13.468 Initiative parlementaire «Mariage civil pour tous» Rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil national du 30 août 2019

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons un projet de modification du code civil, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint. Une minorité (Nidegger, Bregy, Geissbühler, Haab, Schwander, Walliser) propose de ne pas entrer en matière.

30 août 2019

Au nom de la commission: Le président, Pirmin Schwander

2019-3955

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Condensé Ce projet met en oeuvre l'initiative parlementaire 13.468 «Mariage civil pour tous» qui demande d'ouvrir le mariage à tous les couples, indépendamment du sexe des partenaires.

Contexte Depuis que le partenariat enregistré a été instauré en Suisse en 2007, deux personnes du même sexe ont la possibilité de faire reconnaitre leur relation sur le plan juridique. Le partenariat est enregistré par l'office de l'état civil. Il constitue une communauté de vie avec des droits et des obligations réciproques semblables à ceux du mariage. Un certain nombre de différences subsistent toutefois entre le mariage et le partenariat enregistré. À cela s'ajoute le fait que l'état civil des partenaires enregistrés peut être perçu comme stigmatisant, car en communiquant leur état civil, les partenaires enregistrés doivent par là même donner des informations sur leur orientation sexuelle. Cela est considéré d'une part comme une atteinte à la vie privée et peut d'autre part avoir des conséquences problématiques, en particulier dans les pays où l'homosexualité est sanctionnée pénalement.

Contenu du projet L'ouverture du mariage aux personnes de même sexe s'effectue par la voie d'une modification législative. Permettre à tous les couples d'accéder au mariage est la priorité. Ainsi, toutes les dispositions de l'ordre juridique qui fondent des droits et des devoirs sur l'existence d'un mariage seront à l'avenir en principe appliquées aussi bien aux couples hétérosexuels qu'aux couples homosexuels. Ce projet n'est toutefois qu'un projet central: la question de l'élargissement du champ d'application des normes existantes dans les domaines dans lesquels le droit en vigueur opère une distinction en fonction du sexe des époux (par exemple dans le cas des rentes de survivants) ou exige l'hétérosexualité des époux (par exemple pour l'accès à la procréation médicalement assistée) sera soulevée dans le cadre de révisions ultérieures.

À partir du moment où le mariage sera ouvert à tous les couples, il ne sera plus possible d'enregistrer de nouveaux partenariats. Les partenariats enregistrés déjà conclus pourront toutefois être maintenus. Les partenaires enregistrés se verront offrir la possibilité de convertir leur partenariat enregistré en mariage au moyen d'une procédure simple.

L'ouverture du mariage à tous les couples
soulève également des questions en droit international privé en raison du grand nombre de couples ­ mariés ou en partenariat enregistré ­ dans une situation internationale (nationalités différentes, déménagements internationaux, etc.). Les dispositions de droit international privé doivent donc être également modifiées pour appréhender d'un côté les institutions juridiques du droit suisse et leurs effets à l'étranger et, de l'autre, régler la reconnaissance et les effets en Suisse des institutions juridiques étrangères.

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Table des matières Condensé

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Genèse du projet 1.1 L'initiative parlementaire 13.468 1.2 Travaux de la commission

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Considérations générales concernant le mariage pour tous 2.1 Règlementations étrangères 2.2 Niveau normatif: Constitution ou loi 2.3 Sort du partenariat enregistré

8133 8133 8133 8133

3

Résultats de la procédure de consultation

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Présentation du projet 4.1 Droit matrimonial 4.1.1 La conclusion du mariage 4.1.2 Autres dispositions du droit matrimonial 4.2 Conséquences du mariage pour tous 4.2.1 Droit de la nationalité 4.2.2 Rentes de survivants 4.2.3 Accès à l'adoption conjointe et à la procréation médicalement assistée 4.2.3.1 Accès à l'adoption conjointe 4.2.3.2 Accès à la procréation médicalement assistée 4.3 Conversion d'un partenariat enregistré existant en mariage 4.3.1 Procédure de conversion 4.3.2 Effets de la conversion 4.4 Maintien de la LPart pour les partenariats enregistrés existants

8136 8136 8136 8137 8138 8138 8139

Droit international privé 5.1 Généralités 5.2 Mariage (chap. 3 LDIP) 5.2.1 Application des règles existantes à tous les mariages 5.2.2 Reconnaissance et transcription à l'état civil de mariages célébrés à l'étranger 5.2.3 Effets généraux du mariage 5.2.4 Régimes matrimoniaux 5.2.5 Divorce et séparation 5.3 Partenariat enregistré (chap. 3a LDIP) 5.3.1 Maintien des solutions existantes 5.3.2 Droit applicable 5.3.3 Conversion d'un partenariat enregistré en mariage

8144 8144 8145 8145

5

8140 8140 8141 8142 8142 8143 8144

8146 8147 8148 8149 8149 8149 8150 8151

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Questions à régler au sujet du mariage pour tous 6.1 Égalité dans le cadre des rentes de survivants 6.2 Accès à la procréation médicalement assistée 6.3 Autres questions sur le droit de la filiation 6.4 Langue non genrée

8151 8151 8152 8153 8154

7

Commentaires des dispositions 7.1 Dispositions du P-CC 7.2 Dispositions du P-LPart 7.3 Dispositions du P-LDIP

8154 8154 8158 8163

8

Conséquences 8.1 Conséquences pour la Confédération 8.2 Conséquences pour les cantons et les communes 8.3 Conséquences sur l'économie nationale 8.4 Conséquences sur la société 8.5 Conséquences sous l'angle de l'égalité entre femmes et hommes

8165 8165 8166 8166 8166 8167

9

Aspects juridiques 9.1 Constitutionnalité et légalité 9.2 Compatibilité avec les obligations internationales 9.3 Forme de l'acte à adopter 9.4 Frein aux dépenses 9.5 Délégation de compétences législatives 9.6 Conformité à la législation sur la protection des données

8167 8167 8167 8167 8168 8168 8168

Code civil suisse (Mariage pour tous) (Projet)

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Rapport 1

Genèse du projet

1.1

L'initiative parlementaire 13.468

Le 5 décembre 2013, le groupe vert'libéral a déposé une initiative parlementaire dont la teneur est la suivante: «La Constitution fédérale sera modifiée comme suit: Art. 14 Droit au mariage, à l'union (nouveau) et à la famille Al. 1 Le droit au mariage, à l'union (nouveau) et à la famille est garanti.

Al. 2 Les formes d'union régies par la loi sont ouvertes à tous les couples, quels que soient leur sexe ou leur orientation sexuelle.

Art. 38, al. 1 première phrase La Confédération règle l'acquisition et la perte de la nationalité et des droits de cité par filiation, par union (supprimer «par mariage») ou par adoption.» Le 20 février 2015, la Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJN) (ci-après: la commission) a procédé à l'examen préalable de l'initiative et a décidé, par 12 voix contre 9 et 1 abstention, d'y donner suite conformément à l'art. 109, al. 2, de la loi sur le Parlement (LParl)1. La Commission des affaires juridiques du Conseil des États s'est ralliée à cette décision le 1er septembre 2015, par 7 voix contre 5 et 1 abstention (art. 109, al. 3, LParl). Le 16 juin 2017, le Conseil national a décidé, à la demande de sa commission, de prolonger jusqu'à la session d'été 2019 le délai prévu pour élaborer le projet d'acte.

1.2

Travaux de la commission

La commission s'est penchée le 11 mai 2017 sur la mise en oeuvre de l'initiative parlementaire et a mené une première discussion sur la suite à donner au projet. Il y a été décidé de remettre à plus tard la décision concernant la nécessité de modifier la Constitution pour ouvrir le mariage à tous les couples.

Le 5 juillet 2018, la commission a arrêté la décision de principe d'emprunter la voie d'une modification législative pour ouvrir l'institution juridique du mariage aux personnes de même sexe. En outre elle a opté en faveur d'une révision de la loi en deux étapes ou plus plutôt qu'en une seule. Conformément à l'art. 126, al. 2, LParl, la commission a traité la pétition 18.2003 «Abolir l'INégalité face à l'adoption!» de la session des jeunes 2017 en même temps que l'initiative parlementaire 13.468.

1

Loi du 13 décembre 2002 sur l'Assemblée fédérale, RS 171.10.

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L'administration a ensuite été chargée d'élaborer, avec le concours d'experts externes, un «projet central», tel qu'il avait été esquissé dans le document de travail de l'Office fédéral de la justice (OFJ) du 27 mars 20182.

La commission a examiné l'avant-projet et l'a adopté le 14 février 2019. Elle a décidé de compléter le projet central préparé par l'OFJ d'une variante pour élargir l'accès au don de sperme en tant que méthode de procréation médicalement assistée.

Cet avant-projet et la variante ont été soumis à une consultation, conformément à la loi sur la consultation3, et les résultats ont fait l'objet d'une synthèse4. La consultation a duré du 14 mars au 21 juin 2019.

Lors de sa séance du 30 août 2019, la commission a pris acte des avis exprimés et a décidé, par 13 voix contre 12, de renoncer à intégrer au projet central la possibilité de recourir au don de sperme pour les couples de femmes mariées, estimant que cela empêcherait le projet de trouver une majorité. Elle souhaite ainsi n'aborder les questions liées à la procréation médicalement assistée que lors d'une prochaine étape. Une minorité (Flach, Aebischer Matthias, Arslan, Bauer, Burkart, Fehlmann Rielle, Markwalder, Marti Min Li, Mazzone, Merlini, Naef, Wasserfallen Flavia) est en revanche convaincue que seule la variante permettrait d'atteindre l'égalité souhaitée entre les couples homosexuels et les couples hétérosexuels.

Lors de sa séance du 30 août 2019, la commission a également procédé à la discussion par article du projet remanié et l'a accepté au vote sur l'ensemble par 17 voix contre 7 et 1 abstention. Une minorité (Nidegger, Bregy, Geissbühler, Haab, Schwander, Walliser) propose de ne pas entrer en matière.

La commission a bénéficié dans son travail, conformément à l'art. 112, al. 1, LParl du soutien du Département fédéral de justice et police. De son côté, l'administration a été épaulée par les experts suivants (par ordre alphabétique): Andrea Büchler, docteure en droit, professeure ordinaire à l'Université de Zurich; Thomas Geiser, docteur en droit, professeur émérite à l'Université de Saint Gall; Alexandra Jungo, docteure en droit, professeure ordinaire à l'Université de Fribourg; Philippe Meier, docteur en droit, professeur ordinaire à l'Université de Lausanne. Pour les questions relevant du droit international privé, il a été fait appel aux compétences de Florence Guillaume, docteure en droit, professeure ordinaire à l'Université de Neuchâtel.

2

3 4

Voir le document de travail de l'OFJ du 27 mars 2018 «Présentation des conséquences du mariage pour tous dans les différents domaines du droit»; disponible sous: www.parlament.ch > Curia vista 13.468 > liens supplémentaires (ci-après: document de travail de l'OFJ du 27 mars 2018).

Loi fédérale du 8 mars 2005 sur la procédure de consultation, RS 172.061.

La synthèse des résultats de la consultation est disponible sur le site Internet des commissions des affaires juridiques: www.parlament.ch > Organes > Commissions > Commissions thématiques > Commissions des affaires juridiques CAJ > Rapports et procédures de consultation des CAJ > Procédures de consultation > 13.468.

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Considérations générales concernant le mariage pour tous

2.1

Règlementations étrangères

De nombreux ordres juridiques européens ont ouvert ces dernières années le mariage aux couples de même sexe, notamment les Pays-Bas (en 2001), la Belgique (en 2003), l'Espagne (en 2005), la Suède et la Norvège (en 2009), le Portugal et l'Islande (en 2010), le Danemark (en 2012), la France (en 2013), l'Angleterre et le Pays de Galles (en 2013), l'Écosse (en 2014), le Luxembourg, l'Irlande et la Finlande (en 2015), l'Allemagne et Malte (en 2017) et l'Autriche (en 2019)5.

2.2

Niveau normatif: Constitution ou loi

La compétence de la Confédération de légiférer sur le mariage découle de la compétence générale en matière de droit civil (art. 122 de la Constitution fédérale [Cst.]6).

On peut cependant se demander si la notion de mariage telle que la conçoit l'art. 14 Cst. (droit au mariage) ne limite pas le législateur (civil) fédéral dans son activité, auquel cas il faudrait modifier la Constitution avant d'ouvrir l'institution juridique du mariage à tous les couples.

Pour tirer cette question au clair, le président de la commission a demandé à l'OFJ un avis de droit pour déterminer si la mise en oeuvre de l'initiative requiert une modification de la Constitution ou si elle pourrait être réalisée plus simplement, au niveau de la loi. Dans l'avis de droit qu'il a livré le 7 juillet 2016, l'OFJ a conclu que l'art. 14 Cst. n'empêche pas le législateur de se fonder sur sa compétence législative en matière de droit civil pour ouvrir l'institution du mariage aux personnes de même sexe, quand bien même les couples de même sexe ne peuvent aujourd'hui se fonder sur l'art. 14 Cst. pour faire valoir un droit au mariage. En conséquence, il est juridiquement possible d'ouvrir le mariage aux personnes de même sexe en passant par une révision de la loi, une modification de la Constitution n'étant pas nécessaire7.

Sur la base de cet avis de droit, la commission a décidé d'opter pour une révision de la loi.

2.3

Sort du partenariat enregistré

Si l'on ouvre le mariage à tous les couples, il faudra alors décider de l'opportunité de conserver l'institution du partenariat enregistré, c'est-à-dire déterminer s'il y a 5

6 7

Voir DAGMAR COESTER-WALTJEN, Die Einführung der gleichgeschlechtlichen Ehe in ausgewählten Rechtsordnungen, in: Zeitschrift für Europäisches Privatrecht (ZEuP) 2018, 320­358, p. 323.

RS 101 Avis de droit livré le 7 juillet 2016 par le Domaine de direction Droit public de l'OFJ, p. 4­6; disponible sous: www.parlament.ch > Curia vista 13.468 > liens supplémentaires (ci-après: avis de droit OFJ).

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lieu de préserver la possibilité de conclure un tel partenariat et si oui, à qui cette institution serait ouverte. L'initiative parlementaire n'est pas explicite à cet égard et demande simplement d'ouvrir à tous les couples les formes d'union régies par la loi.

Dans plusieurs pays, il existait, avant que le mariage n'y soit ouvert à tous les couples, une institution juridique telle que le partenariat enregistré, laquelle offrait aux couples de même sexe une forme d'union régie par la loi. Ces pays ont maintenu cette institution après avoir ouvert le mariage. En Allemagne toutefois, la conclusion d'un partenariat enregistré n'est plus possible depuis l'introduction du mariage pour tous. Il en va de même au Danemark, où l'institution correspondante réservée aux couples de même sexe n'est plus accessible. Cependant, d'autres pays qui connaissaient une solution analogue au mariage, telle le partenariat enregistré (partenariat fort), ont maintenu cette institution et sont allés jusqu'à l'ouvrir à tous les couples (Pays-Bas p.ex.). Enfin, la France connaît outre le mariage (pour tous) le PACS.

(pacte civil de solidarité) qui est accessible à tous les couples. Des institutions similaires existent en Belgique (cohabitation légale) et au Luxembourg (partenariat enregistré). Celles-ci vont cependant moins loin que le mariage et peuvent être qualifiées de partenariats faibles.

En Suisse, le Conseil national a transmis le 15 mars 2016 les postulats 15.3431 (Caroni) et 15.4082 (Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national) «Un pacs spécifique à la Suisse» et a chargé le Conseil fédéral de présenter un rapport qui se penchera sur l'opportunité d'instituer un PACS (partenariat pour couples de même sexe ou de sexe différent) pour la Suisse. Il s'agit ici d'examiner l'introduction d'un partenariat en tant que régime juridique hors mariage et indépendant du sexe des couples.

Pour la commission, la question de savoir si le législateur suisse souhaite introduire en plus du mariage un lien plus faible peut être tranchée indépendamment de la question de l'ouverture du mariage. C'est pourquoi elle a décidé d'accorder la priorité à l'ouverture du mariage et de poursuivre ce débat ultérieurement.

Une fois le mariage ouvert à tous les couples, il ne sera en revanche plus possible de
conclure de nouveaux partenariats enregistrés. Rappelons que le partenariat enregistré a été institué comme pendant au mariage pour les personnes de même sexe 8. Il n'aura plus de raison d'être si le mariage s'ouvre à tous. Le débat autour de l'introduction d'un nouveau régime juridique pour tous en Suisse aura lieu dans le cadre de l'exécution des deux postulats susmentionnés, 15.3431 et 15.40829.

8

9

Voir ANDREA BÜCHLER/NADJA HERZ/MARTIN BERTSCHI, in: Andrea Büchler (éd.), FamKomm Eingetragene Partnerschaft, Berne 2007, Allg. Einl. IV, Die Entstehung des Partnerschaftsgesetzes, no 1­5; MICHEL MONTINI, Le partenariat enregistré ­ Conclusion, dissolution et effets généraux, no 11 ss, in: Andreas Ziegler/Michel Montini/Eylem Ayse Copur (éd.), LGBT Recht, Bâle 2015.

À cet égard, il convient aussi de mentionner le mandat que l'OFJ a donné à l'Institut suisse de droit comparé (ISDC). L'institut a été chargé d'élaborer un avis de droit comparé pour éclairer la situation juridique qui prévaut à l'étranger concernant les différentes communautés de vie régies par la loi. Les résultats du projet du Fonds national de la recherche UniNE seront également utiles pour fonder la décision sur les futures formes de communautés de vie en Suisse (description du projet sous: https://libra.unine.ch > projets > projets en cours > L'avenir de la famille: analyse sous l'angle de l'égalité de traitement).

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Jusque-là en tout cas, les partenariats enregistrés existants resteront valables, mais la possibilité devra être donnée aux couples qui vivent sous ce régime juridique de convertir leur partenariat enregistré en mariage (voir ch. 4.3).

On ne peut s'attendre à ce que tous les partenaires enregistrés optent pour une conversion, si bien que l'institution juridique du partenariat enregistré subsistera encore pendant longtemps. La loi sur le partenariat enregistré (LPart)10 restera par conséquent en vigueur aussi longtemps qu'existeront des partenariats enregistrés, mais deviendra en quelque sorte une règlementation transitoire qu'il faudra adapter en conséquence (voir ch. 4.4).

3

Résultats de la procédure de consultation

L'avant-projet et le rapport explicatif de la Commission des affaires juridiques du Conseil national ont été soumis à la consultation du 14 mars au 21 juin 2019. Les cantons, les partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale, les associations faîtières des communes, des villes, des régions de montagne et de l'économie oeuvrant au niveau national ainsi que d'autres organisations intéressées ont été invités à s'exprimer. 24 cantons, 9 partis ainsi que 91 organisations et 38 particuliers (dans 30 prises de position, 8 ayant été signées par deux personnes) se sont exprimés, ce qui représente un total de 154 avis.

La grande majorité des participants à la consultation, soit au total 127, parmi lesquels 19 cantons, 6 partis, 82 organisations et 20 particuliers se sont prononcés en faveur du projet central. Seuls 4 cantons, 3 partis, 4 organisations et 18 particuliers l'ont rejeté sur le principe. Peu de participants se sont exprimés sur les autres propositions faites par la commission dans le cadre du projet central, mais la majorité de ceux qui ont formulé un avis estiment que ces propositions sont pertinentes. Des adaptations ont été proposées sur certains points; celles qui méritent d'être mentionnées le seront dans les chapitres idoines.

La modification des dispositions du code civil relatives à l'établissement de la filiation (art. 252 et 259a AP-CC), envoyée en consultation en tant que variante complétant le projet central, a obtenu les faveurs de 97 participants, dont 2 cantons, 4 partis, 71 organisations et 20 particuliers. Seuls 1 parti, 5 organisations et 18 particuliers l'ont explicitement rejetée sur le principe. 22 cantons, 4 partis et 7 organisations ne s'opposent pas nécessairement à la variante, mais ne veulent pas qu'elle soit réalisée dans le cadre du projet central. La question de la parentalité dès la naissance, à savoir la présomption de maternité de l'épouse de la mère, et celle de l'accès à la procréation médicalement assistée pour les couples de même sexe devraient être traitées séparément dans le cadre d'un projet sur le droit de la filiation.

10

Loi fédérale du 18 juin 2004 sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, RS 211.231.

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Présentation du projet

Il est très important pour la commission de garantir aussi rapidement que possible l'accès au mariage à tous les couples. Elle a de ce fait décidé de se concentrer dans un premier temps uniquement sur les adaptations qui sont indispensables pour ouvrir le mariage à tous (réduction à un «projet central»11).

Pour une législation cohérente, la commission a bien conscience qu'il serait nécessaire de réglementer toutes les questions qui se posent dans ce contexte ­ y compris celles qui ont trait à une autre forme d'union régie par la loi que le mariage. Cela permettrait avant tout de garantir que la révision soit réalisée en suivant une stratégie uniforme et d'éviter que plusieurs projets de révision soient menés en parallèle. La portée d'une révision si importante serait toutefois susceptible de retarder considérablement la mise en oeuvre de la question centrale: l'ouverture du mariage à tous les couples. À cela s'ajoutent les risques politiques qu'une révision si complète ferait naître: on se confronterait notamment à des thèmes très controversés dont la modification de la règlementation a déjà échoué par le passé (en particulier la règlementation des rentes de survivants, voir à ce sujet le ch. 6.1, mais aussi l'accès à la procréation médicalement assistée, voir ch. 4.2.3.2 et 6.2). Inclure ces questions dans le projet mettrait en danger son succès dans son ensemble. La préoccupation principale de la commission est toutefois d'éliminer rapidement la discrimination des couples homosexuels en matière de mariage. Pour atteindre cet objectif, elle est prête à s'accommoder temporairement de certaines incohérences et inégalités de traitement et à ne les lever que dans le cadre de la prochaine révision ou des prochaines révisions.

4.1

Droit matrimonial

Les dispositions du droit matrimonial doivent être adaptées et ne doivent plus prévoir que le mariage puisse uniquement être contracté par un homme et une femme, mais qu'il puisse aussi l'être par deux personnes de même sexe. Il faut en outre adapter dans le droit matrimonial les occurrences où la loi utilise les termes de mari, de femme, de fiancé et de fiancée.

4.1.1

La conclusion du mariage

La règlementation légale du mariage est divisée en quatre chapitres: le premier règle les fiançailles (art. 90 à 93 Code civil [CC]12), le deuxième, la capacité et les empêchements de contracter un mariage (art. 94 à 96 CC), le troisième, la procédure préparatoire et la célébration du mariage (art. 97 à 103 CC) et le quatrième, l'annulation du mariage (art. 104 à 109 CC).

11 12

Voir le document de travail de l'OFJ du 27 mars 2018, p. 8 et 9.

Code civil suisse du 10 décembre 1907, RS 210.

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Même si l'incidence pratique de l'institution juridique que sont les fiançailles est très minime, le législateur a expressément renoncé à la supprimer en l'an 2000 dans le cadre de la révision du droit du mariage: «En outre, chaque mariage suppose des fiançailles préalables en raison de la communication de la promesse de mariage à l'office de l'état civil lors de la procédure préparatoire [...] Il paraît donc raisonnable d'adopter une règlementation applicable aux dispositions qui ont été prises en vue du mariage dans les cas où ce dernier n'a pas lieu.»13 Aucune institution parallèle aux fiançailles (art. 90 ss CC) n'a été prévue pour les partenariats enregistrés14.

Désormais, deux personnes du même sexe ont aussi la possibilité de se fiancer au sens des art. 90 ss CC en s'adressant la promesse mutuelle de contracter un mariage ensemble.

Les dispositions portant sur les conditions du mariage (art. 94 à 96 CC) doivent être modifiées: le mariage n'est plus réservé aux couples hétérosexuels mais il pourra être conclu entre deux personnes, indépendamment de leur sexe (art. 94 P-CC). De plus, un partenariat enregistré existant empêchera de conclure un mariage (art. 96 PCC; jusqu'à présent: art. 26 LPart). Cette disposition ne s'applique toutefois pas quand un partenariat enregistré est converti en mariage (voir ch. 4.3).

Les dispositions du chapitre De la procédure préparatoire et de la célébration du mariage (art. 97 à 103 CC) doivent être formulées de manière à ne pas signifier que le mariage doit forcément être conclu entre un homme et une femme. Les différentes versions linguistiques sont adaptées en conséquence. En français, on remplace «mari et femme» par «les époux» et «fiancée et fiancé» par «les fiancés», la forme au masculin pluriel permettant de couvrir tous les cas de figure.

Enfin, le «partenariat enregistré» (art. 105, ch. 1, P-CC) vient s'ajouter aux dispositions concernant l'annulation du mariage (art. 104 à 109 CC).

Les dispositions (d'exécution) de l'ordonnance sur l'état civil (OEC)15 seront adaptées en temps voulu.

4.1.2

Autres dispositions du droit matrimonial

Le champ d'application de toutes les autres dispositions du droit matrimonial (divorce et séparation de corps, effets généraux du mariage, régime matrimonial) est automatiquement étendu aux couples homosexuels. En français, on remplace «mari et femme» par «les époux» à l'art. 163 CC.

13

14 15

Message du 15 novembre 1995 concernant la révision du code civil suisse (état civil, conclusion du mariage, divorce, droit de la filiation, dette alimentaire, asiles de famille, tutelle et courtage matrimonial), FF 1996 I 1, 12.

Message du 29 novembre 2002 relatif à la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, FF 2003 1192, 1214.

Ordonnance du 28 avril 2004 sur l'état civil (OEC), RS 211.112.2.

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4.2

Conséquences du mariage pour tous

Il en va de même pour toutes les autres dispositions de l'ordre juridique fondant des droits et des devoirs sur l'existence d'un mariage et les dispositions de procédure applicables au mariage. Leur champ d'application personnel sera «automatiquement» étendu: les règles concernées seront appliquées aussi bien aux couples hétérosexuels qu'aux couples homosexuels. Il n'est pas admissible de prévoir différentes catégories de mariage. L'égalité de traitement et l'interdiction de la discrimination permettent uniquement d'envisager des distinctions quand il est possible de donner des raisons objectives. Il faut surtout noter, à ce sujet, que l'art. 8, al. 1, Cst. interdit toute discrimination du fait du «mode de vie» ou du «sexe». Selon la doctrine dominante et la jurisprudence, le critère du «mode de vie» englobe les discriminations à raison de l'orientation sexuelle et le critère du «sexe» celles qui visent l'identité sexuelle. L'homosexualité et la vie commune de couples de même sexe ne sont donc pas des raisons objectives qui permettraient de justifier une distinction16.

Cette extension du champ d'application des normes existantes ne pose aucun problème partout où le droit en vigueur reconnaît déjà expressément aux partenaires enregistrés les mêmes droits et devoirs qu'aux époux. Lorsque le droit en vigueur prévoit des règles différentes pour le mariage et le partenariat enregistré (par exemple en ce qui concerne le droit de cité ou l'adoption conjointe), fait écho au sexe des époux (comme en ce qui concerne les rentes de survivants), ou prévoit que les époux soient de sexe différent (comme pour l'accès à la procréation médicalement assistée), il nous faut décrire quelles seront les conséquences du mariage pour tous (voir ch. 4.2.1­4.2.3).

4.2.1

Droit de la nationalité

S'agissant du droit de la nationalité, il existe aujourd'hui une distinction entre le mariage et le partenariat enregistré. La nouvelle loi fédérale sur la nationalité suisse (LN)17, entrée en vigueur le 1er janvier 2018, prévoit aussi des conditions de naturalisation qui diffèrent entre les personnes mariées à une personne de nationalité suisse et les partenaires enregistrés d'une personne de nationalité suisse (voir les art. 10 et 21 LN).

L'égalité du partenariat enregistré et du mariage devant la procédure de naturalisation n'est pas l'objet de ce projet, même si l'initiative parlementaire 13.468 exigeait aussi une adaptation de l'art. 38 Cst. Un projet en faveur de l'égalité du partenariat enregistré et du mariage devant la procédure de naturalisation avait déjà réuni une majorité au Conseil national le 14 mars 2016 avec 122 voix contre 62. Le projet, qui met en oeuvre plusieurs initiatives parlementaires (Iv. pa. 13.418 du groupe vert'libéral, Iv. pa. 13.419 du groupe bourgeois-démocratique, Iv. pa. 13.420 du groupe des verts, Iv. pa. 13.421 du groupe socialiste ainsi que l'Iv. pa. 13.422 de la

16 17

Voir le document de travail de l'OFJ, p. 4.

Loi du 20 juin 2014 sur la nationalité suisse (LN), RS 141.0.

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CN Doris Fiala)18 a cependant ensuite été ajourné au Conseil des États le 26 septembre 2016 en vertu de l'art. 87, al. 3, LParl. La Commission des institutions politiques a fait une demande au Conseil des États parce qu'il faut d'après elle attendre que la Commission des affaires juridiques du Conseil national ait élaboré un projet de mise en oeuvre de l'initiative parlementaire «Mariage civil pour tous» (13.468).

Le Conseil national a accepté la décision du Conseil des États le 16 décembre 2016.

Abstraction faite de la question de l'égalité entre le partenariat enregistré et le mariage devant les procédures de naturalisation, la commission est d'avis que les dispositions sur la naturalisation des personnes mariées avec un Suisse ou une Suissesse s'appliqueront aussi bien aux couples hétérosexuels qu'aux couples homosexuels à partir du moment où le mariage sera ouvert à tous. Il n'existe pas de raison objective qui puisse justifier une distinction.

Il est ressorti de la procédure de consultation publique que le titre marginal de l'art. 21 LN en allemand devrait alors être modifié 19. Cette disposition n'est cependant pas modifiée dans le cadre du présent projet. La Commission est d'avis que plutôt que de modifier de manière ponctuelle les autres lois, il y a lieu d'attendre des révisions de fond de ces lois et d'intégrer à ce moment-là les modifications requises par l'ouverture du mariage aux couples de même sexe. D'ici là, les questions qui se posent pourront être résolues par le biais de l'interprétation des lois.

4.2.2

Rentes de survivants

L'art. 13a, al. 1, de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA)20 prévoit que le partenariat enregistré est, pendant toute sa durée, assimilé au mariage dans le droit des assurances sociales. Si l'une ou l'un des partenaires décède, la partenaire ou le partenaire enregistré survivant est assimilé à un veuf d'après l'al. 2, de cette disposition. Les rentes de conjoint survivant sont soumises à des conditions différentes et les droits des veufs sont moins étendus que ceux des veuves (voir à ce sujet le ch. 6.1). Cette problématique fait l'objet de deux interventions parlementaires: la motion 17.3679 Maury Pasquier «Les partenaires survivantes sont des veuves comme les autres» (liquidée; retirée) et le postulat 17.3838 Feri «Assurances sociales. Adapter la législation afin d'assurer l'égalité pour les différents partenariats» (non encore traité au conseil).

Ce projet ne vise pas à établir une égalité entre les partenaires enregistrées et les femmes mariées devenues veuves face aux rentes de survivants (voir ch. 6.1). Avec l'ouverture du mariage à tous les couples, les dispositions concernant les rentes s'appliqueront pour toutes les épouses, même dans le cas d'un mariage entre deux femmes, étant donné qu'elles sont formulées sans équivoque. Cela revêt surtout de l'importance pour les femmes dont l'épouse décède avant d'avoir atteint l'âge ordinaire de la retraite. En effet, une personne remplissant simultanément les droits 18

19 20

Voir aussi le postulat 18.3171 Guldimann, repris par le CN Wermuth, «Naturalisation facilitée pour les partenaires enregistrés de personnes de nationalité suisse domiciliées à l'étranger».

Synthèse des résultats de la consultation, p. 14.

Loi du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales, RS 830.1.

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d'octroi d'une rente de survivant et d'une rente de vieillesse ou d'une rente d'invalidité se voit uniquement octroyer la rente la plus élevée, c'est-à-dire la rente de vieillesse (avec le supplément pour les veuves et les veufs) (art. 24b loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants [LAVS]21). Il en va de même pour les rentes de survivants d'après la loi fédérale sur l'assurance-accidents (LAA)22 (art. 31, al. 4, LAA).

4.2.3

Accès à l'adoption conjointe et à la procréation médicalement assistée

L'art. 28 de la LPart prévoit que les personnes liées par un partenariat enregistré ne sont pas autorisées à adopter un enfant conjointement ni à recourir à la procréation médicalement assistée. Cette disposition ne sera pas modifiée dans le cadre de ce projet. On peut toutefois se demander quelles seront les conséquences du mariage pour tous dans ces deux domaines.

4.2.3.1

Accès à l'adoption conjointe

Lors de l'adoption du message sur la LPart en 2002, on a principalement justifié le refus de l'accès à l'adoption conjointe aux partenaires enregistrés en soutenant qu'en autorisant les couples homosexuels à adopter, «l'enfant aurait, du point de vue juridique, deux mères ou deux pères, ce qui serait contraire à l'ordre des choses. Il serait alors dans une situation exceptionnelle, qui serait difficile à justifier dans la société contemporaine.»23 Cette réflexion n'est plus de mise. Depuis plusieurs années, les adoptions effectuées par des couples homosexuels à l'étranger sont reconnues en Suisse24. En outre, ces dernières années, on constate une «augmentation des relations homosexuelles vécues au grand jour, avec des couples qui élèvent des enfants en commun».25 Enfin, depuis l'entrée en vigueur de la dernière révision du droit de l'adoption le 1er janvier 2018, dans laquelle le législateur a autorisé l'adoption de l'enfant du conjoint mais aussi du partenaire enregistré, il est désormais aussi possible en Suisse qu'un enfant n'ait pas seulement un père et une mère, mais qu'il ait deux pères ou deux mères. Le sexe des époux ne représente ainsi plus un obstacle à l'adoption. Grâce au mariage pour tous, les dispositions régissant l'adoption conjointe par les époux (art. 264a, al. 1, CC) s'appliqueront aussi bien aux couples de même sexe qu'aux couples de sexe différent. Dans tous les pays où le mariage pour tous existe, les couples homosexuels ont la possibilité d'adopter conjointement un 21 22 23 24

25

Loi du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants, RS 831.10.

Loi du 20 mars 1981 sur l'assurance-accidents, RS 832.20.

Message du 29 novembre 2002 relatif à la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, FF 2003 1222.

Voir l'avis du Conseil fédéral du 14 mai 2008 sur l'interpellation 08.3157 Mario Fehr «Levée de l'interdiction d'adopter faite aux personnes homosexuelles»: «3. [...]

l'adoption d'un enfant par un couple de même sexe à l'étranger sera en principe reconnue en Suisse».

Message du 28 novembre 2014 concernant la modification du code civil (Droit de l'adoption), FF 2015 847.

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enfant. Il y a lieu de préciser que cela ne revient pas à accorder un droit à l'adoption mais seulement la possibilité d'entamer la procédure d'adoption.

4.2.3.2

Accès à la procréation médicalement assistée

La question de l'accès aux méthodes de procréation médicalement assistée est plus complexe.

Selon les travaux préparatoires et une partie de la doctrine, l'exclusion des couples homosexuels de la procréation médicalement assistée découle directement de la Constitution (art. 119, al. 2, let. c, Cst), car la notion constitutionnelle de stérilité ne peut s'appliquer qu'à des couples hétérosexuels. Si l'on s'en tient à ce point de vue, une modification de la Constitution est nécessaire afin de permettre à ces couples d'accéder à la procréation médicalement assistée 26. Si l'on suit en revanche l'avis que partagent l'autre partie de la doctrine et le P r Andreas Ziegler dans son rapport d'expertise du 19 janvier 2018, la notion de stérilité figurant à l'art. 119, al. 2, let. c, Cst. ne peut pas être lue dans le sens d'une discrimination des couples homosexuels.

D'après eux, l'objectif de la disposition est plutôt d'empêcher l'usage abusif de la procréation médicalement assistée; il ne serait ainsi pas possible de justifier, sur la base de cet article, l'exclusion des couples homosexuels27.

Dans ce contexte, la commission a décidé le 14 février 2019 de compléter le projet central préparé par l'OFJ par une modification des dispositions du code civil (CC) portant sur l'établissement de la filiation, qui permettrait aux couples de femmes mariées de recourir à un don de sperme. Cette modification a été soumise à la consultation en tant que variante.

Quand bien même un grand nombre de participants ont approuvé cette variante 28, la commission a décidé de ne pas l'inclure dans le projet central. Au demeurant, 22 cantons étaient opposés au traitement de cette question dans le projet central29.

La commission estime donc que le projet ne parviendrait pas à trouver de majorité, et souhaite donc aborder ultérieurement la procréation médicalement assistée.

Cependant, une minorité (Flach, Aebischer Matthias, Arslan, Bauer, Burkart, Fehlmann Rielle, Markwalder, Marti Min Li, Mazzone, Merlini, Naef, Wasserfallen Flavia) demande toujours que le projet central soit complété par les art. 252, al. 2, et 259a P-CC. La modification de ces dispositions portant sur l'établissement de la filiation permettra aux couples de femmes mariées de recourir à un don de sperme en vertu de l'art. 3, al. 3, de la loi sur la procréation médicalement assistée (LPMA)30. Il n'est pas nécessaire de modifier la LPMA: en reconnaissant dans le 26 27

28 29 30

Voir l'avis de droit de l'OFJ, p. 5 et les références citées.

ZIEGLER ANDREAS R., Kurzgutachten zur Frage des Zugangs gleichgeschlechtlicher Paare zu fortpflanzungsmedizinischen Verfahren in der Schweiz (Auslegung des Begriffs der «Unfruchtbarkeit» in Art. 119 Abs. 2 Bst. c BV), 2019/01/19. Avis de droit, Lesbenorganisation Schweiz (LOS), p. 15 s.; disponible sous: www.unil.ch > Recherche > Publications > serval > Ziegler [serval:BIB_2F3DA0DD2F66].

Synthèse des résultats de la consultation, p. 16.

Synthèse des résultats de la consultation, p. 19.

Loi fédérale du 18 décembre 1998 sur la procréation médicalement assistée, RS 810.11.

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CC la parentalité de l'épouse de la mère dès la naissance, on remplit la condition de l'art. 3, al. 2, let. a, LPMA selon laquelle la procréation médicalement assistée est réservée aux couples à l'égard desquels un rapport de filiation peut être établi au sens des art. 252 à 263 CC. Les autres dispositions de la LPMA, en particulier l'art. 3, al. 3, conformément auquel seul un couple marié peut recourir à un don de sperme, ne s'opposent non plus pas à ce que les couples de femmes puissent recourir à un don de sperme à partir du moment où le mariage sera ouvert à tous les couples.

4.3

Conversion d'un partenariat enregistré existant en mariage

En ouvrant le mariage à tous les couples, il faut déterminer de quelle façon traiter la situation des couples homosexuels qui ont enregistré un partenariat avant l'entrée en vigueur de cette modification et qui souhaiteraient désormais se marier.

Entre l'entrée en vigueur de la LPart le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2018, 10 226 partenariats enregistrés ont été conclus en Suisse (et 1349 dissous judiciairement)31. D'après l'Annuaire statistique de la Suisse, le pays comptait 16 400 personnes liées par un partenariat enregistré en 2017; ce chiffre était de 15 300 en 2016 et de 14 300 en 2015, évoluant ainsi de 1000 unités par année32. La possibilité de convertir le partenariat sera en outre offerte aux personnes vivant à l'étranger, qui ont conclu un partenariat enregistré (selon le droit suisse ou étranger) avant l'introduction du mariage pour tous (voir ch. 5.3.4). De ce fait, la question de la conversion concernera potentiellement plus de 16 000 personnes, soit 8000 couples.

4.3.1

Procédure de conversion

Un partenariat enregistré existant ne peut pas être converti en mariage de par la loi, c'est-à-dire sans participation active des personnes concernées. Une telle règlementation serait incompatible avec le droit au mariage garanti par la Constitution (art. 14 Cst.), car cette dernière garantit aussi la liberté de ne pas devoir se marier. Les partenaires peuvent soit continuer à vivre en partenariat enregistré, soit le convertir en mariage.

Si des partenaires enregistrés décident de convertir leur partenariat, la commission estime qu'il n'est pas envisageable que ces personnes doivent dissoudre leur partenariat et conclure un mariage par la suite. Si les partenaires enregistrés avaient déjà eu la possibilité de se marier au moment de l'enregistrement de leur partenariat, on peut présumer qu'ils seraient nombreux à l'avoir fait. À partir du moment où le mariage s'ouvre à tous les couples, ils ne souhaitent pas se séparer, mais bien au contraire poursuivre leur union dans le cadre d'un mariage. Dans ces circonstances, le fait de devoir effectuer un détour en passant d'abord par une dissolution semble 31

32

Consultable ici: www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.html > Trouver des statistiques > Population > Mariages, partenariats et divorces > Partenariats enregistrés, dissolution > Partenariats enregistrés et dissous selon le sexe et le canton, 2007­2018.

Voir l'annuaire statistique de la Suisse 2019, p. 39.

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inapproprié; il faut en revanche offrir à ces couples la possibilité de convertir leur partenariat enregistré en mariage, sans obstacles bureaucratiques (voir art. 35 PLPart).

Une simple déclaration des couples devant l'officier d'état civil doit permettre cette conversion. La remise de la déclaration de conversion n'est pas soumise à un délai déterminé et peut avoir lieu en tout temps. Dès que les deux partenaires ont signé leur déclaration de conversion, ils sont considérés comme mariés: le changement est enregistré dans le registre d'état civil, leur état civil devenant dès lors «marié». Pour les couples qui le souhaitent, la déclaration conjointe des partenaires pourra être reçue dans le cadre d'une cérémonie analogue au mariage (art. 35, al. 3, P-LPart). Il est à noter que le partenariat sera converti en mariage au moment de la signature de cette déclaration.

4.3.2

Effets de la conversion

La commission considère qu'un mariage issu d'une conversion doit être traité de la même manière que s'il avait été conclu au moment de l'enregistrement du partenariat quant à ses conséquences. Un partenariat enregistré a quoi qu'il en soit les mêmes effets juridiques que le mariage dans de nombreux domaines 33. Dans ceuxci, la conversion ne constitue pas un changement de situation et ne produit aucune (nouvelle) conséquence. Par exemple, si les partenaires ont décidé lors de l'enregistrement de leur union de conserver leur nom (en vertu de l'art. 12a LPart ou la disposition transitoire, l'art. 37a LPart), ils n'ont pas la possibilité de prendre un nom qui leur soit commun lors de la conversion. Cependant, tout époux peut bien sûr demander à changer de nom selon l'art. 30 CC.

En outre, la conversion du partenariat enregistré en mariage n'a aucune conséquence sur les enfants de l'un ou de l'autre partenaire. L'établissement de la filiation avec l'enfant du conjoint repose sur les règles de l'adoption de l'enfant du conjoint ou du partenaire (art. 264c CC): si une procédure d'adoption a déjà été entamée au moment de la conversion, elle se poursuit selon les dispositions en vigueur.

En ce qui concerne les effets juridiques des dispositions basées sur la durée du mariage, il faut tenir compte de la durée du partenariat enregistré qui l'a précédé (art. 35a, al. 2, P-LPart) afin que les couples ayant choisi la conversion ne soient pas désavantagés par rapport aux couples qui poursuivent leur partenariat enregistré ou ceux qui auront pu conclure un mariage dès le début. Dans le domaine du droit des régimes matrimoniaux, la commission estime en revanche que le régime ordinaire de la participation aux acquêts (art. 181 CC) ne doit s'appliquer qu'à partir du moment de la conversion, à moins que les époux n'en aient convenu autrement (art. 35a, al. 3, P-LPart).

33

Voir le tableau synoptique de l'OFJ «Mariage et partenariat enregistré: principales convergences et différences», consultable sous: www.parlament.ch/fr > Curia vista > 13.468 > Lien vers des informations complémentaires.

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4.4

Maintien de la LPart pour les partenariats enregistrés existants

Une fois le mariage ouvert à tous les couples, aucun partenariat ne pourra plus être enregistré. Il sera toutefois possible de conserver les partenariats enregistrés déjà conclus (voir ch. 2.3).

Les partenariats enregistrés pourront ainsi perdurer encore longtemps. Par conséquent, la LPart restera en vigueur mais son premier et deuxième chapitre ainsi que l'objet de la loi sont modifiés (voir ch. 7.2).

L'évaluation du droit en vigueur a en outre fait ressortir que dans un petit nombre de domaines, aucune règlementation n'a été prévue pour les partenaires enregistrés, sans que cela ne résulte d'une décision motivée du législateur34. Les art. 38, al. 3, (dissolution du mariage par déclaration d'absence), 68 (privation du droit de vote dans les associations), 344, al. 2, (dissolution de l'indivision), 503 (personnes concourant à la rédaction du testament) et 574 (répudiation des héritiers) du CC par exemple sont concernés. Pour autant que l'on puisse en juger, cela n'a posé aucun problème dans la pratique jusqu'à aujourd'hui: ces dispositions peuvent s'appliquer de manière analogue aux partenariats enregistrés. Dans la mesure où les partenariats enregistrés tendront à disparaître au fil du temps, on renonce à compléter ces dispositions dans le cadre de ce projet.

La LPart restera en vigueur tant qu'il y aura des partenariats enregistrés. Cette loi entière devient ainsi une sorte de règlementation transitoire (législation temporaire) et ne sera abrogée qu'après la disparition du dernier partenariat enregistré. L'ensemble de l'ordre juridique suisse sera alors modifié en conséquence.

5

Droit international privé

5.1

Généralités

L'ouverture du mariage à tous les couples, indépendamment du sexe des époux, soulève également des questions en droit international privé en raison du grand nombre de couples dans une situation internationale (nationalités différentes des époux, déménagements internationaux, domiciles dans des États différents, etc.). Les règles de droit international privé déterminent les aspects liés à la compétence des autorités, au droit applicable et à la reconnaissance des décisions étrangères. Ces règles doivent garantir la sécurité juridique nécessaire, notamment en ce qui concerne la célébration et la dissolution de mariages en Suisse ainsi que la reconnaissance et les effets des mariages conclus ou dissous à l'étranger. Des questions semblables se posent aussi concernant les partenariats enregistrés, qui continueront d'être conclus à l'étranger, même si la conclusion de nouveaux partenariats enregistrés ne sera plus possible en Suisse (voir ch. 2.3).

Il faut garder à l'esprit que les règles de droit international privé n'ont pas le même objectif et champ d'application que les règles du droit matériel. Les dispositions de 34

Voir le document de travail de l'OFJ du 27 mars 2018, p. 5.

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la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)35 s'appliquent dans un contexte international, ce qui signifie qu'elles doivent non seulement couvrir les formes d'union dans les situations internationales réglées par le droit suisse, mais également régler la reconnaissance en Suisse des différentes formes d'unions prévues par des lois existant à l'étranger36 ainsi que leurs effets dans l'ordre juridique suisse.

La plupart des règles de la LDIP applicables aux questions susmentionnées ne sont pas modifiées dans le cadre de la présente révision. En effet, pour l'essentiel, les mêmes règles s'appliquent déjà indistinctement aux mariages entre personnes de sexe différent et aux partenariats enregistrés entre personnes de même sexe. Ces règles pourront désormais être aussi appliquées aux mariages entre personnes de même sexe. De ce fait, très peu de questions de droit transitoire se posent au niveau du droit international privé, puisque le changement n'intervient pas tant au regard des règles de conflit de loi, mais plutôt en ce qui concerne le droit matériel appliqué dans le cas où les règles de droit international privé renvoient vers le droit suisse.

Au vu des implications pratiques pour les personnes concernées, les explications ciaprès vont non seulement esquisser les grandes lignes de droit international privé, mais aussi sommairement aborder les situations internationales sur lesquelles la modification du droit matériel suisse a des conséquences, même là où les règles de la LDIP ne changent pas. Pour les modifications des règles de la LDIP, voir les explications au ch. 7.3.

5.2

Mariage (chap. 3 LDIP)

5.2.1

Application des règles existantes à tous les mariages

En droit matériel suisse, l'ouverture du mariage à tous les couples conduit automatiquement à l'application des dispositions du chap. 3 LDIP (mariage) aux couples de même sexe. En effet, les autorités suisses interprèteront la catégorie «mariage» suivant la (nouvelle) conception voulue par le législateur, ce qui conduira désormais à classer le mariage entre personnes de même sexe dans la catégorie «mariage». Il n'est pas nécessaire de le préciser explicitement dans le texte de loi; il suffit d'abroger l'actuel art. 45, al. 3, LDIP, d'après lequel «un mariage valablement célébré à l'étranger entre personnes de même sexe est reconnu en Suisse en tant que partenariat enregistré». À l'avenir, un tel mariage sera donc reconnu en tant que mariage.

L'application des règles existantes de la LDIP à tous les mariages, indépendamment du sexe des époux, conduit dans l'ensemble à des résultats satisfaisants. Toutefois, il faut tenir compte du fait que le mariage entre personnes de même sexe est encore relativement peu répandu au niveau mondial, bien qu'il soit connu dans les pays avoisinant la Suisse (voir ch. 2.1). Il convient dès lors de compléter les règles générales du chap. 3 par des dispositions spéciales, comme cela avait été fait pour le partenariat enregistré dans le chap. 3a.

35 36

Loi fédérale sur le droit privé du 18 décembre 1987, RS 291.

Voir: www.isdc.ch > publications > e-avis > avis sur la possibilité d'inscrire des unions étrangères dans le registre de l'état civil suisse, état au 13 mars 2017.

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Pour éviter des lacunes dans la compétence, le droit applicable et la reconnaissance de décisions étrangères, la plupart des solutions développées pour le partenariat enregistré (art. 65b­d LDIP) sont transposées mutatis mutandis dans le chapitre consacré au mariage: le for subsidiaire au lieu de la célébration (art. 60a P-LDIP), la possibilité d'élection du droit de l'État de célébration en matière de régimes matrimoniaux (art. 52, al. 2, P-LDIP) ainsi que la reconnaissance de décisions étrangères rendues dans l'État de célébration (art. 50, let. b, et 65, al. 1, let. c, P-LDIP). En revanche, l'application subsidiaire du droit suisse lorsque le droit étranger désigné ne connaît pas de règles applicables à l'institution en cause (art. 65c, al. 1, LDIP) n'est pas reprise pour les mariages. En effet, le recours au droit suisse n'est pas nécessaire dès lors que tous les droits étrangers connaissent le mariage entre personnes de sexe différent et que ces règles peuvent être appliquées par analogie aux mariages entre personnes de même sexe. Le juge pourra au besoin appliquer d'autres règles du droit désigné ou faire intervenir la clause d'exception de l'art. 15 LDIP.

À ce propos, notons que les dispositions de la LDIP sur la reconnaissance des mariages célébrés à l'étranger (art. 45 LDIP; voir ch. 5.2.2) ne s'appliquent qu'à la question du statut. Les effets généraux du mariage et le régime matrimonial (voir ch. 5.2.3 s.) seront toutefois soumis à d'autres règles, car le droit international privé a pour objectif de faire appliquer le droit qui est le plus étroitement lié à la question posée. Ainsi, la transcription d'un mariage célébré à l'étranger dans le registre de l'état civil suisse n'affecte pas ces autres règles. Si un ressortissant islandais épouse en Allemagne un citoyen anglais, le nom des époux peut, par exemple, suivre la législation islandaise tandis que le régime matrimonial est réglé par droit anglais et que la dissolution de l'union en Suisse sera réglée par le droit suisse. De même, la question de l'autorité parentale sur des enfants ou de la reconnaissance d'un enfant né à l'étranger devra être rattachée à part et ne sera pas réglée par le droit du mariage.

5.2.2

Reconnaissance et transcription à l'état civil de mariages célébrés à l'étranger

Rappelons d'abord la différence entre la reconnaissance d'un évènement d'état civil étranger (tel que le mariage) et sa transcription dans le registre de l'état civil suisse: tout mariage célébré valablement à l'étranger est en principe reconnu en Suisse (art. 45 en relation avec art. 25 ss LDIP) et peut donc produire des effets en Suisse.

En revanche, tout mariage reconnu en Suisse n'est pas transcrit dans le registre de l'état civil: Le but de ce dernier n'est d'ailleurs pas de confirmer la reconnaissance de tous les évènements d'état civil étrangers, mais plutôt de rendre compte de ceux qui se sont produits en Suisse37 ou qui concernent des ressortissants suisses et les membres de leurs familles38. Les mariages célébrés à l'étranger entre ressortissants étrangers ne sont donc pas systématiquement transcrits dans le registre suisse de l'état civil, même lorsque les époux ont leur domicile en Suisse ou y emménagent ultérieurement. Dans la mesure où la transcription n'est pas une condition à la 37 38

Art. 15a OEC Art. 39 OEC

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reconnaissance, un évènement d'état civil étranger peut ainsi produire tous ses effets en Suisse sans avoir été transcrit ici au registre de l'état civil, par exemple lorsque certains effets juridiques sont rattachés à l'existence du mariage étranger, comme des créances d'entretien.39 La présente révision a donc les mêmes effets sur tous les couples mariés, qu'importe leur sexe ou qu'ils soient transcrits ou non dans le registre de l'état civil et, le cas échéant, quelle que soit la date de la transcription. À l'avenir, leur union sera reconnue en tant que mariage car l'ordre public suisse ne s'y opposera plus.

Si le mariage célébré à l'étranger entre personnes de même sexe n'est pas transcrit dans le registre de l'état civil suisse avant l'entrée en vigueur de la présente révision, il pourra toujours l'être en tant que mariage, dès lors que les conditions à la transcription sont remplies. Si le mariage célébré à l'étranger entre personnes de même sexe a été transcrit dans le registre de l'état civil en tant que partenariat enregistré (voir art. 45, al. 3, LDIP), la transcription est à mettre à jour. Les cas qui nous intéressent ici ne sont pas ceux des personnes qui ont conclu un partenariat enregistré à l'étranger avant la présente révision et qui se verront offrir le choix de convertir leur union en mariage ou non (voir ch. 5.3.3), mais ceux des couples qui ont célébré valablement leur mariage à l'étranger mais qui, du fait des dispositions en vigueur en Suisse, n'ont pu jusqu'à présent le faire transcrire en tant que tel. Pour des raisons pratiques, une mise à jour automatique de la transcription n'est pas envisageable. Par conséquent, elle se fera indépendamment d'un évènement d'état civil sur demande des intéressés, ou lors de la transcription d'un nouvel évènement d'état civil (p. ex.

une naissance d'un enfant), en se basant sur l'acte de mariage étranger. 40 Il semble très probable que les couples qui se trouvent dans la situation décrite plus haut demanderont d'eux-mêmes la mise à jour de la transcription. Si tel n'est pas le cas, elle doit être réalisée d'office lorsque, à la faveur de l'annonce d'un nouvel évènement d'état civil, l'officier de l'état civil constate que l'inscription en tant que partenariat enregistré ne correspond pas au mariage célébré à l'étranger et qu'il dispose au moins d'une copie de l'acte de mariage étranger.

5.2.3

Effets généraux du mariage

Les dispositions du chap. 3 de la LDIP sur les effets généraux du mariage peuvent conduire à l'application du droit suisse ou d'un droit étranger. Si le droit étranger ne connaît pas le mariage entre personnes de même sexe, il conviendra en principe d'appliquer par analogie les règles du mariage entre personnes de sexe différent prévues par ce droit.

39

40

ANDREAS BUCHER, in: Andreas Bucher (éd.), Commentaire romand ­ loi sur le droit international privé/Convention de Lugano, Bâle 2011, n o 33 ad art. 45 LDIP; CORINNE WIDMER LÜCHINGER, in: Markus Müller-Chen/Corinne Widmer Lüchinger (éd.), Zürcher Kommentar zum IPRG, Zurich 2018, n o 93 ad art. 65a LDIP.

Art. 16, al. 1, let. c, OEC

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5.2.4

Régimes matrimoniaux

Les règles de la LDIP applicables à défaut d'élection de droit (art. 54 s. LDIP) restent inchangées. Elles ne sont pas affectées par l'abrogation de l'art. 45, al. 3, LDIP, puisque les règles de conflit qui régissent les régimes matrimoniaux sont indépendantes de celles qui régissent la reconnaissance du statut de l'institution étrangère.

Il y a toutefois lieu de signaler un changement important lorsque les règles de conflit renvoient vers le droit suisse. Actuellement, selon la doctrine dominante41, dans une telle situation, les couples de même sexe qui se sont mariés à l'étranger sont soumis à l'art. 18 LPart en vertu duquel chaque personne dispose de ses biens (ce qui équivaut au régime de séparation des biens) sous réserve d'un contrat de mariage. Or, après l'entrée en vigueur de la présente révision, ils seront soumis automatiquement et rétroactivement au régime ordinaire de la participation aux acquêts, s'ils n'en ont pas disposé autrement dans une convention sur les biens ou dans un contrat de mariage (art. 9g, al. 1, tit. fin., P-CC). Ainsi, les dispositions relatives au régime matrimonial qui s'appliquent aux mariages célébrés à l'étranger seront enfin celles de l'état civil choisi par les parties, et ce, que le couple ait été auparavant transcrit dans le registre de l'état civil suisse ou non.

Cet effet rétroactif peut avoir d'importantes conséquences sur les droits déjà acquis des époux (les prestations des assurances sociales deviennent par exemple des acquêts qui doivent être partagés en respectant l'art. 197, al. 2, ch. 2, CC). Pour cette raison la commission est d'avis que dans de telles situations il faut offrir à chacun des époux la possibilité de choisir de rester soumis au régime de l'art. 18 LPart jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente révision par simple déclaration écrite unilatérale, sans devoir conclure un contrat de mariage à cette fin. Cette question ne doit pas être réglée par des dispositions transitoires de la LDIP, puisque ce ne sont précisément pas les règles de conflit qui changent, mais les règles de droit matériel appliquées en cas de renvoi vers le droit suisse. Une nouvelle disposition en ce sens est par conséquent introduite au titre final du code civil (art. 9g, al. 2, tit. fin. P-CC).

Sans un tel choix, les couples seront soumis avec effet rétroactif
au régime ordinaire de la participation aux acquêts. Si une action judiciaire entrainant la dissolution du régime des biens est déjà pendante au moment de l'entrée en vigueur de la révision, le droit antérieur doit s'appliquer, soit l'art. 18 LPart (art. 9g, al. 3, tit. fin. P-CC).

En conclusion, pour les couples qui se marient après l'entrée en vigueur de la révision, de même que pour ceux mariés avant cette date et qui n'ont pas fait de déclaration expresse en faveur de la séparation des biens, le régime ordinaire de la participation aux acquêts s'appliquera lorsque les règles de conflit désignent le droit suisse.

Il convient de rappeler que les couples ont la possibilité de faire une élection de droit (art. 52 s. LDIP) ou de conclure un contrat de mariage (art. 56 LDIP) à tout moment.

41

Voir les références citées à la note 39.

8148

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5.2.5

Divorce et séparation

Pour le divorce et la séparation, le droit suisse, à savoir les dispositions du code civil, sera toujours appliqué en Suisse (art. 61 LDIP), et ce, indépendamment de la date de la conclusion du mariage. Même pour la dissolution d'un mariage conclu à l'étranger entre personnes de même sexe et transcrit dans le registre de l'état civil suisse en tant que partenariat enregistré, il conviendra d'appliquer les dispositions du code civil sur le divorce42 puisque le juge n'est pas lié par une inscription différente dans le registre de l'état civil43.

5.3

Partenariat enregistré (chap. 3a LDIP)

5.3.1

Maintien des solutions existantes

Il restera encore pendant des années des couples qui ont enregistré leur partenariat en Suisse et qui n'auront pas décidé de convertir leur union en mariage. À l'avenir, aucun nouveau partenariat ne pourra être enregistré, mais cela ne change rien au fait que d'anciens partenariats seront conservés. En outre, toujours plus de législations étrangères prévoient des communautés de vie aux effets semblables au mariage et ouvertes aux couples homosexuels comme hétérosexuels. Tous ces couples ont encore besoin de sécurité juridique dans les contextes internationaux. La modification proposée de la LDIP conserve donc la distinction entre mariages et partenariats enregistrés et maintient deux chapitres distincts, de sorte que les mariages comme les partenariats enregistrés puissent être considérés en tant que tels.

Le terme de partenariat enregistré s'entend au sens large dans le chap. 3a LDIP, dans la mesure où il comprend toute forme de communauté de vie qui fonde un lien d'état civil aux effets semblables au mariage (partenariat fort, voir ch. 2.3) mais n'en porte pas le nom. Il pourra donc s'agir à l'avenir de personnes de même sexe comme de sexe différent. Une geregistreerd partnershap néerlandaise entre deux personnes de sexe différent pourra ainsi être reconnue en Suisse en tant que partenariat enregistré, et la volonté des personnes qui ont délibérément choisi à l'étranger une autre union que le mariage sera du même coup respectée. Cette évolution permettra également d'éviter les situations boiteuses, car les mariages et les partenariats étrangers seront respectivement reconnus en Suisse en tant que mariages et en tant que partenariats.

Les couples qui se sentent stigmatisés par le fait que leur union étrangère est reconnue ici en tant que partenariat (comme relevé lors de la consultation) sont libres de demander la conversion de ce dernier en mariage (si le partenariat a été enregistré avant l'entrée en vigueur de la présente révision, art. 35 P-LPart) ou de se marier en Suisse (si le partenariat a été enregistré après l'entrée en vigueur, art. 96 P-CC).

Le risque persiste toutefois que le changement d'état civil ne soit pas reconnu à l'étranger.

42 43

ANDREAS BUCHER (op. cit.), no 45 ad art. 65c LDIP.

ATF 5A_214/2016 du 26 août 2016, consid. 5.2 et 6.

8149

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Comme jusqu'à présent, la reconnaissance et la transcription dans le registre de l'état civil suisse d'unions sans effets semblables au mariage, à l'exemple du PACS français (partenariat faible, voir ch. 2.3), reste exclue. La qualification des différentes institutions étrangères devra s'effectuer au cas par cas par l'autorité saisie (autorité cantonale de surveillance de l'état civil, art. 32 LDIP).

Les dispositions du chap. 3 étant applicables par analogie aux formes d'unions couvertes par le chap. 3a (art. 65a P-LDIP), les art. 65b, 65c, al. 2, et 65d peuvent être abrogés sans que cela ne conduise à un changement au niveau des règles de droit international privé, leur contenu essentiel étant transposé avec quelques adaptations formelles dans le chap. 3 (art. 50, 52, al. 2, 60a, 65, al. 1, P-LDIP).

Comme pour le mariage (ch. 5.2.1 in fine), notons ici que la reconnaissance des partenariats enregistrés à l'étranger et leur éventuelle transcription dans le registre de l'état civil suisse ne vaut que pour la question du statut. Les effets généraux du partenariat et le régime matrimonial du partenariat (voir ch. 5.2.3 s.) seront toutefois rattachés à part comme pour le mariage. L'art. 65a LDIP renvoie à ce propos aux dispositions du mariage (voir ch. 5.2.3­5.2.5) afin que soit appliqué le droit qui est le plus étroitement lié à la question posée.

5.3.2

Droit applicable

Aux termes de l'art. 65a P-LDIP, les règles du chap. 3 sont applicables par analogie aux partenariats enregistrés. Les règles de conflit de la LDIP peuvent aussi bien mener à l'application du droit matériel suisse qu'à celle du droit étranger.

Il convient toutefois de prévoir une disposition spéciale pour les situations dans lesquelles les règles de droit international privé désigneraient un droit ne connaissant pas de règles matérielles sur le partenariat enregistré. Dans une telle situation, l'art. 65c P-LDIP prévoit dorénavant d'appliquer par analogie les règles matérielles du droit désigné applicables au mariage. Quand bien même le mariage et le partenariat enregistré portent des noms différents, les mêmes règles matérielles pourront s'appliquer aux deux dans de nombreuses situations.

Ce sera notamment le cas en Suisse pour les partenariats enregistrés conclus à l'étranger après l'entrée en vigueur de la présente révision lorsque le droit suisse est applicable. La LPart ne s'appliquant qu'aux partenariats enregistrés conclus avant cette date (art. 1 P-LPart), le renvoi vers le droit suisse conduira alors au droit matrimonial: il conviendra d'appliquer par analogie les dispositions matérielles sur le mariage. Par exemple, les dispositions du code civil relatives aux effets généraux du mariage s'appliqueraient à une geregistreerd partnershap néerlandaise entre deux personnes de sexe différent en cas de renvoi vers le droit suisse. Cette solution permet de tenir compte non seulement de la volonté du législateur d'ouvrir le mariage à tous et de ne conserver la LPart que pour les partenariats préexistants, mais aussi du choix délibéré des personnes en ce qui concerne leur état civil, qui porte souvent une forte connotation émotionnelle et qu'il convient donc de respecter.

En ce qui concerne les partenariats enregistrés conclus en Suisse ou à l'étranger avant l'entrée en vigueur de la présente révision, la LPart s'appliquera lorsque le 8150

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droit suisse est désigné, puisque cette loi reste applicable à ces partenariats enregistrés (art. 1 P-LPart; voir ch. 5.3.4). L'application de l'art. 15 LDIP demeure réservée.

Les éventuelles questions de droit transitoire qui pourraient se poser en lien avec la modification de l'art. 65c LDIP en cas de désignation d'un droit étranger seront résolues en vertu de l'art. 196 LDIP.

5.3.3

Conversion d'un partenariat enregistré en mariage

Selon le projet de loi sur le partenariat enregistré, les partenaires ayant conclu un partenariat avant l'entrée en vigueur de la présente révision auront la possibilité de le convertir en mariage (art. 35 P-LPart).

Un partenariat qui a été enregistré à l'étranger avant l'entrée en vigueur de la présente révision pourra également bénéficier de cette procédure de conversion. La compétence et le droit applicable sont régis par analogie par les art. 43 et suivants LDIP. Une telle conversion représente un évènement d'état civil à enregistrer dans le registre de l'état civil.

Les personnes qui ont conclu un partenariat enregistré à l'étranger après l'entrée en vigueur de la présente révision pourront toujours se marier en Suisse, dès lors que les conditions générales des art. 43 ss LDIP et du droit matériel suisse sont remplies.

L'art. 96 P-CC ne crée d'empêchement au mariage que si un précédent partenariat a été conclu avec une tierce personne et non avec le futur époux. L'ambiguïté relevée dans le cadre de la procédure de consultation peut donc être levée.

6

Questions à régler au sujet du mariage pour tous

Comme mentionné plus haut, ce projet se limite à traiter les points centraux (voir ch. 4). D'autres questions qui se posent dans le cadre de l'ouverture du mariage à tous les couples ne sont par conséquent pas réglées. Compte tenu de l'importance sociale et de la complexité technique de ces questions, la discussion à ce sujet doit être menée dans un cadre distinct.

Les domaines d'application exposés ci-dessous sont concernés.

6.1

Égalité dans le cadre des rentes de survivants

En ce qui concerne les rentes de survivants selon la LAVS et la LAA, une partenaire enregistrée est assimilée à un veuf d'après le droit en vigueur (art. 13a, al. 2, LPGA; voir aussi ch. 4.2.2). Les rentes de veuf et de veuve sont cependant soumises à des conditions différentes: d'après l'art. 23, al. 1, LAVS les veuves et les veufs ont droit à une rente si, au décès de leur conjoint, ils ont un ou plusieurs enfants. Les veuves ont en outre droit à une rente si, au décès de leur conjoint, elles n'ont pas d'enfant ou d'enfant recueilli au sens de l'art. 23, mais qu'elles ont atteint 45 ans révolus et 8151

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ont été mariées pendant cinq ans au moins (art. 24, al. 1, LAVS). La rente de veuf s'arrête quant à elle lorsque le dernier enfant atteint l'âge de 18 ans (art. 24, al. 2, LAVS). Cette situation juridique est contestée sur deux points: ­

L'inégalité de traitement entre les veufs et les veuves a été critiquée à de maintes occasions du point de vue de l'égalité des sexes 44.

­

La règlementation en vigueur est aussi critiquée parce qu'elle n'accorde pas les mêmes droits aux femmes ayant conclu un partenariat enregistré qu'aux femmes mariées45. Même si la situation des femmes dans ce contexte s'améliore grâce à l'ouverture du mariage à tous les couples et la possibilité de convertir le partenariat enregistré en mariage (voir ch. 4.2.2), cette inégalité de traitement subsistera après cette révision.

La commission est consciente que cette thématique devra tôt ou tard être traitée en profondeur. Elle regrette en particulier que l'inégalité de traitement des femmes et des hommes soit perpétuée. La complexité de la question a déjà fait l'objet d'un débat au parlement dans le cadre de la révision de l'AVS, mais aucune décision n'avait pu être prise46. Compte tenu du risque que ces questions pourraient freiner excessivement l'ouverture du mariage à tous les couples, la commission a décidé de renoncer à les régler dans le cadre du projet actuel.

6.2

Accès à la procréation médicalement assistée

La commission a également conscience qu'il faudra tôt ou tard lancer un débat de fond sur l'accès à la procréation médicalement assistée et les techniques de procréation médicalement assistée (p. ex. dons de sperme pour partenaires enregistrées, pour les couples non mariés et don d'ovules)47.

Compte tenu du risque que ces questions pourraient freiner excessivement l'ouverture du mariage à tous les couples, la commission est toutefois d'avis que ce débat devrait être mené séparément de celui sur l'ouverture du mariage à tous les couples.

D'autres pays aussi ont ouvert le mariage à tous les couples et examiné séparément la question de l'accès à la procréation médicalement assistée (voir par exemple en Allemagne, Bericht des Arbeitskreises Abstammungsrecht, Abstammungsbericht

44

45 46

47

Voir l'arrêt du Tribunal fédéral 9C 617/2011 du 4 mai 2005, consid. 3.5 (et les références citées); voir aussi la requête no 78630/12 B contre Suisse, introduite devant la Cour européenne des droits de l'homme le 19 novembre 2012.

Voir l'arrêt du Tribunal fédéral 9C 521/2008 du 5 janvier 2009.

Dans le message concernant la réforme de la prévoyance vieillesse 2020 (FF 2015 1), il a été proposé de ne maintenir les rentes de veuve et de veuf que pour les femmes ou les hommes qui, au moment du décès de leur conjoint, ont un enfant ayant droit à une rente d'orphelin ou un enfant nécessitant des soins. En outre, les rentes de veuve et de veuf auraient dû être ramenées de 80% à 60% d'une rente de vieillesse.

Voir le rapport du Conseil fédéral suite au postulat Fehr (12.3607), Modernisation du droit de la famille, mars 2015, p. 56, et les propositions de la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine dans sa prise de position n o 22/2013, La procréation médicalement assistée ­ Considérations éthiques et propositions pour l'avenir, p. 53.

8152

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vom 4. Juli 2017, et en France, le Rapport du groupe de travail Filiation, origines, parentalité, 2014).

6.3

Autres questions sur le droit de la filiation

La question de la filiation, comme celle de la parenté, est étroitement liée à la question des procédures de procréation médicalement assistée. En vertu des art. 252, al. 2, et 255, al. 1, CC, l'enfant né pendant le mariage a pour père l'époux de la mère. Reste à savoir si cet automatisme s'appliquera à l'avenir également à l'épouse de la mère. En l'absence de révision idoine du droit de la filiation, ce n'est aujourd'hui pas le cas48. La question se poserait en particulier si le recours au don de sperme pour la procréation médicalement assistée était autorisé aux couples de femmes. En Autriche, par exemple, la partenaire enregistrée de la mère bénéficie de la présomption de parentalité depuis le 1er janvier 2015 (exclusivement) lorsque de tels procédés ont été employés49. Depuis le 1er janvier 2019 et l'entrée en vigueur du mariage pour tous, cette règle vaut également pour l'épouse de la mère.

La nécessité d'examiner le droit suisse de la filiation ­ y compris les règles concernant la contestation de la présomption de parentalité de l'époux ­ est désormais reconnue par tous50. Le 12 décembre 2018, le Conseil des États a adopté le postulat 18.3714 «Examen du droit de la filiation» déposée par sa commission des affaires juridiques. Il charge le Conseil fédéral d'examiner si une réforme du droit de la filiation est nécessaire et, le cas échéant, de soumettre au parlement un rapport présentant des recommandations pour une réforme globale cohérente. La commission estime que la question de l'accès au don de sperme pour les couples de femmes devrait être traitée dans ce contexte.

Une minorité (Flach, Aebischer Matthias, Arslan, Bauer, Burkart, Fehlmann Rielle, Markwalder, Marti Min Li, Mazzone, Merlini, Naef, Wasserfallen Flavia) demande au contraire que la question soit réglée dans le projet central du mariage pour tous (voir ch. 4.2.3.2).

48

49

50

La même question s'est posée en Allemagne. Le 10 octobre 2018, la Cour fédérale allemande a arrêté que le législateur avait certes mis en place le mariage pour tous, mais pas adapté le droit de la filiation. L'épouse de la mère ne devient donc pas parent légal de l'enfant à sa naissance et est comme auparavant renvoyée à l'adoption.

Voir le § 144, al. 2 und 3, Allgemeines bürgerliches Gesetzbuch (ABGB): «(2) Ist an der Mutter innerhalb von nicht mehr als 300 und nicht weniger als 180 Tagen vor der Geburt eine medizinisch unterstützte Fortpflanzung durchgeführt worden, so ist die Frau Elternteil, 1. die mit der Mutter im Zeitpunkt der Geburt des Kindes in eingetragener Partnerschaft verbunden ist oder als eingetragene Partnerin der Mutter nicht früher als 300 Tage vor der Geburt des Kindes verstorben ist oder 2. die die Elternschaft anerkannt hat oder 3. deren Elternschaft gerichtlich festgestellt ist.

(3) Auf diese Frau sind die auf den Vater und die Vaterschaft Bezug nehmenden Bestimmungen in diesem Gesetz und anderen bundesgesetzlichen Vorschriften sinngemäß anzuwenden. Gelten im Verhältnis der Eltern zu ihrem Kind und zwischen den Eltern besondere Rechte und Pflichten, so kommen diese gleichermaßen zur Anwendung.» Voir le rapport du Conseil fédéral sur le postulat Fehr (12.3607), Modernisation du droit de la famille, mars 2015, p. 56.

8153

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6.4

Langue non genrée

En ouvrant le mariage à tous les couples, il faut considérer le fait que ces derniers pourront aussi se composer de deux hommes ou de deux femmes, et non plus seulement d'un homme et d'une femme. Il faut donc reformuler les dispositions sur le mariage dans le code civil et la LDIP.

Selon l'une des règles édictées dans le guide allemand de formulation non sexiste, les nouvelles dispositions dans le cadre de modifications des grands codes (p. ex. le CC) doivent être rédigées dans un langage non sexiste51. Après avoir étudié la situation présente, il s'est toutefois révélé que presque toutes les dispositions du code civil concernant le mariage (art. 90 à 251 CC) devraient être modifiées. Au vu de la complexité du travail, la commission a décidé de ne pas appliquer la formulation non sexiste à la version allemande du projet. Seules les adaptations nécessaires ont été effectuées et les autres modifications pourront se faire plus tard dans un autre projet.

Il en va différemment pour les versions italiennes et françaises du projet. L'utilisation du masculin générique dans ces deux langues permet de résoudre la question et de désigner tout autant des couples avec deux personnes de sexe différent que ceux dont les deux personnes sont de même sexe52.

7

Commentaires des dispositions

7.1

Dispositions du P-CC

Art. 92

Participation financière

Même si on renonce à procéder à une adaptation globale des dispositions sur le mariage aux prescriptions de la langue non sexiste en allemand (voir ch. 6.4), cette disposition doit être modifiée. En se basant sur la modification à apporter à l'art. 97a (l'expression genrée «der Braut oder des Bräutigams» est remplacée par «eine oder einer der Verlobten»), il faut ici aussi remplacer l'expression «einer der Verlobten» par la formulation «eine oder einer der Verlobten». Avec les modifications apportées aux art. 92, 97a et 98, l'expression «Verlobte/r» est déjà intégrée dans toute la version allemande du code civil et permet de désigner à la fois les couples composés de deux personnes de sexe différent et ceux dont les deux personnes sont du même sexe.

51 52

Voir le Leitfaden zum geschlechtergerechten Formulieren, Bundeskanzlei, 2009, p. 77.

Voir le Guide de formulation non sexiste des textes administratifs et législatifs de la Confédération, Chancellerie fédérale, décembre 2000; Pari trattamento linguistico, Guida al pari trattamento linguistico di donna e uomo nei testi ufficiali della Confederazione, Cancelleria federale, gennaio 2012.

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Art. 94

Capacité

Cette disposition fondamentale qui définit la capacité matrimoniale est reformulée.

Elle précise que le mariage pourra être contracté par deux personnes indépendamment de leur sexe.

La minorité (Nidegger, Geissbühler, Haab, Schwander, Tuena, Walliser), opposée au principe de l'ouverture du mariage, demande au contraire le maintien du droit en vigueur pour cette disposition et toutes celles du CC qui devraient être modifiées à la suite de l'ouverture du mariage à tous les couples.

Art. 96

Mariage ou partenariat enregistré antérieur

Au même titre qu'un mariage antérieur, l'existence d'un partenariat enregistré constitue un empêchement au mariage. À ce jour, seule la LPart prévoit une disposition dans ce sens (art. 26 LPart). Il convient à présent d'inscrire explicitement cet élément dans le CC.

Il y a lieu de préciser qu'il n'y a d'empêchement au mariage que si l'un des fiancés est déjà marié ou lié par un partenariat enregistré avec une tierce personne. Ainsi, si deux personnes se sont liées par un partenariat enregistré à l'étranger après l'entrée en vigueur de la présente révision, elles auront la possibilité non pas de convertir leur partenariat en mariage, mais de conclure un mariage selon la procédure ordinaire, sans devoir au préalable faire dissoudre leur partenariat. Il n'y a naturellement pas d'empêchement au mariage lorsque les partenaires enregistrés (en Suisse ou à l'étranger, voir ch. 5.3.3) avant l'entrée en vigueur de la présente révision souhaitent convertir leur partenariat en mariage. Les dispositions sur la célébration du mariage ne s'appliquent pas en l'espèce (voir commentaire relatif à l'art. 35 P-LPart).

Art. 97a, al. 1 et 2

Abus lié à la législation sur les étrangers

Dans la version allemande, l'expression «der Braut oder des Bräutigams» est remplacée par «eine oder einer der Verlobten» et «Brautleute» par «die Verlobten», ces formulations permettant d'inclure deux personnes de même sexe. Pour la même raison, dans la version italienne, l'expression «il fidanzato o la fidanzata» a été remplacée par par «uno dei fidanzati».

Art. 98, al. 1

Procédure préparatoire

Dans la version allemande, l'expression «Braut und Bräutigam» est remplacée par «einer oder eines der Verlobten», cette formulation permettant d'inclure deux personnes de même sexe.

Art. 102, al. 2

Forme

Dans la version allemande, l'expression «Braut und Bräutigam» est remplacée par «die Verlobten», cette formulation permettant d'inclure deux personnes de même sexe. En français, la formule «à la fiancée et au fiancé» est remplacée par le masculin pluriel «aux fiancés» pour la même raison.

8155

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Art. 105, chiffre 1

Causes d'annulation absolues

Ch. 1: L'existence d'un partenariat enregistré au moment de la célébration du mariage constitue également un motif d'annulation du mariage. Il est prévu de le mentionner expressément dans le CC. Comme mentionné ci-avant (voir commentaire de l'art. 96 P-CC), cela ne vaut pas dans les cas de conversion d'un partenariat enregistré existant en mariage (voir commentaire de l'art. 35 P-LPart).

Le libellé de la disposition est en outre simplifié dans la mesure où il n'est plus question que de «dissolution». Ainsi, le mariage est-il entaché d'une cause de nullité lorsqu'au moment de sa célébration un des époux était déjà marié ou vivait en partenariat enregistré avec une tierce personne, et que cette union antérieure n'a pas été dissoute entre-temps par un divorce ou une dissolution judiciaire, par un décès ou par une déclaration d'absence.

Art. 160, al. 2 et 3

Nom

Dans la version allemande, l'expression «Brautleute» est remplacée par «die Verlobten» aux al. 2 et 3. L'expression «der Braut oder des Bräutigams» n'existe plus dans la nouvelle formulation. Ces changements permettent d'inclure deux personnes de même sexe. La version italienne des al. 2 et 3 a elle aussi été modifiée pour les mêmes raisons.

Art. 163, al. 1

Entretien de la famille

Dans la version française, l'expression «mari et femme» est remplacée par «les époux» afin de pouvoir aussi désigner deux personnes de même sexe.

Art. 182, al. 2

Contrat de mariage

Dans la version allemande, l'expression «Brautleute» est remplacée par «die Verlobten».

Art. 252, al. 2

Établissement de la filiation en général ­ minorité (Flach, Aebischer Matthias, Arslan, Bauer, Burkart, Fehlmann Rielle, Markwalder, Marti Min Li, Mazzone, Merlini, Naef, Wasserfallen Flavia)

Cette disposition énumère les différentes façons d'établir la filiation. L'al. 2 doit être formulé de manière non genrée car le deuxième parent (en plus de la mère, voir al. 1) pourra aussi être une femme.

Titre précédant l'art. 255 ­ minorité (Flach, Aebischer Matthias, Arslan, Bauer, Burkart, Fehlmann Rielle, Markwalder, Marti Min Li, Mazzone, Merlini, Naef, Wasserfallen Flavia) Deuxième chapitre: De la parentalité de l'époux ou de l'épouse Le titre du deuxième chapitre doit être modifié pour couvrir la nouvelle possibilité de parentalité de l'épouse de la mère dès la naissance.

8156

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Art. 259a

F. Parentalité des époux de même sexe ­ Minderheit (Flach, Aebischer Matthias, Arslan, Bauer, Burkart, Fehlmann Rielle, Markwalder, Marti Min Li, Mazzone, Merlini, Naef, Wasserfallen Flavia)

Lorsqu'un enfant naît pendant un mariage, l'épouse de la mère est le parent légal de l'enfant à partir du moment de sa naissance, comme c'est le cas pour le mari de la mère (voir art. 255, al. 1, CC). Les dispositions relatives au statut du père s'appliquent par analogie.

Grâce à l'introduction dans le CC de la parentalité de l'épouse de la mère dès la naissance, les femmes mariées pourront recourir à la procréation médicalement assistée et en particulier au don de sperme en vertu de l'art. 3, al. 3, LPMA. Il n'est pas nécessaire pour cela de modifier la LPMA: en reconnaissant dans le CC la parentalité de l'épouse de la mère dès la naissance, on remplit la condition de l'art. 3, al. 2, let. a, LPMA selon laquelle le don de sperme est réservé aux couples à l'égard desquels un rapport de filiation au sens des art. 252­263 CC peut être établi. L'alinéa 3 de cet article de la LPMA dispose ensuite que seul un couple marié peut recourir à un don de sperme. Une fois le mariage pour tous en vigueur, cette disposition ne sera plus un obstacle pour les couples de femmes mariées.

Art. 9g

Régime matrimonial des époux de même sexe mariés à l'étranger avant le... [date de l'entrée en vigueur de la modification]

En vertu du droit en vigueur, les mariages valablement célébrés à l'étranger entre personnes du même sexe sont reconnus en Suisse comme partenariats enregistrés (art. 45, al. 3, LDIP). Cela peut avoir des effets sur le régime des biens. Si le régime patrimonial du couple de même sexe ayant conclu un mariage à l'étranger est soumis au droit suisse, c'est l'art. 18 LPart qui s'applique, ce qui équivaut à une séparation des biens. Cela changera toutefois après l'entrée en vigueur de la révision, parce que tous les mariages conclus entre personnes de même sexe à l'étranger seront reconnus comme mariages en Suisse, indépendamment du moment où ils ont été conclus (voir ch. 5.2.4).

Al. 1: Après l'entrée en vigueur de cette révision, les époux seront soumis de par la loi au régime de la participation aux acquêts, sauf s'ils en ont disposé autrement en concluant une convention sur les biens ou un contrat de mariage (art. 196 ss CC) et ce, pour toute la durée du mariage, avec effet rétroactif au moment de la conclusion du mariage.

Le projet prévoit ici un véritable effet rétroactif, comme il en était déjà le cas dans la révision du droit du mariage entrée en vigueur le 1 er janvier 199853. La présente règlementation transitoire s'inspire de ce fait de la solution adoptée à l'époque à l'art. 9d.

Al. 2: Comme l'effet rétroactif peut avoir de graves conséquences sur les droits acquis des époux (voir ch. 5.2.4), chaque époux aura la possibilité de signifier à son 53

Voir THOMAS GEISER, in: Heinrich Honsell/Nedim Peter Vogt/Thomas Geiser (éd.), Basler Kommentar ZGB II, Bâle 2015, no 4 ad art. 9d tit. fin.

8157

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conjoint, par écrit et avant l'entrée en vigueur de la présente révision, que le régime de l'art. 18 LPart est maintenu jusqu'à ce moment-là. L'application rétroactive du nouveau droit est ainsi exclue. Si l'un des époux fait une telle déclaration, il faudra procéder à deux décomptes au moment de la dissolution du régime matrimonial54.

Pour la sécurité du droit, cet acte unilatéral doit être déposé au moment de l'entrée en vigueur de la révision. Puisqu'il n'est pas possible de fonder une obligation d'agir sur une législation que n'est pas encore en vigueur, le Conseil fédéral va fixer la date de l'entrée en vigueur de l'art. 9g, al. 2 tit. fin. P-CC six mois avant les autres dispositions. Les époux concernés pourront ainsi déposer leur déclaration pendant cette période. Après l'entrée en vigueur des autres dispositions, les époux auront, en tout temps, la possibilité de choisir le droit auquel ils sont soumis (art. 52 s. LDIP) ou de conclure un contrat de mariage (art. 56 LDIP).

Al. 3: Cet alinéa fixe les règles applicables aux procédures pendantes. L'ancien régime de l'art. 18 LPart est maintenu lorsqu'au moment de l'entrée en vigueur de cette révision une action entraînant la dissolution du régime matrimonial en application du droit suisse est pendante, en Suisse ou à l'étranger.

La minorité (Nidegger, Geissbühler, Haab, Schwander, Tuena, Walliser), opposée au principe de l'ouverture du mariage, souhaite voir cette nouvelle disposition biffée.

7.2

Dispositions du P-LPart

Art. 1

Objet

L'objet de la LPart est reformulé, car il ne sera plus possible de conclure de partenariat enregistré dès l'entrée en vigueur de la présente révision.

En outre les partenaires enregistrés ont désormais la possibilité de convertir leur partenariat en mariage (art. 35 P-LPart). Ils restent toutefois libres de maintenir sous ce titre le partenariat qu'ils ont conclu. L'institution juridique du partenariat enregistré et l'état civil qui s'y rattache seront donc conservés au-delà de l'ouverture du mariage à tous les couples et la LPart restera en vigueur pour les partenariats existants (exclusivement) (voir ch. 4.4).

La minorité (Nidegger, Geissbühler, Haab, Schwander, Tuena, Walliser), opposée au principe de l'ouverture du mariage, demande le maintien du droit en vigueur pour cette disposition et toutes celles de la LPart qui devraient être modifiées à la suite de l'ouverture du mariage à tous les couples.

Art. 2­8

Abrogés

Ces dispositions sont abrogées, car il ne sera plus possible de conclure de nouveaux partenariats après l'ouverture du mariage à tous les couples.

54

Voir THOMAS GEISER, op. cit., no 9 ad art. 9d tit. fin.

8158

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Art. 9, al. 1

Causes absolues

L'art. 9, al. 1, let. b, renvoie à l'art. 4 qui est désormais abrogé. Le contenu de cette disposition abrogée est de ce fait intégré à l'art. 9, al. 1, let. b et bbis. Si tel n'était pas le cas, ce renvoi tomberait dans le vide, alors que cette règle doit pouvoir rester applicable aux partenariats enregistrés qui existent déjà. La let. bbis est formulée de manière analogue à l'art. 105, ch. 1, P-CC.

Art. 26

Abrogé

L'empêchement au mariage que constitue le partenariat enregistré est intégré à l'art. 96 P-CC.

Chapitre 4a: Conversion du partenariat enregistré en mariage Art. 35

Déclaration de conversion

Les partenaires pourront convertir en tout temps leur partenariat enregistré en mariage. Il ne s'agit pas en l'espèce de dissoudre le partenariat enregistré et de conclure un (nouveau) mariage, mais de convertir l'institution existante. Dans ce cas, un partenariat enregistré existant ne constitue évidemment pas un empêchement au mariage (voir commentaire de l'art. 96 P-CC).

Il importe de simplifier cette démarche autant que possible. Dans la mesure où les conditions du mariage sont en grande partie analogues aux conditions d'enregistrement prévues par la LPart, leur réexamen est superflu. Les couples désireux de convertir leur partenariat enregistré en mariage ont déjà subi un examen correspondant. En outre, aucune cérémonie de mariage n'est requise au sens des art. 100­103 CC. En enregistrant leur partenariat, les couples ont en effet déjà exprimé leur volonté de fonder une communauté de vie dont les partenaires assument l'un envers l'autre des droits et des devoirs.

Al. 1: Une déclaration devant l'officier de l'état civil suffit pour réaliser la conversion. Les partenaires peuvent enregistrer leur déclaration dans l'arrondissement, respectivement l'office de l'état civil de leur choix. L'officier de l'état civil qui reçoit la déclaration est chargé de l'enregistrer.

Al. 2: Un partenariat enregistré peut être converti en mariage si les deux partenaires ont l'exercice des droits civils et déclarent ensemble leur intention de convertir leur partenariat à l'officier de l'état civil. La déclaration de conversion est un acte hautement personnel, si bien qu'elle doit être signée de la main des intéressés et en présence de l'officier public de leur réception et de leur enregistrement (au sens de l'art. 18 OEC). Les partenaires doivent remettre des documents actuels attestant leur identité et l'existence du partenariat enregistré, à moins que ceux-ci ne soient déjà disponibles dans le registre informatisé de l'état civil (art. 16, al. 4, OEC). C'est généralement le cas des ressortissants suisses mais non des personnes en provenance de l'étranger. La conversion est valable dès la signature de cette déclaration commune.

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Al. 3: Les intéressés ont en outre la faculté de demander à l'officier de l'état civil de célébrer une cérémonie analogue au mariage (soit publiquement, dans la salle de mariage, en présence de deux témoins). Les détails, et en particulier le moment de la cérémonie, sont fixés par le droit cantonal et d'entente avec les personnes concernées, comme c'est le cas pour le mariage (art. 99, al. 3, CC). Pour cette opération, un émolument sera perçu conformément à l'ordonnance du 27 octobre 1999 sur les émoluments en matière d'état civil (OEEC)55. Il est à noter que dans cette hypothèse également, le partenariat est converti en mariage au moment de la signature de la déclaration commune.

Al. 4: Le Conseil fédéral édicte les dispositions d'exécution nécessaires. Sont concernées ici l'OEC et l'OEEC.

Il s'agira de remplacer le chap. 7a de l'OEC (partenariat enregistré) pour y régler les détails de la conversion des partenariats enregistrés existants en mariage. Concrètement, avant de recevoir la déclaration de conversion, l'officier de l'état civil devra vérifier que les futurs époux sont liés par un partenariat enregistré valide. Si le partenariat a été conclu à l'étranger, la conversion supposera qu'il puisse préalablement être reconnu comme équivalent, soit comme ayant des effets comparables à l'institution suisse (partenariat fort, voir ch. 2.3). À défaut, les partenaires seront considérés des fiancés et seront invités à déposer une demande de préparation du mariage ordinaire (art. 98 CC et 62 ss OEC).

L'OEC règlera la forme de la déclaration de conversion et la compétence à raison du lieu des offices de l'état civil pour la recevoir et enregistrer la conversion du partenariat en mariage. Le registre et les formules de l'état civil seront adaptés en conséquence.

L'OEEC sera complétée pour englober de nouvelles positions tarifaires relatives à la réception des déclarations de conversion. La procédure de conversion se distingue d'une procédure de mariage ordinaire. En effet, les futurs époux ont déjà été soumis à une procédure de préparation et de conclusion de leur union et certaines opérations tombent (p. ex. absence de déclaration concernant le nom et de communication de la clôture de la procédure). Conséquemment, en application des principes de couverture des frais et de l'équivalence56, les
émoluments qui devront être perçus correspondront au taux pratiqué pour la réception d'une déclaration (OEEC, annexe 1, ch. 4 ss et 9.1). Cela signifie que les émoluments perçus sont à situer à un niveau inférieur à ceux prélevés pour une procédure ordinaire de mariage. Il en va différemment lorsque les personnes concernées demandent en sus la célébration d'une cérémonie analogue à celle du mariage (al. 3). Dans ce cas, il y a lieu de prélever des émoluments supplémentaires pour les prestations liées à la célébration dans la salle des mariages (voir OEEC, annexe 1, ch. 11).

La minorité (Nidegger, Geissbühler, Haab, Schwander, Tuena, Walliser), opposée au principe de l'ouverture du mariage, souhaite voir cette nouvelle disposition biffée.

55 56

RS 172.042.110 Voir le message du 15 novembre 1995 concernant la révision du code civil suisse (état civil, conclusion du mariage, divorce, droit de la filiation, dette alimentaire, asile de famille, tutelle et courtage matrimonial), FF 1996 I 1, 57.

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Art. 35a

Effets de la déclaration de conversion

Al. 1: La conversion du partenariat enregistré est réputée accomplie lorsque la déclaration de conversion est effectuée. L'état civil des époux est alors changé en «marié(e)» par un enregistrement correspondant dans le registre de l'état civil.

Dans le cadre de la procédure de célébration ordinaire du mariage, l'échange des «oui» est constitutif (art. 102 CC, 71 OEC). Pour la conclusion du partenariat, c'est lorsque l'officier de l'état civil enregistre la déclaration de volonté des deux partenaires et leur fait signer l'acte de partenariat qu'il est enregistré (art. 7 LPart, 75k OEC). La conversion du partenariat en mariage prend effet lors de la signature de la déclaration de conversion reçue par l'officier de l'état civil (cela est également vrai en cas de célébration d'une cérémonie à la demande des partenaires). L'officier de l'état civil remettra aux époux qui le souhaiteront une attestation de conversion du partenariat en mariage ou un nouveau certificat de famille; il encaissera à cet égard l'émolument usuel pour la délivrance de documents d'état civil (OEEC, annexe 1, ch. 1 ss).

Al. 2: Un mariage résultant d'une conversion doit être traité, s'agissant de ses effets dans le futur, comme s'il avait été contracté à la date où le partenariat a été enregistré (voir ch. 4.3.2). En conséquence, il convient, pour les dispositions dont les effets juridiques sont déterminés par la durée du mariage, de prendre en compte la durée du partenariat enregistré qui l'a précédé. Cela vaut par exemple dans le droit civil pour l'entretien après le divorce (art. 125 CC) et pour la compensation en matière de prévoyance professionnelle (art. 122 CC). La durée du mariage constitue aussi un critère déterminant des conditions de naturalisation (art. 21 LN).

Al. 3: Dans le domaine des régimes matrimoniaux, la commission estime en revanche que le régime ordinaire de la participation aux acquêts (art. 181 CC) ne devrait s'appliquer qu'une fois la conversion effectuée.

Dans le cas où les partenaires enregistrés n'avaient pas conclu de convention sur les biens au sens de l'art. 25 LPart, ils disposaient chacun de leur bien selon l'art. 18 LPart jusqu'à la conversion en mariage. Au bout du compte, le régime prévu par l'art. 18 LPart équivaut au régime de la séparation des biens (art. 247 ss CC). Ce n'est qu'à partir
du moment de la conversion que ces couples seront soumis au régime ordinaire de la participation aux acquêts prévu par le droit matrimonial (art. 196 ss CC). Un effet rétroactif aurait potentiellement d'importantes répercussions sur la situation financière des anciennes ou anciens partenaires. Le produit du travail, les sommes versées par des institutions de prévoyance ou par des institutions d'assurance sociale ainsi que les revenus des biens propres notamment deviendraient des acquêts (art. 197, al. 2, ch. 1, 2 et 4, CC). Les acquêts alimentent le bénéfice (art. 210, al. 1, CC) et l'autre époux ou épouse a droit à la moitié du bénéfice (art. 215, al. 1, CC). Il est possible que d'autres mesures aient été prises pour compenser l'absence de participation aux acquêts pendant le partenariat enregistré. Pour protéger les dispositions déjà prises et les droits déjà acquis et, de ce fait, la situation financière des partenaires enregistrés, il faut donc renoncer à rendre le changement de régime matrimonial rétroactif.

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Les époux restent bien sûr libres de conclure un contrat de mariage après la conversion de leur partenariat et de convenir par exemple que le régime de la participation aux acquêts prend effet rétroactivement, à partir de la conclusion de leur partenariat.

Al. 4: Dans les cas où les partenaires ont conclu une convention sur les biens au sens de l'art. 25 LPart avant la conversion se pose la question du sort de cette convention une fois la conversion réalisée.

La doctrine considère qu'une participation aux acquêts découlant d'une convention sur les biens par exemple déploie déjà des effets pendant la durée du partenariat enregistré57, quand bien même le libellé de la loi, à la différence des dispositions du contrat de mariage, règlemente le partage du patrimoine pour le cas de la dissolution du partenariat seulement. Après la conversion, c'est en principe la participation aux acquêts qui s'appliquerait de par la loi. Cependant, la convention sur les biens renferme souvent des dispositions relevant du droit des successions ou des modifications de la répartition du bénéfice. C'est pourquoi la convention doit conserver sa validité non seulement pour la période précédant mais aussi pour la période suivant la conversion du partenariat en mariage.

Il est aussi possible que les partenaires aient conclu une convention sur les biens qui se base, explicitement ou implicitement, sur le régime de la séparation des biens mais qui contient également des dispositions en matière de succession. Dans ce cas aussi, il faudra que la convention sur les biens puisse continuer d'exister même après la conversion. Exiger, au seul motif de la conversion, la conclusion d'un nouveau contrat (de mariage) qui sera soumis aux mêmes exigences formelles (art. 184 CC), ne semble pas opportun. La convention sur les biens doit simplement demeurer applicable.

En conclusion, les conventions sur les biens au sens de l'art. 25 LPart, quelle que soit leur teneur, doivent garder leur validité après la conversion.

Au surplus, les partenaires enregistrés ont la possibilité de conclure, préalablement à la conversion, un contrat de mariage qui déploiera ses effets une fois la conversion réalisée. Un tel contrat restera bien entendu valable après la conversion.

La minorité (Nidegger, Geissbühler, Haab, Schwander, Tuena, Walliser), opposée au principe de l'ouverture du mariage, souhaite voir cette nouvelle disposition biffée.

57

Voir ANDREA BÜCHLER/GABRIELLA MATEFI, in: Andrea Büchler (éd.), FamKommentar Eingetragene Partnerschaft, Bern 2007, N 31 zu Art. 25; PHILIPP GREMPER, in: Thomas Geiser/Philipp Gremper (éd.), Zürcher Kommentar zum Partnerschaftsgesetz, Zurich 2007, no 15 ss ad art. 25; PASCAL PICHONNAZ, Le régime partenariat des partenaires enregistrés, no 201, in: Andreas Ziegler/Michel Montini/Eylem Ayse Copur (éd.), LGBT Recht, Bâle 2015.

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7.3

Dispositions du P-LDIP

Art. 43, al. 1 et 2

Compétence (de contracter mariage)

Dans la version allemande, l'expression «Brautleute» est remplacée par «die Verlobten» et «der Braut oder des Bräutigams» par «eines der Verlobten», ces formulations permettant d'inclure deux personnes de même sexe.

La minorité (Nidegger, Geissbühler, Haab, Schwander, Tuena, Walliser), opposée au principe de l'ouverture du mariage, demande le maintien du droit en vigueur pour cette disposition et toutes celles du CC qui devraient être modifiées à la suite de l'ouverture du mariage à tous les couples.

Art. 45, al. 2 et 3

Mariage célébré à l'étranger

Al. 2: Dans la version allemande, l'expression «Braut oder Bräutigam» est remplacée par «einer der Verlobten», cette formulation permettant d'inclure deux personnes de même sexe. En français, la formule «la fiancée ou le fiancé» est remplacée par le masculin pluriel «un des fiancés» pour la même raison.

Al. 3: Un mariage valablement célébré à l'étranger entre personnes du même sexe sera reconnu en tant que mariage et non plus en tant que partenariat enregistré.

L'actuel al. 3, n'a donc plus de raison d''être.

Les couples inscrits en tant que partenaires enregistrés au registre de l'état civil avant l'entrée en vigueur de la présente révision peuvent demander, conjointement ou individuellement, une modification de leur inscription au registre de l'état civil.

L'inscription est du reste actualisée d'office lorsque l'un des deux époux est concerné par un événement d'état civil (art. 16, al. 1, let. c OEC).

Art. 50

Décisions ou mesures étrangères (effets du mariage)

Le mariage entre personnes de même sexe est encore peu répandu dans le monde, d'où le risque de conflits de compétences négatifs. Les couples concernés habitant un pays qui ne connaît pas le mariage pour tous n'ont souvent d'autre solution que de se tourner vers les autorités de l'État de célébration du mariage. Les décisions de ces autorités doivent être reconnues. Sur le plan du contenu, cette nouvelle disposition correspond à l'actuel art. 65d.

Art. 51, let. b

Compétences (régimes matrimoniaux)

Cette disposition est complétée pour prendre en compte la (nouvelle) compétence subsidiaire au sens de l'art. 60a.

Art. 52, al. 2 et 3

Principe

L'actuel art. 65c, al. 2, est étendu à tous les mariages sans que son contenu ne soit modifié pour autant. Sous le droit actuel, les époux sont déjà libres de choisir leur régime matrimonial. L'extension de ce choix au droit de l'État de célébration du mariage renforce l'autonomie des parties.

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Art. 60a

For au lieu de célébration du mariage

L'ajout d'une compétence subsidiaire pour connaître d'une action en divorce ou en séparation de corps au lieu de célébration du mariage en Suisse est propre à prévenir des conflits de compétences négatifs, notamment lorsque l'État de domicile du couple de même sexe ne connaît pas les unions homosexuelles. Le contenu de l'art. 60a correspond en substance à l'actuel art. 65b.

La minorité (Nidegger, Geissbühler, Haab, Schwander, Tuena, Walliser), opposée au principe de l'ouverture du mariage, souhaite voir cette nouvelle disposition biffée.

Art. 64

Complément ou modification d'une décision

La disposition est complétée pour prendre en compte la (nouvelle) compétence subsidiaire au sens de l'art. 60a.

Art. 65, al. 1

Décisions étrangères (divorce et séparation de corps)

Il est renvoyé ici aux commentaires relatifs à l'art. 50 qui s'appliquent par analogie.

Art. 65a

Application du chapitre 3

Le renvoi au troisième chapitre est maintenu. Bien que de nouveaux partenariats ne pourront plus se conclure en Suisse, la Suisse continuera de reconnaître en tant que tels les partenariats entre personnes de même sexe enregistrés à l'étranger.

La réserve énoncée quant à l'art. 43, al. 2, peut être abrogée sans autre, puisqu'après l'entrée en vigueur de la présente révision, la conclusion d'un partenariat enregistré sera de toute façon impossible.

Art. 65b

Abrogé

L'art. 65b est abrogé, son contenu étant repris avec quelques adaptations rédactionnelles au chap. 3 (art. 60a P-LDIP). Compte tenu de la référence à l'art. 65a PLDIP, les règles actuellement en vigueur continuent de s'appliquer aux partenariats enregistrés.

Art. 65c

Droit applicable

Si le droit suisse est applicable, il y a lieu d'établir une distinction en fonction de la date d'enregistrement du partenariat. Si celui-ci a été conclu avant l'entrée en vigueur de la présente révision, la LPart s'applique puisqu'elle garde sa validité pour ces unions (voir commentaire au sujet de l'art. 1 P-LPart). En revanche, s'agissant des partenariats enregistrés à l'étranger après l'entrée en vigueur de la présente révision, le droit suisse, du fait précisément de la suppression du partenariat enregistré pro futuro (voir aussi le commentaire de l'art. 1 P-LPart), ne connaîtra plus de règles pour cette institution, si bien que le droit matrimonial du CC s'appliquera en l'espèce.

L'actuel al. 2, est abrogé et remplacé par l'art. 52, al. 2, P-LDIP.

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Art. 65d

Abrogé

Il est renvoyé aux explications concernant l'art. 65b. L'art. 65d LDIP correspond en substance aux art. 50 et 65, al. 1bis, P- LDIP.

8

Conséquences

8.1

Conséquences pour la Confédération

Hormis les adaptations des dispositions d'exécution en matière d'état civil (voir ch. 4.1 et 4.3) ainsi que le fait de devoir mettre à disposition du nouveau matériel d'information, l'ouverture du mariage à tous les couples n'a pas de conséquences sur les activités de la Confédération. Ces travaux seront réalisés avec les ressources disponibles. La révision n'entraîne pas non plus de conséquences immédiates directes sur l'infrastructure informatique. Il sera en effet possible d'intégrer aux travaux liés à l'introduction de Infostar NG (New Generation) une nouvelle fonction relative à la conversion du partenariat en mariage et de procéder avec le support informatique du système à la préparation du mariage et aux fiançailles d'un couple de personnes de même sexe. Dans l'éventualité où la présente révision devait entrer en vigueur avant l'introduction d'Infostar NG, actuellement prévue pour 2023, il sera possible de traiter le mariage de personnes de même sexe en dehors d'Infostar «manuellement» à l'aide de formules papier correspondantes et de l'enregistrer ensuite dans Infostar par la transaction «personne».

Du fait de l'augmentation du nombre de rentes de veuve, la révision proposée aura des conséquences financières pour la Confédération d'une importance toutefois minime. Même si, à l'avenir, davantage de femmes bénéficieront d'une rente de veuve selon la LAVS et la LAA (voir ch. 4.2.2), cette augmentation sera très limitée.

En partant du nombre actuel de femmes de moins de 65 ans vivant en partenariat enregistré (elles étaient 4885 à la fin de l'année 2017)58, l'Office fédéral des assurances sociales chiffre le nombre de nouvelles veuves à environ cinq par an. Sur la base de la probabilité de décès, environ une femme sur mille «en partenariat enregistré» et de moins de 65 ans est susceptible de mourir chaque année. Étant donné que toutes les veuves ne rempliront pas les conditions pour prétendre à une rente de veuve selon l'AVS, et en se basant sur les 4885 partenaires enregistrées de moins de 65 ans, on peut estimer qu'il y aura moins de 5 nouvelles rentes de veuve par année.

La question de savoir si le nombre de rentes de veuves diminuera dans la première période suivant l'introduction du mariage pour tous dépend du nombre de couples qui profiteront de la possibilité de convertir leur
partenariat en mariage et de combien de mariages seront conclus entre deux femmes (en 2017, 306 couples de femmes ont conclu un partenariat enregistré). En comparaison générale avec les rentes de veuves actuelles, les coûts supplémentaires qui en résultent pour l'AVS seraient négligeables (en décembre 2017 un peu plus de 150 000 veuves recevaient une rente

58

Statistiques disponibles sur: www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.html > Trouver des statistiques > Population > Mariages, partenariats et divorces > Partenariats enregistrés, dissolutions.

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AVS pour un montant total de 133 millions de francs par mois ou environ 1,6 milliard par an).

Les conclusions de l'Office fédéral de la santé publique sont similaires. Les prestations selon la LAA sont financées par les primes versées par les assurés. Si davantage de prestations devaient être versées en raison de la modification proposée, les primes augmenteraient. La Confédération ne serait cependant concernée qu'en sa qualité d'employeur, car celui-ci doit supporter les coûts des primes contre les accidents professionnels (art. 91, al. 1, LAA). Même s'il n'y a pas de chiffres concrets, on peut partir du principe qu'il n'y aura qu'un petit nombre de cas.

8.2

Conséquences pour les cantons et les communes

Les modifications prévues ne devraient avoir que peu de conséquences pour les cantons et les communes. Elles impliquent essentiellement des adaptations linguistiques dans certaines ordonnances et formulaires, puisque seront autorisés à contracter mariage non seulement un homme et une femme, mais aussi deux personnes de même sexe.

8.3

Conséquences sur l'économie nationale

Il n'est pas possible d'évaluer avec précision les conséquences de la présente révision sur l'économie nationale. L'augmentation limitée des rentes de veuves selon la LAVS et la LAA (voir ch. 8.1) n'aura pas d'effets sur le refinancement de l'AVS.

8.4

Conséquences sur la société

L'introduction en Suisse du partenariat enregistré en 2007 a donné aux couples de même sexe la possibilité de donner un cadre légal à leur relation. Le partenariat est enregistré devant l'officier de l'état civil et consacre une communauté de vie assortie de droits et de devoirs réciproques semblables à ceux du mariage. Des différences subsistent néanmoins entre le mariage et le partenariat enregistré et cette institution distincte réservée aux partenaires de même sexe est souvent perçue comme un «mariage au rabais».

De plus, les partenaires enregistrés peuvent ressentir leur état civil comme stigmatisant, dès lors qu'au moment de le communiquer, ils renseignent automatiquement sur leur orientation sexuelle. Les intéressés y voient une intrusion dans leur sphère intime dont les conséquences peuvent être de surcroît problématiques, surtout dans les pays où l'homosexualité est punie par la loi.

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L'ouverture du mariage à tous les couples ainsi que la possibilité de convertir un partenariat enregistré constitue une amélioration considérable de la situation. En outre, on peut supposer que l'introduction du mariage pour tous augmentera l'acceptation sociale des couples homosexuels59.

8.5

Conséquences sous l'angle de l'égalité entre femmes et hommes

Avec l'ouverture du mariage à tous les couples et les effets qu'elle est appelée à déployer selon le présent projet, on s'approche un peu plus de la pleine égalité entre les couples de sexe différent ou partenaires enregistrés qui optent pour le mariage ou la conversion d'une part et les couples mariés de sexe différent d'autre part (voir ch. 3; cela concerne par exemple l'adoption conjointe et les conditions de naturalisation). Cette avancée est conforme au principe constitutionnel de l'égalité et de l'interdiction de discriminer (art. 8 Cst.).

La commission a pleinement conscience que certaines discriminations subsisteront dans d'importants domaines après l'ouverture du mariage à tous les couples (voir ch. 6; cela vaut notamment pour la règlementation des rentes de survivants ainsi que pour le droit de la filiation). Il y aura lieu de les éliminer dans le cadre d'une ou de plusieurs révisions ultérieures.

9

Aspects juridiques

9.1

Constitutionnalité et légalité

La révision proposée se fonde sur l'art. 122, al. 1, Cst., qui attribue à la Confédération la compétence législative en matière de droit civil (voir ch. 2.2).

9.2

Compatibilité avec les obligations internationales

La Suisse n'est liée par aucun engagement international réduisant sa liberté d'action en matière de droit matrimonial interne.

9.3

Forme de l'acte à adopter

La modification du code civil, de la LPart et de la LDIP doit être édictée sous la forme d'une loi fédérale.

59

Voir TARIK ABOU-CHADI/RYAN FINNIGAN, Rights for Same-Sex Couples and Public Attitudes toward Gays and Lesbians in Europe, Université de Zurich/University of California, in: Comparative Political Studies, septembre 2018: «marriage equality sends an unambiguously positive signal and reduces the perceived group difference through inclusion into existing rights.» (Résumé).

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9.4

Frein aux dépenses

Le projet n'est pas soumis au frein aux dépenses au sens de l'art. 159, al. 3, let. b Cst., puisqu'il ne renferme pas de dispositions portant sur des subventions et ne fonde ni crédit d'engagement ni plafond de dépenses.

9.5

Délégation de compétences législatives

Le projet ne délègue aucune compétence législative nouvelle au Conseil fédéral.

9.6

Conformité à la législation sur la protection des données

Le projet ne traite aucune question en lien avec la protection des données.

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