluation, de la même date. Formellement, il est encore en vigueur; il figure dans le Recueil systématique des lois et ordonnances de la Confédération, Toutefois, il n'a plus été appliqué depuis que le Conseil fédéral, en vertu des pouvoirs extraordinaires, a pris son arrêté du 1er septembre 1939 sur le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché; ses dispositions d'exécution (ordonnances du département fédéral de l'économie publique) ont été suspendues pour la durée de validité de l'ordonnance I du département fédéral de l'économie publique du 2 septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché. Les ordonnances qui se fondent sur l'arrêté du Conseil fédéral du 27 septembre 1936 ne figurent pas dans le Recueil systématique des lois et ordonnances ; elles cesseront de porter effet dès le 1er janvier 1953 (1).

Serait-il possible, après l'expiration des pouvoirs extraordinaires, de fonder le contrôle des prix sur l'arrêté du Conseil fédéral du 27 septembre 1936 sur les mesures extraordinaires concernant le coût de la vie ? Le préambule de cet arrêté ne fait mention d'aucun fondement juridique. Tout au plus pourrait-on soutenir qu'il a la même base que l'arrêté du Conseil fédéral sur la dévaluation, à savoir l'article 53, 1er alinéa, de l'arrêté fédéral sur le régime financier de 1936 à 1937.

Cette disposition est devenue plus tard l'article 46 de l'arrêté sur le régime financier de 1939 à 1941 (abstraction faite d'un
complément sans importance pour le projet qui nous occupe). Ce dernier arrêté et singulièrement son article 46, est partie intégrante de l'arrêté sur le régime financier de 1951 à 1954, actuellement en vigueur. L'article 46 est ainsi conçu: « Le Conseil fédéral est autorisé à prendre toutes mesures qu'il jugera nécessaires au maintien du crédit national et qu'il estimera ne pouvoir être ( I ) Remarque : Coo considérations no sont pas valables en ce qui concerne l'ordonnance Xla du département fédéral de l'économie publique du 11 juillet 1938 et l'ordonnance XVI du département fédéral de l'économie publique du 24 niai 1949 sur les mesures extraordinaires concernant le coût de la vie.

102 différées. Dans les causes administratives, civiles et pénales, la voie juridique ordinaire est réservée.

Ces mesures seront l'objet d'un rapport qui devra être présenté à la plus prochaine session de l'Assemblée fédérale. »

Le fait que l'arrêté du Conseil fédéral du 27 septembre 1936 sur les mesures extraordinaires concernant le coût de la vie sera encore en vigueur après l'échéance des pouvoirs extraordinaires et que la base juridique sur laquelle le Conseil fédéral s'est vraisemblablement fondé pour l'édicter existe encore, ne suffit pas, à notre avis, pour fonder le contrôle des prix sur cet arrêté. Le contrôle des prix, tel qu'il doit être maintenu après le 31 décembre 1952, n'a rien à voir ou n'a qu'un rapport très lointain avec la dévaluation décrétée en 1936. En outre, ce contrôle ne saurait être assimilé -- ou ne pourrait l'être que très indirectement ·-- à des mesures nécessaires au maintien du crédit national au sens de l'article 46 de l'arrêté sur le régime financier de 1939 à 1941. Le contrôle des loyers, par exemple, est étranger au maintien du crédit national.

Le jpiértmbule de l'arrêté du Conseil fédéral du. 27 septembre 1936 sur les mesures extraordinaires concernant le coût de la vie fait ressortir que le Conseil fédéral a considéré cet arrêté comme une mesure nécessaire, en liaison avec la dévaluation. Dès lors qu'il s'agit de mesures sans rapport ou n'ayant qu'une relation très lointaine avec la dévaluation ·-- comme c'est le cas de celles qu'il faudra prendre éventuellement dès le 1er janvier prochain en matière de contrôle des prix --, elles ne sauraient s'appuyer sur l'arrêté du Conseil fédéral du 27 septembre 1936.

A notre avis, l'article 46 de l'arrêté sur le régime financier de 1939 à 1941 pourrait tout au plus servir de base à des dispositions sur le contrôle des prix s'il s'agissait de les édicter en liaison avec des mesures de politique monétaire.

On ne saurait perdre de vue enfin que l'article 4-6 parle de mesures destinées à maintenir le crédit national et que le Conseil fédéral juge impossible de différer. Or, les dispositions sur le contrôle des prix édictées en vertu des pouvoirs extraordinaires resteront en vigueur jusqu'à la fin de cette année. On n'a donc pas à prendre des mesures urgentes et ne souffrant aucun ajournement; au contraire, la voie législative ordinaire est encore ouverte, de sorte que pour ce motif également, il ne serait pas juste d'invoquer l'article 46.

Dans son rapport du 14 mars 1952 sur l'avant-projet du 6 février 1952, le Tribunal fédéral arrive, lui aussi, à la conclusion que l'article 46 précité ne saurait, en l'occurrence, servir de base juridique.

A ce propos, il déclare en particulier:

103 « Nous sommes cependant de l'avis qu'à tout le moins pour le moment, cette disposition ne pourrait servir de base à un arrêté fédéral sur le contrôle des prix. En effet, les prescriptions en cette matière, fondées sur les pouvoirs extraordinaires, resteront en vigueur jusqu'à fin 1952, de sorte qu'il n'y a pas lieu de prendre des mesures urgentes et ne souffrant aucun renvoi. A l'heure actuelle, nous estimons que la seule voie possible est de créer une nouvelle base constitutionnelle. D'ailleurs, nul ne saurait affirmer avec certitude qu'en 1953, le contrôle des prix pourrait servir au maintien du crédit national. Lorsqu'on 1936, le contrôle des prix fut institué comme corollaire de la dévaluation, les circonstances étaient différentes. » (Traduction.)

. Aux termes de l'article 8 de la loi du 1er avril 1938 tendant à assurer l'approvisionnement du pays en marchandises indispensables, le Conseil fédéral peut, en cas de danger de guerre imminent et d'entraves apportées par l'étranger à l'importation de marchandises indispensables, édicter des dispositions pour empêcher des hausses de prix injustifiées sur les marchandises en stock dans le pays.

Il va sans dire que cette disposition ne saurait constituer la base du contrôle des prix et notamment du contrôle des loyers après 1952, puisqu'elle ne peut être invoquée qu'en cas de danger de guerre imminent. Au surplus, la loi dont il s'agit ne s'applique qu'aux marchandises indispensables; le contrôle des loyers et des fermages, de même que celui des prix des services artisanaux et industriels ( x ) (cf. art. 1er de notre projet d'arrêté) ne sauraient donc en aucun cas être instituée en vertu de cette loi.

D'après la loi du 1er avril 1938 tendant à assurer l'approvisionnement du pays en marchandises indispensables et d'après l'arrêté de l'Assemblée fédérale du 26 avril 1951 complétant cette loi, l'importation, l'exportation, la production, l'utilisation, la livraison et l'acquisition des marchandises dont il s'agit peuvent être soumises à des mesures restrictives. Si de telles mesures étaient prises et entravaient la libre formation des prix, serait-il possible d'édicter, pour ces marchandises, des prix maximums en se fondant sur les actes législatifs prérappelés ? Même si l'on répondait par l'affirmative, une base juridique sur laquelle fonder des dispositions de contrôle des prix n'existerait que pour les marchandises indispensables auxquelles s'appliqueraient les mesures restrictives prévues par la loi du 1er avril 1938 et par l'arrêté de l'Assemblée fédérale du 26 avril 1951. De toutes façons, ni le contrôle des loyers et des fermages, ni des dispositions sur les prix des services artisanaux et industriels ne pourraient s'appuyer t1) Remarque. Si nous mentionnons non seulement le contrôle des loyers et des fermages (qui devrait élre maintenu du moins pour le moment), mais aussi les services artisanaux et industriels, cela ne signifie pas que nous envisagions de rétablir le contrôle des prix de ces services (Us en sont presque tous libérés), à moins, bien entendu, que la situation ne l'exige impérieusement.

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sur cette loi ou sur cet arrêté ; il en serait de même pour les marchandises non soumises aux mesures restrictives dont il vient d'être question. En conséquence, ni la loi du 1er avril 1938 ni l'arrêté du 26 avril 1951 ne peuvent constituer la base juridique recherchée. Nous rappelons aussi que toutes les dispositions sur les prix des marchandises encore en vigueur à l'heure actuelle deviendraient caduques, car aucune de ces marchandises n'est l'objet des mesures restrictives prévues par la loi et l'arrêté prémentionnés. En outre, il ne saurait être question de prendre des mesures de ce genre uniquement en vue de créer la possibilité de maintenir ou de rétablir des dispositions sur les prix.

e. Il n'existe aucun autre acte législatif sur lequel on pourrait se fonder pour maintenir le contrôle des prix après 1952. Nous arrivons ainsi à la conclusion qu'une nouvelle base juridique doit être créée.

2 a. La constitution contient-elle des dispositions conférant à la Confédération des pouvoirs en matière de contrôle des prix ?

Sans doute serait-il possible d'édicter des prescriptions sur les prix dans les limites d'une législation visant à remédier aux conséquences nuisible», d'ordre économique ou social, des cartels ou des groupements analogues (art. Slots, 3e alinéa, lettre d, de la constitution). En revanche, il n'existe pas de fondement constitutionnel sur lequel asseoir l'ensemble des prescriptions figurant dans notre projet d'arrêté. Le Tribunal fédéral, lui aussi, a constaté dans son rapport sur l'avant-projet du 6 février 1952, qu'on ne saurait, en particulier, fonder un contrôle des prix au sens de notre projet sur l'article 31 bis, 3e alinéa, lettre a, de la constitution.

On peut tirer de ce qui précède une première conclusion: le maintien temporaire du contrôle des prix que nous envisageons exige en premier lieu la création d'une base constitutionnelle.

b. On s'est demandé tout d'abord s'il y aurait lieu d'insérer dans la constitution une disposition conçue de manière générale, non limitée dans le temps, et qui donnerait à la Confédération le pouvoir de légiférer dans le domaine des prix au sens le plus large du terme. Toutefois, nous l'avons déjà dit, il ne s'agit pas d'ancrer le contrôle des prix dans la constitution pour en faire un instrument permanent de politique économique. Nous
persistons à penser, au contraire, que la politique économique actuelle de la Confédération -- en tant qu'elle a trait à l'intérieur et abstraction faite des périodes troublées telles que nous les vivons actuellement -- trouve une base suffisante dans les articles de la constitution relatifs au domaine économique, et que les conditions et la nécessité d'élargir cette base pour instituer un contrôle officiel permanent des prix n'existent pas. C'est la raison pour laquelle un article constitutionnel d'une validité non limitée n'entre pas en considération.

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Certes, il faut se demander également si pareille disposition constitutionnelle conçue en termes généraux, conférant certaines attributions en matière de contrôle des prix à la Confédération comme telle et non point à l'Assemblée fédérale ou au Conseil fédéral, ne pourrait pas être limitée dans le temps. Mais si l'on choisissait cette solution, il serait nécessaire d'édicter encore une loi d'exécution qui serait soumise au referendum facultatif. Cette voie comportant trois étapes -- création de la base constitutionnelle permettant à la Confédération de légiférer en matière de pris, puis élaboration et discussion parlementaire d'une loi d'exécution munie de la clause référendaire, enfin adoption d'une ordonnance d'exécution ·-- nous a toutefois parue impraticable, faute de temps. A elle seule la préparation de l'article constitutionnel durerait si longtemps qu'il ne serait pas possible de mettre sous toit la législation d'exécution avant le 1er janvier 1953.

c. Il ne restait ainsi que deux possibilités, à savoir: recourir à la voie législative ordinaire -- c'est-à-dire faire abstraction de la législation d'urgence ·-- et préparer un arrêté fédéral complétant la constitution, lequel conférerait certaines attributions directement à l'Assemblée fédérale ou au Conseil fédéral, et non point à la Confédération; les dispositions constitutionnelles et légales seraient ainsi réunies en un seul et même texte; ou mettre sur pied un arrêté fédéral muni de la clause d'urgence, conformément à l'article 89&'ts, 3e alinéa, de la constitution.

Avons-nous actuellement le chois entre ces deux voies ou seule l'une d'elles entre-t-elle en ligne de compte ? En d'autres termes, les conditions justifiant l'adoption d'un arrêté fédéral muni de la clause d'urgence sont-elles actuellement réunies ou devons-nous recourir à la procédure législative ordinaire ?

Il y a urgence au sens de l'article 89 bis de la constitution lorsque l'entrée en vigueur d'un arrêté ne souffre aucun retard. H ne peut donc s'agir que de mesures à prendre immédiatement, lorsque des circonstances soudaines les rendent nécessaires. On ne doit recourir à l'arrêté muni de la clause d'urgence que dans les cas où la procédure législative ordinaire ne permet pas, faute de temps, d'atteindre le but recherché.

A voir les choses de près, nous devons admettre
qu'il ne s'agit pas, au cas particulier, de prendre des mesures immédiates que des événements inopinés et soudains auraient rendus indispensables.

Jusqu'à la fin de cette année, nous disposons en effet des attributions nécessaires en matière de contrôle des prix. Le projet d'arrêté qui vous est soumis ne doit entrer en vigueur que le 1er janvier 1953.

D'autre part, notre projet contient diverses dispositions attributives de pouvoirs limités, dont il n'est nullement certain que la Confédé-

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ration fasse usage au début de 1953 déjà; peut-être ne lui serviront-ils qu'en 1954, ou peut-être même ne sera-t-il jamais nécessaire de les appliquer. Nous tenons à déclarer une fois encore que nous n'avons nullement l'intention de rétablir en tout état de cause, en vertu de l'arrêté constitutionnel, un contrôle des prix s'étendant à tous les domaines prévus à l'article premier. Abstraction faite de certains secteurs tels que les loyers, les fermages et peut-être certaines marchandises, nous espérons qu'il sera possible de se tirer d'affaire sans fixer de prix maximums et que, pour le cas où certaines mesures seraient néanmoins nécessaires, la surveillance des prix au sens de l'article 5 sera suffisante. L'urgence, telle que nous l'avons définie, ne serait pas réalisée à l'heure actuelle, même si la Confédération devait faire usage, au début de 1953 déjà, des pouvoirs que lui confère notre projet, ou si ce projet était modifié en ce sens que seules seraient maintenues les attributions indispensables au 1er janvier 1953 pour proroger le contrôle des loyers et quelques autres mesures. Le fait que les dispositions fondées sur les pouvoirs extraordinaires doivent cesser de porter effet au plus tard à la fin de cette année est connu depuis le 18 décembre 1950 (AF supprimant les pouvoirs extraordinaires du Conseil fédéral), et l'on savait déjà l'année dernière que la Confédération ne pourrait renoncer, en 1953, à tout moyen d'intervenir en matière de contrôle des prix. La possibilité existait donc de créer, par la voie de la procédure législative ordinaire, les bases juridiques nécessaires au maintien temporaire de ce contrôle; elle existe aujourd'hui encore. Il ne serait dès lors pas admissible de recourir à un arrêté muni de la clause d'urgence. A ce sujet également, l'avis du Tribunal fédéral est tout à fait clair. Dans son rapport du 14 mars 1952, le Tribunal fédéral déclare: « Comme ces dispositions ne doivent pas entrer en. vigueur ayant le 1er janvier 1953, il nous paraît juste de ne pas recourir à la procédure prévue à l'article 89 bis de la constitution, laquelle suppose que la voie législative ordinaire est impraticable. Or, le temps disponible est suffisant pour préparer et adopter un arrêté sous forme de complément transitoire de la constitution. » (Traduction.)

d. A l'heure actuelle, la procédure d'urgence n'est donc pas praticable.

Existe-t-il des raisons de surseoir à toute décision jusqu'à la fin de cette année et de créer ainsi l'urgence ?

Contrairement à l'avis exprimé dans quelques rapports sur l'avantprojet du 6 février 1952, nous sommes persuadés qu'au cours des prochains mois la situation ne subira pas de changements tels que nous pourrions prendre la responsabilité de renoncer à toute attribution en matière de contrôle des prix. Il faut dès lors considérer qu'un arrêté fédéral maintenant le contrôle des prix pour une durée limitée est dès à présent nécessaire. Même si l'évolution de la situation èco-

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nomique devait permettre d'abroger encore certaines dispositions actuellement en vigueur, il n'en faut pas moins compter avec l'éventualité d'événements qui, au cours de ces prochaines années, pourraient rendre indispensables des mesures au sens de l'article premier de notre projet. A notre avis, on ne saurait donc prétendre que la nécessité de maintenir temporairement le contrôle des prix soit actuellement encore douteuse, que l'adoption d'un arrêté à ce sujet soit prématurée et que l'on devrait la différer jusqu'à la fin de l'année, époque à laquelle on pourrait alors recourir à la procédure législative d'urgence. Même si l'on reconnaissait quelque pertinence à ces arguments en ce qui concerne tel ou tel secteur économique --- à notre sens, ils sont injustifiés --, ils ne seraient en tout cas pas valables pour les loyers. S'agissant des loyers en effet, les milieux consultés estiment, dans leur grande majorité, qu'aujourd'hui déjà on doit tenir pour certain que le contrôle ne pourra être abandonné à la fin de l'année.

Dans cet ordre d'idées, il nous faut encore aborder une autre question.

Est-il admissible, pour des raisons d'opportunité, de renvoyer l'adoption de l'arrêté à plus tard, de telle sorte que seule la procédure législative d'urgence soit encore pratiquement possible ? Nous le nions catégoriquement. Dans notre rapport à l'Assemblée fédérale du 27 février 1948 sur l'initiative populaire du 23 juillet 1946 pour le retour à la démocratie directe, nous avons reconnu qu'au cours des années 1930 à 1940, on a parfois attendu, avant de prendre certaines mesures, jusqu'au moment où il était impossible de temporiser plus longtemps. Or, c'est précisément ce procédé qui a suscité du mécontentement dans divers milieux, qui voyaient là une mise en péril des droits populaires. C'est ainsi qu'en l'espace d'environ une année et demie seulement, non moins de trois initiatives furent lancées en vue de restreindre le recours à la clause d'urgence. L'abus de cette clause fut également l'un des motifs de l'initiative qui aboutit à l'insertion du nouvel article SQbis dans la constitution.

On rétorquera sans doute que dans les cas de recours à la procédure d'urgence au sens de l'article 89 bis de la constitution, le souverain n'en est pas moins consulté, puisque l'arrêté muni de la clause d'urgence, s'il
n'a pas de base constitutionnelle et doit rester plus d'un an en vigueur, est subordonné à l'acceptation du peuple et des cantons, la votation devant avoir lieu dans un délai d'une année après son adoption par les chambres. Cet argument n'est pas pertinent. La consultation du peuple et des Etats après l'entrée en vigueur d'un acte législatif doit en effet constituer l'exception. Lorsque les circonstances le permettent, il faut recourir à la procédure législative ordinaire, c'est-à-dire consulter le souverain avant l'entrée en vigueur de l'arrêté.

108

La création artificielle de l'urgence est à l'heure actuelle aussi incompatible avec la constitution qu'elle l'était avant l'adoption de l'article 89 ois.

e. Vu les considérations qui précèdent, il ne peut être question de régler le problème au moyen d'un arrêté muni de la clause d'urgence a,u sens de l'article 89 ois, 3e alinéa, de la constitution. Une seule voie reste ouverte: celle d'un arrêté fédéral complétant la constitution..

Lorsqu'il s'est agi, en raison de circonstances particulières, d'édicter des dispositions pour une durée limitée, la Confédération a appliqué à maintes reprises cette manière de légiférer. Ainsi que le constate le Tribunal fédéral dans son rapport du 14 mars 1952, « elle constitue une procédure rapide permettant d'édicter des dispositions sans qu'il soit nécessaire de passer par deux phases législatives, la modification constitutionnelle, puis la promulgation d'une loi » (traduction.).

Les arrêtés suivants ont été pris conformément à cette procédure : l'arrêté fédéral du 29 septembre 1915 touchant l'adoption d'un article constitutionnel en vue de la perception d'un impôt de guerre non renouvelable (RO 31, 308), l'arrêté fédéral du 27 juin 1919 concernant l'adoption d'un article constitutionnel relatif à la perception d'un nouvel impôt de guerre extraordinaire (RO 35, 595), l'arrêté fédéral du 16 décembre 1938 concernant le régime transitoire des finances fédérales (RO 54, 885), l'arrêté fédéral du 21 juin 1939 sur les crédits destinés au renforcement de la défense nationale et à la lutte contre le chômage (RO 55, 577), l'arrêté fédéral du 20 décembre 1950 concernant le régime financier de 1951 à 1954 (RO 1950, 1507).

On objectera que cette procédure n'est pas normale. Mais sa légitimité ne fait toutefois aucun doute. Le Tribunal fédéral est également de cet avis lorsqu'il déclare dans son rapport déjà cité à maintes reprises : « Certes, la procédure choisie n'est pas celle que la constitution prévoit normalement pour l'adoption de dispositions de portée générale.

Elle n'est toutefois nullement incompatible avec la constitution. Le souverain constitutionnel empiète sur les attributions qui sont en général celles du pouvoir législatif. Mais on ne saurait lui dénier le droit de le faire, puisque c'est lui qui détermine les attributions du législatif et qui, dans la
constitution, délimite pour chaque matière le cadre plus ou moins étendu en lequel la loi doit s'appliquer. Le pouvoir constitutionnel a donc également le droit de faire insérer dans la constitution des dispositions immédiatement applicables et de renoncer, pour leur élaboration, au concours des autorités législatives, qui peuvent même être complètement tenues à l'écart. » (Traduction.)

109

Dans un avis du 26 septembre 1951, la division fédérale de la justice s'est prononcée de la manière que voici sur cette forme de législation : « La doctrine désigne ces arrêtés en marge de la constitution sous le nom de lois constitutionnelles formelles (Fleiner/Giacometti, Schweiz.

Sundesstaatarecht, page 703). Cette manière de compléter la constitution apparaît opportune pour des objets de nature transitoire. Selon nous, le fait que ces objets ne figurent pas dans la constitution en tant qu'articles numérotés réfute l'argument selon lequel leur nature passagère serait incompatible avec le caractère durable de la loi fondamentale. Nous rappelons en outre que la constitution elle-même prévoit des possibilités de revision; ses auteurs ont donc admis que des dispositions constitutionnelles, ou même le droit constitutionnel tout entier, pouvaient être d'une durée limitée. L'évolution récente du droit constitutionnel a encore développé eetto idée, réalisée par l'insertion de l'article 89 bis, 3e alinéa, puisque cette disposition permet expressément, dans les cas d'urgence, de créer par voie extraordinaire du droit constitutionnel de durée limitée. Or, nous ne voyons pas pourquoi du droit constitutionnel de durée limitée ne pourrait être créé que dans les cas où son entrée en vigueur ne souffre aucun retard. Les deux initiatives en faveur du retour à la démocratie directe ont précisément montré que le souverain entendait que, pour créer du droit constitutionnel ou legal, los organes do l'Etat appliquent autant qu.o possible la procédure législative ordinaire. » (Traduction.)

On a objecté aussi que la constitution, loi fondamentale de l'Etat, a un caractère permanent et qu'elle ne saurait dès lors être alourdie de dispositions de durée limitée telles que des articles additionnels comprenant une multitude de dispositions de détail.

Juridiquement, la légitimité de la procédure proposée ne peut être sérieusement révoquée en doute. La constitution elle-même prévoit la revision et ainsi la possibilité de dispositions complémentaires.

Nous nous référons à ses articles 118 et 121, 1er alinéa. Ses auteurs ont donc prévu que les conditions économiques et politiques en perpétuel devenir obligeraient tôt ou tard à modifier ou à compléter ses dispositions primitives.

Certes, nous convenons qu'à être trop souvent complétée par des articles additionnels détaillés, notre charte fondamentale perdrait en clarté. Mais cela n'est pas une raison de renoncer à des mesures indispensables pour sauvegarder la pais sociale et la capacité de concurrence de notre économie; l'objection n'est pas de nature non plus à justifier le choix de la procédure d'urgence au sens de l'article 89 bis, 3e alinéa, de la constitution, car cette procédure est juridiquement impraticable, les conditions pour l'appliquer n'étant pas réunies. A notre avis, créer artificiellement l'urgence serait bien moins démocratique que d'adopter une solution juridiquement irréprochable, quand bien même elle ne devrait pas devenir la règle.

Feuille fédérale. 104e année. Vol. II.

S

110

/. On a également prétendu que notre projet serait incompatible avec les termes de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 supprimant les pouvoirs extraordinaires du Conseil fédéral.

L'article 2, 1er alinéa, de cet arrêté est ainsi conçu: « Les arrêtés pris par lo Conseil fédéral en vertu des pouvoirs extraordinaires conférés par les arrêtés fédéraux des 30 août 1939 et 6 décembre 1945 cessent leurs effets à fin 1952 au plus ta.rd, à moins qu'ils n'aient été confirmés par des arrêtés fédéraux adoptés dans les formes prévues à l'article 88, 2e alinéa, ou à l'article 89 bis de la constitution. »

Certes, cette disposition ne prévoit pas expressément la possibilité de proroger le droit extraordinaire par la voie d'un complément à la constitution. D'aucuns en ont conclu que cette voie n'est pas praticable. Ils en déduisent que si l'on veut maintenir le contrôle des prix, il est nécessaire de recourir à un arrêté muni de la clause d'urgence, au sens de l'article 89 bis, 3e alinéa.

Peut-on sérieusement soutenir qu'en prenant son arrêté du 18 décembre 1950, l'Assemblée fédérale ait entendu exclure le recours à la procédure législative ordinaire, lorsqu'il s'agit de proroger des dispositions fondées sur les pouvoirs extraordinaires et qui n'ont pas de base constitutionnelle ? Pareille thèse serait en contradiction flagrante avec la volonté populaire telle qu'elle a trouvé son expression dans l'article 89 bis de la constitution. La genèse de cette disposition constitutionnelle, notamment notre rapport du 27 février 1948 et les délibérations parlementaires, prouve à l'évidence que les auteurs de l'initiative populaire du 23 juillet 1946 entendaient combattre l'abus du recours à la clause d'urgence. Comment l'Assemblée fédérale aurait-elle pu en arriver à exclure l'application de la procédure législative ordinaire dans les cas dont il s'agit, et cela sans motiver d'aucune manière cette thèse insoutenable ? Aurait-elle d'ailleurs été compétente pour le faire, alors que son arrêté n'était ni soumis au referendum, ni fondé sur un état de nécessité ? Nous le nions catégoriquement, tout en constatant qu'à notre avis l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 n'interdit aucunement de proroger des dispositions fondées sur les pouvoirs extraordinaires par la voie d'un complément à la constitution.

En vertu de l'article 121, 1er alinéa, de la constitution, la révision constitutionnelle -- qui comprend également l'adjonction de dispositions complémentaires -- doit avoir lieu (abstraction faite du cas de l'initiative populaire) dans les formes statuées pour la législation fédérale. Cette procédure est précisée aux articles 89 et 89 bis. Or, l'article 2, 1er alinéa, de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 ne mentionne pas seulement l'article 89 bis de la constitution, mais aussi son article 89, 2e alinéa. Certes, il rie déclare pas expressément qu'au cas

Ili où il s'agit de confirmer un arrêté fondé sur les pouvoirs extraordinaires et dépourvu de base constitutionnelle, il est nécessaire que cette base soit tout d'abord créée ou que, conformément à l'article 89. 2e alinéa, de la constitution, l'arrêté fédéral revête la forme d'un complément à la constitution. Mais cela ne signifie pas que la prorogation d'arrêtés fondés sur les pouvoirs extraordinaires et dépourvus de base constitutionnelle soit impossible par la voie de la procédure législative ordinaire. L'Assemblée fédérale n'avait pas de raison d'étudier et de préciser cette question dans son arrêté.

Au demeurant, il y a lieu de relever que l'article 2, 1er alinéa, de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 a trait uniquement à la confirmation des arrêtés fondés sur les pouvoirs extraordinaires et auxquels il est impossible de renoncer. Or, nous ne vous soumettons pas un projet d'arrêté confirmatif. Sans doute a-t-il pour objet le maintien temporaire du contrôle des prix; toutefois, il ne confirme pas, quant à la forme, l'arrêté du Conseil fédéral du 1er septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché. Même si l'on admettait la thèse selon laquelle un complément à la constitution ne serait pas admissible au cas particulier, on ne pourrait donc pas invoquer l'article 2. 1er alinéa, de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 pour combattre la procédure que nous proposons, sauf en ce qui concerne l'article 9 du projet, qui proroge le droit d'économie de guerre de six mois au maximum dans deux secteurs nettement délimités.

Nous tenons à souligner enfin que pour incorporer à la législation ordinaire une matière réglée jusqu'alors par le droit fondé sur les pouvoirs extraordinaires, il n'est nullement indispensable de suivre la procédure de confirmation au sens de l'article 2, 1er alinéa, de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950; il est loisible au contraire d'adopter toutes les autres formes que prévoit la constitution en matière de législation fédérale. Nous rappelons à ce propos que diverses dispositions fondées antérieurement sur les pouvoirs extraordinaires ont été transférées dans la loi sur l'agriculture, acceptée en votation populaire le 30 mars 1952, et sont ainsi entrées dans le droit ordinaire, sans pour autant qu'on ait eu recours à un arrêté confirmatif.
X. LE COMMENTAIRE DES DIVERSES DISPOSITIONS DU PROJET D'ARRÊTÉ Lorsque les gouvernements cantonaux et les grandes associations économiques eurent répondu à la circulaire du département de l'économie publique du 8 février 1952, la question du maintien temporaire du contrôle des prix fai eAciminée à nouveau. Nous constatâmes que les avis des gouvernements cantonaux et des associations ne contenaient rien qui pût nous inciter à juger la situation économique d'une façon sensiblement

112

différente de celle qui est exposée dans les chapitres VI et VII. Nous continuons à penser que la Confédération doit conserver, après 1952, certaines attributions en matière de contrôle des prix. Nous avons tenu toutefois à alléger le plus possible notre projet; à cet effet, nous avons préparé un nouvel arrêté constitutionnel dont le texte est joint au présent message.

Ses dispositions appellent les remarques suivantes: 1. Titre

Le projet du 6 février 1952 était intitulé « arrêté fédéral sur le contrôle des prix ». Le nouveau projet s'appelle « arrêté fédéral sur le maintien temporaire du contrôle des pris ». Ce changement doit dissiper les malentendus que le projet du 6 février 1952 a, semble-t-il, suscités. Il s'agit premièrement de faire ressortir --· déjà dans le titre -- que le Conseil fédéral n'entend pas modifier les grandes lignes de sa politique économique et que l'arrêté a uniquement pour but de maintenir, dans la mesure où les circonstances l'exigent, certaines attributions permettant a l'Etat d'intervenir le jour où il y aurait lieu de craindre des hausses de prix injustifiées.

Il s'agit, secondement, de montrer que le maintien du contrôle des prix sera limité dans le temps, autrement dit qu'on n'a nullement l'intention d'inscrire à titre durable dans la constitution le droit pour la Confédération d'édicter des prescriptions sur le contrôle des prix.

2. Préambule

Comme notre projet tend à compléter la constitution par un texte annexe, le préambule doit se référer à l'article 118 de la constitution, qui permet de reviser celle-ci en tout temps. Il y a lieu de citer également les articles 121, 1er alinéa, et 85, chiffre 14, de la constitution, qui concernent la procédure et la compétence en matière de revision constitutionnelle.

Nous avons estimé utile de dire brièvement pourquoi cette adjonction à la constitution se justifie. Une telle indication figure dans des arrêtés antérieurs, par exemple dans l'arrêté fédéral sur le régime financier de 1951 à 1954. Etant donné que le message ne sera pas remis à chaque citoyen, une brève mention du but de l'arrêté dans le préambule paraît judicieuse.

3. Article premier 1er alinéa

a. Cette disposition énumère les domaines dans lesquels la Confédération peut édicter des prescriptions concernant le contrôle des prix: aa. Ce sont d'abord les prix des marchandises. Le terme « marchandises » s'entend ici dans une acception large. Il comprend donc le gaz et l'électricité. Notre projet contient une restriction en ce

113 sens que la compétence d'édicter les prescriptions est limitée aux marchandises destinées au marché intérieur. Les prix des marchandises destinées à l'exportation ne sont ainsi pas soumis au contrôle.

Nous nous sommes demandé si la définition des marchandises visées par l'arrêté ne pourrait pas être un peu plus restrictive.

Il existe en effet une série de marchandises pour lesquelles des prescriptions sur les prix maximums ne seront vraisemblablement jamais nécessaires. Nous pensons notamment aux articles de luxe. Pourrait-on ne parler que des marchandises indispensables ?

Si nous avons adopté la formule «prix des marchandises destinées au marché intérieur », nous ne l'avons pas fait dans l'intention d'étendre le contrôle des prix à tout ce qui rentre dans la notion de « marchandise ». En renonçant à l'insertion du mot « indispensable » ou d'un terme analogue, qui peut être compris d'une manière toute différente suivant le point de vue d'où l'on considère les choses et suivant les circonstances du moment, nous avons voulu éviter de créer une source d'insécurité dans notre texte. H va sans dire que nous entendons, le cas échéant, proposer de limiter les dispositions sur les prix maximums aux seules marchandises ayant une réelle importance pour notre économie nationale.

bb. L'article 1er, 1er alinéa, indique un deuxième domaine dans lequel les prescriptions sur les prix peuvent être édictées. Il s'agit des « prestations artisanales et industrielles ». Comme pour les marchandises, le contrôle des prix ne doit s'étendre qu'aux prestations destinées au marché intérieur et ayant une réelle importance économique.

Il convient de distinguer deux catégories de prix pour les prestations artisanales et industrielles. La première comprend celles qui sont fournies directement au consommateur, par exemple celles du cordonnier, du coiffem, du tailleur, du blanchisseur et de l'aubergiste. Si certaines prestations ne sont pas fournies directement au consommateur, mais par l'intermédiaire d'une entreprise, leur rétribution joue pour le coût de la vie un rôle moins visible, mais qui peut être tout aussi important. Cette seconde catégorie comprend surtout les multiples prestations de l'industrie du bâtiment. Chacun sait que les prix de la construction, doublés depuis l'avant-guerre, sont la cause des loyers
extraor dinairement élevés des nouveaux logements. Rentrent aussi dans cette catégorie les prestations des entrepôts et les opérations de perfectionnement dans l'industrie du textile (apprêtage). Les prix de l9apprêtage exercent une forte influence sur les prix des produits finis.

114:

ce. Comme troisième domaine .pouvant être l'objet de prescriptions sur les prix, l'article 1er, 1er alinéa, mentionne les loyers et les fermages. Point n'est besoin d'insister ici sur la nécessité d'étendre l'application de l'arrêté fédéral aux loyers et fermages. Nous nous bornons à renvoyer aux considérations exposées dans le chapitre VI, chiffres 1 et 2.

dd. Les expériences faites pendant la guerre et l'après-guerre montrent que la possibilité d'édicter des prescriptions tendant à équilibrer les prix contribue largement à freiner le renchérissement de la vie. Il s'agit d'un instrument que nous voudrions pouvoir conserver sous l'empire du nouvel arrêté. Les résultats obtenus par la caisse de compensation des prix des peaux, cuirs et chaussures sont un exemple de l'importance que revêt la compensation des prix. Cette caisse a permis, de 1940 à 1951, d'approvisionner l'industrie du cuir -- surtout l'industrie de la chaussure -- en matières premières à des prix sensiblement inférieurs à ceux du marché international. Sans elle, les entreprises travaillant le cuir auraient dû s'accommoder, pour les peaux indigènes brutes, payées normalement de 1 fr. 35 à 2 fr. 15 le kilo, des prix de la marchandise étrangère qui s'élevaient jusqu'à 5 fr. 50 ou plus.

L'abaissement du prix de la matière première a fait bénéficier l'acheteur du produit fini (la paire de chaussirres) d'une réduction de prix représentant à peu près le quadruple de sa contribution à la caisse de compensation.

La caisse de compensation des prix des oeufs est un autre exemple de l'utilité de telles institutions. A l'effet d'assurer le placement des oeufs du pays à des prix équitables pour le producteur, l'importateur est obligé d'en prendre en charge une certaine quantité. Le service du contrôle des prix fixe les conditions de la prise en charge. En outre, la caisse de compensation assume les frais de ramassage, ce qui permet d'abaisser les prix de la marchandise prise en charge. Si la caisse de compensation venait à disparaître, ces prix monteraient et le placement des oeufs du pays serait entravé, à moins que la caisse ne soit remplacée par une institution du même genre.

jSTous mentionnerons enfin la caisse de compensation des prix du lait, laquelle fournit les ressources nécessaires pour couvrir les frais supplémentaires du ravitaillement
du pays en lait de consommation. Jusqu'en mai 1951, la caisse ne prenait à sa charge qu'une partie des augmentations du prix du lait de consommation. Depuis lors, elle assuma également le renchérissement des frais de ramassage, de traitement et de vente aii détail du

115 lait en versant des subsides aus laitiers et débits de lait. La caisse supporte en outre les frais supplémentaires causés par le ravitaillement des régions a production laitière insuffisante. Dans les régions nettement agricoles, il a toujours été possible de vendre le lait au prix normal sans qu'il en résulte de perte. Pour les grands centres de consommation, la caisse de compensation des pris doit verser en revanche, aujourd'hui encore, 3 ou 4 centimes par litre. La réduction de prix assurée par la caisse est presque de deux centimes en moyenne.

b. Pour l'adoption de dispositions sur le contrôle des prix dans les divers domaines passés sommairement en revue sous lettre a, nous prévoyons des conditions plus sévères que celles qui figurent dans le projet du 6 février 1952. Aux termes de l'article 1er, 1er alinéa, des prescriptions ne peuvent être édictées que si des hausses de prix injustifiées sont à craindre en raison de perturbations sérieuses du marché.

Le marché doit être considéré comme troublé lorsque, par suite du jeu de l'offre et de la demande, les milieux économiques peuvent hausser leurs prix ou accroître leurs marges de gain dans une mesure injustifiée. L'adoption de prescriptions doit cependant être limitée aux cas de perturbations sérieuses du marché. Des perturbations insignifiantes, telles qu'il s'en produit constamment en temps normal, ne doivent pas donner lieu à des mesures de contrôle des prix. Quand une perturbation pourra-t-elle être qualifiée de sérieuse \ C'est une question à laquelle il n'est pas possible de donner d'emblée une réponse valable une fois pour toutes. H incombera à l'Assemblée fédérale de statuer dans chaque cas particulier.

Il faut aussi, d'après notre texte, qu'une perturbation sérieuse du marché fasse redouter des hausses ïnjustifié&s. Il s'agit là aussi d'une notion qui ne saurait être déterminée d'avance d'une façon absolue et définitive. Dans les messages par lesquels nous proposerons, le cas échéant, à l'Assemblée fédérale l'adoption de mesures prévues à l'article 1er, 1er alinéa, nous devrons prouver exactement que toutes ces conditions sont remplies.

c. Notre projet d'arrêté ne mentionne pas seulement les hausses, mais aussi les marges injustifiées. En cas de baisse des prix de revient, les possibilités se multiplient pour le commerçant
d'accroître ses marges sans augmenter ses prix. L'intérêt économique général commande que l'on donne aux autorités, lorsque la concurrence ne joue pas, le pouvoir d'empêcher que les prix ne soient maintenus sans raison valable à un niveau trop élevé. Comme la marge ne rentre pas nécessairement dans la notion de prix, nous avons tenu pour judicieux de parler non seulement des prix, mais aussi des marges.

116

Les considérations qui précèdent valent tant pour le premier que pour le deuxième alinéa de l'article premier.

d. Le projet du 6 février prévoyait que le Conseil fédéral serait compétent pour édicter des prescriptions tant sur les pris: des marchandises que sur les loyers et les fermages. Pour tenir compte des craintes exprimées à l'égard d'un tel octroi de compétence au Conseil fédéral et pour laisser à l'Assemblée fédérale un pouvoir de décision plus étendu, nous avons jugé bon de proposer un texte qui subordonne l'adoption de prescriptions sur le contrôle des prix au sens de l'article 1er, 1er alinéa, à un mandat donné au Conseil fédéral par l'Assemblée fédérale.

Nous nous sommes demandé si la compétence d'édicter les dispotions dont il s'agit ne pourrait pas être attribuée à l'Assemblée fédérale elle-même. Il faut cependant considérer que l'adoption des prescriptions sur les prix maximums est chose fort compliquée. Ainsi, lorsqu'il a fallu, en janvier dernier, rétablir des prix maximums pour les bois d'épicéa et de sapin, le service du contrôle des prix dut édicter plusieurs ordonnances, qui furent assez vastes à cause des usages de la branche et des nombreux détails techniques à régler. On eût certainement été trop loin en obligeant l'Assemblée fédérale à édicter toutes ces dispositions. Ici encore, il convient de chercher une solution pratique, et l'on aurait tort de choisir un système hors d'état de fonctionner. Si l'on tient pour indispensable de maintenir la possibilité de contrôler les prix, il faut être prêt à régler la, compétence de telle façon que, pour être efficaces, les prescriptions sur les prix maximums puissent, le cas échéant, être édictées dans les délais les plus brefs.

Ajoutons que les circonstances se modifiant constamment, il faut être en mesure de s'y adapter rapidement. Cela serait impossible si la fixation de tous les prix maximums était de la compétence de l'Assemblée fédérale.

Nous considérons toutefois qu'il ne convient pas d'adopter un texte impliquant une délégation pure et simple de pouvoirs. A notre avis, l'Assemblée fédérale devrait édicter elle-même certaines dispositions fondamentales et en laisser l'exécution au Conseil fédéral. Nous traiterons ce point plus à fond dans nos remarques concernant le troisième alinéa.

2e alinéa

II s'agit ici d'une disposition qui figurait déjà dans l'arrêté fédéral du 20 juin 1936 concernant la surveillance des prix des marchandises. Nous pensons qu'il est juste de prévoir la possibilité d'édicter des dispositions sur les prix pour tous les cas où la Confédération prend des mesures de protection ou d'aide ayant pour conséquence de restreindre la libre formation des prix. Bien entendu, il s'agira toujours, comme à l'article 1er,

117

1er alinéa, de prescriptions sur les prix maximums, et non pas sur les prix minimums. Le but de toute la réglementation prévue est en effet d'empêcher des hausses injustifiées.

Nous pensons en premier lieu à des prescriptions sur les prix des marchandises soumises à des restrictions d'importation. Mais on peut concevoir encore d'autres mesures de protection ou d'aide justifiant l'adoption de prescriptions aur les prix. Des conventions sur la répartition du marché intérieur sont parfois conclues, qui peuvent conduire, aussi bien que des restrictions d'importation, à des hausses injustifiées.

L'arrêté de l'Assemblée fédérale du 26 avril 1951 concernant de nouvelles mesures propres à assurer, en période troublée, l'approvisionnement du pays en marchandises indispensables donne au Conseil fédéral un pouvoir d'édicter toute une série de dispositions restreignant la production, le mouvement et l'utilisation de marchandises. Si le Conseil fédéral devait un jour faire un large usage de ces pouvoirs, il ne serait pas impossible que l'adoption des prescriptions sur les prix dans les secteurs en question se révélât absolument nécessaire.

Pour prévenir tout malentendu, nous précisons que l'adoption de prescriptions au sens du 2e alinéa n'est pas liée aux conditions énoncées au 1er alinéa. Dans le cas du 2e alinéa, la condition d'une perturbation sérieuse du marché faisant redouter des augmentations excessives des prix ou des marges n'est donc pas prévue.

La compétence d'édicter des dispositions doit être réglée au 2e alinéa de la même manière qu'au 1er alinéa. Nous nous référons aux explications concernant cette dernière disposition et à celles qui se rapportent au 3e alinéa.

3e alinéa

Le mandat donné par l'Assemblée fédérale au Conseil fédéral d'agir conformément aux 1er et 2e alinéas doit indiquer exactement les domaines -- catégories de marchandises ou prestations -- pour lesquels le Conseil fédéral doit édicter des prescriptions. Il ne peut donc s'agir d'une autorisation générale.

La teneur que nous proposons d'adopter pour le 3e alinéa n'empêchera nullement l'Assemblée fédérale de donner encore d'autres instructions au Conseil fédéral. On peut concevoir, par exemple, qu'elle limite le mandat dans le temps, qu'elle prescrive au Conseil fédéral de prendre une certaine date en considération pour le calcul des prix, qu'elle établisse des règles sur l'admissibilité des hausses, etc. En matière de baux à loyer ou à ferme, l'Assemblée fédérale pourrait, par exemple, prescrire que les dispositions sur les loyers ne peuvent être maintenues que pour les anciens logements, que des mesures appropriées doivent, autant que possible, supprimer graduellement l'écart entre les loyers des anciens logements et ceux des nouveaux, enfin, que les fermages doivent être calculés en fonction d'une

118

valeur de rendement bien déterminée. Nous tenons à signaler ces points pour montrer que les arrêtés que prendrait l'Assemblée fédérale en vertu de l'article premier, 1er ou 2e alinéas, ne se borneraient pas à l'octroi de pouvoirs comme celui du 30 août 1939 concernant les pouvoirs extraordinaires. Pour le reste, il appartiendra au Conseil fédéral d'édicter, dans les limites du mandat reçu de l'Assemblée fédérale, les dispositions d'exécution propres à assurer l'efficacité des mesures de contrôle des prix.

4e alinéa

Les expériences faites pendant la guerre et l'après-guerre dans le domaine du contrôle des loyers ont montré que, faute de dispositions protégeant les locataires contre les congés, il est malaisé d'assurer l'efficacité des prescriptions sur le contrôle des loyers. Dès qu'un propriétaire d'immeuble, surtout dans les localités souffrant encore d'une certaine pénurie de logements, peut faire librement usage de son droit de résiliation, il a la faculté d'exercer plus aisément une pression sur le locataire pour l'amener à convenir d'un loyer supérieur au maximum légal et il est plus fortement tenté d'user de cette possibilité. A elle seule, l'interdiction d'augmenter les loyers saus autorisation ne prolège pas suffisamment le locataire. Celui-ci ne pourra résister à la pression du bailleur que s'il est certain de ne pas recevoir de congé au cas où il ne consentirait pas à une augmentation injustifiée du loyer. C'est pourquoi le gouvernement du canton de Zurich constate dans sa réponse que le contrôle des loyers n'atteindrait pas pleinement son but s'il n'existait la possibilité de restreindre le droit de résiliation. D'autres gouvernements cantonaux se sont exprimés dans le même sens.

Notre texte parle expressément de mesures contre les congés injustifiés.

Il entend dire clairement que la résiliation de baux à loyers ne pourra pas être empêchée d'une façon générale et que le seul but de la disposition est de garantir l'efficacité des prescriptions sur le contrôle des loyers en faisant échec aux congés injustifiés.

Il appartiendra à l'Assemblée fédérale de décider l'adoption de telles mesures, d'en déterminer la teneur et de voir aussi s'il ne conviendrait pas d'accorder aux cantons le droit de dire leur mot, comme le prévoient les dispositions extraordinaires protégeant les locataires contre les congés.

4. Article 2 Nous l'avons -dit, le Conseil fédéral n'aura pas la possibilité, vu l'article premier, d'édicter lui-même des prescriptions sur le contrôle des prix.

Il pourrait arriver cependant que, pour prévenir des dommages économiques irréparables et des tensions sociales, une intervention rapide soit nécessaire.

Les prescriptions sur le contrôle des prix risquent de manquer complètement leur but si elles ne sont pas édictées au bon moment ou si l'on apprend prématurément que les autorités ont l'intention de prescrire des limites

119

de prix. Des perturbations sérieuses du marché, faisant redouter des hausses de prix injustifiées, peuvent alors se produire brusquement. En pareille occurrence, il faut que des mesures puissent être prises immédiatement.

Bien qu'il soit théoriquement possible de convoquer l'Assemblée fédérale à bref délai en session extraordinaire, une décision de la compétence de cette assemblée, nécessairement précédée de l'examen de la question par les commissions, demande un certain temps, un temps qui serait trop long.

C'est pourquoi nous tenons pour indispensable que le Conseil fédéral soit déclaré compétent dans le cas spécial prévu à l'article 2.

Les mesures prises par le Conseil fédéral doivent être soumises à l'approbation des conseils législatifs au plus tard dans la prochaine session. L'Assemblée fédérale décidera si les dispositions édictées par le Conseil fédéral doivent rester en vigueur, être complétées ou modifiées. Nous pensons qu'une disposition dans ce sens réserve judicieusement et suffisamment les attributions des deux chambres.

5. Article 3 Le projet du 6 février 1952 prévoyait que cette consultation des milieux économiques n'aurait lieu qu'en règle générale. D'après le texte nouveau, elle doit toujours intervenir dans les cas prévus à l'article premier. C'est à dessein que l'article 2 n'a pas été cité à ce propos, car il peut arriver que le Conseil fédéral soit obligé d'agir immédiatement, sans consulter la commission prévue à l'article 3. Nous vous donnons néanmoins l'assurance que même dans les cas d'application de l'article 2, nous consulterons cette commission chaque fois qu'il sera possible de le faire.

La nomination de la commission serait l'affaire du Conseil fédéral.

Celui-ci veillera à ce que les consommateurs soient convenablement représentés. Suivant la rédaction donnée à l'article 3, il serait aussi possible de consulter une commission existant déjà, par exemple la commission fédérale de contrôle des prix, dans laquelle, 011 le sait, sont représentés tous les milieux économiques, ainsi que les consommateurs. Il faudrait cependant que les membres de la commission de contrôle des prix voient leurs fonctions confirmées par le Conseil fédéral, leur nomination ayant été jusqu'à présent du ressort du département de l'économie publique.

G. Article 4 Les dispositions sur le
contrôle des prix qui seront, le cas échéant, édictées en vertu de l'arrêté constitutionnel auront le caractère de mesures de nécessité, commandées par certains faits ou conditions économiques extraordinaires. Aussi faudra-t-il les abroger dès qu'elles ne seront plus indispensables. Pour que les prescriptions édictées ne demeurent pas en vigueur plus longtemps qu'iî n'est nécessaire, l'article 4 oblige le Conseil

120 fédéral à présenter chaque année à l'Assemblée fédérale un rapport sur les dispositions adoptées conformément aux articles 1er et 2. Ce rapport devra justifier la nécessité des mesures qu'il faudrait maintenir en vigueur.

Il donnera à l'Assemblée fédérale l'occasion de vérifier les raisons invoquées pour ce maintien et de décider, le cas échéant, que les mesures seront abolies, complétées ou modifiées.

7. Article 5 7er alinéa Comme nous l'avons exposé dans notre aperçu historique, nous faisons une distinction entre le contrôle et la surveillance des prix. La différence réside en ce que, dans le premier cas, des prescriptions fixent des prix maximums, tandis que dans le second, les autorités se bornent à suivre l'évolution des prix, à se renseigner sur leur formation (notamment sur les prix demandés et leurs bases de calcul) et à empêcher autant que possible les hausses injustifiées, par la voie de la libre entente. En d'autres termes, le contrôle implique une intervention directe de l'Etat dans la libre formation des prix et la fixation de ceux-ci par l'Etat lui-même, dans le domaine contrôlé. La surveillance ne connaît pas cette action directe de l'Etat.

La surveillance des prix a donné satisfaction précisément ces dernières années et eu parfois de bons résultats. Qu'il nous suffise de mentionner la libre entente intervenue dans le domaine du textile. Nous voudrions pouvoir conserver cet instrument. Il est d'ailleurs indispensable du fait que seule une surveillance plus ou moins suivie des prix permet aux autorités de ne pas se laisser surprendre par des événements dangereux pour notre économie et notre paix sociale et de ne pas prendre tardivement les dispositions prévues aux articles 1er et 2.

Nous ne désirons pas cependant que la surveillance des prix soit instituée à titre général dans tous les domaines énumérés à l'article premier.

Nous voudrions avoir simplement la possibilité d'exercer cette surveillance dans les seuJs cas où elle est indispensable. Si l'on veut que la surveillance soit instituée avant qu'il soit trop tard, .la décision doit être de la compétence du Conseil fédéral.

2e alinéa Aux termes de l'article 1er, 1er alinéa, de notre projet, des prescriptions ne doivent être édictées que si le marché souffre de perturbations sérieuses faisant redouter des augmentations
injustifiées des prix et des marges. Cependant la connaissance des prix -- des anciens et des nouveaux -- ne suffit généralement pas pour apprécier s'il y a ou non danger d'une hausse injustifiée.

Pour mieux faire comprendre le sens du 2e alinéa, nous rappelons que les prix (de vente) sont la résultante de divers facteurs (p. ex. prix

121 d'achat, frais d'acquisition, salaires directs, frais généraux, marge brute, y compris le bénéfice). Il faut calculer ces facteurs pour pouvoir juger si l'augmentation d'un prix ou d'une marge est ou non justifiée. La sra> veillance des prix ne saurait donc consister simplement à enregistrer les prix et leurs augmentations. Si elle doit permettre d'éclaircir la question des « hausses de prix et de marges injustifiées » et donner ainsi aux chambres -- en cas d'urgence au Conseil fédéral -- les indications nécessaires pour décider s'il y a heu ou non de fixer des prix, il faut que les organes commis à la surveillance s'occupent de la constitution des prix, c'est-à-dire de leur mode de calcul.

Nous l'avons dit dans le dernier alinéa de nos remarques concernant l'article 5, 1er alinéa, l'ampleur de la surveillance des prix ne peut être déterminée d'avance de façon détaillée. Elle dépendra de la situation du moment, des conditions de fait dans les divers domaines, ainsi que du but à atteindre.

Pour prévenir des malentendus, nous avons ajouté à la disposition sur l'obligation de renseigner une phrase disant que les personnes auxquelles le droit pénal permet, dans certaines conditions, de refuser le témoignage en raison de leur profession ne peuvent être contraintes de donner des renseignements. Cette règle ne vise, naturellement, que des faits dont les personnes en question ont eu connaissance dans l'exercice de leur profession.

lel alinéa

8. Article 6

Le projet du 6 février 1952 donnait au juge la possibilité de prononcer des peines d'emprisonnement pour une année au plus. Le projet que nous vous soumettons ne prévoit plus que l'amende.

L'article 5, 2e alinéa, contient l'obligation de communiquer spontanément les renseignements, obligation dont l'inobservation est punissable.

C'est pourquoi il était indispensable de modifier l'article 6 de l'avant-projet.

Nous ne parlons plus de la possibilité de réprimer les infractions par des amendes mais disons : « Les infractions au présent arrêté seront punies de l'amende ».

Nous avons, enfin, mentionné expressément les dispositions transitoires (art. 9). Il est donc clair que les infractions aux dispositions encore en vigueur après le 31 décembre 1952 fondées sur les an-étés du Conseil fédéral mentionnés à l'article 9 du projet ne pourront plus être punies que de l'amende. Comme on le sait, le droit pénal de l'économie de guerre avait aussi institué des peines d'emprisonnement (voir nos remarques ad art. 6, 3e al.).

122 2e alinéa Comme le code pénal suisse ne permet, sa.uf disposition contraire, que la répression des infractions intentionnelles, ce 2e alinéa est indispensable. Si l'auteur d'une infraction par négligence demeurait impuni, l'efficacité des prescriptions sur le contrôle des prix serait sérieusement compromise.

3e alinéa Contrairement à ce que prévoit le droit pénal en matière d'économie de guerre (également applicable aux infractions en matière de contrôle des prix), la poursuite et le jugement des infractions doivent incomber désormais aux cantons. Cela vaut aussi pour les infractions aux prescriptions fondées sur les pouvoirs extraordinaires et qui seront prorogées pour six mois au plus en vertu de l'article 9. Dès le 1er janvier 1953, ces prescriptions n'auront plus le caractère de dispositions fondées sur les pouvoirs extraordinaires, étant donné qu'elles auront pour base la nouvelle disposition constitutionnelle et non plus l'arrêté fédéral accordant des pouvoirs extraordinaires.

Dans son mémoire concernant l'avant-projet du 6 février 1952, le Conseil d'Etat du canton de Genève a posé la question de savoir si, vu les expériences faites, il ne conviendrait pas d'envisager le maintien de l'appareil de répression pénal créé en matière d'économie de guerre. Nous devons reconnaître que des raisons sérieuses militent pour ce maintien.

Les dispositions en vigueur prévoient que l'instruction et le renvoi sont l'affaire d'autorités fédérales (office d'instruction pénale, secrétariat général du département de l'économie publique), tandis que le jugement des infractions en matière d'économie de guerre -- y compris les infractions aux prescriptions sur le contrôle des prix -- appartient aux dix cours pénales et à la cour suprême de l'économie de guerre. Les membres de ces dix cours de première instance et de la cour suprême sont nommés par le Conseil fédéral ( l ) . Les présidents ne peuvent être que des juges de carrière ou des personnes ayant exercé la profession de juge. Les autres membres sont tous des juristes expérimentés ou des spécialistes des questions économiques. Pour la composition des cours, on a largement tenu compte des différentes langues, régions et tendances politiques. Six cours pénales de première instance fonctionnent pour la Suisse alémanique, trois pour la Suisse romande et
une pour la Suisse italienne. La cour pénale suprême, compétente pour la Suisse entière, est présidée par un juge fédéral. On a ( x ) Remarque: L'appareil judiciaire de l'économie de guerre compte 35 juges ordinaires et 48 suppléants. La désignation de cea juges et suppléants par l'Assemblée fédérale aurait pu, le cas échéant, donner lieu à des discussions indésirables. Notons que les membres des tribunaux militaires -- ce sont des tribunaux ordinaires -- sont a-ussi nommés par le Conseil fédéral.

123

cru pouvoir tirer du fait que les juges et les suppléants sont nommés par le Conseil fédéral la conclusion qu'ils n'étaient pas tout à fait indépendants de l'administration. L'expérience a cependant prouvé que ces cours savent rendre la justice en toute objectivité et indépendance. La preuve en est déjà largement fournie par le fait que, dans de nombreux cas, elles n'ont pas jugé conformément aux conclusions de l'autorité de renvoi et qu'elles ont, au contraire, prononcé des acquittements ou des peines plus légères ou plus sévères que celles qui étaient requises. C'est précisément dans les cas d'infractions en matière de contrôle des prix que les autorités d'instruction, de renvoi et de jugement se sont vues souvent placées devant des tâches délicates. Certes, dans la répression des infractions aux prescriptions d'économie de guerre comme dans d'autres domaines, tout n'était pas parfait. Après avoir relevé qu'il s'agissait pour une grande part de questions nouvelles, à propos desquelles bien des principes n'ont pu être dégagés qu'au cours des années, nous croyons pouvoir affirmer -- sans jeter la pierre à personne -- que la répression pénale ordinaire souffre aussi de certains défauts, comme toutes les institutions humaines.

I>e sérieux motifs militent en faveur du maintien do la justice penalo de l'économie de guerre; si nous vous proposons néanmoins de confier aux cantons la poursuite et la répression des infractions, c'est que nous voudrions voir ériger le contrôle des prix en institution constitutionnelle temporaire et, par conséquent, éviter de déroger sans impérieuse nécessité au principe de l'article G4bis, 2e alinéa, de la constitution.

9. Article 7 La dévolution des gains illicites ou des avantages pécuniaires injustifiés a été prévue pour la première fois par l'arrêté du Conseil fédéral du 17 octobre 1944 concernant le droit pénal et la procédure pénale en matière d'économie de guerre.

L'article 10, 1er alinéa, de cet arrêté est rédigé en ces termes : « Si l'inculpé, le tiers dans l'exploitation commerciale duquel l'infraction a été commise ou leurs ayants cause ont acquis un avantage pécuniaire illicite, le juge peut les condamner à payer à l'Etat une somme correspondant à cet avantage, alors même qu'aucune personne déterminée n'est punissable. »

Nous nous sommes demandé si cette dévolution de gains illicites devait subsister dans l'arrêté qui vous est soumis. Les expériences faites au cours des cinq premières années de guerre, pendant lesquelles l'autorité ne pouvait ordonner la dévolution des gains illicites, justifient le maintien de cette institution.

Il arrive assez souvent, précisément en matière de prix, qu'une infraction ait été commise uniquement par négligence. Les juges hésitent alors ---

124

et cela est bien compréhensible -- à prononcer des amendes comprenant l'ensemble des avantages pécuniaires illicites obtenus par l'accusé, avantages s'élevant souvent à des dizaines de milliers de francs. Mais si, dans des cas de ce genre, seules des amendes minimes sont prononcées et si le condamné conserve une part importante du gain illicite, la répression manque d'emblée son but. Même si l'infraction a été commise intentionnellement, il arrive qu'une amende englobant la totalité de l'avantage illicite soit choquante. Des difficultés peuvent surtout se produire si ces amendes doivent être converties en arrêts, parce qu'elles n'ont pas été payées. Faut-il convertir l'amende entière ou l'amende diminuée de la somme représentant l'avantage pécuniaire illicite ? L'expérience montre que le droit pénal ne peut être appliqué de façon satisfaisante dans les affaires de contrôle des prix que s'il est possible d'ordonner la dévolution de l'avantage pécuniaire illicite sans égard à la peine qui doit être prononcée.

Précisons que nous entendons par « dévolution » l'attribution à l'Etat d'une somme correspondant à l'avantage pécuniaire illicite réalisé.

Il incombera à l'Assemblée fédérale, le cas échéant, de régler les détails. Elle devra notamment décider si le montant de la dévolution doit être versé à la caisse fédérale ou par exemple au canton chargé de la répression ou encore au canton de domicile du débiteur. Elle devra aussi décider s'il y a heu de prévoir la possibilité d'attribuer au lésé tout ou partie du montant en question.

10. Article 8 Toutes les fois qu'une loi ou un arrêté fédéral prévoient que l'Assemblée fédérale est compétente pour arrêter certaines dispositions -- comme c'est le cas par exemple de l'article premier, 3e alinéa, de la loi du 1er avril 1938 sur l'approvisionnement du pays en marchandises indispensables --, les arrêtés que cette autorité édicté en se fondant sur ces dispositions sont soustraits au referendum. A notre connaissance, aucun doute ne subsiste à ce sujet tant dans la doctrine que dans la pratique. Nous estimons que ce qui précède vaut aussi lorsqu'un complément apporté à la constitution -- acte qui tient à la fois de la constitution et de la loi et qui, pour cette raison, a déjà été qualifié de loi constitutionnelle -- réserve une telle compétence à l'Assemblée
fédérale.

Certains compléments apportés à la constitution ont attribué expressément à l'Assemblée fédérale le pouvoir de prendre des décisions définitives.

Mentionnons l'arrêté fédéral du 6 avril 1939 complétant la constitution fédérale en vue de l'octroi et de la couverture partielle de crédits destinés au renforcement de la défense nationale et à la lutte contre le chômage (art. 3, 6e al.). Pour ces motifs et afin de prévenir tout malentendu, nous avons pensé qu'il était judicieux d'insérer dans le projet la disposition de l'article 8.

125

11. Article 9 Comme nous l'avons exposé, le projet d'arrêté doit tout d'abord permettre de maintenir certaines dispositions relatives au contrôle des prix.

Ce n'est qu'en second lieu, et pour le cas où la situation l'exigerait impérieusement, qu'il donne la possibilité d'édicter de nouvelles prescriptions sur les prix maximums.

Dans les domaines où certaines prescriptions sur les prix doivent être maintenues, vu les circonstances, après le 31 décembre 1952, il est nécessaire d'éviter toute interruption de la réglementation. Il sera cependant impossible, avant le 31 décembre 1952, d'adapter toutes les dispositions en vigueur à la nouvelle base juridique en. suivant la procédure prévue dans le projet d'arrêté. C'est pourquoi nous vous proposons d'adopter la disposition transitoire de l'article 9. A notre avis, un délai de six mois est un minimum.

12. Chiffre II D'aucuns estiment que la validité de l'arrêté constitutionnel devrait être inférieure à cinq ans. Si noue vous proposons néanmoins ce délai de cinq ans, c'est que les circonstances actuelles ne donnent pas le sentiment que la situation économique et politique redeviendra normale à brève échéance, autrement dit qu'elle retrouvera bientôt une stabilité nous permettant de renoncer à la possibilité d'édicter des prescriptions sur le contrôle des prix.

Contrairement au projet du 6 février 1952, le nouveau projet donne le pouvoir de décision définitif à l'Assemblée fédérale, sous réserve du cas visé par l'article 2, et que cette même assemblée reçoit un droit de contrôle très étendu (art. 4). C'est pourquoi les critiques exprimées dans les avis relatifs à l'avant-projet, quant à la durée de sa validité, perdent une grande partie de leur poids, surtout si l'on considère aussi que l'article premier subordonne les possibilités d'intervention de l'Etat à des conditions beaucoup plus sévères que celles que prévoyait l'avant-projet.

XI. CONCLUSION La période d'instabilité et d'insécurité que nous vivons justifie le projet d'arrêté constitutionnel temporaire, soumis à votre approbation. Ce projet a une base foncièrement démocratique, son entrée en vigueur étant subordonnée à l'approbation 'préalable du souverain, c'est-à-dire du peuple et des cantons. Il ne rétablit nullement un contrôle général des prix, mais il donno à l'Assembleo foderalo et, lo cas échéant, au Conseil fédéral, la possibilité d'édicter des prescriptions applicables à tel ou tel secteur de l'économie où le régime de la liberté absolue causerait de sérieuses perturFeuille fédérale. 104e année. Vol. IL

9

126

bâtions, génératrices d'abus économiquement et socialement nocifs. Quand les prix montent à un rythme désordonné, c'est le franc qui baisée.

Presque toutes les marchandises sont aujourd'hui libérées du contrôle des prix. Son rétablissement pour l'une ou l'autre d'entre elles n'interviendrait qu'à la dernière extrémité Nous désirons ne pas devoir nous servir d'un instrument dont l'existence, à elle seule, aura -- nous l'espérons --- un effet préventif et incitera à la modération. Aucune des mesures que nous serions obligés d'édicter ne serait appliquée au delà du temps absolument nécessaire.

Les loyers et les fermages ne sauraient être rendus à la liberté du jour au lendemain. Il en résulterait très probablement une augmentation sensible du coût de la vie, qui entraînerait inévitablement des revendications de salaires.

Exiger du Conseil fédéral de saisir l'Assemblée fédérale d'un projet d'arrêté d'urgence, chaque fois que l'entrée en vigueur des prescriptions indispensables ne souffrirait aucun retard, serait compromettre l'efficacité de mesures qui doivent être prises rapidement, mais en vertu de dispositions constitutionnelles temporaires.

Notre projet d'arrêté sauvegarde les attributions et le contrôle de l'Assemblée fédérale.

Contrairement à des affirmations erronées, le projet sur lequel vous êtes appelés à vous prononcer ne détruit ni n'ébranle les fondements de l'ordre économique établi par les articles constitutionnels adoptés, en votation populaire, le 6 juillet 1947. Il s'agit uniquement d'adjoindre à notre charte fondamentale des dispositions dont la durée d'application serait limitée. Le procédé n'est pas nouveau. En tout état de cause, ces dispositions, justifiées par les circonstances actuelles, ne pourraient être renouvelées que si la majorité des citoyens votants et des cantons en décidait ainsi.

Au demeurant, la constitution fédérale n'est pas immuable; elle peut être revisée en tout temps, partiellement ou totalement, que le projet de revision émane du Conseil fédéral ou de l'Assemblée fédérale, ou de l'initiative populaire. En définitive, c'est au souverain qu'il appartient de rendre son verdict.

Les Etats étrangers ont maintenu un contrôle des prix. Toute une série d'entre eux ont introduit ou réintroduit, dans ce domaine, un régime généralisé en face duquel la solution
constitutionnelle temporaire que nous proposons apparaît modérée.

Guidés par le seul souci de pouvoir parer à temps à des situations imprévisibles, de maintenir la stabilité de notre franc, de lutter contre l'inflation et de sauvegarder la paix sociale, le Conseil fédéral unanime recommande l'adoption du projet d'arrêté ci-annexé. Cet -arrêté n'aura

127 force de loi que s'il obtient préalablement l'approbation du peuple et des cantons. La solution est loyale et démocratique.

Le Conseil fédéral a pris ses responsabilités; c'est à l'Assemblée fédé raie qu'il appartient d'assumer les siennes.

Nous vous recommandons d'approuver le projet d'arrêté constitutionnel ci-annexé.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre considération distinguée.

Berne, le 2 mai 1952.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, KOBELT 9274

Le chancelier de la Confédération, Ch. OSER

128 (Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL sur

le maintien temporaire du contrôle des prix

L'Assemblée, fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 85, chiffres 14, 118 et 121, 1er alinéa, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 2 mai 1952 ; considérant que l'arrêté fédéral du 18 décembre 1950 supprimant les pouvoirs extraordinaires du Conseil fédéral abroge, dès le 31 décembre 1952, l'arrêté du Conseil fédéral du 1er septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché; pour éviter que cette abrogation n'influe sur le coût de la vie et n'entraîne de fâcheuses répercussions d'ordre économique ou social, arrête :

La constitution fédérale du 29 mai 1874 est complétée par les dispositions suivantes: Article premier 1

Si de sérieuses perturbations sur les marchés font redouter des augmentations injustifiées de prix ou de marges, l'Assemblée fédérale peut charger le Conseil fédéral d'édicter des prescriptions -- sur les prix de marchandises et de prestations artisanales et industrielles, dans la mesure où elles sont destinées au marché intérieur; -- sur les loyers et les fermages, et -- en matière de compensation des prix.

2 L'Assemblée fédérale peut charger le Conseil fédéral d'édicter des prescriptions sur les prix maximums de marchandises lorsque la libre formation des prix de ces marchandises est limitée par des mesures de protection et de soutien arrêtées par la Confédération.

129 3

En donnant au Conseil fédéral le mandat prévu aux alinéas 1er ou 2, l'Assemblée fédérale spécifiera clairement les secteurs ou les catégories de marchandises ou les genres de prestations auxquels doivent s'appliquer les prescriptions.

4 Si des prescriptions sont édictées sur les loyers en vertu de l'alinéa 1er, l'Assemblée fédérale peut aussi prendre des mesures visant à protéger les locataires contre des congés injustifiés.

Art. 2 Si l'adoption des prescriptions mentionnées à l'article 1er ne souffre aucun retard, le Conseil fédéral est autorisé à les édicter provisoirement de sa propre initiative ; dans ce cas, il est tenu de les soumettre à l'approbation de l'Assemblée fédérale au cours de la session suivante. L'Assemblée fédérale décide si les prescriptions édictées par le Conseil fédéral doivent être maintenues, complétées ou modifiées.

Art. 3 Avant d'édicter des dispositions en application de l'article 1er, le Conseil fédéral est tenu de consulter une commission instituée par lui et. composée de représentants des divers milieux économiques du pays.

Art. 4 Le Conseil fédéral présentera chaque année à l'Assemblée fédérale un rapport sur les prescriptions qu'il aura édictées en vertu des articles 1er et 2; il motivera simultanément la nécessité de maintenir les dispositions encore en vigueur.

Art. 5 Le Conseil fédéral peut ordonner la surveillance des prix dans les secteurs mentionnés à l'article 1er.

a Chacun est tenu de fournir aux organes de surveillance des prix, désignés par le Conseil fédéral, des renseignements sur les pris, loyers et fermages exigés, ainsi que sur les éléments servant à les déterminer. Le secret professionnel au sens de l'article 77 ( J ) de la loi fédérale du 15 juin 1934 sur la procédure pénale sera respecté.

1

t1) Art. 77 : Les ecclésiastiques, les avocats, les notaires, les médecins, les pharmaciens, les sages-femmes, ainsi que leurs auxiliaires, no peuvent être tenus de témoigner sur des secrets à eux confiés en raison de leur ministère ou de leur profession.

130

Art. 6 Les infractions au présent arrêté fédéral, de même qu'aux dispositions d'exécution et aux dispositions transitoires, seront punies de l'amende.

2 L'infraction commise par négligence est aussi punissable.

3 La poursuite et le jugement des infractions incombent aux cantons.

1

Art. 7 L'Assemblée fédérale peut arrêter des dispositions réglant la dévolution d'avantages pécuniaires acquis illicitement à la suite d'une violation des prescriptions édictées en vertu du présent arrêté.

Art. 8 Les arrêtés pris par l'Assemblée fédérale en vertu du présent arrêté ne sont pas soumis au referendum.

Art. 9 Demeurent en vigueur jusqu'au 30 juin 1953 au plus tard les prescriptions non abrogées au 31 décembre 1952 qui sont fondées sur l'arrêté du Conseil fédéral du 1er septembre 1939 concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché ou sur l'arrêté du Conseil fédéral du 15 octobre/8 février 1946 instituant des mesures contre la pénurie de logements.

II

Le présent arrêté est valable du 1er janvier 1953 au 31 décembre 1957.

Il sera soumis à la votation du peuple et des cantons.

Le Conseil fédéral est chargé de son exécution.

9274

131 Variation de l'indice des salaires et du coût de la vie de 1939 à 1951

Variation de l'indice des prix de gros et du coût de la vie de 1939 à 1951

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le maintien temporaire du contrôle des prix (Du 2 mai 1952)

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