03.436 Initiative parlementaire Pour des campagnes de votation équitables Rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 7 mai 2009

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons un projet de loi fédérale précisant le rôle des partis politiques dans la formation de l'opinion et de la volonté populaires, ainsi qu'un projet d'ordonnance de l'Assemblée fédérale concernant le temps d'antenne gratuit avant les votations populaires, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter les projets d'acte ci-joints.

7 mai 2009

Pour la commission: Le président, Gerhard Pfister

2009-1143

5247

Condensé Ces dernières années, plusieurs campagnes menées en vue de votations fédérales ont été dominées par des groupes d'intérêts qui, disposant de puissants moyens financiers, ont occupé le premier plan dans les médias. A contrario, les partis politiques, qui contribuent traditionnellement à former l'opinion et la volonté populaires sur des dossiers concrets, ont vu leur influence s'éroder. Par ailleurs, il arrive que les comités d'initiative et de référendum à l'origine de scrutins soient confrontés au manque d'intérêt des médias pour les projets ayant un faible impact financier ou suscitant peu d'opposition au Parlement. Les conditions d'exercice de la démocratie nécessaires à des campagnes de votations équitables se sont donc détériorées à bien des égards.

Le projet de «loi fédérale précisant le rôle des partis politiques dans la formation de l'opinion et de la volonté populaires» présenté par la Commission des institutions politiques (CIP) du Conseil national doit permettre d'améliorer l'équité dans les campagnes de votation fédérales. Il faut en effet que les personnes ayant participé activement au travail parlementaire d'élaboration d'un projet soumis à votation et les personnes ayant obtenu la tenue d'une votation fédérale par voie d'initiative ou de référendum puissent exposer leur position publiquement, même si elles ne disposent que de moyens financiers modestes.

C'est pourquoi les partis inscrits au registre des partis politiques et qui sont représentés à l'Assemblée fédérale au sein d'un groupe parlementaire, de même que les comités d'initiative et les auteurs d'un référendum ­ soit, en l'espèce, l'ensemble des comités ayant lancé un référendum ­ à l'origine de scrutins, se verront accorder un temps d'antenne gratuit pour diffuser des messages sur certaines chaînes de télévision et certains programmes de radio de la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SSR) ainsi que dans les programmes des autres diffuseurs détenteurs d'une concession donnant droit à une quote-part de la redevance.

Le projet de la commission prévoit, d'une part, la révision partielle de trois lois (projet A) et, d'autre part, un projet d'ordonnance d'exécution de l'Assemblée fédérale (projet B): ­

5248

Il est prévu d'ancrer dans la loi fédérale sur les droits politiques (LDP) le droit au temps d'antenne gratuit accordé aux partis politiques ainsi qu'aux comités d'initiative et de référendum, l'obligation faite à certaines chaînes ou programmes de diffuser les messages politiques liés à une votation ainsi que la responsabilité de la Chancellerie fédérale en matière d'attribution du temps d'antenne. Y figurent en outre des dispositions relatives à la production, au financement et aux contenus minimaux des messages politiques ainsi que la norme de délégation pour une ordonnance d'exécution de l'Assemblée fédérale.

­

Les modalités de surveillance et de recours concernant, d'une part, les messages politiques ­ qu'ils aient déjà été diffusés ou non ­ et, d'autre part, les diffuseurs soumis à l'obligation de diffuser sont inscrites dans la loi sur la radio et la télévision (LRTV).

­

La loi sur le Tribunal fédéral (LTF) est complétée par une disposition qui régit le droit de recours applicable aux décisions de la Chancellerie fédérale relatives à l'attribution du temps d'antenne. Cette disposition est analogue à celle qui s'applique aux recours en matière de droit de vote.

­

Enfin, le temps d'antenne consacré à la diffusion des messages politiques liés à une votation, le mode de répartition de ce temps entre les partis et les comités, les chaînes et programmes tenus de diffuser les messages ainsi que les modalités de diffusion sont définis dans une ordonnance de l'Assemblée fédérale. Les messages auront une durée maximale de 30 secondes et seront diffusés sur les chaînes de télévision et les programmes radiophoniques soumis à l'obligation de diffuser, du cinquième à l'avant-dernier samedi précédant le jour du scrutin, aux heures de grande écoute; le temps d'antenne ne devra pas dépasser 63 minutes par programme.

Autant la commission est convaincue de la nécessité des nouvelles dispositions légales proposées, autant elle tient à cerner étroitement le droit d'expression que celles-ci instaurent. Elle souhaite instamment que ce nouveau support d'information et de publicité soit utilisé avec modération. Il serait contre-productif de saturer de messages politiques les auditeurs et les téléspectateurs.

Tandis qu'elle élaborait le présent projet, la commission a mené des entretiens avec la Chancellerie fédérale et les Chemins de fer fédéraux, au cours desquels elle a obtenu des avis favorables concernant la mise en place de plates-formes médiatiques nouvelles susceptibles d'améliorer la formation de l'opinion et de la volonté populaires. Les résultats de ces entretiens sont résumés dans le chapitre consacré à la genèse du projet.

5249

Table des matières Condensé

5248

1 Genèse 1.1 Initiative parlementaire Gross Andreas du 20 juin 2003 1.1.1 Objet 1.1.2 Examen préalable par la Commission des institutions politiques du Conseil national 1.2 Efforts du Parlement pour rendre les campagnes de votation plus équitables 1.3 Mandat de la CIP 1.4 Elaboration du projet par la sous-commission 1.4.1 Synthèse des travaux 1.4.2 Nouvelles plates-formes dans les imprimés de la Chancellerie fédérale 1.4.3 Affichage gratuit et diffusion d'émissions politiques télévisées en direct dans les grandes gares des CFF 1.4.4 Auditions de la SSR: pas de résultats satisfaisants 1.4.5 Large consensus en faveur d'une modification de la loi 1.4.6 Résultats de la consultation 1.4.7 Remaniement du projet

5252 5252 5252

2 Grandes lignes du projet 2.1 Importance des partis politiques dans la démocratie directe 2.1.1 Article sur les partis dans la Constitution fédérale 2.1.2 Tendance à l'érosion des partis politiques 2.1.3 Soutien des partis en Suisse et en Europe 2.1.4 Nouvelles bases légales pour des campagnes de votation plus équitables 2.2 Instauration du droit à un temps d'antenne gratuit dans la loi fédérale sur les droits politiques (LDP) 2.2.1 Introduction 2.2.2 Pas de messages lors des élections au Conseil national 2.2.3 Les acteurs des votations: partis, comités d'initiative et de référendum 2.2.4 Responsabilité de la cohérence de l'ordre juridique 2.2.5 Différences entre initiative populaire et référendum 2.3 Critères de calcul des quotes-parts du temps d'antenne 2.3.1 Inapplicabilité à l'élection du Conseil national 2.3.2 Votations populaires 2.3.3 Référendum populaire facultatif 2.3.4 Référendum demandé par les cantons 2.3.5 Initiative populaire 2.3.6 Bilan 2.3.7 Objections et contre-arguments 2.3.8 Ordre de diffusion des messages

5250

5252 5253 5254 5254 5254 5255 5255 5257 5258 5259 5259 5260 5260 5260 5260 5261 5262 5263 5263 5264 5264 5265 5265 5266 5266 5266 5267 5267 5268 5268 5268 5269

2.4 Réglementation de la surveillance dans la loi sur la radio et la télévision (LRTV)

5269

3 Commentaire par article 3.1 Loi fédérale précisant le rôle des partis politiques dans la formation de l'opinion et de la volonté populaires (projet A) 3.1.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) 3.1.2 Loi fédérale du 24 mars 2006 sur la radio et la télévision (LRTV) 3.1.3 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) 3.2 Ordonnance de l'Assemblée fédérale concernant le temps d'antenne gratuit avant les votations populaires

5270 5270 5270 5276 5280

4 Conséquences financières et effets sur l'état du personnel 4.1 Conséquences pour la Confédération 4.2 Conséquences pour les acteurs privés

5284 5284 5284

5 Bases légales 5.1 Constitutionnalité et conformité aux lois 5.2 Délégation de compétences législatives 5.3 Forme de l'acte

5285 5285 5286 5286

5280

A Loi fédérale précisant le rôle des partis politiques dans la formation de l'opinion et de la volonté populaires (Projet)

5287

B Ordonnance de l'Assemblée fédérale concernant le temps d'antenne gratuit avant les votations populaires (Projet)

5293

5251

Rapport 1

Genèse

1.1

Initiative parlementaire Gross Andreas du 20 juin 2003

1.1.1

Objet

L'initiative parlementaire déposée par le conseiller national Andreas Gross le 20 juin 2003 demande que la loi fédérale sur les droits politiques (LDP) soit modifiée de sorte que le maximum soit fait, sur le plan légal, pour que les campagnes de votation soient équitables et que les partis soient les premiers à contribuer à la formation de l'opinion et de la volonté publiques. Dans son développement, l'auteur se réfère à l'expérience des dernières campagnes de votation, qui, selon lui, a clairement révélé l'existence d'un besoin de légiférer dans le sens d'une plus grande équité et d'une amélioration du rôle des partis lors de ces campagnes.

L'initiative a été cosignée par trois autres membres de la CIP appartenant aux délégations de trois partis représentés au Conseil fédéral (UDC, PDC et PRD). Cela montre que l'objet de l'initiative est considéré, par-delà les frontières partisanes, comme revêtant une grande importance politique pour les institutions et la démocratie et que la nécessité de légiférer est reconnue.

1.1.2

Examen préalable par la Commission des institutions politiques du Conseil national

La commission a consacré plusieurs séances à l'examen préalable de l'initiative parlementaire. Le 28 janvier 2005, elle a proposé au Conseil national, par 16 voix contre 5 et 2 abstentions, d'y donner suite.

Une majorité de la CIP a admis que le problème de fond était que les campagnes de votation sont largement dominées par des groupes d'intérêts particuliers disposant de puissants moyens financiers, reléguant les partis politiques à un rôle de plus en plus marginal alors qu'ils devraient être les premiers à contribuer à la formation de l'opinion et de la volonté populaires.

Comme le texte de l'initiative n'indique pas comment aborder ce problème, l'auteur de l'initiative, après des entretiens informels avec plusieurs membres de la commission, a présenté un ensemble de solutions envisageables. Au niveau législatif, c'est la diffusion gratuite, avant les votations fédérales, de messages radiophoniques et télévisés produits par les partis qui a été retenue comme axe principal. Des mesures secondaires ont été envisagées, comme l'organisation de campagnes d'affichage dans les gares et l'amélioration de la présentation des partis dans le matériel de vote et les autres imprimés officiels de la Confédération.

Une minorité de la commission a reconnu, dans une certaine mesure, le problème que pose la trop grande présence médiatique des groupes d'intérêts financièrement puissants, mais elle a estimé que l'équité dans les campagnes de votation ne pouvait pas être imposée par la loi. Pour la minorité, c'est au citoyen qu'il revient de juger in fine si une campagne est surdimensionnée ou inéquitable. Les débats radiophoniques 5252

ou télévisés offrent aux partis un nombre suffisant de plates-formes adéquates pour développer leurs arguments. Ces émissions intéressent en outre davantage le citoyen que les messages des partis.

L'initiative ayant été déposée avant l'entrée en vigueur de la loi sur le Parlement (LParl) le 1er décembre 2003, elle a fait l'objet d'un examen préalable selon les règles de la loi sur les rapports entre les conseils (LREC); ainsi, conformément à l'art. 21ter LREC, elle a été soumise pour décision au Conseil national. Lorsque celui-ci a examiné l'initiative le 1er mars 2005, des voix se sont élevées de diverses parts pour souligner que c'était avant tout aux partis politiques qu'il incombait d'assurer l'équité dans les campagnes de votation et qu'il fallait donc leur permettre de mieux faire entendre leurs arguments lors des campagnes.

Le 1er mars 2005, le Conseil national, par 106 voix contre 66, s'est rallié à la proposition de la majorité de la commission et a chargé la CIP d'élaborer un projet sur la base des mesures esquissées par la commission dans le rapport qu'elle avait consacré à l'examen préalable de l'initiative.

1.2

Efforts du Parlement pour rendre les campagnes de votation plus équitables

Le souhait de renforcer l'équité et la transparence dans les campagnes de votation avait fait l'objet d'une initiative parlementaire du conseiller national Andreas Gross dès 1999 (99.430 Iv.pa. Gross Andreas. Campagnes de votation. Publication des montants de soutien importants). Le 11 novembre 1999, le Conseil national a donné suite à cette initiative, qui demandait la déclaration des contributions importantes reçues pour les campagnes de votation. Il l'a cependant classée le 19 mars 2004 car la CIP, qui avait été chargée de la mise en oeuvre, n'était parvenue à aucun résultat satisfaisant malgré les travaux importants qu'elle avait réalisés. Une souscommission de la CIP avait examiné plusieurs modèles visant à instaurer la publication des dons en faveur de campagnes de votation, mais aucun n'avait été jugé praticable. Le modèle «Déclaration obligatoire» avait été rejeté car il aurait été difficile à mettre en oeuvre faute de possibilités de sanction en cas de non-respect.

Des modèles prévoyant des incitations positives, tels «Allégements fiscaux» ou «Temps d'émission radio-TV» étaient apparus comme inadaptés sur les plans technique ou juridique. La seule idée qui avait été approfondie et traduite en termes législatifs était le modèle «Accès aux espaces publicitaires»: les annonceurs qui rendraient publics les dons reçus pour une campagne de votation se verraient rembourser une partie de leurs frais d'annonce et d'affichage par la Confédération. Mais cette approche avait finalement été rejetée elle aussi, car les membres de la commission craignaient qu'elle ne crée des incitations indésirables et, en outre, doutaient que les mécanismes de contrôle prévus soient applicables. Aucun des modèles envisagés n'ayant été jugé propre à conduire au but visé, le Conseil national, sur proposition de sa commission, a renoncé à rechercher d'autres solutions permettant de mettre en oeuvre l'initiative parlementaire.

Le Conseil national n'a pas donné suite à une initiative parlementaire déposée par le conseiller national Rudolf Rechsteiner (03.434 Iv.pa. Rechsteiner Rudolf. Financement public des campagnes de votation), qui demandait d'interdire aux entreprises suivantes de participer au financement des campagnes précédant les votations populaires fédérales: entreprises détenues majoritairement par les pouvoirs publics 5253

(Confédération, cantons ou communes); entreprises détenant un monopole; entreprises dont le financement est assuré par les contributions que la loi impose aux citoyens.

1.3

Mandat de la CIP

L'examen préalable de l'initiative avait seulement permis d'esquisser des axes de travail susceptibles de réunir une majorité, laissant en suspens de multiples questions. La CIP a donc décidé, à sa séance du 9 septembre 2005, de confier la suite des travaux à une sous-commission composée de cinq membres1. Elle a chargé celle-ci de présenter des propositions de révision partielle de la loi sur la radio et la télévision afin de permettre aux partis politiques de diffuser des messages radiophoniques et télévisés avant les votations populaires. Il a également été demandé à la souscommission de se pencher plus en détail sur les propositions supplémentaires suivantes: a.

affichage gratuit dans les gares avant les votations fédérales;

b.

ajout d'une présentation des partis dans la notice explicative que la Chancellerie fédérale publie au sujet des élections au Conseil national;

c.

présentation des partis dans des brochures officielles de la Confédération;

d.

envoi à la population d'un «petit livre des partis fédéraux» quatre fois par an;

e.

envoi du matériel de propagande des partis avec le matériel de vote.

1.4

Elaboration du projet par la sous-commission

1.4.1

Synthèse des travaux

De 2006 à 2009, la sous-commission s'est réunie à douze reprises pour élaborer les bases légales présentées ici et, parallèlement, négocier avec les Chemins de fer fédéraux (CFF) et la Chancellerie fédérale des prestations gratuites pour les partis représentés à l'Assemblée fédérale. En application de l'art. 112 LParl, la souscommission s'est attaché pour ces travaux le concours d'un expert de la Section des droits politiques de la Chancellerie fédérale, d'un expert de l'Office fédéral de la communication (OFCOM) et d'un expert de l'Office fédéral de la justice (OFJ).

En exécution du mandat de la CIP, la sous-commission a conduit des auditions avec trois interlocuteurs externes de premier plan ­ la SSR, les CFF et la Chancellerie fédérale ­ pour étudier les possibilités de mise en oeuvre des propositions concernées. Les CFF comme la Chancellerie fédérale ont contribué à identifier des solutions amiables pouvant être réalisées sans nouvelles bases légales (cf. ch. 1.4.2 et 1.4.3). En revanche, des entretiens avec le Secrétaire général de la SSR ainsi qu'une délégation des directions opérationnelles des unités d'entreprise alémaniques et romandes ont montré que la SSR n'était pas disposée à mettre spontanément à la disposition des partis politiques des plates-formes de communication supplémentai1

Weyeneth, Engelberger, Gross Andreas, Joder, Lustenberger (représenté en partie par Pfister Gerhard).

5254

res propres à offrir des conditions plus équitables lors des campagnes de votation fédérales, dans l'esprit de l'initiative parlementaire.

1.4.2

Nouvelles plates-formes dans les imprimés de la Chancellerie fédérale

La sous-commission a reçu la chancelière de la Confédération Annemarie HuberHotz lors de sa séance du 2 mars 2006 afin d'entendre son avis sur les propositions de mesures du ressort de la Chancellerie que la CIP avait demandé d'étudier de plus près. Se référant à l'art. 137 de la Constitution, la chancelière de la Confédération a souligné le rôle important que jouent les partis dans notre système démocratique, se déclarant prête à donner suite au souhait du Conseil national en contribuant activement à l'amélioration de la présence publique des partis dans le cadre de diverses activités de la Chancellerie à destination du public.

Au cours de l'année électorale 2007, les partis politiques ont eu la possibilité, pour la première fois, de présenter eux-mêmes les thèmes qui leur sont essentiels dans la brochure sur l'élection du Conseil national, tirée à 5,5 millions d'exemplaires.

De plus, les partis disposent, depuis 2008, de quelques pages dans «La Confédération en bref». Cette brochure, qui est publiée chaque année à 240 000 exemplaires, est destinée notamment aux écoles. Elle pourrait être distribuée une fois par législature à l'ensemble des ménages suisses, éventuellement accompagnée d'un bulletin permettant de demander de la documentation aux partis ou de commander un exemplaire d'un «petit livre des partis politiques fédéraux», publication qui resterait à créer.

Les propositions de faire paraître quatre fois par an ce nouveau fascicule ou de joindre la propagande des partis à l'envoi du matériel de vote n'ont pas été examinées plus avant avec la chancelière de la Confédération: il était apparu entre-temps que les partis ne parviendraient pas à les mettre en oeuvre pour des raisons d'organisation. En effet, les assemblées des délégués adoptent généralement leurs mots d'ordre à un moment où les travaux préparatoires de la Chancellerie fédérale pour la distribution du matériel de vote aux cantons sont trop avancés pour qu'un envoi conjoint soit possible dans les délais impartis. La sous-commission a donc convenu d'une mesure de substitution avec la chancelière de la Confédération: c'est ainsi que les adresses Internet des partis représentés à l'Assemblée fédérale figurent depuis peu dans les notices explicatives que la Chancellerie fédérale publie au sujet des votations, afin que les électeurs
intéressés puissent s'informer eux-mêmes des recommandations de vote et des arguments des partis pour ou contre un projet, indépendamment des délais d'envoi des documents de vote.

1.4.3

Affichage gratuit et diffusion d'émissions politiques télévisées en direct dans les grandes gares des CFF

La sous-commission a accueilli le secrétaire général des CFF, M. Kurt Signer, le 2 mars 2006 et le président de la direction des CFF, M. Benedikt Weibel, le 23 juin 2006 pour entendre leur avis sur les possibilités d'affichage gratuit dans les gares avant les votations populaires.

5255

Lors de l'audition du secrétaire général, deux variantes ont été étudiées, à savoir la cession gratuite d'espace publicitaire sur les sites d'affichage existants et la création de plates-formes d'information mobiles ou fixes ou de totems, qui seraient mis à la disposition des partis pendant une période déterminée avant les élections et les votations. Le secrétaire général a relevé deux inconvénients de la cession d'espaces publicitaires gratuits dans les gares CFF: premièrement, elle ferait perdre une partie importante du chiffre d'affaires réalisé grâce à ces espaces, qui s'élève actuellement à 1 million de francs; deuxièmement, elle ne permettrait plus d'assurer l'égalité de traitement entre les entreprises dans les transports publics. A la demande de la souscommission, la direction des CFF a donc présenté les propositions précitées au Comité directeur de l'Union des transports publics (UTP). Mais la réponse transmise par la direction des CFF dans son courrier du 17 mai 2006 était négative. Le Comité directeur de l'UTP juge plus adéquat que la Confédération loue les espaces publicitaires nécessaires directement auprès des sociétés d'affichage SGA et Impacta pour les mettre gratuitement à la disposition des partis. L'UTP est opposée à la mise en place de plates-formes d'information ou de totems, car des plates-formes placées bien en vue risquent de gêner l'accès aux transports publics. De plus, l'UTP estime que la politisation des sites de l'entreprise qui accompagnerait l'installation de ces plates-formes pose un problème de fond.

Après avoir pris connaissance de cet avis, la sous-commission a organisé un second entretien le 23 juin 2006, pour discuter avec M. Weibel du point de vue des CFF au sujet des deux variantes envisagées. Le président de la direction des CFF s'est dit tout à fait ouvert au but de l'initiative parlementaire en général comme aux projets de la commission. Partageant l'idée que les CFF sont une entreprise ayant des liens particulièrement étroits avec l'Etat fédéral et qu'un nombre considérable de personnes peuvent être touchées par des messages politiques dans les gares CFF chaque jour, il a promis d'engager en interne une réflexion approfondie sur les souhaits de la sous-commission. Par courrier du 1er novembre 2006, M. Weibel a exposé à la souscommission deux idées, à concrétiser en collaboration avec les CFF: 1.

Des émissions politiques télévisées retransmises en direct pourraient être organisées dans le hall principal de la gare de Zurich avant les votations ou les élections fédérales. Les CFF sont disposés à accueillir gratuitement ces émissions.

2.

Les dates des votations fédérales et les recommandations de vote des partis pourraient être publiées sous une forme standardisée par affichage sur des panneaux de la SGA. Les CFF sont disposés à apposer gratuitement jusqu'à 5 affiches différentes dans leurs 25 plus grandes gares pendant deux semaines avant les votations ou les élections fédérales.

Les CFF ont par contre maintenu leur opposition à la variante des plates-formes d'information et des totems. En effet, ils estiment, d'une part, que le montage, le démontage, l'entretien et l'entreposage de ces structures représenteraient une charge disproportionnée et, d'autre part, que leurs contraintes d'exploitation et leurs impératifs commerciaux ne leur permettent pas de mettre à disposition des emplacements adéquats.

Lors de sa séance du 15 février 2007, la CIP a décidé de communiquer officiellement l'offre des CFF aux partis représentés à l'Assemblée fédérale. Dans le courrier qu'elle a adressé auxdits partis, la commission invitait à créer un organe commun,

5256

par exemple un comité ayant pouvoir pour agir, qui serait chargé de concrétiser l'offre en collaboration avec les CFF.

1.4.4

Auditions de la SSR: pas de résultats satisfaisants

Lors de ses séances du 22 février et du 23 mai 2006, la sous-commission a reçu le directeur général de SRG SSR idée suisse, M. Armin Walpen, accompagné les deux fois d'une délégation des directeurs opérationnels des unités d'entreprise alémaniques et romandes de la SSR2.

Considérant que la révision partielle de la LRTV envisagée devait être une solution de dernier recours, la sous-commission a souhaité prendre d'abord connaissance des éventuelles autres propositions valables que les responsables de la SSR pourraient faire pour adapter les programmes. Afin de préparer la première rencontre, elle a donc soumis à la SSR une liste de questions formulées de manière ouverte afin de savoir, d'une part, quelles dispositions la SSR était prête à prendre pour améliorer la présence des partis politiques dans les émissions existantes lors des campagnes électorales et des campagnes de votation et, d'autre part, dans quelle mesure l'entreprise était prête à mettre à disposition dans ce but des émissions supplémentaires à caractère rédactionnel. La sous-commission demandait également à la SSR son appréciation d'une réglementation légale qui prévoirait la mise à disposition d'un temps d'antenne gratuit pour la diffusion de messages des partis politiques à la radio et à la télévision.

Lors de la première rencontre, le 22 février, M. Walpen a expliqué que la SSR n'était pas entièrement libre d'accéder au voeu du Parlement et des partis représentés en son sein. A l'appui de ses dires, il a invoqué l'indépendance vis-à-vis de l'Etat et l'autonomie dans la conception des programmes garantis par l'art. 93 de la Constitution fédérale ainsi que les dispositions afférentes inscrites dans la LRTV, qui doivent s'appliquer aussi bien envers les partis politiques qu'envers les associations et les autres groupements d'intérêts. Par ailleurs, il a estimé que la présence des partis politiques dans les programmes de la SSR pouvait être qualifiée, de manière générale, de bonne à très bonne. Selon les enquêtes réalisées par le service de recherche de la SSR, la majorité du public est satisfait de la manière dont sont abordées les élections et les votations ainsi que de l'ampleur des reportages qui leur sont consacrés.

Après les élections fédérales de 2003, une minorité du public avait même estimé que la couverture de l'événement
avait été trop importante. Pour cette raison, la SSR ne voit pas la nécessité de mettre à disposition des émissions supplémentaires offrant une plate-forme aux partis politiques. M. Walpen a cependant jugé possible de discuter d'adaptations quantitatives et qualitatives en vue des élections 2007.

Concernant la diffusion gratuite de messages radiophoniques et télévisés, le directeur général a affirmé que la SSR n'avait pas d'objection de fond à opposer à son introduction par la voie législative. Il a cependant relevé que la SSR rejetait toute responsabilité quant au contenu des messages des partis et que leur diffusion ne devrait pas empiéter sur le temps alloué à la publicité commerciale.

2

Mme Ingrid Deltenre, directrice de Schweizer Fernsehen DRS; M. Walter Rüegg, directeur de Schweizer Radio DRS; M. Gérard Tschopp, directeur de la Radio Suisse Romande.

5257

La sous-commission ayant expliqué que le but de l'initiative parlementaire était d'améliorer l'équilibre du débat démocratique, les interlocuteurs sont convenus que les représentants de la SSR en discuteraient de manière approfondie avec leurs rédactions afin de présenter des propositions concrètes à la sous-commission lors d'une deuxième réunion. Le 23 mai 2006, la délégation de la SSR a ainsi exposé à la sous-commission un ensemble de propositions d'optimisation susceptibles de permettre la mise en oeuvre de l'initiative: 1.

Une séance réunissant l'ensemble des chefs de rédaction et une délégation du Parlement ou des partis sera organisée annuellement pour discuter des questions du moment concernant les comptes rendus politiques et la contribution de la SSR à la formation de l'opinion politique du public.

2.

Des négociations seront entamées avec l'OFCOM en vue de retransmettre, sur la chaîne d'information SF-Info et avec un accompagnement journalistique, davantage de débats parlementaires intéressant l'opinion.

3.

L'offre régionale de débats radiophoniques avec la participation de représentants des partis sera étoffée et institutionnalisée. DRS 1 envisage à cet effet de diffuser des débats de 90 minutes à un rythme mensuel. La stratégie des rédactions régionales est en cours de réexamen en vue de donner davantage d'importance aux sujets politiques et économiques.

4.

Radio DRS veut compléter les tables rondes dominicales organisées lors des scrutins par des tables rondes sur l'actualité quotidienne qui seraient diffusées dans le cadre de l'émission «Tagesgespräch» à midi sur DRS 1.

5.

DRS 1 étudie la création d'une chaîne d'information par DAB (Digital Audio Broadcasting). L'objectif est de compléter, à partir de la mi-2007, les reportages sur la politique suisse en diffusant des informations brèves.

Si la sous-commission a salué les propositions de la SSR, elle n'en a pas moins constaté qu'elles ne répondaient pas, ou du moins qu'elles ne répondaient qu'en partie, à l'objectif visé par l'initiative parlementaire. Ainsi, elles ne comportaient aucune mesure donnant aux partis un accès privilégié aux émissions radiophoniques et télévisées de la SSR. Pour permettre aux partis de mieux faire connaître leur position sur des dossiers concrets et contribuer ainsi à mettre en oeuvre l'initiative parlementaire, la sous-commission avait envisagé plusieurs possibilités, en particulier la diffusion de portraits des partis et d'émissions documentaires ou encore la mise à disposition d'un temps d'antenne gratuit utilisable librement.

1.4.5

Large consensus en faveur d'une modification de la loi

Se fondant sur les nombreux travaux préparatoires de sa sous-commission, la CIP est arrivée à la conclusion qu'il était nécessaire d'ancrer dans la loi la mise à disposition d'un temps d'antenne gratuit pour la diffusion de messages politiques radiophoniques et télévisés sur les chaînes de la SSR et des diffuseurs détenteurs d'une concession donnant droit à une quote-part de la redevance. Cette démarche pourrait être accomplie dans le cadre de révisions partielles de la loi sur les droits politiques (LDP) et de la loi sur la radio et la télévision (LRTV). Le 27 août 2007, la CIP a approuvé le présent projet par 18 voix contre 0 et 2 abstentions, et l'a mis en consultation jusqu'à la fin novembre 2007.

5258

1.4.6

Résultats de la consultation

Le 10 avril 2008, la CIP a pris acte des résultats de la consultation. Sur 102 organes consultés, 51 ont exprimé leur avis: il s'agit de 23 cantons, 7 partis politiques (UDC, PSS, PRD, PDC, PLS, PEV, UDF), 5 associations faîtières de l'économie et 16 autres milieux intéressés. Le Tribunal fédéral et Telesuisse ont renoncé expressément à participer à la procédure. Enfin, 10 avis ont été présentés spontanément à la commission.

Si un quart des participants ­ soit 6 cantons, 1 association faîtière de l'économie, 3 partis politiques et 4 autres participants ­ ont jugé que l'avant-projet allait dans la bonne direction, les trois quarts l'ont, par contre, rejeté.

De l'avis de 17 cantons, 12 associations faîtières de l'économie et 13 autres milieux, les messages politiques liés à une votation tels que prévus par la CIP-N ne sauraient contribuer valablement à amener davantage d'équité dans la formation de l'opinion et de la volonté populaires; au contraire, par la multiplication des formules choc et des raccourcis carricaturaux qu'ils provoqueraient dans le débat politique, ils auraient plutôt un effet contre-productif sur les téléspectateurs et les auditeurs. La plupart des participants ont souligné la complexité des dispositions réglementant les points de détail, comme par exemple la répartition du temps d'antenne.

Le projet a bénéficié de davantage de soutien auprès des partis politiques: si l'UDC, le PLS et le PEV l'ont rejeté, le PSS, le PDC et l'UDF l'ont approuvé. Quant au PRD, il a émis des doutes sur la possibilité de mettre en oeuvre les dispositions de manière effective.

1.4.7

Remaniement du projet

La CIP a décidé de maintenir l'orientation générale du projet, mais de le renvoyer à sa sous-commission en la chargeant de l'améliorer après analyse approfondie des résultats de la consultation.

La sous-commission dans sa nouvelle composition3 s'est réunie par trois fois, entre août 2008 et février 2009, pour effectuer les adaptations voulues. Priorité a été donnée à des simplifications visant à conserver, au niveau de la loi (projet A), uniquement les dispositions fondamentales; partant, les réglementations «techniques» ont été transférées dans une ordonnance de l'Assemblée fédérale (projet B), après avoir été remaniées pour être plus facilement applicables.

Le 7 mai 2009, la CIP a examiné le projet adapté par sa sous-commission; au vote sur l'ensemble, elle a adopté par 14 voix contre 8 le projet de loi et le projet d'ordonnance à l'intention du Conseil national.

La minorité de la commission propose au Conseil de ne pas entrer en matière sur le projet. Elle considère en effet, non seulement que la loi fédérale et ses dispositions d'exécution ne seraient pas de nature à contribuer à l'équité des campagnes de votation, mais qu'autoriser la diffusion de spots se traduirait par des campagnes de votations menées encore davantage à coups de slogans et de simplifications grossières. En outre, le projet risque à ses yeux d'entraîner une multiplication des procédu3

Engelberger, Gross Andreas, Joder, Pfister Gerhard, Wobmann

5259

res qui non seulement surchargeront l'autorité de plainte, mais pourraient remonter jusqu'au Tribunal fédéral lui-même, dans le cadre d'une procédure analogue à celle qui s'applique aux recours en matière de droit de vote. Or, ces procédures seraient à la charge des citoyens, de même que ce serait eux qui, en fin de compte, par le biais des redevances de radio et télévision, supporteraient le coût de la diffusion gratuite des spots. La minorité rappelle enfin que trois quarts des participants à la consultation ont rejeté le projet, qui est contesté même au sein des partis politiques.

2

Grandes lignes du projet

2.1

Importance des partis politiques dans la démocratie directe

2.1.1

Article sur les partis dans la Constitution fédérale

La Constitution fédérale entièrement révisée de 1999 reconnaît pour la première fois que les partis constituent un élément du droit matériel constitutionnel de la Suisse puisqu'elle leur consacre une disposition à part entière. Aux termes de l'art. 137 Cst., les partis politiques contribuent à former l'opinion et la volonté populaires. Le Parlement a toutefois souhaité que les partis ne puissent pas faire valoir de prétentions financières à partir de cette disposition. Le commentaire saint-gallois de la Constitution fédérale définit les partis comme des associations de personnes organisées sans limite de durée dans le but de participer à la formation de la volonté publique (Schmid Gerhard/Schott Markus, Art. 137, in: Ehrenzeller Bernhard, et al., Die schweizerische Bundesverfassung, Kommentar, 2e édition, St-Gall 2008, p. 2134). En tant que tels, ils accomplissent tout un ensemble de tâches essentielles pour le fonctionnement des institutions étatiques. Ils jouent un rôle important dans l'exercice des droits populaires, dans la procédure législative et dans la désignation des autorités politiques à tous les niveaux de l'Etat (du recrutement jusqu'à l'élection des membres des autorités). Les partis constituent donc un trait d'union essentiel entre le peuple et la puissance publique.

En particulier lors des votations, les partis apportent une contribution décisive à la structuration de la volonté politique: d'une part, leurs représentants au sein des parlements jouent un rôle actif dans le processus législatif; d'autre part, ils influent très directement sur la formation de l'opinion et de la volonté populaires avant les votations. Les partis politiques jouent donc un rôle à ne pas sous-estimer dans le bon fonctionnement de la démocratie.

2.1.2

Tendance à l'érosion des partis politiques

L'importance des partis politiques pour le fonctionnement de la démocratie ne se reflète cependant pas toujours dans la considération dont ils jouissent auprès du public. Depuis une vingtaine d'années, la base des partis subit une érosion. Malgré les créations ponctuelles de partis locaux et cantonaux, les sections locales des partis représentés au Conseil fédéral qui existaient déjà en 1990 ont perdu à ce jour un cinquième de leurs membres environ (Ladner Andreas/Meuli Urs, Erosionstendenzen an der Parteibasis, Zurich 2005). La diminution du nombre de militants dans les partis pendant la même période est encore plus remarquable: elle représente 15 % au 5260

PS, 30 % au PRD et à l'UDC et plus de 40 % au PDC. Aujourd'hui, les partis réunis ne comptent plus que 80 000 militants environ. Cette évolution est principalement imputable à la baisse d'intérêt des catégories plus jeunes de la population: les moins de 45 ans ne représentent aujourd'hui que 43 % des militants, si bien que les partis ne parviennent plus à combler les places vides laissées par la génération précédente, avec toutes les pertes (ressources financières et autres) que cela implique. Parallèlement, les journaux d'opinion liés aux partis, qui avaient occupé le premier plan pendant des décennies et jouaient traditionnellement un rôle déterminant lors des campagnes de votation et des campagnes électorales, ont presque tous disparu.

Cette tendance pèse d'autant plus lourd dans la balance que des groupements d'intérêts financièrement puissants interviennent de plus en plus dans les campagnes de votation en fonction des enjeux: recourant à la publicité professionnelle sur l'ensemble du territoire, ils lancent leurs propres campagnes, ce qui leur permet d'influer de manière excessive sur la formation de l'opinion et de la volonté populaires et, in fine, sur le résultat des scrutins en contournant les partis. Ce phénomène, qui présente le risque que la volonté populaire soit soumise à une influence unilatérale, porte en outre atteinte à la considération dont jouissent les partis et, avec eux, les institutions politiques du pays.

2.1.3

Soutien des partis en Suisse et en Europe

Les débats politiques conduits ces dernières années ont mis en évidence l'impossibilité de lutter contre le phénomène d'érosion des partis politiques au moyen de subventions publiques. Parmi les solutions esquissées, toutes celles fondées sur un soutien direct des partis ainsi que la majorité de celles prévoyant un soutien indirect des partis par les pouvoirs publics ont échoué à réunir une majorité. Elles se sont heurtées à un obstacle majeur: la question du financement des partis est généralement liée à la question de la transparence financière.

Le rapport du 23 novembre 1988 sur l'aide aux partis politiques (88.075 MCF. Aide aux partis politiques) établi en réponse à un postulat des deux conseils (Po. des deux conseils du 7 juin 1984 concernant l'Iv.pa. Hubacher «Démocratie politique. Mesures d'entraide») marque une étape importante dans le débat: dans ce rapport, le Conseil fédéral dresse l'inventaire des instruments d'aide aux partis politiques, dont il analyse les possibilités et les limites. Ce rapport a suscité de multiples interventions parlementaires, dont le seul résultat notable a été l'augmentation des contributions allouées aux groupes parlementaires (voir notamment 93.445 Iv.pa. Zisyadis.

La transparence financière des partis politiques; 94.3520 Po. Carrobbio. Partis politiques. Exemption fiscale; 00.3033 Mo. Groupe G. Publicité du financement des partis; 00.3056 Po. Rennwald. Reconnaissance de la formation politique; 00.3395 Mo. Brunner Toni. Partis politiques. Indemnisation plus équitable des sections juvéniles; 02.3714 Mo. Maillard. Instauration de règles dans le financement des partis politiques et des campagnes électorales).

Ces dernières années, trois nouvelles initiatives parlementaires demandant des aides directes ou indirectes en faveur des partis ont été déposées. Alors que le Conseil national a refusé de donner suite à deux d'entre elles (06.406 Iv.pa. Nordmann.

Transparence du financement des partis politiques, des lobbies, des campagnes électorales et des campagnes de votation; 06.407 Iv.pa. Fehr Hans-Jürg. Indemnisation des prestations indispensables fournies par les partis politiques), une troisième 5261

(06.463 Iv.pa. Reimann) a été approuvée par les deux conseils (une divergence subsiste, qui devrait être éliminée à la session d'été 2009); elle prévoit que les versements en faveur de partis politiques puissent faire l'objet de déductions fiscales.

Ainsi, les seules indemnités versées directement par la Confédération sont restées, jusqu'à ce jour, les subventions allouées aux groupes parlementaires en leur qualité d'organes du Parlement, et non pas aux partis politiques représentés au Parlement.

Ces fonds ne peuvent être utilisés que dans le but prévu, et ne peuvent donc servir à financer les activités générales des partis. Par contre, les partis bénéficient de multiples aides indirectes revêtant la forme de prestations en nature (p. ex. traitement préférentiel dans les imprimés officiels, impression et envoi des listes électorales par les cantons, etc.).

De nombreux pays d'Europe occidentale ont un système de financement direct des partis (sous la forme de subventions de base et de subventions électorales) associé à des prestations publiques indirectes (p. ex. subventions en faveur des organes de presse des partis). Des études scientifiques montrent en outre que les partis de nombreux pays européens (A, D, I, DK, N, B, FIN, S, NL, IRL, GB) disposent d'un temps d'antenne gratuit sur les radios et les télévisions (Brändle Michael, Strategien der Förderung politischer Parteien: Eine vergleichende Untersuchung der Parteienförderung in der Schweiz, Grossbritannien und den Niederlanden, Berne 2002, p. 58 s. et 117 s.).

C'est ce dernier système d'aide indirecte qui est repris dans le présent projet de loi, après avoir été adapté aux spécificités de la démocratie référendaire suisse.

2.1.4

Nouvelles bases légales pour des campagnes de votation plus équitables

Si l'initiative parlementaire demande que les campagnes de votation fédérales soient plus équitables et que les conditions de formation de l'opinion et de la volonté populaires soient améliorées, c'est pour renforcer non seulement les partis politiques, mais tous les acteurs politiques impliqués dans les votations, c'est-à-dire aussi les comités d'initiative et de référendum. Les auteurs d'initiatives ou de référendums jouent naturellement un rôle crucial dans la formation de l'opinion et de la volonté publiques lors des campagnes de votation fédérales. Or, les comités ont souvent des ressources financières limitées pour faire campagne en vue des votations dont ils sont à l'origine. Dans un environnement fortement médiatisé, leur voix risque souvent d'être couverte par celles des groupements d'intérêts financièrement puissants.

Il n'est pas moins préoccupant du point de vue institutionnel de constater que certaines campagnes n'ont pratiquement aucun impact public et médiatique parce que, n'ayant pas d'enjeux financiers significatifs, elles ne recueillent que des fonds minimes. Cette situation est choquante, surtout pour les comités qui, grâce à l'énergie déployée par leurs partisans, parviennent à obtenir l'organisation d'une votation populaire malgré leurs faibles moyens financiers.

Le présent acte modificateur unique ­ révision partielle de la LDP associée à une révision partielle de la LRTV et de la LTF (projet A) ­ s'efforce de remédier à cette situation en instaurant un droit à l'antenne pour diffuser gratuitement des messages avant les campagnes de votation fédérales, accordé non seulement aux partis organisés en groupe à l'Assemblée fédérale, mais aussi aux comités à l'origine d'initiatives 5262

populaires et de référendums répondant à des critères bien définis (cf. ch. 2.2 infra).

Cette prestation de service public doit être consentie par la SSR ainsi que par les autres diffuseurs détenteurs d'une concession de radio ou de télévision ouvrant droit à une quote-part de la redevance, c'est-à-dire qui bénéficient de l'argent public. Il n'a pas été nécessaire de préparer une loi spéciale, car ces dispositions ne font que compléter les obligations des diffuseurs de programmes radiophoniques et télévisés détenteurs d'une concession ouvrant droit à une quote-part de la redevance.

Par ailleurs, une ordonnance de l'Assemblée fédérale (projet B) règle les points de détail concernant les droits des partis, des comités référendaires et des comités d'initiative (en particulier la répartition du temps d'antenne entre les ayants droit), désigne les programmes tenus de diffuser les messages et définit les modalités de diffusion.

La commission est consciente que son projet de loi, comme la proposition ­ soutenue par la Chancellerie fédérale et les CFF ­ visant à créer des plates-formes d'information supplémentaires, ne permet pas d'atteindre entièrement l'objectif visé par l'initiative parlementaire. Elle est cependant convaincue que l'introduction d'un temps d'antenne gratuit pour la diffusion de messages télévisés et radiophoniques est de nature à encourager un plus large public à s'intéresser au débat politique précédant les votations fédérales. En effet, ces messages peuvent contribuer à éveiller l'intérêt de la population et conduire à un relèvement du niveau des débats. Enfin, ils peuvent interpeller des électeurs qui s'intéressent peu à la politique et ne se rendent habituellement pas aux urnes.

2.2

Instauration du droit à un temps d'antenne gratuit dans la loi fédérale sur les droits politiques (LDP)

2.2.1

Introduction

L'obligation des diffuseurs d'accorder un temps d'antenne gratuit avant les votations fédérales, la désignation des ayants droit, les exigences minimales quant au contenu des messages et l'interdiction de la publicité sont réglées dans quatre nouveaux articles (art. 15a à d) de la loi fédérale sur les droits politiques partiellement révisée.

S'y trouve également la norme de délégation pour l'ordonnance de l'Assemblée fédérale réglant les modalités de diffusion des messages (art. 15a, al. 5, let. a à f).

Les comités et partis ayant droit au temps d'antenne gratuit produisent et financent eux-mêmes leurs messages. Par conséquent, ils choisissent librement le producteur de leurs messages, dont la production n'est pas soutenue par des fonds publics (p. ex. les recettes de la redevance de réception). Comme la loi ne fixe pas de plafond de dépenses (art. 15b LDP), il se peut qu'un certain déséquilibre apparaisse entre les ayants droit selon leur capacité financière.

La révision partielle de la LRTV, qui constitue la deuxième partie de l'acte modificateur unique, règle la procédure de surveillance. Sur le plan du contenu, les messages doivent respecter les interdictions découlant du droit international et de la législation suisse sur la radio et la télévision (art. 4, al. 1 et 3, LRTV). Les diffuseurs ont le droit de soumettre à l'autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (autorité de plainte) les messages qui leur paraissent contraires au droit afin qu'elle détermine s'ils sont ou non conformes aux dispositions applicables (art. 15c LDP et art. 83, al. 1bis, LRTV).

5263

De plus, la loi sur le Tribunal fédéral a été complétée (révision partielle) par une disposition qui régit le droit de recours applicable aux décisions de la Chancellerie fédérale relatives à l'attribution du temps d'antenne. Cette disposition est analogue à celle qui s'applique aux recours en matière de droit de vote.

Enfin, la norme de délégation contenue à l'art. 15a, al. 5, let. a à f, LDP est concrétisée dans une ordonnance de l'Assemblée fédérale (projet B); ce texte prévoit en outre que les diffuseurs soumis à l'obligation doivent consacrer un total de 63 minutes de temps d'antenne à la diffusion de messages politiques, du cinquième à l'avant-dernier samedi précédant le jour du scrutin. Sur ces 63 minutes ­ divisées en trois contingents hebdomadaires de 21 minutes ­, 50 sont réparties proportionnellement entre les partis en fonction du nombre de sièges qu'ils occupent au Parlement, et 13 le sont selon une clé de répartition équitable entre les comités d'initiative et les auteurs du référendum. La diffusion a lieu sous la forme de spots d'une durée d'au moins 15 secondes jusqu'à un maximum de 30 secondes, regroupés dans des fenêtres d'une durée maximale d'une minute, placées aux heures de grande écoute («prime time»: pour la télévision de 18h à 22h et pour la radio de 11h à 14h et de 17h à 19h).

2.2.2

Pas de messages lors des élections au Conseil national

Il convient d'établir une distinction entre les votations fédérales et l'élection du Conseil national. Ce dernier étant élu au scrutin proportionnel, ce sont les partis, et non pas les comités d'initiative ou de référendum, qui doivent contribuer à former l'opinion et la volonté populaires. Des groupements constitués pour la circonstance peuvent également présenter des candidatures s'ils parviennent à réunir les signatures nécessaires. Or, dans ce contexte, la Constitution fédérale n'admet pas que l'on puisse favoriser les partis sans justification objective.

2.2.3

Les acteurs des votations: partis, comités d'initiative et de référendum

La Suisse n'a pas de loi fédérale sur les partis politiques. Dans une démocratie référendaire, une loi de ce genre poserait d'ailleurs des problèmes. En effet, l'exercice des droits découlant de la démocratie directe ne sauraient être attachés aux partis. Au contraire, le système constitutionnel veut que l'exercice des droits populaires soit ouvert à toutes les forces politiques, ce qui suppose notamment que des groupements ad hoc puissent se constituer spontanément pour exercer ces droits.

C'est pourquoi les partis politiques suisses doivent être soutenus non pas en tant que tels, mais du fait des spécificités que présente le processus de formation de la volonté politique en Suisse: avant les votations populaires fédérales, les partis doivent pouvoir jouer pleinement leur rôle de leaders d'opinion en présentant au peuple des éléments de décision. Ce qui est en jeu, ce ne sont pas les partis, mais le discours politique et les repères fournis au corps électoral. C'est pourquoi la diffusion de messages politiques sur les chaînes détentrices d'une concession et bénéficiant du financement de la redevance ne doit pas être généralisée, mais réservée aux campagnes précédant les votations populaires fédérales.

Dans une démocratie directe, les votations populaires ont pour acteurs non seulement les partis, mais aussi les comités d'initiative et les comités référendaires, qui 5264

jouent un rôle politique et juridique important dans les votations dont ils sont à l'origine. Il ne faut donc pas que, le cas échéant, les premiers soient favorisés par rapport aux seconds. En effet, l'enjeu ultime est la protection du processus de formation de l'opinion et de la volonté populaires, et non pas la protection des partis.

Les comités à l'origine de votations populaires fédérales doivent pouvoir participer à la campagne autant que les partis. La seule différence réside dans la base constitutionnelle applicable: l'art. 137 Cst. pour les partis, les art. 138 et 139a Cst. pour les comités d'initiative et les art. 141 et 163 à 165 Cst. pour les comités référendaires.

2.2.4

Responsabilité de la cohérence de l'ordre juridique

La nécessité que les partis, au même titre que les comités d'initiative et de référendum, participent à la formation de l'opinion et de la volonté populaires lors des votations résultant d'initiatives populaires découle non pas des bases constitutionnelles écrites, mais de la répartition des rôles instituée par le système constitutionnel.

En effet, les comités d'initiative et de référendum forment des oppositions ponctuelles.

Les initiatives populaires fédérales ne peuvent être soustraites à la décision du souverain pour des raisons politiques ou juridiques, sauf rares exceptions (nonrespect des règles impératives du droit international, absence d'unité de la forme et de la matière, impossibilité de mise en oeuvre). Mais aucun comité d'initiative ou de référendum n'a l'obligation de s'assurer qu'il n'y ait aucune contradiction interne dans l'ordre juridique; aucune juridiction fédérale n'y veille non plus (cf. art. 191 Cst.). La responsabilité de la cohérence de l'ordre juridique dans son ensemble appartient aux seules Chambres fédérales, c'est-à-dire aux représentants élus par le peuple et les cantons. Ils doivent au minimum pouvoir intervenir dans le processus démocratique de formation de la volonté pour rendre le souverain attentif au risque de contradiction dans l'ordre juridique. Les élections ayant lieu au système proportionnel dans la plupart des cantons, les partis réunissent les conditions pour l'élection de délégations représentatives dans les parlements (groupes parlementaires). Cela justifie que les partis défendent l'opinion de leurs membres qui, dans le cadre de leur groupe parlementaire, ont participé à la décision prise à la majorité du parlement (voir aussi le ch. 2.3.7 infra).

2.2.5

Différences entre initiative populaire et référendum

L'initiative populaire et le référendum facultatif sont deux droits populaires fondamentalement différents à bien des égards. L'absence de parallélisme dans la teneur des normes constitutionnelles relatives à l'un et l'autre l'illustre bien: l'initiative constitutionnelle doit se présenter sous la forme d'un texte précis présentant une unité et émaner d'un comité dont les membres sont clairement identifiés4; elle ne peut être lancée sous cette forme par un canton. Le référendum législatif facultatif, par contre, est soumis à moins de formalisme: il peut être demandé aussi bien par des cantons que par une partie du peuple. De plus, un référendum peut être demandé 4

Cf. art. 68, al. 1, let. e, art. 72, al. 2, let. a, et art. 73, al. 1, LDP; art. 23, al. 3bis et 4, de l'ordonnance du 24 mai 1978 sur les droits politiques (ODP; RS 161.11).

5265

pour des raisons très diverses, voire contradictoires. Depuis le relèvement du nombre de signatures prescrit en 1977, 40 % des référendums facultatifs ayant abouti avaient été demandés par des groupes d'opposants souvent disparates.

2.3

Critères de calcul des quotes-parts du temps d'antenne

Il est fondamental de définir des critères aisément applicables pour calculer la quotepart du temps d'antenne qui revient aux partis, aux comités d'initiative et aux comités référendaires pour diffuser leurs messages radiophoniques et télévisés lors des campagnes de votation. On ne peut pas dire que la jurisprudence du Tribunal fédéral en la matière soit constante, ne serait-ce qu'en raison des multiples modifications apportées aux bases légales pertinentes; la tendance est cependant clairement à une plus grande sévérité concernant l'application du principe de l'égalité des chances.

Mais cela n'exclut pas de pratiquer des différences de traitement dans le souci d'un rééquilibrage des rapports de force si cette différenciation a des fondements objectifs, n'est pas entachée d'arbitraire et obéit à des motifs importants.

2.3.1

Inapplicabilité à l'élection du Conseil national

S'agissant d'élections, l'exclusion de partis non représentés aux Chambres fédérales d'émissions radiophoniques et télévisées dépasse clairement ce qui constitue, aux yeux du Tribunal fédéral, une différence de traitement acceptable (cf. ATF 124 I 71 consid. 7, 113 Ia 300 s.). Si le Tribunal fédéral a pu, à l'échelon cantonal, juger admissible que les candidats au Conseil d'Etat d'un parti encore non représenté au parlement ne figurent dans une émission télévisée qu'au deuxième rang et avec un temps de parole plus court, il a néanmoins invité à rechercher des compensations dans le cadre d'autres émissions en faveur de ce parti et de ses candidats (ATF 125 II 504 à 506; lire à ce sujet le ch. 2.6.8 infra). A contrario, il a jugé répréhensible le fait qu'un candidat à une élection communale non inscrit avait été exclu de fait de l'affiche électorale présentant l'ensemble des partis locaux que les autorités avaient financée sur leurs recettes fiscales, et il a sanctionné cette exclusion en annulant l'élection concernée (ATF 113 Ia 300 s.). Un cas intermédiaire est illustré par l'annulation d'une réglementation cantonale qui voulait faire dépendre l'octroi d'une contribution publique aux frais de campagne électorale de l'obtention d'au moins cinq des 130 sièges à pourvoir (ATF 124 I 71). Pour être mince, la doctrine afférente n'en est pas moins stricte. Et bien qu'il critique en de multiples occasions les différences de traitement entre grands et petits partis qui ne reposent pas sur des motifs légitimes, le Tribunal fédéral a estimé lui aussi que «les plus petits partis ou mouvements politiques [...] ne sauraient [...] revendiquer un temps d'antenne semblable aux formations politiques plus importantes et aux mêmes heures d'écoute» (ATF 119 Ib 250).

2.3.2

Votations populaires

S'agissant des campagnes précédant les votations populaires, il faut définir des critères permettant de calculer de manière objective et pratique la répartition du 5266

temps d'antenne entre les partis représentés au Parlement fédéral, d'une part, et les comités d'initiative ou de référendum, d'autre part.

2.3.3

Référendum populaire facultatif

Actuellement, quelque 4,9 millions de personnes disposent du droit de vote au niveau fédéral. Pour qu'un référendum aboutisse, il faut qu'il obtienne le soutien de 50 000 électeurs; une initiative populaire a besoin de 100 000 soutiens. Si l'on calcule le quotient provisoire dans le système proportionnel selon la méthode Hagenbach-Bischoff pour les différents cantons lors des dernières élections au Conseil national, on arrive régulièrement à un chiffre d'environ 10 000 votants en moyenne pour chaque représentant élu (un calcul de contrôle sommaire donne le même résultat: dans l'ensemble de la Suisse, 2,2 millions d'électeurs environ se rendent régulièrement aux urnes pour pourvoir les 200 sièges de la Chambre basse).

Cela signifie qu'un référendum reçoit le soutien d'au moins autant d'électeurs qu'un très petit groupe parlementaire. Il est rare qu'un référendum récolte plus de 200 000 signatures: cela correspondrait à la légitimité démocratique d'un groupe parlementaire de 20 personnes.

2.3.4

Référendum demandé par les cantons

Pour aboutir, un référendum cantonal nécessite le soutien de huit cantons au moins.

Dans la plupart des cantons, la décision de demander un référendum appartient au parlement. Exceptionnellement, un référendum cantonal peut être demandé par le biais d'une initiative populaire. Encore plus rarement, la décision est déléguée au Conseil d'Etat (p. ex. dans le canton de Saint-Gall). La légitimité démocratique repose donc, en règle générale, sur la majorité du parlement élu par le peuple. En simplifiant légèrement, on peut dire qu'en moyenne 40 % des 4,9 millions d'électeurs se rendent aux urnes pour élire les parlements cantonaux, qui statuent chacun à la majorité absolue.

Les huit cantons ayant la population la plus importante comptent quelque 3,2 millions d'électeurs, contre 0,25 million pour les huit cantons ayant la population la moins nombreuse. Si l'on reprend les hypothèses précitées, un référendum demandé par la majorité absolue des parlements des huit cantons les plus peuplés repose sur une base électorale de quelque 600 000 voix, contre 50 000 s'il est lancé par les huit cantons les moins peuplés. Les quorums à atteindre pour que les cantons demandent un référendum en s'appuyant sur une initiative populaire sont nettement plus bas, de même que le nombre de voix habituellement obtenus par les conseillers d'Etat lors de leur élection. Globalement, la légitimité démocratique des référendums demandés par les cantons est donc tout à fait comparable à celle des référendums populaires.

Le seul référendum demandé par des cantons qui ait abouti depuis la création de cet instrument (en 1874) unissait onze cantons (FF 2003 6470: BE, OW, GL, SO, BS, SH, SG, GR, VD, VS et JU), représentant environ 2,13 millions d'électeurs.

5267

2.3.5

Initiative populaire

Pour aboutir, une initiative populaire doit réunir le soutien d'un nombre de votants comparable à celui nécessaire pour élire aux Chambres fédérales un groupe de dix représentants. De nos jours, les initiatives populaires sont rarement déposées avec plus de 200 000 signatures valables.

2.3.6

Bilan

Les analyses qui précèdent sont résumées dans le tableau synoptique ci-dessous: Référendum populaire

Minimum Correspond à l'électorat d'un groupe parlementaire de ......

membres Maximum Correspond à l'électorat d'un groupe parlementaire de ......

membres

Référendum demandé par les cantons

Initiative populaire

50 000

50 000

100 000

5

5

10

200 000

600 000

200 000

20

60

20

En d'autres termes, la légitimité démocratique d'un comité référendaire correspond à celle d'un groupe parlementaire de petite taille ou de taille moyenne, tandis que celle d'un comité d'initiative correspond à celle d'un groupe parlementaire de taille moyenne. Le quorum relativement élevé applicable aux référendums demandés par les cantons correspond à la légitimité démocratique d'un groupe parlementaire de taille petite à grande.

Ces comparaisons plaident pour que l'on alloue aux comités d'initiative ou aux auteurs d'un référendum ­ soit l'ensemble des comités ayant lancé un référendum ­ à peu près la même quote-part de temps d'antenne qu'aux partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale au sein d'un groupe parlementaire.

2.3.7

Objections et contre-arguments

Une initiative populaire ou un référendum permet, certes, de faire voter les électeurs sur un projet donné, ce qui peut plaider pour l'octroi d'une quote-part de temps d'antenne plus importante aux groupements qui sont à l'origine de la tenue du scrutin. Néanmoins, il ne faut pas oublier que les comités d'initiative et de référendum ne sont pas responsables des contradictions internes que l'acceptation de leurs demandes, motivées par des oppositions ponctuelles, peut produire dans l'ordre juridique. Seuls les représentants du peuple doivent veiller à la cohérence interne de l'ordre juridique.

5268

Les représentants du peuple sont élus à 80 % au système proportionnel (Conseil national: 194 membres sur 200; Conseil des Etats: 2 des 46 membres; total: 196 élus sur 246), grâce aux partis qu'ils représentent.

Les Chambres fédérales sont seules responsables de la cohérence interne du système juridique, alors même que le droit a des sources concurrentes. Il est donc justifié, au regard de la Constitution fédérale notamment, que les partis puissent défendre l'opinion de leurs membres ayant conduit à la décision majoritaire du Parlement, c'est-à-dire à l'adoption de la loi ou à la recommandation de vote (cf. art. 139, al. 3, art. 156, al. 1 et 2, art. 159, al. 1 et 2 et art. 163 Cst.). Il est conforme à la volonté de la Constitution fédérale que les autorités responsables disposent des moyens minimums nécessaires pour accomplir leurs tâches (cf. art. 139, al. 3, phr. 2, Cst.).

2.3.8

Ordre de diffusion des messages

Etant donné la qualité d'«auteur» des comités d'initiative ou de référendum, il est normal que ceux-ci aient une place de choix dans l'ordre de diffusion: leurs messages seront donc diffusés au début de la campagne parce qu'ils sont à l'origine de la tenue du scrutin et à la fin parce que l'enjeu du scrutin revêt une importance particulière pour eux (cf. ch. 2.2.3 supra et ch. 3.1 infra, commentaire de l'art. 15a, al. 4, ch. 3.1.1).

2.4

Réglementation de la surveillance dans la loi sur la radio et la télévision (LRTV)

La surveillance de la légalité du contenu des messages incombe à l'autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (autorité de plainte).

Celle-ci vérifie, avant la diffusion, que les messages produits par les partis et que lui soumettent les diffuseurs sont compatibles avec les dispositions applicables (art. 83, 86 et 86a, LRTV).

L'autorité de plainte vérifie dans les deux semaines si le message contrevient à l'art. 4, al. 1 et 3, LRTV (donc sans tenir compte des obligations de fidélité et de diversité), s'il viole les droits de la personnalité protégés par l'art. 28 CC ou s'il contient des affirmations fausses. Si l'autorité de plainte juge que le message est illégal, celui-ci n'est pas diffusé. Il est exclu que l'autorité de plainte puisse autoriser la diffusion d'un message partiellement illégal en l'assortissant de charges. La décision de l'autorité de plainte est prépondérante dans la mesure où l'effet suspensif ne peut être accordé à un éventuel recours auprès du Tribunal fédéral (art. 86a, al. 4, LRTV).

Les contrôles légaux usuels (du contenu par l'autorité de plainte, du respect des dispositions sur la publicité par l'OFCOM) sont possibles après la diffusion des messages (art. 86, al. 1 et 5, LRTV).

5269

3

Commentaire par article

3.1

Loi fédérale précisant le rôle des partis politiques dans la formation de l'opinion et de la volonté populaires (projet A)

3.1.1

Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP)

Art. 11, al. 3bis (nouveau) Certains cantons de Suisse occidentale possèdent des bases légales, assorties d'une jurisprudence depuis quelques années, permettant de distribuer aux électeurs un aperçu des mots d'ordre adoptés par tous les partis politiques représentés au parlement cantonal au sujet des objets soumis à votation. Ces dernières années, deux cantons ont étendu cette pratique aux objets fédéraux sans en avoir référé à Berne.

Comme le constatait le Conseil fédéral dans sa réponse à une question parlementaire (06.1103 Q Berberat. Le Conseil fédéral veut-il museler les gouvernements cantonaux?), une telle pratique pose un problème de nature formelle si elle ne s'appuie pas sur une base légale fédérale. Aucune autorité n'a le droit de compléter à sa guise le matériel de vote. Selon le droit en vigueur (art. 11, al. 1 à 3, LDP), le matériel de vote remis en vue d'une votation fédérale comprend exclusivement le bulletin de vote, les textes soumis à votation, les explications du Conseil fédéral et les documents qui, selon le droit cantonal, permettent aux électeurs de voter valablement, comme la carte de légitimation, l'enveloppe électorale et le timbre de contrôle.

La commission est favorable à ce qu'un aperçu des recommandations de vote des partis représentés dans les parlements cantonaux soit annexé au matériel de vote, car ce document politiquement neutre contribue à informer les électeurs. Un nouvel art. 11, al. 3bis crée donc une base légale qui consacre une pratique déjà en vigueur dans certains cantons et qui permet aux autres de l'introduire.

Art. 15a (nouveau)

Messages politiques liés à une votation

Cette disposition définit l'objet de l'obligation (mise à disposition de temps d'antenne gratuit pour des messages politiques avant les votations populaires fédérales) ainsi que le cercle des diffuseurs de programmes qui y sont assujettis.

L'al. 1 cite en premier lieu la SSR (elle fait l'objet d'une réglementation détaillée aux art. 23 à 37 LRTV; la loi ne définit cependant pas ses programmes, mais la concession octroyée par le Conseil fédéral). Sont également citées les autres chaînes détentrices d'une concession qui, sous le régime de la LRTV adoptée le 24 mars 2006, reçoivent une quote-part du produit de la redevance de réception; il s'agit de 13 chaînes de télévision régionales et 21 stations de radio OUC locales et régionales, dont 9 diffuseurs complémentaires sans but lucratif dans des agglomérations (cf.

décisions d'octroi des concessions des 7 juillet et 31 octobre 2008). A noter que les programmes et les décrochages de chaînes étrangères diffusés en Suisse ou dans des régions linguistiques déterminées ne bénéficient pas de la redevance.

L'al. 1 indique en outre clairement que le droit à un temps d'antenne gratuit n'est valable qu'avant les votations populaires (et donc pas avant des élections, ni en dehors d'un scrutin). La mise à disposition d'un temps d'antenne gratuit implique que les partis politiques et les comités qui y ont droit n'ont rien à payer, pas même 5270

les frais administratifs des diffuseurs, et que les diffuseurs doivent supporter euxmêmes l'éventuel manque à gagner que cette mise à disposition peut entraîner. Le financement de la réalisation des messages est réglé à l'art. 15b.

Les al. 2 et 3 définissent les ayants droit à un temps d'antenne gratuit. La formule proposée repose sur l'hypothèse que les ayants droit produisent un message radio et un message télévisé par scrutin (dans plusieurs langues) pour qu'il soit diffusé par tous les diffuseurs assujettis à l'obligation. En d'autres termes, le droit au temps d'antenne gratuit permet uniquement de s'exprimer pendant 15 secondes au minimum et 30 secondes au maximum (cf. ch. 3.2) sur un ou plusieurs projets inscrits au programme du prochain scrutin. Les partis peuvent donc faire un choix parmi les objets soumis au vote. En ce qui concerne les comités (al. 3), il est clair qu'ils ne peuvent s'exprimer qu'au sujet du projet portant sur l'initiative qu'ils ont lancée ou contre lequel ils ont obtenu le référendum.

Limiter davantage le droit au temps d'antenne gratuit ne serait pas sans poser de problème. Le temps d'antenne que peuvent proposer les détenteurs d'une concession est de toute façon très limité. Si l'on veut contribuer à augmenter l'intérêt du grand public pour la politique, il faut que le temps d'antenne gratuit soit situé dans des créneaux horaires clés de la grille quotidienne des programmes. En outre, si le temps accordé à chaque message est trop court, cela ôte toute possibilité de s'exprimer; le temps d'antenne serait alors inutilisable, et la diffusion de messages vides de contenu ne ferait qu'irriter les électeurs. Ainsi, l'attribution de temps d'antenne gratuit au prorata des effectifs aux Chambres fédérales, sachant que certains partis comptent un ou deux représentants seulement, ne serait bénéfique pour personne.

Mieux vaut donc adopter une réglementation prévoyant que seuls les partis représentés dans un groupe parlementaire peuvent s'exprimer gratuitement sur les ondes de la radio et de la télévision. Le représentant unique d'un parti a la possibilité de rallier un groupe ou, le cas échéant, de s'associer avec d'autres députés partageant les mêmes orientations politiques pour constituer un groupe (cf. art. 61, al. 2, LParl, RS 171.10) afin de bénéficier d'un temps d'antenne
gratuit. Cette formule devrait permettre de respecter les exigences strictes du Tribunal fédéral en matière de représentativité (cf. ch. 2.3.1 supra).

L'al. 3 prévoit que les comités de référendum et d'initiative peuvent bénéficier de temps d'antenne gratuit auprès des diffuseurs détenteurs d'une concession et financés par la redevance au cas par cas, c'est-à-dire en vue des votations dont ils sont à l'origine. En revanche, il faut que les partis puissent, quant à eux, s'exprimer avant toutes les votations, car ils sont indispensables pour organiser des élections au système proportionnel. A de très rares exceptions près, ce sont eux qui remportent tous les mandats au Conseil national. Leurs représentants sont donc responsables des textes que les autorités soumettent à votation: ce sont eux qui ont élaboré les solutions proposées et forgé les compromis nécessaires pour trouver une majorité. Dans le cas des initiatives populaires, ils ont contribué à l'adoption de la recommandation de vote du Parlement. (art. 139, al. 3, phr. 2, Cst.).

Onze des partis représentés actuellement au Parlement se sont fait inscrire au registre des partis politiques; trois des partis restants peuvent le faire dès qu'ils le souhaitent. Pour des raisons évidentes, le droit des partis à un temps d'antenne gratuit doit dépendre de leur inscription dans ce registre.

Les partis qui se constituent en un nouveau groupe parlementaire en cours de législature ont aussi la possibilité de bénéficier d'un temps d'antenne gratuit; ils peuvent 5271

faire valoir ce droit pour le prochain scrutin national, dans les limites de la procédure prévue (en particulier des délais). Au vu des coûts de production des messages, la gratuité de la diffusion ne saurait constituer une incitation au fractionnement des partis ou à la création de nouveaux groupes parlementaires; les petits partis, en particulier, n'y trouveraient aucun intérêt.

Dans une démocratie directe, l'encouragement du discours politique ne saurait se limiter aux partis. Autant les partis sont indispensables pour la dimension représentative de la démocratie, surtout lorsque les élections se font selon le système proportionnel, autant l'exercice des droits populaires est libre. C'est tout spécialement le cas du référendum: huit cantons ou 50 000 électeurs peuvent le demander. Les auteurs ne sont pas soumis à des exigences d'unité ni même d'homogénéité: il leur suffit de demander qu'un acte soit soumis au vote du peuple, même si les motifs des uns et des autres sont totalement opposés. Sur dix référendums qui aboutissent, moins de six sont lancés par un seul comité. Malgré la variété des situations qui peuvent se présenter, le projet accorde un temps d'antenne gratuit auprès de tous les diffuseurs concessionnaires financés par la redevance à l'ensemble des acteurs politiques ayant provoqué la tenue d'un référendum contre un acte fédéral.

Une initiative populaire peut être lancée par n'importe quel rassemblement de personnes, notamment un comité constitué pour la circonstance. On ne peut donc pas, en démocratie directe, limiter aux partis les mesures d'encouragement du discours politique. Mais comme l'initiative populaire ­ contrairement au référendum ­ ne consiste pas seulement à demander une votation populaire et offre une très grande liberté de conception sur le plan matériel, elle exclut la formation de coalitions disparates. En effet, les personnes qui lancent une initiative sont forcément favorables au projet présenté. La loi prévoit que toute initiative populaire doit avoir pour auteurs un comité constitué de sept à 27 électeurs (art. 68, al. 1, let. e, LDP). Ce comité d'initiative est l'organe tout désigné pour exercer le droit au temps d'antenne gratuit sur toutes les chaînes concessionnaires bénéficiant de la redevance et, donc, pour choisir comment et par qui le message sera présenté.
La manière d'exposer le but du référendum dans le message diffusé par les concessionnaires recevant une quote-part de la redevance et le choix du présentateur sont l'affaire des gouvernements des cantons s'il s'agit d'un référendum demandé par ces derniers, et du comité référendaire s'il s'agit d'un référendum populaire. Si plusieurs comités ont contribué à l'aboutissement du référendum, ils peuvent soit décider chacun de leur côté de l'utilisation de leur part du temps d'antenne, soit s'entendre sur un message commun et sur le partage de sa présentation par leurs représentants respectifs.

A l'instar des comités d'initiative, des comités référendaires et des gouvernements des cantons ayant obtenu un référendum, les partis sont libres de choisir la manière dont ils veulent présenter leur message et à qui ils souhaitent en confier la présentation auprès des concessionnaires ayant une quote-part de la redevance. Pour être inscrits au registre des partis politiques, les partis fédéraux ont l'obligation légale de revêtir la forme juridique d'une association (art. 76a, al. 1, let. a, LDP); ils doivent en outre avoir communiqué à la Chancellerie fédérale leur nom officiel et l'adresse de leur siège, le nom et l'adresse de leur président et de leur secrétaire national ainsi qu'un exemplaire de leurs statuts en vigueur (art. 76a, al. 2, let. a à c, LDP).

Les petits partis ayant trop peu de députés pour constituer un groupe parlementaire pourront eux aussi déterminer comment et par qui leur message sera présenté après 5272

s'être entendus sur une clé de répartition avec le ou les autres partis avec lesquels ils constituent un groupe. Les partis intégrés dans un groupe peuvent aussi prévoir une présentation commune.

Al. 4: Dans une séquence de diffusion, la première et la dernière places sont privilégiées. S'inspirant de la philosophie du mouvement démocratique du XIXe siècle, qui voulait que le peuple souverain ait «le dernier mot» au sujet des questions importantes pour lui, la commission propose que les comités ayant provoqué une votation populaire en recueillant des signatures disposent d'une place privilégiée pour exposer leur message aux électeurs. C'est pourquoi l'al. 4 leur attribue une diffusion au début de la période et, pour leur donner l'«avant-dernier mot», une diffusion vers la fin de la période.

L'al. 5 contient la délégation législative pour une ordonnance de l'Assemblée fédérale. Le projet d'ordonnance (projet B; cf. ch. 3.2 ci-après) précise la période durant laquelle les messages sont diffusés et la durée de ces derniers, le mode de répartition du temps d'antenne, la liste des chaînes et des programmes sur lesquels la SSR est tenue de diffuser les messages et la procédure que les milieux concernés doivent suivre pour faire valoir leurs droits et pour livrer les messages aux diffuseurs.

Enfin, l'al. 6 confie à la Chancellerie fédérale, en sa qualité d'organisme responsable de l'exécution des droits politiques, la tâche de déterminer avant chaque scrutin, par voie de décision, le temps d'antenne accordé aux différents partis et comités qui ont fait valoir leur droit.

Art. 15b (nouveau)

Production et financement des messages

L'al. 1 règle la question de la responsabilité en matière de production des messages.

Les ayants droit peuvent choisir la société de production à laquelle ils souhaitent confier le mandat. Ils doivent financer eux-mêmes la totalité de la conception et de la réalisation de leur message. Ils sont uniquement exonérés du paiement du montant que la diffusion de leur message aurait normalement coûté. La réglementation proposée tolère qu'un certain déséquilibre puisse s'instaurer selon que les différents ayants droit disposent de moyens financiers plus ou moins importants.

L'al. 2 demande en outre que soit désignée une personne physique qui assume la responsabilité juridique du contenu du message. Cette disposition est utile non seulement en cas de poursuite pénale, mais aussi pour assurer la surveillance prévue par la législation sur la radio et la télévision.

Art. 15c (nouveau)

Exigences minimales quant au contenu des messages

L'ordre juridique met certaines limites à la diffusion de programmes radiophoniques et télévisés. Ce sont, pour une part, les limites qui s'appliquent aux autres formes d'expression dans les médias (p. ex. interdiction de la discrimination raciale et des atteintes à l'honneur figurant dans le droit pénal ou protection de la personnalité inscrite dans le droit civil). Le respect de ces restrictions est examiné par les autorités judiciaires compétentes (justice pénale ou civile). Mais d'autre part, la LRTV impose aux diffuseurs suisses de multiples autres exigences, dont certaines vont plus loin que le droit pénal et le droit civil. On distingue trois catégories de prescriptions applicables à la diffusion radiophonique et télévisée:

5273

­

Certaines dispositions s'appliquent à l'ensemble des éléments d'un programme de radio ou de télévision, c'est-à-dire aux émissions rédactionnelles comme aux émissions publicitaires. C'est le cas, par exemple, de l'art. 4, al. 1 (respect des droits fondamentaux: dignité humaine, non-discrimination, pas d'incitation à la haine raciale, pas d'atteinte à la moralité publique, pas d'apologie de la violence) et al. 3 (pas de mise en danger de la sûreté intérieure et extérieure ou de l'ordre constitutionnel, respect des obligations découlant du droit international), ainsi que de l'art. 5 (émissions préjudiciables aux mineurs) LRTV. Ces obligations valent également pour les messages des partis et des comités diffusés en vue des votations.

­

Un deuxième groupe de dispositions s'applique uniquement aux émissions rédactionnelles. La plus importante est l'obligation de fidélité et l'identification des commentaires comme tels (art. 4, al. 2, LRTV). Les programmes concessionnaires sont en outre soumis à l'obligation de diversité, mais elle s'applique uniquement aux émissions rédactionnelles dans leur ensemble (art. 4, al. 4, LRTV). Les obligations d'objectivité et de diversité ne constituent pas des règles adaptées aux messages liés aux votations (lire sur ce point le commentaire de l'al. 2).

­

Enfin, des règles spécifiques s'appliquent à la publicité et au parrainage (art. 9 à 14, LRTV). Leur respect est contrôlé non pas par l'autorité de plainte, mais par l'OFCOM. L'attribution de ces compétences doit être maintenue pour la diffusion gratuite de messages liés aux votations.

L'al. 1 rappelle que les messages produits par les partis et les comités ne se situent pas dans un vide juridique du point de vue du droit de la radiodiffusion. Les prescriptions habituelles doivent être respectées; autrement dit, les messages doivent être conformes à la Convention européenne du 5 mai 1989 sur la télévision transfrontière (CETT; RS 0.784.405), qui impose des exigences identiques aux programmes télévisés suisses pouvant être captés à l'étranger. Les prescriptions de la convention recoupent, ne serait-ce qu'indirectement, la plupart des exigences figurant dans le droit pénal suisse (p. ex. l'interdiction de la discrimination raciale visée à l'art. 261bis CP).

Les messages portant atteinte aux droits de la personnalité font eux aussi l'objet d'une interdiction expresse. Une atteinte à la personnalité peut avoir lieu lorsqu'un message fait apparaître une personne sous un jour négatif (bien qu'il ne faille pas pour autant interdire les critiques ­ même vives ­ de comportements politiques) ou l'instrumentalise contre son gré en faveur d'un dessein politique (p. ex. en affirmant à tort qu'elle soutient une initiative populaire). Les critères employés pour déterminer s'il y a atteinte à la personnalité sont les principes établis du droit civil.

L'al. 2 ajoute une dimension supplémentaire à ces obligations: la norme interdit toute affirmation revenant à présenter des faits de manière manifestement inexacte.

Le principe essentiel du droit des programmes qui veut que les événements soient présentés de manière fidèle (autrefois: de manière objective) n'est pas adapté aux messages politiques liés aux votations, car ceux-ci ne sont pas des émissions rédactionnelles. Ce principe, qui est ancré non seulement dans la LRTV mais également dans la Constitution, doit garantir que les faits et les opinions présentés dans une émission donnent une image aussi fiable que possible d'une situation ou d'un sujet, afin que le public puisse se forger une opinion librement. Selon la pratique de l'autorité de plainte et du Tribunal fédéral, l'omission de faits essentiels ou leur 5274

présentation tendancieuse peuvent constituer une violation du principe d'objectivité.

Ce critère conçu pour les émissions rédactionnelles n'est pas adapté à des messages dans lesquels des partis et des comités disposent de 15 à 30 secondes pour présenter leur vision d'un sujet, ce qui suppose le recours à des slogans et à des images frappantes et une certaine partialité. Il importe cependant de poser des limites claires afin que l'opinion ne soit pas manipulée par la présentation de faits manifestement inexacts (p. ex. délais ou pourcentages faux). Certes, les concurrents en lice dans les campagnes de votation argumentent traditionnellement en avançant des faits et des chiffres divergents (p. ex. coût actuel et coût futur d'un projet). Mais, dans la formulation proposée, l'al. 2 interdit de présenter des chiffres dont l'inexactitude peut être prouvée au moyen de sources reconnues (p. ex. un chiffre erroné pour la quotité d'impôt d'une commune). Dans ce cas, le Tribunal fédéral accepte les réglementations cantonales qui accordent aux autorités le droit de rectifier des affirmations non conformes à la vérité (ATF 107 Ia 304 consid. 6 c, p. 317). La disposition proposée ne porte en revanche pas sur les manipulations plus subtiles du public, p. ex.

l'incrustation d'images trompeuses.

Art. 15d (nouveau)

Interdiction de la publicité

L'al. 1 contient des garde-fous pour éviter que les messages diffusés gratuitement avant une votation ne soient utilisés abusivement à des fins commerciales. Le choix de ne pas soumettre les diffuseurs aux règles applicables à la publicité lorsqu'ils diffusent des messages gratuits (contrairement à la publicité politique) oblige à étendre spécifiquement à ces messages certaines interdictions applicables à la publicité. Le projet interdit donc la publicité pour les produits ou services de tiers qui sont sans rapport direct avec l'objet soumis à votation. Il est évident que le temps d'antenne accordé gratuitement en vue des votations ne doit pas être utilisé pour contourner les interdictions applicables à la publicité (p. ex. pour le tabac ou les spiritueux). Mais la réglementation prévue ne s'arrête pas là: toute publicité commerciale pour des produits ou des services de tiers (p. ex. une entreprise proche d'un parti) est également prohibée. Les messages sont destinés à apporter un soutien à un projet ou à une idée en vue d'une votation, non à développer les ventes d'un produit ou d'un service. L'al. 1 interdit ainsi non seulement la publicité payante pour des produits et des services (let. a), mais aussi la publicité clandestine (let. b), soumise à une interdiction générale en vertu de l'art. 10, al. 3, LRTV. Les formes nouvelles de communication commerciale sont également interdites, comme la présentation de produits ou de services sur un écran incrusté («split screen»), la publicité virtuelle ou le placement de produits. La let. c a pour but d'éviter que la citation d'un parraineur (p. ex. une entreprise pharmaceutique dans un message concernant un projet de santé publique) n'ait un effet publicitaire indirect. Il est interdit de nommer des parraineurs, mais pas de faire parrainer les messages par des tiers. L'autorisation du parrainage est motivée par le fait qu'il est impossible, dans la pratique, de faire la distinction entre les fonds reçus par un parti ou un comité pour une campagne de votation en général et les fonds reçus pour produire un message en vue d'une votation.

L'al. 2 précise que la procédure en cas de violation des interdictions précitées est intentée non pas contre le diffuseur, mais contre l'ayant droit ­ c'est-à-dire l'auteur du message ­ et contre le tiers au sens de l'al. 1.

5275

Art. 76a, al. 4 (nouveau) Etant donné que le registre des partis politiques constitue désormais une base essentielle pour déterminer les ayants droit au temps d'antenne gratuit, l'art. 76a LDP a été enrichi d'une disposition concernant la mise à jour de cette liste. Jusqu'ici, l'art. 76a LDP définissait les conditions auxquelles les partis politiques, en tant que personnes morales, pouvaient se faire inscrire dans ce registre. Si les données figurant dans le registre n'étaient pas mises à jour, cela avait pour seul inconvénient de faire perdre la jouissance des allégements administratifs prévus pour la procédure de dépôt des listes lors des élections au Conseil national (art. 24, al. 3, let. a et c, LDP).

Or, comme l'élection du Conseil national a lieu tous les quatre ans seulement, il fallait attendre les élections générales suivantes pour que la non-communication de changements soit pénalisante. Les votations populaires, par contre, se succèdent tous les trois ou six mois. L'extension des droits auxquels les partis peuvent prétendre en vertu de leur inscription dans le registre exige la mise en place de mécanismes permettant d'actualiser plus fréquemment le registre des partis. En effet, accorder un temps d'antenne à des groupements qui ne remplissent plus du tout les conditions requises ­ et, partant, ne contribuent plus à la formation de l'opinion au sein du Parlement ­ serait contraire à l'esprit de cette disposition. Les groupements politiques ne figurant pas dans le registre des partis auront droit à un temps d'antenne s'ils ont saisi le référendum ou lancé une initiative populaire. Par contre, ne faisant plus partie de ceux qui ont participé à l'élaboration d'un projet de loi, ils ne seront plus tenus de le défendre assidûment auprès du public. C'est pourquoi l'al. 4 dispose que la Chancellerie fédérale biffe un parti du registre dès qu'il ne remplit plus les conditions d'enregistrement.

Art. 80, al. 4 (nouveau) Le nouvel al. 4 prévoit que les décisions de la Chancellerie fédérale relatives à l'attribution du temps d'antenne peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral; cette disposition est analogue à celle qui s'applique aux recours en matière de droit de vote. On ne peut effectivement pas exclure que la Chancellerie fédérale se trompe dans l'attribution de temps d'antenne à
un parti: ces erreurs peuvent avoir des conséquences sur la libre formation de l'opinion et, partant, sur le résultat du vote. Comme pour les autres cas mentionnés à l'art. 100, al. 3, LTF, le délai de recours doit être court (5 jours). En outre, sachant que la diffusion des messages ne peut en aucun cas être bloquée, il est exclu d'accorder l'effet suspensif à ces recours.

3.1.2

Loi fédérale du 24 mars 2006 sur la radio et la télévision (LRTV)

Art. 2, let. c L'introduction du temps d'antenne gratuit avant les votations populaires fédérales oblige à procéder à des adaptations rédactionnelles dans plusieurs dispositions de la LRTV. Cela concerne en particulier la définition de l'émission rédactionnelle (art. 2, let. c), qui doit rester distincte de la nouvelle catégorie d'émissions que constituent les messages liés aux votations. En effet, le diffuseur ne peut pas être tenu responsable du contenu de ces derniers (qu'il réprouvera peut-être pour certains) alors qu'il l'est du contenu des programmes rédactionnels.

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Les messages politiques que les chaînes devront diffuser avant les votations, même contre leur gré, ne sont pas non plus de la publicité au sens de la loi (art. 2, let. k, LRTV). Ils constituent une catégorie d'émissions à part, qui est soumise à des règles particulières tenant mieux compte de leur caractère.

Art. 11a (nouveau)

Messages politiques liés à une votation

L'al. 1 régit les rapports entre le temps d'antenne gratuit et la publicité payante. La distinction entre les messages politiques liés aux votations et les messages publicitaires à proprement parler répond à un objectif crucial de la législation sur la radio et la télévision dans son ensemble: assurer la transparence pour le public. Cette distinction est également dans l'intérêt des partis et des comités ayant droit à ce temps d'antenne.

L'al. 2 précise que les messages politiques ne doivent pas être imputés sur la durée maximale de publicité octroyée aux diffuseurs. D'après la présente proposition de réglementation, les messages politiques constituent juridiquement une catégorie d'émissions sui generis, c'est-à-dire qu'ils ne sont ni des publicités (puisqu'ils n'ont pas de contrepartie financière pour le diffuseur), ni des émissions rédactionnelles (puisque la responsabilité de la conception incombe à l'ayant droit). La systématique de la loi reflète cette conception, si bien que l'on pourrait déjà en déduire que le temps d'antenne gratuit ne peut être imputé sur le temps alloué à la publicité. Il paraît cependant judicieux d'inscrire ce principe important expressément dans la loi.

Art. 83, al. 1, let. a, et al. 1bis (nouveau) L'al. 1 octroie à l'autorité de plainte la compétence de contrôler le contenu des messages politiques liés aux votations avant leur diffusion, alors que les dispositions générales de la loi ne lui permettent de contrôler que les émissions de la partie rédactionnelle du programme qui ont déjà été diffusées. Contrairement aux autres activités de l'autorité de plainte, la procédure de surveillance des messages politiques liés aux votations est dirigée non pas contre les diffuseurs, mais contre les ayants droit (art. 91, al. 3bis). En raison de cette situation particulière, la loi ménage exceptionnellement la possibilité de contrôler les messages avant leur diffusion, moyennant le respect de règles de procédure particulières (al. 1bis). Après la diffusion des messages politiques, c'est à nouveau la procédure normale de surveillance du contenu des émissions rédactionnelles (art. 91 ss LRTV) qui s'applique, à ceci près qu'elle est dirigée contre les ayants droit et non pas contre les diffuseurs.

Art. 86, al. 1 et 5 Al. 1: Le contrôle du respect de l'interdiction de la publicité
dans les messages politiques après leur diffusion (art. 15d LDP) est du ressort de l'OFCOM, qui est déjà en charge du contrôle de la publicité commerciale en général. La procédure est différente de la surveillance exercée habituellement sur les messages publicitaires diffusés à la radio et à la télévision en ceci qu'elle est dirigée non pas contre les diffuseurs, mais contre les ayants droit (art. 15d, al. 2, LDP). Pour le reste, les compétences et les règles de procédure applicables sont celles prévues par la loi.

L'OFCOM peut en particulier confisquer les recettes obtenues de manière illicite par un parti ou un comité qui aurait détourné son temps d'antenne gratuit à des fins

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commerciales. Il peut également prononcer des sanctions administratives (art. 90, al. 1, let. c, LRTV).

Al. 5: Le contrôle du contenu des messages politiques après leur diffusion (art. 15c LDP) incombe à l'autorité de plainte. Là encore, la procédure est dirigée contre les ayants droit. L'autorité de plainte est également compétente pour examiner les messages avant leur diffusion.

Art. 86a (nouveau)

Contrôle préalable des messages politiques liés à une votation

La norme formulée à l'art. 86a étend la compétence de l'autorité de plainte. Selon les règles générales, en effet, l'autorité de plainte ne peut intervenir qu'après le dépôt d'une plainte, dont les auteurs doivent avoir préalablement présenté une réclamation à l'organe de médiation (art. 94 LRTV). Mais s'adresser à l'organe de médiation ne présente un intérêt que si l'objet de la réclamation est du ressort du diffuseur. Or ici, la situation est inverse: c'est le diffuseur qui veut faire contrôler la légalité d'une émission qu'il n'a pas produite et qu'il est légalement tenu de diffuser.

Dans ce cas, il faut que les litiges soient réglés avant la date prévue pour la diffusion du message.

L'al. 1 habilite les diffuseurs à soumettre un éventuel message litigieux au contrôle de l'autorité de plainte. Le diffuseur qui n'accomplit pas cette démarche ne peut pas refuser de diffuser le message en arguant qu'il ne respecte pas les dispositions légales. Les diffuseurs n'ont pas non plus l'obligation de s'adresser à l'autorité de plainte s'ils ont des doutes sur la légalité d'un message. Dans ce cas également, leur responsabilité est exonérée au regard du droit en matière de diffusion. En revanche, ils risquent d'être mis en cause avec l'ayant droit dans une procédure ultérieure de droit pénal (p. ex. pour contribution à la propagation de déclarations ayant un caractère de discrimination raciale) ou de droit civil (p. ex. exigence d'un droit de réponse ou d'une réparation financière). L'autorité de plainte doit statuer sur la légalité d'un message politique qui lui a été soumis avant la date prévue pour sa diffusion. Malgré les délais très courts impartis par la force des choses, l'autorité de plainte doit donner aux parties la possibilité de s'exprimer (droit d'être entendu), en particulier aux ayants droit.

La décision de l'autorité de plainte repose uniquement sur les critères énoncés à l'art. 15c LDP. Elle ne porte que sur le respect des dispositions légales, à l'exclusion de toutes questions touchant la démarche politique.

L'al. 2 instaure une dérogation au principe de la publicité des délibérations qui s'applique aux autres procédures de l'autorité de plainte (art. 97, al. 1, LRTV). Cette exception est motivée essentiellement par les délais très courts qui sont impartis à l'autorité de plainte pour
statuer sur ces cas. D'autres dérogations au déroulement habituel des procédures (p. ex. concernant les délais) peuvent être définies dans des normes de rang inférieur. Il importe toutefois de conserver la réglementation de l'art. 98 LRTV relative aux frais: le dépôt d'une plainte auprès de l'autorité est gratuit pour les diffuseurs, mais des frais de procédure peuvent être mis à leur charge si la plainte est téméraire.

L'al. 3 prévoit que si l'autorité de plainte estime qu'un message est manifestement illégal, il n'est pas diffusé; les diffuseurs qui n'ont pas recouru auprès de l'autorité de plainte sont eux aussi soumis à cette disposition. Le parti ou le comité concerné 5278

perd alors son droit de diffusion.; il n'est pas autorisé à présenter un nouveau message en raison des délais restreints qui s'appliquent en l'espèce.

Ainsi, la décision de l'autorité de plainte concernant la diffusion ou la non-diffusion d'un message s'impose à toutes les parties. La partie qui a succombé (que ce soit le diffuseur ou l'ayant droit) peut interjeter recours devant le Tribunal fédéral contre la décision de l'autorité de plainte (art. 99, phr. 2, LRTV). Pour des impératifs de calendrier, le Tribunal fédéral ne peut toutefois pas accorder d'effet suspensif à ce genre de recours (al. 4).

Art. 90, al. 2, let. o et p (nouvelles) En vertu de l'art. 90, al. 2, let. o et p, les éventuelles infractions à l'obligation de diffuser gratuitement les messages (let. o) ou à l'obligation de respecter l'interdiction de la publicité (let. p) sont passibles d'une sanction administrative sous la forme d'une amende pouvant aller jusqu'à 10 000 francs; il s'agit de la même sanction que celle qui s'applique en cas de violation de l'obligation de diffuser les communiqués des autorités (art. 8 LRTV). Si ce montant peut paraître modique au premier regard, il faut toutefois tenir compte du fait que l'OFCOM peut, en sa qualité d'autorité de surveillance, décider de mesures supplémentaires, comme la cession de l'avantage financier illicite obtenu du fait de la violation de l'interdiction de la publicité (art. 89, al. 1, let. a, ch. 3, LRTV).

Art. 91, al. 3 let. abis (nouvelle) et al. 3bis (nouveau) Après leur diffusion, les messages liés à une votation sont soumis à la procédure habituelle de surveillance. En conséquence, l'autorité de plainte peut examiner les aspects de fond, mais pas une éventuelle utilisation illicite à des fins commerciales (art. 15d LDP), qui, elle, est du ressort de l'OFCOM.

La procédure applicable aux messages politiques après leur diffusion obéit aux principes qui régissent la surveillance du contenu des émissions rédactionnelles (art. 91 ss LRTV).

Elle présente cependant deux différences de taille: premièrement, elle n'est pas dirigée contre les diffuseurs (sinon une quarantaine de chaînes devraient répondre à chaque fois de la faute d'un tiers); deuxièmement, elle porte uniquement sur le respect des exigences minimales fixées à l'art. 15c LDP (al. 3 et 3bis). La procédure de
surveillance est dirigée contre le parti ayant droit à un temps d'antenne gratuit, c'est-à-dire contre l'organe du parti visé dans la LDP. Si un ayant droit n'est pas organisé en personne morale (comme p. ex. les comités d'initiative), la procédure devra être dirigée contre la personne responsable du message (qui doit être désignée préalablement en vertu de l'art. 15b, al. 2, LDP).

De manière générale, les compétences et les règles de procédure applicables sont celles prévues par la loi. L'OFCOM peut en particulier confisquer les recettes obtenues de manière illicite par un parti ou un comité qui aurait détourné son temps d'antenne gratuit à des fins commerciales.

5279

3.1.3

Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF)

La nouvelle let. c, qui complète l'art. 100, al. 3, de la loi sur le Tribunal fédéral, fixe le délai de recours contre les décisions de la Chancellerie fédérale relatives à l'attribution du temps d'antenne. La limitation de ce délai à cinq jours répond à deux impératifs: d'une part, il s'agit de reprendre les dispositions en vigueur qui s'appliquent à des cas similaires; d'autre part, la diffusion des messages avant un scrutin ne doit subir ni retards, ni blocages.

Cette nouvelle disposition complète l'art. 80, al. 4, LDP et l'art. 86a, al. 4, LRTV, qui prévoient la possibilité de recours tout en excluant la possibilité pour le Tribunal fédéral d'accorder l'effet suspensif.

3.2

Art. 1

Ordonnance de l'Assemblée fédérale concernant le temps d'antenne gratuit avant les votations populaires Messages politiques précédant les votations populaires

L'al. 1 prévoit que les messages doivent être diffusés pendant la dernière phase de la campagne de votation. Le but est de permettre une meilleure mobilisation de l'électorat afin d'augmenter la participation. En revanche, les messages ne pourront pas être diffusés dans les derniers jours précédant le scrutin, la dernière diffusion étant fixée à l'avant-dernier samedi avant le jour de la votation.

Pour être complet, il faut rappeler que la publicité politique à la radio et à la télévision sur les thèmes d'une votation est interdite au plus tard à partir du jour où la date du scrutin est officiellement publiée (cf. art. 10, al. 1, let. d, LRTV et art. 17 ORTV).

L'al. 2 limite la durée de diffusion des messages à 21 minutes par semaine (soit trois minutes par jour), représentant un total de 63 minutes par chaîne de radio ou de télévision et par scrutin. Ce contingentement vise, d'une part, à ce que le temps d'antenne gratuit soit réparti aussi équitablement que possible et, d'autre part, à ce que tous les acteurs concernés puissent planifier au mieux leurs activités. En outre, la limitation du temps à disposition permet non seulement de prévenir une éventuelle saturation du public, mais encore d'empêcher que les médias électroniques ne doivent faire face à des difficultés disproportionnées lorsqu'ils conçoivent leurs programmes.

Art. 2

Répartition du temps d'antenne entre les partis d'une part et les comités d'autre part

En vertu de l'al. 1, les 63 minutes de temps d'antenne disponible au total se répartissent en deux contingents: l'un ­ de 50 minutes ­ destiné aux partis concernés; l'autre ­ de 13 minutes ­ destiné à l'ensemble des comités référendaires et des comités d'initiative. Ce procédé a été choisi pour des raisons pratiques: seuls les droits à l'antenne revenant aux comités d'initiative et aux comités référendaires doivent être recalculés à chaque fois; le temps d'antenne attribué aux différents partis représentés au sein d'un groupe parlementaire n'est, quant à lui, déterminé qu'au début d'une législature ou en cas de changement de la composition du groupe.

5280

Le temps mis à la disposition des comités a été fixé de façon à être suffisant même lorsque le nombre d'objets soumis au vote est largement supérieur à la moyenne.

L'al. 2 prévoit que les contingents qui ne sont pas revendiqués par les ayants droit sont perdus, ce qui implique que les partis et les comités ne peuvent pas céder ­ à titre gracieux ou non ­ tout ou partie de leur temps d'antenne. Cette disposition vise à renforcer l'équité des campagnes de votation, objectif premier du projet.

L'al. 3 autorise en revanche les ayants droit à réunir leurs contingents pour diffuser un message commun, à la condition que les auteurs y soient explicitement mentionnés.

Art. 3

Attribution du temps d'antenne aux différents partis

Le temps d'antenne doit nécessairement être attribué aux différents partis ­ tout comme aux différents comités (cf. art. 4) ­ en fonction de certains schémas. Ainsi, il a été décidé que les grands partis pourront diffuser leur message plus souvent que les petits (principe de la proportionnalité). Une minorité de la commission demande que le projet d'ordonnance soit modifié de telle manière que la répartition du temps d'antenne gratuit entre les partis ne se fasse pas seulement en fonction du nombre de sièges que ceux-ci occupent à l'Assemblée fédérale. Elle demande l'adjonction, en faveur des petits partis, d'un alinéa prévoyant que le temps d'antenne du plus grand parti ne puisse excéder le triple du temps attribué au plus petit parti.

Art. 4

Attribution du temps d'antenne aux différents comités

En vertu des dispositions de l'al. 1, le temps d'antenne attribué aux différents comités est réparti comme suit: une minute au total pour chaque comité d'initiative et une minute au total pour l'ensemble des comités référendaires («auteurs d'un référendum»). Plus précisément, chaque comité d'initiative et les auteurs d'un référendum ont le droit de diffuser, au début et à la fin des trois semaines de campagne de votation, un message politique d'une durée maximale de 30 secondes. La minute d'antenne peut être répartie en trois spots de 20 secondes ou en quatre spots de 15 secondes. Lorsque plusieurs comités ont participé à la récolte des signatures, c'est l'ensemble des comités qui est considéré comme auteurs.

Au cas où un référendum a abouti suite à l'action de plusieurs comités, ces derniers s'entendent sur les modalités d'un éventuel partage entre eux de la minute d'antenne qui leur est accordée. S'ils ne parviennent pas à se mettre d'accord, leur droit est perdu.

L'al. 2 contient une disposition spéciale s'appliquant au cas où un référendum demandé par les cantons et un référendum populaire ont tous deux abouti. Elle permet de garantir l'attribution de la minute de temps d'antenne accordée selon l'al. 1 pour moitié (soit 30 secondes) aux cantons ayant demandé le référendum et pour moitié (30 secondes également) aux auteurs du référendum populaire. Les ayants droit s'entendent sur l'ordre de diffusion de leurs spots. Dans ce cas également, il est possible de diviser le temps d'antenne en deux spots de 15 secondes, qui seront diffusés au début et à la fin de la période de trois semaines durant laquelle la diffusion des messages politiques est autorisée.

L'al. 3 prévoit que si les droits à l'antenne revenant à tous les comités d'initiative et à tous les comités de référendum dépassent le contingent de 13 minutes prévu à l'art. 2, al. 1, le temps attribué à chaque ayant droit est proportionnellement réduit. A 5281

noter toutefois qu'il est extrêmement peu probable qu'un tel cas survienne: à titre d'exemple, le peuple avait dû se prononcer sur pas moins de 9 objets le 18 mai 2003; le contingent évoqué ci-dessus aurait donc largement suffi à couvrir les 9 minutes de temps d'antenne auxquels l'ensemble des différents comités auraient eu droit si la réglementation prévue avait été en vigueur à l'époque.

Art. 5

Procédure que les comités doivent suivre pour faire valoir leurs droits

En vertu de l'al. 1, les comités d'initiative et les comités référendaires concernés doivent annoncer suffisamment tôt à la Chancellerie fédérale ­ soit au plus tard deux semaines après que le Conseil fédéral ait publié la liste des objets soumis au vote ­ s'ils souhaitent faire valoir leurs droits à un temps d'antenne gratuit.

L'al. 2 charge la Chancellerie fédérale de déterminer, au plus tard 12 semaines avant la date de la votation, le temps d'antenne exact attribué aux différents partis et aux différents comités. Dans ce même délai, elle doit communiquer sa décision aux ayants droit ainsi qu'aux diffuseurs concernés.

Les délais d'annonce sont relativement courts, de manière que les ayants droit puissent produire leurs messages le plus rapidement possible dès que les temps d'antenne ont été attribués, et que la diffusion puisse être planifiée suffisamment tôt par les diffuseurs.

Art. 6

Durée minimale et durée maximale des messages; nombre de diffusions

L'al. 1 dispose que les messages ont une durée de 15 à 30 secondes: ils sont ainsi plutôt plus courts que leurs pendants à l'étranger. Il semble qu'un message d'une durée inférieure à 15 secondes ne permettrait pas une présentation convenable de l'idée centrale d'un objet soumis au vote. Raccourcir davantage la durée minimale aurait sans nul doute pour corollaire un risque accru de voir se multiplier les formules choc et les raccourcis carricaturaux. Inversément, la durée des messages a été plafonnée à 30 secondes, de manière à permettre la constitution de fenêtres d'une durée maximale d'une minute, comme le prévoit l'art. 9, al. 3.

Art. 7

Livraison du message aux diffuseurs

Les dispositions de l'al. 1 visent à permettre aux diffuseurs concernés d'examiner les messages suffisamment tôt et, en cas de doute, de les transmettre à l'autorité de plainte pour analyse immédiate. Pour cette raison, il est nécessaire que les ayants droit ­ partis et comités ­ livrent leur message au plus tard 9 semaines avant le jour du scrutin. Les images et le son étant des éléments essentiels pour évaluer l'effet des messages, la remise d'un scénario n'est pas suffisante. En outre, une livraison a posteriori n'est pas autorisée, car elle elle pourrait créer un avantage vis-à-vis des autres ayants droit.

L'al. 2 astreint les ayants droit à convenir suffisamment tôt des modalités techniques avec les diffuseurs concernés, étant donné que lesdites modalités peuvent varier en fonction du programme ou du canal.

5282

Art. 8

Diffusion des messages par la SSR

La commission propose que l'obligation de diffuser s'applique, pour ce qui est de la SSR, à la première chaîne de télévision (let. a), aux premier, deuxième et troisième programmes de radio (let. b) de chaque région linguistique, ainsi qu'à tous les programmes d'information, tant radiophoniques que télévisés (let. c). La concession du 28 novembre 2007 octroyée à SRG SSR idée suisse définit à ce jour deux programmes d'information: un programme de radio en allemand (art. 4, al. 7) et un programme de télévision en allemand (art. 5, al. 2). Si la concession devait être étendue à d'autres programmes d'information dans d'autres régions linguistiques, ceux-ci auraient également l'obligation de diffuser les messages politiques.

Art. 9

Modalités de la diffusion

L'al. 1, let. a et b, précise que les messages ne doivent pas être diffusés aux heures creuses, mais aux heures de grande écoute (prime time). La fenêtre prévue est de quatre heures pour la télévision et de cinq heures pour la radio. L'audience n'est toutefois pas identique durant l'ensemble de la fenêtre: à la télévision, par exemple, celle-ci est nettement plus élevée entre 19h30 et 20h qu'entre 18h et 18h30. Des directives plus précises compromettraient cependant de manière excessive l'autonomie des diffuseurs en matière de programme; d'un autre côté, diffuser une partie des messages aux heures où l'audience est maximale et une autre partie aux heures où l'audience est un peu moins forte irait à l'encontre du principe d'égalité des chances des différents acteurs politiques. Un compromis a donc été trouvé: les diffuseurs peuvent choisir librement le moment ­ à l'intérieur de la fenêtre prédéfinie (prime time) ­ lors duquel ils diffuseront les messages, mais ils sont ensuite tenus de diffuser tous les messages à cette heure-là (p. ex. tous les jours entre 18h30 et 19h, cf. al. 2).

L'al. 3 prévoit que la diffusion s'effectue dans des fenêtres d'une durée maximale d'une minute. Les diffuseurs bénéficient ainsi de toute la flexibilité nécessaire pour définir des solutions faciles à appliquer au cas par cas (selon le nombre de comités référendaires et le nombre d'objets soumis au vote).

L'al. 4 porte sur le lien entre le temps d'antenne gratuit et les émissions rédactionnelles. Il prévoit que ces dernières ne doivent, en règle générale, pas être interrompues par les messages.

L'al. 5 exige que les messages soient clairement désignés comme tels; en plus d'être un gage de transparence, cette disposition présente un avantage pour les diffuseurs, qui peuvent ainsi se distancer comme il se doit des déclarations des partis et comités.

L'al. 6 prévoit que les diffuseurs ne peuvent introduire et conclure les messages de manière différente en fonction de l'ayant droit, de façon à ne pas désavantager ou, a contrario, à ne pas favoriser un ayant droit par rapport aux autres. Il s'agit d'une nouvelle expression du principe d'égalité des chances, que l'on retrouve dans la réglementation complémentaire du temps d'antenne inscrite aux al. 1 et 2.

5283

4

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

4.1

Conséquences pour la Confédération

La diffusion gratuite de messages politiques liés aux votations n'aura pas d'effets sur la situation financière de la Confédération, puisque le coût de production des messages est à la charge des ayants droit. Ces messages ne seront financés ni par la caisse de la Confédération, ni par le produit de la redevance de réception.

Il faut cependant s'attendre à un certain accroissement de la charge de travail dans le domaine de la surveillance. Le volume de travail de l'autorité indépendante de plainte en matière de radio-télévision (un organe de milice composé de neuf membres exerçant leur activité à titre accessoire selon l'art. 82, al. 1, LRTV) pourrait augmenter dans des proportions significatives. En 2006, l'autorité de plainte s'est réunie à six reprises pour traiter 22 procédures de plainte (2005: examen de 21 procédures au cours de cinq séances). L'importance du travail supplémentaire qui reviendra à l'autorité de plainte dépend avant tout du nombre de messages politiques que les diffuseurs lui soumettront pour un examen préalable, sachant qu'un weekend de votations fédérales donne lieu à la diffusion d'une dizaine de messages.

4.2

Conséquences pour les acteurs privés

Les diffuseurs bénéficiaires d'une concession ouvrant droit à une quote-part de la redevance sont tenus de mettre à disposition gratuitement une partie de leur meilleur temps d'antenne. Il est néanmoins assez improbable que les dispositions légales prévues leur causent un manque à gagner sensible. Le temps alloué à la diffusion des messages en vue des votations ne sera pas imputé sur la durée maximale des publicités, ce qui n'empêchera donc pas les chaînes de diffuser par ailleurs des messages publicitaires.

La nouvelle possibilité de communication aura des conséquences pour les budgets de campagne des partis et des comités concernés. On peut estimer que, dans un premier temps, une partie des dépenses affectées à d'autres moyens de communication (p. ex. annonces, tracts, affiches) sera reportée sur la production de messages radiophoniques et télévisés.

Ce report devrait rester marginal pour les partis, d'autant qu'ils recueilleront vraisemblablement des fonds supplémentaires auprès de leur base, des groupes parlementaires ou de sponsors pour financer leurs messages. Les comités, dont on sait par expérience qu'ils publient davantage d'annonces dans la presse écrite que les partis, pourraient reporter davantage de fonds sur le nouveau moyen de communication.

Il n'est cependant pas à craindre que les recettes des quotidiens, par exemple, baissent excessivement en raison de la diminution de ces annonces, d'autant que les comités devraient, eux aussi, trouver des fonds supplémentaires pour produire leurs messages. L'expérience montre que l'introduction de nouveaux médias ou de nouvelles possibilités de propagande, loin de donner lieu à d'importants transferts de ressources, se traduit généralement par une augmentation des budgets concernés visant à assurer une présence à la fois dans les anciens et dans les nouveaux supports de communication.

5284

La nouvelle réglementation pourrait bénéficier aux sociétés de production spécialisées, car la production s'orientera vraisemblablement vers la création de campagnes globales pour les médias écrits et électroniques, ce qui devrait pousser fortement à la hausse les volumes des commandes.

La réglementation prévue ne portera donc pas un coup fatal à la presse écrite. Elle ne fait qu'ouvrir la radio et la télévision aux votations fédérales, laissant aux journaux une grande partie des recettes provenant de la publicité politique (notamment la propagande avant les élections et les votations populaires cantonales et communales).

5

Bases légales

5.1

Constitutionnalité et conformité aux lois

Le présent projet se fonde sur l'art. 93, les art. 137 à 139a, sur l'art. 141 ainsi que sur les art. 165 à 167 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999. L'art. 93 donne à la Confédération la compétence de légiférer sur la radio et la télévision. L'art. 137 définit quant à lui les partis politiques comme contribuant à former l'opinion et la volonté populaires. Les art. 138 à 139a représentent la base constitutionnelle des initiatives populaires tendant à une révision totale ou partielle de la Constitution fédérale ainsi que des initiatives populaires générales; l'art. 141 et les art. 163 à 165 consacrent le référendum facultatif. Ces dispositions fondent donc, au niveau constitutionnel, le droit au temps d'antenne gratuit accordé aux partis politiques ainsi qu'aux comités d'initiative et de référendum concernés.

Le but ultime du projet est de protéger la formation de l'opinion et de la volonté populaires, et non pas les partis. Selon la doctrine et la pratique, il n'est pas admis que les partis soient avantagés par rapport aux comités d'initiative et de référendum directement impliqués dans une votation. Cela ne veut cependant pas dire qu'il faut accorder l'égalité de traitement aux partisans du projet et à ses opposants dans les messages liés à une votation. Tout d'abord, cela ne serait pas possible dans tous les cas, par exemple lorsqu'un projet soumis au référendum obligatoire ne soulève pas d'opposition au sein des Chambres fédérales. Les partis ne sont pas les seuls leaders d'opinion dans notre démocratie directe; juridiquement et politiquement, les comités d'initiative et les auteurs de référendums facultatifs ont également un rôle important à jouer pour former l'opinion. Pour autant, il n'y a pas lieu de présenter de manière égalitaire, dans les messages politiques, les arguments provenant de tous les comités référendaires. C'est le nombre de signatures récoltées par chaque comité qui est le meilleur indicateur du poids des arguments utilisés pour demander la tenue de la votation populaire. Une chose est claire cependant: les auteurs des projets soumis à une votation populaire fédérale doivent être autant présents que les partis dans les messages politiques liés à cette votation. La seule différence réside dans la base constitutionnelle: l'art. 137 Cst. pour les partis, les art. 138 à
139a Cst. pour les comités d'initiative; l'art. 141 et les art. 163 à 165 Cst. pour les comités référendaires.

Même si le peuple peut demander une votation, aucun comité d'initiative ou de référendum n'est tenu responsable des contradictions internes que l'acceptation de sa demande, motivée par des oppositions ponctuelles, peut produire dans l'ordre juridique. Seuls les représentants du peuple sont responsables de la cohérence inter5285

ne de l'ordre juridique. C'est pourquoi les Chambres fédérales ont le droit de formuler une recommandation de vote à l'attention du peuple et des Etats concernant toute demande de légiférer n'émanant pas du Parlement (nouvel art. 139, al. 3, et ancien art. 139, al. 5, Cst.). Contrairement à la plupart des autres pays, la Suisse ne connaît pas de monopole législatif du Parlement, mais des sources de droit concurrentes. La Constitution entend toutefois donner aux autorités responsables les moyens minimums nécessaires pour accomplir leurs tâches.

Les quatre cinquièmes des membres des Chambres fédérales sont élus, au système proportionnel, grâce aux partis qu'ils représentent. Or, comme les Chambres fédérales sont seules responsables de la cohérence interne du système juridique, il est justifié, au regard de la Constitution fédérale notamment, que les partis puissent défendre l'opinion de leurs membres ayant conduit à la décision majoritaire du Parlement, c'est-à-dire à l'adoption de la loi ou à la recommandation de vote (cf.

art. 139, al. 3, art. 156, al. 1 et 2, art. 159, al. 1 et 2 et art. 163 Cst.). Un facteur vient renforcer cette appréciation: au cours des décennies écoulées, les médias électroniques ont relégué les médias imprimés à l'arrière-plan, et le processus de concentration de la presse a fait perdre aux partis leurs journaux attitrés.

Les dispositions des nouveaux art. 15a à 15d LDP assouplissent l'interdiction de la publicité politique figurant à l'art. 10, al. 1, let. d, LRTV, mais exclusivement pour favoriser la participation des partis politiques à la formation de l'opinion et de la volonté populaires. Cet assouplissement est toutefois mesuré: les nouvelles dispositions ne portent guère atteinte au but central de l'interdiction de la publicité politique, qui est de ne pas défavoriser les acteurs politiques ayant des moyens financiers faibles, puisqu'elles prévoient que la diffusion des messages liés aux votations est gratuite (même si leur production ne l'est pas).

Enfin, la réglementation proposée est compatible avec l'art. 93, al. 4, de la Constitution fédérale, selon lequel la radio et la télévision doivent tenir compte de la situation et du rôle des autres médias, en particulier de la presse (cf. ch. 4.2 supra).

5.2

Délégation de compétences législatives

L'art. 15a, al. 5, LDP délègue des compétences législatives à l'Assemblée fédérale: celle-ci doit désigner les programmes de la SSR qui serviront de cadre aux messages liés aux votations et régler les modalités du droit au temps d'antenne gratuit accordé aux partis politiques représentés en son sein ainsi qu'aux comités d'initiative et de référendum.

5.3

Forme de l'acte

La loi fédérale précisant le rôle des partis politiques dans la formation de l'opinion et de la volonté populaires est un acte modificateur unique comportant une révision partielle de la LDP et une révision partielle de la LRTV.

5286