Développement des instruments de surveillance et de l'organisation de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers FINMA Rapport du Conseil fédéral en application des recommandations 3 et 6 ainsi que du postulat 1 (10.3389/10.3628) des commissions de gestion du Conseil national et du Conseil des Etats du 23 mai 2012

Messieurs les Présidents des commissions, Mesdames, Messieurs, En vertu de l'art. 158 de la loi sur le Parlement (LParl), nous vous présentons le rapport suivant en application des recommandations 3 et 6 ainsi que du postulat 1 (10.3389/10.3628) des commissions de gestion du Conseil national et du Conseil des Etats (CdG), conformément à leur rapport du 30 mai 2010 intitulé «Les autorités suisses sous la pression de la crise financière et de la transmission des données clients d'UBS aux Etats-Unis».

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents des commissions, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

23 mai 2012

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Eveline Widmer-Schlumpf La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2012-0762

5345

Condensé Dans le présent rapport, le Conseil fédéral rend compte du développement des instruments de surveillance et de l'organisation de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) au lendemain de la crise financière et dans le cadre de la création d'une autorité compétente dans tous les domaines concernés par les marchés financiers. Ce faisant, le Conseil fédéral satisfait aux recommandations 3 et 6 des commissions de gestion du Conseil national et du Conseil des Etats (CdG), conformément à leur rapport du 30 mai 2010 intitulé «Les autorités suisses sous la pression de la crise financière et de la transmission des données clients d'UBS aux Etats-Unis». Il répond par la même occasion au postulat 1 (10.3389/ 10.3628) des CdG concernant le rôle des sociétés d'audit dans la surveillance des banques.

La FINMA a adapté son concept de surveillance afin d'accroître l'efficacité et l'efficience de sa surveillance. A partir de cette approche axée sur les risques, la FINMA décide quel instrument de surveillance elle entend utiliser pour une banque, et avec quelle intensité. Cela lui permet d'employer ses ressources en fonction du potentiel de risque que présente la banque en question. Le facteur déterminant pour l'efficacité de l'approche de la surveillance basée sur les risques est l'aptitude de la FINMA à identifier ces risques, ce qui suppose qu'elle considère chaque établissement individuellement et comprenne son modèle d'affaires.

En confiant la surveillance des banques à une division ad hoc, la FINMA pose en la matière les bases d'un mode de travail intégré. Le Conseil fédéral salue les mesures prises par la FINMA pour promouvoir l'échange d'informations au sein de la division «Banques», grâce notamment au développement de la gestion des connaissances.

La FINMA a étendu sa propre activité de surveillance par des contrôles sur place et une intensification des analyses. Il s'agit de poursuivre de façon systématique sur cette voie, en particulier au chapitre de la surveillance des grandes banques. A cela s'ajoutent la coopération et les échanges avec la Banque nationale suisse (BNS) ainsi qu'avec les autorités étrangères de surveillance des marchés financiers.

Le Conseil fédéral se félicite des orientations prises par la FINMA en ce qui concerne le recours aux sociétés d'audit
en matière de surveillance. Le développement prévu de l'audit prudentiel sous la forme des modules audit de base, audit complémentaire et audit au cas par cas permettra à la FINMA de cibler le contrôle et l'assurance-qualité de l'activité déployée par les sociétés d'audit. Cette attention accrue de la part de la FINMA exigera de coordonner sa propre activité de surveillance avec celle de ces sociétés afin de prévenir toute confusion des responsabilités.

5346

Liste des abréviations AC-LBA al.

art.

BNS CdG CFB CHF CO CS CSF DFF FF FINMA FMI LB let.

LFINMA OFAP p.

LSR RS ss UBS

Autorité de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment d'argent alinéa article Banque nationale suisse Commissions de gestion du Conseil national et du Conseil des Etats Commission fédérale des banques franc suisse Code des obligations (CO; RS 220) Credit Suisse Group SA Conseil de stabilité financière Département fédéral des finances Feuille fédérale de la Confédération suisse Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers Fonds monétaire international Loi du 8 novembre 1934 sur les banques (RS 952.0) lettre Loi du 22 juin 2007 sur la surveillance des marchés financiers (RS 956.1) Office fédéral des assurances privées page Loi du 16 décembre 2005 sur la surveillance de la révision (RS 221.302) Recueil systématique du droit fédéral et suivantes (page ... ~) UBS SA, United Banks of Switzerland

5347

Rapport 1

Contexte

1.1

Définition des tâches

Le Conseil fédéral a été invité par les commissions de gestion du Conseil national et du Conseil des Etats (CdG) à examiner les recommandations 3 et 6 ainsi que le postulat 1 (10.3389/10.3628) formulés dans leur rapport du 30 mai 2010 intitulé «Les autorités suisses sous la pression de la crise financière et de la transmission des données clients d'UBS aux Etats-Unis»1 et à leur présenter un rapport. Les requêtes adressées par les CdG au Conseil fédéral sont les suivantes: ­

Le Conseil fédéral est invité à évaluer les mesures prises par la FINMA pour améliorer ses instruments de surveillance et sa pratique, et à présenter un rapport d'ici mi-2012 (recommandation 3).

­

Le Conseil fédéral est chargé par ailleurs d'analyser le rôle des entreprises de révision tel qu'il est défini par la législation suisse lorsqu'elles contrôlent les grandes banques et de rendre compte des mesures légales ou autres qu'il serait possible de prendre afin de renforcer leur rôle en faveur de la surveillance des banques (postulat 1).

­

Enfin, le Conseil fédéral est invité à vérifier d'ici un an l'adéquation des processus et de la nouvelle organisation de la FINMA de manière qu'ils permettent une communication de qualité entre ses services et l'échange d'informations indispensable pour mener à bien les activités de surveillance (recommandation 6).

Par décision du 18 août 2010, le Conseil fédéral a proposé l'adoption du postulat 1 des CdG. Puis, le 13 octobre 2010, il a pris position de façon générale sur le rapport du 30 mai 2010 des CdG2 et, dans une lettre du 25 mai 2011, rendu compte de l'état de la mise en oeuvre des recommandations 3 et 6 ainsi que du postulat 1, ce dont les CdG ont pris acte dans leur rapport du 1er juillet 2011 concernant «Les autorités suisses sous la pression de la crise financière et de la transmission des données clients d'UBS aux Etats-Unis»3.

Par le présent rapport, le Conseil fédéral satisfait aux deux recommandations 3 et 6 des CdG, tout en répondant à leur postulat 1, dont il propose le classement.

La recommandation 3 et le postulat 1 concernent tous deux les instruments de surveillance de la FINMA. Sur le fond, ils sont étroitement liés à la recommandation 6 relative à l'organisation de la FINMA. Les mesures qu'a prises la FINMA pour améliorer ses instruments de surveillance et sa pratique ont un impact direct sur ses processus de travail et son organisation, et vice et versa. C'est pourquoi le Conseil fédéral présente un rapport unique aux CdG.

Le Conseil fédéral vérifie dans le cadre de ce rapport si l'organisation et les processus de travail de la FINMA sont aménagés dans le sens de la recommandation 6 des CdG. Au vu de l'autonomie de la FINMA en matière d'organisation et de son indé1 2 3

FF 2011 2903 ss.

Avis du Conseil fédéral du 13 octobre 2010 sur le rapport des CdG, FF 2011 3263 ss.

FF 2011 6073 ss.

5348

pendance dans l'exercice de sa fonction de surveillance, il doit s'imposer une certaine retenue lors de la mise en oeuvre de la recommandation. Cela concerne notamment les éventuelles modifications des processus de travail et de l'organisation de la FINMA recommandées par les CdG.

1.2

Délimitation du sujet et but du rapport

Instituée par la loi du 22 juin 2007 sur la surveillance des marchés financiers (LFINMA) la FINMA a commencé son activité le 1er janvier 2009, en pleine crise financière. Cette autorité créée de fraîche date s'est donc retrouvée, durant une période extrêmement difficile au regard de la politique financière et économique, face au défi de regrouper les organes qui l'avaient précédée4 et de mettre en place une autorité de surveillance des marchés financiers intégrée, qui soit capable de fonctionner. Il s'agissait en même temps pour elle de tirer les leçons de la crise financière.

La FINMA a alors fixé sous la forme de sept objectifs stratégiques les priorités sur lesquelles elle entendait axer et développer son activité de surveillance pour les trois années suivantes. Le Conseil fédéral a approuvé cette stratégie le 30 septembre 2009. Elle visait principalement à accroître l'efficacité et l'efficience de la surveillance ainsi qu'à renforcer la FINMA en tant qu'autorité. Comme on le verra plus loin, la FINMA a pris de nombreuses mesures en vue d'améliorer ses instruments de surveillance et son organisation. Certaines de ces mesures ont été suivies d'effet, d'autres se trouvent à diverses phases de leur mise en oeuvre. Il s'agit notamment des travaux de la FINMA concernant l'audit et le renforcement du rôle des sociétés d'audit dans le cadre de la surveillance.

Dans son rapport du 12 mai 2010 intitulé «Rôle joué par l'Autorité de surveillance des marchés financiers dans la crise financière ­ Enseignements pour l'avenir», rapport en réponse au postulat David (08.4039) et à la motion CER-N (09.3010), le Conseil fédéral a examiné de façon critique les décisions et le rôle de la FINMA pendant la crise financière et en a tiré les enseignements nécessaires. Dans ce contexte, il a voué son attention à diverses interrogations concernant la FINMA, notamment son organisation, ses ressources ainsi que ses instruments de surveillance, et les a appréciées à la lumière de la crise financière. Il en a conclu que les autorités suisses de surveillance ont bien géré la crise des marchés financiers, notamment au regard de ce qui s'est produit à l'étranger. Toutefois, il est également apparu qu'avant la crise, des lacunes existaient au sein de la division Surveillance des grandes banques de la CFB. L'échange d'informations,
notamment, n'y était pas assez systématique. Le Conseil fédéral a identifié comme cause majeure de la crise des marchés financiers une réglementation internationale déficiente, déficit qu'aucune surveillance, si complète et efficace soit-elle, ne peut corriger. Il a relevé qu'il n'existait aucune nécessité immédiate de réviser la législation en vigueur concernant la surveillance des marchés financiers. Les enquêtes n'ont établi en particulier aucun rapport de dépendance vis-à-vis des assujettis, ni à la CFB, ni à la FINMA. Le Conseil fédéral a recommandé à la FINMA de réformer le système dual 4

Ses prédécesseurs étaient la Commission fédérale des banques (CFB), l'Office fédéral des assurances privées (OFAP) et l'Autorité de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment d'argent (AC-LBA).

5349

de surveillance dans le domaine des grandes banques. C'est pourquoi il a soutenu l'objectif stratégique de la FINMA consistant à intensifier sa propre surveillance.

Le Conseil fédéral concentre son attention, dans le présent rapport, sur l'évaluation des mesures que la FINMA a prises et mises en oeuvre au chapitre des instruments de surveillance et de son organisation au lendemain de la crise financière et dans le cadre du regroupement faisant d'elle une autorité intersectorielle de surveillance des marchés financiers. L'accent porte sur les travaux de la FINMA visant à améliorer et développer la surveillance des banques, et notamment des grandes banques. Le développement de la réglementation des marchés financiers après la crise financière ne fait pas l'objet de ce rapport, pas plus que les possibilités dont dispose la FINMA pour sanctionner les infractions au droit de la surveillance.

1.3

Elaboration et articulation du rapport

Pour élaborer son rapport, le Conseil fédéral a tout d'abord demandé à la FINMA de lui présenter un rapport sur les mesures prises afin d'améliorer ses instruments de surveillance ainsi que ses processus de travail et son organisation. La FINMA a satisfait à cette requête sous la forme du document du 21 avril 2011 intitulé «Efficacité et efficience en matière de surveillance», qu'elle a publié le 2 mai 2011. Par la suite, le DFF a chargé un expert indépendant, Peter Hayward, d'établir un rapport d'expertise sur la base de ce document.

Peter Hayward a occupé durant de longues années diverses fonctions au sein de la Bank of England et du FMI. Il travaille aujourd'hui en qualité d'expert indépendant sur mandat du FMI et de la Banque mondiale. Son expertise sera publiée sur le site Internet du DFF.

Le Conseil fédéral fonde son appréciation des adaptations des instruments et d'organisation de la FINMA entre autres sur la base de son document du 21 avril 2011 intitulé «Efficacité et efficience en matière de surveillance» ainsi que sur l'expertise de Peter Hayward, qui date de novembre 2011. D'une manière générale, il partage les conclusions et les propositions de l'expert dans la mesure où il en est question dans ce rapport.

Le rapport commence par la présentation et l'analyse du concept de surveillance de la FINMA, dont l'approche est axée sur les risques. Puis il aborde la réorientation de sa division «Banques» ainsi que le développement de ses instruments de surveillance. Vu leur importance pour l'activité de surveillance, un chapitre spécial est consacré aux sociétés d'audit. Le rapport s'achève sur des constatations récapitulatives quant au développement des instruments de surveillance et de l'organisation de la FINMA.

5350

2

Concept de surveillance axé sur les risques

2.1

Importance du concept de surveillance

La surveillance des marchés financiers a pour but de protéger, conformément aux lois sur les marchés financiers, les créanciers, les investisseurs et les assurés, et d'assurer le bon fonctionnement des marchés financiers5. La création de la FINMA, autorité de surveillance intégrée des marchés financiers, a conduit à une harmonisation formelle des instruments de surveillance et des sanctions. Sur la base de la LFINMA, les mêmes instruments de surveillance6 s'appliquent à tous les assujettis, sous réserve des réglementations complémentaires ou dérogatoires des diverses lois sur les marchés financiers7. Les approches matérielles et techniques de la surveillance ont été conservées.

En Suisse, le secteur financier joue un rôle macroéconomique majeur. Par ailleurs, le pays dispose de deux banques à vocation internationale dont la taille est très grande par rapport à l'économie nationale. Ainsi que l'a révélé la crise financière, des risques disproportionnés pour la stabilité du système financier suisse et, en cas de défaillance, pour l'économie suisse tout entière, peuvent émaner de ces deux établissements dits d'importance systémique. La FINMA est donc mise au défi de mobiliser ses ressources financières et en personnel de façon ciblée ainsi qu'avec un maximum d'efficacité et d'efficience dans le cadre de son mandat légal, afin d'identifier à temps les risques et dérapages majeurs, puis d'y remédier.

Le concept de surveillance détermine pour chaque établissement l'instrument qu'utilise l'Autorité de surveillance et l'intensité de cette surveillance. La FINMA a adapté ce concept pour accroître l'efficacité et l'efficience de sa surveillance.

Désormais, l'approche de la surveillance axée sur les risques s'applique à tous les domaines de la surveillance. Elle est fonction des risques qui émanent de l'établissement assujetti pour les créanciers, les investisseurs, les assurés ainsi que pour l'ensemble du système et la réputation de la place financière suisse. La FINMA répartit les assujettis en catégories de surveillance selon leur taille, leur importance et les risques qu'ils présentent et, en plus, attribue à chaque établissement une note spécifique reflétant l'évaluation des risques auxquels il est exposé.

2.2

Concept de surveillance appliqué aux banques

Concept de surveillance En matière de surveillance bancaire, la FINMA applique le concept de surveillance axé sur les risques sous sa forme actuelle depuis 2010. En foi de quoi chaque banque est classée dans l'une des cinq catégories. Les critères déterminants pour la répartition sont le total du bilan, le montant des actifs sous gestion, des dépôts privilégiés et des fonds propres requis. La catégorie 1 est constituée des deux grandes banques.

La catégorie 2 comprend deux établissements, la catégorie 3 en compte 25, la catégorie 4 en dénombre 70 et la catégorie 5, enfin en recense 270. Si l'on se réfère au 5 6 7

Art. 5 LFINMA.

Art. 2 et art. 24 ss LFINMA.

Loi sur les banques, loi sur la surveillance des assurances, loi sur les placements collectifs, loi sur les bourses, loi sur le blanchiment d'argent, loi sur l'émission de lettres de gage.

5351

total du bilan ou au volume des dépôts, les catégories 1, 2 et 3 réunissent 85 à 90 % des montants.

En outre, la FINMA attribue à chaque banque une note individuelle qui reflète son évaluation quant à la situation actuelle de l'établissement, à partir de paramètres quantitatifs et qualitatifs8. Cette note est réexaminée tous les trimestres et ajustée en cas de modification du profil de risque de la banque en question.

Appréciation L'approche de la surveillance axée sur les risques permet à l'autorité de surveillance de mobiliser ses ressources en fonction de l'importance d'une banque et des risques qu'elle présente pour les créanciers, les investisseurs et l'ensemble du système. Dans son activité, la FINMA accorde à un établissement dont l'insolvabilité peut avoir des répercussions considérables sur la stabilité du système financier, voire de l'économie nationale tout entière, une priorité plus grande qu'à un établissement présentant un potentiel de risque inférieur. La catégorie et la note déterminent par ailleurs les instruments de surveillance auxquels recourt la FINMA vis-à-vis d'une banque et comment agit la combinaison de la surveillance directe exercée par la FINMA et de l'activité de surveillance des sociétés d'audit. Le réexamen régulier de la note individuelle d'un établissement permet à la FINMA de constater les changements de sa situation en temps proche du réel et d'y réagir par une adaptation correspondante des instruments de surveillance.

L'expert Peter Hayward mentionne dans son rapport que les autorités de surveillance des principales places financières fondent leur activité sur une approche axée sur les risques. La façon dont la FINMA a aménagé son concept de surveillance coïncide avec l'approche adoptée par les autorités de surveillance des Etats-Unis, du Canada et d'Europe9.

Le critère déterminant pour juger de l'efficacité de l'approche axée sur les risques est la capacité de la FINMA à identifier ces risques. Cela implique de concentrer son attention sur la situation propre à chaque établissement et suppose une bonne compréhension de son modèle d'affaires et des risques qui peuvent en résulter. Selon Peter Hayward, non seulement la constatation des thèmes découlant des risques mais encore la capacité de la FINMA à retrouver ces thèmes et à les suivre tout au long de
l'activité de surveillance conditionnent la mise en oeuvre efficace du concept10. Dans ce contexte, la communication directe de la FINMA avec l'établissement assujetti, p. ex. à la faveur de contrôles sur place11, joue elle aussi un rôle important.

Enfin, un aspect essentiel pour le succès du concept de surveillance axé sur les risques a trait au contrôle de la qualité. L'idéal sera de confier cette activité à une unité d'organisation au sein même de la FINMA. L'expert Peter Hayward partage cet avis et recommande que cette activité soit exercée éventuellement par l'audit interne, l'état-major de direction de la FINMA ou une équipe à créer spécialement pour assumer cette tâche12.

8 9 10 11 12

La notation s'appuie sur le système CAMEL; cf. expertise de Peter Hayward de novembre 2011 (expertise Hayward), p. 9.

Cf. expertise Hayward, p. 9 et 10.

Cf. expertise Hayward, p. 9 s.

Cf. ch. 3.2 ci-après.

Cf. expertise Hayward, p. 11.

5352

3

Aménagements apportés à la surveillance par la FINMA

3.1

Organisation de la surveillance bancaire

Aménagements apportés à l'organisation La FINMA a réorganisé la surveillance des banques. Depuis la mi-2009, l'ensemble de la surveillance bancaire est réunie au sein d'une même division et placée sous une direction unique. Les équipes de surveillance bancaire ont été constituées en fonction de la taille des établissements et de leur activité. C'est ainsi qu'existent aujourd'hui, outre les deux teams opérant pour UBS et le CS, des équipes qui se consacrent aux banques de gestion de fortune et aux négociants en valeurs mobilières ainsi qu'aux banques de détail et aux banques commerciales. Toutes ces équipes rendent compte de leur activité au même supérieur, le directeur de la division «Banques». Par ailleurs, la division «Banques» assure, outre des fonctions de surveillance, diverses fonctions transversales. Il s'agit de la section «Gestion du risque», avec les unités spécialisées «Risques de marché et de crédit», «Risques agrégés et analyse de scénario» et «Marchés des capitaux», ainsi que des sections «Solvabilité et capital» et «Autorisations».

De plus, la FINMA a pris un certain nombre de mesures visant à promouvoir l'échange de connaissances et d'informations au sein de la surveillance des banques.

C'est ainsi qu'ont lieu des discussions institutionnalisées, régulières, auxquelles participent des membres des différentes équipes de surveillance et des unités exerçant des fonctions transversales. Ces réunions interservices ont pour objet d'aborder dans des compositions diverses un sujet de surveillance donné. Des analyses ­ comparatives notamment ­ et des contrôles sur place sont menés selon cette méthode de travail interdisciplinaire. D'autres mesures encore, telles que les réunions d'information mensuelles, au cours desquelles une équipe de la division «Banques» présentent un sujet particulier, ont pour but de favoriser l'échange de connaissances en interne.

Appréciation L'amélioration de l'interaction et du flux d'information entre les équipes au sein de la surveillance des banques était l'objectif déclaré des aménagements auxquels la FINMA a procédé dans son organisation. L'essentiel aux yeux de l'expert Peter Hayward pour la réalisation de cet objectif, est le fait que la forme d'organisation choisie garantit une interaction et une communication simples, à la fois verticales et
horizontales13. La réunion des activités de surveillance de toutes les banques au sein d'une même division, d'une part, et l'intégration des fonctions transversales, de l'autre, en sont la pierre d'angle. La direction unique de toute la division ainsi que la structure hiérarchique plate permettent de surcroît une réactivité rapide lorsque sont identifiées des lacunes dans un établissement bancaire.

Le point décisif, toutefois, est de savoir si les équipes assurent vraiment une interaction et un échange d'informations qui contribuent à l'amélioration de la qualité de la surveillance. Cette organisation matricielle requiert un gros effort de coordination entre les fonctions de surveillance et les fonctions transversales. Elle exige beaucoup de la part de la direction. L'encouragement ciblé de la discussion et de l'échange 13

Cf. expertise Hayward, p. 17.

5353

d'informations au sein des équipes et entre elles est d'une importance capitale pour la distribution des connaissances spécialisées et du trésor d'expérience qu'elles recèlent. La formation de groupes interdisciplinaires appelés à débattre de sujets d'actualité en matière de surveillance, à procéder à des analyses ou à mener conjointement des contrôles sur place constitue une mesure efficace pour établir un courant d'information institutionnalisé. La mise en place d'un système de gestion des connaissances y fournit elle aussi une contribution insigne. En même temps, il convient d'accorder aux processus de travail et aux éventuelles interfaces, aussi bien au sein de la division «Banques» qu'avec les autres divisions de la FINMA, l'attention qu'ils méritent. Il importe de poursuivre cette approche intégrée et systémique avec cohérence et, comme le prévoit la FINMA, de la développer avec d'autres unités de surveillance, en particulier avec la surveillance des assurances.

La mesure préconisée par Peter Hayward ­ une rotation des postes au sein de la surveillance des banques14 et entre les différentes divisions de la FINMA ­ constitue une variante envisageable pour promouvoir une bonne interaction et une bonne communication. Entrent également en ligne de compte des détachements provisoires (secondments) auprès de banques, de sociétés d'audit, d'études d'avocats ou d'autorités de surveillance étrangères, pratique d'ores et déjà courante pour la FINMA.

3.2

Instruments de surveillance

Adaptation des instruments de surveillance L'application cohérente d'une surveillance axée sur les risques a entraîné plusieurs adaptations des instruments prudentiels de la FINMA. Les principales innovations dans la surveillance bancaire sont exposées brièvement ci-après. Les orientations relatives au rôle futur donné par la FINMA aux sociétés d'audit dans l'activité de surveillance sont présentées dans un chapitre distinct en raison de l'importance de ces sociétés dans ce domaine15.

L'assessment letter est un instrument de surveillance central. La FINMA y communique formellement à la banque assujettie sa classification en termes de risques, ses éventuels points faibles et les mesures à prendre à cet égard. La banque peut donner son avis par écrit. Une assessment letter est envoyée tous les ans aux grandes banques et aux deux établissements de catégorie 2 et au moins tous les deux ans à ceux de catégorie 3.

La FINMA a renforcé la surveillance directe des établissements des catégories prudentielles 1, 2 et 3 par l'intermédiaire de supervisory reviews. Celles-ci concernent des analyses thématiques spécifiques auprès d'une ou de plusieurs banques. Les équipes correspondantes sont constituées en fonction du thème de l'examen. Par exemple, les évaluations de risques sont réalisées par des équipes dont les membres viennent des services de surveillance bancaire et de la section «Gestion du risque».

Les supervisory reviews permettent à la FINMA d'appréhender rapidement un domaine d'activité ou de risque et complètent les rapports des sociétés d'audit.

14 15

Cf. expertise Hayward, p. 17.

Cf. ch. 3.3 pour les adaptations concernant les sociétés d'audit dans l'examen des banques.

5354

L'amélioration des outils d'identification précoce constitue une autre priorité. La FINMA souhaite développer le monitorage en tant que méthode de recensement et de maîtrise des risques systémiques. Par ailleurs, elle utilise déjà des instruments prudentiels plus affinés pour les grandes banques, tels que les tests de résistance (stress tests) et les analyses de sensibilité (building block analysis, BBA). Ces dernières sont effectuées avec la participation de la Banque nationale suisse (BNS). Des analyses du potentiel de pertes (loss potential analysis, LPA) sont également exécutées trimestriellement auprès des grandes banques. La FINMA prévoit d'utiliser aussi les outils d'identification précoce pour les établissements de taille moyenne.

D'une manière générale, la FINMA a renforcé son activité d'analyse en procédant notamment à des analyses comparatives, comparaisons croisées , dont les résultats permettent de traiter les points faibles en temps opportun. Un rapport comparatif détaillé sur les risques des grandes banques est établi mensuellement. Par ailleurs, les analyses concernant le marché des capitaux englobent désormais les affaires et transactions spécifiques.

Enfin, la surveillance bancaire a été étendue et intensifiée dans de nombreux autres domaines importants, tels que la surveillance de la planification des fonds propres (tous les mois pour les grandes banques) et celle de la gestion des liquidités des grandes banques, qui porte sur l'ensemble du groupe et, depuis le milieu de l'année 2011, sur la maison-mère suisse également.

Appréciation En réorganisant la division «Banques», la FINMA a jeté les bases organisationnelles d'une surveillance bancaire intégrée et basée sur les risques. La principale innovation relative aux instruments de surveillance concerne l'extension de sa propre activité de surveillance auprès des établissements bancaires et notamment des grandes banques. En 2011, la FINMA a consacré près d'un tiers du temps dévolu à la surveillance à des contrôles sur place et a exécuté 40 supervisory reviews, dont 20 dans les grandes banques16. Il faut saluer et poursuivre l'intensification de sa propre activité de surveillance, et en particulier les audits sur place17.

Selon l'expert Peter Hayward, la plupart des autorités de surveillance effectuent leurs propres audits auprès
des établissements bancaires, notamment des banques d'importance systémique, mais l'étendue de ces audits diffère fortement en fonction de l'autorité étrangère. Les missions varient de quelques jours à quelques semaines, voire impliquent l'affectation permanente d'une équipe d'audit sur place. Les contrôles sur place peuvent être effectués avec ou sans avis préalable18. La surveillance directe nécessite beaucoup de personnel. D'ailleurs, la FINMA a renforcé les effectifs affectés à la surveillance des grandes banques ces dernières années, car la dotation en personnel y était faible au regard de la taille de ces établissements. Elle

16 17

18

Cf. expertise Hayward, p. 12.

Cf. recommandations du Conseil de stabilité financière (CSF) qui vont dans le même sens: Peer Review of Switzerland, rapport d'évaluation du Conseil de stabilité financière du 25 janvier 2012 (FSB Peer Review), p. 25.

Cf. expertise Hayward, p. 15.

5355

est parvenue à engager des spécialistes du secteur financier disposant de plusieurs années d'expérience, notamment à la suite de la crise financière19.

Un audit sur place requiert un concept bien structuré en matière de planification, d'exécution, de documentation et de rapport. Selon Peter Hayward, l'efficacité des audits ne dépend pas principalement de leur fréquence, mais des connaissances techniques des auditeurs20. En fonction du thème de l'audit, ceux-ci doivent être en mesure d'interroger les spécialistes et les cadres de la banque avec la fermeté requise lors des entretiens, d'analyser les réponses de manière critique et d'insister en cas d'ambiguïté. Cela s'applique notamment à des thèmes essentiels à la surveillance bancaire tels que la gestion des risques, le modèle commercial et les processus de conduite. Il faut pour cela des collaborateurs d'horizons divers, c'est-à-dire des nouveaux diplômés, des contrôleurs expérimentés et des spécialistes des domaines concernés ayant une expérience pratique et de conduite21. Le développement du personnel peut permettre à la FINMA de fidéliser ses collaborateurs et, par conséquent, de bénéficier de leur expérience et de leur savoir sur le long terme. La mesure de la FINMA visant à proposer une carrière technique en plus d'une carrière de conduite semble convaincante dans ce contexte.

En outre, le lancement de l'assessment letter en 2010 pour les banques des catégories 1 à 3 constitue un élément capital de la surveillance axée sur les risques. La FINMA communique ainsi aux assujettis les risques de son point de vue et les éventuelles mesures à prendre. L'expert Peter Hayward préconise d'utiliser strictement cet instrument, de vérifier la correction des défauts constatés et d'agir en cas d'omission22. En l'espèce également, la qualité des analyses sous-jacentes à l'évaluation des risques par la FINMA joue un rôle primordial dans l'efficacité de cet instrument. En plus des connaissances techniques et de l'expérience des collaborateurs, les informations et les données sur lesquelles reposent les analyses de la FINMA doivent présenter une qualité élevée. La FINMA a adopté plusieurs mesures à cet égard: depuis la crise financière, les banques fournissent certains chiffres quotidiennement et d'autres chaque semaine, ce qui accroît la qualité des données.
La FINMA fait désormais régulièrement appel aux comparaisons croisées, une évolution qu'il convient de saluer. D'après Peter Hayward, la comparaison croisée compte parmi les instruments standard de la surveillance bancaire et peut être utilisée efficacement pour des comparaisons nationales notamment23. Sa pertinence est toutefois limitée pour les grandes banques, car les concurrents sont à l'étranger (hormis le concurrent direct respectif en Suisse). Peter Hayward recommande dès lors de réaliser des comparaisons croisées en étroite collaboration avec des autorités de surveillance étrangères, dont celles du Royaume-Uni et des Etats-Unis. Par ailleurs, la FINMA pourrait bénéficier des connaissances des sociétés d'audit opérant au niveau international24. La confidentialité des données et les prescriptions légales sur leur échange transfrontière constituent toutefois des obstacles en la matière.

19

20 21 22 23 24

Cf. rapport du Conseil fédéral du 12 mai 2010 intitulé «Rôle joué par l'Autorité de surveillance des marchés financiers dans la crise financière ­ Enseignements pour l'avenir», rapport en réponse au postulat David (08.4039) et à la motion CER-N (09.3010) (rapport David), p. 22.

Cf. expertise Hayward, p. 15 s.

Cf. rapport David, p. 21 s.

Cf. expertise Hayward, p. 13.

Cf. expertise Hayward, p. 13 s.

Cf. expertise Hayward, p. 14.

5356

D'une manière générale, l'intensification de l'activité de surveillance et d'analyse de la FINMA renforce sa capacité à identifier les risques de manière précoce. Peter Hayward souligne à cet égard le recours plus fréquent aux supervisory reviews et les échanges directs soutenus avec tous les niveaux hiérarchiques des établissements bancaires25. De plus, les discussions structurées et axées sur les risques avec une banque en vue de sa catégorisation et de son évaluation permettent à la FINMA de détecter les risques éventuels correspondants à un stade précoce du processus de surveillance. Peter Hayward estime également à plusieurs reprises que cette évolution est positive. En outre, la collaboration avec la BNS joue un rôle essentiel dans l'identification rapide des risques. L'interaction entre ces deux institutions ainsi que l'échange d'informations et de données peuvent contribuer à un recensement et à une maîtrise précoces des risques systémiques pour assurer la stabilité du système financier26.

Un échange régulier et institutionnalisé avec les autorités de surveillance étrangères aide également la FINMA à mieux comprendre les affaires et les domaines d'activité des grandes banques hors de Suisse et à détecter à temps les risques en découlant. La FINMA entretient depuis des années une bonne collaboration avec les autorités de surveillance du Royaume-Uni et des Etats-Unis. Cette collaboration implique la participation mutuelle aux enquêtes de l'autorité partenaire ainsi que la coordination et l'échange d'informations dans le cadre de la surveillance continue, éventuellement au sein d'instances de contrôle. La réalisation commune, avec des autorités de surveillance étrangères, d'audits sur place consacrés à des thèmes précis pourrait également apporter une valeur ajoutée supplémentaire à la FINMA27. Enfin, il est recommandé d'étendre la collaboration aux autorités de surveillance des pays où les grandes banques sont de plus en plus actives28, de manière bilatérale ou dans le cadre d'instances de contrôle.

3.3

Sociétés d'audit

Problématique Les audits sont effectués soit par la FINMA soit, sur mandat, par des tiers ou des sociétés d'audit29. La Suisse fait traditionnellement appel à des sociétés d'audit pour la surveillance bancaire30. Celles-ci font office de bras armé de la FINMA et effectuent des contrôles sur place. Concrètement, la société d'audit est désignée par l'assujetti, qui supporte les frais en la matière31. Ce choix requiert l'approbation de la FINMA32. Une société d'audit ne sera agréée que si elle remplit les conditions d'agrément prévues par le législateur pour l'exécution des audits33. En particulier, 25 26 27 28 29 30

31 32 33

Cf. expertise Hayward, p. 19.

Cf. rapport de février 2012 du groupe de travail sur la stabilité financière.

Cf. expertise Hayward, p. 19 s.

Cf. rapport David, p. 29 s.

Art. 24 LFINMA.

Ce système de surveillance «dual» tient notamment au souci de l'autorité de surveillance de contenir ses effectifs dans des limites raisonnables. Pour en savoir plus, cf. p. ex. le message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le projet de loi fédérale du 2 février 1934 sur les banques et les caisses d'épargne (FF 1934 I 172 ss).

Art. 24 LFINMA.

Art. 25, al. 2, LFINMA.

Art. 26 LFINMA.

5357

elle doit être soumise à la surveillance prévue par la loi du 16 décembre 2005 sur la surveillance de la révision.

La société d'audit présente un rapport tant à l'organe suprême de direction de la banque qu'à la FINMA. Lorsqu'elle découvre des infractions au droit de la surveillance ou d'autres irrégularités, elle invite l'assujetti à régulariser sa situation dans un délai approprié. Si ce délai n'est pas respecté, elle en informe la FINMA. Au cas où il s'agirait de faits graves, elle doit en référer sans délai à la FINMA34. Cette dernière supervise les contrôles effectués par les sociétés d'audit35.

Ce système de surveillance a déjà subi des changements sous la précédente autorité de surveillance (CFB). Celle-ci a effectué dès 1998 des audits sur place au sein des grandes banques. Dans le sillage de la crise financière, la FINMA a considérablement étendu sa propre activité de surveillance, auprès des grandes banques notamment36.

La FINMA a réexaminé en profondeur le rôle des sociétés d'audit dans l'activité de surveillance, en se concentrant sur les thèmes suivants: ­

Audit des comptes annuels et audit prudentiel: une seule et même société d'audit effectue généralement dans un établissement financier assujetti les contrôles requis au sens du CO et ceux prescrits par le droit de la surveillance. La société d'audit assume ainsi un double rôle, qui requiert de grandes compétences techniques de la part des auditeurs et s'inscrit à chaque fois dans un cadre de régulation différent.

L'audit des comptes selon le CO comprend pour l'essentiel une analyse détaillée et surtout quantitative de la période comptable écoulée. Il vise à établir si les événements survenus durant l'exercice sous revue ont été présentés de manière complète et exacte, et si la poursuite de l'activité de l'entreprise est assurée. L'enjeu est de savoir si la clôture des comptes de l'entreprise a été établie conformément aux prescriptions applicables en matière de tenue et de présentation des comptes. L'audit est régi par les normes usuelles applicables dans la branche.

L'audit prudentiel se concentre en revanche sur le respect, par l'établissement financier assujetti, des conditions d'autorisation prévues en droit des marchés financiers. La question centrale consiste ici à savoir si la stratégie, l'organisation interne et les ressources sont concordantes et si les personnes exerçant une fonction dirigeante présentent toutes les garanties d'une activité irréprochable. L'audit prudentiel dépend à chaque fois de l'activité de l'assujetti, dont il vise à dresser un portrait complet et prévisionnel. Dès lors que l'audit des comptes annuels et l'audit prudentiel visent des buts différents, ils ne peuvent faire l'objet des mêmes normes.

­

34 35 36

Indépendance de la société d'audit: au-delà de la problématique décrite cidessus de la «double casquette» qu'implique l'activité d'audit, le rapport contractuel direct conclu entre la société d'audit et l'établissement financier assujetti l'ayant mandatée peut engendrer, dans certaines situations, des conflits d'intérêts et menacer l'indépendance nécessaire.

Art. 27 LFINMA.

Art. 28 LFINMA.

Cf. plus haut, ch. 3.2.

5358

­

Qualité de l'audit prudentiel: la FINMA assume la responsabilité globale quant à la surveillance des banques. Comme la société d'audit mène sur place, auprès des assujettis, une grande partie des activités correspondantes, la qualité de ses rapports et de ses jugements est cruciale pour la FINMA sachant que le contenu et la qualité de l'audit sont susceptibles d'influencer fortement la qualité de la surveillance exercée sur un établissement.

Objectifs de la FINMA et mesures adoptées Suite à une analyse approfondie, la FINMA a défini un train de mesures d'audit visant à employer les sociétés d'audit de manière plus efficace et rationnelle lors des audits prudentiels. Cette refonte ne se limite pas à l'engagement des sociétés d'audit dans la surveillance bancaire, mais s'étend à la surveillance exercée sur les négociants en valeurs mobilières, les assurances et les placements collectifs.

La FINMA continuera de faire appel à des sociétés d'audit pour la surveillance. Son modèle de surveillance axée sur les risques définira l'ampleur et l'intensité des opérations de contrôle à leur charge. La FINMA prévoit par ailleurs d'exercer davantage d'influence sur le mandat d'audit et de définir la stratégie d'audit d'entente avec la société mandatée. En particulier, la FINMA pilotera davantage l'activité de contrôle de la société d'audit et modifiera la stratégie poursuivie si la situation l'exige. De son côté, la société d'audit devra procéder à des audits prudentiels prévisionnels, dans le souci d'assurer la pérennité de l'assujetti. D'où aussi la nécessité d'une appréciation axée sur les risques des scénarios possibles. Dans le cadre de la réorientation des activités d'audit, la FINMA a prévu les mesures suivantes: ­

Orientation accrue de l'audit prudentiel sur le modèle d'affaires de l'assujetti: l'audit prudentiel tiendra davantage compte du modèle d'affaires de l'établissement financier surveillé. A cet effet, il présentera une structure modulaire ­ audit de base, audit complémentaire et audit ad hoc. Les modules retenus, de même que l'étendue et l'intensité des audits, dépendront de la catégorie de surveillance et de la notation ­ en fonction des risques ­ de l'assujetti.

L'audit de base ­ audit standard ­ aura une ampleur et une intensité réduites par rapport à ce qui se fait aujourd'hui. La FINMA fixera des objectifs concrets pour les domaines devant être audités ainsi que pour l'étendue des contrôles. La société d'audit choisie continuera de s'en charger chaque année, ou à intervalles pluriannuels. Par domaine d'audit, on entend les exigences prudentielles auxquelles l'entreprise de l'assujetti doit satisfaire, et l'adéquation des mesures d'organisation prises par elle, au niveau de sa structure et des processus.

L'audit complémentaire sera effectué ponctuellement par la société d'audit choisie, là où des vérifications supplémentaires s'imposent en raison des développements récents ou de la situation de risque constatée. La FINMA pourra ainsi mieux cibler son activité de pilotage, en faisant dépendre les priorités de ses contrôles de la catégorie de surveillance et de la notation de l'établissement financier concerné.

Enfin, la FINMA prévoit l'engagement ad hoc d'auditeurs aux frais des assujettis. Ils procéderont à des examens d'approfondissement, tireront au clair certains faits ou analyseront des thèmes transversaux. Des audits ad hoc interviendront en cas de besoin de connaissances spécifiques ou d'événe5359

ment extraordinaire. L'audit incombera à la société d'audit ou à un tiers. En faisant appel à des tiers, la FINMA espère en outre ouvrir le marché de la surveillance prudentielle à de nouveaux prestataires et permettre aux petites sociétés d'audit d'étendre leur activité.

­

Clarification du rôle et de l'attitude de la société d'audit: la fonction de la société d'audit en tant que bras armé de la FINMA requiert une autre attitude et une autre conception des rôles que les audits des comptes annuels. Aussi la FINMA entend-elle séparer de façon claire et transparente, sur les plans tant fonctionnel que conceptuel, l'audit prudentiel de celui des comptes annuels. Si la complexité ou le profil de risque de l'établissement assujetti l'exigent, p. ex. dans le cas des grandes banques, la FINMA va même plus loin en exigeant deux équipes d'auditeurs avec, dans chaque cas, un auditeur responsable différent.

En outre, la FINMA attend de la société d'audit qu'elle lui fournisse, sur la base de son analyse des risques émanant de l'assujetti, une appréciation des domaines devant être audités et de l'étendue des contrôles requis. La FINMA confrontera cette appréciation à la sienne propre et en déduira la stratégie d'audit annuelle. Celle-ci inclut la définition des domaines d'audit, la fréquence et l'étendue des contrôles.

­

Société d'audit indépendante, exempte de conflit d'intérêts: la société d'audit est tiraillée entre la FINMA et son mandant, soit l'assujetti qui la paie, ce qui peut compromettre son indépendance et entraîner des conflits d'intérêts. La FINMA ne peut se fier aux résultats des contrôles de la société d'audit que si celle-ci s'acquitte de sa tâche à l'abri des influences extérieures. Les exigences envers les sociétés de révision figurant dans le CO37 et dans la loi du 16 décembre 2005 sur la surveillance de la révision38, ainsi que les règles de comportement de la branche fixent les fondements de l'indépendance. Elles valent par analogie pour l'audit prudentiel. En outre, la FINMA prévoit d'autres mesures visant à renforcer l'indépendance des sociétés d'audit et à prévenir les conflits d'intérêts.

Ainsi, la FINMA interdit p. ex. à la société d'audit de contrôler les travaux que celle-ci avait effectués pour l'assujetti ­ révision interne, procédure d'autorisation, etc. ­ avant qu'il ne lui confie un mandat d'audit. En outre, la FINMA imposera à l'avenir aux sociétés d'audit de ne fournir aucun service de conseil à l'assujetti parallèlement à leur mandat d'audit. Les modalités de la collaboration entre la révision interne des assujettis et la société d'audit externe seront également précisées afin de renforcer l'indépendance de la société d'audit. A cet effet, la FINMA élaborera des directives contraignantes, aux fins d'une présentation transparente de la collaboration établie et d'une appréciation rigoureuse des contrôles effectués par la révision interne et de leurs résultats. Il sera également interdit à la société d'audit de déléguer des mandats d'audit à la révision interne.

37 38

Cf. art. 728 CO.

Cf. art. 11.

5360

Mise en oeuvre des mesures décidées La FINMA a entrepris au début de 2012 de concrétiser la réorientation esquissée cidessus des activités de surveillance confiées aux sociétés d'audit. Les diverses mesures seront définies autant que possible au niveau des circulaires de la FINMA (Circ.-FINMA). Concrètement, cela implique de remanier les circulaires en vigueur sur les questions en matière d'audit, de les élaguer autant que possible puis, après la procédure d'audition usuelle, de les édicter et de les publier sous une nouvelle forme uniforme pour tous les domaines soumis à surveillance.

Appréciation La forte implication des sociétés d'audit dans la surveillance bancaire est une spécificité helvétique. La collaboration et la répartition des tâches entre l'autorité de surveillance et les sociétés d'audit ont dans l'ensemble fait leurs preuves. Il semble donc juste que la FINMA garde en principe le système de surveillance en place, faisant appel à des sociétés d'audit. Mais comme la FINMA l'a reconnu à juste titre, il faudra introduire des modifications essentielles, afin d'accroître la qualité de l'activité déployée par les sociétés d'audit et donc leur plus-value pour la surveillance. Si la surveillance incombe en bonne partie à des auditeurs externes, la qualité de leur travail s'avère cruciale pour l'efficacité de la surveillance. La FINMA peut influencer cette qualité de diverses manières, en imposant des objectifs à la société d'audit ou aux auditeurs responsables et aux équipes d'audit, en précisant le contenu des audits ainsi qu'en surveillant l'activité exercée par la société d'audit.

La mise en oeuvre du modèle de surveillance axée sur les risques ainsi que le renforcement de la propre activité de surveillance de la FINMA constituent le cadre de référence pour l'engagement futur des sociétés d'audit chargées des audits prudentiels. La structure modulaire prévue pour les audits permettra à la FINMA de piloter l'activité des auditeurs externes en fonction des risques et de déterminer la stratégie d'audit adéquate. Cela vaut notamment pour les modules nouvellement prévus d'audit complémentaire et d'audit ad hoc, que la FINMA entend utiliser en fonction des risques émanant de l'établissement financier. Cet emploi ciblé des modules d'audit se justifie pour des raisons d'efficacité et d'efficience
des ressources et permettra d'améliorer la qualité des audits prudentiels, notamment dans la surveillance des grandes banques.

Une claire répartition des rôles entre la FINMA et les sociétés d'audit est devenue prioritaire, à l'heure où la FINMA renforce sa propre activité de surveillance. Il faut ainsi qu'elle assure efficacement le pilotage, la coordination et l'organisation de la surveillance des assujettis. Elle se gardera de toute ingérence dans les tâches de contrôle et les responsabilités définies. Comme le relève également l'expert Peter Hayward39, la FINMA est compétente pour apprécier les risques et l'adéquation des mesures de gestion des risques prises par un assujetti. Quant aux contrôles effectués par la société d'audit, ils se concentreront sur les faits, comme les forces et les faiblesses de la gestion des risques et du système de contrôle interne. Les jugements qualitatifs émis par la société d'audit, p. ex. dans ses analyses des risques, ont beau compléter le portrait dressé par elle des risques inhérents à l'assujetti, ils ne sauraient remplacer les propres évaluations de la FINMA. A ce propos, Peter

39

Cf. expertise Hayward, p. 12.

5361

Hayward souligne que l'appréciation d'ensemble relève de la seule responsabilité de la FINMA40 et qu'elle ne peut être déléguée à des tiers41.

Grâce à leur caractère prévisionnel et axé sur les risques, les audits prudentiels gagneront en utilité pour la FINMA. Cette dernière différencie par la même occasion l'activité exercée par la société d'audit au titre des audits prudentiels de l'activité d'audit des comptes annuels. Reste à savoir si une simple séparation fonctionnelle des équipes d'audit et de l'auditeur responsable suffira à garantir les compétences techniques attendues de la société d'audit à l'occasion d'un audit prudentiel. Il paraît donc juste que la FINMA impose encore aux grandes banques une séparation du personnel choisi à cet effet.

On ne peut que se féliciter des efforts de la FINMA visant à renforcer l'indépendance de la société d'audit vis-à-vis de l'assujetti et à prévenir les conflits d'intérêts. Car il est crucial pour la qualité des résultats que les sociétés d'audit forment leur appréciation en toute objectivité. La possibilité de confier des mandats ad hoc à des tiers favorisera encore l'indépendance de l'audit prudentiel.

Enfin, la surveillance de l'activité des sociétés d'audit et le contrôle de la qualité de leurs examens paraissent importantes42. La FINMA exerce indirectement et de différentes manières, à travers les mesures qu'elle a définies en matière d'audit, une influence sur la qualité des rapports et des résultats d'audit ­ p. ex. en définissant la stratégie d'audit et en donnant un mandat d'audit complémentaire. Le pilotage direct de la société d'audit et le contrôle de son activité restent par ailleurs importants dans une optique d'efficience.

4

Conclusions

Suite à la crise financière, la FINMA a adopté de nombreuses mesures visant à améliorer ses instruments prudentiels et sa propre organisation. Certaines d'entre elles servent en même temps à créer une surveillance intégrée sur le plan suisse des marchés financiers.

En réaménageant son activité en fonction d'un concept de surveillance axé sur les risques, la FINMA a posé les fondements d'une utilisation efficiente et efficace de ses ressources tant humaines que financières. Les établissements financiers présentant des risques accrus pour la stabilité du système financier requièrent une surveillance plus étroite que ceux à moindre potentiel de risque. Il est donc cohérent que ce soient les risques induits par une banque qui décident de l'instrument de surveillance choisi par la FINMA et de l'intensité avec laquelle elle s'en servira.

La FINMA a étendu sa propre activité en matière de surveillance des banques. Elle a p. ex. renforcé de façon générale son activité d'analyse, communique à l'assujetti son appréciation des risques et procède toujours plus à des audits sur place, notamment au sein des grandes banques. Le Conseil fédéral se félicite de cette évolution et recommande à la FINMA de poursuivre de façon systématique sa propre activité de surveillance telle que décrite au ch. 3.2. En effet, la confrontation régulière avec un établissement bancaire, son modèle d'affaires, ses risques et sa gestion des risques 40 41 42

Cf. expertise Hayward, p. 8.

Cf. recommandations du CSF, FSB Peer Review, p. 25.

Cf. recommandations du CSF qui vont dans le même sens, FSB Peer Review, p. 25.

5362

accroît les capacités de détection précoce de la FINMA. La collaboration et les échanges avec la BNS et les autorités de surveillance étrangères y contribuent également, ce qui justifie de resserrer les liens en place.

La FINMA a créé, en modifiant l'organisation de la surveillance bancaire, les conditions nécessaires à une activité interdisciplinaire dûment institutionnalisée. Le Conseil fédéral soutient les mesures de la FINMA visant à encourager les échanges d'information ­ au sein de la division «Banques» et plus généralement à l'échelon de la FINMA. La mise en place d'une véritable gestion des connaissances jouera également ici un rôle central. Cette approche intégrée de la surveillance sera tributaire de la qualité des interactions et de la communication, d'autant plus que la FINMA entend renforcer sa propre activité de surveillance. Il faudra également accorder aux processus de travail toute l'attention requise.

Le Conseil fédéral approuve les objectifs et mesures définis par la FINMA pour le recours aux sociétés d'audit dans le cadre de la surveillance. Les mesures prévues augmenteront globalement la valeur ajoutée de l'activité déployée par les sociétés d'audit. La structure modulaire envisagée pour les audits prudentiels permettra à la FINMA de prévoir des mandats d'audit ad hoc ou liés à des événements venant compléter les audits de base et, le cas échéant, de les confier à des tiers. Autrement dit, la FINMA se chargera du pilotage de la stratégie et des thèmes d'audit. De même, les mesures préconisées pour renforcer l'indépendance des sociétés d'audit, dans une optique d'assurance-qualité et pour prévenir les conflits d'intérêts, aboutiront à préciser le rôle et le mandat de la société d'audit. La coordination entre la propre activité de surveillance de la FINMA, d'une part, et celle exercée par les sociétés d'audit, d'autre part, nécessitera toutefois une attention accrue, pour éviter toute confusion des responsabilités dans l'activité de contrôle.

Le succès de la FINMA dépendra toutefois largement, comme jusqu'ici, de son aptitude à détecter de manière précoce tout risque ou dérapage d'un établissement assujetti, à l'aide de ses instruments prudentiels, ainsi qu'à y remédier de la bonne façon. A cet effet, elle a besoin de collaborateurs compétents, qui possèdent les qualifications
et l'expérience spécifique requises. Aussi le Conseil fédéral soutient-il les mesures de développement du personnel mises en place par la FINMA, p. ex.

l'introduction de différents modèles de carrière, pour offrir à ses collaborateurs qualifiés des perspectives durables et attrayantes.

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