09.074 Message sur les initiatives populaires «Pour un traitement fiscal privilégié de l'épargne-logement destinée à l'acquisition d'une habitation à usage personnel ou au financement de travaux visant à économiser l'énergie ou à préserver l'environnement (initiative sur l'épargne-logement)» et «Accéder à la propriété grâce à l'épargne-logement» du 18 septembre 2009

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre au vote du peuple et des cantons les initiatives populaires «Pour un traitement fiscal privilégié de l'épargnelogement destinée à l'acquisition d'une habitation à usage personnel ou au financement de travaux visant à économiser l'énergie ou à préserver l'environnement (initiative sur l'épargne-logement)» et «Accéder à la propriété grâce à l'épargnelogement» en leur recommandant de les rejeter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 septembre 2009

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Hans-Rudolf Merz La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2009-1512

6313

Condensé Le Conseil fédéral rejette les deux initiatives populaires sur l'épargne-logement sans proposer de contre-projet. En effet, il est d'avis qu'une imposition privilégiée de l'épargne-logement est un moyen qui n'est ni efficace ni efficient pour promouvoir l'accession à la propriété du logement. Par ailleurs, il existe déjà des instruments efficaces pour ce faire: les possibilités de versement anticipé des avoirs de la prévoyance professionnelle et de la prévoyance liée. En outre, l'épargne-logement a des effets négatifs sur l'économie et rend le système fiscal encore plus compliqué qu'il ne l'est actuellement.

L'initiative de la Société suisse pour la Promotion de l'épargne-logement (initiative SGFB) déposée le 29 septembre 2008 prévoit l'introduction facultative par les cantons de la déduction du revenu imposable de l'épargne-logement constituée pour l'acquisition d'un premier logement à usage personnel en Suisse (maximum 15 000 francs par an, le double pour les couples) et pour le financement de mesures visant à économiser l'énergie et à protéger l'environnement (maximum 5000 francs par an, le double pour les couples). Une épargne peut être constituée une seule fois à chacune de ces deux fins, pendant 10 ans au maximum, mais pas simultanément.

De plus, les cantons ont la possibilité d'exonérer les primes d'épargne-logement de l'impôt sur le revenu.

L'initiative de HEV Suisse «Accéder à la propriété grâce à l'épargne-logement» (initiative HEV) déposée le 23 janvier 2009 va moins loin. Elle se limite à demander une imposition privilégiée des dépôts effectués au titre de l'épargne-logement pour l'acquisition d'un premier logement à usage personnel en Suisse (maximum 10 000 francs par an, le double pour les couples) pendant 10 ans au plus. Au contraire de l'initiative SGFB, l'initiative HEV ne propose pas que cet avantage fiscal soit facultatif; elle demande qu'il soit introduit obligatoirement par la Confédération et les cantons.

Le Conseil fédéral n'a jamais approuvé le modèle d'épargne-logement appliqué dans le canton de Bâle-Campagne et repris dans le train de mesures fiscales proposé en 2001. Il a toujours été d'avis qu'il n'était pas nécessaire d'introduire un nouvel instrument fiscal pour promouvoir l'accession à la propriété du logement.

Dès lors et conformément à la position
qu'il a défendue jusqu'ici, il rejette les deux initiatives sans proposer de contre-projet.

Plusieurs raisons justifient ce rejet. Le droit fiscal en vigueur prend déjà dûment en compte le mandat constitutionnel de l'encouragement à l'accession à la propriété du logement dans le cadre de la prévoyance. Les possibilités de versement anticipé à traitement fiscal privilégié des avoirs du 2e pilier et du pilier 3a sont des instruments efficaces pour favoriser l'acquisition d'un premier logement à usage personnel. La détermination des valeurs locatives par les autorités fiscales est une autre composante centrale de cette politique d'encouragement. En effet, celles-ci sont fixées en dessous des valeurs du marché, afin de soutenir la mise en oeuvre du mandat consti-

6314

tutionnel cité. Les mesures fiscales actuelles sont telles, qu'il n'est nul besoin d'en prendre d'autres pour promouvoir l'accession à la propriété du logement.

L'épargne-logement a des effets négatifs en termes de politique sociale et de politique des revenus. En raison de la progressivité de l'impôt sur le revenu, ce sont surtout les personnes qui disposent d'un revenu élevé qui profitent de la déduction au titre de l'épargne-logement. L'épargne-logement a même un effet régressif sur le revenu imposable, par conséquent plus leur revenu est élevé, plus les épargnants sont nombreux, tandis que les ménages dont le revenu imposable est inférieur à 40 000 francs sont nettement sous-représentés.

L'effectivité et l'efficience d'une imposition privilégiée de l'épargne-logement sont donc à considérer de manière relative, car celle-ci ne permet qu'à une petite partie des ménages dits «seuil» (dont le revenu annuel brut est compris entre 60 000 et 100 000 francs) d'acquérir un logement à usage personnel. L'introduction de la déduction fiscale des dépôts d'épargne-logement profite donc en premier lieu aux contribuables qui disposent de moyens suffisants pour acquérir un logement à usage personnel même sans bénéficier de cette mesure. On estime que l'effet d'aubaine sera d'autant plus élevé. En outre, les retombées de l'épargne-logement bénéficient en partie aux fournisseurs de produits destinés à l'épargne-logement (banques et autres instituts financiers). Si les marchés de capitaux et les marchés du logement sont bien développés, alors l'épargne-logement est un instrument qui n'est ni efficace ni efficient, car elle ne se révèle pas suffisamment appropriée pour promouvoir l'objectif visé, à savoir l'accession à la propriété du logement des familles jeunes situées dans les catégories de revenu moyennes et basses.

D'un point de vue économique, promouvoir l'accession à la propriété du logement par des allégements fiscaux a des effets négatifs sur la croissance économique et la prospérité. En effet, cela distord les choix de consommation des ménages, capitalise l'aide à l'épargne-logement dans le prix des terrains et met un frein aux investissements qui favorisent la productivité et la croissance des entreprises, en encourageant les investissements dans la construction de logements, sans effet sur la productivité.
Les allégements fiscaux prônés par l'initiative SGFB se révèlent problématiques sur quatre points. Premièrement, l'exonération fiscale complète, lors de son retrait, de l'épargne-logement constitue un traitement privilégié non justifié par rapport au système de prévoyance du 2e pilier et du pilier 3a, dont les prestations en capital sont soumises à une imposition séparée avec un barème réduit. Deuxièmement, les mesures d'épargne-logement destinées à économiser l'énergie (épargne-logement d'énergie) entraînent une double réduction de la charge fiscale. D'une part, elles autorisent à déduire du revenu imposable le capital constitué au titre de l'épargnelogement et à le prélever sans payer d'impôts pour l'utiliser de manière appropriée.

D'autre part, il est possible de déduire ce même capital une seconde fois au titre des frais d'entretien, au moment où il est investi dans des mesures d'économie d'énergie. Il en résulte une double déduction non justifiée. Troisièmement, le rappel d'impôt privilégié sur l'épargne-logement qui n'a pas été utilisée de manière conforme (séparée des autres revenus avec un impôt annuel) demeure réservé, ce qui encourage des optimisations fiscales non justifiées. Quatrièmement, si en plus des

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mesures d'épargne-logement d'énergie on autorise l'exonération fiscale des primes d'épargne-logement, cette possibilité de déduction supplémentaire entraîne un déséquilibre entre propriétaires et locataires. L'initiative HEV est plus modérée étant donné que les points deux et quatre susmentionnés sont supprimés. A l'inverse de l'initiative SGFB, l'initiative HEV ne donne aucune condition pour le rappel d'impôt dans le cas où l'épargne-logement n'est pas utilisée dans un but approprié.

Les deux initiatives populaires sur l'épargne-logement vont à l'encontre de l'objectif de simplification du droit fiscal. En effet, accorder différentes possibilités de déduction pour l'acquisition d'un premier logement à usage personnel rendrait le système fiscal actuel plus compliqué et augmenterait les dépenses liées à son application. L'initiative SGFB englobe des mesures visant à économiser l'énergie et alourdit encore le travail administratif, étant donné qu'il faut vérifier là aussi l'utilisation conforme du capital accumulé (assainissement énergétique). Pour déterminer la taxation, il faut recourir à l'avis d'un professionnel et le dédommager.

Si l'utilisation du capital provenant de l'épargne-logement n'est pas conforme, il faut effectuer une procédure en rappel d'impôt. Cela implique de recourir à des moyens de contrôle adaptés lors de changements de domicile d'un canton à un autre. La mise en place d'un système de déclaration efficace augmentera inéluctablement les dépenses administratives des autorités cantonales.

Du point de vue de la conformité au principe d'harmonisation, les deux initiatives divergent fondamentalement. L'initiative HEV prend en compte l'harmonisation fiscale formelle, alors que l'initiative SGFB l'ignore totalement, étant donné qu'elle accorde uniquement aux cantons la possibilité d'opter pour un modèle d'épargnelogement, ce qui, concrètement, entraînerait des différences de réglementation non justifiables entre les cantons.

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Table des matières Condensé

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1 Aspects formels et validité des initiatives 1.1 Texte des initiatives 1.2 Aboutissement et délais de traitement 1.3 Validité

6318 6318 6321 6321

2 Contexte des initiatives

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3 Buts et teneur des initiatives

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4 Appréciation des initiatives 4.1 Aucune nécessité de prendre d'autres mesures fiscales pour encourager l'accession à la propriété du logement 4.2 Moyen inefficace pour augmenter le nombre de propriétaires parmi les ménages «seuil» 4.3 Effets négatifs sur la croissance et la prospérité 4.4 Remise en question du principe de l'égalité devant la loi 4.5 Contradiction avec l'effort de simplification du système fiscal 4.6 Conséquences juridiques différentes en ce qui concerne l'harmonisation fiscale 4.7 Répercussions financières 4.8 Difficultés prévisibles lors de la mise en application par les cantons

6324 6324 6327 6330 6331 6333 6335 6335 6336

5 Exigences du droit de procédure

6337

6 Conclusions

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Annexe Encouragement de l'accession à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle

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Arrêté fédéral concernant l'initiative populaire «Pour un traitement fiscal privilégié de l'épargne-logement destinée à l'acquisition d'une habitation à usage personnel ou au financement de travaux visant à économiser l'énergie ou à préserver l'environnement (initiative sur l'épargne-logement)» (Projet)

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Arrêté fédéral concernant l'initiative populaire «Accéder à la propriété grâce à l'épargne-logement» (Projet)

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Message 1

Aspects formels et validité des initiatives

Le 29 septembre 2008, la Société suisse pour la Promotion de l'épargne-logement (SGFB) a déposé l'initiative populaire «Pour un traitement fiscal privilégié de l'épargne-logement destinée à l'acquisition d'une habitation à usage personnel ou au financement de travaux visant à économiser l'énergie ou à préserver l'environnement (initiative sur l'épargne-logement)» sous la forme d'un projet rédigé.

Le 23 janvier 2009, HEV Suisse a déposé l'initiative populaire «Accéder à la propriété grâce à l'épargne-logement» sous la forme d'un projet rédigé.

1.1

Texte des initiatives

L'initiative SGFB a la teneur suivante: I La Constitution est modifiée comme suit: Art. 129a (nouveau)

Imposition de l'épargne-logement

Les cantons peuvent exonérer les dépôts effectués au titre de l'épargne-logement de l'impôt sur la fortune et les intérêts produits par le capital-logement de l'impôt sur le revenu, pendant une durée d'épargne de dix ans consécutifs au plus.

1

Ils peuvent en outre prévoir que les dépôts effectués au titre de l'épargne-logement sont déductibles du revenu imposable, à concurrence d'un montant de 15 000 francs par an s'ils sont destinés à financer l'acquisition d'un logement conformément à l'al. 3, let. a, et de 5000 francs par an s'ils sont destinés à financer des travaux conformément à l'al. 3, let. b; ces déductions ne sont possibles que pendant 10 ans au plus. Les époux faisant l'objet d'une imposition commune peuvent chacun faire valoir ces déductions. L'Assemblée fédérale peut, par voie d'ordonnance, adapter les montants maximaux prévus ci-dessus au renchérissement.

2

Les dépôts effectués au titre de l'épargne-logement au sens du présent article doivent servir à financer:

3

a.

l'acquisition d'un premier logement habité par le futur propriétaire à un lieu de domicile en Suisse, ou

b.

des mesures d'économie d'énergie ou de protection de l'environnement portant sur le logement habité par son propriétaire à un lieu de domicile en Suisse.

Les dépôts effectués au titre de l'épargne-logement ne peuvent être affectés qu'une seule fois à chacune des fins prévues à l'al. 3 sans qu'il soit possible d'utiliser simultanément les deux options; seuls les adultes domiciliés en Suisse peuvent effectuer des dépôts au titre de l'épargne-logement.

4

6318

Les dépôts effectués au titre de l'épargne-logement doivent être opérés auprès d'une banque soumise à la surveillance de la Confédération.

5

Les dépôts effectués au titre de l'épargne-logement et les intérêts crédités ne peuvent pas être constitués en gage.

6

Les cantons peuvent prévoir une limite d'âge pour les bénéficiaires des avantages fiscaux de l'épargne-logement, un montant annuel minimum pour les dépôts et une durée d'épargne minimum.

7

Les dépôts cumulés effectués au titre de l'épargne-logement et les intérêts crédités font l'objet d'un rappel d'impôt sur le revenu, conformément aux dispositions cantonales en la matière:

8

a.

si les dépôts ne sont pas affectés conformément aux fins prévues dans un délai de deux ans à compter de l'échéance de la durée maximale de la constitution de l'épargne-logement ou à compter d'un retrait anticipé; si, dans ce délai, une part du capital et des intérêts crédités n'a pas été affectée aux fins prévues, le rappel d'impôt ne porte que sur celle-ci;

b.

si, après le décès de l'épargnant, ni le conjoint survivant ni les descendants ne continuent l'épargne-logement pour leur propre compte jusqu'à la fin de la durée d'épargne prévue;

c.

si, dans les cinq ans qui suivent l'acquisition du logement conformément à l'al. 3, let. a, son utilisation est durablement modifiée ou s'il est cédé à un tiers sans que le produit de la vente ne serve à l'acquisition d'un autre logement en Suisse également affecté à l'usage personnel de l'épargnant.

Si l'épargnant transfère son domicile dans un autre canton, l'imposition des dépôts effectués au titre de l'épargne-logement est reportée. Les cantons introduisent une réglementation aux termes de laquelle le report prend fin et le rappel d'impôt prévu à l'al. 8 est appliqué si, dans le nouveau canton de domicile, les dépôts ne sont pas affectés conformément aux fins prévues.

9

10 Les cantons peuvent prévoir des dispositions applicables aux cas de rigueur si le rappel d'impôt portant sur l'épargne-logement entraîne des charges objectivement non justifiables.

Les cantons édictent des dispositions visant à empêcher les abus portant sur les avantages fiscaux de l'épargne-logement.

11

Art. 129b (nouveau)

Imposition des primes d'épargne-logement

Les cantons peuvent exonérer de l'impôt sur le revenu les primes liées aux dépôts effectués au titre de l'épargne-logement et destinés à l'acquisition à titre onéreux d'un premier logement à usage personnel en Suisse ou au financement de travaux effectués sur un logement de ce type pour économiser l'énergie ou préserver l'environnement. Ils règlent les détails.

6319

II Les dispositions transitoires de la Constitution sont complétées comme suit: Art. 197, ch. 8 (nouveau) 8. Disposition transitoire ad art. 129a et 129b Jusqu'à l'entrée en vigueur des adaptations de la législation fédérale relatives aux art. 129a et 129b, les cantons peuvent édicter immédiatement des dispositions fondées sur ces art. 129a et 129b.

L'initiative HEV a la teneur suivante: I La Constitution est modifiée comme suit: Art. 108a (nouveau)

Encouragement de la propriété du logement par l'épargne-logement

La Confédération et les cantons encouragent l'acquisition d'un logement à usage personnel en favorisant l'épargne-logement.

1

2

Ce faisant, ils respectent les principes suivants: a.

tout contribuable domicilié en Suisse peut déduire de ses revenus imposables, à concurrence de 10 000 francs par an, l'épargne affectée à l'acquisition à titre onéreux d'un premier logement situé en Suisse qu'il habitera durablement; les époux faisant l'objet d'une imposition commune peuvent chacun faire valoir cette déduction; la Confédération adapte périodiquement le montant maximal déductible au renchérissement; le contribuable peut faire valoir cette déduction pendant dix ans au plus;

b.

pendant la durée de l'épargne-logement, le capital d'épargne et les intérêts servis sur ce capital sont exonérés de l'impôt sur la fortune et de l'impôt sur le revenu;

c.

à l'échéance de la durée maximale d'épargne, seule l'imposition du montant consacré à l'acquisition d'un logement qui sera habité durablement par son propriétaire est reportée.

6320

II Les dispositions transitoires de la Constitution sont modifiées comme suit: Art. 197, ch. 8 (nouveau) 8. Disposition transitoire ad art. 108a (Encouragement de la propriété du logement par l'épargne-logement) La Confédération et les cantons règlent l'épargne-logement dans les cinq ans à compter de l'acceptation de l'art. 108a par le peuple et les cantons. Si les dispositions législatives pertinentes ne sont pas encore en vigueur à cette date, l'art. 108a s'appliquera directement.

1.2

Aboutissement et délais de traitement

Par décision du 29 octobre 2008, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative SGFB déposée le 29 septembre 2008 avait abouti, avec 142 222 signatures valables1.

Par décision du 17 février 2009, elle a constaté que l'initiative HEV déposée le 23 janvier 2009 avait également abouti, avec 120 460 signatures valables2.

Conformément à l'art. 97, al. 1, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)3, le Conseil fédéral dispose d'une année à compter du dépôt d'une initiative dont l'aboutissement a été constaté pour soumettre à l'Assemblée fédérale un projet d'arrêté fédéral accompagné d'un message. Etant donné que le Conseil fédéral a décidé le 25 février 2009 de ne rédiger qu'un message pour les deux initiatives populaires sur l'épargne-logement, le délai d'une année court à compter de la date de dépôt de la première initiative.

Conformément à l'art. 100 LParl, l'Assemblée fédérale dispose de 30 mois à compter du dépôt de l'initiative revêtant la forme d'un projet rédigé pour décider si elle recommandera au peuple et aux cantons de l'accepter ou de la rejeter.

1.3

Validité

Les deux initiatives remplissent les conditions de validité figurant à l'art. 139, al. 3, de la Constitution (Cst.)4. Elles revêtent la forme d'un projet rédigé de manière exhaustive et respectent les principes de l'unité de la forme et de la matière. Les initiatives n'enfreignent aucune règle impérative du droit international et répondent ainsi aux exigences de compatibilité avec celui-ci. Elles sont donc valables.

1 2 3 4

FF 2008 7857 FF 2009 1165 2194 RS 171.10 RS 101

6321

2

Contexte des initiatives

Ni la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD)5, ni la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)6 ne prévoient de déduction au titre de l'épargne-logement.

L'art. 9, al. 4, LHID règle de manière exhaustive les déductions admises au niveau cantonal. Les cantons ne disposent donc plus d'aucune marge de manoeuvre. Après l'entrée en vigueur de la LHID le 1er janvier 1993 et compte tenu de la date du 1er janvier 2001 fixée dans cette loi pour l'adaptation des législations cantonales, des interventions parlementaires ont été déposées pour demander le maintien dans les législations cantonales des déductions existantes en vue de favoriser l'accession à la propriété du logement à usage personnel ou pour demander l'introduction de nouvelles possibilités de déduction dans ce domaine.

Les cantons ont fait part de leur position par rapport au traitement fiscal privilégié de l'épargne-logement lors de deux consultations en 2000 et 2001. La première a eu lieu après l'élaboration d'un projet de loi par la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-N) basé sur l'initiative parlementaire du conseiller national Hans Rudolf Gysin (98.455) et qui prévoyait l'introduction facultative par les cantons d'une déduction pour l'épargne-logement. La deuxième consultation a été menée lors de l'examen par le Parlement du message relatif au train de mesures fiscales 2001 et du projet de loi correspondant visant à instaurer un changement du système d'imposition de la valeur locative des logements habités par leurs propriétaires. La CER-N comparait un modèle d'épargne-logement inspiré de la réglementation en vigueur dans le canton de Bâle-Campagne à une mesure du Conseil fédéral qui proposait une augmentation de moitié de la déduction maximale accordée pour le pilier 3a. Le modèle d'épargne-logement proposé par la CER-N était prévu pour être introduit obligatoirement par la Confédération et les cantons, afin de répondre aux exigences de l'harmonisation fiscale formelle. Les résultats des deux consultations ont été très clairs. Seul le canton de Bâle-Campagne s'est prononcé en faveur d'une imposition privilégiée de l'épargne-logement s'appliquant à toute la Suisse; les autres cantons se sont montrés critiques. Dans
les deux rapports les cantons concluaient en majorité que, d'une part, il y avait fortement lieu de douter que l'objectif visé (favoriser l'accession à la propriété du logement) puisse être atteint à l'aide de l'imposition privilégiée de l'épargne-logement et que, d'autre part, il était à craindre que les mesures proposées ne menacent les principes constitutionnels de l'égalité de traitement et de l'imposition selon la capacité économique.

Compte tenu de la situation dans le canton de Bâle-Campagne, une disposition transitoire a été fixée dans la LHID dans le cadre de la loi du 15 décembre 2000 sur la coordination et la simplification des procédures de taxation des impôts directs dans les rapports intercantonaux7. Conformément à l'art. 72d LHID, les déductions cantonales pour l'épargne-logement devaient encore être autorisées jusqu'à fin 2004 pour permettre au canton de Bâle-Campagne de continuer d'appliquer son modèle d'épargne-logement jusqu'à l'adoption définitive du train de mesures fiscales 2001.

Les Chambres fédérales ont complété entre-temps les dispositions prévues dans ce modèle pour la promotion de l'accession à la propriété du logement par le modèle proposé par la CER-N au lieu d'étendre le pilier 3a. Elles évitent ainsi au canton de 5 6 7

RS 642.11 RS 642.14 FF 2000 5756

6322

Bâle-Campagne de devoir renoncer momentanément à son épargne-logement pour la réintroduire par la suite en se conformant aux dispositions légales décidées par le Parlement. Lors de la votation populaire du 16 mai 2004, le train de mesures fiscales 2001, contre lequel un référendum cantonal avait abouti pour la première fois dans l'histoire de la Suisse, a été balayé par 65,9 % contre 34,1 %8, et avec lui le modèle d'épargne-logement qui était proposé.

Le délai transitoire prévu à l'art. 72d LHID s'étant écoulé, l'octroi de déductions au titre de l'épargne-logement est contraire au droit fédéral depuis le 1er janvier 2005.

Se basant sur le mandat constitutionnel relatif à l'harmonisation fiscale, le Conseil fédéral a défendu l'avis qu'il n'était pas possible de continuer d'offrir aux cantons dans le cadre de la LHID la possibilité d'aménager un modèle d'épargne-logement facultatif9. Les trois initiatives parlementaires (04.446, 04.448, 04.475) et l'initiative cantonale de Bâle-Campagne (04.308), qui ont été déposées peu de temps après le refus du train de mesures fiscales 2001 et demandaient à nouveau l'introduction facultative d'une imposition privilégiée de l'épargne-logement par les cantons, ont essuyé un refus dès la phase d'examen préliminaire: l'initiative cantonale à la session d'hiver 2007 et les trois initiatives parlementaires à la session d'été 2008.

Suite au refus du Parlement, les partisans de l'épargne-logement ont recouru à l'initiative populaire pour demander que cette mesure soit inscrite dans la Constitution.

3

Buts et teneur des initiatives

Selon la SGFB, l'épargne-logement est un moyen de promotion hautement efficace pour les locataires qui souhaitent acquérir leur propre logement. D'après les promoteurs, l'épargne-logement permet de faciliter grandement l'accession à la propriété du logement pour les classes de revenu moyennes et basses, comme le prouve la pratique qui a cours depuis plus de 18 ans dans le canton de Bâle-Campagne. La deuxième composante de l'initiative, les mesures visant à économiser l'énergie, est présentée comme un complément innovant. L'octroi d'avantages fiscaux permettrait de promouvoir la mise en oeuvre de mesures efficaces pour économiser l'énergie lors de la rénovation du logement à usage personnel. Les attraits fiscaux auraient aussi des conséquences positives sur le secteur du bâtiment. La demande en matière de rénovations énergétiques ouvrirait la voie à des innovations techniques. Enfin, l'exonération des primes d'épargne-logement de l'impôt cantonal sur le revenu qui pourrait elle aussi être introduite facultativement créerait une incitation supplémentaire à acquérir un logement à usage personnel et entreprendre des assainissements énergétiques en soutenant l'effort d'épargne dans ce but.

Selon HEV Suisse, les mesures actuelles pour favoriser l'accession à la propriété du logement à usage personnel en Suisse sont insuffisantes. L'initiative déposée par son comité remplirait parfaitement le mandat constitutionnel d'encouragement à la propriété du logement. Sa mise en application répondrait à une nécessité immédiate d'agir. Les cantons et communes compenseraient plusieurs fois les impôts auxquels 8 9

FF 2004 3727 Réponse du Conseil fédéral du 3 novembre 2004 à la question du conseiller national Caspar Baader sur les droits de timbre et l'épargne-construction fiscalement déductible (04.1087).

6323

ils renonceraient par les impôts et taxes sur l'activité économique qu'engendrerait l'épargne-logement dans le secteur du bâtiment. Celle-ci aurait donc un effet net global positif.

En ce qui concerne l'acquisition d'un premier logement grâce à l'imposition privilégiée de l'épargne-logement, les deux initiatives déposées concordent en grande partie quant au contenu. Il existe néanmoins des points de divergence, dont les plus marqués sont les suivants: ­

A l'inverse de l'initiative SGFB, l'initiative HEV tient compte de l'harmonisation fiscale horizontale et verticale. Alors que l'initiative SGFB donne aux cantons la possibilité d'autoriser de manière facultative des dépôts annuels au titre de l'épargne-logement constituée pour financer l'acquisition d'un premier logement à usage personnel, l'initiative HEV demande que la Confédération et les cantons soient tenus d'autoriser ces dépôts.

­

L'initiative HEV n'évoque aucune condition pour le rappel d'impôt, à l'exception du principe selon lequel les mesures d'épargne-logement ne doivent servir qu'à l'acquisition durable d'un premier logement à usage personnel. Elle ne fixe pas non plus de délai pour l'utilisation conforme du capital constitué au titre de l'épargne-logement non plus (SGFB: 2 ans après l'écoulement du délai maximal de 10 ans pour la constitution d'un capital d'épargne-logement), ni dedurée maximale avant rappel d'impôt en cas de changement d'affectation ou de cession à un tiers sans réutilisation adéquate du produit de la vente (SGFB: 5 ans).

­

L'initiative HEV propose d'exonérer de tout impôt les dépôts annuels au titre de l'épargne-logement allant jusqu'à 10 000 francs, voire pour les couples mariés 20 000 francs (SGFB: 15 000 fr., ou pour les couples mariés 30 000 fr.).

En outre, deux composantes supplémentaires doivent être mentionnées qui n'entrent en jeu que dans l'initiative SGFB: le financement fiscalement privilégié de mesures d'économie d'énergie et de protection de l'environnement pour les personnes déjà propriétaires de leur logement («épargne-logement énergie»), ainsi que l'exonération fiscale des primes d'épargne-logement. Ces dernières consistent en contributions publiques sous forme de subventions imputées sur les dépenses.

4

Appréciation des initiatives

4.1

Aucune nécessité de prendre d'autres mesures fiscales pour encourager l'accession à la propriété du logement

L'art. 108 Cst. donne mandat à la Confédération d'encourager la construction de logements et l'accession à la propriété du logement. La politique du logement remplit ce mandat constitutionnel en favorisant les logements à loyer modéré.

La loi du 21 mars 2003 sur le logement (LOG)10 vise à promouvoir l'offre de logements à loyer modéré pour les ménages à revenu modeste, à garantir l'accession à la propriété du logement à des prix modérés, à renforcer l'activité d'organisations 10

RS 842

6324

oeuvrant à la construction de logements d'utilité publique et à améliorer les bases de la recherche dans le domaine du logement. Dans le cadre de son programme d'allégement budgétaire 2003, la Confédération a suspendu les prêts directs qu'elle octroyait. Le 28 février 2007, le Conseil fédéral a décidé de prévoir à nouveau dans le plan financier un budget pour promouvoir la construction de logements dès 2009.

Il a toutefois décidé de renoncer définitivement à accorder un soutien direct.

L'encouragement indirect sera soumis à des critères de construction écologique et efficiente sur le plan énergétique. Durant la session d'hiver de 2008, le Parlement a décidé d'augmenter de 45 millions de francs le budget 2009 destiné à encourager les sociétés construisant des logements d'utilité publique à procéder à des rénovations énergétiques. En tenant compte des cinq millions de francs déjà mis à disposition pour promouvoir la construction de nouveaux logements, les prêts se montent donc à 50 millions de francs pour l'année 2009.

Du point de vue du volume, on dispose actuellement avec les cautionnements et le fonds de roulement de deux instruments de promotion essentiels pour l'application de la LOG. Le premier permet à la Confédération de cautionner les prêts de la centrale d'émission pour les sociétés construisant des logements d'utilité publique.

Grâce aux moyens financiers prélevés sur le marché des capitaux, la centrale d'émission garantit à ses membres, les sociétés construisant des logements d'utilité publique, des prêts à un taux avantageux pour financer la construction de logements bon marché. Sont considérées comme sociétés construisant des logements d'utilité publique les coopératives, les fondations, les associations et d'autres sociétés qui, d'après leurs statuts, visent à mettre à disposition des logements bon marché. Le second pilier central du soutien indirect de la Confédération est constitué par les fonds de roulement approvisionnés par des prêts de la Confédération et gérés à titre fiduciaire par les trois organisations faîtières de la construction de logements d'utilité publique (Association Suisse pour l'Habitat, Association suisse des coopératives d'habitation radicales, Association suisse pour l'encouragement à la construction et à la propriété). Ils permettent de mettre à la disposition
des sociétés construisant des logements d'utilité publique des moyens financiers à un taux avantageux. Ils servent de financement complémentaire ou transitoire lors de la construction, la rénovation ou l'acquisition de logements bon marché.

Même si le mandat constitutionnel ne prescrit ni implicitement ni explicitement aucune mesure fiscale pour encourager l'accession à la propriété du logement et la construction de logements, l'objectif visé par la Constitution se concrétise tout de même par des mesures fiscales: le traitement fiscal privilégié des versements anticipés des avoirs du 2e pilier et du pilier 3a dans le cadre de la prévoyance, d'une part, et l'aménagement avantageux de l'imposition de la valeur locative, d'autre part.

Dans le domaine de la prévoyance, le versement anticipé du 2e pilier se révèle être un instrument ciblé et efficace pour promouvoir l'acquisition d'un premier logement à usage personnel. Cette mesure de promotion en vigueur depuis 1995 vise juste et est fréquemment mise à profit: en 2008, 44 385 assurés ont prélevé plus de 3 milliards de francs. Depuis 1995, le montant total des versements anticipés s'élève à plus de 30 milliards de francs (voir les détails dans la statistique annexée). En outre, des versements anticipés du pilier 3a sont possibles depuis 1990. Ces deux formes de versement anticipé servent à l'acquisition du logement et sont privilégiées sur le plan fiscal en tant que prestations en capital provenant de la prévoyance.

Autrement dit, elles sont imposées séparément et soumises à un impôt annuel entier

6325

calculé sur la base d'un taux représentant le cinquième du barème de l'impôt fédéral direct correspondant.

Une étude d'impact effectuée en 200311 sur mandat de l'Office fédéral des assurances sociales évalue positivement le versement anticipé de la prévoyance professionnelle. Plus de la moitié des personnes ayant bénéficié d'un versement anticipé disposaient durant la période de l'analyse (1995­2002) d'un revenu annuel brut de moins de 100 000 francs. Un peu plus d'un cinquième de tous les versements anticipés ont été réalisés en faveur de la classe de revenu 80 000­100 000 francs, un peu moins d'un cinquième en faveur de la classe de revenu 60 000­80 000 francs. Sans la possibilité de recourir aux avoirs disponibles du 2e pilier, les ménages «seuil», c'està-dire ceux dont le revenu se situe entre 60 000 et 100 000 francs, n'auraient probablement pas pu acquérir de logement, faute de capital propre. Les bénéficiaires étaient âgés de 30 à 44 ans pour la plupart, les 35­39 ans étaient fortement représentés. D'après l'étude, la mise à disposition du capital de la prévoyance professionnelle se révèle être un moyen ciblé et approprié pour aider les ménages «seuil» à acquérir un logement et elle participe considérablement à augmenter la proportion de propriétaires.

Le pilier 3a, quant à lui, est une autre source de financement du logement, qu'utilisent les personnes au revenu plus élevé. La part des ménages bénéficiaires d'un versement anticipé de la prévoyance liée et le montant moyen de celui-ci sont d'autant plus élevés que l'est le revenu. Plus de la moitié des versements anticipés du pilier 3a de l'année fiscale 2005 ont bénéficié à des ménages dont le revenu imposable dépassait 75 300 francs. Durant la période qui s'étend de 1995 à 2002, 12 % des bénéficiaires d'un versement anticipé des avoirs du 2e pilier ont également recouru à ceux du pilier 3a.

Le système actuel de l'imposition de la valeur locative est fortement lié à l'imposition privilégiée du logement. Fait pendant à l'imposition de la valeur locative réduite, la possibilité, à condition que le logement soit occupé par son propriétaire, de déduire en totalité toute une série de charges: les frais effectifs d'entretien, primes d'assurance, frais d'administration par des tiers et intérêts passifs. Néanmoins, la déduction des intérêts
passifs est soumise, depuis le 1er janvier 2001, à une limite supérieure, laquelle correspond à la totalité du rendement de la fortune privée imposable, augmentée de 50 000 francs supplémentaires. Ainsi le droit fiscal en vigueur se révèle être un encouragement à l'accession à la propriété du logement, spécialement dans les cas présentant un compte immobilier déficitaire, c'est-à-dire lorsque les frais déductibles liés à la propriété du logement dépassent le montant de la valeur locative. La déductibilité des frais d'entretien sera étendue davantage encore avec l'abrogation de la pratique Dumont décidée par le Parlement le 3 octobre 2008. A partir du 1er janvier 2010, pour ce qui est de l'impôt fédéral direct, et du 1er janvier 2012 au plus tard, pour ce qui est des impôts cantonaux, les dépenses engagées pour remettre en état un bien immobilier se trouvant dans un état d'entretien négligé au moment de l'acquisition (frais encourus peu après l'acquisition) donneront droit à une déduction également pendant les cinq années suivant l'acquisition. La suppression de la pratique Dumont permet en outre de déduire dès l'acquisition de bâtiments

11

Hornung, Daniel et al., 2003, Analyse des effets de l'encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle (EPL), in: Aspects de la sécurité sociale, Rapport de recherche no 17/03.

6326

existants la totalité des investissements visant à économiser l'énergie et à protéger l'environnement qui y sont effectués.

La détermination d'une valeur locative imposable modérée est un encouragement supplémentaire à l'accession à la propriété du logement. Etant donné que les valeurs locatives sont fixées en dessous de celles du marché de la location, le mandat constitutionnel d'encouragement à l'accession à la propriété du logement est également pris en considération. La jurisprudence du Tribunal fédéral met toutefois des limites à cette forme d'encouragement afin de garantir l'imposition équitable des locataires et des propriétaires: la valeur locative dans le cadre de l'impôt cantonal sur le revenu et au cas par cas ne doit pas être inférieure à 60 % de celle du marché. L'Administration fédérale des contributions, en tant qu'autorité de surveillance, est tenue de veiller à une taxation uniforme de l'impôt fédéral direct. A cette fin, elle mène régulièrement des enquêtes auprès des cantons pour vérifier la fixation des valeurs locatives et intervient lorsque les cantons outrepassent leur marge d'appréciation.

Selon la pratique courante, c'est le cas lorsque les valeurs locatives établies se situent en dessous de 70 % de celles du marché en moyenne cantonale.

Pour résumer, on peut affirmer que le droit et les mesures fiscales en vigueur prennent déjà dûment en compte le mandat constitutionnel d'encouragement à l'accession à la propriété du logement. Comme décrit précédemment, un ensemble de dispositions légales favorisent l'acquisition et le maintien de la propriété du logement et servent cet objectif inscrit dans la Constitution12.

4.2

Moyen inefficace pour augmenter le nombre de propriétaires parmi les ménages «seuil»

Les ménages «seuil» ne profitent guère de l'épargne-logement L'efficacité et l'efficience de l'imposition privilégiée de l'épargne-logement sont faibles, car, bien que l'épargne-logement soit déductible, les familles à revenu moyen ou bas ne peuvent souvent pas épargner assez pour constituer en 10 ans le capital propre de 20 % du prix du logement généralement requis pour son financement. Une étude publiée en 200013 sur mandat de l'Office fédéral du logement a réalisé des calculs sur différents modèles. Partant d'une épargne annuelle de 6000 francs ­ soit le revenu disponible d'un ménage au revenu brut annuel d'environ 90 000 francs d'après l'enquête de l'Office fédéral de la statistique sur les revenus et la consommation d'alors ­ ces calculs montrent pour la période allant de 1992 à 1997 que le capital d'épargne-logement constitué en 6 ans (44 200 fr., composé de la somme des dépôts et des intérêts) n'aurait pas suffi pour acquérir un logement, même augmenté du versement anticipé des avoirs du 2e pilier. Il n'aurait pas suffi 12

13

La décision de principe du Conseil fédéral sur l'initiative HEV «Sécurité du logement à la retraite» du 17 juin 2009 est importante dans ce contexte. Dans la fixation de l'orientation du message, le Conseil fédéral s'est prononcé contre l'initiative mais souhaite néanmoins lui opposer un contre-projet indirect. Ses points clés prévoient de supprimer l'imposition de la valeur locative pour tous les propriétaires et de limiter en contrepartie les possibilités de déduction qui existaient jusqu'à présent à deux: celle, limitée dans le temps, des intérêts passifs dès l'acquisition d'un premier logement à usage personnel et celle des frais liés à des mesures efficaces d'économie d'énergie et de protection de l'environnement.

Hornung, Daniel, 2000, Epargne-logement: un moyen approprié pour promouvoir l'accession à la propriété? Berne.

6327

non plus si la période d'épargne avait duré 10 ans, comme le demandent les deux initiatives populaires. Ces réflexions ne tiennent pas compte du renchérissement de la construction: durant les périodes de forte hausse, due au renchérissement, des coûts de construction et du prix des terrains, l'effet de l'épargne est fortement réduit, voire nul.

Avec une épargne annuelle de 12 000 francs, il était possible de constituer un capital propre de 88 500 francs dans le même espace de 6 ans, ce qui correspond à un prix d'achat de 440 000 francs. Durant la période de l'enquête, les ménages pouvant épargner 12 000 francs par an disposaient d'un revenu annuel minimum situé entre 110 000 et 120 000 francs. De ce point de vue, l'imposition privilégiée de l'épargnelogement désavantage d'emblée les contribuables qui, pour des raisons financières, ne peuvent pas se permettre d'épargner autant. L'étude montre aussi que ce sont surtout des personnes à revenu moyen et élevé qui ont recouru à l'épargne-logement dans le canton de Bâle-Campagne. Elle conclut donc que l'épargne-logement a des répercussions sociales et de politique des revenus défavorables et qu'elle n'aide qu'en faible part les ménages «seuil» à acquérir un logement à usage personnel.

L'effet sur l'augmentation du nombre des propriétaires est donc minime.

Les données publiées d'une étude sur l'épargne-logement effectuée sur mandat de la SGFB14 montrent également que les ménages dont le revenu imposable est inférieur à 40 000 francs sont fortement sous-représentés. Par contre, plus leur revenu est élevé, plus les épargnants sont nombreux. L'épargne-logement a donc un effet régressif sur le revenu imposable. En raison de l'imposition progressive du revenu, la déduction au titre de l'épargne-logement avantage surtout les couches sociales aisées, c'est-à-dire les contribuables qui envisagent d'acquérir un premier logement à usage personnel même sans épargne-logement. Cela entraîne des «effets d'aubaine», qui apparaissent lorsque les individus reçoivent une aide financière de l'Etat pour une action qu'ils auraient entreprise de toute façon, même sans encouragement public. Ainsi, l'épargne-logement est un instrument qui n'est ni efficace ni efficient lorsque les marchés des capitaux et du logement sont bien développés. Elle se révèle insuffisamment conforme
à son objectif, qui est de promouvoir l'accession à la propriété du logement des familles jeunes des catégories de revenu basses et moyennes.

Les primes d'épargne-logement sont elles aussi insuffisamment conformes à cet objectif. L'exonération fiscale des primes d'épargne-logement préconisée par l'initiative SGFB profiterait le plus à des personnes à revenu élevé avec une importante charge fiscale marginale qui ne dépendent en fait aucunement de cette aide car elles sont justement en mesure d'acquérir un logement ou d'entreprendre des rénovations énergétiques sans l'aide de cet encouragement direct. Ce point de l'initiative SGFB provoque donc aussi des effets d'aubaine.

14

Füeg, Rainer / Studer, Tobias, 2005, Bausparen im Kanton Baselland, Liestal, p. 18 et 19.

6328

Les fournisseurs de produits d'épargne-logement profitent d'une part des retombées Un autre point qu'il faut considérer pour juger l'efficacité de l'épargne-logement est de savoir à qui profite en définitive un tel avantage fiscal («incidence»). Subventionner des formes d'épargne précises comme l'épargne-logement ou l'épargnelogement énergie entraîne un avantage indirect pour le fournisseur (banques et autres instituts financiers) et ses produits. Face à un encouragement de la part de l'Etat pour diverses formes d'épargne, un épargnant rationnel acceptera que les rendements de ces diverses épargnes soient moins élevés parce qu'il prend en considération l'ensemble des rendements (l'encouragement inclus). Les fournisseurs des produits avantagés peuvent dès lors proposer des conditions moins bonnes que celles du marché «normal» et trouver tout de même des intéressés. Les fournisseurs génèrent ainsi un revenu assimilable à une «rente de situation». Une partie des effets souhaités de l'encouragement à l'épargne grâce à l'épargne-logement ne bénéficie pas au véritable groupe cible mais aux fournisseurs de produits correspondants destinés à l'épargne.

L'épargne-logement énergie est inefficace pour encourager les assainissements Un rapport demandé par la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats et rédigé par un groupe de travail interdépartemental15 a montré, début 2009, que les déductions fiscales destinées à promouvoir les assainissements énergétiques de bâtiments ne sont appropriées que sous certaines conditions. Les encouragements fiscaux ne sont pas des instruments ciblés, surtout du point de vue de l'effet de répartition, car en raison de la progressivité du barème, les personnes à revenu plus élevé profitent davantage des allégements fiscaux que celles à revenu plus bas.

Avec l'épargne-logement énergie, cet effet est accentué car la même mesure permet une double déduction fiscale: les dépôts sont d'abord déduits au titre de la constitution de l'épargne, ensuite ils le sont une deuxième fois au titre de l'investissement entrepris. Le rappel d'impôt sur l'épargne-logement qui n'a pas été utilisée de manière conforme (p. ex. imposition séparée avec barème partiel) risque également d'inciter à une optimisation fiscale injustifiée. En ce cas, il serait profitable de constituer
une épargne-logement énergie, même si l'on n'a aucune intention de réaliser un investissement énergétique, en ce que cela influencerait la progressivité de l'impôt. Là aussi, ce seraient avant tout les contribuables qui jouissent d'une bonne situation financière qui seraient les plus avantagés.

En outre, encourager les assainissements énergétiques par des mesures fiscales entraîne un effet d'aubaine élevé, c'est-à-dire que des avantages fiscaux sont accordés pour les coûts entraînés par des mesures qui seraient prises même sans ces avantages, parce qu'elles sont économiques ou correspondent à l'état actuel de la technique. L'effectivité de l'épargne-logement énergie est aussi amoindrie du fait qu'une partie de l'aide profite aux fournisseurs de produits d'épargne-logement énergie (banques et instituts financiers).

15

Baur, Martin / Schneider, Lukas / Himmel, Margit / Gutzwiller, Lukas / Wiederkehr, Stefan / König, Felix, 2009, Steuerliche Anreize für energetische Sanierungen von Gebäuden, Berne (en allemand, avec résumé en français).

6329

4.3

Effets négatifs sur la croissance et la prospérité

L'étude mentionnée demandée par la SGFB attribue d'importants effets économiques à l'épargne-logement dans le canton de Bâle-Campagne. Selon ses deux auteurs, pour une plus-value d'environ 40 millions de francs, en moyenne annuelle les pertes fiscales liées à l'épargne-logement s'élèvent à 4,5 millions de francs et les primes versées au titre de l'épargne-logement à 0,5 million de francs. Le profit économique total qui se dégage directement ou indirectement de l'épargne-logement dans le nord-ouest de la Suisse, se monte, selon l'étude, à près de 68,8 millions de francs, ce qui devrait correspondre à 550 places de travail. Les auteurs estiment que l'activité économique engendrée par l'épargne-logement dans le domaine de la construction de logements rapporte chaque année avec un décalage temporel, 6,1 millions de francs en impôts et en taxes au fisc de Bâle-Campagne, ce qui compenserait largement les pertes fiscales liées à l'épargne-logement16.

Ces résultats ne paraissent pas plausibles, dans la mesure où ils se fondent sur une méthode d'appréciation erronée17. En effet, l'étude ne prend pas en compte la valeur des opportunités non réalisées, c'est-à-dire celle d'une autre utilisationdes moyens engagés. Tant le contribuable que les pouvoirs publics peuvent utiliser ceux-ci à des fins plus productives que la propriété du logement. Il n'est pas tenu compte non plus des avantages indirects accordés aux fournisseurs de contrats d'épargne-logement ni de la capitalisation de l'aide à l'épargne-logement dans le prix des terrains, qui réduisent tous deux l'efficacité de l'épargne-logement.

Dans l'ensemble, encourager la propriété du logement par des avantages fiscaux affecte négativement la croissance et la prospérité en raison de trois mécanismes économiques: ­

16 17

L'épargne-logement distord les choix de consommation des ménages, choix d'une forme d'habitat et choix entre le logement et les autres biens de consommation. Avec l'encouragement fiscal que constitue l'épargne-logement, les ménages optent plus facilement pour l'acquisition du logement que pour sa location, même si, au vu des prix du marché, ils préféreraient louer.

En outre, la promotion de l'épargne-logement augmente la demande en logements au détriment de la demande d'autres biens de consommation, car les futurs propriétaires sont incités à acquérir un logement plus grand que celui qu'ils achèteraient sans privilège fiscal. Augmenter la proportion de logements en propriété est un objectif central des auteurs de l'initiative. Pour autant, cela ne signifie pas que ce soit un bon objectif du point de vue de l'efficience. Le taux relativement faible en Suisse de logements en propriété tient entre autres à l'efficacité du marché de la location. Pour diverses raisons, le besoin d'acquérir le logement y est moins fort que dans d'autres pays. Si l'on réduit artificiellement le prix de la propriété du logement et si l'on intervient dans un marché jusqu'alors efficient, la prospérité en pâtit, car la demande est modifiée artificiellement et les personnes ne consomment plus leur panier de marchandises «optimal».

Füeg, Rainer / Studer, Tobias, 2005, Bausparen im Kanton Baselland, Liestal, p. 32 à 35.

Daepp, Martin, 2006, Stellungnahme zur Studie «Bausparen im Kanton Baselland» von Dr. Rainer Füeg und Prof. Dr. Tobias Studer, Bern, p. 13­14.

6330

­

L'introduction de l'épargne-logement a pour tout résultat la hausse des prix des terrains et logements, si l'augmentation de la demande de logements à vendre qu'elle entraîne ne s'accompagne pas de celle de l'offre de terrains à bâtir. L'aide à l'épargne-logement est alors capitalisée dans le prix des terrains: l'objectif de la mesure n'est pas atteint, car les futurs propriétaires devront dès lors acquérir leur logement à des prix plus élevés. Il convient de rappeler à propos de la capitalisation dans le prix des terrains que, s'il existe bon nombre de zones à bâtir dans toute la Suisse, elles ne sont pas nécessairement situées là où les gens souhaitent vivre. Cet écart est particulièrement sensible à proximité des centres-villes, où l'on peut s'attendre à ce que l'aide soit capitalisée dans le prix des terrains même si elle a un faible effet général.

­

L'épargne-logement est certes susceptible, dans certaines circonstances, de stimuler l'industrie du bâtiment, mais les ressources engagées pourraient être utilisées à d'autres fins avec davantage de répercussions positives sur l'économie (coût d'opportunité de l'épargne-logement). Fondamentalement, l'épargne-logement aurait pour effet de remplacer les investissements qui favorisent la productivité et la croissance des entreprises par des investissements dans la construction de logements, sans effet sur la productivité.

4.4

Remise en question du principe de l'égalité devant la loi

D'après la jurisprudence du Tribunal fédéral et en doctrine, l'introduction de l'épargne-logement dans la loi est vue d'un oeil critique. Concernant l'encouragement fiscal d'objectifs extrafiscaux, le Tribunal fédéral a considéré, dans son arrêt du 1er juin 2007 relatif au système fiscal du canton d'Obwald18 qu'en principe, il n'est pas interdit au législateur de se servir des impôts sur le revenu et la fortune comme d'instruments économiques pour promouvoir des buts de politique sociale ou apparentés. Le droit en vigueur prévoit déjà de telles mesures fiscales (p. ex.

l'exonération des avoirs de prévoyance professionnelle, la déduction des contributions au pilier 3a et celle des frais liés à la protection de l'environnement, à l'économie d'énergie et à la restauration des monuments historiques, pour les propriétaires d'immeubles). L'encouragement fiscal de tels objectifs est toutefois critiqué dans la doctrine, parce qu'il est contraire aux principes de l'imposition selon la capacité économique et de l'équité fiscale. Si le revenu doit servir d'indicateur économique de la capacité contributive, il faut le prendre en compte sans omission, selon le principe de la totalité. Par ailleurs, il existe souvent d'autres moyens, meilleurs, de réaliser de tels objectifs. C'est pourquoi le champ à l'intérieur duquel le législateur peut prendre en considération ces objectifs est étroitement limité. Ce dernier doit impérativement s'appuyer pour ce faire sur des bases légales voire constitutionnelles claires. En outre, la législation fiscale doit permettre d'atteindre le but visé. Plus les mesures d'encouragement fiscal portent atteinte à l'imposition selon la capacité économique, plus les exigences du Tribunal fédéral en termes d'intérêt public sont élevées. Est admise la mesure qui consiste à encourager fiscalement la prévoyance individuelle sous forme de propriété du logement.

18

ATF 133 I 206, cons. 11.

6331

En doctrine juridique, la déduction au titre de l'épargne-logement est vue d'un oeil critique. Dans leur rapport d'expert, MM. Cagianut et Cavelti19 soulignent qu'une déduction au titre de l'épargne-logement est au fond étrangère au système, car aucune dépense n'est engagée pour réaliser les revenus, par conséquent la déductibilité des versements d'épargne-logement équivaut fondamentalement à une dérogation au principe de l'imposition selon la capacité économique. Néanmoins, comme il existe d'autres déductions étrangères au système dans le droit fiscal, la déduction au titre de l'épargne-logement ne peut être considérée comme totalement inadmissible.

Le législateur est cependant soumis à des limites strictes; dans l'aménagement, il doit prendre en compte en particulier le principe de l'égalité devant la loi (art. 8, al. 1, Cst.) et les principes de l'universalité, de l'égalité de traitement et de la capacité économique (art. 127, al. 2, Cst.). Les valeurs-clé définies dans le train de mesures fiscales de 2001, avec une imposition privilégiée des versements d'un maximum de 16 % du montant plafond selon l'art. 8, al. 1, LPP (année fiscale 2009: 13 132 fr.)

sur le compte d'épargne-logement, ne seraient toutefois pas du tout conformes au principe de l'imposition selon la capacité économique.

Il y a quelques années déjà, d'autres juristes fiscaux connus ont donné leur avis sur les montants maximum admissibles pour les déductions. Ainsi, M. Zuppinger a affirmé dans un rapport pour le gouvernement du canton de St-Gall20 qu'une déduction au titre de l'épargne-logement de 1000 à 2000 francs était certes admissible, mais n'était guère efficace. MM. Höhn et Meier ont également déclaré dans un rapport pour le département des finances du canton de St-Gall21 qu'eu égard à l'imposition selon la capacité économique, seule une déduction minime pouvait être tolérée. Si une imposition privilégiée de l'épargne-logement pour l'acquisition d'un premier logement à usage personnel était introduite, le préjudice causé aux contribuables qui ne peuvent pas se permettre d'effectuer de tels dépôts d'épargnelogement pour des raisons financières appellerait une remise en question quant au principe de l'égalité de traitement.

Ces avis laissent supposer que l'imposition privilégiée de l'épargne-logement ne sera pas utilisée
par certaines catégories de contribuables essentiellement pour l'acquisition d'un premier logement à usage personnel, mais plutôt comme instrument utile à l'optimisation fiscale.

S'agissant du respect du principe de l'égalité devant la loi, il faut remarquer que l'initiative SGFB, au contraire de l'initiative HEV, englobe encore d'autres éléments qui permettent des économies d'impôts: l'épargne-logement énergie pour financer 19

20

21

Cagianut, Francis / Cavelti, Ulrich, 2003, «Gutachten über die Verfassungsmässigkeit der vom eidgenössischen Parlament beschlossenen Vorschriften im Bundesgesetz über die Änderung von Erlassen im Bereich der Ehe- und Familienbesteuerung, der Wohneigentumsbesteuerung und der Stempelabgaben vom 20. Juni 2003», rédigé sur mandat de la Conférence des gouvernements cantonaux, St-Gall, p. 36 à 40, et des mêmes, 2004, Zur Verfassungsmässigkeit der neuen Bestimmungen über die Wohneigentumsbesteuerung, in: Archives 72, p. 538 à 541.

Zuppinger, Ferdinand, 1984, Gutachten zur Frage der Verfassungsmässigkeit der Volksinitiative für breitere Streuung und massvolle Besteuerung von Wohneigentum, in: Botschaft und Anträge des Regierungsrates vom 11. Dezember 1984 betreffend «Volksinitiative für breitere Streuung und massvolle Besteuerung von Wohneigentum», Rechtmässigkeit und Inhalt, p. 15.

Höhn, Ernst / Meier, Alfred, 1986, Steuerliche Massnahmen zur Wohneigentumsförderung. Gutachten des Instituts für Finanzwirtschaft und Finanzrecht dem Finanzdepartements des Kantons St. Gallen erstattet am 2. Januar 1986, in: Beilage zur Nachtragsbotschaft des Regierungsrates vom 4. Februar 1986, p. 47.

6332

des mesures en faveur de l'économie d'énergie et de la protection de l'environnement, et les primes d'épargne-logement, qui peuvent être exonérées de l'impôt cantonal sur le revenu. Le système actuel de l'imposition de la valeur locative comprend déjà la déduction des intérêts hypothécaires, des frais d'entretien des immeubles et des investissements en faveur de l'économie d'énergie et de la protection de l'environnement. Ajouter des avantages fiscaux supplémentaires aux conditions actuelles de la propriété du logement à usage personnel, comme l'épargne-logement énergie et l'exonération des primes de l'épargne-logement, qui pourraient servir à financer des mesures pour économiser l'énergie et protéger l'environnement, mènerait à un déséquilibre entre propriétaires et locataires et poserait la question du respect du principe de l'égalité devant la loi. Etant donné que l'acceptation des deux initiatives entraînerait une modification de la Constitution, une transgression éventuelle du principe de l'égalité devant la loi serait fondée sur le droit constitutionnel et devrait donc être acceptée d'un point de vue juridique.

4.5

Contradiction avec l'effort de simplification du système fiscal

L'introduction d'une imposition privilégiée de l'épargne-logement entrave les efforts visant à simplifier le système fiscal suisse. En effet, chaque déduction supplémentaire et chaque imposition a posteriori de l'épargne-logement non utilisée conformément aux fins prévues compliquent d'autant plus le système. Cela va dans le sens inverse du désir maintes fois répété de simplifier les impôts. Le rapport de l'Etat-major de prospective de l'Administration fédérale, qui produit tous les quatre ans, sur mandat du Conseil fédéral et comme document de base pour le programme de la législature, un aperçu des différentes questions qui seront importantes dans le futur pour la politique fédérale, consacre un paragraphe à la simplification des impôts22. On y affirme que le système fiscal suisse a tendance à être inutilement et excessivement compliqué. En le simplifiant, les coûts d'exécution pourraient être abaissés. Le Parlement lui-même, dans l'arrêté fédéral du 18 septembre 2008 sur le programme de la législature 2007 à 201123, a affirmé que sa volonté principale était «de simplifier au maximum le système d'imposition des citoyens».

De tels principes ne se concrétiseront jamais si le système fiscal actuel se complique avec la création de nouvelles déductions. Dans le système de l'imposition du revenu brut, les dépenses ne peuvent en principe être déduites que si elles sont liées à la réalisation du revenu. Dès lors, une imposition privilégiée de l'épargne-logement est tout aussi étrangère au système que l'accumulation de dépôts d'épargne destinée à la prévoyance liée. Toutefois, l'exonération complète du capital constitué au titre de l'épargne-logement lors du retrait privilégie celle-ci par rapport au système du pilier 3a. Dans ce dernier, un versement anticipé est imposé en tant que prestation de prévoyance en capital, même si l'imposition est faible, c'est-à-dire séparée du reste du revenu, avec un impôt annuel et à un cinquième du barème ordinaire (LIFD).

Dans les lois cantonales prévaut la souveraineté constitutionnelle des cantons en 22

23

Chancellerie fédérale, 2007, Défis 2007­2011, Evolution des tendances et thèmes futurs de la politique fédérale, Rapport de l'Etat-major de prospective de l'Administration fédérale du 3 avril 2007, Berne, p. 102. Le Conseil fédéral en a pris connaissance le 18 avril 2007.

FF 2008 7745

6333

matière de barèmes. La LHID prévoit pour tout principe que là aussi les prestations en capital provenant d'institutions de prévoyance doivent être imposées séparément du reste du revenu. Il n'y a pas de raison apparente pour que le retrait du capital de l'épargne-logement, d'une part, et le versement anticipé du capital de prévoyance du 2e pilier et du pilier 3a, d'autre part, soient traités différemment sur le plan fiscal; de plus, cela entraîne inutilement des déséquilibres dans le domaine de l'encouragement à la propriété du logement. Les dispositions prévues par les deux initiatives populaires sur l'épargne-logement créeraient deux systèmes de promotion de l'accession à la propriété du logement en concurrence l'un avec l'autre et qui ne s'accordent pas l'un avec l'autre: pour l'initiative HEV, dans le cadre de l'imposition fédérale et cantonale sur le revenu, et pour l'initiative SGFB dans le cadre de l'imposition cantonale sur le revenu uniquement. Concernant l'initiative SGFB, du fait du caractère facultatif des dispositions qu'elle prévoit, cet effet secondaire non désiré n'apparaîtrait que dans les cantons qui décideraient d'introduire l'imposition privilégiée de l'épargne-logement dans leur législation fiscale. Ce qui est plus important cependant, ce sont les problèmes qui pourraient surgir lors d'un changement de domicile d'un canton à un autre. Ce point sera exposé plus en détail au chiffre 4.8. Du point de vue de l'exécution, l'encouragement à la propriété du logement par les canaux existants (au moyen de la prévoyance professionnelle et de la prévoyance individuelle liée) est plus simple à réaliser que l'épargne-logement, avec sa durée d'épargne d'au plus 10 années consécutives et le retrait qui doit être effectué dans les deux années après la fin de la durée maximale de l'épargne, comme le prévoit l'initiative SGFB, ainsi qu'avec la procédure en rappel d'impôt et les réglementations intercantonales en matière de cas de rigueur et d'abus qui restent encore à définir.

L'épargne-logement énergie également compliquerait encore le droit fiscal24. Vu les possibilités de déduction existant dans le cadre de l'impôt fédéral direct et de la plupart des législations fiscales cantonales en faveur des mesures visant à économiser l'énergie et à protéger l'environnement, cet élément de l'initiative
SGFB crée un encouragement fiscal supplémentaire mais inefficace à l'assainissement énergétique des bâtiments dans le cadre de l'impôt cantonal sur le revenu. Le financement fiscalement privilégié de mesures visant à économiser l'énergie et à protéger l'environnement peut entraîner des allégements fiscaux qui ne bénéficient qu'aux personnes déjà propriétaires de leur logement. Du point de vue du droit fiscal, c'est surtout le double dégrèvement qui pose problème. Non seulement le capital constitué au moyen de dépôts d'épargne peut être déduit du revenu imposable et son retrait pour une utilisation dans un but approprié est exonéré d'impôt; mais en outre l'investissement énergétique effectué avec ce même capital peut également être déduit comme frais d'entretien au moment de sa réalisation, ce qui entraîne un double dégrèvement: une première fois au titre de l'épargne, une seconde fois au titre de l'assainissement énergétique équivalant fiscalement à des travaux d'entretien. Du point de vue du droit fiscal, l'introduction de cette possibilité de déduction supplémentaire compliquerait notre système et les dépenses liées à son exécution augmenteraient, car les autorités de taxation devraient vérifier que le capital d'épargnelogement constitué pour être investi dans des mesures d'économise d'énergie et de 24

La constitution d'une épargne fiscalement privilégiée pour financer des assainissements énergétiques a été débattue par les Chambres fédérales et transformée en mandat d'examen pour le Conseil fédéral, suite au dépôt par le groupe PDC de la motion «Incitations fiscales pour améliorer l'efficacité énergétique» (07.3031).

6334

protection de l'environnement ait bien été utilisé aux fins prévues. Etant donné que les autorités de taxation ne disposent généralement pas de ce genre de compétence, il faudrait, pour pouvoir juger correctement les mesures prises par le propriétaire dans son logement, avoir recours à un spécialiste, ce qui générerait des frais supplémentaires.

4.6

Conséquences juridiques différentes en ce qui concerne l'harmonisation fiscale

L'harmonisation, dans le sens la concordance juridique entre les réglementations fiscales de la Confédération et des cantons, doit être comprise comme un processus dynamique qui évolue en fonction des besoins et de la maturité des différents domaines techniques concernés. L'introduction d'une déduction optionnelle de l'épargne-logement au plan cantonal uniquement, comme le demande l'initiative SGFB, est contraire au mandat constitutionnel d'harmonisation des impôts directs de la Confédération, des cantons et des communes (art. 129, al. 1, Cst.). Ce mandat d'harmonisation a pour but de rendre le droit fiscal suisse plus transparent et de simplifier la taxation. Dans la mesure où l'épargne-logement ne concerne pas la Confédération et où elle est facultative pour les cantons, l'acceptation de l'initiative SGFB entraînerait une double désharmonisation: verticale, d'une part, entre la Confédération et les cantons, et horizontale, d'autre part, entre les cantons. La transparence du système fiscal suisse en pâtirait.

Les mêmes conséquences négatives découleraient de l'exonération fiscale des primes d'épargne-logement prévue par l'initiative SFGB. Même l'aide financière de l'Etat doit en principe être imposée comme un revenu, tant qu'il ne s'agit pas de prestations publiques de soutien pour subvenir à l'entretien du contribuable. Cela devrait changer avec l'initiative SGFB en ce qui concerne les primes d'épargnelogement. L'exonération visée de ces primes ne serait toutefois logiquement accessible que dans les cantons qui en versent. Il y aurait ici aussi une double désharmonisation, entre la Confédération et les cantons, d'une part, et entre les cantons, d'autre part.

L'initiative HEV, quant à elle, ne pose pas de problème juridique du point de vue de l'harmonisation, étant donné que le texte demande que la déduction pour l'épargnelogement soit introduite obligatoirement à l'échelon de la Confédération et des cantons.

4.7

Répercussions financières

Etant donné que l'initiative SGFB demande une introduction facultative de l'épargne-logement à l'échelon des cantons et qu'on ne peut pas prévoir quels cantons introduiront l'épargne-logement si l'initiative est acceptée, il n'est pas possible de procéder à une estimation fiable des pertes fiscales. Une évaluation approximative est toutefois possible dans le cas de l'initiative HEV, étant donné qu'elle demande l'introduction obligatoire de l'épargne-logement à l'échelon de la Confédération et des cantons. Les calculs sont fondés sur les données disponibles provenant du canton de Bâle-Campagne. Si on les applique à la Confédération et à tous les cantons, les résultats sont les suivants: les pertes annuelles pour l'impôt cantonal sur le 6335

revenu se montent environ à 96 millions de francs, et à environ 36 millions de francs pour l'impôt fédéral direct.

4.8

Difficultés prévisibles lors de la mise en application par les cantons

En cas d'acceptation des initiatives, de nouvelles prescriptions de procédures intercantonales relatives à l'utilisation des dépôts d'épargne-logement seront indispensables. L'initiative SGFB prévoit un report de l'imposition des dépôts d'épargnelogement lors d'un déménagement dans un autre canton, pour autant que le produit de la vente du logement soit utilisé de manière conforme. Si tel n'est pas le cas, les cantons doivent procéder à un rappel d'impôt. Le texte de l'initiative HEV fixe uniquement le principe du report de l'imposition, pour autant que le capital constitué soit utilisé pour l'acquisition durable d'un logement à usage personnel. La concrétisation doit se faire sur le plan de la loi et de l'ordonnance. Les deux conceptions nécessitent des dispositions d'exécution détaillées sur la base de réglementations intercantonales. Seul une procédure d'annonce fiable entre les cantons peut en effet garantir le rappel d'impôt sur les dépôts d'épargne-logement qui ne sont pas affectés aux fins prévues. Des lacunes dans l'enregistrement des dépôts peuvent survenir, qui seraient dues en premier lieu à une coopération intercantonale insuffisante en matière de contrôle. Il n'est pas certain aujourd'hui que la procédure d'annonce cantonale fonctionnera sans heurt si plusieurs remplois sont effectués à la suite les uns des autres. En outre, il faudrait décider dans le cadre de réglementations intercantonales à quel canton revient le droit de procéder au rappel d'impôt en cas d'utilisation inappropriée du capital d'épargne-logement: le canton où l'épargne-logement a été constituée ou le canton d'arrivée, lequel peut ne pas prévoir de dispositions d'épargne-logement dans sa législation, dans la mesure où l'initiative SGFB se limite à l'introduction facultative de l'épargne-logement par les cantons. Sur ce point, cette initiative manque de cohérence: d'une part elle prévoit que les cantons pourront choisir librement d'introduire ou non le modèle d'épargne-logement dans leur législation, d'autre part, en cas de report d'imposition de l'épargne-logement suite au déménagement dans un canton n'encourageant pas l'épargne-logement, elle restreint cette autonomie en obligeant tous les cantons à prévoir des dispositions à cet effet ­ même ceux dont la législation ignore l'épargne-logement. Par ailleurs, la mise
en place indispensable d'une procédure d'annonce fiable pour garantir l'exécution des rappels d'impôt et combattre les abus augmente les dépenses administratives des autorités cantonales.

Les modalités de la procédure en rappel d'impôt dans le droit cantonal ne sont pas encore clairement définies non plus. Dans l'initiative SGFB, la disposition concernant le rappel d'impôt sur l'épargne-logement traitée comme un revenu conformément aux réglementations cantonales laisse ouverte la question de savoir si les dépôts d'épargne-logement et les intérêts rapportés durant la période d'épargne doivent être comptabilisés avec le reste du revenu imposable ou doivent être imposés séparément et soumis à un impôt annuel entier (comme il en irait des prestations en capital provenant d'institutions de prévoyance professionnelle et de la prévoyance liée). Si les dépôts de l'épargne-logement et leurs intérêts ne sont pas comptabilisés avec le reste du revenu imposable, alors le seul fait qu'il existe une imposition séparée la rend déjà profitable car elle atténue la progressivité de l'impôt. Tous les épargnants potentiels au titre de l'épargne-logement pourraient exploiter cette situa6336

tion et placer le capital d'épargne-logement sans l'utiliser aux fins prévues pour réaliser une optimisation fiscale, selon le barème cantonal. Dans le cas de l'initiative HEV, le problème des modalités à adopter pour le rappel d'impôt ne se pose pas seulement pour les impôts cantonaux sur le revenu, mais aussi pour l'impôt fédéral direct.

5

Exigences du droit de procédure

Le fait que deux initiatives soient soumises au vote, toutes deux sur l'encouragement à l'épargne-logement par des mesures fiscales, nécessite quelques éclaircissements concernant leur mise en oeuvre sur le plan légal. Afin de garantir un résultat non faussé de la votation, le Conseil fédéral prévoit que les votes soient espacés dans le temps. Toutefois, malgré la fixation de délais différents pour les votations, l'acceptation à la fois de l'initiative SGFB et de l'initiative HEV par le peuple et par les cantons aurait pour résultat deux normes juridiques, qui règlent bien le même état de fait (base constitutionnelle pour l'épargne-logement), mais se contredisent en partie.

Si les deux initiatives venaient à être acceptées, cela entraînerait un conflit. Conformément à la doctrine et à la pratique, trois principes s'appliquent pour résoudre les conflits de normes: 1. la loi de rang supérieur prime la loi de rang inférieur (lex superior derogat legi inferiori); 2. les règles spéciales priment les règles générales (lex specialis derogat legi generali); 3. la loi postérieure prime la loi antérieure (lex posterior derogat legi priori).

Etant donné il s'agit d'ajouts à la Constitution dans les deux initiatives, le principe de la loi supérieure ne peut pas être pris en considération. Par contre, les deux autres principes s'appliquent: celui de spécialité et celui de primauté dans le temps. Cela signifie qu'en raison de la règle de la «lex specialis» les éléments non évoqués dans l'initiative HEV (épargne-logement énergie et primes d'épargne-logement) seraient en tous cas inscrits dans la Constitution, étant donné qu'ils doivent être compris et traités comme des réglementations spéciales à la norme de droit sur l'épargnelogement. Il faut souligner que les primes d'épargne-logement ne doivent pas être confondues avec les dépôts d'épargne-logement. Les premières consistent en contributions publiques directes imputées sur les dépenses et doivent, d'après l'initiative SGFB, être exonérées de l'impôt cantonal sur le revenu. Les derniers sont des fonds d'épargne et doivent être déduits de l'assiette de l'impôt, dans la mesure où ils constituent une subvention affectant les recettes.

Par contre, en raison de la règle de la «lex posterior», la norme sur l'épargnelogement pour l'acquisition d'un premier logement
à usage personnel édictée en dernier remplacerait la norme sur l'épargne-logement au sens de l'initiative acceptée auparavant. Autrement dit, si l'initiative SGFB était votée en premier lieu par le peuple et les cantons et acceptée à la majorité, et si l'initiative HEV, soumise aussi au vote mais plus tard, était également acceptée par le peuple et les cantons, aux dispositions sur l'épargne-logement que contient l'initiative SGFB se substitueraient celles de l'initiative HEV. En ce qui concerne les deux normes de droit, qui règlent certes le même état de fait mais prévoient des champs d'application différents, l'harmonisation fiscale formelle avec introduction obligatoire de l'épargne-logement à l'échelle de la Confédération et des cantons (initiative HEV) remplacerait l'introduction facultative de l'épargne-logement au plan cantonal (initiative SGFB)

6337

du fait de la primauté de la norme postérieure. La situation inverse se produirait si l'initiative HEV était soumise au vote en premier lieu.

Enfin, il faut garder à l'esprit qu'en vertu de l'art. 195 Cst., la Constitution révisée totalement ou partiellement entre en vigueur dès que le peuple et les cantons l'ont acceptée. Le report de l'entrée en vigueur n'est possible que lorsque le projet de révision prévoit celle-ci à une date ultérieure ou lorsqu'il délègue la compétence de régler cette question à l'Assemblée fédérale ou au Conseil fédéral. Aucune de ces conditions ne vaut pour les deux initiatives populaires sur l'épargne-logement déposées. Il s'ensuit que si l'initiative SGFB est soumise au peuple et aux cantons et acceptée par eux en premier lieu, elle pourra être mise en oeuvre immédiatement par les cantons, en raison de la disposition transitoire qu'elle contient (art. 197, ch. 8).

Comme le résultat du vote concernant l'initiative HEVne sera pas encore connu, les cantons seraient autorisés, pour éviter un surcroît de travail, à attendre la concrétisation des dispositions constitutionnelles. Si c'est l'initiative HEV qui est soumise au peuple et aux cantons et qu'elle est acceptée par eux en premier lieu, la Confédération et les cantons useraient du délai de cinq ans qui leur est accordé par disposition transitoire (art. 197, ch. 8) pour mettre en oeuvre les dispositions constitutionnelles correspondantes, afin d'éviter là aussi des dépenses supplémentaires.

6

Conclusions

L'art. 108 Cst. oblige la Confédération à encourager la construction de logements et l'accession à la propriété du logement. Du point de vue fiscal, ce mandat constitutionnel se concrétise par des mesures dans le cadre de la prévoyance et de l'imposition de la valeur locative. Les versements anticipés du 2e pilier se révèlent être un instrument efficace pour encourager l'acquisition d'un premier logement à usage personnel. Les mesures d'encouragement à la propriété du logement mises en place depuis 1995 portent leurs fruits et sont fréquemment mises à profit. La prévoyance individuelle liée via le pilier 3a, introduite en 1990, offre des possibilités de versements anticipés supplémentaires. La détermination fiscale des valeurs locatives est une autre composante centrale de cette politique d'encouragement. Comme celles-ci sont fixées en dessous des valeurs du marché, elles soutiennent dûment la mise en oeuvre du mandat constitutionnel.

Les deux initiatives populaires sur l'épargne-logement, de par leur effet, leurs répercussions économiques et à cause de la complication du droit fiscal qu'elles entraînent, ne sont pas convaincantes: ­

6338

L'épargne-logement a des effets défavorables en termes de politique sociale et de politique des revenus; elle a même un effet régressif sur le revenu imposable: les ménages qui disposent d'un revenu imposable inférieur à 40 000 francs sont nettement sous-représentés, ceux dont le revenu est supérieur sont bien plus nombreux. L'introduction de la déduction fiscale des dépôts d'épargne-logement profite donc en premier lieu aux contribuables qui disposent de moyens suffisants pour acquérir un logement à usage personnel, même sans bénéficier de cette mesure. L'efficacité et l'efficience d'une imposition privilégiée de l'épargne-logement sont donc minimes, car celle-ci ne permet qu'à une petite partie des ménages dits «seuil» (dont le revenu annuel brut est compris entre 60 000 et 100 000 francs) d'acquérir un logement à usage personnel.

­

D'un point de vue économique, une imposition privilégiée de l'épargnelogement a des effets négatifs sur la croissance et la prospérité. Elle distord les choix de consommation des ménages, capitalise l'aide à l'épargnelogement dans le prix des terrains et remplace des investissements qui favorisent la productivité et la croissance dans le secteur des entreprises par des investissements dans la construction de logements, sans effet sur la productivité.

­

Les deux initiatives populaires sur l'épargne-logement s'opposent à l'objectif de simplification du droit fiscal. En effet, accorder des possibilités de déduction pour l'acquisition d'un premier logement à usage personnel rendrait le système fiscal actuel plus compliqué et augmenterait les dépenses liées à son application.

­

Il y a une différence juridique fondamentale entre les deux initiatives en ce qui concerne l'harmonisation fiscale. L'initiative HEV prend en compte l'harmonisation formelle, alors que l'initiative SGFB ignore ce principe constitutionnel en accordant uniquement aux cantons la possibilité de choisir un modèle d'épargne-logement.

6339

Versements anticipées en francs

6340

Source: AFC

0

500'000'000

1'000'000'000

1'500'000'000

20'378

26'256 25'440

30'056

32'449

35'250

39'422 37'149

2'619'507'173

2'865'799'268

2'546'299'772

1'667'855'511

1'490'570'801

29'159

36'279

44'385

1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008

1'222'190'736

24'465

1'273'476'670

19'058

1'925'247'517

2'000'000'000

1'684'025'464

2'500'000'000

2'311'514'623

39'393

2'491'081'404

3'000'000'000

2'065'359'366

3'500'000'000

2'881'999'121

colonnes = montant total annuel des versements anticipées en francs triangles = nombre annuel de bénéficiaires

3'206'272'256

40'000

45'000

50'000

Encouragement de l'accession à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle

0

5'000

10'000

15'000

20'000

25'000

30'000

35'000

Nombre de communications

Annexe