19.052 Message concernant l'approbation d'un protocole modifiant la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et l'Irlande du 20 septembre 2019

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'un arrêté fédéral portant approbation d'un protocole modifiant la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et l'Irlande, en vous priant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

20 septembre 2019

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2019-2049

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Condensé Étant donné que la lutte contre l'évasion fiscale injustifiée des sociétés multinationales est devenue une préoccupation majeure de la communauté internationale, l'Organisation de coopération et de développement économiques a lancé en 2013, en collaboration avec le G20, un projet de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (Base Erosion and Profit Shifting, BEPS).

En 2015, ce projet a abouti à la publication de plusieurs rapports.

Certains de ces rapports contiennent des propositions de dispositions visant à modifier les conventions actuelles contre les doubles impositions (CDI), notamment des dispositions portant sur la mise en oeuvre des standards minimaux contre l'utilisation abusive des conventions fiscales et sur l'amélioration du règlement des différends. Dans le but de mettre en oeuvre ces modifications rapidement et de manière efficiente, un groupe de plus de 100 États et territoires, parmi lesquels la Suisse, a créé un instrument multilatéral (convention BEPS). Près de 70 États et territoires, dont la Suisse, ont signé la convention BEPS le 7 juin 2017.

Les discussions que les représentants de la Suisse et de l'Irlande ont eues au sujet des conséquences concrètes de la convention BEPS sur la CDI entre les deux pays (CDI-IE) ont révélé qu'ils ne sont pas prêts à s'accorder sur la teneur exacte des modifications que la convention BEPS apporterait à la CDIIE. C'est pourquoi il a été décidé que la prise en compte dans la CDI-IE des mesures du projet BEPS relatives aux conventions fiscales ne se ferait pas par l'intermédiaire de la convention BEPS, mais par celui d'un protocole de modification bilatéral.

Ce protocole de modification a été signé le 13 juin 2019. Les cantons et associations économiques intéressées ont accueilli favorablement la conclusion du protocole de modification.

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Message 1

Présentation de l'accord

1.1

Contexte, déroulement et résultats des négociations

Il existe entre la Suisse et l'Irlande une convention en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune1 (CDI-IE). Elle a été signée le 8 novembre 1966 et amendée plusieurs fois depuis lors.

Le 7 juin 2017, la Suisse a signé la convention multilatérale pour la mise en oeuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir lérosion de la base dimposition et le transfert de bénéfices2 (convention BEPS, aussi appelée instrument multilatéral). La convention BEPS contient une série de dispositions visant à modifier les conventions contre les doubles impositions (CDI) en vigueur. Certaines de ces dispositions servent à mettre en oeuvre les standards minimaux fixés dans le cadre des actions 6 et 14 du projet BEPS.

En vue de signer la convention BEPS, la Suisse et lIrlande ont discuté de la mise en oeuvre bilatérale de cette dernière. L'Irlande n'était pas prête à s'accorder avec la Suisse sur la teneur exacte des modifications que la convention BEPS apporterait à la CDIIE. Étant donné quil sagit pour la Suisse dune condition nécessaire à lapplication de la convention BEPS, les deux États contractants ont décidé dadapter la CDIIE aux résultats du plan daction BEPS non pas au moyen de la convention BEPS, mais au moyen dun protocole modifiant la CDIIE.

Les négociations concernant ce protocole (protocole modifiant la CDI-IE) ont pu être conclues en août 2017. Les cantons et associations économiques intéressées ont été consultés en novembre 2017 sur sa conclusion et l'ont accueillie favorablement.

Le protocole modifiant la CDI-IE a pu être signé le 13 juin 2019.

1.2

Appréciation

Le protocole modifiant la CDI-IE contient quasi exclusivement des dispositions qui y auraient été reprises si la Suisse et l'Irlande avaient décidé que la CDI était couverte par la convention BEPS. Il existe donc un rapport au niveau du contenu entre le protocole et la convention BEPS, mais pas de lien direct.

Dans sa version modifiée par le protocole modifiant la CDIIE, cette dernière sera conforme aux standards minimaux fixés en matière de conventions fiscales dans le cadre du plan daction BEPS. En sa qualité de pays membre de l l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la Suisse sest engagée à inscrire dans ses CDI toutes les dispositions qui constituent un standard minimal. La conclusion du protocole modifiant la CDIIE marque une nouvelle étape vers ce but.

1 2

RS 0.672.944.11 www.oecd.org > Fiscalité > Conventions fiscales > Convention multilatérale pour la mise en oeuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir le BEPS.

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La clause darbitrage prévue dans la CDIIE est conforme à la politique conventionnelle dans le domaine des conventions contre les doubles impositions de la Suisse.

La procédure amiable prévue par la CDIIE en vigueur ne comporte aucune obligation de résultat. Aujourdhui, il nest donc pas exclu que, dans certains cas, la procédure amiable entre les autorités compétentes de la Suisse et de lIrlande ne parvienne pas à éliminer la double imposition. Cette situation nest pas satisfaisante eu égard à la sécurité du droit. La nouvelle clause darbitrage permet de combler cette lacune.

2

Commentaires des dispositions du protocole

Art. I du protocole modifiant la CDI-IE L'art. I complète le préambule de la CDIIE par deux nouvelles dispositions. Ces deux dispositions ont été élaborées dans le cadre de l'action 6 du projet BEPS et sont inscrites à l'art. 6 de la convention BEPS.

La première disposition additionnelle (art. 6, par. 3, de la convention BEPS) ajoute un autre motif à la CDIIE, à savoir promouvoir les relations économiques entre les États contractants et améliorer leur coopération en matière fiscale.

La seconde disposition nouvelle (art. 6, par. 1, de la convention BEPS) établit clairement que la Suisse et l'Irlande n'avaient pas l'intention, en concluant la CDI, de créer des possibilités de non-imposition ou d'imposition réduite par la fraude ou l'évasion fiscales. En d'autres termes, la CDIIE vise également à éliminer la double nonimposition. Cette règle n'a pas une portée générale mais s'applique uniquement si la double non-imposition résulte de la fraude ou de l'évasion fiscales. De cette manière, on tient compte du fait qu'il existe des situations de double non-imposition voulues, par exemple des dividendes distribués à des sociétés du même groupe. En pareil cas, la double non-imposition permet d'éviter des charges économiques multiples indésirables.

La première disposition ne constitue pas un standard minimal du projet BEPS. En revanche, il est nécessaire d'inscrire la seconde dans le protocole modifiant la CDIIE pour respecter le standard minimal fixé par l'action 6 du projet BEPS.

Art. II et III du protocole modifiant la CDI-IE Ces deux dispositions inscrivent un délai pour rectifier les bénéfices des établissements stables (art. II) et des entreprises associées (art. III) dans la CDIIE. Dorénavant, les autorités fiscales de la Suisse et de lIrlande ne pourront rectifier les bénéfices que pendant une période de cinq ans suivant la fin de la période fiscale concernée. Si un moyen de recours est introduit contre une rectification des bénéfices et que cela entraîne des retards, cela n'affecte pas le calcul du respect du délai.

En cas de fraude, négligence grave ou manquement délibéré, les autorités fiscales pourront procéder à la rectification des bénéfices, même après lexpiration de ce délai. Dans ce cas, ce sont les délais prévus par le droit interne qui sappliquent.

Ces dispositions ne sont pas inscrites dans la convention BEPS. Elles sont cependant inscrites dans la CDIIE en raison de lélément 3.3 du standard minimal relatif à 6552

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laction 14 du plan daction BEPS3. Selon cet élément, les États contractants devraient inscrire dans leurs CDI la deuxième phrase de lart. 25, par. 2, du modèle de convention de lOCDE4. Cette disposition prévoit que les accords amiables sont appliqués quels que soient les délais prévus par le droit interne des États contractants. Si un État nest pas disposé à inscrire cette disposition dans ses CDI, il doit, pour respecter le standard minimal, être prêt à adopter, dans le cadre de négociations relatives aux CDI, dautres dispositions limitant le délai de rectification des bénéfices des entreprises associées et établissements stables.

En principe, la Suisse ninscrit pas la deuxième phrase de lart. 25, par. 2, du modèle de convention de lOCDE dans ses CDI. Par conséquent, la délégation suisse chargée des négociations en vue du protocole modifiant la CDIIE a proposé à la délégation irlandaise dinscrire dans la CDIIE des dispositions limitant à cinq ans la possibilité de rectifier les bénéfices des entreprises associées et des établissements stables. La délégation irlandaise a consenti non seulement à la limitation mais aussi au délai concret proposés.

Art. IV du protocole modifiant la CDI-IE Cet article complète la disposition (art. 22) sur la méthode d'élimination des doubles impositions par l'État de résidence par une disposition visant à éliminer la nonimposition ou l'imposition réduite dans les cas de conflits de qualification.

Il a pour conséquence que la Suisse, en tant qu'État de résidence du bénéficiaire d'un revenu provenant de l'Irlande et pouvant être imposé en Irlande selon la CDIIE, n'a pas l'obligation d'exclure de l'assiette de l'impôt ce revenu si l'Irlande ne l'impose pas ou, s'il s'agit de dividendes, ne procède qu'à une imposition réduite parce qu'elle est d'avis que la CDIIE l'oblige à exonérer ou à imposer de façon réduite ce revenu.

C'est le cas par exemple si l'Irlande, en tant qu'État de la source, traite le revenu d'un résident de la Suisse comme un gain en capital, alors que la Suisse, en tant qu'État de résidence, considère qu'il s'agit d'un revenu provenant d'une activité lucrative dépendante exercée en Irlande. Sans cette nouvelle disposition, la Suisse exclurait ce revenu de l'assiette de l'impôt bien que l'Irlande, en raison de sa qualification fiscale du revenu,
considère que le droit d'imposer revient à la Suisse (art. 12, par. 4, CDIIE) et ne l'impose pas pour cette raison. D'après la nouvelle disposition, la Suisse n'aura plus l'obligation d'exclure le revenu (art. 22, par. 1, let. b, CDIIE) mais pourra l'imposer comme revenu de l'activité lucrative dépendante.

Cette disposition vise à lutter contre une double exemption involontaire en raison de conceptions différentes des états de fait ou en raison d'une interprétation différente des notions de la CDIIE par la Suisse et l'Irlande. Cette disposition est prévue par l'art. 23a, par. 2, du modèle de convention de l'OCDE et par l'art. 5, par. 2, de la convention BEPS. Elle ne constitue pas un standard minimal du projet BEPS.

3

4

OCDE (2016), Accroître l'efficacité des mécanismes de règlement des différends, Action 14 ­ Rapport final 2015, Projet OCDE/G20 sur l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris.

OCDE (2018), Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune: Version abrégée 2017, Éditions OCDE, Paris.

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Art. V du protocole modifiant la CDI-IE Dune part, cet article prévoit la modification de lart. 25, par. 1, CDIIE. Cette disposition régit les demandes de procédure amiable. Elle porte en particulier sur la question de savoir auprès de quelle autorité compétente une demande de procédure amiable doit être introduite.

Selon la disposition en vigueur, si une personne estime que les mesures prises par un État contractant ou par les deux États contractants entraînent ou entraîneront pour elle une imposition non conforme à la CDIIE, cest à lÉtat contractant dont elle est un résident quelle doit adresser une demande de procédure amiable, le cas échéant.

Lart. 25, par. 1, CDIIE est modifié de sorte quune personne ne soit plus limitée dans le choix de lautorité compétente à laquelle adresser sa demande douverture dune procédure amiable. Dorénavant, elle pourra soumettre son cas aux autorités compétentes de chacun des deux États contractants, selon son choix.

Cette modification se fonde sur lélément 3.1 du standard minimal relatif à laction 14 du plan daction BEPS, selon lequel chacune des deux autorités compétentes est informée de la demande douverture dune procédure amiable et peut rendre un avis sur le bien-fondé de la demande.

Dautre part, lart. V du protocole modifiant la CDIIE complète lart. 25, par. 1, CDIIE en prévoyant un délai de prescription de trois ans, que le contribuable doit respecter en introduisant sa demande douverture de procédure amiable devant lautorité compétente.

La modification et le complément apportés par le protocole modifiant la CDIIE rendent lart. 25, par. 1, CDIIE conforme sur le fond aux dispositions correspondantes de la convention BEPS (art. 16, par. 1) et du modèle de convention de lOCDE (art. 25, par. 1).

Art. VI du protocole modifiant la CDIIE Cet article prévoit linscription dune clause darbitrage dans la CDIIE. Pour lessentiel, cette clause correspond dans sa conception à celle prévue dans la partie IV de la convention BEPS. La clause d'arbitrage de la convention BEPS définit la procédure d'arbitrage de manière beaucoup plus détaillée par rapport à la disposition correspondante du modèle de convention de l'OCDE. En dehors de cela, il n'y a pas de différences. La clause d'arbitrage ne constitue pas un standard minimal du plan daction BEPS.

La procédure darbitrage
prévue est obligatoire pour lautorité compétente: si, dans un délai de trois ans, les autorités compétentes ne parviennent pas à un accord dans le cadre de la procédure amiable, la personne peut demander par écrit que les questions non résolues soient soumises à larbitrage (par. 1). Si un tribunal judiciaire ou administratif de lun ou lautre des États contractants a déjà rendu une décision sur les questions à résoudre, il nest pas possible de demander louverture dune procédure darbitrage (par. 11).

Selon le par. 4, la décision arbitrale est définitive et contraignante pour les deux États contractants. Les autorités compétentes ont lobligation de mettre en oeuvre 6554

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cette décision par accord amiable. Si une personne directement concernée par laffaire naccepte pas laccord amiable qui met en oeuvre cette décision, par exemple en décidant de porter laffaire devant un tribunal, le caractère contraignant de la décision arbitrale séteint. Un tel mécanisme permet de tenir compte des intérêts des contribuables qui subissent une double imposition et garantit la sécurité du droit.

Les par. 2 et 3 régissent les modalités de calcul du délai de trois ans, dont dispose les autorités compétentes pour régler les questions à lamiable dans des circonstances particulières.

Les par. 13 à 15 régissent la désignation dun arbitre. Ils sappliquent tant que les autorités compétentes de la Suisse et de lIrlande ne parviennent pas à un autre accord.

Ils prévoient que la commission darbitrage se compose de trois personnes physiques possédant une expertise ou une expérience en matière de fiscalité internationale (par. 13, let. a). Chaque autorité compétente doit désigner un membre de la commission darbitrage, et les deux membres ainsi désignés doivent désigner un troisième arbitre qui nest ni un ressortissant, ni un résident de la Suisse ou de l'Irlande et qui assumera la fonction de président de la commission darbitrage (par. 13, let. b).

Chaque membre de la commission darbitrage doit être impartial et indépendant des autorités compétentes, des administrations fiscales et des ministères des finances des juridictions contractantes et de toutes les personnes directement concernées par la demande ainsi que de leurs conseils (par. 13, let. c).

Faute de désignation dun membre ou du président de la commission darbitrage, le responsable ayant le rang le plus élevé au sein du Centre de politique et dadministration fiscales de lOCDE qui nest ressortissant daucun des États contractants procède à la désignation (par. 14 et 15). Ce dispositif, qui ne sapplique quà défaut dun autre accord entre autorités compétentes, vise à assurer que larbitrage sur des questions soulevées dans un cas de procédure amiable ne puisse être retardé indûment.

Les par. 16, 17 et 20 sont consacrés à la confidentialité. Afin de garantir que la procédure darbitrage remplit son but sans compromettre la confidentialité de la procédure amiable, le par. 16 prévoit que les dispositions de lart. 26 CDIIE en matière de
confidentialité sappliquent aux membres de la commission darbitrage.

Les autorités compétentes de la Suisse et de lIrlande veillent à ce que les membres de la commission darbitrage et leurs collaborateurs sengagent par écrit, avant de participer à la procédure darbitrage, à traiter tout renseignement en lien avec la procédure darbitrage conformément aux obligations de confidentialité et de nondivulgation prévues dans les dispositions de lart. 26 CDIIE (par. 17). Enfin, chacune des personnes qui ont soumis le cas ainsi que leurs conseils sengagent par écrit à ne pas divulguer les renseignements dont ils ont eu connaissance dans le cadre de la procédure darbitrage (par. 20).

Si les autorités compétentes des États contractants parviennent à un accord amiable permettant de résoudre le cas ou si la personne qui a soumis le cas retire sa demande darbitrage ou de procédure amiable au cours de la procédure d'arbitrage, celle-ci prend fin (par. 18).

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La méthode darbitrage est prévue par le par. 19: sauf autre accord des autorités compétentes de la Suisse et de lIrlande, cest la méthode de l«offre finale», également appelée celle de la «dernière meilleure offre» qui sapplique. Cette méthode prévoit que chacune des autorités compétentes soumet à la commission darbitrage une proposition de résolution portant sur toutes les questions non résolues du cas concret. Les propositions de résolution soumises par les autorités compétentes peuvent être étayées par un exposé écrit. Chaque autorité compétente peut également soumettre un mémoire en réponse à la proposition de résolution et à lexposé écrit soumis par lautre autorité compétente. Le mémoire vise à répondre aux seuls arguments et conclusions de lautre autorité compétente, et n'est pas destiné à offrir à une autorité compétente la possibilité davancer des arguments additionnels à lappui de ses propres conclusions. La commission darbitrage opte pour lune des propositions de résolution du cas soumises par les autorités compétentes. Cette décision arbitrale est adoptée à la majorité simple des membres de la commission darbitrage et communiquée par écrit aux autorités compétentes. Elle ne comprend aucune motivation ni explication et ne peut servir de précédent dans aucun autre cas.

Le par. 21 prévoit que les rémunérations et les dépenses des membres de la commission darbitrage, ainsi que les coûts liés à la procédure darbitrage sont supportés par la Suisse et l'Irlande selon des modalités déterminées dun commun accord entre les autorités compétentes. En labsence dun tel accord, chaque État contractant supporte ses propres dépenses et celles du membre de la commission darbitrage quelle a désigné. Les coûts afférents au président de la commission darbitrage sont supportés par les États contractants à parts égales.

Le par. 22, enfin, prévoit que les questions non résolues soulevées par un cas examiné en procédure amiable qui ont déjà été soumises à une procédure darbitrage ne peuvent plus être soumises à un arbitrage.

Même si le nouvel art. 25a CDI-IE régit larbitrage de manière bien plus détaillée que la disposition du modèle de convention de lOCDE, certaines questions de procédure (p.ex. les délais) restent néanmoins ouvertes. Cest pourquoi le par. 10 prévoit que les autorités compétentes règlent la
procédure darbitrage de manière exhaustive par un accord amiable.

Art. VII du protocole modifiant la CDI-IE Cet article introduit une clause se référant aux buts principaux d'un montage ou d'une transaction. Selon cette clause, un avantage fondé sur la CDI-IE n'est pas accordé si l'obtention de cet avantage était un des buts principaux d'un montage ou d'une transaction, à moins qu'il soit établi que l'octroi de cet avantage est conforme à l'objet et au but des dispositions correspondantes de la CDIIE.

Cette clause anti-abus est certes nouvelle, mais elle correspond dans les grandes lignes aux clauses que la Suisse a conclues pour lutter contre les abus dans un grand nombre de CDI ces dernières années. Elle se différencie de ces clauses par le fait qu'elle n'est pas limitée à certains types de revenus, tels que les dividendes, les intérêts ou les redevances de licence. Au contraire, elle s'applique à toutes les dispositions de la convention. Ainsi, les abus sont réservés pour tout avantage fondé sur la convention.

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La teneur de cette disposition diffère en outre sur un autre point de celle des clauses anti-abus récemment adoptées par la Suisse dans ses CDI. Elle ne se limite pas aux états de fait dans lesquels le but principal du montage ou de la transaction est de tirer des avantages de la convention; elle englobe également les états de fait dans lesquels l'obtention de ces avantages n'en est qu'un des buts principaux. Cependant, cette différence de terminologie ne devrait pas aboutir à un résultat différent, car la deuxième partie de la clause prévoit que les avantages fondés sur la convention sont quand même accordés s'ils sont conformes à la finalité ou à l'objet des dispositions correspondantes, ce qui devrait en principe être le cas si l'obtention de l'avantage n'était pas l'objet principal du montage ou de la transaction.

Cette clause anti-abus a été élaborée dans le cadre de l'action 6 du projet BEPS. Elle est inscrite à l'art. 29, par. 9, du modèle de convention de l'OCDE et à l'art. 7, par. 1, de la convention BEPS. Pour respecter le standard minimal fixé dans le cadre de l'action 6 du projet BEPS, il suffit d'inscrire la clause anti-abus dans la CDI (art.

27a). Aucune autre disposition anti-abus n'est requise.

Art. VIII du protocole modifiant la CDIIE Cet article abroge le par. 4 du protocole. Il sagit de la disposition qui obligeait lIrlande à ouvrir des négociations avec la Suisse en vue dinscrire une clause darbitrage dans la CDIIE si lIrlande incluait une clause darbitrage dans lune de ses conventions de double imposition. Linscription dans la CDIIE de lart. VI du protocole modifiant la CDIIE qui prévoit une clause darbitrage rend le par. 4 du protocole caduc.

Lart. VIII inscrit en outre le nouveau par. 4a relatif au nouvel art. 25a (Arbitrage) dans le protocole. Demandé par l'Irlande, cette disposition exclut le droit à une procédure darbitrage pour certains états de fait. En Irlande: si le cas est en relation avec des actes pour lesquels le contribuable ou une personne qui lui est associée (ou une personne qui agit pour le contribuable ou pour la personne qui lui est associée) est soumise à une peine pour acte intentionnel ou si le cas relève des dispositions anti-abus du droit interne de l'Irlande. En Suisse: le droit à une procédure darbitrage est exclu pour tout état de fait qui relève
des dispositions relatives à lévasion fiscale au sens défini par la jurisprudence du Tribunal fédéral ou qui est en relation avec la fraude, la négligence grave ou un manquement délibéré.

Art. IX du protocole modifiant la CDIIE Les dispositions du protocole modifiant la CDIIE sappliquent en principe à compter du 1er janvier de lannée suivant son entrée en vigueur. Une particularité sapplique aux dispositions modifiées ou nouvellement introduites par les art. II, III, V, VI et VIII sur la limitation dans le temps de lajustement des bénéfices des établissements stables et entreprises associées et lintroduction de procédures amiables et l'arbitrage. Ces dispositions sappliquent dès la date de lentrée en vigueur du protocole modifiant la CDIIE. A ce sujet, il est en outre précisé que cela s'applique sans égard à la période fiscale à laquelle se rapporte létat de fait. Ces dispositions peuvent concerner également des périodes fiscales antérieures à l'entrée en vigueur du protocole modifiant la CDI-IE.

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Conséquences financières

Le protocole modifiant la CDI-IE ne prévoit pas de modification des critères d'attribution du droit d'imposer entre la Suisse et l'Irlande. Il contient au contraire des dispositions pour empêcher l'utilisation abusive de la CDI-IE et pour améliorer la procédure amiable en tant que moyen de régler les différends en cas de double imposition. Le protocole modifiant la CDI-IE ne devrait donc pas avoir d'effet notable sur les recettes fiscales de la Confédération, des cantons et des communes.

La CDI-IE modifiée peut être mise en oeuvre avec les ressources humaines disponibles.

4

Aspects juridiques

Le protocole modifiant la CDI-IE se fonde sur l'art. 54, al. 1, de la Constitution (Cst.)5, qui attribue à la Confédération la compétence en matière d'affaires étrangères. L'art. 184, al. 2, Cst. autorise le Conseil fédéral à signer et à ratifier les traités.

En vertu de lart. 166, al. 2, Cst., lAssemblée fédérale est compétente pour approuver les traités, à l'exception de ceux dont la conclusion relève de la compétence du Conseil fédéral en vertu d'une loi ou d'un traité (voir également l'art. 7a, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration6).

Dans le cas d'espèce, il n'existe pas de loi ou de traité qui délègue au Conseil fédéral la compétence de conclure un traité tel que le protocole modifiant la CDI-IE. Le Parlement est ainsi compétent pour approuver ce dernier.

L'art. 141, al. 1, let. d, Cst. dispose qu'un traité international est sujet au référendum, entre autres, s'il contient des dispositions importantes fixant des règles de droit. Selon l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl) 7, sont réputées fixer des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences.

Le protocole modifiant la CDI-IE contient des dispositions qui créent des obligations pour les autorités suisses et confèrent des droits à celles-ci et aux personnes privées (physiques et morales). Il contient donc des dispositions importantes fixant des règles de droit au sens des art. 22, al. 4, LParl et 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. L'arrêté fédéral portant approbation du protocole modifiant la CDI-IE est ainsi sujet au référendum en matière de traités internationaux au sens de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

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RS 101 RS 172.010 RS 171.10

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Procédure de consultation

Le protocole modifiant la CDI-IE est sujet au référendum, conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. En vertu de l'art. 3, al. 1, let. c, de la loi du 18 mars 2005 sur la consultation (LCo)8, il était donc en principe soumis à une consultation.

Une procédure d'orientation a été organisée en novembre 2017. Dans ce cadre, une note explicative a été adressée aux cantons et aux milieux économiques intéressés à la conclusion des conventions contre les doubles impositions. Le protocole modifiant la CDI-IE a été bien accueilli et n'a pas rencontré d'opposition. Par conséquent, les positions des milieux intéressés étaient connues et documentées. En vertu de l'art. 3a, al. 1, let. b, LCo, il était donc possible de renoncer à une consultation.

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RS 172.061

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