09.022 Message relatif à la modification de la loi sur l'agriculture (Réserve au bilan destinée au financement de mesures d'accompagnement en relation avec des accords internationaux dans le domaine de l'agriculture) du 25 février 2009

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons par le présent message, en vous proposant de l'adopter, un projet de modification de la loi sur l'agriculture.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

25 février 2009

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Hans-Rudolf Merz La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2008-2910

1109

Condensé Le 14 mars 2008, le Conseil fédéral a décidé d'entamer des négociations avec l'UE au sujet d'un accord de libre-échange agroalimentaire (ALEA) et dans le domaine de la santé publique. Dans la perspective d'un tel accord et d'un éventuel aboutissement du cycle de Doha de l'OMC, il est prévu de constituer le plus tôt possible une réserve inscrite au bilan du Compte d'Etat, destinée au financement de mesures d'accompagnement (financement spécial). Les négociations en vue d'un ALEA ont été ouvertes officiellement le 4 novembre 2008 à Bruxelles.

Le présent message propose l'introduction d'un nouvel art. 19a dans la loi du 29 avril 1998 sur l'agriculture (LAgr)1. Cet article envisage, dans le cadre d'un financement spécial au sens de l'art. 53 de la loi du 7 octobre 2005 sur les finances de la Confédération (LFC)2, d'affecter les recettes douanières provenant des produits agricoles et des denrées alimentaires importés (chapitres 1 à 24 du tarif des douanes) au financement de mesures d'accompagnement. L'affectation doit intervenir en 2009 déjà et se prolonger jusqu'à la mise en oeuvre de l'ALEA et/ou d'un accord OMC. Comme il ne s'agit pas de mettre en place des mesures permanentes mais que leur terme ne peut pas encore être fixé, l'affectation est, dans un premier temps, limitée à huit ans, jusqu'en 2016.

L'affectation précoce, par un financement spécial, de moyens qui ne seront utilisés qu'ultérieurement constitue un signal soulignant la volonté d'assurer le financement de mesures d'accompagnement. L'affectation des moyens financiers précitée ne règle pas encore la question du financement de mesures d'accompagnement, conforme aux exigences du frein à l'endettement. A ce sujet, le Conseil fédéral présentera un concept dans le cadre de son message relatif à la mise en oeuvre d'au moins un des deux accords évoqués.

1 2

RS 910.1 RS 611.0

1110

Message 1

Grandes lignes du projet

1.1

Contexte

1.1.1

Accord de libre échange agroalimentaire avec l'UE (ALEA)

Le Conseil fédéral a approuvé, le 14 mars 2008, un mandat de négociations concernant un accord de libre-échange avec l'UE dans le domaine agroalimentaire (ALEA) ainsi qu'une coopération renforcée dans le domaine de la santé publique. Les négociations en vue d'un ALEA ont été ouvertes officiellement le 4 novembre 2008 à Bruxelles.

Un ALEA devrait ouvrir globalement et réciproquement les marchés des produits agricoles et des denrées alimentaires. Il devrait permettre d'éliminer les entraves au commerce tant tarifaires (droits de douane et contingents) que non tarifaires (prescriptions diverses en matière de production et d'homologation). Il ne concernerait pas seulement les matières premières issues de l'agriculture (comme le lait ou les animaux de boucherie), mais également les secteurs situés en amont et en aval de la filière. En d'autres termes, il comprendrait aussi bien les moyens de production (semences, engrais, aliments pour animaux, etc.) nécessaires à l'agriculture que les produits transformés (saucisses, yogourts, pâtes alimentaires, etc.).

L'ALEA s'inscrit de manière cohérente dans les réformes de la politique agricole menées jusqu'ici. Il vise à améliorer la compétitivité de l'agriculture suisse sur le plan international et fait partie intégrante de la politique de croissance décidée par le Conseil fédéral en avril 2008. Une ouverture face à l'UE se traduirait par une réduction des coûts de production pour l'ensemble du secteur agroalimentaire, ainsi que par de nouveaux débouchés sur le marché communautaire. Pour les consommateurs suisses, cela entraînerait une baisse des prix des denrées alimentaires. Les retombées sur l'économie seraient largement positives et se traduiraient par une augmentation durable du produit intérieur brut (PIB) de l'ordre de 0,5 %, soit d'au moins 2 milliards de francs par an selon les estimations faites en 2007. Le projet ne prévoit par contre ni la reprise de la politique agricole commune (PAC) de l'UE ni l'adhésion à l'union douanière communautaire. L'UE représente un marché de 490 millions de consommateurs qui, pour la plupart, ont des préférences et des valeurs (multifonctionnalité de l'agriculture, protection de l'environnement) similaires à celles des consommateurs suisses. Grâce à la suppression des entraves tarifaires et non tarifaires visée par un
ALEA, les exportateurs suisses auraient la possibilité de gagner des parts de marché auprès de notre principal partenaire commercial.

Tous ces effets et le contenu possible d'un accord sont présentés en détail dans le rapport en réponse au postulat 06.3401 Frick «Les effets d'un éventuel accord de libre-échange agroalimentaire sur l'agriculture et les secteurs en amont et en aval», approuvé par le Conseil fédéral le 14 mars 20083:

3

http://www.blw.admin.ch/themen/00005/00298/index.html?lang=fr

1111

4

­

Au plan fédéral, un ALEA aurait comme effet direct la suppression des droits de douane à l'importation et des subventions à l'exportation (sur les produits agricoles en provenance de l'UE ou destinés à l'UE). Déduction faite de ces dernières, cela représenterait pour la Confédération un manque à gagner de l'ordre de 425 millions de francs par an. A noter que l'ampleur du manque à gagner au moment de l'entrée en vigueur de l'ALEA varierait selon une éventuelle réduction préalable des droits de douane dans le cadre du cycle de Doha de l'OMC ou sur une base autonome, suite notamment à une augmentation des prix mondiaux des denrées importées.

­

Des incidences seraient également à prévoir au niveau de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), dans la mesure où la baisse du prix des produits alimentaires s'accompagnerait d'une modification de la structure et du volume de la consommation de la population suisse. Au final, sous l'effet cumulé de la réduction des prix et de l'augmentation du revenu disponible induites par l'ALEA, on assisterait à une augmentation des recettes de TVA de plus de 110 millions de francs par année dans l'hypothèse où les économies réalisées sur les achats alimentaires (taxés à un taux réduit) seraient consacrées avant tout à l'achat de biens et de services taxés au taux normal.

­

Comme évoqué plus haut, la mise en oeuvre d'un ALEA entraînerait, selon les simulations d'un modèle en équilibre général, une augmentation permanente du PIB d'au moins 0,5 %. Ceci constitue une estimation plutôt prudente et tient compte des conditions connues en 2007. Or, un accroissement du PIB conduit après un certain temps également à un accroissement des recettes fiscales fédérales, cantonales et communales. Cet effet de croissance se mesurerait complètement une fois la nouvelle situation d'équilibre atteinte et dépendra de l'évolution du niveau général des prix. A supposer que la phase d'adaptation en vue de l'obtention du nouvel équilibre s'étende sur dix années à compter de l'entrée en vigueur de l'ALEA, les recettes supplémentaires générées par l'effet de croissance s'élèveraient à quelque 450 millions de francs par an. Cette estimation se fonde sur les prévisions conjoncturelles du plan financier 2007­20114 et l'expérience selon laquelle tout accroissement du PIB s'accompagne d'une augmentation proportionnellement équivalente des recettes fédérales. Mais on peut s'attendre à ce que l'effet de croissance se manifeste même avant, quoique dans une moindre mesure.

­

Un ALEA impliquerait donc une surcharge budgétaire transitoire pour la Confédération pendant la phase de mise en oeuvre, tandis qu'une augmentation des recettes fédérales interviendrait à plus long terme et durablement.

­

L'ouverture des marchés représente toutefois un défi de taille pour l'agriculture. Afin de permettre aux exploitations de s'orienter vers les nouveaux marchés et de les aider à se restructurer, l'ALEA ne pourrait être mis en oeuvre que de manière progressive et devrait être complété par des mesures d'accompagnement.

Dans le plan financier, les recettes de la Confédération pour l'année 2011 sont estimées à 65 milliards de francs. L'extrapolation de l'évolution des recettes d'ici à 2021 se fonde sur l'hypothèse d'une croissance nominale à moyen terme du PIB de 3 % par année (croissance réelle 1,5 %, renchérissement 1,5 %).

1112

Parallèlement à sa décision d'entamer des négociations avec l'UE, le Conseil fédéral a décidé, le 14 mars 2008, d'élaborer un message concernant le financement des mesures d'accompagnement.

1.1.2

Négociations à l'OMC dans le Cycle de Doha

La participation de la Suisse au système commercial multilatéral est vitale pour son économie qui gagne un franc sur deux à l'exportation. Le cycle actuel de négociations à l'OMC est aussi placé sous le signe du développement. Les pays émergents, dont le secteur agricole est particulièrement compétitif, visent, à ce titre, une libéralisation importante des échanges agricoles.

Bien que les chances d'aboutir à court terme à un accord dans le cadre des négociations à l'OMC soient incertaines, on ne peut pas ignorer l'impact qu'un tel accord pourrait entraîner sur l'agriculture suisse. En raison de notre niveau de protection à la frontière très élevé, les réductions tarifaires prévues selon l'état actuel des négociations placeraient le secteur agroalimentaire suisse devant de grands défis. En vue d'assurer une transition supportable au niveau économique et social, des mesures d'accompagnement seraient nécessaires, car l'effet des réductions tarifaires sur le revenu agricole pourrait être d'un ordre de grandeur similaire à celui consécutif à l'ALEA (voir ch. 1.3). En ce qui concerne les conséquences difficiles à court terme pour le secteur agricole de l'aboutissement d'un accord OMC, le Conseil fédéral, dans sa réponse aux ip. Walter (07.3400) et Joder (08.3132), a annoncé l'examen de mesures d'accompagnement limitées dans le temps et d'options de financement adéquates.

C'est pourquoi les mesures d'accompagnement nécessaires en cas de mise en oeuvre d'un accord OMC doivent pouvoir être financées au moyen du même instrument. La formulation de la nouvelle base légale doit tenir compte de cet impératif.

1.2

Nécessité de mettre en place des mesures d'accompagnement

A l'heure actuelle, on ne peut pas encore savoir lequel des deux accords pourrait entrer en vigueur en premier. Les effets des deux accords sur le revenu sectoriel de l'agriculture ne sont pas cumulatifs. En effet, si la mise en oeuvre des accords OMC précède l'application de l'ALEA, les effets supplémentaires de l'ALEA seront faibles et ne nécessiteront en principe pas de mesures d'accompagnent supplémentaires. Il en irait de même si la mise en oeuvre de l'ALEA devait précéder celle des accords OMC. Dans les deux cas, l'ouverture du marché entraînerait une baisse du revenu dans l'agriculture en raison du rapprochement des prix pratiqués en Suisse de ceux des produits importés. Par comparaison avec une évolution du secteur agricole telle qu'elle se poursuivrait sans ouverture politique vers l'extérieur (recul constant du revenu sectoriel agricole de 2,5 % par an tel qu'on l'a observé jusqu'ici), on observerait pendant une période d'adaptation de plusieurs années une réduction cumulée supplémentaire du revenu de l'ordre de plusieurs milliards de francs.

L'importance effective de ce manque à gagner dépend de la capacité de l'agriculture à saisir les nouvelles opportunités économiques (potentiel de réduction des coûts et possibilités supplémentaires d'exportation, gains de productivité, spécialisation dans 1113

des domaines à forte valeur ajoutée) et de l'importance de l'écart entre les prix au moment de l'entrée en vigueur de l'accord. Pour faciliter la transition vers une nouvelle situation de marché et rendre socialement supportables les adaptations nécessaires, il faut non seulement des délais transitoires négociables, mais aussi des mesures d'accompagnement autonomes et appropriées.

1.2.1

Groupe de travail «Mesures d'accompagnement»

Lors de l'approbation du mandat de négociations en vue d'un ALEA, le Conseil fédéral a reconnu la nécessité de mettre en place des mesures d'accompagnement.

Dans ce but, il a décidé que le Département fédéral de l'économie (DFE), en collaboration avec le Département fédéral des finances, devait proposer des mesures d'accompagnement concrètes avec le concours d'experts externes à l'administration et des représentants des milieux concernés.

Le DFE a institué le 8 avril 2008 un groupe de travail chargé de concevoir des mesures concrètes destinées à soutenir les agriculteurs et éventuellement d'autres entreprises concernées par l'ALEA lors de la transition vers la nouvelle situation du marché. Le groupe de travail réunit les délégués de 15 organisations représentatives de l'ensemble de la filière agroalimentaire et de deux cantons.

Conformément au mandat du DFE, les mesures d'accompagnement visent, d'une part, à permettre aux acteurs qui poursuivent leurs activités dans le secteur agroalimentaire de maîtriser la transition vers des marchés ouverts et d'y faire valoir leurs atouts. Les acteurs concernés doivent pouvoir exploiter rapidement les nouveaux potentiels des marchés et créer des structures aussi optimales que possible. L'autre objectif des mesures d'accompagnement est de faciliter la reconversion des chefs d'exploitation qui souhaitent quitter le secteur agricole et de leur permettre de faire des investissements dans une nouvelle activité.

Le groupe de travail doit se prononcer sur la forme, la durée, le moment de la mise en oeuvre et une éventuelle différenciation des mesures selon les acteurs. Il convient également d'examiner si les instruments actuels de la politique agricole ou d'autres domaines politiques doivent être adaptés et, le cas échéant, selon quelles modalités.

Par contre, il n'est prévu de fixer les ressources à mettre en oeuvre qu'au moment de l'entrée en vigueur de l'accord. Le groupe de travail doit élaborer un rapport à l'intention du DFE d'ici mi-2009.

1.2.2

Interventions parlementaires

Le Conseil fédéral s'est exprimé sur la nécessité de mettre en place des mesures d'accompagnement en cas de conclusion d'un ALEA et du cycle de Doha dans sa réponse à plusieurs interventions parlementaires: 06.3121 ­ Ip. Müller Walter Accord de libre-échange agricole avec l'UE. Conséquences 06.3401 ­ Po. Frick Accord de libre-échange Suisse/UE dans le domaine agroalimentaire. Entamer des négociations sur des bases claires: Le Conseil fédéral a approuvé, le 14 mars 2008, le rapport en réponse au po. Frick

1114

07.3400 ­ Ip. Walter Hansjörg Négociations OMC. Incidences sur l'agriculture 07.3527 ­ Mo. Fehr Mario Accord de libre-échange dans le domaine de l'agriculture et des produits alimentaires 07.3474 ­ Ip. Schibli Perspectives ruineuses pour l'agriculture suisse 07.3824 ­ Ip. Müller Walter Culture maraîchère suisse. Créer un cadre concurrentiel 08.3089 ­ Ip. Häberli-Koller Brigitte Libre-échange agricole. Assurer l'avenir des cultures maraîchères suisses 08.3098 ­ Ip. Kunz Josef Libre-échange avec l'Union européenne dans le secteur agricole 08.3132 ­ Ip. Joder Négociations à l'OMC et agriculture 08.3857 ­ Ip. du Groupe UDC Accord de libre-échange dans le secteur agroalimentaire

1.3

Estimation des besoins financiers pour les mesures d'accompagnement

Le montant des moyens financiers à investir dans les mesures d'accompagnement en faveur de l'agriculture peut être estimé sur la base du recul escompté du revenu sectoriel agricole. Concrètement, la part de la réduction du revenu déterminante est celle qui ne peut pas être compensée par des gains de productivité ni par une évolution structurelle socialement acceptable. Le revenu sectoriel attendu à la suite de l'un ou l'autre accord dépend tant de l'évolution des prix et des coûts que du résultat des négociations et ne peut donc être calculé de manière fiable que peu de temps avant leur entrée en vigueur. Afin de pouvoir estimer à l'avance l'ordre de grandeur de cette perte de gains, la station de recherche Agroscope Reckenholz Tänikon (ART) a effectué des calculs prospectifs à l'aide du modèle dynamique SILAS5. Les années 2002 à 2004 ont servi de base à l'établissement des prévisions. Quatre scénarios ont été étudiés sur cette base: ­

scénario de référence PA 2011

­

OMC sans ALEA

­

ALEA sans OMC

­

ALEA et OMC parallèlement

Le revenu sectoriel après la mise en oeuvre de la Politique agricole 2011 sert de scénario de référence. Entre 2004 et 2011, le revenu sectoriel recule, passant d'environ 3 à 2,5 milliards de francs, soit une réduction annuelle de 2,2 %.

Concernant les trois scénarios de politique commerciale extérieure, l'OFAG a estimé l'évolution des prix jusqu'en 2015, selon le type d'accord mis en oeuvre. Il s'avère, aussi bien en cas de conclusion d'un accord à l'OMC que dans celui d'un ALEA, que le revenu sectoriel agricole se trouverait à peu près au même niveau immédiatement après la suppression des droits de douane. Il convient toutefois de noter que par comparaison avec le scénario OMC, le scénario ALEA donnerait à l'agriculture 5

Concernant le modèle, voir Mack G. und Flury C. (2006): Auswirkungen der Agrarpolitik 2011, Tänikon.

1115

et à l'industrie alimentaire suisses le libre accès intégral au marché intérieur européen. Les segments compétitifs du secteur agroalimentaire auraient ainsi la possibilité de compenser, au moins en partie, par une extension de leurs ventes à l'exportation les baisses de prix et les pertes de parts de marché en Suisse liées à la pression accrue des importations. Un accord à l'OMC n'améliorerait pas l'accès aux marchés étrangers et n'ouvrirait donc pas les mêmes perspectives à long terme qu'un ALEA.

En cas de mise en oeuvre simultanée des deux accords, la baisse de revenu serait légèrement plus marquée, parce que les prix baisseraient également dans l'espace européen suite à la conclusion de l'accord OMC. La régression du revenu sectoriel annuel, de 2011 à 2015, se situe entre 750 et 900 millions de francs, en fonction du scénario. Les résultats pour l'année cible ne varient que de façon négligeable, que la mise en oeuvre des accords s'étale sur une courte ou une assez longue période. Ces chiffres doivent être considérés comme des estimations moyennes. Les résultats dépendent en effet fortement des hypothèses retenues en matière d'évolution des prix et des coûts. Les pronostics concernant l'évolution des prix des produits agricoles sur les marchés mondial et communautaire, le cours des changes, les prix de l'énergie et d'autres moyens de production comportent des incertitudes. Une analyse de sensitivité a été réalisée dans le cadre de calculs précédents. Une variation de +/­10 % des prix à la production a entraîné une modification du revenu sectoriel de +/­300 millions de francs. Dans cette analyse, on n'a toutefois pas tenu compte du fait que les variations de prix et de coûts sont la plupart du temps parallèles et se neutralisent en partie.

Afin de pouvoir évaluer les moyens financiers à investir dans les mesures d'accompagnement, on part du principe que même en cas de réformes internes supplémentaires après la mise en oeuvre de la Politique agricole 2011 et sans la conclusion des deux accords internationaux en question, l'agriculture peut absorber sans mesures d'accompagnement une réduction du revenu sectoriel de l'ordre de 2,5 % par an. A ce rythme, une adaptation structurelle socialement acceptable resterait possible.

1116

Graphique 1 Calcul schématique du manque à gagner résultant d'un accord international

Tre nd du se cte ur agri cole sa ns ouve rtu re extérie ure (trend PA: -2,5%) Tre nd ave c a ccord in te rnatio nal , sans mesure s d'acco mpag neme nt Ma nq ue à ga gne r

Cette évolution du revenu sectoriel considérée comme socialement supportable à moyen terme (trend PA) sert de référence. Selon les estimations SILAS, les scénarios de politique commerciale extérieure réduiraient le revenu sectoriel agricole de plus de 2,5 % par an. Le manque à gagner résulte de la somme des différences annuelles entre le trend PA et l'évolution du revenu pronostiquée en cas de réalisation des scénarios de politique extérieure, sans prendre en compte des mesures d'accompagnement.

En ce qui concerne le déroulement chronologique des ouvertures de frontières, deux scénarios ont été étudiés sur la base du modèle SILAS. Ils sont fondés sur l'hypothèse d'une période d'adaptation de cinq ans. Dans le premier scénario, la mise en oeuvre de l'accord OMC commence en 2011. Elle est suivie un an plus tard par l'élimination progressive de la protection à la frontière par rapport à l'UE. Dans le second scénario, l'ALEA est mis en oeuvre à partir de 2013 (retard éventuel en raison par exemple de négociations plus longues ou d'un référendum) et l'accord OMC à partir de 2014.

Tableau 1 Scénarios de mise en oeuvre des accords internationaux Mise en oeuvre

Début

Fin

OMC

ALEA

OMC

ALEA

Scénario 1

2011

2012

2016

2017

Scénario 2

2014

2013

2019

2018

1117

Etant donné que le scénario de référence (trend PA 2011) table sur une diminution continue du revenu sectoriel, le manque à gagner se réduit si les accords sont mis en oeuvre plus tard. Dans le premier scénario, la réduction du soutien commence à un niveau plus élevé et exerce donc une pression plus forte sur le revenu sectoriel jusqu'à la fin de la période transitoire. A partir de 2019, il n'y a plus de différence de revenu entre les deux scénarios par rapport au trend PA.

Graphique 2 Montants du manque à gagner pour les deux scénarios chronologiques

700 Scénario 1: env. 5 mia. de fr.

Scénario 2: env. 3,6 mia. de fr.

600

mio. de fr.

500 400 300 200 100 0 2011

2013

2015

2017

2019

2021

2023

2025

2027

L'ampleur de la fourchette des pertes de gain possibles ne dépend pas seulement du déroulement chronologique, mais d'autres facteurs encore. Dans l'hypothèse optimiste, le revenu sectoriel serait, après la mise en oeuvre de l'un ou l'autre accord (année cible), de 100 millions de francs plus élevé en raison d'une évolution favorable des prix, des coûts et d'autres facteurs au-delà de toute attente. Par contre, selon un scénario pessimiste, le revenu sectoriel pourrait être de 100 millions de francs inférieur à l'estimation actuelle. Les répercussions sur les deux scénarios sont présentées dans le tableau 2.

Tableau 2 Variation du manque à gagner selon le revenu sectoriel de l'année cible et selon le scénario Variation du revenu sectoriel l'année cible

+ 100 mio. de fr.

­ 100 mio. de fr.

Manque à gagner scénario 1

3,6 mia. de fr.

6,7 mia. de fr.

Manque à gagner scénario 2

2,4 mia. de fr.

5,1 mia. de fr.

1118

L'ampleur des moyens financiers à engager pour des mesures d'accompagnement ne peut être arrêtée avant la conclusion des accords, vu qu'elle dépendra à la fois des accords eux-mêmes (par ex. des délais de transition, des modalités définitives de réduction de la protection douanière dans le cas de l'OMC), du niveau des prix lors de la mise en oeuvre et du type de mesures d'accompagnement retenues. A ce sujet, plusieurs concepts prévoyant un équilibre différent entre les aides à l'adaptation pour les actifs et l'appui à la réorientation hors du secteur agricole sont à l'examen.

Selon la focalisation des mesures, d'autres approches pour calculer les moyens financiers nécessaires sont envisageables. Le Conseil fédéral, lors de sa décision du 14 mars 2008, a annoncé une fourchette de 3 à 6 milliards de francs pour les mesures d'accompagnement. Le présent message vise en premier lieu à créer la base légale pour réserver une partie des moyens nécessaires à financer ces mesures. Il n'y a pas lieu, à ce stade, de préciser davantage le montant à investir dans des mesures d'accompagnement, ni les instruments retenus.

1.4

Conditions-cadre et options de financement

La mise en oeuvre socialement acceptable d'un ALEA ou d'un nouvel accord OMC et la création de conditions de départ favorables compte tenu du nouveau contexte requièrent des mesures d'accompagnement. Leur financement devrait, pour des raisons de politique budgétaire, vraisemblablement s'étendre sur plusieurs années.

Parallèlement aux conditions-cadre de la politique budgétaire, diverses options de financement sont exposées et évaluées ci-après.

1.4.1

Objectifs de politique budgétaire de la Confédération

Les réflexions concernant le financement de mesures d'accompagnement de l'ordre de plusieurs milliards de francs se fondent sur la stratégie de politique budgétaire du Conseil fédéral et sur des principes généraux de politique financière. L'objectif prioritaire de la politique du Conseil fédéral est d'équilibrer le budget de manière durable. Les budgets de la Confédération doivent être équilibrés à moyen terme, c'est-à-dire sur l'ensemble d'un cycle conjoncturel, afin d'éviter les déficits structurels. La stabilisation de l'endettement nominal de la Confédération et la stabilisation de la quote-part de l'Etat constituent d'autres objectifs centraux.

Le frein à l'endettement est le principal instrument de régulation du budget de l'Etat.

Il permet de garantir que les dépenses ordinaires ne dépassent pas les recettes ordinaires sur un cycle conjoncturel et assure ainsi l'équilibre financier de la Confédération. La stabilisation de l'endettement nominal, qui est l'objectif déclaré du frein à l'endettement, nécessitait, dans les années passées, non seulement de respecter les exigences du frein à l'endettement mais aussi de dégager des excédents structurels annuels. C'était le seul moyen de garantir que les dépenses extraordinaires élevées, comme celles de 2008 notamment, n'augmentent pas la dette de la Confédération.

Le message du 19 septembre 2008 sur l'introduction d'une règle complémentaire au frein à l'endettement6 a pour but d'ancrer institutionnellement l'objectif de stabilisation de la dette tenant aussi compte du budget extraordinaire. Il s'agit de compenser 6

FF 2008 7693

1119

les déficits du budget extraordinaire par le biais d'excédents du budget ordinaire sur une période de six ans. Un nouveau compte d'amortissement servira d'instrument de régulation. Ce compte englobera uniquement les recettes et les dépenses extraordinaires. Si les dépenses extraordinaires dépassent les recettes extraordinaires, le découvert devra être éliminé par des excédents dans le budget ordinaire sur les six exercices comptables suivants. Cette nouvelle règle ne doit ni remplacer ni modifier le frein à l'endettement, mais le compléter.

La quote-part de l'Etat traduit les dépenses de la Confédération en pour-cent du produit intérieur brut (PIB) nominal. Pour assurer l'objectif de stabilisation de la quote-part de l'Etat, la croissance des dépenses ne devra plus dépasser la croissance du PIB prévue à moyen terme. Les mesures d'abandon des tâches et les réformes structurelles nécessaires devront être mises en oeuvre dans le cadre de l'examen des tâches de la Confédération décidé par le Conseil fédéral.

1.4.2

Options de financement des mesures d'accompagnement

1.4.2.1

Budget ordinaire de la Confédération

Compte tenu des objectifs de la politique budgétaire du Conseil fédéral, les mesures d'accompagnement doivent en principe être financées par le budget ordinaire en respect du frein à l'endettement. Un financement extraordinaire basé sur un relèvement du plafond des dépenses (art. 15, al. 1, LFC) est limité aux cas où des événements extraordinaires échappant au contrôle de la Confédération l'exigent, ou que des adaptations du modèle comptable ou des concentrations de paiements liées au système comptable le requièrent. La loi impose donc des limites à ce type de financement. La condition préalable, à savoir le caractère extraordinaire et le caractère non-planifiable des dépenses, n'est pas remplie dans le cas des mesures d'accompagnement. Aussi bien dans le cas d'un ALEA que dans celui d'un accord à l'OMC, la politique est en mesure de maîtriser l'envergure des besoins financiers nécessaires, ainsi que l'aménagement concret et la durée des mesures d'accompagnement de manière précise. Dans cette optique, le Conseil fédéral considère que d'un point de vue juridique les conditions d'un financement extraordinaire ne sont pas réunies.

Sous l'angle de la politique agricole, la mise en oeuvre rapide des mesures d'accompagnement directement après l'entrée en vigueur d'un ALEA présenterait certains avantages, mais elle s'avérerait plutôt problématique sous celui de la politique budgétaire. Compte tenu des dispositions du frein à l'endettement, il est difficile de couvrir sur la même durée des besoins financiers de l'ordre de plusieurs milliards de francs auxquels il faut faire face sur une courte période. Pour ne pas compliquer de façon excessive l'élaboration future du budget et du plan financier et l'exécution des tâches de la Confédération, il faudrait répartir sur plusieurs années les dépenses de la Confédération pour les mesures d'accompagnement.

Si le budget fédéral ne présente pas l'excédent nécessaire, deux options de financement sont envisageables pour les dépenses au titre de mesures d'accompagnement.

Du côté des dépenses, les surcoûts pourraient être compensés dans les rubriques relatives aux divers groupes de tâches de la Confédération. Il existe d'autre part la possibilité d'injecter de nouveaux moyens dans le budget fédéral par le biais de recettes supplémentaires. Le plafond des dépenses de la Confédération fixé dans le 1120

cadre du frein à l'endettement serait ainsi relevé, ce qui aurait pour conséquence d'induire des recettes supplémentaires pour le versement des mesures d'accompagnement.

Dans le cas présent, le Conseil fédéral estime judicieux, pour des considérations de politique financière et de politique économique, d'envisager une combinaison entre réduction des dépenses et accroissement des recettes. A ce stade, l'aménagement concret des mesures doit rester ouvert. A cet effet, le Conseil fédéral ne présentera un concept concret de financement à l'intention des Chambres fédérales que dans le cadre du message relatif à la mise en oeuvre des accords internationaux (ALEA et/ou OMC). De plus, compte tenu d'une dégradation importante de la situation économique à laquelle on s'attend ces prochaines années, il est trop tôt de tracer les grandes lignes du plan de financement.

1.4.2.2

Constitution d'un fonds destiné aux mesures d'accompagnement

Outre le financement extraordinaire, pour lequel les exigences énumérées au ch. 1.4.2.1 ne sont pas satisfaites, la possibilité de constituer un fonds spécial au sens de l'art. 52 LFC et de financer des mesures d'accompagnement par le biais d'un tel fonds a également été examinée. La création d'un fonds spécial permettrait un préfinancement des dépenses. Avant même l'entrée en vigueur de l'AELA ou d'un accord OMC, on pourrait par exemple déjà allouer au fonds spécial une contribution annuelle provenant des moyens financiers généraux de la Confédération d'un montant égal aux recettes douanières réalisées sur les produits agricoles. Durant les années d'alimentation du fonds, le budget général de la Confédération disposerait de moyens financiers réduits en proportion. Pour que les exigences en matière de frein à l'endettement soient respectées, des compensations dans différentes tâches de la Confédération devraient être réalisées. Ainsi, d'autres domaines d'activités en feraient les frais à un moment où l'aboutissement d'un accord ALEA/OMC n'est pas encore assuré. Dans le contexte de l'actuelle crise financière et de la situation économique qui se dégrade rapidement et nécessite la mise en place de diverses mesures de stabilisation, le Conseil fédéral considère, également pour des raisons conjoncturelles, qu'il n'est pas indiqué de soustraire au budget fédéral d'importants moyens financiers dans le but d'alimenter un fonds. De plus, il est opposé à la création d'un tel fonds spécial car, au vu des expériences faites jusqu'à présent, ces fonds restreignent trop fortement la marge de manoeuvre de la Confédération dans sa politique financière. Comme l'utilisation des moyens financés par le biais d'un fonds spécial n'est plus soumise à l'approbation des Chambres fédérales, ce genre de réglementation incite, selon les expériences, à une consommation exagérée de ressources. Le risque que le fonds spécial soit maintenu au-delà de son affectation initiale et soit utilisé pour le financement d'autres tâches n'est pas négligeable. Il s'agit d'éviter de perpétuer de tels financements spéciaux en dehors du budget, eu égard notamment à la souveraineté des Chambres fédérales en matière budgétaire. Ces fonds nuisent en outre à la transparence et au pilotage des finances fédérales. Pour les raisons évoquées, le Conseil fédéral rejette l'idée de constituer un fonds spécial pour financer les mesures d'accompagnement.

1121

1.4.2.3

Réserve au bilan au moyen d'un financement spécial

Une autre option est ouverte, à savoir l'instauration d'un financement spécial. Selon l'art. 53 LFC, on entend par financement spécial l'affectation obligatoire de recettes à la réalisation d'une tâche définie. Selon la LFC, la mise sur pied d'un tel financement requiert une base légale. Cet instrument permettrait l'affectation des recettes des droits de douane prélevés sur les produits agricoles aux mesures d'accompagnement avant l'entrée en vigueur d'un ALEA ou d'un nouvel accord à l'OMC.

Les moyens affectés au financement spécial, dans le cadre du budget fédéral, ne sont cependant pas directement disponibles pour le financement des mesures d'accompagnement. En effet, le financement spécial ne correspond pas à un fonds spécial hors du budget de la Confédération, qui servirait en quelque sorte à mettre de côté les moyens financiers nécessaires. Le Conseil fédéral écarte en effet cette solution pour les raisons mentionnées au ch. 1.4.2.3. Selon la loi sur les finances de la Confédération, un financement spécial correspond plutôt à la mise en réserve de recettes dans un but clairement défini. Si, comme dans le cas des mesures d'accompagnement, des recettes douanières sur les produits agricoles sont affectées à un usage précis, cela signifie que les montants réservés dans le bilan de la Confédération s'accumulent au fil des années dans un fonds à affectation spéciale sous les rubriques Capital propre ou Capitaux de tiers. Le montant de l'affectation prévue se réduit ensuite dès que les paiements au titre des mesures d'accompagnement commencent. Dans ce contexte, lors de la création de l'affectation, les moyens sont seulement «inscrits». La question du financement annuel des mesures d'accompagnement n'est donc pas automatiquement résolue. Ce financement doit en tout cas être garanti dans le cadre de la mise au point du budget et du plan financier, dans le respect du frein à l'endettement.

Conformément aux principes relatifs à la présentation des comptes de la Confédération, les financements spéciaux doivent être portés au passif du bilan en tant que fonds affectés à un usage précis sous les rubriques Capital propre ou Capitaux de tiers.

Les moyens à affectation spéciale doivent être portés au bilan sous le capital propre, si, en temps voulu, la base légale permet une certaine latitude en ce qui
concerne le type, l'étendue et le moment du versement des mesures d'accompagnement. Les financements spéciaux inscrits sous le capital propre ont le caractère d'une réserve à affectation spéciale. La constitution et aussi la variation annuelle de ces fonds, dits fonds à affectation spéciale, ne sont pas comptabilisées dans le compte de résultat, mais publiées dans le justificatif des fonds propres du compte d'Etat. Pour constituer le financement spécial, il ne serait donc pas nécessaire d'allouer des crédits dans le compte de résultat lors de l'établissement du budget annuel.

Si, par contre, le législateur envisage de régler dans le détail la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement et si aucune marge de manoeuvre ne subsiste concernant le type de versement et la date à laquelle ce versement doit intervenir, il y aurait lieu d'inscrire sous les capitaux de tiers les moyens à affectation spéciale. Contrairement à une imputation aux fonds propres, l'inscription au bilan sous la rubrique Capitaux de tiers aurait pour effet de grever le compte de résultat d'une dépense neutre en termes de financement. Au moment du paiement des mesures d'accompagnement, le compte de résultat serait crédité en contrepartie d'une recette équivalente neutre correspondant en termes de financement, et le montant des engagements de la Confédération s'en trouverait réduit dans la même proportion.

1122

Par conséquent, la constitution d'un financement spécial ne nécessite que des écritures au bilan (capital propre) ou des décisions d'octroi de crédits sans incidence financière. Contrairement à un fonds spécial classique, il ne s'agit pas d'une caisse alimentée avec des moyens financiers. Les comptes financiers de la Confédération et les effets relatifs au frein à l'endettement ne sont pas concernés par la constitution du financement spécial.

Si, à l'issue d'un programme de soutien à l'agriculture, il devait subsister un montant résiduel dans le financement spécial ou si les moyens n'étaient pas nécessaires, faute d'accord, le Conseil fédéral pourrait libérer les moyens à affectation spéciale restants dans le bilan de la Confédération pour financer les tâches générales de la Confédération. L'inscription au bilan sous les fonds propres pourrait être supprimée par une écriture comptable au bilan. Dans le cas d'une comptabilisation sous les capitaux de tiers, il serait nécessaire de procéder à une comptabilisation neutre par l'intermédiaire du compte de résultat, par analogie avec la constitution du poste sous la rubrique Capitaux de tiers.

A l'heure actuelle, il n'est pas possible de se prononcer clairement sur l'étendue et l'aménagement des mesures d'accompagnement ainsi que sur le moment de leur mise en oeuvre. Par conséquent, il y a lieu de procéder à l'inscription au bilan sous le capital propre, avant la ratification de l'accord et des arrêtés relatifs aux mesures d'accompagnement. Ainsi, par analogie au financement spécial «Circulation routière», un financement spécial «Mesures d'accompagnement» serait constitué dans le capital propre de la Confédération. Dans le cas du financement spécial pour la circulation routière, des recettes fédérales (une partie de l'impôt sur les huiles minérales et les recettes de la vignette pour l'utilisation des routes nationales) sont attribuées par la voie budgétaire ordinaire à un fonds à affectation spéciale du capital propre.

1.4.3

Conclusion

Afin de répondre aux objectifs supérieurs de la politique financière quant à l'équilibre du budget de la Confédération et à la stabilisation de l'endettement, il est envisagé de financer les mesures d'accompagnement même à hauteur de plusieurs milliards de francs par l'intermédiaire du budget ordinaire. Cela dit, ces charges devront être réparties sur plusieurs années pour respecter les prescriptions du frein à l'endettement. Pour des raisons juridiques, le coût des mesures d'accompagnement ne pourra pas être assimilé à une dépense extraordinaire.

Comme le recours à un financement spécial au sens de l'art. 53 FLC contribue à donner un signal politique clair dès le début des négociations en vue d'un ALEA et avant la mise en oeuvre d'un nouvel accord à l'OMC, le Conseil fédéral se prononce pour la constitution d'une réserve au bilan dans le but de préparer le financement de mesures d'accompagnement.

1123

Dans un second message, le Conseil fédéral soumettra au Parlement un concept de financement qui respecte les exigences du frein à l'endettement. Il y aura lieu d'examiner quelles mesures en matière de réduction des dépenses et d'augmentation des recettes seront nécessaires pour pouvoir utiliser les moyens affectés, réservés au bilan, et les verser par l'intermédiaire du compte financier de la Confédération.

1.5

Mise en réserve des recettes douanières sur les produits agricoles et alimentaires importés

1.5.1

Affectation des recettes douanières

En raison de la forte réduction de la protection douanière des produits agricoles, découlant d'un ALEA et/ou d'un nouvel accord OMC, les recettes douanières sur les produits agricoles diminueront nettement. Le budget fédéral doit donc, à moyen terme, se préparer à un niveau de dépenses plus bas. Mieux on arrivera à anticiper ce développement, plus grande sera la marge de manoeuvre pour le financement des mesures d'accompagnement. Il est proposé de réserver à une affectation spéciale des moyens à hauteur des recettes douanières sur l'importation de produits agricoles et de denrées alimentaires des années 2009 à 2016. Cette réserve au bilan augmente donc chaque année d'un montant correspondant aux recettes douanières. L'alimentation de la réserve au bilan après 2016 nécessiterait une adaptation de la loi.

Comme mentionné précédemment, ces montants réservés seront inscrits séparément au bilan de la Confédération. Le frein à l'endettement ne s'applique pas dans le cas d'un financement spécial (cf. ch. 1.4). Cela n'affecte pas la mise en réserve des moyens financiers. Par contre, les dépenses devront être compensées lors du paiement des mesures d'accompagnement.

1.5.2

Effets de l'ALEA et d'un accord à l'OMC sur les recettes douanières

Le tableau 3 donne une vue d'ensemble des recettes douanières agricoles sur la moyenne des années 2006 et 2007. Il s'agit de recettes nettes, qui tiennent compte des remboursements aux entreprises prévus dans la loi du 13 décembre 1974 sur l'importation et l'exportation de produits agricoles transformés7 et du trafic de perfectionnement actif selon l'art. 12 de la loi du 18 mars 2005 sur les douanes8.

7 8

RS 632.111.72 RS 631.0

1124

Tableau 3 Recettes douanières agricoles nettes sur la moyenne des années 2006 et 2007 et réduction estimée suite à un accord OMC9 (CHF/an) Recettes douanières nettes après restitutions pour trafic de perfectionnement et revers

Pertes de recettes en cas d'accord OMC (base actuelle de négociation)

22 374 801 17 851 082 2 871 978 643 979 45 529 580 48 602 9 637 561

­ 14 102 705 ­ 6 930 232 ­ 1 244 022 ­ 371 923 ­ 23 503 775 ­ 18 059 ­ 5 319 934

98 957 581

­ 51 490 649

121 388 749 67 439 059 26 773 738 21 014 389 188 684 107 189 635 88 732 601

­ 76 268 942 ­ 36 096 065 ­ 11 089 565 ­ 13 209 793 ­ 96 903 626 ­ 79 460 ­ 49 157 861

Somme UE

514 222 277

­ 282 805 312

Total

613 179 858

­ 334 295 961

Provenance des produits importés UE/hors UE

Secteur

Hors UE

Grandes cultures Viandes et oeufs Produits agricoles transformés Lait et produits laitiers Cultures spéciales et viticulture Elevage Autres produits (non attribués)

Somme hors UE UE

Grandes cultures Viandes et oeufs Produits agricoles transformés Lait et produits laitiers Cultures spéciales et viticulture Elevage Autres produits (non attribués)

Source: Office fédéral de l'agriculture (OFAG) et Administration fédérale des douanes (AFD)

Les recettes douanières ont été ventilées par secteur de production. Elles sont prélevées sur les produits importés de l'Union européenne et de pays hors de l'UE. Dans la colonne «Recettes douanières nettes» figurent les recettes douanières prélevées annuellement sur la base d'une moyenne des années 2006 et 2007. Elles se montent à 514 millions de francs sur les produits en provenance de l'UE et à 99 millions de francs sur les produits en provenance des pays hors UE, pour un total de 613 millions de francs.

Dans la colonne «Pertes de recettes en cas d'accord OMC» figurent les pertes de recettes douanières estimées sur la base des discussions en cours à l'OMC (projet de modalités de l'ambassadeur Crawford Falconer du 19 juillet 2008). Il a été appliqué aux «Recettes douanières nettes» la formule de réduction des droits de douane actuellement sur la table des négociations. Les pertes douanières se montent à 9

Définition des produits agricoles selon l'OMC: positions tarifaires des chap. 1 à 24, à l'exception des numéros 03 (poissons), 0509 (éponges), 1504 (graisses et huiles de mammifères marins), 1603 à 1605 (préparations à base de poissons) 2301.20 (farines, poudres et agglomérés de poissons); les numéros suivants des chap. 25 à 97: 2905.43/44 (mannitol, sorbitol), 3301 (huiles essentielles), 3501 à 3505 (caséines, albumines, gélatines, pectines, dextrines), 3809.10 (différentes préparations à base d'amidon), 3823.70 (alcools gras techniques), 4101 à 4103 (peaux et pelleteries à l'état brut), 4301 (fourrures à l'état brut), 5001 à 5003 (soie grège, déchets et chutes de soie, cocons), 5101 à 5103 (laine, poils d'animaux, ni cardés, ni peignés, déchets et chutes), 5201 à 5203 (coton, au plus cardé et peigné, déchets), 5301 (lin) et 5302 (chanvre)

1125

51 millions de francs sur les marchandises en provenance des pays hors UE et à 283 millions de francs sur les produits en provenance de l'UE. La perte totale se monte à 334 millions de francs, soit à environ 54 % des droits de douane actuels.

Ce calcul ne tient pas compte de la revendication des pays exportateurs de supprimer complètement les droits de douane à l'intérieur des contingents OMC. Ce point est encore ouvert à ce stade de la négociation. Si une telle obligation devait figurer dans l'accord final, il faudrait compter avec environ 100 millions de francs de pertes supplémentaires, soit 441 millions de francs ou 72 % des droits de douane actuels.

Le tableau 4 met en évidence l'impact sur les recettes douanières des décisions prises dans le cadre de la Politique agricole 2011 et de l'accord agricole CH-UE du 21 juin 1999. Les baisses attendues pour les années 2008 et 2009 sont dues à la diminution des droits de douane sur les céréales et les fourrages importés et à la dernière étape de libéralisation des échanges de fromages avec l'UE.

Tableau 4 Baisse des recettes douanières suite à la mise en oeuvre de la PA 2011 et de l'accord agricole CH-UE Année

Moyenne 06­07 (mio.)

2008 (mio.)

2009 (mio.)

2010 (mio.)

2011 (mio.)

Provenance UE Provenance hors UE

514 99

492 95

465 90

465 90

465 90

Total

613

587

555

555

555

Il n'est pas possible, à ce stade, de déterminer si l'ALEA déploiera ses effets avant l'aboutissement des négociations à l'OMC ou vice-versa. C'est pourquoi deux scénarios ont été retenus à titre d'illustration (cf. ch. 1.3).

Le premier scénario voit démarrer la mise en oeuvre des accords de l'OMC en 2011 et l'ALEA en 2012, la période de transition étant dans les deux cas de cinq ans. Le second scénario prévoit la mise en oeuvre de l'ALEA en 2013 et celle des accords de l'OMC en 2014, la période de transition étant, là aussi, de cinq ans. Par rapport au scénario 1, le scénario 2 inverse la séquence des accords. Il décale également dans le temps le déploiement des effets, en démarrant plus tard.

Avant la mise en oeuvre de l'ALEA et des accords de l'OMC, selon les scénarios 1 et 2, les recettes douanières se montent à 555 millions de francs (Tableau 4). Une baisse linéaire des droits de douane a été appliquée sur une période de transition de 5 ans, les quantités importées restant identiques. Le plancher est atteint le 1er janvier de la sixième année. Les droits de douane sur les produits en provenance de l'UE sont progressivement ramenés à zéro. Les droits de douane sur les produits en provenance des pays hors UE se voient appliquer par étapes les réductions prévues dans le cadre de l'OMC. Lorsque l'ALEA et les accords de l'OMC déploient pleinement leurs effets, les droits de douane prélevés sur les produits agricoles et alimentaires ne se montent plus qu'à 42 millions de francs, soit environ 8 % des droits de douane prélevés avant la mise en oeuvre des accords.

Les montants finaux sont les mêmes dans le scénario 2 que dans le scénario 1, à la seule différence que le plancher est atteint deux ans plus tard.Le graphique 3 montre la baisse prévue des recettes douanières selon le scénario 1. Le graphique 4 montre la baisse prévue des recettes douanières selon le scénario 2.

1126

Graphique 3 Diminution des recettes douanières agricoles nettes selon le scénario 1 600

500

400 Hors UE

300

UE

millions CHF/an 200

100

0 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

NB. Les droits de douane prélevés sur les produits en provenance de l'UE subissent une baisse en 2011 déjà, suite à l'entrée en vigueur des accords de l'OMC.

Graphique 4 Diminution des recettes douanières agricoles nettes selon le scénario 2 600

500

400

300

Hors UE

millions CHF/an

UE 200

100

0 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

1127

1.5.3

Montant des recettes douanières affectées à la réserve au bilan

Les tableaux 5 et 6 donnent un aperçu des recettes douanières qui pourraient être réservées pour le financement des mesures d'accompagnement. Le tableau 5 reprend le scénario 1, qui voit les accords de l'OMC entrer en vigueur en 2011 et l'ALEA en 2012. La période de transition est de cinq ans dans les deux cas.

Tableau 5 Recettes douanières selon le scénario 1 (OMC 2011­2016, ALEA 2012­2017) (en mio. de fr.)

Année

Recettes UE

Recettes hors UE

Total des recettes

Recettes douanières cumulées susceptibles d'être réservées

2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

465 465 422 379 309 231 153 75 0 0 0

90 90 82 74 66 58 50 42 42 42 42

555 555 504 453 375 289 203 117 42 42 42

555 1 110 1 614 2 067 2 442 2 731 2 934 3 051 plus d'affectation spéciale

La colonne «Recettes douanières cumulées susceptibles d'être réservées» montre que les montants disponibles augmentent rapidement avant de se stabiliser sous l'effet de la mise en oeuvre des accords OMC et ALEA et de la baisse des recettes douanières annuelles qui leur est associée. Compte tenu du délai proposé dans le projet de loi, les montants cumulés jusqu'en 2016 s'élèveront à plus de 3 milliards de francs.

Le tableau 6 reprend le scénario 2, selon lequel l'ALEA entre en vigueur en 2013 et les accords de l'OMC en 2014. La période de transition est de 5 ans dans les deux cas. Par rapport au scénario 1, la réduction selon le scénario 2 démarre plus tard, ce qui se reflète sur les recettes douanières cumulées. Entre 2009 et 2016, les montants disponibles pour le financement des mesures d'accompagnement s'élèveront dans ce cas à environ 3,6 milliards de francs.

1128

Tableau 6 Recettes douanières selon le scénario 2 (ALEA 2013­2018, OMC 2014­2019) (en mio. de fr.)

Année

Total des recettes

Recettes UE

Recettes hors UE

Recettes douanières cumulées susceptibles d'être réservées

2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

465 465 465 465 387 309 231 153 75 0 0

90 90 90 90 90 82 74 66 58 50 42

555 555 555 555 477 391 305 219 133 50 42

555 1 110 1 665 2 220 2 697 3 088 3 393 3 612 plus d'affectation spéciale

Sur la base de ces calculs, les recettes douanières sur les produits agricoles et alimentaires importés pouvant être réservées en prévision du financement des mesures d'accompagnement constituent des montants conséquents, éventuellement suffisants. Il est donc nécessaire de réserver ces recettes dès 2009, car elles chutent rapidement une fois que les accords sont mis en oeuvre.

1.6

Procédure préliminaire

1.6.1

Commission consultative agricole

Fin novembre 2008, la Commission consultative agricole a examiné en détail le projet mis en consultation et le rapport sur les résultats de cette consultation lui a également été soumis. Sous réserve de quelques doutes en ce qui concerne les objectifs et les conséquences d'un ALEA sur le secteur agricole, elle est d'avis que la création d'une réserve au bilan présente les meilleures garanties de conformité avec les exigences liées à la LFC. Un fonds spécial au sens de l'art. 52 LFC, de portée plus vaste, susciterait davantage la confiance, mais ne recueillerait guère la majorité, compte tenu des défis macro-économiques actuels et des pronostics revus à la baisse concernant les finances fédérales. Aussi, la majorité des membres de la Commission consultative soutiennent le projet présenté par le Conseil fédéral et jugent la proposition pragmatique.

1.6.2

Consultation

Le 10 septembre 2008, le DFE a ouvert une procédure de consultation au sujet de la création d'une réserve au bilan en vue du financement des mesures d'accompagnement. Cette consultation a pris fin le 21 novembre 2008.

1129

En tout, 77 participants à la consultation ont exprimé leur avis. Le rapport sur les résultats de la consultation est disponible sur le site internet de la Chancellerie fédérale10.

La majorité des cantons approuvent le projet. VD et JU sont d'avis que la solution préconisée est trop peu contraignante. Ils demandent des garanties plus concrètes et plus fiables concernant le financement des mesures d'accompagnement.

Parmi les partis politiques, le PSS, le PDC, le PRD et le PCS jugent positivement le projet de financement spécial au sens de l'art. 53 LFC. Le PCS demande que l'agriculture assume sa responsabilité en matière d'écologie et que les objectifs environnementaux définis dans le rapport établi par l'OFEV et l'OFAG constituent une condition contraignante pour le financement des mesures d'accompagnement.

L'UDC considère que le projet est un exercice alibi, qu'il ne s'agit de rien d'autre que d'une contribution aux frais d'enterrement («Sterbeprämie» soit «prime à la mort des paysans») pour une grande majorité de l'agriculture. Le PES n'approuve pas le projet. Il lui reproche l'absence de stratégie permettant de maintenir la création de valeur ajoutée dans l'agriculture sans perte de revenus et l'absence d'une évaluation de la durabilité.

La majorité des organisations paysannes approuvent la préparation du financement des mesures d'accompagnement, mais trouvent que le projet est trop peu contraignant. Les organisations de consommateurs consultées ont un avis partagé. Alors que le Forum des consommateurs approuve le projet, la Fondation pour la protection des consommateurs le rejette arguant que les mesures d'accompagnement n'incluent aucune stratégie permettant de résoudre les problèmes liés à un ALEA. Economiesuisse et les employeurs sont opposés au projet, alléguant que la solution du problème est repoussée à plus tard et que le montant minimum est bétonné. Si pour des raisons politiques, on devait maintenir la création d'une réserve au bilan, il y aurait lieu de procéder à deux modifications de fond: le montant de la réserve devrait être fortement réduit et les moyens devraient explicitement aussi servir à financer des mesures d'accompagnement pour le premier échelon de transformation de l'industrie agroalimentaire. L'Union suisse des arts et métiers, l'Union syndicale suisse, l'IGAS
(Interessengemeinschaft Agrarstandort Schweiz) et les organisations des échelons situés en aval du secteur agroalimentaire ont exprimé un avis favorable au projet.

Un minorité des cantons (UR, OW, NW, FR, SH et GR) exigent un fonds spécial au sens de l'art. 52 LFC. Parmi les partis, le PSS soutient cette solution, le PRD y est, quant à lui, clairement opposé. Les milieux paysans, les organisations des secteurs situés en amont et en aval ainsi que l'Union suisse des arts et métiers sont favorables à la création d'un fonds spécial. La Migros est d'avis que cette proposition est une solution envisageable; par contre, l'Union professionnelle suisse de la viande, le Centre patronal, la Coop et le Forum des consommateurs la rejettent.

Trois cantons (NW, GR, AI) demandent que les fonds affectés soient utilisés exclusivement pour les mesures d'accompagnement en faveur de l'agriculture. Les autres cantons ne s'expriment pas à ce sujet. Parmi les partis, seul le PSS prend positon. Il souhaite, lui aussi, que les fonds ne soient utilisés que pour l'agriculture. Sur ce point, les milieux paysans ont un avis partagé. L'Union suisse des paysans et l'Union suisse des paysannes et des femmes rurales souhaitent limiter ce financement spécial à l'agriculture. Les organisations de producteurs et les interprofessions, 10

http://www.admin.ch/ch/f/gg/pc/ind2008.html

1130

economiesuisse et l'Union suisse des arts et métiers souhaitent l'implication du premier échelon de la commercialisation et de la transformation. IP-Suisse et les représentants de l'industrie alimentaire sont favorables à une extension à l'ensemble de la chaîne de valeur ajoutée. Ils se référent à la politique de soutien mises en oeuvre par l'UE et veulent jouer à armes égales en cas d'ouverture des marchés.

2

Commentaire de la nouvelle disposition

La constitution d'un financement spécial nécessite une base légale inscrite dans une loi. Etant donné que la création d'une réserve au bilan prévoit l'affectation des recettes douanières prélevées à l'importation de produits agricoles et de denrées alimentaires, la base légale sera inscrite dans la loi du 29 avril 1998 sur l'agriculture (LAgr)11. Comme le projet d'un nouvel art. 19a règle l'affectation de droits de douane, la disposition est insérée dans la section 3 Importation de la LAgr.

Al. 1 L'affectation des recettes douanières correspond à un financement spécial au sens de l'art. 53, al. 1, LFC. Le montant affecté correspond à la somme des droits de douane qui seront prélevés à l'importation de produits agricoles et de denrées alimentaires au cours de la période allant de 2009 à 2016. Ces montants seront toujours attribués aux recettes générales de la Confédération et non pas versés à un fonds spécial.

Comme aucune affectation à durée indéterminée ne peut être prévue, une limite de 8 ans est proposée. L'affectation est ciblée sur des accords tels qu'ils peuvent être prévus aujourd'hui.

Les recettes douanières prélevées à l'importation des produits agricoles et des denrées alimentaires concernent en principe les produits relevant des chap. 1 à 24 du tarif douanier. Il est proposé de renoncer à une délimitation détaillée comme celle appliquée lors de la mise en oeuvre du cycle de l'Uruguay du GATT (voir ch. 1.5).

Elle impliquerait une importante charge administrative et n'aurait qu'une faible incidence sur le montant total, vu que les positions tarifaires concernées présentent généralement des droits de douane bas et que les cas d'exception se compensent en partie. Sont déduites des recettes brutes les contributions au fonds de garantie pour le financement des stocks obligatoires et les recettes restituées (trafic de perfectionnement, revers).

Al. 2 Les moyens réservés et affectés doivent servir uniquement au financement des mesures d'accompagnement. Actuellement, on ne peut pas prédire lequel des deux accords pourra entrer en vigueur en premier. C'est la raison pour laquelle les deux affectations possibles sont mentionnées. Comme indiqué précédemment, la conclusion de ces deux accords ne produirait pas d'effets cumulatifs, mais plutôt complémentaires sur le revenu du secteur agricole. La
disposition ne fixe que l'objectif du financement. Les mesures d'accompagnement nécessitent une base légale propre. Le moment venu, le Conseil fédéral présentera au Parlement des propositions concrètes en même temps que la mise en oeuvre desdits accords.

11

RS 910.1

1131

Al. 3 Le Conseil fédéral doit pouvoir décider des aspects techniques du financement spécial. Si ces accords ne devaient pas aboutir ou s'ils étaient rejetés, le Conseil fédéral serait habilité à dissoudre la réserve au bilan par une écriture au bilan de la Confédération. Il en irait de même du solde si les moyens nécessaires au financement des mesures d'accompagnement devaient s'avérer inférieurs aux montants provisionnés. Une alimentation de la réserve au bilan dès 2017 devrait, le cas échéant, à nouveau être réglementée à l'échelon de la loi. Si les deux accords ne devaient entrer en vigueur qu'après 2016, le Conseil fédéral pourrait en principe utiliser à ce moment-là la réserve au bilan pour des mesures d'accompagnement, en tenant compte des exigences relevant de la politique financière.

Al. 4 L'ampleur des moyens financiers nécessaires et la date de leur attribution ne pourront être déterminées avec précision que lorsque les accords seront mis en oeuvre.

Si le Conseil fédéral considère que la dotation du financement spécial est trop élevée, il peut réduire l'affectation en conséquence.

Ch. II: Entrée en vigueur La mise en réserve de moyens au titre de fonds affectés enregistrés sous le capital propre au bilan de la Confédération se réalisera sans entraîner de conséquences sur les comptes de résultat. Les recettes douanières de l'année comptable 2009 seront uniquement prises en compte pour déterminer le montant de la réserve à constituer au bilan. Pour cette raison il n'est pas nécessaire que le nouvel article entre en vigueur avec effet rétroactif au 1er janvier 2009.

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour la Confédération

La création d'un financement spécial consiste en une opération comptable au bilan de la Confédération. Elle n'augmente pas la charge administrative, ni ne demande une dotation en personnel supplémentaire.

La constitution de ce financement spécial n'entraîne aucune conséquence directe sur l'équilibre financier de la Confédération à court terme. L'impact financier sur les comptes de financement ne sera perceptible que lorsque les contributions transitoires seront versées au titre des mesures d'accompagnement après l'entrée en vigueur des accords. A long terme, des recettes supplémentaires viendront alimenter de manière durable le budget fédéral en raison de l'effet de croissance, qui compenseront sûrement les dépenses occasionnées par les mesures d'accompagnement.

L'objectif premier de la libéralisation visée dans le secteur agricole est d'améliorer l'accès aux marchés d'exportation, d'encourager l'adaptation des structures et de stimuler la compétitivité des exploitations. Les mesures d'accompagnement sont destinées à soutenir de manière substantielle la transition. L'actuel système des paiements directs devra être examiné à la lumière du développement de la compétitivité de l'agriculture suisse.

1132

3.2

Conséquences pour les cantons et les communes

La mise en place de mesures d'accompagnement et leur dotation avec les moyens fédéraux nécessaires ont notamment pour but d'assurer une transition supportable sur le plan social vers la libéralisation des marchés agricoles. Leur mise en oeuvre devrait réduire les risques de détérioration des conditions sociales de l'agriculture et éviter que l'aide sociale, qui est en premier lieu du ressort des cantons et des communes, soit davantage sollicitée. La mise en place d'un financement spécial constitue pour les cantons un signe tangible que des mesures d'accompagnement seront mises en place et que leur financement sera assuré.

Les budgets des cantons et des communes, que l'entrée en vigueur d'un éventuel ALEA ne grèverait pas, bénéficieraient pleinement de l'effet de croissance. Quelque 800 millions de francs de recettes supplémentaires pourraient ainsi être générées (environ 500 millions pour les cantons et 300 millions pour les communes). Selon le scénario, l'effet de croissance se ferait sentir plus ou moins rapidement.

3.3

Conséquences économiques

La création d'une réserve au bilan vise à donner un signal politique, susceptible d'établir la confiance, à l'adresse des milieux concernés par une suppression des prélèvements à la frontière sur les produits agricoles. Ce faisant, aucune décision définitive n'est prise concernant l'utilisation concrète des moyens. Il est indéniable que la mise en oeuvre d'accords internationaux nécessite d'une manière générale une adaptation du droit national.

Le présent projet n'a, à court terme, pas de conséquences économiques directes pour les différents groupes sociaux. A moyen terme, en cas de conclusion de l'un ou l'autre des deux accords internationaux, les groupes concernés (agriculture, secteur agroalimentaire) pourront se référer, dans le cadre des discussions politiques sur l'aménagement des mesures d'accompagnement, au financement spécial au sens de l'art. 19a LAgr.

Des réglementations alternatives visant la préparation du financement des mesures d'accompagnement sont discutées au ch. 1.4.2.

4

Rapport avec le programme de la législature

La négociation d'un accord de libre-échange entre la Suisse et l'UE dans le domaine agroalimentaire figure nommément dans l'arrêté fédéral du 18 septembre 2008 sur le programme de la législature 2007 à 201112. Il figure sous l'objectif 14 qui vise à consolider les relations avec l'UE. Comme le Conseil fédéral l'indique dans son message du 23 janvier 200813, l'ouverture totale des frontières aurait des répercussions sur les revenus des familles d'agriculteurs et des employés du secteur agroalimentaire. Un développement social acceptable ne pourrait par conséquent être garanti qu'à condition de prévoir des mesures d'accompagnement et d'en assurer le 12 13

FF 2008 723 FF 2008 639 713

1133

financement. C'est justement pour remplir cet objectif que le Conseil fédéral propose de créer la base légale nécessaire à la constitution d'un financement spécial.

Le message sur le programme de législature14 mentionne aussi l'aboutissement réussi du cycle de Doha parmi les objectifs. Des mesures d'accompagnement sont également prévues pour que les entreprises agricoles puissent relever sans rupture sociale les nouveaux défis imposés par une plus large ouverture des marchés.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et légalité

Conformément à l'art. 53 LFC, l'instauration d'un financement spécial, tel que celui prévu par l'affectation des recettes douanières, requiert une base légale. La modification proposée de la loi sur l'agriculture pose le principe d'un financement spécial.

Les moyens affectés ne seront requis qu'après la conclusion des accords prévus.

Aussi, la forme des mesures d'accompagnement est-elle encore ouverte.

D'une manière générale, l'art. 104 Cst. et la loi sur l'agriculture constituent les bases constitutionnelles et légales correspondantes. Au moment de l'aménagement concret des mesures d'accompagnement, il y aura lieu d'examiner en détail leur légalité et leur constitutionnalité.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

La conclusion d'un accord de libre-échange agroalimentaire avec l'UE constituera un grand pas vers la libéralisation des marchés agricoles et va dans la direction souhaitée notamment par l'OMC et l'OCDE. Elle est également conforme à l'intention figurant dans la clause évolutive de l'accord agricole entre la Suisse et l'UE de 1999. Comme celle d'un nouvel accord à l'OMC, elle aura pour conséquence de diminuer le soutien global à l'agriculture, par la réduction de la protection à la frontière. Comme les mesures d'accompagnement sont de nature temporaire et qu'elles doivent permettre de faciliter le processus d'adaptation, elles devraient satisfaire aux exigences de la boîte verte de l'OMC.

5.3

Frein aux dépenses

La création d'une nouvelle base légale permettant un financement spécial n'instaure pas de nouvelles subventions directes qui entraîneraient de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions ou des dépenses périodiques de 2 millions de francs.

Aussi, le nouvel art. 19a que le Conseil fédéral propose d'insérer dans la LAgr n'est pas soumis au frein aux dépenses.

14

FF 2008 639 670

1134