06.476 Initiative parlementaire Un enfant, une allocation Rapport de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national du 4 mai 2009

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi fédérale sur les allocations familiales que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose, par 14 voix contre 10, et 1 abstention, d'adopter le projet d'acte ci-joint.

Une minorité de la commission (Triponez, Borer, Dunant, Kleiner, Stahl) propose de ne pas entrer en matière sur ce projet.

Une autre minorité de la commission (Scherer, Baettig, Borer, Bortoluzzi, Dunant, Estermann, Parmelin, Stahl) propose de renvoyer le projet à la commission, en la chargeant de prévoir un financement paritaire.

4 mai 2009

Pour la commission: Le président, Jürg Stahl

2009-1368

5389

Condensé Aux termes de la loi sur les allocations familiales, entrée en vigueur le 1er janvier 2009, tous les salariés qui sont obligatoirement assurés dans l'AVS ont droit aux allocations familiales. Si treize cantons accordent aujourd'hui des allocations familiales aux personnes exerçant une activité lucrative indépendante, aucune législation fédérale ne leur confère un tel droit. Le projet de modification de la loi sur les allocations familiales vise à combler cette lacune.

Les indépendants devront, comme les employeurs, s'affilier à une caisse de compensation pour allocations familiales et auront droit aux mêmes prestations que les salariés, indépendamment de leur revenu. Les cotisations que les indépendants verseront à la caisse de compensation pour allocations familiales seront calculées sur la base de leur revenu soumis à l'AVS. Aucun frais supplémentaire n'est à la charge de la Confédération et des cantons. La nouvelle réglementation laisse aux cantons la liberté de plafonner les cotisations des indépendants sur la base d'un certain revenu.

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Rapport 1

Genèse du projet

Le 26 novembre 2006, le peuple a accepté la loi fédérale sur les allocations familiales (LAFam)1, selon laquelle tous les salariés qui sont obligatoirement assurés dans l'AVS ont droit à des allocations familiales d'au moins 200 francs par mois et par enfant. Par contre, les indépendants ne peuvent prétendre à des allocations familiales. Cette nouvelle loi, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2009, fait suite à une initiative parlementaire déposée en 19912; à l'époque, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) avait déjà été chargée d'élaborer un projet de loi. Le 8 septembre 2004, la CSSS-N a soumis au Conseil national un projet3 selon lequel les indépendants pouvaient eux aussi prétendre à des allocations familiales. Dans son avis, le Conseil fédéral a également préconisé d'appliquer aussi aux indépendants la réglementation prévue pour les salariés4. En première lecture, le Conseil national a adopté cette disposition sans opposition; cependant, le Conseil des Etats l'a pour sa part rejetée. Après avoir décidé, de justesse, de maintenir sa décision, le Conseil national s'est finalement rallié à la décision du Conseil des Etats et a accepté de ne pas inclure les indépendants dans la réglementation sur les allocations familiales, afin de ne pas risquer de faire capoter l'ensemble du projet5.

L'initiative parlementaire déposée le 6 décembre 2006 par le conseiller national Hugo Fasel reprend la question des allocations familiales pour les indépendants. Elle vise à adapter la loi sur les allocations familiales de manière que le droit aux allocations pour enfants soit garanti selon le principe «un enfant, une allocation».

Le 24 août 2007, la CSSS-N a donné suite à l'initiative parlementaire par 13 voix contre 7, et 3 abstentions; le 8 novembre 2007, la CSSS-E s'est ralliée à cette décision par 5 voix contre 5, avec le vote prépondérant de la présidente.

Le 15 février 2008, la CSSS-N a donné mandat à sa sous-commission «Politique familiale»6 d'élaborer un projet de loi. Conformément à l'art. 112 de la loi sur le Parlement, la sous-commission a fait appel à deux experts de l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Après s'être réunie une première fois le 22 octobre 2008, elle a adopté par 5 voix contre 3 un projet de modification de la loi
sur les allocations familiales le 26 janvier 2009 à l'intention de la CSSS-N.

A sa séance du 4 mai 2009, la commission a décidé, par 15 voix contre 5, et 2 abstentions, d'entrer en matière sur le projet de la sous-commission. La question du financement des allocations familiales a été l'un des points les plus controversés 1 2 3 4 5

6

RS 836.2 91.411 Iv.pa. Fankhauser. Prestations familiales.

Rapport complémentaire de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national du 8 septembre 2004, FF 2004 6459.

Avis complémentaire du Conseil fédéral du 10 novembre 2004, FF 2004 6513.

Cf. délibérations du Conseil national du 15 mars 2005, du 29 novembre 2005 et du 15 mars 2006 et délibérations du Conseil des États du 21 septembre 2005 et du 13 mars 2006.

Rossini, Estermann (à partir du 1.1.2009) Fehr Jacqueline, Gilli (à partir du 14.9.2008), Kleiner, Leuenberger-Genève (jusqu'au 14.9.2008), Maurer (jusqu'à la fin novembre 2008), Meyer Thérèse, Scherer, Stahl, Weibel.

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du débat d'entrée en matière. Par 13 voix contre 8, et 3 abstentions, la CSSS-N a rejeté une proposition visant à renvoyer le projet à la sous-commission en la chargeant de prévoir un financement paritaire.

Par 14 voix contre 10, et 1 abstention, la commission a approuvé le présent projet, qui sera donc soumis au Conseil national pour examen et au Conseil fédéral pour avis.

2

Grandes lignes du projet

2.1

Dispositions en vigueur et mesures proposées

Aux termes de la LAFam, les indépendants ne peuvent prétendre aux allocations familiales. Si certains d'entre eux bénéficient d'allocations familiales en vertu d'une réglementation cantonale (cf. ch. 2.2), ce n'est toutefois pas le cas dans la moitié des cantons. Cette lacune au niveau national avait déjà été critiquée à la veille de la votation populaire sur la loi sur les allocations familiales, et le présent projet vise précisément à y remédier.

Comme les salariés, la majorité des indépendants gagnent entre 50 000 et 80 000 francs par an. Toutefois, le nombre des indépendants qui touchent moins que la moyenne est supérieur à celui des salariés, car les inégalités de revenu sont particulièrement importantes chez les indépendants. C'est pourquoi les allocations familiales constitueraient une contribution substantielle au revenu de la famille pour un grand nombre d'indépendants.

Tous les salariés ainsi que les indépendants dans l'agriculture peuvent déjà prétendre aux allocations familiales quel que soit leur revenu. L'objectif est de parvenir à une solution unifiée à l'échelle nationale et qui ne prévoie aucun plafond de revenu également pour les indépendants hors secteur agricole. Toutefois, les cantons devront avoir la possibilité de prévoir un plafonnement des cotisations que les indépendants versent aux caisses de compensation pour allocations familiales, sur la base de leur revenu soumis à l'AVS.

Ces mesures permettraient en outre d'éviter le risque d'abus qui existe dans le système actuel. En effet, selon la LAFam, les employés qui travaillent à temps partiel ont droit à des allocations familiales entières. Il suffit donc que son conjoint travaille quelques heures par semaine pour qu'un indépendant puisse bénéficier d'une allocation entière, alors même que les cotisations ne sont pas versées sur la base d'un salaire complet. En étant eux aussi soumis à la loi, les indépendants ne pourraient plus procéder de la sorte.

Enfin, en raison d'une lacune dans la réglementation actuelle, les salariés qui gagnent entre 4555 et 6840 francs par an ne peuvent prétendre aux allocations familiales ni en tant que salariés, ni en tant que personnes sans activité lucrative. Cela est en contradiction avec l'esprit de la LAFam, selon laquelle tous les salariés et les personnes sans activité lucrative peuvent
prétendre aux allocations familiales. Par conséquent, la présente révision devra corriger cette lacune de sorte que les salariés dont le revenu annuel ne dépasse pas 6840 francs soient considérés comme des personnes sans activité lucrative.

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2.2

Allocations familiales pour personnes exerçant une activité lucrative indépendante selon les réglementations cantonales

Depuis le 1er janvier 2009, il existe dans treize cantons des dispositions légales réglant les allocations familiales pour les personnes exerçant une activité lucrative indépendante. On distingue deux modèles: ­

huit cantons (BE, GL, BL, BS, SH, AR, VD, GE) appliquent les mêmes règles aux salariés et aux indépendants, ce qui correspond au modèle proposé par la commission. Tous les indépendants sont soumis à la loi et ont droit aux allocations quel que soit leur revenu, sauf pour VD qui a fixé une limite à 315 000 francs par an. Les personnes exerçant une activité lucrative indépendante s'affilient à une caisse de compensation pour allocations familiales (CAF) et versent des cotisations calculées en pour cent de leur revenu soumis à l'AVS. Dans cinq cantons, les cotisations sont plafonnées. Dans ceux de BE, BS et BL, le plafond correspond au montant maximum du gain assuré dans l'assurance-accidents obligatoire (126 000 francs par année), GE fixe la limite à 243 000 francs et VD à 315 000 francs par an.

­

Dans quatre cantons (LU, SZ, NW, SG), l'affiliation est facultative et le droit est fonction du revenu. Pour LU, SZ et NW, la limite de revenu est fixée à 54 000 francs par an, plus 10 % par enfant. Pour SG, elle est de 65 000 francs. Les organes d'exécution sont les caisses cantonales de compensation AVS. Les prestations sont financées par les cotisations des bénéficiaires ainsi que, suivant les cantons, par les cotisations des employeurs aux CAF et/ou par des contributions du canton. En VS, les CAF doivent prévoir la possibilité d'affilier les indépendants. L'assujettissement est facultatif. Il n'y a pas de limite de revenu en ce qui concerne le droit aux allocations familiales. Le financement est déterminé par les CAF.

Le montant des prestations correspond dans tous les cantons à celui prévu pour les salariés.

Avant l'entrée en vigueur de la réglementation des allocations familiales au niveau fédéral, des allocations familiales pour indépendants existaient déjà dans onze cantons. Sept cantons (LU, SZ, BL, SH, AR, SG, GE) maintiennent leur régime d'allocations familiales pour les indépendants et quatre cantons (UR, ZG, AI, GR) l'ont abrogé. Six cantons (BE, NW, GL, BS, VD, VS) ont introduit un nouveau régime d'allocations familiales pour les indépendants au 1er janvier 2009. Le nombre de cantons ayant un régime d'allocations familiales pour les indépendants a donc légèrement augmenté. La tendance s'éloigne d'une solution faisant dépendre le droit aux allocations du revenu pour aller en direction d'une solution globale.

2.3

Eléments clés de la modification proposée

Dorénavant, toutes les personnes exerçant une activité lucrative indépendante sont soumises à la LAFam. Tout comme les employeurs, elles doivent s'affilier à une CAF. Elles ont droit aux mêmes prestations que les salariés et ce droit ne dépend pas de leur revenu. Elles versent des cotisations aux CAF calculées en pour cent du revenu soumis à l'AVS. Les cotisations peuvent toutefois être plafonnées par les

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cantons et n'être versées que sur le revenu ne dépassant pas la limite prévue dans l'assurance-accidents obligatoire.

Les modifications proposées reprennent pour l'essentiel le projet du CN tel qu'il a été adopté à l'issue des débats sur la LAFam lors de la session de printemps 2005.

Le CN avait presque entièrement suivi les propositions de la commission préparatoire dans le rapport complémentaire de la CSSS-N du 8 septembre 2004. L'extension du champ d'application de la LAFam aux indépendants nécessite seulement la modification de la section 1 (Salariés exerçant une activité lucrative non agricole) du chap. 3 (Régimes d'allocations familiale). La disposition sur le financement s'écarte de la décision du CN de 2005. En outre, une dérogation à la réglementation actuelle sur le concours de droit et l'introduction d'une disposition sur l'affiliation aux caisses sont proposées. Les deux derniers points cités devraient faciliter l'application de la LAFam. Il n'est pas nécessaire de modifier d'autres lois fédérales.

2.4

Non-entrée en matière: motifs invoqués par la minorité

Les frais supplémentaires résultant de l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2009, de la nouvelle loi sur les allocations familiales s'élèvent à 500 millions de francs. Selon la minorité de la commission, une extension des prestations quelques mois seulement après l'entrée en vigueur de la loi serait pour le moins prématurée. Lors de l'examen de la LAFam, il y a trois ans, les deux conseils avaient finalement décidé, à l'issue d'une discussion nourrie, de ne pas inclure les indépendants dans la réglementation sur les allocations familiales. Cette décision mérite d'autant plus d'être respectée que la majorité des travailleurs indépendants ne souhaitent pas la mise en oeuvre d'une solution à l'échelon fédéral dans ce domaine.

Le surcoût d'une généralisation du droit aux allocations familiales pour les indépendants se monterait, selon les estimations, à 167 millions de francs. Or, cette somme ainsi que les frais administratifs devraient être entièrement pris en charge par les indépendants. Avec la nouvelle réglementation, ceux-ci seraient donc amenés à payer davantage qu'ils ne recevraient, ce qui est inacceptable.

Par ailleurs, l'intégration des indépendants dans le régime fédéral des allocations familiales constituerait une atteinte à l'autonomie des cantons. Pour l'heure, ceux-ci sont libres en effet de prévoir ou non des allocations familiales pour les travailleurs indépendants, un droit qu'il y a lieu de maintenir.

Enfin, l'instauration d'un régime d'allocations familiales pour les indépendants applicable à toute la Suisse doit s'inscrire dans le contexte de la situation financière des autres assurances sociales. Or, il est apparu ces derniers mois que, à l'exception de l'assurance contre les accidents professionnels, l'ensemble des assurances sociales étaient confrontées à de graves difficultés financières ou en étaient menacées.

Ainsi, le financement des assurances sociales posera de sérieux problèmes au cours des prochaines années. C'est pourquoi il convient de renoncer à toute extension des prestations sociales, à moins que cela ne se révèle absolument nécessaire.

5394

2.5

Renvoi à la commission: motifs invoqués par la minorité

A l'origine, les allocations familiales étaient régies par le droit cantonal et octroyées essentiellement aux salariés. Seule la loi sur les allocations familiales dans l'agriculture s'appliquait au niveau fédéral. Cette situation justifiait l'existence d'un financement différencié. La nouvelle loi fédérale sur les allocations familiales a permis, d'une part, d'harmoniser les montants minimaux des allocations et, d'autre part, d'élargir le cercle des ayants droit aux personnes sans activité lucrative. Avec l'intégration des indépendants dans le régime fédéral des allocations familiales et l'application du principe «un enfant, une allocation», qui constitue précisément l'objectif de la présente révision, l'allocation familiale perd son caractère usuel de complément de salaire pour devenir une sorte de prestation de solidarité. Son mode de financement doit par conséquent également être redéfini. En ce qui concerne les allocations familiales pour indépendants, un financement paritaire, tel qu'il existe déjà pour les autres assurances sociales, semble constituer la solution la plus simple.

Il convient donc de renvoyer le projet à la commission pour qu'elle prévoie la mise en place d'un tel mode de financement.

3

Commentaire article par article

Chiffre I Art. 7, al. 1 Let. e Le critère du revenu soumis à l'AVS le plus élevé peut poser des problèmes d'application lorsque le revenu d'une activité indépendante entre également en ligne de compte. En effet, les revenus provenant d'une activité lucrative indépendante sont calculés selon le revenu imposable et ne sont donc disponibles qu'a posteriori, ce qui peut durer plusieurs années suivant les cas. De plus, ils varient d'une année à l'autre et parfois de manière considérable. Pour les parents qui habitent ensemble et avec leur enfant (ce qui est généralement le cas pour les parents mariés), et qui travaillent tous deux dans le canton de domicile (ou tous deux hors du canton), il n'est souvent possible de déterminer la priorité qu'après coup. Si les parents ont des revenus proches, il se peut que le droit prioritaire change à plusieurs reprises. Pour résoudre ce problème de manière simple et pratique, une solution serait de donner la priorité au parent dont le revenu soumis à l'AVS provenant d'une activité salariée est le plus élevé. Cette proposition correspond aux dispositions légales actuelles de huit cantons (LU, SZ, NW, BS, SH, SG, VD et VS) prévoyant déjà des allocations familiales pour les indépendants. Ces prestations sont subsidiaires à celles prévues pour les salariés et générales, c'est-à-dire versées également aux parents divorcés.

Contrairement à la manière actuelle de régler le concours de droit, la présente proposition permet: ­

pour les parents mariés qui travaillent dans le même canton, de respecter en fait la réglementation actuelle, sans devoir prendre en compte le droit lié à l'activité indépendante;

­

pour les parents divorcés, donc également pour le parent ayant une activité lucrative indépendante, de faire valoir leur droit prioritaire conformément 5395

aux lettres a à d de l'art. 7, al. 1. Il n'est pas nécessaire ici de faire une comparaison de revenus.

Il faut cependant être conscient que la réglementation proposée s'écarte quelque peu d'un système uniforme incluant totalement les personnes exerçant une activité lucrative indépendante. De plus, elle tend à avantager les CAF qui comptent beaucoup d'indépendants, car ces derniers paieront certes des cotisations mais percevront relativement moins de prestations. Toutefois, dans les seize cantons avec compensation des charges entre CAF, l'équilibre est maintenu. La commission a privilégié la simplification administrative et l'aspect pratique; elle s'est donc prononcée pour la solution proposée.

Let. f (nouvelle) Si le droit aux allocations de parents mariés dépend exclusivement de leur activité lucrative indépendante et qu'ils sont tous les deux actifs dans le même canton, la priorité revient à celui dont le revenu soumis à l'AVS provenant de cette activité est le plus élevé.

Titre de la section 1 Le terme de «personnes exerçant une activité lucrative» recouvre aussi bien les salariés que les indépendants.

Art.11, al.1, let. c (nouvelle) L'adjonction d'une let. c permet d'intégrer les personnes exerçant une activité lucrative indépendante. La définition fait ici aussi référence à l'AVS.

Art. 12 Al. 1 Il faut expressément préciser dans une deuxième phrase que les indépendants sont soumis aux mêmes dispositions cantonales sur l'affiliation à une CAF que les employeurs. C'est déjà le cas dans tous les cantons qui connaissent actuellement une affiliation obligatoire des indépendants.

Al. 2 La même règle s'applique aux employeurs et aux indépendants. Est déterminant le siège de l'entreprise ou, à défaut, le canton de domicile. Pour l'assujettissement à un régime d'allocations familiales, les législations cantonales actuellement applicables exigent très souvent à la fois le siège de l'entreprise et le domicile dans le canton.

Lorsque le siège et le domicile d'un indépendant ne se trouvent pas dans le même canton, cette réglementation peut occasionner des lacunes. En donnant la priorité au siège de l'entreprise, la règle établit clairement que l'indépendant est assujetti au lieu où il est assujetti en tant qu'employeur pour ses employés.

Dans la deuxième phrase, il est précisé que la réglementation
sur l'assujettissement des succursales n'est applicable qu'aux employeurs. Lorsqu'un indépendant a une succursale dans un autre canton, il ne doit pas s'affilier aussi dans ce canton à une CAF.

5396

Art. 13 Al. 2bis (nouveau) Ce nouvel alinéa fixe le droit aux allocations familiales pour les personnes exerçant une activité lucrative indépendante, en précisant qu'il est réglé par le régime d'allocations familiales du canton du siège de l'entreprise ou, à défaut, du domicile.

Le Conseil fédéral règle les détails concernant la durée de ce droit, car il ne peut être basé ni sur un contrat de travail ni sur un droit au salaire, comme c'est le cas pour les salariés.

Al. 4, let. b Il faut élargir ici la compétence réglementaire du Conseil fédéral, afin que celui-ci puisse également régler le cas des personnes qui exercent simultanément une activité lucrative en tant qu'indépendant et une en tant que salarié.

Art.16 Al. 1 Minorité (Scherer, Borer, Bortoluzzi, Dunant, Estermann, Parmelin, Stahl) La minorité se réfère au développement de la proposition de renvoi (cf. ch. 2.5). En cas d'application stricte du principe «un enfant, une allocation», le financement des allocations familiales devra être entièrement revu. Un financement paritaire correspond au mode de financement des autres prestations sociales.

Al. 3 (nouveau) La disposition sur le financement adoptée par le Conseil National lors de la session de printemps 2005 prévoyait de plafonner les cotisations des personnes exerçant une activité lucrative indépendante selon le montant maximum du gain assuré dans l'assurance-accidents obligatoire7. Le même plafonnement avait été décidé pour les cotisations des salariés dont l'employeur n'est pas tenu d'en payer. Au 1er janvier 2009, les cantons de BE, BS, BL, VD et GE connaissent un plafonnement des cotisations pour les indépendants.

Les cantons disposant déjà d'une réglementation exhaustive incluant toutes les personnes exerçant une activité lucrative indépendante ne doivent si possible pas être obligés à changer leurs dispositions sur le financement des allocations familiales pour les indépendants. C'est pourquoi les cantons ne doivent prélever des cotisations que sur la part du revenu qui ne dépasse pas le plafond fixé dans la loi sur l'assurance-accidents. Ils ne sont pas autorisés à fixer d'autres plafonds concernant le revenu déterminant pour les cotisations aux CAF. En effet, mieux vaut ne pas compliquer la tâche des CAF actives dans plusieurs ou tous les cantons.

La commission a examiné si
les cotisations des salariés dont l'employeur n'est pas tenu de payer des cotisations devraient également être plafonnées (ainsi que le Conseil National 2005 l'avait fait) ou si une compétence devrait être donnée aux cantons également dans ce domaine. Actuellement, seul le canton de Genève fixe un plafond aux cotisations des salariés dont l'employeur n'est pas tenu de payer des cotisations. Il est proposé qu'aucun plafonnement pour les cotisations des salariés 7

Le montant maximal du gain assuré se monte aujourd'hui à 126 000 francs par année; en 2005, il était de 106 800 francs.

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dont l'employeur n'est pas tenu d'en payer ne soit prévu dans la LAFam et que les cantons ne puissent pas non plus en introduire un. Cette solution: ­

est en accord avec les réglementations sur les allocations familiales de tous les cantons sauf GE;

­

empêche que les salariés dont l'employeur n'est pas tenu de payer des cotisations soient soumis en matière de financement à des réglementations différentes en fonction des cantons;

­

correspond à la réglementation qui devrait être en vigueur dans l'AVS au terme de la 11e révision de l'AVS, qui devrait abolir le traitement particulier de ces salariés.

A l'exception du plafonnement des cotisations des indépendants, qui peut être décidé par les cantons, les cotisations de toutes les catégories de personnes affiliées à une CAF seront calculées selon les mêmes règles (par exemple le taux de cotisation).

Art. 19, al. 1bis (nouveau) Selon l'art. 13, al. 3, LAFam, les salariés doivent payer des cotisations AVS sur un revenu annuel correspondant au minimum à la moitié du montant annuel de la rente de vieillesse complète minimale de l'AVS pour pouvoir toucher des allocations familiales. S'ils ont un revenu annuel inférieur à 6840 francs, ils n'ont pas droit aux allocations en tant que salariés. Mais s'ils paient sur leur salaire plus que la cotisation minimale AVS/AI/APG, ils ne sont pas considérés dans l'AVS comme personnes sans activité lucrative. Ils n'ont dès lors pas droit aux allocations familiales pour non actifs selon l'art. 19, al. 1, LAFam. Cela concerne les travailleurs ayant un revenu annuel situé entre 4555 et 6840 francs. Ils ne peuvent faire valoir un droit aux allocations ni en tant que salarié, ni en tant que personne sans activité lucrative.

Jusqu'à présent, 12 cantons ont comblé cette lacune. La commission trouve judicieux de le faire sur le plan suisse dans le cadre de la révision de la LAFam.

En élargissant le champ d'application de la LAFam aux indépendants, la condition du revenu minimum ouvrant le droit aux allocations selon l'art. 13, al. 3, LAFam, est également applicable aux indépendants. Dans l'AVS, une personne peut avoir le statut d'indépendant même si elle n'a pas de revenu du tout pendant une année.

C'est pourquoi les personnes exerçant une activité lucrative indépendante leur rapportant moins de 6840 francs par an doivent être considérées pour les allocations familiales comme étant sans activité lucrative.

Afin de combler cette lacune pour les deux catégories de bénéficiaires, il convient d'ajouter un nouvel al. 1bis à l'art. 19 LAFam, qui définit ces personnes comme étant sans activité lucrative au sens de la LAFam. Pour autant que les autres conditions soient réalisées, en particulier que le revenu familial ne dépasse pas 41 040 francs par an, celles-ci peuvent toucher les allocations familiales en tant que personnes sans activité lucrative.

Art. 28a (nouveau) Disposition transitoire relative à la modification du ...
La modification de la LAFam implique que les lois cantonales contiennent des dispositions qui sont contraires à la LAFam et qui doivent en conséquence être adaptées.

5398

Chiffre II L'obligation des cantons d'adapter leur législation aux nouveautés doit entrer en vigueur immédiatement, comme c'était déjà le cas lors de l'adoption de la LAFam.

4

Conséquences

4.1

Conséquences financières

Pour beaucoup d'enfants d'indépendants, les allocations familiales sont déjà versées à l'autre parent salarié. Il faut donc calculer le coût des allocations familiales à verser pour les enfants des indépendants qui n'y donnent pas droit actuellement. Il s'agit d'allocations familiales destinées aux enfants dont l'un des parents au moins a un statut d'indépendant et dont aucun des deux parents n'exerce d'activité salariée.

Le coût annuel des allocations familiales pour ces enfants est estimé à 278 millions de francs. Cette estimation des coûts se rapporte à l'année 2010.

Si ces prestations étaient uniquement financées par des cotisations prélevées sur le revenu des indépendants, le taux de cotisation devrait être fixé à: ­

1,2 % du revenu des indépendants soumis à l'AVS (si les cotisations ne sont pas plafonnées)

­

1,6 % du revenu des indépendants soumis à l'AVS (si l'obligation de cotiser est plafonnée à un revenu de 126 000 francs).

Depuis le 1er janvier 2009, 111 millions de francs par an sont octroyés aux indépendants au titre d'allocations familiales, et ce, en vertu des réglementations cantonales en vigueur. Le surcoût effectif d'une généralisation du droit aux allocations familiales pour les indépendants est donc, selon ces estimations, de 167 millions de francs. Ce surcoût est financé par les cotisations versées aux CAF par les indépendants euxmêmes. Les taux de cotisation précités reposent sur un calcul théorique. Ils ne signifient pas que tous les indépendants devraient effectivement payer de tels taux. Avec l'affiliation des indépendants à une CAF, la masse salariale augmente, mais aussi le nombre d'enfants pour lesquels il faut verser des prestations. Aujourd'hui déjà, le rapport entre masse salariale et prestations déterminant pour le taux de cotisation diffère selon les CAF. Avec l'affiliation des indépendants, il variera plus ou moins selon les branches. Les taux de cotisations pour les indépendants ­ comme c'est déjà le cas actuellement pour les employeurs ­ vont varier considérablement d'une caisse à l'autre. Il faut également tenir compte de la compensation des charges entre CAF, effectuée dans certains cantons, qui a pour effet d'atténuer les différences entre les taux de cotisations. Actuellement, les taux de cotisation aux caisses cantonales de compensation pour allocations familiales sont de 1,2 à 3 %. Nous ignorons les taux de cotisation des autres caisses. Il ne nous est donc pas possible de savoir dans quelles caisses de compensation l'affiliation des indépendants modifiera le taux de cotisation.

Il n'y a de surcoût ni pour la Confédération ni pour les cantons.

5399

4.2

Mise en oeuvre

La meilleure solution pour permettre une mise en oeuvre efficiente est d'intégrer les personnes exerçant une activité lucrative indépendante dans un système uniforme.

En particulier, l'affiliation obligatoire à une caisse de compensation pour allocations familiales et l'abolition de plafonds conditionnant l'octroi des allocations rendent l'application plus facile que le système actuel, qui comporte des limites de revenu dans quatre réglementations cantonales. Les trois modifications proposées (relatives au concours de droit, à l'affiliation à une caisse et au financement) permettent de simplifier la mise en oeuvre.

5

Relation avec le droit européen

5.1

Le droit de la Communauté européenne

Dans l'Union européenne, la libre circulation des travailleurs est consacrée à l'art. 39 du traité CE. Cette libre circulation des travailleurs requiert la coordination des régimes nationaux de sécurité sociale, ce que prévoit l'art. 42 du traité CE. Cette coordination est mise en oeuvre par le Règlement du Conseil no 1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et par son Règlement d'application no 574/728. Le Règlement no 1408/71 prévoit, notamment, l'égalité de traitement entre nationaux et autres ressortissants communautaires, la conservation des droits acquis et le paiement des prestations sur le territoire communautaire.

L'accord sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et la CE implique que depuis le 1er juin 2002 la Suisse participe à ce système de coordination multilatérale.

Si le droit communautaire prévoit la coordination des régimes nationaux de sécurité sociale, il ne prévoit pas, en revanche, leur harmonisation. Les Etats membres sont libres de déterminer comme ils l'entendent la conception, le champ d'application personnel, les modalités de financement et l'organisation de leur système de sécurité sociale.

Par une recommandation du 27 juillet 1992 relative à la convergence des objectifs et politiques de protection sociale9, le Conseil invite simplement les Etats membres à développer les prestations servies aux familles, pour lesquelles la charge d'enfants est la plus lourde, par exemple en raison du nombre d'enfants et/ou de leur situation économique.

5.2

Les instruments du Conseil de l'Europe

La Charte sociale européenne du 18 octobre 1961 est le pendant de la Convention européenne des droits de l'homme pour les droits économiques et sociaux. L'art. 16

8

9

Règlements codifiés par le règlement du Conseil no 118/97, JO no L 28 du 30.1.1997, p. 1; modifiés en dernier lieu par le règlement du Parlement européen et du Conseil no 631/2004, JO no L 100 du 6.4.2004, p. 1.

JO no L 245 du 26.8.92, p. 49.

5400

de la Charte garantit le droit de la famille à une protection sociale, juridique et économique. L'art. 12 de la Charte porte sur le droit à la sécurité sociale.

La Suisse a signé la Charte le 6 mai 1976, mais le Parlement en ayant refusé la ratification en 1987, ce traité ne lie pas notre pays.

La Charte sociale européenne (révisée) du 3 mai 1996 met à jour et adapte le contenu matériel de la Charte de 1961. Elle constitue un accord distinct de la Charte sociale européenne qu'elle n'abroge pas. Les art. 12 et 16 sont repris dans la (nouvelle) Charte. La Suisse n'a pas signé cet instrument.

Le Code européen de sécurité sociale du 16 avril 1964 a été ratifié par la Suisse le 16 septembre 197710. Notre pays en a accepté notamment la partie VII relative aux prestations familiales. Le cercle des personnes protégées doit comprendre soit certaines catégories de salariés, soit certaines catégories de la population active (art. 41). Les prestations familiales versées aux personnes protégées ne peuvent pas être soumises à condition de ressources. L'art. 44 impose que la valeur totale des allocations pour enfant atteigne au moins 1,5 % du salaire d'un manoeuvre adulte masculin tel que le définit le Code, multiplié par le nombre total des enfants de tous les résidents.

Le Code européen de sécurité sociale (révisé) du 6 novembre 1990 constitue aussi un accord distinct du Code européen de sécurité sociale de 1964 qu'il n'abroge pas.

Le Code (révisé) étend certaines normes du Code de 1964 (extension du champ d'application personnel et amélioration du niveau des prestations, par exemple) et institue parallèlement une plus grande flexibilité en formulant les normes de manière à tenir compte au mieux des réglementations nationales. N'ayant été ratifié par aucun Etat, le Code (révisé) n'est pas encore entré en vigueur.

Parmi les instruments du Conseil de l'Europe, il faut encore mentionner la Recommandation du Comité des Ministres no R (92) 2 sur la généralisation des prestations familiales, aux termes de laquelle les allocations familiales devraient être accordées en faveur de tous les enfants résidant sur le territoire d'un Etat membre. Enfin, les allocations familiales au taux minimal devraient être accordées sans condition de ressources (ch. 3 et 10a de l'annexe à la recommandation).

5.3

Compatibilité avec le droit européen

L'élargissement du cercle des bénéficiaires aux personnes exerçant une activité lucrative indépendante dans la LAFam est compatible avec le droit européen déterminant pour la Suisse.

6

Constitutionnalité

Les modifications proposées se fondent sur l'art. 116, al. 2, de la Constitution, qui attribue à la Confédération la compétence de légiférer sur les allocations familiales.

10

RO 1978 1518; RS 0.831.104

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