19.020 Message concernant la modification de la loi fédérale sur le service civil du 20 février 2019

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi fédérale sur le service civil, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

20 février 2019

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2018-3326

2429

FF 2019

Condensé Le projet vise à modifier la loi fédérale sur le service civil afin de lutter contre trois phénomènes qui contribuent à mettre en danger les effectifs de l'armée: le nombre élevé d'admissions au service civil, le nombre élevé de militaires qui quittent les formations de l'armée après avoir accompli l'école de recrues pour rejoindre le service civil et le passage de spécialistes et de cadres de l'armée au service civil. Il faut faire respecter le principe selon lequel il n'y a pas de libre choix entre le service militaire et le service civil de remplacement. Les personnes qui ont déjà accompli de nombreux jours de service d'instruction à l'armée doivent dès lors répondre à des exigences plus élevées en ce qui concerne la preuve par l'acte.

Contexte L'augmentation du nombre des admissions au service civil et la situation relative au renouvellement des effectifs de l'armée sont susceptibles de menacer à moyen terme l'effectif réglementaire de 100 000 militaires prévu par le projet de développement de l'armée(DEVA). Dans ce contexte et compte tenu de l'évolution démographique, il convient de prendre à temps des mesures afin d'assurer durablement les effectifs de l'armée et de garantir les prestations qui lui incombent en matière de sécurité.

Dans le droit du service civil, ces mesures doivent viser à réduire substantiellement le nombre des admissions au service civil, en particulier celles de personnes incorporées dans l'armée après l'école de recrues (ER). De 2013 à 2018, ces départs ont totalisé entre 36 et 40 % de l'ensemble des admissions, soit 2000 à 2700 départs après l'ER.

Contenu du projet Le projet prévoit la mise en oeuvre des huit mesures suivantes: ­

mesure 1: minimum de 150 jours de service;

­

mesure 2: délai d'attente de 12 mois;

­

mesure 3: facteur 1,5 aux officiers et sous-officiers;

­

mesure 4: interdiction des affectations nécessitant des études de médecine humaine, dentaire ou vétérinaire;

­

mesure 5: pas d'admission de militaires n'ayant plus de jours de service à accomplir;

­

mesure 6: obligation d'accomplir une période d'affectation par année dès l'admission;

­

mesure 7: obligation pour les requérants ayant déposé leur demande pendant l'ER de terminer leur affectation longue au plus tard pendant l'année civile qui suit l'entrée en force de la décision d'admission;

­

mesure 8: aucune affectation à l'étranger.

2430

FF 2019

Message 1

Contexte

1.1

Motif de la révision: trois phénomènes problématiques

Trois phénomènes problématiques touchant le service civil contribuent à mettre en danger les effectifs de l'armée: ­

le nombre élevé d'admissions (cf. ch. 1.1.1);

­

le nombre élevé de militaires qui quittent les formations de l'armée après avoir accompli l'école de recrues pour rejoindre le service civil (cf. ch. 1.1.2);

­

le passage de spécialistes et de cadres de l'armée au service civil (cf. ch. 1.1.3).

1.1.1

Augmentation des admissions

Développement du service civil Depuis son introduction en 1996, le service civil a gagné en importance.

février 2011 Révision de l'ordonnance

avril 2009 Preuve par l'acte

4000

6205 5269

6169

5836

5757

5423

6785 4670

5000

5139

6000

6826

6720

7000

1632

1463

1441

1518

1382

1967

1651

1394

1619 96

1000

1034

960

2000

1175

3000

0 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

Après la suppression de l'examen de conscience, le nombre des admissions est passé de 1632 en 2008 à 6720 en 2009. Dans son message du 27 février 2008 concernant la modification des lois fédérales sur le service civil et sur la taxe d'exemption de

2431

FF 2019

l'obligation de servir1, le Conseil fédéral estimait que le nombre annuel des admissions ne dépasserait pas 2500. En réponse à la forte augmentation du nombre des admissions après l'introduction du régime de la preuve par l'acte en 2009, l'ordonnance du 11 septembre 1996 sur le service civil (OSCi) 2 a été modifiée le 10 décembre 20103. L'ordonnance révisée est entrée en vigueur le 1 er février 2011.

Depuis, le nombre des admissions a néanmoins évolué comme suit: Année

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Admissions

4670

5139

5423

5757

5836

6169

6785

6205

2018 montre une légère baisse du nombre des admissions. Cependant, les raisons en sont inconnues et le manque de recul ne permet pas de tirer des conclusions concernant l'évolution de la situation. Il n'est pas exclu que le changement apporté au système d'instruction le 1er janvier 2018, avec le passage à 2 ER par année au lieu de 3, provoque une imprécision momentanée ou un report du dépôt des demandes d'admission. Le nombre des admissions à la fin de l'année 2018 était en tout cas nettement supérieur à 6000. Un nombre aussi élevé de départs est susceptible de menacer l'effectif réglementaire de l'armée.

Le nombre des admissions en janvier 2019 a augmenté de 10,7 % par rapport à celui de janvier 2018.

Entre 2011 et 2018, le nombre des personnes astreintes au service civil est passé de presque 27 000 à presque 50 000, tandis que le nombre des jours de service civil accomplis chaque année est passé de presque 1,1 million à presque 1,7 million.

L'augmentation du nombre des jours de service accomplis est proportionnellement plus faible que celle du nombre des personnes astreintes. Cet écart est dû à la faible augmentation du nombre de personnes astreintes auxquelles il reste des jours de service à accomplir (d'un peu plus de 21 000 en 2011 à presque 27 000 en 2018).

Les personnes astreintes accomplissent en effet leurs jours de service de plus en plus tôt. Elles restent ensuite astreintes au service civil (en vue d'interventions éventuelles dans le cadre du service d'appui ou du service actif) jusqu'à leur libération ordinaire, mais sans accomplir d'autres jours de service.

Mise en danger des effectifs de l'armée Au cours des années 2014 à 2016, le nombre des militaires incorporés qui ont quitté prématurément l'armée (pour cause d'inaptitude au service, de passage au service civil, de départ à l'étranger, de décès, etc.) a systématiquement dépassé, et de loin, la valeur de référence définie dans le projet de développement de l'armée (DEVA), qui est de 1,5 %.

1 2 3

FF 2008 2379 2431 RS 824.01 RO 2011 151

2432

FF 2019

Année

2014/2015

2015/2016

2016/2017

2017*

Part des militaires incorporés qui ont quitté prématurément l'armée

2,7 %

2,87 %

2,82 %

3,11 %

* Les chiffres 2018 ne seront disponibles qu'après le recensement de l'armée, en avril 2019.

En 2014/2015 et en 2015/2016, la valeur de référence définie dans le DEVA pour le nombre de premières incorporations dans l'armée (18 000) n'a pas été atteinte. En 2016/2017 et 2017/2018, elle l'a été de justesse.

Année

2014/2015

2015/2016

2016/2017

2017/2018*

2018/2019*

Nombre de recrues incorporées dans l'armée

17 561

17 499

18 276

18 512

17 100*

* Lors du bouclage du présent message, les chiffres définitifs pour l'année 2018/2019 n'étaient pas encore disponibles. En effet, les données relatives à toutes les écoles de recrues et de cadres ne sont relevées d'après le nouveau système d'instruction que depuis l'été 2018. Une évaluation complète sera disponible début 2019. Le chiffre pour 2018/2019 pourrait dépasser légèrement 17 100.

Dans sa réponse du 24 mai 2017 à l'interpellation Fricker du 17 mars 2017 (17.3238 «Service civil et baisse des effectifs de l'armée»), le Conseil fédéral n'exclut pas que l'effectif réglementaire prévu par le DEVA (100 000 militaires) ne puisse être atteint à moyen terme (dans les cinq ans suivant la mise en oeuvre du DEVA) si le renouvellement annuel effectif de l'armée s'écarte nettement des valeurs de référence mentionnées plus haut.

Le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) et le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) ont déjà entrepris de mettre en oeuvre dans leur domaine de compétence respectif certaines recommandations du groupe d'étude sur l'obligation de servir en vue d'améliorer la situation. En règle générale, plusieurs années sont nécessaires avant que les mesures déploient leurs effets sur le personnel de l'armée de milice.

Compte tenu de l'évolution démographique et de l'augmentation des admissions au service civil, le Conseil fédéral entend dès lors prendre des mesures supplémentaires en vue d'assurer durablement les effectifs de l'armée, afin qu'elle puisse fournir les prestations qui lui incombent en matière de sécurité.

1.1.2

Nombreuses admissions de militaires incorporés dans l'armée

Des 6785 personnes admises au service civil en 2017, 45,7 % avaient déposé leur demande d'admission avant l'ER, 14 % pendant l'ER et 40,4 % après l'ER (une fois incorporées dans l'armée). Fin 2018, la répartition était légèrement différente: 49 % des personnes admises au service civil avaient déposé leur demande d'admission avant l'ER, 15 % pendant l'ER et 36 %, après l'ER. Les raisons de cette légère différence ne sont pas connues. Il n'est pas exclu qu'elle soit liée au changement du 2433

FF 2019

système d'instruction mentionné plus haut. Il n'est cependant pas possible de prévoir avec certitude de quelle manière les chiffres évolueront avant l'entrée en vigueur d'une modification législative.

Parmi les 40,4 % de personnes ayant déposé leur demande après l'ER en 2017 (soit 2738 militaires), si l'on considère uniquement les soldats et les appointés, on constate qu'environ 75 % d'entre eux ont été admis avant la fin du deuxième cours de répétition et environ 50 % entre la fin du premier cours de répétition et la fin du deuxième (selon les modèles de cours de répétition actuels).

Si l'on considère le nombre de jours de service militaire plutôt que les cours de répétition, tous grades militaires et tous modèles de service confondus, on constate ce qui suit: en 2017, 6 % des militaires avaient accompli moins de 124 jours de service au moment de leur admission au service civil, 56 %, entre 124 et 164 jours de service, et 38 %, plus de 164 jours de service.

La répartition des admissions au service civil selon le moment du dépôt de la demande est certes relativement stable depuis plusieurs années. Cependant, l'augmentation en chiffres absolus est nette.

Année

... avant l'ER

Nombre des demandes d'admission déposées ...

... pendant l'ER

... après l'ER

Nombre total des demandes d'admission

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2488

2789

2669

2872

3098

3037

46 %

48 %

46 %

47 %

46 %

49 %

874

808

903

926

949

904

16 %

14 %

15 %

15 %

14 %

15 %

2061

2160

2264

2371

2738

2264

38 %

38 %

39 %

38 %

40 %

36 %

5423

5757

5836

6169

6785

6205

Cette évolution, en particulier en ce qui concerne les admissions après l'ER et l'incorporation dans l'armée, perturbe le bon fonctionnement de l'instruction de l'armée. Le risque principal est qu'elle fasse obstacle au renouvellement de l'armée et que l'effectif réglementaire ne puisse être atteint. Des soldats dont la formation a demandé un investissement considérable en temps et en argent ne sont plus à la disposition des formations et ne contribuent plus à ce que l'armée fournisse les prestations que les instances politiques exigent d'elle. Les chiffres 2018 montrent certes une nette baisse du nombre des demandes d'admission après l'ER. Cependant, le manque de recul ne permet pas d'affirmer que la tendance est inversée.

2434

FF 2019

1.1.3

Passage de spécialistes et de cadres de l'armée au service civil

En 2017, 401 sous-officiers et 88 officiers ont été admis au service civil; en 2018, de janvier à octobre, les chiffres étaient de 306 sous-officiers et 44 officiers.

Le tableau ci-dessous illustre la répartition entre les différents grades.

Nombre d'admissions au service civil

Grade

2017

2018*

Caporal

34

14

Sergent

305

236

Sergent-chef

0

2

Sergent-major

26

5

Fourrier

36

33

Sergent-major chef

0

16

Lieutenant

37

18

Premier-lieutenant

43

21

Capitaine

7

4

Major

1

1

Total

489

350

* Chiffres jusqu'à octobre.

Le principal problème est la perte de connaissances et de compétences en matière de conduite et la perte de savoir-faire technique, dont la transmission a demandé un investissement considérable en temps et en argent. Étant donné qu'il est rare que les personnes astreintes au service civil exercent des tâches de conduite ou mettent à profit les connaissances techniques acquises à l'armée dans le cadre de leurs affectations, ces connaissances ne peuvent être utilisées que, au mieux, de manière indirecte et il est donc exceptionnel qu'elles bénéficient à la société.

D'après les données du médecin en chef de l'armée, il manquait notamment plus de 270 médecins au sein de la troupe, dans les états-majors et les centres de recrutement en 2017.

Enfin, la situation relative au renouvellement des cadres de l'armée s'aggrave.

L'effectif réglementaire des officiers est encore atteint à 100 % et celui des sousofficiers à 102 %. Cependant, chez les officiers, le renouvellement des capitaines et des officiers supérieurs n'est plus que de 84 %4.

4

Recensement de l'armée en 2016 ­ Version abrégée, août 2016, personnel de l'armée, EM cond A, p. 7. Le document peut être consulté à l'adresse suivante: www.armee.admin.ch > Média > Publications > Recensement de l'armée 2016, version abrégée 2016.

2435

FF 2019

1.1.4

Nouvelles incertitudes et nécessité d'intervenir

Compte tenu de l'évolution de la situation relative au renouvellement des effectifs de l'armée depuis 2014 (approbation par le Conseil fédéral du troisième rapport sur les effets du régime de la preuve par l'acte 5) et de l'incertitude quant à la possibilité d'atteindre les valeurs de référence définies dans le DEVA, le Conseil fédéral n'exclut pas que l'effectif réglementaire tel que prévu par le DEVA soit menacé à moyen terme. Il est dans l'intérêt public de prendre à temps des mesures ciblées de manière à garantir la capacité de l'armée à fournir les prestations qui lui incombent en matière de sécurité.

Le service civil est un des facteurs qui exercent une influence sur les effectifs de l'armée. Compte tenu des nouveaux éléments concernant le renouvellement des effectifs de l'armée, le développement du service civil depuis 2014 et son évolution à venir doivent être analysés sous un angle nouveau et des mesures ciblées doivent être prises au niveau du service civil pour sauvegarder l'intérêt public susmentionné.

Pour cette raison, une révision de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le service civil (LSC)6 s'impose.

1.2

Solutions étudiées et solution retenue

Au cours des débats au sujet de l'augmentation du nombre des admissions au service civil, notamment par rapport la situation relative au renouvellement des effectifs de l'armée, les instances politiques ont demandé d'autres mesures de réduction de l'attrait du service civil, parfois à plusieurs reprises. Ces mesures ont été discutées.

Dans le deuxième rapport sur les effets de la preuve par l'acte 7, le Conseil fédéral a examiné quatre manières de procéder: complication de l'exécution afin de réduire encore l'attrait du service civil (par exemple: interdiction de loger chez soi, prolongation du temps de travail journalier, prolongation supplémentaire de la durée minimale de la période d'affectation, suppression de l'obligation faite aux personnes astreintes de proposer elles-mêmes des places d'affectation, interdiction des affectations à l'étranger, obligation d'accomplir un travail physiquement plus éprouvant); hausse du facteur de calcul de la durée du service civil; mise en oeuvre complète ou partielle de l'initiative parlementaire Engelberger du 16 décembre 2010 (10.528: «Pour un service civil, et non un libre-service»); réintroduction de l'examen de conscience. Il les a cependant toutes jugées inappropriées, parfois en raison de la nécessité de trouver un nombre suffisant d'établissements et de places d'affectation.

Dans son rapport du 20 janvier 2015 à l'intention de la Commission de la politique de sécurité du Conseil national concernant les variantes à l'art. 16, al. 2, LSC et leur

5 6 7

Le rapport peut être consulté à l'adresse suivante: www.admin.ch > Documentation > Communiqués > 25.06.2014 («Service civil: pas de danger pour les effectifs de l'armée»).

RS 824.0 Le rapport peut être consulté à l'adresse suivante: www.admin.ch > Documentation > Communiqués > 27.06.2012 («Admission au service civil: pas de mesures supplémentaires pour le moment»).

2436

FF 2019

évaluation8, le DEFR est parvenu à la conclusion que toutes les variantes impliquant de limiter le droit des militaires à déposer en tout temps une demande d'admission au service civil présentaient nettement plus d'inconvénients que d'avantages.

Les mesures précitées ne paraissent toujours pas adéquates, à l'exception de l'interdiction des affectations à l'étranger. Le Conseil fédéral ne les a donc pas reprises dans le projet de loi. C'est notamment le cas de la réintroduction de l'examen de conscience, de l'attribution d'office de places d'affectation aux personnes astreintes par l'administration et de la restriction du droit de déposer en tout temps une demande d'admission.

1.3

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de législature 2015 à 20199 ni dans l'arrêté fédéral du 14 juin 2016 sur le programme de législature 2015 à 201910.

Le renouvellement des effectifs de l'armée conformément aux valeurs de référence définies dans le DEVA étant potentiellement menacé à moyen terme, notamment en raison des départs constants de militaires vers le service civil, il est cependant urgent d'intervenir. Les huit mesures proposées permettent au service civil d'apporter une contribution substantielle et indispensable à la garantie durable des effectifs de l'armée.

2

Procédure de consultation

2.1

Projet mis en consultation

Le 15 novembre 2017, le Conseil fédéral a chargé le DEFR d'élaborer un projet de révision de la LSC dans le but de diminuer substantiellement le nombre des admissions au service civil en mettant en oeuvre sept mesures. Le projet qui lui a été présenté prévoyait les sept mesures décrites ci-dessous:

8

9 10

­

Mesure 1: 150 jours de service civil pour toutes les personnes admises au service civil qui devraient accomplir moins de 150 jours de service d'après le facteur 1,5 et qui n'ont pas encore accompli leurs services d'instruction à l'armée.

­

Mesure 2: pour les militaires incorporés (ER accomplie), délai d'attente de 12 mois entre le dépôt de la demande et l'admission, pendant lequel ils sont tenus de continuer de faire leur service militaire.

Le rapport peut être consulté à l'adresse suivante: www.civi.admin.ch > Infothèque > Publications > Études et rapports («Rapport sur les périodes possibles de dépôt de la demande»).

FF 2016 981 FF 2016 4999

2437

FF 2019

­

Mesure 3: facteur 1,5 pour les sous-officiers supérieurs et les officiers (le facteur actuel est de 1,1) et pour les cas spéciaux (notamment les anciens officiers spécialistes et anciens cadres qui n'ont pas encore accompli leur service pratique, pour lesquels le facteur actuel est de 1,1 à 1,5).

­

Mesure 4: interdiction aux médecins de faire leur service civil avec un cahier des charges de médecin.

­

Mesure 5: pas d'admission au service civil pour les militaires qui ont déjà accompli tous leurs jours de service d'instruction. Le but est d'éviter qu'ils puissent se soustraire facilement au tir obligatoire, auquel ils sont astreints, en vue d'interventions dans le cadre du service d'appui ou du service actif, jusqu'à la fin de l'année qui précède la libération des obligations militaires.

­

Mesure 6: obligation de faire une période de service par année dès l'année civile suivant l'admission au service civil.

­

Mesure 7: obligation pour les personnes qui ont déposé leur demande d'admission pendant l'ER de terminer leur affectation longue de 6 mois (180 jours de service) au plus tard l'année civile qui suit l'entrée en force de la décision d'admission (le délai est actuellement de 3 ans).

Par décision du 20 juin 2018, le Conseil fédéral a mis le projet de loi en consultation. La procédure de consultation a pris fin le 11 octobre 2018.

Au total, le DEFR a reçu 205 avis: ­

24 avis de cantons;

­

9 avis de partis politiques;

­

2 avis d'associations faîtières de l'économie;

­

2 avis d'associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne;

­

24 avis d'organisations concernées ayant été invitées à se prononcer;

­

18 avis d'organisations concernées n'ayant pas été invitées à se prononcer;

­

122 avis d'établissements d'affectation;

­

4 avis de particuliers.

2.2

Examen des résultats de la procédure de consultation

Même si des avis divergents ont été exprimés et que le projet crée un clivage, une tendance claire en est ressortie sur les points essentiels, notamment auprès des 24 cantons: il faut réviser le droit du service civil et poursuivre sur la voie choisie (mise en oeuvre des 7 mesures). Les principales déclarations et positions des partici11 pants , retenues sur la base de leur poids politique, sont présentées ci-après. Le 11

Le rapport sur les résultats de la consultation est publié à l'adresse suivante: www.admin.ch > Droit fédéral > Consultations > Procédures de consultation terminées > 2018 > DEFR.

2438

FF 2019

présent chapitre expose également les conclusions qui en ont été tirées pour la suite des opérations.

En plus des cantons, 4 partis (PLR, PDC, UDC et Union démocratique fédérale [UDF]), la Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers (CG MPS) et certaines associations (notamment l'Union suisse des arts et métiers, la Société suisse des officiers [SSO] et la Conférence nationale des Associations militaires faîtières sont clairement d'avis qu'il est nécessaire d'intervenir au niveau du service civil.

Le PLR, le PDC, l'UDC, l'UDF et 19 cantons soutiennent l'ensemble des 7 mesures.

Toutefois, pour beaucoup des participants à la consultation mentionnés ci-dessus qui confirment la nécessité d'intervenir au niveau du service civil (notamment le PLR, le PDC, l'UDC, 18 cantons, la CG MPS et la SSO), les mesures proposées ne vont pas assez loin. Dans certains cas, ils mettent également en doute leur efficacité.

À l'inverse, le PS, les Verts, le Parti Bourgeois-Démocratique, le Parti vert'libéral, le Parti évangélique, 3 cantons (GR, ZG, NW), différentes associations (notamment l'Union des villes, le Conseil suisse des activités de jeunesse, H+ Les Hôpitaux de Suisse, la Fédération des Églises protestantes de Suisse et insieme Fédération suisse des associations de parents de personnes mentalement handicapées) et la grande majorité des établissements d'affectation rejettent le projet. Pour différentes raisons, mis à part les 3 cantons, ils ne jugent pas nécessaire d'intervenir au niveau du service civil. Les principaux arguments avancés contre le projet et ses différentes mesures sont les suivants: la révision serait contraire au droit international et à la Constitution (pour violation du principe d'égalité, de l'interdiction de l'arbitraire et du principe de proportionnalité, notamment en ce qui concerne les mesures 1 et 2), l'intérêt public ferait défaut, le projet contredirait les précédents rapports du Conseil fédéral, le renouvellement des effectifs de l'armée ne serait pas menacé, une intervention au niveau de l'armée serait suffisante, une vision globale du système de l'obligation de servir ferait défaut, il ne faudrait pas favoriser la «voie bleue», la société aurait besoin des prestations du service civil et le recul du nombre de personnes
astreintes au service civil entraînerait une augmentation des charges des cantons et des communes.

La mesure 1 est jugée particulièrement justifiée par certains participants à la consultation. D'autres dénoncent notamment le facteur trop élevé qu'elle induit: d'après le PS, ce facteur donnerait un caractère punitif à la mesure. Cette critique passe totalement à côté du fait que le projet vise à ce que les militaires qui affirment être confrontés à un conflit de conscience alors qu'ils ont déjà accompli une part considérable de leurs obligations militaires acceptent d'être soumis à des exigences plus élevées concernant la preuve par l'acte et donc effectuent un nombre minimum de jours de service civil.

Le délai d'attente de 12 mois avant le traitement de la demande proposé par la mesure 2 permet à l'armée de rechercher le dialogue avec le requérant, dans le but de trouver au sein de l'armée une solution qui convienne aux deux parties. En effet, le départ de personnes incorporées est particulièrement lourd de conséquences pour le contribuable et pour l'instruction de l'armée lorsqu'elles ont suivi une formation 2439

FF 2019

de spécialiste ou de cadre, formations qui demandent un investissement considérable en temps et en argent. Les critiques émises par les participants à la consultation au sujet de la mesure 2 ne prennent pas non plus ce phénomène en considération. Les mesures 1 et 2 ont pour objectif de diminuer le nombre des personnes incorporées qui quittent l'armée pour le service civil. Elles instaurent délibérément une différence de traitement selon le moment de l'admission au service civil (cf. ch. 7.1.2).

Le Conseil fédéral juge cette différence de traitement admissible du point de vue du principe de proportionnalité (proportionnalité au sens strict, compte tenu de l'interdiction de faire du service civil une punition). Il considère que les critiques émises ne sont pas probantes et maintient donc les mesures 1 et 2, compte tenu notamment des avis des participants à la consultation qui y sont favorables (notamment l'immense majorité des cantons, la CG MPS, le PDC, le PLR, l'UDC et l'UDF).

Les critiques portant sur les autres mesures et sur l'idée qu'il n'est pas nécessaire de réviser la LSC ne tiennent pas compte du fait que les mesures proposées sont fondées sur le principe, inscrit depuis toujours dans la LSC, qu'il n'y a pas de libre choix entre le service militaire et le service civil. Le service civil est un service de remplacement pour les personnes astreintes au service militaire qui sont en proie à un conflit de conscience. Les mesures proposées n'y changent rien, puisqu'aucune d'entre elles ne touche au droit constitutionnel de faire un service civil de remplacement. Il convient toutefois de veiller à ne pas mettre en péril par des mesures excessives la solution qu'apporté le service civil au problème du refus de servir pour des motifs de conscience. Les sept mesures s'attaquent pragmatiquement aux problèmes identifiés concernant le passage au service civil.

Donnant suite à la demande de la majorité des participants à la consultation de prévoir des mesures supplémentaires, le Conseil fédéral ajoute au projet une huitième mesure, à savoir l'interdiction des affectations à l'étranger, voulue par l'UDC, 8 cantons (BE, SZ, NW, GL, FR, AI, GR, TI), la CG MPS, l'Association suisse des sous-officiers, le Groupe GIARDINO et la Communauté de travail pour une armée de milice efficace et assurant la paix.
Pour le reste, le Conseil fédéral estime qu'il faut faire preuve de retenue, notamment afin d'éviter le recours à la «voie bleue». De son point de vue, il n'est pas nécessaire actuellement de durcir davantage les conditions d'accès au service civil. En outre, un tel durcissement ne semble pas judicieux au vu des critiques émises par les participants à la consultation.

Certains participants à la consultation ont relevé que la société avait besoin des prestations du service civil et que le recul du nombre des personnes astreintes entraînerait une augmentation des charges financières des cantons et des communes. Le Conseil fédéral tient à souligner expressément que, contrairement à l'armée et à la protection civile, qui sont des organisations de premier recours et doivent être à même de remplir complètement leur mission en tout temps, le service civil n'a pas d'effectif défini. Les besoins de la société ne font donc pas partie des critères déterminants pour l'admission et, partant, pour le nombre de personnes astreintes au service civil. En d'autres termes, le nombre de personnes astreintes avec lesquelles le service civil s'acquitte de sa mission fondamentale de fournir un travail civil d'intérêt public dépend exclusivement du nombre des personnes qui déposent une 2440

FF 2019

demande d'admission et remplissent les critères d'admission. Sont admises les personnes qui affirment dans leur demande être en proie à un conflit de conscience et qui sont disposées à accomplir un service civil d'une durée nettement supérieure à celle du service militaire, conformément aux dispositions prévues par la loi (preuve par l'acte).

Certains participants à la consultation ont estimé qu'il manquait une vue d'ensemble du système de l'obligation de servir. Le Conseil fédéral rappelle à cet égard qu'il a constitué un groupe d'étude sur le système de l'obligation de servir et qu'il a pris 12 connaissance de son rapport, contenant une vue d'ensemble actuelle, en été 2016 .

Le 28 juin 2017, il a ordonné que la situation relative au renouvellement des effectifs de l'armée et de la protection civile soit analysée d'ici à la fin de l'année 2020. Cette analyse lui permettra de décider s'il est nécessaire de proposer des modifications du système de l'obligation de servir allant au-delà de la présente révision. Les travaux ont commencé, sous la direction du DDPS. Par ailleurs, une révision de la loi fédé13 rale sur la protection de la population et sur la protection civile est en cours: la consultation a pris fin en 2018 et le projet a été transmis au Parlement. Le Conseil fédéral procède donc de manière structurée, étape par étape, et on ne saurait affirmer que la vue d'ensemble fait défaut. Aussi est-il d'avis que la révision partielle de la LSC doit être mise en oeuvre rapidement. Cette révision n'empêchera pas de poursuivre par ailleurs la réflexion sur un nouveau système d'obligation de servir.

Ainsi, malgré les critiques mentionnées plus haut, le Conseil fédéral maintient les 7 mesures proposées et en ajoute une 8e, en réponse aux demandes formulées (cf. ch. 4.1). Il faut veiller attentivement à ce que le principe selon lequel il n'y a pas de libre choix entre le service militaire et le service civil soit respecté, tout en tenant compte de la réalité de l'exécution du service civil. Le Conseil fédéral estime que l'intérêt public de renouveler les effectifs de l'armée conformément aux besoins afin qu'elle puisse s'acquitter de sa mission est important et qu'il prime l'intérêt des personnes astreintes au service militaire à pouvoir passer de l'armée au service civil aux meilleures conditions possibles. Le projet tient aussi compte des demandes des participants à la consultation, notamment les cantons, qui ont confirmé la nécessité d'intervenir.

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Des grands voisins de la Suisse, seule l'Autriche connaît encore l'obligation de servir et propose un service civil comparable au service civil suisse. Dans les années 2000, la France, l'Allemagne et l'Italie ont suspendu l'obligation générale de servir ou l'ont supprimée.

En Autriche, seules les personnes déclarées aptes au service militaire peuvent faire le service civil. Pour être admises, elles doivent déclarer en termes généraux ne pas 12

13

Le rapport peut être consulté à l'adresse suivante: www.admin.ch > Documentation > Communiqués > 06.07.2016 («Avenir de l'obligation de servir: le Conseil fédéral prend connaissance du rapport du groupe de travail»).

RS 520.1; FF 2019 515 (message) et 591 (projet d'acte)

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FF 2019

pouvoir faire le service militaire pour des raisons de conscience. À cet égard, le système autrichien est similaire à celui de la Suisse. En Autriche, le service civil dure 9 mois et doit être effectué en une seule fois (puisque le service militaire dure 6 mois, le facteur de calcul de la durée du service est de 1,5, comme en Suisse). Les différences entre les deux systèmes résident notamment dans l'exécution du service civil. Les domaines d'activité du service civil autrichien sont comparables à ceux du service civil suisse, à cette exception que les services de secours (accompagnement d'ambulances, etc.) ne font pas partie des domaines d'activité du service civil suisse.

En Autriche, en 2016, un peu plus de 40 % des périodes d'affectation ont été effectuées dans ce domaine, qui est donc le principal domaine d'activité du service civil autrichien. On constate également des différences en ce qui concerne le nombre des admissions. En 2016, environ 15 000 personnes ont été admises au service civil en Autriche, contre 6169 en Suisse.

Contrairement à la Suisse, l'Autriche déplore une diminution du nombre des admissions au service civil en raison de classes d'âge à faible natalité.

Les conditions et règles en vigueur en matière de service civil dans les pays européens environnants sont donc très différentes de celles appliquées en Suisse. Il n'y a notamment pas de réglementations visant à diminuer l'attrait du service civil, comme celles qui sont proposées dans le présent projet. C'est pourquoi il n'est pas possible de tirer des exemples ci-dessus des conclusions applicables à la Suisse.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

Le projet prévoit la mise en oeuvre de sept mesures, ordonnée par le Conseil fédéral dans sa décision du 15 novembre 2017 (cf. ch. 2.1). Il contient également une huitième mesure, intégrée à la suite de la consultation, à savoir l'interdiction des affectations à l'étranger.

­

L'interdiction d'affecter les civilistes à l'étranger porte aussi sur l'accompagnement de camps et d'excursions à l'étranger organisés par des institutions sociales et de soins suisses pour des personnes ayant besoin d'assistance.

­

Le domaine d'activité «coopération au développement et aide humanitaire» (art. 4, al. 1, let. g, LSC) n'est cependant pas supprimé, parce que les personnes astreintes au service civil peuvent toujours être engagées en Suisse dans des projets relevant de ce domaine d'activité.

­

Dans le domaine d'activité «prévention et maîtrise des catastrophes et des situations d'urgence, rétablissement après de tels événements» (art. 4, al. 1, let. h, LSC), les personnes astreintes au service civil pourraient toujours être affectées à la maîtrise et, le cas échéant, au rétablissement dans les régions frontalières des pays voisins (p. ex. des deux côtés du Rhin en cas d'inondation), pour autant que les autorités compétentes et les organisations d'intervention le demandent et que l'engagement des personnes astreintes soit coordonné avec elles (cf. art. 7a, al. 2, LSC).

2442

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4.1.1

Mesures 1 et 2

Ces deux mesures sont à même de réduire de façon substantielle le nombre de militaires qui quittent l'armée pour le service civil après avoir achevé leur instruction.

Mesure 1: minimum de 150 jours de service La mesure 1 prévoit que le nombre total de jours de service à accomplir (à l'armée, puis au service civil) augmente en fonction du moment du passage au service civil.

À mesure qu'elles auront accompli davantage de service militaire, les personnes astreintes examineront leurs motifs et leur décision de passer au service civil de plus en plus attentivement, compte tenu notamment des effets de cette décision sur leur vie privée et sur leur vie professionnelle. Un nombre minimum de 150 jours de service civil est nécessaire afin qu'il y ait un effet dès le premier cours de répétition.

Suivant le moment du passage au service civil, le facteur 1,5 (durée du service civil par rapport à la durée du service militaire) augmente pour atteindre 37,5 au maximum.

Mesure 2: délai d'attente de 12 mois Le délai d'attente de 12 mois prévu par la mesure 2 est nécessaire pour que l'armée puisse étudier et, le cas échéant, mettre en oeuvre des mesures individuelles permettant aux militaires concernés de continuer à faire du service militaire.

4.1.2

Mesures 3 et 4

Ces deux mesures visent à réduire le nombre des personnes qualifiées, à savoir les cadres et les spécialistes, qui quittent l'armée pour le service civil.

Mesure 3: facteur 1,5 aux officiers et sous-officiers La règle actuelle, qui place les intérêts de l'individu au premier plan, permet de tenir compte des jours supplémentaires accomplis ou à accomplir par les officiers et les sous-officiers. Le projet prévoit de tenir davantage compte des besoins de l'armée, notamment de la nécessité que les efforts consentis en vue de l'instruction portent leurs fruits dans le cadre de l'instruction ou des interventions. L'application d'un facteur moins élevé pour les cadres s'est révélée inopportune, puisqu'elle fait perdre à l'armée des militaires exerçant des fonctions exigeantes. Il convient de se doter d'un instrument plus efficace pour y remédier.

Mesure 4: interdiction des affectations nécessitant d'avoir commencé ou achevé des études de médecine humaine, dentaire ou vétérinaire Les affectations qui servent en premier lieu les intérêts de la personne astreinte au service civil, en particulier sa formation de base ou sa formation continue, sont déjà interdites (art. 4a, let. d, LSC). L'application de cette disposition ne suffit cependant pas à éviter que des personnes qui ont commencé ou achevé des études de médecine humaine, dentaire ou vétérinaire mettent l'accomplissement du service civil à profit pour leur formation ou leur expérience professionnelle. La seule manière de 2443

FF 2019

l'empêcher est de donner d'autres cahiers des charges à ces personnes pour le service civil. Tel est l'objectif de la mesure 4.

4.1.3

Mesures 5 à 8

Ces quatre mesures visent à renforcer l'équivalence entre le service militaire et le service civil. Elles réduisent l'attrait du service civil de manière ciblée et améliorent l'application du principe de l'équivalence entre l'accomplissement du service militaire et l'accomplissement du service civil.

Mesure 5: pas d'admission de militaires n'ayant plus de jours de service à accomplir Les militaires qui sont admis au service civil alors qu'ils n'ont plus de jours de service militaire à accomplir ne sont plus à la disposition de l'armée pour le service d'appui ou le service actif. Dans une situation ordinaire, ils ne fournissent cependant pas de preuve par l'acte au service civil. Ils ne sont par ailleurs plus astreints au tir, ce qui constitue un avantage concret non souhaitable par rapport aux autres militaires qui ont terminé leurs services d'instruction (et qui peuvent être convoqués à un service d'appui ou à un service actif). Interdire l'admission dans ces cas est compatible avec les conditions actuelles de l'admission au service civil (notamment le fait de déclarer être en proie à un conflit de conscience et être disposé à accomplir un service civil au sens de la loi). Cette interdiction est nécessaire pour éviter de favoriser ces personnes par rapport aux militaires astreints au tir obligatoire. En cas de service d'appui ou de service actif, le droit constitutionnel de faire un service civil de remplacement doit cependant être maintenu, grâce à une précision apportée à l'art. 1 LSC.

Mesure 6: obligation d'accomplir une période d'affectation par année dès l'admission L'obligation de faire du service civil chaque année dès l'année suivant l'admission est équivalente aux obligations des militaires et réduit l'attrait du service civil. Le fait que le service civil et le service militaire soient en principe accomplis pendant la même période de vie renforce l'équivalence entre les deux types de service (la plus grande partie du service est en général accomplie entre 20 et 25 ans).

Mesure 7: obligation pour les requérants ayant déposé leur demande pendant l'ER de terminer leur affectation longue au plus tard pendant l'année civile qui suit l'entrée en force de la décision d'admission L'harmonisation entre l'accomplissement du service militaire et celui du service civil nécessite également de
prendre en compte le fait que les recrues qui bénéficient d'une libération anticipée de l'ER sont en général convoquées à l'ER suivante, ou peu de temps après. La règle actuelle, qui donne aux personnes admises au service civil avant d'avoir accompli l'ER trois ans pour accomplir leur affectation longue, leur confère un avantage indésirable par rapport aux recrues. Il convient donc de corriger cette situation en alignant les règles applicables au service civil sur celles qui régissent l'accomplissement de l'ER.

2444

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Mesure 8: aucune affectation à l'étranger Cette mesure vise à éviter que les personnes astreintes au service civil soient privilégiées par rapport aux personnes astreintes au service militaire, puisque ces dernières ne peuvent pas organiser elles-mêmes des périodes de service à l'étranger. Elle contribue ainsi à la réduction souhaitée de l'attrait du service civil.

4.2

Effets attendus

Il n'est pas possible de déterminer avec certitude quelle sera l'ampleur de la diminution du nombre des admissions au service civil. Le Conseil fédéral table sur le fait que les mesures 1 et 2 freineront nettement le passage au service civil des soldats incorporés dans l'armée après l'ER. Il se peut qu'une partie d'entre eux choisisse en conséquence de déposer leur demande avant ou pendant l'ER. Il convient en outre de tenir compte du fait que le service civil n'est qu'un des facteurs qui exercent une influence sur les effectifs de l'armée. Il ne faut donc pas s'attendre à ce que les départs de l'armée diminuent dans les mêmes proportions que le nombre des admissions au service civil.

4.3

Mise en oeuvre

La révision de la loi devrait être mise en oeuvre à partir de mai 2020. L'entrée en vigueur devra se faire le plus tôt possible, étant donné qu'une augmentation notable du nombre des admissions est à prévoir dans la phase qui la précédera.

La Confédération est responsable de la mise en oeuvre, dont elle charge l'Office fédéral du service civil (CIVI), rattaché au DEFR.

La LSC est conçue comme une loi-cadre fixant des principes et des normes de délégation; les dispositions d'application figurent dans l'OSCi. Les modifications qu'il est prévu d'apporter à l'OSCi en vue de la mise en oeuvre des nouvelles normes de la LSC sont présentées dans le commentaire des dispositions, aux ch. 5 et 7.5.

La mise en oeuvre de la révision de la loi sera évaluée en continu dans le cadre du contrôle de gestion et de la gestion de la qualité du CIVI et dans le cadre d'échanges avec le DDPS.

5 Art. 1

Commentaire des dispositions Principe

L'al. 1 prévoit de limiter l'admission au service civil aux personnes qui n'ont pas encore accompli la totalité des services d'instruction que prévoit la législation militaire (art. 41 à 61 de la loi fédérale du 3 février 1995 sur l'armée et l'administration

2445

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militaire [LAAM]14). Cette restriction est liée à la mesure 5 et nécessite d'adapter les règles relatives à l'admission au service civil, qui figurent au chap. 2 (art. 16, Dépôt de la demande; art. 18, Admission).

L'al. 2 garantit que les personnes astreintes au service militaire qui ont accompli tous leurs jours de service militaire et qui sont convoquées à un service d'appui ou à un service actif puissent jouir de leur droit constitutionnel de faire un service civil de remplacement.

Art. 4a, let. e Cette nouvelle interdiction d'affectation est liée à la mesure 4 et va plus loin que l'art. 4a, let. d, qui interdit seulement les activités qui servent en premier lieu les intérêts de la personne astreinte. Elle est nécessaire afin d'éviter que les personnes qui ont commencé ou achevé des études de médecine ne retirent un bénéfice exagéré de leurs affectations de service civil pour leur formation continue ou leur expérience professionnelle, même si ces affectations ne servent pas en premier lieu leurs intérêts. L'interdiction ne s'applique pas à l'ensemble des professions médicales universitaires mentionnées à l'art. 2 de la loi fédérale du 23 juin 2006 sur les professions médicales universitaires15, mais uniquement aux médecins (y compris les psychiatres), aux médecins-dentistes et aux vétérinaires, qu'ils aient achevé leurs études universitaires ou non. Le droit constitutionnel de faire un service civil de remplacement demeure intact, mais sans droit de l'accomplir dans le domaine de son choix.

Art. 7 Cet article est abrogé, puisque les affectations à l'étranger ne sont plus possibles (mesure 8). Cette interdiction porte aussi sur l'accompagnement de camps et d'excursions à l'étranger organisés par des institutions sociales et de soins suisses pour des personnes ayant besoin d'assistance. Le droit constitutionnel de faire un service civil de remplacement demeure, mais sans droit de l'accomplir à l'étranger.

Art. 7a, al. 4 Lors de catastrophes et de situations d'urgence, il doit rester possible d'affecter des personnes astreintes au service civil dans les régions frontalières des pays voisins, par exemple des deux côtés du Rhin en cas d'inondation, pour autant que les autorités compétentes et les organisations d'intervention le demandent.

Art. 8

Durée du service civil ordinaire

Cette modification de l'al. 1 est une mise en oeuvre de la mesure 1, qui vise à réduire de manière substantielle les départs de militaires qui ont achevé leur instruction. En vertu du droit en vigueur, les exigences relatives à la preuve par l'acte sont inversement proportionnelles au temps passé à l'armée par le requérant. En effet, plus le nombre de jours de service militaire restant à accomplir est bas, moins le facteur de 14 15

RS 510.10 RS 811.11

2446

FF 2019

calcul de la durée du service civil (1,5 en règle générale) a d'effets. Le projet prévoit que le facteur 1,5 ne s'applique que s'il reste au requérant 100 jours de service militaire à accomplir au moins. Si son solde de jours de service est inférieur, il doit accomplir 150 jours de service civil, indépendamment du nombre de jours de service militaire restants.

Cette nouvelle disposition met également en oeuvre la mesure 3, qui vise à réduire le nombre de cadres et de spécialistes qui quittent l'armée pour le service civil après avoir achevé leur instruction. Elle prévoit en effet que le facteur 1,5 s'applique également aux cadres militaires, pour lesquels le droit en vigueur fixe un facteur plus bas (jusqu'à 1,1; cf. art. 8, al. 1, LSC et art. 27, al. 4 et 5, OSCi), en fonction de leur grade et du nombre de jours de service qu'ils ont effectués.

L'al. 2 est abrogé, puisqu'il n'y a plus d'affectations à l'étranger.

Art. 11, al. 2bis et 2ter L'al. 2bis est adapté à la suppression des affectations à l'étranger.

Al. 2ter: l'art. 21 prévoit que l'obligation d'accomplir des périodes d'affectation ne commence que l'année suivant l'entrée en force de la décision d'admission. Ainsi, les personnes dont la décision d'admission n'entre en force que l'année de leur libération ordinaire ne sont pas tenues de s'acquitter de cette obligation avant d'être libérées du service civil. En relevant l'âge de la libération, la modification du présent alinéa vise à garantir que ces personnes doivent elles aussi effectivement accomplir tous les jours de service qui leur ont été ordonnés.

Art. 13, al. 1 La modification de cette disposition est purement formelle (utilisation du sigle pour le renvoi à la LAAM).

Art. 16

Dépôt de la demande

Al. 1: cette modification est liée à la mesure 5 et complète, comme l'art. 18, le principe énoncé à l'art. 1.

L'exception prévue à l'al. 2 concernant le service d'appui et le service actif vise à garantir le droit constitutionnel de faire un service civil de remplacement. La mise en oeuvre de la mesure 1 (nouvel art. 8, al. 1) prévoit que les personnes visées sont tenues d'accomplir 150 jours de service civil pour apporter la preuve par l'acte de leur conflit de conscience.

Art. 17

Effet de la demande

Le titre de la version française a été harmonisé avec les titres des art. 16, 16a et 16b (suppression du mot «admission»).

L'al. 1 est modifié afin que la disposition ne s'applique plus qu'aux requérants qui ne sont pas encore incorporés dans l'armée. De légères modifications rédactionnelles y sont également apportées.

2447

FF 2019

L'al. 2 vise à mettre en oeuvre la mesure 2. Il se fonde sur la date de la confirmation de la demande, et non sur la date de son dépôt, afin que la mesure 2 s'applique à tous les militaires incorporés à l'armée. Dans le cas contraire, en effet, les requérants qui ont déposé leur demande pendant l'ER, avant d'être incorporés dans l'armée, mais qui ont été incorporés pendant la procédure d'admission ne seraient concernés que par la mesure 6. La date de la confirmation a été choisie parce qu'elle peut être déterminée de manière objective et qu'elle est en général proche de la décision d'admission. Il n'est pas possible de se fonder directement sur la date de l'admission, étant donné qu'elle dépend de facteurs sur lesquels on ne peut exercer qu'une influence insuffisante et qu'on ne peut la prévoir. Le délai d'attente est justifié pour autant que le requérant ne soit pas convoqué à un service d'appui ou à un service actif.

Al. 3: afin de préserver le droit constitutionnel d'accomplir un service civil, le projet ne prévoit pas de délai d'attente en cas de service d'appui ou de service actif.

Al. 4: le projet maintient la délégation de compétences législatives au Conseil fédéral pour les Suisses de l'étranger convoqués au service actif, pour les personnes dont la demande d'effectuer un service militaire sans arme a été rejetée moins de trois mois avant la prochaine période de service militaire et pour les personnes recrutées peu avant l'ER (art. 24, al. 2 et 3, OSCi). Le Conseil fédéral ne prévoira plus d'exceptions au tir obligatoire (art. 24, al. 1, OSCi), étant donné que les personnes incorporées dans l'armée doivent continuer d'accomplir le service militaire jusqu'à leur admission.

Art. 17a, al. 1 et 1bis Le moment de la participation à la journée d'introduction est précisé. Le délai actuel reste applicable pour les personnes qui ne sont pas incorporées dans l'armée ou qui sont convoquées à un service d'appui ou à un service actif au moment où elles déposent leur demande (al. 1). Il n'est pas utile de faire une distinction, pour les personnes non incorporées dans l'armée, entre celles qui sont convoquées à un service d'appui ou à un service actif et celles qui ne le sont pas, puisque les conséquences juridiques sont les mêmes. Le projet prévoit que les personnes qui sont incorporées dans l'armée
et qui ne sont pas convoquées à un service d'appui ou à un service actif au moment où elles déposent leur demande, donc les personnes pour lesquelles le délai mentionné à l'art. 17, al. 2, s'applique (mesure 2), doivent suivre la journée d'introduction obligatoire au cours des trois mois qui précèdent l'échéance du délai d'attente (al. 1bis).

Art. 18

Décision d'admission

Al. 1 et 2: ces modifications sont liées à la mesure 5. Comme l'art. 16, elles complètent le principe inscrit à l'art. 1. Même si le requérant n'a pas encore accompli la totalité des services d'instruction au moment où il dépose sa demande et qu'il est de ce fait autorisé à la déposer (cf. art. 16, al. 1), il se peut que le critère excluant l'admission inscrit à l'art. 1, al. 1, soit rempli au moment de la décision d'admission.

Il convient donc de l'ajouter à l'al. 1. L'exception en cas de service d'appui ou de

2448

FF 2019

service actif prévue à l'al. 2 vise à préserver le droit constitutionnel d'accomplir un service civil.

L'al. 3 correspond à l'actuel al. 2. Il est précisé, étant donné que la mesure 2 implique deux délais pour la participation à la journée d'introduction (nouvel art. 17a, al. 1 et 1bis). Le non-respect de ces délais conduit au classement de la demande d'admission.

L'al. 4 correspond à l'actuel al. 3.

Art. 19, al. 3, let. c, et 8, 1re phrase L'al. 3, let. c, est abrogé et l'al. 8 est adapté, puisqu'il n'y a plus d'affectations à l'étranger.

Art. 20, 2e phrase La norme de délégation concernant la durée minimale et le rythme des périodes d'affectation est supprimée, étant donné que l'art. 79, al. 1, habilite déjà le Conseil fédéral à édicter des dispositions d'exécution (cf. chap. 6, section 3, OSCi).

Art. 21

Début, périodicité et durée des périodes d'affectation

Al 1: actuellement, les personnes astreintes doivent commencer leur première affectation pendant l'année civile qui suit l'entrée en force de la décision d'admission. Le projet prévoit qu'elle doit être accomplie dans ce délai (mesure 6).

L'al. 2 vise à mettre en oeuvre la mesure 6 en inscrivant dans la loi l'obligation d'accomplir une période de service par année après la première affectation.

Al. 3: l'obligation faite aux civilistes ayant déposé leur demande pendant l'ER de terminer leur affectation longue avant la fin de l'année civile suivant l'entrée en force de la décision d'admission est une mesure supplémentaire visant à assurer l'équivalence entre l'accomplissement du service civil et celui du service militaire.

L'objectif est d'éviter que les personnes astreintes au service civil soient favorisées par rapport aux recrues. Cette nouvelle disposition met en oeuvre la mesure 7.

Al. 4: le projet prévoit de maintenir la délégation de compétences législatives au Conseil fédéral concernant les exceptions aux règles relatives à la périodicité des affectations pour les personnes astreintes de retour d'un congé à l'étranger (art. 39a, al. 3, OSCi), pour celles dont l'exemption du service se termine (art. 39a, al. 3, OSCi), pour celles auxquelles un report de service a été accordé (art. 39, let. b, OSCi) et pour celles qui ne peuvent être affectées à un établissement d'affectation approprié (art. 39, let. c, OSCi). Le Conseil fédéral maintiendra la possibilité d'anticiper d'une année l'obligation annuelle d'accomplir des affectations ou de rattraper l'affectation manquée dans un délai d'un an (art. 39a, al. 4, OSCi).

Art. 29, al. 1, let. f Cette disposition est supprimée, puisqu'il n'y a plus d'affectations à l'étranger.

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Art. 80b, al. 1, let. d La modification de cette disposition est purement formelle (utilisation du sigle pour le renvoi à la LAAM).

Dispositions transitoires: L'art. 83f: l'ancien droit continuera de s'appliquer aux requérants qui ont déposé leur demande d'admission au service civil sous ce régime, étant donné qu'ils se sont informés de la procédure et des obligations en matière d'affectation en vue de déposer une demande, qu'ils ont planifié leur service et le cas échéant pris des dispositions à cet égard (al. 1). Suivant la phase dans laquelle la personne astreinte au service civil se trouve, les mesures relatives au début, à la périodicité et à la durée des périodes d'affectation auraient un effet rétroactif non autorisé qui contrevient aux principes qui doivent régir l'application du droit dans le temps. Leurs obligations en matière d'affectation seront donc régies par l'ancien droit. Les conventions d'affectation qui contreviennent à l'art. 4a, let. e, ne seront plus autorisées à partir de l'entrée en vigueur du nouveau droit, car il n'y a pas d'effet rétroactif dans ce cas (al. 2). Les affectations à l'étranger auxquelles les personnes astreintes ont déjà été convoquées à l'entrée en vigueur du nouveau droit seront donc maintenues (al. 3).

L'annulation de ces affectations, pour lesquelles les personnes astreintes, leurs employeurs et les établissements d'affectation ont déjà pris les dispositions nécessaires, pourrait en effet avoir un effet rétroactif non autorisé. Cependant, les conventions d'affectation reçues après l'entrée en vigueur ne seront plus acceptées. Cette restriction permet de mettre en oeuvre rapidement le nouveau droit et les contraintes qu'elle impose sont acceptables puisque les personnes astreintes, leurs employeurs et les établissements d'affectation ne doivent pas prendre, avant la convocation, de dispositions difficiles à annuler.

6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération

6.1.1

Conséquences financières

Si l'on part du principe que, après l'entrée en vigueur de la présente révision, les jours de service accomplis chaque année jusqu'en 2030 ne s'élèveront plus qu'à près de 1,3 million (contre presque 1,7 million en 2018), les recettes provenant des contributions versées à la Confédération par les établissements d'affectation devraient diminuer à moyen ou à long terme. Il ne faut pas tabler sur des recettes supérieures à environ 26,6 millions de francs en 2030, ce qui représente un recul d'environ 7 millions par rapport à 2017.

Dans le domaine de la formation, la diminution du nombre des admissions et la baisse du nombre des personnes astreintes au service civil qui s'ensuivra devrait permettre de légères économies à moyen terme déjà. À plus long terme, c'est-à-dire d'ici à 2030, on peut s'attendre à une réduction des coûts annuels d'environ 2 millions de francs par rapport à 2017.

2450

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Dans l'ensemble, les coûts par jour de service devraient augmenter, étant donné que les coûts de base (p. ex. les frais informatiques), qui sont indépendants du nombre de jours de service, seront répartis sur un plus petit nombre de jours de service.

La réduction du nombre de jours de service allégera les charges du régime des allocations pour perte de gain. En effet, les personnes restant à l'armée ne devront accomplir que le nombre de jours de service militaire ordonnés, au lieu d'une fois et demie le nombre de jours de service militaire restants. Les personnes qui, à la place d'être admises au service civil, sont déclarées inaptes au service militaire ou sont incorporées à la protection civile font un nombre de jours de service encore moins élevé ou s'acquittent d'une taxe d'exemption.

Pour le reste, la mise en oeuvre des huit mesures visant à réduire le nombre des admissions n'aura pas de conséquences financières.

6.1.2

Conséquences sur l'état du personnel

Comme décrit au ch. 6.1.1, la diminution du nombre des admissions entraînera une réduction des jours de service et des périodes d'affectation accomplis ainsi que des personnes astreintes à encadrer. Des postes pourront être supprimés au CIVI proportionnellement à la diminution du nombre des jours de service. Ces suppressions s'opéreront sur plusieurs années, de manière socialement supportable, grâce aux fluctuations naturelles ou à la conclusion de contrats à durée déterminée.

6.1.3

Conséquences sur les effectifs de l'armée

Pour les raisons exposées au ch. 4.2, il n'est pas possible de prévoir avec précision les effets quantitatifs de la présente révision sur les effectifs de l'armée

6.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

À long terme, la diminution du nombre des personnes admises au service civil entraînera une baisse du nombre des jours de service accomplis. Il en découlera un recul des périodes d'affectation accomplies dans certains domaines d'activité au bénéfice des cantons, communes, centres urbains, agglomérations et régions de montagne.

6.3

Conséquences économiques, sociales et environnementales

Du fait de l'application du facteur 1,5, les personnes qui accomplissent un service civil sont plus longtemps absentes de leur place de formation ou de leur emploi 2451

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qu'un militaire accomplissant son service. Le service civil pèse d'autant sur notre économie et le fond du régime des allocations pour perte de gain. Cette charge diminuera si la mise en oeuvre des huit mesures conduit à une baisse notable du nombre des personnes accomplissant le service civil. La charge pesant sur les employeurs en sera allégée. En raison de l'alignement du rythme des périodes d'affectation sur celui des services d'instruction de l'armée, il ne sera plus possible de prendre autant en compte les besoins des employeurs et de la formation professionnelle des personnes astreintes au service civil. Cependant, ce changement est souhaitable pour assurer l'équivalence entre le service militaire et le service civil.

Dans la mesure où le nombre des personnes accomplissant le service civil diminuera à long terme à la suite de l'entrée en vigueur de la présente révision, les établissements d'affectation seront touchés, en particulier dans les domaines d'activité où les ressources nécessaires à l'accomplissement de tâches de la communauté sont insuffisantes ou sont absentes. L'intérêt public prépondérant à garantir les effectifs de l'armée doit toutefois primer.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

7.1.1

Base juridique

Le projet se fonde sur l'art. 59, al. 1, de la Constitution (Cst.)16, qui prévoit un service civil de remplacement. La législation sur le service civil relève de la compétence de la Confédération. Cette dernière peut par conséquent édicter les dispositions nécessaires dans ce domaine.

7.1.2

Compatibilité avec les droits fondamentaux

Les modifications proposées ne posent dans l'ensemble aucun problème du point de vue constitutionnel. Il existe cependant des doutes quant à la constitutionnalité des mesures visées aux art. 4a, let. e, et 8 (cf. ci-après). Le droit constitutionnel d'accomplir un service civil reste intact puisqu'il n'y a pas de libre choix entre service militaire et service civil. Ce principe doit être respecté, même sous le régime de la preuve par l'acte.

Les personnes qui accomplissent le service militaire ou le service civil se trouvent dans un rapport de droit particulier17, qui se distingue par une intégration portant sur trois niveaux (personnel, spatial et hiérarchique)18. En ce qui concerne l'intégration personnelle, elle permet un engagement accru des personnes concernées dans un but public et étatique19. L'exercice de la puissance publique peut conduire chez cer16 17 18 19

RS 101 Pour des réflexions détaillées sur ce rapport de droit particulier, cf. Markus Müller, Das besondere Rechtsverhältnis ­ ein altes Rechtsinstitut neu gedacht, Berne 2003, p. 174 Ibid., p. 134 ss.

Ibid., p. 143 s.

2452

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taines personnes à un changement radical et durable de leur état d'esprit général, d'un point de vue objectif comme d'un point de vue subjectif20, principalement au service militaire21. Même l'État social moderne ne peut se passer de la contrainte étatique22, notamment pour l'astreinte au service militaire. Dans certaines situations, seul le recours à des moyens de contrainte permet à l'État d'aplanir des conflits publics et de contrer à temps et avec efficacité des tendances dommageables pour l'État ou la société23. De nos jours, le comportement des individus se trouvant dans un rapport de droit particulier est régi avant tout par leurs propres intérêts. On ne peut s'attendre à ce qu'ils agissent de leur propre chef en étant (profondément) motivés et conscients de leurs responsabilités24. Moins les personnes intégrées sont en accord avec les objectifs de l'organisation, moins elles s'identifient à elle et plus les instruments de conduite et de contrôle à la disposition des autorités sont indispensables25. Ce raisonnement est particulièrement vrai pour les personnes intégrées au service militaire qui souhaitent rejoindre le service civil pour des raisons autres que des motifs de conscience. Les huit mesures prévues par le présent projet fournissent, au niveau du service civil, des instruments pour agir sur l'accès au service civil en vue de mettre en oeuvre de manière plus rigoureuse le régime de la preuve par l'acte.

Lorsqu'une personne entre dans un rapport de droit particulier et qu'elle se trouve ainsi dans une situation d'intégration, son statut en matière de droits fondamentaux change. Ses obligations de tolérance et de prestations sont accrues et elle doit accepter des restrictions plus ou moins fortes de sa liberté d'exercer ses droits fondamentaux, en particulier en ce qui concerne l'accomplissement du service militaire 26.

D'une manière générale, l'admissibilité des restrictions aux droits fondamentaux est régie par les trois critères inscrits à l'art. 36 Cst. (base légale, intérêt public et proportionnalité); en ce qui concerne le rapport de droit particulier, l'objectif que poursuit l'organisation est déterminant27.

Il s'agit de s'interroger d'une part sur l'intérêt public à l'accomplissement du service militaire et d'autre part sur les intérêts individuels en matière de droits
fondamentaux (proportionnalité, égalité de droit, conformité avec les droits fondamentaux et les droits de l'homme, liberté de conscience). Compte tenu du but de l'armée, inscrit à l'art. 58, al. 2, Cst., il y a bien un intérêt public à renouveler les effectifs de l'armée conformément aux besoins afin de garantir durablement les prestations qui lui incombent en matière de sécurité. Il est plus difficile d'assurer le bon fonctionnement administratif de l'armée selon le moment auquel la personne astreinte demande à passer de l'armée au service civil. Ainsi, la LSC ne prévoit pas le droit à ce que l'astreinte au service militaire prenne fin immédiatement: des délais d'attente avant l'admission y sont déjà inscrits selon le moment du dépôt de la demande.

20 21 22 23 24 25 26 27

Ibid., p. 138 Ibid., p. 138 Ibid., p. 140 Ibid., p. 140 Ibid., p. 191 s.

Ibid., p. 192 Ibid., p. 239 Ibid., p. 261

2453

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Cependant, leur effet n'est pas suffisant. Les mesures proposées permettraient d'empêcher que le fonctionnement de l'armée en tant qu'institution soit compromis.

La mise en oeuvre des huit mesures ne revient pas fondamentalement à réprimer tous les besoins des individus, notamment les besoins de liberté, en cas d'intégration à l'armée ou au service civil. La restriction de la sphère de liberté protégée par les droits fondamentaux individuels, liée à l'intégration, ne va en principe pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif concret de l'intégration28.

La question de la constitutionnalité des mesures visées aux art. 4a, let. e, et 8, se pose par rapport aux principes de proportionnalité (art. 5, al. 2, Cst.) et d'égalité (art. 8 Cst.). La mesure visée à l'art. 8 peut entraîner, suivant le moment du passage au service civil, une augmentation du facteur 1,5 (durée du service civil par rapport à celle du service militaire) jusqu'à 37,5 au maximum. Des doutes ont par conséquent été émis au stade préliminaire de la procédure législative sur l'adéquation et, surtout, la nécessité des mesures évoquées pour assurer durablement les effectifs de l'armée et réduire de manière substantielle le nombre des admissions au service civil. En effet, d'une part le service civil n'est qu'un des facteurs qui exercent une influence sur les effectifs de l'armée (cf. ch. 4.2) et d'autre part les mesures n'ont qu'un effet préventif sur une mise en danger potentielle ­ qui ne peut être exclue à moyen terme ­ de l'effectif réglementaire (cf. ch. 1).

La mesure 3 ne remet pas en cause le droit constitutionnel d'accomplir un service civil. Les exigences relatives à la preuve par l'acte sont toutefois relevées par une augmentation de la durée du service civil.

Étant donné les incertitudes qui entourent l'évolution des valeurs de référence définies dans le DEVA (cf. ch. 1) et compte tenu de l'évolution démographique, il apparaît clairement qu'il est dans l'intérêt public de prendre à temps des mesures en vue de renouveler les effectifs de l'armée conformément aux besoins, de manière à garantir durablement les prestations qui lui incombent en matière de sécurité.

Les mesures prises au niveau du service civil sont un moyen de répondre à cet intérêt public. Malgré les nombreuses corrélations entre l'astreinte
au service militaire et l'astreinte au service civil, ou justement en raison de ces corrélations, il est difficile de déterminer ou d'exposer les liens entre les mesures prises à l'armée et au service civil et leurs effets sur ces deux institutions. L'évaluation de la nécessité de prendre des mesures pour défendre l'intérêt public susmentionné et de déterminer le cas échéant quelles mesures doivent être prises n'en est que plus compliquée. Cette évaluation est pourtant décisive eu égard au principe de la proportionnalité.

La difficulté à exposer les liens de causalité réduit la possibilité d'argumenter au fond et en détail pour justifier la proportionnalité des mesures.

Le Conseil fédéral a procédé à une pesée d'intérêts entre, d'une part, les considérations juridiques concernant les mesures visant à réduire le nombre des admissions et, d'autre part, le risque en matière de politique de sécurité que l'absence de mesures prises (à temps) au niveau du service civil notamment ferait courir pour les effectifs de l'armée.

28

Ibid., p. 242

2454

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7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

La mesure 1 permet une durée totale du service civil dépassant dans certains cas largement le double de la durée du service militaire. Le Comité des droits de l'homme de l'ONU a constaté une violation des art. 18 et 26 du pacte international relatif aux droits civils et politiques29 (interdiction de discriminer) dans plusieurs cas où le service civil de remplacement équivalait au double du service militaire 30. Dès lors, la question de la compatibilité de la mesure 1 avec les exigences de ce pacte se pose. À ce jour, cependant, aucun tribunal n'a statué dans un cas concret sur la question de savoir si l'augmentation du facteur à 37,5 au maximum respecte encore l'interdiction de discrimination. Aussi le Conseil fédéral considère-t-il qu'il est acceptable que la mesure 1 prévoie des exigences plus élevées pour la preuve par l'acte à partir d'un certain moment (après la fin de l'ER).

7.3

Forme de l'acte à adopter

Le projet contient des normes législatives importantes au sens de l'art. 164 Cst., qui doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale.

7.4

Frein aux dépenses

Le projet ne prévoit ni subventions ni crédits d'engagement ou plafonds de dépenses qui entraîneraient une nouvelle dépense unique de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs.

7.5

Délégation de compétences législatives

Le projet ne prévoit pas de déléguer de nouvelles compétences législatives au Conseil fédéral. Les délégations de compétences législatives prévues aux art. 17, al. 4, et 21, al. 4, correspondent aux délégations de compétences législatives actuelles (cf. art. 17, al. 2, 20, 21, al. 2, et 79, al. 1, LSC). L'actuelle délégation de compétences législatives de l'art. 7, al. 3, est abrogée.

29 30

RS 0.103.2 Young-Kwan Kim et consorts c. République de Corée, communication no 2179/2012, constatations du 15.10.2014, § 7.3; Vernier et Nicolas c. France, communication n o 690 et 691/1996, constatations du 11.7.2000, § 10.4, http://juris.ohchr.org/; autres exemples chez Manfred Nowak, CCPR Commentary, 2e édition, 2008, N 29 ad art. 8 et N 29 ad art. 26.

Cf. également Cour européenne des droits de l'homme, arrêt rendu le 7 juillet 2011 par la Grande Chambre en l'affaire Bayatyan c. Arménie, http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001105610.

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