Cautionnements de navires de haute mer: évaluation de l'avis rendu par le Conseil fédéral le 28 septembre 2018 Rapport succinct des Commissions de gestion des Chambres fédérales du 25 juin 2019

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Rapport 1

Contexte

Fin septembre 2017, suite à la crise des cautionnements de la flotte suisse de haute mer et au vu des conséquences financières considérables de ce dossier pour la Confédération, les Commissions de gestion des Chambres fédérales (CdG) ont décidé d'ouvrir une inspection à ce sujet. Dans le cadre de cette dernière, elles ont examiné la façon dont le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) et le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) avaient assumé leur rôle de surveillance à l'égard, respectivement, de l'Office fédéral pour l'approvisionnement économique du pays (OFAE, DEFR) et de l'Office suisse de la navigation maritime (OSNM, DFAE). Les travaux des CdG ont également porté sur l'information de l'ensemble du Conseil fédéral, sur les enseignements tirés de cette affaire pour les autres cautionnements et pour la gestion des risques de la Confédération ainsi que sur le rôle du Contrôle fédéral des finances (CDF) dans ce dossier.

Dans leur rapport d'inspection publié le 26 juin 20181, les CdG ont présenté leurs conclusions et formulé huit recommandations à l'intention du Conseil fédéral. Celles-ci portaient notamment sur la structure organisationnelle de l'OFAE, les pratiques d'archivage, la gestion des risques et les directives relatives aux cautionnements. Elles soulevaient également diverses questions relatives à la conduite des enquêtes administratives au sein de l'administration fédérale.

Le Conseil fédéral a rendu son avis sur le rapport et les recommandations des CdG le 28 septembre 20182. Le CDF, également invité à prendre position, a transmis son avis aux CdG le 19 septembre 20183. Les CdG, par l'intermédiaire de leur groupe de travail «Cautionnements de la flotte suisse de haute mer»4, ont procédé à une analyse des réponses fournies. Afin de compléter leur appréciation, elles ont adressé fin 2018 une série de questions supplémentaires au Conseil fédéral, à la Chancellerie fédérale (ChF) et à l'Office fédéral de la justice (OFJ). Le groupe de travail a également mené, en février 2019, une série d'auditions avec divers acteurs du dossier (représentants du DEFR et de l'OFAE5).

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Cautionnements de navires de haute mer, rapport des CdG du 26.6.2018 (FF 2018 6235).

Cautionnements de navires de haute mer, avis du Conseil fédéral du 28.9.2018 sur le rapport des CdG du 26.6.2018 (FF 2018 6309).

Lettre du CDF aux CdG du 19.9.2018 (non publiée).

Institué le 4 juillet 2017, le groupe de travail «Cautionnements de la flotte suisse de haute mer» des CdG a été chargé par les commissions de la conduite de l'inspection. Il est composé de la conseillère nationale Yvonne Feri (présidente), des conseillers nationaux Martin Candinas, Thomas de Courten, Michael Töngi (à partir de mars 2018, auparavant: Louis Schelbert) et Erich von Siebenthal, de la conseillère aux Etats Géraldine Savary et des conseillers aux Etats Andrea Caroni, Joachim Eder, Hans Stöckli et Beat Vonlanthen.

M. Werner Meier, délégué à l'approvisionnement économique du pays et directeur de l'OFAE, M. Alfred Flessenkämper, directeur suppléant de l'OFAE, M me Nathalie Goumaz, secrétaire générale du DEFR (dès le 1er janvier 2019) et M. Thomas Baumeler, chef droit et protection des informations, secrétariat général DEFR.

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En novembre 2018 et février 2019, le groupe de travail des CdG s'est également entretenu à deux reprises avec le Procureur général de la Confédération au sujet des procédures pénales en cours dans ce dossier6. Il est ressorti de ces échanges que certains éléments mis à jour par le Ministère public de la Confédération (MPC) dans le cadre de ses travaux, bien que non déterminants sur le plan de la justice pénale, pourraient se révéler pertinents pour les CdG. En respect du principe de séparation des pouvoirs, les commissions attendront les conclusions finales de l'enquête du MPC pour examiner ces aspects et, le cas échéant, compléter leur appréciation.

Se fondant sur les clarifications menées par le groupe de travail, les CdG ont approuvé, lors de leur séance du 25 juin 2019, le présent rapport succinct à l'intention du Conseil fédéral, puis ont pris la décision de le publier. Celui-ci présente les éléments portés à la connaissance des CdG jusqu'à la fin du mois de mars 2019 ainsi que l'appréciation des commissions à ce sujet. Le projet de rapport a été soumis aux autorités concernées dans le cadre d'une consultation de l'administration, afin de corriger d'éventuelles erreurs formelles et matérielles.

Conformément au mandat d'enquête défini en septembre 20177, l'inspection des CdG ne porte pas sur le processus de vente des navires ou sur la situation actuelle des cautionnements dans ce domaine. Ces aspects sont examinés par la Délégation des finances des Chambres fédérales (DélFin), qui mène depuis avril 2018 une inspection à ce sujet8. Le groupe de travail des CdG a coordonné autant que possible ses démarches avec celles de la DélFin; il a notamment continuellement examiné si des éléments portés à sa connaissance pourraient s'avérer utiles aux travaux de la DélFin. Il est toutefois arrivé à la conclusion que l'ensemble des informations pertinentes qu'il avait reçues ­ notamment de la part du MPC, du DEFR et de l'OFAE ­ étaient déjà en possession de cette dernière.

2

Evaluation de l'avis du Conseil fédéral et du CDF

Le présent chapitre présente, pour chacune des recommandations du rapport des CdG de juin 2018, les grandes lignes des avis rendus par le Conseil fédéral et le CDF, les éventuelles clarifications complémentaires réalisées par les CdG ainsi que leur appréciation finale.

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En août 2017, le DEFR a déposé une plainte pénale contre l'ancien chef de l'état-major de l'OFAE, M. Michael Eichmann, et contre l'armateur Hans Grunder. Le MPC n'ayant identifié aucun indice permettant de conclure que ces deux procédures étaient liées, celles-ci ont été traitées séparément. La procédure contre M. Grunder a été transmise au Ministère public du canton de Berne; elle porte sur des accusations de banqueroute frauduleuse et sur des faits de droit économique au niveau cantonal. Le MPC continue de mener la procédure contre l'ancien chef de l'état-major de l'OFAE, qui concerne la façon dont celui-ci a exercé sa fonction.

Les Commissions de gestion ouvrent une inspection sur les cautionnements de la flotte suisse de haute mer, communiqué de presse des CdG du 25.9.2017. Voir également: Cautionnements de navires de haute mer, rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 1.2 (FF 2018 6235 6242).

Navires suisses de haute mer: la Délégation des finances examine le déroulement et la procédure de vente des navires, communiqué de presse de la DélFin du 20.4.2018.

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2.1

Remarques générales du Conseil fédéral

En introduction de son avis du 28 septembre 2018, le Conseil fédéral indique qu'il partage les principales conclusions de l'inspection des CdG relatives à la surveillance. Il reconnaît notamment l'information «insuffisante et peu systématique» fournie par l'OFAE au DEFR concernant les conséquences de la crise de la navigation maritime et les risques liés aux cautionnements des navires de haute mer ainsi que le «comportement passif et insuffisamment critique» du DEFR à l'égard des problèmes signalés par l'OFAE. Il admet en outre que les problèmes liés à la flotte suisse de haute mer n'ont jamais été abordés lors des entretiens de gestion entre le chef du DEFR et la direction de l'OFAE.

Les CdG saluent le fait que le Conseil fédéral reconnaisse les manquements liés à la gestion, par le DEFR et l'OFAE, de la crise des cautionnements, et qu'il partage leurs principales conclusions. Elles constatent par ailleurs avec satisfaction que le Conseil fédéral estime, comme elles, que des mesures sont nécessaires en matière d'exécution et de surveillance des cautionnements de la flotte suisse de haute mer.

Elles relèvent enfin que le Conseil fédéral «prend acte» des critiques qu'elles ont formulées dans leur rapport au sujet de l'attribution, par le DEFR, du mandat d'enquête administrative au CDF, et de la réalisation de cette enquête par ce dernier (cf.

à ce propos chap. 2.4).

Ci-après, les CdG traitent l'avis du Conseil fédéral relatif aux différentes recommandations de leur rapport du 26 juin 2018 et présentent leur appréciation à ce sujet.

Chaque recommandation des CdG est d'abord présentée dans sa formulation initiale, à titre de rappel; sont ensuite présentées les considérations du Conseil fédéral, les informations relatives aux clarifications complémentaires des CdG ainsi que l'appréciation des CdG.

2.2

Recommandation 1: établissement et archivage adéquats des procès-verbaux relatifs aux entretiens de gestion

Les CdG invitent le Conseil fédéral à mettre en place les moyens appropriés pour que les procès-verbaux relatifs aux entretiens de gestion soient établis et archivés de manière adéquate et que les prescriptions existantes relatives à la gestion des documents et à l'archivage soient respectées dans la pratique.

Les CdG saluent le fait que le Conseil fédéral partage le point de vue qu'elles ont exprimé dans leur rapport, considérant que «les évaluations et les processus de prise de décisions doivent être transparents et retraçables» et que «les dossiers importants [...] doivent être discutés lors des entretiens de gestion [...] et les résultats consignés sous une forme appropriée». Le Conseil fédéral souligne toutefois que, de son point de vue, «il n'est pas nécessaire de consigner tous les échanges entre le chef de département et les directeurs d'office». De l'avis des CdG également, une certaine proportionnalité est nécessaire. La possibilité de pouvoir vérifier ultérieurement cer6624

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tains échanges doit être adaptée à l'objet et à l'importance de ceux-ci. Les commissions considèrent qu'un archivage adéquat est particulièrement important pour les appréciations et décisions de portée majeure. A ce propos, elles recommandent de privilégier la prudence et considèrent qu'en cas de doute, il vaut mieux que les échanges soient consignés de manière élargie.

Sur le fond, la question se pose de savoir selon quels critères le Conseil fédéral évalue l'importance des dossiers à archiver: dans son avis, il fait mention de l'importance financière ou politique9. Les CdG soulignent toutefois que d'autres aspects peuvent également s'avérer déterminants dans le caractère stratégique d'un dossier, justifiant son archivage (impact en termes de gestion, de personnel, de risques, etc.).

Elles rappellent à cet effet que les critères, processus et responsabilités en matière de détermination de la valeur archivistique des documents sont consignés dans la loi et l'ordonnance sur l'archivage10, dans les instructions du Département fédéral de l'intérieur (DFI) concernant la gestion des documents 11 ainsi que dans le concept général d'évaluation des Archives fédérales12.

Dans leur rapport, les CdG soulevaient également la question de la forme utilisée par le DEFR pour les procès-verbaux relatifs aux entretiens de gestion. Selon le Conseil fédéral, davantage que le format retenu, c'est avant tout le contenu qui est déterminant pour rendre compte de manière transparente des entretiens de gestion. Cette logique fait certes sens, selon les CdG. Le Conseil fédéral ne précise toutefois pas ce qu'il entend, sur le fond, par un contenu adéquat. A ce sujet, les commissions soulignent qu'un document plus formalisé améliore généralement aussi la clarté et la structure du contenu.

Concernant le cas concret des documents liés aux cautionnements des navires de haute mer, le Conseil fédéral reconnaît que ceux-ci ne satisfaisaient pas aux exigences en matière d'archivage. Il indique que «le DEFR a depuis pris les mesures nécessaires»: les entretiens de gestion avec la direction de l'OFAE sont désormais consignés dans des notes de dossier plutôt que dans des courriels. De son côté, le département a indiqué aux CdG que des précisions avaient été apportées à la forme et au contenu des procès-verbaux ainsi qu'à leur
établissement et archivage 13. Le DEFR indique avoir mis en place la «pratique consistant à consigner et à archiver dans le système de gestion des affaires tous les éléments et décisions importants arrêtés lors des entretiens qu'il mène avec les unités administratives»14. Les CdG saluent ces améliorations. Elles partent du principe que, désormais, les points essentiels en termes de gestion seront intégrés dans les documents pertinents. Afin de 9

10 11 12 13 14

Dans la version française de son avis, le Conseil fédéral utilise le terme «importance financière ou économique», alors que dans la version allemande, il est question de «finanziell oder politisch [...] relevante Geschäfte». Les CdG partent du principe que la version allemande du document fait foi.

Loi fédérale du 25.6.1998 sur l'archivage (LAr; RS 152.1), Ordonnance du 8.9.1999 relative à la loi fédérale sur l'archivage (Ordonnance sur l'archivage, OLAr; RS 152.11).

Instructions du Département fédéral de l'intérieur du 13.7.1999 concernant la gestion des documents dans l'administration fédérale (FF 1999 4988).

Archives fédérales: Gesamtkonzept für die Bewertung im Bundesarchiv, 2010 (uniquement en allemand).

Lettre du DEFR au groupe de travail des CdG du 8.3.2019 (non publiée).

Lettre du DEFR au groupe de travail des CdG du 8.3.2019 (non publiée).

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pouvoir vérifier dans les faits l'adéquation de la nouvelle pratique, les CdG ont invité le Conseil fédéral, fin 2018, à leur faire parvenir les trois dernières notes de dossier relatives aux entretiens de gestion sur la flotte de haute mer. Ces documents15 ont confirmé que la pratique du DEFR en matière de procès-verbaux s'était en effet nettement améliorée.

La recommandation 1 invitait également le Conseil fédéral à s'assurer que les prescriptions existantes en matière d'archivage soient respectées dans la pratique. De manière générale, le Conseil fédéral estime que les bases légales sont suffisantes et indique que les départements «mettront en oeuvre cette recommandation s'ils ne le font pas déjà». Les CdG ont demandé au Conseil fédéral de plus amples précisions à ce sujet et si une unité administrative bénéficiait d'une vue d'ensemble à ce propos.

Celui-ci leur a indiqué16 que, de son point de vue, il incombait aux chefs de départements de veiller à l'exécution et au respect des prescriptions en la matière, en faisant usage de leur droit d'instruction et de contrôle, et qu'il n'y avait «pas lieu de prévoir des règlementations ou des contrôles supplémentaires». Le Conseil fédéral souligne que «la responsabilité propre en matière de gestion adéquate des dossiers s'applique à toutes les unités administratives». Il considère en outre que «la délégation de cette tâche à une unité administrative spécifique serait laborieuse et ne permettrait pas d'atteindre l'objectif visé.» Les CdG partent du principe que les chefs de département assumeront à l'avenir la responsabilité qui leur revient en ce qui concerne la recommandation 1. Elles insistent sur l'importance d'une mise en oeuvre rapide et généralisée de cette recommandation, si tel n'est pas déjà le cas. Elles se réserveront le droit, lors du contrôle de suivi de la présente inspection, d'examiner la pratique en matière de procès-verbaux des entretiens de gestion au sein d'autres départements fédéraux.

2.3

Recommandation 2: examen de la structure organisationnelle de l'OFAE

Les CdG invitent le Conseil fédéral à examiner la structure organisationnelle de l'OFAE au niveau de la direction, à évaluer en particulier la possibilité de créer une fonction de directeur d'office à part entière et à leur faire part de ses conclusions. La structure de milice au niveau des secteurs spécialisés doit être maintenue. Les avantages de la fonction de délégué sont à expliciter. Dans ce cadre, la répartition des responsabilités au sein de l'office et entre la direction de l'office et le département est à clarifier. Le Conseil fédéral est par ailleurs prié d'examiner, dans ce contexte, l'opportunité d'une intégration de l'OFAE dans un autre office.

Dans son avis, le Conseil fédéral indique qu'il considère que cette recommandation a déjà été mise en oeuvre par le biais de plusieurs mesures et qu'il n'est pas néces15 16

Procès-verbaux des entretiens de gestion entre le DEFR et l'OFAE du 8.10.2018, du 19.11.2018 et du 17.12.2018.

Lettre du Conseil fédéral aux CdG du 16.1.2019 (non publiée).

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saire de procéder à un nouvel examen de l'organisation de l'Approvisionnement économique du pays (AEP) et de la structure organisationnelle de l'OFAE.

Après avoir pris connaissance de l'avis du Conseil fédéral, le groupe de travail des CdG a approfondi différents aspects de cette recommandation, dans le cadre d'échanges de lettres et d'une audition avec les représentants du département et de l'office. Les CdG présentent ci-après les principales constatations et conclusions issues de ces clarifications.

2.3.1

Structure organisationnelle générale de l'AEP et direction de l'OFAE

Selon l'organisation actuelle, la direction de l'OFAE est répartie entre deux personnes: le délégué à l'AEP (taux d'occupation de 40 %), issu de l'économie privée, qui exerce la fonction de directeur de l'office à titre accessoire, et le directeur suppléant, issu de l'administration fédérale (taux d'occupation de 100 %). Dans leur recommandation 2, les CdG avaient prié le Conseil fédéral d'examiner la pertinence de cette structure organisationnelle. Les commissions précisent qu'elles n'ont jamais remis en cause la légitimité d'une structure de milice au niveau des secteurs spécialisés de l'OFAE. Elles ont avant tout invité le Conseil fédéral à réfléchir à une amélioration de l'organisation existante au niveau de la direction, en présentant les avantages de la fonction de délégué et en évaluant plus particulièrement la possibilité de créer une fonction de directeur d'office à part entière, plutôt qu'à titre accessoire.

Elles ont également invité le Conseil fédéral à examiner l'opportunité d'intégrer l'OFAE dans un autre office.

Du point de vue des CdG, le pourcentage exact attribué au directeur de l'OFAE revêt moins d'importance qu'une réflexion de fond concernant la place de cette fonction dans la structure globale de l'office. Les CdG estiment que le Conseil fédéral n'a répondu que partiellement à cette demande, en se focalisant sur le taux de pourcentage du délégué et en réaffirmant son attachement au système de milice.

Dans son avis de septembre 2018, le Conseil fédéral présente de manière sommaire les avantages de la fonction de délégué oeuvrant à temps partiel et issu du secteur privé («définir et mettre en oeuvre des mesures efficaces, peu coûteuses et réactives en cas de crise, portées par le secteur privé») et laisse sans réponse la demande des CdG visant à créer une fonction de directeur à part entière. Il indique que le taux d'occupation du délégué a été augmenté de 25 à 40 % après les événements de 2015 liés aux cautionnements et qu'il n'y a «pas lieu de procéder à un nouvel examen de la structure organisationnelle». Or, dans leur rapport de juin 2018 déjà, les CdG doutaient précisément qu'un poste à 40 % soit suffisant pour accomplir une telle tâche.

Les CdG ont donc une nouvelle fois invité le Conseil fédéral, fin 2018, à prendre position sur l'opportunité de créer une fonction de
directeur à part entière. Dans sa réponse complémentaire17, le Conseil fédéral estime que le taux d'occupation actuel de la direction de l'OFAE, à savoir 1,4 équivalent plein temps (EPT) réparti entre deux personnes, «est approprié pour diriger l'organisation composée d'environ 17

Lettre du Conseil fédéral aux CdG du 16.1.2019 (non publiée).

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250 agents de milice (cadres) et de 40 collaborateurs de l'OFAE». Il reconnaît que l'ancien taux de 25 % attribué au délégué était «proche du seuil critique pour assurer la direction d'une organisation hétérogène à l'interface entre les milieux économiques et l'administration». Il considère toutefois que «la création d'un poste à plein temps pour diriger l'office s'écarterait du principe selon lequel l'AEP est dirigé à titre accessoire par un délégué issu des milieux économiques», qu'une telle création «irait à l'encontre de la pratique établie et éprouvée» et que, «dans une certaine mesure, elle serait également contraire au principe de la primauté de l'économie privée». Le Conseil fédéral rappelle également que le législateur s'est prononcé en faveur d'une direction de l'AEP à titre accessoire en été 2016 (art. 58 de la loi sur l'approvisionnement économique du pays [LAP]18).

Le délégué à l'AEP a clairement déclaré au groupe de travail19 qu'il considérait le taux d'occupation de 40 % comme adéquat et que ce taux était adapté à la charge de travail effective. La nouvelle secrétaire générale du DEFR a affirmé de son côté qu'il était nécessaire, pour que le système de milice fasse sens, que le délégué puisse consacrer une partie de son temps de travail à ses activités au sein de l'économie privée20. Elle a souligné que le délégué, indépendamment de son taux d'engagement, «porte l'entière responsabilité de ce qui se passe dans son office»21.

En ce qui concerne la demande des CdG visant à procéder à un examen approfondi de la structure de l'OFAE, le Conseil fédéral considère dans son avis de septembre 2018 que «l'organisation de l'AEP est unique» et qu'elle «permet de mettre en oeuvre des mesures efficaces, peu coûteuses et réactives en cas de crise». Du point de vue du Conseil fédéral, un réexamen «générerait des incertitudes, aurait une influence négative sur d'importants projets en cours et compromettrait la participation du secteur privé». Peu satisfaites par les arguments avancés, les CdG ont invité le Conseil fédéral, fin 2018, à compléter sa prise de position à ce sujet.

Dans sa réponse complémentaire22, le Conseil fédéral souligne l'importance de l'économie pour la prévention et la gestion des crises. Il estime que «les liens étroits entre l'OFAE et les nombreux agents de milice de l'AEP
[issus du secteur privé] nécessitent des rapports stables» et que les réorganisations fréquentes fragilisent cette collaboration éprouvée. Il en conclut qu'il n'existe «aucune raison objective de déstabiliser le fonctionnement du système de milice en menant de nouveaux examens».

De son côté, le délégué à l'AEP a souligné face au groupe de travail23 que la structure actuelle (conduite de l'office à titre accessoire par un délégué) était correcte et nécessaire pour intégrer le personnel de milice; il n'a toutefois pas abordé plus 18 19 20 21 22 23

Loi fédérale du 17.6.2016 sur l'approvisionnement économique du pays (Loi sur l'approvisionnement du pays, LAP; SR 531).

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

Lettre du Conseil fédéral aux CdG du 16.1.2019 (non publiée) Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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précisément les avantages et les inconvénients de cette organisation. Interrogé sur la pertinence de confier la direction de l'office à un représentant de l'administration engagé à plein temps, le délégué a indiqué24 qu'une telle modification remettrait en cause la logique actuelle de fonctionnement de l'AEP. De son point de vue, il est important que l'économie privée soit impliquée dans la conduite stratégique de l'AEP, afin de pouvoir prendre les mesures nécessaires dans le cas d'une crise d'approvisionnement.

Du point de vue des CdG, l'argumentation du Conseil fédéral et de l'OFAE manque de profondeur. La réalisation d'un examen relatif à la structure de direction de l'AEP ne déboucherait pas forcément sur une réforme fondamentale. Par ailleurs, le fait que d'importants projets soient en cours est une réalité à laquelle l'ensemble des offices fédéraux sont confrontés et ne constitue en ce sens pas un argument déterminant. Enfin, le but d'une éventuelle réorganisation étant d'améliorer le fonctionnement du système d'AEP, il n'y a aucune raison de penser que celle-ci mettrait en danger l'implication des milieux économiques, au contraire. Les CdG précisent encore une fois qu'elles n'ont jamais remis en cause le principe d'une structure de milice pour l'AEP.

Les CdG prennent note des arguments présentés par le Conseil fédéral et de sa volonté de ne pas procéder à une réflexion approfondie relative à la direction de l'AEP. Elles prennent également acte de ce que le Conseil fédéral, à l'instar des directions du DEFR et de l'office, considère que la structure actuelle de l'OFAE est adéquate et nécessaire pour garantir l'implication des milieux économiques; elles remarquent toutefois que le Conseil fédéral n'a pas évoqué plus précisément les avantages et les inconvénients de cette structure. Dans la mesure où le Parlement a confirmé en 2016 la décision politique de doter l'AEP d'une direction à titre accessoire, elles renoncent à approfondir davantage cette question dans l'immédiat. Elles invitent toutefois le Conseil fédéral à examiner régulièrement l'adéquation de la structure organisationnelle de l'AEP et se repencheront sur ce point dans le cadre du contrôle de suivi de l'inspection.

2.3.2

Descriptifs de postes du délégué à l'AEP et du directeur suppléant de l'OFAE

Afin de compléter leur appréciation concernant la direction de l'AEP, les CdG ont invité le Conseil fédéral à leur transmettre les descriptifs de postes actuels du délégué à l'AEP et du directeur suppléant de l'OFAE. En février 2019, elles ont discuté de ceux-ci avec les personnes concernées.

Les CdG regrettent que le descriptif de poste du délégué à l'AEP ne détaille pas ­ contrairement à celui du directeur suppléant de l'OFAE ­ les taux de pourcentage alloués aux différentes tâches du poste. Le Conseil fédéral précise qu'il n'est pas possible de déterminer ces taux dans la mesure où ceux-ci «varient en permanence et reflètent les besoins de l'organisation et les défis actuels en matière d'approvisionne24

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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ment économique du pays». Les CdG estiment néanmoins qu'une estimation pourrait être effectuée sur la base des expériences de ces dernières années.

Les CdG ont par ailleurs relevé que les descriptifs de postes actuels dataient respectivement d'août 2015 (délégué à l'AEP) et d'août 2004 (directeur suppléant de l'OFAE), et qu'ils n'avaient donc pas été révisés suite à la nouvelle répartition des tâches au sein de la direction de l'OFAE (nouveau règlement du 1 er juillet 2018, cf.

ci-après, chap. 2.3.3). Le DEFR a indiqué aux CdG que les cahiers des charges avaient été vérifiés et qu'aucune nécessité de les adapter n'avait été identifiée. Il a toutefois précisé que les cahiers des charges seraient évidemment adaptés si cette situation devait changer25. De son côté, le délégué à l'AEP a indiqué que, de son point de vue, les cahiers des charges reflétaient de manière cohérente la répartition des tâches définie dans le cadre du nouveau règlement26.

De l'avis des CdG, il conviendrait pourtant de réviser les descriptifs de postes aujourd'hui déjà. D'une part, ceux-ci ne sont pas cohérents avec le règlement de l'OFAE sur au moins un point: selon le descriptif du poste du délégué, celui-ci assume la direction de l'OFAE, c'est-à-dire la responsabilité de toutes les tâches de l'office et de toutes les questions relatives au personnel; or, conformément au nouveau règlement, certaines de ces compétences sont désormais du ressort du directeur suppléant (cf. ci-après, chap. 2.3.3).

D'autre part, les commissions ont relevé que les descriptifs de postes pour ces deux fonctions ne faisaient pas mention, au chapitre des compétences requises, de la gestion des risques. Au vu de la récente crise liée aux cautionnements des navires de haute mer, les CdG considèrent que de telles compétences sont indispensables pour les membres de la direction de l'OFAE. Interrogée à ce sujet, la nouvelle secrétaire générale a confirmé27 que la responsabilité générale en matière de gestion de risques de l'OFAE revenait bien à la direction de l'office, et plus particulièrement au directeur suppléant. Selon elle, cette compétence fait partie de la responsabilité générale de conduite opérationnelle du directeur suppléant, qui figure dans son descriptif de poste28. La nouvelle secrétaire générale a indiqué que le DEFR porterait une
attention particulière, dans le cadre de ses entretiens de gestion, aux compétences nécessaires en matière de gestion des risques et qu'il examinerait à ce propos l'opportunité d'une adaptation des descriptifs de postes29.

Les CdG prennent note des arguments fournis. Elles considèrent malgré tout que la formulation actuelle des descriptifs de poste de la direction de l'OFAE demeure très vague en ce qui concerne les compétences en matière de gestion des risques et estiment que cet aspect mériterait d'y être mentionné de manière plus explicite. Elles saluent la volonté du DEFR de porter une attention particulière à ce sujet à l'avenir.

25 26 27 28

29

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

E-Mail de la Secrétaire générale du DEFR au groupe de travail des CdG du 1.3.2019.

Descriptif de poste du directeur suppléant de l'OFAE, p. 2, chiffre 1: «Verantwortlich für die dem Amt übertragenen Pflichten, Leitung des Amtes nach den Vorgaben des/der DWL, verantwortlich für die finanziellen und personellen Belange, [...] Leitung und Koordination der täglichen Geschäfte [...]» (uniquement disponible en allemand).

E-Mail de la Secrétaire générale du DEFR au groupe de travail des CdG du 1.3.2019.

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2.3.3

Nouveau règlement de l'AEP et répartition des tâches au sein de l'AEP

Dans leur recommandation 2, les CdG ont également invité le Conseil fédéral à clarifier la répartition des responsabilités au sein de la direction de l'OFAE et les relations entre celle-ci et le département. Dans son avis, le Conseil fédéral affirme que «les tâches et responsabilités du délégué, de son directeur suppléant et des domaines AEP sont clairement fixées dans le règlement de l'office». Les CdG ont donc prié le Conseil fédéral de leur faire parvenir de plus amples informations à ce propos et de leur remettre un exemplaire de la version actuelle de ce règlement ainsi que les versions précédentes du document30.

Selon les explications complémentaires fournies par le Conseil fédéral31, la première version du règlement de l'office, datant de 2010, portait uniquement sur l'organisation dirigeant l'OFAE et «réglait, sous une forme rudimentaire, les processus de travail et les compétences de la direction de l'OFAE». La seconde version du règlement, publiée en 2016, se limitait elle aussi à l'OFAE et ne prévoyait «aucune disposition concernant l'organisation de milice de l'AEP». Elle précisait toutefois que la direction de l'OFAE était composée du délégué à l'AEP et du directeur suppléant de l'OFAE, et que la conduite opérationnelle de l'OFAE incombait au directeur suppléant. Le document prévoyait pour la première fois des dispositions concernant la gestion de crise, le processus de planification et le processus stratégique ainsi que les droits de signature.

La version du 1er juillet 2018 du règlement de l'AEP est la première à offrir un cadre réglementaire général applicable à l'AEP. Le document clarifie la répartition des tâches entre, d'une part, le comité directeur de l'AEP, constitué d'agents de milice issus du secteur privé et présidé par le délégué à l'AEP en tant que chef de l'ensemble de l'organisation, et, d'autre part, le comité directeur de l'OFAE, présidé par le directeur suppléant de l'office. Le Conseil fédéral indique par ailleurs que «le comité directeur [de l'OFAE] s'est vu confier de nouvelles compétences décisionnelles», concernant notamment les affaires opérationnelles et les processus de l'administration fédérale. La direction de l'OFAE est désormais également «habilitée à émettre des recommandations à l'intention du délégué à l'AEP» concernant certains dossiers de l'AEP32. Face
au groupe de travail des CdG, le délégué a indiqué que cette nouvelle répartition des compétences avait permis une nette amélioration de l'efficacité au sein de l'office33.

Les CdG déplorent vivement le fait qu'il ait fallu attendre 2018 pour que les tâches et le fonctionnement de l'AEP et de l'OFAE soient consignées de manière complète et transparente dans un règlement. Les versions préalables du document, datant de

30

31 32 33

Règlement de l'Approvisionnement économique du pays au 1.7.2018; Geschäftsordnung des Bundesamtes für Landesversorgung, versions du 1.3.2016 et du 1.3.2010 (uniquement en allemand).

Lettre du Conseil fédéral aux CdG du 16.1.2019 (non publiée).

Lettre du Conseil fédéral aux CdG du 16.1.2019 (non publiée).

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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2010 et de 2016, étaient nettement insuffisantes du point de vue de la gestion; les CdG relèvent par ailleurs qu'elles n'étaient disponibles qu'en allemand.

L'absence de répartition claire des compétences et des tâches respectives jusqu'en 2018 explique également, de l'avis des CdG, les divergences apparues entre les différents acteurs lors de la crise liée aux cautionnements de la flotte suisse de haute mer, qui ont fait obstacle au traitement adéquat de cette crise. Les commissions considèrent qu'une délimitation claire des compétences au sein des instances dirigeantes est indispensable, en particulier dans des organisations présentant une structure particulière comme l'AEP et l'OFAE.

Au vu de ce qui précède, les CdG saluent l'entrée en vigueur du nouveau règlement de 2018, qui constitue un progrès sur le plan organisationnel. La répartition des tâches entre l'AEP et l'OFAE ainsi que les rôles des différents acteurs y sont clairement définis. Au-delà de la question de fond portant sur la pertinence de la structure actuelle de l'AEP (cf. chap. 2.3.1), les CdG estiment que ce nouveau règlement clarifie le fonctionnement organisationnel de l'AEP et permet de bénéficier d'une vue d'ensemble des tâches et compétences dans ce domaine.

Les commissions saluent également le fait que certaines compétences décisionnelles auparavant assumées par le délégué à l'AEP aient été explicitement transmises au directeur suppléant de l'OFAE. Au vu des explications fournies par le Conseil fédéral, les CdG considèrent que cette nouvelle répartition des tâches constitue un progrès et qu'elle est cohérente au regard du taux d'occupation limité du délégué à l'AEP (cf. chap. 2.3.1).

Les CdG déplorent néanmoins que la direction de l'OFAE ne dispose toujours pas d'une hiérarchie claire au sein de sa direction, en particulier en cas de différends.

Les compétences et responsabilités sont certes définies désormais de manière plus précise; selon les représentants du DEFR et de l'OFAE, la collaboration entre les membres actuels de la direction fonctionne bien et aucun problème n'est à signaler à ce propos. Face au groupe de travail34, le délégué a indiqué qu'il portait, selon la loi et le règlement de l'office, la responsabilité fondamentale de l'AEP et de l'OFAE.

Néanmoins, interrogé sur les règles en cas de divergences
majeures, il a indiqué qu'il reviendrait au chef de département de procéder à un arbitrage.

Les CdG s'étonnent du fait qu'aucun processus clair de gestion des différends à l'interne de la direction de l'OFAE n'ait pu leur être présenté. De leur point de vue, dans le cas où de nouveaux conflits devaient survenir, par exemple suite à un changement de personnes au sein de la direction, le bon fonctionnement de l'office pourrait à nouveau être mis en danger. Dans ce contexte, un arbitrage à l'échelle du chef de département ne peut pas constituer l'unique solution. Les CdG considèrent qu'il est indispensable que des règles en matière de règlement des différends soient définies de manière détaillée au niveau de la direction de l'OFAE également, et ce indépendamment des individus qui exercent les fonctions concernées. Elles invitent le DEFR à procéder aux clarifications nécessaires à ce sujet. Du point de vue des CdG, en l'absence de règles claires, le risque subsiste que les problèmes de conduite qu'elles avaient constatés lors de la crise des cautionnements se répètent à l'avenir.

34

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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2.3.4

Autres mesures organisationnelles prises au sein du DEFR et de l'OFAE

Au-delà des considérations portant sur l'organisation générale de l'OFAE, le Conseil fédéral a souligné dans son avis de septembre 2018 qu'un vaste train de mesures organisationnelles, portant sur de nombreux domaines (gouvernance, conformité, système de contrôle interne, reporting financier des compagnies maritimes, etc.), avait été mis en oeuvre par le DEFR suite à l'enquête administrative du CDF relative aux cautionnements maritimes.

Les CdG avaient déjà pris connaissance des mesures organisationnelles prises par le DEFR et l'OFAE en août 2017, dans le cadre de leur inspection35. Suite à la publication de l'avis du Conseil fédéral, elles se sont à nouveau informées de leur mise en oeuvre et ont procédé, en février 2019, à un échange avec les représentants du département et de l'office à ce sujet. Les documents consultés36 et les informations fournies confirment que plusieurs mesures37 ont été prises suite aux recommandations du CDF38, que le DEFR a institué une organisation de projet pour la mise en oeuvre de ces mesures, que le département a été régulièrement informé de l'avancée des travaux, et que la quasi-totalité des recommandations ont été appliquées en 2017 déjà.

Selon les déclarations du délégué à l'AEP et du directeur suppléant de l'OFAE, ces mesures ont fait leurs preuves et produit les effets escomptés39.

Les CdG rappellent toutefois que leur recommandation 2 porte avant tout sur la structure organisationnelle au niveau de la direction de l'OFAE (cf. chapitres précédents). En ce sens, les mesures internes prises par l'office suite à la crise des cautionnements ne constituent qu'une réponse partielle à leur recommandation.

35 36

37

38

39

Cf. Cautionnements de navires de haute mer, rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 3.1.4, let. c (FF 2018 6235 6264).

«Umsetzung der Massnahmen aus der Administrativuntersuchung Bürgschaften Hochseeschiffe. Projektschlussbericht mit Anhängen», rapport de l'OFAE du 23.8.2017 (en allemand uniquement); «Statusbericht. Projekt Umsetzung Massnahmen Bürgschaften Hochseeschifffahrt», rapport de la révision interne de l'OFAE du 1.12.2017 (en allemand uniquement).

Un rapport sur la pertinence de la flotte de haute mer en termes d'approvisionnement est prévu tous les quatre ans; une nouvelle règlementation des signatures est entrée en vigueur à l'OFAE; le dossier de la flotte suisse de haute mer, auparavant confié à l'étatmajor de l'OFAE, a été transféré à l'unité «Logistique»; un nouveau poste de spécialiste financier et une révision interne ont été créés au sein de l'OFAE; deux experts indépendants supplémentaires soutiennent l'organisation de milice de l'AEP; les collaborateurs doivent signer une déclaration d'impartialité; le manuel relatif aux cautionnements a été adapté (il contient désormais des dispositions sur la conservation des documents, les systèmes internes de contrôle, les procédures en cas de situation critique ainsi que différents mécanismes de contrôle et de conduite); une entreprise a été mandatée pour suivre l'évolution du marché maritime; un reporting mensuel concernant la situation des armateurs a été introduit; des principes de compliance ont été élaborés; la collaboration avec l'Office suisse de la navigation maritime (OSNM) a été précisée dans un accord.

Le CDF ne mène lui-même aucun contrôle de suivi de la mise en oeuvre de ses recommandations, vu qu'il ne s'agit pas, en l'espèce, d'un audit au sens de la loi sur le contrôle des finances (LCF), mais d'une enquête administrative que le CDF a effectuée sur mandat du DEFR (cf. chap. 3.4 du rapport des CdG du 26.6.2018).

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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Ci-après, les CdG rendent néanmoins compte de certains éléments ayant été portés à leur connaissance et présentant de leur point de vue un intérêt sur le plan de la gestion.

Règlement des signatures Suite à l'enquête du CDF, les règles appliquées par l'OFAE en matière de signatures concernant les cautionnements de navires de haute mer ont fait l'objet d'adaptations.

Dans le cadre de leur audition par les CdG, les responsables de l'OFAE ont indiqué40 que l'office s'était doté de nouvelles règles début octobre 2000 et que, depuis lors, il exigeait une signature collective ou une double signature pour les contrats de cautionnement. Auparavant, seul le chef de l'état-major était compétent en la matière. Depuis l'adoption des nouvelles règles, le directeur suppléant de l'époque et un collaborateur subordonné au chef de l'état-major avaient eux aussi un droit de signature; plus tard, d'autres collaborateurs subordonnés au chef de l'état-major ont manifestement aussi reçu cette compétence. Ces règles ont été en vigueur jusqu'au début de l'année 2017.

Selon l'OFAE41, le délégué à l'AEP a introduit de nouvelles règles à compter du 1er février 2017, en réaction au rapport d'enquête administrative du CDF. Ces nouvelles règles excluent les signatures collectives par des personnes subordonnées afin d'empêcher que le responsable d'un dossier contourne le contrôle hiérarchique en obligeant un collaborateur qui lui est directement subordonné à apposer sa signature.

Les CdG partent du principe que ces règles valent également pour l'éventuel renouvellement de cautionnements existants ou le consentement à l'octroi, par le bailleur de fonds, d'un sursis de paiement des amortissements.

Lors de son audition face au groupe de travail des CdG42, le délégué à l'AEP a indiqué que l'ensemble des documents pertinents pour la gestion sont désormais signés par un membre de la direction de l'OFAE, en plus du responsable de la section compétente. Il a précisé que les rapports sur les risques étaient quant à eux signés par le directeur adjoint seul, dans la mesure où il s'agit d'une question de type opérationnel43.

Les CdG constatent que les responsabilités en matière de signatures semblent actuellement réglées de manière transparente au sein de l'OFAE. Elles saluent le fait que les signatures collectives incluant des
personnes subordonnées ne soient plus autorisées. Les commissions n'identifient pas de nécessité supplémentaire d'agir à ce propos actuellement, dans la mesure où de nouveaux cautionnements ne seront plus accordés à l'avenir et que les engagements existants font l'objet d'un suivi étroit de la part du DEFR et de la DélFin. Elles estiment toutefois que la répartition des tâches et responsabilités en matière de cautionnements au sein de l'OFAE demeure une question cruciale, au vu des engagements encore en cours. Elles invitent l'office et le département à y consacrer une attention particulière.

40 41 42 43

Courriel de l'OFAE au groupe de travail des CdG du 14.2.2019.

Courriel de l'OFAE au groupe de travail des CdG du 14.2.2019.

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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Les CdG relèvent que les informations fournies par l'OFAE au sujet du règlement des signatures ­ en particulier concernant le début des années 2000 ­ entrent en contradiction avec certaines affirmations contenues dans le rapport d'enquête administrative du CDF. Ce dernier était en effet arrivé à la conclusion que le système de double signature avait été introduit au sein de l'OFAE à partir du 1 er avril 2005 seulement44. L'ancien chef de l'état-major de l'OFAE avait pourtant affirmé, dans une prise de position adressée au CDF, que le principe de la double signature existait depuis l'an 2000 déjà45. Les CdG peinent à comprendre pourquoi ces informations contradictoires n'ont pas été davantage approfondies par le CDF46.

Lors de ses échanges avec le groupe de travail des CdG, le Procureur général de la Confédération a indiqué que le MPC examinait la question du règlement des signatures dans le cadre de ses investigations actuelles concernant l'ancien chef de l'étatmajor de l'OFAE. Il s'est également montré critique vis-à-vis des conclusions de l'enquête administrative CDF sur ce point. Les CdG se réservent la possibilité de revenir sur cet aspect une fois que le MPC aura clos son enquête.

Organisation de crise Eu égard aux cautionnements encore en vigueur et à la situation économique difficile dans laquelle le secteur maritime se trouve encore, le DEFR et l'OFAE ont défini une organisation de crise en cas de nouvelles sollicitations de cautionnement.

Cette structure, introduite au début de l'année 2019, a été présentée au groupe de travail des CdG lors de l'audition du 13 février 2019.

Divisée en cinq phases, l'organisation «Gestion de crise Navires de haute mer» 47 définit les responsabilités de l'office et du département. La structure est organisée sous l'égide d'un comité de pilotage, chargé de définir les orientations générales.

Celui-ci est composé de la secrétaire générale du DEFR, du directeur de l'Administration fédérale des finances (AFF) et du délégué à l'AEP. Par contre, ni le DFAE ni le directeur suppléant de l'OFAE ne figuraient dans la version de l'organigramme de l'organisation présentée en février 2019 au groupe de travail des CdG. Par la suite, la structure a été adaptée: un système de suppléance a été introduit, prévoyant notamment que le directeur suppléant de l'OFAE remplace
le délégué à l'AEP en cas d'absence de ce dernier. Par ailleurs, le DFAE participe désormais au comité de pilotage en tant qu'«invité sans droit de vote»48. Il y est représenté par la directrice de la Direction du droit international public.

44 45 46

47 48

Rapport d'enquête administrative du CDF (non publié), ch. 4.1.1, p. 13.

Rapport d'enquête administrative du CDF (non publié), ch. 4.1.1, p. 13.

Dans le cadre de la consultation relative au présent projet de rapport, le CDF a expliqué qu'il n'avait pas approfondi cette allégation, car il avait constaté que deux décisions de cautionnement (datant de mai et juillet 2000) avaient été signées par l'ancien chef de l'état-major seul. Les CdG prennent note de cet argument. De leur point de vue toutefois, cela n'explique pas pourquoi le CDF est arrivé à la conclusion que le système de double signature avait été introduit par l'OFAE en 2005 seulement.

Cf. organigramme de l'organisation «Gestion de crise Navires de haute mer» en annexe.

Le DFAE est représenté depuis le 11 mars 2019 au sein du comité de pilotage en tant qu'invité sans droit de vote.

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La conduite de l'organisation est confiée à un directeur de projet issu de l'OFAE, tandis que l'équipe de projet est composée d'une douzaine de collaborateurs de l'OFAE, du secrétariat général du DEFR et de l'AFF. Les décisions-clé sont prises par le chef du DEFR, en coordination avec le chef du DFF ou du Conseil fédéral dans son ensemble. Le DEFR a également souligné l'importance d'entretenir des échanges réguliers avec les divers «acteurs» du dossier (banques, OSNM, propriétaires et armateurs).

Sur le principe, les CdG saluent la volonté du DEFR de définir une structure spécifique chargée de gérer les situations de crise liées aux cautionnements de navires.

Elles considèrent qu'il est indispensable que les compétences spécialisées nécessaires puissent être mobilisées au sein de l'administration afin de faire face rapidement et de manière adéquate à d'éventuels événements futurs. A ce titre, elles considèrent que l'intégration de l'AFF dans l'organisation de crise constitue une décision judicieuse.

En ce qui concerne l'intégration de l'OFAE dans l'organisation de projet «Gestion de crise Navires de haute mer», les CdG constatent que le directeur suppléant de l'office, responsable de la conduite opérationnelle, est uniquement mentionné en tant que suppléant du délégué à l'AEP, au sein du comité de pilotage.

En ce qui concerne l'intégration du DFAE et de l'OSNM, les CdG se demandent s'il est adéquat que l'OSNM soit uniquement considéré comme un «acteur» du dossier et soit à ce titre placé au même niveau que les banques, les propriétaires et les armateurs. Elles saluent par contre le fait que la place du DFAE dans l'organisation de crise ait été reconsidérée et que celui-ci participe désormais aux séances du comité de pilotage. Aux yeux des CdG, il est important que ces unités soient associées de manière adéquate à la gestion de crise lorsque cela s'avère nécessaire et qu'une bonne coordination soit garantie avec elles, dans le respect de la convention de coopération conclue en 2017 entre l'OFAE et l'OSNM49.

Au-delà de ces remarques ponctuelles, les CdG ne se prononcent pas sur l'adéquation de la structure choisie par le DEFR ou sur la capacité de celle-ci à faire face de manière efficace à d'éventuelles crises liées aux cautionnements. Elles laissent le soin à la DélFin de porter en temps voulu
une appréciation à ce sujet, dans la mesure où cette dernière suit de manière active le processus de vente des navires et la situation actuelle des cautionnements50.

Entretiens de gestion Alors que, auparavant, seul le délégué à l'AEP participait aux entretiens de gestion entre le DEFR et l'OFAE en tant que représentant de l'office, il est désormais accompagné par le directeur suppléant de l'OFAE. Les CdG saluent cette modification, qu'elles estiment judicieuse et efficace compte tenu des compétences différentes assumées par ces deux personnes. Les CdG ont également pris note du fait qu'un 49 50

Cf. Cautionnements de navires de haute mer, rapport des CdG du 26.6.2018 (FF 2018 6235 6267), chap. 3.3.2.

Le DEFR a informé les CdG, dans le cadre de la consultation relative au présent rapport, que l'évolution de la situation économique d'un armateur avait requis, au printemps 2019, l'entrée en jeu de cette organisation de crise.

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examen du dossier était réalisé de manière hebdomadaire au sein du secrétariat général du DEFR (en présence de la secrétaire générale et des collaborateurs chargés du dossier) et qu'un compte rendu était présenté au chef du département toutes les deux semaines.

Transmission du dossier au nouveau chef de département La question de la transmission des dossiers sensibles lors de changements à la tête des départements a occupé les CdG à plusieurs reprises au cours des dernières années51. Dans ce contexte, le groupe de travail des CdG s'est informé de la manière dont le dossier des cautionnements avait été transmis au nouveau chef du DEFR, M. le Conseiller fédéral Guy Parmelin, lors de son entrée en fonction début 2019.

Sur la base d'une recommandation antérieure des CdG, la Chancellerie fédérale et le Conseil fédéral ont adopté une «check-list» portant sur la transmission des dossiers lors de changements à la tête des départements52. Face au groupe de travail des CdG53, la nouvelle secrétaire générale a souligné que le DEFR s'était référé à ce document lors de l'entrée en fonction du nouveau chef de département, et que celuici avait contribué à une meilleure organisation en matière de transmission des informations.

Selon les indications de la nouvelle secrétaire générale 54, les responsables du DEFR ont préparé à l'attention du nouveau chef de département un dossier de présentation complet concernant les cautionnements des navires de haute mer, incluant un historique et une liste de l'état des risques. Ces informations ont été présentées par écrit et par oral le 20 décembre 2018, lors d'une séance de préparation réunissant le conseiller fédéral sortant, son successeur et leurs secrétaires généraux respectifs. La première rencontre entre le nouveau chef du département et la direction de l'OFAE a eu lieu le 8 janvier 2019. A cette occasion ont notamment été lancés les travaux relatifs à la nouvelle organisation de crise (cf. plus haut).

Les CdG se félicitent du fait que le DEFR se soit basé, dans le cadre de cette transition, sur la «check-list» élaborée par le Conseil fédéral. Sur la base des affirmations du département, elles partent du principe que la transmission du dossier a été réalisée de manière complète et transparente, et que le nouveau conseiller fédéral en charge du dossier dispose d'une
information complète de la situation actuelle au sujet des cautionnements. Le fait que le nouveau chef de département et sa secrétaire générale étaient déjà en fonction depuis plusieurs années au moment de la transmission du dossier constitue, de leur point de vue, une circonstance favorable.

51 52

53 54

Cf. notamment: Suspension du projet de défense sol-air 2020 (DSA), rapport des CdG du 26.1.2017 (FF 2017 3317).

Chancellerie fédérale: «Wissenstransfer bei Stabsübergaben an der Departements- und Bundeskanzleispitze. Checkliste gemäss Ziffer 1.24 des Aide-mémoire für die Mitglieder des Bundesrates und die Bundeskanzlerin / den Bundeskanzler» (uniquement en allemand, non publié).

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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Compétences spécialisées au sein du DEFR et de l'OFAE Dans le cadre de ses clarifications, le groupe de travail des CdG a également abordé avec les représentants du DEFR et de l'OFAE la question du renforcement des compétences spécialisées au sein du département et de l'office dans le domaine des cautionnements maritimes. Le délégué à l'AEP a informé les CdG55 qu'un poste supplémentaire de spécialiste en finances avait été créé au sein du secrétariat de la section «Logistique» de l'AEP, que deux experts en navigation indépendants avaient été recrutés pour son organisation de milice et que des compétences supplémentaires dans ce domaine avaient été acquises auprès de spécialistes externes. Selon les affirmations des représentants du DEFR56, une professionnalisation considérable a eu lieu au sein de l'office, et les compétences spécialisées ont également été renforcées au sein du secrétariat général du département. Ils ont souligné que le traitement de ce dossier avait requis et continuerait de requérir le soutien de nombreux experts externes, notamment dans les domaines économique et juridique, représentant des investissements importants.

Les CdG prennent note des mesures prises afin de renforcer les compétences spécialisées au sein du DEFR et de l'OFAE et considèrent que celles-ci vont dans la bonne direction. De leur point de vue, il est particulièrement important que les collaborateurs chargés du dossier des cautionnements présentent à l'avenir des compétences élevées dans ce domaine et puissent recourir à un soutien externe pour le traitement de certaines questions spécialisées, lorsqu'une telle mesure est clairement justifiée.

2.3.5

Conclusion intermédiaire relative à la recommandation 2

En résumé, les CdG relèvent que diverses améliorations organisationnelles ont été entreprises au sein du DEFR et de l'OFAE suite à la crise des cautionnements de la flotte suisse de haute mer. La nouvelle répartition des tâches au sein de la direction de l'office, bien que très tardive, constitue un progrès. Certains éléments restent encore à clarifier, notamment en ce qui concerne l'adéquation de la structure d'organisation de crise récemment mise en place par le DEFR.

Sur le fond, les CdG constatent par contre que le Conseil fédéral ne semble visiblement pas prêt à procéder à un examen approfondi au sujet de l'organisation de l'OFAE et de sa direction. Elles relèvent qu'aucune modification fondamentale n'a été apportée aux structures existantes suite à la crise des cautionnements. Elles ne sont pas en mesure de déterminer si le Conseil fédéral a, dans les faits, réellement examiné la pertinence de la structure actuelle de l'AEP au cours des dernières années.

55 56

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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De manière générale, les CdG soulignent que la gestion, par le DEFR et l'OFAE, des problèmes liés aux cautionnements ainsi que la mise en oeuvre des mesures visées dans le rapport d'enquête administrative du CDF ne pourront être appréciées de manière définitive que lorsque les autorités de poursuite pénale et le Tribunal administratif fédéral (TAF)57 auront achevé leurs investigations. En effet, il n'est pas exclu que ceux-ci se prononcent dans ce cadre sur des questions pertinentes relatives à la gestion. Par conséquent, les CdG reviendront sur ces aspects une fois que ces investigations seront terminées.

2.4

Recommandations 3, 4 et 5: enquêtes administratives

Recommandation 3: Les CdG invitent le Conseil fédéral à préciser les dispositions de l'art. 27d, al. 1, let. b, OLOGA58, selon lesquelles un organe chargé d'une enquête administrative ne doit pas exercer d'activité dans le domaine à contrôler.

Recommandation 4: Les CdG prient le Conseil fédéral de clarifier explicitement s'il est licite et judicieux que le CDF (ou ses responsables), en tant qu'organe suprême en matière de surveillance financière et autorité indépendante, mène des enquêtes administratives sur mandat des départements dans le cadre de la surveillance des unités administratives.

Recommandation 5: Les CdG invitent le Conseil fédéral à examiner si une enquête administrative ne peut être confiée qu'à des personnes conformément à l'art. 27d OLOGA ou s'il est possible de la confier à des autorités; il devra également examiner dans quelle mesure la supervision d'un employé de la Confédération chargé d'une enquête par un supérieur peut influer sur son indépendance.

Les recommandations 3 à 5 des CdG se basent sur les constatations faites par les commissions au sujet de l'enquête administrative réalisée par le CDF concernant les cautionnements de navires de haute mer.

En réponse à la recommandation 3, le Conseil fédéral souligne dans son avis l'importance de l'indépendance de l'organe chargé d'une enquête administrative. Il indique qu'il retient la recommandation des CdG visant à clarifier les exigences à ce propos et qu'il souhaite «apporter une précision juridique par voie d'interprétation ou, le cas échéant, par le biais d'une adaptation de l'OLOGA», dans le but d'éliminer les incertitudes identifiées dans le cadre de l'inspection des CdG. Il annonce que la ChF réalisera un examen à ce propos.

57

58

Le TAF se penche sur des questions liées aux demandes de consultation du rapport d'enquête administrative du CDF, lesquelles sont fondées sur la loi fédérale sur le principe de la transparence dans l'administration (LTrans). Deux des personnes mentionnées dans le rapport s'opposent à cette consultation; elles critiquent notamment la version des faits présentée dans le rapport et le non-respect du droit d'être entendu dans le cadre de l'enquête administrative (cf. rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 3.4.2).

Ordonnance du 25.11.1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA; RS 172.010.1).

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Au sujet des recommandations 4 et 5, le Conseil fédéral prend note «du fait que, de l'avis des CdG, il existe des incertitudes considérables concernant l'attribution et la réalisation des enquêtes administratives» et estime qu'il est «indispensable de clarifier les points de droit soulevés par les CdG et d'éliminer les incertitudes juridiques». Il indique que la ChF a été chargée d'effectuer à cet effet les contrôles demandés en collaboration avec l'OFJ.

Les CdG saluent le fait que le Conseil fédéral prenne au sérieux les questions juridiques soulevées par leur inspection et qu'il se soit déclaré disposé à les examiner sur le fond. De leur point de vue, il est important que les critiques concrètes formulées par les CdG au sujet de l'enquête menée par le CDF (indépendance vis-à-vis des audits précédents, mélange des bases légales, manquements liés au droit d'être entendu, etc.) soient clarifiées et prises en compte lors d'enquêtes futures59.

Inspection de la CdG-N relative aux enquêtes administratives et disciplinaires Une grande partie des questions soulevées par les recommandations 3 à 5 du présent rapport font actuellement l'objet ­ sous une forme plus générale ­ d'une inspection de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N), portant sur les enquêtes administratives et disciplinaires au sein de l'administration fédérale. Sur la base d'une évaluation du Contrôle parlementaire de l'administration (CPA), la CdG-N prévoit de publier un rapport à ce sujet à la fin de l'année 201960.

Dans la mesure où la CdG-N et le CPA examinent actuellement de manière approfondie la thématique des enquêtes administratives, les CdG estiment qu'il ne ferait pas sens que les aspects soulevés dans les recommandations 3 à 5 de la présente inspection (ainsi que dans la recommandation 6, cf. chapitre suivant) soient traités de manière séparée. Elles ont par conséquent décidé de confier le suivi de ces recommandations à la CdG-N. Elles chargent cette dernière d'intégrer, dans le cadre de son inspection en cours sur les enquêtes administratives, les résultats des clarifications qui auront pu être effectuées entre temps par la ChF61, et examineront l'opportunité de se repencher sur ces aspects dans le cadre du contrôle de suivi de la présente inspection.

Attribution du mandat d'enquête par le DEFR au CDF Dans
son avis, le Conseil fédéral indique qu'il «prend note de la critique» émise par les CdG concernant l'attribution du mandat d'enquête administrative par le DEFR au CDF et des «manquements soulignés [...] lors de la réalisation de l'enquête administrative». Revenant sur la décision du DEFR, il justifie ce choix en faisant valoir que le département avait à l'époque «estimé que cet organe offrait toutes les garanties nécessaires pour mener une enquête administratives impartiale et irréfutable sur 59

60

61

Dans son avis relatif à la recommandation 3, le Conseil fédéral évoque la possibilité d'apporter une précision juridique «par voie d'interprétation». Les CdG soulignent que, dans leur rapport, elles faisaient uniquement référence à une adaptation de la législation.

Sur mandat du Conseil fédéral, la ChF a coordonné ses travaux de clarification avec l'évaluation du CPA relative aux enquêtes administratives et disciplinaires, ce que les CdG saluent.

Le Conseil fédéral a informé les CdG, par lettre du 29.5.2019, des résultats de ces clarifications. Ces nouvelles informations seront analysées par la CdG-N et ne sont pas traitées dans le présent rapport.

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le plan technique.» Il souligne en outre que le rapport du CDF a permis «d'apporter des améliorations considérables au niveau de l'exécution dans le domaine des cautionnements [...].» Les CdG ont également pris connaissance de la prise de position du CDF relative à leur rapport62. Celui-ci admet que «le fait de lui confier une enquête administrative est une construction juridique qui peut être sujette à questions.». Il souligne toutefois que «ce choix a été fait en connaissance de cause pour assurer les intérêts de la surveillance financière», c'est-à-dire notamment de permettre au CDF de poursuivre les investigations qu'il avait déjà commencées auprès de l'OFAE et d'éviter les doublons entre l'enquête administrative et les autres audits du CDF. Le CDF indique également que le contrat conclu avec le chef du DEFR ­ réservant explicitement les dispositions de la loi sur le contrôle des finances (LCF) 63 ­ avait permis de «transmettre ce rapport immédiatement aux organes de surveillance». Il ne prend toutefois pas position sur la critique de fond exprimée par les CdG dans leur rapport au sujet de la confusion entre les prescriptions de l'OLOGA, relatives aux enquêtes administratives, et celles de la LCF, relatives au CDF64.

Dans son avis, le CDF répond également à deux reproches qui lui ont été adressés par les CdG. Concernant le non-respect du droit d'être entendu pour certaines personnes mentionnées dans le rapport d'enquête administrative65, le CDF maintient sa position et relève que cette question juridique est encore en suspens devant les tribunaux. Il précise qu'il a renoncé à auditionner les personnes concernées «afin d'éviter d'entraver la procédure pénale». Le CDF considère en outre que la critique des CdG relative à son manque d'indépendance66 n'est pas fondée. Il souligne qu'il a, dans le cadre de son rapport d'enquête administrative, «spontanément fait son autocritique» et estime «avoir ainsi apporté la preuve que les auditeurs ayant effectué l'enquête administrative disposaient de l'indépendance nécessaire».

Les CdG prennent note des arguments avancés. Elles constatent qu'aucun élément factuel nouveau n'a été porté à leur connaissance et que le CDF n'est visiblement pas disposé à procéder à une réflexion approfondie sur les critiques exprimées.

Dans leurs réponses, le Conseil fédéral
et le CDF font valoir que le TAF n'a pas remis en cause la compétence du CDF de mener l'enquête administrative en question. Formellement, cette affirmation est correcte. Les commissions soulignent toutefois que le TAF n'a, dans le cadre des décisions concernées67, pas spécifiquement examiné cet aspect précis, et qu'il ne se prononce donc pas sur le fond de la question.

62 63 64 65

66 67

Lettre du CDF aux Commissions de gestion du 19.9.2018 (non publiée).

Loi fédérale du 28.6.1967 sur le Contrôle fédéral des finances (Loi sur le Contrôle des finances, LCF; RS 614.0).

Cf. à ce sujet rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 4.4.3 (FF 2018 6235 6298).

En particulier l'ancien chef de l'Etat-major de l'OFAE (1991­2012) ainsi que l'ancienne déléguée à l'AEP (2006­2015). Cf. à ce sujet rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 4.4.2 (FF 2018 6235 6292).

Cf. à ce sujet rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 4.4.3 (FF 2018 6235 6296).

Décisions incidentes A-6908/2017 et A-7102/2017 du TAF.

6641

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Même si les recommandations issues de l'enquête administrative ont pu mener à certaines améliorations au sein de l'OFAE (cf. chap. 2.3.4), les CdG continuent à considérer que le choix du CDF pour réaliser cette enquête n'était pas adéquat, en raison des problèmes d'indépendance de cet organe vis-à-vis de l'office examiné, de son manque de compétences techniques dans le domaine des enquêtes administratives et de son interprétation confuse des bases légales pertinentes68. Dans la mesure où divers points sont encore en cours de clarification dans le cadre de procédures judiciaires et seront traités par la CdG-N, sous une forme plus générale, dans le cadre de l'inspection citée précédemment, les CdG ont décidé de ne pas agir plus avant pour l'instant. Elles se réservent néanmoins la possibilité de compléter leur appréciation ultérieurement et, si nécessaire, d'approfondir davantage certains aspects en fonction des résultats des enquêtes et clarifications en cours.

2.5

Recommandation 6: centre de compétences en matière d'enquêtes administratives

Les CdG invitent le Conseil fédéral à examiner la possibilité de créer, au niveau de la Confédération (au sein de l'Office fédéral de la justice [OFJ], p. ex.), un centre de compétences en matière d'enquêtes administratives chargé de conseiller l'autorité ayant ordonné l'enquête et le mandataire chargé de l'enquête notamment au regard des questions de droit.

A travers cette recommandation, les CdG invitaient le Conseil fédéral à examiner l'opportunité de désigner un «centre de compétences» de la Confédération en matière d'enquêtes administratives. Elles précisent qu'il n'était aucunement de leur volonté d'exiger la création d'une unité supplémentaire; elles souhaitaient plutôt s'assurer qu'une entité existante de la Confédération, clairement identifiable, dispose du savoir-faire en matière de procédure pour les enquêtes administratives, se tienne à jour au sujet de l'évolution des connaissances et de la jurisprudence relative à cette thématique et puisse fournir des renseignements juridiques aux autres services fédéraux si nécessaire.

Dans son avis, le Conseil fédéral estime qu'il n'y a «pas lieu d'examiner la création d'un centre de compétences en matière d'enquêtes administratives». Il considère à ce propos qu'en cas de besoin, «les services compétents (en particulier la Chancellerie fédérale et l'OFJ) peuvent déjà examiner rapidement les questions qui leur sont adressées et conseiller le mandant d'une enquête administrative». De son point de vue, un centre de compétences n'apporterait «aucune plus-value» et créerait «une charge administrative et financière [...] disproportionnée au regard des rares cas concernés.» Afin d'approfondir cet aspect, les CdG ont adressé une liste de questions à la ChF et à l'OFJ portant sur leur expérience et leur pratique en matière de conseil dans le

68

Cf. à ce sujet rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 4.4. (FF 2018 6235 6290).

6642

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domaine des enquêtes administratives, ainsi que sur la répartition des tâches à ce sujet entre la ChF, l'OFJ et l'Office fédéral du personnel (OFPER).

Dans sa réponse69, l'OFJ a indiqué aux CdG qu'il ne disposait pas de connaissances spécifiques en matière d'enquêtes administratives et qu'il n'avait désigné aucune entité pour se consacrer à ces questions. L'office a précisé qu'au cours des cinq dernières années, il avait été consulté une seule fois sur des questions de procédure dans le cadre d'enquêtes administratives, en l'occurrence pour une question de détail. La ChF, de son côté70, a indiqué que sa section du droit était en charge de la législation réglant les enquêtes administratives (LOGA71 et OLOGA). Elle a précisé aux CdG qu'elle avait reçu, au cours des cinq dernières années, «trois demandes portant sur les dispositions de l'OLOGA en matière d'enquêtes administratives et les commentaires s'y rapportant.» A la demande du groupe de travail, elle a indiqué72 que deux de ces demandes ne portaient que sur des explications relatives à la LOGA et à l'OLOGA et que ces cas n'avaient pas été documentés plus avant. Pour la troisième, il s'agissait d'une question de fond spécifique posée par un département (compétence en matière de levée de l'obligation de garder le secret pour des personnes impliquées dans une procédure); la section du droit de la ChF a alors renseigné le département concerné par écrit.

L'OFJ estime qu'il «n'existe pas de règles de répartition des compétences entre l'OFJ, la Chancellerie fédérale et l'Office fédéral du personnel concernant les enquêtes administratives». De son côté, la ChF part du principe que les compétences sont réparties selon les «règles générales de compétence applicables aux domaines spécialisés»: la ChF est responsable de la LOGA et de l'OLOGA, tandis que l'OFJ est impliqué lorsque des questions de droit constitutionnel ou de principe se posent.

L'OFPER n'est, selon elle, pas concerné par les questions en relation avec les enquêtes administratives, dans la mesure où celles-ci ne sont pas explicitement dirigées contre des personnes. La ChF précise encore qu'aucune question concernant la délimitation entre les enquêtes administratives ou disciplinaires ­ ces dernières étant réglées dans le droit du personnel ­ ne lui a été soumise jusqu'à présent.

Tant l'OFJ
que la ChF indiquent qu'il n'est pas prévu d'étendre leurs prestations en matière d'enquêtes administratives. Néanmoins, selon l'OFJ, tous deux «évalueront les améliorations qu'il serait possible d'apporter au cadre institutionnel des enquêtes administratives et détermineront le cas échéant quelles bases légales il serait nécessaire d'adapter.» Du point de vue des CdG, les réponses de l'OFJ et de la ChF relativisent les affirmations du Conseil fédéral. En outre, on peut en déduire que la répartition des compétences (c'est-à-dire les rôles et les responsabilités des deux organes) n'est pas définie de manière totalement claire.

Les investigations du groupe de travail ont montré que la ChF et l'OFJ n'ont été que très rarement consultés lors d'enquêtes administratives et disciplinaires. Les CdG se 69 70 71 72

Lettre de l'OFJ aux CdG du 10.1.2019 (non publiée).

Lettre de la ChF aux CdG du 14.1.2019 (non publiée).

Loi du 21.3.1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA; RS 172.010).

Courriel de la ChF à l'intention du groupe de travail des CdG du 11.2.2019.

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demandent quelles en sont les raisons: est-ce parce que les entités menant les enquêtes ne connaissent pas cette possibilité? Est-ce parce qu'elles estiment qu'une telle consultation serait peu utile? Ou y a-t-il d'autres motifs? Les CdG continuent de se demander ­ comme elles le formulaient dans leur recommandation ­ s'il ne serait pas opportun que le Conseil fédéral désigne plus clairement le ou les organes de référence en matière d'enquêtes administratives et s'assure que les départements s'y réfèrent de manière plus systématique lors de la réalisation d'enquêtes, au moins en ce qui concerne les aspects formels ou juridiques. Les CdG n'ont pas analysé plus avant ces questions dans le cadre de la présente enquête, car celles-ci sont actuellement examinées par le CPA (cf. chap. 2.4).

Les commissions sont néanmoins toujours convaincues que les lacunes en matière d'enquêtes administratives ou disciplinaires portées à la connaissance du public ces dernières années sont graves et auraient pu ­ ou dû ­ être évitées, du moins en partie. Eu égard à l'évaluation actuellement menée par le CPA, elles ont toutefois décidé de ne pas rendre ici d'appréciation définitive ni de formuler de recommandations. Elles confient cet aspect à la CdG-N, qui se penchera sur les résultats de l'évaluation du CPA dans le courant de l'année 2019 et, sur cette base, pourra proposer des mesures d'amélioration ciblées.

2.6

Recommandation 7: examen de l'intégration de certaines obligations dans la gestion des risques

Les CdG invitent le Conseil fédéral à examiner la nécessité d'intégrer dans la gestion des risques les cautionnements ou autres obligations similaires de la Confédération qui n'y figuraient pas jusque-là.

Dans son avis, le Conseil fédéral indique qu'il partage l'avis des CdG et que le service de coordination «Gestion des risques» de la Confédération, rattaché à l'Administration fédérale des finances (AFF), a demandé aux unités administratives dans le cadre du rapport sur les risques 2017 «d'examiner périodiquement leurs engagements conditionnels [...] en vue de les intégrer dans la gestion des risques de la Confédération». Le Conseil fédéral précise dans son avis les critères déterminants à cet effet. Il signale en outre que le Manuel de gestion des risques de la Confédération a été adapté en ce sens en octobre 2017. A l'avenir, «l'AFF rappellera systématiquement aux unités administratives d'examiner leurs engagements conditionnels conformément aux critères en vigueur pour déterminer s'il convient de les intégrer dans la gestion des risques de la Confédération».

Les CdG considèrent que le Conseil fédéral remplit, par ces mesures, les demandes qu'elles avaient formulées dans leur recommandation. Celui-ci va même plus loin que la recommandation initiale, en prévoyant un réexamen annuel de la nécessité d'intégrer de nouveaux cautionnements à la gestion des risques.

Le Conseil fédéral indique dans son avis que la probabilité d'un risque constitue l'un des critères devant mener à un réexamen périodique des engagements. Les CdG rappellent que, dans le cas de la flotte suisse de haute mer, c'est précisément cette 6644

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probabilité qui avait été sous-estimée jusqu'à l'éclatement de la crise. Les commissions invitent donc encore une fois le Conseil fédéral à s'assurer que les risques ayant les conséquences financières les plus importantes apparaissent suffisamment tôt dans le cadre de la gestion des risques et que les indications relatives à la probabilité des risques soient évaluées de manière réaliste et régulièrement vérifiées.

Du point de vue des CdG, les mesures annoncées par le Conseil fédéral ne pourront être mises en oeuvre de manière effective que si une attention suffisante est accordée à la thématique de la gestion des risques au sein des départements. A cet effet, les CdG soulignent encore une fois les considérations qu'elles avaient déjà formulées dans leur rapport de juin 2018: ­

Les CdG demandent que les prescriptions en matière de gestion des risques soient davantage respectées et que les rapports sur les risques des offices soient soumis à un contrôle de plausibilité plus strict au niveau de l'office et du secrétariat général73.

­

Les CdG attendent du Conseil fédéral qu'il veille à ce que la direction et la surveillance incombant aux départements soient assumées de manière plus active dans tous les départements et qu'elles ne soient plus perçues simplement comme des tâches passives74.

­

Dans ce contexte, les CdG estiment que la gestion des risques dans les départements devrait être professionnalisée. Le Conseil fédéral doit notamment veiller à ce que les départements accordent l'importance requise à la fonction de «responsable de la gestion des risques» et que les personnes concernées assument effectivement les tâches liées à cette fonction75.

Les CdG ont chargé leur groupe de travail «Reporting sur les risques» de s'informer, dans le cadre de ses activités régulières, des suites données par le Conseil fédéral et les départements à ces remarques.

Lors de ses échanges avec le DEFR et l'OFAE 76, le groupe de travail des CdG a également été informé de la situation des cautionnements en cours de validité ainsi que de l'état des risques liés à ces derniers. Les CdG ne se prononcent toutefois pas à ce sujet, dans la mesure où ces aspects sont étroitement suivis par la DélFin.

73 74 75 76

Rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 4.1.1 (FF 2018 6235 6283).

Rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 4.1.1 (FF 2018 6235 6284).

Rapport des CdG du 26.6.2018, chap. 4.1.1 (FF 2018 6235 6284).

Audition des représentants du DEFR et de l'OFAE par le groupe de travail des CdG, 13.2.2019.

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2.7

Recommandation 8: examen de l'élaboration de directives uniformes pour l'exécution des cautionnements et autres obligations

Les CdG invitent le Conseil fédéral à déterminer si des directives uniformes concernant l'octroi de cautionnements et d'autres obligations similaires doivent être édictées au regard de la crise touchant les cautionnements de la flotte des navires de haute mer.

Le Conseil fédéral indique dans son avis que, même s'il comprend la recommandation des CdG, il considère qu'il n'est pas possible d'édicter des directives qui tiendraient compte de la grande hétérogénéité des cautionnements et engagements de garantie de la Confédération. Il indique néanmoins qu'il «veillera à ce que les dispositions légales relatives aux cautionnements et aux garanties prévues dans des actes spéciaux soient rédigées conformément aux exigences de la loi sur les subventions77 [...] de manière à ce que leur exécution permette de tenir suffisamment compte des risques.» Il précise toutefois que les mesures visant à minimiser les risques ne peuvent pas être généralisées, en raison de la diversité des réglementations prévues dans les actes spéciaux et des objectifs visés par l'octroi de cautionnements et de garanties, et que celles-ci doivent par conséquent être arrêtées au cas par cas.

Les CdG comprennent les arguments avancés par le Conseil fédéral pour justifier l'impossibilité d'édicter des directives valables pour l'ensemble des cautionnements et engagements de garantie. Afin de compléter leur appréciation, elles ont souhaité savoir si une unité administrative bénéficiait d'une vue d'ensemble dans ce domaine.

Dans sa réponse complémentaire adressée aux CdG78, le Conseil fédéral souligne le rôle important de l'AFF en tant qu'office transversal ayant une position charnière dans le cadre de la procédure de consultation interne relative aux messages du Conseil fédéral sur les modifications de lois. Il indique que l'AFF veille notamment à la compatibilité des projets avec LSu et que les messages du Conseil fédéral examinent cet aspect dans un chapitre spécifique.

Les CdG prennent note du fait que l'AFF possède une position charnière dans la vérification de la conformité des modifications de lois avec la LSu. Elles attendent des départements et offices compétents qu'ils prêtent une attention toute particulière à l'aspect du risque et au respect de la législation sur les subventions lors de la procédure législative en ce qui concerne les cautionnements et autres obligations.

Elles tireront un bilan à ce sujet dans le cadre de leur contrôle de suivi.

77 78

Loi fédérale du 5.10.1990 sur les aides financières et les indemnités (Loi sur les subventions, LSu; RS 616.1).

Lettre du Conseil fédéral aux CdG du 16.1.2019 (non publiée).

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3

Conclusions et suite de la procédure

Après avoir pris connaissance de l'avis du Conseil fédéral relatif à leur rapport du 26 juin 2018 et afin de compléter leur appréciation, les CdG ont approfondi différents éléments liés à la mise en oeuvre de leurs recommandations. Elles ont présenté les résultats de leurs travaux ainsi que leur appréciation dans le présent rapport.

Les CdG saluent le fait que le Conseil fédéral reconnaisse les manquements liés à la gestion, par le DEFR et l'OFAE, de la crise des cautionnements, et qu'il partage leurs principales conclusions. Elles prennent note avec satisfaction que plusieurs mesures ont été prises sur la base de leurs recommandations: ainsi, les pratiques en matière de procès-verbaux des entretiens de gestion ont été améliorées au sein du DEFR (recommandation 1), une nouvelle répartition des tâches a été introduite entre le délégué à l'AEP et le directeur adjoint de l'OFAE (recommandation 2), une organisation de crise concernant les cautionnements a été mise en place sous l'impulsion du DEFR (recommandation 2) et l'intégration des obligations dans la gestion des risques a été renforcée (recommandation 7). Le Conseil fédéral s'est en outre déclaré disposé à examiner les questions juridiques de fond soulevées par les CdG concernant la réalisation des enquêtes administratives (recommandations 3 à 5), et a chargé la ChF et l'OFJ de procéder aux clarifications correspondantes.

Sur d'autres points, le Conseil fédéral considère qu'il n'est pas nécessaire d'intervenir davantage. C'est notamment le cas en ce qui concerne les prescriptions d'archivage au sein des départements (recommandation 1) ou la création d'un centre de compétences en matière d'enquêtes administratives (recommandation 6). Sur ce dernier point, les CdG ne partagent pas l'appréciation du Conseil fédéral. Au vu des lacunes en matière d'enquêtes administratives portées à la connaissance du public ces dernières années, elles continuent de se demander s'il ne serait pas opportun que le Conseil fédéral désigne plus clairement le ou les organes de référence en matière d'enquêtes administratives et s'assure que les départements s'y réfèrent de manière plus systématique. Elles ont décidé de confier à la CdG-N le soin d'approfondir cet aspect dans le cadre de son inspection en cours relative aux enquêtes administratives et disciplinaires.
La mise en oeuvre de la recommandation 2, portant sur l'organisation de l'OFAE, a fait l'objet d'un examen détaillé de la part des CdG. Elles prennent note du fait que le Conseil fédéral ne semble visiblement pas prêt à procéder à un examen approfondi de l'organisation actuelle de l'office et de sa direction, et qu'il considère la structure actuelle de l'AEP comme adéquate. Diverses améliorations organisationnelles ont certes été entreprises au sein du DEFR et de l'OFAE suite à la crise des cautionnements de la flotte suisse de haute mer; les CdG relèvent toutefois qu'aucune modification fondamentale n'a été apportée aux structures existantes. Les commissions déplorent par ailleurs qu'il ait fallu attendre 2018 pour que l'OFAE se dote qu'un règlement consignant clairement les tâches et le fonctionnement de l'AEP. Elles soulignent en outre que certains points, tels que le règlement des différends au sein de la direction de l'OFAE, n'ont pas encore été réglés de manière claire, et que les descriptifs de postes du délégué à l'AEP et du directeur adjoint de l'OFAE devraient être mis à jour.

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Les CdG relèvent que le Conseil fédéral «prend acte» de leurs critiques en ce qui concerne l'attribution, par le DEFR, du mandat d'enquête administrative au CDF et la réalisation de cette enquête. Elles ont également pris connaissance de la prise de position qui leur a été transmise à ce propos par le CDF. Elles constatent qu'aucun élément factuel nouveau n'a été porté à leur connaissance et que l'organe concerné n'est visiblement pas disposé à procéder à une réflexion approfondie sur les critiques exprimées à son sujet. Elles continuent à considérer que le choix du CDF pour réaliser cette enquête n'était pas adéquat.

Sur la base des informations reçues, les CdG ont décidé, lors de leur séance du 25 juin 2019, de clore pour l'instant leurs travaux dans ce dossier. Elles invitent le Conseil fédéral à tenir compte des remarques qu'elles formulent dans le présent rapport. Elles examineront la mise en oeuvre de leurs recommandations dans le cadre d'un contrôle de suivi, dans deux ans environ. Elles se réservent toutefois la possibilité de rouvrir leur inspection préalablement et de compléter leur appréciation si de nouveaux éléments pertinents pour la gestion devaient être portés à leur connaissance, notamment suite à l'achèvement des travaux judiciaires en cours concernant le dossier des cautionnements.

25 juin 2019

Au nom des Commissions de gestion des Chambres fédérales: Le vice-président de la CdG-E: Damian Müller, conseiller aux Etats Le vice-président de la CdG-N: Erich von Siebenthal, conseiller national La présidente du groupe de travail: Yvonne Feri, conseillère nationale La secrétaire des CdG: Beatrice Meli Andres Le secrétaire du groupe de travail: Nicolas Gschwind

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Liste des Abréviations AEP AFF CDF CdG CdG-E CdG-N ChF CPA DEFR DélFin DFAE DFI EPT FF LAr LAP LCF LOGA LSu MPC OFAE OFJ OFPER OLAr OLOGA OSNM TAF

Approvisionnement économique du pays Administration fédérale des finances Contrôle fédéral des finances Commissions de gestion des Chambres fédérales Commission de gestion du Conseil des États Commission de gestion du Conseil national Chancellerie fédérale Contrôle parlementaire de l'administration Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche Délégation des finances des Chambres fédérales Département fédéral des affaires étrangères Département fédéral de l'intérieur Equivalent plein temps Feuille fédérale Loi fédérale du 26 juin 1998 sur l'archivage (RS 152.1) Loi fédérale du 17 juin 2016 sur l'approvisionnement économique du pays (loi sur l'approvisionnement du pays; RS 531) Loi fédérale du 28 juin 1967 sur le Contrôle fédéral des finances (loi sur le Contrôle des finances; RS 614.0) Loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (RS 172.010) Loi fédérale du 5 octobre 1990 sur les aides financières et les indemnités (Loi sur les subventions; RS 616.1) Ministère public de la Confédération Office fédéral pour l'approvisionnement économique du pays Office fédéral de la justice Office fédéral du personnel Ordonnance du 8 septembre 1999 relative à la loi fédérale sur l'archivage (ordonnance sur l'archivage; RS 152.11) Ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (RS 172.010.1) Office suisse de la navigation maritime Tribunal administratif fédéral

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Annexe

Organigramme de l'organisation «Gestion de crise Navires de haute mer»

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