Inspection «Détermination et contrôle des prestations médicales dans l'assurance obligatoire des soins»; lettre de la Commission de gestion du Conseil national du 26 janvier 2009 Avis du Conseil fédéral du 24 juin 2009

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Le Conseil fédéral a pris acte du rapport du Contrôle parlementaire de l'administration (CPA) du 21 août 2008 ainsi que des recommandations de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) du 26 janvier 2009. Il prend position ci-après sur les 19 recommandations.

1

Introduction

1.1

Bases légales

L'assurance obligatoire des soins (AOS) a pour but de permettre à l'ensemble de la population d'accéder par un financement solidaire à des soins médicaux de haute qualité. Afin de rendre compatibles les exigences du contrôle de l'évolution des coûts et l'accès aux possibilités de la médecine moderne, la loi fédérale sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10) prévoit les conditions de prise en charge des prestations par l'AOS: ces prestations doivent être efficaces, appropriées et économiques (critères EAE). L'efficacité doit être démontrée selon des méthodes scientifiques (art. 32, al. 1, LAMal).

Le Conseil fédéral peut désigner les prestations fournies par un médecin ou un chiropraticien, dont les coûts ne sont pas pris en charge par l'AOS ou le sont à certaines conditions (art. 33, al. 1, LAMal). De plus, il détermine dans quelle mesure l'AOS prend en charge les coûts d'une prestation, nouvelle ou controversée, dont l'efficacité, l'adéquation ou le caractère économique sont en cours d'évaluation (art. 33, al. 3, LAMal). Enfin, il désigne les analyses, moyens et appareils diagnostiques ou thérapeutiques pris en charge par l'AOS ainsi que les produits, substances actives et auxiliaires employés pour la prescription magistrale (art. 52, al. 1, LAMal). Le Conseil fédéral se fait conseiller à cet égard par des commissions (art. 33, al. 4, LAMal). Se fondant sur l'art. 33, al. 5, LAMal, il a délégué l'ensemble des tâches précitées au Département fédéral de l'intérieur (DFI) (art. 33 de l'ordonnance sur l'assurance-maladie [OAMal; RS 832.102]).

L'unité de direction de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) responsable de l'assurance maladie, accidents et militaire ou, plus exactement, sa division Prestations encadre le processus décisionnel sur les plans technique et administratif et dirige les secrétariats des commissions consultatives. Ces commissions sont la

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Commission fédérale des prestations générales et des principes (CFPP; responsable des prestations médicales générales et des questions de principe), la Commission fédérale des analyses, moyens et appareils (CFAMA; responsable de la désignation des analyses, moyens et appareils servant à des fins diagnostiques et thérapeutiques) ainsi que la Commission fédérale des médicaments (CFM; responsable des produits, substances actives et auxiliaires employés pour la prescription magistrale ainsi que des médicaments confectionnés qui, aux termes de l'art. 52, al. 1, let. b, LAMal, sont inscrits par l'OFSP sur la liste des spécialités).

Les recommandations de la CdG-N portent sur les prestations fournies par des médecins ou des chiropraticiens, qui sont donc de la compétence de la CFPP et de la section Prestations médicales de l'OFSP. Cette dernière dispose actuellement de 1020 équivalents plein temps, dont 400 pour la CFPP.

La définition de la prestation obligatoire au tenir de l'art. 33, al. 1, LAMal signifie que, en principe, toutes les prestations médicales sont prises en charge, sauf dispositions contraires. Il s'ensuit que l'obligation de prise en charge est implicitement présumée pour les prestations médicales diagnostiques et thérapeutiques (principe de confiance).

L'autorité réglementaire peut exclure des traitements nouveaux ou controversés des prestations obligatoires jusqu'à ce qu'ils aient satisfait à un examen méthodique de leur efficacité, de leur adéquation et de leur caractère économique (art. 33, al. 3, LAMal).

Elle a également la possibilité de n'autoriser la technique ou la méthode nouvelle que pour des indications déterminées, dès lors que les dispositions de l'art. 32, al. 1, LAMal ne sont remplies que dans ce seul domaine, ou de faire dépendre leur autorisation d'une qualification particulière du fournisseur de prestations (art. 58, al. 3, let. b, LAMal). Elle peut enfin autoriser la prestation en cours d'évaluation à l'essai et sous réserve de satisfaction définitive aux conditions de l'art. 32 LAMal. Des prestations nouvelles ou controversées peuvent parfaitement être efficaces, appropriées et économiques alors même que seule manque une preuve suffisante de ces qualités.

Les prestations médicales à visée thérapeutique figurent sur une liste ouverte ou, plus exactement, dans un
catalogue non exhaustif et restreint appelé «Catalogue négatif ou conditionnel»1. Cette liste est intégrée à l'ordonnance sur les prestations de l'assurance des soins (OPAS; RS 832.112.31), dont elle constitue l'annexe 1. Elle énumère pour bon nombre de prestations les conditions de prise en charge, telles que restriction à certaines indications, conditions à remplir par les fournisseurs de prestations ou (pour les prestations visées à l'art. 33, al. 3, LAMal) limitations dans le temps de l'obligation de prise en charge avec évaluation par le fournisseur de prestation. Les médicaments, analyses, moyens et appareils, prestations de médecine préventive, prestations en cas de maternité et prestations non fournies par un médecin font l'objet de listes exhaustives (dites positives, art. 33, al. 2, LAMal)2.

1 2

Message concernant la révision de l'assurance-maladie, FF 1992 I 77, p.141.

Prestations des physiothérapeutes, ergothérapeutes, infirmiers et autres organisations de soins et d'aide (art. 5 ss de l'ordonnance sur les prestations dans l'assurance obligatoire des soins [OPAS]), mesures de prévention (art. 12 OPAS), prestations en cas de maternité (art. 13 ss OPAS), soins dentaires (art. 17 ss OPAS), prestations fournies par des chiropraticiens à des fins diagnostiques et thérapeutiques (art. 4 OPAS), prestations fournies par des médecins à des fins de diagnostic, de traitement, de réadaptation et de palliation (annexe 1 OPAS), moyens et appareils diagnostiques et thérapeutiques (art. 20 ss OPAS, annexe 2 OPAS), analyses de laboratoire (art. 28 OPAS, annexe 3 OPAS), substances actives (art. 29 ss OPAS, annexe 4 OPAS) et médicaments confectionnés (liste des spécialités).

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2

Appréciation des conclusions de la Commission de gestion

2.1

Remarques préliminaires

La CdG-N a chargé le CPA d'évaluer la détermination et le contrôle des prestations dans l'AOS. Le CPA a mené ses investigations en 2008 et choisi les années 2006 et 2007 comme période d'étude. Il convient de préciser au préalable que cette période coïncide avec une période de transition durant laquelle des postes, restés longtemps vacants, ont été attribués à de nouveaux responsables au niveau à la fois de la section et de la direction de l'unité compétente. Par ailleurs, une analyse complète de la situation a conduit depuis 2007 à des changements de conception et de procédure: ­

nouveau formulaire pour la demande de prise en charge3 et formulaire de déclaration supplémentaire à partir de début 2008;

­

nette augmentation des déclarations de prestations controversées;

­

distinction systématique entre les termes d'évaluation (assessment)4 et appréciation (appraisal)5 (l'OFSP n'adresse plus de recommandations à la CFPP);

­

clarification des questions de droit en suspens dans le processus (statut juridique des prestations jugées controversées, cadre juridique pour la restriction de la prise en charge obligatoire à certains fournisseurs de prestations);

­

critères de triage formels en cours d'élaboration;

­

mise au concours du contrat d'expert (reviewer);

­

augmentation des ressources en personnel: la section Prestations médicales de l'OFSP dispose actuellement, au total, de 200 équivalents plein temps de plus que durant la période de l'étude, dont 100 pour la CFPP.

Les recommandations du CPA s'appuient sur une analyse de la désignation des prestations fournies par des médecins ou des chiropraticiens et se concentrent sur la procédure administrative correspondante ainsi que sur la commission compétente.

Des procédures analogues ont été établies pour la désignation des analyses, moyens et appareils diagnostiques et thérapeutiques, ainsi que des médicaments. Ces désignations s'appuient elles aussi sur les conclusions de commissions consultatives (CFAMA, CFM). Il est encore impossible d'apporter une réponse définitive aux questions en suspens quant aux aspects généraux de l'évaluation et de la désignation des prestations et quant à l'organisation de la commission. C'est pourquoi les avis exprimés ci-après à propos de ces aspects généraux ne revêtent qu'un caractère provisoire.

Les prestations décrites à l'annexe 1 de l'OPAS ne concernent qu'une partie relativement restreinte des prestations prises en charge par l'AOS. Ces dix dernières années, les coûts des prestations nouvelles inscrites à l'annexe 1 n'ont représenté que quelques pour mille des dépenses totales de l'AOS. Cela dit, il ne faut pas sous-

3 4 5

Taper http://www.bag.admin.ch/themen/krankenversicherung/00263/00264/04853/ index.html?lang=fr Evaluation transparente et crédible.

Evaluation tenant compte du cadre régional et national.

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estimer l'effet préventif d'un processus qui identifie les prestations non conformes aux critères EAE et les exclut de toute prise en charge par l'AOS.

2.2

Avis relatifs aux recommandations

Recommandation 1:

Détection précoce des prestations sujettes à caution et déclenchement des évaluations

Le Conseil fédéral renforce les préalables au principe de la confiance (art. 33, al. 1, LAMal) en veillant à la détection précoce systématique des nouvelles prestations et des prestations étendues à d'autres indications sujettes à caution, et en veillant à ce qu'elles soient soumises à évaluation en fonction de certaines priorités.

Le DFI se fait conseiller par la CFPP6 pour désigner les prestations en vertu de l'art. 37d OAMal. Le processus d'évaluation conduit à des ajustements réguliers de l'OPAS.

Le principe de confiance implique un mécanisme d'identification des prestations controversées et donc à contrôler. Afin de maintenir des structures administratives légères et efficaces, l'évaluation des prestations nouvelles a lieu sur demande, et il appartient aux requérants de produire la documentation requise pour cette évaluation. En principe, toute personne ou organisation intéressée a le droit de déposer une demande de prise en charge d'une prestation nouvelle. La CFPP traite en moyenne de 15 à 20 demandes par an.

Le catalogue des prestations non exhaustif induit pour les assureurs que des prestations et méthodes nouvelles leur sont facturées aux tarifs en vigueur, ce qui rend difficile l'identification des prestations en question. Ce problème se pose en particulier dans le secteur hospitalier, où les prestations nouvelles sont facturées aux forfaits journaliers ou par cas en vigueur. Aux yeux des agents payeurs, les prestations nouvelles ne sont souvent pas identifiables comme telles (notamment lorsque des implants et des positions de la liste particulièrement coûteuses ne sont pas imputés séparément, ce qui n'est le cas que dans les contrats passés avec certains grands hôpitaux). En général, il est admis que l'instauration d'une prise en charge en fonction de la prestation en milieu hospitalier (système DRG ­ diagnosis-related groups ­ en service de soins aigus) dans le cadre de la réorganisation du financement des hôpitaux créerait davantage de transparence dans le recours à des méthodes nouvelles. Reste à savoir dans quelle mesure et à quel rythme ces changements déploieront leurs effets. En outre, le principe de confiance fait que seule une frange infime des innovations médicales fait l'objet d'une évaluation.

6

La CFPP est née le 1er janvier 2008 de la fusion de la Commission fédérale des principes de l'assurance-maladie et de la Commission fédérale des prestations générales (CFP), dans le cadre du projet de réforme de l'administration fédérale 2005 à 2007. Durant la période couverte par l'étude, la CFP était la commission consultative pour la désignation des prestations.

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Le Conseil fédéral reconnaît la nécessité d'agir pour promouvoir l'identification et l'évaluation précoces de technologies nouvelles en cours de développement ou se situant déjà au début de leur phase d'application pratique. Aussi entend-il faire élaborer un sytème destiné à promouvoir la détection précoce. Par manque de ressources, l'OFSP n'a instauré à ce jour que de façon rudimentaire la détection précoce systématique et le déclenchement des évaluations, bien que soit prévue la possibilité pour la Confédération d'intervenir à titre subsidiaire si les acteurs ne sont pas en mesure de proposer eux-mêmes des innovations utiles. Un formulaire de déclaration a bien été lancé début 2008; en présence de pistes sérieuses, il est envoyé à des fournisseurs de prestations, sociétés spécialisées, fabricants éventuels, etc. Il existe même un réseau reliant des organisations nationales (médecins-conseil, sociétés spécialisées, hôpitaux universitaires et cantonaux, organisations de patients, industrie) et des réseaux internationaux (Euroscan). Toutefois, les ressources en personnel sont actuellement insuffisantes pour permettre la mise en oeuvre d'un processus systématique et institutionnalisé d'identification et d'évaluation précoces de technologies nouvelles.

A la faveur de l'instauration du système DRG, il incombera aux partenaires tarifaires d'harmoniser les processus de désignation des prestations dans le contexte de la LAMal avec le système DRG (intégration de prestations nouvelles dans la structure tarifaire). Responsable de la désignation des prestations, la section Prestations médicales est représentée au sein de l'organisation de projet qui accompagne l'instauration du système DRG pour le compte de l'OFSP.

En résumé, on peut retenir que les conditions d'une identification précoce de prestations sujettes à caution sont réunies de façon partielle au sein de l'OFSP.

Le plan d'encouragement de promotion de l'identification précoce (y compris son alignement sur le système DRG) à élaborer d'ici à 2010 sur mandat du Conseil fédéral tient compte de la recommandation 1.

Recommandation 2:

Critères et bases de clarification

Le Conseil fédéral veille à ce que les bases et les critères utilisés pour la clarification du caractère controversé des prestations sujettes à caution soient adéquatement documentés et que le processus de présélection effectué à l'OFSP se déroule de manière transparente.

Selon l'art. 32 LAMal, les prestations doivent être efficaces, appropriées et économiques pour pouvoir être prises en charge par l'AOS. Au fil des ans, l'OFSP a établi et affiné pour ces prestations un processus d'évaluation censé garantir que les ressources humaines et financières en tout état de cause limitées ne soient employées que pour des prestations dont les assurés et les patients puissent tirer un profit avéré.

Dès la fin des années 90, l'Office fédéral des assurances sociales alors compétent en a consigné les principes dans un manuel destinés aux requérants. Ce manuel7 a été entièrement remanié au début de 2008 et transformé en formulaires de demande commentés.

7

Office fédéral de la santé publique: Manuel pour la présentation de demandes de prise en charge par l'assurance de prestations nouvelles ou controversées, mai 2008.

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Le processus d'évaluation s'inscrit dans un processus de décision clairement défini qui conduit à des mises à jour régulières de l'OPAS et de ses annexes. Il repose sur la démonstration scientifique de l'efficacité et sur la mise en évidence des risques, des effets secondaires et des conséquences financières liés à l'introduction potentielle de la nouvelle prestation. Les informations sont évaluées par la CFPP. Ces évaluations sont désignées sur le plan international par le terme de Health Technology Assessments (HTA).

Vu le large spectre des possibilités médicales, le processus d'évaluation doit se concentrer sur des prestations dont l'efficacité, l'adéquation et l'économicité sont sujettes à caution et qu'il convient d'évaluer, voire de réévaluer. Le processus tient compte de ces restrictions selon une procédure menée en deux étapes. Dans un premier temps, la prestation est attribuée au processus d'évaluation correct. C'est alors seulement qu'intervient la procédure de demande proprement dite. Le formulaire de déclaration sert à clarifier la question de savoir si le cas d'espèce nécessite vraiment une demande de mise à jour de l'OPAS ou de l'une de ses annexes (clarification du caractère controversé de la prestation). Dès la réception du formulaire de déclaration, la section Prestations médicales de l'OFSP procède à un tri: ­

si les critères EAE sont jugés sujets à caution, elle adresse un formulaire de demande aux requérants;

­

en présence de cas controversés, elle sollicite l'avis (clarification) de la Fédération des médecins suisses (FMH) ou de l'association faîtière de la branche de l'assurance-maladie sociale (santésuisse); ­ s'il apparaît, au vu des indications fournies sur le formulaire de déclaration ou des avis exprimés par santésuisse ou la FMH, que les critères EAE sont remplis, le formulaire de déclaration (y compris les informations complémentaires éventuelles) constitue la base d'une inscription (facultative) à l'annexe 1 de l'OPAS. La CFPP en est alors informée et formule une recommandation à propos de l'inscription visée; ­ si les critères EAE ne sont pas remplis au vu des indications fournies sur le formulaire de déclaration ou des avis exprimés par santésuisse ou la FMH, l'OFSP entame un processus d'évaluation.

La question de savoir si la procédure de clarification s'applique à une prestation était examinée jusqu'ici de façon pragmatique, faute d'effectifs suffisants. Le Conseil fédéral estime donc judicieux de revoir cette procédure et de la documenter en conséquence. Des travaux en ce sens ont d'ores et déjà été engagés. Les critères de tri visant à déterminer les cas à clarifier et ceux qui doivent être soumis directement à la CFPP sont en cours d'élaboration. Par ailleurs, la CFPP a examiné à ce propos, lors de sa séance extraordinaire du 30 mars 2009, l'opportunité d'instituer un comité qui fixerait des priorités et préparerait les cas complexes à l'intention de la Commission.

L'avis de droit de Markus Moser8 du 20 février 2009, commandé par l'OFSP va également en ce sens. Il recommande la mise en place d'une procédure sommaire permettant, dans le doute, de décider rapidement si une mesure diagnostique ou thérapeutique satisfait aux critères de l'art. 32, al. 1, LAMal. Au cas où ce doute ne

8

Markus Moser: Die Feststellung der Leistungspflicht der obligatorischen Krankenpflegeversicherung bei ärztlichen Leistungen, Berne, 20.2.2009.

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pourrait être écarté, on soumettra au DFI la demande d'inscription dans l'annexe 1 de l'OPAS et le processus d'évaluation sera mis en route.

Pour résumer, on peut retenir que l'adaptation du processus et l'élaboration de critères de tri en concertation avec la CFPP sont déjà en cours. Les travaux de développement (y compris la consultation de la CFPP et des autres parties prenantes) de même que leur mise en oeuvre concrète sont envisageables d'ici à 2010. Le Conseil fédéral relève encore que les mesures ainsi engagées tiennent compte de la recommandation 2.

Recommandation 3:

Demande concernant les prestations sans indication précise

Le Conseil fédéral veille à définir des conditions claires et fiables permettant de déposer des demandes d'évaluation pour les méthodes de traitement sans indication thérapeutique précise.

Le problème lié à la demande concernant des prestations sans indication précise se pose surtout dans le domaine des médecines complémentaires. Lors de la votation de 1994 concernant la loi sur l'assurance-maladie, le Conseil fédéral et le Parlement avaient déclaré qu'il fallait remplacer la démonstration scientifique de l'efficacité d'une prestation, qui était alors l'unique critère déterminant, par un ensemble de conditions ­ efficacité, adéquation et économicité ­ à remplir cumulativement. Par la suite, non seulement les critères d'évaluation ont été concrétisés pour les prestations médicales standardisées, mais des critères spécifiques propres à l'évaluation de méthodes de traitement individualisées ont été développés, qui prennent mieux en compte les particularités des mesures et des principes actifs appliqués en médecine complémentaire. La nouvelle version du processus d'évaluation et d'appréciation, en vigueur depuis début 2008, fixe des étapes axées sur les prestations de médecine complémentaire. Le formulaire de demande comprend des questions spécifiques aux prestations sans indication précise. Cinq organisations de spécialistes en médecine complémentaire ont fait parvenir des demandes qui sont évaluées selon ce nouveau processus.

Le 17 mai 2009, le peuple et les cantons ont accepté à 67 % l'article constitutionnel relatif aux médecines complémentaires. Selon cet article, il incombe à la Confédération et aux cantons de veiller, dans les limites de leurs compétences, à la prise en compte des médecines complémentaires dans le système de santé. Il appartient désormais aux autorités compétentes aux niveaux fédéral et cantonal de réfléchir à la manière d'atteindre cet objectif. L'OFSP et la CFPP, qui possèdent une vaste expérience de l'appréciation et de l'évaluation des prestations de médecine complémentaire, pourront apporter leur aide à cette fin.

Les autres prestations sans indication précise évoquées dans le rapport du CPA sont la réadaptation et la psychiatrie. En matière de réadaptation, il s'agit d'évaluer les critères EAE applicables à des programmes complets dont les diverses composantes ne peuvent
être spécifiques de telle ou telle indication, tandis que les programmes eux-mêmes ciblent expressément des indications précises, par exemple la réadaptation consécutive à une attaque cérébrale (cf. l'avis rendu à propos de la recomman5109

dation 4). En psychiatrie, la part des prestations qui ne dépendent pas d'une indication renvoie aux aptitudes interpersonnelles des thérapeutes et relèvent donc de la formation de base et continue ainsi que de l'assurance-qualité. En parallèle sont menées des activités de recherche et de développement liés à des indications spécifiques.

En résumé, la question des demandes portant sur des prestations sans indication précise ne se pose guère que dans le domaine des médecines complémentaires, question qui a été résolue grâce aux nouveaux processus mis en place au début de 2008. Les autorités fédérales et cantonales se pencheront, dans les prochains temps, sur les conséquences de la mise en vigueur du nouvel article constitutionnel.

Recommandation 4:

Demande concernant les systèmes thérapeutiques complexes

Le Conseil fédéral veille à ce que, outre les prestations individuelles, les prestations complexes, combinant le cas échéant des prestations médicales avec des analyses, des moyens, des appareils et des médicaments, puissent également faire l'objet d'une demande d'évaluation et être soumises à une évaluation de manière adéquate.

S'agissant des prestations complexes (programmes de traitement, prestations combinées relevant de plusieurs commissions ou listes), les processus actuels prévoient que l'OFSP coordonne le processus d'évaluation. En l'espèce, le requérant ne remet que le formulaire de déclaration rempli, accompagné éventuellement d'autres informations. La section détermine dans un premier temps la catégorie de prestations concernée au premier chef (prestation médicale, analyse, moyen et appareil, médicament) et la commission (CFPP ou CFAMA) censée évaluer la demande. Concernant les prestations pour lesquelles des médicaments jouent un rôle primordial mais non exclusif, la coordination est plus astreignante puisque ces prestations doivent être examinées par deux commissions9. Une fois le formulaire de déclaration reçu et examiné, le secrétariat de la CFPP fait savoir au requérant quels autres documents il doit produire en vue de l'examen de sa demande par la CFPP.

L'évaluation et l'appréciation de méthodes de traitement incluant une forte proportion de prestations «étrangères» au patient (p. ex. programmes de traitement assistés par télémédication ou programmes de gestion de la maladie pour les personnes souffrant de certaines affections chroniques) constituent un défi particulier. En l'occurrence, l'évaluation du critère d'économicité, notamment, se révèle très exigeante. En 2008, la CFPP n'en a pas moins refusé, dans un premier temps, un formulaire supplémentaire pour de tels programmes de traitement: considérant que le nouveau formulaire de demande satisfaisait aux exigences, elle a proposé son évaluation sur une période de deux ans. Une première demande en ce sens a déjà fait l'objet d'une consultation, deux autres sont en préparation, de sorte que l'on dispo9

Les médicaments sont autorisés, en fonction du produit, sur décision de l'OFSP (contrairement aux autres prestations mentionnées, qui le sont sur la base d'une modification d'ordonnance indépendamment du produit).

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sera bientôt d'expériences évaluables. La CFPP estime que ce domaine va gagner en importance. Une clarification s'impose quant aux limites de ces programmes de traitement par rapport à l'encadrement des patients dans les modèles de soins alternatifs (Managed Care). Les innovations au niveau des soins doivent être encouragées et mises en oeuvre dans le respect du cadre légal actuel (entre autres par le biais des formes particulières d'assurance visées à l'art. 62 LAMal) ou des dispositions légales à venir sur le Managed Care.

En résumé, le Conseil fédéral est d'avis que les processus en place permettent d'évaluer des prestations et des programmes de traitement complexes, et qu'il n'y a donc pas lieu d'agir en l'espèce.

Recommandation 5:

Séparation institutionnelle de l'évaluation et de l'appréciation

Le Conseil fédéral veille à définir clairement le rôle de l'OFSP dans la désignation et le contrôle des prestations médicales à la charge de l'AOS. Il définit en particulier la façon dont l'évaluation (assessment) et l'appréciation (appraisal) de la prise en charge des prestations médicales par l'AOS seront à l'avenir clairement séparées sur le plan institutionnel.

A la faveur de la mise en place, en 2008, de processus d'appréciation, d'évaluation et de décision standardisés sur la base des nouveaux formulaires de demande les rôles respectifs de l'évaluation (assessment) et de l'appréciation (appraisal) ont été clairement précisés.

Dans le contexte du Health Technology Assessment, l'évaluation de technologies médicales dans la perspective d'une décision de mise en oeuvre ou de financement se déroule en trois phases, à savoir: ­

assessment (évaluation transparente, plausible),

­

appraisal (appréciation tenant compte du cadre régional ou national),

­

decision (décision proprement dite).

Les phases assessment et appraisal correspondent aux étapes suivantes du processus: La section Prestations médicales veille à ce que les demandes qui lui parviennent sont dûment remplies, en ce sens qu'elle renvoie les demandes lacunaires aux requérants en les priant de les compléter ou de les reformuler. Puis, à partir de la demande qu'elle a reçue (et qui doit faire état des sources bibliographiques), elle rédige un résumé et une appréciation standard sur la qualité des informations données à l'appui de la demande, complétés le cas échéant par les avis d'experts externes (reviewers) à propos de certains éléments de la demande. La demande et l'appréciation succincte portent sur les points suivants: ­

exposé quantitatif du problème de santé (burden of disease);

­

aspects juridiques, éthiques et sociaux;

­

efficacité: efficacité au niveau de l'étude (efficacy), efficacité au quotidien (effectiveness);

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­

adéquation: sécurité, risques, questions de mise en oeuvre;

­

économicité: coût unitaire de la prestation, grille quantitative, coûts subséquents, rapport coût/efficacité au vu de la littérature spécialisée (ou, exceptionnellement, sur la base d'études coût/efficacité que l'OFSP sollicite luimême de la part des requérants).

La demande et l'appréciation succincte, qui sont ensuite adressées à la CFPP, correspondent à l'assessment (évaluation).

La consultation de la CFPP a pour but et objet de remettre une recommandation au DFI. A cette fin, la CFPP pondère chacun des faits et évalue la prestation sur la base des données scientifiques à disposition dans la perspective de la recommandation qu'elle va adresser au DFI. Elle tient compte par ailleurs du contexte social et de la politique de santé en Suisse. Il s'agit de l'appraisal (appréciation).

L'instauration du nouveau formulaire de demande au début 2008 satisfait ainsi à la recommandation 5. Le Manuel fixe clairement les rôles respectifs de l'OFSP et de la CFPP: l'OFSP est chargé de l'évaluation, ou assessment (demande complète et page de couverture10), et de la gestion du processus, tandis que la CFPP donne une appréciation (appraisal) sous forme de recommandation. Par conséquent, l'évaluation et l'appréciation sont clairement distinctes l'une de l'autre sur le plan institutionnel.

Lors de sa séance extraordinaire du 30 mars 2009, la CFPP a déclaré expressément qu'elle concevait son rôle dans le cadre de l'appréciation (appraisal) et que, de son point de vue, les deux phases de l'évaluation et de l'appréciation étaient bien distinctes sur le plan institutionnel. Sur ce point, il n'y a pas lieu d'agir.

Cela étant, il faut reconnaître que la section Prestations médicales de l'OFSP exerce effectivement un double rôle dans le processus d'appréciation, d'évaluation et de décision: d'une part, elle assume la responsabilité du processus de bout en bout (du premier contact noué par le requérant avec l'OFSP jusqu'à la communication et à la mise en oeuvre de la décision du département); d'autre part, elle procède à l'évaluation dans le cadre de ce processus. Cependant, ce double rôle ne concerne pas à la fois l'évaluation et l'appréciation. Le Conseil fédéral n'en est pas moins disposé à étudier une scission des différents rôles pour les trois commissions consultatives (cf. l'avis rendu à propos de la recommandation 6).

Pour résumer, le Conseil fédéral constate que les fonctions d'évaluation (assessment) et d'appréciation (appraisal) sont clairement séparées et que les rôles sont manifestement attribués à des acteurs déterminés. Sous réserve de l'avis rendu à propos de la recommandation 6, il ne voit aucune nécessité d'intervenir dans la clarification et la répartition des rôles entre l'OFSP et les commissions.

10

La page de couverture sert à juger de la qualité de l'information et, le cas échéant, de complément; l'évaluation et le complément sont apportés après consultation éventuelle d'experts externes.

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Recommandation 6:

Revalorisation et dotation en ressources appropriées de la CFPP

Le Conseil fédéral veille à ce que la place et l'indépendance de la CFPP dans le processus d'évaluation soient renforcées et que la Commission soit dotée des ressources indispensables pour accomplir son mandat.

Le Conseil fédéral est disposé à examiner les avantages et les inconvénients d'autres modèles d'organisation pour la CFPP et les deux autres commissions consultatives, avec au premier plan l'institution d'une présidence externe et la création d'un secrétariat autonome. L'institution d'une présidence externe implique de trouver une personne qualifiée, indépendante et reconnue par toutes les parties prenantes, qui puisse assumer cette fonction. En effet, contrairement aux commissions fédérales pour les vaccinations (CFV) et pour les problèmes liés au sida (CFPS), qui disposent d'une présidence externe, la CFPP (comme du reste les deux autres commissions consultatives pour les questions d'assurance-maladie) sont composées de personnes qui cumulent les fonctions d'expert et de représentant des diverses parties prenantes.

L'avantage de la solution consistant à créer une présidence externe et un secrétariat attitré résiderait dans une indépendance et une crédibilité accrues de la commission vis-à-vis de l'extérieur. Son principal inconvénient est qu'elle mobiliserait des ressources supplémentaires, sachant que les synergies nées de l'intégration du secrétariat à la section responsable du processus disparaîtraient et que le président externe devrait être parfaitement préparé par la section pour aborder les séances, ce qui impliquerait de surcroît d'y consacrer un certain temps. Il faudrait compter, en particulier durant la phase initiale de ce modèle, avec des temps de traitement des demandes plus longs.

Pour sa part, la CFPP ne voit pas la nécessité de disposer de son propre secrétariat ni d'accroître ses ressources en personnel. Par contre, elle a envisagé lors de sa séance extraordinaire du 30 mars 2009 de créer une coprésidence (tandem OFSP-CFPP) ou d'instituer un «porte-parole».

Le Conseil fédéral est disposé à étudier des formes d'organisation alternatives envisageables pour les commissions, y compris la création au sein de l'OFSP d'un secrétariat indépendant qui ne porte pas la responsabilité du processus (voir recommandation 5). Une analyse en ce sens ne saurait toutefois être escomptée
avant 2010. C'est pourquoi le DFI engagera des mesures adéquates et, pour autant qu'il y ait lieu d'adapter les bases légales, proposera au Conseil fédéral les modifications qui s'imposent.

Recommandation 7:

Dotation en ressources de la section responsable à l'OFSP

L'OFSP et le DFI garantissent un équilibre entre les tâches et les moyens attribués à la section Prestations médicales de l'OFSP, en tenant compte du rôle que celle-ci aura à l'avenir dans le processus.

5113

La CFPP a exprimé le voeu que l'OFSP commente les demandes de façon plus systématique dans le cadre de l'évaluation et se penche davantage sur le volet juridique. Par ailleurs, elle demande des expertises (reviews) ciblées de la part des experts. L'OFSP étudie les moyens de répondre à ces exigences. Selon le Conseil fédéral, l'examen des demandes par les experts, les mandats confiés à ces derniers pour clarifier des questions spécifiques ou pour lancer des évaluations approfondies devraient conduire à un surcoût considérable. Il convient cependant de considérer que des examens et des mandats d'expert systématiques risquent de faire traîner le processus d'évaluation en longueur. Les besoins en effectif pour la mise au concours et l'adjudication de mandats d'expertise sont manifestes et feront l'objet d'une demande de dotation supplémentaire dans le cadre du processus de réorganisation en cours.

Il n'est pas tenu compte ici d'un programme HTA de faible envergure, ce qui voudrait dire que, chaque année, une à trois demandes non évaluées dans le cadre du processus mais revêtant une certaine importance pour la désignation de prestations seraient traitées en externe par un organisme neutre.

Le Conseil fédéral sait que la section responsable à l'OFSP fait face à des besoins accrus en ressources et est disposé à examiner des demandes de financement de projets et d'augmentation des effectifs.

Recommandations 8 et 9: Concrétisation et opérationnalisation des critères EAE/Pondération plus forte du critère d'économicité Le Conseil fédéral veille à la concrétisation et à l'opérationnalisation adéquates des critères EAE qui régissent la procédure d'admission et de contrôle.

Le Conseil fédéral veille à ce que le critère d'économicité, qui régit l'évaluation de la prise en charge des prestations médicales par l'AOS, ait le poids qu'il doit avoir conformément à la loi.

Le Conseil fédéral partage l'opinion selon laquelle il convient de préciser et d'appliquer les critères EAE. Les critères d'efficacité et d'économicité sont définis de façon partielle dans les documents de demande et se subdivisent en sous-critères.

Par contre, la notion d'adéquation n'est actuellement pas définie comme cela serait souhaitable. Il existe donc bien un besoin de concrétisation et d'opérationnalisation, notamment en termes d'adéquation (évaluation comparative de l'efficacité avec des alternatives, en tenant compte des critères de sécurité et d'adéquation) et d'économicité (cf. l'avis rendu à propos de la recommandation 10) mais aussi dans l'évaluation combinée des trois critères selon un algorithme de décision. Des modèles de ce genre ont déjà trouvé des applications à l'étranger (p. ex., dans le cadre de décisions portant sur l'adoption de nouveaux vaccins dans le programme de vaccination financé par les pouvoirs publics néerlandais), qui pourrait être source d'inspiration pour ces travaux de mise au point.

Le Conseil fédéral émet par contre de sérieuses réserves quant à une pondération accrue de l'économicité et à l'application systématique du rapport coût/bénéfice sous forme de coûts maximaux par année de vie gagnée ajustée par sa qualité.

Aucun débat n'a été mené à ce jour en Suisse, au niveau politique, sur la fixation de 5114

priorités à partir de considérations liées au rapport coût/bénéfice. La CFPP a déclaré qu'elle ne pouvait pas lancer un tel débat tant que le Parlement ne fixerait pas un cadre budgétaire ou, plus exactement, un plafond de dépenses. Or, en vertu de la loi en vigueur, la notion de données budgétaires de référence est étrangère au système.

Sans compter que l'application de valeurs de référence coût/bénéfice pose de nombreux problèmes de méthode, à l'exemple de la fréquente grande dispersion statistique de telles estimations et de la non-disponibilité d'indications sur le rapport coût/efficacité en Suisse, qu'il faut compenser par des modèles de calcul n'offrant aucune garantie11. Des données incontestables, auxquelles la CFPP recourt depuis des années pour élaborer ses recommandations, sont celles qui ont trait à l'impact du coût (cost impact) de décisions d'admission. La Commission recommande souvent de restreindre l'obligation de prise en charge à des indications auxquelles il n'existe pas d'alternative, ou à des fournisseurs de prestations qui offrent des garanties de qualité. Mais selon l'algorithme de décision évoqué plus haut, il va de soi qu'il faut accorder au critère d'économicité le poids adéquat.

La mise en oeuvre des recommandations 8 et 9 requiert une analyse de modèles étrangers et une harmonisation avec toutes les autres mesures de maîtrise des coûts.

Les premières recommandations fondées sur une analyse seront disponibles d'ici à 2010.

Le Conseil fédéral reconnaît la nécessité d'une opérationnalisation des critères EAE, et notamment du critère d'économicité. Cependant, il ne juge pas indiqué, sans débat politique préalable, de désigner l'économicité comme un critère prioritaire (sous la forme de plafonds coût/bénéfice) par rapport à toutes les autres mesures envisageables de contrôle des coûts.

Recommandation 10:

Ordres de grandeur et critères utilisés dans l'appréciation

Le Conseil fédéral veille à formuler des critères et des ordres de grandeur en termes sanitaires et financiers comme cadre de référence pour l'appréciation.

Pour la CFPP, il serait utile d'inscrire l'appréciation (appraisal) dans des lignes directrices qui fixent les priorités de la politique sanitaire (prévention, guérison, palliation, p. ex.), la manière de gérer des prestations inédites (innovation) ou des interventions hautement spécialisées. En ce sens, il faut admettre la nécessité d'un cadre de référence, en termes de politique sanitaire, pour l'appréciation.

Dans la mesure où il s'agit d'aspects liés à la couverture des soins, il appartient aux cantons de fixer de telles lignes directrices (planification de la médecine hautement spécialisée, p. ex.). Au demeurant, le critère déterminant est le principe général qui veut que l'on ménage les ressources des assurances sociales, tandis que les lois fédérales dessineraient le cadre de référence pour certains domaines (p. ex., la modification de la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée qu'il est prévu d'adopter).

11

Cleemput I, Neyt M, Thiry N, De Laet C, Leys: Threshold values for cost-effectiveness in health care Health Technology Assessment (HTA). Brussels: Belgian Health Care Knowledge Centre (KCE);2008. KCE reports 100C (D/2008/10.273/96).

5115

Il en ira autrement, sans doute, du domaine de la prévention: l'avant-projet de loi sur la prévention12 prévoit, à titre d'instrument de pilotage, que le Conseil fédéral formule une stratégie de prévention et de promotion dans le domaine de la santé reposant sur des objectifs nationaux. Cette stratégie devra fixer notamment des objectifs pour les programmes nationaux, pour le futur Institut suisse pour la prévention et la promotion dans le domaine de la santé ainsi que pour l'emploi des recettes issues des prélèvements pour la prévention. En d'autres termes, il est prévu d'organiser dans les domaines de la prévention et de la promotion de la santé, un cadre de référence sur lequel la CFPP pourra s'aligner pour l'appréciation.

Le Conseil fédéral prend acte de la nécessité de créer, en termes de politique sanitaire, un cadre de référence pour l'appréciation. Il précise que ce cadre existe déjà dans certains domaines et qu'il n'est pas de sa compétence de fixer un cadre de référence stratégique pour d'autres domaines.

Recommandation 11:

Apport des experts externes

Le Conseil fédéral veille à ce que le rôle des experts externes dans le processus soit clairement distinct de celui de l'OFSP. Il veille également à élargir la zone de recrutement des experts au-delà des frontières nationales, à rendre plus spécifique leur cahier des charges et à optimiser les conditions de leur engagement.

Le Conseil fédéral admet la nécessité croissante de s'assurer les services d'experts externes ­ suisses et étrangers ­ pour l'évaluation, ce qui est déjà le cas dans le cadre de la standardisation en cours du processus d'appréciation et d'évaluation (cf. la réponse à la recommandation 7). Le Conseil fédéral attire toutefois l'attention sur le risque de voir le processus d'évaluation compliqué ou ralenti par le recours à des experts externes. Mais il faut reconnaître aussi qu'il est parfois très difficile de trouver des spécialistes disposant de capacités durant les périodes souhaitées.

Pour résumer, on retiendra que la standardisation en cours du processus d'appréciation et d'évaluation a marqué le début de l'extension du réseau d'experts. Le Conseil fédéral ne voit donc aucune nécessité d'agir en l'espèce.

Recommandation 12:

Collaboration internationale

Le Conseil fédéral veille à ce que les potentialités que recèle la collaboration internationale en ce qui concerne la détection précoce et l'identification des prestations sujettes à caution ainsi que l'évaluation scientifique et le réexamen des prestations soient plus strictement exploitées. Il identifie les éventuels obstacles juridiques qui s'opposent à une coopération internationale et propose des solutions concrètes pour les lever.

12

Pour de plus amples informations, cliquer sur http://www.bag.admin.ch/themen/ gesundheitspolitik/00388/01811/05047/index.html?lang=fr

5116

Le Conseil fédéral constate que les compétences disponibles à l'échelon international sont d'ores et déjà bien exploitées dans le cadre de projets et de réseaux. C'est ainsi que l'OFSP est représenté dans le projet européen EuNetHTA13 et qu'il fait partie du réseau international EUROSCAN14 de détection précoce de technologies nouvelles. Par ailleurs, l'OFSP est membre de HTAi15, réseau mondial des agences gouvernementales INAHTA16, du Réseau des bases factuelles en santé de l'OMS17 et entretient des contacts réguliers avec la European Public Health Association, EUPHA18. Le recours à ces compétences internationales a cependant des limites, sachant que les faits scientifiques, notamment ceux issus d'études cliniques (analyses bibliographiques systématiques et évaluations HTA) doivent être réexaminés dans le contexte suisse. A noter aussi que la diversité des systèmes de santé se traduit par des structures d'organisation et de coûts différentes, une épidémiologie différente ainsi que des préférences de traitement parmi les patients et des aspects culturels, qui rendent difficile la comparaison avec la Suisse19.

Des structures allégées et la possibilité d'une prise en charge provisoire des prestations permettent aux assurés, par rapport à ce qui se pratique à l'étranger, d'accéder rapidement à de nouvelles prestations prometteuses. L'art. 33, al. 3, LAMal (art. 33, let. c, OAMal) révèle l'esprit d'ouverture inscrit dans la loi sur l'assurance-maladie vis-à-vis des progrès de la médecine ainsi que des attentes que cela suscite. Mais par ailleurs, l'expérience démontre qu'au stade de développement précoce actuel des technologies médicales, la Suisse ne dispose pas encore d'évaluations étrangères. Or il serait incompatible avec une charte vantant un approvisionnement médical de haut niveau de n'agréer des méthodes de traitement nouvelles qu'une fois obtenue la démonstration définitive de leur efficacité et de leur adéquation, sur la foi de résultats probants sur une longue période. Aussi l'éventail de prestations couvertes par la LAMal est-il ouvert ­ en partie du moins ­ au progrès médical, même si celui-ci n'est pas encore définitivement acquis. La participation active à des réseaux implique en général de mettre des appréciations et des évaluations à la disposition des partenaires. Ce qui signifie que
l'OFSP devrait faire en sorte que les demandes, ses commentaires et les évaluations de la commission soient accessibles sous forme de résumés en langue anglaise. Cela nécessite d'une part des ressources pour la traduction et, de l'autre, des règles concernant l'usage d'informations confidentielles dans le cadre de la procédure de demande (secret d'affaires), le cas échéant avant même la décision du département (cf. l'avis rendu à propos de la recommandation 17).

13 14 15 16

17

18

19

Projet lancé par l'UE en vue d'harmoniser l'évaluation, fondée sur des faits, de technologies médicales en Europe; informations disponibles sur: http://www.eunethta.net/ Réseau mondial de détection précoce de technologies nouvelles; informations sur http://www.euroscan.bham.ac.uk Health Technology Assessment International, société internationale d'encouragement et de développement du HTA; informations disponibles sur http://www.htai.org/ Réseau mondial des agences gouvernementales qui se consacrent à l'évaluation, fondée sur des faits, de technologies médicales; pour de plus amples informations: http://www.inahta.org/ Réseau instauré par l'OMS en vue de fournir aux responsables politiques des informations fiables sur les interventions et questions stratégiques les plus diverses dans le domaine sanitaire; pour de plus amples informations: http://www.euro.who.int/hen Association européenne des organisations nationales de santé publique, qui, par le biais de nombreux forums, entretient le dialogue entre les milieux scientifiques, les décideurs de l'économie et les responsables politiques. Pour de plus amples informations, cliquer sur http://www.eupha.org/ Eisenberg JM: Globalize the evidence, localize the decision: evidence-based medicine and international diversity. Health Aff (Millwood). 2002 May à Jun;21(3):166-8.

5117

Les compétences internationales sont déjà exploitées à l'heure actuelle. C'est pourquoi le Conseil fédéral ne voit pas la nécessité d'agir dans le sens de la recommandation 12. La coopération avec des réseaux internationaux pourra toutefois exiger, dans l'évaluation et l'appréciation, une transparence qui dépasse le cadre de la LTrans (voir l'avis à propos de la recommandation 17).

Recommandation 13:

Règlement intérieur de la CFPP

La CdG-N demande à la CFPP qu'elle se dote sans délai d'un règlement intérieur, conformément à l'art. 37, al. 2, OAMal. Celui-ci doit préciser l'organisation et les méthodes de travail de la Commission. Il doit également contenir des directives et une procédure pour la détermination des prestations et l'apport des experts externes.

Le Conseil fédéral précise qu'il existe désormais un règlement intérieur en bonne et due forme pour la CFPP. Ce règlement a été décidé par la CFPP fin 2008 et approuvé par le chef du DFI début 2009. Il est entré en vigueur rétroactivement le 1er janvier 2009 et, si nécessaire, sera adapté en fonction de la mise en oeuvre des présentes recommandations de la CdG-N.

Pour ces raisons, le Conseil fédéral ne voit aucune nécessité d'agir sur ce point.

Recommandation 14:

Contrôle de gestion

Le DFI ou l'OFSP veillent à ce que la détermination et le contrôle des prestations médicales à la charge de l'AOS soient suivis par un contrôle de gestion moderne. Ce contrôle doit garantir un pilotage efficace des travaux et un controlling approprié au niveau de l'office et du DFI; il doit également permettre une évaluation statistique de l'évolution des affaires en cours sur des périodes relativement étendues.

A propos de la recommandation 14, le Conseil fédéral n'envisage qu'une intervention limitée. La procédure de demande de prise en charge de prestations nouvelles ou controversées a été transférée au système iGEKO20. iGEKO soutient les processus de travail de bout en bout, de la réception du courrier au scannage des documents, de l'ouverture et du pilotage des dossiers jusqu'à l'archivage des informations, en passant par la gestion des affaires et des documents. Il fait l'objet d'une optimisation permanente.

20

Programme de soutien des processus de travail, en usage au sein du DFI, entre autres.

5118

Recommandation 15:

Transparence concernant les prestations provisoirement admises

Le Conseil fédéral veille à ce que les prestations admises à titre provisoire qui, après évaluation, ne satisfont pas aux critères légaux EAE soient exclues de la prise en charge par l'AOS. Il se dote d'une statistique indiquant le taux de succès desdites prestations.

Les évaluations et réévaluations se déroulent selon le même processus, sur la base des critères EAE. On pourra se référer à ce sujet aux avis rendus à propos des recommandations 2 et 8. Cela garantit que les prestations prometteuses et admises provisoirement qui ne satisfont pas aux critères EAE une fois le délai d'évaluation échu seront exclues de l'obligation de prise en charge.

Le fait d'avoir intégré le processus d'évaluation à iGEKO permet de rendre transparent le processus suivi pour les prestations admises provisoirement (tout comme, d'ailleurs, pour toutes les autres prestations en cours d'évaluation), et ce, avec un faible investissement supplémentaire.

Le Conseil fédéral prend bonne note de la recommandation 15 et s'engage à la mettre en oeuvre d'ici fin 2009.

Recommandation 16:

Gestion et contrôle du DFI

Le DFI s'implique davantage dans sa fonction de direction et de surveillance vis-à-vis des autorités responsables de la détermination et du contrôle des prestations médicales qui lui sont subordonnées.

Le Conseil fédéral prend acte de la volonté de la commission de gestion de voir le département s'impliquer davantage dans la conduite et la surveillance des autorités responsables de la détermination et du contrôle des prestations médicales. Il pense cependant que le DFI assume de façon appropriée sa fonction de direction et de surveillance vis-à-vis de l'OFSP. En outre, le DFI fixe des objectifs clairs pour assurer la coordination des diverses amorces de maîtrise des coûts et met l'accent sur les affaires qui revêtent une importance politique et financière. Ce faisant, il se concentre sur le niveau stratégique. Par conséquent, le Conseil fédéral est d'avis qu'il n'y a pas lieu d'agir à propos de la recommandation 16.

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Recommandation 17:

Publication des résultats intermédiaires

Le Conseil fédéral examine dans quelle mesure les requérants et les milieux intéressés peuvent avoir un meilleur accès aux résultats intermédiaires de la procédure, notamment au contenu des prises de position de l'OFSP et des experts externes, ainsi qu'à la recommandation de la CFPP à l'intention du DFI. Il identifie les éventuels obstacles juridiques qui s'opposent à une plus grande transparence de la procédure et il en esquisse les solutions correspondantes.

L'accès à des documents officiels est régi par la loi fédérale sur le principe de la transparence de l'administration, entrée en vigueur le 1er juillet 2006 (LTrans; RS 152.3). En principe, la LTrans accorde à toute personne le droit de consulter des documents officiels. Ce droit peut être limité, différé ou refusé dès lors que des intérêts publics ou privés prépondérants s'y opposent. La loi prévoit en l'espèce des mesures dérogatoires. Les demandes en ce sens sont étudiées et traitées en vertu des dispositions en vigueur.

Les informations que fournissent les requérants sur le formulaire de déclaration sont accessibles aux seuls collaborateurs de l'OFSP et de la CFPP durant la procédure de demande. Les requérants ont la possibilité, de qualifier de «confidentielles» les informations relevant des secrets professionnel, d'affaires ou de fabrication, etc.

Après réception du formulaire, l'OFSP confirme qu'une fois la décision prise, ces informations ne seront pas transmises à des personnes intéressées étrangères à l'administration.

C'est une autre question que de savoir si, au-delà du champ d'application de la LTrans, il est légitime de rendre systématiquement publics les résultats intermédiaires de la procédure. On observera à ce propos qu'il y a lieu, dans toute la mesure du possible, de protéger les experts et les membres de la CFPP contre toute tentative de pression de la part des requérants et d'autres milieux intéressés. Des contacts ont d'ores et déjà été pris dans ce sens. Une publication systématique recèle le risque d'une prise d'influence croissante des requérants sur les membres de la CFPP. A ce propos, une étude internationale révèle que dans les systèmes offrant une transparence accrue des processus de décision en matière de financement de prestations sanitaires, les fournisseurs de solutions technologiques exercent une influence
plus grande que dans les systèmes présentant une faible transparence21. Il reste que la communication des résultats intermédiaires de la procédure aurait une incidence positive sur la promotion de la coopération internationale (cf. l'avis rendu à propos de la recommandation 12) et sur la crédibilité même de la procédure. Dans ce contexte, l'OFSP étudie actuellement le moyen de gérer une publication systématique éventuelle.

Le Conseil fédéral souligne qu'en vertu de la LTrans, toute personne est en principe autorisée à consulter des documents officiels dès la clôture d'une procédure. Par contre, en cours de procédure, la transparence peut entraver ou restreindre considérablement une procédure de décision. Il faut à tout prix 21

«it would [...] seem that less transparent and participatory processes afford fewer openings for technology sponsors to exert pressure towards coverage, and thus are less driven by supporters of technology coverage»; Jost Timothy S: Health Care Voverage Determinants: An International Study. Open University Press: New York, 2005, p. 260.

5120

préserver les experts et les membres de la CFPP des tentatives de pression de la part des requérants et d'autres milieux intéressés. Le Conseil fédéral est disposé à examiner d'ici à 2010 les avantages et les inconvénients d'une transparence dépassant le cadre de la LTrans.

Recommandation 18:

Publication des bases de décision complémentaires utilisées au niveau du DFI

Quand le DFI s'appuie sur des expertises complémentaires pour prononcer ses décisions d'ordonnance sur les prestations médicales, en plus des éléments fournis aux stades préparatoires, il fait état ouvertement de quelles informations il s'agit.

Le Conseil fédéral précise qu'en vertu de la LTrans, toute personne a le droit de consulter des documents officiels, à moins que sa requête constitue une exception justifiant la restriction, l'ajournement ou le refus de l'accès à ces informations. Ces deux dernières années, le DFI a toujours suivi les recommandations de la CFPP sans solliciter d'expertises supplémentaires. Si, dans un cas, il devait décider de mener ses propres enquêtes ou études en complément des recommandations de la CFPP, le droit de consultation, conformément à la LTrans, s'étendrait en tout état de cause à ces documents.

Le Conseil fédéral ne voit donc aucune nécessité d'agir.

Recommandation 19:

Contrôle des prestations existantes

La CdG-N demande au Conseil fédéral de présenter la manière dont il entend à l'avenir contrôler systématiquement et rigoureusement les prestations existantes dans le domaine des prestations médicales, conformément au mandat légal défini à l'art. 32, al.2, LAMal.

Le Conseil fédéral est disposé à investir davantage de ressources dans le contrôle des prestations existantes. Il conviendra au préalable, dans un avant-projet, d'élaborer les critères de priorité et de définir les interfaces avec des initiatives similaires (p. ex. assurance-qualité et promotion de l'application adéquate de prestations médicales, revalorisation des soins de base en mettant en place un filtrage [gatekeeping] pour les traitements onéreux). Des travaux en ce sens sont en préparation. Un contrôle systématique des prestations médicales mobilisera en revanche des ressources considérables dont il conviendra de chiffrer le volume dans l'avant-projet évoqué.

5121

3

Récapitulation

Le Conseil fédéral salue l'approche méthodique et le sérieux de l'analyse des processus d'évaluation et de décision relatifs à la prise en charge par l'AOS de nouvelles prestations médicales, ainsi que les recommandations qu'en a tirées la CdG.

­

Le Conseil fédéral précise que bon nombre de ces recommandations ont d'ores et déjà été mises en oeuvre par l'OFSP, ou sont en passe de l'être, dans le cadre du développement permanent des processus. Il s'agit en l'espèce des recommandations 1, 2, 11, 12, 14 et 15.

­

Le Conseil fédéral est disposé à analyser de plus près les recommandations 3, 6 à 9, 17 et 19 et à examiner l'opportunité de les faire appliquer.

­

Le Conseil fédéral ne voit par contre aucune nécessité de prendre de nouvelles mesures en ce qui concerne les recommandations 4, 5, 10, 13, 16 et 18.

La CdG-N attire l'attention sur l'insuffisance actuelle des ressources de l'OFSP. Le développement et la mise en oeuvre en partie déjà engagés des recommandations de la CdG requerront des ressources supplémentaires. Le DFI va examiner à combien se montent ces besoins au total, comment les ressources pourront être mises à disposition et soumettra au Conseil fédéral une proposition en ce sens.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'expression de notre considération distinguée.

24 juin 2009

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Hans-Rudolf Merz La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

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