19.044 Message concernant la modification de la loi sur le blanchiment d'argent du 26 juin 2019

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, le projet d'une modification de la loi du 10 octobre 1997 sur le blanchiment d'argent (LBA).

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

26 juin 2019

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2019-0213

5237

Condensé Le projet vise à mettre en oeuvre quelques-unes des principales recommandations du quatrième rapport d'évaluation mutuelle du Groupe d'action financière (GAFI) concernant la Suisse, à accroître la sécurité juridique et à renforcer la place financière suisse.

Contexte Le Conseil fédéral accorde une grande importance à la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Face à une criminalité en constante évolution, le dispositif de défense de la Suisse doit être régulièrement adapté afin de protéger la place financière suisse contre les abus et de préserver son intégrité en tant qu'important facteur de sa vitalité économique.

Le 7 décembre 2016, le GAFI a publié le quatrième rapport d'évaluation mutuelle sur la Suisse, qui reconnaît la bonne qualité d'ensemble du dispositif suisse de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Dans certains domaines, il identifie cependant des points faibles en matière de législation ou d'efficacité du dispositif et émet des recommandations à cet égard. Le présent projet a pour but de mettre en oeuvre quelques-unes des principales recommandations issues de ce rapport d'évaluation mutuelle. D'autres mesures doivent notamment être mises en oeuvre dans le cadre du projet de loi du Département fédéral de justice et police dans le domaine de la prévention du terrorisme et du crime organisé et par le projet de mise en oeuvre des recommandations du Forum mondial sur la transparence des personnes morales et l'échange de renseignements à des fins fiscales.

La Suisse se trouve dans une procédure de suivi plus intensive au GAFI, ce qui l'oblige à faire rapport plus fréquemment. Les lacunes constatées dans la législation devront être éliminées dans un délai de trois ans. Après cinq ans, la Suisse sera soumise à une évaluation de suivi portant sur l'amélioration de l'efficacité.

Contenu du projet Le projet de loi prévoit notamment les huit mesures principales suivantes: il introduit des obligations pour les personnes qui fournissent certaines prestations en lien avec des sociétés ou des trusts (conseillers). Par ailleurs, il vise à abaisser le seuil des paiements en espèces soumis à des obligations de diligence dans le domaine du négoce des métaux précieux et des pierres précieuses. La loi prévoira désormais explicitement
la vérification de l'identité de l'ayant droit économique et une obligation générale d'actualiser les données des clients. En outre, diverses adaptations sont proposées dans le domaine du système de communication de soupçons au Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent. Il s'agit aussi d'améliorer la transparence des associations exposées à un risque accru de financement du terrorisme. Enfin, le projet propose de créer un mécanisme de contrôle pour l'achat à titre professionnel de métaux précieux usagés, et le Bureau central du contrôle des métaux précieux est voué à assumer la tâche d'autorité de surveillance en matière de blanchiment d'argent.

5238

La mise en oeuvre de ces mesures nécessite d'adapter non seulement la loi sur le blanchiment d'argent, mais aussi le code civil, le code des obligations, le code pénal, la loi sur le contrôle des métaux précieux et la loi sur la surveillance des marchés financiers.

5239

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Table des matières Condensé

5238

1

Contexte 1.1 Nécessité d'agir et objectifs visés 1.2 Solutions étudiées et solution retenue 1.3 Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral 1.3.1 Relation avec le programme de la législature 1.3.2 Relation avec les stratégies du Conseil fédéral

5243 5243 5248

Procédure de consultation 2.1 Résultats 2.2 Principales adaptations découlant des résultats de la consultation 2.2.1 Adoption d'obligations de diligence pour les conseillers 2.2.2 Adaptation du système de communication au Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS) 2.2.3 Mesure supplémentaire: Bureau central du contrôle des métaux précieux appelé à jouer le rôle d'autorité de surveillance LBA pour les essayeurs du commerce en métaux précieux

5248 5249 5250 5250

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen 3.1 Création d'obligations au titre de la loi sur le blanchiment d'argent pour les conseillers 3.2 Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme

5251

Présentation du projet 4.1 Nouvelle réglementation proposée 4.1.1 Création d'obligations au titre de la loi sur le blanchiment d'argent pour les conseillers 4.1.1.1 Contexte 4.1.1.2 Solution proposée 4.1.1.3 Aspects examinés et non retenus 4.1.2 Abaissement du seuil pour le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses 4.1.2.1 Contexte 4.1.2.2 Solution proposée 4.1.3 Vérification de l'identité de l'ayant droit économique 4.1.3.1 Contexte 4.1.3.2 Solution proposée 4.1.4 Actualisation des données des clients 4.1.4.1 Contexte 4.1.4.2 Solution proposée

5252 5252

2

3

4

5240

5248 5248 5248

5250

5250

5251 5251

5252 5252 5253 5258 5258 5258 5259 5260 5260 5261 5261 5261 5262

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4.1.5

4.1.6 4.1.7

4.1.8

4.1.9

Adaptation du système de communication au MROS 4.1.5.1 Contexte 4.1.5.2 Solution proposée 4.1.5.3 Aspect examiné et non retenu Autres modifications de la LBA Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme 4.1.7.1 Contexte 4.1.7.2 Mise en oeuvre Création d'un mécanisme de contrôle pour l'achat de métaux précieux usagés 4.1.8.1 Contexte 4.1.8.2 Solution proposée Bureau central du contrôle des métaux précieux en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA 4.1.9.1 Contexte 4.1.9.2 Solution proposée

5263 5263 5264 5267 5268 5273 5273 5277 5284 5284 5285 5287 5287 5289

5

Commentaire des dispositions 5.1 Loi sur le blanchiment d'argent 5.2 Code civil 5.3 Code des obligations 5.4 Code pénal 5.5 Loi sur le contrôle des métaux précieux 5.6 Loi sur les marchés financiers

5292 5292 5316 5321 5321 5322 5330

6

Conséquences 6.1 Conséquences pour la Confédération 6.1.1 Création d'un mécanisme de contrôle pour l'achat de métaux précieux usagés 6.1.2 Bureau central du contrôle des métaux précieux en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA 6.2 Conséquences pour les cantons 6.3 Conséquences économiques 6.3.1 Attrait de la place économique 6.3.2 Conséquences sur la croissance économique et la concurrence 6.3.3 Conséquences des diverses mesures sur les acteurs 6.3.3.1 Création d'obligations au titre de la loi sur le blanchiment d'argent pour les conseillers 6.3.3.2 Abaissement du seuil pour le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses 6.3.3.3 Banques et autres intermédiaires financiers

5330 5330 5330 5331 5331 5332 5332 5332 5332 5332 5334 5334

5241

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6.3.3.4

6.4 7

Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme 6.3.3.5 Création d'un mécanisme de contrôle pour l'achat de métaux précieux usagés 6.3.3.6 Bureau central du contrôle des métaux précieux en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA 6.3.3.7 Sociétés d'audit Questions liées à la mise en oeuvre

Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité 7.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 7.3 Forme de l'acte à adopter 7.4 Frein aux dépenses 7.5 Conformité à la loi sur les subventions 7.6 Délégation de compétences législatives

Loi fédérale concernant la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (Loi sur le blanchiment d'argent, LBA) (Projet)

5242

5335 5335 5337 5338 5338 5338 5338 5338 5339 5339 5339 5339

5341

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

La Suisse accorde une grande importance au maintien d'une place financière intègre.

Dans le contexte d'une criminalité en évolution constante, elle adapte régulièrement sa législation de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme afin de préserver l'intégrité de la place financière et de se prémunir contre une utilisation criminelle de cette dernière. Dans le même temps, elle vise à assurer la conformité de sa législation avec les normes internationales déterminantes dans le domaine du blanchiment d'argent. Assurer la conformité internationale en matière de lutte contre le blanchiment d'argent constitue d'ailleurs un des cinq axes stratégiques de la politique du Conseil fédéral d'octobre 2016 en matière de marchés financiers pour une place financière suisse compétitive 1. Cela permet de préserver la réputation de la Suisse et l'attrait de sa place financière.

La Suisse participe activement aux travaux du Groupe d'action financière (GAFI) depuis la création de celui-ci en 1989. Le GAFI a élaboré des recommandations qui constituent les normes internationales de référence pour lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive2. Le GAFI évalue régulièrement la conformité des législations nationales de ses membres avec ses recommandations par le biais d'examens par les pairs (évaluations mutuelles). Dans le cadre du 4e cycle d'évaluations mutuelles, initié en 2014, il examine, d'une part, la conformité technique des dispositifs légaux et institutionnels de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, et, d'autre part, pour la première fois, l'efficacité de ces derniers.

La Suisse a fait l'objet d'une évaluation mutuelle en 2016, dans le cadre du 4 e cycle.

Adopté en octobre 2016, le rapport du GAFI sur la Suisse3, publié début décembre 2016 (ci-après 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse) reconnaît la bonne qualité d'ensemble du dispositif suisse de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. La Suisse doit toutefois poursuivre ses efforts en la matière. Dans certains domaines, le GAFI a en effet identifié des points faibles au niveau de la législation et de l'efficacité du dispositif et émis des recommandations à cet égard. La Suisse a
notamment reçu une note insuffisante concernant la conformité technique de sa législation avec 9 des 40 recommandations du GAFI.

Le Département fédéral des finances (DFF) a analysé les recommandations faites à la Suisse par le GAFI dans le cadre du Groupe interdépartemental de coordination 1 2

3

www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/45761.pdf Normes internationales sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de la prolifération, Les recommandations du GAFI, 2012; www.fatf-gafi.org > Publications > Recommandations GAFI.

Mesures de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, Suisse, Rapport d'évaluation mutuelle, décembre 2016; www.sif.admin.ch > Thèmes > Intégrité de la place financière ou www.fatf-gafi.org/media/fatf/content/images/mersuisse-2016.pdf.

5243

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sur la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (GCBF) 4.

Sur cette base, le Conseil fédéral a, en juin 2017, chargé le DFF de préparer un projet de loi destiné à la consultation5. La consultation a duré du 1er juin au 21 septembre 2018. Compte tenu des résultats de la consultation, les mesures proposées sont notamment les suivantes: ­

À l'avenir, les personnes qui fournissent certaines prestations, notamment en lien avec la création, la gestion ou l'administration de sociétés de domicile ou de trusts, devront respecter des obligations inscrites dans la loi du 10 octobre 1997 sur le blanchiment d'argent (LBA) 6.

­

Le seuil à partir duquel les négociants en métaux précieux et en pierres précieuses qui reçoivent le prix de vente en espèces doivent appliquer des obligations de diligence au sens de la LBA doit être abaissé de 100 000 à 15 000 francs. Fera exception à cette règle le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses typiquement destinés à être vendus à des clients finaux.

Ces deux premières mesures doivent permettre d'améliorer la conformité du dispositif légal suisse avec la recommandation 22 du GAFI.

­

Il est prévu de créer une base légale explicite pour l'obligation de vérifier l'identité de l'ayant droit économique.

­

Le projet prévoit également d'inscrire dans la LBA une obligation générale et explicite de vérifier périodiquement l'actualité des données relatives aux clients (profil client). Les données qui ne sont plus actuelles devront être mises à jour.

Ces deux mesures doivent permettre d'améliorer la conformité du dispositif légal suisse avec la recommandation 10 du GAFI, qui constitue une recommandation fondamentale. Il était initialement prévu de les inscrire dans l'ordonnance de la FINMA du 3 juin 2015 sur le blanchiment d'argent (OBA-FINMA)7 et dans les règlements des organismes d'autorégulation (OAR). Au vu des résultats de l'audition relative au projet de révision de l'OBA-FINMA, ouverte en septembre 2017, il a été décidé d'inscrire ces deux mesures directement dans la LBA pour créer plus de sécurité juridique.

­

4

5 6 7 8

L'abrogation du droit de communiquer au sens de l'art. 305ter, al. 2, du code pénal (CP)8 ayant été rejetée dans le cadre de la consultation, cet instrument sera maintenu. Afin de clarifier la distinction entre le droit et l'obligation de communiquer, la notion de «soupçons fondés» figurant à l'art. 9 LBA sera précisée dans l'ordonnance du 11 novembre 2015 sur le blanchiment

Le GCBF a été créé fin 2013 par le Conseil fédéral en tant que groupe permanent. Piloté par le DFF, il est composé des autorités compétentes concernées par la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.

Cf. communiqué de presse du Conseil fédéral du 28 juin 2017: www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-67338.html.

RS 955.0 RS 955.033.0 RS 311.0

5244

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d'argent (OBA)9. Le délai de 20 jours pour l'analyse des communications de soupçons par le Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS) sera en outre aboli. En contrepartie, un droit de mettre fin à la relation d'affaires dans certaines conditions sera inscrit dans la LBA.

­

Les associations courant le risque d'être exploitées à des fins de financement du terrorisme ou de blanchiment d'argent devront s'inscrire au registre du commerce. Toutes les associations tenues de s'inscrire au registre du commerce devront en outre établir une liste de leurs membres et pouvoir être représentées par une personne domiciliée en Suisse.

­

Un mécanisme de contrôle de l'achat de métaux précieux usagés sera créé.

Les personnes qui effectuent ce genre d'achats par métier devront respecter des obligations de diligence et de documentation afin de garantir la licéité de l'origine des métaux précieux achetés. En outre, une obligation d'enregistrement est prévue pour les acteurs inscrits au registre du commerce et une obligation d'obtenir une patente pour ceux qui n'y sont pas inscrits.

­

Le Bureau central du contrôle des métaux précieux (bureau central) de l'Administration fédérale des douanes (AFD) deviendra l'autorité de surveillance LBA des essayeurs du commerce qui effectuent le négoce de métaux précieux bancaires à titre professionnel. Cette mesure ne figurait pas dans l'avant-projet de modification de la LBA. Elle résulte d'une demande exprimée par le secteur concerné dans le cadre de la consultation.

Quelques modifications de la LBA, moins fondamentales, sont également proposées, d'une part, pour renforcer la coopération nationale, et, d'autre part, pour améliorer la conformité avec les recommandations du GAFI en matière de coopération internationale. S'agissant de la coopération nationale, le MROS et les OAR reconnus doivent désormais pouvoir échanger toutes les informations nécessaires à l'application de la LBA. Le deuxième point concerne la transmission, par le MROS, des informations reçues d'un homologue étranger à d'autres autorités ou à des tiers ainsi que leur utilisation. Enfin, une dernière modification est nécessaire afin de résoudre un conflit entre le droit d'accès aux fichiers en rapport avec des communications prévu à l'art. 34 LBA et l'interdiction d'informer de l'art. 10a LBA.

Une modification supplémentaire de la LBA est proposée pour tenir compte d'une demande exprimée dans le cadre de la consultation. Il s'agit de prévoir une exception à l'interdiction d'informer de l'art. 10a LBA entre la filiale en Suisse et sa société mère à l'étranger.

Suite à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2019, de la loi fédérale du 29 septembre 2017 sur les jeux d'argent (LJAr)10, un oubli de coordination lors du traitement du projet de LJAr au Parlement doit être corrigé. Concrètement, il s'agit d'ajouter à l'art. 22a LBA (transmission de données relatives à des activités terroristes) une référence à l'autorité intercantonale de surveillance et d'exécution visée à l'art. 105 LJAr (autorité intercantonale), responsable de la surveillance des exploitants de jeux de grande envergure.

9 10

RS 955.01 RS 935.51

5245

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Enfin, en vue de l'entrée en vigueur au 1er janvier 2020 du nouveau système d'information destiné au traitement des données au MROS (système d'information goAML), quelques adaptations formelles de la LBA sont nécessaires.

Les mesures proposées entraînent des modifications de la LBA, du code civil (CC)11, du code des obligations (CO)12, du CP, de la loi du 20 juin 1933 sur le contrôle des métaux précieux (LCMP)13 et de la loi du 22 juin 2007 sur la surveillance des marchés financiers (LFINMA)14.

L'annexe à la loi fédérale du 15 juin 2018 sur les établissements financiers (LEFin)15 introduira des modifications dans plusieurs dispositions de la LBA, de la LCMP et de la LFINMA. Étant donné que ces modifications entreront en vigueur avant le présent projet de loi ­ en principe le 1er janvier 2020 ­, il en est déjà tenu compte, bien qu'il ne s'agisse pas encore, au moment de l'adoption du présent message, du droit en vigueur. Cela permet de garantir une bonne coordination entre les modifications successives des trois lois concernées. Dans ce cadre, il y a lieu de confirmer dans la LBA que la compétence de la FINMA de prendre des mesures relevant du droit de la surveillance contre les intermédiaires financiers enfreignant l'obligation de s'affilier à un OAR reste inchangée après l'entrée en vigueur de la LEFin. En outre, il est judicieux de prévoir également un échange d'informations entre le MROS et les organismes de surveillance au sens de l'art. 43a LFINMA mentionnés à l'art. 61 LEFin, à l'instar de l'échange d'informations entre le MROS et les OAR prévu dans le cadre du présent projet.

Le présent projet doit servir à mettre en oeuvre quelques-unes des recommandations principales contenues dans le rapport d'évaluation mutuelle. D'autres mesures ont déjà été proposées dans le projet d'arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et de son Protocole additionnel et concernant le renforcement des normes pénales contre le terrorisme et le crime organisé16. Ce projet d'arrêté fédéral a été adopté par le Conseil fédéral le 14 septembre 2018. Les mesures proposées concernent notamment la coopération internationale du MROS et l'entraide judiciaire.

Le 22 novembre 2018, le Conseil fédéral a adopté un projet de loi fédérale sur
la mise en oeuvre des recommandations du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales17. Ce projet propose des mesures visant à renforcer la transparence des personnes morales et, à cette fin, prévoit des sanctions pénales en cas de violation de l'obligation d'annoncer l'ayant droit économique ou de tenir des listes d'actionnaires ou d'ayants droit économiques. Le projet de loi prévoit également que les actions au porteur ne sont autorisées que si la société a des titres de participation cotés en bourse ou que les actions au porteur sont émises sous forme de titres intermédiés.

11 12 13 14 15 16 17

RS 210 RS 220 RS 941.31 RS 956.1 RO 2018 5247 FF 2018 6557 FF 2019 337

5246

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Pour remédier à plusieurs points faibles identifiés au niveau des obligations de diligence, notamment en ce qui concerne les seuils pour les transactions occasionnelles, il est nécessaire de modifier l'OBA-FINMA, l'ordonnance de la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ) du 24 juin 2015 sur le blanchiment d'argent (OBA-CFMJ)18, la convention de 2016 relative à l'obligation de diligence des banques (CDB 16)19 et les règlements des OAR. L'OBA-FINMA partiellement révisée entrera en vigueur le 1er janvier 2020 en même temps que la nouvelle CDB 2020. La nouvelle OBA-CFMJ du 12 novembre 2018 est entrée en vigueur le 1er janvier 2019, en même temps que la LJAr.

Enfin, pour donner suite aux recommandations faites dans le 4 e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, plusieurs rapports d'analyse ont été élaborés. Cela inclut le rapport du GCBF du 28 juin 2017 sur le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme par le biais d'organismes à but non lucratif (OBNL) 21, le rapport du GCBF du 11 septembre 2017 donnant une vue d'ensemble de l'accès aux données du registre foncier en Suisse22, le rapport du GCBF publié en juin 2018 sur le risque de blanchiment d'argent associé aux personnes morales23 et les rapports du GCBF publiés en décembre 2018 sur le risque de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme par les crypto-assets et le crowdfunding24 ou sur l'utilisation du numéraire et les risques inhérents d'utilisation abusive pour le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme en Suisse25. D'autres mesures visent également à améliorer la collecte des statistiques déterminantes pour mesurer l'efficacité du dispositif suisse, notamment au niveau de la poursuite pénale du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme, de la confiscation et de l'entraide judiciaire.

La Suisse se trouve dans une procédure de suivi plus intensive au GAFI. Elle est tenue d'informer régulièrement le groupe de ses progrès. Le GAFI s'attend à ce qu'une grande partie des défaillances constatées en matière de conformité technique du dispositif soient corrigées d'ici février 2020. Seules seront prises en compte les mesures législatives ou réglementaires en vigueur et applicables d'ici cette échéance.

En 2021, la Suisse sera en outre soumise à une évaluation de suivi portant sur l'efficacité de
son dispositif. Pour sortir du processus de suivi plus intensif, elle doit impérativement améliorer sa conformité avec la recommandation 10 du GAFI.

Dans l'ensemble, bien que la Suisse présente déjà aujourd'hui un dispositif de bonne qualité pour la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, des mesures supplémentaires s'imposent en vue d'améliorer à la fois sa conformité technique avec les normes du GAFI et son efficacité. Cet objectif est atteint par les 18 19 20

21 22 23 24 25

RS 955.021 http://shop.sba.ch/1000020_f.pdf Cf. Communiqué de presse de la FINMA du 18 juillet 2018 www.finma.ch/fr/news/2018/07/20180718-mm-gwv-finma/ ainsi que le communiqué de presse de l'Association suisse des banquiers de juillet 2018 www.swissbanking.org/fr/medias/news/cdb-20-de-nouvelles-regles-en-matiere-deblanchiment-d-argent?set_language=fr.

www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/48926.pdf www.sif.admin.ch/sif/fr/home/finanzmarktpolitik/integritaet-des-finanzplatzes-.html (voir sous rapports) www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/52565.pdf www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/55112.pdf www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/55178.pdf

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mesures mentionnées plus haut. En développant les mesures proposées, le Conseil fédéral a tenu compte de tous les facteurs pertinents et fait usage de la marge de manoeuvre à sa disposition. Maintenir un système robuste et efficace est primordial pour protéger une place financière de l'importance de celle de la Suisse contre une utilisation criminelle.

1.2

Solutions étudiées et solution retenue

Les explications concernant les solutions retenues et les alternatives éventuelles examinées se trouvent dans les ch. 4.1.1 à 4.1.9, en regard de chaque mesure proposée.

1.3

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral

1.3.1

Relation avec le programme de la législature

Le présent projet n'a été annoncé ni dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201926, ni dans l'arrêté fédéral du 14 juin 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201927. Début 2016, l'évaluation de la Suisse par le GAFI venait à peine de commencer et il n'était pas encore possible de savoir dans quels domaines le GAFI recommanderait à la Suisse de prendre des mesures supplémentaires pour améliorer la conformité de son dispositif de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme avec les recommandations du GAFI.

1.3.2

Relation avec les stratégies du Conseil fédéral

Tant l'approche fondée sur les risques que la mise en conformité de la législation suisse sur le blanchiment d'argent avec les normes internationales sont conformes aux principes de la politique du Conseil fédéral en matière de marchés financiers 28.

2

Procédure de consultation

Le projet de modification de la loi sur le blanchiment d'argent a fait l'objet d'une procédure de consultation du 1er juin au 21 septembre 2018. Au total, 79 avis ont été recueillis. Ils émanaient de 22 cantons, de six partis politiques (PDC, PES, PLR, PSS, PVL et UDC), de deux associations faîtières nationales des communes, des 26 27 28

FF 2016 981 FF 2016 4999 Cf. rapport du Conseil fédéral d'octobre 2016 «Politique en matière de marchés financiers pour une place financière suisse compétitive» www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-64199.html.

5248

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villes et des régions de montagne, de cinq associations faîtières nationales de l'économie, de sept autres destinataires et de 37 autres participants non invités officiellement.

Le projet mis en consultation prévoyait, outre diverses adaptations de moindre portée, les sept mesures principales suivantes: a.

Adoption d'obligations de diligence pour les conseillers

b.

Abaissement du seuil pour le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses

c.

Vérification des informations concernant l'ayant droit économique

d.

Actualisation des données des clients

e.

Adaptation du système de communication au MROS

f.

Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme

g.

Adoption d'un régime d'autorisation pour l'achat de métaux précieux usagés

2.1

Résultats

Sur le principe, les mesures proposées ont été majoritairement bien accueillies. Des divergences importantes sont cependant apparues à propos de deux mesures (a et e).

En outre, une mesure supplémentaire a été proposée.

La mesure concernant les conseillers (a) a suscité une controverse. Les acteurs concernés l'ont presque tous rejetée, en critiquant notamment le fait qu'elle couvre également des prestations pour des sociétés opérationnelles. En revanche, un nombre identique de participants, notamment la moitié des cantons ayant pris position ainsi que des représentants du secteur des intermédiaires financiers, ont émis un avis explicitement favorable à cette mesure, en réclamant de surcroît au minimum l'instauration d'une obligation de communiquer, voire d'une surveillance.

Les participants se sont par ailleurs montrés critiques à l'égard de deux aspects proposés dans le cadre de l'adaptation du système de communication en matière de blanchiment d'argent (e). Les intermédiaires financiers et leurs associations ainsi que les OAR se sont exprimés en bloc contre la suppression du droit de communiquer et du délai de traitement des communications en matière de blanchiment d'argent par le MROS.

Par ailleurs, l'Association suisse des fabricants et commerçants de métaux précieux (ASFCMP), indépendamment des recommandations du GAFI, a proposé une mesure supplémentaire. La branche souhaite que le bureau central surveille les essayeurs du commerce qui sont soumis à la LBA en tant que négociants en métaux précieux bancaires, et propose cette solution en lieu et place du régime prévu avec l'entrée en vigueur de la LEFin, qui inclut une surveillance par la FINMA en association avec un organisme de surveillance.

5249

FF 2019

2.2

Principales adaptations découlant des résultats de la consultation

De nombreuses demandes de la part des participants à la consultation ont pu être reprises sans compromettre la conformité avec les normes du GAFI. Dans deux domaines, des adaptations importantes ont été apportées sur la base des avis exprimés. En outre, le projet de loi a été complété par une mesure supplémentaire à la demande de l'ASFCMP.

2.2.1

Adoption d'obligations de diligence pour les conseillers

La mesure relative aux conseillers sera en outre complétée par une obligation de communiquer. Les avocats et les notaires ne seront cependant concernés par celle-ci que s'ils exécutent des transactions financières dans le cadre de leurs prestations.

Dans le même temps, le champ d'application sera limité aux prestations pour les sociétés de domicile.

2.2.2

Adaptation du système de communication au Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS)

Afin de tenir compte des avis exprimés lors de la consultation, il est proposé, contrairement au projet initial du Conseil fédéral, de conserver le droit de communiquer.

La différence entre obligation et droit de communiquer sera clarifiée en inscrivant dans l'ordonnance sur le blanchiment d'argent une définition plus précise de la notion de soupçons fondés, telle qu'utilisée dans le cadre de l'obligation de communiquer. Par ailleurs, le délai de traitement du MROS pour les communications de soupçons sera certes supprimé comme prévu, mais un nouveau délai de 40 jours ouvrables sera prévu, au terme duquel les acteurs procédant à une communication auront le droit de mettre fin à la relation d'affaires tout en préservant une trace (paper trail), si le MROS n'a pas transmis la communication à une autorité de poursuite pénale.

2.2.3

Mesure supplémentaire: Bureau central du contrôle des métaux précieux appelé à jouer le rôle d'autorité de surveillance LBA pour les essayeurs du commerce en métaux précieux

La branche propose que le bureau central assume la fonction d'autorité de surveillance en matière de blanchiment d'argent pour les essayeurs du commerce qui sont assujettis à la LBA à titre de négociants en métaux précieux bancaires.

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3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Le présent chapitre indique brièvement, pour les deux mesures qui imposent à de nouveaux acteurs des obligations de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, quelles sont les mesures existantes en comparaison internationale, essentiellement par rapport aux pays voisins et à d'autres États membres de l'UE.

3.1

Création d'obligations au titre de la loi sur le blanchiment d'argent pour les conseillers

L'UE a mis en oeuvre la recommandation 22 du GAFI relative aux prestations en lien avec la création, la gestion ou l'administration de sociétés à l'art. 2, par. 1, ch. 3, let. b, de la directive (UE) 2015/84929. Les réglementations de mise en oeuvre de plusieurs États européens, parmi lesquels l'Allemagne, le Royaume-Uni, le Luxembourg, la France, l'Autriche, le Liechtenstein, la Belgique, l'Espagne, l'Italie et les Pays-Bas, ont été comparées. Hormis les Pays-Bas, tous ont intégré dans leur droit national une disposition correspondant à celle de la directive.

3.2

Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme

Au niveau européen, il existe principalement deux systèmes de création d'associations. Dans le premier, la création de l'association nécessite une annonce auprès d'une entité étatique et s'accompagne du dépôt de certains documents. Ces documents doivent contenir les statuts de l'association, l'activité que celle-ci entend exercer et la liste des personnes autorisées à la diriger. Cette obligation permet la tenue d'un registre national ou régional des associations et une surveillance accrue de certains risques. Les autorités sont également en mesure d'établir des statistiques sur l'utilisation de ce type de personnes morales. Ce système se retrouve par exemple en Belgique, en Espagne et en Autriche.

Dans le deuxième système, que l'on retrouve par exemple en France, en Allemagne ou en Italie, on distingue principalement entre deux types d'associations: celles qui sont dotées de la personnalité juridique et les autres. Ces dernières ne sont donc pas des personnes morales, et chaque acte juridique doit être accompli par un de ses membres personnellement. Par conséquent, les associations non inscrites ne peuvent pas directement conclure des contrats, recevoir des legs, accéder au système bancaire et transférer de l'argent. Pour acquérir la personnalité juridique, l'association 29

Directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission, JO L 141 du 5.6.2015, p. 73.

5251

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doit respecter différentes conditions, dont principalement une obligation d'inscription auprès d'une entité étatique. Après le dépôt de ses statuts et de la liste de ses organes de direction, l'association devient une personne morale à part entière. Ce système est souvent combiné avec des conditions ou des obligations supplémentaires pour les associations qui procèdent à certains types d'opérations ou bénéficient d'avantages. En France, par exemple, une association qui désire recevoir des dons importants ou conclure des contrats devra être reconnue d'utilité publique. Ce statut est assujetti à des conditions supplémentaires. En Allemagne, l'exonération fiscale de l'association nécessite un examen détaillé mené par l'autorité fiscale qui contrôle expressément l'absence de financement du terrorisme. En Italie, l'association qui désire transférer une somme d'argent supérieure à 1000 euros doit passer par un intermédiaire financier. Ces systèmes sont également combinés avec la tenue d'un registre national des associations enregistrées et donc dotées de la personnalité juridique. Les changements dans l'organisation ou dans les statuts doivent être communiqués à l'entité étatique responsable de l'inscription.

4

Présentation du projet

4.1

Nouvelle réglementation proposée

4.1.1

Création d'obligations au titre de la loi sur le blanchiment d'argent pour les conseillers

4.1.1.1

Contexte

Recommandations du GAFI et 4e évaluation mutuelle de la Suisse La recommandation 22 du GAFI règle les obligations de diligence relatives aux activités en dehors du secteur financier. La let. d de la recommandation prévoit des obligations pour certaines activités exercées par les avocats, les notaires, les membres d'autres professions juridiques indépendantes et les comptables. La let. e couvre les activités des prestataires de services aux trusts et aux sociétés. Le droit suisse se réfère quant à lui, pour ce qui est de l'application des obligations prévues par la LBA, aux activités des intermédiaires financiers. Certaines des activités visées par la recommandation 22 peuvent déjà être considérées comme comprises dans les activités des intermédiaires financiers, à l'exception toutefois des opérations décrites à la let. d en lien avec la préparation ou l'exécution des activités suivantes: (i) créer, gérer ou administrer des personnes morales et des constructions juridiques, (ii) organiser des apports pour les mêmes activités, (iii) acheter ou vendre des entités commerciales et (iv) acheter ou vendre des biens immobiliers. Ne sont pas non plus couvertes par la LBA les activités suivantes visées à la let. e de la recommandation du GAFI: (i) fournir une adresse ou des locaux comme siège d'une société ou d'une autre personne morale ou construction juridique et (ii) exercer la fonction d'actionnaire agissant pour le compte d'une autre personne (nominee shareholder) ou aider une autre personne à exercer cette fonction. En lien avec les activités énoncées, la recommandation parle de «préparent ou effectuent des opérations pour leurs clients». À cet égard, le terme «opération» ne doit pas être confondu avec la transaction financière, appelée opération financière (en anglais financial transaction) dans 5252

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les recommandations du GAFI30. La Suisse ne prévoit actuellement aucune obligation au sens de la LBA pour la fourniture de prestations en lien avec les activités indiquées plus haut, bien qu'il ne s'agisse pas de nouvelles recommandations.

En 2005 déjà, dans le 3e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, puis dans le rapport de suivi de 2009, le GAFI a critiqué la mise en oeuvre de la recommandation 22 par notre pays comme étant lacunaire, notamment en ce qui concerne les prestations en lien avec la création, la gestion ou l'administration de sociétés ou de constructions juridiques. Publié le 7 décembre 2016, le 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse par le GAFI réitère ces critiques, formulant en outre une recommandation explicite sur cette question.

Les révélations des Panama Papers Le 3 avril 2016, le Consortium international des journalistes d'investigation publiait des documents confidentiels d'un cabinet d'avocats panaméen. Ces documents révélaient aussi bien des stratégies légales d'évasion fiscale que des infractions fiscales, des actes de blanchiment d'argent et d'autres infractions commises par les clients de ce cabinet d'avocats. Selon les informations recueillies par les journalistes, parmi les 14 000 banques, cabinets d'avocats et autres prestataires de services impliqués figuraient quelque 1200 entreprises suisses ayant participé à la création de sociétés offshore, principalement au Panama. Seuls Hong Kong et le Royaume-Uni comptaient davantage d'entreprises impliquées. Ces révélations ont donné lieu en Suisse à toute une série d'interventions parlementaires réclamant en particulier un renforcement de la législation dans ce domaine. L'adoption de mesures appropriées répond donc non seulement aux sollicitations internationales, mais également à un intérêt de politique intérieure.

4.1.1.2

Solution proposée

Selon la réglementation existante, les prestations en lien avec la création, la gestion ou l'administration de sociétés ou de trusts sont soumises à la LBA et surveillées lorsque des valeurs patrimoniales appartenant à des tiers sont acceptées ou gardées en dépôt ou si une aide est fournie pour les placer ou les transférer. Le fait d'exercer une activité d'organe d'une société de domicile (art. 6, al. 1, let. d, OBA) est également soumis à la LBA. Ces activités relèvent en effet de l'intermédiation financière.

En revanche, les prestations en lien avec des sociétés ou des trusts ne générant pas de flux financiers ne sont pas soumises à la LBA. Les expériences récentes et les évolutions internationales montrent néanmoins la nécessité de soumettre également ces activités à la LBA. C'est pourquoi la proposition est faite d'appliquer des obligations de diligence prescrites par la LBA à certaines prestations spécifiques en lien avec des sociétés non opérationnelles ou des trusts ainsi qu'à la fonction d'actionnaire agissant pour le compte d'une autre personne. Il est ainsi créé une nouvelle catégorie de personnes appelées «conseillers», qui sont assujettis à la LBA tout comme les intermédiaires financiers et les négociants. La notion de «conseiller» sert simplement à regrouper sous un terme générique les activités nouvellement 30

Voir par exemple à cet égard les recommandations 22, let. a, ou 23, let. a.

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soumises à la réglementation. Par conséquent, le but n'est en aucune manière d'assujettir à la LBA toutes les activités de conseil, alors que, par ailleurs, les activités concernées vont en partie au-delà de la signification de la notion de conseil dans la langue courante. Le seul élément déterminant est la fourniture de prestations en lien avec les activités décrites dans le texte de la loi. L'extension correspondante du champ d'application de la LBA permettra à la fois de répondre aux critiques formulées dans le 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, de satisfaire à la norme internationale applicable et de tenir compte des exigences de politique intérieure ressortant de plusieurs interventions parlementaires. Il est proposé, comme c'est déjà le cas pour les négociants, un régime allégé par rapport aux intermédiaires financiers, qui prévoit une obligation de contrôler et une obligation de communiquer, mais pas de surveillance. L'efficacité du dispositif est garantie par l'obligation de contrôler les dossiers soumis aux obligations prévues par la LBA. La cohérence avec le régime des négociants et la possibilité d'une poursuite pénale sont assurées par l'obligation de communiquer. Dans ce contexte, il convient de relever que les prestations, lorsqu'elles sont fournies par un avocat ou un notaire, sont toujours exemptées de l'obligation de communiquer soit lorsqu'elles n'incluent aucune transaction financière, soit lorsque les informations à communiquer sont soumises au secret professionnel. Cette exception ne vaut toutefois que pour l'obligation de communiquer, mais pas pour le respect des obligations de diligence.

Champ d'application Afin de prévenir le risque d'un éventuel transfert des activités criminelles d'un groupe professionnel à un autre et de ne pas désavantager certaines branches, le présent projet suit une approche axée sur les activités. Il s'ensuit que les obligations de diligence vaudront pour toutes les personnes physiques ou morales qui fourniront les prestations concernées, quelle que soit leur profession.

Comme pour les négociants, les personnes relevant de la nouvelle catégorie ne seront soumises aux obligations de diligence que si elles exercent une activité économique orientée vers l'obtention d'un revenu durable. Seule la fourniture à titre professionnel des prestations
concernées entrera donc dans le champ d'application de la loi.

Activités entrant dans le champ d'application des nouvelles dispositions Conformément aux recommandations du GAFI, tant la préparation que l'exécution des opérations seront soumises à la loi. Il s'ensuit que les obligations de diligence devront être respectées même lors du simple établissement d'un concept. Cette solution est judicieuse dans la mesure où l'élaboration ou l'établissement d'un concept sont souvent au coeur de l'activité de conseil et peuvent être assurés même indépendamment de tout acte à proprement parler. Le champ d'application inclut la préparation ou l'exécution d'opérations en lien avec la création, la gestion ou l'administration de sociétés de domicile ou de trusts ainsi que l'organisation des apports de fonds dans ce contexte. Il couvre en outre l'achat et la vente de sociétés de domicile et la fourniture d'une adresse ou de locaux destinés à servir de siège à une société ou à un trust. Enfin, les obligations s'appliquent également aux personnes faisant office d'actionnaires pour le compte d'autres personnes. Des explica-

5254

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tions plus détaillées sur les diverses activités figurent dans les commentaires des différentes dispositions.

Approche fondée sur les risques La recommandation 22 du GAFI ne distingue pas entre les sociétés opérationnelles et les sociétés non opérationnelles. Le présent projet suit quant à lui une approche fondée sur les risques, selon laquelle les prestations en lien avec des sociétés ne présentant qu'un risque mineur doivent être exclues du champ d'application dans toute la mesure du possible. C'est pour cette raison que l'on établit ici une distinction entre sociétés opérationnelles et sociétés non opérationnelles.

Conformément à la pratique constante de la FINMA, les sociétés non opérationnelles sont désignées en Suisse par l'expression «société de domicile». Les sociétés de domicile sont utilisées principalement pour détenir ou administrer des valeurs patrimoniales ou matérielles. Elles sont aussi régulièrement utilisées pour créer des structures de sociétés complexes. Le recours à de telles sociétés garantit un certain anonymat au propriétaire de valeurs patrimoniales, celui-ci ayant la possibilité ­ par exemple en relation avec des comptes ou lors de la conclusion d'affaires ­ d'agir non pas sous son propre nom, mais sous celui de la société de domicile dont il est l'ayant droit économique. L'utilisation de structures de sociétés complexes a en outre pour effet de réduire encore plus la transparence. C'est pourquoi on peut partir du principe que les sociétés de domicile présentent un risque plus élevé que les établissements opérationnels. Le GCBF parvient aux mêmes conclusions dans l'analyse des risques figurant dans son rapport sur le risque de blanchiment d'argent associé aux personnes morales, publié le 1er juin 201831. Selon l'approche fondée sur les risques, le champ d'application doit couvrir les sociétés de domicile. Les sociétés opérationnelles, qui représentent un risque comparativement moindre, doivent donc être exclues de cette mesure, comme le souhaitent d'ailleurs de nombreux participants à la consultation.

En ce qui concerne les formes juridiques entrant dans le champ d'application, le présent projet est conforme aussi bien à la norme du GAFI qu'à la directive (UE) 2015/849. Par ailleurs, la terminologie internationale a été adaptée à celle de la législation suisse afin de
présenter un projet dont les règles soient claires et les termes sans ambiguïtés. Les termes utilisés ci-après sont donc ceux de société, de société de domicile et de trust au sens de la Convention du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance32.

Obligations des conseillers La LBA est complétée par une nouvelle section réglant les obligations de diligence des conseillers et les mesures organisationnelles. L'obligation de communiquer, déjà applicable aux intermédiaires financiers et aux négociants, est par ailleurs étendue aux conseillers. Il en va de même de l'obligation de contrôler déjà applicable aux négociants.

31 32

Voir chap. 7, Conclusions du rapport (www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/52565.pdf) RS 0.221.371

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Obligations de diligence des conseillers Les obligations de diligence prévues pour les conseillers sont globalement les mêmes que celles incombant actuellement aux négociants. Elles incluent les obligations de vérifier l'identité du cocontractant, d'identifier l'ayant droit économique, d'établir et de conserver des documents et de clarifier l'arrière-plan et le but de la prestation à fournir.

Mesures organisationnelles Afin de garantir en interne le respect des obligations, il est également prévu d'obliger les conseillers à veiller à ce que leur personnel soit suffisamment formé et à réaliser des contrôles internes. La règle actuelle applicable aux intermédiaires financiers à l'art. 8 LBA est reprise par analogie. Cette mesure est importante pour apporter la preuve de l'efficacité du dispositif.

Obligation de contrôler incombant aux conseillers Il existe plusieurs possibilités d'attester l'efficacité des dispositions lors des évaluations effectuées par le GAFI. Une possibilité consisterait à assujettir les acteurs concernés à une autorité de surveillance ou à un organisme d'autorégulation appelé à surveiller l'exécution des obligations de la part des assujettis et à en garantir ainsi le respect. Étant donné qu'il s'agit là d'une solution très complète, elle n'a pas été retenue, comme cela était déjà le cas pour les négociants. Une autre possibilité consisterait à introduire une obligation de contrôler. Le respect des obligations de diligence serait en l'occurrence vérifié par une entreprise de révision directement chez les acteurs concernés. Cette solution moins complète étant à la fois simple et efficace, il est proposé de la prévoir pour les conseillers. Il est donc prévu d'étendre aux conseillers la disposition régissant l'obligation de contrôler, qui s'applique actuellement aux négociants.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit également pour l'entreprise de révision une obligation de communiquer au MROS. Cette obligation existe dès lors qu'un conseiller ne s'acquitte pas de son obligation de communiquer et que l'entreprise de révision a des soupçons fondés permettant de présumer que la prestation fournie a un rapport avec le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme, une organisation criminelle ou des fonds provenant d'un crime ou d'un délit fiscal qualifié. Si le conseiller n'est
soumis à aucune obligation de communiquer, par exemple parce que les données à communiquer sont couvertes par le secret professionnel, il ne peut pas non plus y avoir de violation de l'obligation de communiquer.

Afin de préserver le secret professionnel y compris dans le cadre des contrôles effectués par l'entreprise de révision, le conseiller peut faire réaliser les contrôles par un réviseur lui aussi soumis au secret professionnel. Une telle pratique existe déjà s'agissant des audits effectués dans le cadre de la surveillance des avocats et des notaires soumis au secret professionnel et agissant en tant qu'intermédiaires financiers. L'art. 11k de l'ordonnance du 22 août 2007 sur la surveillance de la révision (OSRev)33 impose des conditions d'agrément particulières aux avocats et aux notaires en vue des audits selon la LBA. Il est prévu d'adopter également cette solution 33

RS 221.302.3

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pour les audits des conseillers. En ce qui concerne l'agrément des conseillers en tant que sociétés d'audit au sens de l'art. 2, let. a, ch. 2, de la loi du 16 décembre 2005 sur la surveillance de la révision (LSR) 34, il convient par ailleurs de relever qu'une activité soumise à autorisation est considérée comme un motif d'exclusion à l'octroi d'un tel agrément (art. 9a, al. 1, let. c, LSR). Toutefois, les conseillers ne sont soumis à aucune surveillance et n'exercent donc pas d'activité soumise à autorisation.

Par conséquent, il n'existe pas de conflit entre l'activité de conseiller et l'agrément simultané en tant qu'entreprise de révision.

Afin de garantir qu'une entreprise de révision ne subira pas de conséquences négatives à la suite d'une communication, l'exclusion de la responsabilité pénale et civile, qui est déjà prévue explicitement dans la LBA pour les intermédiaires financiers, est étendue aux entreprises de révision.

Obligation de communiquer pour les conseillers La disposition faisant obligation aux intermédiaires financiers et aux négociants de communiquer est étendue aux conseillers. Cela crée ainsi un régime cohérent couvrant les diverses catégories, comme le réclamait une grande partie des participants à la consultation. L'introduction d'une obligation de communiquer les cas suspects au MROS et la possibilité qui en découle pour ce dernier de se procurer des informations auprès d'autres acteurs concernés améliorent par ailleurs l'efficacité du dispositif et la possibilité de poursuites pénales. L'exception relative au secret professionnel, qui existe déjà dans le domaine de l'activité des intermédiaires financiers, est également applicable aux prestations des conseillers, désormais assujettis. En conséquence, il existe toujours une exception à l'obligation de communiquer lorsque la prestation est fournie par un avocat ou un notaire et que les données à communiquer sont couvertes par le secret professionnel. Par ailleurs, une deuxième exception vient s'y ajouter: celle-ci prévoit qu'il n'existe pas d'obligation de communiquer lorsqu'aucune transaction financière n'est effectuée au nom ou pour le compte d'un client dans le cadre de l'activité. A contrario, l'obligation de communiquer n'existe que si une transaction financière est exécutée pour le client à l'occasion de l'activité
et que les données à communiquer ne sont pas couvertes par le secret professionnel.

Les deux exceptions citées sont également prévues dans les recommandations du GAFI.

Normes pénales Violation de l'obligation de contrôler La LBA en vigueur prévoit une norme punissant la violation de l'obligation de contrôler à laquelle sont soumis les négociants. Afin de garantir que cette obligation soit également respectée par les conseillers, il y a lieu d'étendre l'application de cette norme pénale à la nouvelle catégorie d'acteurs.

34

RS 221.302

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Violation de l'obligation de communiquer La disposition pénale de la LBA relative à la violation de l'obligation de communiquer s'applique désormais automatiquement aux conseillers, dès lors que l'obligation de communiquer est étendue à cette nouvelle catégorie d'acteurs.

4.1.1.3

Aspects examinés et non retenus

Surveillance par la FINMA ou par un OAR La soumission à une surveillance constituerait une solution complète. Pour les conseillers, il s'agit toutefois de mettre en oeuvre une solution à la fois simple et efficace. Comme déjà indiqué, l'instauration d'une obligation de contrôler représente une mesure efficace et proportionnée pour garantir l'efficacité des obligations de diligence. Il convient en outre de relever que, selon le droit en vigueur, seuls les intermédiaires financiers sont soumis à une surveillance. C'est donc pour ces raisons qu'il est proposé de ne pas soumettre les conseillers à une surveillance et de créer un régime cohérent avec celui applicable aux négociants.

Obligations de diligence relatives à la préparation ou à l'exécution d'une opération en lien avec l'achat ou la vente de biens immobiliers pour le compte de tiers La recommandation 22 du GAFI prévoit également des obligations de diligence pour les prestations en lien avec l'achat ou la vente de biens immobiliers. En Suisse, le commerce des biens immobiliers entre déjà largement dans le champ d'application de la LBA. Selon le droit en vigueur, les paiements en espèces dépassant 100 000 francs en relation avec l'achat ou la vente d'un bien immobilier sont soumis à des obligations de diligence ou doivent être effectués en passant par un intermédiaire financier. Celui-ci est en outre tenu de respecter des obligations de diligence en ce qui concerne les valeurs patrimoniales apportées, notamment d'en clarifier l'origine. Ces obligations s'appliquent aussi aux transactions en lien avec le commerce de biens immobiliers. Avec les nouvelles dispositions, les obligations de diligence devront toujours être appliquées lorsque l'achat ou la vente de biens immobiliers se fera en relation avec une prestation concernant la création, la gestion ou l'administration de sociétés de domicile. Pour les raisons évoquées plus haut, ces prestations ne sont pas incluses dans le catalogue des activités des conseillers.

4.1.2

Abaissement du seuil pour le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses

4.1.2.1

Contexte

Dans le cadre de la mise en oeuvre des recommandations du GAFI révisées en 2012, on a inscrit dans la législation sur le blanchiment d'argent, en janvier 2016, des obligations de diligence s'appliquant aux négociants qui agissent à titre professionnel. Ceux-ci sont tenus de respecter des obligations de diligence définies dans la LBA dès lors qu'un paiement en espèces dépasse le seuil de 100 000 francs et qu'il 5258

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n'est pas effectué par le biais d'un intermédiaire financier. Ces dispositions s'appliquent aussi aux négociants en métaux précieux et en pierres précieuses, à moins qu'ils ne soient déjà réputés intermédiaires financiers (cf. art. 2, al. 3, LBA). Avec ce dispositif créé en 2016, la Suisse a opté pour une approche selon laquelle le commerce des biens de luxe est soumis de manière générale à la LBA à partir d'un seuil de 100 000 francs.

La recommandation 22, let. c, du GAFI et sa note interprétative prévoient que les négociants en métaux précieux et en pierres précieuses sont tenus de respecter des obligations de diligence dès lors qu'ils effectuent des transactions en espèces atteignant ou dépassant le seuil de 15 000 dollars/euros. Lors de la 4e évaluation mutuelle de la Suisse par le GAFI, les évaluateurs ont déploré que les paiements en espèces en relation avec le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses n'obligent à respecter des obligations de diligence qu'à partir d'un seuil de 100 000 francs. Le rapport d'évaluation mutuelle du GAFI critique donc expressément le fait que le seuil de 100 000 francs applicable en Suisse est nettement supérieur à celui de 15 000 dollars/euros prévu par la recommandation du GAFI.

4.1.2.2

Solution proposée

Afin de tenir compte des critiques émises dans le rapport d'évaluation mutuelle, il est proposé d'abaisser de 100 000 à 15 000 francs le seuil applicable dans le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses. Toutefois, il est ressorti de plusieurs discussions menées avec des représentants de la branche qu'un tel abaissement du seuil pourrait créer des difficultés dans la vente aux clients finaux, en ce qui concerne aussi bien la détermination de la valeur exacte des matières précieuses contenues dans les produits que la plus-value générée par leur transformation. C'est pourquoi le présent projet propose une solution dont l'application sera plus simple et plus acceptable pour la branche. Dans ce contexte, les définitions des métaux précieux et des pierres précieuses qui seront soumis aux nouvelles dispositions revêtent une importance primordiale. Afin d'exclure le commerce des produits contenant des métaux précieux et des pierres précieuses typiquement destinés à être vendus à des clients finaux, il est proposé de définir de manière étroite les notions de métaux précieux et de pierres précieuses. La proposition repose sur les définitions de produits de la LCMP, de l'ordonnance du 8 mai 1934 sur le contrôle des métaux précieux (OCMP)35 et du tarif des douanes. Les métaux précieux et les pierres précieuses visés à l'art. 8a, al. 4bis, P-LBA sont donc à définir comme étant, pour les premiers, l'or, l'argent, le platine et le palladium sous la forme de produits semiouvrés, de produits de la fonte et de matières pour la fonte et, pour les secondes, les rubis, les saphirs, les émeraudes et les diamants non enfilés, non montés et non sertis. Les bijoux, les statuettes et les autres produits similaires typiquement destinés à être vendus à des clients finaux ne tombent ainsi pas sous ces définitions, qui seront inscrites dans l'OBA. La solution proposée accroît la conformité avec les recommandations du GAFI. D'autres mesures concernant le domaine des métaux précieux sont décrites aux ch. 4.1.8 et 4.1.9.

35

RS 941.311

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L'art. 178 OCMP donne une définition des métaux précieux bancaires. La distinction entre les métaux précieux et les métaux précieux bancaires repose sur le titre et sur la forme apparente. Quiconque pratique le commerce des métaux précieux bancaires est réputé intermédiaire financier, ce qui signifie qu'il est déjà pleinement soumis à la LBA selon le droit en vigueur36. La mesure proposée ne s'applique donc pas dans ce domaine.

Les métaux précieux et les pierres précieuses peuvent en outre faire l'objet d'échanges commerciaux sous la forme de matières premières au sens de l'art. 2, al. 3, let. c, LBA. Or le commerce des matières premières n'est réputé faire partie des activités d'intermédiaire financier que s'il est pratiqué pour le compte de tiers 37.

S'il est au contraire exercé pour compte propre, il ne relève pas de l'intermédiation financière, et ce sont alors les règles relatives aux transactions en espèces dépassant 100 000 francs en vigueur pour les négociants qui s'appliquent. L'abaissement du seuil à 15 000 francs ne concernera donc le commerce des matières premières que lorsque des métaux précieux ou des pierres précieuses seront négociés sous la forme de produits de base non transformés, autrement dit de matières premières.

4.1.3

Vérification de l'identité de l'ayant droit économique

4.1.3.1

Contexte

L'art. 4 LBA exige que l'intermédiaire financier identifie l'ayant droit économique avec la diligence requise par les circonstances. L'art. 305ter, al. 1, CP sanctionne par ailleurs celui qui ne s'acquitte pas de cette obligation. Est puni, selon le CP, quiconque a omis de vérifier l'identité de l'ayant droit économique avec la vigilance que requièrent les circonstances.

La recommandation 10, let. b, du GAFI exige d'identifier le bénéficiaire effectif et de prendre des mesures raisonnables pour vérifier son identité, afin que l'institution financière ait l'assurance de savoir qui est le bénéficiaire effectif. Ses dispositions d'exécution précisent en outre que la vérification doit se fonder sur des informations ou des données pertinentes provenant de sources fiables. Le rapport d'évaluation mutuelle du GAFI reconnaît, dans le cadre de l'examen de l'efficacité des prescriptions légales, que les intermédiaires financiers suisses mettent effectivement en oeuvre des mesures pour s'assurer de la plausibilité des informations concernant l'ayant droit économique. Ils suivent en l'occurrence une approche fondée sur les risques et s'appuient sur leur propre connaissance du profil du client, sur des informations publiques et, au besoin, sur des informations fournies par un service externe. Les critiques du rapport d'évaluation mutuelle portent donc moins sur la conformité des pratiques des intermédiaires financiers suisses avec les recommandations du GAFI que sur l'absence ­ au-delà de l'obligation formelle d'identifier l'ayant droit économique ­ de base légale explicite prescrivant de procéder systématiquement à une vérification matérielle, autrement dit sur l'absence d'obligation générale en la matière. Cette lacune a eu un impact négatif sur l'évaluation de la 36 37

Art. 2, al. 3, let. c, LBA en relation avec l'art. 5, al. 1, let. a et e, OBA Art. 2, al. 3, let. c, LBA en relation avec l'art. 5, al. 1, let. c et d, OBA

5260

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conformité du droit suisse avec plusieurs des exigences de la recommandation 10 et compte donc pour beaucoup dans la note globale insuffisante obtenue en relation avec cette recommandation. De plus, elle a aussi eu un effet négatif sur l'évaluation d'autres recommandations, notamment en ce qui concerne la transparence des personnes morales et d'autres constructions juridiques (recommandations 24 et 25). La mesure proposée ici revêt donc une importance particulière.

4.1.3.2

Solution proposée

Afin de répondre aux critiques du GAFI concernant l'absence de base légale évoquée ci-dessus, il est proposé d'adapter le libellé de la LBA de manière à ce que l'obligation de vérifier l'identité de l'ayant droit économique y reçoive une base légale expresse. La formulation retenue concorde avec la teneur de la recommandation du GAFI, comme le réclamait une grande partie des participants à la consultation.

4.1.4

Actualisation des données des clients

4.1.4.1

Contexte

L'art. 5 LBA prévoit l'obligation de renouveler certaines données récoltées dans le cadre des obligations de diligence des intermédiaires financiers. Cette obligation est toutefois limitée sur deux points. D'une part, elle ne s'applique que lorsque des doutes surviennent au cours de la relation d'affaires quant à l'identité du cocontractant ou de l'ayant droit économique. D'autre part, elle ne vise que le renouvellement de la vérification de l'identité du cocontractant ou de l'identification de l'ayant droit économique.

Le ch. 23 de la note interprétative de la recommandation 10 du GAFI (devoir de vigilance relatif à la clientèle) exige que les institutions financières s'assurent que les documents, données et informations obtenues dans l'exercice du devoir de vigilance restent à jour et pertinents. Dans son rapport d'évaluation mutuelle, le GAFI reproche à la Suisse qu'il n'existe pas d'obligation générale et explicite pour l'intermédiaire financier de s'assurer que les données obtenues dans le cadre des diligences restent à jour et pertinentes au cours de la relation d'affaires. Il relève que c'est seulement dans l'hypothèse d'un doute sur les données relatives à l'identification du client ou de son ayant droit économique que la procédure doit être renouvelée38.

Le GAFI considère que l'absence d'obligation générale et explicite de s'assurer que les données obtenues dans le cadre des diligences restent à jour et pertinentes constitue une lacune importante, notamment pour la détection et le suivi des risques. Cette lacune pèse de manière substantielle sur la note attribuée par le GAFI pour la

38

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, annexe sur la conformité technique, critère 10.7 (b), p. 196.

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recommandation 1039, tout comme l'absence d'une obligation explicite de vérifier l'identité de l'ayant droit économique (cf. ch. 4.1.3). Il est par conséquent nécessaire d'y remédier.

4.1.4.2

Solution proposée

Il est proposé d'intégrer dans la LBA l'obligation de vérifier périodiquement si les documents nécessaires obtenus dans le cadre des obligations de diligence concernant le profil du client sont encore d'actualité, et de les mettre à jour le cas échéant (actualisation du profil du client). Cela remédie à l'insuffisance identifiée par le GAFI.

Il ne s'agit pas d'une nouvelle obligation en tant que telle. En pratique, les intermédiaires financiers doivent déjà revoir périodiquement leur clientèle dans le cadre de la catégorisation des risques. Pour certaines relations d'affaires à risque accru, comme celles avec des personnes politiquement exposées à l'étranger, la direction doit décider chaque année de la poursuite de la relation ou non, ce qui implique une décision prise sur la base de données à jour. Le principe de la vérification périodique et de l'éventuelle actualisation des données relatives aux clients découle donc déjà de manière implicite de la réglementation de la lutte contre le blanchiment d'argent.

Il s'agit par conséquent uniquement d'inscrire dans la LBA une obligation générale et explicite, comme le demande le GAFI.

L'obligation de vérification périodique de l'actualité des données clients vaut pour toutes les relations d'affaires, indépendamment de leur classification au niveau des risques. S'agissant de la périodicité, de l'étendue et de la méthode de vérification et de mise à jour des données des clients, c'est cependant une approche fondée sur les risques qui a été retenue.

Par ailleurs, il n'existe aucune limitation à la vérification de l'identité du cocontractant (art. 3 LBA) ni à l'identification de l'ayant droit économique (art. 4 LBA). La nouvelle obligation explicite peut également impliquer de revoir de manière plus générale le profil du client, par exemple l'objet et le but de la relation d'affaires (art. 6 LBA), dans la mesure où ces informations sont déterminantes pour la classification sur le plan des risques ou pour la surveillance de la relation d'affaires. C'est pourquoi, d'un point de vue systématique, cette nouvelle obligation doit être placée dans la LBA après les obligations de diligence des art. 3 à 6.

Puisque les informations récoltées dans le cadre de l'actualisation devront être documentées et conservées, il est proposé d'inscrire l'obligation générale et explicite d'actualisation des données dans un nouvel alinéa de l'art. 7 LBA relatif à l'obligation d'établir et de conserver des documents.

39

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, annexe sur la conformité technique, pondération et conclusion de la recommandation 10, p. 200.

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4.1.5

Adaptation du système de communication au MROS

4.1.5.1

Contexte

La Suisse dispose, pour des raisons historiques40, d'un système de communication des soupçons de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme particulier dans lequel coexistent, encore aujourd'hui, une obligation et un droit de communiquer. Ce système distingue, sur le papier, selon leur degré les soupçons susceptibles d'être signalés au MROS, les soupçons fondés et les soupçons simples. À ces deux catégories correspondent deux dispositions distinctes: les art. 9 LBA (obligation) et 305ter, al. 2, CP (droit).

La jurisprudence découlant des procédures pénales administratives menées pour soupçon de violation de l'obligation de communiquer selon l'art. 9 LBA en relation avec l'art. 37 LBA a confirmé ces dernières années que la notion de «soupçons fondés» devait être comprise au sens large. Le Tribunal pénal fédéral41 et le Tribunal fédéral42 ont notamment établi qu'un soupçon est clairement fondé au sens de l'art. 9 LBA si des indices suspects subsistent après les clarifications particulières prévues à l'art. 6, al. 2, LBA. En l'absence de clarification dans un délai raisonnable, un «simple doute» peut également, selon le droit en vigueur, déclencher l'obligation de communiquer visée à l'art. 9 LBA.

Dans ce contexte, le droit de communiquer prévu à l'art. 305ter, al. 2, CP n'est plus guère applicable selon la législation en vigueur. En effet, si l'on considère la jurisprudence, l'état de fait visé par le droit de communiquer tombe déjà en grande partie sous l'obligation de communiquer de l'art. 9 LBA.

La coexistence d'un droit et d'une obligation de communiquer peut par conséquent créer une certaine incertitude juridique pour les intermédiaires financiers quant au caractère obligatoire de leur communication. C'est la conclusion à laquelle le GAFI arrive dans son évaluation de la Suisse en 2016. Il considère, en effet, du point de vue de l'efficacité du système, que «le double régime juridique (droit et obligation) organisant les déclarations d'opérations suspectes pèse sur la compréhension et l'interprétation par les intermédiaires financiers des circonstances entraînant une obligation de communiquer un soupçon au MROS»43. Il recommande par conséquent à la Suisse de clarifier le cadre juridique afin de préciser la distinction entre le droit et l'obligation de communiquer et d'éviter qu'un
même degré de soupçon relève des deux régimes juridiques.

Se fondant sur la jurisprudence précitée du Tribunal pénal fédéral de 2015, le GAFI a par contre reconnu que l'obligation de communiquer de l'art. 9 LBA était largement conforme, d'un point de vue technique, avec la recommandation 20 selon laquelle un intermédiaire financier est tenu de communiquer s'il soupçonne ou a des motifs raisonnables de soupçonner que des fonds sont le produit d'une activité 40

41 42 43

Pour les détails sur l'historique du système de communication de soupçons, il est renvoyé au ch. 1.2.5.1 du rapport explicatif du 1er juin 2018 sur le projet de modification de la LBA mis en consultation.

Arrêt SK.2014.14 du 18 mars 2015, consid. 4.5.1.1; arrêt SK.2017.74 du 19 décembre 2017, consid. 2.2.3.1.

Dernier arrêt en date: 1 B_433/2017 du 21 mars 2018, consid. 4.9.

Cf. § 315 du 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse.

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criminelle ou ont un rapport avec le financement du terrorisme. Pour arriver à cette conclusion, le GAFI s'est également basé sur l'avis du MROS qui, depuis 2008, précise que les intermédiaires financiers doivent transmettre une communication au sens de l'art. 9 LBA si, selon diverses indications, selon l'obligation particulière de clarification prévue à l'art. 6 LBA et selon les indices qui en résultent, ils présument ou du moins ne sauraient exclure que les valeurs patrimoniales sont d'origine criminelle44.

Au vu de ce qui précède, le Conseil fédéral a proposé, dans le cadre de la consultation, de supprimer le droit de communiquer. Dans ce contexte, il a également proposé de supprimer le délai de 20 jours ouvrables pour l'analyse par le MROS des communications de soupçons basées sur l'art. 9 LBA.

La majorité des participants s'est toutefois fermement opposée à ces deux propositions.

4.1.5.2

Solution proposée

Compte tenu de ce qui précède et du résultat de la consultation, le Conseil fédéral propose de maintenir le droit de communiquer, tel quel. En revanche, afin de clarifier la distinction entre le droit et l'obligation de communiquer et de renforcer par là même la sécurité juridique, le Conseil fédéral inscrira dans l'OBA l'interprétation jurisprudentielle de la notion de «soupçons fondés» de l'art. 9, al. 1, LBA.

Le Conseil fédéral maintient par contre la suppression du délai d'analyse de 20 jours ouvrables pour les communications basées sur l'art. 9 LBA. En contrepartie, afin de tenir compte des critiques émises à cet égard dans le cadre de la consultation, le Conseil fédéral prévoit d'inscrire directement dans la LBA un droit pour l'intermédiaire financier de mettre fin, à certaines conditions, à une relation d'affaires ayant fait l'objet d'une communication de soupçons au MROS.

Maintien du droit de communiquer et inscription de l'interprétation jurisprudentielle de la notion de «soupçons fondés» dans l'OBA Le droit de communiquer prévu à l'art. 305ter, al. 2, CP est conservé tel quel. Afin de clarifier la distinction entre l'obligation et le droit de communiquer, la notion de «soupçons fondés» de l'art. 9 LBA sera définie dans l'OBA, de manière analogue à ce qui est déjà prévu aujourd'hui en lien avec l'obligation de communiquer des négociants (art. 20, al. 1, OBA).

La définition prendra en compte la jurisprudence selon laquelle un soupçon doit être considéré comme fondé s'il n'a pas pu être dissipé dans le cadre des clarifications au sens de l'art. 6, al. 2, LBA. Comme c'est déjà le cas aujourd'hui, les intermédiaires financiers devront dès lors, également à l'avenir, toujours effectuer des clarifications au sens de l'art. 6, al. 2, LBA avant de procéder à une communication. Il est rappelé à cet égard que toute communication de soupçons au MROS doit notamment décrire 44

Cf. préambule du rapport annuel 2007 du Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent MROS d'avril 2008; www.fedpol.admin.ch/dam/data/fedpol/ kriminalitaet/geldwaescherei/jabe/jb-mros-2007-f.pdf.

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de manière aussi précise que possible les soupçons sur lesquels se base la communication, y compris les extraits de comptes et les pièces justificatives détaillées démontrant les transactions suspectes, ainsi que d'éventuels liens avec d'autres relations d'affaires (art. 3, al. 1, let. h, de l'ordonnance du 25 août 2004 sur le bureau de communication en matière de blanchiment d'argent [OBCBA] 45). Les documents relatifs aux transactions financières et aux clarifications requises réalisées, de même que les autres pièces justificatives, doivent en outre être joints à la communication (art. 3, al. 4, OBCBA). Une communication de soupçons dépourvue des indications requises pourrait constituer une violation de l'obligation de communiquer au sens de l'art. 37 LBA.

En tant que partie intégrante du système de communication de soupçons, les intermédiaires financiers doivent ainsi en principe toujours examiner au préalable les transactions potentiellement suspectes et étayer les communications de soupçons envoyées au MROS. Le Conseil fédéral ne souhaite, en effet, en aucun cas introduire un système de communication «défensif» dans lequel les intermédiaires financiers seraient amenés à communiquer au MROS toute transaction inhabituelle ou toute alerte relevée par leur système de surveillance (hit), sans autre analyse ou clarification préalable. Le système actuel visant à produire des communications de soupçons de qualité doit être maintenu afin d'éviter de submerger le MROS avec des communications insuffisamment fondées qui ne serviraient qu'à produire du renseignement financier, sans contribuer à détecter effectivement des cas de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme.

En ce qui concerne le droit de communiquer, le Conseil fédéral et les autorités compétentes le considèrent comme un instrument subsidiaire par rapport à l'obligation de communiquer. Le droit de communiquer ne doit en aucun cas être vu comme entrant en concurrence avec l'obligation de communiquer. Un même cas ne peut, en effet, jamais tomber à la fois sous le droit et l'obligation de communiquer. En d'autres termes, avant de faire usage du droit de communiquer, l'intermédiaire financier doit toujours examiner si l'obligation de communiquer est applicable, en tenant compte à cet égard de la jurisprudence relative à la notion de
«soupçons fondés». Ce n'est que si l'obligation de communiquer n'entre pas en question, que l'intermédiaire financier peut faire usage du droit de communiquer. Il y a donc, également en cas d'usage du droit de communiquer, toujours des clarifications préalables au sens de l'art. 6, al. 2, LBA. Autrement dit, le droit de communiquer ne peut être utilisé pour annoncer des cas au MROS sans effectuer aucune clarification au préalable.

En raison de l'interprétation jurisprudentielle large de la notion de «soupçons fondés», la proportion de communications de soupçons basées sur le droit devrait, à long terme, diminuer au profit des communications sur la base de l'obligation de communiquer.

45

RS 955.23

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Suppression du délai pour l'analyse des communications par le MROS Le droit actuel prévoit un délai d'analyse de 20 jours ouvrables pour les communications sur la base de l'obligation de communiquer visée à l'art. 9 LBA (art. 23, al. 5, LBA). Aucun délai n'est en revanche prévu s'agissant du droit de communiquer (art. 23, al. 6, LBA). Le délai ne tient déjà aujourd'hui pas suffisamment compte de la réalité. Selon les circonstances, le MROS peut avoir besoin d'informations complémentaires pour son analyse et doit alors faire usage de l'art. 11a LBA, ce qui nécessite du temps. De même, le MROS peut devoir recourir à la coopération internationale pour obtenir d'un homologue des informations aux fins de ses analyses. Or le délai de réponse moyen était de 27 jours ouvrables en 2016 et 201746. Sans compter que le MROS a besoin de temps au préalable pour préparer la demande, puis pour analyser les informations reçues. Enfin, certaines communications peuvent, avec les documents explicatifs ou justificatifs, comporter des centaines de pages.

L'obligation de l'art. 23, al. 5, LBA de traiter dans les 20 jours toutes les communications en vertu de l'obligation de communiquer ne peut par conséquent être maintenue et doit être supprimée. Cela donnera au MROS la marge de manoeuvre nécessaire pour prioriser47 et traiter plus rapidement les communications de soupçons graves, tandis que les communications de moindre gravité auront un délai de traitement plus long. La suppression du délai est d'autant plus nécessaire que ces dernières années le nombre de communications de soupçons sur la base de l'art. 9 LBA a continué d'augmenter.

Les dispositions d'exécution de la LBA, comme l'OBA-FINMA, l'OBA-CFMJ et les règlements des OAR, déterminent à quelles conditions un intermédiaire financier est en droit de mettre fin à une relation d'affaires ayant fait l'objet d'une communication de soupçons. Il en découle notamment qu'il n'est en principe pas possible de mettre fin à une relation d'affaires de son propre chef pendant le délai d'analyse de cette communication par le MROS. Pour les communications de soupçons basées sur l'art. 9 LBA, la LBA prévoit un délai d'analyse de 20 jours ouvrables. Au terme de ce dernier, l'intermédiaire financier peut mettre fin à la relation d'affaires à certaines conditions (cf. par ex. les
art. 30 OBA-FINMA et 20 OBA-CFMJ). Pour le droit de communiquer, aucun délai pour l'analyse n'est par contre fixé dans la loi.

L'intermédiaire financier peut ainsi se voir contraint de maintenir une relation d'affaires pour une période indéterminée. Or les intermédiaires financiers souhaitent souvent mettre fin à une relation d'affaires ayant fait l'objet d'une communication, en raison des risques et des coûts de surveillance impliqués par de telles relations.

Avec l'abrogation du délai d'analyse de 20 jours, les intermédiaires financiers se retrouveraient dans la même situation qu'aujourd'hui en cas de communications sur la base du droit de communiquer. Une large majorité des participants à la consultation considère par conséquent que l'abrogation du délai d'analyse entraînerait une trop grande insécurité pour les intermédiaires financiers et que la proposition est disproportionnée. Une prolongation appropriée du délai d'analyse pour le MROS serait par contre acceptable.

46 47

Cf. rapports annuels du MROS de 2016 et de 2017, ch. 2.3.2.

La priorisation est effectuée par le MROS sur la base de différents critères. Il s'agit d'une procédure interne, adaptée régulièrement, qui n'est pas communiquée aux intermédiaires financiers.

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Le Conseil fédéral a de la compréhension pour les craintes exprimées. Il est d'avis qu'une prolongation du délai d'analyse ne résoudrait pas la situation de manière satisfaisante. Par conséquent, il propose d'inscrire dans la LBA un droit pour l'intermédiaire financier de rompre une relation d'affaires ayant fait l'objet d'une communication de soupçons, si à l'expiration d'un délai de 40 jours ouvrables, le MROS ne l'a pas informé qu'il transmet la communication à une autorité de poursuite pénale. Cette règle vaudra aussi bien pour les communications effectuées sur la base de l'obligation que du droit de communiquer, ce qui constitue une amélioration par rapport à la situation actuelle. Si l'intermédiaire rompt la relation d'affaires, il ne pourra toutefois autoriser le retrait d'importantes valeurs patrimoniales que sous une forme permettant aux autorités de poursuite pénale d'en suivre la trace (paper trail), comme le prévoit aujourd'hui déjà l'art. 30, al. 2, OBA-FINMA. Il continuera également d'être soumis à l'interdiction d'informer. Il ne pourra par conséquent pas informer son client qu'il met fin à la relation d'affaires en raison d'une communication de soupçons. Enfin, l'intermédiaire financier devra bien entendu informer le MROS qu'il met fin à la relation d'affaires.

Le présent projet introduisant une obligation de communiquer pour les conseillers, la LBA prévoira également, pour des questions de sécurité juridique, la possibilité pour ces derniers de mettre fin à la relation d'affaires suite à une communication au MROS. Contrairement aux intermédiaires financiers, les conseillers pourront rompre la relation d'affaires en tout temps. À l'instar des intermédiaires financiers, les conseillers continueront d'être soumis à l'interdiction d'informer et devront prévenir le MROS s'ils mettent fin à la relation d'affaires.

En lien avec la proposition évoquée plus haut, une modification supplémentaire de la LBA s'impose. Pendant l'analyse effectuée par le MROS, l'intermédiaire financier doit exécuter les ordres des clients portant sur les valeurs communiquées (art. 9a LBA). L'art. 33 OBA-FINMA dispose que l'intermédiaire financier ne doit exécuter les ordres du client portant sur d'importantes valeurs patrimoniales, que sous une forme qui permette de suivre la trace de la transaction. Il est
proposé d'inscrire cette règle directement à l'art. 9a LBA. En effet, ne prévoir une telle règle qu'en cas de rupture de la relation d'affaires n'aurait guère de sens, sachant qu'à ce moment, le client pourrait avoir déjà procédé à des retraits importants. Cette règle s'inscrit dans l'optique de faciliter une éventuelle future confiscation par les autorités pénales et vise ainsi à renforcer l'efficacité de la poursuite pénale.

4.1.5.3

Aspect examiné et non retenu

Le Conseil fédéral a examiné si la formulation de l'art. 9, al. 1, LBA ne devrait pas être adaptée à la formulation de la recommandation 20 du GAFI, en remplaçant l'expression «présume sur la base de soupçons fondés» par «soupçonne ou a des motifs raisonnables de soupçonner». Il a renoncé à cette proposition pour les raisons suivantes: premièrement, il existe depuis ces dernières années une définition jurisprudentielle de la notion de «soupçons fondés», confirmée en mars 2018 par le Tribunal fédéral. La remplacer par une nouvelle notion non définie aurait créé une insécurité juridique, du moins aussi longtemps que la jurisprudence ne se serait pas 5267

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prononcée sur son interprétation. La nouvelle formulation aurait également pu laisser entendre, à tort, qu'il n'est plus nécessaire d'effectuer des clarifications particulières avant de faire une communication de soupçons. Cela pourrait entraîner une forte augmentation des communications de soupçons et, parallèlement, une diminution de leur qualité et de leur bien-fondé. L'efficacité du système de communication au MROS et de la lutte contre le blanchiment d'argent dans son ensemble en pâtirait. Deuxièmement, le GAFI a reconnu que l'interprétation jurisprudentielle des «soupçons fondés» est largement conforme à la recommandation 20 du GAFI. Il n'y a par conséquent aucune nécessité de modifier formellement le texte de l'art. 9, al. 1, LBA.

4.1.6

Autres modifications de la LBA

Quelques modifications de la LBA, moins fondamentales, sont proposées, d'une part, pour renforcer la coopération nationale, et, d'autre part, pour améliorer la conformité de la législation suisse avec les normes du GAFI en matière de coopération internationale (recommandation 40). Le droit d'accéder directement auprès des intermédiaires financiers ou des conseillers aux fichiers en rapport avec des communications de soupçons gérés séparément selon l'art. 34 LBA doit en outre être exclu, car il contredit l'interdiction d'informer de l'art. 10a LBA. Cette exclusion doit, par ailleurs, être étendue à toutes les informations transmises au MROS en lien avec une communication de soupçons. Cette modification de l'art. 34 LBA augmentera la sécurité juridique en évitant des conflits entre deux dispositions de la LBA.

Une modification supplémentaire est proposée suite à la consultation. La création d'une nouvelle exception à l'interdiction d'informer de l'art. 10a permettra, à certaines conditions, à la filiale en Suisse d'informer sa mère à l'étranger qu'une communication de soupçons a été effectuée.

Suite à l'entrée en vigueur de la LJAr, quelques adaptations de la LBA sont également nécessaires pour corriger un oubli de coordination lors du traitement du projet de LJAr au Parlement. En lien avec l'entrée en vigueur prochaine de la LEFin, il y a lieu de confirmer que la compétence de la FINMA de prendre des mesures contre les intermédiaires financiers enfreignant l'obligation de s'affilier à un OAR reste inchangée malgré la suppression du statut d'«intermédiaire financier directement soumis à la surveillance de la FINMA» (IFDS). Enfin, quelques modifications formelles de la LBA sont nécessaires en vue de la mise en service au 1 er janvier 2020 du nouveau système de traitement des données au MROS.

Coopération nationale Le MROS peut actuellement échanger des informations nécessaires à l'application de la LBA, d'une part, avec les autorités de surveillance (FINMA, CFMJ, autorité intercantonale, et à l'avenir, bureau central) et les autorités de poursuite pénale, et, d'autre part, avec toutes les autres autorités fédérales, cantonales ou communales (art. 29 LBA). Il ne peut, par contre, pas échanger d'informations avec les OAR reconnus (art. 24 LBA), du fait que ces derniers ne sont ni des autorités de surveillance à proprement parler, ni des autorités fédérales, cantonales ou communales au 5268

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sens de l'art. 29, al. 2, LBA. Or, les OAR ont reçu du législateur des tâches de surveillance des intermédiaires financiers qui leur sont affiliés, tâches similaires à celles des autorités de surveillance, et peuvent déjà échanger des informations avec la FINMA ou les autorités de poursuite pénale. Il convient de créer dans la LBA la base leur permettant d'échanger également des informations directement avec le MROS (art. 29b, al. 1, P-LBA). Cela rendra plus efficace la coopération nationale nécessaire à l'application de la LBA.

Afin de tenir compte d'un avis exprimé lors de la consultation, l'autorisation expresse des autorités pénales sera nécessaire si le MROS souhaite transmettre aux OAR des informations provenant de ces dernières (art. 29b, al. 2, P-LBA).

Avec l'entrée en vigueur de la LEFin, un ou plusieurs organismes de surveillance visés à l'art. 43a LFINMA se verront confier la surveillance courante de certains intermédiaires financiers en vertu de l'art. 61 LEFin. Il y a par conséquent lieu, pour les mêmes raisons que pour les OAR, de prévoir une coopération également entre de tels organismes de surveillance et le MROS. Les mêmes règles seront applicables que celles valant pour l'échange entre le MROS et les OAR (art. 29b P-LBA).

Transmission et utilisation des informations provenant d'une cellule de renseignements financiers étrangère Un principe important de la coopération internationale est qu'une autorité ne peut transmettre à une autre autorité nationale ou à un tiers des informations reçues d'un homologue étranger qu'avec l'autorisation expresse de ce dernier48. Ce principe est déjà inscrit à l'art. 29, al. 2ter, LBA s'agissant des informations que le MROS reçoit d'un homologue étranger et qu'il souhaite transmettre aux autorités visées à l'art. 29, al. 2bis (autres autorités fédérales, cantonales ou communales). Il n'existe pas de disposition similaire en lien avec les autorités de surveillance visées à l'art. 29, al. 1, LBA. Il y a donc lieu de compléter l'art. 29, al. 2ter, LBA, en y ajoutant une référence expresse aux autorités visées à l'al. 1. Le même principe doit également s'appliquer s'agissant de l'échange nouvellement prévu entre le MROS et les OAR et entre le MROS et les organismes de surveillance (art. 29b, al. 3, P-LBA).

Un autre principe important de la coopération
internationale est que les informations échangées doivent exclusivement être utilisées aux fins pour lesquelles elles ont été sollicitées ou fournies (ch. 3 de la note interprétative de la recommandation 40; principe de spécialité). L'autorité qui reçoit les informations doit par conséquent respecter les conditions d'utilisation imposées par l'autorité qui les a fournies. Cela vaut également lorsque des informations reçues d'un homologue étranger sont transmises à une autre autorité nationale avec l'autorisation de ce dernier. Le MROS est généralement autorisé par ses homologues à transmettre les informations reçues aux autorités de poursuite pénale, à condition qu'elles ne soient pas utilisées comme moyens de preuve, afin de ne pas contourner l'entraide judiciaire. Il s'ensuit que ces informations issues de la coopération internationale ne doivent pas être versées au dossier de la procédure pénale. Une telle restriction d'utilisation peut se heurter à une interprétation large du principe du respect des droits de la défense prévu dans le 48

Ch. 3 de la note interprétative de la recommandation 40 du GAFI et principes du Groupe Egmont en matière de coopération entre cellules de renseignements financiers.

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code de procédure pénale (CPP)49, selon laquelle toutes les informations reçues doivent être versées au dossier. Pour éviter des conflits d'interprétation qui pourraient entraîner une violation des conditions d'utilisation imposées par une autorité étrangère, une base légale formelle doit prévoir expressément l'obligation pour les autorités de poursuite pénale de respecter les conditions d'utilisation des informations définies par le MROS. Ces conditions refléteront bien entendu les conditions imposées par l'homologue étranger. À cette fin, un nouvel al. 2bis est ajouté à l'art. 29a LBA.

Droit d'accès aux fichiers en rapport avec des communications de soupçons ou des informations transmises au MROS En vertu de l'art. 34, al. 1, LBA, les intermédiaires financiers doivent gérer des fichiers séparés en rapport avec les communications de soupçons. Le droit d'accès, au sens de l'art. 8 de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD)50, des personnes concernées à ces fichiers est actuellement exclu uniquement pendant l'analyse effectuée par le MROS et tant que dure le blocage des avoirs prévu à l'art. 10 LBA (art. 34, al. 3, LBA). Or, depuis la modification de l'art. 10a, al. 1, LBA induite par la loi fédérale du 12 décembre 2014 sur la mise en oeuvre des recommandations du Groupe d'action financière, révisées en 201251, l'interdiction d'informer le client qu'une communication de soupçons a été effectuée est illimitée dans le temps. Ces deux dispositions doivent désormais être alignées. En effet, en accordant aux personnes concernées l'accès aux fichiers en question, l'intermédiaire financier violerait de facto l'interdiction d'informer le client. C'est pourquoi, en pratique, les intermédiaires financiers font généralement valoir l'interdiction, illimitée dans le temps, d'informer le client pour refuser ce droit d'accès. Cette situation n'est toutefois pas satisfaisante. Il y a donc lieu, pour des raisons de sécurité juridique, d'exclure que les intermédiaires financiers et les conseillers accordent le droit d'accès aux fichiers en lien avec des communications de soupçons. Les personnes concernées doivent faire valoir leur droit d'accès aux informations figurant dans les fichiers séparés exclusivement auprès du MROS. Ce dernier dispose des informations correspondantes et fournit
des renseignements en vertu de l'art. 35 LBA sur la base de l'art. 8 de la loi fédérale du 13 juin 2008 sur les systèmes d'information de police de la Confédération (LSIP)52.

Il y a également lieu d'étendre l'obligation de gérer des fichiers séparés aux informations transmises par les intermédiaires financiers au MROS, à sa demande, sur la base de l'art. 11a LBA. En effet, les informations transmises dans ce cadre sont toujours en lien avec une communication de soupçons. Elles doivent donc être soumises aux mêmes règles que les communications de soupçons en tant que telles.

Outre l'obligation de tenir des fichiers séparés, le droit d'accès auxdits fichiers doit être évalué par le MROS pour les raisons évoquées plus haut. Le titre de l'art. 34 doit, par la même occasion, être modifié pour mieux refléter le contenu de la disposition.

49 50 51 52

RS 312.0 RS 235.1 RO 2015 1389 RS 361

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Nouvelle exception à l'interdiction d'informer prévue à l'art. 10a L'art. 10a, al. 3, LBA permet déjà aujourd'hui à un intermédiaire financier d'informer un autre intermédiaire financier faisant partie du même groupe du fait qu'il a effectué une communication de soupçons. Cette exception ne permet toutefois d'informer que des membres du groupe soumis à la LBA, c'est-à-dire des intermédiaires financiers en Suisse.

Lors de la consultation, plusieurs participants ont souhaité étendre cette disposition de façon à pouvoir également informer un intermédiaire financier du groupe à l'étranger. Le Conseil fédéral propose d'accéder en partie à cette demande en ajoutant un nouvel al. 3bis à l'art. 10a LBA. Il considère en effet que l'information selon laquelle une communication de soupçons a été effectuée peut être utile, voire nécessaire, à des fins de surveillance consolidée de groupes de sociétés internationaux.

Cette proposition s'inscrit également dans la mise en oeuvre de la recommandation 18 du GAFI, qui prévoit un échange d'informations intra-groupe pour les sociétés appartenant à des groupes financiers internationaux, pour autant que cela soit nécessaire à des fins de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.

La nouvelle disposition devra toutefois s'inscrire dans le cadre légal existant, afin de ne pas restreindre davantage le secret bancaire. Ainsi, comme prévu dans la loi du 8 novembre 1934 sur les banques (LB) 53, la possibilité d'informer sera limitée à la relation entre une société fille en Suisse et sa société mère à l'étranger et sera soumise à certaines conditions. La société mère devra en outre s'engager à respecter l'interdiction d'informer prévue à l'art. 10a, al. 1, LBA.

Coordination avec la loi fédérale sur les jeux d'argent (LJAr) Le 29 septembre 2017, le Parlement a adopté la LJAr. Cette dernière est entrée en vigueur le 1er janvier 2019. Elle inscrit dans la LBA une nouvelle catégorie d'intermédiaires financiers, les exploitants de jeux de grande envergure au sens de la LJAr (art. 2, al. 2, let. f, LBA), et une nouvelle autorité en charge de la surveillance LBA de ces derniers, l'autorité intercantonale (art. 12, let. bbis, LBA). Lors de l'adoption par le Conseil fédéral, le 21 octobre 2015, du message relatif à la LJAr54, les modifications de la LBA
introduites par la loi fédérale du 12 décembre 2014 sur la mise en oeuvre des recommandations du Groupe d'action financière, révisées en 2012 n'étaient pas encore entrées en vigueur. La coordination nécessaire entre la LJAr et la LBA révisée n'a pas eu lieu lors du traitement du projet de LJAr au Parlement. Il en résulte que la nouvelle autorité de surveillance pour les exploitants de jeux de grande envergure n'est pas mentionnée dans les dispositions de la LBA en lien avec la transmission de données relatives à des activités terroristes (art. 22a LBA). La présente modification de la LBA est l'occasion de procéder aux adaptations nécessaires pour corriger cet oubli.

53 54

RS 952.0 FF 2015 7627

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FF 2019

Violation de l'obligation de s'affilier à un OAR Sous la législation actuelle, un intermédiaire financier au sens de l'art. 2, al. 3, LBA qui ne dispose ni d'une autorisation de la FINMA, ni d'une affiliation à un OAR est considéré comme une personne «non autorisée». Il est punissable d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire en vertu de l'art. 44 LFINMA. À la sanction pénale viennent s'ajouter des mesures de la FINMA relevant du droit de la surveillance (enforcement). Sur la base de l'art. 3, let. a, LFINMA, un tel intermédiaire financier est en effet considéré comme un potentiel IFDS selon l'art. 14 LBA. Il est soumis de ce fait à l'enforcement de la FINMA. Sur cette base la FINMA peut, en vertu de l'art. 37, al. 3, LFINMA, prendre les mêmes mesures que celles prévues à l'art. 20 LBA en cas de retrait de l'autorisation. Elle peut ainsi dissoudre les personnes morales, sociétés en nom collectif et sociétés en commandites et radier les raisons individuelles du registre du commerce.

Avec l'entrée en vigueur de la LEFin, le statut d'IFDS sera aboli. Dans ce cadre, l'art. 20 LBA sera également abrogé. Les anciens IFDS disposeront d'un délai d'un an pour s'affilier à un OAR et pouvoir ainsi continuer d'exercer légalement une activité soumise à la LBA. Au cas où un intermédiaire financier au sens de l'art. 2, al. 3, LBA ne s'affilierait pas à un OAR au terme de ce délai, il restera punissable, mais ne sera plus considéré comme un IFDS potentiel. Dès lors, il convient de clarifier que la compétence de la FINMA de prendre des mesures d'enforcement et d'appliquer l'art. 37, al. 3, LFINMA, n'est pas touchée par les modifications introduites par la LEFin.

Introduction d'un nouveau système d'information au MROS Au 1er janvier 2020, le système actuel de communication de soupçons connaîtra une modification importante sous l'angle technique. Actuellement, les communications de soupçons sont transmises au MROS sous forme physique, par poste ou par fax.

Les informations que celles-ci contiennent sont ensuite enregistrées manuellement dans le système d'information du MROS pour la lutte contre le blanchiment d'argent (GEWA), conformément à l'OBCBA. Dès le 1er janvier 2020, les communications de soupçons des intermédiaires financiers seront effectuées par voie électronique et
le système d'information actuel destiné au traitement des communications de soupçons sera remplacé par le nouveau système goAML, développé par l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC).

Cette évolution importante sur le plan technique répond non seulement à un besoin actuel incontournable, mais également à une critique émise par le GAFI dans le cadre du 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse (cf. par. 129 et 148). La mise en service de ce nouveau système a été annoncée de longue date et les intermédiaires financiers y ont été associés. Elle n'a pas d'incidence sur le traitement des communications du point de vue légal, à une exception formelle près: à l'avenir, les communications au sens physique (c'est-à-dire les actuels formulaires de communication complétés par les intermédiaires financiers et accompagnés de leurs annexes) ne seront plus transmises physiquement par le MROS aux autorités de poursuite pénale.

Ces dernières recevront les informations communiquées au MROS également par goAML, accompagnées d'un rapport d'analyse du MROS. La mise en service de ce

5272

FF 2019

nouveau système d'information et les nouveautés sous l'angle technique nécessitent quelques adaptations purement formelles de la LBA.

4.1.7

Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme

4.1.7.1

Contexte

Exposé du problème Depuis quelques années, l'utilisation abusive des personnes morales à des fins de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme est au coeur de préoccupations, aussi bien en Suisse que sur le plan international. Le risque n'est cependant pas confiné aux sociétés commerciales. Selon les conclusions de différentes études, suisses et étrangères, les organisations caritatives représenteraient un risque particulier en matière de financement du terrorisme55. La collecte de fonds de bienfaisance peut être utilisée pour fournir une couverture pour le financement du terrorisme.

Afin de prévenir ce risque, le GAFI recommande l'adoption de règles de transparence visant à prévenir l'utilisation abusive des organisations caritatives tout en respectant leurs activités légitimes (recommandation 8). L'efficacité de la réglementation suisse au regard des critères du GAFI a été examinée dans le cadre du 4e cycle d'évaluations qui a abouti à la publication du 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse en décembre 2016. En outre, sur le plan national, plusieurs parlementaires ont déposé, au cours de l'année 2016, des interventions portant sur la transparence, le financement (étranger) et les possibilités de contrôle des associations musulmanes et des mosquées ainsi que sur des thèmes connexes 56. Ces interventions présentent en partie un lien avec la problématique de la transparence des organismes à but non lucratif (OBNL).

Notion d'OBNL Selon la définition du GAFI, la notion d'«OBNL» désigne «les personnes morales, constructions juridiques ou organisations qui à titre principal sont impliquées dans la collecte et la distribution de fonds à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives, sociales ou confraternelles ou dans d'autres types de 57». En 55

56

57

GAFI: rapport du GAFI. Le risque d'être utilisé à des fins de financement du terrorisme pour le secteur non-lucratif (en anglais uniquement), 2014 (www.fatf-gafi.org > Thèmes > Méthodes et tendances); GCBF, rapport sur l'évaluation nationale des risques de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme en Suisse, juin 2015, pp. 50 ss et 106 ss; GCBF, rapport sur les risques dans le domaine du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme dans les organismes à but non lucratif, 28 juin 2017 (www.fedpol.admin.ch > Criminalité > Publications MROS); ci-après GCBF, rapport OBNL 2017.

Voir notamment: motion Fiala 16.4130 du 16 décembre 2016 «Les associations qui procèdent à des transferts internationaux de fonds doivent être impérativement inscrites au registre du commerce» (www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/ suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20164130).

Note interprétative de la recommandation 8 du GAFI, glossaire des termes spécifiques utilisés dans cette recommandation.

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Suisse, les OBNL sont communément appelés organisations d'utilité publique ou encore organisations ou institutions sans but lucratif. Le caractère d'utilité publique dépend toutefois non pas de la forme juridique de l'organisation, mais de critères relevant du droit fiscal. La notion du droit fiscal suisse est plus large que celle du GAFI, car elle tient uniquement compte du but d'utilité publique et non de l'implication dans la collecte et la distribution de fonds58. Les OBNL présents en Suisse revêtent généralement la forme juridique de l'association au sens des art. 60 ss CC ou de la fondation au sens des art. 80 ss CC. Dans de plus rares cas, ils peuvent prendre la forme de sociétés commerciales, comme la société anonyme. Par ailleurs, tous les OBNL actifs sur le territoire suisse ne sont pas nécessairement constitués selon les règles du droit suisse. En effet, certains ont leur siège à l'étranger et exercent leurs activités en Suisse par le biais de succursales ou d'autres intermédiaires. D'autres, comme les trusts, ont bien le siège de leur administration en Suisse, mais revêtent une forme juridique étrangère.

Recommandations du GAFI concernant les OBNL Le 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse examine sous l'angle des OBNL aussi bien le régime applicable aux fondations que celui applicable aux associations.

La législation applicable aux fondations, notamment sous l'angle de la transparence, est généralement considérée comme adéquate par le GAFI. Par contre, le rapport est plus critique en ce qui concerne les associations. Il relève les lacunes principales suivantes en relation avec la transparence des OBNL. Premièrement, il indique que la Suisse n'est pas en mesure d'identifier, dans toute la mesure du nécessaire, la population des associations à risque. Deuxièmement, il estime que les mesures prises par les autorités pour sensibiliser le secteur des OBNL demeurent insuffisantes59.

Troisièmement, il constate le manque de mesures de surveillance des associations. Il relève, enfin, des lacunes partielles en ce qui concerne les obligations de transparence imposées aux OBNL, notamment la publication des états financiers annuels et les règles de connaissance des bénéficiaires, et concernant les sanctions dissuasives en cas de manquement60. Le rapport constate également que les mesures
de transparence applicables aux petites structures associatives, dont le risque de financement du terrorisme ne peut d'emblée être exclu, paraissent insuffisantes61 et que des mesures devraient être prises afin de permettre une plus grande visibilité sur ces structures et éviter que leur vulnérabilité ne soit exploitée62.

La Suisse s'est en particulier vu attribuer la note «partiellement conforme» pour la recommandation 8, qui porte sur les OBNL63. À noter que lors de la précédente évaluation, elle avait été notée «largement conforme», ce qui traduit un durcissement de la manière dont cette recommandation a été évaluée dans le cadre du 4e cycle d'évaluations64. Les critiques formulées à l'égard des petites associations ont également eu une influence sur l'évaluation des règles de transparence des personnes 58 59 60 61 62 63 64

GCBF, rapport OBNL 2017, p. 7 et 10 ss.

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 192.

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 256.

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 139.

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 188.

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 192.

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 144.

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morales dont le niveau d'efficacité a été considéré comme modéré65. À relever qu'en juin 2016, le GAFI a révisé la recommandation 8 et sa note interprétative afin de clarifier les catégories d'OBNL qui doivent entrer dans le champ des exigences de cette recommandation, y compris les mesures de surveillance. Le but était d'harmoniser les normes internationales en matière de transparence des OBNL avec le rapport de typologies du GAFI de juin 2014 et les meilleures pratiques de 2015. Ces rapports clarifient que tous les OBNL ne présentent pas des risques élevés de financement du terrorisme et ne doivent pas tous être couverts par la recommandation 8.

La norme révisée intègre donc désormais une approche fondée sur les risques. Cela implique que les mesures prises par une juridiction au niveau national doivent viser les risques principaux identifiés. La Suisse sera évaluée en février 2020 au regard de cette norme révisée.

Rapport du GCBF sur le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme par le biais d'OBNL En 2017, le GCBF a publié un rapport sur les risques encourus dans le domaine des OBNL66. Ce rapport arrive à la conclusion que les OBNL sont exposés au risque d'être utilisés abusivement à des fins de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme et propose des mesures visant à améliorer la transparence des associations présentant un risque accru d'abus. Selon le rapport, les cas suspects connus en Suisse ont en commun une activité internationale. Il semble que les OBNL menacés en particulier sont ceux qui fournissent des prestations (service activities) dans des zones de conflit où des structures terroristes djihadistes et islamo-nationalistes ou ethno-nationalistes opèrent et où le risque d'actes terroristes est concret et considérable67.

Le rapport du GCBF relève qu'en Suisse, les associations sont soumises à peu de contrôles de l'État et que seule une minorité doit faire auditer ses comptes par une société de révision et se faire inscrire au registre du commerce. En l'absence de telles obligations, il est souvent impossible d'obtenir des informations sur l'organisation, les membres et le financement d'une association68. Pour faciliter la gestion des risques spécifiques aux OBNL, notamment ceux des associations collectant des dons, le rapport recommande d'étendre l'obligation
de s'inscrire au registre du commerce aux associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme, et d'obliger les associations inscrites au registre du commerce à tenir une liste de leurs membres69.

En ce qui concerne les fondations, les auteurs du rapport semblent considérer que la réglementation en vigueur, avec l'obligation qui leur est faite de s'inscrire au registre du commerce, de désigner un organe de révision et de se soumettre à la surveillance de l'État, est suffisante. Aucune mesure tendant au renforcement des règles de transparence des fondations n'est donc préconisée.

65 66 67 68 69

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 139 et 149.

GCBF, rapport OBNL 2017.

GCBF, rapport OBNL 2017, p. 29.

GCBF, rapport OBNL 2017, p. 39.

GCBF, rapport OBNL 2017, p. 40.

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Statistiques Il n'existe pas de statistiques officielles sur le nombre d'organisations d'utilité publique présentes en Suisse. Une étude réalisée en 2008 estimait celui-ci à environ 90 00070. On peut relever qu'au 1er janvier 2018, 17 141 fondations et 9117 associations étaient enregistrées au registre du commerce 71. À noter que ces entités ne poursuivent pas toutes un but non lucratif ni ne procèdent à des collectes ou distributions de fonds. Ces chiffres permettent néanmoins d'établir que seule une minorité des organisations d'utilité publique est inscrite au registre du commerce. L'absence de statistiques sur la question ne permet pas d'estimer précisément combien d'associations seront visées par la nouvelle mesure.

Réglementation en vigueur Il n'existe pas de législation spécifique sur les OBNL en Suisse. Les organisations sont donc soumises aux règles applicables à la forme juridique qu'elles ont choisie.

Les organisations incorporées selon un droit étranger sont régies par ce droit.

La grande majorité des OBNL suisses, constituée en association ou en fondation, est soumise aux règles de transparence suivantes:

70

71

­

Inscription au registre du commerce: les associations acquièrent la personnalité juridique indépendamment de leur inscription au registre du commerce. Seule une minorité des associations a l'obligation de se faire inscrire.

En effet, l'obligation ne s'applique pas aux associations qui ne poursuivent aucun but économique, n'exercent aucune activité commerciale et ne sont pas considérées comme ayant une certaine importance économique, c'est-àdire qui ne dépassent pas plus d'une des trois valeurs suivantes: bilan de 10 millions de francs, chiffre d'affaires de 20 millions de francs ou 50 employés à plein temps. En revanche, toutes les fondations ont l'obligation de se faire inscrire au registre du commerce et n'acquièrent la personnalité juridique que par leur inscription.

­

Comptabilité: seules les associations tenues de s'inscrire au registre du commerce ont l'obligation de tenir une comptabilité et de présenter des comptes conformément aux règles du CO. Les autres ne tiennent qu'une comptabilité des recettes, des dépenses et du patrimoine.

­

Organe de révision: seules les associations d'une certaine importance économique (cf. critères ci-dessus) ont l'obligation de désigner un organe de révision (art. 69b CC). S'agissant des fondations, elles ont en principe toutes l'obligation de désigner un organe de révision, à l'exception des fondations ecclésiastiques et des fondations de famille (art. 87, al. 1bis, CC). En outre, selon l'art. 83b, al. 2, CC, l'autorité de surveillance peut dispenser une fondation de l'obligation de désigner un organe de révision lorsque le total du Cf. Bernd Helmig et al.: Der dritte Sektor in der Schweiz. Länderstudie zum John Hopkins Comparative Nonprofit Sector Project, 2010 in «Rapport sur l'évaluation nationale des risques de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme en Suisse», juin 2015, p. 110, ch. 7.2.2, let. d.

Statistiques de l'Office fédéral du registre du commerce (zefix.ch > publications OFRC > statistiques).

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bilan de la fondation au cours de deux exercices successifs est inférieur à 200 000 francs, que la fondation n'effectue pas de collectes publiques et que la révision n'est pas nécessaire pour révéler exactement l'état du patrimoine et les résultats de la fondation72.

­

Surveillance: alors que les fondations sont en principe soumises à la surveillance d'une autorité administrative (art. 84 CC)73, les associations ne sont soumises à aucune forme de surveillance administrative.

­

Autres règles de transparence: contrairement aux sociétés commerciales (sociétés anonymes, sociétés à responsabilité limitée, etc.), les fondations et les associations ne sont soumises à aucun devoir d'identification de leurs ayants droit économiques. Les associations n'ont pas non plus d'obligation légale de tenir une liste de leurs membres, avec mention de leur nom et de leur adresse. Les fondations et les associations n'ont pas l'obligation d'être représentées par une personne domiciliée en Suisse (administrateur, membre du conseil de fondation ou directeur). À l'inverse de ce que connaissent la plupart des ordres juridiques étrangers, le droit suisse ne prévoit pas d'obligation générale de publication des états financiers des personnes morales. Une telle obligation n'existe donc ni pour les sociétés commerciales, ni pour les fondations et les associations. Le droit privé suisse ne leur impose pas d'autres devoirs de transparence et ne prévoit notamment aucune règle sur l'identification des bénéficiaires ou des donateurs des OBNL.

4.1.7.2

Mise en oeuvre

Objectifs, contenu et champ d'application La réforme proposée vise à atteindre les buts suivants: ­

limiter le risque que des associations suisses puissent être exploitées à des fins de financement du terrorisme ou de blanchiment d'argent;

­

éviter de déstabiliser ou de décourager les activités légitimes des organisations caritatives en Suisse en veillant à adopter des mesures ciblées, efficaces et proportionnées pour lutter contre les abus;

­

faciliter la gestion par les intermédiaires financiers des risques spécifiques aux OBNL concernés.

À cette fin, le projet vise à assujettir à des règles de transparence similaires à celles des autres personnes morales les associations qui sont exposées à un risque d'abus accru, c'est-à-dire celles qui, à titre principal, collectent ou distribuent directement ou indirectement des fonds à l'étranger à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales. Comme c'est déjà le cas pour les fondations et les sociétés 72 73

Art. 1, al. 1, de l'ordonnance du 24 août 2005 concernant l'organe de révision des fondations; RS 211.121.3.

À noter que les fondations ecclésiastiques sont soumises à la surveillance interne de la communauté religieuse. Par contre, les fondations de famille et les fondations ecclésiastiques ne sont pas soumises à la surveillance de l'autorité de surveillance (art. 87 CC).

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commerciales, les associations visées par la nouvelle réglementation seront désormais soumises aux obligations suivantes: ­

requérir leur inscription au registre du commerce;

­

désigner un représentant domicilié en Suisse (cette obligation n'existe pas pour les fondations);

­

tenir une liste de leurs membres, mentionnant leur nom et leur adresse, de manière à ce qu'il soit possible d'y accéder en tout temps en Suisse.

Conformément aux conclusions formulées dans le rapport sur les OBNL et en ligne avec l'approche adoptée par le GAFI depuis 2016, le présent projet ne vise que les associations qui, à titre principal, collectent ou distribuent directement ou indirectement des fonds à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales, en provenance ou à destination de l'étranger, en raison du risque particulier lié à ce type d'activités. Les autres associations ne sont pas visées. Le projet couvre ainsi la notion d'OBNL au sens du GAFI et ne va pas au-delà de ce qui est exigé par les recommandations, tout en limitant le champ d'application aux associations couvertes en raison du caractère transnational de leurs activités. En maintenant l'exemption de l'obligation d'inscription au registre du commerce pour les petites associations qui ne présentent pas de risques particuliers de financement du terrorisme ou de blanchiment d'argent, le projet propose une solution adéquate limitant l'impact sur l'attrait de la Suisse comme place favorable aux associations.

Le présent projet de réforme vise l'ensemble des OBNL et renonce à introduire dans la loi des critères plus précis pour délimiter les associations à risque selon l'appréciation donnée dans le rapport sur les risques (cf. ch. 2.2.1.4 du rapport) tombant sous le coup des nouvelles dispositions. Il renonce notamment à établir une liste des activités ou des pays qui permettraient une exemption, ou encore à ne viser que les associations qui, directement ou indirectement, collectent ou distribuent des fonds dans des pays à haut risque de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme ou dits «non coopératifs» selon les critères du GAFI, comme le demandaient certains participants à la consultation. L'affinement des critères d'identification des risques d'abus pourra se faire, dans le sens d'une exemption de certaines associations, au niveau de l'ordonnance grâce à la norme de délégation prévue dans le présent projet. L'ordonnance pourra ainsi, si nécessaire, faire l'objet de mises à jour pour tenir compte de l'évolution de la situation internationale et d'une meilleure connaissance du risque de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme en Suisse. Suite à la consultation, le présent projet renonce toutefois à introduire une norme de
délégation permettant d'étendre les obligations de transparence à d'autres types d'associations qui ne répondent pas à la définition d'un OBNL, mais qui sont exposées pour d'autres raisons à un risque accru d'être exploitées pour le financement du terrorisme ou le blanchiment d'argent. Cette mesure aurait impliqué un élargissement disproportionné par rapport à la liberté d'association sans que les critères pour un tel élargissement soient d'emblée suffisamment clairs. Bien qu'elles puissent également effectuer des collectes ou des distributions de fonds, les fondations ne sont pas non plus concernées par le projet. En ce qui les concerne, la surveillance étatique et les règles de transparence plus strictes auxquelles elles sont soumises constituent des mesures suffisantes pour lutter contre les abus. L'approche 5278

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fondée sur les risques préconisée par le GAFI ne requiert donc pas l'adoption de mesures supplémentaires dans ce domaine.

Mesures proposées 1. Inscription obligatoire au registre du commerce Les associations sont les seules personnes morales de droit privé à être exemptées de l'obligation de s'inscrire au registre du commerce. Le relatif anonymat dont bénéficient les associations et l'absence d'un système de surveillance étatique analogue à celui des fondations rendent difficiles leur identification et la supervision de leurs activités par les autorités administratives ou pénales. Ainsi, il n'est aujourd'hui pas possible de connaître le nombre total des associations existantes en Suisse ni, a fortiori, d'établir des listes des associations en fonction de leur type d'activités ou de leur profil de risque comme l'exige le GAFI. Le public ne dispose pas non plus du moyen de vérifier facilement l'existence d'une association, la portée de son but ou l'identité des personnes autorisées à la représenter.

L'exemption de l'obligation de s'inscrire au registre du commerce se justifie parfaitement pour les associations locales, sans activités commerciales, qui n'entretiennent que peu de relations en dehors du cercle de leurs membres. Pour ce type d'associations, le besoin de publicité est moindre que pour les autres types de personnes morales. À l'inverse, dès lors que des associations exercent une activité commerciale ou atteignent une certaine importance, une telle exception ne se justifie plus. Elles sont alors soumises à des règles de publicité similaires à celles des autres types de personnes morales, avec notamment l'obligation de se faire inscrire au registre du commerce, de désigner un organe de révision et de tenir une comptabilité. Les OBNL n'entrent généralement pas dans cette deuxième catégorie et ne sont donc en principe pas tenus de se faire inscrire au registre du commerce. Or de telles associations entretiennent également des contacts hors du cercle de leurs membres, qu'ils s'agissent de donateurs ou de bénéficiaires. Il existe donc également un intérêt public à avoir accès aux informations de base les concernant. L'obligation d'inscription au registre du commerce des associations à risque aurait également pour effet de les soumettre à une obligation de tenir une comptabilité en vertu des
art. 957 ss CO.

Considérant qu'une telle mesure constituerait une atteinte disproportionnée à la liberté d'association reconnue par la Constitution (Cst.)74, le projet renonce à introduire une obligation générale d'inscription pour toutes les associations et ne vise que celles qui présentent un risque accru d'être exploitées à des fins de financement du terrorisme ou de blanchiment d'argent, à savoir celles qui, à titre principal, collectent ou distribuent directement ou indirectement des fonds à l'étranger à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales. Cette mesure doit permettre de favoriser la prévention, la détection et la répression des abus. Elle permettra de recenser, sur l'ensemble du territoire suisse, les associations considérées comme présentant un risque accru, et d'avoir accès aux informations sur leurs représentants, leur domicile et leur but social. En outre, les contrôles effectués par les autorités du registre du commerce au moment de l'inscription et le dépôt des pièces justificatives amélioreront la qualité des informations disponibles. La mesure proposée aura 74

RS 101

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également pour effet de renforcer la confiance du public dans le fait que les ressources mises à la disposition de l'association bénéficient aux destinataires légitimes et ne sont pas détournées à d'autres fins. En cas de sollicitation, les donateurs pourront en effet facilement vérifier que l'association est bien inscrite au registre du commerce et qu'elle remplit toutes les règles de transparence prévues par la loi.

2. Obligation de tenir une liste des membres Pour améliorer la transparence des associations tenues de s'inscrire au registre du commerce, le présent projet prévoit d'introduire, dans le CC, une règle similaire à celle prévue dans le CO pour les sociétés de capitaux et les sociétés coopératives75.

Une telle règle obligera les associations concernées à tenir une liste de leurs membres, avec indication du nom ou de la raison sociale et de l'adresse, de manière qu'il soit possible d'y accéder en tout temps en Suisse, et de conserver les informations relatives à chaque membre et les éventuelles pièces justificatives de l'inscription pendant au moins dix ans après la radiation du membre concerné de la liste.

Les associations n'ont à l'heure actuelle aucune obligation légale de tenir une liste de leurs membres. Même si la direction doit en principe le faire pour permettre l'organisation des assemblées générales et enregistrer les entrées et sorties de membres, ces listes ne sont pas toujours tenues dans la pratique. Le droit en vigueur ne permet donc pas de garantir que les autorités ou les intermédiaires financiers puissent avoir accès aux informations sur les personnes qui, en définitive, contrôlent l'association. En l'absence de telles listes, ils ne peuvent pas non plus vérifier si une association compte, parmi ses membres, des personnes politiquement exposées ou figurant sur des listes de personnes et entités liées au terrorisme. Par ailleurs, il convient de souligner que le droit suisse ne prévoit pas de nombre minimal de membres durant la phase de fondation ou une fois l'association constituée. Selon la doctrine, une association peut acquérir la personnalité juridique et continuer à exister avec deux membres, voire un seul. Vu la simplicité des formalités de constitution, le risque que de telles entités soient utilisées à des fins abusives n'est pas négligeable.

Il existe donc
un intérêt à pouvoir vérifier facilement, à l'aide de la liste des membres, si l'association est contrôlée par un membre unique ou par un nombre restreint de membres.

L'obligation légale de tenir une liste des membres répond aux exigences du GAFI sur la transparence des personnes morales (recommandation 24). La recommandation ne s'applique pas uniquement aux sociétés, mais à tous les types de personnes morales, y compris les associations. Afin de satisfaire à cette exigence du GAFI, l'obligation de tenir une liste des membres concerne toutes les associations tenues de s'inscrire au registre du commerce selon l'art. 61, al. 2, CC. Les risques de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme présentés par les associations visées à l'art. 61, al. 2, ch. 1 et 2, mais aussi l'égalité de traitement entre les différents types d'associations tenues de s'inscrire au registre du commerce, justifient que ces dernières soient également soumises à l'obligation de tenir une liste des membres. La mesure proposée permettra donc d'améliorer encore plus la conformité du droit des associations avec les recommandations du GAFI.

75

Art. 686 CO pour les sociétés anonymes, 790 CO pour les sociétés à responsabilité limitée et 837 CO pour les sociétés coopératives.

5280

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3. Obligation d'avoir un représentant en Suisse Contrairement aux autres types de personnes morales régies par le CO76, les associations n'ont pas l'obligation de désigner un représentant en Suisse. Une association peut donc être dirigée par des personnes résidant à l'étranger, ce qui rend beaucoup plus difficile l'accès aux informations sur ses activités et sur ses membres 77.

L'obligation, pour une association, de désigner un représentant domicilié en Suisse et ayant accès à la liste des membres garantit aux autorités qu'en cas d'ouverture d'une procédure contre l'association, une personne physique pourra être entendue et fournir les renseignements utiles, sans qu'il soit nécessaire de recourir aux mécanismes d'entraide internationale. De plus, elle répond aux exigences du GAFI sur la transparence des personnes morales, selon lesquelles les informations sur les membres doivent être disponibles dans le pays afin qu'elles puissent être fournies rapidement sur demande78. L'obligation concerne toutes les associations tenues de s'inscrire au registre du commerce, soit les associations visées à l'art. 61, al. 2, CC.

Elle est justifiée par les risques de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme que présentent les associations visées à l'art. 61, al. 2, ch. 1 et 2, CC et par la nécessité de garantir une égalité de traitement entre les différents types d'associations tenues de s'inscrire au registre du commerce.

4. Disposition pénale en cas d'inobservation des prescriptions sur la transparence des associations Dans le cadre de la consultation, certains participants ont évoqué la difficulté d'assurer une mise en oeuvre effective des nouvelles prescriptions et la nécessité de créer une norme pénale permettant de sanctionner le manquement aux nouvelles prescriptions. Afin d'assurer une mise en oeuvre effective des nouvelles prescriptions sur la transparence des associations, le projet propose de créer une disposition pénale qui permettra de punir de l'amende l'inobservation intentionnelle des obligations de tenir une liste des membres et de désigner un représentant en Suisse. Quant au manquement intentionnel à l'obligation de requérir l'inscription d'une association, il tombe sous le coup de l'art. 153 CP.

Mesures rejetées 1. Réglementation de la collecte de fonds Une alternative à l'inscription
de nouvelles règles de transparence dans le droit des personnes morales en vue limiter les risques d'abus aurait consisté à réglementer directement l'activité à risque, c'est-à-dire la collecte et la distribution de fonds à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales. Des mesures de droit public pourraient être prévues pour uniformiser les règles en vigueur dans les 76 77

78

Art. 718, al. 4, 814, al. 3, et 898, al. 2, CO La situation est la même pour les fondations, mais, pour ce qui les concerne, la surveillance exercée par les autorités étatiques permet dans une certaine mesure de pallier l'absence de représentant en Suisse. Le projet de révision renonce donc à créer une règle correspondante.

Recommandation 24 du GAFI ainsi que critères 24.4, 24.10 et note de bas de page 51 de la méthodologie d'évaluation du GAFI de 2013; www.fatf-gafi.org > Publications > Évaluations mutuelles.

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différents cantons et soumettre ce type d'activité à autorisation administrative. La collecte et la distribution de fonds pourraient alors être réservées à des organismes dûment autorisés, qui présentent des garanties de transparence suffisantes. Cette mesure nécessiterait toutefois une coordination complexe entre droit fédéral et droit cantonal.

2. Réglementation de la reconnaissance du statut d'utilité publique en droit fiscal Le droit fiscal fédéral et cantonal permet d'accorder des exonérations d'impôts aux personnes morales qui poursuivent des buts d'utilité publique79. La réglementation fiscale précise les critères qu'une association, une fondation ou une société doit remplir pour obtenir une telle exonération. Ces critères pourraient être utilisés et adaptés pour prévenir les risques d'abus et améliorer la transparence des OBNL. Il s'agirait de préciser les critères d'exonération fiscale, en adoptant un système similaire à celui qui existe en Allemagne (cf. ch. 3.2). Une telle mesure impliquerait un changement de paradigme en conférant aux autorités fiscales un rôle accru dans la lutte contre le financement du terrorisme et le blanchiment d'argent. Elle nécessiterait en outre une coordination entre droit fédéral et droit cantonal.

3. Surveillance administrative des associations Contrairement aux fondations, les associations ne sont pas soumises à la surveillance d'une autorité étatique. Les mécanismes d'autorégulation qui existent en Suisse permettent d'exercer un certain contrôle des activités des OBNL. On pense notamment aux normes de la fondation ZEWO et aux certificats qu'elle délivre aux organisations qui acceptent de se soumettre à son contrôle80. Cette forme de surveillance est toutefois purement facultative et les entités contrôlées par les organismes d'autorégulation sont principalement de grandes organisations. On ne compte que peu de petites associations parmi les affiliés. Une certaine surveillance des associations considérées comme des OBNL existe aussi par le biais des autorités fiscales, mais son efficacité à lutter contre les abus de financement du terrorisme est limitée81. Il pourrait donc être envisagé de soumettre les associations à risque répondant à la définition d'OBNL à la surveillance d'une autorité administrative. Ces associations devraient néanmoins être identifiées
au préalable. Cette mesure devrait donc aller de pair avec l'inscription de ces associations au registre du commerce. Une surveillance efficace des associations impliquerait toutefois la création d'une autorité de surveillance ou la réorganisation d'une autorité existante engendrant l'allocation d'importants moyens supplémentaires. Elle signifierait également une restriction non négligeable à la liberté d'association. Même si cette mesure est de nature à renforcer la conformité avec les exigences du GAFI, les bénéfices escomptés ne 79

80

81

Cf. art. 56, let. g, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD), RS 642.11 et 23, al. 1, let. f, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID), RS 642.14.

Selon ses statuts, la fondation ZEWO a pour but d'encourager la transparence et la probité d'organisations d'utilité publique collectant des dons. Elle délivre un label de qualité et fournit des informations et des renseignements sur les organisations d'utilité publique qui récoltent des dons. À ce jour, plus de 500 entités suisses sont titulaires du label de qualité ZEWO (pour plus d'informations, cf. www.zewo.ch).

4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, p. 94.

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paraissent pas justifier de tels investissements, raison pour laquelle cette solution n'a pas été retenue.

4. Obligation de désigner un organe de révision Selon le droit actuel, seules les grandes associations sont obligées de soumettre leur comptabilité au contrôle d'un organe de révision. Les seuils d'assujettissement prévus pour les associations restent très élevés (bilan de plus de 10 millions de francs, chiffre d'affaires de plus de 20 millions de francs, plus de 50 employés à plein temps). En matière de financement du terrorisme, les montants en jeu sont souvent beaucoup plus faibles. Le montant du bilan et celui du chiffre d'affaires ne sont donc pas des critères pertinents pour évaluer les risques d'abus et on ne peut pas exclure que des associations qui n'atteignent pas ces seuils soient utilisées à des fins abusives. Un abaissement des seuils d'assujettissement fixés par la loi ne permettrait donc pas d'atteindre l'objectif visé par la réforme. Il aurait en outre pour effet de toucher des associations qui ne présentent pas de risque particulier. Cette mesure a donc été écartée.

Dans le cas des associations dites à risque, il existe un intérêt public à vérifier que les ressources mises à leur disposition bénéficient bel et bien aux destinataires légitimes et ne sont pas détournées à d'autres fins. Il s'agit non seulement d'éviter que les fonds ne puissent servir au financement du terrorisme ou au blanchiment d'argent, mais également de préserver la confiance des donateurs. Le contrôle des comptes par un organe de révision permet, dans une certaine mesure, de vérifier que les états financiers présentés par une association sont tenus correctement et qu'ils reflètent bien la provenance et l'utilisation des fonds. C'est précisément en raison de l'efficacité de la mesure que les fondations sont toutes, sauf exemption par l'autorité de surveillance, soumises à l'obligation de désigner un organe de révision (art. 83b CC). Il s'agit de garantir que les biens affectés à la fondation sont utilisés conformément à la volonté du fondateur. De façon similaire, la désignation d'un organe de révision pour les associations dites à risque permettrait de vérifier que les fonds collectés bénéficient aux destinataires légitimes. Une telle obligation contribuerait dans une large mesure à renforcer la transparence
et la surveillance des petites structures associatives pour lesquelles le risque de financement du terrorisme ne peut être exclu. Elle contribuerait également à renforcer la confiance de la communauté des donateurs et des intermédiaires financiers dans l'intégrité des OBNL actives à l'étranger. Cette mesure aurait cependant pour effet de soumettre les associations à un régime plus sévère que les sociétés commerciales qui ont la possibilité de faire un opting-out (art. 727a, al. 3, CO). Certains OBNL pourraient dès lors décider de revêtir la forme juridique d'une société commerciale pour se soustraire à l'obligation de désigner un organe de révision. Par ailleurs, la révision des comptes annuels induit des charges importantes pour les associations qui disposent bien souvent de ressources limitées. Elle est dès lors de nature à décourager les activités légitimes des associations et à nuire à l'attrait de la Suisse pour les OBNL étrangers.

Par conséquent, cette mesure a été considérée comme excessive.

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5. Publication des comptes annuels Lors de la dernière évaluation du GAFI, la Suisse s'est vu reprocher de ne pas respecter les obligations de transparence imposées aux OBNL, notamment en ce qui concerne la publication des états financiers annuels. Dans le cadre de la recommandation 8 révisée en juin 2016, la publication des comptes annuels n'est toutefois plus une mesure obligatoire, mais reste un exemple de mesure possible pour garantir la transparence et la surveillance. À noter qu'en Suisse les autres personnes morales (hormis les sociétés cotées en bourse) ne sont pas soumises à une telle obligation. En outre, comme l'obligation prévue par le présent projet d'inscrire au registre du commerce les associations à risque entraîne désormais l'obligation de tenir une comptabilité (art. 957 CO), les intermédiaires financiers pourront, s'ils le jugent utile, demander aux associations ouvrant une relation d'affaires auprès d'eux ou dans le cadre de la gestion d'une relation existante d'y accéder. Sous l'angle de la gestion des risques des intermédiaires financiers, il n'est donc pas nécessaire de prévoir une obligation de publication des états financiers. Ainsi, en l'absence d'une exigence expresse du GAFI de publier les comptes annuels, eu égard aux autres mesures existantes ou en préparation pour garantir la transparence et la surveillance des associations à risque (notamment l'inscription au registre du commerce, l'établissement des comptes ou la surveillance par les autorités fiscales) et, enfin, pour respecter l'égalité entre les formes de droit, des mesures supplémentaires ne sont pas jugées nécessaires.

4.1.8

Création d'un mécanisme de contrôle pour l'achat de métaux précieux usagés

4.1.8.1

Contexte

Aux termes de la LCMP, les métaux précieux usagés tombent sous le coup de la définition des matières pour la fonte (art. 1, al. 3, let. b et c, LCMP). En font notamment partie les (vieux) bijoux et les déchets de fabrication destinés à être éliminés, mais contenant des métaux précieux susceptibles d'être récupérés. Le commerce de ces marchandises est délicat, dans la mesure où celles-ci peuvent facilement être valorisées sur le plan monétaire (y compris comme butin). Selon le droit actuel, les titulaires d'une patente de fondeur sont déjà largement soumis aux obligations de diligence résultant de la LCMP. En outre, ils sont considérés comme des intermédiaires financiers au sens de la LBA lorsqu'ils négocient à titre professionnel des métaux précieux bancaires, et sont de ce fait assujettis aux règles correspondantes. Par contre, ceux qui achètent des métaux précieux usagés en Suisse et les exportent en vue de leur réutilisation ne sont soumis à aucune obligation de diligence ou de documentation spécifique, hormis quelques dispositions cantonales. À cela s'ajoute le fait que la majorité des transactions sont réalisées en espèces.

Les dispositions actuelles de la LCMP et de la LBA présentent une lacune dans le domaine des achats de ces métaux précieux. En effet, depuis que la patente commerciale, auparavant nécessaire pour accomplir ces actes juridiques, a été supprimée le

5284

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1er juin 200882, la LCMP ne prévoit plus aucune restriction. Quant à la LBA, seul le commerce des métaux précieux bancaires et des monnaies y est soumis (art. 2, al. 3, let. c, LBA en relation avec l'art. 5, al. 1, let. a, b et e, OBA). La LBA prévoit en outre des obligations de diligence pour les négociants qui reçoivent plus de 100 000 francs en espèces dans le cadre d'une opération de négoce (art. 8a LBA).

Toutefois, ce sont généralement des particuliers qui vendent des ouvrages de bijouterie lors d'opérations d'achat temporaires et ils ne sont donc pas réputés négociants au sens de l'art. 2, al. 1, let. b, LBA. À cela s'ajoute le fait que la problématique des métaux précieux usagés diffère de celle des opérations de négoce. Dans les opérations de négoce, c'est l'origine des espèces qui est déterminante du point de vue de la lutte contre le blanchiment d'argent, tandis que lors de l'achat de métaux précieux usagés, c'est l'origine de la marchandise qui compte. Relevons encore que le commerce de ces métaux est stimulé par la hausse du cours des métaux précieux, en particulier par celui de l'or, ce qui explique que l'on a assisté ces dernières années à une augmentation du nombre d'acheteurs d'or à titre professionnel.

En raison des obligations de diligence (art. 168a OCMP) et de l'obligation de documentation (art. 168c OCMP) en vigueur, la plupart des titulaires d'une patente de fondeur n'acceptent plus de vieil or de la part d'acheteurs de métaux précieux usagés, car ceux-ci ne sont pas en mesure d'apporter les preuves requises de l'origine de la marchandise. On peut donc en conclure que les acheteurs concernés exportent les ouvrages en vieil or qu'ils acquièrent, en vue de leur transformation. Ce phénomène non seulement présente un risque mais constitue également une inégalité de traitement au regard de la problématique du blanchiment d'argent. La branche elle-même a donc manifesté son intérêt pour l'adoption de nouvelles règles dans ce domaine.

À l'occasion de l'évaluation mutuelle de la Suisse par le GAFI, la problématique des métaux précieux usagés, en particulier du vieil or, a été discutée avec les évaluateurs lors de leur visite dans le pays. Même s'ils n'ont pas fait de recommandation expresse à ce sujet dans le rapport d'évaluation, les évaluateurs étaient d'avis que l'absence de
réglementation du commerce des métaux précieux usagés présentait des risques en matière de blanchiment d'argent. Le Conseil fédéral et les autorités suisses compétentes partagent cet avis. L'inscription dans la LCMP d'un mécanisme de contrôle applicable à l'achat par métier de métaux précieux usagés vise par conséquent à combler la lacune de la législation actuelle et, partant, à fortement réduire le risque potentiel de blanchiment d'argent.

4.1.8.2

Solution proposée

Le mécanisme de contrôle proposé vise à assujettir l'achat par métier de métaux précieux usagés à certaines obligations de diligence et de documentation, afin de garantir l'origine légale des marchandises achetées. Les acheteurs à titre professionnel seront tenus d'appliquer les mêmes obligations de diligence et de documentation que les titulaires de patentes de fondeurs. Le projet vise en outre à garantir que les acheteurs concernés seront connus du bureau central, puisque celui-ci sera compé82

Loi fédérale du 21 décembre 2007 sur la suppression et la simplification de procédures d'autorisation; RO 2008 2265.

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tent pour surveiller le respect des obligations. Dans ce but, il était prévu, dans l'avant-projet, de prévoir à titre général une patente pour l'achat par métier de métaux précieux usagés. Au vu des résultats de la consultation, une solution allégée est proposée: les acheteurs à titre professionnel qui sont inscrits au registre du commerce suisse ne seront soumis à aucune obligation d'obtenir une patente, mais devront simplement se faire enregistrer auprès du bureau central. Une patente d'acheteur ne sera réclamée qu'aux acheteurs qui ne sont pas inscrits au registre du commerce suisse. Sur la base des estimations de la branche fournies dans le cadre de la consultation, une centaine d'acheteurs à peine seront encore concernés par l'obligation d'obtenir une patente.

Les obligations de diligence incluent notamment la vérification de l'identité du vendeur, la clarification de l'origine légale de la marchandise ainsi que la dénonciation des opérations suspectes. S'agissant de l'obligation de documentation, la solution recherchée vise à ce que les acheteurs de métaux précieux usagés puissent adapter le plus aisément possible leur système de contrôle interne existant. Il s'agit donc de ne légiférer que sur les conditions minimales absolument indispensables.

Pour les achats de vieil or, les acheteurs devront, pour toute transaction, être à tout moment en mesure de présenter en temps utile les documents suivants aux autorités compétentes: ­

copie d'une pièce d'identité officielle du vendeur;

­

document ou preuve d'où ressortent la désignation et l'origine de la marchandise achetée ainsi que la date de la transaction.

De plus, grâce à l'obligation de tenir une comptabilité des transactions, les autorités de surveillance et les autorités de poursuite pénale pourront prendre connaissance des achats effectués.

Tous les acheteurs à titre professionnel de métaux précieux usagés seront soumis aux obligations de diligence et de documentation prévues. En font notamment partie les négociants en métaux précieux, les bijoutiers, les orfèvres et les établissements de prêts sur gage. Le Conseil fédéral précisera dans l'OCMP les activités qui seront considérées comme relevant de l'achat par métier, c'est-à-dire à titre professionnel.

Le caractère professionnel s'appuiera sur la définition légale prévue à l'art. 3 LEFin, selon lequel le caractère professionnel est établi lorsqu'une activité économique indépendante est exercée en vue d'obtenir un revenu régulier. À cet égard, peu importe que cette activité soit principale ou accessoire.

Du fait qu'ils sont déjà soumis à des obligations de diligence strictes découlant de la LCMP et de la LBA, les titulaires d'une patente de fondeur qui achètent des métaux précieux usagés ne seront pas concernés par les nouvelles dispositions. De même, celles-ci ne s'appliqueront pas non plus au commerce des métaux précieux bancaires ni aux autres transactions déjà réglées par la LBA.

Les dispositions d'exécution relatives à l'achat des matières pour la fonte seront inscrites dans l'OCMP.

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4.1.9

Bureau central du contrôle des métaux précieux en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA

4.1.9.1

Contexte

Les essayeurs du commerce ont pour compétence de déterminer le titre des produits de la fonte (art. 32 LCMP). L'exercice de la profession d'essayeur du commerce est subordonné à une autorisation du bureau central. Outre l'autorisation précitée, les essayeurs du commerce peuvent acquérir une patente de fondeur, également délivrée par le bureau central (art. 41 LCMP). Les essayeurs du commerce qui effectuent le commerce de métaux précieux bancaires sont en outre considérés comme des intermédiaires financiers au sens de la LBA (art. 2, al. 3, let. c, LBA). Ils doivent par conséquent, en plus des autorisations prévues par la LCMP, obtenir une autorisation d'exercer de la FINMA ou s'affilier à un OAR et être soumis à leur surveillance.

À l'heure actuelle, la grande majorité des essayeurs du commerce soumis à la LBA est directement surveillée par la FINMA. Avec l'entrée en vigueur de la LEFin, le statut d'IFDS selon l'art. 2, al. 3, LBA sera supprimé. Les essayeurs du commerce concernés devraient donc s'affilier à un OAR. Pour leur activité commerciale, les essayeurs du commerce qui non seulement procèdent au titrage de produits de la fonte, mais pratiquent également le négoce des métaux précieux bancaires à titre professionnel dépendent de leur admission aux marchés internationaux des métaux précieux. Strictement contrôlés (par ex. par la London Bullion Market Association), ces marchés n'admettent la plupart du temps que des participants soumis à une surveillance étatique reconnue. Étant donné que les OAR sont des entités privées, l'accès de cette catégorie d'essayeurs du commerce aux marchés correspondants pourrait être compromis par une affiliation à un OAR suite à l'entrée en vigueur de la LEFin. C'est pourquoi il était prévu, dans le cadre du projet de LEFin, de les assujettir, tout comme les gestionnaires de fortune et les trustees, à la surveillance prudentielle d'un organisme de surveillance semi-étatique qui devait être créé selon la LEFin. Cet organisme aurait en outre été compétent pour délivrer aux essayeurs du commerce concernés l'autorisation d'exercer leur activité soumise à la LBA.

Le Parlement a toutefois procédé à une modification du régime de surveillance des gestionnaires de fortune, des trustees et des essayeurs du commerce. Il découle des art. 61 LEFin et 42bis LCMP que ces derniers
devront nouvellement obtenir l'autorisation d'exercer de la FINMA et être soumis à la surveillance de cette dernière, qui y associera un organisme de surveillance. À la différence de l'organisme initialement prévu, celui-ci sera privé, à l'instar des OAR. Il sera chargé de la surveillance courante des gestionnaires de fortune, des trustees et des essayeurs du commerce, qui inclut également la surveillance LBA.

Le régime de surveillance finalement adopté par le Parlement ne convient toutefois pas aux essayeurs du commerce. La surveillance courante n'étant pas exercée par une autorité (entité étatique), ils se retrouvent dans une situation similaire à celle qui aurait été la leur s'ils avaient été tenus de s'affilier à un OAR à la suite de la suppression du statut d'IFDS. Ils craignent par conséquent que l'accès aux marchés étrangers soient de ce fait compromis.

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C'est pourquoi l'ASFCMP est intervenue auprès du DFF pour trouver une solution garantissant une surveillance étatique reconnue au niveau international. Elle a également souhaité rationnaliser, dans la mesure du possible, la surveillance des essayeurs du commerce, qui fait actuellement intervenir plusieurs autorités: le bureau central pour la surveillance des règles de la LCMP relatives à l'exercice de la profession d'essayeur du commerce et à la patente de fondeur83, et la FINMA ou un OAR pour la surveillance LBA. À cela s'ajoute qu'en vertu de l'art. 19a LBA, les IFDS doivent charger une société d'audit agréée de procéder à un audit conformément à l'art. 24 LFINMA.

Sur la base des discussions menées avec le DFF, il ressort que la solution la plus rationnelle serait de regrouper auprès d'une seule et même autorité la surveillance des essayeurs du commerce, aussi bien sous l'angle de la LCMP que de la LBA. Vu que le bureau central est déjà chargé par la LCMP de surveiller le commerce des métaux précieux et des ouvrages en métaux précieux, il est judicieux de lui attribuer également la surveillance LBA des essayeurs du commerce concernés. Il s'agit en outre d'une autorité déjà connue au niveau international.

Sur cette base, l'ASFCMP est intervenue dans le cadre de la consultation relative à la modification de la LBA pour demander un renforcement des compétences du bureau central, en lui attribuant la surveillance LBA des essayeurs du commerce en lieu et place du régime prévu par la LEFin.

Dans sa prise de position, l'ASFCMP mentionne le souhait d'assurer la pérennité du bureau central et des compétences qui s'y trouvent, de les renforcer et de développer à long terme une surveillance à 360 degrés des essayeurs du commerce concernés.

Une telle surveillance participe, selon elle, à garantir l'excellente qualité des produits suisses en métaux précieux et donc l'excellence du secteur suisse. L'ASFCMP souhaite également préserver l'atout de certification suisse face à la concurrence internationale. Elle relève que la qualité de la surveillance opérée par le bureau central, et du système de certification qu'il chapeaute, est unique au monde et représente un atout compétitif fondamental face à la concurrence étrangère de plus en plus forte et bénéficiant de coûts de production et de fonctionnement
largement inférieurs à ceux des acteurs suisses. De son avis, la centralisation des compétences et des connaissances au sein d'une même autorité bénéficiera aussi bien au bureau central qu'aux assujettis. Un point de contact unique facilite et améliore les relations entre autorités et assujettis et renforce ainsi la compétitivité de la place suisse, ce qui est particulièrement important au vu de la concurrence internationale croissante et des risques de délocalisation.

L'ASFCMP souhaite également éviter une fragmentation de la surveillance des essayeurs du commerce, en particulier en matière de lutte contre le blanchiment d'argent, par la centralisation et le renforcement de la surveillance par le bureau central. Elle relève enfin que ses membres sont soucieux d'assurer un haut niveau de respect des exigences légales et éthiques quant à leurs activités. En choisissant de favoriser une surveillance purement étatique plutôt qu'une surveillance faisant intervenir également une entité privée comme le prévoit la LEFin, l'ASFCMP 83

Les essayeurs du commerce concernés ont tous également une patente de fondeur au sens de l'art. 24 LCMP.

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souhaite répondre encore mieux aux préoccupations d'une partie de la société civile, de certains partis politiques et des organisations non gouvernementales. Elle craint que le recours à un organisme de surveillance privé, même sous la haute surveillance de la FINMA, soit mal compris, surtout sur le plan international.

4.1.9.2

Solution proposée

Le bureau central sera chargé de la surveillance LBA des essayeurs du commerce qui effectuent le négoce de métaux précieux bancaires soit eux-mêmes, soit par l'intermédiaire d'une société de groupe. Le régime proposé vise également la société qui négocie à titre professionnel les métaux précieux bancaires d'un essayeur du commerce faisant partie du même groupe, sans être elle-même essayeur du commerce. Dans le cadre du présent projet, il est fait référence aux essayeurs du commerce et aux sociétés de groupe pour viser ces deux cas de figure.

Avec la solution proposée, une seule autorité sera désormais compétente, d'une part, pour délivrer les autorisations prévues par la LCMP pour l'exercice des activités d'essayeurs du commerce et de fondeurs et l'autorisation d'exercer l'activité de négociants en métaux précieux bancaires au sens de la LBA, et, d'autre part, pour la surveillance de ces activités.

À l'heure actuelle, la solution proposée vise concrètement dix sociétés titulaires de l'autorisation d'essayeur du commerce importantes pour l'économie suisse et le secteur du négoce de métaux précieux84 et une société de groupe.

Il s'agit uniquement de transférer la compétence de surveillance LBA de la FINMA (en association avec un organisme de surveillance après l'entrée en vigueur de la LEFin) ou des OAR, au bureau central. Les règles applicables aux essayeurs du commerce et aux sociétés de groupe resteront, pour le reste, largement inchangées par rapport à aujourd'hui et l'intensité de la surveillance sera maintenue pour assurer la continuité. Par conséquent, le bureau central devra disposer des mêmes instruments de surveillance que ceux dont dispose la FINMA au titre de la LFINMA.

Toutefois, vu le petit nombre d'acteurs concernés et dans l'optique de garantir une surveillance uniforme, les audits LBA seront en principe effectués directement par le bureau central. Au besoin, un chargé d'audit au sens de l'art. 24a LFINMA pourra être mandaté. Contrairement à ce qui est prévu aujourd'hui par la LBA pour les IFDS, il n'y aura plus lieu pour les acteurs concernés de charger une société d'audit privée de procéder à un audit conformément à l'art. 24 LFINMA.

Les dispositions pénales déterminantes de la LFINMA, notamment en cas d'exercice de l'activité de négociants en métaux précieux bancaires sans autorisation du bureau central ou pour communication de fausses informations, seront reprises mutatis 84

Selon le rapport du GCBF de juin 2015 sur l'évaluation nationale des risques de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme en Suisse, le secteur du négoce de métaux précieux occupe une place importante mondialement. Dans ce secteur, le négoce de l'or occupe une place prépondérante totalisant jusqu'à environ deux tiers du négoce mondial d'or. La fonte de ce métal dans les fonderies suisses atteint environ 40 % des capacités de fonte mondiales. Parmi les neuf leaders mondiaux de la branche, quatre concentrent une partie très importante de leurs activités en Suisse; cf. rapport, ch. 7.1.11.

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mutandis dans la LCMP. Ainsi, les mêmes sanctions pénales qu'aujourd'hui continueront d'être applicables aux essayeurs du commerce et sociétés de groupe, selon les mêmes modalités. Il en découle que l'autorité de poursuite et de jugement sera le DFF.

La compétence de préciser les obligations de diligence des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe relèvera non pas du bureau central, mais de l'AFD. Le bureau central n'a en effet pas la compétence d'édicter des ordonnances. Le fait de ne pas attribuer à l'autorité de surveillance la compétence de préciser les obligations de diligence n'est pas nouvelle. Dans le cadre de la modification de la LBA suite à l'entrée en vigueur de la LJAr, le Département fédéral de justice et police s'est vu attribuer la compétence de préciser les obligations de diligence des exploitants de jeux de grande envergure vu l'absence de compétence législative de l'autorité de surveillance intercantonale de ces intermédiaires financiers. La future ordonnance sur le blanchiment d'argent de l'AFD reprendra dans la mesure du possible les dispositions de l'OBA-FINMA applicables aux essayeurs du commerce, afin d'assurer la continuité de la réglementation.

La présente mesure permettra de rationnaliser, et donc de rendre plus efficace la surveillance des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe. En concentrant la surveillance des aspects LBA et LCMP auprès d'une même autorité, il sera possible d'éviter des doublons. Les coûts de la surveillance pourraient également baisser pour la majorité, voire l'ensemble des acteurs concernés. Le fait par exemple de ne plus recourir à une société d'audit privée pour les audits LBA, comme requis actuellement pour les IFDS, réduira sans conteste les coûts.

La présente mesure s'inscrit également dans le sens de la recommandation relative au bureau central figurant dans le rapport du Conseil fédéral du 14 novembre 2018 donnant suite au postulat 15.3877 Recordon85. Cette recommandation demande d'examiner la proposition de la branche (en particulier de l'ASFCMP) d'élargir les compétences du bureau central, en lui attribuant d'autres tâches, notamment en matière de transparence relative à la provenance de l'or. Le positionnement du bureau central comme autorité unique en charge de la surveillance du commerce des métaux précieux aussi bien
sous l'angle de la LBA que de la LCMP pourrait en effet permettre, à plus long terme, d'étendre progressivement les tâches de ce dernier, par exemple en lien avec des questions de respect des droits de l'homme, si telle est la volonté politique. La présente mesure vise donc également à anticiper de potentielles réformes futures en lien avec la transparence du commerce de l'or.

Transition du régime de surveillance actuel prévu par la LBA au régime de surveillance par le bureau central Comme déjà mentionné, le statut d'IFDS prendra fin avec l'entrée en vigueur de la LEFin. L'art. 42 LBA modifié par la LEFin prévoit que les ex-IFDS doivent s'affilier à un OAR dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la LEFin pour pouvoir continuer d'exercer légalement leur activité soumise à la LBA.

85

«Commerce de l'or produit en violation des droits humains», Rapport du Conseil fédéral du 14 novembre 2018 donnant suite au postulat 15.3877, Recordon, 21.09.2015: www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/54475.pdf.

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Si la LEFin entre en vigueur le 1er janvier 2020, comme prévu, la période transitoire prendra fin le 31 décembre 2020. Or, le présent projet de modification ne pourra vraisemblablement pas entrer en vigueur avant la fin de cette période transitoire.

La disposition finale de la LCMP relative à la modification du 15 juin 2018 prévoit, quant à elle, une période de deux ans après l'entrée en vigueur de la LEFin pour demander à la FINMA l'autorisation d'exercer en tant qu'essayeurs du commerce ou sociétés de groupe actifs dans le commerce de métaux précieux bancaires selon le régime de la LEFin (art. 42bis LCMP). Dans l'attente de l'entrée en vigueur du présent projet, les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe ex-IFDS devraient donc, pour être en mesure de continuer d'exercer légalement le commerce de métaux précieux bancaires, soit demander une autorisation d'exercer à la FINMA sous le régime de surveillance de la LEFin, soit s'affilier à un OAR, et ce, dans l'année suivant l'entrée en vigueur de la LEFin.

Il serait absurde d'obliger les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe exIFDS de passer sous le régime prévu par la LEFin pour seulement quelques mois.

Un passage direct du régime actuel de la LBA au nouveau régime d'autorisation et de surveillance par le bureau central doit être prévu pour des questions d'économie de procédure et de rationalité. Telle était également la demande exprimée par l'ASFCMP dans le cadre de la procédure de consultation relative à la modification de la LBA. À cette fin, il est nécessaire de modifier rétroactivement les dispositions relatives aux essayeurs du commerce et aux sociétés de groupe introduites par la LEFin, de telle sorte qu'au final ces dernières ne leur seront pas du tout applicables.

Afin de tenir compte du fait qu'il n'y aura plus de surveillance en tant que telle des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe ex-IFDS entre l'entrée en vigueur de la LEFin et le moment où ces derniers obtiendront l'autorisation du bureau central prévue par le présent projet, ces derniers devront charger une société d'audit agréée de procéder à un audit LBA. Cette obligation sera applicable rétroactivement.

Cette solution a été convenue directement avec les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe concernés et à leur demande. Ces derniers sont
donc déjà conscients de l'obligation de faire appel à une société d'audit agréée dès l'entrée en vigueur de la LEFin (cf. aujourd'hui art. 19a LBA). Lors de l'examen de la demande d'autorisation prévue par le présent projet, le bureau central examinera si cette obligation a été respectée. À défaut, il dénoncera le contrevenant au DFF pour exercice illégal d'une activité au sens de l'art. 56a P-LCMP, qui reprend les dispositions de l'art. 44 LFINMA.

Les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe affiliés à un OAR à l'entrée en vigueur de la LEFin continueront, quant à eux, d'être soumis à la surveillance de ce dernier jusqu'à obtention de l'autorisation d'exercer le commerce de métaux précieux bancaires délivrée par le bureau central prévue par le présent projet.

À noter que tous les essayeurs du commerce et sociétés de groupe disposeront d'un délai de trois mois dès l'entrée en vigueur du présent projet pour déposer leur demande d'autorisation auprès du bureau central. Ils devront notamment joindre à cette demande les rapports d'audit LBA des dernières années.

5291

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5

Commentaire des dispositions

5.1

Loi sur le blanchiment d'argent

Art. 2, al. 1, let. c L'art. 2, al. 1, est complété par la let. c. Cette nouvelle disposition étend le champ d'application de la LBA aux prestations spécifiques en lien avec des sociétés ou des trusts et à la fonction d'actionnaire agissant pour le compte d'une autre personne.

Les personnes exerçant les activités citées sont regroupées sous une nouvelle catégorie d'acteurs soumis à la LBA, celle des «conseillers», qui vient s'ajouter à celles des intermédiaires financiers et des négociants. Afin de garantir l'égalité de traitement de tous les groupes professionnels, on a opté pour une approche axée sur les activités. Sont donc concernées toutes les personnes physiques ou morales qui préparent ou effectuent des opérations en lien avec les activités énumérées aux ch. 1 à 5. Toutefois, comme pour les négociants, les acteurs concernés ne seront tenus de respecter les obligations de diligence prévues que s'ils fournissent leurs prestations à titre professionnel. L'activité du conseiller est réputée professionnelle lorsqu'elle représente une activité économique indépendante exercée en vue d'obtenir un revenu régulier, qu'il s'agisse d'une activité principale ou d'une activité accessoire. La définition correspondante sera reprise dans l'OBA par analogie avec la définition du négoce exercé à titre professionnel, qui existe déjà pour les négociants. Le champ d'application ne couvre pas les employés de droit public qui donnent par exemple des indications sur l'interprétation de la loi dans le domaine de la création, de la gestion ou de l'administration de sociétés, le plus souvent dans la phase préparatoire.

Il ne s'agit pas là d'une activité économique indépendante exercée en vue d'obtenir un revenu régulier. Relevons qu'aussi bien la préparation que l'exécution d'opérations en lien avec les activités énumérées à l'art. 2, al. 1, let. c entrent dans le champ d'application des nouvelles dispositions, si bien que les obligations de diligence devront être respectées même lors de la simple élaboration d'un concept. En revanche, la notion de préparation n'inclut pas un premier échange avec un client dans le but, par exemple, de tirer au clair ses intentions, les prestations possibles et, le cas échéant, les conséquences en termes de coûts. Les prestations fournies à titre gratuit au stade préparatoire ne sont
pas couvertes par le champ d'application. Pour éviter tout malentendu, il convient en outre de préciser que l'activité des auxiliaires, c'est-à-dire des employés du conseiller qui agissent exclusivement au nom et pour le compte de celui-ci et sont rémunérés par lui et non par le client final, est imputée au conseiller. Ces personnes ne sont donc pas considérées comme des conseillers indépendants. En outre, par analogie avec l'art. 2, al. 2, let. a, ch. 5, OBA pour les intermédiaires financiers, la fourniture de prestations entre sociétés d'un groupe n'est pas non plus couverte par le champ d'application en ce qui concerne les activités des conseillers. Une exception correspondante devra également être prévue dans l'OBA pour l'activité des conseillers.

Le champ d'application de l'art. 2, al. 1, let. c suit une approche fondée sur les risques. Il existe par conséquent une différence selon que la prestation conformément aux ch. 1 à 4 est fournie en lien avec des sociétés opérationnelles ou des sociétés de domicile. Pour la notion de «société de domicile», il est renvoyé à la définition correspondante figurant dans l'OBA-FINMA. Celle-ci découle de la pratique de 5292

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longue date de la FINMA et est décrite de la manière suivante à l'art. 2, let. a, OBAFINMA: les sociétés de domicile sont des personnes morales, des sociétés, des établissements, des fondations, des trusts, des entreprises fiduciaires et des constructions semblables, qui n'exercent pas une activité de commerce ou de fabrication ou une autre activité exploitée en la forme commerciale. Ne sont pas considérées comme sociétés de domicile les sociétés qui ont pour but la sauvegarde des intérêts de leurs membres ou de leurs bénéficiaires collectivement et par leurs propres moyens, ou qui poursuivent des buts politiques, religieux, scientifiques, artistiques, de bienfaisance, de récréation ou des buts analogues, ni les sociétés qui détiennent majoritairement des participations dans une ou plusieurs sociétés opérationnelles, afin de les rassembler sous une direction unique, par le biais d'une majorité de voix ou par d'autres moyens, et dont le but ne consiste pas essentiellement dans la gestion du patrimoine de tiers (sociétés holding et sociétés sous-holding). La société holding ou sous-holding doit réellement exercer ses possibilités de direction et de contrôle.

Enfin, le champ d'application couvre aussi les conseils en lien avec des trusts au sens de l'art. 2 de la convention relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance.

Le ch. 1 couvre la préparation ou l'exécution d'opérations en lien avec la création, la gestion ou l'administration de sociétés de domicile ou de trusts. Par création, on entend tous les actes exécutés en vue de la constitution légale d'une société de domicile ou d'un trust. La gestion comprend quant à elle toutes les tâches de direction opérationnelle, tandis que l'administration regroupe celles incombant au conseil d'administration. Dans ce contexte, il convient de souligner que, conformément à la LBA, l'exercice de l'activité d'organe d'une société de domicile est déjà considéré comme l'exercice d'une activité d'intermédiaire financier (art. 6, al. 1, let. d, OBA).

Il s'ensuit que s'il exerce lui-même une telle activité, le conseiller sera soumis aux règles applicables aux intermédiaires financiers.

Le ch. 2 couvre l'organisation des apports en lien avec les activités visées au ch. 1.

Par organisation des apports, on entend les activités telles que, par exemple,
l'ouverture de comptes bancaires destinés à la consignation du capital.

Avec le ch. 3, le champ d'application est étendu à l'achat ou à la vente de sociétés de domicile au sens du ch. 1.

Le ch. 4 porte sur la fourniture d'une adresse ou de locaux destinés à servir de siège à des sociétés de domicile ou à des trusts tels que mentionnés au ch. 1. Cette activité consiste en ce que le conseiller met par exemple sa propre adresse commerciale à la disposition d'une tierce personne, en tant qu'adresse du siège d'une société. Cette adresse sera alors inscrite au registre du commerce comme adresse du siège.

Enfin, le ch. 5 couvre l'exercice de la fonction d'actionnaire agissant pour le compte d'une autre personne. Le champ d'application doit inclure concrètement la situation du nominee shareholder telle qu'elle existe actuellement en droit anglo-saxon. Cette situation se présente lorsqu'une tierce personne se substitue au véritable actionnaire vis-à-vis de la société concernée et s'inscrit à sa place au registre des actionnaires.

Elle couvre par exemple le cas où un conseiller se fait inscrire pour le compte d'un actionnaire dans le registre des actionnaires de la société anonyme. Le véritable actionnaire peut alors exercer tous ses droits sociaux par l'intermédiaire du conseil5293

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ler, tout en préservant son anonymat vis-à-vis de la société. Cet anonymat est également préservé vis-à-vis de toute autorité qui consulterait le registre des actionnaires.

En garantissant l'anonymat de l'actionnaire vis-à-vis de la société et des autorités, ce genre de situation réduit sensiblement la transparence. Actuellement, une telle situation n'est pas prévue en Suisse. Il n'en reste pas moins possible qu'un conseiller suisse remplisse cette fonction pour l'un de ses clients dans le cadre d'une société étrangère. Pour le ch. 5 également, le champ d'application doit comprendre tant la préparation que l'exécution d'une opération. Le fait d'aider une autre personne à exercer cette fonction, prévu dans la recommandation du GAFI, fait partie de la préparation d'une opération et ne doit donc pas figurer explicitement dans le texte de loi.

Art. 2, al. 2, let. abis et g Le négoce de métaux précieux bancaires à titre professionnel est une activité qui est soumise à la LBA. Les essayeurs du commerce qui effectuent une telle activité sont par conséquent considérés comme des intermédiaires financiers au sens de l'art. 2 LBA. Dans le cadre du régime instauré par la LEFin, ces derniers sont soumis au même régime de surveillance que celui prévu pour les gestionnaires de fortune et les trustees visés à l'art. 17 LEFin. Ainsi, conformément à l'art. 61 LEFin, ces intermédiaires financiers sont assujettis à la surveillance de la FINMA, qui y associe un organisme de surveillance au sens de l'art. 43a LFINMA. Ce dernier exerce la surveillance courante. Il convient de relever que le régime instauré par la LEFin vise aussi bien l'essayeur du commerce qui effectue lui-même le négoce de métaux précieux bancaires à titre professionnel que celui qui l'effectue par l'intermédiaire d'une société de groupe. Dans le second cas, la société de groupe est également soumise au même régime d'autorisation et de surveillance que l'essayeur du commerce dont elle négocie les métaux précieux bancaires (art. 42bis, al. 1 et 2, LCMP créé par la LEFin).

Conformément à leur demande dans le cadre de la procédure de consultation, les essayeurs du commerce seront désormais soumis à la surveillance exclusive du bureau central. Il est par conséquent nécessaire d'ajouter à l'art. 2, al. 2, LBA une nouvelle lettre se référant spécifiquement
aux essayeurs du commerce visés à l'art. 42bis LCMP (let. g). Cette lettre s'étend également aux sociétés qui négocient à titre professionnel les métaux précieux bancaires d'un essayeur du commerce faisant partie du même groupe de sociétés (sociétés de groupe).

Par ailleurs, la let. abis de l'art. 2, al. 2, LBA doit être modifiée pour y supprimer la référence aux essayeurs du commerce. Cette lettre ne visera donc plus que les gestionnaires de fortune et les trustees.

Art. 3, al. 5 Etant donné que l'AFD a, en vertu de l'art. 17, al. 1, let. d, P-LBA, la compétence de préciser les obligations de diligence définies au chap. 2 LBA pour les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe, il lui appartient également de fixer le seuil déterminant pour les opérations de caisse effectuées par ces derniers.

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Art. 4, al. 1, 1re phrase Selon la nouvelle teneur de l'art. 4 proposée dans le présent projet, il s'agira non plus seulement d'identifier l'ayant droit économique, mais également de vérifier son identité, le tout avec la diligence requise par les circonstances, afin de s'assurer de savoir qui est l'ayant droit économique. Le titre de l'article reste inchangé. Son libellé, en revanche, est modifié par la mention explicite de l'obligation de vérifier l'identité de l'ayant droit économique. À cet égard, la diligence requise par les circonstances dans le sens d'une approche fondée sur les risques vaut aussi bien pour l'identification que pour la vérification de l'identité de l'ayant droit économique. Il est également possible d'appliquer l'approche fondée sur les risques en ce qui concerne la manière de vérifier l'identité. Comme le souhaitaient de nombreux participants à la consultation, le libellé de la phrase correspond à celui de la recommandation du GAFI.

La jurisprudence a déjà précisé de longue date, en relation avec l'art. 305ter CP, que l'obligation d'identifier l'ayant droit économique nécessitait de procéder également à une vérification matérielle86. Selon l'arrêt pertinent, celui qui se contente des déclarations du client concernant l'ayant droit économique et qui, malgré des invraisemblances, ne clarifie pas davantage la question de l'ayant droit économique effectif n'a pas identifié l'ayant droit économique et a enfreint son obligation de diligence. Le présent projet propose donc de créer une base légale explicite pour une obligation qui existe déjà implicitement. Relevons que la recommandation 10, let. b, du GAFI exige d'identifier le bénéficiaire effectif et de prendre des mesures raisonnables pour vérifier son identité, afin d'avoir l'assurance de savoir qui est le bénéficiaire effectif. On peut déduire aussi bien de l'argumentation de l'arrêt précité que des précisions dans la recommandation du GAFI que la vérification de l'identité de l'ayant droit économique implique de s'interroger sur la déclaration du client concernant l'ayant droit économique.

L'intermédiaire financier est donc tenu de vérifier de manière critique l'identité de l'ayant droit économique et de prendre ­ avec la diligence requise par les circonstances ­ les mesures nécessaires pour s'assurer de sa plausibilité. Ce
faisant, il devra, à l'avenir aussi, suivre une approche fondée sur les risques et s'appuyer sur différentes sources, notamment sur sa propre connaissance du profil du client, sur des informations publiques et, au besoin et si possible, sur des informations fournies par un service externe. Demander uniquement de fournir une copie d'une pièce d'identité de l'ayant droit économique pour le dossier ne suffit pas pour respecter l'obligation de vérification.

La solution proposée tient compte des critiques formulées dans le 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse tout en renforçant la sécurité juridique.

Art. 6, al. 2, let. d La formulation de cette lettre est simplifiée afin de faire référence uniquement aux données transmises aux intermédiaires financiers sur la base de l'art. 22a, al. 2 ou 3, LBA, sans mentionner expressément les autorités ou organismes ayant procédé à la 86

ATF 125 IV 139, consid. 4

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transmission desdites données. Matériellement, cela ne change rien à l'obligation de clarification de l'intermédiaire financier.

Art. 7, al. 1bis Ce nouvel alinéa instaure une obligation générale et explicite de vérifier périodiquement que les documents nécessaires obtenus dans le cadre des obligations de diligence sont encore actuels et, si tel n'est pas le cas, de les mettre à jour. Dans ce contexte, il convient d'appliquer une approche fondée sur les risques s'agissant de l'étendue, de la périodicité et de la méthode de vérification et de mise à jour des documents. Une formulation similaire à celle de l'art. 6, al. 1, 2e phrase, LBA est proposée.

Le terme générique de «documents» est également utilisé à l'al. 1bis afin d'assurer la cohérence avec les autres alinéas de l'art. 7 LBA. Ce terme ne doit toutefois pas être interprété de manière restrictive. Il est utilisé pour refléter de manière générale les différents documents, informations ou données collectés dans le cadre de l'application des obligations de diligence pour l'établissement du profil du client. La copie d'un document d'identité, un formulaire rempli par le client ou des informations consignées par l'intermédiaire financier dans le dossier client, sous forme d'annotations manuscrites ou électroniques, peuvent être classés sous ce terme générique. Il va de soi que les documents et les notes qui sont réclamés ou établis en liaison avec des transactions individuelles ne relèvent pas de l'obligation de mise à jour, car ils documentent une action unique et non un état durable. Remarque: le fait qu'un document utilisé auparavant pour vérifier l'identité d'un cocontractant ne soit plus valable au moment de la vérification prévue à l'art. 7, al. 1bis, P-LBA n'implique pas obligatoirement une nouvelle vérification de l'identité si les données relatives à l'identité du client n'ont pas changé depuis lors.

Contrairement à l'art. 5 LBA, les données à actualiser ne se limitent pas nécessairement à la vérification de l'identité du client et à l'identification de l'ayant droit économique. Selon les circonstances, il sera nécessaire de vérifier si l'objet et le but de la relation d'affaires sont toujours actuels, en effectuant, au besoin, des clarifications complémentaires (art. 6 LBA). Il appartient à l'intermédiaire financier de déterminer,
sur la base d'une approche fondée sur les risques, quelles données devront être mises à jour, en fonction principalement de leur pertinence pour la classification ou la surveillance de la relation d'affaires.

La vérification de l'actualité des données n'est pas non plus dictée par des événements particuliers, comme dans le cas de l'art. 5 LBA, mais devra être effectuée périodiquement. Il appartiendra à chaque intermédiaire financier de déterminer, sur la base d'une approche fondée sur les risques, à quelle fréquence il vérifiera l'actualité des données de ses différents clients. La fréquence pourra varier en fonction de la catégorie de risques dans laquelle se trouve chaque client. Ainsi, une relation d'affaires considérée comme présentant un risque accru impliquera une vérification plus fréquente qu'une relation d'affaires à risque faible. L'obligation d'actualisation vise toutefois l'ensemble des relations d'affaires d'un intermédiaire financier et n'est pas limitée aux seules catégories de relations d'affaires à risque accru.

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Il va de soi que l'obligation d'actualisation s'appliquera aussi bien aux nouvelles relations d'affaires qu'à celles qui existaient déjà à l'entrée en vigueur de cette nouvelle disposition. En outre, la mise à jour des données doit être effectuée conformément aux règles en vigueur au moment où cette dernière a lieu. En cas de changement des règles entre le moment où les données déterminantes ont été obtenues et le moment où l'intermédiaire financier vérifie leur actualité, il y a lieu de vérifier si ces données sont toujours actuelles au regard des nouvelles règles. Si tel n'est pas le cas, elles doivent être mises à jour en tenant compte des nouvelles règles en vigueur. Il n'est pas escompté que toutes les relations d'affaires aient déjà été mises à jour au moment de l'entrée en vigueur; en revanche, à partir de ce moment, il existe une obligation explicite de vérifier et le cas échéant d'actualiser régulièrement les relations d'affaires. L'intermédiaire financier dispose de sa propre appréciation en ce qui concerne la fréquence des vérifications. Cette approche tient ainsi aussi compte du droit à une réglementation transitoire appropriée.

Art. 8a, al. 4bis et 5, 2e phrase L'art. 8a règle les obligations de diligence des négociants et s'applique également au négoce des métaux précieux et des pierres précieuses. Suite aux critiques émises par le GAFI dans le 4e rapport d'évaluation mutuelle de la Suisse, il est proposé d'abaisser de 100 000 à 15 000 francs le seuil applicable dans le négoce des métaux précieux et des pierres précieuses. Cet abaissement du seuil est inscrit dans le nouvel al. 4bis. Ne sont pas concernés par cette mesure les négociants en métaux précieux visés à l'art. 2, al. 3, let. c, LBA, en relation avec l'art. 5, al. 1, let. a et e, OBA, qui font le commerce de métaux précieux bancaires pour leur propre compte ou pour le compte de tiers et exercent ainsi une activité d'intermédiaire financier.

La solution proposée, acceptable pour la branche, exclut du champ d'application le commerce des produits contenant des métaux précieux et des pierres précieuses typiquement destinés à être vendus à des clients finaux. Dans ce contexte, l'al. 5 est déterminant. Il prévoit que le Conseil fédéral décrit les métaux précieux et les pierres précieuses visés à l'al. 4bis. La description devra
figurer dans l'OBA. Il ne s'agit pas d'une nouvelle définition de ces termes, mais d'une description des produits concernés par cette disposition.

En ce qui concerne les métaux précieux, le projet de loi se fonde sur la définition légale qui en est donnée à l'art. 1, al. 1, LCMP. D'après cette définition, sont réputés métaux précieux l'or, l'argent, le platine et le palladium. De plus, selon la LCMP et l'OCMP, les métaux précieux se présentent sous les formes de produits suivantes:

87 88

­

ouvrages en métaux précieux87: produits entièrement finis en métaux précieux, tels que bijoux ou statuettes;

­

ouvrages multimétaux88: ouvrages constitués de métaux précieux à un titre légal et de métaux communs, par exemple or à un titre de 750 millièmes allié à de l'acier;

Art. 1, al. 4, LCMP Art. 1, al. 5, LCMP

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­

produits semi-ouvrés89: produits tels que les plaques, fils, tubes, profilés et pièces ébauchées, à un titre légal et destinés à la fabrication d'ouvrages;

­

matières pour la fonte90: métaux précieux provenant de l'extraction des matières premières ou de l'affinage; déchets provenant de la mise en oeuvre de métaux précieux ou de leurs alliages et susceptibles d'être récupérés; matières contenant des métaux précieux susceptibles d'être récupérés;

­

produits de la fonte91: lingots, plaques, barres ou grenailles obtenus par la fonte ou par la refonte de métaux précieux ou de matières pour la fonte.

Alors que les ouvrages en métaux précieux et les ouvrages multimétaux sont des produits typiquement destinés à être vendus à des clients finaux, les produits semiouvrés, les matières pour la fonte et les produits pour la fonte ne sont en principe pas vendus à ce type de clients. Le commerce d'ouvrages en métaux précieux et d'ouvrages multimétaux sera donc exclu du champ d'application. Par conséquent, l'art. 8a, al. 4bis, let. a, P-LBA ne s'appliquera qu'aux personnes qui font le commerce de l'or, de l'argent, du platine et du palladium sous la forme de produits semiouvrés, de matières pour la fonte et de produits pour la fonte.

En ce qui concerne les pierres précieuses, il n'en existe pas de définition dans le droit fédéral. Conformément à l'approche fondée sur les risques, il s'agit par conséquent d'appliquer la nouvelle règle aux pierres les plus onéreuses qui sont les plus fréquemment négociées en Suisse. Après consultation des représentants de la branche à ce sujet, les pierres qu'il est proposé de soumettre au nouvel alinéa sont les suivantes: les rubis, les saphirs, les émeraudes et les diamants. Ces pierres précieuses sont négociées aussi bien sous forme isolée qu'intégrées à des bijoux et à d'autres produits similaires. Selon les règles du tarif des douanes, sont considérées comme non encore transformées en un produit final les pierres précieuses non enfilées, non montées et non serties. Les définitions du tarif des douanes sont appliquées à l'échelle internationale. Entreront donc dans le champ d'application de l'art. 8a, al. 4bis, let. b, P-LBA les personnes qui font le commerce de rubis, de saphirs, d'émeraudes ou de diamants non enfilés, non montés et non sertis.

Section 1b Art. 8b

Obligations de diligence des conseillers Obligations de diligence

La LBA est complétée par une nouvelle section 1b relative aux obligations de diligence des conseillers. L'art. 8b énonce les obligations de diligence que devront remplir les conseillers. Elles incluent, outre la vérification de l'identité du cocontractant et l'identification de l'ayant droit économique, les obligations d'établir et de conserver des documents et de clarification. L'identification de l'ayant droit économique prescrite à l'al. 1, let. b, peut porter, dans le cadre de la création, de la gestion ou de l'administration d'une société de domicile, sur l'ayant droit économique de la 89 90 91

Art. 52, al. 2 OCMP Art. 1, al. 3, LCMP Art. 1, al. 2, LCMP

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société; dans le cadre de l'organisation des apports, ce sera aussi l'identification de l'ayant droit économique des valeurs patrimoniales utilisées qui pourra être déterminante. Quant à la clarification de l'arrière-plan et du but de l'opération souhaitée conformément à l'al. 2, elle devra avoir lieu dans tous les cas, et non seulement lorsque l'opération paraît inhabituelle ou suspecte. Pour chacune des obligations de diligence de l'al. 1, il est renvoyé par analogie aux normes correspondantes de la LBA concernant les intermédiaires financiers. Les obligations de diligence devront être précisées dans l'OBA.

Art. 8c

Mesures organisationnelles

Par analogie avec l'art. 8 LBA concernant les intermédiaires financiers, il est proposé, avec l'art. 8c, de soumettre les conseillers à une disposition similaire. Font partie des mesures organisationnelles une formation suffisante des personnes chargées de remplir les obligations prévues par la LBA et la réalisation de contrôles internes.

Cela signifie que les personnes chargées de remplir les obligations correspondantes devront disposer des connaissances nécessaires à cet effet et que le respect de ces obligations devra faire l'objet de contrôles par échantillonnage. Les mesures organisationnelles permettront à la fois de garantir et de surveiller l'exécution correcte des obligations en interne.

Art. 9, al. 1, let. c, 1ter, 1quater et 2 En ce qui concerne l'al. 1, let. c, il est renvoyé mutatis mutandis aux explications relatives à l'art. 6, al. 2, let. d.

L'obligation de communiquer inscrite à l'art. 9 est étendue à la nouvelle catégorie des conseillers. Pour cela, il est créé un nouvel al. 1ter, qui prévoit l'obligation de communiquer si le conseiller sait ou présume sur la base de soupçons fondés qu'une opération préparée ou effectuée par lui a un lien avec des valeurs patrimoniales qui sont en rapport avec le blanchiment d'argent, proviennent d'un crime ou d'un délit fiscal qualifié, sont soumises au pouvoir de disposition d'une organisation criminelle ou servent au financement du terrorisme. Sur le plan du contenu, le nouvel alinéa s'appuie sur les dispositions analogues applicables aux intermédiaires financiers et aux négociants. Toutefois, il n'est pas impératif que des valeurs patrimoniales constituent la base d'une communication.

Dans le cadre du projet d'arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et de son Protocole additionnel et concernant le renforcement des normes pénales contre le terrorisme et le crime organisé, les différentes dispositions de la LBA relatives à l'obligation de communiquer font l'objet d'une modification sur deux points: premièrement, le renvoi à l'art. 260ter, ch. 1, CP est remplacé par un renvoi à l'art. 260ter CP. Deuxièmement, l'expression «organisation criminelle» est complétée par l'ajout des termes «ou terroriste». Une coordination entre ce projet d'arrêté fédéral et le
présent projet de loi sera par conséquent nécessaire le moment venu. Il conviendra en particulier d'adapter les ch. 1 et 3 du nouvel al. 1ter relatif à l'obligation de communiquer des conseillers.

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L'al. 1quater est l'actuel al. 1ter, qui est décalé d'une place en raison de l'introduction de l'obligation de communiquer imposée à la nouvelle catégorie des conseillers. Par ailleurs, cet alinéa précise désormais également l'obligation de communiquer de cette nouvelle catégorie.

L'al. 2 règle les exceptions à l'obligation de communiquer pour les avocats et les notaires. L'exemption existante pour les activités soumises au secret professionnel figure désormais à l'al. 2, let. a. Cette exemption s'applique aussi bien aux intermédiaires financiers qu'à la nouvelle catégorie des conseillers. La question de savoir si l'activité est soumise au secret professionnel doit être tranchée dans chaque cas d'espèce, compte tenu des circonstances concrètes. Selon la jurisprudence la plus récente, les conseils en vue de créer une société peuvent également être reconnus comme une activité typique de l'avocat et donc être couverts par le secret professionnel92. Par ailleurs, l'al. 2 est complété par une deuxième exception, figurant à la let. b, selon laquelle il existe également une exemption à l'obligation de communiquer lorsque les acteurs cités n'effectuent pas de transaction financière au nom ou pour le compte d'un client dans le cadre de leur activité. Dans ce contexte, le seul élément pertinent est l'exécution de la transaction dans le cas concret et non la question de savoir si celle-ci peut être globalement qualifiée d'activité d'un intermédiaire financier. Le conseiller peut donc être également soumis à l'obligation de communiquer s'il n'agit pas en tant qu'intermédiaire financier, mais effectue uniquement une transaction financière. Par conséquent, il n'existe d'obligation de communiquer pour les avocats et les notaires que si ceux-ci effectuent une transaction financière pour leurs clients dans le cadre de leur activité et que les données à communiquer ne sont pas soumises au secret professionnel.

Art. 9a, al. 2 Depuis le 1er janvier 2016, une communication selon l'art. 9, al. 1, let. a, LBA ne déclenche plus un blocage automatique de cinq jours ouvrables au maximum.

L'art. 9a LBA prévoit en outre expressément que l'intermédiaire financier doit pendant l'analyse du MROS exécuter les ordres de clients portant sur les valeurs patrimoniales communiquées. Cette règle minimise le risque de voir le client
de l'intermédiaire financier soupçonner une communication, ce qui pourrait l'inciter à soustraire les valeurs patrimoniales concernées à une éventuelle confiscation par les autorités pénales. Ce système implique cependant qu'une grande importance soit accordée à la poursuite ultérieure de la trace des transactions. Ce n'est que de cette manière que les autorités pénales seront, le cas échéant, en mesure, à la fin de la procédure pénale, de confisquer les valeurs patrimoniales illicites ayant fait l'objet d'une communication. La trace doit donc être garantie. Ce n'est par exemple pas le cas lorsque la clôture d'un compte est effectuée au moyen d'un retrait en espèces.

Une règle similaire à celle déjà prévue, par exemple, à l'art. 33 OBA-FINMA est par conséquent inscrite dans le nouvel al. 2 de l'art. 9a LBA. L'intermédiaire financier devra ainsi exécuter les ordres du client conformément à l'art. 9a LBA sous une forme qui permette de suivre la trace de la transaction.

92

ATF 1B_264/2018 du 28. 9.2018

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Il serait toutefois disproportionné voire impossible d'exiger une trace de toutes les transactions effectuées durant l'analyse du MROS en lien avec les valeurs communiquées. En cas de transactions impliquant de petites sommes, comme lors de retraits aux distributeurs automatiques de billets ou au moyen d'une carte de crédit, le respect du principe de la trace dans son acception traditionnelle ne peut être garanti.

Dans le cas des cartes de débit, il serait nécessaire de bloquer totalement la carte. De ce fait aucune transaction ne serait possible, ce qui non seulement pourrait alarmer le client, mais en outre contreviendrait directement à l'art. 9a LBA. Il est par conséquent proposé, tout comme dans l'OBA-FINMA, de limiter l'exigence d'une trace aux transactions portant sur d'importantes valeurs patrimoniales. L'intermédiaire financier doit estimer lui-même ce qu'il faut entendre par valeurs patrimoniales «importantes». À cet effet, il doit tenir compte des différentes catégories de clients.

De par son inscription dans la LBA, cette règle s'appliquera désormais à tous les intermédiaires financiers.

Art. 9b

Rupture de la relation d'affaires

En contrepartie de la suppression du délai d'analyse de 20 jours ouvrables pour les communications de soupçons en vertu de l'art. 9 LBA, un droit de rompre la relation d'affaires est inscrit dans la LBA (al. 1). Ainsi, si, dans un délai de 40 jours ouvrables après une communication en vertu de l'art. 9, al. 1, let. a, LBA ou 305ter, al. 2, CP, le MROS n'a pas informé l'intermédiaire financier qu'il transmet le cas à une autorité de poursuite pénale, ce dernier peut mettre un terme à la relation d'affaires. Ce droit vaut aussi bien pour les communications fondées sur l'obligation que sur le droit de communiquer.

Il est important de garantir une trace en vue d'une éventuelle confiscation future, également en cas de rupture de la relation d'affaires. C'est pourquoi une règle analogue à celle de l'art. 9a, al. 2 est créée (al. 2). L'obligation de la trace ne vaut, dans ce cas également, qu'en cas de retrait d'importantes valeurs patrimoniales. Cette obligation n'est pas nouvelle. Elle était déjà prévue dans l'OBA-FINMA, l'OBACFMJ et dans des règlements d'OAR.

Étant donné que les conseillers sont aussi soumis à une obligation de communiquer (art. 9, al. 1ter, P-LBA), il y a lieu, pour des questions de sécurité juridique, d'inscrire dans la LBA le droit pour ces derniers de mettre fin à une relation d'affaires durable qui aurait fait l'objet d'une communication au MROS. Bien qu'il ne soit pas exclu qu'un conseiller effectue une transaction financière au nom ou pour le compte de son client dans le cadre de la prestation fournie, le conseiller ne dispose en principe pas des valeurs patrimoniales de son client ou ne les garde pas en dépôt comme le ferait un intermédiaire financier. Il n'est par conséquent guère judicieux d'appliquer aux conseillers le même régime que celui prévu pour les intermédiaires financiers visant à exécuter les ordres des clients pendant l'analyse par le MROS et à suivre la trace des valeurs patrimoniales. Il y a lieu de permettre au conseiller qui fait une communication de soupçons au MROS de mettre fin à la relation d'affaires sans attendre l'expiration du délai de 40 jours prévu pour les intermédiaires financiers. On ne peut forcer un conseiller à maintenir la relation d'affaires et à effectuer pour son client des opérations potentiellement illicites. C'est pourquoi le conseiller 5301

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qui a fait une communication de soupçons au MROS en vertu de l'art. 9, al. 1ter, let. a, LBA, est en droit de mettre fin en tout temps à la relation d'affaires.

L'intermédiaire financier ou le conseiller devra informer sans délai le MROS de la date de la fin de la relation d'affaires (al. 4). En effet, en vertu de l'art. 23, al. 5, P-LBA, le MROS est tenu d'informer l'intermédiaire financier ou le conseiller s'il transmet les informations communiquées à une autorité de poursuite pénale aussi longtemps que l'intermédiaire financier ou le négociant n'a pas rompu la relation d'affaires.

Pour rappel, l'intermédiaire financier ou le conseiller qui a effectué une communication de soupçons est soumis à l'interdiction d'informer de l'art. 10a LBA. S'il décide de rompre la relation d'affaires, il veillera par conséquent à le faire d'une manière qui n'alarme pas le client sur la communication de soupçons effectuée au préalable. Selon l'art. 10a LBA, l'interdiction d'informer est illimitée dans le temps.

Afin de lever tout doute possible, l'al. 5 précise que cette interdiction continue de s'appliquer même après la rupture d'une relation d'affaires (al. 5).

Art. 10, al. 1 et 2 (ne concerne que les textes allemand et italien) Avec le nouveau système de traitement des données (goAML) qui sera mis en service par le MROS au 1er janvier 2020, les communications de soupçons des intermédiaires financiers, des négociants et, à l'avenir, des conseillers, ne seront plus transmises physiquement par le MROS aux autorités de poursuite pénales. S'il reste correct de parler de communications en lien avec l'art. 9 LBA, il convient de parler d'«informations communiquées» dans le contexte de la transmission aux autorités de poursuite pénale. Il y a par conséquent lieu d'adapter les versions allemande et italienne afin de remplacer la deuxième occurrence à l'al. 1 et la première occurrence à l'al. 2 du terme «communication» par l'expression «informations communiquées», que l'on retrouve déjà dans la version française de cette disposition. Dans la version allemande, il y a par ailleurs lieu de remplacer «weiterleitet/Weiterleitung» par «übermittelt/Übermittlung» et dans la version italienne «inoltrare» par «trasmettere». Ces modifications sont purement formelles.

Les versions française et italienne de l'al. 1 pourraient
donner l'impression qu'il y a un décalage temporel entre le moment où le MROS transmet les informations communiquées aux autorités de poursuite pénale et le moment où il en informe l'intermédiaire financier. Or tel n'est pas le cas. Le verbe «transmettre» à la fin de l'al. 1 doit par conséquent être mis au présent afin de refléter correctement la pratique, comme c'est le cas dans le texte allemand actuel.

Art. 10a, al. 1 et 3, phrase introductive Selon l'al. 1, 1re phrase, l'intermédiaire financier ne doit informer ni les personnes concernées ni aucun tiers du fait qu'il a effectué une communication de soupçons au MROS. La 2e phrase actuelle prévoit que l'organisme d'autorégulation auquel l'intermédiaire financier est affilié n'est pas considéré comme un tiers. La 3 e phrase mentionne qu'il en va de même pour la FINMA et la CFMJ en ce qui concerne les intermédiaires financiers assujettis à leur surveillance. Pour être exhaustif, il conviendrait d'ajouter dans la 3e phrase l'autorité intercantonale ­ oubliée dans le cadre 5302

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de la LJAr ­ et le bureau central. Plutôt qu'une longue énumération rendant cette disposition difficilement lisible et sujette à des omissions, une formulation plus générale est proposée. Elle fait tout d'abord référence aux autorités et organismes qui, selon l'art. 12 LBA, sont chargés de la surveillance des intermédiaires financiers. Cette formulation inclut les cas visés par les 2e et 3e phrases actuelles, c'est-àdire aussi bien les autorités de surveillance que les organismes d'autorégulation. Une référence à l'art. 43a LFINMA est ajoutée afin de couvrir le ou les futurs organismes de surveillance, qui suite à l'entrée en vigueur de la LEFin, exerceront la surveillance courante des gestionnaires de fortune et des trustees. La phrase est aussi complétée par une référence aux personnes qui procèdent à des audits dans le cadre de la surveillance. Cette formulation large permet de viser, d'une part, les sociétés d'audit, qu'elles soient mandatées par un intermédiaire financier ou, par exemple, un OAR ou un organisme de surveillance et, d'autre part, les personnes chargées d'audit ou d'enquête par exemple selon les art. 24a et 36 LFINMA. L'inclusion des sociétés d'audit agréées répond par ailleurs à une demande exprimée lors de la consultation.

À l'al. 3, la phrase introductive est complétée par un renvoi à l'art. 305ter, al. 2, CP, pour corriger une lacune dans cette disposition. Ainsi, la possibilité d'informer un autre intermédiaire financier dans certaines conditions vaut aussi bien pour les communications basées sur l'obligation de communiquer que pour celles basées sur le droit de communiquer.

Art. 10a, al. 3bis Cette nouvelle disposition crée la base légale permettant à un intermédiaire financier d'informer à certaines conditions un autre intermédiaire financier à l'étranger membre du même groupe qu'une communication de soupçons a été effectuée.

Une base légale pour l'échange d'informations transfrontalier intragroupe existe déjà dans la législation suisse à l'art. 4quinquies LB. Elle se limite à l'échange entre la société fille en Suisse et sa société mère à l'étranger. Afin d'assurer la cohérence entre la LBA et la LB, la possibilité d'informer un intermédiaire financier à l'étranger devra également être limitée à la relation fille en Suisse et mère à l'étranger. En outre, elle devra
respecter les conditions posées par l'art. 4quinquies LB.

Ainsi, par exemple, l'information transmise doit être nécessaire à la surveillance consolidée. Les informations transmises ne doivent en effet être utilisées qu'à des fins de contrôle interne ou de surveillance directe.

L'art. 10a, al. 4, LBA prévoit que l'intermédiaire financier qui a été informé par un autre intermédiaire financier est ­ à son tour ­ soumis à l'interdiction d'informer le client ou un tiers prévue à l'al. 1. Cette disposition n'est applicable qu'aux intermédiaires financiers soumis à la LBA. Il n'est en effet pas possible d'étendre la LBA au-delà du territoire suisse. La société mère à l'étranger n'étant pas soumise à la LBA, l'interdiction d'informer prévue par la LBA ne lui est pas applicable. Il est par conséquent nécessaire de prévoir expressément que cette dernière doit s'engager à respecter l'interdiction d'informer. Il convient toutefois de préciser que l'interdiction d'informer un tiers n'empêche pas la société mère à l'étranger d'informer, le cas échéant, son autorité de surveillance, si cela est nécessaire aux fins de la surveillance. L'autorité de surveillance étrangère ne doit, en effet, pas être considérée 5303

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comme un tiers par rapport à la société mère. Ceci est en ligne avec l'art. 10a, al. 1, LBA qui prévoit expressément, dans sa teneur actuelle, que la FINMA n'est pas considérée comme un tiers en ce qui concerne les intermédiaires financiers assujettis à sa surveillance. À cet égard, la nouvelle formulation de l'al. 1 proposée dans le présent projet ne change rien à ce principe (cf. commentaires ci-dessus).

On relèvera pour terminer que l'art. 4quinquies LB soumet l'échange d'informations de la fille à la mère à l'étranger à la condition que la société mère et l'autorité compétente pour la surveillance consolidée soient liées par le secret professionnel ou de fonction.

Art. 10a, al. 5 et 6 (ne concerne que les textes français et italien) L'interdiction d'informer après avoir effectué une communication s'applique désormais aussi aux conseillers, puisqu'ils sont eux aussi soumis à une obligation de communiquer (al. 5).

Dans le cadre des débats parlementaires relatifs à la loi fédérale du 12 décembre 2014 sur la mise en oeuvre des recommandations du Groupe d'action financière, révisées en 2012, le législateur a souhaité prévoir à l'al. 6 une nouvelle exception à l'interdiction d'informer lorsqu'il s'agit de sauvegarder des intérêts propres dans le cadre d'une procédure civile, pénale ou administrative. Cette exception à l'interdiction d'informer doit viser aussi bien les intermédiaires financiers que les négociants. Or, les textes français et italien actuels ne citent que les intermédiaires financiers et ne sont donc pas alignés sur la version allemande. Une nouvelle formulation correspondant au texte allemand est par conséquent proposée. La référence à l'interdiction d'informer des al. 1 et 5 se rapporte, d'une part, aux intermédiaires financiers, et, d'autre part, aux négociants et désormais également aux conseillers.

Art. 11, al. 2 Il est proposé d'étendre l'art. 11, al. 2, aux entreprises de révision qui effectuent une communication au MROS en toute bonne foi selon l'art. 15, al. 5 ou 6. Par ce biais, la LBA prévoit également une exclusion de la responsabilité pénale et civile pour les entreprises de révision et veille à ce que celles-ci n'aient aucune conséquence négative à redouter d'une communication selon l'art. 15.

Il est également proposé d'étendre l'exclusion de responsabilité pénale
et civile aux organismes de surveillance au sens de l'art. 43a LFINMA. Avec l'entrée en vigueur de la LEFin, ces derniers auront également une obligation de communiquer au MROS et doivent bénéficier de la même protection que les OAR ou les entreprises de révision.

Par ailleurs, à des fins de clarté, l'al. 2 est désormais subdivisé en lettres. Enfin, en ce qui concerne les OAR, le terme «dénonciation» est remplacé par «communication» à la let. d, en ligne avec les modifications proposées à l'art. 27 LBA.

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Art. 11a, al. 1 à 3 L'art. 11a doit être étendu afin de couvrir les communications de soupçons des conseillers. À l'al. 1, il y a lieu de prévoir l'obligation pour le conseiller auteur d'une communication de fournir, sur demande du MROS, des informations supplémentaires nécessaires à l'analyse de cette communication. Le conseiller ne sera, tout comme l'intermédiaire financier, tenu de ne fournir que les informations dont il dispose. Il convient de rappeler que le conseiller qui effectue une communication de soupçons est soumis à l'interdiction d'informer de l'art. 10a, al. 5, P-LBA. Cette disposition est également applicable lorsque le conseiller fournit des informations supplémentaires au MROS en lien avec la communication de soupçons dont il est l'auteur.

Puisqu'il n'est pas exclu qu'une communication de soupçons d'un conseiller puisse avoir un lien avec une relation d'affaires auprès d'un intermédiaire financier ou une transaction effectuée par un intermédiaire financier, l'al. 2 est complété afin de permettre au MROS d'obtenir dans un tel cas des informations de l'intermédiaire financier concerné.

La formulation de l'al. 3 doit être adaptée pour tenir compte de l'ajout des conseillers à l'al. 1. Cet alinéa fait également l'objet d'une modification dans le cadre du projet d'arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et de son Protocole additionnel et concernant le renforcement des normes pénales contre le terrorisme et le crime organisé. Il conviendra d'assurer la coordination nécessaire entre les deux projets le moment venu.

Une modification de l'al. 4 n'est par contre pas nécessaire. Cet alinéa se réfère spécifiquement à l'état de fait prévu à l'al. 2, c'est-à-dire au cas où un intermédiaire financier doit fournir des informations au MROS en lien avec la communication d'un autre intermédiaire financier ou, désormais, d'un conseiller. L'al. 2 ne prévoyant pas la possibilité pour le MROS de s'adresser à un conseiller en lien avec une communication de soupçon d'un autre conseiller ou d'un intermédiaire financier, une extension de l'al. 4 aux conseillers n'est pas nécessaire.

Art. 12, phrase introductive et let. bbis et bter Dans la phrase introductive du texte français, le terme «organes» est remplacé par
«autorités et organismes». Ces termes sont plus appropriés pour désigner les entités en charge de la surveillance des intermédiaires financiers. Cette modification n'a aucune portée matérielle.

À la let. bbis, la forme courte désignant l'autorité intercantonale de surveillance et d'exécution visée à l'art. 105 LJAr est introduite entre parenthèses. Seule la forme courte est ensuite utilisée dans le reste de la LBA.

La let. bter crée dans la LBA la base légale pour la tâche de surveillance des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe visés à l'art. 42bis P-LCMP assignée au bureau central.

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Art. 15, titre et al. 1 à 4, 5, phrase introductive, et 6 Obligation de contrôler incombant aux négociants et aux conseillers Il est proposé d'étendre l'application de l'actuel art. 15 aux conseillers. Les dispositions concernant les négociants sont intégralement reprises et le champ d'application de l'article est simplement complété par la mention de la nouvelle catégorie d'acteurs. Il s'ensuit que les conseillers seront également tenus de charger une entreprise de révision de contrôler les dossiers impliquant l'exécution d'obligations de diligence. Le nouvel al. 6 est applicable uniquement aux conseillers et règle l'obligation de communiquer de l'entreprise de révision au MROS, par analogie avec la disposition correspondante applicable aux négociants de l'al. 5. L'obligation de communiquer de l'entreprise de révision s'applique toujours lorsqu'un conseiller ne s'est pas acquitté de son obligation de communiquer et que des soupçons fondés permettent de présumer que l'opération préparée ou effectuée a un lien avec des valeurs patrimoniales qui sont en rapport avec le blanchiment d'argent, proviennent d'un crime ou d'un délit fiscal qualifié, sont soumises au pouvoir de disposition d'une organisation criminelle ou servent au financement du terrorisme. Bien entendu, cette disposition n'est pas pertinente dans les cas où les exemptions prévues à l'art. 9, al. 2, s'appliquent et où il n'existe, par conséquent, aucune obligation de communiquer pour la partie contrôlée. Afin de préserver le secret professionnel, le conseiller peut faire exécuter les contrôles par un contrôleur également soumis au secret professionnel. Les conditions d'agrément déjà applicables aujourd'hui en vertu de l'art. 11k OSRev pour les avocats et les notaires en vue des audits selon la LBA s'appliqueront désormais également aux conseillers. Une adaptation à l'échelon de l'ordonnance devra être effectuée en conséquence. L'activité de conseiller ne représente par ailleurs pas une activité soumise à autorisation selon l'art. 9a, al. 1, let. c, LSR et n'est donc pas en conflit avec l'agrément en tant qu'entreprise de révision au sens de la LSR. Il est donc tout à fait admissible d'exercer simultanément l'activité de conseiller et d'entreprise de révision selon la LSR.

Comme mentionné dans le commentaire de l'art. 9, al. 1ter, il
conviendra d'adapter le moment venu les let. a et c de l'al. 6 afin d'assurer la coordination nécessaire avec le projet d'arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et de son Protocole additionnel et concernant le renforcement des normes pénales contre le terrorisme et le crime organisé.

Par souci de précision, le texte de l'art. 15 a en outre été adapté. L'expression «organe de révision» a été remplacée par «entreprise de révision». L'«organe de révision» désigne, en droit des sociétés, un organe d'une société qui a des droits et des obligations spécifiques et qui a pour but principal le contrôle des comptes annuels et statutaires. Ainsi, le rôle d'un organe de révision vise essentiellement l'audit financier. Or, le contrôle du respect des obligations de diligence est une activité d'audit en matière de surveillance. De plus, l'art. 15, al. 2, a été modifié afin que seules des entreprises de révision selon l'art. 6 LSR puissent être mandatées, et non des réviseurs selon l'art. 5 LSR. Le fait qu'une personne physique puisse effectuer le contrôle des obligations de diligence des négociants et des conseillers est contraire au système en vigueur dans le domaine de l'audit financier et de l'audit en matière de 5306

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surveillance. En effet, une personne physique ne peut fournir, à titre indépendant, une prestation de révision légalement prescrite que si elle est inscrite au registre du commerce en tant qu'entreprise individuelle et si elle-même et son entreprise individuelle ont été agréées par l'autorité de surveillance (art. 8 OSRev). Il est précisé que les entreprises individuelles sont qualifiées d'entreprises de révision (art. 2, let. b, LSR). Cela permet d'assurer une meilleure qualité des prestations dès lors que ces entreprises doivent être dotées d'un système d'assurance-qualité (cf. art. 6, al. 1, let. d, LSR et 9, al. 1, OSRev). L'art. 22 OBA sera également adapté en conséquence.

Dans la version allemande, l'expression «Verdacht schöpft» est remplacée par «Verdacht hat» aux al. 5 et 6, afin d'harmoniser la formulation avec celle de l'art. 9.

Art. 16, al. 1, phrase introductive Le bureau central est ajouté à la liste des autorités visées par l'obligation de communiquer au MROS.

Art. 17 Le bureau central n'ayant pas la compétence d'édicter des ordonnances, la compétence de préciser les obligations de diligence applicables aux essayeurs du commerce et aux sociétés de groupe (art. 2, al. 2, let. g, LBA) et d'en régler les modalités d'application est attribuée à l'AFD (al. 1, let. d). Cette dernière devra, à cette fin, édicter une ordonnance.

L'al. 2 précise que les autorités visées à l'al. 1 règlent les modalités d'application des obligations de diligence. Il règle désormais de manière claire le rapport entre les ordonnances des autorités compétentes et l'autorégulation. L'ancienne formulation de l'art. 17 LBA (état avant le 1er janvier 2019) selon laquelle les autorités concernées précisaient les obligations de diligence et en réglaient les modalités «pour autant qu'aucun organisme d'autorégulation ne l'ait fait» a prêté à confusion en pratique. La formulation laissait en effet croire que les OAR (il ne s'agit pas ici des OAR reconnus au sens de l'art. 24 LBA, puisque l'art. 17 LBA concerne les intermédiaires financiers visés à l'art. 2, al. 2, LBA) avaient un droit à faire reconnaître leur règlement d'autorégulation comme ayant valeur de standard minimal et que ce règlement l'emportait sur les dispositions des ordonnances des autorités compétentes. En d'autres termes, l'ancienne formulation donnait
l'impression que l'existence d'une autorégulation avait pour conséquence de priver les autorités de leur compétence législative. Il ressort d'un arrêt du Tribunal fédéral du 11 mars 201993, dans un cas opposant la CFMJ à un OAR dans le domaine des maisons de jeu, que telle n'est pas l'interprétation du Tribunal fédéral de l'art. 17 LBA. Selon le Tribunal fédéral, il faut une base légale formelle pour déléguer des tâches à des organismes en dehors de l'administration. Or une telle base légale n'existe pas en lien avec les maisons de jeu, qui sont des intermédiaires financiers soumis à une loi spéciale. Par conséquent, une délégation de compétence à un OAR dans ce domaine est exclue. La situation est donc différente de celle de la FINMA qui dispose d'une 93

Arrêt dans l'affaire 2C 71/2018

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base légale à l'art. 7, al. 3, LFINMA lui permettant de reconnaître une valeur de standard minimal à l'autorégulation. Une telle base légale faisant défaut dans le domaine des maisons de jeu, un OAR n'a en outre aucun droit à une reconnaissance de son règlement comme standard minimal.

La formulation actuelle de la LBA «pour autant qu'il n'existe pas d'autorégulation», introduite avec l'entrée en vigueur de la LJAr au 1er janvier 2019 n'apporte guère de clarification quant à la portée de l'art. 17 LBA. La formulation révisée de cette disposition figurant dans l'annexe de la LEFin («En l'absence d'autorégulation reconnue») apporte une certaine amélioration de par l'ajout de l'adjectif «reconnue».

Elle laisse toutefois planer un certain doute quant à la question d'un droit éventuel à la reconnaissance de l'autorégulation. C'est pourquoi, afin de clarifier ce point, la 2e phrase de l'al. 2 précise désormais que les autorités compétentes peuvent reconnaître une autorégulation à cet égard. Il n'en découle aucun droit à une reconnaissance de l'autorégulation comme standard minimal. La disposition est ainsi parfaitement cohérente avec l'art. 7, al. 3, LFINMA, formulé sous forme de possibilité donnée à la FINMA et non d'obligation de cette dernière ou de droit en faveur de l'autorégulation.

Art. 20

Activité sans affiliation à un organisme d'autorégulation

Cet article dispose expressément que la FINMA peut prendre des mesures relevant du droit de la surveillance contre les intermédiaires financiers au sens de l'art. 2, al. 3, LBA qui, suite à l'entrée en vigueur de la LEFin, ne se sont pas affiliés à un OAR reconnu (al. 1). Sur cette base, la FINMA pourra notamment dissoudre les personnes morales et les sociétés ou radier les raisons individuelles du registre du commerce (al. 2). Cette disposition confirme que la compétence de la FINMA de prendre des mesures envers les intermédiaires financiers «illégaux» reste inchangée malgré la suppression du statut d'IFDS faisant suite à l'entrée en vigueur de la LEFin.

Ces mesures relevant du droit de la surveillance complètent la disposition pénale applicable aux intermédiaires financiers qui exercent illégalement sur les marchés financiers (art. 44 LFINMA). Elles permettent de rétablir l'ordre légal et d'assurer des conditions égales sur les marchés financiers. Elles garantissent également un système efficace de poursuite des intermédiaires financiers «illégaux». De ce fait, de telles mesures s'inscrivent aussi dans le cadre de la mise en oeuvre des recommandations du GAFI. La recommandation 14, par exemple, exige que les pays appliquent des sanctions appropriées aux personnes physiques ou morales qui fournissent des services de transfert de fonds ou de valeurs sans être agréées ou enregistrées.

Art. 22a, al. 1, 3 et 4 L'autorité intercantonale est ajoutée à la liste des autorités visées par cette disposition afin de corriger un oubli de coordination lors du traitement de la LJAr au Parlement. Par ailleurs, le bureau central est également ajouté en raison de son nouveau statut d'autorité de surveillance LBA. Le DFF devra par conséquent transmettre les données relatives à des activités terroristes également à ces deux autorités (al. 1),

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lesquelles seront chargées, à leur tour, de les transmettre aux intermédiaires financiers assujettis à leur surveillance (al. 3).

La formulation de l'al. 3 a en outre été modifiée pour plus de clarté.

Art. 23, al. 3, 5 et 6 La terminologie utilisée à l'al. 3 pour désigner le système d'information destiné à traiter les communications de soupçons au MROS est adaptée pour tenir compte de la mise en service du nouveau système goAML au 1 er janvier 2020.

Le délai d'analyse du MROS de 20 jours ouvrables pour les communications fondées sur l'obligation de communiquer est supprimé de l'al. 5. La loi ne prévoit donc désormais plus de délai maximal pour effectuer cette analyse. L'al. 5 maintient toutefois l'obligation pour le MROS d'avertir l'intermédiaire financier s'il transmet les informations communiquées à une autorité de poursuite pénale. Cela vaut aussi bien pour les communications de soupçons fondées sur l'obligation que sur le droit de communiquer. En effet, dans les deux cas, la transmission déclenche en vertu de l'art. 10, al. 1, LBA un blocage de cinq jours ouvrables des valeurs patrimoniales communiquées.

L'obligation du MROS d'informer de la transmission aux autorités de poursuite pénale est étendue aux communications de soupçons des conseillers effectuées en vertu de l'art. 9, al. 1ter, let. a, LBA. Bien qu'il n'y ait dans ce cas pas de valeurs patrimoniales à bloquer par le conseiller, ce dernier peut avoir un intérêt à être informé de la suite donnée à sa communication de soupçons, ne serait-ce que pour décider s'il souhaite poursuivre la relation d'affaires avec son client.

Dans tous les cas, l'obligation du MROS d'informer de la transmission des informations communiquées à une autorité de poursuite pénale ne vaut que pour autant que l'intermédiaire financier ou le conseiller n'ait pas rompu la relation d'affaires en vertu de l'art. 9b LBA.

Malgré l'abolition du délai maximal pour l'analyse des communications basées sur l'obligation de communiquer, le MROS veillera à effectuer ses analyses dans les meilleurs délais et à traiter prioritairement les communications de soupçons graves.

Cette disposition valant aussi bien pour l'obligation que le droit de communiquer, l'al. 6 concernant le droit de communication est abrogé.

Art. 27, titre et al. 4, phrase introductive Échange d'informations
et obligation de communiquer Le titre actuel de l'art. 27 mentionnant l'obligation de dénoncer des OAR doit être modifié pour faire référence à l'obligation de communiquer. Le MROS étant une autorité administrative et non une autorité de poursuite pénale, il ne peut recevoir de dénonciation à proprement parler. Il n'est pas non plus cohérent que les autorités de surveillance, les entreprises de révision, et avec l'entrée en vigueur de la LEFin, les organismes de surveillance, aient une obligation de communiquer, alors que les OAR auraient une obligation de dénoncer.

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La phrase introductive de l'al. 4 est modifiée en conséquence dans les textes français et italien. La même formulation est reprise que pour l'obligation de communiquer des autorités de surveillance (art. 16, al. 1, phrase introductive). Cette modification permet par ailleurs de corriger une incohérence dans le texte actuel de la LBA entre, d'une part, les versions française et italienne se référant à la dénonciation, et d'autre part, la version allemande qui parle déjà de communication. Dans la version allemande, l'expression «Verdacht schöpft» est remplacée par «Verdacht hat» dans un souci de cohérence avec l'art. 9.

Art. 29, al. 1, 2ter et 3 Le bureau central, en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA, est ajouté aux al. 1 et 3.

Le MROS étant une autorité administrative qui produit du renseignement financier, il ne peut en principe échanger avec les autorités suisses ou étrangères que des renseignements (ou des informations) et non pas des documents en tant que tels, qui pourraient, par exemple, être utilisés dans une procédure administrative ou pénale (cf. art. 30, al. 3, et 29, al. 2bis, LBA). Afin de refléter ce principe, le terme «documents» est supprimé de l'al. 1. En pratique, cette modification ne porte pas à conséquence. Les autres autorités visées à l'al. 1 sont toutes des autorités de surveillance.

Si sur la base de renseignements transmis par le MROS ces dernières ont besoin, aux fins d'une procédure interne, de documents détenus par un intermédiaire financier assujetti à leur surveillance, elles peuvent le demander directement à ce dernier.

L'al. 2ter reflète un principe important de la coopération internationale selon lequel l'autorisation préalable expresse d'une cellule de renseignements financiers est nécessaire pour transmettre à une autorité nationale tierce les renseignements qui proviennent de cette cellule. Ce principe vaut de manière générale indépendamment de la qualité de l'autorité tierce concernée. En d'autres termes, elle est également nécessaire lorsque l'autorité tierce est une autorité compétente en matière de lutte contre le blanchiment d'argent ou le financement du terrorisme. Or, aux termes mêmes de l'al. 2ter, la nécessité d'une autorisation préalable expresse n'est prévue qu'en cas de transmission aux autorités fédérales, cantonales ou communales
visées à l'al. 2, mais pas en cas de transmission par exemple à la FINMA ou à la CFMJ.

Une référence aux autorités de surveillance visées à l'al. 1 est donc ajoutée pour corriger cette lacune et inscrire dans la loi un principe que le MROS applique déjà aujourd'hui dans l'assistance administrative avec la FINMA et la CFMJ.

Art. 29a, al. 2bis, 3 et 4 Une des missions principales confiées au MROS est de soutenir les autorités de poursuite pénale dans la lutte contre le blanchiment d'argent, les infractions préalables au blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Le MROS exécute cette tâche notamment à travers les analyses approfondies des communications de soupçons que lui font parvenir les intermédiaires financiers. Ces analyses se fondent sur les informations en provenance de différentes sources tant confidentielles (informations policières ou autres) que publiques. Le MROS utilise aussi l'échange d'informations avec ses homologues étrangers pour obtenir des informations.

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Ce dernier canal est d'une importance cruciale du fait que la majorité des infractions préalables dans les cas communiqués au MROS sont commises à l'étranger 94. Dès lors, l'obtention des informations nécessaires par le biais des homologues étrangers des pays concernés est indispensable pour réunir les éléments permettant de transmettre aux autorités de poursuite un dossier complet. Or, les homologues étrangers soumettent généralement l'utilisation des informations remises au MROS à certaines conditions. Le Conseil fédéral s'est déjà exprimé sur l'obligation des cellules de renseignements financiers de respecter les conditions d'utilisation des informations imposées par leurs homologues étrangers95. Les autres autorités suisses auxquelles les informations reçues de l'étranger sont transmises par le MROS doivent également respecter les conditions d'utilisation.

Un grand nombre d'homologues du MROS autorisent par exemple la transmission de ces informations aux autorités de poursuite pénale, mais ne permettent pas que ces dernières soient utilisées dans la procédure pénale, par exemple en tant que moyens de preuve.

Le respect des droits de la défense inscrits dans le CPP est un pilier du système judiciaire d'un État de droit comme la Suisse. L'interprétation qui en est faite n'est toutefois pas unanime au sein des ministères publics. Certains procureurs l'interprètent comme une obligation d'intégrer au dossier de procédure tous les documents reçus du MROS, même s'ils ne constituent pas des moyens de preuve. Il se pourrait que les documents du MROS incluent des informations provenant d'un homologue dont le dépôt au dossier a été expressément interdit. Pour éviter une éventuelle utilisation des informations qui violerait les conditions posées par l'homologue étranger, la solution la plus simple pour le MROS est de ne pas transmettre ce type d'information aux autorités de poursuite pénale. Cette situation n'est pas idéale car la connaissance même de certaines informations peut être très utile, voire cruciale, dans le cadre d'une procédure pénale. En outre, sachant que certaines informations existent, les autorités de poursuite pénale pourront, au besoin, passer par l'entraide judiciaire pour les obtenir sous forme de moyens de preuve pouvant être utilisés valablement dans la procédure pénale.
Les informations provenant d'un homologue étranger et transmises par le MROS aux autorités de poursuite pénale doivent donc obéir à un régime particulier, prévu par la LBA en tant que loi spéciale, qui permet aux procureurs d'en prendre connaissance selon les conditions précisées par le MROS et sans avoir l'obligation de les verser au dossier de la procédure. À cette fin, un nouvel al. 2bis est ajouté à l'art. 29a LBA. Pour préciser que ces restrictions s'appliquent uniquement aux informations reçues de l'étranger, un renvoi à l'art. 29, al. 2ter, LBA (autorisation de l'homologue étranger pour la transmission des informations) est inscrit dans la nouvelle disposition.

Le bureau central, en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA, est ajouté dans les al. 3 et 4.

94 95

GCBF, rapport sur l'évaluation nationale des risques de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme en Suisse, juin 2015, p. 4.

Message du Conseil fédéral du 27 juin 2012 relatif à la modification de la loi sur le blanchiment d'argent, FF 2012 6449 6462 s.

5311

FF 2019

Titre suivant l'art. 29a

Section 1a Collaboration avec les organismes de surveillance et les organismes d'autorégulation Une base légale est créée dans la LBA pour permettre au MROS d'échanger des informations, d'une part, avec les OAR, et, d'autre part, après l'entrée en vigueur de la LEFin, avec les organismes de surveillance au sens de l'art. 43a LFINMA. Étant donné que les OAR et les organismes de surveillance ne sont pas des autorités en tant que telles, une nouvelle section est ajoutée à la LBA, à la suite de la section relative à la collaboration entre les autorités suisses.

Art. 29b L'art. 29b, al. 1, crée dans la LBA une base légale permettant au MROS et aux OAR d'échanger tous les renseignements nécessaires à l'application de la LBA, dans le cadre de l'assistance administrative. Seuls sont visés les OAR reconnus au sens de l'art. 24 LBA, c'est-à-dire les organismes qui se sont vu attribuer par le législateur une tâche de réglementation et de surveillance des intermédiaires financiers qui leur sont affiliés. Ces OAR sont, selon la jurisprudence, délégataires d'une tâche de puissance publique96. Afin d'être en mesure d'effectuer leurs tâches, il est nécessaire qu'ils aient, eux aussi, à l'instar des autorités de surveillance, accès aux informations nécessaires détenues par le MROS.

Les renseignements peuvent être échangés aussi bien spontanément que sur demande. L'assistance administrative est réciproque, en ce sens que les renseignements peuvent être transmis du MROS aux OAR ou des OAR au MROS. La seule restriction est que les renseignements échangés doivent être nécessaires à l'application de la LBA.

Comme mentionné dans le commentaire de l'art. 29, al. 1, LBA, le MROS ne peut en principe pas échanger de documents. C'est donc en toute connaissance de cause que l'échange avec les OAR est également limité aux renseignements.

Afin de tenir compte d'un commentaire exprimé lors de la consultation, l'al. 2 prévoit l'autorisation expresse des autorités pénales pour que le MROS puisse transmettre aux OAR des informations provenant de ces dernières.

Le principe de l'autorisation préalable expresse s'agissant d'informations provenant d'homologues étrangers du MROS vaut également en cas de transmission à un tiers qui n'est pas une autorité (publique) proprement dite. Une norme analogue à celle de l'art. 29, al. 2ter,
P-LBA est donc inscrite à l'art. 29b, al. 3.

Suite à l'entrée en vigueur de la LEFin, il est judicieux de prévoir également un échange d'informations entre le MROS et les organismes de surveillance au sens de l'art. 43a LFINMA puisque ces derniers ont également été chargés, par le législateur, de la surveillance courante de certains intermédiaires financiers en vertu de l'art. 61 LEFin. Les mêmes dispositions sont applicables à l'échange de renseigne96

Arrêt du Tribunal fédéral du 28 avril 2011 2C-887/2010, consid. 9.3

5312

FF 2019

ments entre le MROS et les organismes de surveillance et à l'échange entre le MROS et les OAR.

Art. 30, al. 2, let. a, et 32, al. 3 L'obligation de communiquer ayant été étendue à la nouvelle catégorie des conseillers, les dispositions concernant la collaboration avec les homologues étrangers du MROS et les autorités de poursuite pénale étrangères s'appliquent également aux conseillers et sont complétées en conséquence.

Art. 34, titre et al. 1 à 3 Fichiers en rapport avec les communications et les informations transmises au bureau de communication Le titre actuel de l'art. 34 LBA est trop restreint par rapport au contenu de cette disposition qui vise les fichiers aussi bien en rapport avec l'obligation qu'avec le droit de communiquer (cf. actuel al. 3). Une formulation plus générique du titre se référant aux fichiers en rapport avec les communications (en général) est proposée.

Le titre doit également être étendu afin de couvrir les informations transmises au bureau de communication en application de l'art. 11a LBA.

Le bureau central, en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA, est ajouté dans l'al. 2.

Al. 1 et 3 L'al. 1 doit être modifié pour y ajouter un renvoi au droit de communiquer de l'art. 305ter, al. 2, CP, suite au maintien de cet instrument. Les mêmes règles de gestion des fichiers doivent en effet s'appliquer aux communications de soupçons, qu'elles soient effectuées sur la base de l'obligation ou du droit de communiquer.

L'obligation prévue à l'al. 1 de gérer des fichiers séparés doit en outre être expressément étendue, d'une part, aux conseillers et, d'autre part, aux documents se rapportant aux demandes du MROS en vertu de l'art. 11a LBA.

L'art. 11a LBA permet au MROS d'obtenir des intermédiaires financiers et désormais des conseillers des informations supplémentaires nécessaires à l'analyse des communications de soupçons. En vertu de l'art. 11a, al. 4, LBA, l'intermédiaire financier qui n'est pas l'auteur de la communication mais auquel le MROS s'adresse pour obtenir des informations supplémentaires est soumis à l'interdiction d'informer le client du fait qu'une communication a été effectuée, conformément à l'art. 10a, al. 1, LBA.

Lorsque le MROS demande des informations supplémentaires à l'intermédiaire financier ou au conseiller qui a lui-même effectué la communication,
les documents remis au MROS en lien avec cette demande font partie du dossier de communication déjà couvert par l'art. 34, al. 1. En ce qui concerne ces documents, l'art. 34, al. 3, LBA exclut ­ aujourd'hui temporairement ­ le droit d'accès de la personne concernée au sens de l'art. 8 LPD. Par contre, lorsque le MROS demande des informations supplémentaires à un intermédiaire financier qui n'est pas lui-même l'auteur de la communication, comme le prévoit l'art. 11a, al. 2, LBA, les documents en lien avec 5313

FF 2019

cette demande ne font pas partie du dossier de communication visé à l'al. 1, et l'art. 34, al. 3, LBA n'est pas applicable. Si la personne concernée demande l'accès au dossier, l'intermédiaire financier se retrouve dans une situation juridiquement incertaine: d'un côté, l'art. 34 LBA ne l'autorise pas à refuser à la personne concernée l'accès aux documents remis au MROS. D'un autre côté, en accédant à la demande de la personne concernée, il violerait l'interdiction d'informer prévue à l'art. 10a, al. 1, en relation avec l'art. 11a, al. 4, LBA, puisque la personne concernée serait, par ce biais, informée qu'une communication de soupçons la concernant a été effectuée par un autre intermédiaire financier ou un conseiller. Il y a donc une lacune dans la loi qu'il convient de corriger en étendant l'art. 34, al. 1, LBA aux documents se rapportant aux demandes du MROS en vertu de l'art. 11a LBA.

L'al. 3 de l'art. 34 LBA doit également être modifié pour corriger une insécurité juridique similaire. Depuis le 1er janvier 2016, l'interdiction d'informer le client selon l'art. 10a LBA est illimitée dans le temps, alors que l'exclusion du droit d'accès selon l'art. 34, al. 3, LBA est, elle, limitée. Elle ne vaut que durant l'analyse de la communication par le MROS ou tant que dure le blocage prévu à l'art. 10 LBA. Pour éviter, ici également, que l'intermédiaire financier ou le conseiller se retrouve dans la situation juridiquement incertaine évoquée plus haut, l'exclusion du droit d'accès vis-à-vis des intermédiaires financiers et des conseillers doit être illimitée dans le temps. Cette exclusion illimitée vaut aussi bien pour les fichiers séparés contenant les documents se rapportant aux communications que pour ceux se rapportant aux demandes du MROS en vertu de l'art. 11a LBA, de par l'extension proposée de l'al. 1.

L'exclusion illimitée dans le temps du droit d'accéder auprès des intermédiaires financiers et des conseillers aux fichiers qu'ils doivent gérer séparément selon l'al. 1 permet d'assurer la cohérence entre les art. 34 et 10a LBA, ce qui renforce la sécurité juridique. Elle répond également à un souci d'efficacité du système de communication de soupçons. Une fois que l'analyse du MROS et le blocage prévu à l'art. 10 LBA ont pris fin, il se peut que la personne concernée accède aux fichiers,
alors même que le dossier fait encore l'objet de vérifications préliminaires de la part d'une autorité de poursuite pénale. La personne concernée apprendra, par ce biais, non seulement qu'une communication de soupçons la concernant a été effectuée, mais également que celle-ci a été transmise aux autorités pénales. Si ces dernières n'ont pas (encore) décidé de bloquer les fonds, on ne peut exclure que la personne concernée tente de les soustraire à une éventuelle confiscation en Suisse en les transférant dans une juridiction connue pour son manque de coopération en matière d'entraide judiciaire. La procédure pénale pourrait alors être mise en danger.

Un autre aspect concerne l'intermédiaire financier qui a communiqué. En donnant accès au client au dossier de la communication au MROS, l'intermédiaire financier lui dévoile les soupçons qu'il a éprouvés le concernant. Par conséquent, le plus souvent, le client rompt la relation d'affaires, car le lien de confiance avec son intermédiaire financier n'existe plus. Dans des cas plus rares, certains clients peuvent même intenter des procédures contre l'intermédiaire financier. Dans la mesure où l'intermédiaire financier a effectué une communication au MROS en étant de bonne foi, il est protégé en vertu de l'art. 11 LBA. Il n'en demeure pas moins qu'une procédure civile ou pénale peut entraîner des désagréments plus ou moins impor5314

FF 2019

tants. La perte de clients et les autres désagréments liés au droit d'accéder au dossier pourraient avoir pour effet de dissuader les intermédiaires financiers de communiquer au MROS. Or, afin d'atteindre le but de la LBA, à savoir la lutte efficace contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, les intermédiaires financiers doivent pouvoir communiquer au MROS sans craindre de perdre leur client ou de devoir affronter d'autres désagréments. Les mêmes craintes et désagréments pourraient survenir en lien avec les conseillers qui seront également soumis à l'obligation de communiquer.

Au vu de ce qui précède, le Conseil fédéral est d'avis qu'une base légale formelle excluant directement auprès des intermédiaires financiers et des conseillers l'accès du client aux fichiers gérés séparément selon l'art. 34, al. 1, LBA est nécessaire; les personnes concernées doivent faire valoir leur droit d'accès aux informations figurant dans les fichiers séparés exclusivement auprès du MROS. Ce dernier dispose des informations correspondantes et fournit des renseignements en vertu de l'art. 35 LBA sur la base de l'art. 8 LSIP. La procédure fixée à l'art. 8 LSIP, applicable d'une manière générale aux fichiers de police contenant des données liées aux soupçons, permet de garantir que les demandes de renseignements des personnes concernées concernant des informations suspectes sont traitées conformément aux exigences de la protection des données et sans mettre en péril les intérêts de la poursuite pénale.

Seul le MROS dispose des informations pertinentes des intermédiaires financiers et des conseillers et est à même de clarifier les intérêts qu'ont les autorités de poursuite pénale au maintien du secret. Par conséquent, il lui incombe exclusivement d'évaluer, en vertu de l'art. 35 LBA en relation avec l'art. 8 LSIP, si des renseignements peuvent être fournis concernant ces informations et, si oui, dans quelle mesure. Cette façon de procéder permet de garantir que la personne concernée recevra la même réponse, qu'elle adresse sa demande de renseignements concernant ces informations aux intermédiaires financiers, aux conseillers ou au MROS. Cette règle renforce la sécurité juridique et se justifie par l'intérêt général de la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.

Il convient
de noter pour terminer que l'art. 34 LBA (titre et al. 1 à 3) fait également l'objet d'une proposition de modification dans le cadre du projet de loi fédérale sur la révision totale de la LPD et sur la modification d'autres lois fédérales 97. Il est notamment proposé de remplacer «fichiers» par «dossiers et/ou banques de données» dans le titre et les al. 1 et 2. Par ailleurs, les renvois à la LPD et à la disposition pertinente de cette loi figurant à l'al. 3 sont modifiés. Le projet de révision totale de la LPD est en cours de traitement au Parlement. Il conviendra, le moment venu d'assurer la coordination nécessaire entre le présent projet et cette révision.

Art. 35, al. 2 Le bureau central, en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA, est ajouté à l'al. 2. La formulation de cet alinéa est en outre adaptée. L'art. 35 LBA porte sur le traitement des données par le MROS. L'al. 2 ne peut par conséquent que concerner l'échange d'informations entre le MROS, d'une part, et les différentes autorités mentionnées, d'autre part. Or, dans sa teneur actuelle, en particulier en français, cet 97

FF 2017 6803 6883

5315

FF 2019

alinéa donne l'impression qu'il porte de manière générale sur l'échange d'informations entre les différentes autorités LBA, par exemple entre la FINMA et la CFMJ.

Or cet échange est déjà réglé à l'art. 29, al. 1, LBA. L'adaptation de la formulation n'a pas de conséquence matérielle.

Art. 38, al. 1 et 2 (ne concerne que les textes allemand et italien) La disposition pénale concernant l'infraction à l'obligation de contrôler, déjà applicable aux négociants, est étendue aux conseillers. Le respect de l'obligation de contrôler s'impose donc aussi aux conseillers.

Art. 41, al. 2 L'AFD étant chargée, en vertu de l'art. 17 LBA, de préciser les obligations de diligence des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe, il est logique de l'autoriser également, à l'instar de la FINMA et de la CFMJ, à édicter des dispositions d'exécution dans les domaines de portée restreinte.

Art. 42, al. 2 Un nouvel al. 2 est ajouté rétroactivement aux dispositions transitoires de la modification du 15 juin 2018. Les dispositions transitoires de la LBA créées par la LEFin ne sont ainsi pas applicables aux essayeurs du commerce et aux sociétés de groupe visés par la LCMP. Seules les dispositions finales de la LCMP leur sont applicables, et ce dès l'entrée en vigueur de la LEFin. Cela implique que les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe ex-IFDS, contrairement aux autres ex-IFDS, ne sont pas soumis à l'obligation de s'affilier à un OAR dans l'année suivant l'entrée en vigueur de la LEFin pour pouvoir continuer d'exercer légalement leur activité soumise à la LBA.

5.2

Code civil

Art. 61 Al. 2, ch. 3 Selon le droit actuel, seules les associations qui exercent une activité commerciale ou qui, en raison de leur importance économique, sont soumises à l'obligation de faire réviser leurs comptes, sont tenues de se faire inscrire au registre du commerce.

Le projet vise à étendre l'obligation d'inscription aux associations présentant un risque accru d'abus, c'est-à-dire aux associations qui, à titre principal, collectent ou distribuent directement ou indirectement des fonds à l'étranger à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales. Il couvre ainsi les situations dans lesquelles soit la collecte soit la distribution de fonds a lieu en dehors du territoire suisse. Cela inclut les cas où la collecte des fonds a lieu en Suisse et leur distribution à l'étranger, où la collecte et la distribution ont lieu à l'étranger et où la collecte a lieu à l'étranger et la distribution en Suisse. Les associations qui ne se conforment 5316

FF 2019

pas à leur obligation d'inscription pourront faire l'objet d'une procédure d'inscription d'office au registre du commerce, conformément à la procédure décrite dans l'ordonnance du 17 octobre 2007 sur le registre du commerce (ORC)98.

Trois critères doivent être cumulativement remplis pour qu'une association soit soumise aux nouvelles règles de transparence: 1) collecte ou distribution de fonds à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales; 2) exercice de cette activité à titre principal; 3) collecte ou distribution de fonds à l'étranger.

1. Collecte ou distribution de fonds à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales Le critère de la collecte ou de la distribution de fonds à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales correspond à la définition d'OBNL donnée par le GAFI99. À relever que les buts visés par la disposition couvrent aussi les buts confraternels et de «bonnes oeuvres» mentionnés dans la définition d'OBNL du GAFI. Il faut préciser que le GAFI interprète la notion de fonds de façon large 100.

Les associations sportives, de loisirs et d'entraide ne poursuivent pas les buts évoqués ci-dessus101. De même, les associations économiques, comme les associations professionnelles, patronales ou ouvrières, qui ont pour but la défense des intérêts économiques communs de leurs membres, ne répondent pas à la définition énoncée ci-dessus et ne sont par conséquent pas visées par les nouvelles dispositions.

Sont considérées comme collectes de fonds toutes les contributions qui ont principalement pour but d'apporter une aide à l'association ou aux bonnes oeuvres qu'elle soutient. Peu importe à cet égard que les contributions aient été sollicitées ou non.

Par contre, les cotisations versées par les membres de l'association102, les subventions étatiques, le revenu de leurs activités, les prestations de sponsoring et, de manière générale, toutes les contributions qui ont pour but l'obtention d'une contreprestation de la part de l'association, n'entrent pas dans la définition de collecte de fonds. De façon symétrique, la distribution de fonds englobe toutes les contributions versées par l'association sans contre-prestation, dans le but d'apporter une aide à son destinataire. Les contributions en nature et l'offre de services peuvent être assimilées à une distribution de fonds dans la mesure où elles sont financées par les ressources de l'association.

98 99

RS 221.411, art. 152 ss Cf. glossaire du GAFI selon lequel l'expression OBNL désigne les personnes morales, constructions juridiques ou organisations qui à titre principal sont impliquées dans la collecte et la distribution de fonds à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives, sociales ou confraternelles ou dans d'autres types de «bonnes oeuvres».

100 Cf. glossaire des 40 recommandations: «Le terme fonds désigne tous les types d'avoirs, matériels ou immatériels, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, quel que soit leur mode d'acquisition, ainsi que les actes juridiques ou instruments sous toute forme, y compris électronique ou numérique, attestant la propriété de ces avoirs ou les droits y relatifs».

101 Cf. GCBF, rapport OBNL 2017, ch. 1.3; cf. également Confédération suisse, Administration fédérale des contributions: Circulaire n°12. Exonération de l'impôt pour les personnes morales poursuivant des buts de service public ou de pure utilité publique ou des buts cultuels; déductibilité des versements bénévoles, 1994.

102 Par quoi il faut entendre les cotisations des membres actifs, fixées statutairement, pour lesquelles chaque membre ou chaque catégorie de membres reçoit la même prestation (par ex. journal, entrée, rabais) en guise de contre-prestation.

5317

FF 2019

Le projet couvre toutes les formes de collectes de fonds, indépendamment de leur contexte ou de l'identité voire du nombre des donateurs. Il couvre aussi bien les collectes organisées sur la voie publique que les appels aux dons effectués par courrier, porte-à-porte, téléphone, courriel ou sur Internet. Le projet renonce volontairement à limiter l'application des nouvelles règles de transparence aux seules collectes publiques, ce qui aurait eu pour effet d'exclure les appels aux dons effectués auprès des membres de l'association ou de ses sympathisants, notamment les quêtes effectuées dans les édifices du culte et celles effectuées dans le cadre d'une manifestation organisée par l'association et en rapport avec son but. En effet, ce type de collecte présente un potentiel d'abus similaire à celui des appels adressés au public. On pense par exemple à la problématique des sectes ou aux inquiétudes liées au financement des mosquées qui, dans la plupart des cas, privilégient le recours aux fonds versés par des adhérents ou d'autres organisations associées et renoncent aux appels publics aux dons. De plus, l'introduction de dérogations pour certains types de collectes entraînerait des difficultés d'application et offrirait des possibilités de contourner les nouvelles règles, ce qui nuirait à leur efficacité.

2. Activité principale Les libéralités de moindre importance ou occasionnelles n'entrent en principe pas dans le champ d'application des dispositions proposées. En effet, seules les associations qui à titre principal collectent ou distribuent directement ou indirectement des fonds à l'étranger à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales sont visées par ces nouvelles règles. C'est le cas dès lors que les fonds collectés constituent une part substantielle des ressources de l'association, ou que les fonds distribués consomment une importante partie de ses ressources. Il appartiendra, le cas échéant, au Conseil fédéral de fixer les seuils permettant de déterminer si une association est ou non soumise à l'obligation d'inscription. Les limites devraient être fixées de manière à ne pas entraver les associations qui souhaitent faire des dons modiques ou consacrer une petite partie de leurs ressources au soutien d'organisations tierces.

3. Fonds collectés ou distribués à l'étranger
Le dernier critère concerne l'exercice à l'étranger des activités de collecte et de distribution de fonds. En effet, selon les études réalisées sur la question, les OBNL les plus exposés aux abus sont ceux qui opèrent dans des zones de conflit, où des organisations terroristes sont actives sur le terrain et où la menace d'actes terroristes est importante103. De toute évidence, les associations purement locales, qui déploient leurs activités sur le territoire suisse et dont les donateurs et les bénéficiaires se trouvent en Suisse, ne répondent pas à ces critères. Il en va différemment dès lors que les fonds collectés transitent par l'étranger. Il est alors plus difficile de vérifier l'affectation finale des fonds et de s'assurer qu'ils ne transitent pas par des zones de conflit. De même, la provenance des fonds collectés à l'étranger est plus difficile à établir quel que soit le lieu de leur distribution. Fort de ce constat, le projet limite le champ d'application des nouvelles règles de transparence aux associations qui reçoivent des fonds ou qui en distribuent en dehors des frontières suisses.

103

GCBF, rapport sur l'évaluation nationale des risques de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme en Suisse, juin 2015, p. 52; GCBF, rapport OBNL 2017, p. 37.

5318

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Al. 2bis et 2ter En raison de l'évolution constante de la situation, sur le plan tant national qu'international, le Conseil fédéral doit disposer d'une certaine marge de manoeuvre pour lutter de manière efficace contre le financement du terrorisme et le blanchiment d'argent. Le projet propose donc une norme de délégation autorisant le Conseil fédéral à édicter les dispositions d'exécution concernant l'inscription obligatoire au registre du commerce. La norme de délégation prévue à l'al. 2bis ne permet pas au Conseil fédéral de définir de nouvelles conditions à l'obligation d'inscription, mais de préciser si nécessaire certaines notions employées à l'al. 1, ch. 3. Cette précision permettra d'éviter que des associations se fassent inscrire à titre préventif faute de savoir si elles sont visées par la nouvelle obligation. La norme de délégation contribue donc également à augmenter la sécurité juridique des associations et ainsi à éviter des coûts importants liés à des inscriptions préventives dans le secteur associatif, ce qui répond à une critique exprimée lors de la consultation. La norme de délégation de l'al. 2ter autorise le Conseil fédéral à prévoir des exemptions pour les associations qui présentent un risque faible d'être exploitées à des fins de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme, en fonction notamment du montant des fonds collectés ou distribués, de leur provenance, de leur destination ou de leur affectation. Il sera ainsi possible de fixer par voie d'ordonnance les montants à partir desquels une association est tenue de se faire inscrire ou de prévoir des exemptions à l'obligation d'inscription en lien avec des pays considérés comme moins risqués.

Art. 61a

IIa. Liste des membres

À l'instar de la règle applicable aux sociétés régies par le CO 104, ce nouvel article oblige les associations tenues de se faire inscrire au registre du commerce à dresser une liste de leurs membres, avec indication du nom ou de la raison sociale et de l'adresse, de manière qu'il soit possible d'y accéder en tout temps en Suisse. Bien que cette disposition ne prévoie pas d'obligation spécifique de mise à jour de la liste, les associations concernées doivent cependant s'assurer que les informations figurant sur la liste sont tenues au meilleur de leur connaissance. Elles doivent en outre conserver les informations relatives à chaque membre et les éventuelles pièces justificatives de l'inscription sur la liste pendant au moins dix ans après la radiation du membre concerné. Ce délai de conservation doit permettre d'identifier les personnes qui ont quitté l'association et ne figurent par conséquent plus sur la liste des membres. Le projet de loi ne prévoit pas d'obligation de produire des pièces justificatives et, en cas de production de pièces justificatives, ne fixe aucune exigence de forme. Celle-ci peut donc être déterminée librement par les associations. En principe, les statuts prévoient que l'entrée et la sortie d'un membre nécessitent un acte écrit, mais ce n'est pas toujours le cas. L'adhésion peut également avoir lieu sur simple déclaration. Dans tous les cas, l'association devra conserver des copies des différentes versions des listes de membres et d'éventuelles pièces justificatives pendant au moins dix ans après la radiation du membre concerné.

104

Art. 686, 790 et 837 CO

5319

FF 2019

Art. 69c, al. 1 En raison des nouvelles obligations sur la transparence des associations que prévoit le présent projet, il est nécessaire de réviser l'art. 69c, al. 1, CC concernant les carences dans l'organisation de l'association. Dans le droit actuel, un membre ou un créancier peut requérir du juge qu'il prenne les mesures nécessaires lorsque l'association ne possède pas l'un des organes prescrits. La formulation actuelle de l'art. 69c, al. 1, couvre le cas où l'association manque à son obligation de désigner un représentant en Suisse conformément à l'art. 69, al. 2, P-CC. En revanche, il est nécessaire de modifier l'art. 69c, al. 1, afin de permettre à un membre ou à un créancier de requérir du juge qu'il prenne les mesures nécessaires également lorsque l'association ne tient pas la liste des membres conformément à l'art. 61a P-CC.

Art. 69, al. 2 Par analogie avec le droit des sociétés105, toutes les associations tenues de s'inscrire au registre du commerce devront désormais pouvoir être représentées par une personne domiciliée en Suisse et ayant accès à la liste des membres. Si aucune des personnes domiciliées en Suisse ne dispose d'une signature individuelle, l'exigence en matière de domicile peut également être remplie grâce au concours de plusieurs personnes. Cette obligation est de nature impérative. En cas de manquement, l'association présente une carence dans son organisation au sens de l'art. 69c CC et s'expose aux conséquences prévues par cette disposition.

Titre final Art. 6bbis

1a. Associations tenues de s'inscrire au registre du commerce

Dans le cadre de la consultation, certains participants ont évoqué la nécessité d'introduire une disposition transitoire octroyant aux associations existantes un délai suffisant pour se conformer aux nouvelles prescriptions. Les associations existantes qui, selon le droit actuel, sont tenues de s'inscrire au registre du commerce selon l'art. 61, al. 1, ch. 1 et 2, doivent se conformer à leurs obligations de tenir une liste des membres et de désigner un représentant domicilié en Suisse dans un délai de 18 mois. Les associations existantes qui remplissent les conditions de l'art. 61, al. 1, ch. 3, P-CC disposeront également d'un délai de 18 mois pour s'inscrire au registre du commerce, tenir une liste des membres et désigner un représentant en Suisse.

105

Art. 718, 814 et 898 CO

5320

FF 2019

5.3

Code des obligations

Art. 941a, al. 1 et 3 Selon le droit actuel, seules les carences d'une association relatives à l'organe de révision autorisent le préposé au registre du commerce à en appeler au juge pour qu'il prenne les mesures nécessaires. Le projet propose de modifier cette disposition pour garantir une mise en oeuvre effective du nouvel art. 69, al. 2, P-CC qui oblige les associations inscrites au registre du commerce à avoir un représentant domicilié en Suisse. Les associations tenues de s'inscrire au registre du commerce seront désormais soumises à un régime analogue à celui des autres personnes morales.

L'art. 941a, al. 1, P-CO habilite le préposé au registre du commerce à saisir le juge pour toute carence dans l'organisation impérativement prescrite par la loi (par exemple si, après sommation, l'association n'a pas désigné de représentant en Suisse) et pas uniquement pour celles qui concernent l'organe de révision. Comme l'organisation impérativement prescrite par la loi d'une association selon l'art. 941a, al. 1, P-CO couvre également les prescriptions impératives concernant l'organe de révision, l'art. 941a, al. 3, CO est abrogé.

5.4

Code pénal

Art. 327

Inobservation des obligations applicables aux associations

Afin d'assurer la mise en oeuvre effective des nouvelles dispositions sur la transparence des associations, le projet prévoit une nouvelle disposition pénale qui punit d'une amende le manquement aux obligations de tenir une liste des membres et de désigner un représentant en Suisse. Quant au manquement intentionnel à l'obligation de requérir l'inscription d'une association, il tombe sous le coup de l'art. 153 CP. En effet, cette disposition, qui vise à protéger la fiabilité des informations contenues dans le registre du commerce et la confiance du public, réprime notamment le fait de taire un fait devant être inscrit. Sont ainsi couverts tant les cas où l'auteur requiert une inscription incomplète que ceux où il ne requiert pas une inscription obligatoire.

L'omission par négligence est quant à elle punie par l'art. 943 CO106.

Le projet de loi fédérale sur la mise en oeuvre des recommandations du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales prévoit d'ajouter deux nouveaux articles au CP (art. 327 et 327a). En cas d'adoption de ces deux dispositions par le Parlement, une coordination sera nécessaire avec le présent projet le moment venu. L'art. 327 P-CP du présent projet deviendrait alors l'art. 327b P-CP.

106

FF 1991 II 933 1006

5321

FF 2019

5.5

Loi sur le contrôle des métaux précieux

Chapitre IV Commerce des produits de la fonte et des matières pour la fonte Art. 31a

Achat par métier de matières pour la fonte

Al. 1 Cette disposition crée un mécanisme de contrôle pour l'achat par métier de métaux précieux usagés. Dans la LCMP, ces métaux entrent dans la définition des matières pour la fonte au sens de l'art. 1, al. 3, let. b et c, LCMP. En font notamment partie les (vieux) bijoux ainsi que les déchets de fabrication destinés à être éliminés, mais contenant des métaux précieux susceptibles d'être récupérés. Par contre, les métaux précieux provenant de l'extraction des matières premières ou de l'affinage au sens de l'art. 1, al. 3, let. a, LCMP ne sont pas concernés.

L'achat de produits de la fonte au sens de l'art. 1, al. 2, LCMP n'est pas non plus concerné par cette disposition. Les métaux précieux bancaires sont considérés comme des produits de la fonte et ne relèvent donc pas de la présente disposition. En outre, le commerce de métaux précieux bancaires est déjà régi par la LBA. Les produits semi-ouvrés (par ex. lingots de travail) qui sont destinés à une transformation ultérieure ne sont pas concernés non plus. Ces derniers ne sont en effet pas considérés comme des matières pour la fonte au sens de la LCMP.

Les acheteurs sont soumis à une obligation générale de diligence et de documentation portant sur l'origine de la marchandise achetée. L'acheteur doit obtenir des informations sur la personne dont provient la marchandise et sur la provenance de la marchandise elle-même. Il doit pouvoir documenter les informations obtenues afin qu'il soit possible de vérifier si la marchandise provient, le cas échéant, d'une infraction et si les obligations de diligence ont été respectées.

Al. 2 et 3 Le contrôle des acheteurs à titre professionnel et la vérification du respect de leurs obligations de diligence et de documentation se font par le biais d'une obligation d'enregistrement ou d'autorisation qui garantit le recensement exhaustif des acheteurs à titre professionnel. Les personnes qui achètent des matières pour la fonte à titre professionnel et sont inscrites au registre du commerce suisse doivent simplement se faire enregistrer auprès du bureau central. En revanche, celles qui achètent des matières pour la fonte à titre professionnel sans être inscrites au registre du commerce suisse ont besoin d'une patente d'acheteur délivrée par le bureau central.

Cette prescription vise surtout à recenser les personnes
n'ayant pas de siège ou de domicile en Suisse qui veulent par exemple attirer l'attention sur des manifestations d'achat par le biais de petites annonces.

En combinant l'obligation d'enregistrement et l'autorisation, il est possible d'obtenir un recensement et un contrôle exhaustifs des acheteurs à titre professionnel.

La patente d'acheteur pour les personnes non inscrites au registre du commerce suisse n'est octroyée que si le demandeur offre des garanties d'activité commerciale 5322

FF 2019

irréprochable. Il faut entendre par là par exemple les indications sur les antécédents, les inscriptions au casier judiciaire, la situation financière, etc.

Al. 4 Les dispositions de l'art. 26 LCMP relatives à la fabrication des produits de la fonte s'appliquent par analogie à l'octroi, au renouvellement et au retrait de la patente d'acheteur. Celle-ci est délivrée pour une durée de quatre ans et peut être renouvelée. L'octroi et le retrait de la patente sont publiés dans la Feuille officielle suisse du commerce.

Al. 5 Le Conseil fédéral définira plus précisément dans l'OCMP l'achat par métier. Le caractère professionnel de l'achat doit s'appuyer sur la définition légale de l'art. 3 LEFin. Selon cette disposition, le caractère professionnel est établi lorsqu'il existe une activité économique indépendante exercée en vue d'obtenir un revenu régulier.

Peu importe à cet égard qu'il s'agisse d'une activité principale ou d'une activité accessoire. Pour déterminer le caractère professionnel, il convient notamment de tenir compte des risques que représente ce genre d'achats dans le contexte du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme.

Le Conseil fédéral réglera également les modalités des obligations de diligence et de documentation à respecter. La norme minimale à cet égard est qu'un acheteur ne peut accepter des matières pour la fonte que de personnes capables de prouver la licéité de leur acquisition. Il conviendra également de vérifier l'identité du client à l'aide d'un document probant tel que passeport ou carte d'identité. Par ailleurs, le vendeur devra fournir des indications sur l'origine des matières pour la fonte. Les personnes qui achètent des matières pour la fonte à titre professionnel sont censées pouvoir apporter à tout moment la preuve du respect des obligations de diligence imposées (obligation de documentation).

Al. 6 L'art. 31a ne s'applique pas aux titulaires d'une patente de fondeur selon l'art. 24 LCMP. Ceux-ci sont en effet déjà soumis à de vastes obligations de diligence et de documentation résultant de la LCMP et de l'OCMP. Ils sont en outre réputés être des intermédiaires financiers au sens de la LBA lorsqu'ils négocient à titre professionnel des métaux précieux bancaires, de sorte qu'ils sont déjà soumis à des obligations de diligence et de documentation similaires.
Art. 34, al. 1, 1re phrase La délégation concernant l'édiction de dispositions d'exécution relatives à la procédure d'octroi d'une patente de fondeur est étendue à la patente d'acheteur.

Art. 36

b. Attributions

L'al. 1 est complété par une mention de la LBA. Ce complément crée, dans la LCMP, la base légale de la nouvelle tâche de surveillance LBA des essayeurs du

5323

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commerce et des sociétés de groupe visés à l'art. 42bis LCMP attribuée au bureau central.

Pour plus de clarté, les tâches du bureau central énumérées à l'al. 2 sont subdivisées en lettres. La liste n'est pas exhaustive. Selon les let. c et d, le bureau central est compétent non seulement pour l'octroi des patentes de fondeur, mais désormais aussi, en vertu de l'art. 31a, al. 2 et 3, pour l'octroi des patentes d'acheteur et la tenue du registre des personnes qui font le métier d'acheter des matières pour la fonte. En outre, selon la let. e, le bureau central est désormais responsable de la surveillance de l'achat par métier de matières pour la fonte au sens de l'art. 31a.

L'al. 3 crée la base légale formelle qui manquait jusque-là pour la perception d'émoluments pour l'activité de surveillance par le bureau central du commerce des métaux précieux et des ouvrages en métaux précieux selon l'al. 1. Cela inclut en particulier toutes les activités d'autorisation et d'enregistrement et autres activités de surveillance et de contrôle prévues par la LCMP. La fixation des émoluments devra être réglée par le Conseil fédéral en application des principes généraux applicables à la perception d'émoluments, étant entendu que les coûts de cette réglementation devront être supportés en grande partie par la branche économique. La réglementation se fonde sur l'art. 46a, al. 2 à 4, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA)107.

Dans la mesure où l'activité d'autorisation et de surveillance dans le domaine de l'achat par métier de matières pour la fonte selon l'art. 31a et des essayeurs du commerce et sociétés de groupe selon l'art. 42ter n'est pas couverte par les émoluments, le bureau central perçoit une taxe de surveillance. Le but de cette réglementation est de faire financer entièrement les coûts de ces deux domaines de surveillance par les assujettis, comme c'est également le cas dans le domaine des marchés financiers108.

En ce qui concerne la surveillance de l'achat par métier de matières pour la fonte, une solution aisément applicable est prévue pour fixer la taxe correspondante. Il serait en effet disproportionné de collecter auprès de tous les assujettis des données sur le chiffre d'affaires ou d'autres indicateurs pour fixer différentes taxes individuelles. C'est
pourquoi la taxe de surveillance sera prélevée sous forme de montant forfaitaire pour une période de quatre ans. Les quatre ans correspondent à la période pour laquelle est octroyée la patente selon l'art. 26 LCMP.

Le total du bilan et le produit brut sont déterminants pour le calcul de la taxe de surveillance pour les activités selon l'art. 42ter (essayeurs du commerce et sociétés de groupe), qui sera prélevée chaque année.

Le Conseil fédéral règle les modalités des émoluments et de la taxe de surveillance.

S'agissant de la taxe de surveillance relative aux essayeurs du commerce et aux sociétés de groupe, il s'appuiera en grande partie sur les réglementations applicables à la FINMA.

107 108

RS 172.010 Cf. art. 15 LFINMA; FF 2006 2741 2780

5324

FF 2019

Art. 41, 3e phrase La disposition existante pour les patentes de fondeur concernant l'autorisation professionnelle pour les essayeurs du commerce est étendue aux patentes d'acheteur.

Mais comme, en règle générale, les essayeurs du commerce sont inscrits au registre du commerce suisse et n'ont donc pas besoin d'une patente d'acheteur, cette disposition ne s'appliquera que dans des cas exceptionnels.

Art. 42bis

c. Autorisation supplémentaire en matière de négoce de métaux précieux bancaires

Al. 1 Les essayeurs du commerce visés aux art. 41 et 42 LCMP sont considérés comme des intermédiaires financiers au sens de la LBA s'ils font le commerce de métaux précieux bancaires à titre professionnel pour leur propre compte ou pour celui de tiers (art. 2, al. 3, let. c, LBA en relation avec l'art. 5, al. 1, let. a et e, OBA, ou art. 2, let. abis dans la version de la LBA après l'entrée en vigueur de la LEFin). Ils disposent d'une patente de fondeur et d'une autorisation pour le titrage des produits de la fonte délivrées par le bureau central. Afin de disposer du droit de faire le commerce à titre professionnel des métaux précieux bancaires, ils ont en outre besoin, pour cette activité soumise à la LBA, d'une autorisation selon la LCMP. Avec l'adoption de la LEFin, les essayeurs du commerce sont soumis, selon l'art. 42bis LCMP en relation avec l'art. 61 LEFin, à une surveillance courante exercée par le futur organisme de surveillance selon l'art. 43a LFINMA, avec la FINMA en tant qu'autorité d'autorisation et de surveillance au sens de la LBA (art. 12, let. a, LBA). Le bureau central est désormais la nouvelle autorité d'autorisation et de surveillance visée à l'art. 12, let. bter, P-LBA.

À des fins de clarté, la surveillance est désormais réglée dans une nouvelle disposition séparée (art. 42ter P-LCMP).

À noter que, comme prévu dans le cadre du régime de la LEFin, l'essayeur du commerce doit obtenir une autorisation, qu'il effectue lui-même le négoce de métaux précieux bancaires ou qu'il l'effectue par l'intermédiaire d'une société de groupe.

Al. 2 En ce qui concerne les conditions d'autorisation pour les essayeurs du commerce, l'art. 42bis, al. 3, LCMP créé par la LEFin renvoie par analogie aux dispositions applicables aux gestionnaires de fortune prévues dans la LEFin. Parmi ces conditions figurent notamment des exigences prudentielles relatives au capital minimal.

Ces exigences sont nouvelles par rapport aux conditions d'autorisation prévues aujourd'hui à l'art. 14, al. 2, LBA pour les essayeurs du commerce ayant le statut d'IFDS. Elles s'expliquent par la raison suivante: sous le régime actuel, la FINMA n'exerce aucune surveillance prudentielle sur les IFDS. Suite à la suppression de ce statut, la FINMA ne surveillera plus que des intermédiaires financiers soumis également à une
surveillance prudentielle. Les essayeurs du commerce devraient donc être également soumis à des exigences prudentielles pour pouvoir être placés sous la surveillance de la FINMA, en association avec un organisme de surveillance.

5325

FF 2019

Contrairement par exemple aux banques, aux placements collectifs, aux assurances ou encore aux gestionnaires de fortune et aux trustees, les essayeurs du commerce qui font le commerce de métaux précieux bancaires ne gardent en principe pas en dépôt des valeurs patrimoniales appartenant à leurs clients. Ils ne font ainsi pas courir de risque particulier à leur clientèle en cas de faillite. De ce fait, des exigences prudentielles ne semblent pas strictement nécessaires. C'est pourquoi il est prévu, plutôt que de se référer aux conditions d'autorisation selon la LEFin, de reprendre les conditions prévues aujourd'hui dans la LBA pour les IFDS en les inscrivant expressément dans la LCMP (let. a à d). Il y a également lieu d'ajouter une condition concernant les personnes détenant une participation qualifiée dans l'essayeur du commerce (let. e). Il est important de s'assurer que ces dernières jouissent également d'une bonne réputation et garantissent que leur influence ne soit pas exercée au détriment d'une gestion saine et prudente de l'établissement. On retrouve cette exigence à l'art. 14, al. 2, LBA, modifié par la LEFin, relatif aux conditions d'affiliation des intermédiaires financiers au sens de l'art. 2, al. 3, LBA à un OAR.

Cette exigence va également dans le sens de la recommandation 26 du GAFI selon laquelle les autorités compétentes devraient prendre les mesures législatives ou réglementaires nécessaires pour empêcher les criminels ou leurs complices de détenir ou de devenir les bénéficiaires effectifs d'une participation significative ou de contrôle d'une institution financière, ou d'y occuper un poste de direction.

Mis à part cette dernière condition et le fait que l'autorité en charge de délivrer l'autorisation n'est plus la même, il n'y a pas de changement par rapport au régime d'autorisation actuel fondé sur l'art. 14 LBA.

Bien que des exigences prudentielles ne soient pas prévues, il est utile de savoir que les dix essayeurs du commerce et la société de groupe faisant le commerce de métaux précieux bancaires revêtent aujourd'hui tous la forme de sociétés anonymes. Ils sont donc déjà soumis, en vertu de l'art. 621 CO, à l'exigence d'un capital minimum de 100 000 francs, comme le prévoit la LEFin pour les gestionnaires de fortune, et partant, pour les essayeurs du commerce.

Al. 3 À
l'instar de ce qui est prévu par le régime de la LEFin (art. 42bis, al. 2, LCMP), si une société de groupe négocie à titre professionnel les métaux précieux bancaires d'un essayeur du commerce, sans être elle-même essayeur du commerce, elle doit également requérir une autorisation du bureau central. L'autorisation est octroyée aux mêmes conditions que celles applicables à l'essayeur du commerce. La société en question sera en outre également soumise à la surveillance du bureau central en vertu de l'art. 42ter.

Art. 42ter

d. Surveillance en matière de négoce des métaux précieux bancaires

Les titulaires d'autorisation visés à l'art. 42bis, par quoi il faut entendre aussi bien les essayeurs du commerce que les sociétés qui négocient les métaux précieux d'un essayeur du commerce faisant partie du même groupe, sont désormais soumis à la surveillance du bureau central conformément à l'art. 12, let. bter, P-LBA (al. 1).

5326

FF 2019

L'attribution de la surveillance LBA au bureau central permet d'obtenir des effets de synergie avec la surveillance dans les domaines de l'autorisation d'exercer la profession d'essayeur du commerce et de la patente de fondeur. Certains éléments que le bureau central examine déjà lors des contrôles dans ce cadre relèvent aussi de la surveillance LBA. Mais cette concentration des activités de surveillance permet également d'alléger substantiellement les contraintes imposées aux essayeurs du commerce.

Le transfert de compétence pour l'autorisation et la surveillance au bureau central doit préserver la qualité et l'intensité de la surveillance. Il est donc logique que le bureau central dispose des mêmes instruments de surveillance que la FINMA. Les dispositions déterminantes du chap. 3 LFINMA relatives aux instruments de surveillance sont donc applicables par analogie (al. 3). Il s'agit des dispositions suivantes: art. 24a, al. 2 et 3, 25, al. 1, 29 à 33, 34, 36 à 38, 39, al. 1, 40, 41, 42 et 42a.

L'entraide administrative avec des autorités suisses et étrangères est également couverte par ce biais.

Les modalités de la surveillance et des audits doivent être réglées, conformément à l'al. 4, dans une ordonnance de l'AFD. Celle-ci doit notamment définir l'aménagement des instruments de surveillance à appliquer découlant du chap. 3 LFINMA. Il convient en outre de tenir compte du fait que le bureau central exécutera lui-même les audits des essayeurs du commerce, le cas échéant en recourant à des professionnels qualifiés si cela s'avère nécessaire d'un point de vue matériel (al. 2). Par conséquent, le bureau central, selon les besoins, fera réaliser les audits par des chargés d'audit au sens de l'art. 24a LFINMA, c'est-à-dire des personnes qualifiées et indépendantes. Il n'existe cependant plus de place pour un modèle dual prévoyant une société d'audit externe mandatée par les personnes surveillées, comme c'est aujourd'hui le cas pour les intermédiaires financiers directement soumis à la surveillance de la FINMA (IFDS). Il est d'ailleurs dans l'intérêt des essayeurs du commerce qu'un «organe» de moins intervienne dans les audits, dans un effort de simplification et afin d'éviter des doublons. A noter que les chargés d'audits ou les chargés d'enquête (cf. art. 36 LFINMA applicable par analogie) auxquels
le bureau fait appel dans le cadre de la surveillance sont soumis au secret de fonction.

Pour garantir la qualité et l'intensité de la surveillance, l'ordonnance s'appuiera sur les règles de la FINMA. La compétence d'édicter l'ordonnance incombe à l'AFD (al. 4).

Art. 48

e. Commerce illicite et non-respect des obligations de diligence, de documentation et d'enregistrement

La disposition pénale existante concernant les opérations effectuées sans patente de fondeur ou autorisation d'exercer la profession d'essayeur du commerce est expressément étendue aux opérations effectuées sans patente d'acheteur. Mais désormais, le même fait constitutif d'infraction inclut aussi le non-respect des obligations de diligence et de documentation et de l'obligation de s'enregistrer conformément à l'art. 31a, al. 1 et 2. Les infractions sont punies d'une amende, qui pourra atteindre 10 000 francs au plus conformément à l'art. 106, al. 1, CP.

5327

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Cette disposition n'est pas applicable aux opérations effectuées sans autorisation selon l'art. 42bis LCMP. Dans ce cas, c'est l'art. 56a P-LCMP qui s'applique.

7. Inobservations dans le négoce de métaux précieux bancaires Art. 56a à 56i Selon la version de l'art. 42bis LCMP créée par la LEFin, les essayeurs du commerce qui négocient des métaux précieux bancaires à titre professionnel eux-mêmes ou par le biais d'une société de groupe ont besoin d'une autorisation de la FINMA et sont soumis à sa surveillance selon les dispositions de la LFINMA (voir commentaire de l'art. 42bis). Il en va de même pour les sociétés de groupe qui négocient à titre professionnel les métaux précieux bancaires d'un essayeur du commerce faisant partie du même groupe de sociétés. En conséquence, les dispositions pénales de la LFINMA (chap. 4, art. 44 à 52) s'appliquent aux infractions commises par les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe en matière d'autorisation et de surveillance.

Malgré le transfert de compétence pour l'autorisation et la surveillance de la FINMA au bureau central, comme prévu aux art. 42bis et 42ter P-LCMP, les mêmes dispositions pénales que celles inscrites dans la LFINMA doivent continuer de s'appliquer aux infractions dans le domaine des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe actifs dans le négoce de métaux précieux bancaires. Pour des questions de sécurité juridique, et notamment au regard du principe de précision de la base légale applicable en droit pénal, les dispositions pénales déterminantes de la LFINMA sont reprises dans la LCMP, le cas échéant avec les adaptations nécessaires, dans un nouveau ch. 7 du chap. VII relatif aux dispositions pénales (art. 56a à 56i). Il est ainsi garanti que tous les acteurs opérant sous une forme ou sous une autre dans le secteur financier et soumis à une surveillance correspondante seront passibles des mêmes sanctions pénales en cas d'infractions dans le cadre de cette surveillance et seront jugés selon les mêmes critères et sur la base de la même procédure. L'autorité de poursuite et de jugement est le DFF, en vertu de l'art. 56g, al. 1, P-LCMP, qui est le pendant de l'art. 50, al. 1, LFINMA. La jurisprudence relative aux dispositions déterminantes de la LFINMA continuera elle aussi de s'appliquer dans le contexte des essayeurs du commerce
et des sociétés de groupe.

A titre d'exemple d'adaptations nécessaires des dispositions pénales, on peut mentionner le remplacement de «FINMA» par «bureau central». Il y a également lieu de tenir compte du fait que les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe ne seront plus tenus de faire appel à une société d'audit.

Pour un commentaire détaillé de ces dispositions pénales, il est renvoyé au message du Conseil fédéral du 1er février 2006 concernant la loi fédérale sur l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers109.

109

FF 2006 2741 2799 ss

5328

FF 2019

Dispositions finales de la modification du 15 juin 2018 Selon la disposition finale de la LCMP créée par la LEFin, les essayeurs du commerce tenus d'obtenir une autorisation de la FINMA dans le cadre du régime de la LEFin auraient dû s'annoncer à la FINMA dans les six mois suivant l'entrée en vigueur de la LEFin et demander dans les deux ans l'autorisation d'exercer à la FINMA. Afin de permettre un passage direct du régime actuel de la LBA (autorisation de la FINMA selon l'art. 14 LBA ou affiliation à un OAR) au régime prévu par le présent projet, les dispositions finales de la LCMP créées par la LEFin doivent être modifiées rétroactivement.

Étant donné que le statut d'IFDS sera abrogé avec l'entrée en vigueur de la LEFin, les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe ex-IFDS se retrouveront sans surveillance à l'entrée en vigueur de la LEFin. Ils ne seront plus non plus tenus de charger une société d'audit agréée de procéder à un audit conformément à l'art. 24 LFINMA, l'art. 19a LBA étant lui aussi abrogé à l'entrée en vigueur de la LEFin.

Plutôt que de s'affilier à un OAR ou demander une autorisation à la FINMA sous le régime de la LEFin dans l'attente de l'entrée en vigueur du nouveau régime de surveillance par le bureau central, les essayeurs du commerce concernés ont proposé de continuer de faire appel à une société d'audit agréée. Ainsi un minimum de surveillance restera assuré pendant la période de transition. Cette obligation est expressément inscrite à l'al. 1 des dispositions finales révisées. Dans l'attente de l'entrée en vigueur rétroactive de cette obligation, les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe concernés se sont engagés à respecter leur future obligation dès l'entrée en vigueur de la LEFin. Les rapports d'audit LBA pertinents devront être remis plus tard au bureau central.

L'al. 2 concerne les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe qui, à l'entrée en vigueur de la LEFin, seront affiliés à un OAR. Il prévoit que ces derniers restent soumis à la surveillance de l'OAR. En d'autres termes, ils ne doivent pas non plus s'annoncer à la FINMA dans les six mois suivant l'entrée en vigueur de la LEFin ni demander d'autorisation dans les deux ans. Ils devront attendre l'entrée en vigueur du présent projet, puis demander l'autorisation au bureau central dans le
délai prévu.

Avec cette modification rétroactive de la disposition finale de la modification du 15 juin 2018, le régime particulier d'autorisation et de surveillance des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe prévu dans le cadre du régime de la LEFin n'entrera de facto jamais en vigueur.

Dispositions finales de la modification du ...

Pendant les douze premiers mois suivant l'entrée en vigueur de l'art. 31a LCMP, aucune autorisation ni aucun enregistrement ne sera nécessaire pour l'achat par métier de matières pour la fonte (al. 1). Si des personnes exercent leur activité sans patente ou sans enregistrement après cette période transitoire, l'art. 48 LCMP leur sera applicable.

Les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe qui doivent obtenir une autorisation du bureau central en vertu de l'art. 42bis devront faire leur demande dans les trois mois suivant l'entrée en vigueur du présent projet (al. 2). Ils devront remettre au bureau central les rapports d'audit LBA des dernières années, afin que ce dernier 5329

FF 2019

ait une base sur laquelle il pourra décider de l'octroi ou non de l'autorisation. Il appartiendra au bureau central de déterminer combien de rapports d'audit seront nécessaires à l'examen de la demande d'autorisation.

On entend ici aussi bien les rapports d'audit d'une société d'audit agréée selon l'art. 9a LSR, que ceux d'un OAR, de la FINMA ou encore d'un chargé d'audit au sens de l'art. 24a LFINMA.

Les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe concernés pourront poursuivre leur activité jusqu'à ce que le bureau central ait statué sur leur demande.

Dans le cadre de l'examen des demandes, le bureau central s'assurera que les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe ex-IFDS ont, déjà à compter de l'entrée en vigueur de la LEFin, respecté l'obligation de faire appel à une société d'audit agréée prévue à l'al. 1 des dispositions finales de la modification du 15 juin 2018, telles que révisées par le présent projet. En cas de violation de cette obligation, le bureau central pourra dénoncer le cas aux autorités pénales sur la base de l'art. 38, al. 3, LFINMA, applicable par analogie en vertu de l'art. 42ter, al. 3, LCMP.

L'essayeur du commerce ou la société de groupe ex-IFDS qui ne respecte pas l'obligation de désigner une société d'audit agréée pendant la période transitoire exerce en effet de facto illégalement l'activité de négoce de métaux précieux bancaires (art. 56a P-LCMP, qui est le pendant de l'art. 44 LFINMA).

5.6

Loi sur les marchés financiers

Titre suivant l'art. 43

Titre 3

Surveillance des gestionnaires de fortune et des trustees

Le titre 3 de la LFINMA est modifié afin de supprimer la référence aux essayeurs du commerce, qui seront, en vertu de l'art. 42ter P-LCMP, soumis à un régime de surveillance différent de celui applicable aux gestionnaires de fortune et aux trustees.

Art. 43a, al. 1, et 43b, al. 1 La référence aux essayeurs du commerce au sens de l'art. 42bis LCMP est supprimée de ces deux dispositions pour la même raison que celle mentionnée ci-dessus.

6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération

6.1.1

Création d'un mécanisme de contrôle pour l'achat de métaux précieux usagés

Le bureau central, s'appuyant sur des estimations de la branche fournies dans le cadre de la consultation sur la révision de la LBA, présume qu'une centaine de demandes de patentes d'acheteur seront effectuées et devront être périodiquement 5330

FF 2019

réévaluées. En outre, le bureau central devra contrôler le respect des dispositions de la LCMP auprès des titulaires de patentes et des participants au marché inscrits au registre du commerce, ce qui entraînera une charge supplémentaire. Pour l'heure, on estime que le traitement des demandes de patentes et les mesures de contrôle et d'exécution nécessiteront deux postes supplémentaires. Le traitement des demandes d'autorisation est soumis à un émolument. En outre, une taxe de surveillance forfaitaire sera perçue auprès des assujettis pour couvrir les coûts des activités de surveillance qui ne sont pas couverts par des émoluments, c'est-à-dire les contrôles portant sur le respect des obligations de diligence et de documentation. C'est pourquoi la Confédération devrait encaisser des recettes supplémentaires. Le besoin de ressources effectif dépendra du nombre d'acheteurs concernés et ne sera évalué plus précisément que dans le cadre de la suite des travaux au niveau des ordonnances.

6.1.2

Bureau central du contrôle des métaux précieux en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA

Étant donné que la réglementation de la LBA existe déjà sous une forme similaire, il est possible de reprendre la grille quantitative existante, ce qui correspond aujourd'hui à onze autorisations. Après certains efforts initiaux, incluant surtout l'acqusition des connaissances nécessaires, le travail requis pour l'octroi des autorisations et la surveillance s'alignera sur celui du régime actuel d'autorisation et de surveillance de la FINMA. Cela correspond à un poste supplémentaire.

Les autorisations, la surveillance et l'activité de contrôle pour les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe sont soumises à des émoluments. Ceux-ci doivent couvrir intégralement les frais initiaux nécessaires et le besoin d'un poste supplémentaire au bureau central. Une taxe de surveillance sera perçue pour les dépenses du bureau central dans ce domaine de tâches qui ne sont pas couvertes par des émoluments. Le montant de ces émoluments et de la taxe de surveillance doit encore être fixé au niveau de l'ordonnance, mais devrait être dans la mesure du possible équivalent aux tarifs précédents de la FINMA110.

6.2

Conséquences pour les cantons

Le non-respect des nouvelles prescriptions applicables aux associations peut conduire le juge à prononcer la dissolution d'une association qui ne s'y conformerait pas, ce qui pourrait augmenter les procédures de faillite et engendrer ainsi une augmentation des coûts des offices cantonaux de poursuite et faillite. Ces coûts supplémentaires ne peuvent pas être quantifiés a priori.

110

Voir art. 32 ss de l'ordonnance du 15 octobre 2008 sur les émoluments et les taxes de la FINMA; RS 956.122.

5331

FF 2019

6.3

Conséquences économiques

6.3.1

Attrait de la place économique

Avec le présent projet de loi, la Suisse se donne la possibilité de combler l'essentiel des lacunes législatives constatées par le GAFI et, partant, de mettre un terme au processus de suivi plus intensif. Le renforcement fondé sur les risques du dispositif suisse de lutte contre le blanchiment d'argent qui en résultera permettra en outre de préserver l'attrait de la place financière. La garantie de l'intégrité des intermédiaires financiers et de la place financière suisse en général est dans l'intérêt non seulement de cette dernière, mais de tout le pays. Elle contribue en outre à réduire la probabilité de contre-mesures économiques et accroît la fiabilité des conditions-cadres régnantes.

6.3.2

Conséquences sur la croissance économique et la concurrence

Étant donné que le présent projet concerne un grand nombre d'intermédiaires financiers et en particulier d'intermédiaires non financiers, il est difficile d'estimer quels en seront les effets cumulés sur la croissance économique globale et sur la concurrence. Dans l'ensemble, la croissance économique globale et la concurrence ne devraient pas être compromises. En raison d'obligations supplémentaires, il faut s'attendre à une certaine augmentation de la charge administrative des entreprises, surtout dans le domaine des conseillers et dans celui de l'achat de métaux précieux usagés.

6.3.3

Conséquences des diverses mesures sur les acteurs

6.3.3.1

Création d'obligations au titre de la loi sur le blanchiment d'argent pour les conseillers

Pour renforcer le dispositif suisse de lutte contre le blanchiment d'argent conformément aux recommandations du GAFI, la fourniture de certaines prestations en lien avec la création, la gestion ou l'administration de sociétés ou de trusts déclenchera des obligations au titre de la LBA. Ces prestations de conseil sont fournies typiquement par des notaires, des avocats, des fiduciaires ou des conseillers fiscaux, mais peuvent aussi l'être par d'autres groupes professionnels. Ne relevant toutefois pas des activités des intermédiaires financiers au sens de la loi, elles ne sont actuellement pas soumises aux dispositions de la LBA111. C'est aussi pour cette raison qu'il n'est guère possible d'estimer de manière fiable le nombre d'acteurs opérant dans ce domaine. Ce qu'il est en revanche possible d'estimer approximativement ­ sur la base de données empiriques tirées des audits en matière de surveillance visant à 111

Sont réputées intermédiaires financiers, outre les banques et les assurances, toutes les personnes qui, à titre professionnel, acceptent, gardent en dépôt ou aident à placer ou à transférer des valeurs patrimoniales appartenant à des tiers.

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contrôler le respect de leurs obligations par les gestionnaires de fortune ­, ce sont les charges qui seront occasionnées par le contrôle des dossiers pour lesquels les conseillers devront remplir des obligations au titre de la LBA, car les audits des activités des intermédiaires non financiers comportent des points de contrôle analogues à ceux des audits des intermédiaires financiers. Il convient en outre de mentionner ici que les avocats ou notaires qui sont actifs comme intermédiaires financiers doivent déjà aujourd'hui charger une entreprise de révision d'effectuer un audit des dossiers déterminants au niveau du blanchiment d'argent. Dans un tel cas, l'audit devra désormais être étendu aux dossiers relatifs à l'activité de conseiller.

En 2016, l'audit d'un intermédiaire financier directement soumis à la FINMA (IFDS) nécessitait, en moyenne, environ 39 heures de travail et coûtait 8500 francs à l'entreprise concernée112. Les fourchettes effectives des heures de travail nécessaires (de 25 à 180 heures) et des coûts (de 6000 à 40 000 francs) sont toutefois très larges.

Outre de la taille de l'entreprise, les coûts de surveillance dépendent en particulier du degré de complexité des dossiers. Ainsi, les dossiers d'entreprises opérant dans les affaires grand public en Suisse et dont la plupart des dossiers clients sont simples n'occasionnent généralement que des charges de surveillance relativement peu élevées. Si l'on prend toutefois deux entreprises comptant le même nombre de clients, mais dont l'une gère des dossiers plus complexes, les coûts de surveillance peuvent, selon les spécialistes, être de deux à quatre fois supérieurs pour l'entreprise présentant les cas plus complexes que pour l'autre, car l'examen des dossiers est d'autant plus long. Les coûts de surveillance sont en outre plus élevés dans les domaines d'activité fortement automatisés (par ex. celui des systèmes de paiement) ­ où il s'agit de contrôler des systèmes informatiques complets ­ que dans les cas où les contrôles sont essentiellement manuels.

Contrairement à un intermédiaire financier qui, en raison de son activité, doit typiquement respecter des obligations au titre de la LBA pour tous ses clients, les obligations des conseillers sont uniquement en rapport avec les opérations citées et donc seulement avec une partie des
prestations globalement fournies par eux. Les conséquences économiques des nouvelles obligations pour les conseillers dépendront donc largement de la fréquence à laquelle ils fourniront des prestations en lien avec des sociétés ou des trusts. Ceux qui n'opèrent pas dans ce domaine n'auront pas de coûts supplémentaires à supporter, car ils ne feront jamais l'objet d'audits. Si un conseiller est impliqué uniquement à titre accessoire dans une opération en lien avec des sociétés ou des trusts, s'il gère par exemple dix dossiers clients beaucoup plus complexes que ceux d'un IFDS ordinaire, et si trois de ces dossiers sont audités lors de contrôles par échantillonnage, les coûts qu'il aura à supporter chaque année pourraient se situer entre 5000 et 6000 francs. Pour les spécialistes fournissant ces prestations à titre d'activité principale et gérant par conséquent des dossiers clients plus nombreux ou plus complexes, les coûts pourraient être beaucoup plus élevés.

112

Source: rapport annuel 2016 de la FINMA (p. 8 et 97) Coûts de l'audit dans le domaine «Marchés» (IFDS): 1,7 million de francs / 199 IFDS = 8542 francs par IFDS.

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6.3.3.2

Abaissement du seuil pour le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses

En abaissant de 100 000 à 15 000 francs le seuil pour les paiements en espèces de métaux précieux et de pierres précieuses soumis à des obligations de diligence, la Suisse donne suite à une recommandation explicite du rapport d'évaluation mutuelle du GAFI. Étant donné que les produits finis, comme les bijoux, n'entrent pas dans le champ d'application de la nouvelle règle, le commerce de détail ne sera pas concerné. Quant aux négociants en métaux précieux et en pierres précieuses soumis à la nouvelle disposition, ils ne supporteront quasiment pas de frais supplémentaires, car ils ont aujourd'hui déjà presque entièrement renoncé aux paiements en espèces. On ne dispose d'aucune donnée sur le nombre de personnes concernées.

6.3.3.3

Banques et autres intermédiaires financiers

L'inscription dans la loi d'une obligation de vérification matérielle de l'identité de l'ayant droit économique et d'une obligation d'actualisation des informations sur les clients, toutes deux fondées sur les risques, permettra de combler les lacunes législatives relevées par le GAFI. Soulignons que l'approche fondée sur les risques est conforme aux principes adoptés par le Conseil fédéral en matière de politique des marchés financiers113.

Vérification de l'identité de l'ayant droit économique La vérification de l'identité de l'ayant droit économique n'est pas une nouvelle obligation à proprement parler. Il s'agit simplement d'inscrire dans la loi une pratique existante dictée également par la jurisprudence. Les charges que la vérification occasionnera dépendront des risques que présente le cocontractant. Les vérifications ne devraient toutefois entraîner quasiment aucuns frais matériels supplémentaires, ni aucune détérioration du rapport coûts/revenus, en particulier pour ce qui est des activités exercées en Suisse.

Actualisation des données des clients Les intermédiaires financiers actualisent déjà régulièrement les informations sur leurs clients. Les banques profitent d'ailleurs souvent des entretiens convenus à cet effet pour informer les clients sur certains produits ou faire de la publicité pour des prestations supplémentaires. Toutefois, dans les relations avec les petits clients, avec lesquels les contacts personnels sont généralement moins étroits, ces occasions d'actualiser les informations font défaut. Le présent projet comble cette lacune, tout en garantissant aux intermédiaires financiers, grâce à l'approche fondée sur les risques, la plus grande flexibilité possible en ce qui concerne aussi bien la périodicité que l'étendue et le type d'informations à collecter. Cela pourrait néanmoins occasionner aux établissements concernés des coûts uniques ou périodiques au titre de la 113

Cf. rapport du Conseil fédéral d'octobre 2016 «Politique en matière de marchés financiers pour une place financière suisse compétitive» www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-64199.html.

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mise en conformité avec les règles en vigueur (compliance). Il n'est actuellement pas possible d'estimer l'ordre de grandeur de ces coûts.

6.3.3.4

Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme

Conformément au projet de loi, les associations doivent se faire inscrire au registre du commerce si elles collectent ou distribuent directement ou indirectement, à titre principal, des fonds à l'étranger à des fins caritatives, religieuses, culturelles, éducatives ou sociales. L'inscription au registre du commerce implique l'obligation de tenir une comptabilité et de présenter des comptes conformément aux règles du CO (art. 957, al. 1, CO). De plus, les associations concernées devront tenir une liste de leurs membres et s'assurer de pouvoir être représentées par une personne domiciliée en Suisse. L'inscription au registre du commerce leur occasionnera certains frais uniques. À l'émolument de 400 francs dû à l'office du registre du commerce 114 pourront s'ajouter des coûts minimes de légalisation de signatures. Les légalisations peuvent être opérées directement par l'office du registre du commerce 115, ce qui entraîne des frais moins élevés que si elles le sont par un officier public 116. À cela s'ajoutent les frais relatifs aux modifications des faits inscrits, en particulier en ce qui concerne les membres de la direction. Ces frais se situent dans une fourchette allant de 20 à 100 francs selon l'ordonnance sur les émoluments en matière de registre du commerce. Le nombre de modifications varie fortement d'une association à l'autre. Il n'est donc pas possible d'estimer les coûts globaux liés à ces modifications. En ce qui concerne la tenue d'une liste des membres et la représentation par une personne domiciliée en Suisse, il ne devrait pas en résulter de coûts supplémentaires directs. Par contre, l'obligation de tenir une comptabilité et de présenter les comptes selon les règles du CO entraînera des coûts supplémentaires pour les associations qui ne tenaient jusqu'alors qu'une comptabilité des recettes et des dépenses ainsi que du patrimoine. Il n'est pas possible d'estimer le nombre d'associations concernées.

6.3.3.5

Création d'un mécanisme de contrôle pour l'achat de métaux précieux usagés

Les acheteurs professionnels de métaux précieux usagés encourent des frais plus élevés (en temps et en argent) en raison des obligations supplémentaires de diligence et de documentation. S'ils ne sont pas déjà inscrits au registre du commerce suisse, ils devront s'acquitter tous les quatre ans d'émoluments pour l'octroi de la patente d'acheteur. Le montant de ces émoluments n'est pas encore déterminé et sera fixé 114

Art. 1, al. 1, de l'ordonnance du 3 décembre 1954 sur les émoluments en matière de registre du commerce; RS 221.411.1 115 Art. 21 ORC 116 Conformément à l'art. 9 de l'ordonnance sur les émoluments en matière de registre du commerce, l'émolument perçu pour la légalisation d'une signature s'élève à 10 francs.

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par voie d'ordonnance. Les acheteurs étrangers de métaux précieux usagés pourront échapper à l'émolument relatif à la patente exigible tous les quatre ans en fondant une seule fois une succursale et en la faisant inscrire au registre du commerce. Pour l'inscription d'une succursale, l'émolument s'élève, selon l'ordonnance sur les émoluments en matière de registre du commerce, à 50 % du montant prévu pour un siège principal, mais au maximum à 2500 francs. Le bureau central, en s'appuyant sur des estimations de la branche fournies dans le cadre de la consultation sur la révision de la LBA, suppose qu'une centaine de demandes d'autorisation seront déposées et devront être périodiquement réévaluées. Cependant, la grande majorité des entreprises concernées est sans doute déjà être inscrite au registre du commerce et n'aura donc pas à demander de patente liée à des coûts. Pour ces acheteurs, l'inscription au registre du bureau central à créer se fera gratuitement.

À l'avenir, les acteurs opérant sur le marché des métaux précieux usagés à titre professionnel pourront compter sur le fait que les obligations de diligence de la LCMP seront respectées par tous, ce qui pourra faciliter le commerce de ces métaux en Suisse (en particulier entre les titulaires d'une patente de fondeur et les négociants domiciliés en Suisse). Les manquements pourront soit être dénoncés, soit être découverts à la faveur des contrôles par échantillonnage du respect des obligations de diligence. Seront également concernées les personnes qui achètent des métaux précieux usagés à des particuliers à titre professionnel. Les mesures proposées dans le domaine des métaux précieux usagés ne sont pas directement en rapport avec l'évaluation mutuelle du GAFI et aboutissent à établir les mêmes conditions de concurrence avec les 25 titulaires actuels de patentes de fondeur.

Les titulaires de la patente d'acheteur pourront remplir les obligations de diligence prévues à moindres frais et sans grande bureaucratie supplémentaire. Lors de tout achat de métaux précieux usagés, ils devront établir l'identité du vendeur de manière probante et documenter la marchandise acquise en la photographiant et éventuellement en la pesant. Étant donné que l'on trouve sur le marché plusieurs progiciels offrant des possibilités suffisantes en la matière, les
investissements informatiques nécessaires ne seront pas très importants. Chaque dossier pourra ensuite être conservé sous forme électronique et il ne sera pas nécessaire de gérer des dossiers physiques. Les obligations de diligence devraient s'avérer efficaces, car on peut présumer que le seul fait d'exiger une copie d'une pièce d'identité aura un certain effet dissuasif sur les personnes ayant des intentions malhonnêtes.

Pour les acteurs professionnels qui ne sont pas inscrits au registre du commerce, des émoluments seront perçus tous les quatre ans pour le renouvellement de la patente.

Le montant de ces émoluments pour la patente d'acheteur, qui sera fixé dans l'ordonnance du 17 août 2005 sur les taxes du contrôle des métaux précieux117, revêt une importance centrale pour l'évaluation des effets possibles sur le marché. Le montant exact des émoluments pour la patente d'acheteur n'est pas encore connu.

Pour le déterminer, il faudra tenir également compte des émoluments perçus pour la patente de fondeur. Actuellement, ceux-ci sont trop bas (420 francs pour quatre ans).

L'AFD envisage cependant de demander leur augmentation lors de la fixation des émoluments pour la patente d'acheteur. Les émoluments seront fixés en tenant 117

RS 941.319

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compte du principe de l'équivalence et du principe de la couverture des coûts (art. 46a, al. 3, LOGA). La détermination des tarifs des émoluments devra également tenir compte de l'intérêt public ainsi que de l'intérêt de la personne assujettie ou de l'utilité que celle-ci retire de la décision ou de la prestation (art. 5, al. 2, de l'ordonnance générale du 8 septembre 2004 sur les émoluments118). Lors de la fixation du montant des émoluments pour la patente d'acheteur, il faudra aussi tenir compte du fait que son champ d'application est plus restreint (la patente de fondeur vaut également patente d'acheteur, mais la réciproque n'est pas vraie). La patente d'acheteur devrait donc être moins chère que la patente de fondeur. Des émoluments plus élevés pourraient créer des barrières à l'entrée sur le marché, ce qui aurait un impact négatif sur l'ensemble de l'économie, et limiter l'intensité de la concurrence entre les acteurs du marché, entraînant éventuellement une augmentation des prix pour les clients des titulaires d'une patente de fondeur ou des acheteurs.

Afin de couvrir les coûts de la surveillance courante du respect des dispositions de la LCMP, tous les acheteurs, inscrits ou non au registre du commerce, seront assujettis en outre au paiement d'une taxe de surveillance forfaitaire qui devra elle aussi être fixée au niveau de l'ordonnance. Cette taxe est destinée à compenser les frais du bureau central qui sont liés à ces activités de surveillance et ne sont pas couverts par les émoluments.

6.3.3.6

Bureau central du contrôle des métaux précieux en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA

L'autorisation et la surveillance par une autorité publique est une condition-cadre importante pour les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe, car leurs clients sur le marché mondial jugent très souvent cette surveillance plus efficace que les contrôles privés. C'est pourquoi onze entreprises seront désormais surveillées (non plus par la FINMA119 ou par un OAR, mais) par le bureau central. Le regroupement auprès d'une seule autorité de la surveillance portant sur les obligations de diligence LBA et les dispositions de la LCMP permet aux personnes assujetties d'obtenir des effets de synergie et d'économiser des ressources financières et en personnel, puisqu'elles ne seront désormais plus soumises qu'à un seul contrôle, certes plus approfondi. Cela pourra entraîner au final une diminution des coûts de la réglementation pour les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe.

Les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe seront assujettis au paiement d'émoluments annuels dont le montant, lui non plus, n'est pas encore connu. Pour les frais du bureau central qui ne sont pas couverts par les émoluments, une taxe de surveillance sera perçue en fonction de l'importance économique des titulaires d'autorisation. À noter que les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe supportent déjà aujourd'hui des coûts pour la surveillance par la FINMA ou l'affiliation à un OAR, auxquels s'ajoutent, le cas échéant, les coûts d'une société d'audit. La surveillance par le bureau central ne devrait pas leur coûter plus cher 118 119

RS 172.041.1 L'abolition du statut d'IFDS dans le cadre de la LEFin a supprimé la possibilité de continuer à appliquer l'ancien régime de surveillance.

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qu'aujourd'hui. Au contraire, le fait qu'il n'y ait plus d'intervention d'une société d'audit devrait même abaisser la facture totale pour la grande majorité des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe concernés.

6.3.3.7

Sociétés d'audit

L'extension du cercle des acteurs assujettis à la LBA élargit globalement le marché pour les sociétés d'audit. En revanche, il sera renoncé à l'avenir au recours à des sociétés d'audit dans le domaine des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe, sauf pendant la période transitoire. Les chiffres d'affaires réalisés jusque-là disparaîtront.

6.4

Questions liées à la mise en oeuvre

Le bureau central est compétent pour l'exécution des mesures prévues dans le domaine de l'achat de métaux précieux (usagés) et pour le contrôle du respect des obligations de diligence LBA chez les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe. Il prendra les mesures préparatoires nécessaires suffisamment tôt avant l'entrée en vigueur pour que les procédures d'octroi de patente soient aussi courtes que possible après l'expiration de la période transitoire d'un an pour les acheteurs professionnels de matières pour la fonte. Des processus d'autorisation longs peuvent être assortis de coûts d'opportunité élevés pour les acheteurs concernés et doivent donc être évités. Pour les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe concernés, la réglementation proposée aboutit à les mettre en contact avec une seule autorité. Dans ce domaine, le bureau central devra accumuler de l'expertise pour pouvoir, dès le début, garantir une surveillance de qualité similaire et néanmoins aussi efficace que possible.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

Les dispositions proposées reposent sur les mêmes bases constitutionnelles que celles sur lesquelles se fondent déjà les lois révisées.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

La Suisse participe activement aux efforts déployés par la communauté internationale pour lutter contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Elle est notamment membre fondateur du GAFI, dont les recommandations constituent les normes internationales en la matière. Bien que les recommandations du GAFI n'aient pas la même valeur contraignante qu'une convention internationale ratifiée 5338

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par un État, tout État qui les approuve prend l'engagement politique de les mettre en oeuvre dans son ordre juridique. À cet égard, le GAFI reconnaît que les États sont dotés de systèmes juridiques et financiers divers, et qu'en conséquence, tous ne peuvent pas prendre des mesures identiques afin de réaliser l'objectif commun. Les recommandations établissent par conséquent des normes minimales qui requièrent l'adoption par les pays de mesures de mise en oeuvre précises, en fonction de leurs circonstances particulières et de leurs cadres constitutionnels. Les recommandations du GAFI ont également été mises en oeuvre par des États non-membres du GAFI et ont été reconnues par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale comme les normes internationales en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

La Suisse a, comme les autres États membres du GAFI, approuvé les recommandations révisées. Elle s'est ainsi engagée à les mettre en oeuvre en droit interne. Suite à l'évaluation de 2016, des mesures supplémentaires sont nécessaires pour améliorer la conformité de la législation suisse avec les normes du GAFI et son efficacité. Tel est l'objet du présent projet.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Le projet fixe des règles de droit. Or l'art. 164, al. 1, Cst. prévoit que toutes les dispositions qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale.

7.4

Frein aux dépenses

Le projet ne prévoit pas de dépenses soumises au frein aux dépenses (art. 159, al. 3, let. b, Cst.).

7.5

Conformité à la loi sur les subventions

Le projet ne prévoit ni aides financières ni subventions.

7.6

Délégation de compétences législatives

Abaissement du seuil pour le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses L'art. 8a, al. 5, 2e phrase, P-LBA prévoit que le Conseil fédéral décrira les métaux précieux et les pierres précieuses visés à l'al. 4bis. La description des termes correspondants figurera dans l'OBA.

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Création d'obligations au titre de la loi sur le blanchiment d'argent pour les conseillers L'art. 8b, al. 3, P-LBA prévoit que le Conseil fédéral précisera les obligations de diligence des conseillers et en réglera les modalités d'application. Ces précisions et modalités seront arrêtées dans l'OBA, comme c'est déjà le cas des dispositions correspondantes applicables aux négociants.

Amélioration de la transparence des associations présentant un risque accru en matière de financement du terrorisme L'art. 61, al. 2bis, P-CC autorise le Conseil fédéral à édicter les dispositions d'exécution concernant l'inscription obligatoire au registre du commerce. En outre, le Conseil fédéral peut, sur la base de l'art. 61, al. 2ter, P-CC, exempter de l'obligation d'inscription certaines associations visées à l'art. 61, al. 2, ch. 3, P-CC, lorsqu'elles présentent un risque faible d'être exploitées à des fins de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme, en raison notamment du montant des fonds collectés ou distribués, de leur provenance, de leur destination ou de leur affectation.

Achat par métier de métaux précieux usagés L'art. 31a, al. 5, P-LCMP prévoit que le Conseil fédéral définira l'achat par métier de matières pour la fonte. Ce faisant, le Conseil fédéral tiendra notamment compte des risques que représente cette activité en matière de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme. Il réglera en outre les modalités des obligations de diligence et de documentation à respecter. L'art. 34, al. 1, 1re phrase, P-LCMP prévoit que le Conseil fédéral réglera les modalités concernant la procédure à suivre pour l'octroi, le renouvellement et le retrait des patentes d'acheteur, de manière analogue à ce qui est déjà prévu aujourd'hui pour la patente de fondeur. Enfin, le Conseil fédéral réglera les modalités des émoluments et de la taxe de surveillance à percevoir par le bureau central pour son activité de surveillance de l'achat de métaux précieux usagés (art. 36, al. 3, P-LCMP).

Bureau central du contrôle des métaux précieux en tant que nouvelle autorité de surveillance LBA L'art. 3, al. 5, P-LBA prévoit que l'AFD fixe le seuil applicable aux opérations de caisse en lien avec les essayeurs du commerce et les sociétés de groupe selon l'art. 42bis LCMP. En outre, l'AFD doit préciser, en vertu de
l'art. 17 P-LBA, les obligations de diligence définies au chap. 2 LBA pour cette catégorie d'intermédiaires financiers et en régler les modalités d'application.

L'art. 36, al. 3, P-LCMP prévoit que le Conseil fédéral règle les modalités des émoluments et de la taxe de surveillance à percevoir par le bureau central pour sa surveillance des essayeurs du commerce et des sociétés de groupe.

Enfin, l'art. 42ter, al. 4, P-LCMP prévoit que l'AFD règle les modalités de la surveillance et des audits.

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