ad 17.405 Initiative parlementaire Burkart Reconduire les allègements fiscaux de durée limitée accordés pour le gaz naturel, le gaz liquide et les biocarburants Rapport du 24 juin 2019 de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national Avis du Conseil fédéral du 21 août 2019

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Conformément à l'art. 112, al. 3, de la loi sur le Parlement, nous nous prononçons comme suit sur le rapport du 24 juin 2019 de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie concernant l'initiative parlementaire 17.405 «Reconduire les allègements fiscaux de durée limitée accordés pour le gaz naturel, le gaz liquide et les biocarburants»1.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

21 août 2019

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Avis 1

Contexte

Depuis le 1er juillet 2008, la Suisse encourage l'utilisation de carburants ménageant l'environnement en accordant des allègements fiscaux. La loi du 21 juin 1996 sur l'imposition des huiles minérales (Limpmin)2 exige que les pertes de recettes fiscales qui en découlent soient compensées par une hausse du taux d'imposition de l'essence (art. 12e Limpmin). La durée des allègements fiscaux accordés en vertu de la loi sur l'imposition des huiles minérales est limitée au 30 juin 2020.

Le 27 février 2017, le conseiller national Thierry Burkart a déposé une initiative parlementaire intitulée «Reconduire les allègements fiscaux de durée limitée accordés pour le gaz naturel, le gaz liquide et les biocarburants» (17.405), qui demande que les allègements fiscaux soient reconduits jusqu'en 2030. La Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national (CEATE-N) a décidé, par 15 voix contre 9 et 1 abstention, de donner suite à cette initiative le 19 février 2018. Le 19 mars de la même année, son homologue du Conseil des États s'est ralliée à cette décision à l'unanimité.

Dans son message du 1er décembre 2017 relatif à la révision totale de la loi sur le CO2 pour la période postérieure à 20203, le Conseil fédéral a également souligné l'importance des carburants renouvelables du point de vue de la politique climatique. Cependant, il ne souhaite pas reconduire les allègements fiscaux dont l'échéance est prévue pour mi-2020 en raison des pertes qui en découleraient (le manque à gagner est estimé à quelque 900 millions de francs d'ici à mi-2020 en ce qui concerne l'impôt sur les huiles minérales et la surtaxe sur les huiles minérales). Pour remplacer les allègements fiscaux, le Conseil fédéral propose donc d'imposer aux importateurs de carburants fossiles la compensation d'au moins 5 % des émissions de CO2 liées au trafic par la mise à la consommation de carburants renouvelables (art. 27 du projet de loi sur le CO24).

En raison du lien étroit existant entre la révision totale de la loi sur le CO2 pour la période postérieure à 2020 et l'initiative parlementaire 17.405, la CEATE-N a décidé d'examiner cette dernière dans le cadre de la révision totale de la loi sur le CO2. Lors de ses délibérations, elle s'est prononcée en faveur de la poursuite de l'encouragement des
carburants ménageant l'environnement. Elle a toutefois décidé de soutenir le modèle proposé par le Conseil fédéral et s'est expressément opposée à la reconduction des allègements fiscaux jusqu'en 2030 voulue par l'initiative.

Durant la session d'hiver 2018, le Conseil national a rejeté le projet de révision totale de la loi sur le CO2 lors du vote sur l'ensemble. Comme il est peu probable que la loi entre en vigueur le 1er janvier 2021, la CEATE-N a chargé l'administration le 29 avril 2019 d'élaborer un projet qui permettrait de prolonger l'application des dispositions relatives à l'octroi d'allègements fiscaux pour les carburants renouve2 3 4

RS 641.61 FF 2018 229; 17.071 FF 2018 373

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lables jusqu'à l'entrée en vigueur de la révision totale de la loi, mais au plus tard jusqu'au 31 décembre 2021. Le projet doit également prévoir la reconduction de tous les autres instruments prévus par la loi sur le CO2 qui expireront fin 2020.

Selon la commission, ces dispositions sont nécessaires pour combler le vide réglementaire et garantir la sécurité du droit.

La CEATE-N a examiné le projet de l'administration lors de sa séance du 24 juin 2019 et a proposé par 22 voix contre 2 de l'adopter, marquant ainsi sa volonté de prolonger sans interruption les allègements fiscaux pour les carburants ménageant l'environnement ainsi que les instruments prévus par la loi sur le CO2 jusqu'à l'entrée en vigueur de la révision totale de cette dernière, mais au plus tard jusqu'au 31 décembre 2021.

Le 24 juin 2019, la CEATE-N a transmis son rapport au Conseil fédéral pour avis.

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Avis du Conseil fédéral

Par son message du 1er décembre 2017 relatif à la révision totale de la loi sur le CO2 pour la période postérieure à 2020, le Conseil fédéral a soumis au Parlement sa proposition de mise en oeuvre de l'Accord de Paris d'ici à 2030. Souhaitant que l'objet soit traité avec diligence, il est d'avis qu'une entrée en vigueur au 1er janvier 2021 de la révision totale de la loi sur le CO2 doit clairement être préférée à une solution transitoire telle qu'elle est proposée par la CEATE-N.

Dans son message, le Conseil fédéral a réaffirmé qu'il ne souhaitait pas reconduire les allègements fiscaux accordés pour les carburants renouvelables après leur échéance, mi-2020, proposant plutôt d'imposer aux importateurs de carburants fossiles la compensation d'au moins 5 % des émissions de CO2 liées au trafic par la mise à la consommation de carburants renouvelables. Il propose par ailleurs que les exigences en matière de qualité applicables aux carburants renouvelables soient adaptées à celles de l'Union européenne (UE), afin de faciliter l'accès au marché de ces produits.

L'abandon des allègements de l'impôt sur les huiles minérales, limités jusqu'à fin juin 2020, qui est également lié au respect de critères écologiques et sociaux minimaux, créerait un vide réglementaire de six mois jusqu'à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2021, de la révision totale de la loi sur le CO2. Au vu des grands écarts de prix entre les carburants renouvelables et les carburants fossiles, le Conseil fédéral n'a cependant pas de raison de croire que des quantités importantes d'agrocarburants indésirables concurrençant la production de denrées alimentaires seront importées pendant ce laps de temps. Les ventes de carburants renouvelables, importants en matière de protection du climat, ne devraient pas baisser, étant donné que l'obligation des importateurs de carburants fossiles de compenser les émissions de CO2 doit être maintenue après 2020 et que seule la conjugaison des allègements de l'impôt sur les huiles minérales et de l'obligation de compenser a entraîné une hausse des ventes de biocarburants.

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Le Conseil national ayant rejeté le projet de révision totale de la loi sur le CO2 lors du vote sur l'ensemble à la session d'hiver 2018, il semble judicieux de prévoir une solution pour le cas où la révision totale de la loi sur le CO2 ne pourrait entrer en vigueur le 1er janvier 2021. Dans ce contexte, le Conseil fédéral juge donc pertinent de prolonger de 18 mois les allègements de l'impôt sur les huiles minérales accordés pour les carburants renouvelables, ce qui était d'ailleurs l'objectif initial de l'initiative parlementaire 17.405. Dans la foulée, il est logique d'étendre la neutralité des recettes exigée d'ici fin 2028 et de compenser les pertes fiscales par une imposition plus élevée de l'essence et du diesel. Ces mesures, par ailleurs proposées dans le cadre de la révision totale de la loi sur le CO2, permettront de compenser les pertes de recettes de l'impôt sur les huiles minérales par une augmentation modérée de 2,6 centimes par litre d'essence et de diesel, pour autant que celle-ci soit appliquée comme prévu à partir du 1er juillet 2020. Le Conseil fédéral prendra les mesures nécessaires à cette fin.

Pour le cas où la révision totale de la loi sur le CO2 ne pourrait entrer en vigueur le 1er janvier 2021, le Conseil fédéral juge opportuns les compléments que la commission a apportés à l'initiative parlementaire 17.405, à savoir le prolongement d'un an au plus, jusqu'à fin 2021, des principaux instruments de la loi sur le CO2 en vigueur.

Sont concernés l'objectif général de réduction et, partant, l'obligation de compenser (art. 3 de la loi sur le CO2), le système d'échange de quotas d'émission (SEQE) (art. 15, 16, 16a, 18, 21 et 48a de la loi sur le CO2) et l'exemption de la taxe sur le CO2 des entreprises qui ne participent pas au SEQE (art. 31 de la loi sur le CO2). En outre, l'art. 10, al. 4, doit être adapté de sorte que les dispositions relatives aux émissions des véhicules permettent le passage de l'ancienne méthode de mesure (nouveau cycle européen de conduite, NCEC) à la nouvelle (Worldwide Harmonized Light Vehicles Test Procedure, WLTP). Enfin, la modification des annexes 1 et 1a Limpmin doit permettre de corriger l'inégalité fiscale existant entre les gaz liquéfiés et les gaz gazeux.

Soulignons que le présent projet ne doit pas retarder encore les débats parlementaires
sur la révision totale de loi sur le CO2. C'est pourquoi il est essentiel que la prolongation des principaux instruments de la loi sur le CO2 prévue par le présent projet ne dépasse pas un an. Néanmoins, il n'est pas non plus question de privilégier certains éléments du projet de révision totale ou de viser le prolongement de certains instruments au-delà d'un an. Le SEQE constitue une exception en la matière. En effet, le Parlement a déjà approuvé le couplage du SEQE suisse avec celui de l'UE et, partant, le développement parallèle du système suisse (arrêté fédéral du 22 mars 2019 portant approbation et mise en oeuvre (modification de la loi sur le CO2) de l'accord conclu entre la Suisse et l'Union européenne sur le couplage de leurs systèmes d'échange de quotas d'émission5). Par conséquent, il est justifié, dans le cadre du présent projet, de reconduire le SEQE sans limitation de durée et de l'adapter aux derniers développements, comme le propose la majorité de la CEATE-N.

La loi sur le CO2 doit impérativement être révisée pour que l'accord entre la Suisse et l'UE sur le couplage de leurs SEQE puisse être maintenu au-delà de 2020.

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Pour que la Suisse puisse atteindre les objectifs qu'elle s'est fixés dans le cadre de l'Accord de Paris, une approche globale de tous les instruments au-delà de 2020 s'impose. Seule la révision totale de la loi sur le CO2 telle qu'elle est prévue permet de répondre à cet enjeu.

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Propositions du Conseil fédéral

Le Conseil fédéral propose d'adopter le projet de la CEATE-N.

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