713

# S T #

Feuille Fédérale

Berne, le 22 novembre 1968 120e année Volume II N°47

Paraît, en règle générale, chaque semaine. Prix: 36 francs par an; 20 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement.

# S T #

10088 Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation de la convention entre la Suisse et la Principauté de Liechtenstein sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales en matière civile (Du 13 novembre 1968) Monsieur le Président et Messieurs,

Nous avons l'honneur de vous soumettre, par le présent message, un projet d'arrêté fédéral approuvant la convention entre la Suisse et la Principauté de Liechtenstein sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales en matière civile, conclue le 25 avril 1968.

I II peut paraître paradoxal que la Suisse et la Principauté de Liechtenstein, si étroitement liées à maints égards, n'aient pas conclu plus tôt une convention sur la reconnaissance et l'exécution réciproque des jugements civils. La raison profonde en est sans doute que la Principauté est à juste titre soucieuse de défendre sous tous ses aspects l'un des attributs essentiels de la souveraineté, le pouvoir juridictionnel. Abstraction faite de ce que la Principauté n'a conclu jusqu'ici de convention générale sur l'exécution des jugements avec aucun autre Etat étranger, il est en effet significatif qu'après certains sondages effectués vers 1930 une tentative de conclure une convention s'était à l'époque heurtée à une disposition du droit liechtensteinois prévoyant en substance qu'un accord d'élection de for en faveur d'un tribunal étranger - conclu entre Liechtensteinois et ressortissants étrangers ou même entre Liechtensteinois - n'est valable que s'il est passé par acte authentique. Bien que cette disposition légale, considérée comme d'ordre public, soit aujourd'hui encore en vigueur, le gouvernement princier s'est pourtant déclaré disposé, en octobre 1965, à entrer en pourparlers avec la Suisse en vue de la conclusion d'une convention d'exécuFeuille fédérale.120e- année. Vol. II.

.

48

714

tion des jugements civils. A la suite d'une requête de la Fédération suisse des avocats, qui signalait les nombreux inconvénients dus à l'absence de pareille convention avec le Liechtenstein, le Département politique avait en effet, en avril 1965, fait part aux autorités liechtensteinoises du désir de ia Suisse de conclure une convention. Entretemps, une petite question Schmid Werner et un postulat Vetsch avaient été déposés au Conseil national et visaient, eux aussi, à la conclusion d'une convention avec le Liechtenstein en matière d'exécution des jugements.

Au début de 1966, il fut convenu avec les autorités de la Principauté d'élucider d'abord la situation juridique en procédant à un échange de vues au cours d'un entretien officieux entre représentants suisses et liechtensteinois.

Cet entretien eut lieu à Berne le 7 juin 1966. D'un commun accord, les interlocuteurs choisirent comme base de discussion notamment les conventions d'exécution conclues par la Suisse avec l'Autriche (RO 1962, 270) et la Belgique (RO 1962, 936). L'examen de ces conventions sous l'angle des relations entre la Suisse et le Liechtenstein démontra qu'il ne serait guère possible d'arriver à un arrangement pleinement satisfaisant du point de vue suisse et que son champ d'application serait plutôt restreint. Ainsi, il apparut d'emblée que le Liechtenstein n'accepterait pas d'étendre le régime conventionnel aux décisions prononcées dans un procès pénal sur conclusions de la partie civile, ni de l'appliquer aux jugements en matière d'obligations alimentaires rendus au for du demandeur (forum actoris), à moins que le défendeur n'ait eu son domicile, lors de l'introduction d'instance, dans le pays du jugement. Mais ce qui suscita les plus sérieuses appréhensions quant à la possibilité de conclure une convention fut le fait que les représentants liechtensteinois laissèrent entrevoir un refus de leur gouvernement de renoncer à la forme authentique pour les accords de prorogation de for. Cela signifierait, en d'autres termes, que la convention ne pourrait même pas contenir de disposition selon laquelle la compétence internationale des tribunaux de l'Etat du jugement serait fondée lorsque le défendeur s'est soumis par simple convention écrite à la compétence du tribunal qui a statué sur le fond du litige. Or, pour le commerce
international, l'un des buts essentiels d'une convention d'exécution des jugements est d'assurer l'exécution de tout jugement rendu en vertu d'une clause de prorogation de for. Les relations commerciales seraient sensiblement entravées si tout accord d'élection de for, sous peine de nullité, devait être passé par acte authentique, c'estrà-dire par-devant notaire. Tandis que la jurisprudence suisse relative à l'article 59 de la constitution protège le débiteur inexpert en affaires contre les clauses de prorogation de for insérées subrepticement dans des contrats, en ce sens qu'elle juge de la validité de la clause selon les principes du droit des obligations régissant la formation des contrats, le droit liechtensteinois va beaucoup plus loin, car il permet aussi au débiteur expérimenté en affaires, qui a passé même par écrit une convention de prorogation de for, de se prévaloir ensuite de la nullité de la convention parce qu'elle n'a pas été reçue en la forme authentique. Face à cet état de choses, les représentants suisses proposèrent une solution intermédiaire selon laquelle la forme authentique ne serait requise que pour les

715

conventions de prorogation de for passées par des personnes non inscrites au registre du commerce, la simple forme écrite - mais non pas la forme orale étant en revanche suffisante pour les conventions passées pai- des personnes inscrites dans ce registre. Mais cette solution intermédiaire, elle non plus, ne paraissait pas devoir obtenir l'agrément du Liechtenstein. Les représentants de la Principauté exprimèrent même le désir de ne pas prévoir la compétence du for devant lequel le défendeur aurait procédé au fond sans faire de réserve quant à la compétence internationale des tribunaux de l'Etat du jugement (cf. art. 2, 1er al., lettre c, de la convention belgo-suisse).

Au terme de cette entrevue «exploratoire», qui n'augurait guère favorablement de la conclusion d'une convention, les représentants du Liechtenstein émirent le voeu que les autorités suisses élaborent un projet de convention et le soumettent ensuite aux autorités de la Principauté, En janvier 1967, la Légation du Liechtenstein fit savoir que le gouvernement princier était en principe d'accord d'ouvrir des négociations officielles sur la base du projet de convention que la Division de justice avait élaboré d'accord avec le Département politique.

Sur ces entrefaites, le Conseil fédéral accepta l'invitation du gouvernement princier d'ouvrir les négociations à Vaduz et constitua la délégation suisse. En raison de diverses circonstances, ces négociations ne purent avoir lieu qu'en date des 13 et 14 février 1968.

En dépit des perspectives peu séduisantes qui les avaient précédées, les négociations aboutirent au paraphe d'une convention qui, tout bien considéré, peut être qualifiée d'acceptable. Le 25 avril 1968, la convention fut signée à Vaduz, au nom du Liechtenstein par M. Batlincr, chef du gouvernement princier, et au nom de la Suisse par M. Thalmann, directeur de la Division de justice.

n La convention s'inspirant pour une large part des conventions austrosuisse et belgo-suisse précitées, elle en a repris plusieurs dispositions, en les maintenant telles quelles ou en y apportant les modifications requises par leur transposition dans les relations entre la Suisse et le Liechtenstein. Nous pourrons donc limiter nos commentaires plus particulièrement aux dispositions qui s'écartent peu ou prou, quant au fond, de celles de nos autres conventions d'exécution.

A l'article premier, 2e alinéa, il a fallu prévoir expressément, pour éviter toute équivoque dans l'interprétation de la première phrase du premier alinéa («décisions judiciaires rendues en matière civile»), que la convention ne s'applique pas aux décisions rendues dans un procès pénal sur conclusions de droit civil. Lors des négociations de Vaduz, les représentants liechtensteinois ont en effet confirmé leur volonté de ne pas soumettre ces décisions à la convention.

Ils ont fait valoir que le Liechtenstein n'avait aucun intérêt à obtenir l'exécution à l'étranger des condamnations civiles prononcées par un juge pénal de

716

la Principauté, de telles condamnations y jouant un rôle minime et les tribunaux pénaux s'étant de toute façon accoutumés à renvoyer au juge civil le jugement des prétentions civiles.

Bien que la convention s'applique en principe aux seules décisions judiciaires et exclue donc les décisions rendues par les autorités administratives, elle prévoit pourtant une exception en faveur des décisions d'autorités administratives chargées en Suisse de la tutelle; suivant l'article premier, 3e alinéa, les décisions de ces autorités, ainsi que les transactions conclues devant elles, seront assimilées aux décisions et transactions judiciaires.

Varticle 2 précise la disposition de l'article premier, 1er alinéa, chiffre 2, relative à la compétence juridictionnelle en donnant le catalogue des fors admis par la convention, c'est-à-dire qu'il indique les neuf cas dans lesquels, sous réserve des exceptions prévues au 2e alinéa, la compétence des juridictions de l'un des Etats doit être reconnue dans l'autre Etat. De ce fait, l'article 2 constitue la pierre angulaire de la convention.

Notons que la convention, contrairement à la convention austro-suisse (art. 4), n'admet pas, en matière d'obligations alimentaires fondées sur le droit de famille, le for du demandeur (forum actoris). A Vaduz, les négociateurs liechtensteinois ont en effet demandé d'exclure ce for, connu du droit suisse (cf. art.

144 et 312 CC), mais ignoré du droit de la Principauté. La convention ne serait par conséquent pas applicable à un jugement de paternité suisse rendu contre un ressortissant liechtensteinois qui, lors de l'introduction d'instance, serait domicilié dans la Principauté. La reconnaissance du jugement de paternité pourrait en revanche avoir lieu au Liechtenstein en vertu de l'article 2, 1er alinéa, chiffre 1, de la convention, si le défendeur, à la date de l'introduction d'instance, avait son domicile en Suisse. Le fait que la convention n'admet pas le for du demandeur comme tel n'empêcherait pas non plus la reconnaissance d'un jugement rendu à ce for dans les cas où le chiffre 5 du 1er alinéa reconnaît la compétence des juridictions du pays d'origine en matière d'état, de capacité et de droit de famille. Ainsi, non seulement des jugements de paternité, mais aussi des jugements de divorce «concernant des ressortissants de l'Etat
où la décision a été rendue» pourraient être reconnues en vertu dudit chiffre 6, pourvu - bien entendu - que ces jugements remplissent aussi les autres conditions requises par l'article premier, 1er alinéa, chiffres 1, 3, et 4 de la convention.

Comme nos conventions avec la France (RS 12, 315; art, 1er, 3e al.), l'Autriche (art. 3) et la Belgique (art. 2, lettre/), le chiffre 4 de l'article 2 admet pleinement le for du lieu de l'acte illicite (forum delicti commissi) au moins dans le domaine particulier des accidents de la circulation; à l'instar de la convention avec l'Autriche, il assimile les «cycles avec ou sans moteur» aux «véhicules automobiles». En raison de cette disposition, qui intéresse surtout le tourisme automobile, la garantie constitutionnelle du for du domicile (art, 59 Cst.) ne pourra plus être invoquée par le défendeur domicilié en Suisse à rencontre du jugement d'un tribunal civil liechtensteinois le condamnant à réparer le dommage occasionné par un accident routier survenu dans la Principauté,

717

II est entendu, comme l'ont admis les négociateurs de la convention, que le for du lieu de l'accident vaut aussi pour l'action directe du lésé contre l'assureur en responsabilité civile de l'auteur du dommage.

Les dispositions des chiffres 7 et 8, relatives au for prorogé (forum prorogatum), sont parmi les plus importantes de la convention, car elles constituent un progrès appréciable par rapport aux inconvénients résultant actuellement de la disposition légale liechtensteinoise signalée au début du présent message. Cette disposition - article 53 a de la «Jurisdiktionsnorm» (loi sur la juridiction et la compétence en matière civile) est en effet ainsi conçue (traduction) : «Les conventions entre nationaux et étrangers ou entre nationaux domiciliés sur le territoire national, contenues dans des contrats particuliers ou dans des clauses faisant partie intégrante d'autres contrats, et qui prévoient la compétence d'un tribunal étranger, ne seront désormais valables que si elles sont passées en la forme authentique.

La même règle sera applicable aux dispositions de statuts, contrats de société ou autres contrats de même genre prévoyant une telle compétence, ainsi qu'aux conventions attribuant compétence à un tribunal arbitral devant fonctionner à l'étranger.

En matière de contrats d'assurances toute convention attribuant compétence à un tribunal étranger ou à un tribunal arbitral sera nulle, lorsque le preneur d'assurance est domicilié sur le territoire national ou que l'intérêt assuré se trouve sur ce territoire.

Le tribunal veillera d'office, et cela même en procédure d'exécution forcée ou de faillite, à l'observation de la présente disposition.»

Malgré l'attitude plutôt négative observée, lors de l'entrevue de Berne, par les représentants liechtensteinois à l'égard d'une solution intermédiaire visant la forme authentique, la Division de justice avait concrétisé cette solution dans le projet de convention soumis aux autorités de la Principauté. Bien lui en prit, car à Vaduz les négociateurs liechtensteinois - convaincus sans doute que l'application sans réserve de l'article 53 a de la «Jurisdiktionsnorm» risquerait à la longue d'entraver le développement normal des relations commerciales et juridiques avec la Suisse - acceptèrent telle quelle la solution proposée.

Cette solution, qui représente certainement pour le Liechtenstein une concession substantielle, nous paraît acceptable du point de vue suisse, quand bien même elle s'écarte notablement des règles de nos autres conventions d'exécution et constitue, en matière de prorogation de for, le moins que l'on puisse exiger pour justifier la conclusion d'une convention.

Le chiffre 1 vise la convention de prorogation de for conclue par des parties qui sont toutes deux inscrites au registre du commerce. En pareil cas, il suffit que cette convention soit faite par écrit. L'idée est que les parties sont des commerçants et qu'étant par conséquent versées en affaires elles doivent savoir qu'en se soumettant à la juridiction du tribunal prorogé elles acceptent du même coup de se laisser distraire de leur juge naturel. Un commerçant domicilié en Suisse devra donc savoir qu'en se soumettant par convention écrite à la juridiction du Landgericht de Vaduz il renonce au for du domicile garanti par l'article 59 de la constitution. Quant au commerçant liechtensteinois, il ne devra plus, en passant par simple écrit une convention de prorogation de

718

'

for en faveur d'un tribunal suisse, nourrir l'espoir que si les choses tournent mal pour lui il pourra de toute façon échapper à l'exécution d'un jugement suisse au Liechtenstein en se prévalant de la nullité de l'accord de prorogation de for non revêtu de la forme authentique.

Certes, l'exigence d'une convention écrite peut paraître rigoureuse, dans les cas du chiffre 1, par rapport à la jurisprudence libérale du Tribunal fédéral, laquelle admet, pour la prorogation de for, une simple convention expresse pouvant même être exclusivement verbale. Mais si l'on se place sur le terrain des réalités, c'est-à-dire face à la législation liechtensteinoise, il faut reconnaître que la règle du chiffre 7 mérite d'être approuvée. Elle aura d'ailleurs l'avantage, en exigeant carrément une «convention écrite», de prévenir de nombreux litiges portant sur le point de savoir si une convention «expresse» de prorogation de for, .telle que l'exigent la plupart de nos autres conventions d'exécution, est suffisamment claire et explicite pour emporter renonciation au for ordinaire.

Si le Liechtenstein, par le chiffre 7, a fait une concession à la Suisse en acceptant une dérogation à l'article 53 a de sa «Jurisdiktionsnorm» - considéré comme d'ordre public -, le chiffre 8 est en quelque sorte le prix que la Suisse doit lui payer pour cette concession. Dans les cas visés au chiffre 8, la forme authentique est en effet une condition de validité pour la convention de prorogation de for passée entre parties dont l'une seulement est inscrite au registre du commerce ou dont aucune n'y est inscrite. Du point de vue du Liechtenstein, la forme authentique serait en pareils cas indispensable pour assurer la protection - contre une renonciation irréfléchie à son for ordinaire - de toute partie à un accord de prorogation de for qui n'est pas inscrite au registre du commerce et dont on devrait par conséquent présumer qu'elle n'est pas expérimentée en affaires et pourvue de connaissances juridiques. Alors même qu'on pourrait, à notre avis, pencher pour une solution moins extrême - c'est-à-dire se contenter, là aussi, de la simple convention écrite -, il est en tout cas certain que l'on ne saurait imaginer protection plus efficace des personnes inexpérimentées en affaires.

Notons qu'à.cette protection s'ajoute encore, du moins dans
certains cas, celle de l'article 11 de la loi fédérale du 4 octobre 1930 sur les voyageurs de commerce (RS 10, 214), ainsi conçu: «Est nulle toute convention qui a été conclue avec un voyageur au détail, à l'occasion de la recherche de commandes et par laquelle l'acheteur renonce à son for ordinaire. La nullité sera constatée d'office.»

La législation du Liechtenstein connaît la même disposition, car ladite loi fédérale a été déclarée applicable dans la Principauté en vertu du traité d'union douanière avec la Suisse. Le but de cet article 11 est de protéger les «petites gens» contre l'habitude qu'ont nombre de maisons de commerce, lorsqu'un client leur fait une commande par l'entremise d'un voyageur au détail, de faire souscrire à l'acheteur une clause par laquelle il reconnaît comme for celui du domicile de la maison, pour le cas où la commande donnerait lieu à un différend entre parties. Dans ce domaine particulier assez restreint, l'article 11 est cepen-

719

dant applicable sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que l'acheteur est ou non inscrit au registre du commerce. A vrai dire, alors qu'il était encore à l'état de projet, l'article 11 ne visait que les conventions conclues entre voyageurs au détail et personnes non inscrites au registre du commerce. Les personnes inscrites n'auraient donc pas bénéficié de sa protection. Les chambres ont toutefois supprimé cette distinction et mis sur le même pied tous les clients des voyageurs au détail.

Nous ne pensons pas que la coexistence de cet article 11 et du chiffre 8 de la convention puisse susciter des difficultés. A supposer même qu'un voyageur au détail ait l'idée saugrenue d'amener un client non inscrit au registre du commerce à renoncer à son for ordinaire en passant avec lui, en la forme authentique, une convention de prorogation de for, il est certain que la nullité statuée à l'article 11 frapperait aussi cette convention. En outre, le fait que le chiffre 8 reconnaît la compétence du for ainsi prorogé serait d'ailleurs sans effet, c'està-dire qu'un jugement rendu à ce for ne pourrait de toute façon pas être exécuté en vertu de la convention. En effet, l'article 11 étant d'ordre public, la juridiction de l'Etat de domicile du client du voyageur au détail serait exclusivement compétente, en sorte que d'après le 2e alinéa de l'article 2 de la convention «la compétence des juridictions de l'Etat où la décision a été rendue» ne serait «pas fondée au sens de l'article premier, 1er alinéa, chiffre 2».

Certes, le critère retenu par les chiffres 7 et 8, soit la distinction entre personnes inscrites et personnes non inscrites au registre du commerce, est passablement arbitraire, car nombre de personnes inscrites, artisans ou petits commerçants, ne sont pas plus conscientes de la portée d'une renonciation au for ordinaire que beaucoup de personnes non inscrites. Mais il n'était guère · possible de choisir un autre critère si l'on voulait que la convention, face aux exigences du Liechtenstein en matière de forme authentique, eût une valeur pratique au moins pour la grande majorité des cas de prorogation de for, c'està-dire pour les accords de prorogation passés entre commerçants.

Tandis que les chiffres 7 et 8 concernent la prorogation de for résultant d'une reconnaissance expresse - par «convention
écrite» ou par convention en forme authentique - de la compétence d'un tribunal normalement incompétent pour connaître du litige, le chiffre 9 vise la prorogation de for résultant du fait que le défendeur reconnaît tacitement la compétence de ce tribunal en procédant devant lui au fond du litige.

D'après le chiffre 9, la prorogation de for tacite est à la portée de tout défendeur, «qu 'il soit ou non inscrit au registre du commerce». Cette précision s'imposait en raison de la distinction faite aux deux chiffres précédents quant à la qualité des parties eu égard au registre du commerce. A l'instar de la plupart de nos autres conventions, il faut, pour que la prorogation de for tacite soit valable, que le défendeur ait «procédé au fond sans faire de réserve quant à la compétence, dans le sens de la présente convention, des tribunaux de l'Etat où la décision a été rendue». 11 ne suffit pas que le défendeur décline la compétence du tribunal saisi par le demandeur, car cette compétence peut être fondée

720

en vertu de la lex fori. Ce qui importe, c'est que le défendeur ne fasse pas de «réserve» quant à la compétence dite «internationale» des tribunaux de l'Etat du jugement, cette compétence étant réglée non par la législation interne de cet Etat (lex fori), mais par la convention elle-même, c'est-à-dire par les dispositions de son article 2. Ainsi, le défendeur fera une «réserve» dans le sens de la convention s'il fait connaître, avant d'entrer en matière, qu'il ne se soumet à la procédure qu'à l'égard de l'Etat du jugement, mais qu'il s'opposera à l'exécution du jugement dans l'autre Etat, ce qu'il pourra effectivement faire avec succès si «la compétence des juridictions de l'Etat où la décision a été rendue» n'est pas fondée dans le sens de l'article premier, 1er alinéa, chiffre 2, et de l'article 2.

La convention avec le Liechtenstein s'écarte toutefois sur un point des règles de nos autres conventions, car elle subordonne encore à une autre condition la validité de la prorogation de for tacite. A la demande des négociateurs liechtensteinois, le chiffre 9 a été complété par une restriction visant précisément le cas où le défendeur a procédé au fond sans faire de «réserve». Il faut, en effet, que le défendeur «ait été instruit par le juge de la possibilité dé faire une telle réserve». Les négociateurs de la Principauté ont fait valoir que sans cette restriction la protection des «petites gens» visée, en matière de prorogation de for expresse, par le chiffre 8 ne serait pas assurée dans le cas de prorogation de for tacite. Il se pourrait qu'un défendeur, même inscrit au registre du commerce, procède au fond «sans faire de réserve» pour la simple raison qu'il ignore avoir le droit d'en faire une. Fonder une prorogation de for sur une telle méconnaissance d'un droit serait contraire à l'équité. Nos négociateurs ont pensé pouvoir se rallier à cette manière de voir et ont admis que le fait par le défendeur de procéder au fond sans réserve ne serait concluant que s'il est établi que le juge a instruit le défendeur «de la possibilité de faire une telle réserve».

Cette disposition du chiffre 9 suppose évidemment qu'elle soit connue du juge lui-même, que celui-ci l'applique en fait et que la preuve qu'il l'a appliquée - c'est-à-dire qu'il a «instruit» le défendeur - soit facilement accessible à l'autorité
saisie d'une demande d'exequatur du jugement.

Afin que les juges de notre pays soient renseignés sur cette particularité de la convention avec le Liechtenstein, le Département de justice et police entend demander aux gouvernements cantonaux par voie de circulaire - si les chambres approuvent la convention - de prendre, à l'intention des autorités judiciaires cantonales, les mesures d'information nécessaires en vue d'assurer l'application du chiffre 9 de l'article 2, 1er alinéa, de la convention.

Le 2e alinéa de l'article 2, que nous avons déjà rencontré plus haut en parlant du chiffre 8, est repris presque tel quel de la convention belgo-suisse. Il réserve les cas où le droit de l'Etat dans lequel le jugement est invoqué attribue à cet Etat ou à un autre Etat une juridiction exclusive en la matière dont relève l'objet du litige. Cette réserve en faveur des cas de compétence judiciaire exclusive s'impose si l'on veut que l'Etat qui considère ses propres juridictions comme exclusivement compétentes en certaines matières (p. ex. en matière

721

de statut personnel, de droit de famille ou d'assurances) ne soit pas obligé de reconnaître des décisions émanant de l'autre Etat qui rempliraient les conditions de reconnaissance spéciales prévues par la convention.

Les articles 3 à 6 concernent la procédure de reconnaissance et d'exécution des décisions rendues dans l'un des deux Etats et qui réunissent les conditions prévues aux deux premiers articles de la convention. Ces dispositions, reprises presque telles quelles de nos conventions avec l'Autriche et la Belgique, se passent de commentaires.

D'après l'article 7, la convention s'applique aussi aux sentences arbitrales, aux transactions judiciaires et aux transactions conclues devant des arbitres. Elle assimile ces sentences et transactions dans une large mesure aux décisions judiciaires, puisqu'elle subordonne leur reconnaissance et leur exécution, en tant que leur nature particulière le permet, aux mêmes conditions que les jugements.

La rédaction de l'article 7 ne diffère de la disposition correspondante de la convention austro-suisse qu'en ce que Je 1er alinéa a été complété par une seconde phrase, suivant laquelle les chiffres 7 et 8 de l'article 2, 1er alinéa, sont applicables par analogie au contrat d'arbitrage (compromis ou clause compromissoire), sous réserve de la juridiction exclusive prévue au 2e alinéa de l'article 2. Ce complément s'imposait du fait que l'article 53 a précité de la «Jurisdiktionsnorm» s'applique aussi, en vertu de son 2e alinéa, aux «conventions attribuant compétence à un tribunal arbitral devant fonctionner à l'étranger». Faute d'un tel complément, on aurait pu douter de l'application des chiffres 7 et 8 en matière de compromis ou de clause compromissoire, ces dispositions visant essentiellement les conventions et clauses de prorogation de for. 11 eût pu arriver que le Liechtenstein refusât d'exécuter une sentence arbitrale rendue en Suisse par un tribunal arbitral, si ce tribunal s'était déclaré compétent en raison d'un compromis ou d'une clause compromissoire qui, contrairement aux exigences dudit article 53 a, n'aurait pas été fait par acte authentique. Grâce au complément, toute équivoque est évitée et il est certain que, conformément au chiffre 7 de l'article 2, la simple forme écrite suffira pour tout contrat d'arbitrage passé entre commerçants suisses
et liechtensteinois. Si la forme authentique est nécessaire dans les cas tombant sous l'application du chiffre 8, l'inconvénient n'est pas capital, car il n'arrive guère fréquemment qu'un arbitrage soit convenu entre non-commerçants ou entre parties dont l'une seulement est inscrite au registre du commerce.

La réserve de la «juridiction exclusive» dont parle le complément vise évidemment tous les cas d'interdiction de compromettre ou de transiger prévus par le droit interne de chacun des deux Etats.

Nous avons vu plus haut, en traitant de l'article 2, que les négociateurs de la Principauté n'ont pas accepté de prévoir dans la convention, en matière d'obligations alimentaires fondées sur le droit de famille, la compétence du for du demandeur (forum actoris). Pour atténuer sans doute la déception éprouvée du côté suisse, ils ne se sont toutefois pas opposés à l'insertion d'une disposition concernant l'exécution des «transactions en matière d'entretien passées dans

722

l'un des deux Etats devant un tribunal ou une autorité administrative chargée d'organiser et de surveiller la tutelle». Tel est l'objet de l'article 8. Ces transactions «seront, quelle que soit la nationalité des parties, exécutées dans l'autre Etat, si elles satisfont aux prescriptions des articles précédents, en tant que celles-ci sont applicables». A vrai dire, cette disposition conventionnelle, qui fut rédigée à Vaduz un peu à la hâte dans le «feu de la discussion», soulèvera sans doute, en pratique, quelques questions d'interprétation, puisqu'il s'agira de savoir quelles prescriptions «des articles précédents», visant normalement des décisions judiciaires, pourront être considérées comme applicables à ce genre de transactions tant judiciaires (passées devant un tribunal) qu'extrajudiciaires (passées devant une autorité tutélaire administrative). Il semble pourtant qu'en raison de la nature contractuelle de ces transactions certaines prescriptions de la convention - par exemple le chiffre 1 de l'article 2, 1er alinéa, relatif au domicile du «défendeur» - ne devraient pas pouvoir leur être appliquées. Il appartiendra à la jurisprudence, en cas de contestations, de régler ces questions d'interprétation.

La valeur pratique de l'article 8 n'est néanmoins pas douteuse. Du fait que la nationalité des parties à une transaction en matière d'entretien ne joue pas de rôle, la convention permettra d'obtenir notamment l'exécution de maintes transactions passées devant les autorités tutélaires en matière de paternité.

L'article 9, 1er alinéa, règle la question de la litispendance en précisant les conditions dans lesquelles le tribunal saisi d'un litige déjà pendant devant l'un des tribunaux de l'autre Etat devra refuser d'office de l'instruire à son tour.

Le tribunal qui se dessaisit d'un litige en vertu du 1er alinéa ne pourra toutefois pas refuser d'ordonner lui-même, sur requête, les mesures provisoires ou conservatoires qui devraient être prises dans son ressort. Le 2e alinéa prévoit en effet que de telles mesures «pourront être requises des autorités de chacun des deux Etats, quelle que soit la juridiction saisie du fond».

En prévoyant que la convention «ne touche pas aux dispositions des arrangements internationaux auxquels participent les deux Etats», l'article 10 vise surtout l'article 56 des
conventions internationales concernant le transport des marchandises (CIM) et des voyageurs (GIV) par chemins de fer (RO 1964, 1007 et 1082).

Les articles 11, 12 et 13 s'expliquent d'eux-mêmes.

A la demande du Liechtenstein, la convention prévoit, à l'article 14, une procédure de conciliation et d'arbitrage pour les cas où un différend, qui ne pourrait pas être réglé par la voie diplomatique, s'élèverait au sujet de l'interprétation ou de l'application de la convention.

Bien que la Suisse et la Principauté de Liechtenstein soient toutes deux parties au statut de la Cour internationale de justice et reconnaissent comme obligatoire la juridiction de la Cour conformément à l'article 36 de son statut (RO 1959, 300 et 309), la procédure instituée par l'article 14 de la convention, plus simple et moins coûteuse qu'une procédure devant la Cour internationale

723

de justice, se justifie en raison des relations particulièrement étroites existant entre les deux Etats contractants.

"L'article 15 concerne la réserve de ratification, la date de l'entrée en vigueur et la dénonciation de la convention.

La convention pouvant être dénoncée en tout temps, l'arrêté fédéral dont nous vous soumettons le projet en annexe ne serait pas soumis au referendum facultatif prévu à l'article 89, 4e alinéa, de la constitution. Quant à la compétence de l'Assemblée fédérale pour prendre cet arrêté, elle se fonde sur les articles 8 et 85, chiffre 5 de la constitution.

L'absence actuelle, entre la Suisse et le Liechtenstein, de régime conventionnel en matière d'exécution des jugements civils présente de nombreux inconvénients. Ainsi, il est rare que des jugements civils suisses puissent être exécutés dans la Principauté et les cas où un jugement liechtensteinois peut être exécuté en Suisse ne sont pas plus fréquents. Cela tient à ce que tant les cantons suisses - à l'exception de quatre (Berne, Neuchâtel, Schaffhouse et Tessin) - que le Liechtenstein subordonnent l'exécution des jugements étrangers à la garantie de réciprocité. En outre, un jugement suisse, même rendu dans un canton n'exigeant pas la garantie de réciprocité, ne peut pas être exécuté au Liechtenstein s'il émane d'un tribunal dont la compétence se fonde sur une convention de prorogation de for ne répondant pas aux exigences de forme du droit liechtensteinois (art. 53 a de la « Jurisdiktionsriorm»).

Notons qu'en 1926 le canton de Lucerne a échangé avec le Liechtenstein une déclaration de réciprocité en matière d'exécution de jugements civils (v.

Burckhardt, Le droit fédéral suisse, vol. IV, n° 1657); mais même cette déclaration n'empêche pas la Principauté de refuser, en vertu de son ordre public, l'exécution d'un jugement émanant d'un tribunal lucemois dont la compétence repose sur une convention de prorogation de for qui ne satisfait pas aux exigences de forme du droit liechtensteinois.

La convention que nous soumettons à votre approbation remédierait non pas à tous les inconvénients actuels en matière d'exécution des jugements, mais à une bonne partie d'entre eux. En particulier, elle apporterait un progrès appréciable sur le plan des relations commerciales entre la Suisse et le Liechtenstein. Nous vous
recommandons donc de l'approuver en adoptant le projet d'arrêté fédéral ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 13 novembre 1968.

1S3S9

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, Spühler Le chancelier de la Confédération, Huber

724 (Projet)

Arrêté fédéral approuvant la convention entre la Confédération suisse et la Principauté de Liechtenstein sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales en matière civile

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu les articles 8 et 85, chiffre 5, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 13 novembre 1968, arrête:

Article unique La convention entre la Confédération suisse et la Principauté de Liechtenstein sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales en matière civile, signée le 25 avril 1968, est approuvée.

Le Conseil fédéral est autorisé à la ratifier.

725

Traduction du texte original allemand

Convention entre la Confédération suisse et la Principauté de Liechtenstein sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales en matière civile

Le Conseil fédéral suisse et Son Altesse Serenissime le Prince régnant de Liechtenstein, désireux de régler la reconnaissance et l'exécution réciproques de décisions judiciaires et de sentences arbitrales en matière civile, ont résolu de conclure une convention en ce domaine. A cet effet, ils ont désigné pour leurs plénipotentiaires, savoir Le Conseil fédéral suisse: Monsieur Walter Thalmann, directeur de la Division de la justice; Son Altesse Serenissime le Prince régnant de Liechtenstein: Monsieur Gérard Batliner, chef du gouvernement de la Principauté de Liechtenstein; lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs reconnus en bonne et due forme, sont convenus des dispositions suivantes : Article premier L'autorité des décisions judiciaires rendues en matière civile dans l'un des deux Etats sera reconnue dans l'autre, si elles réunissent les conditions suivantes: 1. La reconnaissance de la décision ne doit pas être contraire à l'ordre public de l'Etat où la décision est invoquée ; en particulier, l'exception de chose jugée ne doit pas s'opposer à la reconnaissance d'après la loi de cet Etat;

726:

2. La décision doit émaner d'une juridiction compétente selon les dispositions de l'article 2; 3. La décision doit être passée en force de chose jugée d'après la loi de l'Etat où elle a été rendue; 4. En cas de jugement par défaut, l'acte ou la citation qui a introduit l'instance doit avoir été remis en temps utile à la partie défaillante, soit en mains propres, soit à son mandataire. Si la notification devait avoir lieu sur le territoire de l'Etat où la décision est invoquée, elle doit avoir été faite par la voie de l'entraide judiciaire.

Les décisions rendues dans un procès pénal sur conclusions de droit civil, ainsi que les décisions infligeant des amendes d'ordre dans un procès civil ou ordonnant un séquestre ou toute autre mesure provisionnelle, ne pourront être reconnues ni exécutées en vertu de la présente convention. Il en sera de même des décisions rendues en matière de faillite ou de concordat.

Les décisions d'autorités administratives chargées en Suisse d'organiser et de surveiller la tutelle, ainsi que les transactions conclues devant ces autorités seront, aux fins de la présente convention, assimilées aux décisions et transactions judiciaires.

Article 2 La compétence des juridictions de l'Etat où la décision a été rendue sera fondée au sens de l'article premier, 1er alinéa, chiffre 2, dans les cas suivants: 1. Lorsqu'à la date de l'introduction de l'instance, le défendeur avait son domicile ou, s'il s'agit d'un défendeur qui n'est pas une personne physique, son siège dans l'Etat où la décision a été rendue; 2. Lorsque le défendeur ayant dans l'Etat où la décision a été rendue un établissement commercial ou industriel ou une succursale, y a été assigné pour des prétentions résultant de leur exploitation; 3. En cas de demande reconventionnelle connexe à la demande principale, lorsque le tribunal qui a rendu la décision était compétent, dans le sens de la présente convention, pour connaître de la demande principale; 4. Lorsque la décision vise la réparation de dommages résultant d'accidents survenus dans l'Etat où la décision a été rendue et causés par l'emploi de véhicules automobiles ou de cycles avec ou sans moteur; 5. Lorsque l'action avait pour objet un droit réel sur un immeuble situé dans l'Etat où la décision a été rendue; 6. En matière d'état, de capacité ou de droit de famjlle
concernant des ressortissants de l'Etat où la décision a été rendue; 7. Lorsque les parties, toutes deux étant inscrites au registre du commerce, se sont soumises par une convention écrite à la compétence du tribunal qui a statué.sur le fond du litige;

727

8. Lorsque les parties, l'une d'elles seulement étant inscrite au registre du commerce ou aucune d'elles n'y étant inscrite, se sont soumises par une convention passée en la forme authentique à la compétence du tribunal qui a statué sur le fond du litige; 9. Lorsque le défendeur, peu importe qu'il soit ou non inscrit au registre du commerce, a procédé au fond sans faire de réserve quant à la compétence, dans le sens de la présente convention, des tribunaux de l'Etat où la décision a été rendue, bien qu'il ait été instruit par le juge de la possibilité de faire une telle réserve.

Nonobstant les dispositions du premier alinéa, chiffres 1,2, 3, 7, 8 et 9 du présent article, la compétence des juridictions de l'Etat où la décision a été rendue n'est pas fondée au sens de l'article premier, 1er alinéa, chiffre 2, dans les cas où, d'après le droit de l'Etat où la décision est invoquée, une juridiction de cet Etat ou d'un autre Etat est exclusivement compétente en la matière dont relève l'objet du litige.

Article 3 Les décisions rendues par les juridictions de l'un des deux Etats et dont la reconnaissance est invoquée dans l'autre ne devront faire l'objet d'aucun examen autre que celui des conditions prévues à l'article premier de la présente convention. En aucun cas, il ne sera procédé à un nouvel examen du fond de ces décisions.

Article 4 Les décisions rendues par les juridictions de l'un des deux Etats et qui réunissent les conditions prévues à l'article premier, pourront donner lieu à exécution forcée dans l'autre Etat si elles sont exécutoires dans l'Etat où elles ont été rendues.

La compétence et la procédure en matière d'exécution forcée sont réglées par la législation de l'Etat où l'exécution est requise.

Article 5 La partie qui requiert la reconnaissance ou l'exécution d'une décision devra produire : 1. La décision en original ou en expédition authentique; 2. Une attestation que la décision est passée en force de chose jugée et, s'il y a lieu, qu'elle est devenue exécutoire; cette attestation sera délivrée par le tribunal qui a rendu la décision ou par le greffier du tribunal; 3. En cas de jugement par défaut, une copie de l'acte ou de la citation qui a introduit l'instance, ainsi qu'une attestation indiquant le mode et la date de notification à la partie défaillante ; 4. Une copie certifiée
conforme de l'exposé de demande ou toutes autres pièces appropriées, lorsque l'état des faits à la base de la décision ne ressort pas de celle-ci assez clairement pour permettre l'examen prévu à l'article premier;

728

5. Le cas échéant, une traduction des pièces indiquées sous chiffres 1 à 4 rédigée dans la langue officielle de l'autorité auprès de laquelle la reconnaissance ou l'exécution de la décision est requise. Cette traduction sera certifiée conforme d'après la législation de l'un ou de l'autre Etat.

Les documents à produire en vertu du présent article n'auront besoin d'aucune légalisation.

Article 6 L'examen de la demande d'exécution ne portera que sur les conditions prévues à l'article premier de la présente convention et sur les documents à produire conformément à l'article 5. En aucun cas, il ne sera procédé à un nouvel examen du fond de la décision.

Article 7 Les sentences arbitrales rendues dans l'un des deux Etats seront reconnues et exécutées dans l'autre Etat si elles satisfont aux prescriptions des articles précédents, en tant que celles-ci sont applicables. En particulier, l'article 2, 1er alinéa, chiffres 7 et 8, est applicable par analogie au contrat d'arbitrage, (compromis ou clause compromissoire), sous réserve de la juridiction exclusive prévue au 2e alinéa.

Il en sera de même pour les transactions judiciaires ou pour les transactions conclues devant des arbitres.

L'attestation que la sentence arbitrale ou la transaction conclue devant des arbitres est passée en force de chose jugée et qu'elle est devenue exécutoire est délivrée en Suisss par l'autorité compétente du canton où la sentence arbitrale a été rendue ou la transaction conclue, dans la Principauté de Liechtenstein par le Landgericht à Vaduz.

Article 8 Les transactions en matière d'entretien passées dans l'un des deux Etats devant un tribunal ou une autorité administrative chargée d'organiser et de surveiller la tutelle seront, quelle que soit la nationalité des parties, exécutées dans l'autre Etat, si elles satisfont aux prescriptions des articles précédents, en tant que celles-ci sont applicables.

Article 9 Lorsqu'un litige est pendant devant un tribunal de l'un des deux Etats et que la décision sur le fond de la cause devra probablement être reconnue dans l'autre Etat, un tribunal de cet autre Etat refusera d'instruire un litige porté devant lui ultérieurement et concernant le même objet et les mêmes parties.

Les mesures provisoires ou conservatoires prévues par les législations suisse et liechtensteinoise pourront être requises des autorités de chacun des deux Etats, quelle que soit la juridiction saisie du fond.

729

Article 10 La présente convention ne touche pas aux dispositions des arrangements internationaux auxquels participent les deux Etats.

Article 11 Les dispositions de la présente convention s'appliqueront, sous réserve de l'article 2, 1er alinéa, chiffre 6, quelle que soit la nationalité des parties.

Article 12 La présente convention s'appliquera aux décisions judiciaires, sentences arbitrales et transactions intervenues après son entrée en vigueur.

Article 13 Le département fédéral de justice et police et le gouvernement de la Principauté de Liechtenstein se communiqueront directement, sur requête, des renseignements juridiques concernant les questions que soulèverait l'application de la présente convention. La liberté de décision des tribunaux demeure intacte.

Article 14 Tout différend qui s'élèverait au sujet de l'interprétation ou de l'applicacation de la présente convention et qui ne pourrait pas être réglé par la voie diplomatique dans un délai de six mois sera, sur requête de l'un des deux Etats, soumis à une commission chargée de rechercher une solution du litige et composée d'un représentant de chacun des deux gouvernements.

Si l'un des deux Etats ne désigne pas son représentant et ne défère pas, dans un délai de deux mois, à la demande de l'autre Etat de procéder à cette désignation, ledit représentant sera nommé, sur requête de ce dernier Etat, par le président de la Cour internationale de justice.

Au cas où les deux représentants ne parviendraient pas à régler le différend dans les trois mois qui suivent la date à laquelle il leur a été soumis, ils désigneront d'un commun accord un troisième membre de la commission qu'ils choisiront parmi les ressortissants d'un Etat tiers. A défaut d'accord sur le choix de ce membre, dans un délai de deux mois, l'un ou l'autre des deux Etats pourra inviter le président de la Cour internationale de justice à désigner le troisième membre de la commission; celle-ci exercera alors les fonctions d'un tribunal arbitral.

En tant que les deux Etats n'en décident pas autrement, le tribunal arbitral réglera lui-même sa procédure. Il délibérera à la majorité des voix; sa décision sera définitive et obligatoire.

Chacun des deux Etats assumera les frais occasionnés par l'activité de l'arbitre nommé par lui. Ceux du président seront assumés à parts égales par les deux Etats.

Ftuille fédérale. 120e année. Vol. I.

49

730

Article 15 La présente convention sera ratifiée et les instruments de ratification seront échangés à Berne.

La convention entrera en vigueur deux mois après l'échange des instruments de ratification.

Elle pourra être dénoncée en tout temps par chacun des deux Etats; toutefois, elle demeurera en vigueur encore un an après la dénonciation.

En foi de quoi, les plénipotentiaires ont signé la présente convention en double original et l'ont revêtue de leur sceau.

Fait à Vaduz le 25 avril 1968.

Pour la Confédération suisse:

Pour la Principauté de Liechtenstein:

(signé) Thalmann

(signé) Batliner

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation de la convention entre la Suisse et la Principauté de Liechtenstein sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales en matière civile ...

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1968

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

47

Cahier Numero Geschäftsnummer

10088

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

22.11.1968

Date Data Seite

713-730

Page Pagina Ref. No

10 098 960

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.