Pratique de la Confédération en matière de gestion de la Poste, des CFF et de Swisscom Rapport de la Commission de gestion du Conseil national du 8 mai 2012

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Index des abréviations AFF CdF-N CdG-N cf.

ch.

COST CPA DETEC DFI p.

s.

ss

7906

Administration fédérale des finances Commission des finances du Conseil national Commission de gestion du Conseil national confer chiffre European Cooperation for Science and Technology Contrôle parlementaire de l'administration Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication Département fédéral de l'intérieur page(s) et suivante et suivantes

Rapport 1

Introduction

A la fin des années 1990, la Confédération a remanié les marchés de la poste, des chemins de fer et des télécommunications: en 1998, la Poste et Swisscom ont été détachées de l'administration centrale de la Confédération, suivies, en 1999, des CFF. Bien qu'ayant revêtu une nouvelle forme juridique, ces trois entreprises continuent depuis lors d'assumer des tâches relevant du service public et d'avoir une importance financière considérable pour la Confédération. Les CFF reçoivent d'ailleurs une contribution financière annuelle des pouvoirs publics. En sa qualité de propriétaire et de garante, la Confédération continue pour sa part d'exercer une certaine influence sur la manière dont ces entreprises s'acquittent de leurs tâches.

Si les tâches, les attributions et les responsabilités des organes compétents de la Confédération sont l'objet de normes juridiques, on n'avait jamais, jusqu'ici, procédé à une analyse empirique des mesures de pilotage des CFF, de la Poste et de Swisscom, effectivement appliquées par le gouvernement et par son administration.

Or une telle analyse pourrait servir de base au perfectionnement de la gouvernance des entreprises publiques. Jusqu'à maintenant, les discussions concernant le pilotage des trois entreprises se situaient essentiellement à un niveau conceptuel et portaient sur des questions de principe. On n'avait en outre jamais analysé l'évolution de la compétitivité des entreprises en question, depuis leur détachement de la Confédération.

C'est sur cette toile de fond que les Commissions de gestion du Conseil national et du Conseil des Etats ont, en janvier 2010, chargé le Contrôle parlementaire de l'administration (CPA) d'examiner la pratique de la Confédération en matière de gestion de la Poste, des CFF et de Swisscom, afin d'obtenir des informations sur l'adéquation de leur pilotage. Le CPA a procédé à cette évaluation en collaboration avec des experts externes. Le présent rapport de la CdG-N est fondé sur les avis d'experts reproduits dans le rapport final du 30 août 20111.

La première partie de l'évaluation a été consacrée à la pratique effective du Conseil fédéral et de l'administration en ce qui concerne leur pilotage de la Poste, des CFF et de Swisscom en tant que propriétaires. Dans cette perspective, cinq événements critiques ont été éclairés de manière
détaillée: dans le cas de la Poste, la réduction du nombre des centres courrier (projet REMA) et la réorganisation du réseau postal, aux CFF, l'orientation stratégique de CFF Cargo ainsi que la grève aux ateliers industriels de Bellinzone, et chez Swisscom, la stratégie internationale de l'entreprise. Dans la seconde partie du rapport, les auteurs ont cherché à savoir dans quelle mesure l'objectif de l'autonomisation ­ qui était d'augmenter l'efficience, la capacité de rendement et la compétitivité (soit la performance) de la Poste, des CFF et de Swisscom ­ avait été atteint.

1

Pratique de la Confédération en matière de gestion de la Poste, des CFF et de Swisscom, Rapport du 30.8.2011 à l'attention du Contrôle parlementaire de l'administration, ci-après «Rapport d'experts».

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La Confédération étant l'unique propriétaire des entreprises devenues autonomes, ou tout au moins leur actionnaire majoritaire (dans le cas de Swisscom), elle endosse le rôle de propriétaire. Si ses droits et ses obligations sont en principe les mêmes que ceux des autres propriétaires (par ex. des actionnaires), les objectifs stratégiques du Conseil fédéral, inscrits dans la loi, représentent une exception dans la mesure où ils lui permettent de faire valoir son influence sur les entreprises devenues autonomes en intervenant sur les aspects relatifs à l'entreprise (par ex. l'évolution du bénéfice et du chiffre d'affaires) et/ou sur les aspects relatifs aux tâches (par ex. en fixant certaines priorités). Les objectifs stratégiques sont un instrument essentiel au moyen duquel la Confédération peut aménager sa propriété ou ses participations en fonction des intérêts qu'elle poursuit par l'intermédiaire des entités devenues autonomes2. Le pilotage exercé par la Confédération en sa qualité de propriétaire est au centre du présent rapport.

Dans le contexte du modèle de gestion de la Confédération, l'autonomisation signifie que les entreprises ­ et donc leurs conseils d'administration ­ jouissent en principe d'une pleine autonomie dans les limites définies par la législation et les objectifs stratégiques. Le Conseil fédéral renonce à intervenir dans les activités opérationnelles des entreprises. En tant que propriétaire, il peut faire valoir son influence en fixant et en ajustant, le cas échéant, les objectifs stratégiques, en approuvant ou en rejetant le rapport d'activité, en donnant décharge au conseil d'administration ou en la lui refusant et, en dernier ressort, en révoquant le conseil d'administration. Le modèle de gestion ne prévoit pas de moyen d'intervention allant au-delà de ceux qui viennent d'être énumérés3.

La CdG-N se limite ici à présenter les conclusions et résultats du rapport d'experts qui lui paraissent essentielles ainsi qu'à en donner une appréciation politique. Elle a travaillé en considérant le modèle de gestion comme un état de fait et ne l'a donc pas remis en question.

Les conclusions et recommandations de la CdG-N se rapportent en principe aux trois entreprises, sans guère de distinction. Le Conseil fédéral est bien entendu libre de procéder à une différenciation dans sa réponse.

2

Recommandations

Il ressort du rapport d'experts que le modèle de gestion stratégique actuellement appliqué par la Confédération pour le pilotage des trois entreprises est probant dans l'ensemble.4 «En temps normal», il semble que ce modèle soit à même, dans sa conception actuelle, de permettre le pilotage des entreprises par leur propriétaire et que les mécanismes mis en place soient acceptés par les parties intéressées. Toutefois, dans leur rapport, les experts ont également souligné que, en pratique, les compétences prévues dans le modèle n'étaient pas toujours respectées et que ce dernier montrait ses limites dans les situations inhabituelles, lorsque les entreprises étaient exposées à une forte pression politique (par ex. en cas de crise ou d'événe-

2 3 4

Rapport explicatif de l'Administration fédérale des finances du 13.9.2006 concernant le rapport du Conseil fédéral sur le gouvernement d'entreprise, ch. 7.1.

Pour plus de détails sur le modèle de gestion, voir rapport d'experts, ch. 2.1 et 2.2.

Rapport d'experts, ch. 2.5, p. 33.

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ments inattendus qui concernent la stratégie)5. Dans ce genre de situations exceptionnelles, son application devient incertaine et ce flou incite la Confédération à intervenir directement, ce qui toutefois n'est pas prévu dans le modèle de gestion. Le rapport d'experts montre qu'il existe diverses raisons à de telles inconséquences.

La CdG-N espère donc que ses recommandations, fondées sur les enseignements tirés du passé, contribueront au perfectionnement du pilotage et, plus particulièrement, à une clarification de la réglementation des compétences respectives du Conseil fédéral et des entreprises (ou de leur conseil d'administration), notamment dans les situations inhabituelles.

2.1

Objectifs stratégiques

On trouve dans la pratique de la Confédération en matière de gestion un grand nombre d'objectifs relatifs aux tâches. Plus de la moitié des objectifs stratégiques sont exogènes, ne sont pas adaptés à l'échelon hiérarchique ou ne sont pas formulés sous la forme d'un objectif stratégique du Conseil fédéral6. En définissant une multitude d'objectifs détaillés se rapportant aux tâches, le Conseil fédéral restreint la marge de manoeuvre dont le conseil d'administration a besoin pour atteindre ses objectifs de gestion. La liberté entrepreneuriale du conseil d'administration s'en trouve réduite et les responsabilités ­ notamment le rôle du conseil d'administration ­ deviennent floues7.

Dans le cadre de la pratique actuelle, les objectifs stratégiques ne sont en outre souvent ni hiérarchisés ni pondérés8. Des conflits ont notamment été relevés entre les objectifs se rapportant aux tâches et les objectifs de gestion d'entreprise. Pour le conseil d'administration, les objectifs stratégiques ne représentent donc pas des instructions claires. Ils ne lui indiquent notamment pas comment fixer les priorités dans le cas d'espèce, ni quels objectifs il doit faire primer sur les autres. Le flou qui en résulte peut être générateur de conflits, surtout dans les cas où le conseil d'administration doit mettre en balance les objectifs relatifs aux tâches et les objectifs de gestion, alors que le Conseil fédéral entend fixer un autre ordre de priorité (par ex. lorsque les entreprises estiment ­ contrairement au Conseil fédéral ­ que les conséquences de leurs décisions sur le personnel et la politique régionale doivent être supportées compte tenu des nécessités entrepreneuriales)9.

La CdG-N estime qu'il est important d'améliorer la cohérence et la clarté des objectifs stratégiques afin d'en renforcer le potentiel de pilotage tout en augmentant la transparence de la gestion publique. Elle considère qu'il faudrait avant tout que le Conseil fédéral clarifie l'importance relative des différents objectifs stratégiques et qu'il établisse un ordre de priorité clair, en mettant l'accent sur les objectifs relatifs à la gestion d'entreprise. Cela paraît particulièrement important dans le cas des CFF, qui se sont vu fixer un nombre d'objectifs stratégiques relativement élevé et dont les

5 6 7 8 9

Rapport d'experts, ch. 2.4, p. 28 s.; ch. 2.5, p. 33 s.

Rapport d'experts, ch. 2.3.1.2, p. 19 s.

Rapport d'experts, ch. 2.5, p. 29 s.

Rapport d'experts, ch. 2.5, p. 33.

Rapport d'experts, ch. 2.5, p. 29 s.; ce fut le cas par ex. dans le contexte des discussions sur la femeture des centres courrier de la Poste ou des ateliers industriels des CFF à Bellinzone.

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objectifs relatifs aux tâches sont formulés de manière très détaillée10. Les critères définis dans les rapports sur le gouvernement d'entreprise ne paraissent pas suffisamment clairs dans l'ensemble (notamment le principe directeur n° 16) pour permettre de limiter au strict nécessaire la formulation des objectifs se rapportant aux tâches11. Il serait donc important que les principes définis dans le rapport sur le gouvernement d'entreprise soient concrétisés, d'une part, par une réglementation du lien entre les objectifs relatifs aux tâches et les objectifs relatifs à la gestion d'entreprise et, d'autre part, par la mise en place de critères déterminant l'intensité du pilotage en fonction des tâches12.

Recommandation 1

Conception des objectifs stratégiques

La CdG-N invite le Conseil fédéral à formuler les objectifs stratégiques de manière plus cohérente et hiérarchiquement adéquate en mettant l'accent sur les objectifs de gestion d'entreprise. Un ordre de priorité et d'importance doit être établi pour les objectifs stratégiques et les conflits entre les objectifs relatifs aux tâches et les objectifs de gestion d'entreprise doivent être résolus.

La CdG-N invite en outre le Conseil fédéral à tirer les enseignements des expériences faites à ce jour pour clarifier les critères appliqués à la formulation d'objectifs stratégiques adéquats, relatifs à l'entreprise et à ses tâches.

2.2

Contrôle de la réalisation des objectifs

L'un des principaux instruments de contrôle de la réalisation des objectifs est le rapport annuel des entreprises. Elles y indiquent dans quelle mesure elles ont réalisé, au cours de l'exercice sous revue, les objectifs que leur a assignés le Conseil fédéral.

Ce contrôle a lieu selon une procédure standardisée13. D'après les conclusions du rapport d'experts, les trois entreprises font preuve de transparence en transmettant à l'administration toute les informations dont celle-ci a besoin pour juger de la réalisation des objectifs. Relevons que l'administration est tributaire de ces données, car elle n'a pas la possibilité, faute de personnel, de recueillir elle-même les informations lui permettant de juger du degré de réalisation des objectifs. Grâce à la documentation qu'il reçoit, le Conseil fédéral est en mesure de comprendre l'appréciation faite par les entreprises elles-mêmes. Il se fonde donc sur les rapports fournis par les entreprises pour procéder à sa propre évaluation de la réalisation des objectifs. Dans la pratique, cette évaluation ne diverge toutefois que peu de celle des entreprises. Le fait que son appréciation repose uniquement sur les données fournies par les entre10 11

12

13

Rapport d'experts, ch. 2.3.1.1, p. 16 s., ch. 2.3.1.2, p. 20.

Cf. rapport du Conseil fédéral du 13.9.2006 sur l'externalisation et la gestion de tâches de la Confédération (rapport sur le gouvernement d'entreprise), FF 2006 7799 ss; rapport du Conseil fédéral du 25.3.2009 complétant le rapport sur le gouvernement d'entreprise ­ Mise en oeuvre des résultats des délibérations au sein du Conseil national, FF 2009 2299 ss; rapport explicatif de l'Administration fédérale des finances du 13.9.2006 concernant le rapport du Conseil fédéral sur le gouvernement d'entreprise,.

Voir aussi co-rapport des CdG du 22.1.2010 relatif à l'initiative parlementaire 07.494, «Instrument parlementaire concernant les buts stratégiques des unités indépendantes» de la CdF-N du 23.6.2009, notamment p. 5 s.

Rapport d'experts, ch. 2.3.2.1, p. 21 s.

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prises elles-mêmes comporte, selon les experts, des risques d'asymétrie de l'information et d'erreurs d'appréciation14.

Un autre point a attiré l'attention de la CdG-N: la performance du point de vue des clients est évaluée au moyen d'indicateurs de qualité qui sont propres à la branche, qui ont été sélectionnés et qui sont reconnus. Il s'agit, pour la Poste, des délais d'acheminement, pour les CFF, de la ponctualité et, pour Swisscom, de la qualité du réseau. Ces indicateurs de performance du point de vue des clients servent d'indices pour l'évaluation de l'efficacité, de la capacité de rendement et de la compétitivité des trois entreprises15.

Dans le cas des CFF, par exemple, l'indicateur de qualité de la ponctualité dans le trafic voyageurs est un retard maximum de cinq minutes. Cette valeur est enregistrée de façon standardisée. Le résultat de l'appréciation en fonction de cet indicateur est excellent (96,1 % en 2010) et constitue lui-même un facteur de l'appréciation de la performance du point de vue des clients, qui est restée constante et se situe à un niveau élevé depuis des années. Les CFF n'ont pas à craindre la comparaison internationale de ce point de vue. On peut toutefois se demander si l'indicateur choisi (retard maximum de cinq minutes) est déterminant ou s'il ne vaudrait pas mieux prendre comme critère le fait que les correspondances sont ou non assurées16.

Les indicateurs de performance du point de vue des clients sont choisis, dans une large mesure, par les entreprises elles-mêmes. La CdG-N s'interroge donc sur la pertinence de cette appréciation, sur la valeur effective qu'elle a dans ces circonstances, notamment en comparaison internationale.

Le contrôle par le Conseil fédéral de la réalisation des objectifs est essentiellement fondé sur la confiance, comme nous l'avons vu plus haut. En cas de détérioration de ces rapports de confiance, l'efficacité du contrôle pourrait se trouver remise en question. Pour garantir un contrôle effectif, la CdG-N juge donc nécessaire de pouvoir fonder l'évaluation des résultats des entreprises sur des données qui ont été obtenues de façon indépendante ou qui ont été vérifiées par des tiers indépendants.

Du point de vue de la CdG-N, la pratique actuelle est problématique dans la mesure où la contrainte de rendre régulièrement compte de leurs
activités au Conseil fédéral ­ contrainte imposée aux entreprises par le modèle de gestion en vigueur ­ est en porte-à-faux avec le degré d'autonomie de gestion très élevé dont les entreprises jouissent dans la mise en oeuvre des objectifs stratégiques qui leur sont assignés. La CdG-N estime qu'il importe de tenir compte de cette large autonomie en mettant en place un contrôle indépendant, qui puisse être assuré aussi en cas de conflit. Il faudrait, pour cela, garantir l'accès aux données des entreprises qui sont nécessaires au contrôle de la réalisation des objectifs (par ex. en inscrivant une telle garantie dans la loi).

14 15 16

Rapport d'experts, ch. 2.3.2.2, p. 25, ch. 2.5, p. 33.

Rapport d'experts, ch. 3.2.1, p. 35 s.

Rapport d'experts, ch. 3.3.2, p. 55, tableau 23 et ch. 3.3.3 p. 56 s.

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Recommandation 2

Accès aux données de contrôle

La CdG-N demande au Conseil fédéral de garantir l'accès aux données qui sont nécessaires au contrôle de la réalisation des objectifs.

Certaines données permettant une comparaison internationale de la performance des entreprises sont recueillies par les organismes internationaux dont les entreprises sont membres. Contrairement aux entreprises, l'administration n'a pas d'accès direct à ces données et doit donc se contenter d'un examen de plausibilité17. Sans compter que les disparités entre les conditions spécifiques aux différents pays et aux différentes entreprises rendent les comparaisons internationales plutôt aléatoires. En Europe, il n'existe pour l'heure pas de base de données permettant non seulement une interprétation correcte en toutes circonstances, mais aussi une comparaison internationale fiable18.

Un accès direct aux données des organisations sectorielles internationales augmenterait la crédibilité d'une évaluation indépendante dans les différents pays. Une certaine connaissance des développements dans ces pays reste néanmoins indispensable.

Dans leur rapport, les experts suggèrent que la tâche de gérer et d'analyser ces données soit confiée à EUROSTAT19.

La CdG-N estime que, dans la mesure de ses possibilités, le Conseil fédéral devrait user des instruments internationaux dont il dispose pour s'employer à obtenir qu'une autorité indépendante collecte et analyse des données comparables au niveau international et qu'il ait un accès direct à ces données. Il s'agit là, selon elle, d'une condition nécessaire si l'on veut pouvoir garantir une certaine indépendance dans la définition des objectifs et dans l'appréciation des résultats obtenus. L'obtention de valeurs de référence est particulièrement importante dans les domaines où les lois du marché ne peuvent guère jouer leur rôle (par ex. dans le trafic voyageurs des CFF), puisque celles-ci, en l'occurrence, ne sont pas fournies par le marché.

Recommandation 3

Comparabilité internationale des performances

La CdG-N demande au Conseil fédéral de s'efforcer d'obtenir un accès direct à des données comparatives internationales. Ce faisant, elle l'invite à encourager, dans la mesure de ses possibilités, le développement de valeurs de référence internationales.

2.3

Autres activités de pilotage

Le rapport d'experts montre que les échanges entre l'administration et les entreprises sont continuels. Ils ont lieu dans le cadre de séances fixées à intervalles réguliers et sous la forme d'entretiens informels (plus fréquents dans le cas des CFF que dans celui de la Poste et de Swisscom). Ainsi, des réunions institutionnalisées sont par 17 18 19

Rapport d'experts, ch. 2.5, p. 33.

Rapport d'experts,ch. 3.1, p. 35.

Rapport d'experts, ch. 2.3.2.2, p. 25 s.

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exemple organisées plusieurs fois par an entre l'administration et les entreprises. Ces dernières transmettent les ordres du jour et les procès-verbaux des séances des conseils d'administration au secrétaire général du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) et au directeur de l'Administration fédérale des finances (AFF). Dans certains cas, le secrétariat général du DETEC et l'AFF rencontrent le représentant de l'Etat au sein du conseil d'administration avant que celui-ci ne se réunisse. De nombreux échanges informels ont lieu entre les collaborateurs du secrétariat général et ceux des entreprises. Des contacts réguliers sont en outre établis entre la direction des entreprises, le secrétariat général du DETEC et certains membres du Conseil fédéral et du Parlement20.

Des rapports informels, qui plus est aussi réguliers, ne sont pas prévus par la loi21.

La remise des ordres du jour et des procès-verbaux, en particulier, est considérée par les experts comme étant problématique au regard du modèle de gestion, car elle représente une ingérence dans les décisions des conseils d'administration et une confusion des responsabilités. En procédant de la sorte, l'administration prend le risque d'intervenir dans la responsabilité entrepreneuriale des conseils d'administration des trois entreprises22.

Comme nous l'avons relevé plus haut (ch. 2.1), les objectifs stratégiques sont nombreux et les conflits entre ces différents objectifs, fréquents. Cet état de fait appelle une évaluation de la situation dans chaque cas d'espèce. Le propriétaire, donc la Confédération, s'assure constamment que les entreprises interprètent les objectifs comme elle l'entend. Le conseil d'administration, pour sa part, ne cesse de devoir contacter le propriétaire pour obtenir un ordre de priorité clair et précis entre les différents objectifs stratégiques, ce qui implique qu'il ne peut plus assumer ses compétences de manière autonome. Cette pratique n'est pas conforme au modèle de gestion, car elle va bien au-delà de la simple utilisation des instruments formels qui y sont prévus et limite de ce fait l'autonomie que doivent avoir les entreprises.

La CdG-N estime que, pour permettre une clarification des responsabilités, la Confédération devrait s'efforcer de limiter sa
gestion aux instruments de pilotage prévus. Ce qui ne signifie pas qu'il ne doit plus y avoir aucun échange entre la direction des entreprises et l'administration. Si, contrairement à l'avis de la CdG-N, le Conseil fédéral devait continuer de considérer que la pratique évoquée ici est conforme au modèle de gestion, il serait judicieux au moins de réexaminer les bases légales pour s'assurer qu'elles sont effectivement suffisantes pour permettre un échange informel aussi intense.

Recommandation 4

Echange informel d'informations

La CdG-N invite le Conseil fédéral à s'assurer que les échanges informels d'informations qui ont lieu régulièrement entre l'administration et la Poste, les CFF et Swisscom sont bien conformes au modèle de gestion.

20 21 22

Rapport d'experts, ch. 2.3.2.1, p. 22 s.

Rapport d'experts, ch. 2.5, p. 29 s.

Rapport d'experts, ch. 2.3.2.2, p. 26 ; ch. 2.5, p. 32.

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Le rapport d'experts porte sur l'analyse approfondie de cinq situations inhabituelles qui ont retenu l'attention du public et suscité des interventions politiques (réduction du nombre des centres courrier, réorganisation du réseau postal, orientation stratégique de CFF Cargo, grève aux ateliers industriels des CFF à Bellinzone et stratégie internationale de Swisscom). Dans quatre de ces cinq situations, la Confédération est intervenue en sa qualité de propriétaire dans des décisions que les entreprises avaient pourtant prises sans contrarier leurs objectifs stratégiques. Dans leur rapport, les experts en arrivent à la conclusion que de telles interventions spécifiques ne sont pas conformes au modèle de gestion, dans la mesure où elles empiètent sur l'autonomie des entreprises23. On ne peut pas exclure que la Confédération, dans les cas où elle prend une responsabilité qui revient en principe au conseil d'administration, puisse être tenue pour responsable des conséquences de son intervention en raison de son statut d'organe de fait24.

Afin de garantir une pratique uniforme et transparente, la CdG-N souhaiterait que soient définies les conditions auxquelles la Confédération peut déroger au modèle de gestion pour intervenir dans une décision, alors même que l'entreprise en question agit dans le cadre des orientations stratégiques qui lui ont été assignées. Il est important que ces conditions soient formulées de manière très stricte si l'on veut éviter que le modèle de gestion ne soit contourné. Logiquement, les décisions des entreprises devraient alors être acceptées dans les cas où ces conditions strictes ne seraient pas réunies et ne pourraient être corrigées que moyennant une adaptation des objectifs stratégiques ou des bases légales.

Recommandation 5

Interventions dans des situations spécifiques

La CdG demande au Conseil fédéral de poser des conditions strictes à la dérogation au modèle de gestion que constitue une intervention concrète de la Confédération.

23 24

Rapport d'experts, ch. 2.4, p. 29; ch. 2.5, p. 33 s.

Plus précisément si la Confédération, qu'elle ait été formellement désignée comme organe ou non, a pris part effectivement et de manière déterminante à la formation de volonté de la personne morale. Cf. rapport explicatif de l'Administration fédérale des finances du 13.9.2006 concernant le rapport du Conseil fédéral sur le gouvernement d'entreprise, p. 20.

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3

Remarque finale

La CdG-N a décidé aujourd'hui de publier ses conclusions et recommandations. Elle demande au Conseil fédéral de bien vouloir répondre aux observations et recommandations formulées dans le présent rapport avant le 31 décembre 2012 et le prie de lui indiquer comment et dans quels délais il entend mettre en oeuvre les recommandations de la commission.

8 mai 2012

Au nom de la Commission de gestion du Conseil national: Le président, Ruedi Lustenberger La secrétaire, Beatrice Meli Andres Le président de la sous-commission DFI/DETEC, Max Binder La secrétaire de la sous-commission DFI/DETEC, Ines Stocker

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