19.027 Message concernant la loi fédérale sur l'amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches du 22 mai 2019

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet de loi fédérale sur l'amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches, en vous proposant de l'adopter.

Simultanément, nous vous proposons de classer les interventions parlementaires suivantes: 2010

P

09.4199

Congé rémunéré d'une durée suffisante pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé (E 2.3.10, Seydoux-Christe)

2013

P

13.3366

Prévoir des allocations d'assistance et des possibilités de décharge pour les personnes qui prennent soin d'un proche (N 25.4.13, CSSS-N)

2016

P

16.3868

Pour une couverture LPP adéquate des proches aidants (N 16.12.16, Müller-Altermatt)

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

22 mai 2019

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2019-0856

3941

Condensé Les besoins croissants en assistance et en soins auxquels la santé publique ne peut faire face à elle seule, les nouvelles formes de vie de famille et la hausse continue du taux d'activité professionnelle des femmes ont placé sous les feux de l'actualité politique la prise en charge de membres de la famille atteints dans leur santé. Ces raisons ont amené le Conseil fédéral à élaborer une nouvelle loi fédérale portant sur l'amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches.

Contexte Le projet de révision de plusieurs textes de loi découle de divers rapports commandés ces dernières années par le Parlement et le Conseil fédéral en vue d'améliorer la situation des proches aidants. On relèvera notamment le postulat 09.4199 Seydoux-Christe «Congé rémunéré d'une durée suffisante pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé», le postulat 13.3366 de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national «Prévoir des allocations d'assistance et des possibilités de décharge pour les personnes qui prennent soin d'un proche» et la mesure 65 figurant à l'art. 18 de l'arrêté fédéral du 15 juin 2012 sur le programme de la législature («Encourager la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches»; art. 18).

Dans son rapport de juin 2011 «Soins palliatifs, prévention du suicide et assistance organisée au suicide», le Conseil fédéral a en outre chargé le Département fédéral de l'intérieur (DFI) de proposer des mesures pour mieux concilier l'exercice d'une activité professionnelle et la prise en charge de membres de la famille atteints dans leur santé. Les mesures du domaine d'action no 1 «Garantir la qualité de la vie» figurant parmi les priorités fixées dans la stratégie Santé2020 adoptée par le Conseil fédéral le 23 janvier 2013 visent elles aussi à adapter les structures, les processus et les offres des systèmes ambulatoire et hospitalier de manière à répondre à l'évolution sociétale, médicale et technique actuelle.

Dans son rapport du 5 décembre 2014 «Soutien aux proches aidants», le Conseil fédéral a établi les besoins existants et adopté un plan d'action de soutien et de décharge en faveur des proches aidants. C'est en vue de concrétiser les modifications de loi proposées dans ce plan
qu'a été élaboré le présent projet de loi fédérale sur l'amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches.

Actuellement, la loi sur le travail, qui régit les rapports de travail de droit privé et, en partie, ceux de droit public, prévoit uniquement un congé de trois jours au plus pour la garde d'un enfant malade, sans faire mention de la prise en charge d'autres membres de la famille ou d'autres proches exigeant des soins, ni de l'obligation de continuer à verser le salaire. Le code des obligations, qui règle les rapports de travail de droit civil, prévoit le maintien du paiement du salaire, limité dans le temps, uniquement lorsque le travailleur prend en charge ses enfants, son époux ou épouse ou son/sa partenaire enregistré/e, et non lorsqu'il prend soin de la personne avec

3942

laquelle il fait ménage commun, de ses parents ou de ses frères et soeurs. L'obligation de continuer à verser le salaire perdure en outre uniquement jusqu'à ce qu'il ait trouvé une solution de remplacement appropriée ou, dans le cas d'un enfant malade ou victime d'un accident, jusqu'à ce que la prise en charge par les parents ne soit plus considérée comme nécessaire pour des raisons médicales. Il n'existe pas de véritable compensation de la perte de gain causée par une absence professionnelle de longue durée due à la survenance d'un besoin prononcé de prise en charge.

Des mesures de soutien supplémentaires existent, mais uniquement pour les parents d'enfants atteints d'une infirmité congénitale.

Une bonification pour tâches d'assistance de l'AVS est octroyée à tout assuré qui prend en charge un parent en ligne ascendante ou descendante, son époux ou épouse, ses beaux-parents, l'enfant d'un autre lit, son frère ou sa soeur ayant droit à une allocation pour impotence au moins moyenne de l'AVS, de l'AI, de l'assuranceaccidents ou de l'assurance militaire. Si la personne exigeant des soins perçoit une allocation pour impotence faible seulement, le proche aidant ne touche pas de bonification pour tâches d'assistance. Il en va de même si la personne exigeant des soins est le partenaire du proche aidant.

En vertu du droit en vigueur, le versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses de l'AI est interrompu lorsque l'enfant doit être hospitalisé. Le présent projet prévoit de n'interrompre ce versement qu'après que l'enfant a passé un mois civil entier à l'hôpital.

Contenu du projet Le présent projet contient les mesures suivantes visant à permettre aux personnes concernées de mieux concilier activité professionnelle et prise en charge de proches: ­

l'employeur sera tenu de continuer à verser le salaire de l'employé si celuici est absent du travail trois jours au plus par cas, mais dix jours au plus par année, pour l'organisation de la prise en charge nécessaire d'un membre de la famille ou du partenaire atteints dans leur santé en raison d'une maladie ou d'un accident;

­

les parents qui prennent en charge un enfant atteint gravement dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident percevront une allocation de prise en charge et bénéficieront d'un congé de prise en charge d'une durée maximale de quatorze semaines à prendre dans un délai-cadre de 18 mois; dès la naissance du droit, ils bénéficieront d'une protection contre le licenciement pendant six mois et ne pourront pas voir leurs vacances réduites;

­

le droit à une bonification pour tâches d'assistance de l'AVS sera étendu: il sera octroyé au proche aidant pour la prise en charge d'une personne atteinte d'impotence faible, mais aussi de son partenaire;

­

le versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses de l'AI à un enfant sera interrompu uniquement après que celui-ci aura passé un mois civil entier à l'hôpital.

3943

FF 2019

Table des matières Condensé

3942

1

Contexte 1.1 Nécessité d'agir et objectifs 1.1.1 Assistance et soins dispensés par des proches 1.1.2 Défis en matière de politique de la santé 1.1.3 Défis en matière de politique sociale 1.1.4 Conciliation entre vie professionnelle et prise en charge de proches 1.2 Législation actuelle 1.2.1 Absences professionnelles de courte durée 1.2.2 Absences professionnelles de longue durée 1.2.3 Bonifications de l'AVS pour tâches d'assistance 1.2.4 Allocation pour impotent et supplément pour soins intenses de l'AI 1.3 Rapport avec le programme de législature et les stratégies du Conseil fédéral 1.4 Classement d'interventions parlementaires 1.4.1 Postulat 09.4199 Seydoux-Christe «Congé rémunéré d'une durée suffisante pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé» du 10 décembre 2009 1.4.2 Postulat 13.3366 CSSS-N «Prévoir des allocations d'assistance et des possibilités de décharge pour les personnes qui prennent soin d'un proche» du 25 avril 2013 1.4.3 Postulat 16.3868 Müller-Altermatt «Pour une couverture LPP adéquate des proches aidants» du 30 septembre 2016

3947 3947 3947 3947 3950

2

Procédure de consultation

3965

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

3967

4

Grandes lignes du projet 4.1 Nouvelle réglementation proposée 4.1.1 Absences professionnelles de courte durée dans le CO 4.1.2 Coordination avec la loi sur le travail 4.1.3 Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident (allocation de prise en charge) 4.1.3.1 Introduction 4.1.3.2 Ayants droit 4.1.3.3 Durée du congé et allocation 4.1.3.4 Montant et calcul de l'allocation de prise en charge

3969 3969 3969 3970

3944

3950 3952 3952 3957 3957 3958 3958 3959 3959

3960 3960

3971 3971 3972 3973 3974

FF 2019

4.1.3.5 4.1.3.6

Coordination avec les autres assurances sociales Dispositions complémentaires et coordination avec le code des obligations 4.1.4 Extension des bonifications pour tâches d'assistance 4.1.5 Adaptation du droit à l'allocation pour impotent et au supplément pour soins intenses en cas de séjour à l'hôpital Harmonisation des tâches et des finances Mise en oeuvre 4.3.1 Absences professionnelles de courte durée 4.3.2 Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident 4.3.3 Extension du droit aux bonifications pour tâches d'assistance de l'AVS

3974

Commentaire des dispositions 5.1 Code des obligations (CO) 5.2 Loi sur le travail (LTr) 5.3 Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS) 5.4 Loi fédérale sur l'assurance-invalidité (LAI) 5.5 Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP) 5.6 Loi fédérale sur l'assurance-accidents (LAA) 5.7 Loi sur les allocations pour perte de gain (LAPG) 5.8 Loi fédérale sur les allocations familiales dans l'agriculture (LFA)

3979 3979 3981 3982 3982

Conséquences 6.1 Conséquences financières pour les assurances sociales 6.1.1 Régime des allocations pour perte de gain (APG) 6.1.2 Assurance-vieillesse et survivants (AVS) 6.1.3 Assurance-invalidité (AI) 6.2 Conséquences pour la Confédération en matière de finances et de personnel 6.2.1 Absences professionnelles de courte durée 6.2.2 Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident 6.2.3 Adaptation du droit à l'allocation pour impotent et au supplément pour soins intenses en cas de séjour à l'hôpital 6.3 Conséquences pour les cantons et les communes ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

3987 3987 3987 3988 3988

4.2 4.3

5

6

3975 3976 3976 3977 3978 3978 3978 3978

3983 3983 3983 3987

3989 3989 3989 3989 3990

3945

FF 2019

6.4

6.5

6.6 7

Conséquences pour les entreprises et l'économie 6.4.1 Étude relative à l'analyse d'impact de la réglementation 6.4.2 Absences professionnelles de courte durée 6.4.3 Absences professionnelles de longue durée Conséquences sociales 6.5.1 Absences professionnelles de courte durée 6.5.2 Absences professionnelles de longue durée 6.5.3 Extension du droit aux bonifications pour tâches d'assistance de l'AVS Conséquences environnementales

Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité 7.1.1 Absences professionnelles de courte durée 7.1.2 Allocation pour les parents qui prennent en charge un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident 7.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 7.2.1 Absences professionnelles de courte durée 7.2.2 Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident 7.3 Forme de l'acte à adopter 7.4 Assujettissement au frein aux dépenses 7.5 Délégation de compétences législatives 7.6 Protection des données

3990 3990 3991 3995 3996 3996 3996 3996 3997 3997 3997 3997 3997 3998 3998 3998 4000 4000 4000 4000

Annexe: Budget du régime des APG avec un congé de prise en charge

4002

Loi fédérale sur l'amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches (Projet)

4005

3946

FF 2019

Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs

1.1.1

Assistance et soins dispensés par des proches

L'assistance et les soins que des proches fournissent à des enfants ou à des adultes qui en ont besoin sont irremplaçables. Lors d'urgences médicales, les proches se voient souvent contraints d'assurer soudainement l'accompagnement ou la prise en charge d'un membre de leur famille. Les personnes qui s'occupent de proches malades ou nécessitant une aide ont essentiellement pour tâches de fournir un soutien psychologique et social, d'effectuer des tâches ménagères, de gérer les transports et de régler des questions organisationnelles et administratives. Si elles sont amenées à prodiguer des soins, leur apport vient compléter les soins professionnels dispensés par les services d'aide et de soins à domicile, les hôpitaux ou les homes.

Dans le cadre de l'assistance et des soins, les proches, tout comme les personnes qu'ils prennent en charge, traversent des phases critiques marquées aussi bien par la peur et le doute que par l'espoir. Les inconnues sont nombreuses et l'évolution de la maladie est incertaine. On observe ainsi que les proches aidants sont souvent dépassés, surmenés et finissent par souffrir d'épuisement et d'autres problèmes de santé.

Lorsqu'ils exercent en parallèle une activité professionnelle, les difficultés à concilier leurs deux fonctions peuvent poser des problèmes supplémentaires, voire mettre en danger leur carrière et leurs moyens de subsistance.

La société ne devrait pas exercer de pression sur les individus pour qu'ils soignent et accompagnent eux-mêmes le plus possible leurs proches. Pour les personnes qui sont néanmoins disposées à assurer cette prise en charge, il faut introduire des mesures leur permettant d'assumer au mieux de telles tâches s'ils exercent une activité professionnelle.

1.1.2

Défis en matière de politique de la santé

Grâce à de bonnes conditions de vie et à un système de santé convenable, la population suisse jouit d'une forte longévité. Il est aujourd'hui possible de traiter de nombreuses maladies qui, par le passé, étaient pratiquement toujours mortelles. Les phases graves d'une maladie impliquent cependant souvent une prise en charge et des soins très lourds, et des dommages indirects entraînant parfois des atteintes définitives à la santé ne peuvent pas toujours être évités.

Enfants gravement atteints dans leur santé en raison d'une maladie ou d'un accident Grâce aux progrès médico-thérapeutiques, la plupart des enfants atteints de maladies incurables qui seraient autrefois morts précocement peuvent aujourd'hui recouvrer la santé ou atteindre l'âge adulte avec certaines limitations liées à leur maladie. Chez 3947

FF 2019

les enfants, les phases aiguës d'une maladie nécessitent un investissement important dans la prise en charge étant donné qu'ils doivent être accompagnés par l'un de leurs parents à chaque visite chez le médecin ou à chaque hospitalisation.

Les maladies et les accidents provoquant de graves problèmes de santé sont souvent synonymes de longues ou de multiples hospitalisations (cf. tableau 1). Pour l'année 2017, l'Office fédéral de la statistique (OFS) recense dans sa Statistique médicale des hôpitaux, pour les enfants et les adolescents, près de 8900 séjours hospitaliers de plus d'une semaine. Environ 4750 hospitalisations ont duré plus de deux semaines.

Quelque 65 % de ces séjours hospitaliers concernaient des jeunes âgés d'au moins 12 ans. En 2017, 8100 enfants et adolescents ont été hospitalisés à plusieurs reprises, dont 2150 l'ont été au moins trois fois. Cette même année, 180 enfants ont subi plus de huit hospitalisations. Par ailleurs, quelque 9500 familles avaient un enfant atteint d'une infirmité, parfois grave, la plupart du temps congénitale, exigeant une prise en charge permanente1.

Tableau 1 Nombre de séjours hospitaliers par classe d'âge et par durée du séjour en 2017 Classe d'âge

Durée du séjour 1 à 2 jours

3 à 7 jours

8 à 14 jours

15 jours et plus

Total

De 91 jours à 5 ans De 6 à 11 ans De 12 à 17 ans

19 462 10 906 16 749

7 922 3 537 7 942

1 526 750 1 864

915 737 3 096

29 825 15 930 29 651

Total

47 117

19 401

4 140

4 748

75 406

Source: Évaluation OFS, Statistique médicale des hôpitaux. Nombre de cas concernant des patients âgés de 3 mois à 17 ans (âge révolu au moment de l'hospitalisation) sans les cas traités en ambulatoire.

Problèmes de santé chez les adultes L'enquête suisse sur la santé réalisée en 2017 révèle qu'environ 40 % des personnes âgées de 50 à 64 ans souffrent d'une ou de plusieurs maladies chroniques. Ce pourcentage augmente avec l'âge et dépasse 70 % chez les personnes de plus de 80 ans.

Les maladies chroniques peuvent certes être traitées, mais pas guéries. Compte tenu du vieillissement de la population, le nombre absolu de personnes atteintes d'une ou de plusieurs maladies chroniques continuera à progresser au cours des prochaines décennies. Il s'agit dans la plupart des cas de maladies cardiovasculaires, de cancers, de maladies des voies respiratoires, de diabètes, de dépressions et de maladies musculosquelettiques. Le grand âge est souvent aussi lié à l'apparition de troubles dégénératifs du cerveau, comme la démence, qui peuvent considérablement restreindre la possibilité de vivre de manière autonome.

1

Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Statistique AI 2017, Berne, p. 38.

3948

FF 2019

En conséquence, de plus en plus de personnes vivent avec des problèmes de santé pendant une longue période et nécessitent, en cas de forte détérioration de leur état de santé, mais aussi souvent dans leur quotidien, une assistance et des soins dispensés par des professionnels, par des membres de la famille ou par d'autres proches2.

Dernière phase de vie Indépendamment de l'âge de la personne malade et tributaire de soins, la dernière phase de vie requiert de la part des proches un degré de prise en charge considérable.

Une étude réalisée dans le cadre du Programme national de recherche «Fin de vie» (PNR 67) révèle que les personnes les plus importantes pour préserver la qualité de vie d'une personne en fin de vie sont ses proches3. Au vu de l'évolution démographique, le nombre de décès annuel devrait passer de 64 200 en 2015 à environ 83 200 en 20354. Près de 60 % des décès enregistrés font suite à une maladie évolutive grave (par ex. cancer). La durée de la phase de maladie est variable. Dans les cas de démence, elle peut aller jusqu'à dix ans, en fonction de la forme et de l'évolution de la maladie5.

Recours aux prestations de soins et d'assistance Le recours aux prestations fournies par des organisations d'aide et de soins à domicile est un indicateur important pour établir les besoins de prise en charge à domicile. Selon la Statistique de l'aide et des soins à domicile de l'OFS, le recours aux prestations est en hausse constante depuis 2011. Entre 2011 et 2017, le nombre de personnes tributaires de prestations d'aide et de soins à domicile a ainsi progressé de 39 %: alors qu'en 2011, plus de 250 000 personnes ont bénéficié de ces services, elles étaient environ 350 000 en 20176, soit un peu plus de 4 % de la population suisse. En 2017, plus de 44 % des personnes nécessitant de l'aide étaient âgées d'au moins 80 ans, et les deux tiers étaient des femmes. Souvent, les personnes qui ont besoin d'assistance sollicitent aussi bien des soins que de l'aide au ménage: en 2017, le nombre moyen d'heures facturées par personne pour des prestations de soins s'élevait à 54, contre 51 pour l'économie domestique et l'accompagnement social 7.

2

3

4 5 6 7

Berthod Marc-Antoine, Papadaniel Yannis, Brzak Nicole. Les proches aidants: entre monde du travail et accompagnement de fin de vie, Lay Summary, End of Life National Research Programme NRP 67, Lausanne, 2016.

Borasio Gian D., Bernard Mathieu, Gamondi Palmesin Claudia. Meaning in life, personal values, and spirituality at the end of life. Lay Summary, End of Life National Research Programme NRP 67, Lausanne, 2016.

Office fédéral de la statistique (OFS): Scénarios de l'évolution de la population de la Suisse 2015­2045, Neuchâtel, 2015, p. 9.

www.ofsp.admin.ch > Stratégie & politique > Stratégies nationales en matière de santé > Démences www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > 14 - Santé > Bases statistiques et enquêtes > Enquêtes > Statistique de l'aide et des soins à domicile www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > 14 - Santé > Système de santé > Aide et soins à domicile

3949

FF 2019

1.1.3

Défis en matière de politique sociale

Parallèlement aux services professionnels et institutionnels d'assistance et de soins, la prise en charge assurée bénévolement par des membres de la famille ou d'autres proches représente une ressource importante pour la société. Il est cependant inacceptable que les tâches d'assistance et de soins entraînent un risque de pauvreté pour leurs prestataires8. Une étude internationale à laquelle la Suisse a participé indique que les parents d'enfants atteints d'un cancer voient leur revenu baisser sensiblement et présentent un risque de pauvreté accru. Les parents ayant un faible niveau de formation sont particulièrement menacés9.

La priorité consiste donc à introduire des mesures permettant de mieux concilier vie professionnelle et prise en charge de proches. Ces mesures sont d'autant plus indispensables que les femmes, qui assumaient autrefois la majorité des tâches d'assistance non rémunérées, exercent aujourd'hui pour la plupart une activité professionnelle. Depuis 1991, le taux d'activité des femmes âgées de 15 à 64 ans ne cesse d'augmenter: en 2018, il s'élevait ainsi à 79,9 %, contre 88,5 % pour les hommes10.

Pour pouvoir exploiter le potentiel de main-d'oeuvre disponible en Suisse, il est essentiel d'intégrer les femmes plus solidement encore dans le monde du travail. En ces temps de pénurie de personnel qualifié, l'économie n'a pas d'autre choix11.

Concilier vie professionnelle et prise en charge d'un proche est particulièrement problématique pour les personnes se trouvant dans l'incapacité de partager ces tâches avec un ou une partenaire ou avec d'autres membres de la famille. Selon le Rapport sur les familles 2017 du Conseil fédéral, les personnes vivant seules représentent le plus grand groupe de l'ensemble des ménages (35 %). Cette proportion va continuer à progresser à l'avenir. Le rapport révèle également que les formes de communauté de vie familiale se sont diversifiées, et que les ménages qui comptent plusieurs personnes exerçant une activité professionnelle sont plus à l'abri des difficultés financières que ceux qui n'en comptent qu'une12.

1.1.4

Conciliation entre vie professionnelle et prise en charge de proches

Considérant, d'une part, la pénurie généralisée de main-d'oeuvre qualifiée et, d'autre part, les objectifs de la politique de croissance du Conseil fédéral, il convient de maintenir le taux d'activité professionnelle au plus haut niveau, car il constitue un facteur déterminant du développement économique de la Suisse. Les femmes dis8 9

10 11 12

Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG). Reconnaissance et revalorisation du travail de care. Agir pour l'égalité, Berne, 2010.

Mader Luzius, Roser Katharina, Baenziger Julia et al. Household income and risk-ofpoverty of parents of long-term childhood cancer survivors. Pediatr Blood Cancer 2017; août; 64 (8): 326245.

www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > 03 - Travail et rémunération > Activité professionnelle et temps de travail > Personnes actives > Taux d'activité www.seco.admin.ch > Travail > Politique en matière de personnel qualifié www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > 01 - Population > Évolution future > Scénarios des ménages

3950

FF 2019

posant d'une bonne formation professionnelle, en particulier, offrent un potentiel mobilisable supplémentaire. Les investissements dans la formation professionnelle des femmes doivent en outre pouvoir être utilisés de manière optimale sur le marché du travail, comme dans le cas des hommes. Toutefois, les mesures visant à mieux concilier activité professionnelle et prise en charge de proches ne doivent pas compromettre les chances sur le marché du travail des personnes exerçant une activité professionnelle (s'avérant par ex. un obstacle à la sélection lors d'un recrutement), un phénomène susceptible de toucher majoritairement les femmes et les salariés plus âgés.

Dans le cadre de l'Enquête suisse sur la population active (ESPA), l'OFS, tous les trois à quatre ans depuis 1997, collecte dans un module complémentaire les données relatives au travail non rémunéré réalisé tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du ménage, y compris l'assistance apportée aux adultes ayant besoin de soins. En 2016, quelque 300 000 personnes âgées de plus de 15 ans ont effectué en Suisse un travail non rémunéré auprès de personnes nécessitant une prise en charge.

Selon l'exploitation des données de l'ESPA par l'OFS en 2016, près de 56 000 personnes âgées de 15 à 64 ans ayant une activité professionnelle faisaient ménage commun avec un adulte ayant besoin de soutien. Celles qui assumaient des tâches d'assistance et de soins y consacraient en moyenne 8,5 heures par semaine. Avec 11,2 heures par semaine, les femmes investissaient plus de temps dans ce travail que les hommes, qui y passaient 6,5 heures13. Environ 127 000 personnes exerçant une activité professionnelle ont indiqué avoir effectué, au cours des quatre semaines précédentes, des tâches d'assistance ou de soins pour des adultes vivant dans d'autres ménages. En moyenne, elles y ont consacré 3,7 heures par semaine.

Tableau 2 Personnes exerçant une activité professionnelle et assumant des tâches d'assistance pour des proches nécessitant des soins Femmes exerçant une activité professionnelle

Hommes exerçant une activité professionnelle

À l'intérieur du ménage

À l'extérieur du ménage

À l'intérieur du ménage

À l'extérieur du ménage

ca. 22 000

ca. 78 000

ca. 35 000*

ca. 48 000

Source: Évaluation spéciale de l'OFS, 2016 * Si l'on tient compte uniquement des personnes âgées de 15 à 64 ans exerçant une activité professionnelle, le nombre d'hommes se trouvant dans cette situation est supérieur à celui des femmes, car les femmes sont moins nombreuses à travailler que les hommes.

Selon l'OFS, les proches aidants en Suisse ont fourni en 2016 un total de 80 millions d'heures de travail non rémunéré sous la forme d'assistance et de soins. En admettant qu'une heure de travail coûte en moyenne 45 fr. 50, cela représente une valeur monétaire de 3,7 milliards de francs par an14.

13 14

www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > 03 - Travail et rémunération > Travail non rémunéré (module de l'ESPA) www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > 03 - Travail et rémunération > Travail non rémunéré > Compte satellite de la production des ménages

3951

FF 2019

Problèmes de la conciliation entre vie professionnelle et prise en charge de proches Les personnes actives qui prennent soin d'un proche ont souvent du mal à exercer leur activité professionnelle. La possibilité qu'elles ont de la poursuivre malgré le besoin de prise en charge d'un proche dépend de différents facteurs: situation personnelle au travail (marge d'autonomie), type de tâches et organisation du travail (possibilité d'être remplacé en cas d'absence, modèles de temps de travail flexibles), culture d'entreprise.

Une étude comparative des congés d'assistance de courte et de longue durée au niveau international montre que, pour la majeure partie des personnes exerçant une activité professionnelle chargées d'assumer des tâches d'assistance pendant une longue période, une organisation du travail flexible ne remplace pas un congé d'assistance, ou que des horaires de travail flexibles s'avèrent impossibles en pratique. Pour les personnes qui disposent d'un revenu faible, occupent le bas de la hiérarchie ou ont des horaires de travail irréguliers (par ex. travail en équipe), en particulier, il est généralement difficile d'organiser son temps de travail de manière flexible. De même, les horaires de travail flexibles ne permettent pas de soulager les familles avec plusieurs enfants dont l'un est gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident, car les différentes tâches et exigences sont soumises à des contraintes horaires et la présence sur place est parfois indispensable15.

Les personnes exerçant une activité professionnelle devraient donc avoir la possibilité de s'absenter du travail pour une courte durée, de réduire temporairement leur taux d'occupation ou de prendre un congé pour assumer des tâches d'assistance, et ce sans mettre en danger leur situation financière, leur carrière ou leur prévoyance vieillesse ultérieure. En particulier au vu de la pénurie de main-d'oeuvre, les personnes, jeunes ou moins jeunes, qui prennent soin de proches tout en ayant une activité professionnelle doivent pouvoir préserver leurs chances sur le marché du travail.

1.2

Législation actuelle

1.2.1

Absences professionnelles de courte durée

Loi sur le travail La loi du 13 mars 1964 sur le travail (LTr) 16 régit les conditions de travail des employeurs privés et, en partie, des employeurs publics. L'art. 36, al. 1, LTr définit les travailleurs ayant des responsabilités familiales. Sont réputées responsabilités familiales l'éducation des enfants jusqu'à l'âge de 15 ans ainsi que la prise en charge de membres de la parenté ou de proches exigeant des soins. Selon cette disposition, l'employeur doit tenir compte de la situation familiale de ses salariés dans l'aména15

16

Schmidt Andrea E., Fuchs Michael, Rodrigues Ricardo. Vergleichende Studie zu Betreuungsurlauben für Angehörige im internationalen Vergleich: Gesetzgebung und politische Massnahmen, Vienne, 2016.

RS 822.11

3952

FF 2019

gement du temps de travail, notamment en leur accordant des pauses plus longues et en évitant de leur imposer des heures supplémentaires. L'art. 36, al. 3, LTr limite toutefois le droit aux congés de courte durée pour la prise en charge de proches à la garde d'enfants malades, sans faire mention de l'aide apportée à d'autres membres de la famille ou à d'autres proches exigeant des soins. En vertu de cette disposition, l'employeur doit, sur présentation d'un certificat médical, donner congé au salarié pour le temps nécessaire à la garde d'un enfant malade, jusqu'à concurrence de trois jours. La LTr ne contient aucune disposition concernant le maintien du paiement du salaire.

Code des obligations S'agissant des rapports de travail soumis au droit civil, les dispositions applicables sont celles du code des obligations (CO)17. L'art. 324a CO régit l'obligation qu'a l'employeur de continuer à verser le salaire lorsque le salarié est empêché de travailler pour des causes inhérentes à sa personne, l'empêchant d'assumer l'obligation de travailler, ou que celle-ci ne peut être raisonnablement exigée de lui. Cette obligation de continuer à verser le salaire s'applique non seulement en cas de maladie ou d'accident du salarié, mais aussi lorsque celui-ci doit accomplir une obligation légale (art. 324a, al. 1). Par obligation légale, il faut entendre l'obligation d'entretien des enfants (art. 276 du code civil [CC]18), du conjoint ou du partenaire enregistré (art. 163 CC; art. 13 de la loi du 18 juin 2004 sur le partenariat19), à l'exclusion des personnes en union libre. L'obligation d'entretien ne s'applique pas non plus à l'un ou l'autre des parents ni aux frères et soeurs, ces derniers n'y étant plus soumis depuis l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2000, de la version révisée des art. 328 et 329 CC20, et le soutien prévu dans ces dispositions étant de toute façon uniquement de nature financière. Bien qu'une décision cantonale et une partie de la doctrine reconnaissent l'empêchement de travailler au sens de l'art. 324a, al. 1, CO pour cause d'obligation d'entretien fondée sur un devoir moral, celui-ci n'est juridique-

17 18 19 20

RS 220 RS 210 RS 211.231 Message du Conseil fédéral du 15.11.1995 concernant la révision du code civil suisse (état civil, conclusion du mariage, divorce, droit de la filiation, dette alimentaire, asiles de famille, tutelle et courtage matrimonial), FF 1996 I 1.

3953

FF 2019

ment pas établi21. L'obligation de continuer à verser le salaire perdure en outre uniquement jusqu'à ce qu'une solution de remplacement appropriée ait été trouvée ou, dans le cas d'un enfant malade ou victime d'un accident, que la prise en charge par les parents ne soit plus considérée comme nécessaire pour des raisons médicales 22.

Les solutions de remplacement envisageables incluent notamment l'implication de membres de la famille disponibles ou les offres de décharge des différentes organisations.

L'obligation de continuer à verser le salaire est en outre limitée dans le temps. Durant la première année de service, l'art. 324a, al. 2, CO prévoit un contingent maximal de trois semaines. Le salaire continue ensuite à être versé pour une «période plus longue fixée équitablement», compte tenu de la durée des rapports de travail et des circonstances particulières. En pratique, on utilise des barèmes appelés échelle bâloise, échelle bernoise et échelle zurichoise pour déterminer la durée du maintien du paiement du salaire23. Selon ces trois échelles, un total de seize semaines de maintien de paiement du salaire est par exemple considéré comme approprié pour des rapports de travail d'une durée de six ans. Le crédit de temps correspondant s'applique à toutes les absences dues à un empêchement de travailler au sens de l'art. 324a, al. 1, CO. Lorsque le salarié est lui-même malade ou victime d'un accident ou lorsqu'il doit prendre en charge plusieurs personnes, par exemple des enfants, il est possible que le nombre limité de jours d'absence pour cas d'empêchement de travailler donnant droit au maintien du paiement du salaire soit insuffisant.

Cette situation est particulièrement problématique durant les premières années de service ou pour les mères qui ont subi des complications durant la grossesse ou dont l'enfant nécessite un traitement continu après la naissance.

21

22 23

Arrêt du tribunal du travail de Zurich, 20.3.1981, RSJ / SJZ 1981, 234 ss. Empêchement pour un motif autre qu'une obligation légale; ZK-Staehelin, no 17 ad art. 324a CO; Hensch, Angela, Arbeitnehmer mit Familienpflichten, AJP 2016, 1631 ss, 1639; CH-Emmel, no 1 ad art. 324a CO; Streiff, Ullin/von Kaenel, Adrian/Rudolph, Roger, Arbeitsvertrag, Praxiskommentar zu den Art. 319­362 OR, 7e édition, Zurich/Bâle/ Genève 2012, no 20 ad art. 324a CO («für deren Pflege man verantwortlich ist»); Brühwiler, Jürg, Einzelarbeitsvertrag ­ Kommentar zu den Art. 319­343 OR, 3e édition, Bâle 2014, no 2 ad art. 324a CO (schwere Erkrankung eines Elternteils); Subilia, Olivier/ Duc, Jean-Michel, Droit du travail ­ Éléments de droit suisse, 2e édition, Lausanne 2010, no 20 ad art. 324a CO (maladie grave d'un proche); Geiser, Thomas/Müller, Roland, Arbeitsrecht in der Schweiz, 3e édition, Berne 2015, no 428 (Betreuung nahestehender Angehöriger); BSK-Portmann/Rudolph, no 47 ad art. 324a CO (Erkrankung nahestehender Angehöriger).

Empêchement motivé uniquement par une obligation légale: arrêt du Tribunal fédéral du 7.4.1998, 4C.459/1997, consid. 4 et CS-Longchamp, 13 ad art. 324a CO; BKRehbinder/Stöckli, 11 ad art. 324a CO; Egli, Hans-Peter, Lohnfortzahlung und Versicherungsschutz gemäss Art. 324a OR, AJP 2000, 1065, 1067; Rüetschi, David, Die Rechte des Arbeitnehmers bei der Betreuung kranker Kinder und anderer Angehöriger, in: Andrea Büchler Markus Müller-Chen (éd.). Private Law ­ national global ­ comparative.

Festschrift für Ingeborg Schwenzer zum 60. Geburtstag (vol. I et II), Berne 2011, 1449 ss, 1461; Vischer, Frank/Müller, Roland M., Der Arbeitsvertrag, 4 e édition, Bâle 2014, no 10, § 12; Wyler, Rémy/Heinzer, Boris, Droit du travail, 3e édition, Berne 2014, 223­224; Brunner, Christiane/Bühler, Jean-Michel/Waeber, Jean-Bernard/Bruchez, Christian, Commentaire du contrat de travail, 3e édition, Lausanne 2010, no 8 ad art. 324a CO; Kuko OR-Pietruszak, no 5 ad art. 324a CO; CR-Aubert, no 28.

Arrêt du Tribunal fédéral du 7.4.1998, 4C.459/1997, consid. 4b.

www.arbeitsverhinderung.ch > Rechtsfolge > Lohnfortzahlungsskalen

3954

FF 2019

Les tribunaux peuvent s'écarter des échelles de calcul de la durée de maintien du paiement du salaire, comme en témoigne la jurisprudence cantonale en lien avec la prise en charge d'enfants en bas âge24. Cela présuppose toutefois que, lorsque l'employeur ne donne pas son accord, le salarié agisse en justice, ce qui constitue un obstacle important à l'exercice du droit au salaire.

La possibilité qu'ont les tribunaux de s'écarter des échelles de calcul présente à la fois des avantages et des inconvénients: d'un côté, l'examen au cas par cas permet de tenir compte de chaque situation concrète; de l'autre, au vu de la marge d'appréciation, le droit au salaire n'est pas garanti durant l'intégralité de la période de la prise en charge, puisque son application peut être appréciée différemment d'un tribunal à l'autre, et la démarche implique une procédure longue et coûteuse. Si, en plus, le proche aidant tombe lui-même malade durant la même année, le nombre de jours de congé de prise en charge rémunérés est réduit d'autant. Par ailleurs, le Tribunal fédéral applique les règles de l'équité avec retenue dans l'examen des décisions cantonales rendues25, avec pour conséquence que les décisions divergentes des différents tribunaux cantonaux ne sont pas forcément uniformisées.

Les absences prises pour s'occuper de membres de la famille malades à l'égard desquels il n'existe aucune obligation d'entretien légale peuvent être considérées comme des heures et des jours de congé usuels au sens de l'art. 329, al. 3, CO. La date et la durée du congé doivent être fixées équitablement selon les circonstances, en tenant compte des intérêts de l'employeur et du travailleur (al. 4). Durant cette absence, l'al. 3 ne prévoit pas le maintien du paiement du salaire, ce dernier devant relever d'une convention ou de l'usage (art. 322, al. 1).

24 25

Arrêt du tribunal cantonal de Berne du 27.7.2004, JAR 2005, 352 356.

Par ex. en cas de licenciement avec effet immédiat pour justes motifs: ATF 130 III 28, consid. 4.1.

3955

FF 2019

Tableau 3 Aperçu des absences de courte durée en vertu du droit en vigueur Le tableau suivant présente la réglementation en vigueur selon le CO et la LTr.

Travailleur s'occupant

Art. 324a CO Congé

Art. 36 LTr Maintien du paiement Congé du salaire

Maintien du paiement du salaire

de son enfant malade (obligation d'entretien)

Oui, jusqu'à En principe solution de rem- contingent selon placement ou échelles tant que présence des parents nécessaire, et selon échelles

3 jours de travail max. par événement

Pas réglé

de son conjoint ou partenaire enregistré gravement malade (obligation d'entretien)

Oui, jusqu'à solution de remplacement

En principe contingent selon échelles

Pas réglé

Pas réglé

du partenaire faisant ménage commun avec lui pas d'obligation d'entretien)

Controversé; pas de sécurité juridique

Controversé; pas de sécurité juridique

Pas réglé

Pas réglé

d'un autre membre de la famille (par ex.

parent, frère ou soeur vivant seul)

Controversé; pas de sécurité juridique

Controversé; pas de sécurité juridique

Pas réglé

Pas réglé

d'un proche

Controversé; pas de sécurité juridique

Controversé; pas de sécurité juridique

Pas réglé

Pas réglé

Dispositions applicables au personnel de la Confédération Les dispositions déterminantes pour les rapports de travail de droit public sont celles du droit public cantonal et, au niveau fédéral, la loi fédérale du 24 mars 2000 sur le personnel de la Confédération (LPers)26 et les ordonnances y relatives. En vertu de l'art. 40, al. 3, let. c, de l'ordonnance du DFF du 6 décembre 2001 concernant l'ordonnance sur le personnel de la Confédération (O-OPers)27, les employés de la Confédération peuvent bénéficier d'un congé payé pouvant aller jusqu'à trois jours de travail par événement pour les premiers soins et l'organisation des soins ultérieurs à donner à un membre de la famille ou au partenaire tombé malade ou victime d'un accident.

26 27

RS 172.220.1 RS 172.220.111.31

3956

FF 2019

1.2.2

Absences professionnelles de longue durée

Il n'existe aujourd'hui pas de droit à une compensation de la perte de gain causée par une absence prolongée du travail due à la survenance d'un besoin sérieux de prise en charge d'un membre de la famille. De l'art. 324a CO ne peut découler qu'un prolongement de l'obligation de continuer à verser le salaire. Toutefois, ce droit est en général limité dans le temps, jusqu'à ce qu'une solution de remplacement soit trouvée. La durée annuelle de ce type de congé est en outre plafonnée. Le maintien prolongé du paiement du salaire a été accordé en particulier pour la prise en charge d'enfants en bas âge, autrement dit dans des cas pour lesquels il n'était pas nécessaire de trouver une solution de remplacement, la présence d'un parent étant jugée indispensable.

Des mesures de soutien supplémentaires existent, mais uniquement pour les parents d'enfants atteints d'une infirmité congénitale. Dans de tels cas, l'AI rembourse les prestations d'aide et de soins pédiatriques à domicile dispensées dans le cadre d'un traitement, et verse une allocation pour impotent pour mineurs ainsi qu'un supplément pour soins intenses (art. 42bis et 42ter, al. 3, de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité [LAI]28), ces prestations étant octroyées de manière forfaitaire et calculées indépendamment du salaire. Elles ne sont en général versées qu'à l'échéance d'une année, lorsqu'il est établi que l'impotence est durable. Une contribution d'assistance peut en outre être octroyée lorsque les parents engagent un tiers pour s'occuper de leur enfant malade (art. 42quater, al. 3, LAI). Selon le droit en vigueur, ces prestations ne sont pas accordées lorsqu'il y a séjour dans un home (art. 42bis, al. 4, 42ter, al. 3, et 42quater, al. 1, let. b, LAI).

1.2.3

Bonifications de l'AVS pour tâches d'assistance

Les bonifications pour tâches d'assistance sont une illustration de la reconnaissance de la société envers les proches aidants.

En vertu de l'art. 29septies de la loi fédérale du 20 décembre 1949 sur l'assurancevieillesse et survivants (LAVS)29, les assurés qui prennent en charge des parents de ligne ascendante ou descendante ou des frères et soeurs nécessitant des soins ont droit à une bonification pour tâches d'assistance. Une personne est considérée comme nécessitant des soins lorsqu'elle perçoit de la part de l'AVS, de l'AI, de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire une allocation pour impotence moyenne ou grave. Le proche aidant ne doit pas être trop éloigné de la personne qu'il aide; il ne doit pas résider à plus de 30 kilomètres ou d'une heure de route du lieu de résidence de celle-ci. Sont considérés comme parents les conjoints, les beaux-parents et les enfants d'un autre lit.

La bonification pour tâches d'assistance est un revenu fictif qui correspond au triple du montant annuel de la rente AVS minimale (2018: 42 300 francs par année civile).

Revenu fictif, elle n'est pas un paiement en espèces, mais elle est prise en compte 28 29

RS 831.20 RS 831.10

3957

FF 2019

ultérieurement, lors du calcul de la rente. Autrement dit, elle augmente le salaire moyen qui sert à déterminer le montant de la rente. Ainsi, elle compense les éventuelles pertes de revenu et permet, à l'instar de la bonification pour tâches éducatives, d'atteindre une rente plus élevée.

Il n'est pas possible de faire valoir simultanément plusieurs bonifications. Autrement dit, la prise en charge de plusieurs personnes ne donne pas droit à plus d'une bonification.

Les années durant lesquelles il déclare des enfants de moins de 16 ans, l'assuré bénéficie d'une bonification pour tâches éducatives. Pendant cette période, il ne peut donc pas percevoir de bonification pour tâches d'assistance.

La législation actuelle présuppose une prise en charge d'une certaine intensité et ne reconnaît l'assistance dispensée à des membres de la famille qu'à condition que ceux-ci aient une impotence moyenne. La prise en charge de personnes présentant une impotence faible n'est donc pas couverte, bien que ces personnes nécessitent elles aussi souvent des soins de la part de leurs proches.

1.2.4

Allocation pour impotent et supplément pour soins intenses de l'AI

En vertu du droit en vigueur, le versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses (au sens de l'art. 42ter, al. 3, LAI) est interrompu lorsque l'enfant est hospitalisé. En revanche, pour les adultes, l'allocation pour impotent n'est supprimée qu'après un mois civil entier passé à l'hôpital (art. 67, al. 2, de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales [LPGA]30).

1.3

Rapport avec le programme de législature et les stratégies du Conseil fédéral

La mise en oeuvre du plan d'action de soutien et de décharge en faveur des proches aidants figure dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201931; mais étant donné que les modifications légales s'inscrivaient dans un mandat d'examen, le projet n'était pas annoncé dans l'arrêté fédéral du 14 juin 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201932.

La mise en oeuvre du plan d'action fait partie intégrante de la stratégie Santé2020 approuvée par le Conseil fédéral en janvier 2013 dans le but d'appuyer les objectifs fixés et les mesures prises dans ce cadre pour garantir une offre de soins moderne.

Dans l'optique d'un système de santé durable et financièrement supportable, le travail réalisé à titre bénévole par les proches aidants est important: les institutions ne 30 31 32

RS 830.1 FF 2016 981 FF 2016 4999

3958

FF 2019

disposent ni des professionnels ni des moyens financiers qu'il faudrait pour couvrir les besoins supplémentaires en soins si ce bénévolat n'existait pas. Les mesures mises en oeuvre par la Confédération, les cantons et les organisations privées en lien avec le plan d'action peuvent avoir de grandes conséquences pour les proches aidants tant sur le plan social et de la santé que dans le monde du travail. Par exemple, tous les résultats de ce plan d'action seront directement repris dans la Stratégie nationale en matière de démence 2014­2019 et partagés via la plateforme d'échange «Soins palliatifs». Les acteurs qui s'occupent de maladies psychiques ou rares dans le cadre des activités de la Confédération profiteront eux aussi de l'amélioration des conditions offertes aux proches aidants.

Dans l'initiative visant à combattre la pénurie de personnel qualifié lancée par le Conseil fédéral en 2015, le Plan d'action de soutien et de décharge en faveur des proches aidants correspond à la mesure 23. Celle-ci comprend le programme de promotion «Offres visant à soutenir et à décharger les proches aidants» de 2017 à 2020, qui se compose de deux parties: ­

Partie 1: à partir de projets de recherche, élaboration de bases de connaissances pratiques devant servir à développer de manière axée sur les besoins les offres qui visent à soutenir et à décharger les proches aidants.

­

Partie 2: recherche et documentation, par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), des offres, des projets et des mesures à valeur de modèle visant à soutenir les proches aidants; ces documents pourront inciter les acteurs intéressés à créer ou développer leurs propres offres33.

1.4

Classement d'interventions parlementaires

1.4.1

Postulat 09.4199 Seydoux-Christe «Congé rémunéré d'une durée suffisante pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé» du 10 décembre 2009

Le postulat 09.4199 Seydoux-Christe «Congé rémunéré d'une durée suffisante pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé» du 10 décembre 2009 chargeait le Conseil fédéral d'établir un rapport sur la possibilité d'introduire dans notre système d'assurances sociales un congé rémunéré d'une durée suffisante pour l'un ou l'autre parent s'occupant d'un enfant gravement atteint dans sa santé. Le postulat envisageait une indemnité journalière dont les modalités, notamment le montant et la durée, seraient à déterminer, et qui pourrait bénéficier à l'un ou l'autre parent de familles en situation financière difficile. Il a été adopté par le Conseil des États le 2 mars 2010.

L'introduction d'un congé de prise en charge pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé créerait les conditions requises pour classer ce postulat.

33

www.ofsp.admin.ch > Stratégie & politique > Politique nationale de la santé > Programmes de promotion «Initiative visant à combattre la pénurie de personnel qualifié plus» > Programme de promotion «Offres visant à décharger les proches aidants»

3959

FF 2019

1.4.2

Postulat 13.3366 CSSS-N «Prévoir des allocations d'assistance et des possibilités de décharge pour les personnes qui prennent soin d'un proche» du 25 avril 2013

Le postulat 13.3366 CSSS-N «Prévoir des allocations d'assistance et des possibilités de décharge pour les personnes qui prennent soin d'un proche» du 25 avril 2013 chargeait le Conseil fédéral d'établir un rapport sur la question des personnes qui prennent soin d'un proche; ce document fournira en particulier des réponses aux questions relatives aux allocations d'assistance et au soutien. Le postulat a été adopté par le Conseil National le 13 juin 2013.

L'introduction d'un congé de prise en charge pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé créerait les conditions requises pour classer ce postulat.

1.4.3

Postulat 16.3868 Müller-Altermatt «Pour une couverture LPP adéquate des proches aidants» du 30 septembre 2016

Contexte Le postulat 16.3868 Müller-Altermatt «Pour une couverture LPP adéquate des proches aidants» du 30 septembre 2016 charge le Conseil fédéral de présenter dans un rapport les moyens à mettre en oeuvre pour que les proches aidants puissent maintenir leur couverture LPP s'ils sont amenés à réduire leur taux d'occupation pour assurer ce soutien. Le postulat demande notamment que le Conseil fédéral examine les mesures à prendre pour que les cotisations de l'employeur soient payées par une autre source (par ex. un fonds de garantie financé par l'État), et qu'il indique à partir de quelle réduction du taux d'occupation un tel dispositif serait efficace (par ex. une réduction de 20 % pour un emploi qui continuerait d'être exercé à 60 % au minimum) et comment il faudrait justifier en pratique de la prise en charge effectuée (par ex. attestation du médecin traitant de la personne aidée).

Sur recommandation du Conseil fédéral, le Conseil national a accepté ce postulat le 16 décembre 2016.

Réglementation actuelle La prévoyance professionnelle est, par définition, une assurance conçue pour les personnes qui exercent une activité salariée. Ainsi, est soumise à l'assurance obligatoire toute personne qui travaille pour un employeur et qui touche un salaire soumis à l'AVS d'au moins 21 330 francs par année. L'employeur est tenu de s'affilier à une institution de prévoyance (ou d'en créer une) et d'y assurer ses salariés. Tout salaire annuel qui se situe entre 24 885 et 85 320 francs est soumis à l'assurance obligatoire. Employeurs et salariés cotisent de manière paritaire; les premiers déduisent du salaire des seconds la part de cotisations incombant au salarié et la transfèrent, ainsi que leur propre part de cotisations, à l'institution de prévoyance.

3960

FF 2019

Les personnes qui exercent une activité indépendante peuvent s'assurer à la prévoyance professionnelle, mais à titre facultatif.

Les personnes qui ne touchent plus de salaire soumis à l'AVS ou dont le salaire annuel est inférieur à 21 330 francs (par ex. en raison d'une réduction de leur taux d'occupation) ne sont plus soumises à la prévoyance professionnelle obligatoire.

Elles sortent alors de l'institution de prévoyance et doivent faire transférer dans une institution de libre passage les avoirs de vieillesse qu'elles ont accumulés jusqu'à cette date. La loi fédérale du 25 juin 1982 sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité (LPP)34 prévoit, sous de strictes conditions, la possibilité pour les personnes concernées de maintenir leur assurance.

Maintien de l'assurance à titre facultatif en vertu de l'art. 47 LPP En vertu de l'art. 47 LPP, les personnes qui ne touchent plus aucun salaire ou dont le salaire annuel est inférieur au seuil de 21 330 francs peuvent maintenir leur prévoyance professionnelle dans la même mesure que précédemment, mais à titre facultatif. La pratique fiscale leur accorde une déduction durant seulement deux ans.

Au-delà de cette date, elle considère que les personnes assurées à titre facultatif qui ne touchent plus de revenu provenant d'une activité lucrative se trouvent dans une situation qui enfreint le principe posé à l'art. 1, al. 2, LPP, selon lequel le salaire assuré dans la prévoyance professionnelle ne doit pas dépasser le revenu soumis à la cotisation AVS. En cas de maintien de l'assurance à titre facultatif au sens de l'art. 47 LPP, le principe de parité des cotisations ne s'applique pas. Les assurés sont donc tenus d'assumer eux-mêmes l'intégralité des cotisations, y compris la part de l'employeur.

La possibilité offerte par l'art. 47 LPP ne peut exister que si l'institution de prévoyance la prévoit dans son règlement. Lorsque c'est le cas, le règlement peut aussi définir si l'assurance peut porter sur la totalité du dernier revenu réalisé, ou seulement sur le gain assuré à titre obligatoire (montant de 24 885 à 85 320 francs). À l'heure actuelle, les institutions de prévoyance prévoient en général le maintien de l'assurance à titre facultatif ­ si tant est qu'ils en prévoient un ­ uniquement pour un congé non rémunéré, pendant
lequel subsiste le contrat de travail avec l'employeur affilié. Par contre, les institutions de prévoyance ne prévoient généralement pas la possibilité de maintenir la prévoyance des personnes qui n'ont plus de rapports de travail avec un employeur affilié.

Si le règlement de l'institution du dernier employeur ne permet pas le maintien de l'assurance à titre facultatif, l'assuré peut, en vertu de l'art. 47 LPP, maintenir sa prévoyance professionnelle auprès de l'institution supplétive LPP. Celle-ci permet toutefois d'assurer à titre facultatif uniquement les salaires correspondant au gain assuré à titre obligatoire. Cette possibilité de maintenir l'assurance à titre facultatif n'est pas très utilisée: au 31 décembre 2017, 1294 personnes seulement étaient affiliées à l'institution supplétive à ce titre.

34

RS 831.40

3961

FF 2019

Maintien de l'assurance au niveau du dernier gain assuré en vertu de l'art. 33a LPP L'art. 33a LPP prévoit également, pour les salariés qui réduisent leur taux d'occupation après avoir atteint l'âge de 58 ans, la possibilité de maintenir leur prévoyance au niveau du dernier gain assuré. Les assurés ayant atteint cet âge dont le salaire diminue de moitié au plus peuvent voir leur prévoyance maintenue au niveau du dernier gain assuré au plus tard jusqu'à l'âge réglementaire ordinaire de la retraite. Cette possibilité, qui concerne la prévoyance professionnelle obligatoire et surobligatoire, n'existe toutefois que lorsque l'institution de prévoyance la prévoit dans son règlement. En outre, la parité des cotisations ne s'applique pas aux cotisations destinées au maintien de la prévoyance: l'assuré doit par principe assumer lui-même les cotisations, alors qu'en réalité il ne touche plus le salaire correspondant. Le règlement ne peut prévoir des cotisations de l'employeur visant le même but qu'avec l'assentiment de ce dernier.

Mesures de maintien de la prévoyance prévues dans le présent projet L'art. 329g P-CO vise à régler le maintien du paiement du salaire lorsque le travailleur doit prendre en charge un enfant, un membre de la famille ou son partenaire atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident. En vertu de cette disposition, le proche aidant a droit à un congé rémunéré d'un maximum de trois jours par cas. Un congé est ainsi garanti pour la prise en charge d'un membre de la famille ou du partenaire. Le temps que dure le congé de prise en charge, la prévoyance professionnelle est maintenue.

L'art. 329h P-CO inscrit dans la législation le droit des travailleurs à un congé de 14 semaines au plus payé par le régime des APG, à prendre dans les limites d'un délai-cadre de 18 mois, pour prendre en charge un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident. L'art. 8, al. 3, P-LPP est quant à lui complété en sorte que la couverture d'assurance de la prévoyance professionnelle s'applique aussi pendant ce congé. Ainsi, durant cette période, les cotisations à la prévoyance professionnelle continuent elles aussi d'être dues (part de l'employeur et part du salarié).

Possibilités de maintien de la prévoyance professionnelle pour les proches aidants en cas de
réduction du taux d'occupation Maintien de la prévoyance professionnelle au sens de l'art. 47 LPP La possibilité de maintenir la prévoyance professionnelle conformément à l'art. 47 LPP est indépendante de la raison pour laquelle le salaire est réduit. Les proches aidants qui cessent d'être assujettis à la prévoyance obligatoire parce qu'ils réduisent leur taux d'occupation peuvent maintenir leur prévoyance à titre facultatif dans la limite des conditions décrites précédemment. En outre, la pratique fiscale accorde une déduction pour l'assurance facultative pendant deux ans.

Pour répondre aux besoins des proches aidants, la durée maximale de l'assurance pourrait certes être fixée dans la loi et portée, par exemple, à cinq ans. Mais une telle solution contreviendrait au principe fixé à l'art. 1 LPP, selon lequel le salaire assuré dans la prévoyance professionnelle ne doit pas dépasser le revenu soumis à la cotisation AVS. Ce principe a été inscrit à l'occasion de la 1 re révision LPP en vue d'évi3962

FF 2019

ter que la prévoyance professionnelle ne soit trop utilisée à des fins d'optimisation fiscale. Aujourd'hui, seules les conditions strictes posées pour les exceptions visées aux art. 33a et 47 LPP permettent d'y déroger.

Maintien de la prévoyance professionnelle par analogie avec la règle de l'art. 33a LPP Lorsque des personnes qui réduisent leur taux d'occupation pour prendre soin d'un proche tout en restant affiliées à l'assurance obligatoire peuvent maintenir leur prévoyance professionnelle au niveau du gain assuré précédemment, la question se pose de savoir s'il ne faudrait pas régler ce type de cas par analogie avec l'art. 33a LPP en vigueur.

Le postulat suggère une piste: les actifs qui réduisent leur taux d'occupation d'au moins 20 % pour prendre soin d'un proche et qui continuent à travailler de 60 % au minimum pourraient continuer d'assurer dans leur institution de prévoyance le salaire qu'ils percevaient précédemment, et ce pour une durée déterminée.

Étant donné que les institutions de prévoyance modifient souvent les salaires assurés dès que le taux d'occupation varie de 10 %, on pourrait aussi imaginer que les proches aidants puissent déjà bénéficier de la possibilité de maintenir leur prévoyance lorsque leur salaire baisse de 10 %. En outre, si, pour le taux d'occupation, le seuil de 60 % suggéré dans le postulat était abaissé à 50 %, cela permettrait une harmonisation avec la réglementation de l'art. 33a LPP, qui s'applique pour un salaire réduit de 50 % au plus. En outre, cela aurait pour autre avantage que les personnes qui travaillent déjà à temps partiel avant d'être amenées à prendre en charge un proche pourraient elles aussi bénéficier de la réglementation.

Il resterait à définir la nature et l'étendue des tâches d'assistance et de soins propres à justifier une réduction du taux d'occupation et la prise en charge des cotisations LPP de l'employeur, vu l'exigence formulée dans le postulat selon laquelle les proches aidants ne devraient pas assumer eux-mêmes la cotisation de l'employeur durant la période de maintien de l'assurance (voir ci-après pour les questions de financement). Le médecin du proche aidé ne devrait pas être la seule personne habilitée à valider la qualité d'ayant droit du proche aidant. Il faudrait régler clairement dans la loi et l'ordonnance le minimum
auquel doit correspondre l'aide fournie pour que les proches aidants puissent bénéficier de la prise en charge des cotisations LPP de l'employeur. Le médecin traitant pourrait être chargé de certifier le besoin en assistance et en soins de son patient, à l'intention de l'institution appelée à financer la cotisation de l'employeur.

Financement Le postulat demande d'examiner la possibilité de faire financer par un tiers au moins la cotisation LPP de l'employeur pour tout proche aidant qui fournit des tâches d'assistance et de soins et réduit son taux d'occupation à cette fin. Le salarié concerné devrait ainsi payer uniquement la part de cotisations qui lui incombe, ce qui l'inciterait fortement à maintenir sa prévoyance conformément à l'art. 47 LPP ou à une nouvelle disposition analogue à celle de l'art. 33a LPP.

3963

FF 2019

Si le salarié n'était plus tenu d'assumer lui-même la totalité des cotisations pour maintenir l'assurance à titre facultatif, la question se pose de savoir par qui la cotisation de l'employeur serait payée. Les sources de financement possibles sont globalement l'employeur, les pouvoirs publics (via les recettes fiscales), l'assurance obligatoire des soins ou, comme le suggère le postulat, le Fonds de garantie LPP.

La cotisation de l'employeur à la prévoyance professionnelle constitue une prestation salariale annexe: elle augmenterait si l'employeur devait assumer de surcroît les cotisations sur le revenu fictif des proches aidants. En outre, contraindre l'employeur à payer ces cotisations créerait une inégalité de traitement avec les salariés qui réduisent aussi leur taux d'occupation, mais pour aider par exemple des enfants qui ne présentent pas un besoin de soins particulier.

Aujourd'hui, le Fonds de garantie LPP a pour mission de garantir les prestations dues aux assurés par des institutions de prévoyance devenues insolvables, et de verser des subsides aux institutions de prévoyance ayant une structure d'âge défavorable. Il est financé par les institutions qui lui sont affiliées, c'est-à-dire surtout par les institutions soumises à la loi du 17 décembre 1993 sur le libre passage35, et donc indirectement par tous les assurés. Si le fonds de garantie LPP devait financer la part de cotisations de l'employeur sur le revenu fictif des proches aidants, cela signifierait que tous les assurés du 2e pilier devraient contribuer à financer de manière solidaire la moitié des cotisations d'une certaine catégorie d'assurés, en l'occurrence les salariés qui prennent en charge des proches.

Un financement par les pouvoirs publics ou par l'assurance obligatoire des soins pourrait se justifier en ceci que l'augmentation des tâches effectuées par les proches aidants décharge en partie les pouvoirs publics et l'assurance-maladie.

Coûts Les coûts des cotisations de l'employeur sur le revenu fictif d'un salarié au titre du maintien de l'assurance sont difficiles à estimer avec précision. En 2017, 1294 personnes ont utilisé la possibilité de maintenir leur assurance à titre facultatif auprès de l'Institution supplétive. Il est impossible de savoir si ce nombre augmenterait de manière significative si les assurés
ne devaient plus assumer que la cotisation qui leur incombe. En l'absence d'estimation fiable du nombre de personnes susceptibles d'être intéressées par cette option, il est impossible d'évaluer les coûts avec précision.

La solution proposée entraînerait une augmentation des charges administratives des institutions de prévoyance, car celles-ci devraient décompter, pour chaque assuré y ayant droit, la cotisation de l'employeur sur le salaire fictif soumis au maintien de l'assurance, puis la facturer au tiers chargé de son financement. Cela serait assez complexe, nécessiterait beaucoup de travail et coûterait cher d'un point de vue administratif ­ contrairement au système normal d'encaissement collectif des cotisations, relativement simple.

35

RS 831.42

3964

FF 2019

Appréciation des possibilités d'assurance L'expérience faite avec le maintien de l'assurance à titre facultatif en vertu de l'art. 47 LPP montre que les assurés sont peu nombreux à y avoir recours. Bien souvent, les personnes dont le revenu est faible n'en ont pas les moyens. Quand bien même elles ne devraient pas assumer elles-mêmes la cotisation de l'employeur, elles devraient toujours payer leur cotisation de salarié. Pour qu'elles utilisent nettement plus la possibilité de maintenir leur assurance, il faudrait que la totalité des cotisations soit prise en charge.

Ainsi, une extension du maintien de l'assurance pour les proches aidants au sens du postulat bénéficierait avant tout à ceux qui peuvent assumer la cotisation du salarié, mais ils sont moins concernés par un manque de moyens pour la prévoyance vieillesse que ceux qui ne peuvent pas assumer ces cotisations.

Bilan Le Conseil fédéral estime que la proposition du postulat d'étendre la prévoyance professionnelle ne permettrait pas d'améliorer clairement la situation de prévoyance des proches aidants. Cette proposition ne serait probablement pas déterminante pour la décision de prendre en charge des proches. La principale difficulté financière des proches aidants réside non pas dans la diminution de la prévoyance professionnelle, mais dans la perte de revenu engendrée par l'assistance et les soins qu'ils prodiguent à leurs proches.

Le financement par des tiers de la cotisation de l'employeur bénéficierait à ceux qui peuvent assumer au moins la cotisation du salarié. Ceux qui ne disposent pas des ressources financières nécessaires ne pourraient par contre pas profiter d'une telle mesure.

2

Procédure de consultation

Le Conseil fédéral a mis l'avant-projet en consultation du 27 juin au 16 novembre 201836.

Les objectifs et l'orientation générale du projet ont été majoritairement approuvés par les cantons, les partis politiques, l'Union des villes suisses (UVS) et les organisations de travailleurs. Les organisations patronales (Union patronale suisse [UPS], Union suisse des arts et métiers [USAM]) et l'Union démocratique du centre (UDC) ont clairement rejeté le projet dans son ensemble. Quelques cantons (AI, GL, GR, NW, OW, SZ) ont émis des réserves importantes ou refusé la majorité des mesures proposées dans l'avant-projet.

Le sujet traité a par ailleurs suscité un très grand intérêt. Près de 71 organisations ont donné leur avis spontanément, en particulier des organisations de personnes concer-

36

Les documents relatifs à la procédure de consultation sont disponibles à l'adresse: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2018 > DFI.

3965

FF 2019

nées, des associations féminines, des groupes spécialisés dans les affaires sociales et la santé, et diverses organisations patronales.

De manière générale, le projet est considéré comme une étape importante pour permettre aux personnes concernées de mieux concilier activité professionnelle et prise en charge de proches. Il a toutefois été indiqué à plusieurs reprises qu'il faudrait étendre le droit à une allocation de prise en charge aux personnes proches (conjoints, partenaires, frères et soeurs) qui prennent soin d'adultes ou d'enfants (mineurs ou majeurs) atteints dans leur santé.

S'agissant du congé de courte durée proposé dans le cadre du CO, l'avant-projet prévoyait un congé de trois jours par cas pour la prise en charge des membres de la famille et, de manière générale, des proches atteints dans leur santé en raison d'une maladie ou d'un accident. Il ne prévoyait pas de limite ni de plafond annuel. Tenant compte des avis divergents sur l'étendue du congé et la définition des proches, la solution proposée dans le projet adopte une voie médiane. Un plafond annuel, envisagé à titre de variante par le Conseil fédéral dans l'avant-projet, a ainsi été introduit. Le congé est limité aux membres de la famille et au partenaire avec lequel l'assuré fait ménage commun. En outre, la définition d'atteinte à la santé ne se limite pas aux cas de maladie ou d'accident, mais vise toute atteinte à la santé. Dans ce sens, la situation de handicap est également couverte.

L'avant-projet prévoyait de fixer au niveau de l'ordonnance la définition d'une atteinte grave à la santé pour cause de maladie ou d'accident. Plusieurs participants à la consultation ont souhaité que le degré de gravité de l'atteinte à la santé soit inscrit dans la loi afin de garantir la sécurité du droit. Cette demande est justifiée, c'est pourquoi le projet de loi prévoit une définition incluant les éléments suivants: ­

changement majeur de l'état physique ou psychique de l'enfant;

­

incertitude quant à l'issue de ce changement, ou forte présomption que celuici conduise à un handicap durable ou au décès;

­

besoin de prise en charge accru, de la part des parents; et

­

nécessité pour l'un des parents d'interrompre son activité professionnelle pour s'occuper de l'enfant.

L'avant-projet prévoyait une durée minimale d'une semaine pour le congé de prise en charge rémunéré. Plusieurs participants à la consultation ont demandé que le congé puisse être pris sous la forme de journées, ce qui, à l'évidence, offrirait plus de flexibilité aux proches aidants; cette possibilité a donc été intégrée au projet. La réglementation proposée dans l'initiative parlementaire 18.441 de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des États (CSSS-E) «Contreprojet indirect à l'initiative pour un congé de paternité» en faveur d'un congé de paternité de deux semaines peut être reprise telle quelle.

L'avant-projet prévoyait de ne pas accorder de droit à une allocation de prise en charge à une personne qui a déjà droit à un supplément pour soins intenses de l'AI (art. 42ter, al. 3, LAI). Cette proposition a suscité l'incompréhension des organisations au service de personnes en situation de handicap et des organisations des milieux de la santé et du social, qui souhaitent qu'une allocation de prise en charge puisse être versée conjointement à un supplément pour soins intenses. En effet, les 3966

FF 2019

parents d'enfants handicapés ayant droit à un supplément pour soins intenses devraient aussi pouvoir bénéficier d'un congé de prise en charge rémunéré lorsque leur enfant tombe gravement malade ou a un grave accident car, dans une telle situation, ils ont eux aussi besoin d'être déchargés et devraient pouvoir assumer à la fois les tâches de soins et leur activité professionnelle. En outre, les parents d'enfants ayant droit à un supplément pour soins intenses sont également concernés par la perte de gain, car la charge d'accompagnement et de soins qu'ils subissent pourrait augmenter, voire entraîner une interruption de travail, en cas de maladie ou d'accident de leur enfant entraînant une atteinte grave à la santé. Par ailleurs, ni l'allocation pour impotent ni le supplément pour soins intenses ne permettent de couvrir la perte de gain des parents; ces deux prestations visent à indemniser les coûts des soins usuels liés à un handicap.

Dans les faits, l'allocation de prise en charge et le supplément pour soins intenses n'ont pas le même but. La première sert à compenser la perte de gain, tandis que le deuxième doit permettre de s'occuper à domicile de personnes atteintes dans leur santé et représente à ce titre un revenu de substitution pour de nombreuses familles.

Une famille qui touche un supplément pour soins intenses pour un enfant gravement handicapé doit consacrer davantage de temps aux soins lorsque l'état de l'enfant s'aggrave ou que ce dernier doit être hospitalisé. Si un parent doit pour cela interrompre son travail, le revenu familial risque de diminuer. Ainsi, le versement parallèle d'une allocation de prise en charge et d'un supplément pour soins intenses ne peut être qualifié de surindemnisation du point de vue du droit des assurances; il garantit plutôt que les parents d'enfants atteints dans leur santé ne soient pas désavantagés. En outre, le congé de prise en charge est limité dans le temps, contrairement au versement du supplément pour soins intenses. Pour ces raisons, le projet n'exclut plus un droit à une allocation de prise en charge lorsqu'il existe déjà un droit à un supplément pour soins intenses.

Dans cette optique, il a aussi été demandé que le versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses ne soit plus suspendu pendant le séjour à l'hôpital
de l'enfant, comme la loi le prévoit actuellement (art. 42ter, al. 3, LAI). Le présent projet satisfait à cette demande en alignant la réglementation qui s'applique aux enfants sur celle qui régit le cas des adultes (art. 67, al. 2, LPGA): le versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses ne sera suspendu qu'une fois passé un mois civil entier à l'hôpital.

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Selon une étude menée en 2016 sur mandat de l'OFSP concernant les absences pour tâches d'assistance et de soins de courte et de longue durée, les pays analysés, à savoir l'Autriche, l'Allemagne, la France, l'Italie, les Pays-Bas et le Canada, ont introduit au cours des dernières années des réglementations relatives aux absences professionnelles de courte ou de longue durée motivées par la nécessité d'accom-

3967

FF 2019

pagner ou de soigner un membre de la famille ou un autre proche malade ou victime d'un accident37.

Absences professionnelles de courte durée Les pays étudiés ont mis en place des possibilités légales d'absences professionnelles dont la durée se situe entre 5 et 36 jours par an et par salarié. Le nombre maximal de jours ne peut être pris que dans le cadre de congés successifs d'une durée de trois jours au plus chacun. Alors que ces absences ne sont pas indemnisées en France et au Canada, dans les quatre autres pays, le salaire continue d'être versé dans son entièreté ou en partie, généralement par l'employeur.

Absences professionnelles de longue durée Les pays étudiés ont des approches très diverses des absences professionnelles de longue durée. La durée du congé de prise en charge ou les coûts attendus de ces absences peuvent être caractérisés selon les quatre points suivants: ­

définition du besoin de soins de la personne prise en charge à partir duquel un congé est accordé,

­

cercle des ayants droit potentiels,

­

montant des prestations financières, et

­

durée du congé.

La durée des différents congés proposés par les pays étudiés varie entre 6 semaines (Pays-Bas) et 24 mois (Italie, Allemagne en tant que variante à temps partiel). Seuls 3 des 13 modèles de congé de longue durée examinés ne prévoient aucun soutien financier de l'État.

L'approche retenue dans les réglementations propres à chaque pays s'explique en partie par des raisons historiques: par exemple, le débat sur l'euthanasie mené au niveau international dans les années 2000 a conduit, en Autriche, au rejet de cette idée, mais à l'introduction d'un congé de prise en charge de longue durée. Ce congé était initialement prévu principalement pour accompagner les membres de la famille en phase terminale et les enfants gravement malades. Par la suite, il a été étendu à d'autres situations nécessitant des soins.

Outre les quatre points mentionnés précédemment, le droit au congé, la couverture sociale et l'égalité des sexes sont autant de critères importants aux yeux des proches aidants. Tous les pays étudiés prévoient un droit à un congé (de courte ou de longue durée), à l'exception de l'Autriche. En Allemagne, ce droit n'est toutefois accordé que lorsque l'entreprise atteint une certaine taille. La couverture sociale est assurée dans tous les pays. Les droits à la retraite demeurent généralement les mêmes.

37

Schmidt Andrea E., Fuchs Michael, Rodrigues Ricardo. Vergleichende Studie zu Betreuungsurlauben für Angehörige im internationalen Vergleich: Gesetzgebung und politische Massnahmen, Vienne, 2016.

3968

FF 2019

En 2017, l'Institut suisse de droit comparé (ISDC) à Lausanne a actualisé l'étude précitée de 2016 à la lumière des évolutions ultérieures dans les pays concernés 38: dans la province canadienne de Colombie-Britannique, le maintien du paiement du salaire a été amélioré et le délai de carence pour obtenir un congé de longue durée a été raccourci. Au Canada, une législation a en outre été adoptée à l'échelle nationale qui élargit nettement les droits accordés en cas d'absence professionnelle due à des tâches d'assistance. Les conditions se sont également améliorées en Allemagne: les motifs justifiant un congé ont évolué pour passer d'une nécessité des soins exprimée en temps à une définition reposant sur le besoin d'assistance requis par la personne exigeant la prise en charge. En Italie, la Cour constitutionnelle a étendu le cercle des ayants droit aux situations assimilables à une communauté de vie stable (concubinage). Les législations autrichienne et néerlandaise n'ont subi aucun changement depuis 2016.

Les législations analysées se réfèrent principalement au cercle des ayants droit et au degré de gravité d'une maladie ou d'un accident pour établir le droit à une absence professionnelle de longue durée due à des tâches de prise en charge. Dans la plupart des cas, le droit au congé n'est pas lié à des obligations légales d'assistance, que ce soit pour un congé de courte ou de longue durée. En d'autres termes, le partenaire menant de fait une vie de couple avec la personne ayant besoin d'une assistance, ses frères et soeurs et les membres de sa famille élargie ou les membres du ménage sont réputés ayants droit s'ils peuvent prouver qu'ils sont impliqués dans les tâches de prise en charge.

Dans les pays étudiés qui prévoient un droit à une absence professionnelle de longue durée, le principal élément pour le droit à un congé est le degré de gravité de la maladie de la personne concernée. À l'âge adulte, le critère le plus fréquemment retenu est la perspective d'un décès imminent. À cet égard, les réglementations des pays étudiés reposent sur l'expertise de professionnels de santé. En Autriche et en Colombie-Britannique, la réglementation s'étend au-delà des maladies mortelles lorsque la prise en charge concerne un enfant. En France, il suffit de présenter un certificat médical, sans autre forme d'explication complémentaire.

4

Grandes lignes du projet

4.1

Nouvelle réglementation proposée

4.1.1

Absences professionnelles de courte durée dans le CO

Le projet propose un nouvel art. 329g P-CO réglant le maintien du paiement du salaire pendant une absence de courte durée de trois jours au maximum pour la prise en charge d'un membre de la famille ou du partenaire atteint dans sa santé. La notion de membre de la famille est à prendre dans le sens prévu à l'art. 29septies, al. 1, P-LAVS pour l'octroi de bonifications pour tâches d'assistance. Il s'agira donc des 38

Nadakavukaren Krista, Fournier Johanna, Curran John, et. al. Care Leave in Austria, Germany, Italy and the Netherlands ­ an update of the report of 2016, Lausanne, 2017.

3969

FF 2019

parents en ligne directe ascendante ou descendante (les parents et les enfants principalement) et des frères et soeurs, auxquels s'ajoutent le conjoint, le partenaire enregistré, les beaux-parents, de même que la personne qui fait ménage commun avec le salarié depuis au moins cinq ans de manière ininterrompue. Les enfants, enfin, sont ceux avec lesquels le lien de filiation est établi au sens du droit civil.

La durée du congé est de trois jours par cas. De plus, pour éviter que le nombre de congés ne soit trop élevé, un plafond annuel de dix jours par année est introduit. Une personne pourra par exemple s'occuper d'un enfant malade, de son père, de son frère et d'un autre enfant malade la même année si les autres conditions sont remplies, pour peu que le total des absences ne dépasse pas dix jours.

Cette nouvelle réglementation apporte principalement deux améliorations par rapport à la situation actuelle: d'une part, elle octroie un congé pour la prise en charge d'un membre de la famille ou d'un partenaire à l'égard duquel il n'existe aucune obligation d'entretien légale (art. 324a CO). Ainsi, la prise en charge est reconnue lorsqu'elle concerne non seulement les enfants, le conjoint et le partenaire enregistré du proche aidant, mais aussi ses parents, ses frères et soeurs ainsi que la personne avec laquelle il fait ménage commun. D'autre part, la réglementation ne prévoit plus de limiter le maintien du paiement du salaire seulement jusqu'à ce qu'une solution de remplacement appropriée ait été trouvée (art. 324a CO). Par ailleurs, le congé de trois jours pour la prise en charge d'un enfant, du conjoint ou du partenaire enregistré n'est plus imputé au crédit annuel visé à l'art. 324a CO.

La coordination de l'art. 329g P-CO avec l'art. 324a CO est exposée au ch. 5.1.

4.1.2

Coordination avec la loi sur le travail

Le projet prévoit de compléter l'actuel art. 36 LTr en prévoyant une extension du congé aux membres de la famille. La même réglementation que celle prévue au nouvel art. 329g P-CO est reprise, soit un congé de trois jours par cas pour la prise en charge d'un membre de la famille ou du partenaire atteint dans sa santé. Ce nouveau congé est toutefois limité à dix jours par an. Cette modification permet d'améliorer la lisibilité entre le CO et la LTr et, d'une manière générale, la cohérence de la législation. Toutefois, la modification de la LTr ne remet nullement en cause le droit en vigueur concernant les enfants. En effet, le plafond de dix jours s'applique uniquement aux autres membres de la famille et non aux enfants. Dans le cadre du CO, la garde des enfants malades peut continuer à relever de l'art. 324a CO, sans entamer les dix jours prévus par le nouvel art. 329g CO.

La nouvelle réglementation proposée est présentée dans le tableau ci-après.

3970

FF 2019

Tableau 4 Aperçu de la nouvelle réglementation des absences professionnelles de courte durée Salarié s'occupant

art. 329g P-CO et 36, al. 4, P-LTr Congé

Maintien du paiement du salaire

de son enfant malade (obligation d'entretien)

3 jours de travail max.

par événement

3 jours de travail max.

par événement, jusqu'à 10 jours par an

de son conjoint ou partenaire enregistré gravement malade (obligation d'entretien)

3 jours de travail max.

par événement, jusqu'à 10 jours par an

3 jours de travail max.

par événement, jusqu'à 10 jours par an

du partenaire faisant ménage commun avec lui (pas d'obligation d'entretien)

3 jours de travail max.

par événement, jusqu'à 10 jours par an

3 jours de travail max.

par événement, jusqu'à 10 jours par an

d'un autre membre de la famille (parent, soeur, frère)

3 jours de travail max.

par événement, jusqu'à 10 jours par an

3 jours de travail max.

par événement, jusqu'à 10 jours par an

4.1.3

Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident (allocation de prise en charge)

4.1.3.1

Introduction

Lorsqu'un enfant est gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident, cela représente un bouleversement profond dans la vie d'une famille, qui se retrouve en proie à une charge émotionnelle et à une pression temporelle énormes. À cela peuvent s'ajouter des inquiétudes financières, en particulier lorsque l'un des parents interrompt son activité professionnelle et subit donc une perte de revenu. Il faut alors réorganiser le quotidien de la famille et trouver des arrangements avec les employeurs.

Le projet prévoit de créer un congé payé pour prendre en charge un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident. Ce congé permettrait aux parents concernés d'interrompre leur activité professionnelle pendant une durée déterminée sans risquer de perdre leur emploi ou de subir une perte de gain. Les parents s'en trouveraient ainsi déchargés, et cela favoriserait les chances de guérison et le processus de rétablissement de l'enfant.

La loi du 25 septembre 1952 sur les allocations pour perte de gain (LAPG) 39 prévoit actuellement des indemnités journalières en cas de service dans l'armée, le service civil et la protection civile ainsi qu'en cas de maternité. Le congé prévu par le projet 39

RS 834.1

3971

FF 2019

entraînera une perte de gain qu'il faut indemniser, il est donc logique de régler la nouvelle allocation de prise en charge dans la LAPG.

4.1.3.2

Ayants droit

Le droit à l'allocation de prise en charge est prévu pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé qui requièrent de ce fait un niveau accru d'accompagnement et de soins. La définition du rapport parent-enfant repose sur la filiation au sens de l'art. 252 CC. L'état civil des parents est par conséquent sans importance.

Il convient de prendre autant que possible en considération la diversité des constellations familiales pour éviter qu'un enfant soit désavantagé du fait de la situation de sa famille. Le droit à l'allocation pour les parents nourriciers et les beaux-parents doit également être fixé au niveau du règlement.

Gravité de l'atteinte à la santé Les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé doivent pouvoir prétendre à l'allocation. La définition d'une atteinte grave à la santé se trouve à l'art. 16j P-LAPG; elle doit établir une distinction entre une atteinte grave à la santé et une maladie bénigne ou des conséquences légères d'un accident, mais aussi être suffisamment générale pour englober au mieux toute la diversité des atteintes graves à la santé.

Le degré de gravité de l'atteinte à la santé est d'abord déterminé par les symptômes observés. Les atteintes à la santé doivent impliquer un traitement médical hospitalier ou ambulatoire de longue durée (plusieurs mois); cette durée est toutefois souvent difficile à évaluer dès le départ.

Une condition liée à une durée minimale de traitement du cas a été écartée, car elle ne permet pas d'exclure, par exemple, les fractures du bras ou de la jambe. Faire d'une durée minimale une condition d'octroi de l'indemnité retarderait en outre la naissance du droit, puisqu'il faudrait d'abord attendre l'échéance du délai requis.

Cela irait à l'encontre du but visé par l'indemnité, à savoir apaiser rapidement une situation aiguë.

Les atteintes graves à la santé nécessitent une prise en charge intense de la part des parents. L'importance du besoin de prise en charge dépend essentiellement de l'âge de l'enfant, en plus de la gravité de l'atteinte à la santé. Ainsi, pour un même problème de santé, un enfant de 4 ans ne nécessite pas le même accompagnement qu'un jeune de 15 ans. La même atteinte à la santé peut donc être jugée plus ou moins grave selon l'âge de l'enfant.

Rapports de travail des parents Le droit à la prestation
prend naissance lorsqu'au moins un des parents exerce une activité professionnelle salariée ou indépendante et interrompt cette activité. L'octroi de la prestation n'est soumis à aucune durée d'assurance ni à aucune durée d'exercice d'une activité professionnelle préalables. L'exigence d'une durée d'assurance préalable vise à prévenir le tourisme des prestations; étant donné toutefois qu'une maladie ou un accident grave survient en général de manière brusque et inattendue, 3972

FF 2019

il est peu probable qu'une personne se rende en Suisse spécifiquement pour obtenir une allocation de prise en charge. Une telle condition n'est donc pas nécessaire.

Pour obtenir l'allocation de prise en charge, il suffit que l'un des parents exerce une activité professionnelle. Il convient de renoncer à la condition selon laquelle les deux parents sont tenus d'avoir un emploi pour pouvoir toucher cette allocation. On peut présumer que, dans les familles qui ont plusieurs enfants, l'un des parents est entièrement occupé par la prise en charge de l'enfant gravement atteint dans sa santé et que, du fait de la répartition des rôles (activité professionnelle / prise en charge des enfants), il n'est plus en mesure de s'occuper de ses autres enfants. Dans de telles situations, il est important de pouvoir garantir aussi l'éducation des frères et soeurs. Par ailleurs, les parents devraient aussi pouvoir bénéficier de ce congé lorsque l'un s'occupe de l'enfant et exerce une activité professionnelle alors que l'autre ne fait ni l'un ni l'autre. Ils n'y auraient pas droit s'il était exigé que les deux parents travaillent. La condition selon laquelle un parent au moins doit exercer une activité professionnelle garantit la prise en compte de toutes les constellations familiales.

C'est pourquoi il faut s'accommoder du fait que les familles au sein desquelles un seul parent travaille pourraient être avantagées; toutefois, il ne s'agit sans doute que de quelques cas, puisqu'un quart des familles seulement compte un seul parent ayant une activité professionnelle40. L'obligation de fournir des moyens de preuve (certificat médical) et la possibilité de contrôle dont dispose l'employeur permettront d'éviter d'éventuels abus.

4.1.3.3

Durée du congé et allocation

L'avant-projet prévoit, dans un nouvel art. 329h P-CO, un congé de prise en charge d'une durée maximale de quatorze semaines pour les parents qui s'occupent d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident.

Durant ce congé, une indemnité journalière du régime des APG est versée (art. 16i à 16n P-LAPG). Le congé peut être pris dans les limites d'un délai-cadre de 18 mois, qui commence à courir le jour pour lequel la première indemnité journalière est versée, ce qui permet de garantir qu'il n'est pas raccourci lorsque le degré de gravité de l'atteinte à la santé n'a pas encore été déterminé lorsqu'il commence. Le congé doit être pris en une fois ou sous la forme de journées (art. 329h, al. 4, P-CO).

Un congé de prise en charge rémunéré de quatorze semaines permet d'améliorer nettement la situation des parents concernés puisque ces derniers disposent ainsi d'un congé approprié dont ils peuvent convenir avec l'employeur. Il est toutefois clair que la durée de quatorze semaines ne couvre pas la durée nécessaire à la prise en charge de maladies graves, en particulier le cancer. L'investissement que représente la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé est considérable et l'évolution de l'état de santé varie d'un cas à l'autre. De même, le besoin de prise en charge d'un enfant varie selon son âge et le degré de l'atteinte à la santé. Il est aussi possible que, durant un certain temps, l'enfant n'ait plus besoin de l'aide supplémen40

www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > 20 - Situation économique et sociale de la population > Égalité entre les femmes et les hommes > Conciliation emploi et famille > Participation des mères et des pères au marché de l'emploi

3973

FF 2019

taire de ses parents au point de leur permettre de reprendre leur activité professionnelle, puis qu'il nécessite de nouveau une présence à une période ultérieure de sa vie, par exemple à la suite d'une rechute.

Selon les indications du Registre suisse du cancer de l'enfant (RSCE) 41, l'investissement dans la prise en charge d'un enfant atteint d'un cancer représente en moyenne 155 jours de travail au cours de l'année qui suit l'apparition de la maladie. Il s'agit là du nombre de jours qu'un parent doit passer à l'hôpital avec son enfant, auxquels il faut ajouter le temps consacré aux soins à fournir en dehors des visites à l'hôpital. Cela signifie que, l'année de la survenance d'un cancer chez un enfant, l'un de ses parents sera en principe absent de son travail pendant une année entière (env. 240 jours de travail). Si l'on additionne les jours de prise en charge au cours de la deuxième année (1 à 2 jours par semaine) et le temps nécessaire aux contrôles de suivi à long terme, les parents exerçant une activité professionnelle sont absents de leur travail durant près de 320 jours au total (240 l'année de la survenance de la maladie, puis 80 répartis sur les années suivantes). Cela montre que la durée du congé, soit quatorze semaines pouvant être réparties sur 18 mois, ne couvre pas entièrement le besoin d'assistance des enfants atteints d'un cancer. Elle peut aussi se révéler insuffisante pour couvrir les besoins que nécessitent d'autres maladies. En cas de maladie grave, la durée proposée permet donc uniquement d'alléger la situation et ne couvre pas tous les cas de figure. Par ailleurs, le congé de prise en charge comprend aussi les atteintes à la santé d'une durée plus courte.

4.1.3.4

Montant et calcul de l'allocation de prise en charge

Le montant de l'allocation de prise en charge est calculé selon les règles en vigueur dans la LAPG. L'indemnité journalière s'élève à 80 % du revenu obtenu avant le début du droit à l'allocation et elle est plafonnée. Cette règle s'applique indépendamment du fait que les jours de congé soient pris en une seule fois ou par journées (cf. commentaire de l'art. 16k P-LAPG).

4.1.3.5

Coordination avec les autres assurances sociales

Exclusion d'autres prestations, mais primauté de l'allocation de maternité En principe, aucune prestation provenant d'autres assurances sociales ne peut être octroyée pendant que l'allocation de prise en charge est perçue. L'allocation de maternité fait toutefois exception, en ce sens que lorsqu'un enfant naît avec une maladie grave, la mère a droit à une allocation de maternité, et non à une allocation de prise en charge (art. 16g P-LAPG). Il existe une deuxième exception en ce qui

41

Schindler Mathias, Kuehni Claudia. Betreuungsaufwand für Eltern von Kindern und Jugendlichen mit Krebs in der Schweiz, Berne, 2014; www.ofsp.admin.ch > Stratégie & politique > Mandats politiques & plans d'action > Faktenblatt Betreuungsaufwand Kinderkrebs (uniquement en allemand).

3974

FF 2019

concerne le supplément pour soins intenses octroyé par l'assurance-invalidité42: ce supplément peut être versé en même temps qu'une allocation de prise en charge.

Cotisations aux assurances sociales En vertu de l'art. 19a LAPG, des cotisations à l'AVS, à l'AI, au régime des APG et à l'assurance-chômage seront payées sur l'allocation de prise en charge, et la part de l'employeur sera assumée par le Fonds de compensation du régime des APG.

Comme cette disposition s'applique à toutes les allocations régies par la LAPG, il n'est pas nécessaire de la modifier.

Assurance-accidents En vertu de l'art. 7, al. 1, de l'ordonnance du 20 décembre 1982 sur l'assuranceaccidents (OLAA)43, les indemnités versées au titre de la LAPG sont expressément reconnues comme salaire au sens de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'assuranceaccidents (LAA)44, de sorte que le maintien de l'assurance est garanti durant le congé de prise en charge.

Prévoyance professionnelle La couverture d'assurance de la prévoyance professionnelle doit également s'appliquer durant le congé de prise en charge, raison pour laquelle l'art. 8, al. 3, P-LPP est complété par la mention du congé de prise en charge prévu à l'art. 329h P-CO.

Allocations familiales dans l'agriculture L'art. 10, al. 4, de la loi fédérale du 20 juin 1952 sur les allocations familiales dans l'agriculture (LFA)45 doit être adapté de sorte qu'une personne qui perçoit une allocation de prise en charge puisse continuer à toucher des allocations familiales dans l'agriculture.

4.1.3.6

Dispositions complémentaires et coordination avec le code des obligations

Le projet prévoit d'introduire dans le CO le droit à un congé de prise en charge d'une durée maximale de quatorze semaines (art. 329h P-CO) et, dans la LAPG, le droit à l'allocation qui sera versée pendant ce congé pour compenser la perte de gain qui en découle. Le projet prévoit en outre une protection contre le licenciement tant que l'assuré a droit à un congé de prise en charge, mais pendant une période de six mois au plus (art. 336c, al. 1, let. cbis, P-CO), ainsi que l'interdiction de réduire les vacances d'un parent bénéficiant d'un congé de prise en charge (art. 362, al. 1, P-CO). La coordination avec le droit au salaire selon l'art. 324a CO se fera conformément à l'art. 324b, al. 1, CO, qui prévoit que l'employeur est libéré de l'obligation de payer le salaire si au moins les quatre cinquièmes de celui-ci sont couverts 42 43 44 45

Art. 42ter, al. 3, LAI RS 832.202 RS 832.20 RS 836.1

3975

FF 2019

par une assurance légale obligatoire. Si les 80 % du salaire dépassent le montant maximal de l'indemnité journalière fixé dans la LAPG, ou si, en raison de ce plafond, l'allocation de prise en charge ne couvre pas 80 % du salaire, les dispositions sur le maintien du salaire visées aux art. 324a et 324b CO sont applicables.

4.1.4

Extension des bonifications pour tâches d'assistance

Extension du droit aux cas d'allocation pour impotence faible Actuellement, les proches aidants n'ont droit à une bonification pour tâches d'assistance de l'AVS que si la personne exigeant des soins bénéficie d'une allocation pour impotence moyenne ou grave46. Le projet prévoit d'accorder aussi ce droit en cas d'impotence faible. D'une part, une vie autonome à la maison s'en trouvera encouragée. D'autre part, cela favorisera la reconnaissance des prestations d'assistance fournies par les proches aidants. Les conditions requises pour obtenir le droit de faire valoir une impotence faible montrent qu'il s'agit déjà de situations susceptibles d'impliquer un investissement considérable de la part des proches aidants: une personne au bénéfice d'une allocation pour impotence faible a besoin d'aide pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie. On entend par là des actes tels que se vêtir, se dévêtir, se lever, s'asseoir, se coucher, manger, faire sa toilette, aller aux toilettes ou se déplacer. Une allocation pour impotence faible est également octroyée lorsqu'une personne a besoin d'une surveillance permanente, nécessite des soins astreignants en raison de son infirmité ou requiert l'aide d'autrui en raison d'une grave atteinte des organes sensoriels ou d'une grave infirmité corporelle l'empêchant d'entretenir des contacts sociaux sans l'assistance d'un tiers47.

Extension du droit aux couples formant une communauté de vie La prise en charge d'un partenaire doit être reconnue de la même manière que celle d'un conjoint, raison pour laquelle les couples formant une communauté de vie doivent être assimilés aux couples mariés. C'est pourquoi le droit aux bonifications pour tâches d'assistance doit être octroyé aux partenaires qui s'occupent d'un proche exigeant des soins au bénéfice d'une allocation pour impotent. Une communauté de vie ne donne droit à une bonification pour tâches d'assistance que lorsque le couple fait ménage commun depuis au moins cinq ans.

4.1.5

Adaptation du droit à l'allocation pour impotent et au supplément pour soins intenses en cas de séjour à l'hôpital

L'allocation de prise en charge vise à permettre aux parents de prendre soin de leur enfant gravement atteint dans sa santé sans devoir abandonner leur activité lucrative ni subir une diminution trop grande de leur revenu. Outre la possibilité de soigner son enfant à domicile, elle donne aussi droit à une allocation lorsque l'enfant est 46 47

Art. 29septies LAVS Art. 66bis, al. 1, RAVS et 37, al. 1, 2, let. a et b, et 3, let. a à d, RAI.

3976

FF 2019

hospitalisé et qu'il a besoin d'un accompagnement de l'un de ses parents. Par contre, le droit à l'allocation pour impotent et au supplément pour soins intenses d'un enfant en situation de handicap est supprimé chaque jour que celui-ci passe à l'hôpital.

Cette règle avait été prise pour éviter une double indemnisation, étant donné que, lorsque ces prestations de l'AI ont été introduites, on partait de l'idée que les enfants hospitalisés n'avaient pas besoin d'être pris en charge par leurs parents. Or, plusieurs participants à la consultation l'ont relevé à juste titre, cette règle se trouve en contradiction avec l'idée qui préside à la création de l'allocation de prise en charge.

Il va de soi que les enfants qui sont tributaires d'une allocation pour impotent et d'un supplément pour soins intenses ont tout autant besoin de la présence de leurs parents que les autres lorsqu'ils sont hospitalisés, car l'hôpital ne peut souvent pas garantir leur prise en charge complète. De plus, cette situation occasionne souvent des frais supplémentaires pour la famille, notamment lorsqu'il faut faire garder les frères et soeurs par des tiers. Et si la famille recourt à un soutien extérieur, par exemple une infirmière, pour prendre en charge l'enfant en situation de handicap, elle doit continuer de payer des charges pendant la période d'hospitalisation, même lorsqu'elle ne perçoit pas la prestation, du moins un certain temps.

Le présent projet constitue ainsi une bonne occasion d'améliorer la situation des parents d'enfants handicapés. Il y a lieu de maintenir pendant une certaine durée le versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses pour les enfants hospitalisés, par analogie avec la règle qui prévaut pour les adultes. Cela concorde avec le but de l'allocation de prise en charge, en donnant la possibilité aux parents d'accompagner leur enfant lors d'un séjour à l'hôpital sans subir une perte considérable de revenu.

La proposition consiste à reconnaître aux enfants le même droit à l'allocation pour impotent qu'aux adultes en leur appliquant l'art. 67, al. 2, LPGA, en vertu duquel l'allocation pour impotent est suspendue seulement après que l'assuré a passé un mois civil complet à l'hôpital. La suppression de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses en cas
de séjour dans un home doit en revanche être maintenue, car l'entrée dans un home vise précisément à garantir un accompagnement complet à l'assuré pendant une période plus longue.

4.2

Harmonisation des tâches et des finances

Le projet de loi ne contient aucune nouvelle tâche que la Confédération serait tenue de réaliser suite à l'adoption du texte concerné. Ce nouvel acte n'a donc aucune répercussion sur le budget de la Confédération.

3977

FF 2019

4.3

Mise en oeuvre

4.3.1

Absences professionnelles de courte durée

La modification proposée s'applique uniquement aux rapports de travail de droit privé. La mise en oeuvre des absences professionnelles de courte durée relève ainsi avant tout de la responsabilité des employeurs et des personnes concernées. En cas de litige, l'exécution du CO est du ressort des tribunaux civils.

4.3.2

Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident

Les organes chargés de l'exécution du régime des APG sont les caisses de compensation AVS. La demande d'allocation de prise en charge se fera au moyen d'un formulaire. Dans le cadre de cette démarche, l'employeur et l'ayant droit annonceront à la caisse de compensation AVS les jours de congé pris et le salaire correspondant.

La requête devra être accompagnée du certificat médical attestant de la gravité de l'atteinte à la santé. En sollicitant l'indemnité correspondant au congé, l'employeur évaluera la crédibilité du certificat médical. Compte tenu de la longueur du délaicadre (18 mois), l'employeur doit avoir la possibilité, passée une certaine durée, d'exiger un nouveau certificat attestant la persistance de l'atteinte à la santé.

Contrairement à la démarche applicable à l'allocation de maternité, où le droit à la prestation peut être prouvé au moyen du certificat de naissance de l'enfant, la détermination des conditions d'octroi du droit dans le cas d'une atteinte grave à la santé est complexe. Cette indemnité étant toutefois prévue pour des situations aiguës, la décision concernant l'existence ou non de ce droit doit être rendue rapidement, car il en ira de l'éventuelle réduction ou interruption de l'activité professionnelle de l'un ou l'autre des parents qui, en cas de refus du droit à une allocation, peut entraîner des pertes financières considérables.

Les caisses de compensation AVS ne sont pas organisées pour vérifier si les conditions médicales requises sont remplies, mais pour examiner les droits de l'assuré et son activité professionnelle, et pour verser les prestations correspondantes. L'idée de confier l'examen des aspects médicaux aux offices AI n'a pas été retenue, car les procédures de ces organes ne sont pas adaptées à des situations d'urgence.

4.3.3

Extension du droit aux bonifications pour tâches d'assistance de l'AVS

Une bonification pour tâches d'assistance sera octroyée à toute personne assurée qui prend en charge son partenaire, à condition qu'ils fassent ménage commun depuis au moins cinq ans sans interruption. Les caisses de compensation pourront demander le contrat de bail ou une attestation de domicile pour vérifier si les conditions sont remplies. En revanche, l'extension du droit aux bonifications pour tâches d'assistance aux cas d'impotence faible n'entraîne aucune modification de procédure.

3978

FF 2019

5

Commentaire des dispositions

5.1

Code des obligations (CO)

Art. 329, titre marginal Le titre marginal de l'art. 329 CO doit être complété du fait de l'inclusion de nouvelles dispositions relatives au congé de prise en charge.

Art. 329b, al. 3 Lorsqu'une travailleuse prend un congé de maternité, ses vacances ne peuvent pas être réduites. En vertu de la let. b, il en ira de même lorsqu'un travailleur ou une travailleuse bénéficieront d'un congé et d'une allocation de prise en charge.

Art. 329g Le nouvel art. 329g P-CO introduit un congé pour la prise en charge d'un membre de la famille ou du partenaire atteints dans leur santé. La notion de membre de la famille est à prendre dans le sens prévu à l'art. 29septies, al. 1, P-LAVS pour le droit aux bonifications pour tâches d'assistance. Il s'agira donc des parents en ligne directe ascendante ou descendante (les parents et les enfants principalement) et des frères et soeurs, auxquels s'ajoutent le conjoint et les beaux-parents, de même que le partenaire qui fait ménage commun avec le travailleur depuis au moins cinq ans de manière ininterrompue. Les enfants sont ceux avec lesquels le lien de filiation est établi au sens du droit civil.

La durée du congé est de trois jours par cas. Le cas se rapporte à une affection déterminée. Le droit au congé peut donc être exercé une seule fois par affection et non de manière répétée, même s'il se peut que, lors d'affections de longue durée, des crises répétées nécessitent un soutien à chaque fois. Il s'agit ici de déterminer non pas quels sont les cas où un soutien est nécessaire, mais ceux dans lesquels le travailleur aura droit à un congé payé au sens de la nouvelle disposition. De plus, pour éviter que le nombre de congés ne soit trop élevé, un plafond annuel de dix jours par année est introduit. Une personne pourra par exemple s'occuper d'un enfant malade, de son père, de son frère et d'un autre enfant malade la même année si les autres conditions sont remplies, pour peu que le total des absences ne dépasse pas dix jours.

L'année à considérer est l'année de service.

Les affections donnant droit au congé sont des atteintes à la santé. Cette notion générale vise à ne pas limiter les causes à une maladie ou à un accident et à inclure aussi, par exemple, les cas de handicap.

La nécessité de la prise en charge se rapporte entre autres à la possibilité qu'auraient d'autres
personnes d'assurer la prise en charge. Le cercle à considérer sera également celui de la famille. Un autre membre de la famille doit être disponible et pouvoir raisonnablement intervenir. Il ne doit donc, par exemple, pas habiter trop loin.

Le fait qu'une autre personne ait droit à un congé n'exclut pas en soi le droit. Il reviendra à la famille de déterminer quelle personne prend le congé à quel moment.

Ensuite, la nécessité sera jugée selon le besoin. Une prise en charge sera par exem3979

FF 2019

ple plus facilement considérée comme nécessaire dans le cas d'un enfant mineur ou en bas âge.

Un certificat médical n'est pas exigé explicitement à teneur du texte légal, comme c'est le cas à l'art. 36, al. 3, LTr. Toutefois, au vu des règles générales applicables en droit civil en matière de preuve (art. 8 CC), l'employé doit prouver les faits qui donnent naissance à son droit, ce qui se fera en général au moyen d'un certificat médical. Avec cette solution, le travailleur peut invoquer d'autres éléments pour apporter la preuve, et l'employeur peut faire de même pour infirmer le contenu du certificat médical fourni. Les règles générales du droit civil sont ici déterminantes.

La relation entre la nouvelle disposition et l'art. 324a CO se fait de la manière suivante. Le congé de trois jours est indépendant de l'art. 324a. La conséquence principale est que les conditions de cet article, comme l'empêchement de travailler ou le contingent annuel d'absence, ne s'appliquent pas. Une personne reste toutefois libre de prendre congé sur le contingent visé à cet article sans entamer celui visé à l'art. 329g P-CO. Ce sera principalement le cas si des enfants ou l'un des conjoints ont besoin d'une prise en charge, car ils relèvent des deux dispositions. Les personnes qui ont plusieurs enfants notamment pourront s'occuper d'eux en se libérant sur la base de l'art. 324a CO, sans épuiser le maximum de dix jours annuels fixé au nouvel art. 329g P-CO. Il faut bien entendu pour cela que les conditions de l'art. 324a CO soient remplies.

L'art. 324a CO peut aussi s'appliquer à l'échéance du congé de trois jours, pour autant que les conditions de cette disposition soient remplies et en particulier que le crédit annuel correspondant n'ait pas été épuisé. Un congé pourrait théoriquement aussi être accordé à l'issue des trois jours en vertu de l'art. 329, al. 3, CO. Toutefois, le temps libre octroyé conformément à cette disposition ne dure en principe pas plus de trois jours.

La relation entre les art. 329g et 329h P-CO (congé pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident) devra elle aussi être clarifiée. Au vu des fonctions différentes de ces congés et du temps nécessaire pour établir la nécessité du congé de longue durée, le congé de trois jours prévu à
l'art. 329g P-CO pourra être accordé indépendamment du congé visé à l'art. 329h P-CO. Dans l'hypothèse, par exemple, où la maladie d'un enfant serait explicitement prouvée mais où sa gravité requerrait des clarifications supplémentaires ou serait contestée, les parents pourraient prendre le congé visé à l'art. 329g P-CO pour s'occuper de leur enfant malade.

Art. 329h La réglementation du droit au congé de prise en charge est un ajout indispensable à l'allocation de prise en charge. Si le droit à ce congé n'était pas réglé dans le CO, les parents seraient en principe tenus de travailler. Le droit au congé au sens du CO n'est cependant accordé que si le congé est indemnisé par le régime des APG.

Conformément à la durée de la prestation visée dans la LAPG, le congé est accordé pour quatorze semaines au plus, pris en une fois ou sous la forme de journées, dans les limites d'un délai-cadre de 18 mois (cf. commentaire de l'art. 16l, al. 2, P-LAPG).

3980

FF 2019

Le congé de prise en charge doit également être accordé lorsqu'un seul des parents exerce une activité lucrative ou lorsqu'au moins un parent travaille à temps partiel (ch. 4.1.3.2). Si tous deux travaillent, le congé de prise en charge est en principe réparti entre eux à parts égales, de sorte que chacun bénéficie de sept semaines de congé. Les parents doivent toutefois aussi avoir la possibilité d'établir, d'un commun accord, une répartition différente. Cet accord est suffisant pour modifier la répartition. L'employeur n'a pas à l'approuver, mais il en est informé conformément à l'al. 3. Cette précision permet de garantir, d'une part, que les deux parents jouissent dans la même mesure de leur droit et, d'autre part, que la durée du congé n'excède pas quatorze semaines. Le congé peut être pris en une fois ou sous la forme de journées. Il doit également être possible aux parents de prendre leur part de congé simultanément.

Pour préserver autant que possible les intérêts de l'employeur, celui-ci doit être informé immédiatement des modalités selon lesquelles le congé est pris, c'est-à-dire de la répartition du congé entre les parents et des jours de congé prévus. Cette obligation s'applique aussi à tout changement apporté aux modalités.

Art. 336c, al. 1, let. cbis Le travailleur bénéficie d'une protection contre le licenciement en temps inopportun tant que dure le droit au congé visé à l'art. 329h P-CO, mais au maximum pendant six mois à compter du jour pour lequel la première indemnité journalière est versée.

La protection débute lorsque le droit naît (art. 16k, al. 3, P-LAPG).

Art. 362, al. 1 Pour qu'ils ne puissent pas être modifiés au détriment des travailleurs, les nouveaux art. 329g et 329h P-CO sont ajoutés à la liste des dispositions impératives.

5.2

Loi sur le travail (LTr)

Art. 36, al. 3 et 4 Les adaptations sont commandées à des fins de coordination avec l'art. 329g P-CO.

Al. 3: la nouvelle disposition, plus large que le droit en vigueur, prévoit que le congé de prise en charge est accordé pour aider un enfant, mais aussi un autre membre de la famille ou le partenaire du proche aidant.

Al. 4: conformément au droit en vigueur et au congé proposé dans le CO, la durée du congé est également de trois jours par cas. Elle est aussi plafonnée à dix jours par année sauf pour les enfants, pour maintenir le niveau de protection actuel. La situation dans le CO est différente, car la prise en charge des enfants peut également se fonder sur l'art. 324a CO.

3981

FF 2019

5.3

Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS)

Art. 29septies, al. 1 La prise en charge du partenaire doit aussi donner droit à une bonification pour tâches d'assistance. Il y a situation de fait assimilable à une communauté de vie conjugale lorsque les partenaires sont considérés comme ayant de fait une vie de couple lorsqu'ils font ménage commun depuis au moins cinq ans. Cette durée a été fixée par analogie avec les dispositions en vigueur dans la prévoyance professionnelle48. Mais contrairement à la prévoyance professionnelle49, l'octroi de la prestation présuppose ici l'existence d'un ménage commun qui puisse servir de référence pour la mise en oeuvre.

Par ailleurs, la prise en charge d'une personne au bénéfice d'une allocation pour impotence faible de l'AVS, de l'AI, de l'assurance-accidents obligatoire ou de l'assurance militaire donnera également droit à une bonification pour tâches d'assistance.

5.4

Loi fédérale sur l'assurance-invalidité (LAI)

Art. 42bis, al. 4 En dérogation à l'art. 67, al. 2, LPGA, le droit actuel prévoit la suspension du versement de l'allocation pour impotent pour les mineurs et celle du supplément pour soins intenses (qui n'est de toute façon destiné qu'à des enfants) les jours durant lesquels un mineur séjourne dans un établissement hospitalier. Cette dérogation doit être abrogée, de sorte que le versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses ne soit suspendu que lorsqu'un mineur a passé au moins un mois civil complet à l'hôpital. Cette réglementation s'applique d'ores et déjà pour les adultes.

Outre l'égalité de traitement entre mineurs et adultes, cette modification garantit l'égalité de traitement entre parents professionnellement actifs (qui auront désormais droit à une allocation de prise en charge) et parents qui cessent de travailler pour accompagner leur enfant handicapé et qui, pour cette raison, étaient jusqu'à présent confrontés à des difficultés financières considérables lorsque leur enfant doit être hospitalisé.

Le maintien du versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses pendant une hospitalisation permet aux parents d'être auprès de leur enfant malade sans subir de pertes financières.

Le Conseil fédéral opte pour une égalité de traitement entre adultes et mineurs, étant donné que la suspension de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses est, en cas de séjour de longue durée à l'hôpital, supportable pour les assu48 49

Art. 20a, al. 1, let. a, LPP ATF 134 V 369

3982

FF 2019

rés, et que les frais supplémentaires qui en découleront pour l'AI seront limités. Lors d'une longue hospitalisation, la structure de prise en charge est fournie par l'hôpital, de sorte que les parents peuvent alors adapter l'organisation du ménage et de la vie de famille, n'ayant plus forcément, dans ce cas, à assumer eux-mêmes un accompagnement de longue durée.

5.5

Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP)

Art. 8, al. 3, 1re phrase L'ajout du congé visé à l'art. 329h P-CO garantit que la couverture d'assurance est maintenue au même niveau durant le congé de prise en charge.

5.6

Loi fédérale sur l'assurance-accidents (LAA)

Art. 16, al. 3 Il n'est pas possible de percevoir une indemnité journalière de l'assurance-accidents en même temps qu'une allocation de prise en charge du régime des APG. La présente disposition est complétée dans ce sens.

5.7

Loi sur les allocations pour perte de gain (LAPG)

Titre La présente loi réglementera désormais aussi l'allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident (allocation de prise en charge) visée à l'art. 329h P-CO. Aussi est-il judicieux de simplifier le titre de cet acte.

Art. 16g, al. 1, let. f Lorsqu'un enfant naît avec une grave maladie, ses parents n'ont pas droit à l'allocation de prise en charge. La mère a droit à l'allocation de maternité, qui a la priorité. Lorsque les conditions sont remplies, les parents peuvent cependant avoir droit à l'allocation de prise en charge à la suite de l'allocation de maternité.

L'ajout «si elle concerne le même enfant» règle les cas des enfants qui viennent au monde dans une famille comprenant déjà un enfant gravement atteint dans sa santé (frère ou soeur). Le cas échéant, il peut y avoir simultanément un droit à l'allocation de maternité et un droit à l'allocation de prise en charge. À noter que seul le père peut bénéficier de ce dernier durant le congé de maternité.

3983

FF 2019

Titre précédant l'art. 16i L'allocation de prise en charge se distingue des autres allocations du régime des APG sur de nombreux points; c'est pourquoi elle est réglementée dans une section particulière (IIIb).

Art. 16i

Ayants droit

Al. 1: la qualité d'ayant droit suppose nécessairement qu'il y ait un lien de filiation au sens de l'art. 252 CC. En revanche, l'état civil des parents est sans importance.

Un droit ne peut être accordé que pour la prise en charge d'un enfant de moins de 18 ans (art. 14 CC). Au moins un des parents doit interrompre son activité lucrative (let. a). Le taux d'occupation exercé jusque-là ne joue aucun rôle. C'est la perte de salaire occasionnée qui est déterminante pour l'octroi de la prestation. Les deux parents n'ont droit qu'à une seule allocation.

Al. 2: le droit est accordé par cas de maladie ou d'accident. Si l'enfant est atteint d'une autre maladie grave, les parents peuvent demander une nouvelle allocation.

Les maladies en lien avec la maladie principale, qui découlent par exemple de l'affaiblissement du système immunitaire, ne sont pas considérées comme de nouvelles maladies et ne constituent donc pas de nouveaux cas. Une rechute qui survient après une longue période sans symptôme est en revanche reconnue comme un nouveau cas. Aux termes de la présente disposition, un autre droit peut aussi prendre naissance dans une même famille lorsqu'un deuxième enfant tombe gravement malade ou est victime d'un accident grave. Il en va de même lorsque plusieurs enfants sont gravement blessés à la suite d'un même accident et qu'il en résulte de graves séquelles.

Al. 3 Let. a: le droit doit également être accordé à des personnes qui s'occupent bel et bien de l'enfant comme des parents, alors qu'aucun lien de filiation juridique ne les relie. Une telle réglementation existe déjà dans le cadre de l'AVS, qui accorde une rente d'orphelin aux enfants recueillis dont les parents nourriciers décèdent 50. Les dispositions du règlement reprendront ce modèle.

Let. b: comme c'est le cas pour l'allocation de maternité, les personnes en incapacité de travail doivent aussi pouvoir recourir à la prestation. Cela concerne en particulier les personnes au bénéfice d'une rente AI ou d'une indemnité journalière de l'AI ou de l'assurance-chômage.

Art. 16j

Enfant gravement atteint dans sa santé

La définition fixée dans cet article vise à distinguer une atteinte grave à la santé d'une atteinte moyenne. On juge moyenne une atteinte à la santé qui nécessite certes des hospitalisations ou des consultations médicales régulières et rend ainsi la vie quotidienne plus difficile, mais dont on peut prévoir une issue positive ou sous contrôle (par ex. fracture, diabète, pneumonie).

50

Art. 25, al. 3, LAVS et 49 RAVS

3984

FF 2019

Let. a: l'allocation de prise en charge a pour but d'alléger des situations difficiles dues non seulement à une maladie aiguë, mais aussi à d'autres causes telles que l'aggravation soudaine d'un état de santé qui se détériorait jusque-là imperceptiblement, ou la détérioration nette de l'état de santé d'un enfant malade chronique.

Let. b: une atteinte grave à la santé se distingue souvent par la nature indéterminée et difficilement prévisible de son évolution. Cela peut signifier que le processus de guérison s'accompagne de hauts et de bas, qu'il faut s'attendre à des rechutes et que l'issue du processus de guérison est incertaine. C'est pourquoi la disposition mentionne l'éventualité du décès, dont le moment de survenance est lui aussi marqué du sceau de l'incertitude. Le critère de la difficulté à prévoir va de pair avec la supposition que l'atteinte à la santé évoluera sur une longue période; néanmoins, il convient de ne fixer aucune durée minimale.

Let. c: un enfant gravement atteint dans sa santé a besoin de la prise en charge étroite d'au moins un de ses parents, laquelle comprend également un accompagnement lors des consultations chez le médecin ou à l'hôpital, ou la participation aux entretiens. Par ailleurs, un enfant gravement malade n'est pas forcément tributaire en permanence d'une prise en charge. Il peut parfaitement maîtriser la situation pendant certaines phases et avoir besoin d'aide à d'autres moments. C'est notamment le cas des personnes souffrant de maladies psychiques. À noter que la prise en charge étroite inclut aussi des phases durant lesquelles elle se limite à une simple présence (par ex. durant un long séjour hospitalier) et où l'aide et les soins doivent être assurés exclusivement par des professionnels. C'est pourquoi les soins et la prise en charge ne font ici l'objet d'aucune définition, à la différence des législations régissant l'assurance-invalidité51 ou l'assurance-maladie52.

L'intensité de la prise en charge dépend essentiellement de la gravité et du type du problème de santé, de l'âge de l'enfant et de la situation familiale (réseau social, autres contraintes liées à la maladie, au chômage, à la situation professionnelle, etc.).

Let. d: l'accompagnement, l'assistance ou les soins doivent être d'une importance telle qu'ils nécessitent l'interruption de l'activité
lucrative d'au moins un des parents. Cette nécessité doit être attestée par un certificat médical. Il n'y a pas lieu d'exiger un nombre minimal d'actes ou d'heures d'encadrement et de soins par jour, même si l'accompagnement soutenu d'un enfant implique souvent des actes d'assistance et de soins ­ comme le contrôle des fonctions corporelles, certaines mesures médicales simples, une aide pour accomplir des actes ordinaires de la vie, l'accompagnement aux thérapies et aux consultations médicales, etc.

Art. 16k

Délai-cadre, début et fin du droit à l'allocation

Al. 1: pour que les parents puissent prendre congé lorsque l'enfant a besoin d'eux, le congé doit être pris dans un délai-cadre de 18 mois. Le délai-cadre sert à délimiter le congé et empêche que celui-ci ne s'étende sur plusieurs années. L'employeur peut ainsi mieux planifier les absences. De plus, le délai-cadre comporte une protection 51 52

Cf. circulaire sur l'invalidité et l'impotence dans l'assurance-invalidité (CIIAI); ch. 8074.

Art. 7 de l'ordonnance du 29 septembre 1995 sur les prestations de l'assurance des soins; RS 832.112.31.

3985

FF 2019

contre le licenciement durant six mois, conformément à l'art. 336c, al. 1, let. cbis, P-CO. Il garantit également que cette protection ne puisse être prolongée indéfiniment.

Al. 2: étant donné que la gravité de l'atteinte à la santé n'est pas toujours déterminée dès le début et qu'elle n'est reconnue, dans certaines circonstances, qu'après coup, il convient de ne pas faire commencer le délai-cadre à l'apparition des premiers symptômes. Cela aurait pour effet de raccourcir le délai-cadre, ce qui ne serait pas adapté à la situation. C'est pourquoi le délai-cadre commence à courir le jour pour lequel la première indemnité journalière est versée. En outre, les jours pris sous une autre forme de congé (par ex. vacances, compensation des heures supplémentaires ou congé de prise en charge au sens de l'art. 329g P-CO) ne sont pas inclus dans le délai-cadre et ne le raccourcissent donc pas. Les vacances prises pendant le délaicadre ne le prolongent pas.

Al. 3 et 4: ces dispositions règlent l'extinction du droit. Le droit s'éteint avant que toutes les indemnités journalières aient été perçues si l'enfant n'est plus gravement atteint dans sa santé. Autrement dit, le congé doit être pris selon les besoins. C'est la raison pour laquelle le droit ne s'éteint pas si l'enfant entre dans sa majorité pendant le délai-cadre.

Art. 16l

Forme et nombre des indemnités journalières

Al. 1: comme les allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité, l'allocation de prise en charge est versée sous la forme d'indemnités journalières.

Al. 2 et 3: le nombre maximal d'indemnités journalières est de 98. Durant le délaicadre, le congé peut être pris en une fois ou sous la forme de journées. Comme les allocations sont dues également les jours non ouvrés (par ex. samedi et dimanche), deux indemnités journalières supplémentaires sont versées par tranche d'indemnisation de cinq jours. Autrement dit, une indemnité journalière est versée durant 98 jours tandis que le congé de prise en charge ne peut compter à proprement parler que 70 jours. Cela garantit que l'indemnisation représente 80 % du revenu de l'activité lucrative (cf. commentaire de l'art. 16m).

Al. 4: cette disposition règle le droit à l'allocation des parents entre eux lorsqu'ils remplissent tous deux les conditions d'octroi. Tandis que les parents jouissent en principe chacun de la moitié du congé, tout en ayant la possibilité de se répartir le congé différemment (cf. art. 329h, al. 3, P-CO), il est précisé que l'allocation est attribuée au parent qui prend le congé.

Art. 16m

Montant et calcul de l'allocation

On calcule le montant de l'indemnité journalière en divisant par 30 le revenu moyen de l'activité lucrative obtenu avant le début du droit à l'allocation. L'indemnité journalière équivaut à 80 % du salaire mensuel brut et correspond, en cas de travail à temps partiel, au taux d'occupation réduit. Cela signifie qu'elle est aussi versée les jours pendant lesquels l'assuré ne travaille normalement pas en raison du temps partiel.

3986

FF 2019

L'indemnité journalière est limitée à 196 francs par jour. Si l'allocation de prise en charge ne couvre pas 80 % du salaire en raison de ce plafonnement, les dispositions relatives au maintien du paiement du salaire en vertu des art. 324a et 324b CO s'appliquent.

Art. 16n

Rapport avec des prestations des autres assurances sociales

Al. 1: cette disposition prévient toute surindemnisation. En principe, aucune autre indemnité journalière n'est versée durant la perception de l'allocation de prise en charge. Il est toutefois possible que la naissance d'un enfant survienne pendant qu'un autre enfant est gravement atteint dans sa santé. Le cas échéant, les parents doivent avoir droit à l'allocation de prise en charge. Conformément au commentaire relatif à l'art. 16g, l'allocation de maternité prime cette indemnité.

Al. 2: le congé de maternité peut être suivi par le versement d'une allocation de prise en charge. Le montant de celle-ci est au moins égal à celui des prestations des assurances mentionnées dans la disposition.

Art. 20, al. 1 Les dispositions relatives à la prescription et à la facturation ont une portée générale, elles figurent donc au chap. VI. Dispositions diverses. Le droit aux allocations non versées s'éteint cinq ans après le dernier jour de congé pris.

5.8

Loi fédérale sur les allocations familiales dans l'agriculture (LFA)

Art. 10, al. 4 Pour que les allocations familiales continuent à être versées durant le congé de prise en charge visé à l'art. 329h P-CO, cette disposition doit être complétée par la mention de ce congé.

6

Conséquences

6.1

Conséquences financières pour les assurances sociales

6.1.1

Régime des allocations pour perte de gain (APG)

Il est difficile de calculer les conséquences financières qu'aura pour le régime des APG l'introduction d'un congé de prise en charge pour les parents qui s'occupent d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident, car le nombre de familles concernées est lui aussi difficile à évaluer. Si l'on table sur le fait qu'une hospitalisation d'une durée de plus de deux semaines indique que l'enfant concerné est gravement malade ou victime d'un accident grave, il devrait s'agir d'un maximum de 4500 familles par an. Avec un congé d'une durée 3987

FF 2019

maximale de 98 jours, les coûts pour le régime des APG pourraient atteindre environ 74 millions de francs par an, ce qui nécessiterait un relèvement du taux de cotisation au régime des APG (aujourd'hui de 0,45 %) de l'ordre de 0,016 point de pourcentage. Cette augmentation se traduirait par une légère majoration des cotisations sociales pour les employeurs et pour les salariés. En vertu de l'art. 27 LAPG, la cotisation ne peut dépasser 0,5 % du revenu. Le projet ne prévoit pas de modifier cette valeur limite.

6.1.2

Assurance-vieillesse et survivants (AVS)

En 2017, sur plus de deux millions de bénéficiaires de rentes AVS, quelque 5600 ont sollicité une bonification pour tâches d'assistance, occasionnant un relèvement de la rente pour 3700 personnes. En moyenne, le montant de la rente a augmenté de 40 francs par mois.

En 2017, l'AVS a versé des prestations à hauteur de quelque 43,3 milliards de francs. En comparaison, le coût des bonifications pour tâches d'assistance, à savoir 2,6 millions de francs, ne pèse pas très lourd. Si les bonifications pour tâches d'assistance étaient aussi accordées pour une impotence faible, 2000 personnes recevraient une rente plus élevée. Il en résulterait pour l'AVS un surcoût de 1 million de francs par an.

Les coûts supplémentaires générés par l'extension du droit aux bonifications pour tâches d'assistance pour les partenaires sont impossibles à chiffrer sur la base des données actuelles. Mais il y en aura, car l'octroi d'une bonification pour tâches d'assistance peut conduire dans certains cas au relèvement de la rente (notamment pour les personnes ayant un revenu modeste qui renoncent à leur activité lucrative ou qui réduisent leur taux d'occupation, et qui ne sont pas mariées à une personne qui a un revenu supérieur).

Les charges administratives qui en découlent pour les caisses de compensation sont insignifiantes, car le système informatique existe déjà et devrait simplement être modifié aux fins d'inclure l'allocation pour impotence faible.

6.1.3

Assurance-invalidité (AI)

La poursuite du versement de l'allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses durant le premier mois passé à l'hôpital génèrera des coûts supplémentaires de l'ordre de 2,5 millions de francs par année pour l'assurance-invalidité.

3988

FF 2019

6.2

Conséquences pour la Confédération en matière de finances et de personnel

6.2.1

Absences professionnelles de courte durée

La loi sur le travail ne s'applique que de manière limitée aux collaborateurs de l'administration fédérale (art. 36a LTr). De même, les dispositions du CO ne s'appliquent que de manière subsidiaire au personnel de la Confédération (art. 6, al. 2, LPers) ou à certaines catégories de personnel définies par le Conseil fédéral (art. 6, al. 5, LPers). Étant donné que l'art. 40, al. 3, let. c, O-OPers prévoit déjà un congé pour la prise en charge de proches, le congé de trois jours proposé dans le présent projet ne s'appliquera qu'aux catégories de personnel soumises au CO. Les conséquences en matière de personnel pour la Confédération sont donc négligeables.

6.2.2

Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident

L'introduction d'un congé pour les parents qui prennent en charge un enfant gravement atteint dans sa santé aura très peu de conséquences sur le plan financier. Puisque, en tant qu'employeur, la Confédération garantit la poursuite du versement du salaire à 100 % pendant le congé de prise en charge et qu'elle appliquera la réglementation prévue dans le présent projet, elle devra payer les coûts salariaux non couverts par le régime des APG (80 % du salaire avec plafond fixé à 196 francs par jour). Le congé de prise en charge n'entraînera pas de conséquences en matière de personnel pour la Confédération.

6.2.3

Adaptation du droit à l'allocation pour impotent et au supplément pour soins intenses en cas de séjour à l'hôpital

Aux termes de l'art. 77, al. 2, LAI, l'allocation pour impotent et le supplément pour soins intenses octroyés par l'AI sont financés par la Confédération. L'art. 78, al. 5, LAI précise que la contribution de la Confédération se situe entre 37,7 et 50 % des dépenses annuelles de l'assurance.

Parmi d'autres prestations, l'allocation pour impotent et le supplément pour soins intenses sont compris dans les 3,6 milliards de francs financés en 2018 par la Confédération en faveur de l'AI. Le présent projet de modification n'aura aucune conséquence financière pour la Confédération, puisque les coûts supplémentaires à prévoir s'inscrivent dans la fourchette (entre 37,7 et 50 % des dépenses annuelles de l'AI) prévue pour fixer la contribution de la Confédération.

3989

FF 2019

6.3

Conséquences pour les cantons et les communes ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

A priori, l'introduction d'un congé de prise en charge n'entraînera pas de conséquences en matière de personnel, car le système administratif déjà en place, bien rodé, pour les APG en cas de service et de maternité peut très bien voir son domaine d'application étendu aux parents qui prennent en charge un enfant gravement malade.

On ne peut toutefois pas exclure que, suivant le droit du travail applicable, les employés des administrations cantonales ou communales ou d'autres institutions puissent profiter des nouvelles réglementations. En outre, l'introduction d'une allocation de prise en charge dans le régime des APG (en relation avec l'art. 329h P-CO) se traduira probablement par des économies du fait de la suppression de prestations sociales ou de prestations de soutien. Au vu du peu de cas concernés, l'incidence devrait cependant être minime.

6.4

Conséquences pour les entreprises et l'économie

6.4.1

Étude relative à l'analyse d'impact de la réglementation

Le 5 juillet 2017, l'OFSP a chargé la société B,S,S. Volkswirtschaftliche Beratung, à Bâle, de mener une analyse d'impact de la réglementation (AIR) portant sur les modifications de loi proposées, selon la décision de principe du Conseil fédéral du 1er février 201753. À cet effet, B,S,S. a effectué une enquête auprès d'entreprises de toute la Suisse dans le but, d'une part, de comparer la situation actuelle et les effets attendus des nouvelles dispositions prévues et, d'autre part, d'analyser les coûts et les bénéfices que celles-ci pourraient générer du point de vue des entreprises, de l'économie et de la société. Pour cette enquête, l'OFSP a remis à B,S,S. un échantillon de 6000 petites, moyennes et grandes entreprises représentatif de toutes les régions du pays. Les sociétés retenues employaient toutes au moins deux personnes. Au total, 2246 entreprises ont participé à l'enquête en ligne, ce qui correspond à un taux de réponse de 38 %. Si l'on extrapole ces chiffres, l'étude représente 302 000 entreprises employant 4,61 millions de personnes.

Dans son analyse, B,S,S. a pondéré les résultats obtenus pour chaque question de l'AIR en fonction du nombre d'entreprises ou du nombre d'employés. Elle a ensuite vérifié la plausibilité des résultats auprès de représentants des entreprises et des employés ainsi qu'auprès de plusieurs spécialistes de la prise en charge de malades par des proches aidants. Ce groupe d'experts ayant jugé plausibles les résultats de l'analyse, la base de données peut être considérée comme très bonne et les résultats comme solides. S'agissant des résultats présentés ci-après, il convient de relever que 53

Frey Miriam, Suri Mirjam, Meier Harald. Regulierungsfolgenabschätzung zu den kurzen und länger dauernden Arbeitsabwesenheiten für Betreuungsaufgaben kranker Familienmitglieder, Bâle, 2018.

3990

FF 2019

l'enquête s'adressait à la direction des entreprises ou aux responsables du personnel.

Le point de vue du personnel fait par conséquent défaut. L'étude portait sur les règles proposées dans l'avant-projet. Par conséquent, les modifications faites après la consultation, comme l'introduction d'un plafond pour le congé de courte durée, n'y sont pas intégrées.

Position de principe des entreprises Pour les entreprises, les absences professionnelles entraînent des coûts élevés. L'AIR montre qu'au cours des dernières années, diverses entreprises en Suisse ont développé leurs propres mesures en matière de politique familiale, dont certaines tiennent compte de la prise en charge de proches. Les principales raisons à cela étaient de préserver la santé, la motivation et la performance du personnel et de se positionner comme un employeur attractif. Les résultats de l'enquête menée par B,S,S. ainsi qu'une étude du Fonds national suisse54 révèlent que, pour mieux concilier activité professionnelle et prise en charge de proches, les entreprises proposent des solutions spécifiques aux situations rencontrées. À cet égard, la culture prônée par l'entreprise exerce une influence considérable. Les solutions convenues au cas par cas peuvent cependant s'avérer coûteuses. Elles risquent en outre de susciter des tensions tant entre employeur et employés qu'au sein des équipes de travail55.

6.4.2

Absences professionnelles de courte durée

Pratique actuelle Toutes les entreprises peuvent potentiellement être concernées par des absences pour tâches d'assistance de leur personnel. Pourtant, seule la moitié des entreprises interrogées a indiqué que des employés avaient fait valoir leur droit à une absence professionnelle de courte durée pour prendre en charge un membre de la famille malade ou victime d'un accident durant l'année 2016. Comme l'illustre le graphique 1 cidessous, 84 % des employés ont pu prendre congé ou bénéficier de modèles de temps de travail flexibles pour faire face à la maladie d'un enfant ou d'un parent en vertu du règlement de l'entreprise. Pour 15 % des employés ayant un enfant malade et 12 % de ceux qui ont un parent malade, la décision relevait de la hiérarchie.

54 55

Berthod Marc-Antoine, Papadaniel Yannis, Brzak Nicole. Les proches aidants: entre monde du travail et accompagnement de fin de vie, Lausanne, 2017.

Frey Miriam, Suri Mirjam, Meier Harald. Regulierungsfolgenabschätzung zu den kurzen und länger dauernden Arbeitsabwesenheiten für Betreuungsaufgaben kranker Familienmitglieder, Bâle, 2018, p. 30.

3991

FF 2019

Congé pour la prise en charge d'un enfant ou d'un parent

Graphique 1

Source: enquête de B,S,S. auprès des entreprises, pondération selon le nombre de collaborateurs. N = 2246, bien que la question soit restée sans réponse pour respectivement 2 % (enfants) et 8 % (parents) des personnes. Autre: décision prononcée surtout par la hiérarchie.

Exemple de lecture du tableau: 84 % des employés peuvent en principe prendre un congé de courte durée pour s'occuper de leur enfant.

Dans les entreprises dans lesquelles le personnel peut prendre congé, la majorité bénéficie du maintien de son salaire. Il existe toutefois des différences: ­

Enfants: 87 % des personnes touchent leur salaire pour les jours d'absence dus à la maladie d'un enfant mineur. Selon l'AIR, le fait que 13 % ne jouissent pas du versement de leur salaire en dépit de l'obligation définie dans le CO peut signifier que certaines entreprises ignorent la législation en vigueur, qui est complexe.

­

Parents: en cas de congé accordé pour la prise en charge d'un parent malade, 70 % des personnes bénéficient du maintien de leur salaire, bien que les entreprises ne soient pas légalement tenues de le verser. Le cas échéant, le personnel qui ne perçoit pas de salaire compense généralement les congés par le biais d'un horaire de travail flexible ou d'heures supplémentaires.

3992

FF 2019

Graphique 2 Maintien du salaire en cas de prise en charge d'un enfant ou d'un parent

Source: enquête de B,S,S. auprès des entreprises, pondération selon le nombre de collaborateurs. N = 2144 (à l'exclusion des entreprises n'accordant pas de congé), bien que la question soit restée sans réponse pour respectivement 13 % (enfants) et 17 % (parents) des personnes.

Exemple de lecture du tableau: pour 30 % du personnel, le salaire n'est pas versé en cas d'absence de courte durée pour une prise en charge (parents).

Des analyses approfondies montrent qu'en termes de maintien du versement du salaire, les grandes entreprises sont plus généreuses que les PME. Suivant la taille et le type de l'entreprise, il est plus ou moins facile de compenser une absence et, partant, de continuer à verser le salaire (par ex. une boulangerie doit immédiatement trouver une solution de remplacement, alors que le travail peut attendre une journée dans une autre entreprise).

Coûts actuels pour les entreprises Selon l'AIR, les absences professionnelles de courte durée dues à la prise en charge d'un proche qui sont rémunérées sont actuellement justifiées dans 70 % des cas par l'accompagnement d'un enfant malade et dans 30 % des cas par celui d'un autre membre de la famille ou d'un proche malade ou nécessitant des soins. La durée moyenne de l'absence est de 1,4 heure par employé et par an 56. Cela représente ­ pour un tarif moyen de 60 francs par heure de travail ­ des coûts salariaux moyens estimés à 80 francs par an et par personne. Le total des absences professionnelles de courte durée assorties d'un droit légal au maintien du paiement du salaire (par ex.

maladie de l'employé lui-même) s'élève en moyenne à 22 heures par employé et par an.

56

Frey Miriam, Suri Mirjam, Meier Harald. Regulierungsfolgenabschätzung zu den kurzen und länger dauernden Arbeitsabwesenheiten für Betreuungsaufgaben kranker Familienmitglieder, Bâle, 2018.

3993

FF 2019

Extrapolé à l'échelle de la Suisse, l'ensemble des absences professionnelles de courte durée dues à la prise en charge d'un membre de la famille engendre ainsi pour les entreprises des coûts annuels directs de 360 millions de francs. Si l'on considère exclusivement les absences prises pour s'occuper de membres de la famille envers lesquels il n'existe pas d'obligation d'entretien (par ex. les parents), les coûts directs pour les entreprises s'élèvent à 100 millions de francs par an.

Parallèlement aux coûts directs, les absences professionnelles génèrent aussi pour les entreprises des coûts indirects (notamment démarches organisationnelles, heures supplémentaires d'autres collaborateurs), auxquels s'ajoutent ce qu'il est convenu d'appeler des coûts d'opportunité (par ex. mandats manqués, perte de productivité).

Ces coûts additionnels sont deux à quatre fois supérieurs aux coûts directs. Les absences professionnelles de courte durée entraînent ainsi pour l'ensemble des entreprises des coûts totaux estimés entre 1,08 et 1,8 milliard de francs par an. Les coûts annuels directs et indirects résultant d'absences pour la prise en charge de membres de la famille envers lesquels il n'existe pas d'obligation d'entretien (par ex. les parents) représentent au total entre 300 et 500 millions de francs. À l'heure actuelle, les entreprises assument ces coûts de plein gré, vu qu'aucune obligation légale ne les contraint à verser le salaire des employés qui sont absents pour soutenir un proche.

Coûts estimés d'une nouvelle réglementation sur les absences professionnelles de courte durée rémunérées Une nouvelle réglementation des absences professionnelles de courte durée assortie du maintien du paiement du salaire bénéficierait au tiers des employés, autrement dit aux personnes qui ne perçoivent actuellement pas de salaire lorsqu'ils prennent congé pour aider des membres de la famille envers lesquels il n'existe pas d'obligation d'entretien (par ex. un parent). Il en résulterait pour les entreprises un surcoût direct de quelque 30 millions de francs par an. Le total des frais supplémentaires représenterait ainsi entre 90 et 150 millions de francs par an ­ en plus des 300 à 500 millions de francs découlant des absences professionnelles dues à la prise en charge d'un membre de la famille envers lequel il n'existe
pas d'obligation d'entretien que les entreprises supportent aujourd'hui volontairement. Selon B,S,S., il s'agit là d'une estimation optimiste. Les résultats de l'enquête ne permettent pas d'évaluer si l'information sur la nouvelle réglementation induira un changement de comportement des employés susceptible d'entraîner une hausse additionnelle des coûts pour les entreprises.

Ces estimations ne tiennent pas compte du plafond de dix jours par année ni de la définition plus étroite des bénéficiaires potentiels (famille proche et partenaire), limitations proposées dans le projet et nouvelles par rapport à l'avant-projet. On peut supposer que ces deux restrictions limiteront les coûts pour les entreprises, vu que certains congés qui étaient possibles selon l'avant-projet ne le sont plus dans le projet. La prévisibilité est aussi améliorée, ce qui facilite la gestion des congés. Le plafond entraînera probablement un travail administratif supplémentaire.

Point de vue des entreprises Environ la moitié des entreprises interrogées considère qu'il est dans son principe pertinent et nécessaire de réglementer clairement l'extension des absences profes3994

FF 2019

sionnelles de courte durée dues à la prise en charge d'autres membres de la famille; l'autre moitié est opposée à la nouvelle réglementation.

6.4.3

Absences professionnelles de longue durée

Pratique actuelle Environ 5 % des entreprises interrogées font état d'une absence de longue durée due à la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident au cours de ces dernières années. Une solution d'un commun accord a pu être trouvée dans pratiquement toutes ces entreprises. De manière générale, les mesures possibles énumérées par les entreprises consistaient pour la personne employée à réduire (provisoirement) son taux d'occupation, puis à prendre un congé non payé de plus ou moins longue durée. L'enquête indique qu'il n'existe pas de solution standardisée pour gérer ce type de situation. Le cas échéant, les parties concernées cherchent une solution individualisée adaptée à la situation, en particulier un assouplissement du mode de travail, qui peut prendre différentes formes; les plus fréquemment citées sont un lieu de travail flexible (télétravail), une répartition flexible des horaires de travail (horaires à la carte ou modèles annualisés) et la compensation des heures supplémentaires. Lorsqu'aucune solution convenable n'est trouvée, les employés se déclarent souvent eux-mêmes malades.

Coûts actuels Comme les solutions sont trouvées au cas par cas, les entreprises ne peuvent pas présenter les coûts dus aux absences professionnelles de longue durée.

Pas de coûts supplémentaires entraînés par la nouvelle réglementation d'un congé financé par le régime des APG pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident L'allocation de prise en charge proposée occasionnera un surplus de travail négligeable pour les caisses de compensation.

Comme pour les absences professionnelles de courte durée, il faut s'attendre à ce que cette allocation génère elle aussi des coûts indirects supplémentaires pour les entreprises. Bien que l'AIR ne permette pas d'affirmer sans équivoque si, dans le cas des absences de longue durée également, ces coûts sont deux à quatre fois supérieurs aux coûts directs (ce qui donnerait des coûts de 36 à 320 millions de francs), il semble évident que le total excédera les coûts directs. Contrairement au risque observé en lien avec les absences de courte durée, il n'y a toutefois pas à craindre que la nouvelle réglementation des absences de longue durée se traduise par
des changements de comportement susceptibles d'entraîner des coûts supplémentaires.

Point de vue des entreprises Alors que près des deux tiers des entreprises interrogées saluent la réglementation de la prise en charge d'enfants gravement atteints dans leur santé en raison d'une maladie ou d'un accident, environ un tiers considère qu'un congé de prise en charge cou-

3995

FF 2019

vert par la LAPG serait inutile ou trop onéreux. Elles craignent en particulier les difficultés organisationnelles qui résulteraient de ces absences.

6.5

Conséquences sociales

6.5.1

Absences professionnelles de courte durée

La nouvelle réglementation des absences professionnelles de courte durée permettra de mieux concilier activité professionnelle et prise en charge de membres de la famille gravement atteints dans leur santé. En créant les mêmes conditions pour toutes les personnes exerçant une activité professionnelle, elle garantit aussi la sécurité du droit. En effet, les employés pourront exécuter des tâches d'accompagnement à court terme auprès des membres de la famille sans devoir craindre des problèmes juridiques avec leur employeur, ni une perte de salaire. Grâce à la nouvelle réglementation, l'aide fournie au sein de la famille jouira en outre d'une meilleure reconnaissance de la société.

6.5.2

Absences professionnelles de longue durée

L'introduction d'un congé pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident renforce la sécurité juridique pour tous les acteurs impliqués, et ce sans mettre en danger la situation financière, la carrière ou la prévoyance vieillesse ultérieure des proches aidants. Le présent projet favorise la reconnaissance de l'aide fournie par les proches et améliore la situation des parents concernés. Enfin, le congé de prise en charge permet tant aux hommes qu'aux femmes de mieux concilier vie professionnelle et prise en charge de proches.

Aucune autre répercussion financière potentielle n'a pu être chiffrée de manière fiable dans l'AIR (consécutive par ex. à la sensibilisation, à l'amélioration des connaissances concernant les absences professionnelles de courte durée et aux changements de comportement des entreprises et des employés qui peuvent en découler).

Un congé de prise en charge destiné aux parents d'un enfant gravement atteint dans sa santé peut par ailleurs aussi constituer un allègement pour le système de santé: lorsque des enfants sont hospitalisés, il est essentiel pour les unités pédiatriques que les parents participent au moins à une partie de leur prise en charge.

6.5.3

Extension du droit aux bonifications pour tâches d'assistance de l'AVS

Des bonifications pour tâches d'assistance seront désormais aussi octroyées pour la prise en charge de personnes présentant une impotence faible. L'autonomie des personnes à domicile s'en trouvera encouragée, tout comme la reconnaissance de l'aide fournie par les proches. L'extension de ce droit au partenaire est, pour sa part, gage

3996

FF 2019

d'égalité de traitement entre couples mariés ou non en butte à des problèmes pratiques similaires.

6.6

Conséquences environnementales

Aucune des modifications présentées n'a de répercussion sur l'environnement.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

7.1.1

Absences professionnelles de courte durée

La compétence législative de la Confédération en matière de droit privé se fonde sur l'art. 122, al. 1, de la Constitution (Cst.)57.

7.1.2

Allocation pour les parents qui prennent en charge un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident

L'allocation de prise en charge accordée aux parents d'enfants gravement atteints dans leur santé en raison d'une maladie ou d'un accident se fonde sur l'art. 117, al. 1, Cst., qui charge la Confédération de légiférer sur l'assurance-maladie et sur l'assurance-accidents. Le législateur fédéral peut donc régler la couverture des risques «maladie» et «accident» par un régime d'assurance. La prise en charge des enfants par leurs parents est une prestation en faveur d'une personne (enfant) qui est touchée par l'une de ces deux catégories de risque. Le régime des APG est une modalité possible de prise en charge par l'assurance, c'est-à-dire un mode de financement de cette prestation. Mais le législateur n'est pas tenu de régler la prise en charge de prestations uniquement dans les lois qui régissent usuellement l'assurance-maladie ou l'assurance-accidents (loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie [LAMal]58; LAA). L'intégration de la prestation des parents dans l'assurance obligatoire des soins serait inopportune: les parents ne sont pas des fournisseurs de prestations au sens de la LAMal, et la compensation de la perte de gain n'est pas du ressort de l'assurance obligatoire des soins. C'est pourquoi il convient de rattacher le financement de la prestation des parents au régime le plus adéquat, à savoir à celui des APG. Cela signifie en particulier qu'à l'avenir, les cotisations visées à l'art. 27 LAPG se fonderont toujours sur l'art. 117, al. 1, Cst.

lorsqu'elles serviront à financer l'allocation pour perte de gain destinée aux parents d'enfants gravement atteints dans leur santé. Le fait que les employeurs soient tenus de payer des cotisations finançant aussi une prestation fondée sur l'art. 117, al. 1, Cst. est conforme à cette disposition: la pratique et la doctrine en matière d'assu57 58

RS 101 RS 832.10

3997

FF 2019

rance-accidents et d'allocations pour perte de gain admettent en effet que des cotisations d'assurances sociales puissent aussi être prélevées auprès des employeurs sans base constitutionnelle expresse.

L'intégration dans la LAPG de l'allocation de prise en charge pour les parents d'enfants gravement atteints dans leur santé a pour conséquence que le champ d'application personnel de cette allocation est séparé de l'affiliation à l'assurance obligatoire des soins. Ainsi, les travailleurs frontaliers domiciliés dans l'Union européenne qui ont fait usage du droit d'option pour s'affilier (avec leur famille) à l'assurancemaladie de leur lieu de domicile pourront bénéficier d'une allocation pour perte de gain alors que leur enfant gravement atteint dans sa santé n'est pas assuré en Suisse auprès de l'assurance obligatoire des soins. Cela ne contrevient pas à l'art. 117 Cst., car le législateur peut prévoir un champ d'application personnel plus large pour une prestation particulière (ici l'allocation pour perte de gain) que pour les prestations de l'assurance-maladie.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

7.2.1

Absences professionnelles de courte durée

Les absences professionnelles de courte durée dues à la prise en charge d'un proche ne font l'objet d'aucun accord international conclu par la Suisse.

7.2.2

Allocation pour la prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident

Afin de faciliter la libre circulation, l'UE a instauré des règlements visant à coordonner les systèmes nationaux de sécurité sociale. La Suisse participe à ce système de coordination depuis l'entrée en vigueur, le 1 er juin 2002, de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (accord sur la libre circulation des personnes, ALCP59). Le droit de l'UE ne prévoit pas l'harmonisation des systèmes nationaux de sécurité sociale. Les États membres sont libres de déterminer comme ils l'entendent les modalités de leur propre système, à condition de respecter les principes de coordination du droit européen. En vertu de la Convention du 4 janvier 1960 instituant l'Association européenne de libre-échange (AELE)60, cela vaut aussi pour les relations entre la Suisse et les autres États de l'AELE.

L'allocation pour perte de gain en faveur des personnes qui font du service ne fait pas partie des risques réglementés par le droit international en matière de sécurité sociale et peut donc être aménagée sans contrainte aucune. Les prestations accordées en cas de maternité et l'allocation de prise en charge pour les parents d'enfants 59 60

RS 0.142.112.681 RS 0.632.31

3998

FF 2019

gravement atteints dans leur santé en raison d'une maladie ou d'un accident peuvent en revanche être considérées sur le plan international comme des allocations familiales ou comme des prestations assimilables aux allocations de maternité. Leur organisation doit donc respecter les engagements internationaux repris par la Suisse dans ce domaine.

En vertu de l'ALCP et de la convention AELE révisée, la Suisse applique les règlements (CE) nos 883/2004 (R 883/2004)61 et 987/200962. Ces règlements sont également valables pour certaines prestations comprises dans le champ d'application de la LAPG (art. 28a LAPG). En vertu du règlement no 883/2004, la Suisse est tenue de traiter les ressortissants d'un État de l'UE ou de l'AELE de la même manière que les citoyens suisses (art. 4) et de leur accorder une allocation de prise en charge d'enfants gravement atteints dans leur santé dans la mesure où ils remplissent les conditions requises, en tenant compte si nécessaire des périodes d'assurance applicables dans l'État de l'UE ou de l'AELE concerné (art. 6). L'allocation doit également être octroyée en cas de domiciliation dans l'espace de l'UE ou de l'AELE (art. 7), et donc notamment aux frontaliers.

Les mesures de la présente révision sont compatibles avec les dispositions de coordination précitées.

Aucune convention internationale ratifiée par la Suisse dans le domaine de la sécurité sociale ne prévoit de prestations similaires à celles du présent projet. La convention no 183 sur la protection de la maternité de l'Organisation internationale du travail63, ratifiée par la Suisse, ne prévoit aucune allocation de ce type.

En ce qui concerne le Conseil de l'Europe, la recommandation n o R (96) 5 du Comité des ministres aux États membres sur la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale préconisait, en 1996 déjà, la création de possibilités de congés pour soigner des membres de la famille malades et handicapés (§ 10)64. On peut également mentionner ici la recommandation Rec (2006) 19 du Comité des ministres aux États membres relative aux politiques visant à soutenir une parentalité positive65, selon laquelle il conviendrait de mettre en oeuvre, dans l'optique d'une meilleure conciliation vie familiale-vie professionnelle, des mesures permettant de s'occuper d'un enfant handicapé ou malade
(ch. 6.3, par. i, de l'annexe à la recommandation).

En introduisant une allocation de prise en charge d'enfants gravement atteints dans leur santé en raison d'une maladie ou d'un accident, le présent projet va dans la direction indiquée par les deux recommandations.

61

62 63 64 65

Règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, JO L 166 du 30 avril 2004, p. 1, dans la version applicable à la Suisse selon l'annexe II, section A, ALCP (RS 0.142.112.681) respectivement l'annexe K, appendice 2, section A, de la convention AELE (RS 0.632.31). Une version consolidée non contraignante de ce règlement est publiée dans le RS 0.831.109.268.1.

RS 0.831.109.268.11 RS 0.822.728.3 Consultable sous search.coe.int/cm/Pages/result_details.aspx?ObjectId= 09000016804c6f1e.

Consultable sous archive.crin.org/en/library/legal-database/council-europerecommendation-rec200619-policy-support-positive-parenting.html.

3999

FF 2019

7.3

Forme de l'acte à adopter

Les modifications proposées exigent l'adoption d'une loi au sens formel.

7.4

Assujettissement au frein aux dépenses

L'art. 159, al. 3, let. b, Cst. établit que les dispositions relatives aux subventions ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses, s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs, doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil. Le présent avant-projet n'entraînant pas de coûts supplémentaires pour la Confédération, il n'est pas assujetti au frein aux dépenses.

7.5

Délégation de compétences législatives

Le droit des parents nourriciers doit être réglé par analogie avec les dispositions pertinentes dans l'AVS (art. 25, al. 3, LAVS et art. 49 du règlement du 31 octobre 1947 sur l'assurance-vieillesse et survivants [RAVS]66). Le droit des personnes qui ne remplissent pas les conditions générales requises en raison d'une incapacité de travail ou de chômage doit être réglé par analogie avec les dispositions relatives à l'allocation de maternité (art. 16b, al. 3, LAPG et 29 du règlement du 24 novembre 2004 sur les allocations pour perte de gain [RAPG] 67).

7.6

Protection des données

Le congé de courte durée visé à l'art. 329g P-CO élargit le droit au congé de trois jours aux membres de la famille et au partenaire. Pour pouvoir faire valoir le droit au congé pour la prise en charge du proche en question, le travailleur doit donc fournir des indications sur son lien de parenté ou sur la relation de fait qu'il entretient avec lui. Comme certaines des données portent sur la santé, il s'agit de données sensibles au sens de l'art. 3, let. c, ch. 3, de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD)68, dont le traitement est soumis à des exigences particulières (cf. par ex. art. 12, al. 2, let. c, ou 14 LPD).

Dans cette triangulation, les principes relatifs au traitement des données fixés par la LPD requièrent une attention particulière. Ainsi, les données relatives au tiers concerné doivent être limitées au strict nécessaire et accessibles uniquement aux personnes qui en ont besoin pour gérer le rapport de travail (c.-à-d. pour confirmer le droit au congé; application du principe de proportionnalité; art. 4, al. 2, LPD). Les

66 67 68

RS 831.101 RS 834.11 RS 235.1

4000

FF 2019

tiers concernés doivent en outre être informés de la communication des données à l'employeur du proche aidant (principe de transparence; art. 4, al. 4, LPD).

En droit privé, un certificat médical tel qu'exigé à l'art. 36, al. 3, LTr n'est pas nécessaire. Tout moyen de preuve peut être apporté pour établir le droit au congé. Le travailleur devra néanmoins livrer des données concernant la maladie ou l'accident du parent ou du proche ainsi que le besoin de prise en charge, et l'employeur aura de ce fait à traiter des données de personnes tierces. Le traitement pourra se fonder sur la nécessité d'exécuter le contrat de travail (art. 328b, al. 1, CO), vu qu'il s'agit d'accorder un congé au travailleur. Le proche qui bénéficie de la prise en charge aura de même consenti à ce traitement de données en fournissant le certificat médical ou les informations pertinentes en vue de leur transmission à l'employeur. De plus, la finalité du traitement des données sert son intérêt, ce qui est à prendre en compte dans la pesée des intérêts visée à l'art. 13, al. 1, LPD.

L'art. 329h P-CO prévoit le congé en relation avec les art. 16i ss P-LAPG. Le traitement par l'employeur des données relatives à l'enfant gravement atteint dans sa santé, qui est aussi lié directement à l'exécution du contrat de travail, sert les intérêts de l'enfant. Les principes de la LPD relatifs au traitement des données doivent là aussi être respectés.

4001

FF 2019

Annexe

Budget du régime des APG avec un congé de prise en charge Le tableau ci-dessous donne l'évolution des coûts à prévoir pour le régime des APG de 2022 (année de l'entrée en vigueur probable du congé de prise en charge) à 2035.

Les dépenses du régime des APG comprennent les allocations en cas de service, de maternité et de prise en charge par les parents d'un enfant gravement atteint dans sa santé.

Les dépenses inscrites dans le tableau se basent sur le scénario démographique A-00-2015 de l'OFS, qui prévoit un solde migratoire annuel constant de 60 000 personnes jusqu'en 2030, puis de 30 000 personnes jusqu'en 2040. L'évolution des paramètres économiques (indice des salaires nominaux et indice suisse des prix à la consommation) correspond aux indices utilisés pour le budget 2019 et le plan financier 2018­2020 de la Confédération (état au 19.12.2018). Pour les années qui suivent le plan financier, les chiffres reposent sur les perspectives établies par l'Administration fédérale des finances. Les hypothèses concernant l'évolution économique sont les suivantes: Année

2018

2019

2020

2021

2022

dès 2023

Indice des salaires

0.8

1.0

1.2

1.3

1.5

1.9

Changements structurels

0.3

0.3

0.3

0.3

0.3

0.3

Prix

0.9

0.5

0.7

1.0

1.0

1.0

4002

FF 2019

Budget du régime des APG avec un congé de prise en charge de 14 semaines Montants en millions de francs, aux prix de 2018 Année

Dépenses

Service

Maternité

Prise en charge

Total dépenses

État: décompte 2017 Recettes

Résultat de Produit du répartition capital

Résultat d'exploitation

Total recette

Résultat de Produit des Résultat répartition placements d'exploitation

Niveau du Fonds APG Capital

Dont TC serTC materliquidités vice, en % nité, en % du salaire du salaire

1)

2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030 2031 2032 2033 2034 2035

851 833 812 791 783 815 809 805 804 803 803 852 855 859 864 870 876 882 939

873 890 904 917 929 971 985 997 1008 1018 1027 1075 1084 1092 1100 1108 1116 1124 1181

0 0 0 0 0 67 68 69 70 71 71 72 74 74 75 76 77 77 78

Remarques: 1) Taux de cotisation 0,45 % du salaire 2) TC: taux de cotisation

4003

1724 1723 1716 1708 1712 1854 1862 1871 1882 1892 1901 1999 2012 2025 2039 2054 2069 2083 2198

1675 1700 1728 1756 1782 1808 1840 1872 1903 1934 1964 1994 2024 2055 2086 2118 2150 2182 2213

­49 ­23 12 47 70 ­46 ­22 0 21 42 63 ­4 12 30 47 64 81 99 15

61 26 22 25 29 30 30 30 31 32 34 35 36 37 39 41 44 48 50

12 3 34 72 99 ­16 7 30 52 74 97 31 48 67 86 105 125 146 65

1036 1040 1068 1133 1221 1193 1189 1207 1247 1309 1393 1410 1444 1497 1568 1658 1767 1896 1942

Indicateurs

878 870 896 957 1043 1012 1005 1020 1056 1115 1196 1211 1242 1292 1360 1446 1552 1677 1721

2)

2)

TC prise en charge, en % du salaire 2)

0.23 0.22 0.21 0.20 0.20 0.20 0.20 0.19 0.19 0.19 0.18 0.19 0.19 0.19 0.19 0.18 0.18 0.18 0.19

0.23 0.24 0.24 0.24 0.23 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 0.23 0.23 0.24

0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.017 0.017 0.017 0.017 0.016 0.016 0.016 0.016 0.016 0.016 0.016 0.016 0.016 0.016

TC total, en % du salaire

0.45 0.45 0.45 0.44 0.43 0.46 0.46 0.45 0.45 0.45 0.44 0.45 0.45 0.45 0.45 0.44 0.43 0.43 0.45

Liquidités en % des dépenses

2)

51 50 52 56 61 55 54 54 56 59 63 61 62 64 67 70 75 81 78

FF 2019

4004