07.417 Initiative parlementaire Transport des animaux et contrôles aux frontières Rapport de la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national du 7 mai 2009

Madame la Présidente, Madame, Monsieur, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet de modification de la loi du 16 décembre 2005 sur la protection des animaux1, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

7 mai 2009

Au nom de la commission: La présidente: Josiane Aubert

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RS 455

2009-1713

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Condensé Contrairement à la législation de l'Union européenne, la législation suisse retreint les possibilités de transit des bovins, moutons, chèvres et porcs au transport aérien et au transport ferroviaire (art. 175 de 1'ordonnance du 23 avril 2008 sur la protection des animaux, OPAn2).

Dans le cadre du renforcement de la coopération entre la Suisse et l'UE et de l'effort d'harmonisation des dispositions applicables dans le domaine vétérinaire, il devenait impératif, en vertu de la protection des animaux, d'inscrire cette restriction dans la loi elle-même, pour être en mesure de la maintenir à moyen et à long terme.

Cette modification législative permettra de répondre aux préoccupations exprimées dans l'initiative parlementaire 07.417 Transport des animaux et contrôles aux frontières, déposée par Barbara Marty Kälin, ainsi qu'à cinq initiatives déposées par les cantons, qui visaient, elles aussi, à interdire le transport d'animaux d'abattage de l'UE sur les routes suisses (initiatives 07.311, 08.315, 08.332, 09.305 et 09.309).

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RS 455.1

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Rapport 1

Genèse du projet

Le 23 mars 2007, la conseillère nationale Barbara Marty Kälin a déposé une initiative parlementaire, soutenue par 76 cosignataires, demandant l'interdiction du transit des animaux destinés à l'abattage à travers la Suisse et le renforcement des contrôles aux frontières des transports d'animaux. Cette initiative faisait suite aux craintes de voir disparaître la disposition interdisant le transport des bovins, moutons, chèvres et porcs via le réseau routier suisse en raison du rapprochement de la législation de la Suisse et de celle de l'UE, qui admet ce type de transport dont la durée est parfois considérable. De plus, l'envoi en consultation des développements de l'annexe vétérinaire de l'accord sur l'agriculture semblait sonner le glas de la réglementation suisse, d'autant que, les contrôles vétérinaires à la frontière étaient amenés à disparaître rapidement, suite à la reconnaissance réciproque des différentes dispositions légales entre la Suisse et l'Union européenne.

1.1

Délibérations des commissions parlementaires

Après avoir procédé à l'examen préalable de l'initiative parlementaire 07.417 Transport des animaux et contrôles aux frontières déposée par Barbara Marty Kälin, la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national (CSEC-N) avait décidé, à l'unanimité, d'y donner suite, le 2 novembre 2007. La commission considérait en effet que l'ouverture du réseau routier suisse au transport d'animaux venant de l'Union européenne n'était pas souhaitable pour des raisons touchant, d'une part, à la protection des animaux et, d'autre part, au risque d'introduction d'épizooties jusque-là inexistantes ou déjà éradiquées en Suisse.

Le 21 janvier 2008, la commission homologue du Conseil des Etats (CSEC-E) a rejeté la décision de la CSEC-N par 6 voix contre 4. Rejoignant l'avis de la commission du Conseil national sur les questions fondamentales que posait l'initiative, la CSEC-E estimait elle aussi que la réglementation relative au transport des animaux devait être absolument maintenue. Elle partageait également la volonté de la CSEC-N de conserver les contrôles douaniers vétérinaires afin d'éviter la propagation de nouvelles épizooties. La commission a toutefois émis des doutes quant au fait que l'initiative parlementaire soit l'instrument le plus pertinent pour demander le maintien des dispositions sur le transport des animaux; elle a également affirmé que le moment n'était pas opportun pour concrétiser cette initiative, car une éventuelle modification de la loi pourrait compliquer les négociations en cours avec l'UE.

A la suite du rejet de la CSEC-E, la CSEC-N a de nouveau dû se pencher sur l'initiative en vertu de l'art. 109, al. 3, LParl. Elle a donc réexaminé le texte le 26 juin 2008 et décidé, par 23 voix contre 1, de s'en tenir à sa décision première en recommandant à son conseil de donner suite à l'initiative.

Le 3 octobre 2008, le Conseil national a approuvé la proposition de la CSEC-N sans discussion. Le 13 octobre suivant, la commission du Conseil des Etats s'est ralliée à cette décision, par 8 voix contre 3, rejetant par-là même l'avis d'une minorité, qui

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préconisait d'attendre la fin des négociations entamées, dans le cadre des accords bilatéraux, par le comité mixte vétérinaire Suisse-UE.

En sa qualité de commission du conseil prioritaire, la CSEC-N s'est attelée à la mise en oeuvre de l'initiative le 19 février 2009. Ayant, dans le même temps, pris acte de la décision prise, le 23 décembre 2008, du comité mixte vétérinaire institué par l'accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse relatif aux échanges de produits agricoles3, les membres de la commission ont souligné que la réglementation sur laquelle la Suisse et l'UE s'étaient entendues en matière de transport d'animaux ferait, selon toute vraisemblance, encore l'objet de débats lors de prochaines négociations. C'est pourquoi ils ont décidé d'inscrire les mesures demandées par l'initiative parlementaire 07.417 dans la loi afin qu'à l'avenir les animaux ne soient pas transportés dans n'importe quelles conditions et à n'importe quel prix sur le territoire suisse. Les modifications proposées dans le projet d'acte doit permettre de régler cette question.

Le 7 mai 2009, la commission a adopté le projet par 17 voix contre 0 et 3 abstentions.

1.2

Soutien des cantons

L'initiative parlementaire de Mme Marty Kälin (07.417) a suscité un grand intérêt, notamment dans l'opinion publique. La problématique du transport des animaux a entraîné le dépôt de plusieurs interpellations et a donné lieu à de nombreuses questions parlementaires; de surcroît, les cantons se sont eux aussi intéressés au sujet et ont déposé cinq initiatives entre décembre 2007 et mai 2009, toutes demandant au Conseil fédéral d'interdire le transit par la Suisse des animaux de boucherie4. Contrairement à l'initiative de Mme Marty Kälin, les initiatives de ces cantons n'émettent aucune exigence concernant les contrôles vétérinaires des transports d'animaux à la frontière.

1.3

Modification des conditions légales

Depuis le dépôt de l'initiative parlementaire 07.417, plusieurs bases légales relatives à la protection des animaux ont été révisées. Ainsi, l'ordonnance concernant l'importation, le transit et l'exportation d'animaux et de produits animaux (OITE)5 est entrée en vigueur le 18 avril 2007. En outre, la Suisse et l'UE appliquent, depuis 2006, des dispositions analogues en matière d'épizooties et d'hygiène alimentaire.

Le transport d'animaux entre les Etats membres de l'UE et la Suisse doit désormais répondre à un impératif de traçabilité: c'est pourquoi le système de contrôle TRACES a été mis en place. Ce système permet d'enregistrer tout déplacement d'animaux vivants en Suisse et dans l'Union européenne dans le cadre du trafic 3

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Décision n° 1/2008 du comité mixte vétérinaire institué par l'accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse relatif aux échanges de produits agricoles du 23 décembre 2008.

Initiatives visant à interdire le transit par la Suisse des animaux de boucherie déposées par les cantons de Berne (07.311), de St-Gall (08.315), de Fribourg (08.332), de Zurich (09.305) et de Lucerne (09.309), état au 17 juin 2009.

RS 916.443.10

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transfrontière. La réglementation relative aux contrôles vétérinaires de frontière a été fixée par l'OITE, qui interdit également le transit par la route des animaux à onglons. Cette interdiction, qui avait d'abord été décidée pour lutter contre le risque d'épizooties, demeure aujourd'hui mais pour un autre motif, celui de la protection des animaux. Le Conseil fédéral a donc inscrit cette interdiction dans la nouvelle version de l'ordonnance du 23 avril 2008 sur la protection des animaux (OPAn)6, qui est entrée en vigueur le 1er septembre 2008, en même temps que la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur la protection des animaux (LPA)7. L'art. 175, OPAn dispose que le transit par la Suisse de bovins, de moutons, de chèvres et de porcs n'est admis que par le rail ou par avion.

1.4

Négociations en cours avec l'UE

Le Conseil fédéral a reçu mandat de négocier avec l'UE en octobre 2008.

L'interdiction du transport d'animaux, telle que réglée par l'art. 175, OPAn, fait partie des points qui devaient être abordés durant les négociations.

Le Comité mixte vétérinaire (CMV) s'est réuni en décembre 2008. Dans sa décision du 23 décembre 2008, il a repris la formulation de l'art. 175 de l'ordonnance du 23 avril 2008 sur la protection des animaux: par conséquent, le transit par la Suisse de bovins, de moutons, de chèvres et de porcs reste restreint au rail ou au transport aérien. Cette décision est entrée en vigueur le 1er janvier 2009.

La Commission européenne souhaiterait se pencher de nouveau sur cette question dans le cadre du développement de l'accord vétérinaire 2009/2010. La Suisse a, quant à elle, toujours indiqué que, tant que l'Union européenne tolérera que les animaux soient transportés jusqu'à 28 heures d'affilée dans des conditions ne leur permettant guère de s'allonger, elle ne sera politiquement pas en mesure d'adopter les dispositions de l'UE.

1.5

Contrôle vétérinaires à la frontière

L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2009, de la décision du 23 décembre 2008 met fin aux contrôles vétérinaires effectués à la frontière entre la Suisse et l'UE par la police vétérinaire. Elle n'affecte cependant pas les contrôles douaniers. Par conséquent, les animaux de rente importés continueront d'être enregistrés mais ne seront plus soumis à un contrôle vétérinaire. Toutefois, tous les transports internationaux d'animaux dans l'UE et en Suisse feront l'objet d'une surveillance vétérinaire officielle et seront suivis à l'aide du système TRACES, du lieu de départ au lieu de destination. L'organe officiel compétent du lieu de destination (en Suisse, l'Office vétérinaire cantonal) recevra, par voie électronique, toutes les données concernant le transport avant que ce dernier n'ait lieu. En vertu de l'ordonnance sur la protection des animaux, les éventuels contrôles des transports d'animaux en Suisse relèveront des cantons.

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RS 455.1 RS 455

5909

De l'avis de la commission, la réintroduction des contrôles vétérinaires réguliers effectués par les autorités douanières ­ qui est une des revendications de l'initiative parlementaire ­, ne serait ni judicieuse, ni applicable. La CSEC-N a donc décidé de ne pas donner suite à la proposition de l'al. 1 de l'initiative concernant les contrôles par les autorités douanières et d'examiner uniquement l'interdiction du transport d'animaux vivants, objet de l'al. 2 et des initiatives déposées par les cantons.

2

Grandes lignes du projet

Le projet élaboré par la commission, en collaboration avec l'Office vétérinaire fédéral (OVF), vise à inscrire dans la loi l'interdiction ­ jusque-là réglée par une ordonnance ­ du transit par la route de bovins, de moutons, de chèvres et de porcs sur le territoire suisse. Les transports de longue durée ne sont pas seulement un facteur de stress pour les animaux; ils sont nuisibles pour l'environnement et vont à l'encontre d'une politique agricole régionale axée sur le développement durable.

L'introduction d'un nouvel article dans la loi doit permettre, à la fois, d'accorder à la protection des animaux la même importance que celle qu'elle a revêtu dans les débats parlementaires et publics, et de renforcer la position du gouvernement suisse sur ce point dans l'optique de nouvelles négociations.

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Commentaire par article

Généralités La réglementation actuelle de l'ordonnance du 23 avril 2008 sur la protection des animaux (OPAn; art. 175)8 dispose que le transit par la Suisse de bovins, de moutons, de chèvres et de porcs n'est admis que par le rail ou par avion. Il est prévu d'inscrire cette disposition dans la loi du 16 décembre 2005 sur la protection des animaux (LPA)9.

Art. 15

Principes

La section 4 de la LPA en vigueur ne contient qu'une seule disposition, l'art. 15.

Elle en contiendra deux, semblables par leur objet ­ les transports d'animaux ­ mais différentes par leur teneur. Il est prévu de marquer cette différence en leur donnant à chacune un titre différent. L'art. 15, qui s'applique à la fois aux transports nationaux et internationaux d'animaux, sera intitulé «Principes».

Art. 15a

Transports internationaux d'animaux

Al. 1: Un article sur les transports internationaux d'animaux est introduit à la section 4. Aux termes de cette disposition, les bovins, les moutons, les chèvres et les porcs ne peuvent transiter par la Suisse que par voie ferroviaire ou aérienne.

Par «transit» d'animaux, on entend tout transport d'animaux via la Suisse dont le point de départ et le point d'arrivée sont situés en dehors du territoire suisse.

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RS 455.1 RS 455

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Cette disposition équivaut à interdire le transit par la route. Mais, comme les conditions nécessaires au transit par voie ferroviaire ou aérienne ne sont pas remplies (absence d'infrastructures permettant le transbordement, durée et coûts du dédouanement, etc.), l'interdiction de transit via la Suisse est de facto quasi complète.

L'objectif est d'éviter aux animaux un transport de longue durée dans des véhicules exigus.

La prescription relative au transport s'applique à toutes les espèces animales citées par la disposition, indépendamment de leur utilisation (donc tant aux animaux de rente qu'aux animaux de boucherie). Par contre, elle ne concerne ni les chevaux ni la volaille dont le transit par la route via la Suisse reste admis.

Al. 2: Le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions pour des bovins, des moutons, des chèvres et des porcs qui sont destinés à être exposés ou à participer à une démonstration, lorsque le transport routier des animaux à travers la Suisse dure moins longtemps qu'un trajet évitant notre pays. Les animaux visés doivent être accompagnés des documents de transport officiels adéquats.

Cette disposition s'explique par le fait qu'il est permis de penser que les animaux concernés seront transportés avec le plus de ménagement possible, puisqu'ils devront être en bonne santé à l'arrivée. En outre, le nombre de manifestations de ce genre étant limité, les animaux ne pourront être acheminés n'importe où.

4

Conséquences

Le projet n'aura de conséquences ni sur le plan des ressources financières et humaines ni sur le plan de l'exécution, puisque la réglementation prévue est déjà inscrite à l'échelon de l'ordonnance.

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Bases juridiques

5.1

Constitutionnalité

La disposition se fonde sur l'art. 80 de la Constitution (Cst.)10, notamment l'al. 2, let. e, de celui-ci qui habilite la Confédération à édicter des dispositions sur la protection des animaux en matière de commerce et de transport d'animaux.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

L'annexe 11 de l'accord bilatéral entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif aux échanges de produits agricoles (annexe vétérinaire)11 facilite les échanges d'animaux vivants et de produits animaux entre les deux Parties. Cette annexe constate l'équivalence des législations des Parties en matière de santé anima10 11

RS 101 Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif aux échanges de produits agricoles (avec annexes et acte final), annexe 11; RS 0.916.026.81.

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le et d'importation d'animaux vivants (art. 2, al. 1, et art. 4, al. 1). Elle reconnaît ainsi l'équivalence des conditions sanitaires régissant le commerce d'animaux dans la Communauté européenne (CE) et en Suisse. Depuis lors, la Suisse ne peut plus invoquer des raisons sanitaires pour justifier l'interdiction du transit routier des animaux de boucherie.

La question s'est posée de savoir si l'interdiction du transit routier pouvait être maintenue en se fondant sur des raisons de protection des animaux. Les dispositions relatives à la protection des animaux lors des transports internationaux sont contenues dans l'annexe vétérinaire (art. 6). La Suisse s'y engage à appliquer les dispositions du règlement (CE) no 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes12. Ce règlement remplace la directive du 19 novembre 1991 relative à la protection des animaux en cours de transport13. Si le règlement (CE) no 1/2005 renforce les exigences auxquelles doivent satisfaire les véhicules et le personnel qui effectuent les transports, il laisse quasi intact les exigences relatives à la durée du transport et aux surfaces minimales. Pour la Suisse cela restait insuffisant. Elle entendait continuer à empêcher les transports d'animaux de longue durée via son territoire.

Une solution de compromis entre les deux positions a pu être trouvée: l'accord a été assorti d'une remarque autorisant la Suisse à maintenir momentanément l'interdiction du transit routier comme le prévoit l'art. 175 OPAn. Mais cette question sera réexaminée par le Comité mixte vétérinaire (art. 19 de l'annexe vétérinaire).

L'interdiction du transit routier sera également mise en discussion dans le cadre des négociations sur l'accord de libre échange entre la Suisse et la CE dans le secteur agro-alimentaire (AELA).

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Règlement (CE) no 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes et modifiant les directives 64/432/CEE et 93/119/CE et le règlement (CE) no 1255/97, JO L 3 du 5.1.2005.

Directive 91/628/CEE du 19 novembre 1991 relative à la protection des animaux en cours de transport, JO L 340 du 11.12.1991, p. 17; modifiée en dernier lieu par le règlement (CE) no 806/2003 (JO K 122 du 6.5.2003, p. 1) et par la directive 95/29/CE du Conseil du 29 juin 1995, modifiant la directive 91/628/CEE relative à la protection des animaux en cours de transport, JO L148 du 30.6.1995, p. 52.

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