09.019 Message concernant la garantie des Constitutions révisées des cantons de Glaris, d'Appenzell Rhodes-Intérieures, d'Argovie et de Genève du 18 février 2009

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons par le présent message un projet d'arrêté fédéral simple concernant la garantie des Constitutions révisées des cantons de Glaris, d'Appenzell Rhodes-Intérieures, d'Argovie et de Genève en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 février 2009

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Hans-Rudolf Merz La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2008-2718

981

Condensé En vertu de l'art. 51, al. 1, de la Constitution fédérale, chaque canton doit se doter d'une constitution démocratique. Celle-ci doit avoir été acceptée par le peuple et doit pouvoir être révisée si la majorité du corps électoral le demande. Selon l'al. 2 de cet article, les Constitutions cantonales doivent être garanties par la Confédération. Cette garantie est accordée si elles ne sont pas contraires au droit fédéral. Si une disposition constitutionnelle cantonale remplit ces conditions, la garantie fédérale doit lui être accordée; sinon, elle lui est refusée.

En l'espèce, les modifications constitutionnelles ont pour objet: dans le canton de Glaris: ­

la mise en oeuvre de la réforme de la structure communale;

­

la garantie de l'accès au juge dans les affaires de droit public;

dans le canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures: ­

les affaires ecclésiastiques;

dans le canton d'Argovie: ­

la liberté économique;

­

l'allègement administratif des entreprises;

dans le canton de Genève: ­

la protection contre la fumée passive;

­

l'interdiction des chiens dangereux.

Ces modifications sont conformes à l'art. 51 de la Constitution fédérale; aussi la garantie fédérale doit-elle leur être accordée.

982

Message 1

Les diverses révisions

1.1

Constitution du canton de Glaris

1.1.1

Votation populaire cantonale du 4 mai 2008

Lors de la landsgemeinde du 4 mai 2008, le corps électoral du canton de Glaris a accepté deux modifications de la Constitution cantonale concernant: ­

la mise en oeuvre de la réforme de la structure communale (modification des art. 118, 128 à 133 et 154 de la constitution);

­

la garantie de l'accès au juge dans les affaires de droit public (modification des art. 59 et 113 de la constitution).

Dans une lettre du 4 juillet 2008, le Conseil d'Etat du canton de Glaris a demandé la garantie fédérale.

1.1.2

La mise en oeuvre de la structure communale

Ancien texte Art. 118 Modifications d'effectif et de limites 1 Les modifications relatives à l'effectif des communes ou à leurs limites doivent être décidées par les communes concernées et approuvées par le Grand Conseil.

2 Si aucun accord n'est possible, la landsgemeinde peut décider une telle modification sur la proposition d'une des communes concernées ou du Grand Conseil.

3 Le canton peut accorder aux communes qui fusionnent des subventions pour la réadaptation et la réorganisation de leur administration.

Art. 128, al. 1, let. b et c Sont des organes nécessaires de la commune: b. L'organe directeur, composé du président et de quatre membres au moins; c. Deux vérificateurs des comptes au moins ou une commission de vérification des comptes, composée du président et de deux membres au moins, aucune de ces personnes ne pouvant faire partie de l'organe directeur.

1

Art. 129, al. 1 1 Tout citoyen actif a le droit de présenter en tout temps à l'organe directeur, à l'intention de l'assemblée communale, des propositions relatives à des objets qui relèvent de la compétence de cette dernière.

Art. 130, al. 1, 2 et 4 Les citoyens actifs exercent leur droit de vote à l'assemblée communale; celle-ci se réunit selon les besoins, mais au moins une fois par année.

2 Une assemblée communale extraordinaire a lieu lorsque l'organe directeur le décide ou lorsqu'un dixième des citoyens actifs, mais au moins dix citoyens actifs le demandent en indiquant les affaires à traiter.

4 Le maire et les membres du conseil de la commune municipale sont élus par la voie des urnes, au scrutin majoritaire.

1

983

Art. 131, let. a, b et g Le corps électoral est compétent en particulier: a. Pour élire le président et les membres de l'organe directeur; b. Pour élire les vérificateurs des comptes ou la commission de vérification des comptes; g. Pour approuver les comptes de la commune et les rapports y relatifs des vérificateurs ou de la commission de vérification des comptes; Art. 132 Décision tacite Une décision de la commune peut exceptionnellement être prise de façon tacite dans les cas urgents lorsque la décision de l'organe directeur, prise à l'unanimité, fait objet d'un avis public et pour autant que dix citoyens actifs dans les communes de moins de 1000 électeurs ou 20 citoyens actifs dans les plus grandes communes ne demandent pas, ensuite, dans un délai de quinze jours, qu'elle soit soumise au vote comme proposition lors de la prochaine assemblée communale.

Art. 133 Référendum facultatif 1 Les communes peuvent, dans leur règlement, prévoir que l'organe directeur est compétent: a. Pour édicter des actes normatifs communaux déterminés selon l'art. 131, let. e; b. Pour prendre jusqu'à un montant déterminé, les décisions prévues à l'art. 131, let. h; c. Pour conclure certains contrats conformément à l'art. 131, let. 1.

2 Ces actes normatifs et ces décisions sont sujets au référendum facultatif. La demande de référendum a abouti, lorsque, dans les quinze jours qui suivent leur publication, un dixième des citoyens actifs au moins, mais dix citoyens actifs au moins, demandent que l'acte normatif ou la décision soit soumis au vote comme proposition lors de la prochaine assemblée communale.

Art. 154 Modification de la législature selon l'art. 78 de la Constitution cantonale La loi peut déroger à l'art. 78 (législature et réélection) pour favoriser la mise en oeuvre et l'introduction de la réforme de la structure communale décidée par la landsgemeinde le 7 mai 2006.

Nouveau texte Art. 118 Modifications d'effectif et de limites 1 Les modifications relatives à l'effectif des communes doivent être acceptées par le corps électoral concerné et approuvées par la landsgemeinde.

2 L'approbation du Grand Conseil suffit dans les paroisses et pour la modification des limites des communes.

3 Abrogé Art. 128, al. 1, let. b et c, ainsi qu'al. 3 (nouveau) 1 Sont des organes nécessaires de la commune: b. L'organe directeur; c. La commission de gestion de la commune ou un organe de vérification des comptes d'une paroisse.

3 Les communes peuvent instaurer un parlement communal. Il compte au moins 20 membres et se constitue lui-même dans le cadre de la loi et du règlement communal.

Art. 129, al. 1 Tout citoyen actif a le droit de présenter en tout temps à l'organe directeur, à l'intention du corps électoral, des propositions relatives à des objets qui relèvent de la compétence de cet organe.

1

984

Art. 130, al. 1, 2 et 4, ainsi que 5 et 6 (nouveaux) 1 Les citoyens actifs exercent en principe leur droit de vote à l'assemblée communale; celle-ci se réunit selon les besoins, mais au moins une fois par année.

2 Une assemblée communale extraordinaire a lieu lorsque l'organe directeur le décide, lorsque le nombre de citoyens actifs fixé dans la loi le demandent en indiquant les affaires à traiter ou lorsque le Conseil d'État l'ordonne.

4 Les membres du parlement communal sont élus par la voie des urnes, au scrutin proportionnel; la loi règle les circonscriptions électorales.

5 Le maire et les membres du conseil de la commune municipale sont élus par la voie des urnes, au scrutin majoritaire.

6 La loi fixe les compétences et les procédures électorales concernant les autres élections.

Art. 131, al. 1, let. a, b et g, ainsi qu'al. 2 (nouveau) Le corps électoral est compétent en particulier: a. Pour élire le président et les membres de l'organe directeur; b. Pour élire le président et les membres de la commission de gestion ou de l'organe de vérification des comptes; g. Pour approuver les comptes de la commune et les rapports y relatifs de la commission de gestion ou de l'organe de vérification des comptes; 2 Dans les communes possédant un parlement communal, le corps électoral est obligatoirement compétent: a. Pour élire les membres du parlement communal; b. Pour élire le président et les membres de l'organe directeur; c. Pour édicter le règlement communal; d. Pour prendre les décisions prévues à l'al. 1, let. h dans le cadre du règlement communal ainsi que les décisions prévues à l'al. 1, let. i, k et l.

1

Art. 132 Décision urgente Une décision de la commune relevant de la compétence du corps électoral peut exceptionnellement être prise de façon tacite dans les cas urgents lorsque la décision de l'organe directeur, prise à l'unanimité, ou la décision du parlement communal, prise à la majorité absolue, fait objet d'un avis public et pour autant que le nombre de citoyens actifs fixé dans la loi ne demande pas ensuite, dans le délai imparti, qu'elle soit soumise au vote comme proposition lors de la prochaine assemblée communale ou de la prochaine votation.

Art. 133 Référendum facultatif Les communes possédant une assemblée communale peuvent, dans leur règlement, prévoir que l'organe directeur est compétent: a. Pour édicter des actes normatifs communaux déterminés selon l'art. 131, al. 1, let. e; b. Pour prendre jusqu'à un montant déterminé les décisions prévues à l'art. 131, al. 1, let. h; c. Pour conclure certains contrats conformément à l'art. 131, al. 1, let. l.

2 Ces actes normatifs et ces décisions sont sujets au référendum facultatif; la loi fixe les délais et les quorums.

3 Les communes possédant un parlement communal désignent dans le règlement communal les actes normatifs et les décisions du parlement qui sont sujets au référendum facultatif ou que le parlement doit soumettre au vote du corps électoral.

1

Art. 154 Compétences des nouveaux organes directeurs La loi peut prévoir que les organes directeurs des trois communes créées au 1er janvier 2011 qui ont été élus avant la fin de la période de fonction 2006/2010 entrent en fonction dès le 1er juillet 2010, avec tous les droits et devoirs, tâches et compétences des organes directeurs sortants au 30 juin 2010 des communes municipales, des Tagwen et des communes scolaires.

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La landsgemeinde du 7 mai 2006 a chargé le gouvernement glaronnais de créer 3 communes en lieu et place des 25 communes municipales, 18 communes scolaires, 16 communes d'assistance et 9 Tagwen existants. Le Conseil fédéral s'est déjà exprimé sur la conformité de cette réforme de la structure communale avec la Charte européenne de l'autonomie locale (RS 0.102) dans son message du 10 janvier 2007 concernant la garantie des Constitutions révisées des cantons de Berne, de Schwyz, de Glaris, d'Appenzell Rhodes-Intérieures et de Vaud (FF 2007 581). Il y concluait que cette réforme était compatible avec ladite charte, de sorte que les conseils législatifs ont garanti les dispositions correspondantes par arrêté du 18 juin 2007. La modification de la Constitution cantonale fixe les principes de l'organisation (organes de la commune, primauté de l'assemblée communale, possibilité de créer un parlement communal) ainsi que l'étendue des droits populaires (droits des citoyens, précision du droit de proposition individuel, décisions urgentes).

1.1.3

Garantie de l'accès au juge dans les affaires de droit public

Ancien texte Art. 59, al. 2 2 Le Grand Conseil décide de la recevabilité juridique des initiatives et de leur pertinence; sont pertinentes les initiatives recevables qui recueillent au moins dix voix.

Art. 113, al. 1 1 Le Tribunal administratif connaît, comme juridiction de première instance ou comme juridiction de recours, de litiges relevant du droit administratif ou d'autres litiges relevant du droit public. Il se compose du président et de huit juges; le président et quatre juges forment une chambre.

Nouveau texte Art. 59, al. 2 2 Le Grand Conseil décide de la recevabilité juridique des initiatives et de leur pertinence; sont pertinentes les initiatives recevables qui recueillent au moins dix voix. Il n'existe pas de voie de recours cantonale contre les décisions du Grand Conseil concernant la recevabilité juridique.

Art. 113, al. 1 Le Tribunal administratif connaît, comme juridiction de première instance ou comme juridiction de recours, de litiges relevant du droit administratif ou d'autres litiges relevant du droit public. Il se compose du président et de huit juges, qui forment deux chambres.

1

La garantie de l'accès au juge (art. 29a Cst.) et la loi sur le Tribunal fédéral (LTF)1 sont entrées en vigueur au niveau fédéral le 1er janvier 2007. La nouvelle disposition constitutionnelle prévoit que toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire, mais que la Confédération et les cantons peuvent, par la loi, exclure l'accès au juge dans des cas exceptionnels (art. 29a, 2e phrase, Cst.). La LTF concrétise la garantie de l'accès au juge. Elle oblige les cantons à instituer des tribunaux comme autorités cantonales de dernière instance (art. 75, al. 2, 80, al. 2, 86, al. 2 et 114 LTF). La LTF prévoit des exceptions pour les décisions revêtant un caractère politique prépondérant ou pour les droits politiques cantonaux des citoyens 1

986

Loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral; RS 173.110.

(art. 86, al. 3, et 88 LTF). Elle prescrit seulement aux cantons de prévoir une voie de recours contre tout acte d'autorité qui est susceptible de violer les droits politiques cantonaux des citoyens (art. 88, al. 2, 1re phrase, LTF); cette obligation ne s'étend explicitement pas aux actes du parlement et du gouvernement (art. 88, al. 2, 2e phrase). Le canton de Glaris est donc libre de soumettre ou non les décisions du Grand Conseil concernant la recevabilité des initiatives à une voie de recours cantonale. Les décisions du Grand Conseil concernant la recevabilité des initiatives étant purement politiques, le canton de Glaris a décidé de ne pas prévoir de possibilité de recours. La modification de la Constitution cantonale prévue en conséquence est donc compatible avec la garantie de l'accès au juge et la loi sur le Tribunal fédéral et, partant, conforme au droit fédéral. Il en va de même de la modification de l'art. 113, al. 1, de la Constitution cantonale.

1.2

Constitution du canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures

1.2.1

Votation populaire cantonale du 27 avril 2008

Lors de la landsgemeinde du 27 avril 2008, le corps électoral du canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures a accepté la modification de l'art. 46 de la Constitution cantonale (affaires ecclésiastiques).

Dans une lettre du 28 avril 2008, le Gouvernement du canton d'Appenzell RhodesIntérieures a demandé la garantie fédérale.

1.2.2

Affaires ecclésiastiques

Ancien texte Art. 46, al. 6 6 Il peut être décidé par concordat avec un autre canton que les habitants de ce canton qui professent la religion catholique-romaine appartiennent avec tous droits et obligations aux paroisses de Rhodes intérieures.

Nouveau texte Art. 46, al. 6 6 Il peut être décidé par concordat avec un autre canton que les habitants des deux cantons qui professent la religion catholique-romaine ou évangélique réformée soient pleinement reconnus comme membres par les paroisses de l'autre canton, avec tous les droits et devoirs afférents.

Le concordat conclu en 1969 au sujet de l'affiliation aux paroisses et de l'imposition des membres de l'Eglise évangélique domiciliés dans le canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures ne reposait jusqu'ici sur aucune base légale. La présente modification de la Constitution cantonale comble cette lacune. Elle offre également la base nécessaire à la conclusion d'autres concordats dans le domaine ecclésiastique, s'il devait y en avoir.

987

1.3

Constitution du canton d'Argovie

1.3.1

Votation populaire cantonale du 1er juin 2008

Lors de la votation populaire du 1er juin 2008, le corps électoral du canton d'Argovie a accepté deux modifications de la Constitution cantonale concernant: ­

l'adaptation de la liberté économique au droit fédéral (modification du § 20 de la Constitution cantonale), par 100 551 oui contre 31 968 non;

­

l'allègement administratif des entreprises (modification du § 50 de la Constitution cantonale), par 111 980 oui contre 21 143 non.

Dans une lettre du 18 juin 2008, le Conseil d'Etat du canton d'Argovie a demandé la garantie fédérale.

1.3.2

Liberté économique

Ancien texte § 20, al. l 1 Tout Suisse a le droit de choisir et d'exercer librement une profession et une activité économique.

Nouveau texte § 20, al. 1 1 Toute personne a le droit de choisir et d'exercer librement une profession et une activité économique.

Le droit fondamental à la liberté économique, tel qu'il était libellé dans la Constitution du canton d'Argovie, était réservé aux seuls citoyens suisses. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la liberté économique s'étend toutefois aussi à d'autres personnes si elles sont titulaires d'une autorisation d'établissement ou si elles ont droit à une autorisation de séjour en vertu de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr; RS 142.20) ou d'un accord international. L'ancienne formulation de la disposition constitutionnelle s'est donc révélée trop stricte, raison pour laquelle on a remplacé le substantif «Suisse» par celui de «personne», un terme plus ouvert, qui présente également l'avantage d'être épicène. La nouvelle formulation de l'alinéa pose toutefois une nouvelle difficulté dans le sens où elle pourrait laisser penser que les personnes qui ne sont pas admises sur le marché du travail suisse par la législation sur les étrangers ou seulement à certaines conditions (art. 34 et 46 en relation avec l'art. 38 LEtr) jouissent également de la liberté économique au sens du § 20, al. 1 de la Constitution argovienne, conclusion qui irait plus loin que ne le veut le droit fédéral. On peut cependant interpréter cette disposition en conformité avec le droit fédéral, raison pour laquelle la garantie fédérale peut lui être accordée.

988

1.3.3

Allègement administratif des entreprises

Nouveau texte § 50, al. 2bis (nouveau) 2bis Le canton prend les mesures nécessaires pour limiter autant que possible la densité réglementaire et le fardeau administratif du secteur économique. Il tient compte, ce faisant, des intérêts des petites et moyennes entreprises.

Le nouvel article constitutionnel oblige le canton à agir, dans le cadre de sa politique économique, pour que le fardeau administratif des entreprises, et notamment des PME, soit réduit et limité au minimum. Cette nouvelle disposition est conforme au droit fédéral et s'inscrit dans la liste des mesures que la Confédération et d'autres cantons ont déjà prises pour soulager les entreprises suisses, et notamment les petites et moyennes entreprises, sur le plan administratif2. Elle peut donc être garantie.

1.4

Constitution du canton de Genève

1.4.1

Votation populaire cantonale du 24 février 2008

Lors de la votation populaire du 24 février 2008, le corps électoral du canton de Genève a accepté deux modifications de la Constitution cantonale concernant: ­

la protection de l'hygiène publique et de la santé; fumée passive (art. 178B), par 111 562 oui contre 29 363 non;

­

l'interdiction des chiens dangereux (art. 178C et 182, al. 2), par 90 091 oui contre 48 399 non.

Dans un courrier du 30 avril 2008, le Conseil d'Etat du canton de Genève a demandé la garantie fédérale.

1.4.2

Protection de l'hygiène publique et de la santé

Nouveau texte Art. 178B Protection de l'hygiène publique et de la santé (nouveau); fumée passive 1 Vu l'intérêt public que constitue le respect de l'hygiène publique et la protection de la santé, le Conseil d'Etat est chargé de prendre des mesures contre les atteintes à l'hygiène et à la santé de la population résultant de l'exposition à la fumée du tabac, dont il est démontré scientifiquement qu'elle entraîne la maladie, l'invalidité et la mort.

2 Afin de protéger l'ensemble de la population, il est interdit de fumer dans les lieux publics intérieurs ou fermés, tout particulièrement dans ceux qui sont soumis à une autorisation d'exploitation.

2

Voir à ce sujet le rapport du Conseil fédéral du 8 juin 2007 sur la politique de la Confédération en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) dans la FF 2007 5499 et le rapport du Conseil fédéral du 2 avril 2008 sur la politique de croissance pour les années 2008 à 2011 (en exécution de la motion 01.3089 «Politique de croissance.

Sept mesures»).

989

3

Sont concernés: a. tous les bâtiments ou locaux publics dépendant de l'Etat et des communes ainsi que de toutes autres institutions de caractère public; b. tous les bâtiments ou locaux ouverts au public, notamment ceux affectés à des activités médicales, hospitalières, para-hospitalières, culturelles, récréatives, sportives ainsi qu'à des activités de formation, de loisirs, de rencontres, d'exposition; c. tous les établissements publics au sens de la législation sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement; d. les transports publics et les autres transports professionnels de personnes; e. les autres lieux ouverts au public tels que définis par la loi.

La législation en matière de santé est, pour l'essentiel, l'affaire des cantons. La Confédération, quant à elle, est compétente pour légiférer dans un nombre limité de domaines, énumérés exhaustivement à l'art. 118, al. 2, let. a à c, Cst. (utilisation de denrées et de biens de consommation pouvant présenter un danger pour la santé, lutte contre certaines maladies, protection contre les rayons ionisants). Les cantons sont habilités à édicter des règles visant à protéger la population contre les effets du tabagisme passif tant et aussi longtemps que la Confédération ne légifère pas dans ce domaine. Pour assurer la protection des travailleurs contre le tabagisme passif, le législateur fédéral a introduit dans la législation sur le travail différentes dispositions fondées sur l'art. 110, al. 1, let. a, Cst. Jusqu'à présent, les cantons ont donc la faculté d'édicter des dispositions visant à protéger la population contre les effets du tabagisme passif.

Le 3 octobre 2008, le Parlement a adopté la loi fédérale sur la protection contre le tabagisme passif (FF 2008 7483), qui repose tant sur la base constitutionnelle qui vient d'être citée que sur l'art. 118, al. 2, let. b, Cst. (lutte contre les maladies transmissibles, les maladies très répandues et les maladies particulièrement dangereuses).

Cette loi qui vise à garantir à l'ensemble de la population une protection étendue contre le tabagisme passif, n'est pas encore entrée en vigueur. L'art. 4 de cette loi permettant expressément aux cantons d'édicter des dispositions plus strictes pour la protection de la santé, l'art. 178B de la Constitution du canton de Genève continuera donc d'être compatible avec le droit fédéral lorsque cette loi sera en vigueur.

Il convient d'examiner si, pour le surplus, l'art. 178B de la Constitution du canton de Genève est conforme au droit de rang supérieur. Selon son al. 2, l'interdiction de fumer s'applique aux «lieux publics intérieurs ou fermés, tout particulièrement (...)

ceux qui sont soumis à une autorisation d'exploitation». On peut se demander si cette disposition n'est pas incompatible avec la liberté personnelle (art. 10, al. 2, Cst.). Dans un arrêt qu'il a récemment rendu, le Tribunal fédéral, examinant le nouvel art. 178B de la Constitution du canton de Genève, s'est demandé si l'on pouvait inférer de la
liberté personnelle le droit de fumer dans des locaux et établissements publics3. Il a, toutefois, laissé cette question en suspens, constatant dans le même arrêt que, dans le cas de l'article de la Constitution genevoise concernant la protection contre le tabagisme passif, les conditions auxquelles doit satisfaire toute restriction des droits fondamentaux (art. 36 Cst.), notamment la proportionnalité par rapport au but visé, étaient, à l'évidence, réunies. S'agissant de la liberté économique (art. 27 Cst.), on pourrait, en outre, aller jusqu'à objecter que l'interdiction de fumer instaurée dans le canton de Genève reviendrait pratiquement à empêcher l'exploitation de bars habituellement fréquentés par des fumeurs ou d'autres établis3

990

ATF 133 I 125, cons. 5.2.4.

sements publics similaires. Cependant, a estimé le Tribunal fédéral4, il est loisible au canton de Genève de prévoir, dans sa législation d'exécution, des exceptions propres à sauvegarder l'existence de tels établissements sur le plan économique. Cela étant, la garantie fédérale peut être accordée au nouvel art. 178B de la Constitution du canton de Genève.

1.4.3

Chiens dangereux

Nouveau texte Art. 178C

Chiens dangereux (nouveau) Interdictions et mesures de sécurité 1 En vue de garantir la sécurité publique, les chiens appartenant à des races dites d'attaque ou jugées dangereuses, dont le Conseil d'Etat dresse la liste, ainsi que les croisements issus de l'une de ces races, sont interdits sur l'ensemble du territoire du canton.

2 Cette interdiction s'applique à tout autre chien dressé à l'attaque ou ayant un comportement agressif ou dangereux ainsi qu'aux chiens provenant de toute lignée présentant des caractéristiques génétiques d'agressivité et de dangerosité.

3 Les chiens de grande taille, d'un poids supérieur à 25 kilos, pouvant de ce fait présenter un danger potentiel, doivent être déclarés et faire l'objet d'une éducation adéquate et d'une autorisation de détention délivrée par l'autorité compétente. Celle-ci est délivrée sur la base d'un examen destiné à évaluer le comportement de l'animal et la capacité du détenteur à le maîtriser en toutes circonstances.

4 Les agents de la force publique ainsi que les gardes-frontière ayant une formation adéquate sont autorisés à utiliser des chiens de races dites d'attaque. Le Conseil d'Etat adopte des règles quant à l'utilisation de chiens par la force publique.

5 Toute violation des al. 1 et 2 ainsi que de l'art. 182, al. 2, est passible d'une peine pénale de police et entraîne le séquestre ainsi que, le cas échéant, l'euthanasie de l'animal. L'autorité compétente peut retirer l'effet suspensif aux recours interjetés contre ces mesures, qui sont également applicables aux chiens de grande taille, au sens de l'al. 3, n'ayant pas fait l'objet d'une autorisation de détention.

6 L'application des dispositions du présent article est confiée à une autorité désignée par le Conseil d'Etat, laquelle doit présenter chaque année au Grand Conseil un rapport sur ses activités.

Art. 182, al. 2 (nouveau)5 2 L'interdiction des chiens dangereux, au sens de l'art. 178C, al. 1 et 2, n'est pas applicable aux animaux qui se trouvent légalement sur le territoire du canton avant son adoption par le peuple.

Toutefois et dès son entrée en vigueur, les détenteurs de chiens au sens des al. 1 à 3 doivent déclarer ces chiens à l'autorité compétente et obtenir, dans le délai d'une année, une autorisation de détention au sens de l'al. 3. De plus, les chiens visés par les al. 1 et 2 doivent être tenus en laisse et muselés, lorsqu'ils ne sont pas enfermés, et ils doivent être castrés ou stérilisés pour éviter une reproduction.

La protection de l'être humain contre les chiens dangereux relève de la compétence législative des cantons (art. 3 Cst.). Pour l'heure, une initiative parlementaire Kohler 4 5

ATF 133 I 125, cons. 7.4.

L'al. 2 de l'art. 182, tel qu'il a été soumis à la Confédération en vue de l'obtention de la garantie fédérale figure aujourd'hui dans le Recueil systématique du canton de Genève à titre d'al. 4. Ce décalage est dû au fait que, dans l'intervalle, deux dispositions transitoires (les actuels al. 2 et 3) ont été insérées à l'art. 182. Or, ces deux dispositions faisaient partie d'une révision constitutionnelle (art. 160F de la Constitution du canton de Genève), pour laquelle, par inadvertance, les autorités genevoises n'ont pas demandé la garantie fédérale. Elles ont été informées de cette omission et sont en train de préparer la demande de garantie pour ces deux dispositions.

991

(05.453) tendant à interdire les pitbulls est pendante devant une sous-commission de la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national; en l'état actuel des travaux, on ne sait pas encore si et dans quelle mesure le droit fédéral futur s'écartera des réglementations cantonales en matière de protection de la population contre le danger que peuvent présenter les chiens. Toutefois, comme l'élément déterminant est la situation juridique qui vaut au moment où doit être prise la décision d'accorder la garantie fédérale, l'art. 178C de la Constitution genevoise peut donc être garanti.

2

Constitutionnalité

L'examen effectué montre que les dispositions modifiées des constitutions des cantons de Glaris, d'Appenzell Rhodes-Intérieures, d'Argovie et de Genève remplissent les conditions posées par l'art. 51 de la Constitution fédérale. Elles peuvent donc recevoir la garantie fédérale.

Selon les art. 51 et 172, al. 2, de la Constitution fédérale, l'autorité compétente pour accorder cette garantie est l'Assemblée fédérale.

992