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Message du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'institution de l'office fédéral du travail.

(Du 2l juin 1920.)

Monsieur le président et messieurs, I.

La loi fédérale du 27 juin 1919 portant réglementation des conditions du travail, laquelle prévoyait entre autres la création d'un office fédéral du travail, a .été rejetée par le peuple suisse, le 21 mars 1920, à une très faible majorité.

Si aujourd'hui, peu de temps après cette décision, nous vous soumettons de nouveau un projet pour la création d'un office de ce genre et proposons de le soustraire au referendum, au moyen de la clause d'urgence, notre intention n'est aucunement de méconnaître la volonté du peuple. Nous le faisons .au contraire dans l'idée que les dispositions qui, dans la loi rejetée, visaient l'institution d'un office de travail n'ont été .sérieusement attaquées d'aucun côté et n'auraient pas engagé à elles seules à recourir au referendum et à repousser la loi, et nous le faisons également parce que depuis le rejet de celle-ci, il est survenu de nouveaux faits qui donnent un caractère d'impérieuse nécessité à la création d'un office central s'occupant des questions ouvrières.

Le traité de paix du 28 juin 1919 consacre sa XIIIe partie à lia réglementation internationale des questions du travail Feuille fédérale, 72e année. Vol. III.

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et expose dans son introduction à la section I concernant 1'« organisation du travail » les considérations suivantes : «Attendu que la Société des Nations a pour but d'établir la paix universelle, et qu'une telle pais ne peut être fondéeque sur la base de la justice sociale; « Attendu qu'il existe des conditions de travail impliquant pour un grand nombre de personnes l'injustice, la misère et les privations, ce qui engendre un tel mécontentement que la paix et l'harmonie universelle sont mises en danger, et attendu qu'il est urgent d'améliorer ces conditions : par exemple, en ce qui concerne la réglementation des heures de travail, la fixation d'une: durée maxima de la journée et de la semaine de travail, Hé recrutement de la main-d'oeuvre, la lutte contre le chômage, la garantie d'un salaire assurant des conditions d'existence convenables, la protection du travailleur contre les maladies générales ou professionnelles et les accidents résultant du travail, la protection des enfants, des adolescents et des femmes, les pensions de la vieillesse et d'invalidité, la défense des intérêtsdés travailleurs occupés à l'étranger, l'affirmation du principe de la liberté d'association syndicale, l'organisation de l'enseignement professionnel et technique et autres mesures, analogues; « Attendu que la non-adoption par une nation quelconque d'un régime de travail réellement humain fait obstacle aux efforts des autres nations désireuses d'améliorer le sort des.

travailleurs dans deurs propres pays; « Les Hautes Parties Contractanteia, mues par des sentiments de justice et d'humanité aussi bien que par le désir d'assurer une paix mondiale durable, ont convenu ce qui suit : » Dans la section II sont développés des principes généraux pour l'exécution des travaux entrepris; cet exposé setermine par les déclarations suivantes : « Sans proclamer que ces principes et ces méthodes sont ou complets, ou définitifs, les Hautes Parties Contractantes sont d'avis qu'ils sont propres à guider la politique de la Société des Nations; et que, s'ils sont adoptés par les communautés industrielles qui sont membres de la Commission des Nations, et s'ils sont maintenus intacts dans la pratique par un corps approprié d'inspecteurs, ils répandront des.

bienfaits permanents sur les salariés du monde. »

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Pour la réalisation du but à atteindre, il a été créé une organisation permanente, dont les premiers membres sont les membres originaires de la Société des nations; plus tard, l'affiliation s'acquiert par l'accession à cette société. Nous faisons toutefois remarquer ici déjà que l'Allemagne et l'Autriche ont été admises à faire partie de l'organisation du travail, bien qu'elles ne soient pas encore membres de la Société des nations. Cette faveur leur a été accordée en considération de ce qu'elles étaient disposées à entrer dans la Société et du fait que cette admission n'est qu'une question de temps, de sorte qu'il est entièrement justifié de leur permettre d'adbérer dès le début à l'organisation susmentionnée.

Il va de soi que cette bienveillance s'inspire aussi de la nécessité de ne, pas laisser un pays industriel de l'importance de l'Allemagne suivre ses propres voies en matière de réglementation du droit du travail, peut-être au détriment de ses concurrents.

La chose.la plus intéressante et sans doute aussi la plus utile, dans cette organisation, est que celle-ci se compose non seulement de représentants de gouvernements, mais aussi de représentants de patrons et d'ouvriers, qui de ce fait sont en mesure de s'exprimer au sujet de leurs vues, de leurs voeux et de leurs besoins et, par là, d'arriver à une entente.

L'organisation permanente est constituée par la conférence générale des délégués des Etats affiliés, ainsi que par un office international du travail, que dirige un conseil d'administration.

La conférence générale, qui se réunit au moins une fois chaque année, se compose de quatre délégués de chaque pays.

De ces délégués, deux représentent le gouvernement, tandis que les deux autres représentent les employeurs et les ouvriers du pays dont il s'agit et sont désignés de concert avec les groupements professionnels les plus représentatifs, là où il en existe. Chaque délégué peut être accompagné d'un nombre limité de conseillers techniques.

Le conseil d'administration compte 24 membres, dont 12 en qualité de représentants des gouvernements, 6 en qualité de représentants des patrons et 6 en qualité de représentants des ouvriers, tous nommés pour trois ans. Sur les 12 délégués des gouvernements, 8 sont nommés par les pays les plus importants au point de vue industriel et les 4 autres par les pays que désignent les représentants des gouvernements dans la conférence générale, à l'exclusion des délégués

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des huit principaux pays industriels. Quant aux délégués des employeurs et des ouvriers, ils sont nommés par les groupes de délégués respectifs de la conférence générale.

L'office international du travail, qui a à sa tête un directeur élu par le conseil! d'administration, est institué au siège de la Société des Dations et forme une partie des institutions générales de celle-ci. Il a pour tâche essentielle de recueillir et fournir tous renseignements concernant la réglementation internationale de da condition des ouvriers et du régime du travail, particulièrement d'étudier les questions à traiter par la conférence générale pour la conclusion d'arrangements internationaux, d'exécuter tous les travaux spéciaux que cette conférence lui assigne, de préparer l'ordre du jour des réunions de cette dernière et de publier0 des rapports périodiques sur des questions d'intérêt international en matière d'industrie et de travail!.

Les décisions de la conférence générale s'expriment soit sous forme de recommandations, qui sont alors soumises aux Etats affiliés, pour être prises en considération dans la législation nationale, soit sous forme de projets de conventions internationales, qui, s'ils sont adoptés "par les membres de la société, font règle comme droit international. Dans l'un et l'autre cas, les décisions /n'obligent que ceux des Etats qui les acceptent, les gouvernements étant toutefois tenus de les soumettre dans le délai d'un an à l'îiutorité législative. Si cette dernière les adopte, il est prévu une procédure déterminée pour en assurer au besoin l'exécution par contrainte, avec droit de recours à la future cour de justice internationale. Le projet primitif concernant la réglementation internationale du travail allait plus loin, il est vrai, car il prévoyait que les décisions de la conférence générale auraient caractère obligatoire sans qu'il fût besoin d'une déclaration d'acceptation. Il fallut cependant bientôt reconnaître que lo moment n'était pas encore venu de faire régler ainsi le droit du travail par un parlement universel et l'on se contenta de suivre la voie qui vient d'être mentionnée.

Pour tous des détails de l'organisation internationale du travail, nous renvoyons au surplus à la partie XIII du Traité de paix, jointe en appendice au présent message.

Dans ses dispositions transitoires,
le Traité de paix dispose que la première séance de la conférence générale doit avoir lieu en octobre 1919 à Washington, avec un programme déterminé. Conformément à cette clause, ]a conférence s'est

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effectivement réunie le 29 octobre dans la capitale des EtatsUnis. Or, comme il a été dit plus haut, la qualité de membre de l'organisation internationale du travail s'acquiert par l'affiliation à la Société des nations. Mais comme le Traité de paix n'était pas encore ratifié à l'époque dont il s'agit, de sorte que la Société des nations n'était pas encore dûment constituée, il ne fut pas possible, quant à cette première réunion de la conférence, de se régler sur la qualité de membre de la Société des nations et l'on invita donc à y participer les 45 Etats qui pouvaient entrer en considération pour l'adhésion à la société. Parmi ces Etats se trouvait aussi la Suisse et elle avait les meilleures raisons de déférer à l'invitation.

D'une part, en effet, sa législatiQn en matière de protection ouvrière est si avancée qu'elle a intérêt, tant par bienveillance humanitaire envers le salariat international qu'eu égard à sa propre capacité de concurrence sur de marche mondial, à voir les principes essentiels de l'assistance sociale introduits également dans les autres pays. D'un autre côté, le voeu d'une réglementation internationale du droit du travail est conforme à «es traditions. C'est en effet la Suisse qui, la première, essaya en 1876 -- en vain, il est vrai -- de réunir un congrès universel de la protection ouvrière. Elle reprit l'idée en 1890, tout en laissant la préséance à l'Allemagne, qui avait les mêmes intentions.

Le congrès eut effectivement lieu à Berlin, en 1890, mais sang grands résultats immédiats. La Suisse fut également le siège de l'Association internationale pour la protection légale des travailleurs, fondée à Paris en 1900, et qui eut à Baie son office international du travail, dont l'activité se borna cependant, en raison du peu d'homogénéité de l'association, à recueillir, commenter et publier les lois des divers pays dans un bulletin périodique. C'est enfin à Berne que se tint, en 1905, le congrès international de protection ouvrière, où l'on convint d'interdire le travail de nuit des femmes et l'emploi du phosphore blanc, comme ce fut de même dans cette ville qu'en 1913 le coingrès siégea à nouveau et établit les projets de conventions concernant la prohibition du travail de nuit des jeunes ouvriers dans l'industrie et la fixation d'une durée maximum, du travail pour les ouvrières
et jeunes ouvriers occupés dans l'industrie -- conventions dont la guerre vint toutefois empêcher la ratification. Il est bien naturel, clans ces conditions, qu'en dépit de l'incertitude où l'on se trouvait à l'égard de l'accession de la Suisse à la Société des nations, le Conseil fédéral ait donné suite à l'in-

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vitation d'envoyer des délégués à la conférence de Washington. Cette dernière, à laquelle prirent part 39 Etats avec plus de 200 délégués et experts, dura tout un mois. Le gouvernement américain mit à sa disposition les locaux nécessaires, ainsi qu'un président en la personne du ministre du travail Wilson. En revanche, il s'abstint d'envoyer des'délégués, sur le voeu exprès du sénat, au sein duquel un groupe commençait à cette époque déjà de prendre une attitude négative à l'endroit de la Société des nations.

L'ordre du jour de cette première conférence se trouvait déjà fixé, comme on l'a vu ci-dessus, dans une disposition transitoire du Traité de paix. Conformément à cette clause, un comité international d'organisation, dont un délégué de la Suisse faisait également partie, avait préparé les travaux, en réunissant les actes législatifs des divers pays, en établissant des projets, en se renseignant auprès des gouvernements sur leur manière de voir et en condensant les réponses reçues à cet égard. Le contenu essentiel des décisions qui furent prises ensuite par la conférence a été publié et commenté dans la presse. Nous en reproduisons la teneur en appendice au présent message et n'en rappellerons ici que la substance On élabora, à l'intention des Etats représentés, des projets de conventions et des recommandations ayant pour but la réalisation, dans la législation nationale, des principes admis par la conférence concernant l'introduction de la semaine de 48 heures, avec certaines exceptions, les mesures à prendre contre le chômage, l'égalité de traitement des ouvriers étrangers, la protection de la maternité et l'interdiction du travail de nuit-des ouvrières, îa protection des ouvriers contre certaines matières nocives et l'institution d'un service d'hygiène ouvrière, ainsi que l'interdiction de faire travailler les enfants et celle du travail de nuit des jeunes gens.

Ne se jugeant pas compétente pour arrêter définitivement ses décisions avant la constitution de la Société des nations, la conférence donna pouvoir à cet égard au conseil d'administration, qui, dans sa séance du 26 janvier dernier, à Paris, déclara effectivement en vigueur ces décisions. Dès cette date a commencé de courir le délai d'une année, fixé en l'article 405 du Traité de paix, pendant lequel tous les membres de l'organisation doivent soumettre les projets de conventions et les recommandations à l'autorité législative, pour être adoptés ou repoussés.

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La deuxième conférence générale a été convoquée à Gênes pour le 15 juin. Comme elle doit s'occuper exclusivement du statut de gens de mer, auquel la Suisse, avec sa navigation intérieure, d'ailleurs insignifiante, n'a qu'un intérêt indirect découlant de l'influence des conditions de travail sur les taux de fret, nous avons décidé, d'entente avec les associations intéressées, de n'envoyer à cette conférence qu'une délégation gouvernementale. La conférence générale de l'année 1921 a été fixée au 5 juin par le conseil d'administration.

Vu l'accession de la Suisse à la Société des nations, la ville de Genève a été désignée comme lieu de réunion. Dans sa dernière séance, le conseil d'administration a déjà préparé l'ordre du jour, très substeniiel, de cette conférence.

La Suisse a eu l'honneur d'être désignée comme l'un des huit principaux pays industriels de l'organisation du travail. Toujours sous réserve et dans l'attente de son accession à la Société des nations, cela lui a donné le droit de nommer un représentant de son gouvernement au sein du conseil d'administration. En outre, le groupe du patronat a confié le siège revenant à un industriel américain dans ce conseil à un Suisse, jusqu'à l'adhésion des Etats-Unis, de sorte que notre petit pays se trouve représenté d'une manière relativement forte dans ladite institution, qui compte 24 membres comme- il a été rappelé plus haut. Le conseil d'administration, qui doit se réunir au moins chaque trimestre aux termes de son règlement, a siégé pour la première fois à Washington, immédiatement après la clôture de la conférence générale, puis pendant plusieurs jours en janvier à Paris, en mars à Londres et en juin à Gênes. Jusqu'ici, il a liquidé principalement des questions organiques. Toutefois, il est allé plus loin, dans sa réunion à Londres, en décidant d'envoyer dans la Russie des soviets une commission chargée de faire une enquête sur les conditions de politique sociale de ce pays, -- décision qui témoigne de la haute importance et du vaste champ d'action de la nouvelle institution, en même temps que de l'esprit dont elle s'inspira. Notre pays est représenté dans cette commission par trois experts qu'ont désignés le gouvernement, le groupe des ouvriers et le groupe des patrons.

Le conseil d'administration a nommé directeur de l'office international du travail l'ancien ministre français Albert Thomas. Bien connu comme organisateur de grande initia-

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tive, à d'esprit ouvert et à la haute intelligence, d'une grande puissance créatrice et d'une ardeur infatigable au travail, l'élu a non seulement la confiance des milieux ouvriers, dont il a défendu autrefois les intérêts syndicaux, mais aussi celle des gouvernements et du patronat, ainsi que le prouve l'unanimité de sa nomination. Il est en tout point qualifié pour faire réaliser à l'organisation mondiale du travail les progrès qu'on en espère. L'office international, qui comprend plusieurs sections, est en pleine activité déjà. Jusqu'ici, il avait son siège provisoire à Londres, mais, lors de sa dernière session, le conseil d'administration a décidé de la transférer à Genève, cette ville étant désignée par le Traité de paix comme siège de la société des nations.

De par son adhésion à la Société des nations, notre pays est devemi définitivement membre originaire de l'organisation internationale du 'travail, avec tous les droits et obligations que cette qualité confère. Nous avons esquissé ci-haut la composition, les fonctions et l'activité antérieure de cette institution, afin de nous représenter et vous faire connaître les tâches que l'affiliation de la Suisse impose à nos autorités, et aussi pour pouvoir examiner ensuite si l'un des services administratifs existants serait à même de les accomplir ou si, au contraire, il faut créer un nouvel organisme particulier.

Le mieux, pour se faire une idée des questions à traiter dans le domaine qui nous occupe, est sans doute de définir les mesures essentielles qui devront être prises ces prochains mois.

En première ligne, à cet égard, vient le règlement des décisions de la conférence de Washington, qui, nous l'avons déjà relevé, ont été déclarées en vigueur le 26 janvier dernier et doivent, vu l'article 405 du Traité de paix, être soumises à l'autorité législative compétente dans le délai d'un an à partir de cette date. La première décision consiste enrétablissement d'un projet de convention relative à l'introduction de la journée de huit heures et de la semaine de quarante-huit heures dans les exploitations industrielles.

Sans vouloir nous engager, nous-mêmes et les autorités législatives, relativement à l'attitude à adopter envers le projet, nous avons chargé le délégué du gouvernement suisse

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dans le conseil d'administration de l'office international du travail de soumettre à celui-ci un certain nombre de demandes quant à l'interprétation et à l'application de la. convention. Dans l'examen de la réponse qui nous a été donnée, il faudra prendre l'avis des services intéressés et des associations patronales et ouvrières entrant en ligne de compte, puis on présentera aux Chambres fédérales un rapport circonstancié.

Les deuxième et troisième décisions de la conférence de Washington se rapportent aux mesures contre le chômage. D'après un projet de convention, les Etats qui accepteraient celle-ci seront tenus de faire périodiquement rapport à l'offlce international du travail au sujet du chômage et, de ce fait, d'instituer un service y relatif ainsi que d'introduire un système de bureaux de placement gratuits, soumis à la surveillance de l'Etat, et de créer des. commissions mixtes ayant pour objet de délibérer les mesures à prendre.

Une recommandation, d'autre part, tend à l'interdiction du placement professionnel, à la réglementation internationale de l'engagement collectif d'ouvriers à l'étranger, à l'introduction d'une bonne assurance en cas de chômage, par la création d'établissements de l'Etat ou le subventionnement d'institutions existantes, de même qu'à la répartition de travaux publics, au point de vue de (leur durée, de manière à prévenir le chômage. Les deux décisions susmentionnées soulèvent dans toute son ampleur et «a complexité la question de la lutte contre le chômage et il faudra des travaux étendus et très divers pour nous mettre en mesure de vous faire uu rapport et des propositions sur l'attitude à prendre relativement à ces décisions.

Une quatrième décision de la conférence recommande aux Etats, à titre de proposition, de mettre les ouvriers étrangers sur le même pied que ceux du pays en matière de droit du travail, moyennant réciprocité. Il suffit de songer au domaine des assurances sociales, de l'assistance aux chômeurs et de la police des étrangers pour se rendre compte de la portée de cette recommandation et de la nécessité d'un examen approfondi de ses effets.

La cinquième décision revêt de nouveau la forme d'un projet de convention, qui prévoit une protection étendue de la maternité des ouvrières dans l'industrie, les métiers et le

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commerce, comportant u-n repos payé de sis semaines avant et après l'accouchement. Il faudra également examiner à fond, s'il y a lieu de ratifier cette convention, qui dépasse le cadre de la législation en vigueur chez nous jusqu'ici.

Les autres décisions de la conférence, enfin, ont trait au travail de nuit des femmes et des jeunes gens, à l'âge minimum des enfants employés au travail, ainsi', qu'à des mesures concernant l'hygiène du travail. Bien qu'elles ne soient nullement étrangères à notre législation, ces matières nécessiteraient certains actes législatifs au cas où la Suisse entendrait adopter le régime proposé.

Outre les décisions et propositions de la conférence générale, il faudra examiner et éventuellement exécuter aussi celles du conseil d'administration de l'office international du travail. A cet égard entrent en ligne de compte, par exemple, la documentation et l'instruction des délégués de la Suisse dans les -diverses commissions. Le conseil d'administration a, entre autres, accordé à notre pays un délégué au sein de la commission d'émigration, qui, à part l'immigration et l'émigration des ouvriers -- y compris leur protection à l'étranger -- aura à examiner également l'importante question de la réciprocité, sur laquelle elle présentera un rapport et des propositions à la conférence générale de l'année 1921. Vu la portée considérable de toutes ces questions, il faudra nécessairement mettre notre délégué dans la commission à même de défendre les intérêts de la Suisse en -toute connaissance de notre manière de voir et demeurer en contact avec lui La Suisse est au surplus représentée par son délégué gouvernemental entre autres dans la commission de chômage; ce délégué recevra aussi des instructions.

A ces affaires concernant les décisions prises par la conférence générale et le conseil d'administration, vient encore s'ajouter la collaboration à la préparation des autres tâches de l'organisation du travail. Il s'agit notamment ici, outre les instructions à donner au délégué suisse dans le conseil d'administration, de se procurer les matériaux nécessaires pour la. conférence générale de 1921. L'office international du travail enverra ces prochains temps à tous les Etats affiliés les questionnaires relatifs aux divers objets à traiter. Les réponses ne devront pas être limitées à l'exposé du régime légal et des autres conditions du pays, mais au contraire renseigner aussi, en particulier, sur le point de savoir quelle

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est l'opinion de chacun des gouvernements à l'égard des solutions internationales proposées par l'office du travail, les gouvernements ayant alors l'occasion de formuler et défendre leurs propres vues le cas échéant. L'avis de chaque pays est susceptible, suivant la force des arguments qui l'appuient, d'influer sur les décisions de la conférence générale.

Il doit dès lors être l'objet d'une préparation minutieuse, pour laquelle il faudra notamment entendre aussi les groupements professionnels intéressés. Les tractanda suivants figurent à l'ordre du jour de la réunion du 5 avric 1921 : Réglementation du travail agricole par la détermination de sa durée; lutte contre le chômage; protection de la femme et de l'enfant; enseignement de l'agriculture; mesures d'hygiène; reconnaissance du droit d'association; assistance en cas d'accident, de maladie, d'invalidité et de vieillesse; rapport de la commission d'émigration; question des repos hebdomadaires; mesures préventives contre le saturnisme pt les maladies provoquées par la laine; changements dans la composition du conseil d'administration, lesquels pourraient SPlon les circonstances mettre en question la représentation de la Suisse au sein du conseil. Plusieurs de ces questions intéressent peu ou n'intéressent même pas du tout notre pays; d'autres, en revanche, entreront en ligne de compte pour nous également, et toutes, enfin, exigent d'être traitées à temps et d'une façon approfondie.

Toute cette besogne -- examen des décisions prises et mesiires qu'elles comportent, préparation des nouvelles affaires -- telle que nous venons de la décrire, se renouvellera à l'avenir après et avant chaque séance du conseil d'administration et chaque conférence générale. D'autres fonctions régulières viendront d'ailleurs s'y ajouter encore. C'est ainsi qu'il faudra suivre la manière dont les décisions de la conférence seront exécutées à l'étranger, renseigner les intéressés -- disons au moyen de publications périodiques --, pourvoir à la correspondance avec l'office international du travail et enfin, abstraction faite des rapports à faire aux Chambres fédérales à teneur de la loi, présenter à l'office international le rapport annuel prescrit en l'article 408 du Traité de paix.

Après avoir exposé par ce qui précède les tâches essentielles que l'affiliation de la Suisse à l'organisation inter-

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nationale du travail imposera à nos autorités, il nous reste à examiner à quels services administratifs elles pourraient être confiées.

Jusqu'à ce jour, les travaux indispensables qui nous incombaient en raison de notre participation provisoire ont été faits par divers organes et personnes, entre autres par le secrétariat général du département de l'économie publique, la division de l'industrie et des métiers, le délégué du même département pour la législation sociale et le directeur de l'office fédéral des assurances sociales, ce dernier en sa qualité de représentant du gouvernement au sein du conseil d'administration de l'organisation internationale du travail.

Cette répartition de la besogne ne saurait cependant être maintenue avec fle temps. Elle est en effet irrationnelle -- sans même parler de ce que les bureaux et personnes susmentionnés sont occupés dans une telle mesure par leurs propres fonctions qu'il leur serait impossible, sans renforcement du personnel, d'assurer d'une manière suivie même seulement une partie des obligations nouvelles qui résulteront de l'affiliation de la Suisse à l'organisation internationale du travail. Il est bien vrai que même dans le cas de centralisation certains services administratifs auront à s'occuper de temps à autre des questions du régime international qui rentreront dans leur domaine. Mais il faut qu'une seule et même institution traite les affaires d'une manière permanente et dans leur ensemble, une institution dont partent tous les fils, à laquelle aboutissent toutes les informations, et qui ait ainsi une vue d'ensemble de toute la question et, par là, soit en mesure de fournir en tout temps les renseignements nécessaires sur l'état des divers problèmes dans leur eonnexité et leurs effets réciproques. Si donc l'importance des tâches passées en revue justifie à elle seule la création d'un organe particulier, 3'accomplissement même de la besogne n'exige, en revanche, qu'un personnel restreint, quoique particulièrement qualifié. C'est pourquoi, vu la répugnance qui existe à l'égard de toute création non indispensable de nouveaux rouages, nous sommes d'avis que le service à instituer doit être assumé par une division déjà existante qui serait développée en conséquence ou par une division qu'il y aurait lieu de créer. Ici pourrait entrer tout d'abord en corsidération la division de l'industrie et des arts et métiers du département de l'économie publique.

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Mais, d'une part, ses tâches essentielles n'ont pas avec les tâches nouvelles dont nous avons parlé tant de points communs, ni si divers, qu'une fusion serait justifiée et, d'autre part, cette fusion étendrait le champ d'activité de la division, déjà bien assez vaste, d'une manière telle que ses chefs n'auraient plus la vue d'ensemble désirable sur tout le service. Il en serait de même de l'autre subdivision du département de l'économie publique, l'office fédéral des assurances sociales. Sans doute, l'extension des assurances sociales rentre-t-elle dans le programme international, mais ejicore n'en constitue-t-elle précisément qu'une partie, l'activité de l'office n'ayant aucun rapport direct avec les autres objets. Cette activité est au surplus tellement absorbée par les travaux législatifs préparatoires concernant l'assurance en cas de vieillesse et d'invalidité et en faveur des survivants, de même que par la revision de la loi sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents et des ordonnances y relatives, que lui attribuer encore d'autres travaux ne rentrant pas dans son domaine propre provoquerait un éparpillement bien inopportun de ses forces. Le fait que le directeur actuel de l'office, a assisté à la conférence de Washington, qu'il représente à cette heure le gouvernement fédéral dans le conseil d'administration de l'office international du travail et qu'il a dès lors pu acquérir de l'expérience dans le domaine du droit international du travail, ne saurait non plus justifier une réunion durable des nouvelles tâches à celles du ressort spécial de l'office des assurances sociales. Pour toutes ces raisons, nous concluons que le mieux est de confier le nouveau service à un « Office fédéral du travail ». A vrai dire, le ressort de cet organe au point de vue des tâches nationales ne sera pas en tout point le même qu'en matière internationale et l'office aura souvent besoin du concours d'autres organes. Néanmoins, l'affinité sera ici également des plus étendues, aussi en ce qui concerne le caractère surtout informatoire de l'activité de l'office.

Nous montrerons plus loin que malgré le rejet de la loi réglementant les conditions de travail, l'institution d'un office fédéral du travail demeure justifiée et nécessaire en soi.

Si, de surcroît, il s'agit de déléguer à cet organe les tâches résultant
de l'affiliation de la Suisse à l'organisation internationale du travail, solution la meilleure à notre avis, sa création devient directement indispensable et urgente.

656 II.

Dans tous les pays civilisés, la question du droit du travail est au premier plan des préoccupations. On en saisit la haute importance si l'on se représente que la prospérité d'un peuple dépend en première ligne non point de sa fortune nationale, mais bien de sa capacité de production, que l'élément essentiel de cette capacité est le travail humain et que c'est dès lors, sur celui-ci que repose toute la vie économique.

La concentration -toujours plus intense des industries et du capital a énormément augmenté le nombre de ceux qui, n'ayant pas d'existence indépendante au point de vue économique, sont obligés de se mettre au service d'autrui. Ce travail pour le compte de tiers est aujourd'hui la base même de la vie économique d'une grande partie de la population.

C'est pourquoi la façon dont les rapports entre employeurs et employés sont réglés -- juridiquement et économiquement -- autrement dit le régime du travail -- a pris une importance capitale pour l'économie générale du pays.

Les problèmes que comporte le droit du travail sont des plus complexes et difficiles. De par les rapports étroits qui existent entre le travail et l'économie nationale, toute modification apportée aux conditions du droit du travail se répercute aisément sur la vie économique. Une intervention malheureuse d'un côté détermine des dommages de l'autre côté. Un examen minutieux et une connaissance approfondivi de la vie économique sont dès lors la condition première d'une bonne réglementation du droit du travail. Ils exigent à leur tour une observation constante de l'évolution économique, l'étude des facteurs propres à assurer un bon régime du travail en même temps que la volonté et le désir de travailler, enfin la connaissance des conditions et besoins de l'existence des travailleurs, d'une part, les possibilités des prestations des employeurs, d'autre part.

Si l'on reconnaît unanimement que l'Etat doit vouer un redoublement d'attention à ces questions et qu'il ne peut plus se contenter, comme aux temps du libéralisme économique pur, de tout abandonner au libre jeu des forces, les opinions divergent en revanche sur le point de savoir comment conditionner le droit du travail et comment réglementer les conditions de travail. Il ne s'agit pas, aujourd'hui, de

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prendre parti dans les controverses à ce sujet; nous en aurons l'occasion quand il nous faudra résoudre certains problèmes d'ordre matériel. Pour le moment, nous n'avons à nous occuper que de la création de l'organe appelé à traiter toutes ces questions.

Notre pays a manqué jusqu'ici d'un organe de ce genre.

La vie économique et, avec elle, le droit du travail étant en perpétuelle évolution, de sorte qu'une activité ininterrompue et exclusive dans ce domaine peut seule donner des résultats utiles, il est clair qu'une institution permanente est seule à même d'accomplir les diverses tâches qui s'imposent. Nous estimons donc que Ja création d'un office fédéral du travail est une nécessité inéluctable.

Nous croyons d'ailleurs, à cet égard, être en communauté d'opinion avec la grande majorité du peuple suisse, qui, lors de 'la votation concernant la loi fédérale réglementant les conditions de travail, avait admis en principe l'institution d'un office du genre susmentionné, dont elle reconnaissait l'utilité et la nécessité. Partant de l'idée que celles des parties de la loi précitée qui, somme toute, n'ont pas été contestée, devaient être reprises sous une autre forme, nous, avons chargé le département de l'économie publique, déjà en date du 19 avril dernier, de présenter un ou plusieurs projets sur la création d'un office du travail, l'extension de la procédure de conciliation prévue dans la. loi sur les fabriques aux entreprises qui ne sont pas soumises à cette loi, la fixation de salaires minima dans les industries domestiques et l'applicabilité des contrats collectifs de travail à tous les membres d'un groupement professionnel.

Si nous soulevons maintenant la question de l'office fédéral du travail et vous proposons d'instituer celui-ci par la voie d'un arrêté fédéral urgent, c'est en raison des tâches internationales auxquelles nous nous trouvons brusquement dans la nécessité de faire face, ainsi que nous l'avons exposé au chapitre qui précède. Comme il ne s'agit là que de questions d'organisation, le mode de faire auquel nous nous sommes arrêtés mous paraît admissible. Nous rappellerons que f'office fédéral des assïirances sociales, par exemple, a lui aussi été institué par un arrêté fédéral urgent. Les autres réformes que visait notre ai'rêté du 19 avril 1920 sont de

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droit matériel et nous avons l'intention de les réaliser au moyen d'une ou de plusieurs lois fédérales, dont nous vous soumettrons d'ailleurs les projets très prochainement.

On pourrait se demander si, après avoir créé l'organisation internationale du travail, les nations, ont encore à s'occuper du droit du travail et ne peuvent pas abandonner au nouvel organisme les questions qu'il soulève, de telle sorte qu'il n'y aurait plus rien à faire pour l'initiative dans île domaine national et qu'un office national du travail serait en somme sans objet. Il n'en est nullement ainsi. Nous avons déjà montré quelles tâches incombent à tout membre de l'organisation international, tâches qui exigeraient à elles seules déjà ila création d'un organe spécial. Le fait, précisément, que les décisions de la conférence générale du travail n'obligent pas les Etats affiliés, mais doivent en revanche être examinées par eus quant à leur applicabilité, rend indispensable un organe à la fois qualifié pour s'occuper de ces affaires et connaissant bien les situations nationales. Il faut relever, d'autre part, que les tâches internationales et les tâches /nationales ne sont pas les mêmes. En général, seules pourront s'affirmer et prétendre à durer dans le domaine international, les réformes en matière do régime du travail qui auront été éprouvées et définitivement admises au point de vue national. Non seulement, dès lors, la réglementation nationale des conditions de travail conservera-telle sa légitimité, mais encore gagnera-t-elle beaucoup en importance. En effet, l'activité et l'initiative à déployer dans le domaine international amèneront les Etats à vouer plus d'attention à leurs tâches nationales; d'autre part, ceux des pays qui suivent attentivement les questions du travail seront appelés à jouer un rôle important dans la réglementation internationale, soit qu'il s'agisse de faire réaliser des réformes ayant fait leurs preuves au point de vue national, soit qu'il s'agisse de s'opposer à des expériences prématurées.

Les tâches internationales ne restreindront ni surtout ne supprimeront les tâches nationales; elles les étendront plutôt et les rendront plus importantes. Les unes ne sauraient au surplus être disjointes des autres, car il y a d'étroits rapports entre elles.

En créant un office du travail, nous n'innovons rien.

Nous instituons un organe qui existe déjà dans maints autres pays et qu'on réclame depuis longtemps chez nous. Nous

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nous référons, sur ce point, à notre message du 11 avril 1919 concernant la réglementation des conditions de travail (pages 13 à 16).

III.

Les dispositions du projet donnent lieu aux observations suivantes : Article 'premier : Les tâches dévolues à l'office du travail sont si complexes et si étendues qu'il convient de donner à cet organe le caractère d'une division particulière de l'administration, à rattacher au département de l'économie publique de par La nature même de ses attributions. Ainsi que nous l'avons exposé ci-haut, il paraît déjà impossible de confier à une division existante les seules questions se rapportant au droit international du travail. A plus forte raisou ne peut-on songer à faire rentrer dans les attributions d'une division déjà pleinement occupée, les doubles tâches d'ordre national et international à assumer par un office du travail. Dans notre message concernant la réglementation des conditions de travail, message qui fut publié alors qu'il n'était pas encore question des tâches internationales que l'on doit 'attribuer aujourd'hui à un office du travail, nous recommandions déjà la création d'une division indépendante. A ce propos, nous disions ce qui suit : « Les tâches « de l'office du travail sont d'un genre si spécial et ont une « si grande étendue qu'il faut à ce nouveau service un direc<-. teur qui s'en occupe exclusivement. L'application à l'une «des deux divisions susmentionnées, d'ailleurs déjà fort occu« pées, ne pourrait donc se faire qu'au moyeu de la création « d'une section spéciale, avec un directeur particulier, mais « S'uborclonné au chef de la division. Nous croyons cependant « qu'une pareille solution ne serait pas satisfaisante. D'abord, ·« le chef de la division devrait assumer la responsabilité de « tâches auxquelles il ne pourrait se consacrer personnelle« ment que dans une mesure très restreinte. De plus, l'office « du travail est une institution d'une si grande importance « qu'eäle sera pleinement justifiée comme division spéciale « du département, d'autant plus que la division de ce service « ne peut être confiée qu'à un homme qui, grâce à ses con« naissances et à ses hautes qualités personnelles, puisse pré« te,ndre au rang élevé de chef de division, dont il a nécesFeuille fédérale. 72e année. Vol. III.

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« sairement besoin aussi comme .président de la commission « centrale des salaires et dans ses rapports avec les auto« rites et les associations. » Ce que nous disions alors pour un office du travail n'assumant que des tâches nationales est d'autant plus justifié aujourd'hui que l'on doit faire rentrer dans les attributions de cet office des tâches internationales.

Nous avons conservé la désignation d'« Office fédéral du travail » que la loi rejetée donnait à l'institution, car le public s'était déjà familiarisé avec elle. Une raison de plus de l'adopter est que l'organe correspondant de l'organisation international du travail s'appelle de même « office de travail ». L'adjonction du mot « fédéral » préviendra toute confusion avec d'autres offices similaires.

Art. 2 : D'une manière tout à fait générale, l'office a pour attributions de préparer et traiter les affaires concernant le droit du travail et le régime du travail. Si nous citons dans l'article qui nous occupe quelques-unes de ces affaires, nous savons bien que nous n'en faisons pas une énumération limitative. Cela ne serait d'ailleurs pas possible, car on ne saurait prévoir dès aujourd'hui ce que l'avenir apportera dans les deux domaines susmentionnés. La (législation d'ordre matériel circonscrira d'une manière plus précise certaines tâches de l'office; c'est ainsi que le projet annoncé concernant la conciliation déterminera dans les détails l'activité et les attributions de l'office en matière de conflits entre employeurs et employés.

Nous avons dit que les tâches internationales à accomplir motivent l'urgence de l'arrêté. Si néanmoins nous commençons par les tâches nationales dans l'énumération des attributions de l'office, c'est en considération de leur grande importance.

Pour ce qui est des diverses attributions énoncées dans' l'article, nous ferons remarquer ce qui suit : Ad lettre a : Nous renvoyons à nos remarques concernant l'article 5.

Ad lettre b : Le contact étroit que l'office du travail doit continuellement avoir avec le patronat et les employés, particulièrement avec les associations professionnelles, le met à même de constater à temps le besoin d'innovations dans le droit du travail et de prendre les mesures voulues pour que,- le moment venu, les projets d'actesi législatifs puissent être présentés. C'est là une chose des plus hnpor-

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tantes, car d'une part notre régime démocratique exige que les actes législatifs soient préparés, à fond si l'on ne veut qu'ils soient condamnés d'emblée à un échec, et, d'autre part, les antagonismes économiques qui existent dans le domaine considéré sont une cause de difficultés particulières pour l'oeuvre du législateur.

Ad lettre c : Les efforts tendant à ce que la Confédération prête son concours pour l'amélioration du service de placement et les mesures contre le chômage, ont occupé les Chambres à plus d'une occasion. En 1904 déjà, le Conseil fédéral avait présenté à ces dernières un rapport sur la participation de la Confédération aux institutions concernant le placement et concernant la protection contre le chômage.

Le 6 juin 1905 fut rendu un arrêté fédéral aux termes duquel la question de l'assurance des chômeurs était considérée comme non encore entièrement élucidée, mais qui chargeait en revanche le Conseil! fédéral de poursuivre l'étude de l'assistance en cas de chômage et de faire rapport sur la collaboration des administrations fédérales, cantonales et communales aux fins d'arriver à une répartition rationnelle des travaux publics, le Conseil fédéral recevant de même mandat de présenter un projet concernant l'appui à donner au service de placement.

En date du 7 décembre 1907, le Conseil fédéral adressa aux Chambres un message relatif aux mesures à prendre par la Confédération en faveur de ce service et contre le chômage, message qui était accompagné de deux rapports, l'un de M. le conseiller national J. Vogelsanger, concernant le rpremier de ces objets, l'autre, de M. le conseiller national D E. Hofmann, sur Ile second. Les délibérations aboutirent à un arrêté fédéral relatif à l'encouragement, par la Confédération, du service de placement, du 29 octobre 1909. Cet arrêté, d'une part, assurait sous certaines conditions des subventions aux bureaux publics de placement et aux associations cantonales de secours en nature, ainsi qu'à l'union des offices suisses du travail, et, d'autre part, chargeait cette union d'établir un bureau central pour l'observation du marché du travail et l'amélioration du service international de placement.

Les frais du bureau central des offices suisses du travail, institution qui fut dirigée jusqu'à cette année 1920 par le chef de l'office du travail de la ville de Zurich, sont supportés par la Confédération. Le bureau publie chaque semaine

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une « liste centrale des emplois vacants », pourvoit aux affaires de l'union des offices du travail et cherche à perfectionner le service de placement dans son ensemble.

Le 8 mars 1912, la question de l'assistance-chômage fut soulevée à nouveau, par une motion de M. Eugster-Züst (prise en considération le 3 juin 1313) qui invitait le Conseil fédéral à présenter un rapport et des propositions sur le point de savoir si, et éventuellement de quelle manière, la Confédération pourrait améliorer et subventionner l'assistance en cas de chômage immérité, particulièrement l'assurance contre les effets de ce chômage.

Vu cette motion, M. le conseiller national Hofmann fut chargé de continuer son rapport de l'année 1907 et d'examiner si et comment le projet d'un arrêté fédéral sur la matière de 1907 devait être modifié. Le nouveau rapport, qui a été déposé le 16 septembre 1917, conclut à ce que l'on édicté un arrêté fédéral sur le subventionnement des caisses de chômage par la Confédération. Les propositions de M. Hofmann sont discutées à l'heure actuelle par une commission d'experts.

En attendant, il a été versé aux caisses d'assistancechômage, pour les années 1915 à 1918, des subventions pour les secours accordés par ces institutions.

La crainte de voir une grave crise de chômage se produire après la guerre, a, d'autre part, engagé le Conseil fédéral à percevoir un supplément à l'impôt de» bénéfices de guerre pour constituer un $ Fonds d'assurance-chômage ».

En outre, sur une suggestion ,émanant des milieux industriels, la même autorité a rendu le 5 août 1918 un arrêté concernant l'assistance en cas de chômage dans l'industrie et les métiers, auquel a fait suite, en date du 4 mars 1919, un arrêté concernant l'assistance en cas du chômage des employés. Le chômage appréhendé s'est effectivement produit à un haut degré en hiver 1918 et a en fin de compte déterminé la création de l'office fédéral d'assistance en cas de chômage, qui, avec ses sections : création d'occasions de travail, placement et secours, a pourvxi aux divers objets de l'assistancechômage. Entre temps, le bureau central de l'union des offices suisses du travail, dont il a été question ci-dessus, a été détaché de l'office du travail de la ville de Zurich par suite de l'arrêté du Conseil fédéral du 6 janvier 1920 et a passé à l'office fédéral d'assistance des chômeurs. La chose était devenue

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nécessaire du fait que plus on avançait et plus atissi l'on constatait que le service central des offices du travail -- l'observation du marché du travail -- doit être directement en relations avec l'assistance en cas de chômage. Le nouvel office central fédéral de placement (2« section de l'office d'assistance aux chômeurs) travaille de concert avec les 'Offices de placement institués dans les cantons par suite de l'arrêté du Conseil fédéral du 29 octobre 1919 relatif à l'assistance des chômeurs, avec les offices du travail et avec les associations professionnelles des chefs d'entreprise, des ouvriers et des employés. Il publie toutes les semaines une liste générale des emplois vacants et le « Marché suisse du travail » (Schweiz.

Arbeitsmarkt), l'un et l'autre destinés à renseigner sur les les conditions du mâché du travail et sur le fonctionnement du service intercantonal de placement.

Cet office central de placement est une institution à caractère durable, tandis que l'office fédéral d'assistance en cas de chômage sera supprimé un jour ou l'autre. Il devra alors s'occuper des questions concernant cette assistance, vu la eonnexité étroite existant entre elle et le service de placement, et aura de même à traiter, concernant ce dernier service, d'autres questions qui ne sont pas encore réglées.

Pas.n'est besoin, sans doute, de démontrer que bien d'autres travaux -- actes législatifs à préparer et à exécuter, etc.

-- demeurent à effectuer dar.s ce domaine. C'est la division de l'industrie et des arts 'et métiers qui y avait pourvu jusqu'ici. Mais du moment qu'on crée un office fédéral du travail, il est tout indiqué d'alléger la tâche de cette division et de confier au nouvel organe la préparation et l'exécution d'actes législatifs et mesures eu matière de placement et de chômage, ces objets rentrant d'emblée dans sa sphère d'activité. C'est d'ailleurs ce qui a été fait dans d'autres pays où il existe des offices nationaux du travail.

L'article 2, lettre c, de notre projet n'apporte aucune innovation matérielle, mais vise seulement une question d'organisation, en ce sens que l'office central fédéral de placement constituera désormais une section de l'office du travail.

Comme jusqu'ici, cet office central observera le marché du travail, poursuivra l'amélioration du service de placement, préparera
ou appliquera tout ce qui est nécessaire pour lutter contre le chômage ou en atténuer les effets et se mettra en rapport, pour cela, avec les associations de patrons, d'où-

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vriers et d'employés. Les publications périodiques seront continuées, car elles se sont montrées utiles et même indispensables.

Ad lettre d : Parmi les tâches que son affiliation à l'organisation internationale du travail impose à notre pays, rentrent en particulier la préparation des affaires à traiter dans les conférences générales, l'examen des décisions et autres manifestations des organes de cette institution, (la présentation de rapports et de propositions concernant ces objets et, enfin, l'observation de la législation en matières de travail et celle du régime du travail à l'étranger.

Comme les attributions de l'office du travail touchent par divers points à celles de la division de l'industrie et des arts et métiers, il convient de laisser au Conseil fédéral le soin de déterminer de plus près le champ d'activité dudit office. Il est de même indiqué de donner à cette autorité la faculté d'assigner d'autres tâches encore à l'office du travail, la disposition y relative' n'étant toutefois applicable qu'au point de vue organique, comme il va de soi, et ne conférant donc pas en quelque sorte pleins pouvoirs pour ses actes d'ordre législatif.

Ad art. 3 : Les obligations de l'office exigent une organisation appropriée à son but; il faut en premier lieu veiller à ce que l'activité de son directeur ne soit pas absorbée par les affaires courantes, car alors ce fonctionnaire n'aurait plus la vue d'ensemble nécessaire et perdrait la direction du service. Il est indispensable que le directeur puisse consacrer le meilleur de ses forces à la solution des problèmes importants. Cette circonstance, jointe à celle que le directeur aura fréquemment à assister à des séances de commissions et que ses fonctions l'obligeront à" certains déplacements, justifie à elle seule la création immédiate d'un poste de vicedirecteur, ce dernier ayant à suppléer le chef de l'office en cas de nécessité.

13 ne serait pas bon de fixer dans tous ses détails l'organisation de l'office déjà dans l'arrêté. Pour qu'elle puisse s'adapter plus aisément aux circonstances, qui sont susceptibles de changer au cours du temps, il est préférable de réserver au Conseil fédéral la compétence de prendre les mesures nécessaires à cet égard.

Ad art. i : Le régime actuel des traitements de l'administration fédérale ayant un caractère transitoire et ces trai-

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"tements étant à ta veille d'être réglementés à nouveau, il ne -conviendrait pas de fixer dans l'arrêté les anciens chiffres quant à la rétribution du personnel de l'office. Dès que la réforme des traitements sera chose faite, le Conseil fédéral classera les fonctionnaires dans les diverses catégories de "traitement et déterminera leur rétribution en conformité des nouvelles prescriptions.

11 est de toute importance de mettre à la tête de l'office ·et de ses sections des personnes qualifiées à tous égards.

Avec les traitements actuels, cependant, elles seraient difficiles à trouver, et c'est pourquoi il convient de laisser au Conseil fédéral une certaine latitude et de lui donner la compétence de fixer les traitements selon son appréciation jusqu'à ce que la nouveille réglementation soit établie -- en quoi il restera naturellement dans de justes limites, comme sa responsabilité lui en fait un devoir.

Ad art. 5 : Une base sûre est la condition indispensable de toute oeuvre. L'office du travail ne peut accomplir sa tâche que s'il connaît dans leur ensemble les facteurs essentiels des rapports entre employeurs et employés. Rechercher et étudier ces facteurs est donc nécessaire pour la préaparation des réformes à réaliser en matière de droit du travail.

Un des premiers objets qui s'impose ici à l'attention est une statistique des salaires; en second lieu viendrait la détermination des effets exercés sur la production par la réduction de la durée du travail, question des plus controversées, ·comme on le sait. Ces recherches doivent s'étendre au travail à domicile, à l'industrie, aux arts et métiers et au commerce. L'agriculture n'entre pas ici en considération.

Une autre nécessité est de faire déterminer par uu organe neutre les conditions d'existence. Le manque de renseignements sûrs à cet égard s'est manifesté d'une marnière très fâcheuse ces dernières années par suite des brusques fluctuations des prix. Bien. des antagonismes et des luttes auraient pu être évités si les autorités et les particuliers avaient été éclairés à temps et sûrement au sujet de ces fluctuations. Aussi tous ceux qui furent appelés à s'entremettre ou à statuer dans les conflits de salaires ont-ils eu une tâche ardue; tâtonnant fréquemment dans l'inconnu, il n'avaient pas de données certaines sur lesquelles ils auraient pu
fonder leurs propositions et décisions. C'est d'ailleurs aussi la principale raison pour laquelle les offices de conciliation ne sont peut-être pas toujours intervenus à la satis-

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faction générale. Le manque d'une règle présentant la sûretévoulue les a souvent, obligés de se laisser guider ,par le sentiment, ce qui n'a que trop souvent éveillé l'idée, chez les intéressés, qu'on tranchait au hasard et arbitrairement. Nous n'entendons nullement, en faisant ces constatations, rabaisser la valeur dé la besogne considérable et méritoire des offices de conciliation, mais nous voulons simplement expliquer la raison de critiques formulées contre eux dans certains cas. Ces offices trouvent un grand appuis auprès de l'office du travail. 11 leur fournira en effet les matériaux dont ils ont besoin pour arrêter leurs décisions. C'est lui, aussi, qui recueillera les renseignements utiles concernant leur jurisprudence et pourra les éclairer au sujet de cellle-ci.

Toutes ces choses ne manqueront pas d'avoir d'heureux effets sur l'institution de la conciliation.

Quant à l'observation du marché du travail, cette branche de l'activité du nouvel organe est déjà assumée par l'office fédéi-al de placement et nous pouvons simplement renvoyer à ce que nous avons dit concernant l'article 2, lettre c.

Si l'on veut que toutes ces tâches soient efficacement accomplies, il faut nécessairement, d'une part, le concours des autorités et offices des cantons et celui des associations professionnelles intéressées, et, d'autre part, d'obligation pour les chefs d'entreprise et leur personnel de fournir tous les renseignements utiles.

On a soulevé la question de savoir si .le service qu'il s'agit aujourd'hui de confier à l'office du travail ne pourrait pas être effectué par une institution privée neutre. Il faut objecter, à ce sujet, qu'une telle institution serait encore à créer; et il n'est pas certain que cela puisse se faire. En outre, un organe privé ne disposerait pas de sanctions pour faire respecter ses décisions; or, il est douteux qu'il pût s'en passer. Si donc nous sommes d'avis qu'il appartient :V l'Etat de prendre l'affaire en main, cela ne veut pas dire qu'au point de vue de l'exécution on n'aura pas égard à la plus grande décentralisation possible et qu'on ne fera pas appel au concours des entreprises privées des associations économiques. Moins l'appareil central sera chargé, et mieux cela^ vaudra. Le mode même de l'accomplissement pratique ries diverses tâches exige cependant encore un examen approfondi, à faire conjointement avec les associations professionnelles. Et c'est pourquoi il est prévu que le Conseil-

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fédéral pourra édicter des prescriptions de détail en cette matière.

Aux ternies de l'article 2, lettre b, c'est l'office federall du travail qui est l'organe chargé de pourvoir à ces diverses affaires.

Un ancien postulat va, de cette manière, se trouver réalisé. Nous répéterons ce que nous avons dit à ce sujet dans notre message du 11 avril 1919 concernant la réglementation des conditions de travail : « En Suisse, les -efforts tendant à instituer un bureau " « de statistique sociale remontent à Alfred Escher. Ils en« gagèrent M. Emile Frey, alors conseiller national, à pré« senter une motion demandant une enquête générale con« cernant les conditions sociales dans le pays. Après que « diverses enquêtes eurent été faites au sujet des arts et « métiers, de l'agriculture, des douanes et de l'émigration, « le Conseil fédéral déclara liquidée cette motion dans son « rapport de gestion de l'année 1883. Ce n'est qu'en 1903, « à l'occasion d'un recensement fédéral des entreprises, que « la question d'une statistique sociale systématique fut re« prise, dans des conférences données au sein de l'association « suisse pour l'amélioration de la protection internationale « des ouvriers. Les revendications relatives furent formulées « dans huit points du programme de r>ette association, du « 22 mai 1906. L'idée fut accueillie avec intérêt dans d'autres «milieux et, en date du 6 décembre 1907, le conseiller natio« nal Machler déposait une motion conçue en ces termes : « ,,Le Conseil fédéral est invité à présenter un rapport et « des propositions sur le point de savoir s'il n'y aurait pas « lieu d'établir un office spécial de statistique sociale."

« Cette motion fut prise en considération par le Conseil « national le 31 mars 1908. Le même jour, le comité de l'asso« ciation suisse pour ]a protection internationale des ouvriers « remit au Conseil fédéral un mémoire disant, entre autres : « ,,Ce qu'il faut, c'est non point une statistique unilatérale « des conditions du travail, niais bien une statistique des «conditions d'existence de toutes les classes de la société, « ainsi que de leur participation à la production et A la con« sommation générales. C'est seulement une fois renseigné « sur tous les facteurs entrant en ligne de compte que le « législateur pourra établir en connaissance de cause une «législation systématique fondée sur les faits." En la même

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« affaire, le Conseil fédéral a reçu d'autre part, le 15 juin « 1914, un. mémoire d'une conférence convoquée par le comité « central de l'union syndicale suisse aux fins d'uniformiser « les enquêtes en matière de chômage. » Art. 6 : II faut des dispositions pénales pour que les enquêtes nécessaires puissent effectivement avoir lieu. Toutefois, afin d'éviter une poursuite pénale dans les cas où il s'agit pilutôt de malentendu que de mauvaise intention, il «st prévu que l'action pénale ne s'ouvrira que sur réquisition spéciale, la compétence y relative étant déléguée à l'office .du travail pour assurer l'uniformité qui doit exister à cet égard.

Art. 7 : Nous avons déjà exposé dans la première partie du présent message les motifs qui militent en faveur de la clause d'urgence.

Outre le projet d'arrêté, que nous vous recommandons d'adopter, sont joints en appendice au présent message : 1° la XIII« partie du Traité de paix de Versailles du 28 juin 1919, relative au «travail»; 2o les décisions de la conférence générale de Washington, du 29 octobre au 29 novembre 1919.

Le texte susmentionné du Traité de paix est axtrait des annexes à notre message concernant la question de l'accession de la Suisse à la Société des nations.

La traduction allemande des décisions adoptées à Washington n'a pas le caractère officiel. Il n'est pas impossible que le texte allemand officiel de ces décisions soit encore établi, ce qui pourrait amener quelques modifications rédactionnelles.

Nous vous prions instamment de traiter l'affaire dans .la prochaine session d'automne.

Berne, le 21 juin 1920.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, MOTTA.

Le chancelier de la Confédération, STEIGER.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'institution de l'office fédéral du travail. (Du 21 juin 1920.)

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