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FEUILLE FÉDÉRALE 104e année

Berne, le 28 février 1952

Volume I

Paraît, en règle générale, chaque semaine. Prix: 80 francs par an; 16 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 50 centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des Hoirs C.-J. Wyss, société anonyme, à Berne

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi sur la navigation maritime sous pavillon suisse (Du 22 février 1952) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous remettre, avec le présent message, un projet de loi sur la navigation maritime sous pavillon suisse.

PREMIÈRE PARTIE

INTRODUCTION A. APERÇU RÉTROSPECTIF Bien que son droit d'utiliser les mers ne puisse être contesté, notre pays a tergiversé pendant plus de trois quarts de siècle devant le problème de la navigation maritime sous pavillon suisse. Ce problème a été souvent posé par des particuliers; puis, officiellement, pour la première fois, par un message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale du 25 novembre 1864, message qui, pratiquement, est resté sans suite; il s'est posé, à nouveau, avant 1940, sur le plan de l'intérêt général, en présence des difficultés de notre ravitaillement, lorsque les événements internationaux ne nous permirent plus d'obtenir le tonnage dont nous avions besoin et quand les navires étrangers au service de notre commerce extérieur se trouvèrent exposés aux interventions des belligérants.

Pendant les trois premières années de la première guerre mondiale, notre ravitaillement se fit sans trop de peine; mais, en 1917, la situation changea: le tonnage devint très rare et nous connûmes le rationnement.

L'Allemagne, qui avait d'abord refusé d'accorder des sauf-conduits aux navires américains dont nous pouvions encore disposer, consentit à leur Feuille fédérale. 104e aimée. Vol. I.

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assurer le libre passage sur certains itinéraires, à la condition qu'ils fissent apparaître des signes distinctifs.

En été 1918, les chocolatiers affrétèrent quelques navires, qui furent mis, partiellement, à la disposition de l'office central suisse des transports extérieurs. A la fin de cette même année, on vit se constituer l'union suisse des transports maritimes, au capital de soixante millions, dont la Confédération apporta la moitié; cette société se livra à l'exploitation de navires sous pavillons étrangers; les circonstances et notre inexpérience ne lui permirent pas de réaliser les espérances qu'on avait fondées sur elle.

L'armistice de 1918 ne devait pas mettre un terme à nos embarras.

Mais à la fin du mois de janvier 1919, les Etats-Unis et l'Angleterre promettaient à la Suisse de mettre à sa disposition, au moins soixante-dix mille tonnes par mois, étant entendu qu'il nous serait interdit, jusqu'en septembre de la même année, de chercher ailleurs des possibilités de transport.

Dès 1919, la situation s'améliora et notre pays bénéficia de nouveau de la concurrence entre les flottes marchandes; Marseille, Gênes, Trieste, Rotterdam, Hambourg se disputèrent à nouveau notre trafic; par ailleurs, les modalités des achats nous enlevèrent souvent la préoccupation du tonnage.

Bien que les obstacles d'ordre international eussent disparu, le Conseil fédéral refusa, en 1923, aux promoteurs d'une société de navigation maritime l'autorisation d'arborer notre pavillon sur ses navires et, à la veille de la seconde guerre mondiale, l'administration fédérale écartait le projet d'une entreprise connue qui proposait la création d'une flotte suisse. Ces décisions furent motivées, surtout, par des préoccupations d'ordre politique et par l'absence d'une législation appropriée.

Nous nous trouvions donc au seuil de la seconde guerre mondiale sans que le problème de la navigation maritime suisse eût marqué un progrès appréciable. Il faut dire qu'avant 1939, la Suisse avait obtenu des principales puissances pouvant participer à un nouveau conflit l'assurance que les navires affrétés par elle ne seraient pas réquisitionnés et que leur immunité serait reconnue s'ils étaient utilisés exclusivement au service de notre économie nationale; les Etats limitrophes paraissaient disposés à nous permettre le trafic avec
leurs ports; c'est pourquoi, lorsque l'office de guerre pour les transports eut affrété quinze navires grecs pour la durée de la guerre, on put croire que la solution choisie était la meilleure.

De fait, jusqu'au milieu de 1940, notre ravitaillement se fit dans des conditions assez satisfaisantes. Les pays de l'Est européen étaient devenus d'importants fournisseurs. Mais la situation changea brusquement lorsque la France eut été envahie et que le conflit s'étendit a.ny "Balkans et à la Russie. La Méditerranée se trouva fermée aux navires grecs, puis aux cargos yougoslaves que nous avions affrétés après l'entrée en guerre de la Grèce et dont les services nous furent, d'ailleurs, précieux.

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B. INSTITUTION DE LA NAVIGATION MARITIME SUISSE Le gouvernement fédéral, en présence de cette situation nouvelle, se rendit à l'évidence : la création d'une flotte, naviguant sous pavillon suisse, restait notre seule chance de salut.

Le droit maritime indispensable fut construit en grande hâte, en quelques semaines, sous l'experte direction de feu le professeur Haab, de Baie. Il tient dans les 76 articles de l'arrêté que prit le Conseil fédéral, le 9 avril 1941, en vertu de ses pouvoirs extraordinaires et qui fut complété par celui qui concerne le contrat d'engagement des marins, du 20 janvier 1942, et par diverses réglementations accessoires.

Sans attendre que ce droit embryonnaire eût été mis au point, la Confédération, d'une part, et certaines entreprises privées, de l'autre, acquirent quelques cargos qui furent dûment enregistrés, après le 9 avril, à Baie, au lieu qui constitua pour eux le port d'enregistrement. Tous ces navires, que l'on paya au prix fort et dont quelques-uns étaient vieux et fatigués, furent utilisés, tant que la crise dura, par la Confédération; ils nous ont rendu, tels qu'ils étaient, d'inappréciables services. A l'heure actuelle, la Confédération ne possède plus de navires. En revanche, une quinzaine d'entreprises exploitent la navigation sous pavillon suisse.

C. MAINTIEN DE LA NAVIGATION MARITIME SUISSE On pouvait se demander si la navigation maritime sous pavillon suisse, instituée sous l'empire des nécessités économiques au cours de la dernière guerre, devait subsister après le retour de conditions normales, ou ne devait subsister qu'en prévision du retour de nouvelles complications internationales. Or le département politique, le département de l'économie publique, la commission consultative des transports, l'union suisse du commerce et de l'industrie, l'association des armateurs suisses se sont prononcés pour le maintien du pavillon suisse sur mer. De son côté, la commission du Conseil national, chargée de faire rapport sur la question des arrêtés pris en vertu des pouvoirs extraordinaires, a conclu qu'il ne serait pas désirable de supprimer la navigation maritime suisse dont l'institution nous a préoccupés pendant près de trois quarts de siècle ; ce rapport a été approuvé sans discussion par le Conseil national, le 25 mars 1946. H est certain que cette navigation
offre des avantages permanents: notre dépendance économique et financière sera moins étroite qu'elle ne le fut jadis ; la concurrence de nos navires nous permettra de régulariser, au profit de notre économie, le fret des marchandises dont nous avons besoin; une partie des frais de transport resteront dans le pays; nous pourrons offrir une occupation stable à de nombreux concitoyens, car nos armateurs, nous y comptons, constitueront, peu à peu, nos équipages, notre corps de capitaines, d'ofliciers et de spécialistes; nos usines pourront obtenir les commandes des chantiers auxquels

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seraient confiées la construction et la réparation de nos unités; l'économie suisse tirera un profit direct d'un contact plus direct avec les pays d'outremer; la clientèle de nos exportateurs sera moins exposée que ce ne fut le cas précédemment aux entreprises des concurrents; prolongeant et complétant la navigation fluviale et l'aviation, la marine suisse sera un puissant facteur d'expansion, II suffit d'ailleurs de constater, pour maintenir l'institution que certains ont pu considérer comme un expédient éphémère, que nous devons avoir à notre disposition les navires qui nous permettraient d'assurer à nouveau en temps de crise, par nos propres moyens, les transports maritimes indispensables à notre existence.

Mais il est désirable que l'armement suisse reste ce qu'il est devenu progressivement après 1945: l'affaire de l'entreprise privée, D. LE DROIT MARITIME SUISSE Le droit maritime suisse -- l'arrêté du Conseil fédéral du 9 avril 1941 concernant la navigation maritime sous pavillon suisse (en abrégé: arrêté), et ses compléments -- fut une construction de fortune. On trouvera les détails sur les principes dont il s'est inspiré dans le IVe rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale du 21 mai 1941 sur les mesures prises par lui, en vertu de ses pouvoirs extraordinaires, sous II. A. Département politique.

Etant données les circonstances dans lesquelles elle fut édifiée et le peu de temps dont nous disposions, l'entreprise fut une gageure. Mais cette ceuvre a été d'une valeur incontestable pour le ravitaillement du pays aux heures les plus difficiles de la guerre ; elle nous a rendu les services que nous en attendions.

L'arrêté assemble des règles de droit international, de droit public et administratif, de droit privé, de droit pénal et de procédure: tout ce qui était immédiatement nécessaire pour préciser, dans les circonstances où nous nous trouvions, les conditions auxquelles serait soumis l'usage du pavillon national, tout ce qu'il y a de pratique et d'utile parmi les tissus de règles législatives, coutumières et jurisprudentielles appliquées ailleurs.

La législation maritime suisse actuelle est d'une inspiration éclectique ; elle invoque le droit suisse existant: code civil, code fédéral des obligations, code pénal et code pénal militaire; les lois, ordonnances, prescriptions, ordres,
directives ou dispositions sur le registre des bateaux affectés à la navigation sur les eaux intérieures, sur la saisie et l'expropriation, sur la procédure pénale, sur le maintien de la neutralité, sur l'extradition, sur les rapports de service des autorités ou fonctionnaires, etc. ; puis les accords ou usages internationaux, universellement appliqués ou en vigueur, et, plus spécialement, six conventions, produits de conférences internationales du travail, ainsi que les cinq conventions dites de Bruxelles; puis encore, les

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principes du droit international et les principes généraux du droit maritime, les coutumes, règles et usages généralement reconnus dans la navigation maritime; des principes proclamés par des associations privées (telles que les règles dites d'York et d'Anvers) ; des systèmes ou prescriptions établis par les principales sociétés de classification; enfin, la doctrine et la jurisprudence .. . Les conventions internationales mentionnées dans l'arrêté sont considérées comme faisant partie intégrante de la législation suisse.

Les autres règles ---· législatives ou coutumières, suisses ou étrangères -- sont applicables, les unes directement à titre principal ou subsidiaire, les autres par analogie. Mais on ne saurait penser à tout; il fallait, dès lors, prévoir les oublis, les lacunes; l'arrêté précise qu'ils seront comblés conformément à la règle inscrite en tête du code civil suisse, adaptée en ces termes aux besoins de la cause : < < . . . le juge prononce selon les principes généraux reconnus du droit maritime et, à défaut de tels principes, selon les règles qu'il établirait s'il avait à faire acte de législateur, en tenant compte de la législation, de la coutume, de la doctrine et de la jurisprudence des Etats maritimes. » Etant donné que les dispositions du droit maritime suisse ont été puisées dans toutes les sources susindiquées, l'arrêté a un caractère particulier. Le point le plus important est que l'usage du pavillon est subordonné à une concession qui est accordée, refusée, modifiée, retirée, sans indication de motifs, par le Conseil fédéral. Baie, qui est reliée à la mer, fut désignée comme « port d'enregistrement ».

E. NÉCESSITÉ D'UNE REVISION La commission du Conseil national, dans le rapport auquel nous nous sommes déjà référés, exprimait encore le voeu que le Conseil fédéral se préoccupât de la façon dont la matière pourrait être incorporée dans la législation ordinaire. H nous a paru désirable, d'autre part, que le droit actuellement en vigueur ne fût pas prorogé au-delà du 31 décembre 1952 et qu'on pût lui substituer, à ce moment-là, une loi complète, une oeuvre durable, appropriée aux besoins de l'armement suisse en temps de paix, mais élaborée aussi, compte tenu de nos expériences, en prévision de nouvelles complications internationales.

F. TRAVAUX PRÉLIMINAIRES Nous avons chargé
le département politique de diriger les études nécessaires, d'abord parce que le contrôle de caractère politique qu'il a exercé, dès 1941, sur la navigation maritime lui a procuré beaucoup de renseignements et d'expériences utiles, ensuite parce que, en temps de

262 paix comme en temps de crise, la navigation maritime suisse touche de près aux relations avec l'étranger.

Donnant suite aux propositions de ce département, nous avons constitué, le 22 janvier 1948, une commission consultative dont fixent partie, d'une part, les délégués des départements et offices fédéraux et, d'autre part, les représentants des milieux intéressés à la navigation maritime.

La commission, dont nous n'attendions tout d'abord que des avis sur certains points essentiels, a entrepris, avec notre consentement, et avec la collaboration constante du département politique, une étude complète du problème et rédigé le projet de loi que nous avons approuvé et que nous vous soumettons aujourd'hui.

G. LE PROJET DE LOI a. Considérations générales D'emblée, nous voulons relever deux caractères de ce projet. Tout d'abord, quant à la forme, il réunit, d'une part, comme l'arrêté, les dispositions strictes de droit public et administratif relatives à l'usage du pavillon suisse sur mer et la réglementation tantôt imperative, tantôt simplement dispositive, applicable à l'exercice de la navigation et à l'utilisation des navires, d'autre part, la réglementation sur le contrat d'engagement des marins, qui a fait l'objet de l'arrêté du 20 janvier 1942.

Deuxièmement, sur le plan matériel, le projet --- qui emprunte une grande partie de ses règles aux autres disciplines du droit, en les conjuguant en un tout cohérent -- se présente comme un compromis entre les exigences d'un libéralisme sans lequel l'exercice de la navigation par des entreprises privées serait voué à un échec et les nécessités politiques et administratives d'un Etat qui se préoccupe, dans un domaine échappant souvent à son action directe, de limiter le plus possible les sources de litiges internationaux et qui entend que son pavillon soit respecté partout. N'oublions pas en effet que nos navires, chaque fois qu'ils quittent la haute mer, sont dans les eaux territoriales d'un autre Etat et que ceux qui les commandent ou servent à leur bord sont et seront, pendant plusieurs années encore, dans leur grande majorité, des sujets étrangers.

b. Bases juridiques Notre droit de faire naviguer sur mer, et sous notre pavillon national, nos propres navires est incontestable et depuis longtemps incontesté. La déclaration de Barcelone, adoptée en
1921 par la conférence générale sur la liberté des communications et du traue, acte que la Suisse a signé, l'a consacré, implicitement, une fois de plus et de la manière la plus nette, en précisant les formalités auxquelles devait être soumis l'exercice de ce

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droit : « Les soussignés, dûment autorisés à cet effet, déclarent que les Etats qu'ils représentent reconnaissent le pavillon des navires de tout Etat qui n'a pas de littoral maritime, lorsqu'ils sont enregistrés en un lieu unique déterminé, situé sur son territoire; ce lieu constituera pour ces navires le port d'enregistrement. » Par l'arrêté fédéral du 21 juin 1924 (RO 40, 429) l'Assemblée fédérale a pris acte de la signature de cette déclaration par le Conseil fédéral.

Selon l'article 24fer de la constitution, adopté le 4 mai 1919 par le peuple et les cantons, «la législation sur la navigation est du domaine de la Confédération ». Or, dans son message du 20 octobre 1917, le Conseil fédéral affirmait « que la compétence de la Confédération ne doit pas se borner à la navigation intérieure. » --- « L'article 24fer doit, disait-il, nous donner l'occasion de poser le principe que la Suisse, en sa qualité d'Etat souverain, a le droit d'exercer la navigation maritime; si les intérêts de l'économie nationale devaient l'engager à user de ce droit, la Confédération aura en mains toutes compétences pour légiférer sur cette matière. » D'autre part, les articles 64 et 646is de la constitution donnent à la Confédération la compétence la plus étendue pour légiférer dans un domaine auquel il faut incorporer de nombreux éléments de droit civil, de droit des obligations et de droit pénal.

c. Conditions primordiales pour l'usage du pavillon suisse

L'arrêté repose sur la notion fondamentale du droit au pavillon, notion qui n'est pas précise en droit international et qui, dans cet arrêté, est complexe, d'une complexité que les circonstances de 1941 justifièrent, mais qui nuit à sa clarté. Subjectivement, le propriétaire ou l'armateur-gérant doivent obtenir le droit au pavillon, qu'on nomme ailleurs la concession ou droit d'user du pavillon suisse; objectivement, la concession doit être obtenue pour des navires déterminés. Ces deux aspects sont liés indissolublement: subjectivement, le requérant n'obtient le droit au pavillon que si ce droit est accordé objectivement au navire pour lequel il est demandé. Si la concession est accordée subjectivement et objectivement, il faut encore une autorisation de l'office de la navigation maritime, autorisation qui ne peut être obtenue que si l'aptitude du navire à la navigation est établie.

Le système que nous vous proposons est différent : il n'y a plus de concession; le pavillon est lié à la nationalité du navire et cette nationalité dépend de l'enregistrement; ne sont enregistrés que les navires à l'égard desquels sont réunies les conditions de propriété, d'admission à la navigation, de dénomination et de procédure posées par la loi.

Le pavillon est un signe; un emblème, manifestant la nationalité du navire. La nationalité est bien la chose essentielle; le pavillon crée une pré-

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somption, mais sans caractère absolu; c'est, a-t-on dit, la carte de visite du navire; ce qui est déterminant, c'est le droit d'arborer le pavillon; ce droit résulte de ce qu'on a justement appelé l'état civil du navire, attesté chez nous par sa lettre de mer. La « loi du pavillon », c'est la loi applicable selon la nationalité manifestée par le pavillon. Il faut, dès lors, donner le pas à la notion de nationalité. Or, elle s'attache au navire ; c'est donc l'aspect objectif qui prime. Il appartient, en principe, à chaque Etat de déterminer, par sa législation, comment il entend établir le caractère national des navires qui portent son pavillon. Doit-on se fonder sur la propriété, sur le domicile du propriétaire, ou encore sur celui de l'armateur qui exploite le navire ? Les opinions diffèrent et les décisions de la conférence de Londres, de 1909, qui devaient les unifier, n'ont jamais été ratifiées. Il convient, dès lors, de prendre trois précautions plutôt qu'une: exiger, à la fois, la nationalité suisse du propriétaire, le domicile en Suisse du propriétaire et celui de l'exploitant. C'est ce que fit l'arrêté, et ce cumul doit être maintenu.

Aujourd'hui, le droit au pavillon est concédé au propriétaire du navire (arrêté, art. 5 et 6). Désormais, ce ne sera plus le cas : ce droit n'appartient qu'à la Confédération, qui en fera usage au profit des navires suisses.

Le propriétaire et l'exploitant étant suisses, domiciliés en Suisse, on peut se demander s'il est nécessaire que la totalité des capitaux engagés dans le navire soit suisse, s'il est nécessaire, par exemple, que tous les actionnaires, ou tous les associés d'une société coopérative, ou tous les membres d'une association soient des ressortissants suisses, domiciliés en Suisse, ou des personnes morales ayant leur siège en Suisse. Si l'on s'en, tenait, s'agissant de ces sociétés, aux prescriptions du code civil ou du code fédéral des obligations, le caractère suisse ne pourrait pas être contesté, si, lors d'une nouvelle crise, le principe selon lequel la détermination de la nationalité du navire est affaire de chaque Etat était universellement admis. Mais, au moment critique, chaque Etat peut reprendre sa liberté d'appréciation et se réserver le droit de déterminer, selon ses conceptions du moment, les conditions de la nationalité.

C'est en
considérant la complexité du problème et les conséquences que peut avoir, en cas de complications internationales, le fait que la nationalité du propriétaire est chose discutable, que nous avons été amenés à exclure non seulement les personnes physiques mais aussi les sociétés commerciales et personnes morales dans lesquelles les personnes physiques jouent un rôle prépondérant.

Nous avons renoncé à la construction adoptée pour l'arrêté. En 1941, il fallut agir vite; on se contenta de poser, avec minutie, les conditions auxquelles était subordonné l'usage du pavillon, de prévoir les sanctions applicables en cas d'abus; pour le reste, l'arrêté avait eu recours, dans toute la mesure opportune, aux lois en vigueur déclarées applicables directement ou par analogie, et à des accords internationaux conclus en dehors

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de nous. Le problème ayant été repris à sa base, nous avons donné la préférence à une réglementation systématique, plus précise et, à certains égards, plus détaillée.

Le texte que nous vous présentons comprend : d'une part, les règles de droit public et administratif nécessaires ; d'autre part, comme droit national, tout ce qui., dans une exploitation rationnelle de la navigation, est indispensable aux armateurs, aux équipages et aux usagers pour régler leur comportement.

Les règles relatives à la qualification du navire suisse et à l'usage de notre pavillon sont originales ; notre souci constant de prévenir les contestations de caractère politique et d'assurer au pavillon suisse une considération absolue les domine. Dans les autres domaines, nous avons tenu largement compte du droit commun des Etats maritimes. En ce qui concerne l'exploitation de la navigation, nous nous sommes abstenus d'imposer à nos armateurs des règles qui les placeraient en état d'infériorité à l'égard de leurs concurrents étrangers, Nous avons apprécié la façon dont la commission a défini certaines notions fondamentales et certains termes usuels: l'armateur, par exemple. Ce vocabulaire sera précieux en présence de la confusion terminologique qui règne ailleurs et qu'accentué la diversité des langues; à cet égard aussi, notre oeuvre peut être considérée comme originale.

d. Etendue de la réglementation A première vue, le projet que nous vous présentons paraît plus étendu que l'arrêté; en réalité, ce n'est pas le cas. Le projet comprend, compte tenu des conventions internationales déclarées applicables et des règles d'York et d'Anvers, 233 articles, alors que la législation actuelle, avec les accords internationaux qui lui sont incorporés et l'arrêté du Conseil fédéral concernant l'engagement des marins, en compte une centaine de plus. Mais, malgré sa brièveté, le projet se présente comme un code complet.

Fallait-il réglementer le transport des passagers ? Nous avons répondu par l'affirmative. Indépendamment de l'hypothèse où un armateur suisse s'enhardirait à vouloir exploiter des paquebots, il est clair que la possibilité du transport de passagers ne peut jamais être exclue dès qu'il y a navigation maritime régulière: en pratique, parce que le transport de passagers, en nombre limité, à bord des cargos est un appoint
fréquent, consacré par des accords internationaux, à l'activité des transporteurs de marchandises ; du point de vue juridique, parce que nombre de personnes pouvant se trouver à bord, à des titres divers, ne peuvent répondre qu'à la définition du passager, qui couvre, à titre complémentaire, ceux qui n'ont à bord ni emploi, ni fonctions nautiques pour le compte de l'armateur.

La navigation de plaisance n'a pas suscité d'enthousiasme parmi les membres de la commission. Bien avant qu'eut été édicté l'arrêté, des ressor-

266 tissante suisses demandaient de pouvoir arborer notre pavillon sur leurs yachts. Ces requêtes ont été plus pressantes ces derniers temps. Acceptant la solution à laquelle la commission s'est ralliée, nous vous proposons de ne pas exclure d'emblée la navigation de plaisance sous pavillon suisse; le Conseil fédéral aurait la faculté de l'admettre en la soumettant à une réglementation particulière ; vous pouvez être certains qu'il ne le ferait pas sans exiger, des bénéficiaires, des garanties limitant le plus possible les risques de complications. Nous reviendrons sur ce point à propos de l'article 25.

Nous avons tenu compte des voeux exprimés par les milieux intéressés en incorporant dans le projet (art. 111 à 113) des dispositions relatives à la navigation sur les eaux intérieures ; il s'agit exclusivement de règles de droit privé relatives aux rapports entre propriétaires ou armateurs d'une part, et chargeurs de l'autre. C'est la solution opportune et pratique d'un problème qui préoccupe depuis longtemps les armateurs rhénans, leurs clients et les entreprises d'assurance.

DEUXIÈME PARTIE LES DISPOSITIONS DU PROJET Titre premier

ORGANISATION ET AUTORITÉS Chapitre premier Principes généraux Article premier. Le droit régissant la navigation maritime est extrêmement complexe. Nous l'avons montré en parlant du contenu de l'arrêté.

Chaque Etat a sa législation propre, qui constitue, pour les navires soumis à son autorité, la loi du pavillon; ces diverses législations renferment de nombreuses dispositions semblables, sinon identiques, produits d'une expérience commune qui remonte très loin dans le passé. Mais chaque Etat admet que la loi du pavillon n'est pas absolue, car les navires doivent observer: d'une part, la réglementation imperative et la juridiction de l'Etat étranger dans les ports et dans les eaux territoriales duquel ils se trouvent ; d'autre part -- que les navires soient dans les eaux territoriales ou en haute mer -- les règles de droit international, public ou privé, formulées dans des traités internationaux ou fondées sur les usages et la coutume. H ne saurait être question de tracer, ici, une ligne de démarcation, même approximative, entre le domaine national et celui du droit des gens. Nous entendons régir la navigation sous pavillon suisse, par notre législation, dans toute la mesure où cela est pratiquement possible. C'est un principe qu'il convient de mettre

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en évidence dans une loi dont les dispositions seront invoquées, en grand nombre, hors de nos frontières. Ce principe, nous l'avons posé dans le premier alinéa de l'article premier.

Tout navire prouve sa nationalité par un signe extérieur, le pavillon.

On ne peut laisser ses dimensions, sa forme, ses couleurs et ses pièces ou ornements à l'arbitraire ou à la fantaisie du propriétaire. Le pavillon suisse doit être le même pour tous les navires et répondre aux prescriptions de la loi; le 2e alinéa précise, plus brièvement que l'article 11 de l'arrêté, ses caractères distinctifs.

Le droit et l'obligation d'arborer ce pavillon sur les navires suisses résultent du 3e alinéa.

Dans l'arrêté, la désignation du port d'enregistrement se trouve à l'article 14; vu son importance essentielle, nous l'avons placée en tête de la loi.

Article 2. Selon le droit des gens, les eaux navigables sont divisées en trois zones : les eaux intérieures, les eaux territoriales et la haute mer. Les eaux intérieures sont celles qui se trouvent dans le territoire d'un Etat et du fait de la souveraineté de ce dernier, le droit national y est applicable.

Quant aux eaux territoriales, longeant le littoral, l'Etat riverain y fait usage de sa souveraineté ; celle-ci consiste principalement dans la compétence législative et juridictionnelle. Reconnue en principe, cette souveraineté subit, dans la pratique du droit des gens, la limitation volontaire que voici : Sur les navires étrangers auxquels est reconnu le droit de passage inoffensif et de séjour libre dans les eaux territoriales, les affaires internes du bord restent soumises au droit de l'Etat du pavillon aussi longtemps qu'il n'est pas porté atteinte à la tranquillité et à l'ordre public desdites eaux. Cette souveraineté de l'Etat riverain est restreinte également, en partie, dans les eaux intérieures, ainsi que dans les ports et autres installations similaires.

Ce sont les Etats riverains qui fixent eux-mêmes la largeur de leurs eaux territoriales. En effet, on n'a pu, dans ce domaine, convenir de règles uniformes sur le plan international. La zone classique des trois milles a été élargie dans beaucoup d'Etats, dont les eaux territoriales s'étendent, par exemple, sur une largeur de 6 à 12 milles marins. En dehors de celles-ci se trouve la haute mer, qui n'appartient au
territoire d'aucun Etat et n'est soumise à aucune loi ni juridiction nationales. La haute mer est considérée comme un domaine commun à tous les Etats (res communia omnium).

La liberté des mers est reconnue, par le droit des gens, au profit des navires de toutes les nations. Mais, pour éviter l'absence de tout droit et l'anarchie, les navires doivent, d'une manière certaine et incontestable, se rattacher à un Etat reconnu en droit international. On y parvient en soumettant ces navires, en haute mer et aussi, en partie, dans les eaux territoriales et dans les eaux intérieures, au droit de l'Etat du pavillon. D'un autre côté, la reconnaissance internationale du pavillon d'un navire suppose l'ex-

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tension à celui-ci de la souveraineté et du droit national de l'Etat dont il arbore le pavillon.

Cette compétence législative et juridictionnelle de l'Etat du pavillon à l'égard de ses propres navires n'est cependant pas la conséquence de sa souveraineté territoriale ; il s'agit plutôt de sa juridiction sur des personnes et des biens. Le navire n'est pas une « partie flottante » de l'Etat du pavillon, mais bien une communauté organisée, placée sous l'autorité du capitaine, dont les attributions sont fixées par le droit de cet Etat. Cette conception est généralement reconnue par le droit des gens actuel, et l'ancienne doctrine de la territorialité du navire en haute mer peut, tout au plus, servir d'image, pour des raisons de commodité ; elle n'est, autrement, qu'une fiction qui ne doit pas être prise à la lettre. C'est pourquoi le projet évite à dessein, même à titre de fiction, d'assimiler le navire au territoire de la Confédération suisse. La structure federative de la Confédération, qui se compose de territoires relevant tous de la souveraineté des cantons, ne permettrait guère de résoudre la question de savoir à quel territoire cantonal un navire suisse appartiendrait. La doctrine de la « partie flottante du territoire » peut, de même, avoir des effets dangereux en matière de neutralité, attendu qu'une mesure de prise frappant un navire suisse devrait, alors, être considérée comme violant la neutralité de l'Etat du pavillon. Enfin, et cela n'est pas le moins important, certaines conséquences indésirables découlent toujours du principe de la territorialité, lorsqu'un rapport de droit est fondé nécessairement, vu sa nature, sur la souveraineté territoriale. On peut penser, ici, au séjour ou au domicile lorsque se posent des questions de nationalité ou de souveraineté fiscale, ou aux prescriptions concernant les importations et les exportations, la douane et le clearing, ainsi que les formalités de passeports ou encore à tels actes délictueux qui ne concernent que le territoire suisse ou qui ne peuvent être commis que sur ce territoire.

Pour ces raisons, la Suisse se conforme à l'obligation, que lui impose le droit des gens, de prévenir l'absence de tout ordre juridique sur ses navires, en déclarant à cet effet son droit national applicable à bord de ceux-ci; elle étend donc le champ d'application
de son propre droit, sans recourir, pour cela, à une fiction.

En conséquence, l'article 2 du projet dispose qu'en haute mer, le droit fédéral (public et privé) est en vigueur sans partage à bord des navires suisses, l'application de dispositions de droit cantonal restant par là exclue.

Ainsi, le droit suisse est en vigueur non seulement sur le territoire de la Suisse, mais encore à bord des navires de ce pays, ce qui permet de résoudre les conflits de droit international se produisant en haute mer. Quant à la délimitation internationale de la compétence des tribunaux, elle doit être laissée à la pratique du droit des gens et ne peut être réglée par le droit suisse. Cependant, dans la mesure où il est compétent, un tribunal suisse a l'obligation d'appliquer son propre droit aux actes exécutés à bord de navires suisses.

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Comme, dans les eaux territoriales, l'Etat riverain s'abstient régulièrement d'invoquer sa souveraineté dans une mesure dont il reste d'ailleurs seul juge, et qui varie selon les pays et les circonstances de principe dans un certain nombre d'affaires, il y a lieu de prévoir que le droit suisse sera applicable à bord des navires suisses se trouvant dans les eaux territoriales étrangères, lorsque le droit étranger n'y est pas impératif. Le projet tient compte de cette circonstance en ne prévoyant, à son article 2, que l'application subsidiaire du droit suisse.

En cas de naufrage, il est nécessaire, tout particulièrement en matière pénale, que le droit de l'Etat du pavillon continue de s'appliquer aux survivants qui, dans des canots de sauvetage ou autrement, sont hors du champ d'application de tout droit national, jusqu'à ce qu'ils se trouvent à nouveau dans un lieu soumis à la souveraineté d'un autre Etat.

Selon l'article 2 du projet, le droit pénal suisse est en vigueur à bord des navires suisses. Le code pénal suisse est mentionné expressément, mais les autres dispositions pénales de la législation fédérale sont également applicables. La référence au code pénal signifie aussi que la partie générale de ce dernier, conformément à son article 333, est également valable pour les infractions particulières prévues par le projet. Cependant le code pénal délimite le cbamp d'application du droit pénal suisse d'après le principe de la territorialité (art. 3). Les exceptions prévues par les articles 4, 5 et 6 ne suffisent pas pour rendre le code applicable à bord des navires suisses.

Aussi, vu la règle « Pas de peine sans loi », est-il nécessaire de prévoir expressément l'extension du champ d'application du droit pénal suisse aux actes commis à bord de navires suisses. Si l'on suit la théorie de l'ubiquité, dont est inspiré l'article 7 du code pénal, un acte punissable est réputé commis à bord d'un navire non seulement quant son exécution a lieu en cet endroit, mais encore quand son résultat s'y est produit.

En matière pénale, il ne suffit pas, comme en matière de droit civil ou de droit public, que l'application du droit suisse ne soit prescrite impérativement qu'en haute mer, cependant que, dans les eaux territoriales, ce droit suisse ne s'appliquerait que si l'Etat riverain s'abstenait de déclarer
son droit pénal applicable, car, précisément, l'Etat riverain applique toujours son propre droit pénal dans ses eaux territoriales. Le droit pénal étranger serait donc toujours applicable durant le passage ou le séjour d'un navire suisse dans les eaux territoriales étrangères et, comme la juridiction est toujours déterminée, en droit pénal international, en fonction du droit matériel applicable, le juge étranger serait compétent chaque fois. Juridiquement correcte en théorie, cette délimitation de la souveraineté est cependant irréalisable en pratique, car elle entraînerait, le plus souvent, une absence de toute juridiction, dont l'auteur du délit profiterait. Un problème de droit international préjudiciel à celui de l'application du droit pénal national ou étranger, ainsi qu'à celui de la juridiction compétente, nationale

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ou étrangère, serait toujours celui de la délimitation des eaux territoriales, par rapport à la haute mer. Or, cette délimitation peut varier d'un pays à l'autre. Dans un cas concret, le juge étranger pourrait déclarer que, d'après sa jurisprudence, l'acte a été commis alors que le navire se trouvait encore en haute mer, tandis que le juge suisse qui serait saisi de la même cause considérerait le lieu du délit comme se trouvant dans les eaux territoriales étrangères; par conséquent, les deux juges déclineraient chacun leur compétence et l'auteur de l'acte échapperait à toute punition. Enfin, il est souvent impossible, en pratique, de fixer exactement l'endroit où se trouvait le navire lorsque l'acte a été commis à son bord, en particulier s'il s'agit de délits continus. Au surplus, les faits de la cause ne sont ordinairement élucidés que lorsque le navire atteint le prochain port. Par ailleurs, bien que leur propre droit pénal soit en vigueur dans leurs eaux territoriales, les Etats riverains s'abstiennent souvent d'invoquer leur droit de juridiction ; il en est spécialement ainsi, selon une pratique assez répandue, lorsque l'acte punissable ne produit pas d'effet au dehors du navire et qu'il n'est pas porté atteinte à la tranquillité, à l'ordre et à la sécurité des eaux territoriales, ou encore lorsque ni l'auteur de cet acte, ni sa victime, ne sont ressortissants de l'Etat riverain. Quant à l'exercice effectif du droit de juridiction par les Etats riverains, il varie beaucoup et n'est soumis à aucun critère uniforme. Souvent aussi, on renonce à poursuivre un. délit, et cela seulement pour des raisons qui n'ont rien de juridique. Pour ces motifs, le projet prévoit l'application concurrente du droit pénal suisse et du droit pénal étranger au cas où l'acte est commis à bord du navire dans les eaux territoriales. Afin, que ce concours de droits applicables ne conduise pas à punir l'auteur plusieurs fois pour un même acte, le projet prévient le cumul des actions pénales des deux Etats, non pas en se plaçant sur le terrain de l'applicabilité du droit pénal matériel, mais bien en tenant compte de la juridiction effectivement saisie. L'auteur de l'acte ne reste impuni, en Suisse, que si l'Etat étranger, en vertu de l'applicabilité de son droit pénal, a exercé, en fait, également son pouvoir de juridiction. Le
projet est, sur ce point, conforme au système adopté par l'article 6 du code pénal. Cela peut créer des conflits de compétence positifs, mais exclut, en même temps, toute absence de droit et de juridiction.

Comme le droit maritime en vigueur jusqu'à présent, le projet prévoit certains délits (art. 114 à 137) dont la répression vise à protéger les navires et la navigation maritime suisses. Une telle protection ne peut être obtenue, cependant, que si ces dispositions spéciales de droit pénal ont une portée illimitée dans l'espace, analogue à celle du code pénal militaire (art. 9).

Pour en démontrer la nécessité, citons, par exemple, le délit d'abus du pavillon, une infraction qui ne peut, de toute façon, être commise qu'à l'étranger. C'est pourquoi le projet prévoit que les dispositions pénales particulières de la loi sont applicables partout, que l'infraction ait été commise dans le pays, à l'étranger, en haute mer ou dans les eaux terri-

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toriales étrangères. En prévision du cas où le même acte serait réprimé par le droit étranger, on a adopté, ici également, la règle selon laquelle l'auteur ne peut être puni de nouveau en Suisse lorsque le juge étranger a, en fait, déjà exercé son pouvoir de juridiction.

Contrairement à ce que prévoit l'article 59 de l'arrêté, on a renoncé à étendre la notion de territoire suisse, telle que la comprend la législation destinée à protéger la neutralité (CPM, art. 92 et 93; CPS, art. 271), car, selon les circonstances, il peut paraître inopportun de rendre l'Etat du pavillon politiquement responsable, à cet égard aussi, des actes commis à bord de ses navires. C'est à la législation spéciale qui pourra éventuellement être adoptée pour protéger la neutralité de la Suisse que sera laissé, suivant les cas, le soin d'étendre son propre champ d'application selon les nécessités.

Article 3. La loi ne saurait réglementer dans les détails et dans toutes les directions une matière aussi touffue, cela d'autant moins qu'il pourrait être désirable d'adapter rapidement des dispositions -- d'ordre administratif surtout -- aux enseignements de l'expérience ou à des circonstances nouvelles.

Le projet prévoit, entre autres mesures d'application, les règles sur l'organisation et le fonctionnement de l'office suisse de la navigation maritime et de l'office du registre des navires suisses (art. 9 etlO) ; sur l'admission, dans des cas exceptionnels, comme propriétaires de navires suisses, d'associations et de fondations (art. 24) ; sur la navigation de plaisance (art. 25) ; sur l'élévation ou l'abaissement de montants maximums dans le domaine de la responsabilité du propriétaire ou de l'armateur (art. 37 et 91); sur la procédure en matière de collocation de créances (art. 38), ou de délit commis à bord (art. 45), ou encore en vue de l'homologation d'une dispache par un tribunal suisse (art. 110); sur les mesures destinées à favoriser la formation d'équipages suisses (art. 49) ; sur les prescriptions sanitaires et sociales (art. 51 et 73); sur les conditions auxquelles est subordonné le transport des passagers (art. 104). Au vu du premier alinéa de l'article 3, cette énumération n'est pas limitative.

Sont déclarées applicables: certaines dispositions de la convention internationale du 10 avril 1926 sur l'unification de
certaines règles relatives aux privilèges et hypothèques (art. 28), les conventions du 23 septembre 1910 sur l'unification de certaines règles en matière d'abordage, d'assistance et de sauvetage (art. 107), ainsi que les règles dites d'York et d'Anvers, dans leur teneur la plus récente (art- 108). Par ailleurs, la loi renvoie au Conseil fédéral le soin d'édicter -- en tenant compte des conventions internationales et des usages en vigueur dans la navigation maritime -- des dispositions relatives à l'âge minimum, à l'examen médical des marins, à la durée de leur travail, à leur nourriture et à leur logement à bord, ainsi qu'aux vacances payées. Ces conventions internationales peuvent être

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modifiées ; que la Suisse adhère ou non à ces accords, il pourrait apparaître désirable d'adapter notre droit aux changements décidés par les hautes parties contractantes, sans qu'il soit nécessaire de modifier la loi ou de recourir, chaque fois, à un acte législatif séparé.

Nous avons aussi prévu l'application, à la navigation maritime suisse, d'autres dispositions contenues dans des accords internationaux actuels ou à venir; il s'agit, en particulier, des mesures arrêtées ou recommandées dans les limites des conventions internationales du travail; en pareils cas, le Conseil fédéral prendrait, par voie d'ordonnances, des mesures provisoires.

L'article 4 vise toutes les circonstances imaginables qui pourraient justifier des mesures exceptionnelles. En cas de service actif, de neutralité armée ou d'hostilités, ces mesures pourraient être fondées Sur le droit de nécessité; mais la prévision de la guerre ou de menaces de guerre constituerait un cadre trop étroit; il faut penser à des événements qui peuvent se produire loin de nos frontières, à des éventualités qui ne justifieraient pas, chez nous, le recours aux pouvoirs extraordinaires; un conflit localisé dans le Pacifique peut, par exemple, affecter la navigation maritime suisse, notre ravitaillement, ainsi que les multiples relations internationales que cette navigation met en jeu. Les dispositions de l'article 4 ont leur place dans la loi, car il pourrait être nécessaire de faire valoir, à l'étranger, la légalité de mesures d'exception sans recourir, sur le plan constitutionnel, à une argumentation compliquée.

Les règles ordinaires en matière d'expropriation ou de réquisition ne permettraient pas d'arriver à une solution rapide ; aussi, nous sommes-nous contentés de prévoir une juste indemnité, l'article 110 de la loi fédérale d'organisation judiciaire offrant, en cas de litige, à celui qui se tient pour lésé la possibilité d'obtenir une appréciation objective de son droit.

Article 5. Le premier alinéa reprend à peu près textuellement l'article 72 de l'arrêté et reproduit le principe original du second alinéa de l'article premier du code civil. Cette disposition a une importance particulière dans un domaine où les usages et la coutume ont encore un très large champ d'application.

Le 2e alinéa consacre la libre appréciation du juge à l'égard des preuves.

Chapitre II Administration

Article, 6. Nous vous proposons une organisation analogue à celle que est prévue par la loi fédérale sur la navigation aérienne. D'après cette loi, le Conseil fédéral fait exercer la surveillance qui lui incombe par le département des postes et des chemins de fer. Bien que l'arrêté n'ait pas prévu

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pareille délégation, c'est le département politique qui, en fait, exerce dès 1941 la haute surveillance dans le domaine de la navigation maritime.

Nous vous proposons de consacrer le fait, car l'expérience a démontré que ce département était le mieux à même de contrôler l'usage du pavillon suisse, puisque la navigation maritime s'exerce loin de notre pays, sur le plan international, et que nous devons recourir sans cesse, pour l'application des prescriptions légales, à l'entremise de nos consulats. Le département politique disposera, pour l'exercice de la surveillance immédiate, de l'office suisse de la navigation maritime, comme c'est déjà le cas actuellement. (Aujourd'hui, l'office de la navigation maritime de la Confédération suisse -- ainsi que l'office fédéral du registre des navires -- est administrativement rattaché à la division de la justice du département fédéral de justice et police.)

Les articles 7 à 10 consacrent l'institution des deux offices créés en 1941 (arrêté, articles 2, 1er alinéa, et 3, 1er alinéa). Leur dénomination est devenue : « Office suisse de la navigation maritime » (au lieu de « Office de la navigation maritime de la Confédération suisse ») et « Office du registre des navires suisses » (au lieu de « Office fédéral du registre des navires »), Tandis que, selon l'arrêté (art. 75), les attributions de l'office de la navigation sont exercées par les organes de la direction de la navigation du canton de Baie-Ville et celles de l'office du registre des navires par le conservateur du registre foncier du canton de Baie-Ville, nous vous proposons de laisser désormais au Conseil fédéral le soin de pourvoir, au gré des besoins, à l'organisation et au fonctionnement des deux offices, avec faculté de confier leur gestion ou l'exercice de certaines de leurs attributions à des administrations cantonales.

Il convient de préciser dans la loi que l'office suisse de la navigation maritime peut traiter et correspondre directement avec nos consulats, ainsi qu'avec les représentants d'Etat étrangers, où qu'ils se trouvent.

Les consuls et les consulats interviendront notamment -- et abstraction faite des demandes qui leur seront adressées par l'office de la navigation pour le besoin de la surveillance (art. 7, 32 et 33, par exemple) -- dans des cas déterminés par la loi. C'est ainsi
que l'inscription des marins sur le rôle d'équipage se fait par devant le consul, qui valide l'opération par son visa; le consul intervient également à l'occasion des dérôlements (art. 53) ; le consulat doit constater l'impossibilité d'embaucher un remplaçant pour un membre de l'équipage dont le contrat arrive à échéance et justifier par là la prorogation obligatoire de l'engagement (art. 67). Le consulat doit être informé par le capitaine de l'arrivée du navire et de la date de son départ; pendant l'escale, le capitaine doit tenir ses papiers de bord à la disposition du consulat; c'est par l'entremise du consulat que le capitaine demandera, en cas de besoin, l'aide judiciaire d'un Etat étranger (art, 47) ; en cas de différend relatif à l'exécution du contrat d'engagement, le consulat, s'il en Feuille, fédérale, 104e aimée. Vol. I.

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est requis, s'efforcera de concilier les parties; il doit aussi, si le contrat d'engagement le prévoit, arbitrer les litiges (art. 70) ; si l'armateur refuse le rapatriement alors que le marin débarqué paraît y avoir droit, le consulat pourvoit à ce rapatriement (art, 71); si le navire ou la cargaison subissent un accident, le capitaine est tenu de faire rapport au consulat du premier port où il relâche et le consul peut procéder, à bord, à une enquête administrative et à tout interrogatoire utile, après quoi il dresse un procès-verbal qu'il envoie à l'office de la navigation (art. 105 et 106). Le consulat reçoit les extraits du livre de bord où sont consignés les naissances et les décès; les testaments doivent lui être remis (art. 44), ainsi que les rapports d'enquête dressés par le capitaine (art. 45).

Il arrive souvent qu'il n'y a pas de consulat ou d'agent consulaire dans les ports où ces opérations devraient se faire ; dans certains cas, le capitaine s'adressera à l'autorité locale; dans d'autres, il transmettra les documents au consulat dans l'arrondissement duquel l'événement s'est produit ou au consulat le plus facilement accessible; dans d'autres encore, il attendra d'arriver dans un port où la Suisse a un consulat.

Nous avons distingué, comme dans l'arrêté, entre consul et consulat.

Lorsque le texte mentionne le consul, nous entendons que le représentant de notre pays doit intervenir personnellement. Selon l'article 74 de l'arrêté, le terme de consulats s'applique également aux légations qui sont chargées des affaires consulaires. Il comprend les consulats généraux, les consulats, les vice-consulats, ainsi que les agences consulaires; le terme de consul s'applique au chef de la mission diplomatique ou du poste consulaire ou à leur mandataire. Nous avons supprimé ces définitions, car elles relèvent de la réglementation interne et des décisions du département politique.

Etant donnée l'importance des intérêts en jeu, la loi fédérale sur la responsabilité des autorités et des fonctionnaires de la Confédération est trop restrictive. S'agissant de l'office fédéral du registre des navires, la Confédération est déjà responsable du dommage, conséquence d'une faute intentionnelle ou d'une négligence grave du préposé ou de ses subordonnés (arrêté, art. 16, 2e al.). Il convient de régler d'une
façon plus large, comme d'autres lois l'ont déjà fait, la responsabilité à l'égard des actes et décisions des deux offices, en posant le principe que la Confédération répond de tout dommage selon le droit commun, sans préjudice de son recours éventuel contre les fonctionnaires et les employés qui ont commis une faute; en créant ces offices, la Confédération doit assumer les risques inhérents à leur exploitation. Les dispositions relatives aux recours contre les décisions de ces offices (arrêté, art. 2, 2e al., et art. 3, 2e al.) ont trouvé leur place au .chapitre suivant qui traite de la juridiction.

275 Chapitre IH

Juridiction Article 11. D'après le projet, l'office suisse de la navigation maritime a de nombreuses attributions administratives, en particulier les fonctions que le Conseil fédéral exerce conformément au régime en vigueur jusqu'à présent. Pour les mesures et décisions de sa compétence, l'office dispose d'une certaine liberté d'appréciation, ce qui est inévitable dans une activité de cet ordre. C'est pourquoi le projet prévoit un recours administratif au Conseil fédéral, autorité politique. La procédure de recours est réglée par les articles 124 à 139 de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943.

En revanche, les mesures de l'office du registre des navires sont déférées au Tribunal fédéral, conformément à la procédure prévue pour les recours de droit administratif par les articles 97 et suivants de la même loi.

Article 12. D'après le droit en vigueur jusqu'à présent, un for existe dans le canton de Baie-Ville pour toutes les actions civiles intentées contre le propriétaire, le possesseur ou le capitaine d'un navire suisse. Le professeur Haab a déjà qualifié d'inexacte cette détermination du for en faisant valoir que Baie ne peut constituer un for exclusif que pour les actions réelles; pour les autres actions civiles, le for prévu par l'article 59 de la constitution doit prévaloir, à l'exception des actions découlant de l'avarie commune et des actions en collocation appelées par le fait que le propriétaire invoque ea responsabilité limitée. Tenant compte de ces observations, nous avons réglé la compétence «ratione loci» du juge civil d'après la nature particulière de chaque action.

Nous fondant sur les articles 37 et 52 de la loi fédérale du 28 septembre 1923 sur le registre des bateaux, nous avons prévu, pour toutes les actions réelles concernant un navire suisse, un for exclusif au heu de l'enregistrement, c'est-à-dire à Baie, quel que soit le domicile du défendeur et sans égard à la question de savoir si le propriétaire est demandeur ou défendeur.

Comme il s'agit non pas d'une réclamation personnelle, mais réelle, ce for est conforme à la constitution.

S'agissant d'autres actions civiles du propriétaire de navire, de l'armateur ou du capitaine, ou de celles qui leur sont intentées, il n'y a heu de fixer un for en Suisse que pour les actions fondées spécialement sur le
droit maritime et non pour celles qui ont trait à d'autres prétentions de droit civil. En outre, ce for spécial n'entre en considération que si aucun autre for n'existe en Suisse, c'est-à-dire seulement si le défendeur ne peut se prévaloir d'un for constitutionnel, en qualité de débiteur solvable domicilié dans le pays. Le for subsidiaire de Baie, lieu de l'enregistrement des navires, est donc établi, avant tout, pour qu'on puisse y actionner les défendeurs étrangers sur la base de contrats de location, d'affrètement ou de transport,

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ou encore en raison de faits d'assistance, de sauvetage, d'abordage entre navires, etc. S'agissant d'actions intentées contre un armateur suisse dont le siège n'est pas à Baie, le for constitutionnel de son domicile est valable également pour les réclamations fondées sur le droit maritime.

Il est nécessaire de fixer un for subsidiaire pour une catégorie particulière d'actions civiles, à savoir les demandes en dommages-intérêts à raison d'actes illicites commis sur un navire suisse (CO, art. 41 s.), alors que la même nécessité n'existe pas lorsqu'il s'agit de contrats conclus à bord. Celui qui, sur un navire, conclut un contrat avec un tiers doit avoir, comme n'importe quel passager, une notion, claire du lieu où il pourrait actionner son cocontractant en justice, en cas de non-exécution. En revanche, s'agissant d'actes illicites, il convient que la loi prévoie un for à l'intérieur du pays, pour protéger les intérêts du lésé.

Lorsque l'armateur suisse invoquera la limitation de sa responsabilité en se fondant sur les articles 37 à 38 du projet, sa fortune de mer fera, pour ainsi dire, l'objet d'une faillite séparée. Tous les créanciers maritimes participeront, selon le rang de leurs créances, au montant maximum de responsabilité déterminé d'après une somme fixée par tonneau de jauge brut. Pour être effective, cette limitation de la responsabilité nécessite une procédure spéciale, analogue à celle de la faillite, que fixera l'ordonnance prévue par l'article 38, 3e alinéa; cette procédure ne pourra pas empêcher certaines décisions judiciaires en la forme sommaire. Pour déterminer le montant de l'actif, l'admission des divers créanciers et le rang de leurs créances, il y a heu de prévoir des actions en collocation, pour lesquelles, tout comme en matière de faillite, un for unique s'impose. Il est compréhensible que le for soit Baie, lieu de l'enregistrement des navires, lorsque cette procédure doit se dérouler en Suisse; c'est là, en effet, que se trouve aussi le for de la poursuite, prévu par l'article 55 de la loi sur le registre des bateaux. La même règle est applicable à l'homologation judiciaire de la dispache, en cas d'avarie commune. Quand, par exception, une dispache doit être homologuée en Suisse pour devenir exécutoire, la procédure contradictoire qui s'engage nécessairement à cette occasion
ne peut se dérouler qu'en un seul lieu; c'est pourquoi le projet prévoit, dans ce cas aussi, le for de Baie. L'article 59 de la constitution ne s'applique pas à cette variété d'actions judiciaires.

Article 13. Lorsque le droit pénal suisse est applicable, la juridiction suisse découle des dispositions du code pénal. Lorsque la juridiction du Tribunal fédéral n'est pas prescrite, ce sont les cantons qui sont compétents, en principe le canton dans lequel l'acte punissable a été commis. Si cet acte est commis à bord d'un navire suisse, il y a Lieu de fixer un for particulier; d'après le projet, celui-ci, comme jusqu'à présent, se trouve être Baie, lieu de l'enregistrement des navires. L'obligation et le droit, qui incombent aux autorités de Baie-Ville, de poursuivre et de juger les actes punissables

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s'étendent en outre aux actes spécialement réprimés par le projet (art. 114 à 137) qui, le plus souvent, sont commis hors de Suisse, mais non pas à bord de navires suisses.

S'agissant d'actes punissables pour lesquels le droit pénal suisse prévoit la juridiction du Tribunal fédéral ou celle des tribunaux militaires, cette compétence doit subsister si ces actes ont été commis à bord d'un navire suisse. Le renvoi au canton de Baie-Ville n'est donc requis que si le droit fédéral prévoit la compétence matérielle ou locale d'une autorité cantonale. Comme l'exécution des peines est assurée aux frais du canton dont les tribunaux ont jugé, il est juste que le canton'de Baie-Ville, déclaré compétent par la loi, dispose également du produit des amendes prononcées en application de celle-ci. Une disposition spéciale est nécessaire, le texte de l'article 381 du code pénal étant insuffisant.

Selon l'article 367 du code pénal, les contraventions prévues par le droit fédéral doivent, en tant qu'elles sont soumises à la juridiction cantonale, être poursuivies et jugées d'après la procédure instituée par le canton pour ce genre d'infractions. Les faits réprimés à titre de contravention par le projet sont de la compétence du canton de Baie-Ville, qui, en l'espèce, connaît la procédure de constatation. L'autorité administrative a le droit et l'obligation de constater les contraventions, mais la peine ne peut être prononcée que par le juge. Le droit cantonal désigne, d'après le genre de la contravention, l'autorité qui a qualité pour la constater. Si pareille désignation fait défaut, le département de la police de Baie-Ville est compétent.

Dans les affaires de navigation maritime, il est inopportun de confier le soin de constater des contraventions à une autorité qui ne serait ni familiarisée avec la matière ni non plus en mesure d'être informée des infractions commises. Aussi le projet désigne-t-il l'office suisse de la navigation maritime comme autorité de constatation.

Comme il en est des autres infractions du droit fédéral jugées par une autorité cantonale, le projet règle aussi l'obligation, faite au canton de Baie-Ville, de communiquer au ministère public fédéral les jugements et ordonnances de non-lieu. Il va sans dire que ces décisions doivent être communiquées « in extenso ».

Titre II DES NAVIRES SUISSES
Chapitre premier De l'enregistrement Actuellement, « sont considérés comme navires suisses les bâtiments qui ont le droit, en vertu d'une concession accordée par le Conseil fédéral, de porter le pavillon suisse et qui ont été immatriculés dans le registre des navires tenu par l'office fédéral du registre des navires » (arrêté art, o).

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« Dès qu'un bâtiment a été immatriculé dans le registre des navires, le Conseil fédéral délivre au concessionnaire un certificat de pavillon » (arrêté, art. 21, 1er al.)

Nous avons parlé plus haut, d'une manière générale, de la différence fondamentale qui sépare, à cet égard, le projet que nous vous soumettons du régime actuellement en vigueur. Cette différence ressort nettement des articles 14 et suivants du projet.

Article 14. Sont navires suisses les navires de mer enregistrés dans le registre des navires suisses, et ne sont enregistrés que les navires à l'égard desquels sont réunies les conditions de propriété (art. 15 et 16), d'admission à la navigation (art. 19), de dénomination (art. 21) et de procédure (art. 17, 22 et 23) posées par la loi.

Article 15. Nous abordons ici un sujet qui, au sein de la commission et dans les milieux intéressés, a donné lieu à de nombreuses controverses.

La solution à laquelle nous nous sommes ralliés se déduit de l'argumentation que voici: La propriété nationale est quelque chose d'illusoire; elle peut exister juridiquement, selon nos conceptions; mais il n'est pas certain que, le cas échéant, les Etats étrangers s'en satisfassent. Il convient pour le moins de réduire, autant que faire se peut, les éventualités de litiges.

Si l'on admettait, comme propriétaires d'un navire suisse, une ou des personnes physiques, ou des sociétés commerciales liées organiquement à des personnes physiques, nous irions au devant de complications considérables. Envisageons les cas suivants : le citoyen A, domicilié en Suisse, a été admis Comme propriétaire; son navire a été mis, par conséquent, au bénéfice du pavillon; or, A passe une partie de l'année dans une résidence à l'étranger; la guerre survient, il ne peut rentrer en Suisse; le navire, dont il est propriétaire, sera-t-il considéré comme suisse ? La question du domicile est toujours épineuse; si l'on recourt au critère du principal établissement et qu'il se révèle que A passe sept mois sur douze à l'étranger, le litige est probable.

E, propriétaire du navire, va s'établir à l'étranger; il faudrait l'obliger à vendre son navire à un acquéreur ayant son domicile en Suisse; si, au mépris des dispositions de la législation suisse, il le vend à un étranger, il échapperait à toute sanction effective.

C se fait naturaliser
dans un autre pays; sa double nationalité permettrait de contester la nationalité du navire.

D meurt ; son héritier est domicilié à l'étranger, ressortissant suisse ou sujet d'un autre Etat.

E laisse plusieurs héritiers, dont une fllle qui a épousé un étranger; ou il laisse ses biens à sa femme, qui se remarie avec un étranger, ou va s'établir hors de nos frontières.

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Notre concitoyen, qui a des intérêts à l'étranger, est l'objet de poursuites; on séquestre ses biens, etc., etc.

Dans tous ces cas, il faudrait engager la procédure de régularisation prévue par l'article 18; elle exigerait, le cas échéant, quatre mois dès le moment où le vice a surgi. En temps de pais, on arriverait sans doute et sans grave inconvénient a redresser la situation dans les délais prescrits.

Mais que de soucis pour les organes de surveillance et que de complications administratives! Si la guerre survient avant le rétablissement de l'état conforme ou pendant la procédure de régularisation, les choses n'iraient pas facilement; le navire serait probablement séquestré eil attendant des preuves qui, peut-être, ne seront pas jugées suffisantes; les belligérants sont naturellement susceptibles et méfiants; le navire serait immobilisé pendant des mois, au détriment de nos intérêts immédiats.

Même si le propriétaire est resté en Suisse, des difficultés peuvent se produire ; songeons au cas où les héritiers ne seraient pas rapidement déterminés, au cas de bénéfice d'inventaire, à la répudiation de la succession par les héritiers ou par l'un d'eux, à la liquidation officielle ... On le voit, si nous admettions les personnes physiques comme propriétaires d'un navire suisse, nous irions au devant de bien des difficultés.

Or, celui qui entend posséder un navire doit en avoir les moyens; il les a également pour créer une société anonyme suisse, dont il sera peut-être l'unique actionnaire ; mais alors, le propriétaire -- la société, qui ne saurait vagabonder -- conservera son caractère suisse indépendamment du sort personnel de cet actionnaire; même sa mort n'affectera pas la propriété suisse du navire. Seul le transfert des actions sera en cause, et l'autorité exigera que ce transfert se fasse à des personnes remplissant les conditions posées par la loi.

Le même raisonnement s'applique, avec d'autant plus de force qu'il y a davantage de personnes physiques en jeu, aux sociétés en nom collectif, en commandite et en commandite par actions, ainsi qu'aux sociétés à responsabilité limitée.

Partant de là, nous vous proposons de ne mettre au bénéfice du pavillon suisse que les navires appartenant à la Confédération, aux cantons, à d'autres corporations et établissements de droit public, ainsi qu'à
des sociétés anonymes et à des sociétés coopératives suisses, dont le capital se trouve entièrement entre des mains suisses.

Les sociétés anonymes et les sociétés coopératives présentent l'avantage d'avoir un domicile fixe. Elles ne peuvent se déplacer que dans l'intérieur du pays et que sous réserve de l'accomplissement de formalités diverses.

Si elles meurent -- par dissolution ou par exécution forcée -- leur disparition est précédée d'une longue agonie qui permettra à l'autorité compétente de prendre en temps opportun toutes mesures utiles.

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S'agissant des corporations et établissements de droit public, nous n'avons formulé aucune condition ; nous ne voyons pas comment on pourrait contester la nationalité des navires qui leur appartiennent. Pratiquement, la lettre a de l'article 15 vise la Confédération et des circonstances analogues à celles des années 1941 et suivantes, un service de l'administration fédérale étant chargé de pourvoir au ravitaillement du pays ; mais on peut envisager le cas où une commune, un groupement de communes se procureraient un navire pour l'importation du charbon destiné à leurs usines, le cas d'un établissement officiel d'enseignement qui voudrait disposer d'un navire pour des recherches scientifiques, etc.

Sous lettre &, nous avons posé les conditions rigides que les sociétés de droit privé doivent remplir pour que leurs navires puissent être enregistrés.

On s'est demandé si le système auquel nous nous sommes arrêtés était conciliable avec la liberté du commerce et de l'industrie garantie par la constitution. Nous pouvons répondre affirmativement, en invoquant notamment un précédent d'importance: l'assurance privée; un particulier, une société en nom collectif, en commandite, en commandite par actions ou à responsabilité limitée ne peuvent pas s'engager dans les opérations soumises au contrôle officiel. Un privilège existe en faveur des sociétés anonymes ou mutuelles ou d'entreprises qui peuvent, pratiquement, leur être assimilées; on dira que ces restrictions ont été introduites dans l'intérêt général et dans celui des assurés. A plus forte raison, nous semble-t-il, on doit recourir à ce genre de limitations dans un domaine où l'intérêt du pays (nationalité du navire, sincérité du pavillon, neutralité, etc.) est en jeu.

Nous n'avons pas exclu absolument les associations et les fondations, encore que l'arrêté n'ait pas prévu ces catégories de personnes morales; nous y reviendrons en commentant l'article 24, Article 16. Il ne suffit pas que le navire appartienne à une personne morale suisse. Il faut encore que celle-ci ne recouvre ou dissimule aucun intérêt étranger; la propriété doit être indiscutablement suisse. L'article 16 pose le principe que les fonds engagés dans le navire doivent être intégralement suisses.

La société anonyme et la société coopérative doivent avoir des fonds propres -- en capital
social et en réserves -- proportionnés à l'importance des valeurs en jeu; il serait choquant, par exemple, de voir une société anonyme, au capital de cinquante mille francs, propriétaire de navires valant des millions ; nous vous proposons d'exiger, en fonds propres, au moins vingt-cinq pour cent de la valeur marchande du navire à enregistrer et, en outre -- pour permettre à la société de tenir compte des amortissements sur les navires -- le quart de la valeur comptable des autres navires déjà enregistrés à son nom. Les autres fonds placés dans l'entreprise --

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emprunts hypothécaires ou chirographaires, obligations, crédits bancaires, etc. -- doivent également être d'origine suisse. Toutefois, tenant compte des voeux de certains milieux intéressés, nous avons admis que, dans des cas exceptionnels (plus particulièrement lors de la construction du bâtiment ou de la réparation d'un navire suisse), on pourrait admettre des créances en faveur d'étrangers (par ex., en faveur de chantiers de construction) jusqu'à concurrence de vingt pour cent de la valeur marchande du navire. Aux termes de l'article 23, lettre d, la société qui entend demander le bénéfice de cette dérogation doit établir qu'à première réquisition de l'autorité compétente, la créance étrangère sera cédée à un créancier de caractère indiscutablement suisse.

Le dernier alinéa de l'article 16 renforce encore les précautions que nous vous proposons de prendre pour mettre notre pavillon à l'abri de toute discussion; il ne suffirait pas de prescrire que les actionnaires ou les associés de la société coopérative fussent suisses; pour écarter le risque de camouflage, il faut encore prévoir que les sociétés commerciales, les sociétés coopératives, les associations ou fondations qui seraient actionnaires ou associés dans l'entreprise propriétaire du navire fussent, elles aussi, indiscutablement suisses; il est clair qu'une banque ou une entreprise commerciale, dont les actions sont dans une proportion raisonnable entre les mains d'étrangers, peuvent détenir des actions ou des parts sociales de la société propriétaire du navire. Le caractère indiscutablement suisse de ces personnes morales ou autres sociétés commerciales est affaire d'appréciation; en cas de litige à ce propos, la décision appartiendrait au Conseil fédéral (art. 11, 1er al.).

Les articles 15 et 16 forment un tout; nous croyons avoir formulé toutes les conditions imaginables pour que la sincérité de notre pavillon ne puisse jamais être mise en doute, tout en accordant aux entreprises privées le droit subjectif qu'il est désirable de leur concéder.

En bref, le principe de la concession, par le gouvernement, serait aboli ; les navires à l'égard desquels les conditions légales sont remplies pourraient être enregistrés ; le navire enregistré peut et doit, alors, arborer le pavillon suisse.

La propriété suisse du navire ne suffit pas; il
faut que celui qui l'exploite -- l'armateur -- s'il n'est pas lui-même le propriétaire, présente, en ce qui concerne sa nationalité, des garanties identiques à celles qu'on exige du propriétaire. Nous y reviendrons en vous présentant les articles 34 et 35.

Articles 17 et 18. Si les conditions relatives à la nationalité du propriétaire requérant sont remplies, l'office de la navigation établit un document qui sera annexé à la demande d'enregistrement (art. 22 et 23). Si elles cessaient de l'être, 1'« état conforme » devrait être rétabli sous peine d'immobilisation ou de radiation du navire (art. 18). Il se révèle, par exemple,

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qu'une société commerciale, actionnaire de la société propriétaire du navire, n'avait pas ou n'a plus le caractère indiscutablement suisse exigé par la loi; cet actionnaire doit être exclu dans les trente jours, sinon l'office de la navigation fera retirer la lettre de mer par les soins du premier consulat à même d'agir; le navire, encore au bénéfice du pavillon, se trouvera immobilisé. Si, dans les trois mois, à compter de l'intervention de l'office, l'état conforme n'était pas rétabli, par le transfert des actions que cette société commerciale détenait à un ressortissant suisse ou à une personne morale de caractère indiscutablement suisse, le navire serait radié, cela sans préjudice de l'application des peines prévues aux articles 130 et suivants.

Même procédure, mêmes conséquences, si l'office de la navigation constatait le camouflage d'un intérêt étranger ou si, à la suite du décès d'un actionnaire de la société propriétaire, les actions n'étaient pas transférées dans les délais utiles, soit « proprio motu », soit sur l'injonction de l'office, à une ou à des personnes admises en vertu des statuts, car les statuts de la société propriétaire ou de l'entreprise d'armement doivent contenir des limitations dans le sens de la loi (art. 15, lettre b). L'article 18 est conçu en termes tels que les conséquences et sanctions, civiles ou pénales, pourront et devront suivre chaque fois que l'office de la navigation aura constaté que la volonté du législateur n'a pas été strictement observée.

"L'article 19 correspond à l'article 27 de l'arrêté, et l'article, 20 le complète, en exigeant que les conditions posées pour l'admission à la navigation soient constamment remplies.

Article 21. La commission avait envisagé d'imposer aux navires suisses des noms tirés de l'histoire ou de la géographie suisses, comme c'est en général le cas actuellement; elle est revenue elle-même à une règle plus souple; mais la liberté de l'armateur ne doit pas être totale; la dénomination serait donc soumise à l'approbation de l'autorité.

Les articles 22 et 23 correspondent, compte tenu des changements systématiques (abandon du régime de la concession), aux articles 16 et 17 de l'arrêté. Sous lettre d de l'article 23---disposition nouvelle --·, le projet exige que la créance étrangère, quelle que soit sa nature, qui aurait été
tolérée en vertu de l'article 16, 2e alinéa, puisse être cédée, à première réquisition de l'office de la navigation, à un créancier suisse.

Article 24. L'arrêté, qui ne visait que la navigation marchande, n'a pas fait de place (art. 6) aux fondations et aux associations. Néanmoins, le Conseil fédéral mit au bénéfice du pavillon les navires que la fondation créée par le comité international de la Croix-Rouge avait acquis et armés.

Nous devons maintenir, en faveur de cette institution humanitaire, la faculté d'exploiter ses navires sous pavillon suisse, bien que, pas plus qu'elle n'aurait pu le faire naguère, elle ne puisse remplir, dans l'avenir, les conditions strictes posées aux articles 15 et 16. Nous pouvons envisager aussi

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le cas d'une société de sciences naturelles ou d'une institution philantropique (une «mission » par ex.) qui voudraient disposer de navires pour l'accomplissement des tâches qu'elles se sont assignées. II est possible de tenir compte de ces éventualités, si problématiques qu'elles puissent paraître. Etant donné que, s'agissant de fondations ou d'associations, les limitations des articles 15 et 16 ne pourraient que rarement être strictement observées, nous avons adopté la formule souple de l'article 24.

Article 25. Comme nous l'avons dit dans l'introduction, la navigation de plaisance sous pavillon suisse ne jouit pas d'une sympathie unanime.

Ce sont les milieux de l'économie, surtout, qui ont formulé des réserves.

On craint des conséquences désagréables, nuisibles à la considération dont notre pavillon doit être l'objet, conséquences qui pourraient résulter, en temps de crise surtout, d'une navigation malaisément contrôlable. On a fait état de cas où des yachts -- étrangers -- ont été utilisés pour la contrebande et pour l'espionnage. D'un autre côté, les propriétaires suisses de bateaux de plaisance comprennent difficilement que le bénéfice du pavillon national leur soit refusé, ce qui les contraint à solliciter un pavillon étranger; or, la plupart des Etats maritimes n'accordent leur pavillon qu'à leurs propres ressortissants. Nous vous proposons de laisser la porte entr'ouverte.

Chapitre H

Droits réels Nous avons repris dans son ensemble, mais en la simplifiant et en la précisant sur plusieurs points, la réglementation introduite par l'arrêté.

Rappelons donc brièvement que cette réglementation se fonde essentiellement sur le régime prévu pour les bateaux de la navigation intérieure par la loi du 28 septembre 1923, laquelle renvoie elle-même aux dispositions du code civil sur le registre foncier.

Article 26. Ce premier article formule le principe de notre réglementation: en renvoyant à la législation fédérale sur le registre des bateaux (car la loi du 28 septembre 1923 a, depuis lors, été complétée de textes accessoires), l'article rend donc applicables à la propriété et aux hypothèques sur les navires suisses, sous réserve des quelques règles particulières énoncées dans ce même chapitre II et dans la loi de 1923, les dispositions du code civil. Pour que la loi soit conforme à la pratique d'ores et déjà suivie, la propriété et l'hypothèque sont désormais les seuls droits réels prévus, à l'exclusion notamment de l'usufruit. Les hypothèques au porteur sunL expressément exclues comme incompatibles avec l'exigence du caractère indiscutablement suisse des créanciers-gagistes du propriétaire.

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Article 27. Selon l'empire de l'arrêté, la cessation de l'exploitation d'un navire sous pavillon suisse était, à la faveur du régime de la concession « à bien plaire », subordonnée à une autorisation du Conseil fédéral (arrêté, art. 9). En substance, cette condition d'autorisation permettait à l'administration, particulièrement en vue des difficultés d'approvisionnement du pays, d'empêcher la diminution du tonnage national et le passage intempestif de navires suisses sous pavillon étranger.

Il s'est agi, pour réserver au Conseil fédéral des possibilités équivalentes sous le régime plus libéral et moins arbitraire prévu par notre projet de loi, de mettre au point un mécanisme juridique offrant toutes les garanties voulues tant aux intéressés privés qu'à l'administration. Plusieurs solutions furent envisagées; ce n'est pas sans réticences que divers milieux, ayant pris l'habitude du régime arbitraire de l'article 9 de l'arrêté, ont fini par reconnaître que ce régime n'est pas compatible avec les règles fondamentales du droit civil suisse et ne saurait être perpétué par une loi qui vise à faire de la navigation maritime sous pavillon suisse une institution permanente, non plus une construction de fortune reposant sur l'exercice de pouvoirs extraordinaires.

L'institution, en faveur de la Confédération, d'un droit légal de préemption sur tout navire suisse par rapport à tout acquéreur étranger éventuel a, pour finir, rallié tous les suffrages. Elle offre en effet l'avantage de créer une situation juridique parfaitement claire en faveur de tous les intéressés, de leur donner à tous des garanties précises et de s'insérer, sans le dénaturer aucunement, dans le système général des droits réels suisses.

La procédure prévue au deuxième alinéa vise à empêcher que le Conseil fédéral ne soit privé de l'exercice de son droit de préemption par le fait accompli d'une vente déjà conclue, au moment de l'avis, en faveur d'un acheteur étranger; car, une fois sous pavillon étranger, le navire vendu ne pourrait être ramené sous pavillon suisse simplement parce qu'un droit de préemption n'aurait pas été exercé. Le délai de 10 jours peut paraître bref, niais les opérations de ce genre doivent se traiter très rapidement. La simulation d'une offre alléchante, soit pour décourager la Confédération de faire usage de son
droit de préemption, soit pour obtenir qu'elle achète le navire au prix fort, se trouve, d'autre part, réprimée pénalement par l'article 132. Si le Conseil fédéral décide d'user du droit de préemption, rien ne l'empêchera au surplus de faire établir par des experts, et compte tenu de l'offre étrangère d'achat, la valeur marchande du navire.

Ajoutons, à toutes fins utiles, que toute action du propriétaire suisse du navire contre la Confédération, fondée sur l'exercice par elle de son droit de préemption devra, en vertu de l'article 41 de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943, être portée devant le Tribunal fédéral, siégeant comme juridiction unique en matière civile.

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Artide 28 et 29, Les articles 28 et 29 reprennent la substance de l'article 26 de l'arrêté ; le texte a été divisé en deux articles pour le rendre plus facilement assimilable.

Les privilèges dont il est question et qui sont prévus par la convention internationale du 10 avril 1926 représentent une institution familière aux droits des pays latins, mais étrangère au droit suisse. Ainsi que c'était déjà le cas sous le régime de l'arrêté, ces privilèges sont donc transformés, aux fins du droit suisse, en hypothèques légales sans inscription, primant toutes les autres.

Indiquons ici que, pour assurer la reconnaissance internationale des droits réels enregistrés sur les navires suisses, la Suisse aurait intérêt à adhérer formellement à ladite convention internationale du 10 avril 1926 pour l'unification de certaines règles relatives aux privilèges et hypothèques maritimes.

Article 30. Ce dernier article du chapitre des droits réels permet de faire le départ exact entre les conséquences de droit public et international et celles de droit civil attachées à l'enregistrement et à la radiation des navires suisses. Il s'agit là d'un problème particulier au droit maritime et que la loi du 28 septembre 1923 ne touchait aucunement, puisque les bateaux de la navigation intérieure n'ont pas plus de pavillon suisse que les immeubles ancrés dans le sol.

Chapitre III

Lettre de mer Artichs 31, 32 et 33, II peut paraître surprenant, à première vue, que trois articles de notre projet de loi soient consacrés à un document dont l'importance est apparemment de pure forme et qui reste souvent d'autant plus mal compris que les documents correspondants des divers Etats maritimes diffèrent du tout au tout les uns des autres et ne nous offraient donc aucun modèle général.

La vérité, c'est que la lettre de mer (nous avons repris cette heureuse expression du professeur Haab) est d'une importance capitale comme constituant, du point de vue du droit maritime international, le titre juridique d'un navire suisse à battre le pavillon de notre pays, c'est-à-dire à naviguer. En fait, le droit même de naviguer est, en effet, pour tout navire donné, indissolublement lié à son droit à battre son pavillon national, ainsi qu'à l'obligation de le battre à l'exclusion de tout autre. Pour reprendre une image, qui n'est pas tout à fait exacte, mais qui résume usuellement une

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argumentation juridique solidement établie, on peut dire que la lettre de mer d'un navire suisse a pour celui-ci toute l'importance que son passeport a pour un citoyen suisse voyageant à l'étranger, S'agissant d'un document aussi important et dont ni la nature, ni les conséquences ne doivent être sujettes, eu égard au droit maritime international, à des modifications d'opportunité, on comprendra donc que nous avons jugé à propos de fixer dans la loi ellemême tous les détails utiles concernant la nature, la portée, le contenu, l'établissement, la prorogation, la modification, le renouvellement et la restitution de la lettre de mer.

Eu égard à diverses dispositions légales, notamment à celles de l'article 455 du code des obligations, le 4e alinéa de notre article 31 précise utilement que l'admission à la navigation et la délivrance de la lettre de mer ne constituent pas concession d'industrie par l'autorité.

Titre III DE L'EXERCICE DE LA NAVIGATION Nous avons groupé sous ce titre, pris dans un sens plus restreint et plus précis que ce n'était le cas au chapitre IV de l'arrêté, les règles qui, sur deux plans superposés l'un à l'autre, doivent régir l'exploitation, la conduite et la manoeuvre du navire. Un premier chapitre traite en effet de l'armateur : c'est le plan supérieur; le second chapitre traite du capitaine: c'est le plan inférieur.

Chapitre premier

De l'armateur Article 34, Cet article constitue, par la définition qu'il donne de l'armateur, la clé de voûte de notre projet de loi. En substance, l'armateur est caractérisé par la possession, au sens même de notre droit commun (code civil, art. 919, 1er al.) du navire. L'adjonction, à ce critère, de la possession, de la notion de « contrôle » constituerait certainement un pléonasme si cette notion n'avait pas, du point de vue du droit civil comparé, le mérite d'être commune à des systèmes législatifs aussi différents que les systèmes anglosaxons et latins --· alors que ces systèmes s'écartent considérablement en ce qui concerne la possession -- et d'assurer ainsi la validité, sur le plan international, de notre idée suisse de la possession appliquée à des navires maritimes.

Précisons aussi dès maintenant, pour la clarté de l'ensemble du titre III. que dans les limites de cette possession du navire qui, sur le plan supérieur, caractérise l'armateur, le capitaine en aura, sur le plan inférieur, une simple détention subordonnée.

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Le 2e alinéa fournit la description de la fonction d'armement qui appartient par nature à celui qui tient le navire en sa possession. La réserve « sans préjudice de la compétence légale » vise un ensemble d'attributions du capitaine qui lui appartiennent nécessairement en propre et que l'armateur n'est donc libre ni d'étendre, ni de restreindre.

Article 35. L'article 34 définit expressément l'armateur du navire suisse, car il importe que notre loi ne puisse être interprétée comme fournissant une définition générale de l'armateur du point de vue du droit civil telle qu'on pût éventuellement prétendre l'appliquer à l'armateur (peut-être citoyen suisse) d'un navire sous pavillon étranger. Cependant, cet article 34 a bien pour raison d'être et pour objet de caractériser la fonction d'armement selon le droit privé.

L'article 35, au bénéfice de la définition fourme par l'article 34, pose les exigences de nationalité auxquelles doit satisfaire l'armateur d'un navire suisse. Considérant que, jusqu'à présent, les propriétaires des navires suisses en ont généralement été en même temps les armateurs, nous avons posé ces exigences à propos des conditions de propriété (art. 15 à 18).

Il pouvait arriver que par un contrat de location ou de sous-location, la possession du navire passe à. un armateur qui n'est plus propriétaire, c'est là un fait qui pourrait devenir beaucoup plue fréquent si la navigation maritime sous pavillon suisse connaît l'essor qu'on peut lui souhaiter.

Aussi nous-a-t-il suffi de prévoir à l'article 35 que l'armateur, « qu'il soit ou non propriétaire du navire », doit en tout temps remplir les conditions fixées pour le propriétaire.

Le 2° alinéa, certes superflu du point de vue du droit interne, a la même raison d'être que le renvoi à la notion de « contrôle » qui complète le critère de la possession : il est essentiel, pour accréditer le pavillon suisse à l'étranger et rendre insoupçonnable le caractère suisse du contrôle exercé par l'armateur, que le texte de notre loi permette d'affirmer que l'exploitation d'un navire sous pavillon suisse est bien dirigée de notre pays.

La sanction prévue au 3e alinéa doit permettre de suspendre la navigation de tout navire suisse dont l'armateur aura tourné les exigences de nationalité; elle est, en revanche, conçue de façon à ne pas entraîner le
retrait du pavillon suisse et, par là, une diminution du tonnage national.

Le retrait de la lettre de mer empêchera pratiquement le navire de naviguer, et ce chômage constituera déjà, à lui seul, sur l'armateur (et sur le propriétaire), une pression économique telle qu'une régularisation devra normalement être recherchée au plus vite.

Artide. 3fì. Par son article 55, l'arrêté s'est référé à la convention internationale du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles concernant la limitation de la responsabilité dea propriétaires de navires, et il s'est borné à renvoyer au droit suisse des obligations en ce qui concerne les autres

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questions touchant la responsabilité extracontractuelle de l'armateur. En vertu de l'article 55 du code des obligations, l'armateur est responsable, comme n'importe quel autre chef d'entreprise, du dommage causé par son capitaine ou par ses marins dans l'accomplissement de leurs fonctions, à moins qu'il ne prouve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances pour détourner le dommage ou que sa diligence n'eût pas empêché celui-ci de se produire. Ces moyens d'exception que le droit suisse met à la disposition de l'employeur ne répondent cependant pas aux besoins de la navigation maritime. La responsabilité de l'armateur a eu, de tout temps, un développement particulier; elle est l'exemple le plus ancien d'une responsabilité causale du fait de l'exploitation et des risques courus sans moyens spéciaux d'exception libératoire, mais d'autre part restreinte aux biens confiés par l'armateur au capitaine. La responsabilité causale rigoureuse et la limitation de cette responsabilité sont inséparables en droit maritime, à la différence du droit civil ordinaire, où la responsabilité du chef d'entreprise s'est, il est vrai, développée également dans le sens de la responsabilité causale, mais avec divers moyens d'exception. Du point de vue historique, cela s'explique par le fait que la responsabilité du chef d'entreprise, issue de l'idée de culpabilité, a évolué de telle manière qu'on est arrivé à présumer, chez celui-ci, l'existence d'une faute dans le choix et la surveillance de ses auxiliaires et la négligence présumée de tels devoirs de diligence est devenue la raison juridique pour justifier cette responsabilité du fait de la faute d'un tiers.

En Allemagne, la responsabilité du chef d'entreprise repose encore à présent sur l'idée de la culpabilité avec renversement du fardeau de la preuve, mais la responsabilité de l'armateur s'est développée dans le sens d'une stricte responsabilité causale, car si l'on admettait des exceptions tendant à renverser la présomption d'un manque de diligence, cela provoquerait des cas fâcheux de libération de la responsabilité. La mise en oeuvre des exceptions libératoires du droit suisse étant soumise aux mêmes critères que celle des exculpations du droit allemand, et cela pour les mêmes motifs, l'article 55 du code des obligations n'est pas suffisant pour
servir de fondement à la responsabilité extracontractuelle de l'armateur suisse.

Dans beaucoup, si ce n'est dans tous les sinistres de caractère nautique, l'armateur pourrait fournir la preuve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances, dans le choix, la direction et la surveillance de l'équipage. S'agissant du capitaine et des officiers du bord, l'armateur en est réduit à les choisir dans le cercle restreint des personnes qui prouvent leur qualité par des certificats de capacité émanant de l'Etat. D'autre part, le recrutement de l'équipage incombe au capitaine (art, 42). Une faute dans le choix est donc exclue, et il en est ainsi, à plus forte raison, d'une violation du devoir de surveillance, du moment que le capitaine répond seul de la conduite nautique du navire (art. 40). De même, il est aisé de prouver, en

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matière de navigation maritime, que toute la diligence requise n'aurait pas empêché le dommage de se produire.

C'est pourquoi, dans tous les droits maritimes, l'armateur répond absolument de ses auxiliaires. Adoptant ce principe, le projet prévoit lui aussi, à l'article 36, une responsabilité causale de l'armateur suisse qui se rapproche, clans sa forme, des responsabilités connues en droit suisse, encourues du fait de l'entreprise et des risques (loi sur la responsabilité civile des entreprises de chemins de fer et de bateaux à vapeur et des postes et loi sur la circulation des véhicules automobiles et des cycles) et aussi pour les faits éliminant le rapport de cause à effet comme élément déterminant, tant en ce qui concerne la responsabilité de l'armateur que les autres responsabilités causales du droit suisse. La justification de cette responsabilité de l'armateur ne réside pas dans le manque de diligence, mais bien dans l'exploitation du navire et dans les risques qui y sont inhérents.

Le recours de l'armateur contre l'auxiliaire responsable est conforme au droit civil. Le droit maritime appelle toutefois une disposition spéciale visant le propriétaire qui a loué à un armateur un navire non équipé et non armé. Les droits de recours de cet armateur sont restreints, car il répond lui-même de la navigabilité du navire.

La responsabilité extracontractuelle de l'armateur est, en cas d'abordage, appréciée selon des règles particulières (art. 107).

Article 37. Depuis le moyen âge, c'est un principe reconnu du droit maritime que l'armateur n'est responsable, à raison du dommage causé par le capitaine et par l'équipage, que jusqu'à concurrence des biens qu'il a risqués en mer, de sorte que la fortune de l'armateur se divise en fortune de mer et fortune de terre, avec cette conséquence que les créanciers dits « maritimes » ne peuvent s'en prendre qu'à la fortune de mer. Universellement admise, cette limitation, de la responsabilité de l'armateur est conseillée par le caractère extraordinaire des risques encourus ; en effet, l'armateur doit confier à un capitaine son navire, qui est son capital d'exploitation le plus précieux, et, sans pouvoir être exonéré de sa responsabilité, il doit supporter les conséquences des fautes commises par son équipage, bien qu'il ne soit pas en mesure de surveiller ce
dernier lui-même. Selon les circonstances, l'armateur est exposé à des réclamations dont le montant peut excéder de beaucoup ses propres capacités. En particulier, l'abordage, ce danger constant de la navigation maritime, peut entraîner pour l'armateur des conséquences qu'on ne peut lui demander de supporter dans tous les cas, surtout s'il doit s'assurer l'aide d'un pilote qui lui est imposé par l'Etat. De même que dans le cas d'une société anonyme la responsabilité n'excède pas le capital social, la responsabilité de l'armateur est limitée à son capital d'exploitation, c'est-à-dire à son navire. C'est pourquoi, tout comme l'arrêté, le projet adopte le principe de la responsabilité limitée de l'armateur, ce qui se comprend aisément, car, s'il en était autrement, les Feuille fédérale, 104e année. Vol. I.

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entreprises suisses de navigation maritime seraient mises en état d'infériorité par rapport aux entreprises étrangères. Les raisons qui justifient la limitation de la responsabilité de l'armateur ont cependant pour conséquence que celui-ci ne peut invoquer ce bienfait de la loi lorsqu'une faute propre lui est imputable. Selon la pratique généralement admise dans les pays maritimes, on entend par faute propre non seulement la faute personnelle de l'armateur qui serait impossible dans le cas de personnes morales, mais encore la faute des employés de l'entreprise d'armement qui en assurent la direction, qu'ils soient ou non des organes de la société, car on tient compte, sur ce point, plus que de leurs qualités officielles, des attributions effectives de ces employés dans l'exploitation du navire. La faute propre de l'armateur doit être prouvée par le lésé et le projet reprend ce principe, dûment reconnu en droit maritime.

L'idée de cette limitation de responsabilité a été diversement réalisée par la législation maritime des divers pays, tant en ce qui concerne le système de responsabilité qu'en ce qui a trait aux créances affectées par cette limitation. Dans rémunération de ces créances dites «maritimes», le projet se conforme aux principes modernes du droit maritime tels qu'ils sont consacrés dans les législations étrangères les plus récentes. Il limite avant tout le droit à des dommages-intérêts découlant de la responsabilité causale que l'armateur encourt du fait de l'exploitation, en particulier les créances qui résultent d'un abordage ou d'autres accidents de la navigation.

Il restreint, en outre, les demandes d'indemnité pour le dommage subi par les marchandises chargées à bord. Les créances résultant de l'assistance ou du sauvetage et la contribution de l'armateur à l'avarie commune sont, en outre, des créances maritimes qui, par définition, ne peuvent excéder la valeur du navire sauvé. En revanche, les créances ayant leur source dans des contrats conclus par le capitaine en vertu de ses pouvoirs légaux ne subissent aucune limitation.

Les systèmes que le droit maritime connaît pour déterminer l'étendue de la responsabilité sont le système de l'abandon, celui de l'exécution, celui de l'abandon en valeur et celui de la responsabilité forfaitaire. La convention de Bruxelles, incorporée au
droit suisse en vigueur jusqu'à présent, a adopté un système d'option, une combinaison des deux systèmes de l'abandon en valeur et de la responsabilité forfaitaire. Contrairement au droit actuel, le projet renonce à ce régime de la convention internationale du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles concernant la limitation de la responsabilité des propriétaires de navires de mer; cette convention est une oeuvre conçue comme un compromis entre divers droits nationaux; elle aurait dû conduire à une unification de droit dans ce domaine, mais elle s'est révélée si compliquée et si contradictoire que son application pratique s'en trouve pour ainsi dire impossible. La Belgique mise à part, peu d'Etats ont adhéré à cette convention ou l'ont ratifiée. Comme les

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autorités et les armateurs suisses ne disposent d'aucune expérience pour mettre en pratique la limitation de la responsabilité de l'armateur, il ne paraît pas opportun que la Suisse déclare partie intégrante de son droit maritime un système de responsabilité disparate et compliqué, influencé par des droits nationaux différents. Par souci de clarté, d'intelligibilité et de simplicité, ainsi que pour des considérations d'ordre pratique, le projet a adopté plutôt l'un des systèmes de responsabilité traditionnels et il l'a incorporé dans le droit suisse. En choisissant ce système, il a laissé de côté celui de l'abandon et celui de l'exécution. D'après le système de l'abandon du code de commerce français, le propriétaire du navire est indéfiniment responsable, mais il peut se libérer des créances maritimes en abandonnant le navire et le fret; il en résulte que les créanciers n'ont affaire qu'à une masse illusoire si le navire a coulé. De même, le système allemand de l'exécution est fondé sur une responsabilité purement réelle et les créanciers maritimes ne peuvent réaliser leurs prétentions que sur la fortune de mer de l'armateur. Ces deux systèmes sont surannés et ne répondent plus aux besoins de la navigation maritime moderne. Le système américain de l'abandon en valeur est plus moderne; l'armateur n'est responsable que jusqu'à concurrence de la valeur du navire et du fret à la fin du voyage.

Le nouveau droit maritime italien connaît, lui aussi, cet abandon en valeur, mais avec cette restriction que la valeur pour laquelle l'armateur est responsable doit s'élever, au moins, à un cinquième, et, au plus, à deux cinquièmes de la valeur du navire au début du voyage. La responsabilité forfaitaire anglaise est différente; d'après son principe, l'armateur est personnellement responsable, mais seulement jusqu'à concurrence de la valeur du navire, cette valeur étant fixée non pas dans chaque cas, mais une fois pour toutes, à forfait, à raison de 8 livres sterling par tonneau de jauge brute du navire. Cette responsabilité forfaitaire ne dépend pas de la valeur effective du navire après l'accident ou à la fin du voyage et encore moins du fait que ce bâtiment existe encore ou qu'il a coulé. S'agissant de choisir entre l'abandon en valeur et la responsabilité forfaitaire, c'est à cette dernière qu'il faut, en
tout cas, donner la préférence, vu les conditions particulières de la Suisse, car ainsi l'estimation de la valeur du navire, qui d'ailleurs a lieu hors du pays, n'est pas déterminante.

L'étendue de la responsabilité y est en effet fixée par un simple calcul et l'armateur, connaissant son risque d'avance, peut s'assurer entièrement contre lui. La responsabilité de l'armateur est indépendante du sort du navire, ce qui est avantageux pour les créanciers et contrebalance largement l'inconvénient d'une taxation uniforme et générale. Il est vrai que, selon l'âge et l'état du navire, le montant pour lequel l'armateur est resposable peut être supérieur ou inférieur à la valeur effective du navire après l'accident. Mais cela constitue en somme une prime aux navires de valeur et en bon état, ce qui est juste et opportun, car ces navires courent de moins grands risques d'exploitation quand ils sont bien entretenus. Ce n'est pas.

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par hasard que les Pays-Bas, qui ont une expérience déjà ancienne dans la navigation maritime, ont adopté la responsabilité forfaitaire lors de la revision de leur droit maritime, en 1927, et limitent la responsabilité de l'armateur à 50 florins par mètre cube de capacité du navire. Il est donc indiqué, pour les mêmes motifs, que ce système de responsabilité soit aussi introduit en. Suisse.

Pour fixer le montant forfaitaire qui sert de base à la responsabilité limitée, le projet n'a pas tenu compte purement et simplement des mesures étrangères. La Grande-Bretagne connaît encore aujourd'hui la limitation à 8 livres par tonneau; les Pays-Bas limitent la responsabilité à 50 florins, la Belgique à 1400 francs belges, la Norvège et la Suède a 145 couronnes.

Tous ces chiffres sont dépassés par suite de la dévaluation de la monnaie.

Quant au projet, il tient compte avant tout de la valeur moyenne par tonneau de jauge brute, calculée d'après le tonnage global de la flotte maritime suisse, et il se fonde sur le chiffre ainsi obtenu. En prenant ces éléments en considération, un montant de 500 francs suisses se révèle une unité de paiement juste et convenable. Ce montant, multiplié par le nombre de tonneaux de jauge brute d'un navire, donne la somme jusqu'à concurrence de laquelle l'armateur est responsable; cette somme est due dans tous les cas, indépendamment du sort du navire. Le montant forfaitaire dont il s'agit est plus élevé que celui que prévoient les droits maritimes étrangers, ce qui se justifie par le fait que, comme le droit néerlandais, le projet ne prévoit aucune somme supplémentaire pour les dommages aux personnes, contrairement au système anglais où un montant supplémentaire de 7 livres par tonneau est dû en cas de lésions corporelles. Vu les conditions particulières de la Suisse, il serait peu opportun de faire une distinction entre dommages personnels et réels et d'instituer une limite de responsabilité variant selon la nature du dommage, d'autant moins que la limitation de la responsabilité ne sera que rarement effectuée selon le droit suisse. D'un autre côté, le système adopté par le projet a le grand avantage de la responsabilité forfaitaire par rapport à la détermination dans le temps, en ce sens que le montant total auquel correspond cette responsabilité est renouvelé après chaque
accident et qu'il ne constitue pas un chiffre global poiir tout un voyage.

Le projet prévient aussi, dans une large mesure, le sérieux inconvénient résultant du fait que la valeur de la monnaie et celle des navires sont soumises à des fluctuations ; il prévoit la possibilité d'adapter immédiatement le montant maximum, par voie d'ordonnance, aux changements de cet ordre qui peuvent se produire. Cette faculté d'adaptation n'existe pas dans les droits étrangers, ce qui fait qu'en Grande-Bretagne la limitation de base à 8 livres est la même aujourd'hui qu'il y a cinquante ans.

Un transporteur qui n'arme pas lui-même le navire répondrait indéfiniment des dommages subis par la cargaison, mais il ne pourrait se retourner

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contre l'armateur responsable de l'exploitation du navire que jusqu'à concurrence du montant auquel la responsabilité de ce dernier est limitée par la loi. Pour exclure une telle injustice, le projet, s'inspirant en cela de modèles étrangers, met le transporteur sur le même pied que l'armateur, en ce qui concerne l'étendue de sa responsabilité.

Article 38. La mise à exécution, dans chaque cas, de la limitation de la responsabilité de l'armateur revient à une faillite distincte, ayant pour objet la fortune de mer de celui-ci. La valeur du navire y forme la masse active et les créances maritimes constituent la masse passive. Les créances participent, selon leur rang, à la répartition des biens garantissant la responsabilité. Les créances non maritimes ne sont pas prises en considération, parce qu'elles ne bénéficient pas d'un privilège selon la convention internationale du 10 avril 1926 pour l'unification de certaines règles relatives aux privilèges et hypothèques maritimes (art. 28).

Comme des créances peuvent, à tout moment, naître contre l'armateur, il est nécessaire de délimiter dans le temps les masses active et passive.

La responsabilité forfaitaire a ceci de particulier que l'accident est considéré comme unité de responsabilité, tandis que, dans les autres systèmes, c'est le voyage qui compte comme tel et toutes les créances nées au cours d'un seul et même voyage sont colloquées dans le même montant global de responsabilité.

En revanche, selon le système de responsabilité forfaitaire, seules entrent en concurrence les créances nées d'un même accident. Si plusieurs accidents ont heu pendant un même voyage, il se constitue pour chacun d'eux une nouvelle masse active dont le montant maximum est conforme à la loi, à moins que le second accident ne soit une conséquence du premier. Toutefois, pour prévenir toute incertitude, le projet établit la présomption qu'il y a eu un seul et même sinistre au cours d'un voyage ; c'est une règle reconnue dans les droits maritimes étrangers.

S'il n'y a -- le cas sera rare -- que des créances contractuelles, en particulier des dommages-intérêts résultant de contrats de transport, et si le dommage ne peut être attribué à aucun accident déterminé, la responsabilité forfaitaire se rapporte, faute de tout autre critère approprié, au voyage pris dans son ensemble.
Le projet prévoit une ordonnance pour fixer la procédure, laquelle devrait, de même, être réglée si la loi avait intégré la convention internationale, car les dispositions de procédure applicables à la faillite sont ici insuffisantes. Ces prescriptions spéciales en matière de procédure viseront à assurer une détermination rapide du montant maximum de responsabilité en cas de contestation et devront régir l'établissement de l'état de collocation des créances selon leur montant et leur rang. Pour la production des créances, il y aura lieu de fixer des délais avec effet péremptoire.

294 Chapitre II

Du capitaine Sur le plan inférieur, l'exploitation, la conduite et la manoeuvre du navire sont l'affaire du capitaine, qui en a, pour le compte de l'armateur, la détention subordonnée. La figure juridique du capitaine, dégagée dès la plus haute antiquité, et qui se différencie si nettement de celle de tous les autres personnages envisagés par le droit, mérite, au moment d'être consacrée à titre permanent dans le droit positif suisse, d'y être tracée avec clarté. Nous nous sommes donc efforcés, dans les neuf articles qui composent ce chapitre, de distribuer les différentes attributions du capitaine dans un ordre rationnel tel que la lecture de ces articles fasse immédiatement comprendre l'importance, la gradation et la variété des fonctions de ce personnage.

Article 39. Ce premier article tend à résoudre les problèmes relatifs à l'attribution du commandement du navire, ce commandement étant, par définition, le caractère distinctif du capitaine au sens technique où notre projet reprend cette appellation.

Le 1er alinéa indique d'entrée de cause le rapport d'emploi qui lie le capitaine à l'armateur. L'exercice du commandement, par le capitaine lui-même ou, le cas échéant, par celui qui doit le remplacer, fait l'objet des 2e et 3e alinéas. Le 4e alinéa consacre à des fins subsidiaires un principe général en posant que l'exercice effectif du commandement et les obligations et responsabilités qui en découlent sont indissolublement liés, de telle façon qu'aucune circonstance exceptionnelle, si éloignée soit-elle du cours normal des choses, ne puisse jamais engendrer d'incertitude juridique à cet égard.

Article 40. Consacré à la conduite nautique du navire, c'est-à-dire à sa gouverne technique dans l'élément liquide, cet article fournit aussi la formule générale de l'équilibre qui doit s'établir entre l'autorité et la responsabilité du capitaine. Le capitaine a toute l'autorité à bord; mais il n'en demeure pas moins rigoureusement soumis aux règles du droit qui, notamment sous la menace latente de ses responsabilités, s'imposent à lui dans l'exercice de son autorité.

Article, 41. La sécurité du voyage n'exige pas seulement une vigilance constante et des mesures régulières et normales (1er al.); elle exige aussi, le cas échéant, des mesures improvisées ou de caractère exceptionnel (2e al.). Il est
essentiel de rendre le capitaine juridiquement compétent pour prendre les unes et les autres, s'agissant d'ailleurs, ici aussi, d'une « compétence liée », c'est-à-dire tout à la fois d'un droit et d'une obligation, tout à la fois d'une autorité et d'une responsabilité.

Le 1er alinéa, tout en posant une règle générale, met utilement l'accent, par sa deuxième phrase, sur l'une des mesures ordinaires pratiquement les

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plus importantes: l'arrimage. Le 2e alinéa, qui, de même, pose un principe général, met l'accent, par sa deuxième phrase, sur l'obligation pour le capitaine, autant que faire se peut, de se concerter avec l'armateur.

Article 42. Nous avons groupé dans cet article le principe et le corrollaire : le principe est celui de l'autorité du capitaine sur toutes les personnes se trouvant à bord; le corollaire est celui de la liberté traditionnellement laissée au capitaine de composer son équipage à son gré. Une expérience séculaire, dont toutes les législations maritimes tiennent aujourd'hui compte, a en effet montré que l'autorité du capitaine n'a de chance d'être ce qu'elle doit être que si le capitaine est libre de choisir, dans toute la mesure, d'ailleurs souvent étroite, où les circonstances le permettent, la main-d'oeuvre à l'aide de laquelle il doit pourvoir à la navigation et, le cas échéant, maintenir l'ordre à bord.

Nous avons cependant cru bon de tempérer cette liberté du capitaine en prévoyant l'approbation de l'armateur. Cette disposition, dont l'application restera en un certain sens à la discrétion du capitaine lui-même, permettra cependant d'obtenir des capitaines de nos navires (qui resteront le plus souvent des étrangers) une attitude mieux en harmonie avec les intérêts suisses que cela n'a été parfois le cas jusqu'à présent.

Article 43. Cet article institue avec précision le mécanisme juridique par lequel la fonction d'armement, qui sur le plan supérieur est celle de l'armateur, se trouve exercée en pratique, sur le plan inférieur, par le capitaine.

Le 1er alinéa consacre une solution universellement suivie en reconnaissant au capitaine la représentation légale de l'armateur et en protégeant les tiers de bonne foi. L'exclusion de l'a.liénation du navire et de la constitution d'hypothèque par le capitaine, conseillée par le fait que la facilité et la rapidité des consultations à distance rendent aujourd'hui ces mesures pratiquement superflues, doit être expressément prévue.

Le 2e alinéa consacre la subordination du capitaine à l'armateur, dans les limites du rapport d'emploi qui lie le premier au second, pour tout ce qui concerne la conduite commerciale du navire.

Le 3e alinéa précise utilement que la représentation légale de l'armateur par le capitaine s'étend à la représentation
en justice jusqu'à désignation par l'armateur d'un autre mandataire. Il ne s'ensuit naturellement pas que le capitaine puisse faire office d'avocat devant des tribunaux étrangers, mais il s'ensuit bien que l'armateur est présent partout où son capitaine peut agir et comparaître.

Articles 44 et 45. Tout comme pour son commandement, les attributions d'état-civil visées à l'article 44 et celles qui sont prévues par l'article 45 pour le cas où un délit a été commis à bord appartiennent en propre au capitaine sans que son employeur, l'armateur, puisse ni les étendre, ni les restreindre.

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Les attributions du capitaine en matière de droit pénal couvrent les mesures inhérentes à une enquête de police. Cependant, le projet charge en même temps le capitaine de procéder à l'instruction préparatoire. La raison de cette contradiction réside dans le fait que les autorités du canton de Baie-Ville sont compétentes pour réprimer les délits commis à bord d'un navire suisse et que le code de procédure pénale de ce canton, applicable en l'espèce, n'autorise la mise en accusation d'une personne absente que si l'auteur a déjà été entendu sur l'objet de ladite accusation, au cours d'une instruction préparatoire. S'il n'en est pas ainsi, la procédure doit être provisoirement interrompue. S'agissant de délits commis en haute mer, une procédure par défaut sera inévitable et, pour rendre celle-ci possible, l'activité du capitaine doit consister non seulement en une enquête de police, mais encore en une instruction préparatoire au sens du code de procédure pénale de Baie-Ville. Il sera possible, ainsi, de condamner par contumace un délinquant qui aura pris la fuite après avoir été interrogé par le capitaine.

En outre, le capitaine ayant les attributions d'un juge d'instruction et étant chargé de diriger l'instruction préparatoire, il en résulte que la prescription est interrompue, en vertu de l'article 72 revisé du code pénal, par toute mesure d'instruction prise par le capitaine, ce qui ne serait pas le cas si celui-ci ne procédait qu'à une enquête de pouce.

Article 46. La conservation et la tenue des documents de bord constituent techniquement le moyen par lequel la responsabilité du capitaine, s'accumulant tout au cours de la navigation, s'enregistre au fur et à mesure de l'exercice de son autorité considérable. Il est d'autant plus important de les prévoir avec précision que, par elles, le capitarne témoigne comme qui dirait contre lui-même. C'est pourquoi le régime institué par l'article 46 ne doit pas être considéré comme une concession de plus faite au vice moderne de la paperasserie: la conservation et la tenue de documents complets et exacts n'est nulle part aussi nécessaire à la sécurité juridique qu'à bord d'un navire.

Article, 47. Ce dernier article établit enfin quelles doivent être les relations du capitaine avec les consulats de Suisse dans les ports étrangers.

Une certaine souplesse
est nécessaire, car des consulats suisses n'existent pas dans tous les ports. Le principe d'un contact immédiat n'en est cependant pas moins fermement posé; il est souligné par l'obligation, mise à la charge du capitaine, de tenir les papiers de bord à la disposition du consulat pendant l'escale. On ne peut en effet pas oublier que le capitaine, notamment par ses attributions d'état-civil et ses fonctions d'instruction, et d'une façon plus générale par la responsabilité qu'il a de la navigation et de l'ordre à bord, a incontestablement un certain caractère représentatif de la puissance publique suisse. Son contact avec le consulat de Suisse doit fournir à l'administration une occasion régulière de s'assurer que la navigation sous pavillon suisse s'exerce dans des conditions normales.

297 Titre IV

DE L'ÉQUIPAGE Chapitre premier

Dispositions générales Les rapports de service de l'équipage présentent un aspect très particulier. Ils affectent la personne du marin avec une intensité qui serait inconcevable dans toute autre relation de service entre employeur et employé. C'est pourquoi il n'est pas possible de se référer simplement aux dispositions du code des obligations sur le contrat de travail ; ces dispositions n'ont qu'une valeur subsidiaire, à défaut de prescriptions particulières de la loi maritime. Pour élaborer la législation du travail en mer, le projet s'inspire de l'arrêté du Conseil fédéral du 20 janvier 1942 concernant le contrat d'engagement des marins qui a été en vigueur jusqu'à présent, ainsi que des diverses conventions internationales concernant, le droit du travail des gens de mer et des recommandations du bureau international du travail.

L'élaboration des dispositions relatives à l'équipage a eu Heu avec le concours des organisations de travailleurs et d'employeurs, ainsi qu'avec celui de l'office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail et de l'office fédéral des assurances sociales.

Article 48. Cette disposition institue une terminologie uniforme.

L'équipage se compose du capitaine et des marins; ceux-ci sont des officiers ou des matelots. Lorsque la loi parle des membres de l'équipage, le capitaine est également visé. S'il est question des marins, la disposition s'applique aux officiers et aux matelots.

La situation particulière de la navigation maritime suisse exige que, dans l'intérêt du pays, un membre de l'équipage puisse être congédié en tout temps, sans indication de motifs. Cet empiétement de l'autorité dans les contrats de droit civil ne se justifie, cependant, que si la libre navigation d'un navire suisse doit être assurée en vue de l'approvisionnement du pays ou à des fins analogues et que cette navigation est mise en danger par la présence à bord d'un certain marin. L'intérêt du pays à la libre navigation du navire doit l'emporter sur les intérêts particuliers de l'armateur ou sur ceux du marin en cause. Une mesure de cet ordre- a cependant pour conséquence que la Confédération doit mettre ledit marin à l'abri de tout dommage, lorsqu'il est contraint d'abandonner sa place uniquement dans l'intérêt supérieur du pays. En revanche, si la révocation est motivée par la
personne du marin et que lui-même soit en faute, il perd ce droit d'être protégé dans ses intérêts, en vertu de la règle concernant la rupture du contrat d'engagement pour justes motifs. La décision à cet égard incombe au juge.

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Article 49. Cette disposition, qui a le caractère d'un programme, permet à la Confédération d'encourager l'instruction des marins suisses; en effet, si des difficultés internationales se produisent, il y aura certainement avantage à ce que les navires suisses aient des équipages comprenant avant tout des ressortissants suisses.

Article 50, Les exigences professionnelles pour le service à bord sont fixées d'après les conventions et les usages internationaux. La préoccupation déterminante est, ici, la sécurité de la navigation, de sorte que les prescriptions concernant cette matière sont une pierre de touche pour juger si un navire est équipé convenablement ou non. Les certificats de capacité nécessaires sont délivrés par l'office suisse de la navigation maritime; celui-ci peut aussi reconnaître comme valables et suffisants les certificats d'autres pays. De même, on tient compte, pour les officiers radiotélégraphistes, du certificat de capacité de la direction générale des postes, télégraphes et téléphones.

Article 51. En ce qui concerne les prescriptions relatives à la législation du travail, le projet renvoie à l'ordonnance d'exécution de la loi et se borne à poser quelques principes essentiels. C'est l'ordonnance qui fixera le temps consacré au travail et au repos, ainsi que la durée des vacances payées; elle devra s'en tenir, sur ces divers points, aux conventions et aux usages internationaux.

Articles 52 et 33. Le rôle d'équipage, qui tient lieu en quelque sorte de passeport collectif de l'équipage, est un document important dans les relations avec les autorités étrangères. C'est pourquoi chaque marin y est inscrit. L'enrôlement d'un marin, qui est prouvé par son inscription dans le rôle d'équipage, n'équivaut cependant pas, juridiquement, à la conclusion d'un contrat d'engagement de droit civil ; c'est simplement l'acte constitutif de la subordination du marin à l'autorité que la loi confère au capitaine. L'enrôlement effectué, le marin est soumis aux obligations particulières de droit civil, pénal et disciplinaire qui sont prescrites pour le service à bord.

L'enrôlement est un acte solennel, accompli devant le consul de Suisse.

La présence du consul tend à permettre au marin, s'il a été engagé dans des conditions incorrectes, de le déclarer à temps à un représentant de l'autorité et de
s'assurer, qu'après le départ du navire il ne sera pas livré à la toute-puissance du capitaine, contre sa volonté et sans pouvoir recourir à une aide officielle.

Comme il n'y a pas de consulat de Suisse accessible clans tous les ports où l'on enrôle des marins, le projet ne peut qu'en principe seulement prévoir la présence du consul lors de l'enrôlement. Dans des cas exceptionnels, le capitaine procédera immédiatement à l'enrôlement, mais il devra le soumettre à l'agrément du consul de Suisse qu'il pourra atteindre dans le

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prochain port. Le dérôlement, acte inverse, est accompli dans les mêmes formes. Le capitaine doit indiquer dans le rôle d'équipage la raison pour laquelle le marin quitte son bord. Cette formalité a lieu elle aussi, en règle générale, devant le consul, si un consulat est accessible dans le port de dérôlement. Dans des cas exceptionnels, l'agrément consulaire peut être donné après coup. Lorsqu'un marin meurt, lorsqu'il déserte ou que, pour d'autres raisons, il ne se présente pas au dérôlement, le capitaine doit radier son inscription du rôle d'équipage, en indiquant en même temps les motifs de cette radiation et en soumettant celle-ci au visa du prochain consulat. Si, dans un cas de ce genre, le consul a lieu de penser que le licenciement du marin ne s'est pas effectué correctement, il peut néanmoins viser le rôle d'équipage, afin d'empêcher que des difficultés ne se produisent avec des autorités étrangères. Mais alors, le consul a l'obligation de faire en même temps rapport à l'office suisse de la navigation maritime.

Article 54. Le livret du marin est une institution bien connue du droit régissant l'engagement des marins. Il correspond, dans un certain sens, au livret de service militaire et sert de pièce justificative pour les services accomplis.

Article 55. Etant donné le principe selon lequel un navire suisse n'est pas une portion flottante du territoire de la Confédération, le service à bord ne crée par un domicile. Conformément aux règles générales du droit civil, le marin conserve le domicile qu'il possédait jusqu'alors, en Suisse ou à l'étranger. Cette disposition présente une importance particulière du point de vue du droit fiscal, car la législation maritime ne peut empiéter sur les règles de rattachement en matière d'impôts. C'est à la législation fiscale qu'il incombe de déterminer l'état de fait qui, s'il est réalisé, place sous la souveraineté fiscale de la Confédération ou des cantons le marin servant à bord d'un navire suisse. On ne peut d'ailleurs, dans une loi fédérale, établir une réglementation valable pour toute la Suisse, du moment que les cantons sont souverains en matière d'impôts.

Le règlement de bord, conçu comme un règlement d'ordre domestique, peut contenir des dispositions complémentaires qu'il pourrait être inopportun d'inclure dans le règlement d'exécution. La loi
détermine, dans un sens limitatif, les dispositions qui peuvent être insérées dans le dit règlement de bord. Quant aux autres prescriptions, c'est à l'armateur qu'il appartient de les établir, en sa qualité de chef de l'exploitation.

Le manuel du marin servant sous pavillon suisse est un recueil des dispositions relatives au service à bord d'un navire suisse; il vise à procurer au marin, en particulier à celui qui est d'origine étrangère, un aperçu indispensable de ses droits et de ses obligations. Ce manuel contient les dispositions de la loi, du règlement d'exécution et du règlement de bord.

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Chapitre II Du contrat d'engagement

Article 56. Le contrat de travail en matière de navigation maritime est dénommé contrat d'engagement ; il contient plusieurs éléments de droit public. C'est pourquoi le projet déclare les dispositions de droit suisse qui régissent l'engagement des marins comme impérativement applicables aux personnes occupées à bord de navires suisses.

Article 57. Le projet tient compte des conditions particulières à la navigation, en ce qui concerne la durée d'un contrat d'engagement. Conformément aux dispositions des conventions internationales, la forme écrite est une condition nécessaire à la validité du contrat. Le marin a droit à un exemplaire complet du contrat, contenant toutes les conditions de l'engagement. Dans des circonstances particulières, la conclusion formelle d'un contrat d'engagement ne peut avoir lieu qu'après l'entrée en service à bord, spécialement lorsque le capitaine doit engager immédiatement un remplaçant et qu'il est lui-même empêché de dresser le contrat au port, avant l'appareillage du navire. Le projet tient compte de ces éventualités en disposant qu'en tout cas les effets d'un contrat d'engagement remontent au moment de l'embarquement effectif du marin, et cela surtout pour mettre dès le début le marin au bénéfice des prestations d'assurance.

Article 58. La convention internationale du 24 juin 1926 concernant le contrat d'engagement des marins comprend un grand nombre de dispositions sur le contenu du contrat d'engagement. Le projet s'en tient à cette réglementation internationale.

Article 59. En définissant les devoirs et responsabilités des membres de l'équipage, le projet s'en tient à l'article 328 du code des obligations, avec cette réserve que le capitaine et les marins répondent des dommages qu'ils occasionnent par leur faute, non seulement envers l'armateur, mais encore envers tout tiers. Sont considérées en particulier comme des tiers les personnes intéressées à la cargaison.

Le projet met également l'accent sur le caractère de hiérarchie militaire propre au contrat d'engagement sur mer, ainsi que sur le devoir, incombant au marin, de prêter assistance en cas de danger.

Articles 60, 61 et 62, II est nécessaire de régler par des prescriptions spéciales la question de l'attribution du travail au marin, en particulier dans les cas exceptionnels où la protection de ce dernier
demande des dispositions appropriées. D'autre part, il y a lieu de fixer les contre-prestations de l'armateur, notamment en ce qui concerne le droit à la nourriture et au logement gratuits à bord, ainsi que les indemnités pour heures de travail supplémentaires.

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La loi fixe en outre la durée du droit au salaire. Quant à l'indemnité journalière pour incapacité de travail, elle est réglée par les dispositions relatives au droit à l'assurance qui figurent aux articles 73 et 74 du projet.

Article 63. On est obligé d'exécuter du travail supplémentaire à bord s'il manque des marins ou en cas d'assistance ou de sauvetage. Le marin a alors droit à une indemnité spéciale. Pour les cas d'assistance, le projet adopte le principe, reconnu dans tous les droits maritimes, selon lequel les marins participent à la rémunération pour actes d'assistance, puisqu'ils ont souvent aidé au sauvetage au péril de leur vie. Cette participation de l'équipage ne concerne cependant que la partie de la rémunération qui constitue un bénéfice pour l'armateur et excède les impenses et les dommages subis par celui-ci. Quant à la répartition de la moitié, revenant à l'équipage, du bénéfice obtenu, elle est réglée selon divers usages de la navigation maritime. Il est généralement admis qu'une part importante revient au capitaine. Le projet se borne donc à établir des directives. La répartition définitive est fixée d'après les usages locaux.

Articles 64 à 69. Ces dispositions servent surtout à protéger le marin; elles n'appellent pas d'autre explication. Une règle importante est celle que pose l'article 65, selon lequel la dénonciation du contrat d'engagement ne prend effet qu'au moment de l'arrivée au prochain port. Les délais de dénonciation doivent être les mêmes pour les deux parties (cf. art. 58, lettre i).

L'article 66 est emprunté textuellement à la convention internationale.

Eu égard aux intérêts considérables de la navigation, on ne peut pas toujours tenir compte du désir d'un marin d'être licencié. Aussi, dans certains cas, le marin a-t-il l'obligation de rester en service encore trois mois; en contre-partie, son salaire est augmenté de 25 pour cent. D'un autre côté, l'armateur ne peut débarquer un marin qui a mis ses services à la disposition d'un navire suisse, lorsqu'il en résulterait pour l'intéressé de graves inconvénients, souvent d'ordre politique; il doit au contraire garder le marin deux mois de plus à bord et, s'il n'est pas possible d'assurer son débarquement normal après ce terme, l'office suisse de la navigation maritime doit faire le nécessaire, selon les circonstances,
pour assurer à cet homme le passage vers un autre pays qui lui accorde le séjour, ou encore pour obtenir son admission en Suisse (art. 67).

Les dispositions particulières concernant les salaires posthumes correspondent aux usages de la navigation maritime (art. 68).

Concernant le certificat de service, qui, dans la navigation, joue un rôle décisif pour les engagements ultérieurs du marin, le projet s'en tient aux règles posées par le code des obligations; il en est de même de la dis-

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tinction entre certificats contenant ou ne contenant pas de qualification (art. 69).

Article 70. Les différends relatifs à l'exécution du contrat d'engagement doivent, autant que possible, être réglés aussitôt dans le port de dérôlement. C'est pourquoi le consul de Suisse a l'obligation de faire office de juge de paix. Il est, en outre, d'usage de désigner, dans le contrat d'engagement, le consul de l'Etat du pavillon comme arbitre pour ces sortes de contestations. Le projet tient compte de cette pratique utile, mais il ajoute que l'arbitrage du consul doit être rendu gratuitement. Le marin ne doit pas être mis dans l'impossibilité de faire valoir son droit, faute de ressources personnelles, même s'il ne s'agit que d'une réclamation portant sur une somme insignifiante. D'autre part, comme il dresse luimême le contrat, l'armateur a la possibilité d'y introduire une clause arbitrale de son choix, obligeant le marin, selon les circonstances, à faire valoir son droit en un lieu qui lui serait pratiquement inaccessible. Le projet interdit, pour ces motifs, toute clause arbitrale qui désignerait un autre arbitre que le consul de Suisse le plus facilement accessible.

Si le contrat d'engagement ne contient aucune clause arbitrale, les différends qui s'y rapportent sont soumis à la juridiction civile ordinaire.

Lorsque le défendeur, notamment le marin défendeur, n'a pas de domicile en Suisse, un for existe à Baie, conformément à l'article 12 du projet.

Chapitre III

De la sécurité sociale Articles 71 et 72. Le rapatriement des marins est l'une des institutions les plus originales du droit maritime en matière de protection des travailleurs. La convention internationale concernant le rapatriement des marins, adoptée le 23 juin 1926 par la conférence internationale du travail lors de sa 9e session, et que l'arrêté a déclarée applicable à la navigation maritime sous pavillon suisse, a donné à cette institution sa forte carrure actuelle. Désireux de ne pas renvoyer à cette convention, nous en avons repris la substance dans le texte même de notre projet.

Notre article 71 adapte d'abord aux circonstances particulières de notre pays, sans littoral maritime, le principe posé par l'article 3 de ladite convention. Nous avons groupé dans cet article tout ce qui concerne le droit même au rapatriement, c'est-à-dire le droit du marin débarqué à un rapatriement « en nature ». Pour tenir compte des cas où il y a contestation, nous avons pris soin d'instituer au 3e alinéa un droit de recours de la Confédération lorsque le rapatriement aura eu lieu à ses frais.

Mais le rapatriement « en nature » n'est ni toujours opportun, ni même toujours possible. C'est pourquoi il convient également de prévoir la con-

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version de ce droit, pour qu'il ait déjà pris naissance, en un droit à des prestations équivalentes. Les modalités du rapatriement prévues à l'article 72 ont été, en substance, reprises de l'article 39 de l'arrêté du Conseil fédéral du 20 janvier 1942 concernant le contrat d'engagement des marins.

Articles 73 et 74. Notre projet serait incomplet s'il ne contenait pas des dispositions relatives à Fassurance-maladie et accidents des équipages des navires.

La législation suisse sur l'assuranee-accidents obligatoire ne peut être appliquée aux équipages des navires suisses. Une application par analogie de cette législation en dehors du territoire suisse n'aurait en effet aucun fondement juridique; la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, à Lucerne, aurait d'ailleurs les plus grandes difficultés à pratiquer pareille assurance, puisqu'elle n'a pas d'organes à l'étranger pour apprécier le risque et procéder aux contrôles usuels. Pour des raisons du même ordre, il a également fallu renoncer à confier à une caisse-maladie reconnue le soin d'assurer les marins contre la maladie. C'est ainsi que l'arrêté du Conseil fédéral du 13 juin 1941 sur l'assurance des équipages des navires suisses contre les accidents et la maladie a imposé au propriétaire du navire (ou à l'armateur-gérant) l'obligation d'assurer lui-même son équipage, et cela auprès d'une compagnie d'assurance privée. L'ordonnance du 6 août 1941, édictée en vertu de cet arrêté, contient les dispositions de détail; elle prévoit, en particulier, que les contrats d'assurance doivent être au moins aussi avantageux pour les équipages, que le sont les contrats conclus par la Confédération pour ses propres équipages.

Le régime d'assurance ainsi institué dès 1941 a eu de bons effets, de sorte qu'il n'y a aucun motif de ne pas le reprendre dans la nouvelle loi.

Notre article 73 prévoit donc, en premier lieu, que les parties d'entreprises maritimes qui se trouvent hors de Suisse ne sont pas soumises à rassuranceaecidents obligatoire instituée par la Confédération. Le même article impose ensuite aux armateurs l'obligation d'assurer leurs équipages contre les accidents professionnels et la maladie, les dispositions de détail devant être édictées par voie d'ordonnance du Conseil fédéral. D'aucuns auraient sans doute préféré que les prestations
d'assurance fussent prévues par la loi elle-même; la nécessité de pouvoir modifier ces prestations au gré des fluctuations de la situation économique générale a cependant conduit à remettre au Conseil fédéral le soin, après consultation des milieux intéressés, d'édicter les dispositions de détail.

Au contraire de ce qui' est le cas sous le régime actuel, l'armateur est libéré, aux termes de l'article 74, de sa responsabilité pour faute légère en cas d'accident professionnel ou de maladie, lorsqu'il y a, contrat d'assurance; s'il a passé un contrat d'assurance conforme aux exigences de la loi, l'armateur a, en effet, rempli ses obligations. En revanche, pour ménager des prestations d'assurance convenables, une amélioration sensible a été

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apportée au régime actuel en faveur des marins : lorsqu'il n'y a pas d'assurance, l'armateur est civilement responsable. Si l'armateur néglige de conclure un contrat d'assurance ou si, pour toute raison quelconque, ce contrat n'a pas été passé, il répond donc lui-même envers le marin du dommage résultant de l'accident professionnel ou de la maladie. Qu'une faute lui soit imputable ou non, l'armateur doit alors au marin des prestations équivalentes à celles qui lui auraient été versées s'il y avait eu assurance conforme à la loi.

Comme il y a ainsi un lien entre l'assurance et la responsabilité civile qui intervient en lieu et place de l'assurance si celle-ci fait défaut, il s'agira dans chaque cas, pour fixer l'étendue de la responsabilité, de déterminer d'abord quelles auraient été les prestations versées par une compagnie d'assurance s'il y avait eu contrat conformément à la loi. Les droits à des dommages-intérêts sont privilégiés au même titre que les créances de salaire.

Article 75. Comme le rapatriement des marins, l'indemnité de chômage en cas de perte du navire par naufrage a été consacrée sur le plan international par une convention adoptée, le 9 juillet 1920, lors de sa 2e session, par la conférence internationale du travail. La substance de cette convention, déclarée applicable à la navigation maritime sous pavillon suisse par l'arrêté, a été directement incorporée au droit positif suisse par l'article 26 de l'arrêté du Conseil fédéral du 20 janvier 1942 concernant le contrat d'engagement des marins.

Pour éviter, ici aussi, le renvoi à une convention internationale, nous avons directement consacré cette institution par notre article 75. La nouvelle rédaction, inspirée par un désir d'harmonie avec les autres textes de notre projet, apporte plus de clarté et de précision.

Titre V DES CONTRATS D'UTILISATION DU NAVIRE L'expression « contrats d'utilisation du navire » est empruntée au code italien de la navigation, du 30 mars 1942, la compilation de droit maritime la plus récente et la plus complète.

Sous cette rubrique, nous avons groupé dans le titre V, tout en les distinguant nettement, toute la gamme des contrats qui servent, directement ou indirectement, à l'exploitation du navire.

Sans entendre trancher par là des questions doctrinales, nous avons distribué ces divers contrats,
eu égard à la conception juridique générale à laquelle ils répondent en quatre chapitres consacrés à la location du navire, à l'affrètement, au contrat de transport et au contrat de passage.

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Les textes qui composent ainsi le titre V régissent au premier chef les contrats pour l'utilisation d'un navire suisse; cela ressort déjà du titre même de la loi proposée. Toutefois, comme il s'agit de règles de droit privé, nous n'avons parlé ici du navire que d'une façon générique; par là, nous avons réservé le droit international privé, qui, d'une part, fixe les règles de rattachement et peut, par exemple, soumettre les contrats dont il s'agit à la loi du lieu de leur conclusion, et qui, d'autre part, laisse traditionnellement aux parties contractantes, sous réserve des règles d'ordre public, la liberté de se référer, d'un commun accord, à la loi de leur préférence.

Article 76. Ce premier article, qui vise l'ensemble des contrats d'utilisation du navire, situe clairement la place du droit nouveau créé par le titre V dans les limites du droit suisse: il s'agit d'une variété de règles du droit des obligations, variété nécessitée par les circonstances particulières de la navigation et du commerce maritimes, mais qui n'en doit pas moins avoir son fondement dans notre droit commun, le droit fédéral des obligations.

Le 1er alinéa exprime cette solution en faisant le départ entre notre lex specialis et le droit commun, entre les dispositions mêmes de la loi proposée et les règles du code fédéral des obligations. Les premières sont imperatives ou ne le sont pas; si elles le sont, elles s'appliquent sans exception; si elles ne le sont pas, elles s'appliquent, sauf convention contraire des parties. C'est, en effet, à la convention des parties, s'il y en a une, que conduit non seulement le droit dispositif, mais encore le renvoi même au droit fédéral des obligations, puisque celui-ci a magistralement consacré la liberté des conventions à moins de règle de droit strict (CO, art. 19), Enfin, si la loi spéciale et la convention des parties font toutes deux défaut, on recourt aux autres règles du droit fédéral des obligations, c'est-à-dire, au premier chef, mais non pas exclusivement, aux dispositions de notre code des obligations, et tout particulièrement à celles de sa partie générale, ainsi qu'à celles qui sont consacrées aux contrats expressément mentionnés aux articles 78 et 87 de notre projet.

Le 2e alinéa institue, pour les contrats d'utilisation du navire, un délai de prescription d'une année,
qui répond à la pratique internationale (convention de Bruxelles du 25 août 1924; art. 3, chiffre 6, 4e al). La prescription générale de dix ans (CO, art. 127) désavantagerait les armateurs suisses sur le marché international. Comme il avait fallu précédemment se demander si ce délai spécial est un délai de prescription ou un délai de péremption, il nous a semblé utile de trancher la question. C'est ainsi que, fidèle à l'esprit comme à la lettre de la convention de Bruxelles (laquelle prévoit, en effet, l'exonération du transporteur et de l'armateur « à moins qu'une action ne soit intentée » dans le délai en question), notre projet opte résolument en faveur d'un délai de prescription, c'est-à-dire d'un délai qui peut être interrompu.

Feuille fédérale. 104e année. Vol. I.

22

306 Chapitre premier

Location du navire Article 77. La définition donnée de ce contrat rattache entièrement celui-ci au fait matériel de la possession du navire et le sépare nettement, du point de vue juridique, de toutes conventions accessoires éventuelles, lesquelles restent ainsi régies par leurs règles propres, ainsi que des autres contrats d'utilisation du navire, même lorsque plusieurs de ces contrats, passés entre les mêmes contractants, se trouvent pratiquement combinés.

Dans la location du navire, celui-ci est donc remis «coque nue»; il doit l'être en bon état de navigabilité.

L'annotation prévue au 2e alinéa attribue au locataire, envers des tiers, la situation juridique de l'armateur. A défaut d'annotation, le propriétaire est présumé demeuré, envers les tiers, dans cette situation, c'est-à-dire qu'il continue à répondre comme s'il avait encore le navire en sa possession, alors qu'en fait, cette possession a déjà passé au locataire.

Article 78. En lui donnant la possession du navire, la location fait du locataire l'armateur. Il est donc logique que le locataire doive remplir les conditions exigées de l'armateur suisse. U en va de même du sous-locataire qui, entrant en possession du navire, en devient à son tour l'armateur.

Pour empêcher tout détournement de possession, la sous-location doit être autorisée par le bailleur.

Location et sous-location du navire ont été rattachées au bail à loyer de notre droit commun (CO, art. 253 à 274). A première vue, l'analogie paraît plus grande avec le bail à ferme. Cependant, il faut relever que les textes du code des obligations sur le bail à ferme visent très directement les baux agricoles et renvoient pour le surplus aux règles du bail à loyer comme à des règles plus générales. La location et la sous-location du navire sont donc conçues comme un nouveau type de bail, frère du bail à ferme, mais se rattachant comme lui, à titre subsidiaire, au modèle premier du bail à loyer.

Article 7.9. Cet article fournit quelques précisions nécessaires en matière de location du navire, et qui autrement ne résulteraient pas de la seule application des principes généraux sur le bail à loyer. Il s'agit d'ailleurs de droit dispositif; mais les parties ne s'en écarteront pas volontiers.

Chapitre II

Affrètement Article 80. La définition donnée par cet article offre un double intérêt.

A. En premier lieu, elle vise, pour prévenir toute confusion, à conférer à l'expression d'affrètement, dans le droit positif suisse, un sens juridique parfaitement précis. Il se peut que l'attribution de ce sens-là, à l'exclusion

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de tout autre, à cette expression en elle-même plus générale ait quelque chose d'arbitraire du point de vue linguistique ; mais le souci de la sécurité juridique nous a paru devoir l'emporter.

B. En second lieu, cette définition caractérise et situe un contrat qui est lui-même entièrement nouveau dans le droit commercial suisse et qu'on ne peut notamment rattacher à aucun des types de contrat prévus par le code des obligations. Il est donc bien de la plus haute importance que la loi sur la navigation maritime sous pavillon suisse trace avec clarté la figure juridique, jusqu'alors étrangère à notre droit national, de ce contrat essentiel au commerce maritime.

S'inscrivant bien logiquement entre la location du navire (qui repose sur un transfert de possession) et le contrat de transport maritime (nouvelle forme évoluée du mandat), l'affrètement défini à l'article 80 est par excellence le contrat pour l'utilisation du navire : le fréteur (propriétaire ou locataire, mais par définition armateur) conserve la possession et le contrôle, du navire ; mais il en fait, contre rémunération, profiter un tiers, l'affréteur, soit que celui-ci transporte pour le compte d'autrui (affréteur principal, transporteur), soit qu'il transporte pour son propre compte (chargeur).

En d'autres termes, la contre-prestation de l'armateur (fréteur) ne consiste pas directement en un transport, mais bien en une navigation utile à un transport.

Les deux grandes variétés de ce contrat sont prévues par la mention des chartes-parties au temps et au voyage; le projet consacre un usage universel en autorisant chacune des parties à exiger l'établissement d'un cahier des charges réciproques, auquel nous avons précisément laissé son nom traditionnel de charte-partie.

Article 81. Cet article indique la mesure de la responsabilité du fréteur envers l'affréteur. Comme le fréteur est, par définition, l'armateur du navire, cette responsabilité d'origine contractuelle vient en fait compléter la responsabilité fonctionnelle qui lui incombe déjà envers tous les tiers, du seul fait de l'exploitation de son navire (art. 36).

Article 82. Comme le navire reste entre les mains du fréteur, mais que la navigation doit servir les intérêts de l'affréteur, l'exécution du contrat appelle nécessairement une certaine collaboration entre les parties
contractantes. Il est d'autant plus important d'en préciser les conditions générales que la tentation est souvent forte de tourner le principe du contrat et, par un ensemble de clauses abusives donnant à l'affréteur autorité directe sur le capitaine (employment-clauses), de transformer pratiquement ce contrat en une sous-location partielle, ouvrant ainsi la voie à des abus éventuels du pavillon par des affréteurs étrangers, C'est pourquoi l'article 82: a. Réserve impérativement à l'armateur tout ce qui touche à la conduite du navire, de telle sorte que le contrôle

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de celui-ci ne lui échappe pas; b. Limite à la cargaison les pouvoirs que la charte-partie peut conférer à l'affréteur et détermine les conséquences de pareille attribution contractuelle de pouvoirs, tant à l'égard des tiers qu'entre les parties contractantes.

Articles 83 à 86, Les dispositions de ces articles s'inspirent des usages les mieux établis dans le commerce maritime. Celles où figure la réserve « en principe » n'ont toutefois qu'un caractère dispositif et subsidiaire qui les rendrait peut-être superflues s'il n'était pas essentiel, le contrat dont il s'agit étant entièrement nouveau dans notre droit suisse, d'en indiquer clairement, pour la gouverne des parties contractantes comme pour celle des juristes de notre pays, les contours usuels et normaux.

Chapitre IH Contrat de transport

Le chapitre consacré au contrat de transport maritime se subdivise en deux sections.

I. Généralités La première section (art, 87 à 98) pose des principes généraux applicables dans tous les cas; elle représente une transposition, dans le droit maritime, des règles de notre droit commun (CO, art. 440 à 457), auquel il est d'ailleurs renvoyé à titre subsidiaire.

On s'est demandé si cette transposition était indispensable. Deux motifs principaux nous ont conduits à le reconnaître.

A. Si le contrat de transport maritime n'était pas expressément prévu par notre loi, il apparaîtrait souvent douteux que notre droit commun, éminemment terrestre, ait lieu de s'appliquer, même s'agissant de transports sous pavillon suisse, à des contrats de transport entièrement exécutés en dehors du territoire suisse, alors que le transport intermédiaire éventuel (de la frontière au littoral ou vice-versa) est, bien naturellement, sous l'empire de lois étrangères.

B. Les usages internationaux qui prévalent dans le commerce maritime et qui ont été consacrés en grande partie par la convention internationale de Bruxelles du 25 août 1924, s'écartent, d'autre part, sur des points importants, du régime qui résulterait d'une application pure et simple au contrat de transport maritime des règles de notre droit commun, et contiennent, en outre, des précisions qu'il y a techniquement intérêt, pour la défense économique du pavillon suisse, à incorporer dans la loi applicable aux transporteurs suisses.

Ladite convention de Bruxelles (que l'arrêté déclarait applicable à la navigation maritime sous pavillon suisse) s'est cependant révélée, à l'examen et compte tenu de l'expérience internationale, être à la fois fort

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compliquée et fort confuse, si même elle n'est pas contradictoire. Nous avons donc jugé prudent, dans l'intérêt de la sécurité juridique et à l'instar de plusieurs Etats étrangers, de faire désormais l'économie du renvoi à cette convention ·-- renvoi qui devrait, surtout, être une source de procès -- et d'incorporer directement dans notre loi, en les réexprimant avec clarté et simplicité, les solutions de la pratique internationale dominante que cette convention visait à consacrer.

Article 87. Cet article établit d'abord, en vue de l'application subsidiaire du droit commun, le rapport exact qui rattache notre contrat de transport maritime au contrat de transport du code des obligations.

C. Au bénéfice de la définition fournie par le 1er alinéa et qui sépare nettement le contrat de transport maritime des autres contrats de notre droit positif, le 2e alinéa prévoit donc, pour le cas où notre loi spéciale et la convention des parties font toutes deux défaut, l'application des règles du droit commun relatives au contrat général de transport (CO, art. 440s.).

Article 88. Cet article consacre en droit suisse les règles correspondantes de la susdite convention de Bruxelles (art. 3, chiffre 1).

Articles 89 et 90, Ces deux articles consacrent en droit suisse les règles correspondantes de la convention de Bruxelles (art. 4, chiffres 2 et 3) -- règles universellement suivies dans le commerce maritime, qui mesurent la responsabilité du transporteur.

La systématique suivie par l'article 89 -- qui contient, après une énumération de cas précis où le transporteur se dégage en apportant la preuve positive des circonstances de fait visées (lettres a à i), une clause générale d'irresponsabilité au cas où le transporteur peut apporter à sa propre décharge la preuve négative de l'absence de faute -- n'est certes pas exempte de critique. Mais, consacrée par la convention de Bruxelles, elle est devenue familière aux praticiens des transports maritimes. Nous avons donc jugé prudent de la reprendre, afin que la conformité substantielle de notre réglementation avec celle de ladite convention soit immédiatement apparente. Nous nous sommes bornés, à des fins de sécurité juridique dans les limites de notre droit national, à mettre au point une rédaction moins prolixe.

Article 91. Pour se conformer aux solutions
universellement suivies dans le droit maritime, cet article consacre le mécanisme, étranger au droit commun, de la limitation de responsabilité qui, dans le cas du transporteur comme dans celui de l'armateur, vient se superposer au mécanisme de construction de cette responsabilité, lequel, seul, a son équivalent dans le droit commun.

Il a paru raisonnable d'exprimer le maximum en monnaie suisse plutôt que de reprendre le maximum en livres sterling valeur or de la convention de Bruxelles; le 2e alinéa devra permettre des ajustements éventuels.

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Articles 92 et 93. Ces deux articles incorporent au droit suisse des précisions utiles sur la responsabilité du chargeur, qu'on trouve également, en substance, dans la convention de Bruxelles (art. 3, ch, 5; art. 4, ch. 6).

La responsabilité causale du chargeur prévue par l'article 93 dans le cas où le transporteur n'était pas informé de la nature de la chose, n'empêchera naturellement pas le chargeur de se retourner, le cas échéant, en vertu du droit commun (CO, art. 41), contre le tiers dont il pourra établir la responsabilité personnelle.

Article 94. Introduit à la demande des milieux d'armement, cet article, tout entier de caractère dispositif et subsidiaire, est surtout destiné à indiquer les contours usuels et normaux du contrat de transport maritime.

Articles 95 et 96, Laissés en suspens par de nombreuses lois étrangères, comme par la convention de Bruxelles, les problèmes de l'acquisition du fret et de l'identification du débiteur méritent d'autant plus de recevoir, dans notre droit suisse, une solution de principe claire et simple que la livraison au port de destination, ayant lieu hors de Suisse, suscite en cas de contestation sur la règle à suivre, d'insolubles conflits de lois. Les solutions fournies par notre projet accordent les garanties traditionnellement réclamées par les transporteurs (art. 95, 2e et 3e al.) et par les chargeurs (art. 96, 2e al.), en les rattachant comme des exceptions au principe fondamental de la réciprocité des obligations des deux parties (art. 95, 1er al. ; art. 96, 1er al.).

Article 97. Il nous a de même paru utile de fournir, à l'instar du code italien de 1942, une solution générale au problème classique de l'impossibilité de l'exécution. Les règles du droit commun (CO, art. 119) ne peuvent, en effet, s'appliquer uniformément aux quatre cas d'impossibilité entrant ici en ligne de compte. Signalons en particulier la solution proposée pour le deuxième cas (2e al.), où l'expression « distance utilement parcourue » vise, étant donné la variété des situations possibles, à réserver les prétentions légitimes des parties et laisse une certaine latitude au juge. Quant au 4e alinéa, qui, techniquement, peut sembler superflu, nous avons estimé que la loi ne devait pas paraître ignorer la quatrième éventualité, relativement fréquente et fort embarrassante, et qu'il
importait de préciser qu'elle ne constitue pas à elle seule un juste motif de résiliation immédiate (et unilatérale) au sens du droit commun (CO, art. 107 à 109). C'est pourquoi nous n'avons pas hésité à parler de résiliation « par accord des parties ».

Article 98. Cet article, fruit d'un travail considérable de simplification rédactionnelle, incorpore la solution dominante suivie dans la pratique internationale et que, dans la convention de Bruxelles du 25 août 1924 (art. 3, n° 6), des textes prolixes et confus visaient à enregistrer. Le régime ainsi consacré en droit suisse s'écarte sur plusieurs points de notre droit

311 commun (CO, art. 452) ; nous nous sommes efforcés, dans l'intérêt de la sécurité juridique, de trouver une rédaction qui facilite la comparaison de ces deux solutions.

Cette comparaison fait en premier Heu ressortir l'importance du 1er alinéa, qui n'a pas d'équivalent exact dans notre droit commun et qui, beaucoup plus clairement que l'ensemble des avis et constatations prévus par ce dernier (CO, art. 450 s.), institue une complète réciprocité des droits et obligations des deux parties en ce qui concerne la constatation de l'état de la marchandise.

Le 2e alinéa de notre article 98 correspond, ensuite, au 1er alinéa de l'article 452 du code des obligations. Ce dernier institue une péremption d'autant mieux acquise, en fait, que le paiement du prix du transport va, par hypothèse, de pair avec l'acceptation de la marchandise. Notre projet, en revanche, se conforme à la solution de la convention de Bruxelles et n'institue qu'une « présomption jusqu'à preuve du contraire », laquelle pourra donc être renversée par l'apport des preuves utiles dans le délai de prescription d'une année prévu par l'article 76, 2e alinéa.

Enfin, le 3e alinéa de notre article 98 correspond aux 2e et 3e alinéas de l'article 452 du code des obligations. Cet alinéa a pour effet de donner au destinataire un délai spécial de trois jours pendant lequel il peut faire des réserves sur les avaries non apparentes, sans avoir à renverser la susdite présomption de livraison conforme. Mais, une fois ces trois jours écoulés, il est clair que, même s'il n'a pas fait de réserve, le destinataire peut encore, pendant tout le délai de prescription d'une année prévu par l'article 76, 2e alinéa, renverser, par l'apport de ses preuves, la présomption de livraison conforme, tant pour les avaries non apparentes que pour les avaries apparentes.

On peut certes, en le comparant au régime général du contrat de transport de notre code des obligations, critiquer ce système de la convention de Bruxelles comme trop souple ou trop subtil. Nous croyons cependant indiqué, étant donnée sa validité internationale, d'incorporer ce système dans la réglementation suisse du contrat de transport maritime.

II. Connaissement La deuxième section (art. 99 à 103) du chapitre consacré au contrat de transport maritime pose, sans préjudice des principes généraux
groupés dans la première section et qui demeurent valables en cas de connaissement, des règles spéciales pour le cas, à vrai dire de beaucoup le plus fréquent dans la pratique, mais qui n'en reste pas moins un cas particulier, où un connaissement doit être établi.

L'absence de ces règles spéciales dans le droit suisse s'est cruellement fait sentir SOUB l'empire de l'arrêté; faute de mieux, les transporteurs maritimes suisses ont établi leurs connaissements, sans pouvoir mesurer la

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portée juridique exacte de leurs nombreuses clauses et souvent sans même oser les traduire, en copiant servilement des modèles courants de la pratique étrangère, en particulier des modèles anglo-saxons. Il s'est agi là, manifestement, d'une méthode de fortune, techniquement contradictoire, puisque la plupart des lois étrangères (sur ce point, d'ailleurs, en retard sur les tendances de la pratique actuelle) subordonnent la validité d'un connaissement à son émission par le capitaine au port de chargement, en sorte qu'aucun connaissement n'aurait en principe jamais dû être émis en Suisse!

Grâce à beaucoup de souplesse de la part des transporteurs suisses, cette méthode de fortune a suffi pendant les premières années. Mais il est évident qu'au moment de consacrer par une loi la permanence de la navigation maritime sous pavillon suisse, il faut aussi régulariser -- et faire rentrer dans notre droit national positif -- toute la matière contractuelle, si vaste et si importante, qui est couverte par les contrats de transport maritime entraînant l'établissement de connaissements.

Article 99. Cet article crée donc le connaissement du droit suisse. Du point de vue du droit suisse, il est conçu comme un document commercial différencié, spécialement destiné aux transports maritimes; du point de vue du droit maritime général, il représente une innovation, s'agissant d'un connaissement spécialement conçu pour répondre à la situation d'un Etat sans littoral maritime.

Le 1er alinéa pose en effet d'emblée que le connaissement suisse est établi « pour le compte du transporteur », sans poser aucune condition quant au lieu d'émission (traditionnellement, dans le port de chargement), ni quant au signataire (traditionnellement, le capitaine). Par là est sauvegardée la pratique, déjà bien établie aujourd'hui, des connaissements émis en Suisse, pratique qui, d'ailleurs, va-au devant d'une préférence de plus en plus manifeste du commerce international -- encore qu'elle se heurte à beaucoup de résistance et à beaucoup d'obstacles techniques et législatifs -- pour le « connaissement direct » (through bill of lading).

Le 2e alinéa identifie le document commercial différencié que ce connaissement constituera ainsi dans les limites du droit suisse. Il va sans dire que ce texte s'inspire des usages les mieux établis et consacre
notamment les règles incorporées dans la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement.

Article 100. Il est d'autant plus important de spécifier quelle valeur ont les mentions du connaissement que le caractère de ce document est loin d'être familier aux juristes suisses. Le 1er alinéa consacre, en droit suisse, la solution en substance suivie par la susdite convention de Bruxelles.

La formule « même s'il est incomplet » indique, pour la gouverne des juristes suisses, l'échelle des différentes valeurs probatoires que le connaissement peut avoir selon la forme dans laquelle il est établi.

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Le 2e alinéa, introduit dans le souci de la sécurité juridique et de la réputation du nom suisse, vise à exclure la déplorable pratique des réserves globales faites a priori, même en l'absence de tout motif précis (unknown clauses), par quantité de transporteurs qui, ainsi, cherchent à échapper à toute responsabilité. La jurisprudence des Etats maritimes n'a jamais cessé de lutter contre cette pratique, encore qu'avec peu de succès, vu la proportion relativement faible des différends de droit maritime qui vont jusqu'au prétoire. Nous avons cru sage de poser dans la loi même le principe excluant cette pratique abusive, tant pour étayer le bon renom du commerce maritime suisse, que parce que les tribunaux suisses auraient proportionnellement encore moins d'occasions que les tribunaux étrangers d'intervenir en la matière, pour peu que ces réserves globales fussent émises ou opposées hors de Suisse (par ex. au port de chargement).

Articles 101 et 102. Ces deux articles, élaborés à la lumière des usages les mieux établis, ont pour objet essentiel de consacrer dans le droit positif suisse la nature et le rôle traditionnels du connaissement et de les dégager avec assez de clarté pour permettre une assimilation rapide de cette nouvelle institution.

Article, 103. Ce dernier article établit enfin clairement: a. D'une part, la différence entre le cas d'un transport avec connaissement et celui d'un transport sans connaissement (1er al.). S'il n'y a pas de connaissement, les parties conservent leur liberté contractuelle ; b. D'autre part, la relation entre affrètement et contrat de transport lorsque ces deux contrats se trouvent combinés entre les deux mêmes parties contractantes (3e al.), auquel cas le contrat de transport n'est plus, entre fréteur et affréteur, qu'une convention accessoire qui vient compléter l'affrètement sans en altérer aucunement les conséquences propres, le tiers porteur du connaissement restant cependant au benèfice du 1er alinéa de ce même article 103.

Le 2e alinéa prévoit, à l'instar de la convention de Bruxelles, des facilités d'accord entre les parties dans deux cas traditionnellement différenciés ; nous avons cependant pris soin, en les prévoyant, de ne pas exclure l'établissement de connaissements qui, pratiquement, seront souvent utiles, même s'agissant d'animaux vivants ou de transports en pontée.

Chapitra IV

Contrat de passage

Article 104. Bien que le transport de passagers n'ait pas été, jusqu'à présent, exploité régulièrement sous pavillon suisse et qu'on doive s'attendre que pareille activité se heurterait, le cas échéant, à une concurrence redoutable, l'éventualité du transport de passagers à bord des navires suisses ne peut être exclue dès lors que la navigation maritime est consacrée à titre permanent. D'une part, la pratique s'est en effet établie de chercher

314 dans le transport d'un nombre limité de passagers à bord des «argos un appoint dont les transporteurs de marchandises sont friands ; cette pratique, consacrée par des accords internationaux, est d'ores et déjà suivis par les armateurs suisses. D'autre part, diverses circonstances se présentent où des personnes n'ayant ni emploi pour le compte de l'armateur, ni fonction nautique, voyagent à bord, de telle sorte que la situation juridique de passagers est celle qui doit normalement leur être reconnue.

L'article 104 vise donc moins à ouvrir un nouveau champ d'activité à la navigation maritime suisse, qu'à combler une lacune et à donner sa solution élégante à un problème qui se pose nécessairement. Il se borne d'ailleurs à quelques règles générales.

Pour ménager l'avenir, nous avons toutefois saisi cette occasion pour prévoir, au 3e alinéa, une extension éventuelle du commerce maritime suisse à l'exploitation régulière du transport de passagers. Il est clair qu'en pareil cas une réglementation beaucoup plus complexe, et dont les détails devront d'ailleurs être fonction des circonstances dans lesquelles cette évolution pourra se produire, devra être mise au point. En prévoyant que le Conseil fédéral devra arrêter cette réglementation, nous n'avons pas seulement pensé adopter la solution aujourd'hui la plus simple, mais nous avons également voulu tenir compte du fait que l'exploitation régulière du transport de passagers posera, le cas échéant, des problèmes d'ordre politique et d'ordre économique dont il paraît normal de laisser l'appréciation au gouvernement.

Titre VI

INCIDENTS ET ACCIDENTS DE MER Articles 105 et 106. S'il se produit un accident ou un autre fait exceptionnel en matière de navigation maritime, hors des eaux territoriales où les autorités nationales compétentes auraient assumé l'instruction du cas, il est nécessaire que les circonstances dans lesquelles ce fait s'est produit soient établies d'une manière incontestable. Cette obligation a incombé de tout temps au capitaine. Celui-ci doit faire une enquête et établir un rapport de mer (sea protesi). Ce document doit être remis au prochain consulat de Suisse et, à son défaut, aux autorités locales compétentes.

Afin de faciliter, pour l'administration des preuves, une vérification ultérieure de l'état des faits, le consulat saisi du cas est compétent pour faire une nouvelle enquête. Les éléments ainsi recueillis sont soumis, conformément à l'article 5, 2e alinéa, à la libre appréciation du juge. Les intéressés ont le droit de prendre connaissance des actes qui constituent des moyens de preuve (art. 46, 3e al.).

Art. 107. La convention internationale du 23 septembre 1910 pour l'unification de certaines règles en matière d'abordage a été ratifiée par presque tous les Etats qui pratiquent la navigation maritime et incorporée dans les législations nationales, de telle sorte que, dans ce domaine, le droit

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est unifié sur le plan mondial. Il est donc juste que la Suisse adopte les mêmes règles sans changement; aussi, comme le faisait déjà l'arrêté du Conseil fédéral du 9 avril 1941, le projet déclare-t-il cette convention partie intégrante de la législation maritime suisse.

Il en est de même de la convention internationale du 23 septembre 1910 pour l'unineatien de certaines règles en matière d'assistance et de sauvetage maritime qui a été également ratifiée par de nombreux Etats et incluse dans leurs législations. Il est donc tout naturel que la Suisse règle cet objet en faisant réception de ladite convention. Cette dernière ne précisant pas qui est débiteur de la rémunération pour assistance et sauvetage, l'introduction de dispositions complémentaires s'est révélée nécessaire. Pour éviter que l'armateur qui a prêté assistance ne se retourne contre le propriétaire de chaque valeur sauvée, c'est-à-dire contre un grand nombre de chargeurs, le projet dispose, en accord avec les autres législations maritimes, que l'armateur du navire bénéficiaire de l'assistance est débiteur de toute la rémunération. Cet armateur a un droit de recours contre les autres intéressés à la cargaison sauvée.

A propos des dispositions concernant l'abordage, ainsi que l'assistance et le sauvetage, il convient de mentionner l'existence d'une autre convention internationale, signée à Bruxelles le 10 avril 1926, qui vise à l'unification de certaines règles concernant les immunités des navires d'Etat.

Cette convention prévoit, en ce qui concerne l'exercice de la navigation, que les navires d'Etat, tels que les navires de guerre et bâtiments analogues, sont soumis, quant à leur responsabilité civile, aux mêmes dispositions que les navires de commerce. La convention accorde cette protection aux navires des pays qui l'ont ratifiée. Il serait indiqué que la Suisse adhérât à cette convention, afin qu'en cas d'abordage entre un navire suisse et un navire de guerre étranger ou un bâtiment analogue, l'armateur suisse pût faire valoir un droit à des dommages-intérêts contre l'Etat étranger.

Article 108, Par son article 52, l'arrêté se bornait, pour identifier les cas d'avarie commune, à renvoyer aux « règles d'York et d'Anvers, dans la teneur adoptée en 1924 à Stockholm ». Etant donnée l'absence totale, dans le droit commun, de toute
institution correspondante, nous avons jugé utile, au moment de consacrer cette institution dans le droit positif suisse, d'en fournir une définition qui dispense les juristes suisses de se référer, en vue de l'interprétation desdites règles d'York et d'Anvers, aux définitions divergentes et le plus souvent surannées qu'en donnent les législations étrangères.

La définition que nous avons élaborée reprend en substance, cela va sans dire, les éléments qu'une étude critique approfondie des règles d'York et d'Anvers permet de dégager. Nous pensons qu'ainsi l'application de ces règles, auxquelles nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer puisqu'elles font pratiquement loi dans le monde entier, aura un fondement juridique plus certain et sera, le cas échéant, assurée par nos tribunaux

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en toute connaissance de cause. Ces règles, intégrées dans notre loi, y coneervent leur caractère dispositif.

Le fait que les règles d'York et d'Anvers, issues de l'initiative privée, sont périodiquement sujettes à revision -- par exemple que les règles adoptées en 1924, à Stockholm, sont aujourd'hui remplacées par celles qui ont été adoptées en 1950 à Copenhague -- confère au surplus à notre définition suisse toute sa valeur en donnant à l'institution de l'avarie commune dans notre droit national la stabilité qui la caractérise depuis de longs siècles dans le droit maritime général.

Article 109, Cet article remplace en substance, dans notre projet, les articles 53 et 54 de l'arrêté. La procédure prévue en 1941, comparée à la procédure en usage dans la plupart des marines étrangères, se révèle à la fois compliquée à l'excès (par l'exigence d'un accord spécial entre le capitaine et ses officiers et par les conséquences d'un refus éventuel de ceux-ci) et simpliste (par ses prescriptions formalistes sur le procès-verbal).

Nous appuyant sur le régime général prévu pour les papiers de bord par notre article 44, nous avons simplifié la procédure suivie à bord même.

Nous avons, d'autre part, apporté un peu plus de précision au texte visant la dispache (2e al.), notamment en fournissant, pour la gouverne des juristes suisses, une définition de la dispache et en prévoyant son établissement, non pas au port de destination (qui pourra n'être jamais atteint du fait même de l'accident survenu), mais bien au port où le voyage prend effectivement fin. Enfin, nous avons expressément consacré l'obligation des intéressés au règlement d'avarie à contribuer, par l'apport des preuves, au travail des dispacheurs.

Article 110. Un délai de prescription spécial de deux ans est proposé pour les créances engendrées par l'acte d'avarie commune. Le délai général du droit commun paraît beaucoup trop long pour garantir la sécurité juridique des intéressés, eu égard aux sommes considérables qui peuvent être en jeu et à la difficulté qu'auront le plus souvent les parties à évaluer les conclusions auxquelles pourront aboutir les dispacheurs. Un délai d'un an seulement, d'abord proposé à l'instar de la réglementation allemande, a été jugé trop court, eu égard au fait qu'un certain temps devra souvent s'écouler avant que l'action
puisse même être introduite devant un tribunal suisse.

En général, les dispaches établies au port où le voyage prend fin sont homologuées par l'autorité locale, le plus souvent un tribunal de première instance ou de commerce. Toutefois, pour assurer un maximum d'applicabilité à notre loi sans égard à la variété des législations étrangères, non plus qu'aux défaillances de la pratique dans certains pays, nous avons jugé bon de confier au Conseil fédéral le soin de mettre au point, par voie d'ordonnance, une procédure d'homologation des dispaches devant les tribunaux suisses.

317 Titre VII

APPLICATION A LA NAVIGATION INTÉRIEURE Le droit de la navigation comprend le droit de la navigation maritime et celui de la navigation intérieure; le droit de la navigation aérienne y est également inclus dans certains pays. En tout cas, la navigation dans toutes les eaux navigables présente bien une certaine unité, eu égard au grand développement qu'a connu, au cours du siècle dernier, la grande navigation sur les neuves et les autres eaux intérieures. Mentionnons au premier chef la navigation sur le Rhin, dont la liberté a été garantie par les actes de Mannheim de 1868, qui assurent à la Suisse le libre accès à la mer.

Depuis le début de ce siècle, la navigation suisse sur le Rhin a pris un essor inattendu et c'est par elle que passent aujourd'hui plus du tiers de l'ensemble des importations du pays. D'importantes entreprises suisses de navigation rhénane ont fait leur apparition, qui disposent de docks importants et de bateaux nombreux, contribuant d'autant à l'approvisionnement du pays.

Il manque cependant à cette navigation intérieure suisse une législation adéquate, puisque seuls la propriété et les autres droits réels sur les bateaux de la navigation intérieure se trouvent régis par la loi fédérale du 28 septembre 1923 sur le registre des bateaux. Cependant, le droit de la navigation intérieure recouvre d'autres matières de droit commercial, telles que la réglementation des contrats d'affrètement et de transport, celle des connaissements, la responsabilité de l'armateur, l'abordage, l'assistance et le sauvetage, l'avarie commune, toutes institutions qui sont connues des autres Etats riverains du Rhin et que la loi y règle d'après les principes du droit maritime. Or, comme les aspects de droit public de la navigation rhénane ont été réglés uniformément sur le plan international par les ordonnances élaborées par la commission centrale du Rhin, il appartient à la Suisse, pour s'associer à l'unité juridique internationale créée pour cette navigation intérieure, d'adopter également les règles nécessaires en matière de droit civil. La nécessité de combler les lacune du droit suisse de la navigation a déjà été signalée (cf. Prof. His : « Rechtsgrundlagen einer schweizerischen Gesetzgebung über die Gross-Schiffahrt auf internationalen Gewässern, besonders auf dem Rhein » ; Prof. Haab : « Die
privatrechtliche Rechtsgrundlage einer schweizerischen Gross-Schiffahrt », Zürich 1922). Bien que le Rhin ne soit navigable sur territoire suisse que sur une courte distance, c'est le droit suisse qui s'applique à plusieurs égards; il s'appliquerait dans une mesure accrue si le Rhin était rendu navigable jusqu'au lac de Constance ou si d'autres eaux intérieures devaient servir à une navigation directe entre la frontière suisse et la mer. D'après les principes de droit international privé, c'est en effet le droit suisse qui s'applique aux prétentions extracontractuelles fondées sur l'abordage ou sur d'autres accidents, de même que sur des mesures d'assistance et de sauvetage lorsque les faits en question se sont passés en Suisse ou lorsque c'est un bateau suisse affecté à la navigation intérieure qui a été secouru.

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C'est également le droit suisse qui régit la situation du capitaine et de l'équipage des bateaux suisses de la navigation intérieure; c'est encore lui qui régit les contrats sur l'utilisation d'un bateau affecté à la navigation intérieure (contrats de location, d'affrètement et de transport), lesquels sont en effet soumis au droit du lieu où l'armateur est établi. En matière d'avarie commune, on applique le droit du lieu où la dispache est établie, cependant que la personne de l'armateur est soumise au droit de son domicile, tandis que sa responsabilité et l'étendue de celle-ci s'apprécient selon le droit du lieu où s'est produit l'événement dommageable. C'est ainsi que le droit suisse doit s'appliquer dans beaucoup de circonstances alors que des règles adéquates y font défaut. Sans doute les armateurs fluviaux peuvent-ils, en matière contractuelle, pallier aux défauts de règles légales par des règles conventionnelles ; mais cela ne remplace pas les prescriptions imperatives nécessaires d'une législation sur la navigation. L'absence d'une législation suisse sur la navigation intérieure n'a pas seulement été critiquée en Suisse ; elle l'a également été à étranger, en particulier dans les milieux d'armateurs dont les bateaux viennent fréquemment jusqu'à Baie.

Un coup d'oeil sur les réglementations étrangères montre les possibilités d'une réglementation légale suisse de la navigation intérieure privée.

C'est l'Allemagne qui est allée le plus loin: la loi allemande du 15 juin 1895 « sur les rapports de droit privé dans la navigation intérieure » constitue en effet une codification complète. Ce droit allemand de la navigation intérieure correspond en substance au droit maritime allemand. Il est significatif que la France, après qu'elle fût redevenue riveraine du Rhin par le retour de l'Alsace-Lorraine, ait maintenu en vigueur, par décret du 29 avril 1924, la législation allemande sur la navigation intérieure et qu'elle ait fait de celle-ci, dans une traduction littérale, une partie intégrante de son droit national. La Belgique a adapté son droit fluvial au droit maritime et on trouve dans le deuxième livre du code de commerce belge, intitulé « De la navigation maritime et de la navigation intérieure », les dispositions de droit maritime et de droit fluvial réunies, exception faite de quelques
.modifications techniques spéciales pour la navigation intérieure (art. 271s.).

Ce régime a été complété par une loi du 5 mai 1936 « sur l'affrètement fluvial ». C'est aux Pays-Bas que la navigation intérieure est assimilée le plus complètement à la navigation maritime. Selon l'article 748 du code -du commerce néerlandais, les règles de droit maritime s'appliquent telles :quelles à la navigation intérieure internationale. Le « codice della navigazione, » italien du 30 mars 1942 réunit de même à la fois la navigation maritime et la navigation intérieure, selon les mêmes principes et dans la même codification, laquelle s'étend d'ailleurs également à .la matière du droit aérien.

Il ressort des substances de ces réglementations étrangères qu'une unité juridique assez prononcée existe, en particulier sur le Rhin, et que les dispositions de droit fluvial, sous réserve de quelques exceptions, cor-

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respondent aux règles du droit maritime. Comme les droits maritimes étrangers ont incorporé au droit national ou ont repris textuellement les différentes conventions internationales concernant la navigation maritime, et qu'elles y appliquent ce droit maritime à la navigation intérieure, on trouve, dans la navigation du Rhin, une réglementation uniforme en matière d'abordage, d'assistance et de sauvetage,, d'avarie commune, ainsi, en principe, qu'en matière de contrats sur l'utilisation des bateaux de la navigation intérieure. En ce qui concerne la responsabilité de l'armateur, l'unité juridique existe en tant que tous les Etats riverains du Rhin ont résolu ce problème de la même façon d'après les principes du droit maritime. L'application pure et simple du droit maritime offre le grand avantage que la question difficile de la délimitation de ces deux ordres juridiques peut ainsi être éludée, ce qui se révèle particulièrement opportun, eu égard à la faveur croissante dont jouissent les contrats de transport directs.

Pour la Suisse, la nécessité de ne pas désavantager les entreprises nationales par rapport aux entreprises concurrentes de l'étranger est un élément décisif du problème.

La mise au point du droit maritime suisse offre l'occasion de régler ces matières du droit fluvial, qui n'étaient jusqu'alors pas régies par la loi.

Le plus sage paraît, à cet égard, de suivre les exemples des Pays-Bas et de la Belgique et de déclarer applicables à la navigation intérieure les dispositions de droit maritime qui s'y prêtent. Les articles 111--113 de notre projet permettent ainsi de régler de façon adéquate l'ensemble du droit privé de la navigation intérieure suisse. De la sorte, le projet tient compte des besoins particuliers de notre navigation fluviale internationale.

Article 111. En délimitant la portée des dispositions du droit maritime quant à leur application à la navigation intérieure, il faut garder présent à l'esprit que la nouvelle réglementation n'est pas destinée à s'appliquer à la navigation purement intérieure sur les lacs et les rivières, mais bien à la navigation fluviale sur les cours d'eau internationaux reliant directement la Suisse à la mer et dont la navigation est l'objet d'une concurrence étrangère et constitue en même temps une unité juridique conditionnée par le réseau
fluvial. Pour la navigation purement interne, qui sert surtout au transport des personnes, les prescriptions de la législation sur les chemins de fer, s'appuyant sur la concession fédérale nécessaire, demeureront en vigueur. Comme, pour le moment, le Rhin n'est na-vigable sans interruption que jusqu'à Rheinfelden, la nouvelle réglementation se limitera actuellement à ce parcours rhénan. Mais, si le Rhin est rendu navigable jusqu'au lac de Constance, ou si d'autres fleuves sont rendus navigables entre la mer et la Suisse, la formule de l'article 111 sutura pour étendre de plein droit à ces nouvelles liaisons le domaine d'application des règles du droit maritime. La navigation sur les eaux spécifiées à 'article 111 n'est, d'autre part, soumise aux règles du droit maritime que ai elle est exercée avec des

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bateaux de la navigation intérieure devant répondre à des conditions particulières. A cet égard, la nationalité du bateau ou son lieu d'enregistrement ne jouent aucun rôle, car le droit applicable en matière de navigation intérieure n'est pas déterminé par le pavillon du bateau mais selon d'autres principes du droit international privé, en particulier d'après le lieu où un événement s'est produit. C'est pourquoi la seule exigence est que le bateau soit inscrit dans un registre public suisse ou étranger, de façon que des points de rattachement matériel soient donnés. Les autres conditions prévues pour un bateau de la navigation intérieure sont reprises de la définition, fourme par l'ordonnance internationale du 27 février 1948 concernant la visite des bâtiments du Rhin. (AS 64, 134.) Notre projet envisage, d'autre part, uniquement la navigation intérieure exercée à titre professionnel. Ne sont applicables à la navigation intérieure exercée avec les bateaux ainsi désignés sur les eaux internationales en question que les dispositions de la loi maritime qui sont visées aux articles 112 et 113. Sont en outre réservées les dispositions suisses ou internationales particulières à la navigation intérieure, lesquelles ont alors naturellement la priorité.

Article 112, La personne de l'armateur est également au premier plan dans la navigation intérieure; notre projet reprend donc la même définition que pour l'armateur maritime. En ce qui concerne la responsabilité de l'armateur fluvial, les mêmes principes peuvent être repris puisque, dans les autres Etats riverains du Rhin, l'armateur fluvial est soumis à la même responsabilité que l'armateur maritime. Cette rigoureuse responsabilité causale appelle cependant, ici aussi, une limitation de la responsabilité à un montant maximum et les mêmes motifs d'opportunité juridique déterminent de même le choix du système de responsabilité. Notre projet reprend donc pour la navigation intérieure le système de la responsabilité forfaitaire, ce que le professeur Haab avait déjà réclamé.

Ce système forfaitaire veut cependant que la fixation de l'unité numérique de responsabilité s'effectue sur d'autres bases de calcul que pour les navires, parce que les bateaux affectés à la navigation intérieure ne sont pas mesurés par tonneaux de jauge, mais par tonnes de portée en lourd.
Pour tenir compte du fait que les dangers d'exploitation sont plus grands lorsqu'un bateau est muni de moyens mécaniques de propulsion, et que la valeur de ce bateau est plus élevée aussi, le montant maximum des responsabilités est, en outre, majoré en proportion du nombre de chevauxvapeur de puissance. Pour les remorqueurs, qui ne peuvent être estimés que d'après leur puissance, cette dernière base de calcul est la seule.

La nécessité d'une limitation de la responsabilité de l'armateur fluvial dans le trafic international a déjà, été pleinement dégagée par le professeur Haab (cf. Haab : « Die beschränkte Haftung des Reeders im Binnenschiffahrtsrecht », Bàie 1934, dans « Beiträge zum Handelsrecht, Festgabe zum 7O.Geburtstag Carl Wieland»), Les raisons qu'a la Suisse d'accorder une

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limitation de responsabilité à ses armateurs fluviaux sont évidentes: d'une part, l'armateur fluvial répond sans exception de toutes les fautes de l'équipage; d'autre part, si le montant de sa responsabilité est déterminé d'après le droit suisse, cette responsabilité n'est jusqu'à présent soumise à aucune limitation. Dans les droits allemand, français, belge et néerlandais, la responsabilité causale et rigoureuse du propriétaire de bateaux est supportable parce qu'elle est combinée avec la limitation de responsabilité. Mais si un armateur suisse, lors d'un accident à l'étranger, est recherché en vertu du droit étranger, on ne sait pas avec certitude s'il peut, de même, se prévaloir de la limitation de responsabilité de ce droit étranger, parce que son droit national ne garantit pas la réciprocité. En revanche, les Etats étrangers protègent leurs propres armateurs également en cas de dommages causés à l'étranger, en n'autorisant la poursuite en exécution que dans la mesure prévue par le droit national de l'armateur.

Tous ces mêmes motifs qui ont amené les autres Etats riverains du Rhin à introduire la limitation de la responsabilité de leurs armateurs fluviaux valent également pour la Suisse; les autres Etats riverains du Rhin disposent d'une navigation étendue représentant une forte concurrence, et nos propres armateurs doivent, en matière de responsabilité, jouir des mêmes avantages que les armateurs étrangers. Indépendamment de cette question de la concurrence étrangère, une limitation de la responsabilité de l'armateur est en outre souhaitable, parce que l'abordage devient un des dangers les plus sérieux de la navigation fluviale, danger qui s'est même augmenté durant les dernières décennies du fait de l'usage accru de bateaux munis de moyens de propulsion mécaniques et, par conséquent, doués d'une plus grande rapidité. La négligence d'un instant peut, dans certains cas, conduire à des dommages disproportionnés dont la réparation entière peut avoir pour suite la ruine de l'armateur; les accidents de navigation sont, à cet égard, plus graves que les accidents de la circulation terrestre, parce que le danger de perte totale est évidemment beaucoup plus considérable. L'armateur fluvial assume donc un risque qui dépasse considérablement celui de tous les autres entrepreneurs de transports terrestres
et il paraît juste en soi d'atténuer ce risque par une limitation de sa responsabilité. La navigation fluviale court d'aussi grands dangers nautiques que la navigation maritime, et c'est pourquoi les Etats étrangers ont également limité la responsabilité dans une mesure appréciable. L'Allemagne et la France ont repris tel quel le système maritime de l'exécution et leurs armateurs fluviaux sont limités à une simple responsabilité réelle mesurée d'après le bateau et le fret. L'armateur néerlandais ne répond, dans la navigation intérieure également, que jusqu'à concurrence de 50 florins par mètre cube, de la contenance du bateau. En Belgique, la responsabilité de l'armateur rhénan est limitée à 500 francs belges pour chaque tonne de portée en lourd. Les créances pour lesquelles la responsabilité est ainsi limitée sont, à peu de chose près, les mêmes dans les divers Etats riverains du Rhin.

Feuille fédérale. 104e année. Vol. I.

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II apparaît judicieux que la Suisse reprenne ainsi la limitation forfaitaire, simple et pratique, l'unité numérique ne devant pas être déterminée sans tenir compte des règles étrangères, en particulier des valeurs contributives des bateaux telles qu'elles ont été fixées par l'association internationale des registres des bateaux du Rhin, et de la valeur moyenne du tonnage suisse. C'est ainsi que le projet s'est arrêté à un montant de cent francs par tonne de portée en lourd et de deux cent cinquante francs par cheval-vapeur de puissance. Ces montants sont adéquats et fournissent un maximum de responsabilité plus élevé que celui des droits étrangers.

Le montant maximum de la responsabilité reste indépendant du sort du bateau et c'est l'accident, non pas le voyage, que circonscrit l'application de cette limitation. En pratique, cette nouvelle réglementation de la responsabilité de l'armateur fluvial ne lèse pas les intérêts des tiers, car depuis de longues années déjà il est usuel en matière contractuelle, en particulier pour les contrats de transport, de limiter la responsabilité par des clauses conventionnelles correspondant à la réglementation étrangère. Pour les dommages extracontractuels, par exemple pour ceux qui résultent de l'abordage, ce ne sont, avant tout, que les armateurs rhénans qui sont touchés, et le nouveau droit en la matière ne s'appliquera qu'à cette catégorie professionnelle, Article 113. Cet article indique les autres dispositions du droit maritime qui seront appliquées à la navigation intérieure. Comme la législation du travail a déjà reçu dans la navigation rhénane une réglementation internationale, il suffit de rendre applicables les principes régissant les obb'gations du capitaine et de l'équipage. Les autres dispositions concernant l'équipage ne peuvent pas être appliquées à la navigation intérieure.

Les dispositions sur les contrats pour l'utilisation du navire sont intégralement déclarées applicables aux transports sur le Rhin. Ne font exception que les conditions de droit public prévues pour l'armatextr, parce que la navigation intérieure ne connaît aucune condition de nationalité telle que celles qui doivent être posées pour la navigation maritime sous pavillon suisse. Le transport des personn.es dans la navigation intérieure se trouve, d'autre part, déjà réglé dans
le droit suisse du fait du régime de la concession.

L'adoption du droit maritime en matière de transport comprend cette innovation importante qu'à l'avenir la nature et la signification du connaissement en tant que document le plus important, seront consacrées par la loi également pour la navigation intérieure. Depuis longtemps, des connaissements sont établis dans la navigation rhénane par des transporteurs suisses; or, cette pratique a manqué jusqu'à présent de toute base légale.

L'introduction du connaissement du droit maritime entraîne, pour les transports rhénans également, la limitation des clauses dérogatoires prévues à l'article 103 du projet; par là se trouve satisfait un désir déjà ancien des chargeurs. Jusqu'à présent, dans la navigation intérieure, les clauses

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libératoires de la responsabilité contractuelle en matière de transport étaient possibles dans les limites des articles 100 et 101 du code des obligations, et il a été abondamment fait usage de cette possibilité. L'adoption d'une législation maritime adéquate met aujourd'hui des bornes nécessaires à cette liberté contractuelle dont il a tant été fait usage, ce qui répond, dans une très grande mesure, aux intérêts des chargeurs.

L'adoption, en matière d'abordage, d'assistance et de sauvetage, du droit unifié sur le plan international, permet, de même, d'assurer l'uniformité du droit en la matière dans toute la navigation rhénane, en même temps qu'elle fournit à la Suisse une réglementation légale adéquate. Il en va de même de la nouvelle base légale de l'avarie commune, cette institution typique du droit maritime qui, dès l'apparition de la navigation suisse sur le Rhin, a été contractuellement adoptée par les armateurs, les chargeurs et les sociétés d'assurances.

Eu égard au développement particulier du droit de navigation, il paraît également opportun que les dispositions sur le pouvoir d'interprétation et d'appréciation du juge (art. 5 de notre projet) soient rendues applicables par analogie à la navigation intérieure.

Titre,

VIII

DISPOSITIONS PÉNALES ET DISCIPLINAIRES La navigation maritime connaît un droit pénal et disciplinaire particulier qui, dans les pays maritimes, se trouve souvent dans les codes pénaux ordinaires, mais, pour la plus grande partie, dans un code pénal spécial pour la marine marchande. Nous ne pouvons envisager, en. Suisse, d'adopter pareil code complet et spécial; nous devons nous contenter d'introduire les dispositions pénales complémentaires nécessaires à la sécurité et au bon ordre de la navigation maritime sous pavillon suisse, cependant que nous pouvons renoncer à des dispositions pénales spéciales pour toutes les infractions qui, en elles-mêmes, sont déjà visées par une disposition répressive du code pénal suisse. Ce n'est que lorsqu'une sanction ne peut, vu la matière, être tirée de ce code pénal qu'il convient de prévoir des délits particuliers du droit maritime.

Si on laisse de côté les délits maritimes particuliers prévus par les articles 60 à 63 de l'arrêté, le droit actuel règle le problème en renvoyant au droit pénal terrestre. Notre projet rspreiid ce système en ce qui concerne l'application du code pénal et des autres dispositions pénales du droit fédéral (art. 2). En ce qui concerne les infractions commises par un membre de l'équipage à bord ou en rapport avec ses obligations de service et pour lesquelles l'article 57 de l'arrêté prévoit l'application du code pénal militaire, sans cependant rendre compétents les tribunaux militaires, notre projet s'écarte, en revanche, du régime actuel. De même, notre projet ne se borne pas à recourir au régime disciplinaire militaire (CPM, art. 180 à

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214), ainsi que le faisait l'article 58 de l'arrêté, mais il prévoit, pour ces fautes particulières de l'équipage, des infractions différenciées répondant aux circonstances, et notre droit disciplinaire se trouve formulé de façon précise par des dispositions spéciales. Les membres de l'équipage ne sont ainsi plus soumis au code pénal militaire que s'ils se trouvent assujettis à ce droit-là du fait que sont remplies les conditions de nature personnelle ou substantielle qui sont prévues pour son application (CPM, art. 2 à 4).

Il n'y a en effet aucune raison, pour les délits de droit commun, de punir les personnes travaillant à bord d'un navire plus sévèrement, du fait de ce lieu de travail, que les autres citoyens qui, par exemple, gagnent leur vie comme pilotes, comme chauffeurs ou comme employés de chemin de fer.

Des peines plus sévères ne sont justifiées que là où un intérêt particulier doit être protégé, comme par exemple celui de la sécurité du trafic routier dans le cas des chauffeurs. Les intérêts qui doivent spécialement être protégés dans la navigation maritime sont la sécurité du navire et de la navigation, l'ordre et la discipline à bord et l'intégrité du pavillon suisse sur mer. Lorsque ces intérêts légitimes sont lésés ou menacés, une peine plus sévère pour l'auteur est nécessaire, que cslui-ci soit, au surplus, membre ou non de l'équipage. Notre projet répond à ce besoin de protection de la navigation en prévoyant, à l'instar de modèles étrangers, certains délits maritimes spéciaux; il fournit par là une protection pénale que l'application générale du droit pénal militaire à l'équipage ne fournirait pas.

Certains de ces délits maritimes de notre projet ne peuvent être commis que par les membres de l'équipage; d'autres peuvent l'être par tout le monde. En visant les délits de « mise en péril », notre projet vise différents actes pénaux qui font, à l'étranger, l'objet de dispositions pénales spéciales. Comme le droit pénal militaire a d'autres buts, étrangers aux intérêts de la navigation maritime, son extension à celle-ci doit être écartée, malgré la similitude certaine des deux domaines en raison de la hiérarchie qu'on rencontre dans l'armée et dans la marine. L'arrêté n'avait, d'ailleurs, soumis l'équipage au code pénal militaire que faute de temps et faute de mieux.

Lorsque l'infraction
d'un membre de l'équipage n'est pas réprimée par les dispositions pénales spéciales de notre projet et qu'elle doit simplement être punie d'après le code pénal suisse, le juge peut, eu égard aux circonstances du cas, tenir compte dans la fixation de la peine, selon l'article 63 du code pénal, du fait que l'auteur a agi à l'occasion de ses obligations de service à bord et, en considération de ces circonstances personnelles, apprécier la gravité de l'acte et prononcer une peine plus sévère.

L'objectif légal d'une responsabilité pénale plus élevée des membres de l'équipage peut donc être atteint sur la base de l'ordre juridique existant.

Il n'est pas nécessaire de réprimer par un texte spécial, pour les frapper simplement de pénalités plus sévères, les délits de droit commun commis par les membres de l'équipage, ni d'obtenir ces pénalités plus sévères par tin renvoi au droit pénal militaire.

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Notre projet a renoncé à reprendre le régime disciplinaire militaire, parce que cette solution, seule possible en 1941 du fait de manque de temps, ne peut pas, à la longue, répondre aux besoins maritimes, bien que l'équipage d'un navire soit également organisé selon une hiérarchie militaire. La définition de la faute disciplinaire militaire ne peut pas être appliquée telle quelle aux circonstances de l'équipage d'un navire; parmi les peines disciplinaires du régime militaire manque, d'autre part, l'amende disciplinaire, peine connue par le droit pénal maritime de tous les pays et, en pratique, hautement efficace. La compétence pénale d'un colonel (jusqu'à 15 jours d'arrêts de rigueur), attribuée par le droit actuel au capitaine, qui est le plus souvent un étranger, paraît, d'autre part, exagérée au vu des systèmes étrangers. C'est pourquoi notre projet institue, par ses articles 141 à 147, un régime disciplinaire propre, auquel les passagers sont également soumis. Cette réglementation légale suit la terminologie du droit pénal militare, mais vise les buts de protection particuliers à la navigation maritime. Le système des peines correspond aux modèles étrangers récents. Le régime disciplinaire de notre projet est complété par le fait que certains faits délictueux de peu de gravité ne seront punis que disciplinairement, ce qui allège d'autant les dispositions disciplinaires proprement dites, Nous avons pu renoncer à prévoir pour les délits spéciaux de notre projet l'équivalent de ce qu'est, dans le droit commun, la partie générale du code pénal, puisque, d'après l'article 333 de ce dernier, ladite partie générale du code pénal suisse s'applique également aux faits réprimés pénalement par d'autres lois fédérales. Cette applicabilité de la partie générale du code pénal suisse est d'une grande importance sur plusieurs points, tels que cumul d'une peine privative de liberté et de l'amende et montant des amendes (CP, art. 48, 50 et 106), application du droit durant la période intermédiaire (CP, art. 336), compétence locale selon le lieu de commission (CP, art. 346), for subsidiaire des infractions commises à l'étranger (CP, art. 348), for en cas de participation (CP, art. 349), for en cas de concours de plusieurs infractions (CP, art. 350). Malgré cette applicabilité de la partie générale du code pénal,
les articles 5 et 6 de celui-ci n'ont cependant aucune application à la navigation maritime, puisque nous avons, dans l'article 2 de notre projet des dispositions spéciales sur le champ d'application du droit pénal suisse. Pour la fixation de la peine et sa mesure, notre projet laisse une grande liberté au juge pour les divers délits, mais s'inspire, quant à la gradation des délits, selon leur gravité (crimes, délits, contraventions), exprimée par le maximum prévu pour la peine, de modèles étrangers récents, en particulier du droit pénal maritime très complet qu'on trouve dans 1s code italien de la navigation de 1942. Une grande liberté doit être laissée au juge parce qu'une doctrine et une jurisprudence suisses manquent encore en la matière et qu'une sanction pénale adéquate ne peut pas être, d'avance, fixée pour chaque

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acte, d'autant moins que, pour les délits de « mise en péril », de nombreuses variétés d'actes doivent être envisagées. Le même fait peut aussi, dans la navigation maritime, être, selon les circonstances, d'un© nature beaucoup plus ou beaucoup moins grave; il en ira notamment ainsi de la mise en péril du navire d'ordre nautique. Pour les délits de peu de gravité et pour les contraventions, les arrêts, peine privative de liberté, sont exclus, car il ne serait pas raisonnable de transporter en Suisse l'auteur pour lui faire subir une détention de quelques jours. Pour des cas de ce genre, notre projet a prévu l'amende et, le cas échéant, une peine disciplinaire. Notre projet reprend, pour la terminologie, les expressions et les conceptions du code pénal suisse et du code pénal militaire, ce qui facilitera l'application et l'interprétation du texte. Les définitions légales du capitaine, de l'armateur, des officiers et des marins ne se trouvent pas dans la partie pénale du projet, mais dans les articles 34, 39 et 48. La disposition de l'article 39, 4e alinéa (commandement effectif), est particulièrement importante à cet égard.

On pourrait reprocher à ce droit pénal maritime, du point de vue suisse, le fait que la poursuite, l'instruction ou même la découverte de l'acte pénal est pratiquement exclue lorsque le délit a été commis en haute mer. Indiquons donc que le droit pénal maritime a avant tout un caractère préventif. Les sanctions pénales contribuent à assurer l'ordre juridique de la navigation en rendant possible la protection juridique nécessaire, indépendamment de la question de savoir si un fait déterminé conduit ou peut conduire chaque fois jusqu'à un jugement pénal. On ne peut pas renoncer à l'ordre juridique pénal sous prétexte qu'il est difficile, quelquefois presque impossible, d'assurer l'application de la loi. Les dispositions de droit pénal de notre projet n'en auront pas moins leur valeur; elles indiqueront surtout clairement à l'étranger que la navigation maritime suisse doit s'effectuer dans l'ordre.

Les faits pénaux déjà prévus par les articles 60 à 63 de l'arrêté ont été repris et développés par notre projet. La réunion de ces délits avec les autres délits nouvellement prévus par le projet a suggéré la répartition de toutes ces infractions en infractions contre la sécurité du navire
et la navigation (art. 114 à 119), punies en vue de protéger l'ordre «extérieur» de la navigation, et en infractions contre la discipline et l'ordre à bord (art. 120 à 128), punies en vue de protéger l'ordre « intérieur » du navire.

Le troisième chapitre traite des infractions particulières contre l'organisation de la navigation suisse et vise à la protection des intérêts particuliers de l'Etat du pavillon.

Le régime pénal de notre projet a encore cette autre utilité de compléter le « cahier des charges » du propriétaire, de l'armateur, du capitaine et des marins. Comme chaque sanction pénale suppose la violation d'une règle du droit normatif dont la formulation est sous-entendue par la disposition pénale, il se dégage en effet des dispositions pénales de notre projet

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une série de devoirs dont l'énoncé dans les chapitres antérieurs de la loi n'aurait conduit qu'à des répétitions inutiles. Partout où une sanction du droit civil ou du droit administratif suffit pour assurer le respect de la loi, notre projet a renoncé à la sanction pénale. Pour de nombreuses obligations, il a été possible de renoncer à prévoir une infraction pénale parce que le code pénal suisse fournit déjà, d'une façon générale, une protection juridique suffisante. Le droit pénal maritime particulier incorporé à notre projet ne constitue ainsi pas seulement un complément du droit pénal suisse, mais il constitue également un élément du système d'ensemble de la navigation suisse.

Chapitre premier

Des infractions contre la sécurité du nayire et de la navigation Article 114. Ce délit manquait jusqu'à présent dans notre droit, n est cependant nécessaire de le prévoir pour la protection des navires de mer suisses, car les délits de dommage à la propriété (CP, art. 145), de mise en danger de la vie d'autrui (CP, art. 129), de lésion corporelle (CP, art. 122s.), de meurtre et d'homicide par négligence (CP, art. 111 et 117) ne suffisent pas. La protection pénale doit, dans le temps, être assurée avant et non pas seulement après la commission de l'acte. Le cadre pénal des délits en question est trop étroit, eu égard aux dangers considérables que comportent ces mêmes faits sur mer. Le délit de « mise en péril » prévu par l'article 114 englobe dans sa construction toute une variété de faits pénaux distingués par les droits maritimes étrangers, mais qui ont pu être ramenés à un dénominateur commun.

Articles 115 et 116. A la différence du délit de mise en péril du navire (art. 114), qui peut être commis par tout le monde, le délit de mise en péril de la navigation et les contraventions aux règles nautiques ne peuvent être commis que par un membre de l'équipage. Le délit réprimé à l'article 115 constitue un élargissement de l'article 63 de l'arrêté, lequel ne le prévoyait que comme infraction. L'article 115 correspond, en tant que fait criminel, au délit d'entrave à la circulation publique du code pénal (art. 237), cependant que l'article 116 ne prévoit qu'une contravention, puisque, s'il n'y a pas eu mise en péril, les prescriptions de police ont seules été violées.

L'intérêt à protéger réside, d'une façon générale, dang la sécurité de la navigation, celle du navire suisse comme celle des autres navires. Deux éléments doivent être réunis: l'inobservation des règles nautiques et la mise en péril du navire ou des personnes à bord. Si l'infraction n'a pas entraîné cette mise en péril, l'auteur n'est puni que pour la contravention correspondante, sur la seule base de l'article 116, dont la disposition n'a ainsi ainsi qu'une valeur subsidiaire.

Articles 117 et 118. L'article 117 réprime un autre délit de mise en péril, par lequel le devoir cardinal du capitaine se trouve sanctionné pénale-

328 ment. Les délits de mise en péril du navire et de la navigation ne suffisent pas, car l'article 114 suppose qu'un navire en bon état de navigabilité a été ultérieurement mis en mauvais état de navigabilité et l'article 115 se réfère essentiellement aux règles de l'art nautique, auxquelles les exigences d'équipement et d'armement n'appartiennent pas. Le délit de mise en état de mauvaise navigabilité, connu de tous les droits étrangers, doit donc être prévu. Il ne peut cependant y avoir aucune suite pénale pour la mise en péril de la cargaison se trouvant à bord et résultant de la mauvaise navigabilité; autrement, chaque cas de dommage aux marchandises se trouverait transporté sur le terrain pénal au lieu d'être réglé sur le terrain civil. L'article 118 prévoit une contravention administrative qui peut également être commise par l'armateur. Une mise en péril n'est pas nécessaire. Le fait réprimé englobe différents délits particuliers connus à l'étranger, comme, par exemple, le fait de prendre la mer sans approvisionnement ou avec un équipage insuffisant, etc.; la disposition est de nature subsidiaire.

Article 119. Cette disposition correspond à la prescription de l'article 62 de l'arrêté et sanctionne les devoirs du marin, tels qu'ils sont consacrés depuis des siècles. Une disposition correspondante se trouve dans tous les autres droits maritimes.

Chapitre H

Des infractions contre la discipline et l'ordre à bord Ces dispositions pour la protection de l'ordre interne du navire font qu'il est superflu de soumettre les membres de l'équipage au droit pénal maritime; elles assurent en effet une protection adéquate aux intérêts qu'il s'agit de sauvegarder.

Article 120. Ce délit bien connu du droit maritime doit également être prévu par le droit maritime suisse, puisque la disposition pénale consacre légalement des devoirs incontestés depuis longtemps. Un service et des mesures appropriés de sauvetage ne sont d'ailleurs possibles que surla base de ces dispositions.

Articles 121 et 124. Les délits de non-exercice du commandement et d'abandon de poste sont également connus à l'étranger. Ils sont nécessaires pour consacrer les devoirs du capitaine et des gens de mer. Tandis que le capitaine est punissable sitôt qu'il n'exerce pas son commandement ou qu'il le néglige, les marins ne sont punissables que s'ils abandonnent un poste essentiel à la sécurité du navire ou de la navigation. L'abandon d'un poste moins important ne constitue, au maximum, qu'un fait de désobéissance et sera puni disciplinairement.

Article 122. Cette disposition est rendue nécessaire par le fait que le capitaine a tant d'attributions que des abus ne peuvent être empêchés que par des sanctions pénales correspondantes. En la forme, cet article correspond aux dispositions du code pénal militaire, articles 66, 67 et 69.

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Article 123. Le délit de désertion, jusqu'à présent réglé par un renvoi aux articles 83 et 84 du code pénal militaire, pose le problème le plus discuté du droit pénal maritime. Dans les siècles passés, des peines sévères étaient prévues, telles que fouet et peines corporelles; actuellement, l'engagement du marin est ramené à un contrat de travail, de sorte que la sanction pénale a été considérablement adoucie. A la différence de beaucoup d'autres délits maritimes, qui sont punis par les Etats riverains de la mer, la désertion est un délit qui n'est puni que par l'Etat du pavillon. La question se pose donc de savoir si le droit maritime suisse doit ou ne doit pas prévoir ce délit puisque, d'après notre conception interne, la rupture d'un contrat de travail ne constitue pas un délit. La conséquence normale, en droit civil, réside dans l'obligation de réparer le dommage. En droit maritime, il y a cependant des motifs particuliers pour soumettre cette désertion à une peine. Le capitaine peut, du fait de la rupture de son contrat par un membre de l'équipage dans un port éloigné, se trouver en posture difficile et, selon les circonstances, être obligé d'interrompre le voyage si les autorités du port refusent le départ du navire, faute d'équipage suffisant. Le marin ne sera guère en mesure de réparer pareil dommage. Indépendamment de ce désavantage financier, on doit aussi invoquer la sécurité même du navire, lorsque le capitaine doit se tirer d'affaire avec des remplaçants mal préparés a leur tâche ou, faute de remplaçants, doit imposer un surcroît de travail au reste du personnel et, du fait de pareil surmenage, exposer son navire à des dangers. Du point de vue juridique, on peut donc considérer que le marin n'est pas seulement lié par un rapport de droit privé à son employeur, l'armateur, mais qu'il est aussi lié par un certain rapport de droit public à l'Etat du pavillon qui, par ailleurs, lui doit aussi protection.

Un dernier argument, mais non le moindre, en faveur du maintien du délit de désertion, est que les gens de mer sont habitués à d'autres mesures que les employés et les travailleurs terrestres. Ils sont habitués à ce que la désertion soit punie. Les droits maritimes de la Belgique, de la France, de l'Allemagne, des Pays-Bas, de l'Italie et de l'Angleterre et d'autres pays sanctionnent
cette infraction. Pour ces motifs et pour d'autres encore, aucun Etat maritime étranger n'a renoncé à punir la désertion. Un fait d'expérience semble être qu'on ne peut se tirer d'affaire sans 'ce délit. Le droit anglais ne prévoit, il est vrai, pas de peine d'emprisonnement, mais prévoit seulement la perte du salaire, indépendamment de la réparation du dommage; mais le capitaine peut aussi s'adresser aux autorités et leur demander de ramener de force le déserteur à bord. La Suisse ne peut pas exercer de contrainte administrative de cet ordre, ce qui fait qu'elle doit se contenter d'une sanction pénale. Il convient donc certainement que notre droit maritime consacre le délit de désertion, non sans toutefois y apporter quelque adoucissement par rapport à certains droits maritimes étrangers plus anciens, dans ce sens que ce n'est pas tout abandon du navire contraire au contrat d'engagement qui constituera une désertion punissable, mais

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seulement l'abandon entraînant une difficulté essentielle pour l'exploitation du navire. Cette solution correspond au nouveau droit maritime italien et permet au juge de statuer équitablement dans chaque cas. La libération de toute peine en cas de retour en temps utile, exemple typique de repentir actif, correspond à la réalité et paraît appropriée. Les éléments de la désertion sont le fait de quitter le navire contrairement au contrat d'engagement et l'animus de ne pas y revenir. La caractéristique objective du délai est la difficulté essentielle qui en résulte pour l'exploitation du navire. La difficulté sera essentielle lorsque la sécurité du navire et des personnes à bord est menacée.

Article 125. Cette disposition est également nécessaire, mais non pas dans sa forme militaire, où l'ivresse n'est punissable que si elle donne Heu à un trouble public. Dans la navigation, l'ivresse est un délit dès qu'elle menace la sécurité du navire ou de la navigation. La protection nécessaire n'est donc pas fournie par l'action lìbera in causa de l'article 263 du code pénal, car la protection pénale doit pouvoir être fournie avant que le malheur ne se soit produit. La sanction pénale ne sert pas seulement à la sécurité du navire, mais aussi au bon renom de la marine marchande suisse. Dans sa construction juridique, ce délit s'inspire du droit italien. On le retrouve cependant sous une forme analogue dans les autres droits maritimes.

Article, 126. La conduite du voyage à bonne fin suppose l'autorité chez les supérieurs et l'obéissance chez les subordonnés. Tous les pays maritimes connaissent, par conséquent, le délit de désobéissance. Ce n'est cependant pas toute désobéissance à l'ordre d'un supérieur qui est punissable pénaleraent, mais il doit s'agir d'un ordre nécessaire à la conduite du navire. Un adoucissement par rapport au délit militaire général de refus d'obéissance s'impose dans la navigation: le refus d'obéissance n'est une infraction pénale que si une conduite sûre du navire n'est plus possible, mais non pas lorsque n'importe quel ordre, qui pourrait également être donné dans une entreprise terrestre, n'est pas exécuté. Une aggravation de la peine pour le cas où le refus d'obéissance menace la sécurité du navire est superflue puisque cette circonstance est déjà couverte par l'article 114. Ce n'est
que dans le cas d'une désobéissance à des ordres d'assistance et de sauvetage qu'une peine supérieure est indiquée. Tous les autres cas de refus d'obéissance trouvent leur sanction sur le terrain du droit disciplinaire.

Le délit de mutinerie au sens de l'article 63 du code pénal militaire, le complot de plusieurs en vue d'une action commune et la participation à un refus d'obéissance, à des menaces ou à tous actes dirigés contre les supérieurs, ne sont pas définis par notre projet comme des délits distincts, parce que ces formes d'insubordination sont visées par l'article 114. Tout trouble ou toute entrave apportés à la conduite du navire ou à l'ordre du bord, s'ils entraînent un danger pour le navire et les personnes, sont punis comme

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« mise en péril » du navire, cette disposition couvrant donc bien toute mutinerie de l'équipage.

Article 127. Les marchandises et les passagers clandestins sont prohibés. L'article 151 du code pénal sur l'obtention frauduleuse d'une prestation ne suffit pas, car, dans la navigation, il ne s'agit pas seulement de punir l'intention d'enrichissement qu'on peut trouver dans une concurrence idéale, mais bien, à l'égal de tout trouble domestique, le seul fait que certaines choses ou certaines personnes sont embarquées sans autorisation, d'autant plus que cela peut impliquer des dangers pour le navire. Des délits analogues sont prévus par les autres droits maritimes.

Article 128. Celui qui se rend à bord d'un navire encourt à tous égards une part de responsabilité pour les autres personnes à bord, pour le navire et pour l'armateur. Les expériences déjà faites durant les quelques années de navigation maritime suisse montrent que la tentation de contrebande est grande et que les suites pour le navire et la cargaison en sont graves, puisque l'Angleterre avait même menacé de refuser les « navycerts » dans un cas précis où l'on soupçonnait des marins suisses de contrebande. Ce n'est pas seulement la réputation du navire qui est menacée, mais bien toute la navigation maritime suisse. Cet article ne punit cependant pas la contrebande douanière ou fiscale, à la punition de laquelle pourvoient les autorités étrangères dont les prescriptions sont violées. Ce qu'il punit à l'instar des droits maritimes de la Belgique, de la France, de l'Allemagne et de l'Italie, c'est la mise en danger de l'exploitation du navire, représentée par ces manoeuvres.

Chapitre III

Des infractions contre l'organisation de la navigation suisse Les incriminations suivantes visent à la protection du pavillon suisse sur mer et de l'organisation administrative de la navigation maritime suisse ; elles ont, par conséquent, un caractère spécifiquement suisse. Pour certains délits, il a fallu tenir compte du fait particulier que, faute de littoral, la Suisse n'a aucune emprise directe sur ses navires. Notre projet a donc dû s'astreindre ici à la formulation précise de chaque délit particulier ; il a renoncé à viser globalement, par une disposition générale analogue à celles des articles 75 et 91 de la loi du 21 décembre 1948 sur la navigation aérienne (HO 1950, 471), toutes les violations des dispositions de droit civil ou administratif de la loi maritime. Une disposition pénale aussi générale serait en effet contraire à notre conception du droit pénal en tant que droit strict et n'offrirait aucune garantie contre l'arbitraire de l'administration.

Article 129. Le délit d'abus du pavillon et le port incorrect du pavillon suisse étaient déjà prévus par les articles 60 et 63 de l'arrêté. Le projet reprend ces dispositions avec quelques précisions, sans répéter que la peine privative de liberté et l'amende peuvent être cumulées puisque cela résulte

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déjà de l'article 50 du code pénal. Le maximum de l'amende a été fixé au montant légal de 20 000 francs (CP, art. 48), sous réserve d'élévation en cas de cupidité.

Article 130. Cette disposition correspond à l'article 61 de l'arrêté, mais a été modifiée en corrélation avec la nouvelle procédure. Le droit nouveau ne connaît plus la concession du droit au pavillon, mais l'enregistrement du navire dans le registre des navires suisses, enregistrement qui confère au navire son caractère suisse. La loi fédérale sur le registre des bateaux prévoit déjà, par ses articles 62 et suivants, des peines pour les infractions à la procédure d'enregistrement, peines qui ne suffisent cependant pas à garantir à nos navires maritimes un caractère incontestablement suisse.

Le nouvel article 130 fournit la sanction pénale nécessaire au respect des articles 14 à 25 du projet et va plus loin, par son texte, que l'article 61 de l'arrêté, puisqu'il punit non seulement les indications inexactes du requérant, mais également la dissimulation de faits essentiels.

Le 2e alinéa de l'article 130 consacre l'obligation du propriétaire d'annoncer les faits nouveaux essentiels, par où le régime des articles 14 et suivants de notre projet se trouve complété. Comme non seulement la propriété suisse, mais également l'exploitation suisse d'un navire doivent être protégées, le 3e alinéa prévoit une sanction pénale qui complète à son tour l'article 78 du projet relatif à la location du navire. Ces deux infractions des 2e et 3e alinéas ne sont que des contraventions, cependant que la fraude dans l'enregistrement est elle-même qualifiée de délit.

Article, 131, Cet article reprend le contenu de l'article 60, 2e alinéa, et de l'article 61, 5e alinéa, de l'arrêté. Une disposition analogue se trouve déjà à l'article 64 de la loi sur le registre des bateaux. Il est cependant nécessaire, dans la navigation maritime, de pouvoir prononcer des peines spécialement élevées afin d'assurer le respect des décisions des autorités, cela d'autant plus que toute mesure d'exécution à l'encontre d'un navire suisse ne peut, en Suisse même, s'effectuer que sur le papier. Les délits ordinaires de banqueroute frauduleuse et de fraude dans la saisie (CP, art. 163 et 164) ne suffisent pas, étant données les conditions de juridiction mises à l'ouverture d'une
faillite ou à l'établissement d'un acte de défaut de biens. Un délit particulier du droit maritime est donc nécessaire. En corrélation avec l'article 60 du code pénal, notre projet prévoit que l'amende, qui peut être prononcée cumulativement avec une peine privative de liberté (CP, art. 50), peut atteindre la valeur du navire, le juge pouvant, sur requête, allouer son montant aux lésés. Cette solution spécifiquement suisse est commandée par le fait que notre pays n'est pas riverain de la mer.

Article 132, Le droit légal de préemption de la Confédération, prévu par l'article 27 de notre projet, trouve sa protection pénale dans l'article 132, protection nécessaire puisque les navires, se trouvant à l'étranger, échappent à toute contrainte de la puissance publique suisse. Des offres fictives,

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privant la Confédération de l'exercice de son droit de préemption, peuvent être punies d'après cette disposition. Dans beaucoup de cas, un délit de fraude sera également réalisé.

Article 133. Comme l'exercice de la navigation avec un navire suisse repose administrativement sur l'établissement de la lettre de mer, l'obligation de restitution doit être sanctionnée pénalement pour assurer leur efficacité aux ordres des autorités. L'infraction n'est cependant qu'une contravention.

Article 134 et 135. La bonne tenue des livres de bord ne peut être assurée que par une disposition pénale ; c'est pourquoi les lois étrangères contiennent des prescriptions à cet effet. Les articles 134 et 135 correspondent à l'article 63 de l'arrêté. La négligence dans les devoirs d'information, qui s'écarte, en tant que délit spécial, de la règle générale de l'article 286 du code pénal, concerne les devoirs d'information particuliers prévus par le projet à la charge de l'armateur, du capitaine, etc.

Article 136. Notre projet contient des dispositions pour la protection du travail qui, vu leur caractère de droit public, doivent être sanctionnées par l'Etat, la protection du droit civil sur demande du lésé ne suffisant pas.

Toutes les législations du travail contiennent donc des dispositions pénales correspondantes, ce qui oblige à distinguer nettement les dispositions visant le rapport contractuel d'engagement et devant être appliquées par le juge civil, des dispositions de droit publie devant être appliquées par le juge pénal. L'article 136 établit cette distinction en ne reconnaissant le caractère de droit public et en ne donnant de sanction pénale qu'aux dispositions sur la durée du travail à bord, sur l'âge minimum, sur l'examen médical, sur les qualités requises pour l'engagement, ainsi que sur la procédure d'enrôlement.

Toutes les autres dispositions concernant le rapport contractuel d'engagement sont laissées à la compétence du juge civil. Les dispositions sur l'exécution d'une peine disciplinaire ont également un caractère de droit public, alors même que la compétence disciplinaire est conférée par l'Etat au capitaine. L'infraction est punie en tant que contravention.

Article 137. Le projet prévoit, à l'article 104, un régime particulier pour le transport des personnes. L'expérience a montré que des prescriptions
spéciales sur la sécurité et l'armement du navire, le logement et la nourriture des passagers, etc., sont nécessaires pour ce genre de transport.

Le respect de ces prescriptions ne peut être assuré que par des sanctions pénales. Toutes les autres dispositions sur le transport des personnes relèvent du droit civil.

Chapitre IV

Dispositions spéciales Article 138. La peine accessoire de l'interdiction d'exercer une profession prévue à l'article 54 du code pénal ne suffit pas, telle qu'elle est formulée,

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lorsqu'il s'agit des circonstances maritimes, de sorte qu'une interdiction spéciale est nécessaire, à titre rie peine accessoire, en cas de graves délits contre la sécurité du navire et de la navigation. Il en va de même des délits de l'abus du pavillon et de la fraude dans l'enregistrement, où le juge peut suspendre la navigation par le retrait de la lettre de mer prononcé à titre accessoire. L'interdiction accessoire d'exercer une profession tire son efficacité particulière du fait qu'un nouvel engagement du même marin est rendu beaucoup plus difficile et que cette peine accessoire est largement prise en considération à l'étranger.

Article 139. Comme seules les sociétés anonymes et en coopérative sont admises à titre de propriétaires et d'armateurs, et comme divers délits prévus par notre projet peuvent être commis dans l'activité d'une personne morale, la désignation précise des personnes pénalement responsables est nécessaire. La personne morale ne répond cependant en principe que des frais de procédure, mais non pas de l'amende prononcée à titre de peine pour la faute personnelle de l'auteur de l'acte. Une entorse à cette conception de la culpabilité pénale dans un Etat fondé sur le droit n'a cependant pas pu être évitée pour les délits de fraude dans l'enregistrement, de soustraction du navire et d'atteinte au droit de préemption de la Confédération, car, autrement, le but poursuivi n'aurait pu être atteint.

L'entorse est cependant justifiée en fait puisque, dans ces trois cas, la commission du délit est le plus souvent liée à un profit delà personne morale.

Article 140. Comme la loi du 22 janvier 1892 concernant l'extradition envers les Etats étrangers énumère limitativement les délits donnant lieu, à extradition, il est nécessaire que les délits graves prévus par notre projet soient expressément qualifiés de délits donnant lieu à extradition, d'autant plus que les Etats étrangers n'accordent l'extradition ou le transit que sur la base de la réciprocité, laquelle résulte des règles du droit suisse sur l'extradition. Cette disposition correspond à l'article 66 de l'arrêté.

Chapitre V Du régime disciplinaire

La systématique, la terminologie et certains éléments fondamentaux du régime disciplinaire du projet sont empruntés au droit pénal militaire.

Cependant, tandis que le droit disciplinaire vise à la protection de la discipline et de l'ordre militaire (CPM, art, 180), la compétence disciplinaire maritime du capitaine vise à assurer l'accomplissement de leurs tâches par les gens de mer et le maintien du bon ordre à bord. Tous les Etats maritimes connaissent un droit disciplinaire spécial pour les gens de mer.

La Suisse doit également en avoir un; celui-ci ne doit pas seulement correspondre aux usages maritimes, mais également aux conceptions suisses de l'Etat fondé sur le droit et la liberté. C'est pourquoi notre projet a

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rattaché le droit disciplinaire à la définition de la faute disciplinaire (art, 141), dans laquelle l'élément de culpabilité joue le même rôle que dans le droit pénal ordinaire. La portée du régime disciplinaire est délimitée avec précision; une distinction est faite entre membres de l'équipage et passagers, et les peines sont énumérées limitativement (art. 142 à 143). Les peines sont largement empruntées aux législations étrangères modernes. Le cumul des peines est interdit. Des objections s'élevaient contre l'institution de l'amende disciplinaire ; mais, en dehors des arrêts, qui comportent toujours un trouble dans le travail des marins, l'amende reste la peine la plus efficace. Comme le régime des fonctionnaires suisses connaît également des amendes disciplinaires, il n'y a pas de raison de principe pour s'opposer à l'institution d'amendes disciplinaires dans la navigation, d'autant moins que cette même peine est connue à l'étranger, où elle prend généralement la forme d'une retenue de salaire jusqu'à concurrence du salaire d'un mois.

Du point de vue suisse, il était important d'éviter tout lien entre le droit au salaire et la peine de l'amende. Le produit des amendes servira à des fins de prévoyance. A l'instar du droit pénal militaire, une prescription a été prévue (art. 144). La compétence du capitaine ou de son représentant ne suffit pas ; le juge saisi doit également pouvoir prononcer des peines disciplinaires dans des cas de peu de gravité (art. 145). Pour rendre possible l'exécution de pareilles peines disciplinaires prononcées par un tribunal, le juge dispose exceptionnellement de la peine des arrêts ordinaires, car il ne serait pas raisonnable de ramener à bord le délinquant déjà dérôlé simplement pour lui faire subir sa peine. La procédure est prévue en détail et vise tant à la protection de l'inculpé qu'à celle de la sécurité juridique (art. 146). Pour que le marin ne soit pas livré sans défense à la compétence disciplinaire du capitaine, un droit de recours contre toute peine disciplinaire prononcée est prévu, ce recours ne pouvant cependant avoir aucun effet suspensif. En revanche, notre projet prévoit qu'en cas de peine disciplinaire non fondée, l'inculpé doit échapper à tout préjudice financier (art. 147).

DISPOSITIONS FINALES ET TRANSITOIRES Sauf les dérogations transitoires
prévues aux articles 149, 150 et 151, qui visent l'adaptation des rapports existants au droit nouveau, toutes les dispositions contraires du droit fédéral seront abrogées de plein droit dès l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, l'entrée en vigueur étant fixée par le Conseil fédéral (art. 152).

Pour la période transitoire, le régime sera le suivant: a. Les concessions accordées en vertu de l'arrêté s'éteindront au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur de la loi; propriétaires et armateurs devront donc, dans ce délai, satisfaire aux conditions de fond

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et de procédure relatives à l'enregistrement des navires et à leur exploitation; ils y seront, d'ailleurs, invités au moins un an d'avance par l'office suisse de la navigation maritime; des dérogations -- qui ne pourraient être accordées que dans des cas exceptionnels -- seraient de la compétence du Conseil fédéral.

b. Les contrats d'engagement qui n'auraient pas été adaptés, dans l'année, aux dispositions imperatives de la loi seront régis d'office par celle-ci; ce délai est convenable, attendu que, matériellement, la réglementation actuelle (arrêté du 20 janvier 1942 concernant le contrat d'engagement des marins) correspond, dans l'ensemble, aux exigences du projet.

c. Quant aux contrats pour l'utilisation du navire, ils doivent être mis en harmonie avec le nouveau droit dans les six mois, exception faite du contrat de transport, qui se trouvera régi immédiatement par la nouvelle loi Les articles 88 à 103 sont aussi bien dans l'intérêt des chargeurs et de leurs ayants droit que dans celui des armateurs. Il est donc indiqué de les appliquer dès l'entrée en vigueur de la loi, réserve faite des conventions contraires des parties. Les autres contrats pour l'utilisation du navire, notamment le louage et l'affrètement, devront être adaptés au droit nouveau dans un délai relativement court, car l'usage même du pavillon est en cause.

Le titre final du code civil suisse, applicable par analogie, réglera, entre autres choses et quant aux rapports de droit civil, l'application du droit suisse et du droit étranger.

Nous vous recommandons d'accepter le projet de loi joint au présent message.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 22 février 1952.

Au nom du Conseil fédéral suisse; Le président de, la Confédération, KOBELT fll20

Le chancelier de la Confédération, Ch. OSER

337 (Projet)

LOI FÉDÉRALE sur

la navigation maritime sous pavillon suisse

L'Assemblée fédérale, de la Confédération suisse, vu les articles 24ter, 64 et 64bis de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 22 février 1952, arrête ; Titre premier

ORGANISATION ET AUTORITÉS Chapitre premier

Principes généraux Article premier La navigation maritime sous pavillon suisse est régie par le Papillon suiss droit suisse dans la mesure compatible avec les principes du droit et droit des gens des gens.

2 Le pavillon maritime suisse porte une crois; blanche sur fond rouge; les formes et les proportions répondent à la figure annexée à la présente loi.

3 Le pavillon suisse ne peut être arboré que par des navires suisses; tout navire suisse arbore le pavillon suisse à l'exclusion de tout autre.

4 Baie est le port d'enregistrement unique des navires suisses, au sens de la déclaration internationale de Barcelone du 21 avril 1921 portant reconnaissance du droit au pavillon des Etats dépourvus de littoral maritime.

1

Feuille, fédérale. 104e année. Vol. I.

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Application du droit Baisse

Ordonnai»TM du Conseil fédéral

Pleine pouvoirs exceptionnels

Art. 2 Le droit fédéral est en vigueur à bord des navires suisses : en haute mer sans partage; dans les eaux territoriales en tant que la loi de l'Etat riverain ne se fait pas imperative. En cas de naufrage d'un navire suisse, il est en vigueur dans la même mesure entre les survivants.

2 Les infractions au sens du code pénal suisse et des autres dispositions pénales du droit fédéral commises à bord d'un navire suisse sont toutefois punies selon le droit suisse sans égard au lieu où le navire se trouvait lorsqu'elles ont été commises.

3 Les dispositions pénales de la présente loi sont en outre applicables, que les infractions qu'elles répriment aient été commises hors de Suisse ou en Suisse.

4 L'auteur ne pourra plus être puni en Suisse : s'il a été acquitté à l'étranger pour le même acte par un jugement passé en force; s'il a subi la peine prononcée contre lui à l'étranger, si cette peine lui a été remise, ou si elle est prescrite.

5 S'il n'a subi a l'étranger qu'une partie de la peine prononcée contre lui, cette partie sera imputée sur la peine à prononcer.

1

Art. 3 Le Conseil fédéral édictera les ordonnances nécessaires à l'application de la présente loi. Il établira, s'il y a lieu, les règles complémentaires de droit national appelées par les dispositions déclarées applicables des conventions internationales.

2 Le Conseil fédéral est autorisé à déclarer obligatoires les amendements et modifications apportés aux dispositions déclarées applicables des conventions ou règles internationales.

3 II peut, jusqu'au règlement par la loi, prendre les mesures provisoires nécessaires à l'effet d'appliquer à la navigation maritime suisse des dispositions tirées d'autres accords internationaux.

1

Art. 4 En cas d'hostilités ou en cas de complications internationales affectant la navigation maritime suisse, le Conseil fédéral peut à titre provisoire prendre toutes mesures opportunes: a. Pour que l'usage du pavillon suisse sur mer ne puisse compromettre la sécurité et la neutralité de la Confédération; b. Pour que la navigation maritime suisse contribue à la défense économique du pays.

1

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A cet effet, le Conseil fédéral paut, en particulier, restreindre temporairement l'usage du pavillon suisse sur mer, ainsi que réquisitionner ou exproprier les navires suisses contre juste indemnité.

Art. 5 Si la législation fédérale, notamment la présente loi, ainsi que les règles juridiques internationales auxquelles il est fait renvoi, ne contiennent pas de dispositions applicables, le juge prononce selon les principes généraux du droit maritime. Si ces principes paraissent faire défaut, il prononce selon les règles qu'il établirait s'il avait à faire acte de législateur, en tenant compte de la législation, de la coutume, de la doctrine et de la jurisprudence des Etats maritimes.

2 Le juge apprécie librement la valeur et la portée des preuves, notamment celles des inscriptions et autres textes figurant dans les journaux, registres, livres, procès-verbaux et rapports établis par le capitaine.

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Pouvoir d'interprétation et d'appréciation du juge

Chapitre II Administration

Art. 6 La navigation maritime sous pavillon suisse est soumise à la haute surveillance du Conseil fédéral.

a La surveillance immédiate en appartient au département politique fédéral, lequel l'exerce par le moyen de l'office suisse de la navigation maritime.

3 L'office suisse de la navigation maritime a pour tâche d'assurer et de contrôler, selon les instructions du département politique, l'application des dispositions relatives à la navigation maritime sous pavillon suisse. Il fait rapport au département politique.

1

Art. 7 L'office suisse de la navigation maritime a son siège à Baie.

Il agit auprès des navires suisses, soit par le moyen de ses propres fonctionnaires, soit par l'entremise des consulats de Suisse.

2 A cet effet, il traite et correspond directement avec les consulats et consuls de Suisse, ainsi qu'avec les autorités et représentants d'Etats étrangers.

3 II peut d'autre part exiger en tout temps des propriétaires, armateurs et capitaines des navires suisses tous les renseignements nécessaires à l'exercice de ses fonctions; il a un droit d'inspection à bord des navires suisses.

1

Administration générale

Office suisBp de la navigation

340

Office du registre dea naYÏres suisse»

Organisation des deux offices; responsabilité

Gestion cantonale de nos offices

Art. 8 L'office du registre des navires suisses tient le registre dans lequel sont enregistrés les navires suisses et procède à l'inscription des droits réels qui les concernent.

2 L'office du registre des navires suisses a son siège à Baie, 3 Sauf disposition contraire de la présente loi, la législation fédérale sur le registre des bateaux est applicable par analogie à la tenue du registre des navires suisses.

1

Art. 9 Le Conseil fédéral pourvoit à l'organisation et au fonctionnement des deux offices. Il arrête les taxes à percevoir par ces offices ou par les consulats à l'occasion de l'exercice de la navigation maritime sous pavillon suisse.

2 La Confédération répond de tout dommage résultant des mesures et décisions des deux offices, notamment de la tenue du registre des navires suisses; elle a un droit de recours contre les fonctionnaires et les employés qui ont commis une fante.

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Art. 10 Le Conseil fédéral peut, d'entente avec le gouvernement cantonal intéressé, confier la gestion des offices ou l'exercice de certaines de leurs attributions à des administrations cantonales.

2 Dans ce cas, les rapports de service et la responsabilité des fonctionnaires et employés de ces administrations sont régis, en tant qu'ils ont agi en vertu des dispositions de la présente loi, par la législation fédérale.

x

Chapitre III Juridiction

Juridiction administrative

Art, 11 *Les décisions de l'office suisse de la navigation maritime peuvent être déférées au Conseil fédéral dans les trente jours dès la réception de leur communication écrite.

2 Les décisions de l'office du registre des navires suisses peuvent être déférées au Tribunal fédéral par voie de recours de droit administratif dans les trente jours dès leur communication écrite, 3 La loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 est applicable.

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Art. 12 Toutes les actions se fondant sur des droits réels portant sur des navires suisses ont leur for à Baie, quel que soit le domicile du défendeur.

2 Les actions civiles se fondant sur des actes illicites commis à bord des navires suisses ainsi que toutes les autres actions civiles dérivant de la présente loi ont un for subsidiaire à Baie si elles n'ont pas d'autre for en Suisse.

3 Les actions dérivant de la limitation de la responsabilité de l'armateur ainsi que les demandes d'homologation de dispache en cas d'avarie commune ont un for commun à Baie.

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Art. 13 Les autorités du canton de Baie-Ville poursuivent et jugent les infractions pénales commises à bord des navires suisses ainsi que les infractions spécialement réprimées par la présente loi, à moins que ne soit prévue la compétence du Tribunal fédéral ou celle des tribunaux militaires. Le produit des amendes prononcées en vertu de la présente loi appartient au canton de Baie-Ville.

2 Les contraventions prévues par la présente loi sont constatées par l'office suisse de la navigation ma,ritime.

3 Les autorités du canton de Baie-Ville communiquent au ministère public fédéral tous les jugements pénaux et ordonnances de non-lieu rendus sur la base de la présente loi.

1

Juridiction civile

Juridiction pénale

Titre II

DES NAVIRES SUISSES Chapitre premier De l'enregistrement Art. 14 Sont navires suisses les navires de mer enregistrés dans le registre des navires suisses.

2 Ne sont enregistrés dans le registre des navires suisses que les navires à l'égard desquels sont réunies les conditions de propriété, d'admission à la navigation, de dénomination et de procédure posées par la présente loi.

3 Le refus par l'office du registre des navires suisses de procéder à l'enregistrement d'un navire doit être motivé par l'indication des conditions qui ne sont pas remplies.

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Définition des navires suisses

342

* L'enregistrement et la radiation du navire sont publiés par les soins de l'office du registre des navires suisses dans la Feuille fédérale et dans la Feuille officielle suisse du commerce.

Conditions de propriété

Caraotère suisse du propriétaire

Art. 15 Peuvent être enregistrés dans le registre des navires suisses les navires ayant pour propriétaires : a. La Confédération, les cantons ainsi que les autres corporations et établissements de droit public; 6. Les sociétés anonymes et les sociétés coopératives ayant leurs domicile, siège principal et centre effectif d'activité en Suisse; dont les actionnaires et associés sont tous de nationalité suisse et domiciliés en Suisse; dont les organes d'administration et de contrôle sont exclusivement composés de ressortissants suisses domiciliés en Suisse; dont le capital social se trouve entièrement entre des mains suisses; et dont les statuts contiennent des limitations dans le sens de la présente loi. Si le propriétaire est une société anonyme, les actions doivent être nominatives. Un quart des actionnaires au maximum détenant un quart au maximum du capital social peuvent être domiciliés à l'étranger.

Art. 16 Le propriétaire doit disposer de fonds propres représentant au moins le quart de la valeur marchande du navire à enregistrer et, en outre, le quart de la valeur comptable des autres navires déjà enregistrés à son nom.

2 II doit justifier que les capitaux engagés dans son entreprise sont d'origine suisse. Toutefois, l'office suisse de la navigation maritime peut autoriser, dans des cas exceptionnels, des créances en faveur d'étrangers jusqu'à concurrence de 20 pour cent de la valeur marchande du navire.

3 Le propriétaire doit déclarer par écrit que son entreprise ne recouvre ou dissimule aucun intérêt étranger, éventuellement aucun intérêt étranger autre que celui qui aurait été autorisé en vertu de l'alinéa précédent.

4 Les sociétés en nom collectif ou en commandite et les personnes morales qui sont intéressées comme associés ou actionnaires dans la personne morale propriétaire du navire, ou qui sont chargées de son contrôle, doivent avoir, par leurs capitaux, leurs actionnaires, associés, commanditaires ou membres, ainsi que par les personnes chargées de l'administration et du contrôle, un caractère indiscutablement suisse.

1

343

Art. 17 L'accomplissement des conditions posées aux articles 15 et 16 est attesté par une déclaration d'état conforme délivrée par l'office suisse de la navigation maritime.

2 Le refus de cette déclaration doit être motivé par l'indication des conditions qui ne sont pas remplies.

1

Art. 18 Lorsque, ensuite de changement de nationalité, de transfert de domicile, ou pour toute autre cause, les conditions posées aux articles 15 et 16 ne sont plus remplies, le propriétaire a un délai de trente jours courant de plein droit dès le défaut de conformité pour rétablir celle-ci.

2 Si l'état conforme n'est pas rétabli à l'expiration de ce délai, l'office suisse de la navigation maritime, pourvu qu'il ait connaissance du défaut de conformité alors que celui-ci dure encore, suspend sa déclaration et fait retirer la lettre de mer jusqu'à régularisation complète.

3 Si celle-ci n'intervient pas dans les trois mois de la suspension, l'office suisse de la navigation maritime ordonne la radiation du navire du registre des navires suisses.

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Art. 19 Le navire doit être admis à la navigation par l'office suisse de la navigation maritime.

2 Ne peuvent être admis à la navigation que les bâtiments jaugeant au moins cent tonnes brutes et classés par l'une des sociétés de classification reconnues par l'office suisse de la navigation maritime.

3 Le refus de l'admission à la navigation doit être motivé par l'indication des conditions qui ne sont pas remplies.

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Art. 20 Une fois enregistré, le navire suisse doit constamment répondre aux conditions auxquelles est subordonnée son admission à la navigation.

2 L'office suisse de la navigation maritime s'assure que ces conditions sont constamment remplies. S'il constate qu'elles ne le sont plus, il fixe au propriétaire du navire un délai raisonnable de trente jours au moins pour entreprendre les réparations ou les aménagements nécessaires.

3 Si les réparations ou les aménagements nécessaires ne sont pas exécutés par le propriétaire dans ce délai, ou s'ils se révèlent 1

Déclaration d'étatoonlorme

Procédure de régularisation

Admission à la navigation

Bépaiationg et aménagements

344

insuffisants, l'office suisse de la navigation maritime suspend l'admission à la navigation et fait retirer la lettre de mer.

Dénomination du navire

Art. 21 Tout navire suisse porte un nom, inscrit de la manière usuelle en poupe et de chaque côté de la proue.

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2

Le nom du navire doit se distinguer nettement de ceux des autres navires suisses; il doit être approuvé par l'office suisse de la navigation maritime.

3

Le nom du port d'enregistrement doit être indiqué en poupe, sous le nom du navire, dans l'une des trois langues officielles de la Confédération (Basel, Baie, Basilea).

Procédure d'enregistrement

Art. 22 L'enregistrement du navire au registre des navires suisses se fait sur requête du propriétaire.

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2

a.

b.

c.

d.

e.

La requête doit indiquer : Les nom, raison sociale et siège du propriétaire; Le nom approuvé du navire, ses mesures d'identification et de tonnage ; Le type du bâtiment, sa destination principale, le matériel de construction, le moyen de propulsion; Le constructeur du navire, ainsi que la date et le lieu de la construction ; Le cas échéant, le pavillon et le propriétaire précédents du navire.

3

Toute modification des faits énumérés ci-dessus doit être portée sans délai par le propriétaire à la connaissance de l'office du registre des navires suisses, lequel en informe l'office suisse de la navigation maritime.

Art. 23 Documents à l'appui

A l'appui de sa requête, la requérante doit: 1. Produire la déclaration d'état conforme, l'admission à la navigation et l'approbation du nom, délivrées pour le navire à enregistrer par l'office suisse de la navigation maritime, ainsi que son titre de propriété.

345 2. Etablir que le navire, s'il avait été enregistré précédemment dans un autre Etat, a été radié du registre de cet Etat, ou que la radiation interviendra au moment de l'enregistrement en Suisse ; 3. Déclarer par écrit qu'il n'a pas requis et ne se propose pas de requérir l'enregistrement du navire dans le registre d'un autre Etat; 4. Etablir que le navire n'est grevé d'aucun droit de gage conventionnel ou, s'il en est grevé, que le créancier gagiste consent à ce que la créance soit inscrite dans le registre suisse, en francs suisses, qu'elle soit soumise au droit suisse et, s'il est étranger, que sa créance soit cédée, au plus tard au moment de l'enregistrement, à un créancier suisse domicilié en Suisse et de caractère indiscutablement suisse. Toutefois, si, en application de l'article 16, alinéa 3, une créance a été admise au profit d'un étranger, la requérante doit établir que cette créance sera cédée, à première réquisition de l'office suisse de la navigation maritime, à un créancier suisse domicilié en Suisse et de caractère indiscutablement suisse.

Art. 24 Exceptionnellement, le Conseil fédéral peut autoriser l'enregistrement, aux conditions qu'il fixera suivent les cas, de navires appartenant à des associations ou à des fondations à but philanthropique, humanitaire, scientifique ou culturel, en tant que le caractère suisse de ces personnes morales est indiscutable.

Art. 25 Le Conseil fédéral est autorisé à édicter des dispositions rendant possible l'exercice de la navigation de plaisance sous pavillon suisse par des citoyens suisses ou des associations de caractère indiscutablement suisse.

Associations et fondations

Navigation de plaisance

Chapitre II

Des droits réels

Art. 26 Sauf disposition contraire de la présente loi, la législation fédérale sur le registre des bateaux s'applique à la propriété et aus hypothèques sur les navires suisses. Les hypothèques au porteur ne sont pas admises.

Généralités

346

Broit de préemption delà Confédération

Privilèges ot hypothèques

Purge hypothécaire

Pavillon suisse et droit civil

Art. 27 La Confédération jouit sur tout navire suisse, par rapport à tout acquéreur étranger éventuel, d'un droit de préemption au prix de la valeur marchande du navire.

2 Le Conseil fédéral exerce ce droit de préemption dans les dix jours de l'avis, donné par écrit, par le propriétaire du navire au département politique de son intention d'accepter une offre d'achat reçue de l'étranger.

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Art. 28 Les privilèges énumérés dans la convention internationale du 10 avril 1926 pour l'unification de certaines règles relatives aux privilèges et hypothèques maritimes sont des hypothèques légales sans inscription qui priment les hypothèques inscrites dans le registre des navires. Les dispositions des articles 1er à 13 de ladite convention régissent la naissance, le contenu, la portée et les effets de ces hypothèques légales.

2 L'hypothèque légale prend fin avec l'extinction de la créance garantie, en cas de réalisation forcée du navire et lorsque se trouvent réunies les conditions de fait indiquées aux articles 9 et 10 de la convention internationale.

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Art. 29 Lorsque le navire est vendu de gré à gré, l'office du registre des navires suisses, à la requête de l'acquéreur, invite, par avis publié deux fois dans la Feuille fédérale et deux fois dans la Feuille officielle suisse du commerce, les titulaires de créances garanties par une hypothèque légale sans inscription à lui faire savoir, à l'intention de l'acquéreur, dans un délai qui doit être d'un mois au moins à compter de la deuxième publication, s'ils revendiquent cette hypothèque légale envers l'acquéreur.

2 Le créancier qui n'observe pas ce délai perd son droit de gage sur le navire; dans ce cas, ladite hypothèque légale sans inscription porte sur la créance de Faliénateur en paiement du prix de vente, dans la mesure où celui-ci est encore dû.

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Art. 30 L'enregistrement et la radiation du navire n'affectent que sa nationalité ; ils sont sans effet sur les droits privés.

3 Après la radiation, les inscriptions dans le registre subsistent pour la sauvegarde des droits inscrits.

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347

Chapitre HI De la lettre de mer

Art. 31 Tout navire suisse doit être muni à bord de sa lettre de mer.

2 La lettre de mer atteste que le navire a le droit et l'obligation de naviguer sous pavillon suisse. Elle doit permettre l'identification du navire ; à cet effet, elle mentionne l'armateur du navire et reproduit en outre les indications principales du registre des navires suisses.

3 La lettre de mer indique la durée de sa validité, laquelle ne peut être supérieure à cinq ans. Dans tous les cas. elle perd sa validité de plein droit avec la radiation du navire.

4 L'admission du navire à la navigation et la délivrance de la lettre de mer n'impliquent pas la concession d'une industrie par l'autorité.

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Art. 32 La lettre do mer est établie par l'office suisse de la navigation maritime; elle ne peut être confiée qu'à un armateur suisse.

2 A titre exceptionnel, et pourvu que l'enregistrement au registre des navires suisses ait eu lieu, l'office suisse de la navigation maritime peut faire directement délivrer par un consulat une lettre de mer provisoire d'une validité maximum de trois mois.

3 A l'expiration de sa validité, ou si elle est renouvelée avant ce terme, toute lettre de mer, même si elle était provisoire, doit être restituée par l'armateur à l'office suisse de la navigation maritime.

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Art. 33 Tant que les conditions justifiant l'enregistrement du navire au registre des navires suisses sont remplies, la lettre de mer doit être, selon les cas, prorogée, modifiée ou renouvelée.

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2

Les consulats prorogent et modifient les lettres de mer selon les instructions de l'office suisse de la navigation maritime.

3

L'office suisse de la navigation maritime établit une nouvelle lettre de mer: a. Lorsque le navire change de propriétaire ou d'armateur ; b. Si la lettre devient inutilisable ou est perdue, après annulation de la précédente, et publication dans la Feuille fédérale et clans la Feuille officielle suisse du commerce.

Nature, portée, contenu

Etablissement et restitution

Prorogation, modification, renouvellement

348 Titre III

DE L'EXERCICE DE LA NAVIGATION Chapitre premier

De l'armateur Définition de l'armateur

Statut de }'armateur suisse

Responsabilité del'armutenT.

Limitation delà responsabilité'

Art. 34 Est armateur du navire suisse la personne qui, soit à titre de propriétaire, soit à titre de locataire, le tient en sa possession et contrôle son exploitation.

2 L'armateur arme, équipe et approvisionne le navire. Il nomme et révoque le capitaine dont, sans préjudice de la compétence légale, il fixe librement les attributions.

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Art. 35 Qu'il soit ou non propriétaire du navire, l'armateur doit en tout temps remplir les conditions fixées pour le propriétaire par les articles 15 et 16, 2e, 3e et 4e alinéas.

2 En outre, quelles que soient les dispositions prises par l'armateur pour l'utilisation du navire, l'exploitation doit être dirigée de Suisse au moyen d'une organisation commerciale et technique appropriée.

3 Lorsque ces conditions ne sont plus remplies, l'armateur a un délai de trente jours courant de plein droit dès leur défaut pour les rétablir. S'il ne les a pas rétablies à l'expiration de ce délai, l'office suisse de la navigation maritime fait retirer la lettre de mer.

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Art. 36 L'armateur répond de tout dommage résultant pour un tiers de l'exploitation du navire, à moins qu'il ne prouve que le dommage a été causé par la force majeure, par le fait propre du lésé ou par la faute d'un tiers. Ne sont pas des tiers les membres de l'équipage et les autres personnes au service du navire.

2 L'armateur a un recours contre la personne qui a causé le préjudice en tant que celle-ci est responsable du dommage. Toutefois, si l'armateur est locataire du navire, il n'a de recours contre le propriétaire que pour vice caché de construction ou défaut d'entretien antérieur à la location.

Art. 37 1 Pour les dommages occasionnés à des tiers par l'exploitation du navire, pour ceux qui sont occasionnés à des personnes ou à des biens transportés à bord du navire, pour les rémunérations 1

349

d'assistance et de sauvetage, ainsi que pour sa part contributive en cas d'avarie commune, la responsabilité de l'armateur est limitée à un montant de cinq cents francs par tonneau de jauge brute du navire, à moins que l'armateur n'ait causé le préjudice par sa propre faute.

2 Si le transporteur ne se confond pas avec l'armateur, la responsabilité du transporteur est à son tour limitée, en tant qu'elle découle du transport par mer de personnes ou de biens, au montant auquel l'est celle de l'armateur en application de l'alinéa précédent.

3 En cas de changement essentiel affectant la valeur du tonnage ou la monnaie, le Conseil fédéral peut élever ou abaisser le montant maximum par tonneau de jauge brute.

Art. 38 Toutes les créances, contractuelles ou non, nées contre l'armateur d'un même sinistre sont colloquées pour le même montant maximum de responsabilité et concourent à sa répartition selon leurs rangs respectifs. Si un nouveau sinistre se produit avant l'arrivée au premier port touché, il est réputé se confondre avec le premier 1

Cbllooation dee créances

sinistre.

2

S'il n'y a que des créances contractuelles, le montant maximum de responsabilité couvre toutes ces créances en tant qu'elles sont nées avant l'arrivée au port de destination ou au lieu où le voyage prend fin.

3 Le Conseil fédéral réglera par voie d'ordonnance la procédure et les délais nécessaires à l'application du présent article.

Chapitre II

Du capitaine

Art. 39 Le commandement du navire appartient et incombe de plein droit au capitaine désigné par l'armateur.

2 Sauf les démarches nécessaires ou usuelles dans les ports d'escale, le capitarne doit en principe se trouver à bord et exercer personnellement le commandement pendant toute la durée du voyage.

3 Lorsque le capitaine quitte le navire ou se trouve, empêché de remplir ses fonctions, le commandement du navire appartient et incombe de plein droit au membre du personnel de pont le plus ancien dans le grade le plus élevé.

1

Exeroice et dévolution dn commandement

350 4

Conduite nautique du naràc

Sécurité" du voyage

Quiconque exerce effectivement le commandement à bord a de plein droit les obligations et les responsabilités civiles et pénales du capitaine.

Art. 40 1 Le capitaine répond seul de la conduite du navire.

2 II conduit le navire selon les règles de l'art nautique et en se conformant aux accords internationaux, aux usages généralement reconnus en matière de navigation maritime et aux règles édictées par les Etats dans les eaux territoriales desquels le navire se trouve.

3 Le capitaine doit maintenir le navire en bon état de navigabilité; il pourvoit à ce que son armement, son équipement et son approvisionnement restent suffisants pendant toute la durée du voyage.

Art. 41 1 Le capitaine prend, selon les usages, toutes les mesures propres à sauvegarder les intérêts du propriétaire du navire, de l'armateur, de l'équipage, des passagers ainsi que des ayants droit à la cargaison.

Il procède à un arrimage conforme aux usage maritimes.

2 En cas de nécessité, le capitaine procède à tous actes immédiatement indispensables à la sauvegarde de la vie humaine, du navire ou de la cargaison. Néanmoins, il doit, pour peu que les circonstances le permettent, se concerter avec l'armateur avant de prendre une mesure de caractère exceptionnel.

.Art. 42 Le capitaine a sur toute personne se trouvant à bord du navire l'autorité que lui confèrent les règles et usages généralement reconnus en droit maritime. Il répond de l'ordre à bord et exerce le pouvoir disciplinaire.

2 En principe, le capitaine recrute et forme lui-même l'équipage de son navire. Dans la mesure du possible, il soumet les engagements à l'approbation de l'armateur; toutefois, si les effectifs du personnel de pont ou des machines tombent au-dessous du chiffre normal, le capitaine est tenu d'engager le plus rapidement possible les remplaçants nécessaires.

Art. 43 1 Le capitaine est le représentant légal de l'armateur. La limitation de ses pouvoirs de représentation est sans eifet à l'égard des tiers de bonne foi. Toutefois, le capitaine ne peut en aucun cas ni aliéner ni hypothéquer le navire.

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Discipline de lord et formation de l'équipage

Ropréaentation de l'armateur

351 2

Dans l'exercice de ses fonctions commerciales, le capitaine doit s'en tenir aux instructions de l'armateur. H doit, conformément aux usages, le renseigner sur tout ce qui concerne le navire et la cargaison.

3 Tout litige survenant à propos du navire doit être, le plus rapidement possible, signalé par le capitaine à l'armateur. En pareil cas, le capitaine représente l'armateur en justice, tant en demandant qu'en défendant, aussi longtemps que l'armateur n'intervient pas par le moyen de quelque autre représentant dûment habilité.

Art. 44 A bord du navire, le capitaine a les pouvoirs d'un officier d'état civil en ce qui concerne les naissances et les décès.

2 II consigne ces événements dans le livre de bord, les porte à la connaissance de l'office suisse de la navigation maritime et remet un extrait du livre de bord au prochain consulat de Suisse.

3 Si une personne meurt à bord d'un navire suisse, le capitaine doit prendre sous sa garde, après les avoir inventoriés avec le concours d'un autre membre de l'équipage, les objets qui ont appartenu au défunt ainsi que les testaments qui peuvent exister et les remettre au prochain consulat de Suisse.

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Art. 45 Si un délit a été commis à bord, le capitaine a les attributions d'un juge d'instruction; il mène l'instruction préparatoire jusqu'à l'arrivée de l'autorité compétente.

2 A cet effet, il entreprend les actes d'enquête qui ne supportent aucun retard, fait au besoin arrêter provisoirement les suspects, fouiller les passagers et les marins et séquestrer les objets qui peuvent servir de preuve. Sont applicables par analogie les articles 62 à 65, 69 et 74 à 85 de la loi fédérale du 15 juin 1934 sur la procédure pénale.

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3

Le capitaine établit un rapport sur les actes d'enquête auxquels il a procédé et sur le résultat de ses recherches. Il tient ce rapport avec le procès-verbal d'audition des témoins et les pièces à con"vâction à la disposition des autorités compétentes et porte ces faits et documents à la connaissance du ministère public du canton de Baie-Ville ainsi que du premier consulat de Suisse accessible.

* Le Conseil fédéral peut toutefois prescrire des règles spéciales pour cette procédure.

Compétence d'état civil

Mesures de sûreté et d'instruction

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Papiers de bord

Relations avec les consulats

Art. 46 Le capitaine est responsable de la présence à bord des documents concernant le navire, l'équipage, les passagers et la cargaison.

Il veille notamment à la tenue du livre de bord et du journal des machines.

a Seront consignés dans le livre de bord, chronologiquement et avec l'indication exacte du moment où se fait l'inscription, les événements de caractère nautique et météorologique, ainsi que tout fait intéressant le voyage. Sauf circonstances exceptionnelles, les inscriptions doivent se faire jour après jour. L'officier chargé des inscriptions en atteste l'exactitude sous sa signature; elles sont vérifiées et contresignées par le capitaine.

3 Quiconque établit qu'il y a un intérêt légitime peut obtenir, par l'entremise de l'office suisse de la navigation maritime et contre paiement des frais, un extrait du livre de bord et la copie des procèsverbaux, rapports et autres documents établis par le capitaine ou par ses subordonnés.

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Art. 47 S'il y a un consulat de Suisse dans le port où le navire fait escale ou achève le voyage, le capitaine lui annonce l'arrivée du navire et le prévient à temps de son départ.

2 Jusqu'à ce départ, le capitarne doit tenir à la disposition du consulat les papiers de bord.

3 Le consulat est autorisé, sur requête du capitaine, à demander à l'autorité compétente, au nom de la Confédération, l'assistance judiciaire d'un Etat étranger..

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Titre IV DE L'ÉQUIPAGE Chapitre premier

Dispositions générales Composition de l'équipage

Art. 48 Sont membres de l'équipage, outre le capitaine, tous ceux qui sont inscrits sur le rôle d'équipage comme ayant un emploi à bord (marins).

2 Sont officiers les marins qui ont obtenu ce grade et ont été engagés à ce titre.

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353 3

L'office suisse de la navigation maritime peut ordonner, en tout temps et sans donner de motifs, le renvoi immédiat d'un membre de l'équipage. Si ensuite de pareil renvoi, l'armateur est tenu d'allouer des dommages-intérêts, la Confédération doit les lui rembourser avec frais et dépens.

Art. 49 La Confédération encourage la formation professionnelle de capitaines et de marins de nationalité suisse. Le Conseil fédéral prend les mesures nécessaires.

Art. 50 Peuvent être engagés comme membres de l'équipage d'un navire suisse, sans égard à leur nationalité, tous ceux qui sont en possession d'un passeport valable ou d'une pièce d'identité équivalente et qui justifient de leur aptitude à la fonction qui leur sera confiée.

2 Peuvent seuls être engagés en qualité d'officiers de pont, officiers des machines et officiers radiotélégraphistes d'un navire suisse les marins dont l'aptitude à l'un de ces emplois ressort d'un certificat délivré soit par l'office suisse de la navigation maritime, soit par l'autorité compétente d'un autre Etat exerçant la navigation maritime.

3 Peut seul être engagé en qualité de capitaine d'un navire suisse celui qui est titulaire d'un brevet de capitaine dûment reconnu par l'office suisse de la navigation maritime.

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Art. 51 Les enfants de moins de quinze ans ne peuvent être employés à bord d'un navire suisse.

2 Nul ne peut être engagé à bord d'un navire suisse s'il ne présente un certificat médical attestant qu'il est apte au travail qui lui incombera et qu'il est exempt de toute maladie pouvant mettre en danger les autres personnes qui se trouvent à bord.

3 Le Conseil fédéral édicté, en tenant compte des conventions internationales et des usages en vigueur dans la navigation maritime et après consultation des milieux intéressés, les dispositions relatives à l'âge minimum et à l'examen médical des marins, à la durée de leur travail, à leur nourriture et leur logement à bord ainsi qu'aux vacances payées.

4 Sont seuls jours fériés en mer et dans les ports le jour de l'An, le Vendredi-Saint, l'Ascension et le jour de Noël.

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Feuille fédérale. 104e année. Vol. I.

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Formation professionnelle

Exigences professionnelles

PreseriptionB sanitaires et sociales

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Bùie d'équipage

Enrôlement et dérôlement

Livret de marin cuisse

Art. 52 Le capitaine tient le rôle d'équipage dans les formes prescrites par l'office suisse de la navigation maritime.

2 Tout marin engagé à bord d'un navire suisse doit faire l'objet sur ce rôle, avant le premier départ du navire suivant son engagement, d'une inscription comportant l'indication de son état civil, de son emploi à bord, des conditions de son engagement et des documents au vu desquels il a été engagé.

3 Lorsque le marin a quitté le service à bord, son inscription sur le rôle d'équipage est radiée par le capitaine. Les circonstances du départ sont indiquées.

4 Les personnes qui se trouvent à bord sans y avoir d'emploi doivent, si elles ne figurent pas sur une liste de passagers, faire l'objet, par les soins du capitaine, d'une mention au rôle d'équipage.

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Axt. 53 L'inscription des marins sur le rôle d'équipage a lieu par devant le consul de Suisse, hors la présence des agents de placement et si possible à bord du navire.

2 Le capitaine ou un autre représentant autorisé de l'armateur, d'une part, le marin engagé d'autre part, apposent leurs signatures sur le rôle d'équipage en regard de l'inscription.

3 Le consul valide l'opération en apposant son visa sur le rôle à la suite des signatures des parties. S'il n'y a pas de consulat accessible au port d'enrôlement, l'inscription est soumise au visa du prochain consulat accessible.

4 Le dérôlement est soumis aux mêmes formalités que l'enrôlement ; si le consul a des motifs de penser que le marin a été indûment radié, il en informe l'oince suisse de la navigation maritime.

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Art. 54 Tout membre de l'équipage d'un navire suisse qui est lui-même citoyen suisse reçoit de l'office suisse de la navigation maritime un livret de marin suisse établi à son nom.

8 Ce livret sert à l'inscription des services accomplis par son titulaire à bord de tout navire suisse. Les inscriptions y sont effectuées sous la signature du capitaine au moment du dérôlement; elles indiquent notamment la nature de l'emploi, les conditions de l'engagement et sa durée.

3 Le livret de marin suisse peut également servir à l'inscription, dans les mêmes formes, des services accomplis par son titulaire à bord de navires étrangers.

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355

Art. 55 Le service à bord des navires suisses n'emporte pas par lui seul transfert de domicile.

a Les modalités de l'examen médical, les pratiques d'hygiène et les soins usuels à bord, ainsi que les modalités d'application du régime disciplinaire à bord, font l'objet d'un règlement sur le service à bord des navires suisses, établi par l'office suisse de la navigation maritime et approuvé par le Conseil fédéral.

3 Tout membre de l'équipage d'un navire suisse reçoit, lors de son engagement, le manuel du marin servant sous pavillon suisse établi par l'office suisse de la navigation maritime et reproduisant les principales dispositions applicables aux marins des navires suisses.

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Conditions du service à bord

Chapitre H

Du contrat d'engagement

Art. 56 Les dispositions sur le contrat d'engagement sont applicables à tous les marins servant à bord des navires suisses, quelle que soit leur nationalité.

2 Sous réserve des dispositions de la présente loi, le contrat d'engagement des marins servant à bord des navires suisses est régi par le droit fédéral des obligations.

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Art. 57 Le contrat d'engagement peut être conclu soit pour une durée déterminée, soit pour un ou plusieurs voyages, soit pour une durée indéterminée. Si la durée d'un contrat conclu pour une période déterminée ou pour plusieurs voyages dépasse une année, il est réputé conclu pour une durée indéterminée.

2 Le contrat d'engagement doit être conclu en la forme écrite.

Chaque partie en reçoit un exemplaire. L'exemplaire destiné au marin lui est remis au plus tard lors de la signature du rôle d'équipage.

3 Le contrat d'engagement entre en vigueur au plus tard au moment de l'embarquement.

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Art. 58 Le contrat d'engagement doit indiquer de manière claire et précise les droits et les obligations des deux parties; il mentionnera notamment : a. Les nom et prénom, la date et le Heu de naissance du marin, sa nationalité et, s'il est ressortissant suisse, son lieu d'origine;

Application du dîoit suisse

Conclusion duoontrat

Contenu du contrat

356

b. Le lieu et la date de l'engagement et de l'entrée en service; c. La désignation du ou des navires à bord duquel ou desquels le marin s'engage à servir; d. Le voyage ou les voyages à entreprendre, s'ils peuvent être déterminés au moment de l'engagement; e. Le service pour lequel le marin est engagé ; /. Le rappel des dispositions légales relatives à la durée du travail et aux vacances; g. Le salaire, ainsi que l'indication de la monnaie dans laquelle il sera payé; A. La rémunération des heures de travail supplémentaires portées en compte; i. Le terme du contrat, en particulier le délai de congé, qui doit être le même pour les deux parties.

Devoirs dea maiins

Travaux exceptionnels

Rémunération et salaire

Art. 59 Tout membre de l'équipage est tenu d'exécuter avec soin le travail dont il est chargé. Il répond du dommage qu'il cause intentionnellement ou par négligence.

2 Le marin doit respect et obéissance au capitaine et à ses autres supérieurs. Il doit se conformer aux ordres qu'il reçoit ainsi qu'aux usages reconnus.

3 En cas de danger de mer, le marin doit fournir toute l'assistance dont il est requis pour le sauvetage des personnes, du navire et de la cargaison.

Art. 60 1 Le capitaine peut affecter le marin à un travail autre que celui qui est prévu dans le contrat d'engagement lorsque, pour des raisons particulières, l'intérêt d'une bonne navigation l'exige. Dans ce cas, le salaire ne peut être réduit.

2 Si le marin est affecté à des travaux dont les exigences dépassent celles des services prévus par le contrat, il a droit à une augmentation correspondante de son salaire pour la période pendant laquelle il effectue ces travaux.

3 Les officiers ne peuvent être astreints à un service qui, d'après les usages, n'est pas compatible avec leur grade.

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Art. 61 Le marin a droit au salaire convenu et, le cas échéant, à la rémunération due pour les heures de travail supplémentaires. Il a en outre droit, à bord du navire, à sa nourriture et à son logement.

1

357 2

Le marin a droit, pour chaque heure de travail supplémentaire, à une indemnité correspondant à son salaire horaire calculée sur la base du salaire convenu, majoré de 25 pour cent. Toutefois, ce droit n'existe que si l'article 63, 1er alinéa, n'est pas applicable.

3 S'agissant des officiers, le contrat d'engagement peut prévoir une indemnité forfaitaire pour leur travail supplémentaire.

Art. 62 Le droit au salaire prend naissance au plus tard le jour de l'inscription sur le rôle d'équipage.

" Le salaire est échu à la fin de chaque mois et au plus tard le jour de la radiation du rôle d'équipage ; il est payable sous déduction des avances déjà versées.

3 Le droit au salaire est suspendu lorsque le marin est empêché de faire son travail parce qu'il est aux arrêts, ou bien ensuite d'une incapacité de travail provoquée par sa propre faute.

4 En cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident, le droit au salaire est suspendu aussi longtemps qu'une indemnité journalière est payée au marin.

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Art. 63 Si l'équipage, pour une cause quelconque, n'est pas au complet, les marins qui ont, de ce fait, un surcroît de travail pendant le voyage en mer ont droit au salaire épargné proportionellement au travail supplémentaire qu'ils ont chacun accompli.

2 Les rémunérations pour actes d'assistance ou de sauvetage sont réparties -- après déduction des impenses et des dommages subis par les sauveteurs -- par moitiés entre l'armateur et l'équipage du navire. La répartition de la moitié revenant à l'équipage doit se faire, en principe, proportionnellement aux salaires, compte tenu, toutefois, des mérites particuliers des divers membres de l'équipage.

Art. 64 1 Le capitaine tient un livre des salaires dans lequel sont inscrites toutes les sommes versées au marin, avec indication de la monnaie et du cours du change.

2 Le marin donne quittance de chaque paiement en apposant sa signature dans ce livre en regard de l'écriture correspondante.

Un relevé de compte est alors remis au marin.

3 Aucun paiement ne peut être fait aux marins dans les auberges et les tavernes.

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EoïéiffllM et suspension du salaire

Répartition do rémunérations extraordinaires

Paiements ammiriTM

358 Expiration du contrat

Résiliation anticipée

Prorogations exceptionnelles

Art. 65 Le contrat d'engagement de durée déterminée qui expire au cours d'un voyage est prorogé jusqu'à l'arrivée du navire au prochain port.

2 Le contrat d'engagement de durée indéterminée peut être dénoncé en tout temps de part et d'autre moyennant un congé donné par écrit 24 heures d'avance, le contrat étant prorogé jusqu'à l'arrivée du navire au prochain port si ce délai expire au cours d'un voyage.

Le contrat peut d'ailleurs prévoir un délai de congé plus long.

3 Les parties peuvent en tout temps se départir immédiatement du contrat pour de justes motifs. Sont au premier chef considérés comme tels les crimes et délits commis en mer, les manquements graves à la discipline, ainsi que le fait que le membre de l'équipage doit être débarqué pour cause de maladie ou d'accident ou ne remplit plus les conditions légales exigées pour son engagement.

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Art. 66 Si le marin prouve à l'armateur ou à son représentant, soit qu'il a la possibilité d'obtenir le commandement d'un navire ou un emploi d'officier ou d'officier mécanicien ou tout autre emploi plus élevé que celui qu'il occupe, soit que par suite de circonstances intervenues depuis son engagement, son départ présente pour lui un intérêt capital, il peut demander son congédiement à condition qu'il assure, sans frais nouveaux pour l'armateur, son remplacement par une personne compétente, agréée par l'armateur ou son représentant.

2 Dans ce cas, le marin a droit aux salaires correspondant à la durée de son service.

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Art. 67 Si l'impossibilité d'embaucher un remplaçant qualifié au port où le contrat expire est dûment constatée par le consulat ou, à son défaut, par l'autorité locale compétente, le marin sortant est tenu, contre augmentation de son salaire de 25 pour cent, de conserver son emploi pour une durée maximum de trois mois.

2 Si le contrat d'engagement expire dans un port où, ensuite d'ordres ou de mesures des autorités locales, le marin est empêché de débarquer, le contrat est prorogé de plein droit, aux conditions auxquelles il avait été conclu, jusqu'au prochain port où le marin pourra débarquer, mais pour une durée maximum de deux mois.

3 Si le débarquement ne peut avoir lieu dans ce délai, l'office suisse de la navigation maritime s'occupe du cas.

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359 Art. 68 En cas de radiation d'un navire suisse considéré comme perdu, le contrat d'engagement de ses marins est réputé avoir pris fin un mois après la date à laquelle ont été reçues les dernières nouvelles du navire. Les salaires dus en conséquence doivent, dès la radiation entrée en force, être versés par l'armateur à l'office suisse de la navigation maritime.

8 Lorsqu'un membre de l'équipage est décédé, a été déclaré absent ou a disparu dans des circonstances telles que sa mort doit être tenue pour certaine, le salaire qui lui restait dû doit de même être versé par l'armateur à l'office suisse de la navigation maritime.

3 L'office suisse de la navigation maritime tient ces salaires à la disposition des ayants droit. S'ils ne sont pas réclamés à bon droit dans les cinq ans de leur paiement, il les verse à un fonds de prévoyance en faveur des marins.

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Art. 69 Tout membre de l'équipage reçoit, lorsqu'il quitte le service du navire, une attestation du capitaine mentionnant, sans appréciation, le genre et la durée de son travail a bord. Pour les ressortissants suisses, cette attestation est délivrée par voie d'inscription dans le livret de marin suisse.

2 Le marin a le droit de se faire délivrer, en outre, un certificat portant appréciation de ses services et de sa conduite.

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Art. 70 En cas de différend relatif à l'exécution du contrat d'engagement, le consulat de Suisse, s'il en est requis par l'une des parties, doit s'efforcer, sans frais pour celles-ci, de les concilier. Un procèsverbal de son intervention est dressé et envoyé à l'office suisse de la navigation maritime.

2 Le contrat d'engagement peut prévoir que les litiges relatifs audit contrat, y compris ceux qui concernent le rapatriement, seront arbitrés par le consulat de Suisse le plus facilement accessible. Dans ce cas, l'arbitrage du consul est rendu gratuitement. Toute autre clause d'arbitrage est nulle.

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Salaires posthumes

Certificats de service

Conciliation et arbitrage

Chapitre III

De la sécurité sociale Art. 71 1 Le marin débarqué a le droit de se faire ramener, aux frais de l'armateur, au lieu d'engagement, sauf s'il a dénoncé lui-même

Droit du marin au rapatriement

360

Modalité du rapatriement

Asenranoo en cas d'accidents professionnels et do maladie

Responsabilité civile et assurance

le contrat ou si celui-ci a été résilié pour de justes motifs à l'encontre du marin.

2 Les frais de rapatriement à la charge de l'armateur comprennent toutes les dépenses nécessaires au transport, au logement et à la nourriture du marin pendant son voyage, ainsi que son entretien jusqu'au moment fixé pour son départ. Si le marin retarde son départ, il supporte les frais supplémentaires résultant de cet ajournement.

3 Si l'armateur refuse le rapatriement alors que le marin débarqué paraît y avoir droit, le consulat pourvoit a ce rapatriement, et la Confédération a un recours, soit contre l'armateur débiteur du rapatriement, soit contre le marin s'il se révèle que celui-ci n'y avait pas droit.

Art. 72 1 Lorsque le droit au rapatriement a pris naissance, les parties peuvent convenir de remplacer le rapatriement du marin par le versement d'une somme forfaitaire correspondant aux frais du rapatriement.

2 L'armateur peut aussi satisfaire a son obligation de rapatriement en procurant au marin un emploi convenable à bord d'un autre navire se rendant au port de destination du rapatrié ou bien, si le marin doit être ramené à l'intérieur, au port où, d'après les instructions de l'armateur, il doit entreprendre son voyage de retour par voie de terre.

Art. 73 1 Sous réserve des parties d'entreprise qui se trouvent en Suisse, l'exploitation de la navigation maritime n'est pas soumise à l'assurance-accidents obligatoire instituée par la Confédération.

2 L'armateur d'un navire suisse doit assurer son équipage contre la maladie et les accidents professionnels.

3 Une ordonnance du Conseil fédéral fixera, après consultation des milieux intéressés, les prestations minimums et les prescriptions de détail auxquelles le contrat d'assurance doit se conformer pour que l'armateur satisfasse à ses obligations.

Art. 74 S'il y a assurance conforme à la présente loi, l'armateur est libéré, en cas d'accident professionnel ou de maladie, de sa responsabilité pour faute légère.

2 A défaut d'assurance conforme à la présente loi, l'armateur, même si aucune faute ne lui est imputable, est débiteur, envers la victime de l'accident professionnel ou de la maladie, ou envers ses 1

361

survivants, de prestations au moins équivalentes aux prestations d'assurance que cette victime aurait reçues s'il y avait eu assurance conforme. Les droits à ces prestations sont alors privilégiés au même titre que le sont les créances de salaire.

Art. 75 En cas de perte du navire ensuite de naufrage, les membres survivants de l'équipage ont droit, indépendamment de leur rapatriement éventuel, à une indemnité de chômage.

2 Cette indemnité est payée, pour chaque jour de chômage effectif, mais pendant deux mois au maximum, au taux du salaire prévu par le contrat.

3 L'indemnité de chômage est privilégiée au même titre que le sont les créances de salaire.

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Chômage ensuite de naufrage

Titre V DES CONTRATS D'UTILISATION DU NAVIKE

Art. 76 Sous réserve dés dispositions de la présente loi, les contrats pour l'utilisation du navire sont régis par le code fédéral des obligations.

2 Toutes les actions dérivant des contrats pour l'utilisation du navire se prescrivent, sous réserve des cas de dol ou de faute grave, par une année à partir de l'expiration du contrat en cas de location ou d'affrètement, ou bien, dans le contrat de transport, à partir du jour où la marchandise a été livrée au destinataire ou aurait dû lui être livrée, et dans le contrat de passage à partir du jour où le passager est arrivé au port de destination ou aurait dû y arriver.

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Droit applicable et prescription

Chapitre premier De la location du navire

Art. 77 Dans la location du navire, le propriétaire du navire s'oblige à conférer au locataire, contre paiement d'un loyer, la jouissance, l'usage et le contrôle d'un navire, sans armement et sans équipage, en bon état de navigabilité.

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Définition, annotation

362 2

Tant que la location du navire n'a pas fait l'objet d'une annotation au registre des navires suisses, le propriétaire répond en tant qu'armateur envers tout tiers qui n'avait pas connaissance de la location au moment où sa créance est née.

Location et Bous-looation

Droits et obligations des parties

Art. 78 La location ou la sous-location d'un navire suisse ne sont valables qu'en faveur d'un locataire ou d'un sous-locataire remplissant les conditions exigées d'un armateur suisse.

2 La sous-location doit avoir été prévue par le contrat de location.

3 La location et la sous-location du navire sont en principe soumises aus dispositions du code des obligations sur le bail à loyer.

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Art. 79 Dans la location du navire, le loyer court du jour de la remise effective du navire au locataire jusqu'au jour de sa restitution effective par ce dernier.

2 Le locataire doit restituer le navire, compte tenu de l'usure normale, dans son état original et dans le port où il l'a reçu.

3 Le contrat de location conclu pour une durée indéterminée peut être résilié en tout temps moyennant un délai de congé de quatre mois.

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Chapitre II

De l'aorètement Définition

Responsabilité du fréteur

Art. 80 Dans le contrat d'affrètement, l'armateur s'oblige en tant que fréteur, contre rémumération, à mettre à la disposition de l'affréteur tout ou partie de la contenance d'un navire désigné, soit pour une durée déterminée (charte-partie au temps), soit pour un ou plusieurs voyages déterminés (charte-partie au voyage).

2 Fréteur et affréteur peuvent exiger chacun l'établissement d'une charte-partie.

Art. 81 1 Le fréteur a l'obligation de maintenir le navire en bon état de navigabilité ; il doit le pourvoir de l'armement, des approvisionnements et de l'équipage répondant à l'usage qui en est prévu par le contrat, ainsi que des papiers de bord nécessaires.

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363

Le fréteur répond envers l'affréteur de tout dommage résultant d'un état défectueux du navire, à moins qu'il ne puisse établir que les défauts n'ont pu être découverts malgré un examen diligent avant le début du voyage.

Art. 82 1 Le capitaine demeure entièrement aux ordres de l'armateur pour tout ce qui touche à la conduite du navire.

2 La charte-partie peut en revanche ménager à l'affréteur le droit de donner au capitaine des ordres concernant la réception, l'acheminement et la livraison de la cargaison; les actes accomplis par le capitaine en vertu de ces ordres engagent l'affréteur.

3 Si, dans ces conditions, le capitaine a traité avec des tiers au nom et pour le compte de l'affréteur, celui-ci répond envers eux solidairement avec l'armateur; le recours de l'armateur contre l'affréteur est réservé.

4 Au surplus, l'armateur ne répond pas envers l'affréteur des actes accomplis par le capitaine en vertu des ordres que ce même affréteur lui a donnés.

Art. 83 1 Les frais de combustibles et carburants, ceux qui sont normalement entraînés par la manutention de la cargaison, ainsi que les droits et taxes normalement perçus à l'occasion des mouvements et arrêts du navire, sont en principe, dans l'affrètement au temps, à la charge de l'affréteur.

2 L'affréteur ne doit en principe aucune rémunération pour les périodes dépassant vingt-quatre heures consécutives que l'armateur consacre à maintenir le navire en bon état de navigabilité ainsi qu'à le pourvoir de son équipage.

Art. 84 Dans l'affrètement au temps, le fréteur n'est pas tenu d'effectuer un voyage exposant le navire et l'équipage à un danger majeur qui, non prévu au moment de la conclusion du contrat, n'est survenu ou n'a été connu que postérieurement.

2 Si, par là, l'utilisation du navire telle qu'elle est prévue au contrat est rendue impossible, l'affréteur a le droit de résilier immédiatement le contrat et de répéter ce qu'il a déjà payé.

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Art. 85 A l'expiration de l'affrètement au temps, le navire doit en principe se trouver au port de :départ du premier voyage.

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Contrôle des opérations

Répartition des fraie

Rupture de voyage

Fin du contrat

364 2

Lorsque la durée prévue est dépassée par la fin du dernier voyage, la relation contractuelle est prorogée jusqu'à l'achèvement du voyage et la rémunération due est augmentée prò rata temporis.

3 Le fréteur peut refuser d'entreprendre un voyage qui, dans des conditions normales, dépasserait la durée prévue par le contrat.

Obligations de l'affréteur

Art. 86 La rémunération est en principe due même si l'affréteur n'utilise pas entièrement la contenance stipulée, à moins que le fréteur n'ait tiré parti de cette contenance d'une autre façon.

2 Le chois de la route à suivre entre le port de départ et le port de destination appartient en principe au fréteur.

3 Le chargement et le déchargement de la marchandise incombent en principe à l'affréteur.

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Chapitre HI

Du contrat de transport I. Généralités Définition

Diligenoe préalable du transporteur

Besponsabilité du transporteur a. En général

Art. 87 Dans le contrat de transport maritime., le transporteur s'oblige à effectuer, contre paiement du fret, le transport par mer stipulé par le chargeur.

2 Sous réserve des dispositions de la présente loi, le contrat est régi par les règles du code fédéral des obligations sur le contrat de transport, le transporteur étant alors considéré comme voiturier et le chargeur comme expéditeur.

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Art. 88 Le transporteur répond du dommage subi par la marchandise résultant de l'innavigabilité du navire à moins qu'il ne prouve qu'il a exercé, avant le voyage et au début du voyage, une diligence raisonnable à l'effet de s'assurer que le navire était en bon état de navigabilité, notamment qu'il était convenablement armé, équipé et approvisionné et que les cales et autres parties du navire où des marchandises sont chargées étaient appropriées à la réception, transport et à la conservation desdites marchandises.

Art. 89 Le transporteur répond de la perte ou de la destruction de la marchandise à moins qu'il ne prouve que cette perte ou destruction résulte de l'une des causes suivantes:

365

a. Force majeure, cas fortuit, périls, dangers et accidents de la mer ou d'autres eaux navigables; 6. Fait de guerre, de révolution ou de troubles civils; c. Acte de l'autorité publique, tel que saisie judiciaire ou restriction de quarantaine; d. Grève, lock-out ou autre arrêt ou entrave apportés au travail; e. Incendie à bord, à moins que le transporteur ne puisse en être rendu responsable; /. Faute dans la conduite nautique du navire; g. Action d'assistance ou de sauvetage en mer; h. Fait imputable au cbargeur ou au destinataire; i. Vice propre de la marchandise ou insuffisance de l'emballage ou des marques, ou de toute autre cause ne provenant ni de sa propre faute, ni de la faute du capitaine, de l'équipage ou de toute autre personne au service du navire ou du transporteur.

Art. 90 Le transporteur est responsable comme en cas de perte et sous les mêmes réserves de tout dommage résultant de l'avarie ou de la destruction partielle de la marchandise.

2 Le transporteur est responsable du retard à la livraison à moins qu'il ne prouve que le retard a eu pour cause l'une des circonstances énumérées dans l'article précédent.

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Art. 91 La responsabilité du transporteur ne peut en aucun cas dépasser la somme de deux mille francs suisses par colis ou unité de fret à moins qu'une valeur supérieure n'ait été dûment déclarée par le chargeur avant l'embarquement. Sont réservés les cas de dol et de faute grave du transporteur.

2 En cas de changement essentiel affectant la monnaie, le Conseil fédéral peut élever ou abaisser le montant maximum par colis ou unité de fret.

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Art. 92 Le chargeur répond envers le transporteur et les autres intéressés à la cargaison de tout dommage résultant de l'inexactitude de ses déclarations, notamment concernant la nature, les marques, le nombre, la quantité, le poids et la valeur de la marchandise.

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&. Avaria partielle, retard

Limitation de responsabilité

Déclarations inexactes du chargeur

366 2

En cas de déclarations inexactes du chargeur, le transporteur ne répond d'un dommage causé à la marchandise que si le chargeur prouve que ce dommage est imputable au dol ou à la faute grave du transporteur ou de ses agents ou préposés.

Marchandises en fraudo

Chargement et déchargement

Acquisition du fret

Débiteur du fret

Art. 93 Si des marchandises ou des objets de nature inflammable, explosive ou dangereuse ont été chargés sans que le transporteur ou le capitaine aient eu connaissance de leur nature ou caractère, le chargeur répond de tout dommage causé par la marchandise, même si aucune faute ne peut lui être imputée.

a Le capitaine peut en tout temps faire décharger, détruire ou jeter à la mer ces objets ou marchandises.

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Art. 94 Le transporteur doit, au port de chargement, prendre les marchandises sous palan, et au port de déchargement, les délivrer sous palan à moins qu'un autre mode de livraison ne soit prévu par le contrat ou par l'usage local.

2 Si le lieu du chargement ou du déchargement n'est pas fixé par le contrat, ces opérations se font au lieu usuel déterminé par le transporteur, s Si les délais de chargement et de déchargement du navire et le taux des surestaries ne sont pas fixés par le contrat, ils sont déterminés selon l'usage local.

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Art. 95 Le fret n'est dû que si les marchandises sont livrées ou mises à la disposition du destinataire au port de destination.

2 Toutefois, le fret est dû lorsque le défaut de livraison provient d'un fait imputable au chargeur ou au destinataire ou bien du vice propre de la marchandise, lorsque celle-ci, dangereuse ou prohibée, a dû être déchargée, détruite ou jetée à la mer en cours de route, ou lorsque la perte de la marchandise a été admise en avarie commune.

3 S'agissant du transport d'animaux vivants, le fret est dû a moins que le chargeur n'apporte la preuve que la mort de l'animal est due à la faute du transporteur.

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Art. 96 Celui qui demande livraison de la marchandise devient débiteur du fret et des autres réclamations dont la marchandise est grevée.

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367 2

II n'est toutefois tenu des surestaries ou autres indemnités au port de chargement que si ces réclamations sont indiquées sur le connaissement ou s'il est établi qu'il en a connaissance autrement.

Art. 97 Le contrat de transport est résolu de plein droit sans indemnité de part et d'autre si, ensuite de force majeure ou de cas fortuit survenant avant le début du voyage, l'utilisation du navire telle qu'elle est prévue au contrat est rendue définitivement impossible.

2 Si cette impossibilité définitive survient en cours de route, le fret est dû proportionnellement à la distance utilement parcourue.

3 Si une impossibilité temporaire due à la force majeure ou au cas fortuit survient avant le début du voyage, chaque partie peut, après mise en demeure, résilier le contrat à l'expiration d'un délai convenable. Les frais encourus jusqu'à la résiliation, y compris les frais éventuels de déchargement, sont supportés par la partie qui a résilié.

4 Si l'impossibilité temporaire survient en cours de route, le contrat ne peut être résilié que par accord des parties.

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Art. 98 Transporteur et destinataire ont chacun le droit de demander la constatation contradictoire de l'état de la marchandise lors de sa délivrance.

2 L'acceptation de la marchandise sans réserve emporte présomption jusqu'à preuve du contraire que la marchandise a été délivrée par le transporteur dans l'état où il l'avait reçue.

s Le transporteur reste toutefois tenu des avaries non apparentes si le destinataire les constate dans le délai où, d'après les circonstances, la vérification pouvait ou devait se faire et s'il avise le transporteur aussitôt après les avoir constatées. Cet avis doit néanmoins être donné au plus tard dans les trois jours de la livraison; à défaut, la marchandise est tenue pour acceptée sans réserve.

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Art. 99 Si le chargeur demande un connaissement, celui-ci est établi au plus tard lorsque la marchandise a été mise à bord pour le compte du transporteur.

2 Le connaissement doit contenir en particulier : a. Les noms et domiciles du transporteur et du chargeur; 1

Impossibilité de l'exécution

Constatation des dommages

H.

Connaissement Etablissement et contenu du oonnaJesemont

368

0. Le nom du navire, ainsi que l'indication du fait qu'il s'agit d'un connaissement pour embarquement si le document est établi avant le chargement à bord; c. Le port de chargement et le lieu de destination; d. La description de la marchandise établie selon les indications du chargeur et comportant notamment l'indication de la nature de cette marchandise, de son état et de son conditionnement apparent, des marques d'identification, du nombre de colis ou de pièces ou bien de la quantité ou du poids et, s'il y a lieu, de la valeur dûment déclarée par le chargeur comme étant celle de la marchandise; e. L'indication concernant le fret; /. La date et le lieu d'émission; g. La signature de celui (capitaine ou représentant du transporteur) qui a établi le connaissement; A. Le nombre des exemplaires négociables.

3 Le connaissement est nominatif, à ordre ou au porteur.

Valeur des mentions

Exemplaires négociables

Mécanisme de la livraison

Art. 100 Le connaissement, même s'il est incomplet, vaut présomption jusqu'à preuve du contraire de la réception par le transporteur de la marchandise telle qu'elle s'y trouve décrite.

2 Des réserves du transporteur relativement à la description de la marchandise ne sont valables que si, insérées dans le connaissement au moment même de son établissement, elles font mention précise des circonstances qui les justifient dans le cas particulier.

1

Art. 101 Le connaissement doit être dressé en autant d'exemplaires que les circonstances le commandent.

2 Les exemplaires originaux donnent droit à la livraison de la marchandise.

3 Le transporteur et le chargeur ont chacun le droit d'exiger que les exemplaires originaux soient contresignés par le chargeur.

* Les exemplaires originaux du connaissement sont des titres représentatifs de marchandises au sens de l'article 925 du code civil.

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Art. 102 Lorsqu'un connaissement a été établi, la marchandise doit, au port de déchargement, être livrée sur présentation du premier exemplaire original. Si plusieurs exemplaires originaux sont présentés 1

simultanément par plusieurs porteurs, le capitaine dépose la marchandise auprès de l'autorité compétente ou auprès d'un tiers, 2 Le transporteur répond de tout préjudice pouvant résulter du fait qu'il aurait livré la marchandise à qui ne lui présentait pas un exemplaire original du connaissement.

Art. 103 Lorsqu'un connaissement est établi, est nulle toute clause ayant directement ou indirectement pour objet de soustraire le transporteur à tout ou partie de la responsabilité qui lui incombe en vertu de la présente loi, ou de renverser le fardeau de la preuve de cette responsabilité.

2 Pour le transport d'animaux vivants, pour le chargement, d'entente entre les parties, de marchandises sur le pont, ainsi qu'en cas de responsabilité résultant de faits survenus antérieurement au chargement et postérieurement au déchargement, le transporteur et le chargeur sont toutefois autorisés à convenir de conditions différentes.

3 Sont en outre réservés, s'il y a contrat d'affrètement, les rapports entre l'armateur et son affréteur, lesquels sont régis exclusivement par les dispositions de ce contrat.

1

Droit impératif et dispositi!

Chapitre IV

Du contrat de passage

Art. 104 Tout passager à bord d'un navire suisse doit être en possession, dès son embarquement, d'un titre de passage délivré par l'armateur et indiquant la date de son émission, la date prévue pour le départ, le nom et le type du navire, les ports de départ et de destination, les conditions de logement et d'entretien à bord, ainsi que le prix du passage.

2 La personne transportée a pour le moins le droit, pour le prix ainsi stipulé, de prendre à bord et d'y conserver sous sa garde les effets personnels indispensables. Pour le surplus, et sauf autre accord des parties, le bagage du passager est réputé faire l'objet d'un contrat de transport séparé.

s Le Conseil fédéral arrêtera les autres conditions auxquelles le transport des passagers à bord des navires suisses est subordonné.

1

Feuille fédérale. 104« année. Vol. I.

26

Dispositions IcjaloB

370

Titre VI INCIDENTS ET ACCIDENTS DE MER Rapport de mer et enquête

Procts-vcrbal consulaire

Abordage: assistance et sauvetage

Avarie cymmiiüe

Art. 105 Si le navire ou la cargaison subissent un accident ou s'il se produit un autre fait particulier, le capitaine est tenu de faire un rapport de mer (sea protest) au consulat du premier port d'escale ou, à défaut de consulat, à l'autorité locale compétente.

2 Le consul peut procéder à bord à une enquête administrative et à tout interrogatoire utile.

1

Art. 106 Saisi d'un rapport de mer, le consul dresse un procès-verbal où sont relatées aussi exactement qu'il a pu les reconstituer les circonstances dans lesquelles le fait s'est produit.

2 Le consulat doit envoyer sans délai un exemplaire du procèsverbal à l'office suisse de la navigation maritime. Si le rapport de mer est remis à l'autorité locale, le capitaine en adresse copie à l'office suisse de la navigation maritime.

1

Art. 107 Les droits et obligations résultant d'un abordage entre navires sont déterminés par la convention internationale du 23 septembre 1910 pour l'unification de certaines règles en matière d'abordage.

2 Les dispositions de la convention internationale du 23 septembre 1910 pour l'unification de certaines règles en matière d'assistance et de sauvetage maritime s'appliquent à la navigation maritime sous pavillon suisse. La rémunération prévue par ladite convention est due par l'armateur du navire assisté, lequel a un recours contre les ayants droit aux autres valeurs sauvées.

1

Art. 108 II y a avarie commune lorsqu'une perte extraordinaire est subie ensuite d'un sacrifice fait ou d'une dépense encourue intentionnellement et raisonnablement pour le salut commun à l'effet de préserver d'un péril les biens et intérêts engagés dans un même voyage sur nier.

2 Les règles d'York et d'Anvers, dans la teneur adoptée à Copenhague en 1950, régissent l'avarie commune.

1

371

Art. 109 Sans préjudice des articles 105 et 106, le capitaine doit, après tout acte d'avarie commune, en consigner les circonstances dans le livre de bord en indiquant les mesures prises et en énumérant les biens sacrifiés ou endommagés. Il porte ces faits le plus rapidement possible à la connaissance de l'armateur.

2 Le capitaine est tenu de faire procéder à l'estimation et à la répartition des pertes (dispache) au plus tard dans le port où le voyage prend fin. Il doit, dès son arrivée à ce port, s'adresser à cet effet à l'autorité locale compétente.

3 Les divers intéressés au règlement d'avarie commune ont chacun l'obligation de mettre à la disposition des dispacheurs les pièces justificatives qui sont en leur possession.

1

Art. 110 Les créances engendrées par l'acte d'avarie commune se prescrivent par deux ans à partir du jour où la marchandise est arrivée au port de destination ou aurait dû y arriver.

2 Le Conseil fédéral réglera par voie d'ordonnance la procédure selon laquelle une dispache concernant un navire suisse peut être homologuée par un tribunal suisse.

1

Dispache

Prescription et procédure

Titre VII APPLICATION A LA NAVIGATION INTÉRIEURE

Art. 111 La navigation exercée sur le Rhin, ses affluents et canaux contigus, ainsi que sur les autres eaux navigables reliant la Suisse à la mer avec des bateaux de la navigation intérieure, est assimilée à la navigation maritime et régie dans les -.limites du présent titre par les dispositions de la présente loi, sans préjudice des dispositions particulières sur la navigation intérieure.

8 Sont réputés bateaux de la navigation intérieure les bâtiments enregistrés dans un registre public, munis ou non de moyens mécaniques de propulsion, dont la portée en lourd ou le déplacement atteint ou dépasse quinze tonnes et qui sont affectés ou destinés au transport professionnel de personnes ou de marchandises.

3 Echappe toutefois à cette assimilation la navigation intérieure exercée en vertu d'une concession accordée par la Confédération.

1

Cri tires de l'assimilation

372

Dispositions applicables: c. Responsabilité dé l'armateur

Art. 112 Est armateur d'un bateau de la navigation intérieure la personne qui, soit à titre de propriétaire, soit à titre de locataire, le tient en sa possession et contrôle son exploitation.

2 La responsabilité de cet armateur est régie par les articles 36 à 38, avec cette différence qu'elle est limitée: a. Pour les bateaux affectés au transport, à un montant de cent francs par tonne de portée en lourd, majoré en cas de moyens mécaniques de propulsion d'un montant de deux cent cinquante francs par cheval-vapeur de puissance; b. Pour les remorqueurs, à un montant de deux cent cinquante francs par cheval-vapeur de puissance.

1

Art. 113 b. Autres dispositions applicables

1

Les articles 39 à 41 et 59 s'appliquent au capitaine et aux membres de l'équipage d'un bateau de la navigation intérieure.

2 Les dispositions du titre V s'appliquent aux contrats pour l'utilisation des bateaux de la navigation intérieure et au connaissement, à l'exception des articles 78, 1er alinéa, et 104.

3 Les dispositions du titre VI, à l'exception des articles 105 et 106, s'appliquent aux cas d'abordage, d'assistance et de sauvetage, ainsi, que d'avarie commune survenus dans la navigation intérieure.

Sont réservées les conventions contraires en matière d'avarie commune.

4 En outre, l'article 5 est applicable par analogie à la navigation intérieure.

Titre VIII DISPOSITIONS PÉNALES ET DISCIPLINAIRES Chapitre premier

Des infractions contre la sécurité du navire et de la navigation

Uise en péril du navire

Art. 114 Celui qui, intentionnellement, aura endommagé, détruit, rendu inutilisable, mis hors d'usage ou fait disparaître un navire suisse, ses parties intégrantes ou ses accessoires, ou bien les moyens de bord en combustibles ou en vivres, celui qui, intentionnellement, aura empêché ou troublé la conduite du navire ou bien l'ordre ou la vie à bord, 1

373

et aura par là sciemment mis en danger le navire ou les personnes se trouvant à bord, sera puni de la réclusion pour dix ans au plus ou de l'emprisonnement.

2 La peine aéra la réclusion, si l'acte a causé la perte du navire ou la mort d'une personne et si le délinquant pouvait le prévoir.

3 La peine sera l'emprisonnement ou l'amende si le délinquant a agi par négligence.

Art. 115 1 Le capitaine ou le marin d'un navire suiss equi aura intentionnellement violé les dispositions légales ou les règles reconnues sur la conduite nautique du navire ou les autres prescriptions suisses ou étrangères sur la circulation et la police de la mer et aura par là sciemment mis en danger son navire ou un autre navire ou bien les personnes se trouvant à bord de l'un d'eux, sera puni de l'emprisonnement.

2 La peine peut être la réclusion pour dix ans au plus si l'acte a causé la perte d'un navire ou la mort d'une personne e^ si le délinquant pouvait le prévoir.

3 La peine sera l'emprisonnement ou l'amende si le délinquant a agi par négligence.

Art. 116 Le capitaine ou le marin d'un navire suisse qui aura violé les dispositions légales ou les règles reconnues sur la conduite nautique du navire ou les autres prescriptions suisses ou étrangères sur la circulation et la police de la mer sera, si l'acte n'est pas punissable en vertu d'une autre disposition légale, puni d'une amende de cinq mille francs au plus.

Art. 117 1 Le capitaine qui aura intentionnellement ou par négligence pris la mer avec un navire suisse innavigable, insuffisamment équipé, armé ou approvisionné et aura par là mis en danger le navire ou les personnes se trouvant à bord sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

2 La peine sera la réclusion de cinq ans au plus ou l'emprisonnement si l'acte a causé la perte du navire ou la mort d'une personne et si le délinquant pouvait le prévoir.

Art. 118 Le capitaine ou l'armateur qui aura fait naviguer un navire suisse innavigable, insuffisamment équipé, armé ou approvisionné sera, si l'acte n'est pas punissable en vertu d'une autre disposition légale, puni d'une amende de cinq mille francs au plus.

Mise en péril de la navigation

Contraventions aux règles nautiques

Mauvaise navigabilité

Contraventions aux règles de navigabilité

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D Haut d'assis tance

Art. 119 Le capitaine d'un navire suisse qui aura manqué à son devoir de prêter assistance à un autre navire ou à des personnes en danger de se perdre en mer, alors qu'il était à même de les secourir sans danger sérieux pour son propre navire, son équipage ou ses passagers, sera puni de l'emprisonnement.

2 La peine sera l'amende si le délinquant a agi par négligence.

x

Chapitre II

Infractions contre la discipline et l'ordre à bord Abandon da navire en péril

Non-exercice du commandement

Abuso t usurpation de pouvoir

Dé3Ertion

Art. 120 Le capitaine d'un navire suisse qui n'aura pas quitté le dernier son navire en danger sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

2 Le marin qui aura quitté un navire suisse en danger sans autorisation du capitaine sera puni de l'emprisonnement pour un an au plus ou de l'amende.

Art. 121 1 Le capitaine d'un navire suisse qui, intentionnellement, n'aura pas exercé ou aura négligé la conduite du navire qui lui incombe sera puni de l'emprisonnement pour un an au plus ou de l'amende.

2 La peine sera l'amende si le délinquant a agi par négligence.

1

Art. 122 Le capitaine ou l'officier d'un navire suisse qui aura abusé de son pouvoir de donner des ordres à un subordonné pour lui donner des ordres sans aucun rapport avec le service à bord; le capitaine qui aura outrepassé son pouvoir d'infliger des peines disciplinaires ou qui en aura abusé; celui qui, n'ayant pas le pouvoir de donner des ordres ou de punir à bord d'un navire suisse, se sera arrogé un tel pouvoir, sera puni de l'emprisonnement.

2 La peine sera l'amende si l'infraction est de peu de gravité.

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Art. 123 Le capitaine ou le marin d'un navire suise qui, étant enrôlé, ne se sera pas rendu à, bord ou aura quitté le navire de façon contraire à son contrat d'engagement, sera, s'il en résulte une difficulté essentielle dans l'exploitation du navire, puni de l'emprisonnement pour six mois au plus ou d'une amende de deux mille francs au plus.

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375 2

Si le délinquent rejoint le navire avant le départ, mais dans les trois jours au plus tard, il sera exempt de toute peine mais pourra être puni disciplinairement.

Art. 124 1 Le marin d'un navire suisse qui, commis à un service essentiel à. la sûreté du navire ou de la navigation, aura abandonné son poste ou se sera endormi pendant ce service, sera puni de l'emprisonnement pour six mois au plus ou d'une amende de deux mille francs au plus.

2 L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

Art. 125 1 Le capitaine d'un navire suisse qui se sera trouvé, ensuite d'ivresse ou d'intoxication due à sa faute, dans un état excluant ou entravant sa capacité pour conduire le navire, sera puni de l'emprisonnement pour un an ou d'une amende de cinq mille francs au plus.

2 Le marin qui se sera trouvé, durant un service essentiel à la sûreté du navire ou de la navigation, dans un état d'ivresse ou d'intoxication due à sa faute, sera puni de l'emprisonnement pour six mois au plus ou d'une amende de deux mille francs au plus. L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

Art. 126 Le marin d'un navire suisse qui n'aura pas obéi à un ordre d'un supérieur concernant la conduite nautique ou technique du navire ou bien l'exécution d'une peine disciplinaire sera puni de l'emprisonnement pour trois mois au plus ou d'une amende de mille francs au plus.

2 L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

3 S'il s'agit d'un ordre visant à sauver le navire lui-même, un autre navire ou des personnes en danger de se perdre en mer, la peine sera l'emprisonnement pour un an au plus ou d'amende de cinq mille francs au plus.

Art. 127 1 Celui qui, sans autorisation de l'armateur ou du capitaine, aura embarqué, possédé ou dissimulé à bord d'un navire suisse des objets, notamment des objets dangereux ou prohibés; celui qui, sans autorisation de l'armateur ou du capitaine, aura embarqué ou caché des personnes à bord d'un navire suisse, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

2 L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

1

Abandon de posta

Ivresse

Désobéissance

Embarquements prohibés

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Contrebande

Art. 128 Celui qui, à l'insu de l'armateur ou du capitaine d'un navire suisse, se sera livré à la contrebande ou à d'autres actes illicites et aura par là mis l'armateur ou le capitaine en danger d'être punis ou d'être frappés par une saisie du navire ou de la cargaison, par un retardement du départ ou par toute autre mesure analogue, sera puni de l'emprisonnement pour un an au plus ou de l'amende. L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

2 Le capitaine d'un navire suisse qui aura fait de tels actes à l'insu de l'armateur sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

1

Chapitre III Des infractions contre l'organisation de la navigation suisse Abus du pavillon

Fraude dans l'enregistrement

Art. 129 Celui qui aura battu le pavillon suisse sur mer pour couvrir la navigation d'un bâtiment non enregistré au registre des navires suisses, le capitaine d'un navire suisse qui n'aura pas battu le pavillon suisse sur mer ou qui aura battu un pavillon étranger, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

2 Le capitaine d'un navire suisse qui n'aura pas arboré un pavillon suisse de la forme prévue, ou qui ne l'aura pas arboré de la manière usuelle pour les navires de la catégorie du sien, sera puni de l'amende.

1

Art. 130 Celui qui, dans la procédure d'enregistrement d'un navire dans le registre des navires suisses ou dans la procédure de régularisation des conditions de propriété, aura, notamment quant aux conditions légales relatives à la propriété, à l'existence de fonds propres, à l'origine des capitaux et à l'absence de tout intérêt étranger non autorisé, fait des déclarations inexactes ou dissimulé des faits essentiels, sera puni de l'emprisonnement ou d'une amende de cinquante mille francs au plus. La peine sera une amende de dix mille francs au plus si le délinquant a agi par négligence.

2 Le propriétaire ou l'armateur d'un navire suisse qui n'aura pas annoncé à l'autorité compétente des faits nouveaux de nature à provoquer la radiation du navire du registre des navires suisses ou le retrait de la lettre de mer; 1

377

le propriétaire ou le locataire d'un navire suisse qui aura loué ou sous-loué le navire à un locataire ou sous-locataire ne remplissant pas les conditions légales exigées d'un armateur suisse, sera puni d'une amende de dix mille francs au plus.

Art. 131 Celui qui aura soustrait un navire enregistré dans le registre des navires suisses à la saisie, au séquestre, à la réquisition ou à l'expropriation ordonnées par l'autorité suisse compétente sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende pour la valeur du navire au plus.

Le juge pourra, sur requête, allouer aux lésés le montant de l'amende payée, contre cession par eux à l'Etat d'une part correspondante de leurs créances.

Art, 132 Le propriétaire d'un navire suisse, qui n'aura pas mis la Confédération en mesure d'exercer son droit légal de préemption ou qui l'aura frustrée du résultat de l'exercice par elle de ce droit, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende pour le montant au plus du prix de vente obtenu.

Art. 133 Celui qui, obligé par la loi à restituer la lettre de mer ou tout autre certificat concernant un navire suisse, aura contrevenu à cette obligation, sera puni d'une amende de vingt mille francs au plus.

Art. 134 Le capitaine d'un navire suisse qui aura contrevenu à son obligation légale de tenir et conserver en bon ordre le livre de bord, le rôle d'équipage, le journal des machines ou les autres uvres, procèsverbaux et pièces de contrôle, ou qui n'aura pas à bord du navire les livres et papiers de bord prévus par la loi, sera puni de l'amende.

Art. 135 Le capitaine, le propriétaire ou l'armateur d'un navire suisse qui aura violé son obligation légale d'informer ou de renseigner l'office suisse de la navigation maritime, l'office du registre des navires suisses ou les consulats de Suisse, sera puni de l'amende.

Art. 136 Le capitaine ou l'armateur d'un navire suisse qui aura violé les dispositions sur la protection du travail à bord prévues par la présente loi et les ordonnances et règlements qui la compléteront, con-

Soustraction du navire

Atteinte au droit de préemption dola Confédération

Non-restitution de la lettre de mer

Négligence dans la tenue des livres do bord

Négligence dans les devoirs d'information

ContrjLventiong a la législation du travail

378

cernant la durée du travail, l'âge minimum pour l'enrôlement, l'examen médical et les qualités requises pour le service prévu, la procédure d'enrôlement et de dérôlement, ainsi que la nourriture et le logement à bord; le capitaine qui aura violé les prescriptions concernant l'exécution d'une peine disciplinaire, sera puni de l'amende.

Contraventions aux dispositions Bur le transport

des passagers

Art. 137 Le capitaine ou l'armateur d'un navire suisse qui aura violé les dispositions de la présente loi et des ordonnances et règlements qui la compléteront concernant la sécurité des transports de passagers par mer, l'armement des navires qui y sont destinés, ou bien le logement ou la nourriture des passagers, sera, si l'acte n'est pas punissable en vertu d'une autre disposition légale, puni d'amende de vingt mille francs au plus.

Chapitre IV

Dispositions spéciales Peines accessoires

Personnes morales et sociétés uommerumles

Art. 138 Lorsqu'un délinquant a été condamné pour mise en péril du navire ou de la navigation, pour mauvaise navigabilité, pour défaut d'assistance, pour abandon du navire en péril, pour non-exercice du commandement ou pour abandon de poste, le juge peut prononcer à titre de peine accessoire le retrait du brevet ou certificat d'aptitude professionnelle ainsi que l'interdiction de servir à bord d'un navire suisse.

2 Lorsqu'un délinquant a été condamné pour abus du pavillon ou pour fraude dans la procédure d'enregistrement, le juge peut prononcer à titre de peine accessoire le retrait de la lettre de mer.

1

Art. 139 Si les actes punissables selon les articles 118,128,129, première phrase, 130 à 133 et 135 à 137 sont commis dans la gestion d'une personne morale ou d'une société commerciale, les dispositions pénales sont applicables aux personnes qui ont agi ou auraient dû agir pour elle.

2 La personne morale ou société commerciale répond toutefois solidairement avec le délinquant du paiement des frais; dans les cas prévus aux articles 130 à 132, elle répond en outre du paiement de l'amende.

1

379

Art. 140 Les infractions qui, d'après les dispositions de la présente loi, sont punies de l'emprisonnement pour plus d'un an ou d'une peine plus sévère, donnent lieu à extradition au sens de la législation suisse sur l'extradition aux Etats étrangers.

Extradition

Chapitre V

Du régime disciplinaire Art. 141 1 Celui qui contrevient aux prescriptions générales de service ou au bon ordre à bord, commet une faute de discipline à moins que l'acte ne soit punissable comme crime, délit ou contravention.

2 Sont notamment des fautes de discipline: a. La désobéissance à un ordre d'un supérieur concernant le service à bord; b. L'infraction contre les prescriptions du règlement de bord; c. L'entrave à l'ordre et à la vie à bord; d. La négligence ou l'inattention dans l'accomplissement d'un devoir de service; e. Le fait de ne pas se présenter au service ou de s'en absenter ; /. L'absence irrégulière du bord; g. L'ivresse au service; l'ivresse hors du service si celle-ci a causé un scandale public; h. Toute conduite inconvenante ou blessante pour un supérieur ou toute autre personne à bord.

3 Est seul punissable celui qui agit d'une façon coupable. La peine sera choisie et mesurée d'après la culpabilité de l'auteur. Il sera tenu compte des mobiles et du caractère du coupable, de sa conduite au service à bord, ainsi que de la gravité de la faute du point de vue de l'ordre et de la sécurité à bord.

Art. 142 Toute personne à bord d'un navire suisse est soumise au régime disciplinaire établi par la présente loi.

3 Sont seules autorisées les peines disciplinaires suivantes: a. pour les marins: la réprimande, la suppression du congé durant un à cinq jours, l'amende disciplinaire de cinq à cent francs, les arrêts d'une durée d'un à trois jours.

Fautes (in discipline

1

Conditions personnelles et peines

380

o. pour les passagers et autres personnes à bord: la réprimande, l'exclusion des repas communs durant un à cinq jours, l'amende disciplinaire de cinq à deux cents francs.

3 Tout cumul de peines disciplinaires est interdit.

Exécution des peines disciplinaires

Prescription

Compétence

Art. 143 La réprimande est infligée oralement ou par écrit. A l'encontre d'un passager, elle peut, dans des cas spéciaux, être infligée publiquement.

2 La suppression du congé est subie à l'arrivée au prochain port.

Le coupable doit, même pendant les heures libres, se trouver à bord du navire.

3 Les officiers subissent les arrêts dans leurs cabines, les autres marins dans un local désigné pour cet usage à bord du navire. Les arrêts doivent, en tant que le service à bord le permet, être subis immédiatement.

4 Celui qui est mis aux arrêts ne fait pas de service ; le droit au salaire est suspendu en vertu de l'article 62, 3e alinéa. Les locaux d'arrêts doivent être secs, éclairés par la lumière du jour, suffisamment aérés et conformes aux exigences d'hygiène auxquelles doivent répondre les cabines.

6 Si eue est exclue des repas communs, la personne en faute prend ses repas dans sa cabine. Les frais supplémentaires causés de ce fait peuvent lui être débités.

6 Les amendes doivent être versées à l'office suisse de la navigation maritime, qui les utilise exclusivement à des fins de prévoyance en faveur des marins suisses.

1

Art. 144 Le droit de punir disciplinairement et les peines prononcées pour des fautes de discipline se prescrivent par trois mois.

2 Cette prescription n'est pas sujette à interruption. Totitefois, si l'acte donne lieu à l'ouverture d'une procédure judiciaire, la prescription ne court qu'à partir de l'arrivée du navire au prochain port et elle est suspendue jusqu'à la fin de cette procédure.

1

Art. 145 Le pouvoir disciplinaire appartient au capitaine ou à son remplaçant, lesquels peuvent prononcer toutes les peines disciplinaires prévues par la présente loi.

1

381 2

Si l'acte donne lieu à l'ouverture d'une procédure judiciaire, le juge peut prononcer toutes les peines disciplinaires. Si le coupable n'est plus au service d'un navire suisse, le juge peut prononcer à la place des arrêts disciplinaires une peine d'arrêts ordinaires d'une même durée.

Art. 146 1 L'inculpé sera dans chaque cas mis à même d'expliquer, oralement ou par écrit, ses actes et les mobiles de sa conduite. A la demande de l'inculpé, ses explications doivent faire l'objet d'un pro ces-verbal.

2 Le prononcé de toute peine disciplinaire doit être communiqué à l'inculpé, oralement ou par écrit, avec indication de la faute commise, et relaté dans le livre de bord. La communication de la décision est attestée dans le livre de bord par l'inculpé et le capitaine ; si l'inculpé refuse sa signature, un autre officier est appelé à témoigner par écrit du prononcé de la peine disciplinaire et de sa communication.

Art. 147 1 La peine disciplinaire entre en force et devient exécutoire avec sa communication au coupable.

2 Recours contre toute peine disciplinaire prononcée peut être formé par écrit par celui qui a été puni auprès de l'office suisse de la navigation maritime dans les dix jours de l'arrivée au prochain port. Ce recours ne suspend pas l'exécution de la peine.

3 L'instance de recours donne au capitaine l'occasion de s'expliquer. La décision de l'instance de recours est communiquée par écrit, avec indication des motifs, au capitaine ainsi qu'au recourant, 4 Si un recours contre une amende disciplinaire est reconnu fondé, le montant de l'amende déjà payé doit être restitué. Si un recours contre une mise aux arrêts est reconnu fondé, le droit au salaire est rétabli pour le temps pendant lequel les arrêts ont été subis,

Procédure

Droit de recours

DISPOSITIONS FINALES ET TRANSITOIRES

Art. 148 Les dispositions du titre final du code civil stiisse sont appücables aux matières régies par la présente loi.

Art. 149 Le droit au pavillon accordé en vertu de l'arrêté du Conseil fédéral du 9 avril 1941 concernant la navigation maritime sous pavillon suisse s'éteint deux ans après l'entrée en vigueur de la présente loi.

1

Application tin titro final ducodo civil

Adaptation de l'ancien droit a. Droit au pavillon

382 2

Un an au moins avant l'expiration de ce délai, l'office suisse de la navigation maritime doit, de lui-même, indiquer aux propriétaires et aux armateurs des navires suisses lea conditions nouvelles restant à remplir pour que l'enregistrement des navires subsiste au delà dudit délai.

3 Le Conseil fédéral peut, dans des cas spéciaux, prolonger les délais sur requête de l'office ou du propriétaire.

(>. Contrats d'engagement des marins

c. Contrats pour l'utilisation du navire

Entrée en vigueur de la loi"

Art. 150 Les contrats d'engagement existant au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi doivent être mis en harmonie avec ses dispositions dans le délai d'une année; passé ce délai, la présente loi s'applique à tous les contrats d'engagement.

Art. 151 Les articles 88 à 103 s'appliquent immédiatement aux contrats de transport par mer existant au moment de son entrée en vigueur.

2 Les autres contrats pour l'utilisation du navire existant au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi doivent être mis en harmonie avec ses dispositions dans le délai de six mois; passé ce délai, la présente loi s'applique à tous les contrats pour l'utilisation du navire.

Art. 152 1 Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi. Restent en vigueur jusqu'à cette date: l'arrêté du Conseil fédéral du 9 avril 1941 concernant la navigation maritime sous pavillon suisse, l'arrêté du Conseil fédéral du 15 juin 1941 concernant l'assurance des équipages des navires suisses contre les accidents et la maladie, et l'arrêté du Conseil fédéral du 20 janvier 1942 concernant le contrat d'engagement des marins.

2 Toutes les dispositions contraires sont abrogées à partir de l'entrée en vigueur de la présente loi.

1

f!20

383

ANNEXE I (Article l", 2= alinéa, de la loi fédérale du sur la navigation maritime sous pavillon suisse)

Le pavillon maritime suisse

384

ANNEXE II (Article 28 de la loi fédérale du sur la navigatioa maritime sous pavillon suisse)

Texte original Convention taternationale pour l'unification de certaines règles relatives aux privilèges et hypothèques maritimes signée, à Bruxelles, le 10 avril 1926

Article premier Les hypothèques, mortgages, gagea sur navires, régulièrement établis d'après les lois de l'Etat contractant auquel le navire est ressortissant et inscrits dans un registre public, soit du ressort du port d'enregistrement, soit d'un office central, seront considérés comme valables et respectés dans tous les autres pays contractants.

Art. 2 Sont privilégiés sur le navire, sur le fret du voyage pendant lequel est née la créance privilégiée et sur les accessoires du navire et du fret acquis depuis le début du voyage: 1. Les frais de justice dus à l'Etat et dépenses encourues dans l'intérêt commun des créanciers, pour la conservation du navire ou pour parvenir à la vente et à la distribution de son prix; les droits de tonnage, de phare ou de port et les autres taxes et impôts publics de mêmes espèces ; les frais de pilotage, les frais de garde et de conservation depuis l'entrée du navire dans le dernier port; 2. Les créances résultant du contrat d'engagement du capitaine, de l'équipage et des autres personnes engagées à bord ; 3. Les rémunérations dues pour sauvetage et assistance et la contribution du navire aux avaries communes ; 4. Les indemnités pour abordage ou autres accidents de navigation, ainsi que pour dommages causés aux ouvrages d'art des ports, docks et voies navigables ; les indemnités pour lésions corporelles aux passagers et aux équipages ; les indemnités pour pertes ou avaries de cargaison ou de bagages; 5. Les créances provenant des contrats passés ou d'opérations effectuées par le capitaine hors du port d'attache, en vertu de ses pouvoirs légaux, pour les besoins réels de la conservation du navire ou de la continuation du voyage, sans distinguer si le capitaine est ou non en même temps

385

propriétaire du navire et si la créance est la sienne ou celle des fournisseurs, réparateurs, prêteurs ou autres contractants.

Art. 3 Les hypothèques, mortgages, gages sur navires prévus à l'article 1er, prennent rang immédiatement après les créances privilégiées mentionnées à l'article précédent.

Les lois nationales peuvent accorder un privilège à d'autres créances que celles prévues audit article, mais sans modifier le rang réservé aux créances garanties par hypothèque, mortgages et gages et aux privilèges les primant.

Art. 4 Les accessoires du navire et du fret visés à l'article 2 s'entendent: 1. Des indemnités dues au propriétaire à raison de dommages matériels subis par le navire et non réparés, ou pour pertes de fret; 2. Des indemnités dues au propriétaire pour avaries communes, en tant que celles-ci constituent soit des dommages matériels subis par le navire et non réparés, soit pertes de fret; 3. Des rémunérations dues au propriétaire pour assistance prêtée ou sauvetage effectué jusqu'à la fin du voyage, déduction faite des sommes allouées au capitaine et autres personnes au service du navire.

Le prix du passage et, éventuellement, les sommes dues en vertu de l'article 4 de la convention pour la limitation de la responsabilité des propriétaires de navires sont assimilés au fret.

Ne sont pas considérés comme accessoires du navire ou du fret les indemnités dues au propriétaire en vertu de contrat d'assurance, non plus que des primes, subventions ou autres subsides nationaux.

Par dérogation à l'article 2, alinéa 1er, le privilège prévu au profit des personnes au service du navire porte sur l'ensemble des frets dus pour tous les voyages effectués pendant le cours du même contrat d'engagement.

Art. 5 Les créances se rapportant à un même voyage sont privilégiées dans l'ordre où elles sont rangées à l'article 2. Les créances comprises dans chacun des numéros viennent en concurrence et au marc le franc en cas d'insuffisance du prix.

Les créances visées aux noa 3 et 5, dans chacune de ces catégories, sont remboursées par préférence dans l'ordre inverse des dates où elles sont nées.

Les créances se rattachant à un même événement sont réputées nées en même temps.

Feuille fédérale. 104e année. Vol. I.

27

386

Art. 6 Les créances privilégiées du dernier voyage sont préférées à celles des voyages précédents.

Toutefois, les créances résultant d'un contrat unique d'engagement portant sur plusieurs voyages viennent toutes au même rang avec les créances du dernier voyage.

Art. 7 En vue de la distribution du prix de la vente des objets affectés par le privilège, les créanciers privilégiés ont la faculté de produire pour le montant intégral de leurs créances, sans déduction du chef des règles sur la limitation, mais sans que les dividendes leur revenant puissent dépasser la somme due en vertu desdites règles.

Art. 8 Les créances privilégiées suivent le navire en quelque main qu'il passe.

Art. 9 Les privilèges s'éteignent, en dehors des obstacles prévus par les lois nationales, à l'expiration du délai d'un an, sans que, pour les créances de fournitures, visées au n° 5 de l'article 2, le délai puisse dépasser six mois.

Le délai court pour les privilèges garantissant les rémunérations d'assistance et de sauvetage, à partir du jour où les opérations sont terminées; pour le privilège garantissant les indemnités d'abordage et autres accidents et pour lésions corporelles, du jour où le dommage a été causé; pour le privilège, pour les pertes ou avaries de cargaison ou des bagages, du jour de la délivrance de la cargaison ou des bagages ou de la date à laquelle ils eussent dû être délivrés ; pour les réparations et fournitures ou autres cas visés au n° 5 de l'article 2, à partir du jour de la naissance de la créance. Dans tous les autres cas, le délai court à partir de l'exigibilité de la créance.

La faculté de demander des avances ou des acomptes n'a pas pour conséquence de rendre exigibles les créances des personnes engagées à bord, visées au n° 2 de l'article 2.

Parmi les cas d'extinction prévus par les lois nationales, la vente n'éteint les privilèges que si elle est accompagnée de formalités de publicité déterminées par les lois nationales. Ces formalités comporteront un préavis donné dans la forme et les délais prévus par ces lois à l'administration chargée de la tenue des registres provns à l'article 1er de ia présente convention.

Les causes d'interruption des délais susdits sont déterminées par la loi du tribunal saisi.

387

Les hautes parties contractantes se réservent le droit d'admettre dans leur législation, comme prorogeant le délai ci-dessus fixé, le fait que le navire grevé n'a pu être saisi dans les eaux territoriales de l'Etat dans lequel le demandeur a son domicile ou son principal établissement, sans que ce délai puisse dépasser trois ans depuis la naissance de la créance.

Art, 10 Le privilège sur le fret peut être exercé tant que le fret est encore dû ou que le montant du fret se trouve encore entre les mains du capitaine ou de l'agent du propriétaire. Il en est de même du privilège sur les accessoires.

Art. 11 Sauf ce qui est prévu à la présente convention, les privilèges établis par les dispositions qui précèdent ne sont soumis à aucune formalité, ni à aucune condition spéciale de preuve.

Cette disposition ne porte pas atteinte au droit de chaque Etat de maintenir dans sa législation les dispositions exigeant du capitaine l'accomplissement de formalités spéciales, soit pour certains emprunts sur le navire, soit pour la vente de la cargaison.

Art. 12 Les lois nationales doivent déterminer la nature et la forme des documents se trouvant à bord du navire sur lesquels mention doit être faite des hypothèques, mortgages et gages prévus à l'article 1er: sans que toutefois le créancier qui a requis cette mention dans les formes prévues puisse être responsable des omissions, erreurs ou retards de l'inscription sui- ces documents.

Art. 13 Les dispositions qui précèdent sont applicables aux navires exploités par un armateur non propriétaire ou par un affréteur principal, sauf lorsque le propriétaire s'est trouvé dessaisi par un acte illicite et quand, en outre, le créancier n'est pas de bonne foi.

Art. 14 Les dispositions de la présente convention seront appliquées dans chaque Etat contractant lorsque le navire grevé est ressortissant d'un Etat con« tractant, ainsi que dans les autres cas prévus par les lois nationales.

Toutefois, le principe formulé dans l'alinéa précédent ne porte pas atteinte au droit des Etats contractants de ne pas appliquer les dispositions

388

:

de la présente convention en faveur des ressortissants d'un Etat non contractant.

Art, 15 La présente convention est sans application aux navires de guerre et aux navires d'Etat exclusivement affectés à un service public.

Art. 16 Bien, dans les dispositions qui précèdent, ne porte atteinte à la compétence des tribunaux, à la procédure et aux voies d'exécution organisées par les lois nationales.

Art. 17 A l'expiration du délai de deux ans au plus tard à compter du jour de la signature de la convention, le gouvernement belge entrera en rapport avec les gouvernements des hautes parties contractantes qui se seront déclarées prêtes à la ratifier, à l'effet de faire décider s'il y a lieu de la mettre en vigueur. Les ratifications seront déposées à Bruxelles à la date qui sera fixée de commun accord entre lesdits gouvernements. Le premier dépôt de ratifications sera constaté par un procès-verbal signé par les représentants des Etats qui y prendront part et par le ministre des affaires étrangères de Belgique.

Les dépôts ultérieurs se feront au moyen d'une notification écrite, adressée au gouvernement belge et accompagnée de l'instrument de ratification.

Copie certifiée conforme du procès-verbal relatif au premier dépôt de ratifications des notifications mentionnées à l'alinéa précédent, ainsi que des instruments de ratification qui les accompagnent sera immédiatement, par les soins du gouvernement belge et par la voie diplomatique, remise aux Etats qui ont signé la présente convention ou qui y auront adhéré. Dans les cas visés à l'alinéa précédent, ledit gouvernement fera connaître, en même temps, la date à laquelle il a reçu la notification.

Art. 18 Les Etats non signataires pourront adhérer à la présente convention, qu'ils aient été ou non représentés à la conférence internationale de Bruxelles.

L'Etat qui désire adhérer notifie par écrit son intention au gouvernement belge, en lui transmettant l'acte d'adhésion, qui sera déposé dans les archives dudit gouvernement.

Le gouvernement belge transmettra immédiatement à tous les Etats signataires ou adhérents copie certifiée conforme de la notification ainsi que de l'acte d'adhésion, en indiquant la date à laquelle il a reçu la notification.

389

Art. 19 Les hautes parties contractantes peuvent, au moment de la signature, du dépôt des ratifications ou lors de leur adhésion, déclarer que l'acceptation qu'elles donnent à la présente convention ne s'applique pas soit à certains soit à aucun des dominions autonomes, colonies, possessions, protectorats ou territoires d'outre-mer se trouvant sous leur souveraineté ou autorité.

En conséquence, elles peuvent ultérieurement adhérer séparément au nom de l'un ou de l'autre de ces dominions autonomes, colonies, possessions, protectorats ou territoires d'outre-mer, ainsi exclus dans leur déclaration originale. Elles peuvent aussi, en se conformant à ces dispositions, dénoncer la présente convention, séparément pour l'un ou plusieurs des dominions autonomes, colonies, possessions, protectorats ou territoires d'outre-mer se trouvant sous leur souveraineté ou autorité.

Art. 20 A l'égard des Etats qui auront participé au premier dépôt de ratifications, la présente convention produira effet un an après la date du procèsverbal de ce dépôt. Quant aux Etats qui la ratifieront ultérieurement ou qui y adhéreront, ainsi que dans le cas où la mise en vigueur se fera ultérieurement et selon l'article 19, elle produira effet six mois après que les notifications prévues à l'article 17, alinéa 2, et à l'article 18, alinéa 2, auront été reçues par le gouvernement belge.

Art. 21 S'il arrivait qu'un des Etats contractants voulût dénoncer la présente convention, la dénonciation sera notifiée par écrit au gouvernement belge, qui communiquera immédiatement copie certifiée conforme de la notification à tous les autres Etats, en leur faisant savoir la date à laquelle il l'a reçue.

La dénonciation produira ses effets a l'égard de l'Etat seul qui l'aura notifiée et un an après que la notification en sera parvenue au gouvernement belge.

Art. 22 Chaque Etat contractant aura la faculté de provoquer la réunion d'une nouvelle conférence, dans le but de rechercher les améliorations qui pourraient être apportées à la présente convention.

Celui des Etats qui ferait usage de cette faculté aurait à notifier un an à l'avance son intention aux autres Etats, par l'intermédiaire du gouvernement belge, qui se chargerait de convoquer la conférence.

390 PROTOCOLE DE SIGNATURE En procédant à la signature de la convention internationale pour l'unification de certaines règles relatives aux privilèges et hypothèques maritimes, les plénipotentiaires soussignés ont adopté le présent protocole, qui aura la même force et la même valeur que si ses dispositions étaient insérées dans le texte de la convention à laquelle il se rapporte: I. -- II est entendu que la législation de chaque Etat reste libre: 1. D'établir parmi les créances visées au 1° de l'article 2 un ordre déterminé inspiré par le souci des intérêts du trésor; 2. D'accorder aux administrations des ports, docks, phares et voies navigables, qui ont fait enlever une épave ou d'autres objets gênant la navigation ou qui sont créanciers pour droits de port, ou pour des dommages causés par la faute d'un navire, le droit, en cas de nonpayement, de retenir le navire, les épaves et autres objets, de les vendre et de s'indemniser sur le prix par préférence à d'autres créanciers, et 3. De régler le rang des créanciers pour dommages causés aux ouvrages d'art autrement qu'il n'est dit à l'article 5 et à l'article 6.

II. -- II n'est pas porté atteinte aux dispositions des lois nationales des Etats contractants qui accorderaient un privilège aux établissements publics d'assurance pour les créances résultant de l'assurance du personnel des navires.

Fait à Bruxelles, en un seul exemplaire, le 10 avril 1926.

391

ANNEXE III er

(Article 107, 1 alinéa, de la loi du.

sur la navigation maritime sous pavillon suisse)

Texte original Convention internationale pour l'unification de certaines règles en matière d'abordage signée, à Bruxelles, le 23 septembre 1910

Article premier En cas d'abordage survenu entre navires de mer ou autres navires de mer et bateaux de navigation intérieure, les indemnités dues à raison des dommages causés aux navires, aux choses ou personnes se trouvant à bord sont réglées conformément aux dispositions suivantes, sans qu'il y ait à tenir compte des eaux où l'abordage s'est produit.

Art. 2 Si l'abordage est fortuit, s'il est dû à un cas de force majeure, ou s'il y a des doutes sur les causes de l'abordage, les dommages sont supportés par ceux qui les sont éprouvés.

Cette disposition reste applicable dans le cas où, soit les navires, soit l'un d'eux, sont au mouillage au moment de l'accident.

Art. 3 Si l'abordage est causé par la faute de l'un des navires, la réparation des dommages incombe à celui qui l'a commise.

Art. 4 S'il y a faute commune, la responsabilité de chacun des navires est proportionnelle à la gravité des fautes respectivement commises; toutefois si, d'après les circonstances, la proportion ne peut pas être établie ou si les fautes apparaissent comme équivalentes, la responsabilité est partagée par parts égales.

Les dommages causés soit aux navires, soit à leurs cargaisons, soit aux effets ou autres biens des équipages, des passagers ou d'autres personnes se trouvant à bord sont supportés par les navires en faute, dans ladite proportion, sans solidarité à l'égard des tiers.

392

Les navires en faute sont tenus solidairement à l'égard des tiers pour les dommages causés par mort ou blessures, sauf recours de celui qui a payé une part supérieure à celle que, conformément à l'alinéa 1er du présent article, il doit définitivement supporter.

Il appartient aux législations nationales de déterminer, en ce qui concerne ce recours, la portée et les effets des dispositions contractuelles ou légales qui limitent la responsabilité des propriétaires de navires à l'égard des personnes se trouvant à bord.

Art. 5 La responsabilité établie par les articles précédents subsiste dans le cas où l'abordage est causé par la faute d'un pilote, même lorsque celui-ci est obligatoire.

Art. 6 L'action en réparation des dommages subis par suite d'un abordage n'est subordonnée ni à un protêt, ni à aucune autre formalité spéciale.

Il n'y a point de présomptions légales de faute quant à la responsabilité de l'abordage.

Art. 7 Les actions en réparation de dommages se prescrivent par deux: ans a partir de l'événement.

Le délai pour intenter les actions en recours admises par l'alinéa 3 de l'article 4 est d'une année. Cette prescription ne court que du jour du paiement.

Les causes de suspension et d'interruption de ces prescriptions sont déterminées par la loi du tribunal saisi de l'action.

Les hautes parties contractantes se réservent le droit d'admettre dans leurs législations, comme prorogeant les délais ci-dessus fixés, le fait que le navire défendeur n'a pu être saisi dans les eaux territoriales de l'Etat dans lequel le demandeur a son domicile ou son principal établissement.

Art. 8 Après un abordage, le capitaine de chacun des navires entrés en collision est tenu, autant qu'il peut le faire sans danger sérieux pour son navire, son équipage et ses passagers, de prêter assistance à l'autre bâtiment, à son équipage et à ses passagers.

Il est également tenu dans la mesure du possible de faire connaître à l'autre navire le nom et le port d'attache de son bâtiment, ainsi que les lieus d'où il vient et où il va.

Le propriétaire du navire n'est pas responsable à raison de la seule contravention aux dispositions précédentes.

393

Art. 9 Les hautes parties contractantes dont la législation ne réprime pas les infractions à l'article précédent s'engagent à prendre ou à proposer à. leurs législatures respectives les mesures nécessaires pour que ces infractions soient réprimées.

Les hautes parties contractantes se communiqueront, aussitôt que faire se pourra, les lois et les règlements qui auraient déjà été édictés, ou qui viendraient à l'être dans leurs Etats pour l'exécution de la disposition précédente.

Art. 10 Sous réserve de conventions ultérieures, les présentes dispositions ne portent point atteinte aux règles sur la limitation de responsabilité des propriétaires de navires, telles qu'elles sont établies dans chaque pays, non plus qu'aux obligations résultant du contrat de transport ou de tous autres contrats.

Art. 11 La présente convention est sans application aux navires de guerre et aux navires d'Etat exclusivement affectés à un service public.

Art. 12 Les dispositions de la présente convention seront appliquées à l'égard de tous les intéressés, lorsque tous les navires en cause seront ressortissants aux Etats des hautes parties contractantes et dans les autres cas prévus par les lois nationales.

Il est entendu toutefois: 1° Qu'à l'égard des intéressés ressortissants d'un Etat non contractant, l'application desdites dispositions pourra être subordonnée par chacun des Etats contractants à la condition de réciprocité; 2° Que, lorsque tous les intéressés sont ressortissants du même Etat que le tribunal saisi, c'est la loi nationale et non la convention qui est applicable.

Art. 13 La présente convention s'étend à la réparation des dommages que, soit par exécution ou omission d'une manoeuvre, soit par inobservation des règlements, un navire a causés , soit à un autre navire, soit.aux choses ou personnes se trouvant à leur bord, alors même qu'il n'y aurait pas eu abordage, Art. 14 Chacune des hautes parties contractantes aura la faculté de provoquer la réunion d'une nouvelle conférence après trois ans à partir de l'entrée en vigueur de la présente convention, dans le but de rechercher les améliorations qui pourraient y être apportées, et, notamment d'en étendre, s'il est possible, la sphère d'application.

394

Celle des puissances qui ferait usage de cette faculté aurait à notifier son intention aux autres puissances, par l'intermédiaire du gouvernement belge, qui se chargerait de convoquer la conférence dans les six mois.

Art. 15 Les Etats qui n'ont pas signé la présente convention sont admis à y adhérer sur leur demande. Cette adhésion sera notifiée par la voie diplomatique au gouvernement belge et, par celui-ci, à chacun des gouvernements des autres parties contractantes ; elle sortira ses effets un mois après l'envoi de la notification faite par le gouvernement belge.

Art. 16 La présente convention sera ratifiée.

A l'expiration du délai d'un an au plus tard, à compter du jour de la signature de la convention, le gouvernement belge entrera en rapport avec les gouvernements des hautes parties contractantes qui se seront déclarées prêtes à la ratifier, à l'effet de faire décider s'il y a lieu de la mettre en vigueur.

Les ratifications seront, le cas échéant, déposées immédiatement à Bruxelles et la convention produira ses effets un mois après ce dépôt.

Le protocole restera ouvert pendant une autre année en faveur des Etats représentés à la conférence de Bruxelles. Passé ce délai, ils ne pourraient qu'y adhérer, conformément aux dispositions de l'article 15.

Art. 17 Dans le cas où l'une ou l'autre des hautes parties contractantes dénoncerait la présente convention, cette dénonciation ne produirait ses effets qu'un an après le jour où elle aurait été notifiée au gouvernement belge et la convention demeurerait en vigueur entre les autres parties contractantes.

ARTICLE ADDITIONNEL

Par dérogation à l'article 16 qui précède, il est entendu que la disposition de l'article 5 fixant la responsabilité dans le cas où l'abordage est causé par la faute d'un pilote obligatoire, n'entrera de plein droit en vigueur que lorsque les hautes parties contractantes se seront mises d'accord sur la limitation de la responsabilité des propriétaires de navires.

En foi de quoi, les plénipotentiaires des hautes parties contractantes respectives ont signé la présente convention et y ont apposé leurs cachets.

Fait à Bruxelles, en un seul exemplaire, le 23 septembre 1910.

395

ANNEXE IV e

(Article 107, 2 alinéa, de la loi du sur la navigation maritime sous pavillon suisse)

Texte original Convention internationale pour l'unification de certaines règles en matière d'assistance et de sauvetage maritimes signée, à Bruxelles, le 23 septembre 1910

Article premier L'assistance et le sauvetage des navires de mer en danger, des choses se trouvant à bord, du fret et du prix de passage, ainsi que les services de même nature rendus entre navires de mer et bateaux de navigation intérieure sont soumis aux dispositions suivantes, sans qu'il y ait à distinguer entre ces deux sortes de services et sans qu'il y ait à tenir compte des eaux où ils ont été rendus.

Art. 2 Tout fait d'assistance ou de sauvetage ayant eu un résultat utile donne lieu à une équitable rémunération.

Aucune rémunération n'est due si le secours prêté reste sans résultat utile.

En aucun cas, la somme à payer ne peut dépasser la valeur des choses sauvées.

Art. 3 N'ont droit à aucune rémunération les personnes qui ont pris part aux opérations de secours malgré la défense expresse et raisonnable du navire secouru.

Art. 4 Le remorqueur n'a droit à une rémunération pour l'assistance ou le sauvetage du navire par lui remorqué ou de sa cargaison que s'il a rendu des services exceptionnels ne pouvant être considérés comme l'accomplissement du contrat de remorquage.

Art. 5 Une rémunération est due encore que l'assistance ou le sauvetage ait eu lieu entre navires appartenant, au même propriétaire.

Art. 6 Le montant de la rémunération est fixé par la convention des parties etj à défaut, par le juge.

396

II en est de même de la proportion dans laquelle cette rémunération doit être répartie entre les sauveteurs.

La répartition entre le propriétaire, le capitaine et les autres personnes au service de chacun des navires sauveteurs sera réglée par la loi nationale du navire.

Art. 7 Toute convention d'assistance et de sauvetage passée au moment et sous l'influence du danger peut, à la requête de l'une des parties, être annulée ou modifiée par le juge, s'il estime que les conditions convenues ne sont pas équitables.

Dans tous les cas, lorsqu'il est prouvé que le consentement de l'une des parties a été vicié par dol ou réticence ou lorsque la rémunération est, de façon excessive dans un sens ou dans l'autre, hors de proportion avec le service rendu, la convention peut être annulée ou modifiée par le juge à la requête de la partie intéressée.

Art. 8

La rémunération est fixée par le juge selon les circonstances en prenant pour base : a, en premier lieu, le succès obtenu, les efforts et le mérite de ceux qui ont prêté secours, le danger couru par le navire assisté, par ses passagers ou son équipage, par sa cargaison, par les sauveteurs et par le navire sauveteur, le temps employé, les frais et dommages subis, et les risques de responsabilité et autres courus par les sauveteurs, la valeur du matériel exposé par eux, en tenant compte, le cas échéant, de l'appropriation spéciale du navire assistant; b. en second lieu, la valeur des choses sauvées.

Les mêmes dispositions s'appliquent à la répartition prévue à l'article 6, alinéa 2.

Le juge peut réduire ou supprimer la rémunération s'il apparaît que les sauveteurs ont, par leur faute, rendu nécessaire le sauvetage ou l'assistance ou qu'ils se sont rendus coupables de vols, recels ou autres actes frauduleux.

Art. 9 II n'est dû aucune rémunération par les personnes sauvées, sans que cependant il soit porté atteinte aux prescriptions des lois nationales à cet égard.

Les sauveteurs de vies humaines qui sont intervenus à l'occasion de l'accident ayant donné heu au sauvetage ou à l'assistance ont droit à une équitable part de la rémunération accordée aux sauveteurs du navire, de la cargaison et de leurs accessoires.

Art. 10 L'action en paiement de la rémunération se prescrit par deux ans à partir du jour où les opérations d'assistance ou de sauvetage sont terminées.

Les causes de suspension et d'interruption de cette prescription sont déterminées par la loi du tribunal saisi de l'action.

397

Les hautes parties contractantes se réservent le droit d'admettre dans leur législation, comme prorogeant le délai ci-dessus fixé, le fait que le navire assisté ou sauvé n'a pu Être saisi dans les eaux territoriales de l'Etat dans lequel le demandeur a son domicile ou son principal établissement.

Art. 11 Tout capitaine est tenu, autant qu'il peut le faire sans danger sérieux pour son navire, son équipage, ses passagers, de prêter assistance à toute personne, même ennemie, trouvée en mer en danger de se perdre.

Le propriétaire du navire n'est pas responsable à raison des contraventions à la disposition précédente.

Art. 12 Les hautes parties contractantes dont la législation ne réprime pas l'infraction à l'article précédent s'engagent à prendre ou à proposer à leurs législatures respectives les mesures nécessaires pour que cette infraction soit réprimée.

Les hautes parties contractantes se communiqueront, aussitôt que faire se pourra, les lois ou règlements qui auraient déjà été édictés ou qui viendraient à l'être dans leurs Etats pour l'exécution de la disposition qui précède.

Art. 13 La présente convention ne porte pas atteinte aux dispositions des législations nationales ou des traités internationaux sur l'organisation de services d'assistance et de sauvetage par les autorités publiques ou sous leur contrôle, et notamment sur le sauvetage des engins de pêche.

Art. 14 La présente convention est sans application aux navires de guerre et aux navires d'Etat exclusivement affectés à un service public.

Art. 15 Les dispositions de la présente convention seront appliquées à l'égard de tous les intéressés lorsque, soit le navire assistant ou sauveteur, soit le navire assisté ou sauvé appartient à un Etat de l'une des hautes parties contractantes, ainsi que dans les autres cas prévus par les lois nationales.

H est entendu toutefois: 1° Qu'à l'égard des intéressés ressortissants d'un Etat non contractant, l'application desdites dispositions pourra être subordonnée par chacun des Etats contractants à la condition de réciprocité; 2° Que, lorsque tous les intéressés sont ressortissants du même Etat que le tribunal saisi, c'est la loi nationale et non la convention qui est applicable;

398

3° Que, sans préjudice des dispositions plus étendues des lois nationales, l'article 11 n'est applicable qu'entre navires ressortissant aux Etats des hautes parties contractantes.

Art. 16 Chacune des hautes parties contractantes aura la faculté de provoquer la réunion d'une nouvelle conférence après trois ans à partir de l'entrée en vigueur de la présente convention, dans le but de rechercher les améliorations qui pourraient y être apportées et, notamment, d'en étendre, s'il est possible, la sphère d'application.

Celle des puissances qui ferait usage de cette faculté aurait à notifier son intention aux autres puissances, par l'intermédiaire du gouvernement belge, qui se chargerait de convoquer la conférence dans les six mois.

Art. 17 Les Etats qui n'ont pas signé la présente convention sont admis à y adhérer sur leur demande. Cette adhésion sera notifiée par la voie diplomatique au gouvernement belge et, par celui-ci, à chacun des gouvernements des autres parties contractantes; elle sortira ses effets un mois après l'envoi de la notification faite par le gouvernement belge.

Art. 18 La présente convention sera ratifiée.

A l'expiration du délai d'un an au plus tard, à compter du jour de la signature de la convention, le gouvernement belge entrera en rapport avec les gouvernements des hautes parties contractantes qui se seront déclarées prêtes à la ratifier, à l'effet de faire décider s'il y a Heu de la mettre en vigueur.

Les ratifications seront, le cas échéant, déposées immédiatement à Bruxelles et la convention produira ses effets un mois après ce dépôt.

Le protocole restera ouvert pendant une autre année en faveur des Etats représentés à la conférence de Bruxelles. Passé ce délai, ils ne pourraient qu'y adhérer conformément aux dispositions de l'article 17.

Art. 19 Dans le cas où l'une ou l'autre des hautes parties contractantes dénoncerait la présente convention, cette dénonciation ne produirait ses effets qu'un an après le jour où elle aurait été notifiée au gouvernement belge et la convention demeurerait en vigueur entre les autres parties contractantes.

En foi de quoi, les plénipotentiaires des hautes parties contractantes respectives ont signé la présente convention et y ont apposé leurs cachets.

Fait à Bruxelles, en un seul exemplaire, le 23 septembre 1910.

399

ANNEXE V (Article 108, 2e alinéa, de la loi du sur la navigation maritime sous pavillon suisse) Texte original (Le texte anglais fait également foi)

Règles d'York et d'Anvers 1950 concernant l'avarie commune adoptées par le Comité Maritime International (conférence d'Amsterdam 1949) et par l'International Law Association, à Copenhague, en 1950

Kègle d'interprétation. -- Dans le règlement d'avaries communes, les règles suivantes précédées de lettres et de numéros doivent s'appliquer à l'exclusion de toute loi et pratique incompatibles avec elles.

A l'exception de ce qui est prévu par les règles numérotées, l'avarie commune doit être réglée conformément aux règles précédées de lettres.

Kègle A. -- H y a acte d'avarie commune quand, et seulement quand, intentionnellement et raisonnablement, un sacrifice extraordinaire est fait ou une dépense extraordinaire encourue pour le salut commun, dans le but de préserver d'un péril les propriétés engagées dans une aventure maritime commune.

Kègle B. -- Les sacrifices et dépenses d'avarie commune seront supportés par les divers intérêts appelés à contribuer sur les bases déterminées ci-après.

Kègle C. -- Seuls les dommages, pertes, ou dépenses, qui sont la conséquence directe de l'acte d'avarie commune, seront admis en avarie commune.

Les pertes ou dommages subis par le navire ou la cargaison, par suite de retard, soit au cours du voyage, soit postérieurement, tels que le chômage, et toute perte indirecte quelconque telle que la différence de cours, ne seront pas admis en avarie commune.

Règle D. -- Lorsque l'événement qui a donné lieu au sacrifice ou à la dépense aura été la conséquence d'une faute commise par l'une des parties engagées dans l'aventure, il n'y en aura pas moins lieu à contribution, mais sans préjudice des recours pouvant être ouverts contre cette partie à raison d'une telle faute.

Kègle E. -- La preuve qu'une perte ou une dépense doit effectivement être admise en avarie commune incombe à celui qui réclame cette admission.

400

Règle F. ·-- Toute dépense supplémentaire encourue en substitution d'une autre dépense qui aurait été admissible en avarie commune sera réputée elle-même avarie commune et admise à ce titre, sans égard à l'économie éventuellement réalisée par d'autres intérêts, mais seulement jusqu'à concurrence du montant de la dépense d'avarie commune ainsi évitée.

Règle O. -- Le règlement des avaries communes doit être établi, tant pour l'estimation des pertes que pour la contribution, sur la base des valeurs au moment et au lieu où se termine l'aventure.

Cette règle est sans influence sur la détermination du lieu où le règlement doit être établi.

Règle I. -- Jet de cargaison Aucun jet de cargaison ne sera admis bonifié en avarie commune, à moins que cette cargaison n'ait été transportée conformément aux usagés reconnus du commerce.

Règle II. -- Dommage causé par jet et sacrifice pour le salut commun Sera admis en avarie commune le dommage causé au navire et à la cargaison, ou à l'un d'eux, par un sacrifice ou en conséquence d'un sacrifice fait pour le salut commun, et par l'eau qui pénètre dans la cale par les écoutilles ouvertes ou par toute autre ouverture pratiquée en vue d'opérer un jet pour le salut commun.

Règle III. --· Extinction d'incendie, à bord Sera admis en avarie commune le dommage causé au navire et à la cargaison, ou à l'un d'eux, par l'eau ou autrement, y compris le dommage causé en submergeant ou en sabordant un navire en feu, en vue d'éteindre un incendie à bord; toutefois, aucune bonification ne sera faite pour dommage causé à toutes parties du navire et du chargement en vrac, ou à tous colis séparés de marchandises qui ont été en feu.

Sègle IV. -- Coupement de débris La perte ou le dommage résultant du coupement des débris ou restants d'espars ou d'autres objets qui ont été enlevés par fortune de mer ne sera pas bonifié en avarie commune.

Règle V. -- Echouement volontaire Quant un navire est intentionnellement mis à la côte, et que les circonstances sont telles que si cette mesure n'était pas adoptée, il serait inévitablement drossé à la côte ou sur les rochers, aucune perte ou avarie résultant pour le navire, le chargement et le fret, ou pour l'un deux, de cet échouement intentionnel ne sera admise en avarie commune, mais les pertes ou dommages encourus en renflouant un tel navire seront admis en avarie commune.

401

Dans tous les autres cas où un navire est intentionnellement mis à la côte pour le salut commun, la perte ou le dommage qui en résulte sera admis en avarie commune.

Bègl& VI. -- Forcement de voiles. Avarie ou perte de voiles L'avarie ou la perte de voiles et d'espars, ou de l'un d'eus, ayant pour cause les efforts faits pour renflouer un navire échoué ou l'amener sur un plus haut fond en vue du salut commun, sera admis en avarie commune; mais lorsqu'un navire est à flot, aucune perte ou avarie causée au navire, au chargement et au fret, ou à l'un d'eux, par forcement de voiles, ne sera bonifié en avarie commune.

Bègle VII. -- Dommages aux machines et aux chaudières Le dommage causé aux machines et aux chaudières d'un navire échoué dans une position périlleuse par les efforts faits pour le renflouer, sera admis en avarie commune, lorsqu'il sera établi qu'il procède de l'intention réelle de renflouer le navire pour le salut commun au risque d'un tel dommage; mais lorsqu'un navire est à flot, aucune perte ou avarie causée par le fonctionnement des machines et chaudières, y compris la perte ou avarie due à un forcement de machines ou une mesure de ce genre, ne sera en aucune circonstance admis en avarie commune.

Sègle VIII. -- Dépenses pour alléger un navire échoué et dommage résultant de cette mesure Lorsqu'un navire est échoué et que la cargaison, ainsi que le combustible et les approvisionnements du navire, ou l'un d'eux, sont déchargés dans les circonstances telles que cette mesure constitue un acte d'avarie commune, les dépenses supplémentaires d'allégement, de location des allèges, et, le cas échéant, celles de réembarquement ainsi que la perte ou le dommage en résultant, seront admis en avarie commune.

Bègle IX. -- Objets du navire et approvisionnements brûlés comme combustible Les objets et approvisionnements du navire, ou l'un d'eux, qu'il aura été nécessaire de brûler comme combustible pour le salut commun en cas de péril, seront admis en avarie commune quand et seulement quand le navire aura été pourvu d'un ample approvisionnement de combustibles.

Mais la quantité estimative de combustible qui aurait été consommée, calculée au prix courant au dernier port de départ du navire et à la date de ce départ, sera portée au crédit de l'avarie commune.

Bègle X. -- Dépenses au port de refuge, etc.
a. Quand un navire sera entré dans un port ou heu de refuge ou qu'il sera retourné à son port ou lieu de chargement par suite d'accident, de sacrifice ou d'autres circonstances extraordinaires qui auront rendu cette mesure nécessaire pour le salut commun, les dépenses encourues pour Feuille fédérale. 104« année. Vol. I.

28

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entrer dans ce port ou lieu seront admises en avarie commune; et, quand il en sera reparti avec tout ou partie de sa cargaison primitive, les dépenses correspondantes pour quitter ce port ou lieu qui auront été la conséquence de cette entrée ou de ce retour seront de même admises en avarie commune.

Quand un navire est dans un port ou lieu de refuge quelconque, et qu'il est nécessairement déplacé vers un autre port ou lieu parce que les réparations ne peuvent être effectuées au premier port ou lieu, les dispositions de cette Règle s'appliqueront au deuxième port ou lieu comme s'il était un port ou lieu de refuge. Les dispositions de la Règle XI s'appliqueront à la prolongation de voyage occasionnée par ce déplacement.

6. Les frais faits pour manutentionner à bord ou pour décharger la cargaison, le combustible ou les approvisionnements soit à un port soit à un lieu de chargement, d'escale, ou de refuge, seront admis en avarie commune si la manutention ou le déchargement était nécessaire pour le salut commun ou pour permettre de réparer les avaries au navire causées par sacrifice ou par accident si ces réparations étaient nécessaires pour permettre de continuer le voyage en sécurité.

c. Toutes les fois que les frais de manutention ou de déchargement de la cargaison, du combustible ou des approvisionnements seront admissibles en avarie commune, les frais de leur rechargement et de leur arrimage à bord du navire, ainsi que tous frais de magasinage (y compris l'assurance, si elle a été raisonnablement conclue) seront également ainsi admis. Mais si le navire est condamné ou ne continue pas son voyage primitif, aucun frais de magasinage encouru après la date de la condamnation du navire ou de l'abandon du voyage ne sera admis en avarie commune. En cas de condamnation du navire ou d'abandon du voyage avant l'achèvement du déchargement de la cargaison, les frais de magasinage, dont il est question ci-dessus, seront admis en avarie commune jusqu'à la da/te de l'achèvement du déchargement.

d. Si un navire en état d'avarie se trouve dans un port ou lieu où il serait pratiquement possible de le réparer de manière à lui permettre de poursuivre son voyage avec toute sa cargaison, et que, en vue de réduire les dépenses, on prenne le parti, soit de le remorquer jusqu'à son port de destination, soit de transborder
la cargaison, en tout ou en partie, sur un autre navire ou de la réexpédier de toute autre manière, en pareil cas, la dépense supplémentaire de ces remorquages, transbordement et réexpédition, ou de l'un d'eux (jusqu'à concurrence du montant de la dépense supplémentaire épargnée) sera supportée par les divers intéressés dans l'aventure proportionnellement à la dépense extraordinaire épargnée.

Règle. XI. -- Salaires et entretien de l'équipage et autres dépenses pour se rendre au port de refuge, vi dans ce port ...

a. Les salaires et frais d'entretien du Capitaine, des Officiers et de l'équipage raisonnablement encourus ainsi que le combustible et les appro-

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visionnement consommés durant la prolongation du voyage occasionnée par l'entrée du navire dans un port de refuge ou par son retour au port ou lieu de chargement, doivent être admis en avarie commune quand les dépenses pour entrer en ce port ou lieu sont admissibles en avarie commune par application de la Règle X».

6. Quand un navire sera entré ou aura été retenu dans un port ou lieu, par suite d'un accident, sacrifice ou autres circonstances extraordinaires qui ont rendu cela nécessaire pour le salut commun, ou pour permettre la réparation des avaries causées au navire par sacrifice ou accident quand la réparation est nécessaire à la poursuite du voyage en sécurité, les salaires et frais d'entretien des Capitaine, Officiers, et équipage raisonnablement encourus pendant la période supplémentaire d'immobilisation en ce port ou lieu jusqu'à ce que le navire soit ou aurait dû être mis en état de poursuivre son voyage, seront admis en avarie commune. Quand le navire est condamné ou ne poursuit pas son voyage primitif, la période supplémentaire d'immobilisation sera réputée ne pas dépasser la date de la condamnation du navire ou de son abandon du voyage ou, si la cargaison n'est alors pas déchargée, la date d'achèvement de son déchargement.

Le combustible et les approvisionnements consommés pendant la période supplémentaire d'immobilisation seront admis en avarie commune à l'exception du combustible et des approvisionnements consommés en effectuant des réparations non admissibles en avarie commune.

Les frais de port encourus durant cette période supplémentaire d'immobilisation seront de même admis en avarie commune, à l'exception des frais qui ne sont encourus qu'en raison de réparations non admissibles en avarie commune.

c. Pour l'application de la présente Règle ainsi que des autres Règles, les salaires comprennent les paiements faits aux Capitaine, Officiers et équipage ou à leur profit, que ces paiements soient imposés aux armateurs par la loi ou qu'ils résultent des conditions et clauses des contrats de travail.

d. Quand des heures supplémentaires sont payées aux Capitaine, Officiers ou équipage pour l'entretien du navire, ou pour des réparations dont le coût n'est pas admissible en avarie commune, ces heures supplémentaires ne seront admises en avarie commune que jusqu'à concurrence de la
dépense qui a été évitée et qui eût été encourue et admise en avarie commune, si la dépense de ces heures supplémentaires n'avait pas été exposée.

Règle, XII. -- Dommage causé à la cargaison en la, déchargeant, etc.

Le dommage ou la perte subis par la cargaison, le combustible ou les approvisionnements dans les opérations de manutention, déchargement, emmagasinage, rechargement et arrimage sera admis en avarie commune

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lorsque le coût respectif de ces opérations sera admis en avarie commune et dans ce cas seulement.

Règle XIII, -- Déduction du coût des réparations, Dans le règlement des réclamations pour avarie commune, les réparations admises en avarie commune seront sujettes à des déductions pour différence du « neuf au vieux » selon les règles suivantes quand du vieux matériel sera, en totalité ou en partie, remplacé par du neuf.

Les déductions sont fixées d'après l'âge du navire depuis la date de son premier enregistrement jusqu'à la date de l'accident, excepté pour les approvisionnements et matières consommables, isolants, canots de sauvetage et similaires, équipements de gyro-compass, de radiocommunication, de radiogoniométrie, de sondage par écho et similaires, les machines et chaudières pour lesquelles les déductions seront calculées d'après l'âge des différentes parties auxquelles elles s'appliquent.

Aucune déduction ne sera faite sur les approvisionnements, matières consommables et apparaux qui n'auront pas été utilisés.

Les déductions seront effectuées sur le coût du matériel nouveau ou de ses parties, y compris la main-d'oeuvre, les frais généraux mais à l'exclusion de la dépense exposée pour accéder à la pièce à remplacer.

Les frais de cale sèche, de slip et de déplacement du navire seront admis en entier.

Aucun nettoyage ou peinture de la carène ne sera admis si la coque n'a pas été peinte dans les six mois qui ont précédé la date de l'accident.

A. La première année

Toutes les réparations seront admises en entier, excepté le piquage, le nettoyage et la peinture ou l'enduit de la coque, dont un tiers sera déduit.

B. Entre 1 et 3 ans d'âge

Déduction pour piquage, nettoyage et peinture de la coque, comme ci-dessus, clause A.

Un tiers sera déduit des voiles, du gréement, des cordages, des écoutis et haussières (autres que les filins métalliques et chaînes), des bâches, prélarts, approvisionnements, matières consommables et peinture.

Un sixième sera déduit des parties en bois de la coque, y compris le vaigrage de la cale, des mâts en bois, des esparts et canots, des meubles et tapisseries, de la vaisselle, des articles de verre et de métal, des gréements, filins et haussières métalliques, des équipement de gyro-compass, de radiocommunication, de radiogoniométrie, de sondage par écho et similaires, des chaînes d'ancre et chaînes, des isolants, des machines auxiliaires, des appareils à gouverner et de leurs accessoires, des treuils et grues et leurs accessoires, des machines électriques et de leurs accessoires autres que les

405 machines électriques de propulsion; les autres réparations seront admises en entier.

Le doublage en métal pour les navires en bois ou mixtes sera réglé en admettant en entier le coût d'un poids égal au poids brut du doublage retiré du navire, sous déduction du produit de vente du vieux métal. Les clous, le feutre et la main-d'oeuvre pour pose du nouveau doublage subiront une réduction d'un tiers.

C. Entre 3 et 6 ans

Déduction comme ci-dessus, clause B, excepté qu'un tiers sera déduit des parties en bois de la coque, y compris le vaigrage de la cale, des mâts en bois, des esparts et canots, des meubles et tapisseries et qu'un sixième sera déduit des parties en fer des mâts et esparts et de toute la machinerie y compris les chaudières et leurs accessoires).

D. Entre 6 et 10 ans

Déduction comme ci-dessus, clause C, excspté qu'un tiers sera déduit de tout gréement, cordages, écoutes et haussières, parties en fer des mâts et esparts, des équipements de gyro-compass de radiocommunication, de radiogoniométrie, de sondage par écho et similaires, des isolants, des machines auxiliaires, des appareils à gouverner, des treuils, grues et accessoires et de toutes autres machines (y compris les chaudières et leurs accessoires).

E. Entre 10 et 15 ans

Un tiers sera déduit de tous remplacements, excepté des parties en fer de la coque, du ciment et des chaînes d'ancre pour lesquels un sixième sera déduit, et des ancres qui seront admises en entier.

F. Au delà de 15 ans

Un tiers sera déduit de tous les remplacements, excepté pour les chaînes d'ancre pour lesquelles il sera déduit un sixième et pour les ancres qui seront admises en entier.

Règle. XIV. -- Séparations provisoires Lorsque des réparations provisoires sont effectuées à un navire, dans un port de chargement, d'escale ou de refuge, pour le salut commun ou pour des avaries causées par un sacrifice d'avarie commune, le coût de ces réparations sera bonifié en avarie commune.

Lorsque des réparations provisoires d'un dommage fortuit sont effectuées simplement pour permettre l'achèvement du voyage, le coût de ces réparations sera admis en avarie commune, sans égard à l'économie éventuellement réalisée par d'autres intérêts, mais seulement jusqu'à concurrence de l'économie sur les dépenses qui auraient été encourues et admises en avarie commune, si ces réparations n'avaient pas été effectuées en ce Heu

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Aucune déduction pour différence de vieux au neuf ne sera faite du coût des réparations provisoires admissibles en avaries communes.

Règle XV. -- Perte de fret La perte de fret résultant d'une perte ou d'un dommage subi par la cargaison sera admise en avarie commune, tant si elle est causée par un acte d'avarie commune, que si cette perte ou ce dommage est ainsi admis.

Devront être déduites du montant du fret brut perdu les dépenses que le propriétaire de ce fret aurait encourues pour le gagner, mais qu'il n'a pas exposées par suite du sacrifice.

Règle XVI. -- Valeur à admettre pour la cargaison perdue ou avariée par sacrifice Le montant à admettre en avarie commune pour dommage ou perte de marchandises sacrifiées sera le montant de la perte que le propriétaire des marchandises aura éprouvée de ce fait en prenant pour base le prix du marché au dernier jour du déchargement du navire, ou à la fin de l'aventure lorsqu'elle se termine à un autre lieu que celui de la destination primitive.

Quand des marchandises ainsi avariées sont vendues et que le montant du dommage n'a pas été autrement convenu, la perte à admettre en avarie commune sera la différence entre le produit net de la vente et la valeur nette au dernier jour clu déchargement du navire ou à la fin de l'aventure, lorsqu'elle se termine à un autre lieu que celui de la destination primitive.

Règle XVII. -- Valeurs contributives La contribution à l'avarie commune sera établie sur les valeurs nettes réelles des propriétés à la fin du voyage, auxquelles sera ajouté le montant admis en avaries communes des propriétés sacrifiées s'il n'y est pas déjà compris. Du fret et du prix de passage en risque pour l'armateur seront déduits les frais et les gages de l'équipage qui n'auraient pas été encourus pour gagner le fret si le navire et la cargaison s'étaient totalement perdus au moment de l'acte de l'avarie commune et qui n'ont pas été admis en avarie commune. De la valeur des propriétés seront également déduits tous frais y relatifs, postérieurs à l'événement qui donne ouverture à l'avarie commune mais pour autant seulement qu'ils n'auront pas été admis en avarie commune.

Les bagages de passagers et les effets personnels pour lesquels il n'est pas établi de connaissement ne contribueront pas à l'avarie commune.

Règle XVIII. -- Avaries au navire Le montant à admettre en avarie commune pour dommage ou perte subis par le navire, ses machines et/ou ses apparaux, lorsqu'ils ont été

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réparés ou remplacés, sera le coût réel et raisonnable des réparations et du remplacement de ces dommages et pertes, sous réserve des déductions à opérer en vertu de la règle XIII. Lorsqu'il n'y a pas eu de réparations, il sera alloué une dépréciation raisonnable n'excédant pas le coût estimatif des réparations.

Lorsqu'il y a perte totale effective, ou perte réputée totale, du navire, le montant à allouer en avarie commune pour perte ou dommage causé au navire par un acte d'avarie commune, sera la valeur estimative du navire à l'état saiti sous déduction du coût estimatif des réparations du dommage n'ayant pas le caractère d'avarie commune, ainsi que du produit de vente, s'il y a lieu.

Règle XIX. -- Marchandises non déclarées ou faussement déclarées La perte ou le dommage causé aux marchandises chargées à l'insu de l'armateur ou de son agent, ou à celles qui ont fait l'objet d'une désignation volontairement fausse au moment de l'embarquement, ne sera pas admis en avarie commune, mais ces marchandises resteront tenues de contribuer si elles sont sauvées.

La perte ou le dommage causé aux marchandises qui ont été faussement déclarées à l'embarquement pour une valeur moindre que leur valeur réelle sera admis sur la base de la valeur déclarée, mais ces marchandises devront contribuer sur leur valeur réelle.

Bègle XX. --· Avances de fonds Une commission de deux pour cent sur les débours d'avarie commune autres que les salaires et frais d'entretien du capitaine, des officiers et de l'équipage et le combustible et les approvisionnements qui n'ont pas été remplacés durant le voyage, sera admise en avarie commune ; niais lorsque les fonds n'auront pas été fournis par l'un des intérêts appelés à contribuer, les frais encourus exposés pour obtenir les fonds nécessaires au moyen d'un prêt à la grosse ou autrement, de même que la perte subie par les propriétaires des marchandises vendues dans ce but, seront admis en avarie commune.

Les frais d'assurance de l'argent avancé pour payer les dépenses d'avarie commune seront également admis en avarie commune.

Sègle XXI. -- Intérêts sur les pertes admises en avarie commune Un intérêt sera alloué sur les dépenses, sacrifices et bonifications classés en avarie commune, au taux de cinq pour cent par an, jusqu'à la date du règlement d'avarie commune, en tenant compte
toutefois des remboursements qui ont été faits dans l'intervalle par ceux qui sont appelés à contribuer ou prélevés sur le fonds des dépôts de l'avarie commune.

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Bègle XXII. -- Traitement des dépôts en espèce Lorsque des dépôts en espèces auront été encaissés en garantie de la contribution de la cargaison à l'avarie commune, aux frais de sauvetage ou frais spéciaux, ces dépôts devront être versés, sans aucun délai à un compte joint spécial aux noms d'un représentant désigné pour l'armateur et d'un représentant désigné pour les déposants, dans une banque agréée par eux deux. La somme ainsi déposée augmentée s'il y a lieu, des intérêts, sera conservée à titre de garantie pour le paiement aux ayants droit en raison de l'avarie commune, des frais de sauvetage ou des frais spéciaux payables par la cargaison et en vue desquels les dépôts ont été effectués.

Des paiements en acompte ou des remboursements de dépôts peuvent être faits avec l'autorisation écrite du dispacheur. Ces dépôts, paiements ou remboursements seront effectués sans préjudice des obligations définitives des parties.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi sur la navigation maritime sous pavillon suisse (Du 22 février 1952)

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28.02.1952

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