20.008 Rapport sur la politique économique extérieure 2019 comprenant des messages concernant des accords économiques internationaux et Rapport sur les mesures tarifaires prises en 2019 du 15 janvier 2020

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Nous fondant sur l'art. 10 de la loi fédérale du 25 juin 1982 sur les mesures économiques extérieures, nous avons l'honneur de vous soumettre le présent rapport et ses annexes (ch. 9.1.1 à 9.1.6). Nous vous proposons d'en prendre acte.

Nous fondant sur l'art. 10, al. 3, de la loi fédérale sur les mesures économiques extérieures, nous vous soumettons simultanément des messages et, en vous proposant de les approuver, des projets d'arrêtés fédéraux portant approbation ou modification des textes suivants (ch. 9.2.1 à 9.2.3): ­

accord agricole entre la Suisse et Israël,

­

modification du protocole A sur les produits agricoles transformés entre les États de l'AELE et Israël,

­

accord commercial entre la Suisse et le Royaume-Uni et accord additionnel en vue d'étendre au Liechtenstein certaines dispositions de l'accord commercial,

­

accord avec la Turquie dans le cadre du Système généralisé de préférences.

En application de l'art. 10, al. 4, de la loi fédérale sur les mesures économiques extérieures et nous fondant sur les art. 13, al. 1 et 2, de la loi du 9 octobre 1986 sur le tarif des douanes, 6a de la loi fédérale du 13 décembre 1974 sur l'importation et l'exportation de produits agricoles transformés et 4, al. 2, de la loi du 9 octobre 1981 sur les préférences tarifaires, nous vous soumettons le rapport et le projet d'arrêté fédéral sur les mesures tarifaires prises en 2019 (ch. 9.3), en vous proposant de l'adopter.

2019-2256

1903

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

15 janvier 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

1904

Condensé La politique économique extérieure face à un contexte de plus en plus volatil Le contexte dans lequel évolue la politique économique extérieure de la Suisse a été fortement marqué par des incertitudes persistantes ou nouvelles. Le système commercial mondial tel qu'on le connaît depuis l'après-guerre, caractérisé par un droit fort pour tous plutôt que par un droit du plus fort, est remis en cause par certains États fondateurs. Il est de plus en plus manifeste que l'ordre international fondé sur des règles, qui constituait depuis des décennies le socle évident de notre croissance économique et de notre prospérité, continue de s'éroder. Un morcellement en différents ordres nationaux et régionaux et un durcissement de la concurrence entre les systèmes, phénomènes que l'on croyait révolus, se dessinent à l'horizon. Des lames de fond populistes combinées à un scepticisme croissant envers la mondialisation se traduisent, dans de nombreux pays, par une tendance générale au repli et au protectionnisme sur les questions commerciales. À cela s'ajoute l'inquiétude grandissante que la transition vers une économie plus durable n'intervienne pas assez rapidement.

Paradoxalement, cette évolution se fait jour à une époque où les chaînes de valeur mondialisées, c'est-à-dire les processus de production transfrontaliers, se renforcent. Ce renforcement est accéléré par la marche rapide du progrès technique. La numérisation, en particulier, bouleverse profondément et fondamentalement l'économie mondiale. Le numérique imprègne comme jamais les États, les entreprises et les individus. De nouvelles prestations et de nouveaux modes de production voient sans cesse le jour, qui autorisent des gains de prospérité, y compris dans les pays en développement et les pays émergents. S'ils ouvrent de nouvelles perspectives aux chaînes de valeur en termes de durabilité et de transparence, ils détruisent aussi les modèles d'affaires et de travail traditionnels et en créent de nouveaux.

Cela représente, partout dans le monde, un véritable casse-tête pour les milieux politiques et les régulateurs, pousse le système commercial mondial à s'adapter et augmente les forces centrifuges en jeu. Le chapitre introductif (ch. 1) du présent rapport est consacré à ce thème.

Dans ce contexte global où se heurtent repli politique et
explosion technologique, pour la Suisse, économie de moyenne importance dotée d'un marché intérieur restreint, l'enjeu majeur sur le front de la politique économique extérieure reste finalement la défense de sa compétitivité. Sur le plan intérieur, la Suisse reste bien positionnée en tant qu'important pôle de recherche et de formation associant un marché du travail souple et une charge administrative comparativement faible pour les entreprises. Vis-à-vis de l'étranger, la Suisse peut mettre en avant des relations économiques éprouvées et une interopérabilité réglementaire avec l'UE. Elle doit par ailleurs s'engager, dans le cadre des alliances éprouvées ou à venir, en faveur de relations économiques qui soient, dans la mesure du possible, non discriminatoires, qui offrent une sécurité juridique et qui puissent évoluer. Elle doit aussi oeuvrer, au niveau multilatéral, à l'élaboration et à l'application de règles et de

1905

normes adéquates, et à la consolidation et au développement de son réseau d'accords bilatéraux.

Objectifs du Conseil fédéral pour 2019 Dans ce contexte, le Conseil fédéral s'est attaché pendant l'année sous revue, à différents niveaux, à préserver et à renforcer le système commercial multilatéral fondé sur des règles. Les négociations avec l'UE d'un accord institutionnel ont en outre occupé une bonne part du terrain. Le Conseil fédéral a lancé une vaste consultation sur les résultats de ces négociations. Plusieurs accords ont été conclus avec le Royaume-Uni afin de garantir une poursuite aussi fluide que possible des relations économiques bilatérales après le Brexit. Un accord de libre-échange (ALE) a été conclu dans le cadre de l'Association européenne de libre-échange (AELE) avec le Mercosur et ses États membres.

Ces questions et d'autres dossiers importants pour la politique économique extérieure de la Suisse sont traités dans le présent rapport (ch. 2 à 8). Le chapitre introductif (ch. 1) traite des opportunités et des défis de la numérisation pour la politique économique extérieure de la Suisse.

Le Conseil fédéral présentera en détail le degré de réalisation des objectifs de politique économique extérieure dans le rapport de gestion de l'année sous revue.

Une première appréciation indique que ces objectifs ont été atteints.

Situation et développements économiques dans le monde Durant l'année sous revue, un grand nombre de régions ont connu un ralentissement de la croissance, phénomène notamment observé dans les États membres de l'UE. Mais le fléchissement graduel de la dynamique de croissance de ces dernières années s'est aussi manifesté, de manière marquée, en Amérique et en Asie. Le secteur secondaire et le commerce mondial de marchandises qui en dépend ont été particulièrement touchés. Le secteur tertiaire et la demande intérieure dans les grands pays industrialisés ont quant à eux contribué à la stabilisation de la conjoncture globale.

Le différend commercial persistant entre les États-Unis et d'importants partenaires commerciaux a été le principal responsable de la perte de vigueur du commerce mondial (cf. à ce sujet le rapport sur la politique économique extérieure 2018). Il s'est peu à peu durci par les relèvements de droits de douane et les menaces proférées d'en appliquer
davantage. C'est en Chine que les traces de cet affrontement sont à ce jour les plus visibles: tant le commerce extérieur que la croissance économique globale sont restés en-deçà des prévisions. Le recul du commerce mondial a également impacté les économies fortement axées sur l'exportation comme la Suisse ou l'Allemagne, même si celles-ci ne sont pas directement impliquées dans ces tensions géoéconomiques.

Par-delà les différends commerciaux, les incertitudes politiques en Europe, liées aux Brexit par exemple, ont contribué à entretenir un flou persistant sur les marchés mondiaux. Le contexte incertain et la défiance des investisseurs et des entreprises

1906

vis-à-vis des risques se sont traduits par des taux d'intérêt à long terme affichant, un peu partout, des niveaux historiquement bas.

Sur le plan international, les banques centrales, principalement celles de la zone euro, des États-Unis et de plusieurs pays d'Amérique latine, ont maintenu voire encore assoupli leur politique monétaire particulièrement expansionniste. Au début de l'année, malgré les incertitudes globales, les marchés des actions ont enregistré des cours à la hausse et une faible volatilité; depuis, toutefois, le durcissement du différend commercial a, çà et là, entraîné de sévères dépréciations.

En revanche, les différents marchés du travail, globalement robustes, ont émis des signaux positifs. Le taux de chômage a encore diminué graduellement dans nombre de pays durant l'année sous revue. Il a dans certains cas atteint un plancher historique. Les taux d'inflation, fortement tributaires notamment des cours du pétrole, sont restés modérés au niveau international. Les taux d'inflation sous-jacente sont, pour la plupart, restés stables. Conjuguée au faible renchérissement, l'évolution favorable des marchés du travail a soutenu la demande intérieure. Le climat de consommation est resté dans de nombreux pays, y compris dans la zone euro, à un niveau relativement élevé.

Situation économique en Suisse Le produit intérieur brut de la Suisse est resté inférieur à la moyenne au premier semestre. Toutefois, en comparaison internationale, la Suisse se situe en milieu de classement compte tenu de l'évolution mondiale.

La consommation privée, principalement, a soutenu la croissance, et la bonne santé du marché du travail n'y est pas étrangère. La progression de l'emploi a continué même si de façon moins dynamique et des différences marquées existent entre les différentes branches de l'économie. Tandis que dans le secteur des services le nombre de demandeurs d'emplois a ultérieurement baissé, une légère augmentation des demandes a été constatée dans les secteurs industriels, surtout dans les industries électronique, métallique et des machines. Une légère augmentation du travail à court terme a par ailleurs été constatée pour la première fois depuis 2015.

L'économie suisse a elle aussi été directement impactée par les incertitudes persistantes concernant l'économie mondiale. Premièrement,
l'activité d'investissement des entreprises a été affectée. Deuxièmement, le ralentissement conjoncturel à l'étranger a freiné l'industrie d'exportation, pénalisant les producteurs de biens sensibles à la conjoncture tels que les machines (baisse des exportations d'environ 1,5 % en moyenne annuelle) et les métaux (recul des exportations d'environ 2 % en moyenne annuelle). De surcroît, le franc suisse s'est quelque peu apprécié en lien avec les incertitudes politiques persistantes, ce qui a particulièrement affecté l'industrie manufacturière. En revanche, les exportations de produits chimiques et pharmaceutiques ont fortement progressé durant l'année sous revue.

1907

Contenu du rapport sur la politique économique extérieure 2019 et perspectives pour 2020 Chapitre introductif: numérisation et commerce extérieur (ch. 1) La place économique suisse doit demeurer l'une des plus compétitives au monde.

Elle doit créer et préserver des emplois à forte valeur ajoutée. Pour conserver et stimuler sa compétitivité internationale ainsi que sa prospérité, la Suisse doit pouvoir accéder aux services numériques et aux prestations intermédiaires avec le moins d'obstacles possible. Cela passe, d'une part, par l'identification et l'élimination, sur le plan interne, des obstacles au commerce numérique qui sont injustifiés et pénalisants. Il importe, d'autre part, que les entreprises suisses puissent servir efficacement leurs marchés d'exportation dans le contexte numérique, sans être prétéritées. Entraver le moins possible les flux transfrontaliers de données, base de l'économie numérique (ch. 1.1.2), revêt ici une importance capitale.

Ces évolutions offrent d'importantes opportunités à la Suisse, économie hautement développée et connectée à l'échelle mondiale. Aujourd'hui déjà, dans le domaine numérique, la Suisse se profile comme un espace économique et de recherche significatif et en plein essor. Toutefois, pour ces mêmes raisons, elle est confrontée à des défis qui touchent le marché du travail, la politique fiscale et la cybersécurité. Elle apparaît en outre très exposée à de potentielles restrictions des flux transfrontaliers de données dans d'importants pays partenaires (ch. 1.3).

Tandis que le progrès technique accélère la numérisation et donc l'ouverture des frontières nationales, on assiste, un peu partout dans le monde, à des contremesures politiques. Les États s'efforcent de sauvegarder leur souveraineté dans un monde numérique connecté et d'agir dans des domaines prioritaires sur le plan politique comme la sûreté intérieure, la poursuite pénale ou la protection de la sphère privée et des données personnelles. De telles mesures peuvent aussi être le signe de tendances protectionnistes dans le commerce électronique. L'amorce de constitution de blocs régionaux (ch. 1.2.2) se dessine, qui menace de restreindre la nature globale et ouverte d'Internet.

Le droit économique international peut favoriser la transparence et contribuer à éliminer voire empêcher les mesures
disproportionnées. Les discussions actuelles, telles celles sur la protection des données, montrent que l'équilibre à trouver entre des intérêts publics légitimes (protection de la vie privée, p. ex.) et le libre-échange sera un élément crucial à appréhender dans le cadre de la réglementation de l'économie numérique internationale (ch. 1.2.4). Sur le plan international, il est dans l'intérêt de la Suisse de promouvoir des normes et des règles internationales aussi étendues que possible. Les travaux en cours au sein de l'OCDE et l'initiative plurilatérale de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sur le commerce électronique peuvent ici jouer un rôle central à moyen terme, mais il ne faut pas négliger le développement le cas échéant des instruments bilatéraux.

1908

Importantes évolutions en Suisse en matière de politique économique extérieure (ch. 2) La politique économique intérieure et la politique économique extérieure sont plus que jamais étroitement liées. Les réglementations évoquées au ch. 2, axées sur l'économie suisse, ont potentiellement des répercussions directes sur les relations internationales de la Suisse.

S'agissant de la question du contrôle des investissements étrangers en Suisse, le Conseil fédéral a approuvé, le 13 février 2019, le rapport « Investissements transfrontaliers et contrôles des investissements » en exécution des postulats 18.3376 Bischof et 18.3233 Stöckli (cf. 2.1). Il conclut que l'introduction d'un contrôle n'apporte à l'heure actuelle aucune plus-value. La Motion 18.3021 Rieder « Protéger l'économie suisse en contrôlant les investissements » doit encore être traitée par le Conseil National. Le Conseil fédéral propose de rejeter cette motion qui demande la création de bases légales pour le contrôle des investissements directs depuis l'étranger dans des entreprises suisses. Le Conseil des Etats a adopté cette motion le 17 juin.

La loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l'AVS a été acceptée en votation populaire le 19 mai 2019 (ch. 2.2). Entrée en vigueur le 1er janvier 2020, elle préserve l'attrait et la compétitivité de la place économique suisse, l'emploi et, à moyen et long termes, les recettes fiscales. La réforme met en outre le droit de la fiscalité des entreprises en conformité avec les standards internationaux.

Durant l'année sous revue, le Conseil fédéral a décidé d'abolir unilatéralement les droits de douane sur les biens industriels importés (ch. 2.3). Concernant l'initiative populaire « Stop à l'îlot de cherté ­ pour des prix équitables (initiative pour des prix équitables) », le Conseil fédéral a présenté, durant l'année sous revue, un contreprojet indirect qui tient compte des objectifs des initiants et qui s'attache à éviter les conséquences économiques dommageables pour le pays (ch. 2.4).

Relations économiques avec l'UE (ch. 3) Depuis 2014, la Suisse et l'UE négocient un accord institutionnel (ch. 3.1.2) visant à consolider les accords d'accès au marché existants et la voie bilatérale, et à ouvrir la voie à de nouveaux développements. Le 7 décembre 2018, le Conseil fédéral a pris
acte du résultat des négociations. Après avoir consulté, pendant plusieurs mois, les acteurs suisses les plus directement concernés, il a réaffirmé, le 7 juin 2019, son appréciation positive du projet d'accord institutionnel et décidé de demander des clarifications sur trois points: la protection des salaires, les aides d'État et la directive sur la citoyenneté européenne. Si des solutions satisfaisantes sont trouvées dans ces trois domaines, l'accord pourra être signé.

Après que la Commission européenne n'a pas prolongé la reconnaissance de l'équivalence boursière de la Suisse au-delà du 30 juin 2019, le Département fédéral des finances (DFF) a activé, le 1er juillet, la mesure de protection de l'infrastructure boursière suisse (ch. 3.1.3). Celle-ci interdit aux plateformes de négociation de l'UE de proposer ou de permettre le négoce de titres de participation

1909

de sociétés ayant leur siège en Suisse. Cette mesure a jusqu'à présent produit les effets recherchés.

L'accord sur la libre circulation des personnes avec l'UE a soutenu la place économique durant l'année sous revue sans avoir de répercussions négatives sur le taux d'activité, le chômage ou l'évolution salariale. L'immigration nette en provenance des États de l'UE/AELE est restée relativement faible. Pouvoir facilement recruter de la main-d'oeuvre qualifiée à l'étranger constitue, justement, un atout majeur pour la place économique suisse, notamment dans le contexte de numérisation croissante (ch. 1.3 et 3.1.4).

Durant l'année sous revue, le Parlement a approuvé une deuxième contribution suisse à certains États membres de l'UE (« contribution à l'élargissement »), qui représente en tout 1,302 milliard de CHF sur dix ans. La Suisse ne prendra toutefois aucun engagement tant que des mesures discriminatoires de l'UE sont en vigueur à l'encontre de la Suisse (ch. 3.2).

Dans le cadre de la stratégie « Mind the gap » adoptée par le Conseil fédéral en 2016, plusieurs accords ont été signés avec le Royaume-Uni durant l'année sous revue: un accord sur les assurances, un accord sur le transport routier, un accord commercial (voir message intégré dans le présent rapport), un accord sur les droits des citoyennes et des citoyens et, enfin, deux accords de durée limitée, l'un sur l'admission réciproque des personnes physiques sur les marchés du travail concernés et l'autre sur la coordination des systèmes de sécurité sociale. Ces accords seront applicables dès que les accords bilatéraux conclus entre la Suisse et l'UE cesseront de s'appliquer au Royaume-Uni (ch. 3.3).

Par ailleurs, les ministres des finances de l'UE ont décidé, lors de leur réunion du 10 octobre 2019 à Luxembourg, de radier la Suisse de la liste de surveillance de l'UE en matière fiscale (liste grise).

Organisations internationales (ch. 4) La crise du système commercial international, qui a été traitée largement dans le rapport sur la politique économique extérieure 2018, se reflète dans les différentes initiatives de réforme de l'OMC qui ont été poursuivies durant l'année sous revue (ch. 4.1). Cette pression en faveur de réformes s'est accentuée avec le blocage de la nomination de juges au sein de l'organe d'appel de l'OMC. Dans le cadre
d'initiatives plurilatérales, certains membres de l'OMC déterminés souhaitent faire avancer les négociations dans certains domaines avec l'intention de soumettre ultérieurement les résultats en plénum. C'est ainsi qu'une dynamique réjouissante se dessine dans les domaines du commerce électronique et des réglementations intérieures régissant le commerce des services. Le groupe spécial d'arbitrage de l'OMC, saisi par des membres de l'OMC, dont la Suisse, à l'encontre des ÉtatsUnis concernant les droits de douane sur l'acier et l'aluminium, a entamé ses travaux durant l'année sous revue.

Les travaux conceptuels de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur les avancées de la numérisation se sont poursuivis (ch. 4.2). Les États membres de l'OCDE, dont la Suisse, ont adopté des recomman-

1910

dations sur le recours à l'intelligence artificielle, les premières au monde en la matière. Par ailleurs, sur proposition de la Suisse, ils ont procédé à un échange de vues sur le vieillissement démographique.

L'Organisation internationale du travail (OIT) a célébré son 100e anniversaire durant l'année sous revue (ch. 4.3). Les festivités se sont déroulées en Suisse, en sa qualité de pays hôte. À cette occasion, l'OIT a lancé une initiative sur l'avenir du travail.

Accords économiques bilatéraux (ch. 5) En août 2019, la Suisse est parvenue, avec ses partenaires de l'AELE, à clore les négociations d'un ALE de large portée avec le Mercosur (ch. 5.1). Une étude d'impact environnemental ciblée a été réalisée pour la première fois. Déjà conclu en décembre 2018, l'accord de partenariat économique de large portée (Comprehensive Economic Partnership Agreement, CEPA) avec l'Indonésie a été approuvé par le Parlement. Les entretiens exploratoires avec les États-Unis sur un possible ALE se sont poursuivis. Par ailleurs, la Suisse est restée en contact avec plusieurs pays partenaires afin de moderniser les ALE existants, et a participé à différents comités mixtes (cf. ch. 9.1.3) et commissions économiques mixtes (ch. 9.1.5).

Les négociations menées avec plusieurs pays en vue de conclure des accords de protection des investissements (API) se sont aussi poursuivies durant l'année sous revue (ch. 5.2 et 9.1.4). Par ailleurs, le Conseil fédéral a approuvé un mandat de négociation sur la révision ou la conclusion d'API avec l'Angola, la Bolivie, les Émirats arabes unis et l'Équateur (ch. 5.2).

La Suisse a conclu un accord avec la Turquie dans le cadre du système généralisé de préférences (ch. 5.3 et 9.2.3).

Durabilité et responsabilité sociétale des entreprises (ch. 6) Le thème de la durabilité a gagné en importance dans le contexte du réchauffement climatique et de la surexploitation des ressources naturelles. Durant l'année sous revue, le Conseil fédéral a défini une stratégie pour le développement durable visant à concrétiser l'Agenda 2030 au niveau national (ch. 6.1). Dans les dernières années, ce thème a aussi gagné en importance dans les ALE. La Suisse et les autres États de l'AELE ont révisé et renforcé le chapitre modèle de l'AELE sur le commerce et le développement durable en introduisant notamment
des dispositions relatives aux thèmes « commerce et changement climatique », « commerce et biodiversité » ainsi qu'une nouvelle approche du règlement des différends (ch. 6.2).

La mise en oeuvre et l'actualisation des plans d'action du Conseil fédéral concernant la responsabilité sociétale des entreprises, les entreprises et les droits de l'homme, et l'économie verte se sont poursuivies (ch. 6.4).

L'initiative populaire fédérale « Entreprises responsables ­ pour protéger l'être humain et l'environnement » (dite « initiative multinationales responsables »), déposée le 10 octobre 2016, prévoit un devoir de diligence et une responsabilisation des entreprises. Le Conseil fédéral rejette cette initiative mais est favorable à des dispositions coordonnées au niveau international et il attend la fin des débats par-

1911

lementaires relatifs à une contre-proposition indirecte. À son avis, les règles en matière de responsabilité ne doivent toutefois pas aller au-delà du droit en vigueur.

Coopération économique au développement (ch. 7) Pendant l'année sous revue, le Conseil fédéral a soumis aux milieux intéressés, dans le cadre d'une consultation facultative, le rapport explicatif relatif au message sur la coopération internationale de la Suisse 2021­2024.

La coopération internationale de la Suisse a fait l'objet d'un examen par les pairs du Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE, et d'un rapport à miparcours sur la coopération internationale 2017­2020 (ch. 7.2). L'OCDE recommande entre autres à la Suisse de renforcer son engagement et de consacrer 0,5 % de son revenu national brut à l'aide publique au développement. Cela correspond à la valeur de référence fixée par le Parlement en 2011.

Les États membres de la Banque africaine de développement ont décidé d'augmenter le capital de la banque de 7 milliards d'USD au total (ch. 7.2). Par ailleurs, les négociations relatives à la 19e reconstitution du fonds de développement du Groupe de la Banque mondiale (Association internationale de développement, IDA) se sont achevées.

Contrôles à l'exportation, sanctions et politique de la maîtrise des armements (ch. 8) Le 17 avril 2019, le Conseil fédéral a prolongé jusqu'au 12 mai 2023 (ch. 8.1) l'ordonnance sur l'exportation et le courtage de biens destinés à la surveillance d'Internet et des communications mobiles. Les autorisations d'exportation ou de courtage de ces biens peuvent être refusées si les biens sont susceptibles d'être utilisés par les destinataires finaux à des fins de répression.

La Commission de gestion du Conseil des États a clos, le 26 mars 2019, son examen relatif à la participation de la Confédération à l'application de sanctions économiques. La politique suisse en matière de sanctions est jugée globalement cohérente.

Le Conseil fédéral a présenté, le 14 juin 2019, le message concernant l'initiative populaire « Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre » et recommandé le rejet de l'initiative (ch. 8.3). Les auteurs de l'initiative populaire « Contre les exportations d'armes dans des pays en proie à la guerre civile (initiative correctrice) », déposée le 24 juin
2019, souhaitent inscrire dans la Constitution les critères d'autorisation des exportations de matériel de guerre.

L'initiative prévoit également le retour aux critères d'exclusion applicables aux exportations de matériel de guerre que le Conseil fédéral avait fixés en 2008 et qui ont fait l'objet de légères retouches en 2014.

Perspectives pour l'année à venir Le Conseil fédéral continuera de faire des relations avec l'UE la première des priorités. La démarche passe par des clarifications avec l'UE sur les trois points susmentionnés concernant le projet d'accord institutionnel. La décision de la Commission européenne concernant la reconnaissance de l'adéquation de la protection

1912

des données en Suisse est attendue pour 2020. Au niveau européen, la phase préparatoire de la politique de cohésion 2021­2027 devrait s'achever en 2020. Les régions frontalières suisses vont lancer, en partenariat avec leurs voisins, de nouveaux programmes transfrontaliers. Le Conseil fédéral va suivre ces développements en relation avec la deuxième contribution suisse à certains États membres de l'UE.

Le Conseil fédéral s'engagera par ailleurs en faveur de la réforme de l'OMC. Il défendra les intérêts économiques de la Suisse au sein des instances internationales telle l'OCDE. En outre, le développement du réseau d'ALE et l'amélioration de l'accès des entreprises suisses aux marchés étrangers vont rester des fondamentaux de la politique économique extérieure. L'accent sera notamment mis sur les négociations d'ALE avec l'Inde, la Malaisie et le Vietnam. En outre, le Conseil fédéral poursuivra ses entretiens exploratoires avec les États-Unis.

Fin 2020, l'OCDE publiera un rapport final sur le projet « Défis fiscaux posés par l'économie numérique », qui pourrait donner lieu à des adaptations substantielles du droit fiscal international pour les entreprises, qui toucheraient non seulement les modèles d'affaires numériques, mais l'ensemble de l'économie. Cette évolution aurait une portée considérable pour la Suisse, qui compte de nombreuses entreprises multinationales.

Au chapitre de la responsabilité sociétale des entreprises, le Conseil fédéral entend encourager, dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'action actualisé correspondant, la présentation par les entreprises de rapports sur le développement durable. Par ailleurs, le Point de contact national pour les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales s'attachera à faire connaître aux entreprises le nouveau guide de l'OCDE sur le devoir de diligence applicable à l'octroi de crédits par les instituts financiers. Dans le sillage de la révision du plan d'action national en faveur de l'économie et des droits de l'homme, un forum suisse sur ce thème sera organisé. L'avis des ambassades suisses sera sollicité et les PME seront soutenues concernant la procédure de diligence en matière de droits de l'homme.

Début 2020, l'administration fédérale dressera un bilan de la mise en oeuvre des mesures du rapport « Économie
verte: mesures de la Confédération pour préserver les ressources et assurer l'avenir de la Suisse » pour la période 2016­2019 et formulera vraisemblablement des recommandations pour la période 2020­2023.

L'objectif premier est de réduire l'impact environnemental de la consommation et de la production suisses sur le plan domestique et à l'étranger. Rapporté en unités de charge écologiques, l'impact environnemental total est généré pour près des trois quarts en dehors des frontières nationales. L'un des axes prioritaires du rapport sur l'économie verte concerne d'ailleurs l'engagement international.

1913

FF 2020

Table des matières Condensé

1905

Liste des abréviations

1918

1

1920 1920

2

3

Numérisation et commerce extérieur 1.1 La numérisation de l'économie mondiale 1.1.1 La numérisation transforme les structures des échanges commerciaux 1.1.2 Flux de données transfrontaliers sans entraves: un prérequis 1.2 Réactions politiques et réglementation 1.2.1 Internet ouvert et neutralité du réseau 1.2.2 Réglementation des flux de données et entraves au commerce numérique 1.2.3 Application extraterritoriale du droit 1.2.4 Interopérabilité de la réglementation et reconnaissance réciproque de l'adéquation 1.2.5 Évolution du droit international économique 1.3 Défis et opportunités pour la Suisse dans une économie mondiale numérique 1.3.1 Garantir les flux de données transfrontaliers 1.3.2 Fiscalité de l'économie numérique 1.3.3 Cybersécurité et espionnage économique 1.3.4 La numérisation aux frontières (DaziT) 1.3.5 Coopération au développement et numérisation 1.3.6 Dimension environnementale de la transformation numérique de l'économie 1.4 Synthèse Importantes évolutions en Suisse en matière de politique économique extérieure 2.1 Contrôle des investissements 2.2 Imposition des entreprises 2.3 Droit d'auteur 2.4 Train de mesures visant à lutter contre «l'îlot suisse de cherté» 2.5 Initiative pour des prix équitables Relations économiques avec l'UE 3.1 Évolution des relations économiques bilatérales avec l'UE 3.1.1 Règles équivalentes en Suisse et dans l'UE 3.1.2 Accord institutionnel 3.1.3 Reconnaissance de l'équivalence de la réglementation boursière suisse 3.1.4 Libre circulation des personnes

1914

1921 1923 1924 1925 1927 1928 1929 1929 1933 1937 1938 1939 1941 1942 1942 1943 1944 1944 1945 1946 1946 1947 1948 1948 1949 1949 1951 1951

FF 2020

3.2 3.3 4

Contribution suisse à des États membres de l'UE Brexit

1953 1953

Organisations internationales 4.1 Organisation mondiale du commerce (OMC) 4.1.1 Réforme de l'OMC et préservation du mécanisme de règlement des différends 4.1.2 Négociations plurilatérales 4.1.3 Défense des intérêts commerciaux de la Suisse 4.2 OCDE et G20 4.3 Organisation internationale du travail (OIT)

1955 1955

5

Accords économiques bilatéraux 5.1 Accords de libre-échange 5.2 Accords de protection des investissements 5.3 Autres accords économiques 5.4 Commissions économiques mixtes

1959 1959 1960 1961 1961

6

Durabilité et responsabilité sociétale des entreprises 6.1 Mise en oeuvre de l'Agenda 2030 6.1.1 Mise en oeuvre en Suisse 6.1.2 Forum politique de haut niveau des Nations Unies pour le développement durable 2019 6.2 Dispositions relatives au développement durable dans les accords de libre-échange 6.2.1 Accord de partenariat économique AELE-Indonésie 6.2.2 Accord de libre-échange AELE-Mercosur 6.2.3 Derniers développements concernant la durabilité dans les accords de libre-échange 6.2.4 Mémorandums d'entente sur la coopération en matière de travail et d'emploi (dialogues sur le travail) 6.3 Durabilité et développement économique 6.4 Responsabilité sociétale des entreprises 6.4.1 Diligence raisonnable des entreprises 6.4.2 Actualisation des plans d'action 6.4.3 Principes directeurs de l'OCDE et Point de contact national

1961 1961 1962

Coopération économique au développement 7.1 Message sur la stratégie de coopération internationale 2021­2024 7.2 Coopération multilatérale 7.3 Fonds destinés à promouvoir l'investissement à impact social et la stabilité des marchés de capitaux 7.4 Évaluation de l'efficacité de la coopération internationale 2017­2020

1968 1969 1970

7

1955 1956 1956 1957 1958

1962 1963 1963 1963 1964 1964 1965 1965 1965 1967 1968

1970 1971 1915

FF 2020

8

9

Contrôles à l'exportation, sanctions et politique de la maîtrise des armements 8.1 Contrôles à l'exportation 8.2 Sanctions 8.3 Politique de la maîtrise des armements 8.3.1 Initiative populaire «Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre» 8.3.2 Initiative populaire «Contre les exportations d'armes dans des pays en proie à la guerre civile» Annexes au rapport sur la politique économique extérieure 9.1 Annexes pour information 9.1.1 Thèmes de négociation au sein de l'OMC 9.1.2 Négociations en cours concernant des accords de libreéchange 9.1.3 Rencontres de comités mixtes dans le cadre d'accords de libre-échange en vigueur 9.1.4 Négociations d'accords bilatéraux de protection des investissements 9.1.5 Missions économiques, rencontres de travail bilatérales et sessions des commissions économiques mixtes 9.1.6 Exportations dans le cadre de la loi sur le contrôle des biens 9.2 Annexes pour approbation 9.2.1 Message concernant l'approbation de l'accord agricole entre la Suisse et Israël et la modification du protocole A sur les produits agricoles transformés de l'accord de libre-échange entre les États de l'AELE et Israël Arrêté fédéral portant approbation de l'accord agricole entre la Suisse et Israël et de la modification du protocole A sur les produits agricoles transformés de l'accord de libre-échange entre les États de l'AELE et Israël (Projet) Décision no 1/2018 du Comité mixte AELE-Israël Accord agricole entre la Suisse et Israël 9.2.2 Message concernant l'approbation de l'accord commercial entre la Suisse et le Royaume-Uni et de l'accord additionnel en vue d'étendre en vue d'étendre au Liechtenstein certaines dispositions de l'accord commercial

1916

1972 1972 1972 1973 1973 1973 1975 1975 1975 1976 1977 1980 1981 1983 1984

1985

1997 1999 2001

2005

FF 2020

9.2.3

9.2.4 9.2.4

Arrêté fédéral portant approbation de l'accord commercial entre la Suisse et le Royaume-Uni et de l'accord additionnel en vue d'étendre en vue d'étendre au Liechtenstein certaines dispositions de l'accord commercial (Projet) Accord commercialentre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord Accord additionnel entre la Confédération suisse, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et la Principauté de Liechtenstein en vue d'étendre à la Principauté de Liechtenstein certaines dispositions de l'Accord commercial entre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord Message concernant l'approbation de l'accord avec la Turquie dans le cadre du Système généralisé de préférences Arrêté fédéral portant approbation de l'accord entre la Suisse et la Turquie dans le cadre du Système généralisé de préférences (Projet) Accord sous forme d'échange de lettres entre la Confédération suisse et la République de Turquie sur le cumul de l'origine entre l'Union européenne, la Confédération suisse, le Royaume de Norvège et la République de Turquie dans le cadre du Système généralisé de préférences Annexe 9.2.4 Rapport sur les mesures tarifaires prises en 2019 Arrêté fédéral portant approbation de mesures touchant le tarif des douanes (Projet)

2035 2037

2097 2103 2113

2115 2121 2123 2127

1917

FF 2020

Liste des abréviations ADPIC

Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce

AGCS

Accord général sur le commerce des services (RS 0.632.20 Annexe 1 B)

AELE

Association européenne de libre-échange

ALE

Accord de libre-échange

API

Accords de protection des investissements

ARM

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif à la reconnaissance mutuelle en matière d'évaluation de la conformité (RS 0.946.526.81)

CLOUD

Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act des États-Unis

CNUCED

Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement

CNUDCI

Commission des Nations Unies pour le droit commercial international

CPTPP

Comprehensive and Progressive Agreement for Trans-Pacific Partnership

DEFR

Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche

DLT

Distributed Ledger Technology

DSTRI

Digital Services Trade Restrictiveness Index der OECD

FAI

Fournisseurs d'accès à internet

FRI

Formation, recherche et innovation

G20

Groupe des vingt (Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, ÉtatsUnis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, RoyaumeUni, Russie, Turquie, UE)

IEEE

Institute of Electrical and Electronics Engineers

INSTA

Accord institutionnel entre la Suisse et l'UE

LTaD

Loi sur le tarif des douanes du 9 octobre 1986 (RS 632.10)

OCCP

Ordonnance sur les contributions à des cultures particulières dans la production végétale et sur le supplément pour les céréales du 23 octobre 2013 (RS 910.17)

OCDE

Organisation de coopération et de développement économiques

OIT

Organisation internationale du travail

OMC

Organisation mondiale du commerce

1918

FF 2020

ONU

Organisation des Nations unies

PIB

Produit intérieur brut

PME

Petites ou moyennes entreprises

RGPD

Règlement général de l'UE sur la protection des données

SECO

Secrétariat d'Etat à l'économie

TIC

Technologies de l'information et de la communication

USMCA

United States-Mexico-Canada-Agreement

1919

FF 2020

Rapport 1

Numérisation et commerce extérieur

1.1

La numérisation de l'économie mondiale

Les progrès réalisés dans les technologies de l'information et de la communication (TIC), l'accroissement des performances des infrastructures et certains développements techniques ­ informatique en nuage, intelligence artificielle, mégadonnées et Internet des objets ­ modélisent l'économie mondiale du XXIe siècle. Tandis qu'à ses débuts, la numérisation visait essentiellement à simplifier, en les automatisant à l'aide des TIC, les processus opérationnels répétitifs, la transformation numérique qui s'est accélérée ces quelque dix dernières années peut de plus en plus être désignée comme l'avènement du «tout-numérique»1. Celui-ci touche l'ensemble de l'économie et modifie les modèles commerciaux, les processus de production, les modes de consommation et le monde du travail. Après être passés d'une économie industrielle à une économie de services, nous vivons actuellement une mutation qui va dans le sens d'une économie axée sur l'information. Ce processus a été nommé de diverses manières, notamment «Industrie 4.0.»2, «quatrième révolution industrielle»3 ou «transformation numérique»4. Sur le fond, il s'agit toujours du même concept: nous faisons face non seulement à une amélioration et à une accélération de ce qui existe déjà, mais aussi à un changement profond, d'ordre qualitatif.

Le Conseil fédéral entend mettre en place de bonnes conditions générales, de sorte que la numérisation puisse contribuer durablement à assurer et à accroître la prospérité du pays5. Dans le rapport sur la politique économique extérieure 2016, le Conseil fédéral avait déjà relevé l'importance de la numérisation pour la place économique suisse6. Le présent chapitre traite des récents développements touchant le commerce numérique7 et des conséquences qu'ils peuvent avoir pour la Suisse.

1 2 3 4

5

6 7

Cf. Ernst&Young, The Digitisation of Everything, Londres 2011.

Deutsches Bundesministerium für Bildung und Forschung BMBF, Industrie 4.0, www.bmbf.de > Forschung > Digitale Wirtschaft und Gesellschaft > Industrie 4.0.

Schwab Klaus, La quatrième révolution industrielle, Munich 2016.

Ceci correspond à la terminologie du Conseil fédéral. Cf. Modèle cible pour la transformation numérique de l'administration fédérale et le développement des infrastructures numériques www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/55503.pdf.

Cf. Programme de la législature 2015 à 2019, objectif 3, programme de la législature 2019 à 2023, ligne directrice 1 «La Suisse assure durablement sa prospérité et saisit les chances qu'offre le numérique»; Rapport du Conseil fédéral sur les principales conditions-cadre pour l'économie numérique, 2017.

Rapport du Conseil fédéral sur la politique économique extérieure 2016, ch. 1 «Exploiter le potentiel de la mondialisation et de la numérisation».

Actuellement, il n'existe pas de définition généralement acceptée du commerce numérique ou cybercommerce (e-commerce). En principe, il s'agit de transactions internationales motivées par un intérêt économique et soutenues par des moyens numériques.

1920

FF 2020

1.1.1

La numérisation transforme les structures des échanges commerciaux

Les transactions numériques jouent aujourd'hui un rôle primordial dans les échanges économiques. L'augmentation du volume des transactions et l'entrée en scène de nouveaux modèles et acteurs économiques transforment également de plus en plus les secteurs qui étaient jusqu'ici assez peu touchés par la mondialisation, notamment ceux des services aux personnes et des services internes aux entreprises8.

La division internationale du travail va croissant. Aujourd'hui déjà, certaines étapes de la production se déroulent dans des régions et des pays différents. Ce ne sont plus seulement des produits finis mais également des produits intermédiaires et semi-finis qui sont échangés à l'échelle internationale9. Ces chaînes mondiales de création de valeur, auxquelles l'économie suisse est fortement intégrée10, sont transformées par les progrès de la numérisation. De plus en plus, un fil numérique basé sur les flux de données transfrontaliers s'étend sur toute la chaîne de création de valeur, depuis la recherche et développement jusqu'à l'utilisation par le client final, en passant par le design, la production, le transport et la logistique11.

8 9

10 11

Cf. p. ex. Baldwin Richard, The Globotics Upheaval, Londres 2019.

Rapport du Conseil fédéral sur la politique économique extérieure 2014, chapitre introductif «Le renforcement de la compétitivité de la Suisse dans les chaînes de valeur mondiales».

Nathani Carsten et al., Die volkswirtschaftliche Bedeutung der globalen Wertschöpfungsketten für die Schweiz, étude élaborée sur mandat du SECO, Berne 2014.

Présentation complétée selon OCDE, Trade and Cross Border data flows, juin 2019.

1921

FF 2020

L'utilisation de la technologie numérique réduit les frais de transaction, améliore et accélère la coordination des processus de production, facilite l'acquisition de marchés plus importants, permet de réaliser des économies d'échelle et d'obtenir des effets de réseau ainsi que de personnaliser les produits et de les développer en les modifiant en fonction du comportement des utilisateurs, d'où l'intégration toujours plus profonde du numérique dans la production et le commerce. Cette évolution est fortement influencée par des avancées technologiques telles que la chaîne de blocs (blockchain, fondée sur la technologie des registres distribués, DLT) ou l'utilisation de l'intelligence artificielle. La DLT recèle, par exemple, un potentiel considérable pour le financement commercial, pour la traçabilité des ressources naturelles ou dans le domaine de l'énergie et des transports.

Le progrès technologique diminue l'importance de la présence physique de l'opérateur sur un marché. Les produits et services numériques deviennent plus faciles à échanger. Bien que le relevé statistique de ces processus fasse l'objet, dans le monde entier, de divergences quant au mode de calcul et aux résultats obtenus, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) fait état d'une croissance des exportations mondiales de services de l'ordre de 7,4 % en 2017 (contre 10,7 % pour les exportations de biens durant la même période, bien que la croissance dans le commerce des services soit tendanciellement plus dynamique)12. Des chances s'offrent ainsi d'accroître encore la productivité, notamment par l'externalisation13 de services auparavant internes aux entreprises, tels que la comptabilité, le service informatique et le service clients. Cette évolution ouvre des possibilités, en particulier pour les PME, et permet aux pays en développement d'accéder aux marchés et de s'intégrer au système mondial de production et d'échanges commerciaux (cf. ch. 1.3.5).

Tandis qu'une part du commerce numérique se joue en tout-électronique, les technologies numériques transforment également l'économie «analogique». La numérisation gomme les limites séparant le commerce des biens et celui des services 14. Cet effet se manifeste tant au niveau des produits eux-mêmes ­ par exemple par la fabrication additive (impression 3-D)15 ­ que dans le regroupement
croissant de biens et de services (p. ex. ascenseurs commercialisés avec des services de maintenance et de surveillance). La production de biens intègre de plus en plus de valeur ajoutée découlant de prestations de services de tiers. On observe en outre une convergence des services numériques: pour y accéder, les consommateurs ont besoin de toujours moins de terminaux (p. ex. smartphones), les plateformes offrent un éventail élargi de services (p. ex. paiements via les réseaux sociaux) et entrent en concurrence avec les acteurs en place dans les secteurs concernés16. Les vecteurs de valeur immaté-

12 13 14 15

16

Cf. www.wto.org > news and events > press releases > 2018 > strong trade growth in 2018 rest on policy choices.

Rapport sur les principales conditions-cadre pour l'économie numérique, rapport du Conseil fédéral du 11 janvier 2017.

Cf. Rapport du Conseil fédéral en réponse au postulat 11.3461 Bischof.

Conséquences de la numérisation sur l'emploi et les conditions de travail: opportunités et risques, rapport du Conseil fédéral donnant suite aux postulats Reynard du 16 septembre 2015 (15.3854) et Derder du 17 mars 2017 (17.3222).

Cf. p. ex. Körber Torsten, Analoges Kartellrecht für digitale Märkte?, Wirtschaft und Wettbewerb, vol. 65, no 2, pp. 120 à 132.

1922

FF 2020

rielle et la propriété intellectuelle gagnent en importance, surtout pour les économies nationales qui, comme la Suisse, sont fondées sur la connaissance (cf. ch. 2.3).

Malgré les barrières douanières qui subsistent, le commerce effectué par petits envois commandés via les plateformes en ligne a considérablement augmenté. En 2015, on a estimé à quelque 260 milliards d'USD le volume de ces envois dans le monde entier, dont une part prépondérante (env. 76 %) concernait des envois dans les limites du territoire national. Mais il faut noter que le volume des envois internationaux s'accroît presque deux fois plus vite que celui des envois nationaux. L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) table sur une croissance annuelle de 25 % jusqu'en 202017. Le Conseil fédéral a adopté le 4 septembre un rapport dans lequel sont évaluées diverses mesures visant à relever les défis liés au dédouanement dans le commerce en ligne transfrontalier18.

La numérisation soulève par ailleurs des questions de politique de la concurrence.

On observe ainsi l'émergence de marchés bifaces ou multifaces 19 à travers des plateformes numériques par lesquelles les fournisseurs, tout comme les consommateurs, profitent d'une concentration sur quelques services, ce qui tend à créer des positions dominantes sur le marché. Des marchés importants, comme celui des services informatiques en nuage ou des services de recherche, sont dominés par quelques opérateurs mondiaux, majoritairement basés aux États-Unis, ce qui, pour les clients, peut avoir certains effets positifs, mais aussi générer des frais plus élevés pour changer d'opérateur; cette situation tend donc à créer une dépendance exclusive à l'égard d'un seul fournisseur (vendor lock-in). Eu égard aux incertitudes qui demeurent quant aux effets qu'elles pourraient avoir sur la prospérité économique en général, des interventions de politique de la concurrence sont discutées avec retenue.

1.1.2

Flux de données transfrontaliers sans entraves: un prérequis

Le commerce numérique est tributaire des flux de données transfrontaliers, qui permettent la création d'un fil numérique dans les chaînes de création de valeur, la fourniture numérique de services et la participation des consommateurs.

La géographie globale et la dynamique des flux de données transfrontaliers sont fondamentalement différentes de celles des flux commerciaux basés sur les techniques analogiques. Pour être transmises, les données sont réparties en différents paquets qui parviennent à leur destinataire par divers canaux électroniques20. Cette

17 18

19

20

www.oecd.org > trade > opinion > parcels trade: the good, the bad, and the ugly?

Pour que toutes les entreprises de commerce en ligne puissent lutter à armes égales, rapport du Conseil fédéral du 4 septembre 2019 en réponse au postulat 17.4228 Moser du 15 décembre 2017.

Les marchés bifaces ou multifaces se développent sur des plateformes mises en place par une ou plusieurs entreprises et sur lesquelles des groupes d'utilisateurs distincts se réunissent. L'utilisation de la plateforme est influencée par les effets de réseau. Cela signifie que plus les participants d'un groupe utilisent la plateforme, plus celle-ci devient attrayante pour les utilisateurs des autres groupes et inversement.

Cf. p. ex. van Schewick Barbara, Internet Architecture and Innovation, MIT Press 2012.

1923

FF 2020

répartition se fait en fonction de la capacité du réseau21. Même lorsqu'elles sont réputées nationales, ces transactions sont souvent transfrontalières. Par exemple, si l'on appelle, en Suisse, le service en ligne d'un opérateur suisse, la demande peut aller à un ou plusieurs serveurs à l'étranger, notamment si l'opérateur utilise des services étrangers. Il en est de même pour le stockage de données. Lorsqu'on utilise des services de stockage en nuage, des données peuvent simultanément être stockées («clonées» ou «dupliquées») en différents endroits22. Internet et les transactions économiques qui s'y déroulent sont ainsi tributaires d'un maximum de liberté pour les flux de données transfrontaliers. En même temps, des questions se posent quant à la souveraineté, par exemple, sur la protection des données et le lieu d'imposition des bénéfices réalisés par le commerce numérique (cf. ch. 1.3.2).

Le volume des flux de données transfrontaliers enregistre une croissance exponentielle ininterrompue23. L'OCDE estime ainsi qu'en 2015, le volume total des flux de données à l'échelle mondiale était déjà de 8 zettaoctets24, ce qui équivaut à une multiplication par 8 depuis 201025. Les estimations prévoient actuellement un volume de près de 40 fois supérieur d'ici à 2020. Il est cependant difficile d'évaluer l'utilité commerciale directe de ces données.

1.2

Réactions politiques et réglementation

La réglementation de l'économie numérique au niveau mondial évolue très rapidement, de manière inégale et dans les domaines les plus divers. Elle s'exerce aux trois niveaux d'Internet: physique (réseaux et infrastructures), logique (infrastructure numérique, c'est-à-dire protocoles et algorithmes) et informationnel (données, produits et services)26. Sur ce sujet, la nature globale d'Internet et les législations nationales entrent en contradiction. Les solutions relevant du droit international peuvent dès lors fournir une contribution importante à la sécurité juridique. C'est une question dont s'occupent depuis passablement de temps des forums multilatéraux (OCDE, G20, OMC). Jusqu'ici, toutefois, la réglementation en vertu du droit international économique a essentiellement pris la forme d'accords économiques et commerciaux conclus sur une base bilatérale et régionale (cf. ch. 1.2.3), d'où le risque d'un morcellement en systèmes normatifs régionaux27.

21 22 23

24 25 26 27

OFCOM, Rapport du 23 octobre 2014 du groupe de travail Neutralité des réseaux.

www.kmu.admin.ch > Actuel > Thème du mois > 2019 > Guide-du-cloud-computing.

Les statistiques commerciales ne font pas apparaître spécifiquement les biens et services faisant l'objet d'un commerce numérique. Toutefois, des efforts sont en cours à l'OCDE, par exemple, pour améliorer la précision des statistiques, cf. OCDE, Measuring the Digital Transformation, A Roadmap for the Future, 11 mars 2019, disponible sur: www.oecd-ilibrary.org/science-and-technology/measuring-the-digital-transformation_ 9789264311992-en. Par conséquent, seuls certains aspects spécifiques peuvent actuellement être mis en évidence.

À titre de comparaison: 1 gigabit correspond à 109 bytes. 1 zettabit correspond à 1021 bytes.

OCDE, «Data-driven Innovation: Big Data for Growth and Well-being», Editions OCDE, 2015.

Selon Benkler/Lessig.

Cf. également Lionnet Philippe, Commerce mondial: normalisation croissante ou nouveau fossé? dans: La Vie économique, no 8­9, 2019.

1924

FF 2020

Approches différentes au niveau mondial: tendance à la formation de blocs?

Les différences d'approches réglementaires concernant les flux de données transfrontaliers (cf. ch. 1.1.2) tendent à la formation de blocs regroupant des États partageant les mêmes vues. On peut d'ores et déjà identifier deux groupes majeurs. L'un est centré sur les États-Unis, qui ne disposent pas, jusqu'ici28, d'un cadre juridique bien développé, notamment en matière de protection des données, et qui ont une conception libérale du droit commercial en ce qui concerne les flux de données transfrontaliers, ainsi que de la réduction et de l'abolition des entraves. L'autre bloc comprend la Chine, la Russie, la Turquie et le Vietnam, qui défendent une vision plus étroite du contrôle d'Internet (désignée parfois par le terme de cybersouveraineté) pour justifier des interventions dans les flux de données transfrontaliers. Des tendances similaires sont également perceptibles dans certains États européens29. Par ailleurs, les États de l'UE et de l'EEE/AELE constituent un autre groupe, où l'accent est mis sur la garantie des droits individuels, notamment sur la protection des données personnelles. Tandis que principalement l'UE voit dans les obligations en matière de localisation des données non personnelles des mesures protectionnistes et les rejette, elle est globalement critique à l'égard des obligations du droit international en matière de flux de données transfrontaliers vu que celles-ci entrent en contradiction avec sa propre législation sur la protection des données30. La Suisse, ne serait-ce qu'en raison de sa conception du droit de la protection des données, peut être considérée comme faisant partie de ce groupe.

1.2.1

Internet ouvert et neutralité du réseau

Internet tisse sa toile tout autour de la planète, mais il est composé, sur le plan physique, d'un grand nombre de réseaux différents. Dans chacun de ces réseaux, divers fournisseurs d'accès à internet (FAI) interviennent, parmi lesquels des entreprises nationales de télécommunications. Le principe fondamental de la transmission de données est celui du meilleur effort: pour autant que les capacités soient suffisantes, toutes les données sont transmises immédiatement quels qu'en soient l'émetteur, le récepteur, la finalité ou le contenu. Transmettre des données dans le monde entier ne nécessite aucun accord avec les différents FAI. En outre, ces fournisseurs travaillent de manière largement interopérable sur le plan logique. La neutralité du réseau a rendu possibles d'innombrables innovations et fait d'Internet ouvert l'infrastructure de communication centrale de la mondialisation.

28 29 30

Des processus législatifs à ce sujet sont en cours dans différents États fédéraux américains (en Californie, notamment).

Cf. Leigh Karen, Kravchenko Stepan et Rai Saritha, How 'Cybersovereignty' Splits the Once World Wide Web, Bloomberg, 2 mai 2019.

Dans le cadre du marché intérieur numérique de l'UE, la libre circulation des données non personnelles a été décidée le 28 mai 2019. Cf. règlement (UE) 2018/1807 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 établissant un cadre applicable au libre flux des données à caractère non personnel dans l'Union européenne, JO L 303 du 28.11.2018, p. 59.

1925

FF 2020

Pour continuer de garantir ce principe fondamental, il importe de prévenir toute intervention discriminatoire dans le trafic des données. La diversité des besoins en matière de bande passante est un défi à relever; certains services vidéo, tels que Netflix et Youtube, sont aujourd'hui déjà à l'origine de la moitié des flux de données transfrontaliers en termes de volume de données31. Des opérateurs importants peuvent par exemple exploiter et fournir des connexions privilégiées, telles que les lignes dites louées, privées ou spécialisées. Des différences de prix existent aujourd'hui déjà en fonction de la bande passante allouée, même si elles donnent parfois lieu à des contestations. Certains FAI accordent en outre sélectivement à leurs clients des rabais de prix pour l'accès à certains services (dits détaxés ou à taux zéro).

L'ancrage juridique de la neutralité du réseau diffère selon les régions. Les ÉtatsUnis prennent actuellement leurs distances à l'égard d'une réglementation contraignante de la neutralité du réseau 32. Le principe en a par contre été inscrit dans la législation de l'UE33. Dans d'autres pays, les atteintes à la neutralité du réseau n'ont rien d'inhabituel. En Chine, notamment, la loi sur la sécurité cybernétique adoptée en 2016 est une base légale complète permettant de justifier l'ingérence de l'État et suffisante pour bloquer tout accès à des services étrangers ou intérieurs. Par ailleurs, il est de plus en plus fréquent que des gouvernements restreignent l'accès à Internet pour des motifs politiques34. Plusieurs pays ont déjà connu de telles violations de la neutralité du réseau: par exemple, le Venezuela, pendant la campagne électorale, le Cameroun et l'Irak, où l'accès à Internet a été interrompu, mais également l'Espagne, où certains sites ont fait l'objet d'un blocage ciblé dans le contexte du référendum en Catalogne. En Suisse, le principe de la neutralité du réseau a désormais force de loi puisqu'il est inscrit dans la loi du 30 avril 1997 sur les télécommunications35, révisée au cours de l'année sous revue: toutes les données doivent être traitées de manière égale, mais les opérateurs doivent disposer d'une certaine latitude pour aménager leur offre pour les services spéciaux, à condition que cela n'altère pas la qualité de la connexion Internet36.

31 32

33

34 35 36

Sandvine, Internet Phenomena Report, 2018.

Alors que la FCC, l'autorité de régulation américaine, avait proposé des principes pour un InternetInternet ouvert en 2014, ces proprositions ont été remplacées par le Restoring Internet Freedom Order, plus transparent et orienté vers le marché.

Règlement (UE) 2015/2120 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 établissant des mesures relatives à l'accès à un internet ouvert et modifiant la directive 2002/22/CE concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques et le règlement (UE) no 531/2012 concernant l'itinérance sur les réseaux publics de communications mobiles à l'intérieur de l'Union, JO L 310 du 26.11.2015, p. 1. 310 du 26.11.2015, p. 1 De 2016 à 2018, 371 obstacles partiels ou totaux à l'accès ont été enregistrés, la plupart en Asie (www.accessnow.org). Cf. Kormann Judith, Kelen Joana, NZZ du 9 juillet 2019.

RS 784.10 Les services spéciaux, offerts par les fournisseurs en plus de l'accès InternetInternet, sont transmis sur la même ligne; il peut s'agir notamment de téléphonie vocale via la téléphonie mobile de quatrième génération (VoLTE) et de certains services de télévision (IPTV). Cf. www.bakom.admin.ch > OFCOM > Organisation > Bases légales > Lois fédérales > Révision de la LTC 2019.

1926

FF 2020

1.2.2

Réglementation des flux de données et entraves au commerce numérique

Les entraves au commerce numérique sont de plus en plus fréquentes dans le monde entier. Sur la base de l'indice de restriction du commerce des services numériques (Digital Services Trade Restrictiveness Index, DSTRI), l'OCDE constate que sept des États membres du G20 appliquent en 2018 des restrictions aux échanges internationaux de services numériques plus sévères qu'en 2014. Trois États seulement sont devenus plus libéraux à cet égard 37. L'indice répertorie les mesures qui induisent des distorsions des échanges et dont l'effet s'accentue dans un monde numérisé. Il s'agit, par exemple, de dispositions qui imposent la forme écrite qualifiée de documents, d'obligations d'établissement ou encore d'obligations de désigner un représentant légal sur le marché visé. Pour les biens groupés, on observe que l'accès au marché est interdépendant pour le bien et la fourniture du service38.

Lorsque la fourniture du service de maintenance lié à l'achat d'une machine est entravée, les fournisseurs de ce genre de machines subissent un désavantage concurrentiel.

Par ailleurs, de plus en plus de pays prennent des mesures ayant trait aux contenus d'Internet. Ces mesures ont pour objectif la restriction ciblée des flux de données transfrontaliers (p. ex. restrictions à l'accès direct ou règles de localisation exigeant que certaines données soient stockées dans une juridiction déterminée). Le graphique39 suivant met en évidence la tendance à l'augmentation des réglementations nationales concernant les flux de données transfrontaliers.

37 38

39

OCDE Digital Services Trade Restrictiveness Index (DSTRI), 2018, www.oe.cd/stri-db.

En l'occurrence, la partie services ne doit pas être obligatoirement numérique: dans les travaux de maintenance, la fourniture de services personnalisés est particulièrement importante.

Les réglementations concernant les données englobent notamment la transmission transfrontalière de données ou les exigences de localisation en matière de stockage des données. Le nombre de règles dépend fortement de la structure réglementaire de chaque État. Source: Casalini and Lopez-Gonzalez (2019), «Trade and cross-border data flows».

1927

FF 2020

Les motifs justifiant ces mesures sont très divers. Cela peut être la protection de la sphère privée. Mais la localisation obligatoire de certaines données peut aussi avoir pour motif, par exemple, que c'est le seul moyen d'en assurer l'accès aux autorités de poursuite pénale et de surveillance et de pouvoir réaliser des audits. Les restrictions peuvent en outre avoir pour but de protéger des intérêts de sécurité nationale.

Bien que le droit de l'OMC et certains accords commerciaux préférentiels comportent des clauses dérogatoires à ce sujet, il existe un potentiel d'utilisation abusive.

Les instruments techniques et réglementaires utilisés pour restreindre les flux de données transfrontaliers peuvent également servir à des fins de politique industrielle et économique, par exemple pour protéger des opérateurs indigènes contre la concurrence étrangère40. Certains y décèlent par conséquent les prodromes d'un protectionnisme numérique41.

1.2.3

Application extraterritoriale du droit

La nature internationale du commerce numérique est en contradiction avec le principe de territorialité, c'est-à-dire avec la compétence exclusive des autorités chargées d'appliquer le droit sur leur territoire national. C'est ce que l'on constate, par exemple, dans l'application extraterritoriale de certaines règles, où est prise en considération l'origine des données concernées. Ainsi le règlement général de l'UE sur la protection des données (RGPD)42 oblige aussi les personnes domiciliées ou ayant leur siège à l'étranger qui offrent leurs biens et services à des clients établis dans le marché intérieur européen et qui donc traitent leurs données personnelles.

Harmonisant le droit sur la protection des données dans le cadre de l'UE, le RGPD constitue, au niveau mondial, le dispositif réglementaire le plus développé dans le domaine de la protection des données. Vu son applicabilité extraterritoriale et l'importance du marché intérieur européen, le RGPD pourrait être promu au rang de norme internationale43. Un autre exemple est celui du Cloud Act (Clarifying Lawful Overseas Use of Data) du 23 mars 2018 des États-Unis. Cette loi fédérale oblige les entreprises américaines à garantir aux autorités étasuniennes chargées des enquêtes l'accès aux données, même lorsque celles-ci ne sont pas stockées aux États-Unis.

Elle prévoit en outre la possibilité de négocier des accords bilatéraux (Executive Agreements) réglant les modalités des enquêtes des pouvoirs publics et de la transmission de données sur une base de réciprocité. Vu que le stockage de données en Suisse gagne en importance du point de vue économique et que le traitement des données représente une partie des activités courantes des entreprises internationales 40 41 42

43

Cf. Aaronson Susan Ariel, What we are talking about when we discuss digital protectionism?, Institute for International Economic Policy Working Paper Series, juillet 2017.

Cf. p. ex. Aaronson.

Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), JO L 119 du 4.,5.,2016, p. 11.

Jusqu'ici, par exemple, l'Australie (Privacy Amendment) et le Brésil (Lei Geral de Proteçao de Dados) se sont inspirés du RGPD pour l'élaboration de leur droit national sur la protection des données. Le California Consumer Privacy Act de l'État fédéral de Californie puise également dans le RGPD parmi d'autres sources d'inspiration.

1928

FF 2020

ayant leur siège en Suisse, cette application extraterritoriale du droit peut avoir des conséquences directes pour elles, et par contrecoup pour la place économique suisse.

1.2.4

Interopérabilité de la réglementation et reconnaissance réciproque de l'adéquation

La question de savoir si, aux yeux d'un régulateur étranger, des données sensibles peuvent être traitées en Suisse va dépendre de plus en plus de la manière dont les autorités étrangères jugeront le cadre juridique suisse. Elle sera importante pour toutes les entreprises suisses qui, dans le cadre de leur activité commerciale, traitent des données de clients étrangers. Pour la Suisse, le rôle du RGPD est à cet égard de première importance. En vertu de ce règlement, la Commission européenne est habilitée à établir si un État tiers présente un niveau de protection des données adéquat, autrement dit qui permette l'échange de données personnelles sans autre forme de procès44. La décision d'adéquation est un acte unilatéral de la Commission européenne contre lequel un État concerné n'a pas de moyen de recourir45. La décision de maintenir ou non la décision d'adéquation pour la Suisse, qui est très importante pour son économie, devrait tomber en 2020 (cf. ch. 1.3.1). Cela dit, la transmission de données personnelles à partir de la Suisse sans prendre de mesures particulières requiert également la reconnaissance, par le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT), du niveau de protection des données dans l'État tiers46. Une poursuite de cette tendance poserait de manière plus aiguë la question de la compatibilité entre les diverses prescriptions nationales sur la protection des données, ce qui soulève à nouveau la question des standards internationaux.

1.2.5

Évolution du droit international économique

Les aspects de la numérisation qui touchent au commerce relèvent depuis le milieu des années 90 du droit international commercial et économique47. Jusqu'ici, toutefois, les institutions multilatérales n'ont pas réussi à contrer, par des règles communes, la prolifération des mesures pouvant constituer des entraves au commerce.

Les divergences croissantes observées entre certaines régions et certains États dont

44

45

46 47

Art. 25 RGPD. Ont été reconnus jusqu'ici: Andorre, l'Argentine, le Canada (organisations commerciales), les États-Unis (reconnaissance restreinte au cadre du Privacy Shield ­ bouclier de protection des données), les Îles Féroé, Guernesey, Israël, l'Île de Man, le Japon, Jersey, la Nouvelle-Zélande, la Suisse et l'Uruguay. Durant l'année sous revue, des entretiens portant sur la question de l'adéquation ont été menés à terme avec le Japon, et d'autres sont encore en cours avec la Corée du Sud.

Comparable aux décisions d'adéquation dans d'autres domaines, p. ex. celui de la réglementation des marchés financiers. Cf. communication de la Commission européenne du 29 juillet 2019 relative à l'équivalence dans le domaine des services financiers.

www.edoeb.admin.ch > Protection des données > Commerce et économie > Transmission à l'étranger Cf. Burri/Cottier, Digital technologies and international trade regulation, dans: Burri/Cottier, Trade governance in the digital age, Cambridge 2015, pp. 1 à 14.

1929

FF 2020

la tradition réglementaire diffère, mettent en évidence la nécessité de normes minimales communes visant à placer tous les opérateurs du marché sur un pied d'égalité.

Accords bilatéraux et régionaux de libre-échange Les accords commerciaux bilatéraux et régionaux comportent de plus en plus souvent des dispositions qui réglementent le commerce numérique48. Comme l'indique le graphique49 ci-après, cette tendance comprend des règles générales relatives au commerce électronique ainsi que certaines clauses spécifiques concernant les flux de données transfrontaliers. Bien qu'ils ne lient que les États signataires, ces dispositifs réglementaires finissent par constituer une importante source de droit.

Comparés aux accords antérieurs, l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (Comprehensive and Progressive Trans-Pacific Partnership, CPTPP) et l'Accord Canada ­ États-Unis ­ Mexique (United States-Mexico-Canada-Agreement, USMCA) conclus en 2018 prévoient un approfondissement substantiel des règles du commerce numérique50. Les parties à ces accords s'engagent ainsi, par exemple, à ne pas instaurer de restrictions arbitraires des flux de données transfrontaliers ou à ne pas imposer de localisation pour le traitement des données. Des restrictions motivées par la protection d'intérêts publics prépondérants restent possibles, mais sont soumises à un examen de la proportionnalité. D'autres dispositions définissent les conditions d'accès au marché, à savoir notamment la non-discrimination des produits numériques en fonction de leur origine, la reconnaissance de l'équivalence des signatures numérique et manuscrite, l'interdiction permanente 48

49 50

World Trade Institute, Université de Berne, Base de données TAPED. Voir également: Elsig Manfred, Klotz Sebastian, Data flow-related provisions in preferential trade agreements, preliminary draft 2018.

Source: Base de données TAPED.

Cf. également: Burri Mira, Comment réglementer les flux mondiaux de données?, dans: La Vie économique, no 8­9, 2019.

1930

FF 2020

des droits de douane sur les flux de données et la notification obligatoire du code source des logiciels. Ces deux accords ont ainsi établi de nouvelles normes en matière de droit commercial.

Les récents ALE de l'UE avec la Turquie et le Mexique comportent également des développements dans le domaine du commerce numérique, mais ils reflètent surtout une approche réglementaire assez restrictive de la transmission de données personnelles. Le Conseil fédéral examine dans quelle mesure les ALE de la Suisse devront être développés à l'avenir dans ce domaine (cf. ch. 1.3.1). L'équivalence de la législation suisse sur la protection des données (cf. ch. 1.2.4 et 1.3.1) au cadre juridique de l'UE aura un impact décisif sur la position de la Suisse à l'égard de cette question.

OMC: négociations multilatérales relatives au commerce électronique L'OMC offre un cadre juridique et institutionnel important pour pouvoir définir, à plus ou moins long terme, des règles mondiales pour le commerce numérique. Ses principes fondamentaux de non-discrimination (clause de la nation la plus favorisée et traitement national) et de transparence sont également importants pour le commerce numérique. Certains faits touchant le commerce de services numériques ont déjà été examinés, à la lumière du droit de l'OMC, par les organes de règlement des différends, qui ont émis des arrêts contraignants51. Depuis le mois de mai de l'année sous revue, 82 États membres de l'OMC52, dont la Suisse, sont en négociation, dans le cadre d'une initiative multilatérale, en vue de clarifier les règles de l'OMC et d'y adjoindre des dispositions concernant le commerce numérique53. Le but de ces négociations est de promouvoir le commerce numérique en évitant les obstacles inutiles aux échanges commerciaux et le protectionnisme injustifié, tout en définissant des principes fondamentaux communs pour les législations nationales (p. ex. en matière de localisation). Ces négociations se basent sur les normes qui existent déjà dans les ALE bilatéraux et régionaux. Elles couvrent actuellement un large éventail thématique et abordent certains problèmes du commerce numérique, comme la reconnaissance de la signature numérique, la localisation du stockage de données et la protection des consommateurs (notamment la lutte contre les courriers indésirables). Les
membres de l'OMC qui y participent ont par conséquent des approches réglementaires très diverses (cf. ch. 1.2.2). La Suisse participe activement à ces négociations. Représentant environ 90 % du commerce mondial, le groupe de négociation a la capacité d'établir des règles de portée globale.

51 52

53

Notamment Mexico-Telecoms, US-Gambling, China-Audiovisual products.

Albanie, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Bahreïn, Bénin, Brésil, Brunéi Darussalam, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Côte d'Ivoire, Corée du Sud, Costa Rica, El Salvador, Émirats arabes unis, États-Unis, UE, Géorgie, Honduras, Hong Kong Chine, Indonésie, Islande, Israël, Japon, Kazakhstan, Kenya, Colombie, Koweït, Laos, Liechtenstein, Malaisie, Macédoine, Mexique, Moldova, Mongolie, Monténégro, Myanmar, Nouvelle-Zélande, Nicaragua, Nigeria, Norvège, Panama, Paraguay, Pérou, Qatar, Russie, Singapour, Suisse, Taiwan (Taipei chinois), Thaïlande, Turquie, Ukraine, Uruguay.

Dans le cadre de l'OMC, le «commerce numérique» (dans le sens où ce terme est utilisé par exemple dans l'accord USMCA ou par l'OCDE) est désigné comme «commerce électronique». L'utilisation de ce terme remonte au programme de travail sur le commerce électronique lancé par l'OMC en 1998 (Workprogram on E-Commerce, 1998).

1931

FF 2020

Approche globale en matière de nouvelles technologies Les développements technologiques actuels et les problèmes qu'ils posent sont de nature globale: l'informatique en nuage, la DLT et l'intelligence artificielle en sont trois exemples. Ils sont ainsi devenus, dans l'agenda international (p. ex. celui de l'ONU, de l'UNESCO, du Conseil de l'Europe et de l'UE, ainsi que d'organismes techniques tels que l'IEEE Standards Association), le sujet de nombreux débats. En mai de l'année sous revue, l'OCDE a été la première organisation internationale à adopter, au niveau ministériel, des recommandations fondamentales relatives à l'intelligence artificielle. Ces recommandations portent notamment sur le respect des valeurs démocratiques et des droits de l'homme, la transparence, l'explicabilité, la responsabilité et des aspects liés à la sécurité54. Le thème de la numérisation est également relayé par certains pays en développement, qui y voient des chances de profiter de cette révolution économique ou prennent la mesure des risques de la manquer.

OCDE: élaboration de règles internationales concernant l'économie numérique En tant qu'organisation normative, l'OCDE devrait jouer à l'avenir un rôle majeur dans la définition de règles internationales en matière de commerce numérique.

Dans le cadre de son initiative Going Digital55, l'organisation prévoit des travaux pluridisciplinaires visant à réunir des connaissances multithématiques sur la mutation numérique. Il s'agit notamment d'analyser des questions aussi variées que la définition et la mesure du commerce numérique, l'importance de l'ouverture des marchés à l'ère du numérique, les effets de la restriction des services et de la réglementation des flux de données transfrontaliers, ou encore les conséquences des nouvelles technologies, telles que la fabrication additive. Ces travaux peuvent dans une première phase servir de base à des recommandations communes (bonnes pratiques), promouvoir une approche politique cohérente et globale en matière de transformation numérique et s'appliquer, par exemple, aux négociations dans le cadre de l'OMC ou d'ALE. La Suisse, elle aussi, participe activement à ces travaux pour y défendre ses intérêts et identifier le plus tôt possible les risques éventuels.

Comme d'autres organisations internationales, l'OCDE juge qu'il
est important d'adopter des règles de droit souple. Ces règles ne sont certes pas juridiquement contraignantes, mais elles peuvent avoir une efficacité politique en ce sens qu'elles donnent l'exemple de bonnes pratiques. Dans ce domaine, le Conseil fédéral souhaite associer le Parlement de façon mieux ciblée. En réponse au postulat 18.4104, il relève que le droit souple, joue un rôle croissant en tant qu'instrument d'organisation des relations internationales56. Il formule en outre des propositions sur la façon d'assurer une participation plus ciblée du Parlement, en respectant la répartition des compétences prévue par la Constitution et en préservant la capacité d'action en matière de politique extérieure. Il précise enfin qu'il entend améliorer l'information du Parlement et les rapports à son intention en matière de droit souple.

54 55 56

OCDE, Recommandation du Conseil sur l'intelligence artificielle, 22 mai 2019.

www.oecd.org/going-digital/ www.dfae.admin.ch >Actualité > Le Parlement doit être plus fortement associé aux projets de droit souple.

1932

FF 2020

1.3

Défis et opportunités pour la Suisse dans une économie mondiale numérique

À ce jour, la Suisse est bien positionnée dans les classements internationaux en matière de numérisation57. Cela s'explique en particulier par des conditions-cadre favorables, par exemple la qualité des infrastructures dans les secteurs de la communication ou de l'électricité. Elle dispose en outre d'une base très solide dans les domaines de la formation et de la recherche. L'importance des moyens investis dans les TIC par l'économie privée et l'État en comparaison internationale est une autre de ses forces: entre 1996 et 2016, ces investissements, corrigés du pouvoir d'achat, sont passés de 6 932 à 24 527 millions de CHF, soit une croissance annuelle de 6,5 %. En 2016, près des 3/4 de cette somme ont été consacrés à des programmes informatiques et à des banques de données, un bon sixième aux technologies de communication et le reste aux technologies de l'information. Le graphique58 suivant expose le développement des investissements dans les TIC en Suisse.

La capacité d'une économie à tirer parti du potentiel de croissance et d'innovation de la numérisation dépend aussi du nombre de travailleurs formés aux TIC. En 2017, 5 995 diplômes dans les domaines des TIC ont été délivrés en Suisse, soit six fois plus qu'en 1990, mais la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée reste particulièrement sensible dans ce secteur59. Le nombre de demandes de brevets dans le domaine des TIC témoigne de l'importance de cette branche pour les activités de recherche et de développement. En 2016, la Suisse a déposé 33,8 demandes de brevets TIC par million d'habitants, ce qui la place au huitième rang des pays de l'OCDE. En tête de classement, on trouve la Suède (147,4), suivie de la Corée (108,7), de la Finlande (93,6) et d'Israël (92,2). En sa qualité de pôle de recherche, de services, de finance et d'industrie, la Suisse a jusqu'ici relevé avec succès les défis de la numérisation.

La récente croissance significative de secteurs économiques spécifiques tels que 57

58 59

Cf. World Economic Forum, Networked Readiness Index 2016: 7e rang; International Institute for Management Development, World Digital Competitiveness Ranking 2018, 5e rang.

Source: Office fédéral de la statistique (OFS).

SECO, Pénurie de main-d'oeuvre qualifiée en Suisse, 2016. www.seco.admin.ch > Situation économique & Politique économique > Politique économique > Marché du travail > Besoins de main-d'oeuvre qualifiée.

1933

FF 2020

l'exploitation de centres de données met en évidence le potentiel de l'économie numérique en Suisse, mais aussi la nécessité de disposer d'infrastructures performantes60.

La Suisse est toutefois largement tributaire des fabricants étrangers d'équipements TIC. Or tout porte à croire que les solutions matérielles et logicielles développées et utilisées dans le monde ne sont pas totalement sûres. Il est donc difficile d'exclure tout accès illicite. Au lieu d'écarter un fabricant d'un pays leader du marché, la Suisse s'attache à peser les risques, les avantages et les inconvénients d'un produit et à prendre des mesures visant à identifier et à empêcher le plus tôt possible tout accès non autorisé aux systèmes et aux données. À cet égard, le positionnement de la Suisse face aux blocs qui se constituent également dans la production de biens TIC ­ par exemple pour ce qui est de la technologie 5G ­ représente un véritable défi.

Stratégie «Suisse numérique» En septembre 2018, le Conseil fédéral a adopté la stratégie «Suisse numérique»61.

Celle-ci fixe les lignes directrices régissant l'action de l'État et montre les potentiels de la collaboration entre les autorités, l'économie, les milieux scientifiques, la société civile et les acteurs politiques. Il est primordial d'offrir des conditions propices au développement numérique de l'économie et de la société. Les instances politiques et les autorités sont appelées à faciliter et à soutenir dans la mesure du possible la transformation numérique. Elles mettent en place les conditions adéquates à cet effet. Parmi les objectifs du champ d'action «économie» de la stratégie figure le fait pour la Suisse de saisir les opportunités offertes par l'espace économique virtuel international et d'en tirer parti, tout en évitant les risques d'exclusion. La Suisse doit également viser une participation élevée au marché du travail dans le contexte de la numérisation, offrir un espace pour le déploiement de modèles commerciaux innovants et disposer d'un vivier diversifié de start-up capables de lancer rapidement des innovations sur le marché. Un secteur FinTech novateur et actif à l'échelle mondiale doit garantir la compétitivité de l'industrie financière, et l'agriculture suisse doit elle aussi pouvoir tirer parti des innovations technologiques.

Incidences de la numérisation
sur le marché suisse du travail L'évolution du marché du travail reflète les effets concrets du mouvement de numérisation et d'automatisation en cours. L'analyse rétrospective des innovations technologiques des dernières décennies permet de prendre la mesure de la capacité d'adaptation du marché suisse du travail, remarquable en comparaison internationale. L'emploi tend toutefois à se déplacer vers des branches exigeant des niveaux de qualification élevés.

60

61

Cf. Deloitte, Centres de données en Suisse, www2.deloitte.com > corporate-finance > data-centres in switzerland, Langenegger Markus, Le numérique: facteur de croissance de l'économie, paru dans: La Vie économique du 26.10.2015 et Betschon Stefan, Der grosse Sprung in die Cloud, Neue Zürcher Zeitung du 29.8.2019.

www.strategy.digitaldialog.swiss.

1934

FF 2020

Entre 1998 et 2018, le nombre total d'employés administratifs et d'ouvriers qualifiés de l'industrie, de l'artisanat et de l'agriculture a ainsi diminué de quelque 234 000 unités. Au cours de la même période, de nombreuses possibilités d'emploi ont émergé, en particulier dans les professions universitaires et techniques, dans les professions dirigeantes ainsi que dans les secteurs des services et de la vente. Le nombre net d'actifs s'est accru de 22 %, soit plus de 839 000 personnes62. Ces changements sont encore plus marqués au sein même des branches. Les avancées technologiques créent des domaines d'activités nécessitant de nouvelles compétences. Jusqu'à présent, les salariés ont réussi à relever ces défis grâce à la mise à niveau continue de leurs qualifications. En Suisse, on n'observe guère de signes d'une polarisation de la répartition des revenus.

Pour le Conseil fédéral, la perspective pour l'avenir reste celle d'une évolution structurelle constante plutôt que celle d'une rupture macroéconomique brutale 63.

Cette vision est corroborée par une estimation récente de l'OCDE64 selon laquelle 14 % des emplois des pays de l'OCDE sont fortement menacés par l'automatisation, tandis que 32 % supplémentaires pourraient être affectés par une modification substantielle de leur structure d'activités dans les décennies à venir. Néanmoins, la numérisation pourrait à l'avenir s'accompagner d'autres défis pour l'instant difficiles à prévoir pour le marché suisse du travail. Pour que ce dernier puisse continuer de bénéficier de la numérisation, il faut donc non seulement maintenir, mais renforcer sa capacité d'adaptation. La formation, par exemple, doit être encore davantage axée sur les compétences requises. Des mesures dans ce sens ont d'ores et déjà été prises65, notamment dans le cadre du plan d'action Numérisation dans le domaine FRI66. En novembre 2017, le Conseil fédéral a en outre décidé de mettre en place un monitorage des conséquences du tournant numérique sur le marché du travail, lequel permettra de mieux cerner les nouveaux défis que celui-ci implique. En octobre 2018, le chef du Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) a signé avec les associations faîtières des partenaires sociaux une déclaration tripartite sur l'avenir du travail et du partenariat social
en Suisse à l'ère de la numérisation de l'économie, témoignant ainsi de leur confiance dans la capacité du partenariat social à relever les défis du monde du travail de demain. Lors de la Conférence internationale du travail de juin 2019, la Suisse s'est par ailleurs engagée en faveur d'une ambitieuse déclaration sur l'avenir du travail, visant à relever les défis de la numérisation du monde du travail et à saisir les chances qu'elle offre.

62 63

64 65

66

OFS/ESPA, données compilées par le SECO.

Conséquences de la numérisation sur l'emploi et les conditions de travail: opportunités et risques. Rapport donnant suite aux postulats Reynard du 16 septembre 2015 (15.3854 «Automatisation. Risques et opportunités») et Derder du 17 mars 2017 (17.3222 «Économie numérique. Identifier les emplois de demain et la manière de stimuler leur émergence en Suisse»).

OCDE Better Work Initiative.

www.admin.ch > Page d'accueil > Documentation > Communiqués > Le Conseil fédéral approuve le rapport et les mesures concernant les conséquences de la numérisation sur le marché du travail.

www.sbfi.admin.ch > Le SEFRI > Numérisation > Plan d'action dans les domaines de la formation, de la recherche et de l'innovation pour les années 2019­2020.

1935

FF 2020

La numérisation dans la promotion économique La promotion économique mise elle aussi sur la numérisation, que ce soit par la promotion des exportations et de la place économique, ou par le biais des politiques régionale, du tourisme ou en faveur des PME67. Dans le cas des instruments de promotion économique extérieure, l'influence de la numérisation s'exerce par différents canaux. Switzerland Global Enterprise (S-GE), l'organisation chargée par la Confédération de promouvoir les exportations et la place économique, offre par exemple aux exportateurs suisses un accès encore plus rapide aux informations du marché grâce à son large portefeuille de prestations en ligne. La numérisation joue également un rôle grandissant dans la promotion de la place économique suisse.

Pour ce qui est de la politique du tourisme, encourager les compétences des acteurs des milieux concernés dans le traitement des données revêt une importance particulière, par exemple pour la prospection des marchés internationaux. Dans le domaine de la politique en faveur des PME, il est beaucoup question d'allègement administratif, un objectif qu'il s'agit de renforcer par le développement du traitement électronique des démarches administratives (cyberadministration). Dans ce domaine, la Suisse continue toutefois d'afficher un certain retard en comparaison internationale, en particulier pour ce qui est des services dits de base68. Compte tenu de la concurrence mondiale à laquelle elles sont confrontées, les PME exportatrices profitent particulièrement de gains d'efficacité administrative. La promotion économique 2020­2023 oeuvre avec ses champs d'action numériques pour que les PME et les régions de Suisse puissent pleinement exploiter les nouvelles perspectives offertes par la numérisation et s'affirmer face à la concurrence internationale.

La numérisation de la place financière suisse Partout dans le monde, le domaine des services financiers voit émerger de nouveaux produits et modèles d'affaires. Dans leur version numérique, les services financiers suisses sont plus facilement accessibles depuis le marché mondial. Cette évolution ouvre de nouvelles perspectives aux sociétés innovantes, bien que le droit de surveillance étranger impose également des exigences particulières aux entreprises et aux FinTechs suisses tournées vers
l'exportation. Les prestataires financiers helvétiques ont à leur disposition de nouvelles solutions techniques qui, à l'instar de l'externalisation en nuage (cloud outsourcing), accroissent leur puissance d'innovation tout en réduisant leurs coûts. De leur côté, les consommateurs suisses profitent de nouveaux services et de nouveaux produits d'investissement (systèmes de paiement, cryptoactifs, comptes bancaires en ligne, etc.). Le marché financier helvétique, tout comme les autorités, est appelé à tenir la cadence de ces rapides développements.

C'est pourquoi le Conseil fédéral prend régulièrement de nouvelles mesures destinées à renforcer la capacité d'innovation du secteur financier suisse dans l'environnement numérique. Durant l'année sous revue, il convient de relever par exemple l'introduction (au 1er janvier) des dispositions d'exécution régissant la nouvelle autorisation FinTech et la mise en consultation (en mars) du projet de loi fédérale 67 68

Message du 20 février 2019 sur la promotion économique pour les années 2020 à 2023, FF 2019 2333.

Cf. rapport comparatif de l'UE sur la cyberadministration 2018, www.egovernment.ch > Rapport comparatif de l'UE sur la cyberadministration 2018.

1936

FF 2020

sur l'adaptation du droit fédéral aux développements de la technologie des registres électroniques distribués69.

1.3.1

Garantir les flux de données transfrontaliers

Les entraves aux flux de données transfrontaliers entre la Suisse et d'importants pays partenaires peuvent avoir des retombées dommageables pour toute l'économie.

Inscrire des engagements ad hoc dans les accords commerciaux de la Suisse et participer activement à des travaux multipartites tels que ceux de l'OMC et de l'OCDE (cf. ch. 1.2.5) sont une bonne manière d'y remédier. Il importe toutefois en parallèle de maintenir le niveau de protection des données et de l'aligner sur les normes internationales en la matière.

Révision de la loi fédérale sur la protection des données et décision d'adéquation de l'UE En raison de la rapidité de l'évolution technologique, la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD)70 est dépassée. Le Conseil fédéral entend l'adapter à la nouvelle donne tant technologique que sociale et, dans la foulée, améliorer en particulier la transparence du traitement des données et le droit pour les personnes concernées d'exercer un contrôle sur leurs données personnelles71. Parallèlement, dans le cadre de la révision totale de la LPD, le Conseil fédéral entend ratifier la convention STE 108 révisée du Conseil de l'Europe72 et reprendre la directive (UE) 2016/680 relative à la protection des données dans le domaine de la procédure pénale, ce à quoi il est tenu en vertu de l'accord d'association à Schengen73. De plus, la révision de la LPD doit permettre de se rapprocher des exigences du RGPD. L'adaptation au droit européen est essentielle pour que l'UE continue de reconnaître la Suisse comme État tiers offrant un niveau de protection des données adéquat et pour que les flux de données transfrontaliers restent possibles sans exigences administratives supplémentaires (garanties contractuelles ou règles d'entreprises contraignantes suffisantes). Un retrait ou une suspension de la décision d'adéquation par la Commission européenne pourrait compliquer dans une mesure difficile à évaluer ­ voire empêcher complètement ­ le stockage et le traitement des données en provenance du principal partenaire commercial de la Suisse. Les modèles d'affaires de nombreuses entreprises suisses, à commencer par les PME, seraient ainsi mis sous pression. La question de l'adéquation de la protection des données doit bien entendu aussi être vue dans le contexte général de nos relations avec l'UE (cf. ch. 3).

69 70 71 72 73

www.admin.ch > Documentation > Communiqués > Le Conseil fédéral ouvre la consultation sur l'amélioration du cadre juridique régissant la blockchain et la TRD.

RS 235.1 www.bj.admin.ch > État & Citoyen > Projets législatifs en cours > Renforcement de la protection des données.

Conseil de l'Europe, STE 108, Convention pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel.

Accord du 26 octobre 2004 entre la Confédération suisse, l'Union européenne et la Communauté européenne sur l'association de la Confédération suisse à la mise en oeuvre, à l'application et au développement de l'acquis de Schengen; RS 0.362.31.

1937

FF 2020

Le régime du Privacy Shield Le régime du Swiss-US Privacy Shield permet le transfert de données personnelles de la Suisse vers les États-Unis sans garanties contractuelles supplémentaires. Il remplace le régime du Swiss-US Safe Harbor (2009­2015), aboli parallèlement à l'EU-US Safe Harbour suite à l'arrêt Schrems74 de la CJUE. Ce nouveau régime prévoit un mécanisme d'autocertification des sociétés sises aux États-Unis par lequel celles-ci s'engagent à respecter les principes de la protection des données du Privacy Shield (et notamment le droit des personnes concernées à accéder à leurs données et à obtenir des renseignements sur leur utilisation). La Suisse reconnaît l'adéquation du niveau de sécurité offert par ces entreprises. Pour ce qui concerne l'accès des autorités américaines à leurs données, les personnes domiciliées en Suisse peuvent, via une demande du PFPDT, s'adresser à un médiateur au sein du Département d'État américain (ombudsperson). Le Swiss-US Privacy Shield compte déjà plus de 3000 entreprises américaines certifiées.

Développement des accords économiques bilatéraux La Suisse a négocié des textes relatifs au commerce électronique dans le cadre d'ALE avec six partenaires commerciaux75 à ce jour. Ces dispositions sont toutefois de moindre portée que celles figurant dans des accords plus récents passés entre d'autres pays, notamment dans le cadre du CPTPP (cf. ch. 1.2.5). La Suisse va devoir envisager d'étendre ses exigences si elle veut éviter toute discrimination indirecte à l'encontre de la place économique et des entreprises suisses. Outre les précisions qu'elles amèneront, par exemple pour ce qui est de l'application de règles générales au commerce électronique, ces nouvelles dispositions pourront d'une part concerner des barrières commerciales numériques spécifiques comme la localisation du stockage des données et, d'autre part, viser des objectifs politiques généraux (protection des consommateurs, cybersécurité, etc.). Au cours de l'année sous revue, des travaux de cet ordre ont également débuté dans le cadre de l'AELE.

1.3.2

Fiscalité de l'économie numérique

La numérisation de l'économie soulève également la question de l'imposition des entreprises internationales. En mai 2019, l'OCDE a adopté un programme de travail sur ce sujet et un rapport final contenant des mesures à long terme doit être adopté d'ici à la fin 2020. La discussion s'articulera autour de deux piliers: la taxation dans les États de commercialisation des groupes concernés76 d'une bonne part des bénéfices consolidés réalisés, d'une part, et une imposition minimale des multinationales, d'autre part.

74 75

76

CJUE, arrêt de la Cour (grande chambre) du 6 octobre 2015, Maximilian Schrems contre Data Protection Commissioner, demande de décision préjudicielle, affaire C-362/14.

Dans les ALE de l'AELE avec la Turquie, l'Amérique centrale (Costa Rica, Guatemala, Panama), le Pérou, le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et la Colombie ainsi que dans l'ALE bilatéral de la Suisse avec le Japon.

Les États dans lesquels se trouvent les consommateurs des prestations numériques.

1938

FF 2020

En tant que pays innovant orienté sur l'exportation avec un petit marché intérieur, la Suisse risque de perdre, du fait des futures règles, une partie de ses recettes fiscales.

Ce risque ne peut pour l'instant pas être quantifié précisément. La Suisse participe toutefois activement aux travaux de l'OCDE en vue de l'adoption d'une solution multilatérale. L'alternative serait sinon la prolifération de mesures nationales telles que des impôts sur le numérique, que plusieurs États prévoient ou ont déjà introduits. À long terme, cette perspective serait potentiellement préjudiciable à l'économie suisse. La Suisse oeuvre pour que l'imposition continue à s'effectuer là où est produite la valeur ajoutée des prestations offertes et pour que la part de l'assiette fiscale soumise à l'impôt dans les États de commercialisation soit modérée. En ce qui concerne les taux d'imposition minimaux, la Suisse met en garde contre les effets de répartition, les restrictions à la concurrence entre les places économiques et les charges supplémentaires pour les entreprises, autant de facteurs susceptibles de grever la croissance.

En Suisse, les dispositions relatives à la vente par correspondance sont entrées en vigueur au 1er janvier de l'année sous revue; elles font partie des versions partiellement révisées de la loi du 12 juin 2009 sur la TVA77 et de l'ordonnance du 27 novembre 2009 régissant la taxe sur la valeur ajoutée78, entrées elles en vigueur au 1er janvier 2018. Cette nouvelle réglementation a pour but de supprimer les désavantages concurrentiels liés à la TVA que les entreprises suisses subissent par rapport à leurs concurrentes étrangères79.

1.3.3

Cybersécurité et espionnage économique

La numérisation expose l'économie suisse à des risques de sécurité importants, comme en témoignent les récentes cyberattaques dont ont été victimes certaines entreprises80. Ces attaques ne sont pas seulement le fait d'individus isolés. Depuis quelques années, certains pays ont eu davantage recours au cyberespionnage pour accéder aux secrets d'affaires et à la propriété intellectuelle des entreprises. Les informations extorquées profitent alors à leurs propres entreprises et sont intégrées à leur développement technologique dans le but de renforcer leur compétitivité. Il peut aussi arriver à des entreprises suisses d'être la cible de telles activités. Il ne peut alors pas être exclu que celles-ci débouchent sur le vol de secrets d'affaires ou de fabrication. On assiste également à des attaques de la part de groupes ou d'individus qui ont pour but de nuire à la réputation des entreprises ou de leur soutirer de l'argent81.

77 78 79 80 81

RS 641.20 RS 641.201 www.efd.admin.ch > Thèmes > Impôts > Imposition nationale > Révision de la taxe sur la valeur ajoutée.

Cf. p. ex. Müller Giorgio V., Cyberattacken gehören zum Geschäftsalltag ­ 40 % aller Schweizer Firmen mittlerweile betroffen, NZZ du 10 janvier 2019.

Cf. p.ex. MELANI Rapport semestriel 1/2019 du 29 octobre 2019.

1939

FF 2020

Ces attaques peuvent prendre diverses formes, comme l'introduction de virus informatiques, le chantage au moyen d'un rançongiciel (ransomware), des attaques par déni de service (denial of service, DoS) aboutissant à une surcharge intentionnelle des infrastructures, le vol de données et les courriers indésirables (spams). Plus les processus commerciaux des entreprises suisses sont numérisés, et plus ces risques deviennent sérieux. Cela vaut aussi pour les PME: pour 2017, le nombre d'entreprises victimes de chantage est estimé à 23 000 (4 %), tandis qu'elles pourraient être environ 209 000 (36 %) à avoir été visées par des logiciels malveillants (virus ou chevaux de Troie)82. Outre les entreprises, les infrastructures sensibles pour l'économie suisse sont elles aussi exposées aux cybermenaces83.

Cybersécurité: stratégie du Conseil fédéral Le Conseil fédéral est d'avis que la coopération internationale et un climat de confiance entre les États peuvent contribuer de manière substantielle à réduire les cyberrisques. La Suisse s'engage pour un espace numérique sûr, ouvert et libre, basé sur des règles claires et la confiance mutuelle, avec pour indispensable prémisse la mise en oeuvre du droit international dans cet espace virtuel. Les droits humains universels comme la protection de la sphère privée doivent y être garantis et il faut y défendre les libertés fondamentales, notamment la liberté d'opinion et la liberté de la presse. La Suisse promeut le développement de ses propres compétences et s'investit activement pour renforcer la confiance entre les États. Elle contribue dans la mesure du possible au développement des capacités dans d'autres pays et mène avec des pays choisis des consultations sur la sécurité du cyberespace. Dans le cadre de ses propres initiatives internationales (p. ex. le dialogue d'experts sur l'application du droit international dans le cyberespace) et grâce à sa participation active à diverses rencontres multilatérales (p. ex. le cyberdialogue sino-européen), la Suisse s'engage en outre pour la reconnaissance, le respect et l'application du droit international dans l'espace numérique. Ce faisant, elle veille à être toujours guidée par le principe fondamental de la responsabilité partagée de tous les acteurs en matière de cyberstabilité nationale et internationale.

Élaborés en
collaboration avec l'économie, les cantons et les hautes écoles, la Stratégie nationale de protection de la Suisse contre les cyberrisques 2018­2022 et son plan de mise en oeuvre constituent la base des travaux visant à réduire les cyberrisques à l'échelon national et international.

Cyberespionnage économique La Suisse est visée par l'espionnage économique, lequel recourt toujours plus souvent à des cyberoutils. Les entreprises suisses constituent elles aussi des cibles pour les services de renseignements étrangers, qui cherchent de cette manière à obtenir des avantages économiques ou des biens et des connaissances servant à la production d'armes de destruction massive. Depuis 2015, le Service de renseignement de la Confédération (SRC) enregistre un nombre croissant de cyberattaques visant 82 83

GFS-Zürich, Cyberrisiken in Schweizer KMUs, décembre 2017 (disponible uniquement en allemand).

Cf. OFEN, Digitalisierung im Energiesektor, rapport du 11 décembre 2018 (disponible uniquement en allemand).

1940

FF 2020

l'économie suisse. Celles-ci ont pour finalité le vol de secrets d'affaires et de fabrication, d'une part, et l'acquisition d'informations en vue du rachat d'entreprises, d'autre part. L'intrication numérique intensifie cette problématique. La nouvelle loi fédérale du 25 septembre 2015 sur le renseignement (LRens) 84 offre au SRC une base légale l'autorisant, sur mandat du Conseil fédéral, à prendre les mesures propres à défendre la place industrielle, économique et financière de la Suisse, en particulier lorsque des secteurs économiques d'importance nationale sont concernés.

Outre les mesures de contre-espionnage mentionnées, le SRC contribue à la protection de l'économie par son programme de prévention et de sensibilisation Prophylax (conseils aux entreprises, hautes écoles, instituts de recherche, etc.) lancé en 2004 et par un renforcement de la Centrale d'enregistrement et d'analyse pour la sûreté de l'information MELANI (soutien subsidiaire aux infrastructures sensibles de la Suisse concernant leurs mécanismes de sécurisation des informations).

1.3.4

La numérisation aux frontières (DaziT)

Le programme DaziT85 a vocation à faire entrer l'Administration fédérale des douanes (AFD) de plain-pied dans l'ère numérique86. Il vise à numériser de bout en bout les formalités douanières et la perception des droits et redevances. Lancé le 1er janvier 2018, le programme DaziT court jusqu'à fin 2026. Selon les estimations, les coûts de réglementation devraient diminuer de 125 millions de CHF par année dans le seul trafic transfrontalier des marchandises87.

Planifier et mettre en oeuvre la simplification et la numérisation des procédures douanières de manière coordonnée de part et d'autre de la frontière doit permettre d'accélérer sensiblement les échanges internationaux de marchandises. Au plan douanier, le commerce entre la Suisse et l'UE est régi par différents accords 88. Le Conseil fédéral accorde une grande importance à la coordination avec les projets de numérisation de ses partenaires européens pour la rationalisation des procédures douanières.

84 85 86

87 88

RS 121 Le nom du programme se compose de «dazi», le mot romanche désignant la douane, et de l'initiale du mot transformation.

Cf. FF 2017 1567, mais aussi Emmenegger Isabelle, L'Administration fédérale des douanes fait peau neuve, La Vie économique 5/2017, p. 55 s., Stamm Basil / Strasser Ingo, Les formalités douanières facilitées grâce au programme «DaziT», La Vie économique 5/2017, p. 57 s., Bock Christian, Zoll der Zukunft, Foreign Trade 1/2017, p. 57 ss.

Cf. Stamm Basil / Strasser Ingo, Les formalités douanières facilitées grâce au programme «DaziT», La Vie économique 5/2017, p. 57 s.

En particulier la Convention du 20 mai 1987 relative à la simplification des formalités dans les échanges de marchandises (RS 0.631.242.03), la Convention du 20 mai 1987 relative à un régime de transit commun (RS 0.631.242.04) et l'Accord du 25 juin 2009 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif à la facilitation des contrôles et des formalités lors du transport des marchandises ainsi qu'aux mesures douanières de sécurité (RS 0.631.242.05).

1941

FF 2020

1.3.5

Coopération au développement et numérisation

La numérisation joue également un rôle croissant dans la coopération internationale au développement. La Suisse soutient notamment des initiatives dans le domaine du numérique qui visent à promouvoir le développement économique durable et à réduire la fracture numérique89 entre pays industrialisés et en développement, mais aussi au sein des pays. La numérisation des institutions publiques est l'une des grandes priorités de la Suisse. Il s'agit tout d'abord d'améliorer l'accès aux institutions, de réduire la bureaucratie et de lutter contre la corruption. Dans ce contexte, la Suisse s'engage également pour la sécurité et la confidentialité des données personnelles. Elle aide ensuite des PME des pays en développement dans leurs processus de numérisation, afin que celles-ci soient plus compétitives et puissent intégrer l'économie mondiale. Elle encourage la mise au point de prestations numériques et oeuvre à la suppression des entraves à l'accès au marché. Soucieuse de limiter les conséquences négatives des processus de numérisation et d'automatisation sur le marché du travail, la Suisse soutient en outre l'acquisition de compétences au moyen de programmes de formation ciblés, en particulier en faveur de groupes de population défavorisés.

Les activités de la Suisse tiennent également compte de ses propres intérêts: tout en finançant des initiatives numériques et en apportant un soutien technique bilatéral, elle tisse des alliances avec des pays partenaires. De cette façon, elle renforce par exemple sa position au sein des organismes internationaux chargés d'élaborer les règles et les normes applicables aux nouvelles technologies. La Suisse contribue également à la stabilité du système financier international en renforçant l'aptitude des banques centrales et des autorités de surveillance financière des pays qui bénéficient de son aide à faire face aux risques liés à la cybercriminalité, au blanchiment d'argent et aux flux financiers illégaux. L'utilisation de nouvelles technologies permet en outre d'améliorer la traçabilité en termes de qualité et de durabilité des produits importés en Suisse et de répondre aux besoins d'informations des parties prenantes dans ce domaine. Ces technologies contribuent également à la lutte contre le piratage, la contrefaçon et la contrebande.

1.3.6

Dimension environnementale de la transformation numérique de l'économie

La transformation numérique de l'économie doit aussi être évaluée dans sa dimension environnementale. Les nouvelles technologies, et notamment la DLT, apportent les promesses de chaînes de valeur plus durables, avec notamment une traçabilité accrue des ressources naturelles qui y sont intégrées. Mais la transformation numérique repose également sur une infrastructure exigeant l'extraction de grandes quan-

89

Ce terme, souvent utilisé dans les institutions multilatérales, désigne les inégalités entre économies ou entre groupes de population touchant à l'accès et à l'utilisation des technologies de l'information et de la communication, en particulier Internet, et dues à des facteurs techniques et socioéconomiques.

1942

FF 2020

tités de ressources minérales90. Enfin, la numérisation, et en particulier la DLT, est très énergivore de par son fonctionnement même. Il faudra donc veiller à ce que les activités liées à la transformation numérique soient réalisées durablement du point de vue environnemental.

1.4

Synthèse

La Suisse est l'une des économies les plus intégrées aux chaînes mondiales de valeur. Elle est en bonne position pour continuer à prospérer, même dans une économie mondiale transformée par la numérisation. L'économie suisse est bien avancée sur la voie du numérique, et comparé à celle d'autres pays, son dispositif réglementaire fondé sur la stabilité, le respect des principes et la neutralité technologique contribue à l'innovation et au bas niveau des coûts d'adaptation. Pour le Conseil fédéral, l'objectif prioritaire à l'heure du numérique consiste à tirer parti de l'important moteur de croissance que représente le potentiel d'amélioration de la productivité, tout en garantissant une participation au marché du travail aussi élevée que possible et des emplois de qualité. Pour ce faire, il importe de préserver et de consolider les atouts de la politique suisse en matière de formation et de marché du travail.

Cependant, de par son ouverture sur l'extérieur, l'économie suisse fait face à des défis particuliers. La limitation croissante des flux de données transfrontaliers, les entraves numériques au commerce et l'émergence de blocs réglementaires pourraient la toucher plus durement que des économies dotées d'un marché intérieur plus vaste. La garantie d'une liberté maximale dans les flux de données transfrontaliers est donc cruciale. Parallèlement à cet objectif, il est toutefois indispensable de préserver certains intérêts publics essentiels comme un niveau élevé de protection des données personnelles et d'assurer la défense des entreprises et des infrastructures contre les cyberattaques et l'espionnage économique.

La marge de manoeuvre des gouvernements nationaux et des organisations internationales est soumise à l'influence grandissante des défis globaux en lien avec le développement dynamique de l'économie mondiale numérisée. Dans ce contexte, il est d'autant plus difficile pour de petits États comme la Suisse de revendiquer des réglementations nationales indépendantes. La coopération internationale, la reconnaissance mutuelle et garantie au plan juridique des réglementations des partenaires et les approches réglementaires «intelligentes» fondées sur la participation des acteurs concernés revêtent à cet égard une importance croissante. Il est par ailleurs dans l'intérêt de la Suisse de soutenir
les pays en développement de manière à ce qu'ils puissent prendre part à l'économie mondiale numérisée.

Dans la perspective de flux de données transfrontaliers aussi libres que possible avec les principaux marchés d'importation et d'exportation de la Suisse, l'équivalence de la législation suisse avec celle de l'UE en matière de protection des données est fondamentale. La réglementation de l'UE a en effet le potentiel de devenir une norme internationale d'importance.

90

Cf. Bieser Jan C.T., Hilty Lorenz M., Chancen und Risiken der Digitalisierung für den Klimaschutz in der Schweiz, Étude de l'Université de Zurich, Zurich 2017.

1943

FF 2020

Au plan international, il est également dans l'intérêt de la Suisse d'oeuvrer en faveur de recommandations, de normes et de règles négociées à l'échelle la plus large possible, que ce soit à l'OMC, à l'OCDE ou au sein d'autres organismes. Il est important pour elle de pouvoir identifier très tôt les tendances réglementaires potentiellement préjudiciables et d'être en mesure de faire valoir sa position, comme le montrent par exemple les discussions en cours à l'OCDE au sujet de la fiscalité de l'économie numérique.

Pour finir, il convient d'envisager un développement spécifique des accords de libreéchange mais également d'autres instruments de droit économique international, par exemple en ce qui concerne les flux de données transfrontaliers, les conditions de localisation et les simplifications administratives. Il s'agit pour la Suisse d'éviter une future discrimination de ses acteurs économiques et de contribuer à la sécurité juridique du commerce numérique avec ses principaux partenaires.

2

Importantes évolutions en Suisse en matière de politique économique extérieure

La politique économique intérieure et la politique économique extérieure sont plus que jamais étroitement liées. Des développements économiques en Suisse peuvent avoir des conséquences directes sur ses relations internationales (et vice versa), notamment dans les domaines ci-après.

2.1

Contrôle des investissements

Une politique ouverte en matière d'investissements étrangers est capitale pour la place économique suisse et, partant, pour la prospérité de la Suisse. Elle assure aux entreprises suisses un afflux suffisant de capital et de savoir, contribuant ainsi non seulement à la valeur ajoutée, mais encore au maintien et à la création d'emplois. La Suisse compte à la fois parmi les premières destinations mondiales des investissements directs et parmi les plus grands investisseurs directs à l'étranger. En 2018, les investissements directs étrangers en Suisse s'élevaient à quelque 1 296 milliards de CHF, tandis que les investissements directs de la Suisse à l'étranger s'élevaient à 1 467 milliards de CHF.

Ces dernières années, des entreprises étatiques ou proches de l'État en provenance de Chine et d'autres pays émergents ont intensifié leurs activités d'investissement à l'étranger, dans certains cas dans des opérations motivées par une forme de politique industrielle. En Suisse, cette évolution a parfois suscité des craintes selon lesquelles il pourrait en résulter une perte d'emplois et de savoir-faire ou encore une mise en danger de la sécurité nationale. Dans son rapport du 2 février 2019 «Investissements transfrontaliers et contrôles des investissements»91 donnant suite aux postulats 91

www.seco.admin.ch > Economie extérieure et Coopération économique > Investissements internationaux > Investissements étrangers > Contrôles des investissements > Rapport Investissements transfrontaliers et contrôles des investissements.

1944

FF 2020

Bischof 18.3376 du 16 mars 2018 et Stöckli 18.3233 du 15 mars 2018, le Conseil fédéral a examiné en profondeur ces risques potentiels. Il est parvenu à la conclusion que, pour l'heure, la mise en place d'un régime de contrôle des investissements n'apporterait rien. Le rapport montre que la législation en vigueur permet déjà aux autorités de contrer efficacement les éventuelles menaces. Un contrôle étatique des investissements impliquerait une plus grande charge administrative pour les entreprises concernées, plus d'incertitude pour les investisseurs et réduirait l'attrait de la Suisse.

Le Conseil fédéral est néanmoins pleinement conscient des risques liés aux investissements directs. C'est pourquoi il entend réaliser un monitorage et actualiser le rapport au cours des quatre prochaines années. Cet instrument permettra de mettre en lumière, le cas échéant, la nécessité de prendre des mesures, sans trop alourdir la charge administrative. Le Conseil fédéral veut par ailleurs examiner comment la résilience du domaine de l'informatique des infrastructures critiques92 face à des activités étrangères abusives peut être encore améliorée par des mesures ciblées. Il accordera en outre une plus grande importance à la question de la réciprocité.

La Motion 18.3021 Rieder «Protéger l'économie suisse en contrôlant les investissements» doit encore être traitée par le Conseil National. Le Conseil fédéral propose de rejeter cette motion qui demande la création de bases légales pour le contrôle des investissements directs depuis l'étranger dans des entreprises suisses. Le Conseil des Etats a adopté cette motion le 17 juin.

2.2

Imposition des entreprises

La concurrence internationale en matière d'imposition des entreprises reste intense.

La pratique suisse actuelle d'imposition préférentielle des revenus de source étrangère (ring fencing) des sociétés holding, des sociétés de domicile et des sociétés mixtes a depuis longtemps été critiquée par les principaux partenaires commerciaux de la Suisse et l'OCDE, et a engendré des mesures de rétorsion dans plusieurs pays.

La Suisse et les 28 États membres de l'UE ont signé une déclaration commune en octobre 2014 dans laquelle ces derniers s'engagent à lever les mesures de rétorsion sitôt que les régimes fiscaux contestés seront supprimés.

Lors de la votation populaire du 19 mai 2019, la loi fédérale du 28 septembre 2018 relative à la réforme fiscale et au financement de l'AVS (RFFA)93 a été acceptée par 66,4 % des voix. Entrée en vigueur le 1er janvier 2020, la RFFA crée un système compétitif, équilibré et compatible avec le droit international. Les privilèges fiscaux accordés jusqu'à présent aux entreprises principalement actives à l'international («sociétés à statut fiscal spécial») seront supprimés. Les baisses d'impôts accordées en parallèle dans les cantons permettront de préserver l'attrait et la compétitivité de la Suisse comme lieu d'implantation, de maintenir les emplois et, à moyen et à long termes, de garantir les recettes fiscales.

92 93

Pour un aperçu des infrastructures critiques, v. la Stratégie nationale du Conseil fédéral pour la protection des infrastructures critiques 2018­2022 (FF 2018 491).

FF 2018 2565 6077

1945

FF 2020

2.3

Droit d'auteur

La numérisation révolutionne l'industrie du divertissement en créant de nouvelles formes d'accès aux biens culturels (plateformes de streaming pour les offres audiovisuelles, p. ex.). Elle facilite ainsi l'accès aux contenus et augmente l'offre de biens culturels. Cette évolution a toutefois également un aspect négatif, puisqu'elle facilite la piraterie portant atteinte au droit d'auteur. La Suisse a fait l'objet de critiques dans ce domaine. Les États-Unis, en particulier, estiment qu'elle ne légifère pas suffisamment pour lutter contre la piraterie à l'égard du droit d'auteur. Le représentant américain au commerce suit de près les développements juridiques observés en Suisse (watch list). Le 27 septembre, le Parlement a adopté une modification de la loi du 9 octobre 1992 sur le droit d'auteur94 qui tient compte de cette critique et prévoit des mesures pour lutter efficacement contre la piraterie portant atteinte au droit d'auteur. Dans le même temps, la loi est conçue de façon à ne pas entraver le développement technique, notamment dans le domaine de la recherche et du développement, qui est important pour la Suisse95.

2.4

Train de mesures visant à lutter contre «l'îlot suisse de cherté»

À l'heure des chaînes de valeur mondialisées, les intrants traversent les frontières nationales à plusieurs reprises en un bref laps de temps. Dans les petits pays à l'économie ouverte, comme la Suisse, jusqu'à un tiers des importations sont utilisées en tant qu'intrants pour les exportations. Pour rester compétitives, les entreprises suisses sont par conséquent tributaires de procédures douanières aussi légères que possible, tant à l'importation de produits intermédiaires qu'à l'exportation. Les entraves au commerce génèrent des coûts, qui peuvent rapidement s'accumuler du fait des nombreux passages à la frontière.

Le Conseil fédéral a souligné dans plusieurs rapports l'impact de ces entraves au commerce et a montré les facteurs responsables du niveau élevé des prix en Suisse (îlot suisse de cherté). Il a présenté en 2016 un rapport sur les importations parallèles en exécution du postulat de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national du 24 février 2014 (14.3014 «Simplifier les formalités douanières et favoriser les importations parallèles grâce à la reconnaissance d'autres documents permettant d'attester de l'origine d'un produit») et a adopté un ensemble de mesures pour lutter contre l'îlot suisse de cherté96. Ces dernières visent à supprimer les obstacles à l'importation et, partant, à rendre plus difficile la segmentation du marché par des fabricants étrangers.

Dans le cadre de ces mesures, le Conseil fédéral propose de supprimer unilatéralement les droits de douane à l'importation des produits industriels. Cette mesure 94 95 96

RS 231.1 www.dfjp.admin.ch > Accueil DFJP > Actualité > Thèmes > Modernisation du droit d'auteur.

www.parlement.ch > 14.3014 > Rapport en réponse à l'intervention parlementaire.

1946

FF 2020

permettra d'abaisser les prix des biens importés. L'économie profitera du fait que les intrants étrangers pourront être obtenus meilleur marché et les entreprises verront leur charge administrative allégée, ce qui renforcera leur compétitivité. En plus de la suppression des droits de douane, le projet prévoit la simplification de la structure du tarif des douanes pour les produits industriels. Le 27 novembre, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la suppression des droits de douane sur les produits industriels et l'a transmis au Parlement. De plus, il est prévu d'abaisser les droits de douane sur une sélection de biens agricoles qui ne sont pas produits en Suisse. Le principe «Cassis de Dijon» sera par ailleurs renforcé à moyen terme, en remplaçant la procédure d'autorisation applicable aux denrées alimentaires par une procédure plus simple. L'objectif est de générer des économies considérables s'élevant à près de 900 millions de CHF, au bénéfice tant des entreprises que des consommateurs.

Par contre, pour le budget de la Confédération, ces mesures se traduiront par une baisse des recettes se chiffrant à plusieurs centaines de millions de CHF.

Pour encore mieux préserver la concurrence, le Conseil fédéral prévoit de réviser le contrôle des fusions d'entreprises. La mise en place du test SIEC (Significant Impediment to Effective Competition), également utilisé par l'UE, permettrait à la Commission de la concurrence (COMCO) d'intervenir au cas par cas lorsque la concurrence est entravée de manière notable, même en l'absence d'une position dominante au sens du test de dominance actuellement en vigueur. La révision du contrôle des fusions pourrait rendre plus difficile l'émergence d'entreprises puissantes sur le marché, ce qui aurait une incidence positive sur la concurrence en Suisse.

2.5

Initiative pour des prix équitables

L'initiative populaire «Stop à l'îlot de cherté ­ pour des prix équitables (initiative pour des prix équitables)»déposée en 2017 entend également lutter contre l'îlot de cherté en limitant les pratiques de restrictions commerciales de type privé. Concrètement, elle vise à garantir l'achat non discriminatoire de biens et de services à l'étranger et à empêcher les restrictions à la concurrence causées par des pratiques unilatérales d'entreprises puissantes sur le marché. À cette fin, l'initiative prévoit d'agir sur trois plans: premièrement, elle demande une adaptation de la loi sur les cartels afin que le contrôle des abus soit étendu aux entreprises «ayant un pouvoir de marché relatif». Deuxièmement, elle introduit une clause qui permet d'empêcher les réimportations dans le pays de production. Troisièmement, elle crée une réglementation pour garantir en principe la non-discrimination en matière d'achats dans le commerce en ligne (interdiction de principe du blocage géographique privé).

Le Conseil fédéral juge que les exigences de l'initiative vont trop loin, tout en reconnaissant la nécessité d'agir. Du point de vue du droit international public en particulier, la clause de réimportation prévue dans l'initiative introduirait un traitement privilégié en faveur des entreprises suisses par rapport à leurs concurrentes à l'étranger. Par conséquent, le Conseil fédéral veut agir de manière plus ciblée contre l'îlot de cherté et le cloisonnement du marché suisse et propose un contre-projet

1947

FF 2020

indirect à l'initiative97. Ce dernier doit permettre notamment d'éviter les conséquences négatives inhérentes au texte de l'initiative.

3

Relations économiques avec l'UE

Le marché unique européen, et tout particulièrement les échanges avec les pays limitrophes de la Suisse, demeurent d'une importance capitale pour l'économie helvétique. Au total, en 2018, plus de la moitié des exportations suisses de marchandises étaient destinées aux marchés de l'UE, dont deux tiers aux pays limitrophes.

De la même façon, les deux tiers des importations suisses proviennent de l'UE, qui est de loin le principal partenaire commercial de la Suisse.

3.1

Évolution des relations économiques bilatérales avec l'UE

La Suisse et l'UE s'accordent toujours un accès largement non discriminatoire à leurs marchés réciproques en vertu des nombreux accords bilatéraux98 qu'elles ont conclus. Ces derniers constituent en outre le fondement d'une étroite collaboration dans des domaines d'importance majeure (p. ex. la recherche ou la sécurité). En plus de l'ALE de 197299, qui supprime les droits de douane sur les produits industriels et améliore l'accès aux marchés pour les produits agricoles transformés, les accords revêtant une importance particulière pour le commerce extérieur de la Suisse sont ceux qui contiennent des dispositions relatives aux entraves non tarifaires au commerce (p. ex. la reconnaissance des évaluations de la conformité de produits industriels [ARM]100 et agricoles101, la facilitation des contrôles lors du transport des marchandises102 ou la libéralisation des marchés des transports103) ainsi qu'à la libre

97

98 99 100

101 102

103

Message du 29 mai 2019 relatif à l'initiative populaire «Stop à l'îlot de cherté ­ pour des prix équitables (initiative pour des prix équitables)» et au contre-projet indirect (modification de la loi sur les cartels); FF 2019 4665.

www.dfae.admin.ch > Politique européenne de la Suisse > Vue d'ensemble > Accords bilatéraux I.

Accord du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne; RS 0.632.401.

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif à la reconnaissance mutuelle en matière d'évaluation de la conformité (RS 0.946.526.81) et Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport aérien (RS 0.748.127.192.68).

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif aux échanges de produits agricoles (RS 0.916.026.81).

Accord du 25 juin 2009 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif à la facilitation des contrôles et des formalités lors du transport des marchandises ainsi qu'aux mesures douanières de sécurité, avec annexes (RS 0.631.242.05).

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport de marchandises et de voyageurs par rail et par route (RS 0.740.72).

1948

FF 2020

circulation des personnes104. Ces accords reposent soit sur la reprise du droit européen, soit sur la reconnaissance mutuelle de l'équivalence des prescriptions pertinentes.

3.1.1

Règles équivalentes en Suisse et dans l'UE

La plupart des producteurs suisses ont un intérêt à pouvoir appliquer les mêmes prescriptions que leurs principaux partenaires commerciaux, raison pour laquelle la Suisse n'a pas attendu de conclure les accords bilatéraux pour adapter ses prescriptions à celles de l'UE dans de nombreux domaines.

ARM a scellé la reconnaissance de cette équivalence pour les produits industriels qu'il couvre. Depuis, il n'est plus nécessaire de réaliser d'examens de la conformité supplémentaires pour distribuer ces produits dans l'UE. Les producteurs suisses sont donc placés sur un pied d'égalité avec leurs concurrents du marché unique européen dans les domaines couverts par l'accord. Ce dernier doit par conséquent être mis à jour régulièrement pour l'adapter aux évolutions pertinentes de la législation de l'UE. Les accords bilatéraux concernés ne prévoient toutefois aucune obligation de mise à jour rapide, si bien que par le passé, cette actualisation n'a pas toujours été garantie. À la suite de l'adoption de l'article constitutionnel relatif à la gestion de l'immigration (art. 121a Cst.), en 2016, l'UE ne s'était pas montrée disposée, pour des raisons politiques, à mettre à jour l'ARM pendant un certain temps. La mise à jour relative au chapitre sur les dispositifs médicaux doit avoir lieu d'ici le mois de mai 2020; bien qu'elle soit imminente elle n'a pas encore pu être finalisée. Cette actualisation pourrait être remise en cause en raison du lien que l'UE fait entre l'accord institutionnel et la mise à jour des accords d'accès au marché existants.

Lorsque l'équivalence des prescriptions n'est pas reconnue, les entreprises concernées font face à des coûts supplémentaires.

La mise à jour des accords sur l'accès aux marchés serait en revanche fixée de manière contraignante dans l'accord institutionnel (cf. art. 5 du projet d'accord). La conclusion de l'accord institutionnel garantirait la sécurité juridique pour les accords d'accès au marché.

3.1.2

Accord institutionnel

La Suisse et l'UE ont négocié un accord institutionnel en vue de consolider et développer l'accès réciproque à leurs marchés et, plus globalement, pour rendre la voie bilatérale viable à long terme. Il doit être applicable à cinq accords existants 105 ainsi qu'à tous les accords d'accès aux marchés à venir.

104

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP) (RS 0.142.112.681).

105 Libre circulation des personnes, transport aérien, transport des marchandises et de voyageurs par rail et par route, produits agricoles et ARM.

1949

FF 2020

Le projet d'accord institutionnel prévoit un cadre uniforme pour la mise à jour des accords concernés pour ce qui est de la reprise ou de l'harmonisation avec le droit de l'UE. À cet égard, la Suisse a veillé à ce qu'il soit dûment tenu compte, comme c'était le cas jusqu'à présent, des procédures constitutionnelles liées à la démocratie directe. L'accord institutionnel prévoit en outre un mécanisme de règlement des différends uniforme pour les accords concernés. Les éventuelles mesures de compensation peuvent elles aussi être examinées sous l'angle de leur proportionnalité, ce qui améliorerait la sécurité juridique s'agissant de la participation au marché intérieur européen.

En plus des questions institutionnelles, l'accord établit certains principes s'agissant des aides d'État. Dans le marché intérieur européen, le droit des aides d'État est devenu un instrument important pour garantir que toutes les entreprises bénéficient des mêmes conditions de concurrence. Il ne porte pas uniquement sur les subventions financières directes, mais également sur les allégements fiscaux et d'autres avantages pécuniaires tels que les garanties et les cautionnements. Le droit suisse ne prévoit pas de surveillance aussi stricte des aides d'État et des éventuelles distorsions de la concurrence que le droit de l'UE. Dans les négociations de l'accord institutionnel, l'UE a par conséquent attaché une grande importance à la fixation de principes juridiques définissant l'admissibilité des aides publiques. Dans un premier temps, ces principes ne sont applicables qu'à l'accord sur le transport aérien106. Sur la base de ces principes, des règles matérielles contraignantes concernant les aides seront négociées pour les futurs accords d'accès au marché qui tomberont sous le coup de l'accord institutionnel. La Suisse et l'UE demeureront compétentes pour veiller, sur leur propre territoire, à la bonne application des règles en matière d'aides d'État.

Après d'intenses consultations avec les principaux milieux concernés en Suisse, le Conseil fédéral a décidé le 7 juin 2019 de procéder à la clarification de trois points du projet d'accord. Ces clarifications concernent, premièrement, la garantie que la réglementation relative aux aides d'État n'aura pas de conséquences horizontales, en particulier pour ce qui est de l'accord de
libre-échange avant sa mise à jour; deuxièmement, la directive sur la libre circulation des citoyens de l'UE 107, et, troisièmement, la protection salariale dans le cadre du détachement de travailleurs. Désireux de mettre toutes les chances de son côté pour parvenir à un accord avec l'UE tout en s'assurant un large soutien en Suisse, le Conseil fédéral a étroitement associé les partenaires sociaux et les cantons au processus politique108.

La Suisse n'a plus conclu avec l'UE d'accord d'accès au marché depuis 2004.

L'adaptation des accords existants a été en partie bloquée, ce qui accroît le risque de perte de compétitivité pour les entreprises suisses. Ceci à la fois face à leurs concur106

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport aérien (RS 0.748.127.192.68) 107 Directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n o1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, JO L 158 du 30.4.2004, p. 77.

108 www.dfae.admin.ch > DAE > Négociations et thèmes ouverts > Accord institutionnel.

1950

FF 2020

rents européens, qui bénéficient de leur intégration progressive au marché intérieur de l'UE (p. ex. dans le domaine des services et de la numérisation), mais également face à des concurrents hors UE, puisque cette dernière a conclu ces dernières années toute une série d'ALE de large portée avec des pays tiers.

Pour toutes les raisons évoquées, le Conseil fédéral juge important que l'accord institutionnel sécurise les accords qui unissent la Suisse et l'UE et un large accès au marché, qu'il apporte une sécurité juridique aux entreprises et aux investisseurs, et qu'il permette d'envisager la conclusion d'autres accords d'accès aux marchés avec notre principal partenaire commercial.

3.1.3

Reconnaissance de l'équivalence de la réglementation boursière suisse

La Commission européenne conditionne la reconnaissance illimitée de l'équivalence boursière (selon l'art. 23 du règlement concernant les marchés d'instruments financiers109) à la conclusion de l'accord institutionnel. Elle n'a pas reconduit la reconnaissance, accordée provisoirement pour une année en juin 2018, à la suite de quoi le Département fédéral des finances (DFF) a activé la mesure prévue par le Conseil fédéral pour protéger l'infrastructure boursière suisse le 1 er juillet 2019. L'ordonnance correspondante110 prévoit une obligation, pour les plateformes de négociation étrangères, d'obtenir une reconnaissance lorsque ces plateformes autorisent la négociation d'actions de sociétés suisses. Depuis le 1er juillet 2019, il est interdit aux bourses de l'UE de proposer ou de permettre le négoce de certaines actions de sociétés suisses. Cela a permis jusqu'à présent d'éviter les effets négatifs de la nonprolongation de l'équivalence boursière pour la place financière suisse.

3.1.4

Libre circulation des personnes

L'ALCP permet aux entreprises suisses de recruter simplement et avec beaucoup de souplesse du personnel qualifié à l'étranger pour faire face à la pénurie structurelle de main-d'oeuvre qualifiée en Suisse. Cette possibilité s'est révélée être un important avantage comparatif en particulier du fait de l'évolution de la demande sur le marché du travail qui, dans le sillage de la numérisation, requiert de nouveaux profils (cf. ch. 1.3). L'ALCP a soutenu la croissance économique remarquable de ces dernières années ainsi que l'augmentation de la prospérité pour la population suisse.

L'immigration nette en provenance des États de l'UE et de l'AELE, qui s'est élevée à 31 200 personnes en 2018, est donc restée relativement faible par rapport à la moyenne pluriannuelle. L'immigration liée à la libre circulation des personnes a contribué à ralentir le vieillissement démographique, puisque ce sont principalement 109

Règlement (UE) no 600/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et modifiant le règlement (UE) no 648/2012, JO L 173 du 12.6.2014, p. 84.

110 Ordonnance du 30 novembre 2018 concernant la reconnaissance de plates-formes étrangères pour la négociation de titres de participation de sociétés ayant leur siège en Suisse; RS 958.2.

1951

FF 2020

les personnes en âge de travailler qui s'installent en Suisse. Mais l'augmentation de l'immigration comme conséquence de la bonne situation économique de la Suisse s'accompagne aussi de craintes, comme celles d'effets d'éviction et de baisse des salaires. Néanmoins, bon nombre d'études menées ces dernières années ont montré que ce type de conséquences n'a été observé que pour certains groupes de personnes et certaines régions. Le rapport de l'Observatoire sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et l'UE réalisé cette année et qui couvre les évolutions jusqu'en 2018, parvient à la même conclusion111, à savoir que l'immigration de ces dernières années n'a pas eu de conséquences négatives notables sur le taux d'activité de la population indigène, le chômage, les assurances sociales ou le niveau des salaires.

Les mesures ciblées mises en place par le Conseil fédéral en vue de soutenir la population indigène et les éventuels groupes de personnes ou régions touchés ont permis de surmonter cette mutation structurelle. Les mesures d'accompagnement visant la protection contre les abus en matière de conditions salariales et de conditions de travail ont porté leurs fruits112. Par ailleurs, durant l'année sous revue, le Conseil fédéral a recueilli d'autres retours positifs avec l'obligation d'annoncer les postes vacants mise en place en 2018. La Suisse s'est ainsi dotée d'un instrument promouvant la réintégration de personnes sur le marché du travail. Dans le cadre de sa politique en matière de personnel qualifié113, le Conseil fédéral s'attache en outre à encore mieux exploiter le potentiel de main-d'oeuvre indigène. Il a par ailleurs adopté un train de mesures supplémentaires114 durant l'année sous revue. Ces mesures visent entre autres à assurer la compétitivité des actifs seniors et à renforcer l'intégration au marché du travail des personnes difficiles à placer ainsi que des étrangers vivant en Suisse.

Étant donné l'importance de la libre circulation des personnes pour l'économie suisse et fort des bonnes expériences faites avec les mesures susmentionnées, le Conseil fédéral a recommandé de rejeter l'initiative populaire «Pour une immigration modérée (initiative de limitation)» dans le message qu'il a adopté le 7 juin115.

111 112 113 114 115

www.seco.admin.ch > Travail > Libre circulation des personnes et Relations du travail > L'Observatoire sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et l'UE > Rapports.

Cf. communiqué du 23 mai 2019 «15 années de protection des salaires suisses».

www.seco.admin.ch > Travail > Politique en matière de personnel qualifié.

Cf. communiqué du 15 mai 2019 «Le Conseil fédéral renforce l'encouragement du potentiel de main-d'oeuvre indigène».

FF 2019 4807; cf. communiqué du 7 juin 2019 «Le Conseil fédéral dit non à l'initiative de limitation».

1952

FF 2020

3.2

Contribution suisse à des États membres de l'UE

Depuis 2007, la Suisse soutient des projets dans 13 États membres de l'UE116 à hauteur de 1,302 milliard de CHF. Elle contribue ainsi à réduire les inégalités économiques et sociales au sein de l'UE élargie tout en renforçant les relations bilatérales. De surcroît et à long terme, la Suisse gagne à ce que l'Europe soit sûre et stable et à ce que les inégalités économiques et sociales soient aussi faibles que possible. Dans les États qui ont accédé à l'UE en 2004, tous les projets ont été menés à terme au plus tard en 2017. Le 7 décembre, la Bulgarie et la Roumanie ont achevé, après dix ans, les projets réalisés au titre de la contribution suisse à l'élargissement, tandis qu'en Croatie, les projets courent jusqu'en 2024.

Durant l'année sous revue, le Parlement a donné son accord de principe à une nouvelle contribution à certains États membres de l'UE. À l'instar de la contribution à l'élargissement, la deuxième contribution de la Suisse doit aussi s'élever à 1,302 milliard CHF sur dix ans. À travers cette nouvelle contribution, la Suisse entend notamment soutenir les États membres de l'UE qui sont particulièrement affectés par les flux migratoires. Le Parlement a toutefois aussi décidé qu'aucun engagement ne serait pris si l'UE édicte ou maintienne des mesures discriminatoires à l'encontre de la Suisse.

3.3

Brexit

Le Royaume-Uni est un important partenaire commercial de la Suisse: en 2018, il était le sixième marché de débouchés pour les exportations de produits suisses, qui, cette année-là, se sont élevées à 8,8 milliards CHF.

Les relations entre la Suisse et le Royaume-Uni se fondent principalement sur les accords bilatéraux entre la Suisse et l'UE. En cas de retrait du Royaume-Uni de l'UE et, partant, du marché intérieur, après une période transitoire, les accords bilatéraux ne seraient plus applicables entre la Suisse et le Royaume-Uni.

Dans le contexte de la stratégie «Mind the gap» adoptée par le Conseil fédéral en 2016, la Suisse et le Royaume-Uni ont signé une série d'accords durant l'année sous revue: un accord sur les assurances (25 janvier), un accord sur les transports routiers (25 janvier), un accord commercial (11 février), un accord sur les droits des citoyens (25 février), un accord temporaire sur l'accès mutuel au marché du travail (10 juillet) et un accord temporaire sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (31 octobre). Ils avaient par ailleurs déjà signé un accord sur le transport aérien le 17 décembre 2018. Ces accords entreront en vigueur dès que les accords bilatéraux Suisse-UE ne seront plus valables pour le Royaume-Uni. Les deux accords temporaires deviendraient applicables uniquement en cas de sortie désordonnée du Royaume-Uni. L'accord commercial et l'accord touchant à la migration doivent encore être approuvés par le Parlement. Si le Royaume-Uni devait quitter l'UE sans être parvenu à un accord («no-deal») avant l'approbation par le Parlement, les deux 116

Bulgarie, Chypre, Croatie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque, Roumanie, Slovaquie et Slovénie.

1953

FF 2020

accords en question seraient appliqués à titre provisoire. Le Conseil fédéral a adopté le 6 décembre 2019 un message concernant l'accord sur les droits des citoyens.

L'accord sur les droits des citoyens, conclu entre la Suisse et le Royaume-Uni, permet de préserver les droits et les obligations acquis par leurs ressortissants et garantit la sécurité juridique aux acteurs économiques ainsi qu'aux ressortissants séjournant dans l'un des deux pays. L'accord sur l'accès mutuel au marché du travail permet de déroger temporairement à certaines conditions d'autorisation prescrites par la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI)117, ce qui permet de tenir compte des intérêts de l'économie suisse tout en respectant les dispositions de l'art. 121a Cst. L'accord sur la coordination des systèmes de sécurité sociale préserve quant à lui entre la Suisse et l'UE les règles correspondantes de l'accord Suisse-UE sur la libre circulation des personnes.

L'accord commercial avec le Royaume-Uni (ch. 9.2.2) prévoit de maintenir pour l'essentiel les droits et obligations convenus au titre des accords avec l'UE dans les domaines économique et commercial (entre autres ceux découlant de l'accord de libre-échange118 et de l'accord relatif aux marchés publics119). Certains des accords entre la Suisse et l'UE couverts par l'accord commercial reposent sur l'harmonisation ou la reconnaissance mutuelle des prescriptions pertinentes par la Suisse et l'UE et ne peuvent pas être repris en bloc sans convention spécifique entre le Royaume-Uni et l'UE (c'est notamment le cas de l'accord de 2009 sur la facilitation et la sécurité douanières, de certaines sections de l'accord agricole ­ dont l'annexe sur l'accord vétérinaire ­ et de certaines sections de l'accord sur les entraves techniques au commerce). L'application des clauses des accords en question peut, selon l'évolution des relations entre le Royaume-Uni et l'UE, être décidée par le comité mixte compétent.

L'accord commercial prévoit des entretiens exploratoires pour développer les relations commerciales, entretiens qui, comme dans d'autres domaines, ont été lancés durant l'année sous revue. En plus de la conservation des acquis, l'éventualité d'une intensification de la collaboration avec le Royaume-Uni a gagné en importance par rapport au statu quo (dans le cadre de la stratégie «Mind the gap») durant l'année sous revue.

117 118 119

RS 142.20 RS 0.632.401 RS 0.172.052.68

1954

FF 2020

4

Organisations internationales

4.1

Organisation mondiale du commerce (OMC)

4.1.1

Réforme de l'OMC et préservation du mécanisme de règlement des différends

Depuis 2018, plusieurs initiatives de réforme ont été lancées à l'OMC, qui s'inscrivent dans le contexte des difficultés auxquelles le système commercial multilatéral est actuellement confronté120. Membre du Groupe d'Ottawa121, réuni sous l'égide du Canada, la Suisse s'est engagée pour l'élaboration de propositions de réforme.

L'objectif de faire évoluer l'OMC a recueilli une large adhésion politique durant l'année sous revue, que ce soit lors des rencontres ministérielles informelles de l'OMC organisées à Davos, Paris et Shanghai ou lors du sommet des chefs d'État ou de gouvernement du G20 à Osaka122.

Les positions restant figées en ce qui concerne les tensions entre les États-Unis et la Chine et compte tenu de l'attitude critique de pays en développement à l'égard de la poursuite de la libéralisation, aucune percée n'est attendue lors de la douzième Conférence ministérielle ordinaire, qui se tiendra en juin 2020 à Noursoultan, au Kazakhstan. Des progrès sont attendus dans le domaine des subventions à la pêche, en vue de réduire la surpêche dans les mers du globe conformément aux objectifs de développement durable (ODD) de l'ONU. Dans le secteur agricole également, nombre d'États membres de l'OMC souhaitent un aboutissement des négociations.

Les États-Unis bloquant la nomination de nouveaux juges, l'Organe d'appel du mécanisme de règlement des différends de l'OMC n'est plus en mesure de délibérer valablement depuis décembre. Les jugements rendus en première instance dans le cadre du mécanisme de règlement des différends, qui continue à appliquer le droit de l'OMC et est très sollicité par les États membres, ne peuvent donc désormais plus être examinés. Les discussions relatives à la recherche de solutions à ce blocage se poursuivront dans les mois à venir. Des solutions intérimaires ont en outre été initiées par certains membres afin de pallier les effets négatifs d'un organe d'appel hors d'état de fonctionner ainsi que pour mettre en place une procédure d'appel par voie d'arbitrage pour les différends les opposant.

120 121

Cf. rapport sur la politique économique extérieure 2018.

En font partie l'Australie, le Brésil, le Canada, le Chili, la Corée du Sud, le Japon, le Kenya, le Mexique, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, Singapour, la Suisse et l'UE.

122 Déclaration d'Osaka des dirigeants du G20 (G20 Osaka Leader's Declaration) du 29 juin 2019.

1955

FF 2020

4.1.2

Négociations plurilatérales

Les négociations plurilatérales (conduites entre plusieurs États membres de l'OMC) ont connu une évolution réjouissante durant l'année sous revue. Annoncée en janvier en marge de la rencontre ministérielle informelle de l'OMC à Davos, l'ouverture de négociations formelles dans le domaine du commerce électronique a eu lieu en mai.

Au vu de l'ampleur du sujet et de sa complexité technique, un aboutissement rapide n'est toutefois guère probable123, d'autant que des positions divergentes se dessinent. Les négociations concernant la réglementation intérieure des services et la facilitation des investissements ont en revanche enregistré des avancées notables. La Suisse s'engage activement dans ces discussions. En matière de réglementation intérieure, elle milite pour l'instauration de règles claires afin d'accroître la sécurité juridique pour les prestataires de services. Des règles additionnelles dans ces domaines sont en préparation en vue de la conférence ministérielle de Noursoultan.

Le 25 septembre 2019, en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies, le Costa Rica, Fidji, l'Islande, la Norvège et la Nouvelle-Zélande ont annoncé leur intention de conclure un accord sur le changement climatique, le commerce et la durabilité (Agreement on Climate Change, Trade and Sustainability, ACCTS). Cette initiative, à laquelle la Suisse a adhéré, vise à contribuer à la réalisation des objectifs climatiques fixés dans l'Accord de Paris du 12 décembre 2015 sur le climat 124. Les négociations, qui devraient s'ouvrir en 2020, porteront sur les biens et services environnementaux, la suppression des subventions en faveur des combustibles fossiles et l'écoétiquetage.

4.1.3

Défense des intérêts commerciaux de la Suisse

Le 4 décembre 2018, le groupe spécial (panel) de l'OMC chargé du règlement du différend opposant la Suisse aux États-Unis concernant les droits de douane sur l'acier et l'aluminium a commencé ses travaux. La Suisse a demandé l'institution de ce groupe spécial au motif que les droits de douane américains frappant l'acier et l'aluminium pénalisaient les exportations suisses et que la justification qu'en donnaient les États-Unis ­ préserver la sécurité nationale ­ était contraire à leurs engagements découlant de l'Accord général du 30 octobre 1947 sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT)125. Six autres membres de l'OMC126 ont engagé des procédures similaires, auxquelles la Suisse a participé en tant que tierce partie durant l'année sous revue.

123 124 125 126

Cf. ch. 1.

RS 0.814.012 RS 0.632.21 Chine, Inde, Norvège, Russie, Turquie et UE.

1956

FF 2020

4.2

OCDE et G20

En novembre 2019, la Suisse a présidé pour la deuxième fois la réunion du Groupe de stratégie globale (GSG), un forum de haut niveau de l'OCDE rassemblant plus de 40 pays. Le thème du vieillissement de la population a été au coeur des discussions.

Les représentants des gouvernements des États membres de l'OCDE et d'autres États invités ont débattu des défis et opportunités liés à cette thématique. Les discussions ont mis en évidence le grand intérêt mais aussi les préoccupations des pays concernant ce thème et ses effets macroéconomique dans des domaines tels que la santé, la formation, les assurances sociales, la fiscalité et les finances publiques.

L'étude économique que l'OCDE a consacrée à la Suisse durant l'année sous revue examine, elle aussi, la question du vieillissement de la population. L'accent y est mis sur les enjeux liés aux systèmes de retraites et de santé.

La réunion ministérielle de l'OCDE a mené cette année des discussions sur les mesures à la disposition des pouvoirs publics pour maîtriser la transition numérique.

Les travaux préliminaires dans le cadre de l'initiative Going Digital ont pu être achevés. Il s'agit maintenant, dans un deuxième temps, d'élaborer des recommandations concrètes. Les ministres des États membres ont également adopté les Principes de l'OCDE sur l'intelligence artificielle, qui constituent le premier ensemble de principes intergouvernementaux sur la question.

En mars, la Suisse a présenté oralement un premier rapport suite à son examen par les pairs en 2018 dans le cadre de la convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption127. Alors que l'engagement de notre pays dans la lutte contre la corruption a été salué, l'OCDE a ciblé ses critiques sur l'absence d'une protection des lanceurs d'alertes dans le secteur privé, une absence déjà regrettée par le passé. La Suisse rendra un rapport écrit détaillé sur la mise en oeuvre des recommandations en 2020.

Lors du Sommet du G20 qui s'est tenu fin juin à Osaka, les chefs d'État ou de gouvernement se sont accordés sur une déclaration finale, malgré les tensions actuelles sur la scène internationale128. La Suisse a été invitée cette année encore à participer aux rencontres du volet financier (Finance Track) et du Groupe de travail anticorruption. Elle prend une part active aux discussions sur l'imposition
des entreprises internationales et l'économie numérique menées actuellement au sein de l'OCDE sur demande du G20 (cf. ch. 1.3.2).

Le Royaume d'Arabie Saoudite, qui a repris la présidence du G20 du Japon, a convié la Suisse, ainsi que la Jordanie et Singapour, en tant qu'Etat invité. En novembre 2020, cela sera la première fois que la Suisse pourra participer à l'ensemble des groupes de travail et des rencontres ministérielles et au sommet du G20.

127

Convention du 17 décembre 1997 sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales (RS 0.311.21).

128 www.g20.org > Documents and materials > Outcome documents > G20 Osaka Leader's Declaration.

1957

FF 2020

4.3

Organisation internationale du travail (OIT)

L'année sous revue a été marquée par le centième anniversaire de l'Organisation internationale du travail (OIT). À cette occasion, l'OIT a lancé une initiative sur l'avenir du travail, qui a débouché sur un rapport établi par la Commission mondiale sur l'avenir du travail129. La commission appelle les gouvernements à s'engager à répondre par des mesures concrètes aux profondes mutations qui affectent le monde du travail dans un contexte de numérisation croissante de l'économie (cf. ch. 1.3).

Elle a tracé les contours d'un programme d'action centré sur l'humain, dont les piliers sont l'investissement dans la formation et le potentiel humain, dans les institutions du travail et dans le travail décent et durable.

Les célébrations ont culminé lors de la session annuelle de la Conférence internationale du travail. La Suisse, État hôte et membre fondateur de l'OIT, a eu le grand honneur de présider cette session du centenaire. La présidence s'est achevée sur l'adoption de la Déclaration du centenaire pour l'avenir du travail et de la convention sur la violence et le harcèlement dans le monde du travail (convention no 190)130. La Déclaration du centenaire pour l'avenir du travail fixe les lignes directrices de l'action de l'OIT pour son deuxième siècle d'existence. Elle renforce en outre son mandat de promotion de la justice sociale.

La Suisse a saisi l'occasion de ce centième anniversaire pour renforcer le partenariat social, principalement par le biais de la mise en oeuvre continue de la Déclaration tripartite sur le futur du travail et du partenariat social en Suisse à l'ère de la numérisation de l'économie131. Elle a en outre organisé divers événements et activités afin de mieux faire connaître l'OIT et ses acquis à la population suisse.

129 130

www.ilo.org > Thèmes > Avenir du travail > Travailler pour bâtir un avenir meilleur.

www.ilo.org > Événements et réunions > Conférence internationale du travail > Sessions de la CIT > 108e session, 2019 > Commissions à l'ordre du jour > Commission normative: violence et harcèlement dans le monde du travail > Convention concernant l'élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail, 2019.

131 www.admin.ch > Documentation > Communiqués > Une déclaration sur le futur du travail et du partenariat social en Suisse.

1958

FF 2020

5

Accords économiques bilatéraux

5.1

Accords de libre-échange

La Suisse a poursuivi durant l'année sous revue l'élargissement de son réseau d'ALE.

Le 14 décembre 2016, le Conseil fédéral a donné mandat au DEFR de négocier un accord de libre-échange entre les Etats de l'AELE et ceux du Mercosur respectant un certain nombre d'objectifs, dont la promotion du développement durable. Dans ce cadre, les Etats de l'AELE et ceux du Mercosur ont conclu en substance les négociations d'un accord le 23 août 2019 à Buenos Aires. Le Conseil fédéral prendra vraisemblablement connaissance du contenu de l'accord durant le premier semestre 2020, le texte faisant l'objet d'un contrôle juridique. La date de la signature n'a pas encore été définie.

Le DEFR est d'avis que le projet d'accord remplit le mandat donné par le Conseil fédéral. Grâce à cet accord, environ 95 % des exportations suisses vers le cinquième plus grand marché du monde seront à moyen terme exonérés de droits de douane.

L'accord améliorera en outre l'accès au marché et la sécurité juridique pour les services, les investissements et les marchés publics. Il contient en outre des dispositions concernant le droit de la concurrence, la protection de la propriété intellectuelle, la réduction des obstacles non tarifaires, y compris en matière sanitaire et phytosanitaire, ainsi que le commerce et le développement durable. Les négociations ont abouti peu après celles que les États du Mercosur menaient avec l'UE depuis 20 ans. Vu les droits de douane élevés dans les États du Mercosur, les exportateurs suisses risquaient d'être fortement défavorisés en l'absence d'un accord.

Les concessions tarifaires octroyées par la Suisse pour les produits agricoles, qui revêtent un intérêt majeur pour les États du Mercosur, ont constitué une pierre d'achoppement lors des négociations. Selon le DEFR, grâce à des concessions tarifaires adaptées à la politique agricole suisse et définies en concertation avec les branches concernées, il a néanmoins été possible d'obtenir un bon résultat dans le domaine du commerce des marchandises. L'accord prévoit en outre des clauses de sauvegarde détaillées, qui autorisent des mesures correctives en cas d'importations d'une ampleur inattendue. La protection de la propriété intellectuelle a constitué un autre défi. Les dispositions relatives à la protection des brevets et des données d'essais, notamment,
ont fait l'objet de longues négociations. Dans ce domaine aussi la Suisse a, selon le Département en charge des négociations, obtenu des résultats satisfaisants par rapport à l'ALE entre l'UE et les États du Mercosur. Enfin, la Suisse a également atteint ses objectifs au chapitre commerce et développement durable. Elle est parvenue, avec les autres États de l'AELE, à obtenir l'intégration dans l'accord de dispositions concernant le respect des droits des travailleurs et la protection de l'environnement.

Conclu en décembre 2018, l'accord de partenariat économique avec l'Indonésie a été approuvé par le Parlement durant l'année sous revue. Les concessions accordées à l'Indonésie pour l'huile de palme ont été au coeur des discussions parlementaires.

Celle-ci doit avoir été produite de manière durable afin de pouvoir bénéficier des abaissements tarifaires dans le cadre des contingents négociés (cf. ch. 6.2).

1959

FF 2020

De nombreuses autres négociations sur de nouveaux ALE et l'actualisation d'ALE existants se sont poursuivies durant l'année sous revue (cf. ch. 9.1.2), de même que les entretiens exploratoires avec les États-Unis sur un possible ALE. De plus, la Suisse a mené des entretiens exploratoires avec d'autres partenaires, par exemple la Chine132 et le Japon133.

En ce qui concerne les accords en vigueur, le Conseil fédéral a commandé une analyse de l'utilisation, par les acteurs économiques, des préférences tarifaires prévues. À cet effet, des données douanières ont été échangées avec un grand nombre de pays partenaires durant l'année sous revue, qui ont ensuite été compilées dans une étude externe qui a montré de grandes différences entre les pays partenaires concernant l'utilisation des préférences. Ces données seront régulièrement échangées à l'avenir, ce qui permettra au Secrétariat d'État à l'économie (SECO) d'évaluer en continu l'utilisation des préférences.

Par ailleurs, plusieurs des comités mixtes créés dans le cadre d'ALE se sont réunis au cours de l'année sous revue (cf. ch. 9.1.3).

5.2

Accords de protection des investissements

Avec un stock d'investissements directs à l'étranger qui dépasse 1,467 milliards de CHF134, la Suisse compte parmi les dix plus grands exportateurs de capitaux du monde; elle est également un grand importateur de capitaux135. Il est donc dans l'intérêt de la Suisse de mettre en place et de maintenir des conditions-cadre propices aux investissements. Les accords bilatéraux de protection des investissements (API) y contribuent, en offrant aux investisseurs une sécurité juridique accrue et une protection contre les risques politiques, grâce aux garanties qu'ils contiennent et à leur mécanisme d'application136. Dans ce contexte, la Suisse ­ qui compte 111 API en vigueur ­ renouvelle progressivement son réseau d'accords par la conclusion de nouveaux API ou la révision d'API existants. Au cours de l'année sous revue, deux tours de négociations relatifs à la révision de l'API avec l'Indonésie ont eu lieu. Un projet de texte commun a pu être élaboré et les négociations sont avancées. Les négociations relatives à la révision de l'API avec la Slovaquie sont, quant à elles, avancées et les parties espèrent les clore prochainement. Un état des lieux de l'ensemble des négociations en cours est présenté au ch. 9.1.4.

132 133 134

135 136

Accord de libre-échange du 6 juillet 2013 entre la Confédération suisse et la République populaire de Chine (RS 0.946.292.492).

Accord de libre-échange et de partenariat économique du 19 février 2009 entre la Confédération suisse et le Japon (RS 0.946.294.632).

D'après les statistiques de la Banque nationale suisse (BNS) à fin 2017, cf. BNS, Investissements directs 2018, décembre 2019, www.snb.ch > FR > statistiques > rapports et communiqués de presse > investissements directs.

Le stock d'investissements directs étrangers en Suisse était de 1,296 milliards de CHF à fin 2018 (données BNS).

Cf. «Développements dans la protection des investissements internationaux et opportunité à saisir», ch. 1 du rapport du Conseil fédéral du 10 janvier 2018 sur la politique économique extérieure 2017 (FF 2018 791).

1960

FF 2020

Par ailleurs, un nouveau mandat de négociation a été approuvé par le Conseil fédéral en vue de la conclusion ou de la révision d'API avec l'Angola, la Bolivie, les Émirats arabes unis et l'Équateur.

5.3

Autres accords économiques

Durant l'année sous revue, la Suisse a également conclu un accord économique bilatéral avec la Turquie (ch. 9.2.3). L'échange de lettres règle l'utilisation, dans le cadre du Système généralisé de préférences (SGP), d'intrants d'origine turque ou suisse lors d'une transformation. Le SGP permet l'importation à taux réduits ou en franchise douanière des marchandises originaires des pays en développement.

5.4

Commissions économiques mixtes

Afin de renforcer les relations économiques bilatérales de la Suisse en dehors des processus de libre-échange, diverses missions et réunions économiques ont eu lieu au cours de l'année sous revue dans le cadre de commissions économiques mixtes (cf. ch. 9.1.5). Ces dialogues sont un instrument important pour la sauvegarde des intérêts économiques extérieurs de la Suisse grâce à un échange permanent avec ses principaux pays partenaires.

6

Durabilité et responsabilité sociétale des entreprises

6.1

Mise en oeuvre de l'Agenda 2030

L'Agenda 2030 est le cadre de référence mondial pour le développement durable et sert de repère à la politique suisse en la matière. Il réunit les efforts nationaux et internationaux visant à trouver des solutions communes aux grands défis tels que la consommation des ressources ou le changement climatique137. Il est essentiellement constitué des 17 objectifs de développement durable (ODD). Un état des lieux de la mise en oeuvre de ce programme par la Suisse a été présenté à l'Organisation des Nations Unies (ONU) en 2018 sous la forme d'un rapport national138.

137 138

www.dfae.admin.ch > Agenda 2030 > 17 objectifs de développement durable.

www.seco.admin.ch > Le SECO > Communiqués de presse > La Confédération renforce la mise en oeuvre de l'Agenda 2030 pour le développement durable.

1961

FF 2020

6.1.1

Mise en oeuvre en Suisse

Le Conseil fédéral accorde une grande importance à l'Agenda 2030. Pour l'intégration de l'Agenda 2030 au sein de l'administration fédérale et par voie de conséquence sa mise en oeuvre, le Conseil fédéral a décidé au cours de l'année sous revue de mettre en place une nouvelle structure organisationnelle: il a tout d'abord institué un comité directeur Agenda 2030 dans lequel les offices principalement concernés sont représentés au niveau de la direction. Ce comité est chargé d'assurer le pilotage stratégique et de coordonner les travaux de mise en oeuvre. Précisément, ses tâches incluent le suivi des ODD en Suisse, l'élaboration du rapport national à remettre à l'ONU, l'attribution de priorités entre les principaux défis et chances qui se présentent à la Suisse, la fixation d'objectifs nationaux, la définition de mesures appropriées et la collaboration avec les cantons, les communes et les acteurs non étatiques.

Deux délégués à l'Agenda 2030 assurent la direction opérationnelle en se relayant sur un cycle de deux ans, l'un du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC), l'autre du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Outre leurs activités de coordination, les délégués remettront chaque année au Conseil fédéral un rapport sur la mise en oeuvre de l'Agenda 2030; ils le feront pour la première fois en 2020.

La tâche principale du comité directeur et des délégués a été de préparer les nouvelles orientations et priorités de la Stratégie pour le développement durable 2030.

Celle-ci se concrétisera par un plan d'action quadriennal, à faire approuver par le Conseil fédéral en 2020, en même temps que la stratégie. Le cycle suivant de deux ans sera consacré à la préparation du rapport national suisse qui sera présenté à l'ONU en 2022.

6.1.2

Forum politique de haut niveau des Nations Unies pour le développement durable 2019

Le Forum politique de haut niveau pour le développement durable 2019 a permis d'examiner et d'évaluer la mise en oeuvre de l'Agenda 2030. Cette année, la Suisse a participé activement à la revue de l'ODD 8 «Promouvoir une croissance économique soutenue, partagée et durable, le plein emploi productif et un travail décent pour tous». Elle a mis en avant ses activités au niveau national en faveur d'une augmentation de la productivité et du taux de participation au sein du marché du travail. Elle a également fait part de ses actions pour améliorer l'efficience de l'utilisation des ressources mondiales et pour promouvoir l'emploi décent, à travers sa coopération internationale. Un point fort du forum a été la remise de la Déclaration du centenaire de l'OIT pour l'avenir du travail au Secrétaire général de l'ONU par la Suisse, qui a présidé la Conférence internationale du travail 2019.

1962

FF 2020

6.2

Dispositions relatives au développement durable dans les accords de libre-échange

6.2.1

Accord de partenariat économique AELE-Indonésie

L'accord de partenariat économique de large portée (CEPA) entre l'AELE et l'Indonésie (cf. ch. 5.1), qui a été approuvé pendant l'année sous revue, illustre comment la Suisse améliore la cohérence entre les objectifs et mesures de la politique économique, ceux de la politique de développement et ceux de la politique de protection de l'environnement. Il offre aux entreprises des parties un meilleur accès aux marchés tout en contribuant aux objectifs de la politique de développement de la Suisse (cf. ch. 7), aux objectifs politiques et économiques de l'Indonésie et aux ODD de l'Agenda 2030 (cf. ch. 6.2.4). Pour garantir que l'huile de palme importée soit issue d'une production durable, des dispositions sont édictées sous la forme d'une ordonnance du DEFR. Elles listent des standards pour l'huile de palme qui remplissent les conditions prévues par les dispositions du CEPA relatives au développement durable.

La Suisse soutient les efforts déployés par l'Indonésie pour réformer les conditionscadre applicables aux échanges commerciaux. Elle promeut un commerce respectueux des normes économiques, sociales et écologiques. Dans le cadre du Programme suisse pour la promotion des importations (SIPPO), par exemple, elle renforce les capacités des organisations de promotion des exportations en matière de stratégie d'exportation, de gestion des connaissances ou de réseautage international dans le but d'accroître la capacité d'exportation des producteurs locaux. L'intégration des petits producteurs de cacao et d'huile de palme dans des chaînes de valeur respectueuses de l'environnement favorise un développement durable de l'industrie agricole.

Par ailleurs, la Suisse est, avec les Pays-Bas, le Danemark et la Norvège, l'un des principaux acteurs de la Sustainable Trade Initiative (IDH,) qui a son siège à Utrecht (Pays-Bas). Dans le cadre de son engagement en faveur de cette initiative lancée en 2008, la Suisse soutient la coopération public-privé en vue d'intensifier et d'accélérer la production durable de biens comme le café, le cacao, le coton, le soja et l'huile de palme. S'agissant de ce dernier produit, l'IDH vise trois objectifs en Indonésie: 1) augmenter sensiblement la production d'huile de palme certifiée selon des critères de durabilité, 2) améliorer la traçabilité dans ce secteur d'activité et 3) assurer un revenu plus élevé aux petits producteurs.

6.2.2

Accord de libre-échange AELE-Mercosur

L'ALE conclu pendant l'année sous revue entre les Etats de l'AELE et du Mercosur prévoit des dispositions complètes en matière de commerce et développement durable qui renvoient aux engagements des parties au titre de l'Agenda 2030. Ces dispositions portent entre autres sur la gestion durable des ressources forestières, la biodiversité et le rapport entre commerce et changement climatique. Il est également prévu de mettre en place un dialogue sur une filière agroalimentaire durable.

1963

FF 2020

Cet ALE a fait l'objet d'une étude d'impact environnemental ciblée, commandée par le SECO avec le concours de l'Office fédéral de l'environnement en application de la mesure 7 du rapport Économie verte à l'attention du Conseil fédéral. Cette étude visait à évaluer les conséquences environnementales possibles, en Suisse et dans les pays du Mercosur, d'un ALE entre les États de l'AELE et ceux du Mercosur.

6.2.3

Derniers développements concernant la durabilité dans les accords de libre-échange

Les travaux de révision du chapitre modèle de l'AELE sur le commerce et le développement durable ont été achevés pendant l'année sous revue. Depuis 2010, les dispositions du chapitre modèle constituent la position initiale de l'AELE dans toutes les négociations de libre-échange. Le nouveau chapitre modèle contient une référence explicite aux objectifs fixés dans l'Agenda 2030 et l'Agenda de l'OIT pour le travail décent. Il inclut aussi des dispositions régissant le rapport entre commerce et changement climatique ainsi qu'entre commerce et biodiversité, la promotion de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et l'égalité hommes-femmes. La Suisse a également convaincu ses partenaires de renforcer le mécanisme de mise en oeuvre. En cas de divergence de vues sur l'application des dispositions relatives au développement durable, les ALE conclus jusqu'ici prévoient des consultations entre les parties. Pour renforcer autant que possible le système de règlement des différends, le nouveau chapitre modèle prévoit la possibilité d'instituer un groupe spécial d'experts indépendants, qui peut formuler un avis et des recommandations en vue de résoudre le problème. Les conclusions du groupe spécial sont publiées et leur mise en oeuvre est placée sous la surveillance du comité mixte de l'accord.

Le 18 septembre, le Conseil fédéral a adopté le postulat 19.3011 de la Commission de gestion du Conseil national concernant la recherche d'une méthode pour l'évaluation des impacts des ALE sur le développement durable. Le Conseil fédéral dispose d'un délai de deux ans pour répondre à ce postulat.

6.2.4

Mémorandums d'entente sur la coopération en matière de travail et d'emploi (dialogues sur le travail)

La Suisse mène, avec la Chine, le Myanmar et le Vietnam, diverses activités en matière de travail et d'emploi sur la base de mémorandums d'entente. Ceux-ci institutionnalisent un dialogue régulier de haut niveau entre les autorités du marché du travail et les partenaires sociaux de chacune des parties. Ils correspondent à la stratégie d'engagement de la Suisse à l'OIT et contribuent à la mise en oeuvre des aspects sociaux du chapitre «Commerce et développement durable» des ALE conclus par la Suisse. Cet échange institutionnalisé bénéficie aux projets en matière de travail et d'emploi qui sont menés dans les pays susmentionnés au titre de la coopération économique au développement. Dans ce domaine, la Suisse finance notamment deux projets de l'OIT: Better Work, en partenariat avec la Société finan1964

FF 2020

cière internationale (SFI), et Sustaining Competitive and Responsible Enterprises (SCORE). Au cours de l'année sous revue, un troisième dialogue tripartite de haut rang sur le travail a été mené avec les autorités chinoises compétentes, à savoir le Ministère de l'emploi et de la protection sociale et le Ministère de la gestion des risques et des urgences. Il est à noter enfin que la Suisse a conclu, en marge du CEPA (cf. ch. 6.2.1), un mémorandum d'entente similaire avec l'Indonésie. Un premier dialogue bilatéral sur le travail et l'emploi est prévu en 2020.

6.3

Durabilité et développement économique

Les ODD constituent le cadre de référence du message du 17 février 2016 sur la coopération internationale 2017­2020139 (cf. ch. 7). Les travaux préparatoires du message sur la stratégie de coopération internationale 2021­2024 prennent appui sur les expériences accumulées et sur une évaluation de la viabilité de projets de coopération économique au développement. Cette approche permet d'améliorer en permanence la cohérence politique entre les aspects économiques, migratoires, climatiques et environnementaux.

La Suisse s'engage en faveur d'un développement sociétal durable dans ses pays partenaires, ce qui contribue par ricochet à sa sécurité, à sa prospérité et à son indépendance.

Dans la coopération économique au développement, la Suisse veille par ailleurs à ce que ses partenaires du secteur privé respectent les normes en faveur d'un développement sociétal durable. Ainsi, lorsqu'elle collabore avec le secteur privé, elle exige l'application des Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales et le respect des Principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme.

6.4

Responsabilité sociétale des entreprises

Durant l'année sous revue, la Confédération a continué d'oeuvrer concrètement pour que la RSE soit adoptée et appliquée par le plus grand nombre. Les entreprises suisses qui misent sur la RSE apportent une importante contribution au développement durable et concourent à relever des défis de société.

6.4.1

Diligence raisonnable des entreprises

Conjointement avec des associations économiques et des chambres de commerce, l'administration fédérale a organisé, pendant l'année sous revue, dans toute la Suisse, une vingtaine de formations sur le thème «économie et droits de l'homme».

Ces formations ont accordé une place de choix à la mise en oeuvre du Guide OCDE 139

FF 2016 2179

1965

FF 2020

sur le devoir de diligence pour une conduite responsable des entreprises, qui s'adresse aux entreprises de plusieurs secteurs, et des Principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. La Confédération a publié une brochure sur les procédures de diligence des PME suisses en matière de droits de l'homme140. En partenariat avec le réseau suisse du Pacte mondial des Nations Unies141, le «Tour de Suisse pour une économie responsable 2018­2022», lancé en 2018, s'est poursuivi pendant l'année sous revue: des événements ont été organisés dans différentes régions de Suisse. De plus, la Confédération a associé plus étroitement et plus systématiquement les représentations de la Suisse à l'étranger à ses campagnes de sensibilisation à la RSE. S'agissant du secteur des matières premières, des représentants de la Confédération ont oeuvré, lors de formations en Suisse et d'événements nationaux ou internationaux, à faire connaître le guide publié en 2018 à l'intention du secteur des matières premières142 en vue de mettre en oeuvre les Principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme.

L'initiative populaire fédérale «Entreprises responsables ­ pour protéger l'être humain et l'environnement» a pour but de contraindre légalement les entreprises à appliquer une diligence raisonnable. Elle exige en outre des dispositions correspondantes en matière de responsabilité des sociétés. Dans son message du 15 septembre 2017 relatif à l'initiative populaire143, le Conseil fédéral reconnaît la nécessité d'agir dans les domaines des droits de l'homme et de l'environnement pour ce qui est des activités des entreprises suisses à l'étranger, et mise, à cette fin, sur l'application systématique des divers instruments existants. Le Parlement a délibéré sur cet objet au cours de l'année sous revue. Le 14 août 2019, le Conseil fédéral a décidé de soutenir, dans le cadre des débats parlementaires, le contre-projet indirect qui prévoit une obligation de rendre compte du respect des droits de l'homme et de la protection de l'environnement conformément aux règles en vigueur dans l'UE. Les règles en matière de responsabilité ne doivent toutefois pas aller au-delà du droit en vigueur afin de ne pas pénaliser exagérément la place économique suisse144. L'opportunité d'instaurer un
devoir de diligence concernant le travail des enfants et les minéraux «du sang» sera par ailleurs examinée. Le 18 décembre, le Conseil des Etats, après le Conseil national, s'est également prononcé en faveur d'un contre-projet. Selon l'avis du Conseil des Etats, ce contre-projet indirecte doit prévoir l'introduction d'une obligation de rendre compte du respect des droits de l'homme et de la protection de l'environnement ainsi que d'un devoir de diligence concernant les minéraux du sang et le travail des enfants. Le dossier a donc été renvoyé afin d'éliminer les divergences au Conseil national qui jusqu'à présent s'est prononcé en faveur d'un contreprojet prévoyant un devoir de diligence et une responsabilité des entreprises.

140 141 142

www.nap-bhr.admin.ch www.globalcompact.ch www.seco.admin.ch > Économie extérieure et Coopération économique > Matières premières.

143 FF 2017 5999 144 www.admin.ch > Documentation > Communiqués > Les entreprises suisses appelées à rendre compte du respect des droits humains et des normes environnementales.

1966

FF 2020

6.4.2

Actualisation des plans d'action

Début 2020, le Conseil fédéral rendra compte de la mise en oeuvre du plan d'action RSE 2017­2019 et décidé de poursuivre le plan d'action pendant la période 2020­2023145. En application du nouveau plan d'action, la Confédération se concentrera encore davantage sur la promotion de la mise en oeuvre pratique des instruments de RSE tant nationaux qu'internationaux. Elle encourage en outre l'alignement des instruments de RSE du secteur privé sur les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales. Elle s'engage par ailleurs pour une plus grande transparence en ce qui concerne les mesures de RSE appliquées par les entreprises, et examine les opportunités et les risques liés à la numérisation et à la RSE. En tant que membre de l'OCDE, la Suisse est tenue de vérifier régulièrement l'application des instruments de l'OCDE sur le devoir de diligence.

En même temps que le plan d'action RSE, le Conseil fédéral a approuvé au début de l'année 2020 le plan d'action national (PAN) en faveur des entreprises et des droits de l'homme146 pour les années 2020 à 2023. L'actualisation du PAN s'est appuyée sur une étude externe contenant un état des lieux de la mise en oeuvre du PAN 2016­ 2019 et des recommandations en la matière147. Le PAN révisé compte plus de 30 mesures concernant le respect des droits de l'homme par la Confédération et le secteur privé. L'efficacité du PAN sera dorénavant mesurée au moyen d'indicateurs.

Les représentants de groupes d'intérêts externes (entreprises, associations économiques, syndicats, organisations non gouvernementales, milieux scientifiques, etc.)

ont été associés aux travaux d'actualisation du plan d'action RSE et du PAN en faveur des entreprises et des droits de l'homme.

Pendant l'année sous revue, la Confédération a poursuivi la mise en oeuvre des recommandations formulées par le Conseil fédéral dans la nouvelle évaluation de la situation dans le secteur suisse des matières premières 148, publiée en 2018. L'une de ces recommandations vise une plus grande transparence et un renforcement de la traçabilité en matière de respect des droits de l'homme dans le commerce de l'or.

Une analyse de l'importance de la branche du négoce de matières premières en Suisse a aussi été entamée, en collaboration avec l'Office fédéral de la statistique. Le Conseil fédéral a chargé l'administration de rédiger, d'ici à la fin de 2020, un rapport sur l'état de la mise en oeuvre des recommandations.

145 146 147

www.csr.admin.ch www.nap-bhr.admin.ch Cf. rapport «Bestandsaufnahme über die Umsetzung der UNO-Leitprinzipien für Wirtschaft und Menschenrechte durch den Bund und durch Schweizer Unternehmen», 31 juillet 2018; www.nap-bhr.admin.ch > Événements et documentation > Études.

148 www.seco.admin.ch > Économie extérieure et Coopération économique > Matières premières.

1967

FF 2020

6.4.3

Principes directeurs de l'OCDE et Point de contact national

Le Groupe de travail de l'OCDE sur la conduite responsable des entreprises a publié en octobre un nouveau guide sur le devoir de diligence applicable à l'octroi de crédits par les instituts financiers149. Le Point de contact national (PCN) pour les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales prévoit d'organiser, en 2020, une manifestation pour présenter ce nouveau guide en Suisse.

Pendant l'année sous revue, le PCN a reçu une demande d'examen concernant la Fédération internationale de hockey sur glace, qui a son siège en Suisse. Il a mené la procédure à terme et clos deux autres procédures ouvertes l'année précédente (Table ronde sur l'huile de palme durable et Crédit Suisse)150.

La commission consultative du PCN s'est penchée, entre autres, sur la mise en oeuvre du Guide OCDE sur le devoir de diligence pour une conduite responsable des entreprises et sur le développement de sa pratique en ce qui concerne la formulation de recommandations aux parties dans les déclarations finales relatives aux procédures.

7

Coopération économique au développement

La coopération économique au développement promeut l'intégration des pays en développement dans l'économie mondiale, favorise l'essor des marchés et la création de perspectives d'emploi décentes, et renforce la résilience économique des pays partenaires. La Suisse apporte ainsi une contribution importante à la réduction de la pauvreté et des inégalités, et à la mise en oeuvre de l'Agenda 2030 (cf. ch. 6.3).

Dans le même temps, elle concourt à élargir les débouchés commerciaux et les possibilités d'investissement des entreprises helvétiques.

La coopération internationale de la Suisse s'inscrit dans le programme de la législature 2019­2023 et la stratégie de politique étrangère de la Suisse 2020­2023. Elle est en adéquation avec la politique économique extérieure et la Stratégie pour le développement durable. Par ailleurs, la Suisse coordonne ses efforts avec ceux de la communauté internationale dans le cadre de l'Agenda 2030, de l'Accord de Paris sur le climat et du Programme d'action onusien d'Addis-Abeba. Ainsi, elle tire parti des interactions positives entre les différentes stratégies, limite le plus possible les conflits d'objectifs et, ce faisant, accroît la cohérence des politiques au service du développement durable. Sur ce dernier point, la Suisse s'est engagée au plan multilatéral, au sein du Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE, pour un renforcement des lignes directrices visant à accroître la cohérence des politiques au service du développement durable.

149

www.mneguideline.oecd.org > RBC-Financial Sectorwww.oecd.org > Investissement international > Principes directeurs pour les entreprises multinationales.

150 www.seco.admin.ch > Économie extérieure et Coopération économique > Point de contact national suisse > Publication des résultats.

1968

FF 2020

7.1

Message sur la stratégie de coopération internationale 2021­2024

Dans son message sur la stratégie de coopération internationale 2021­2024151, le Conseil fédéral définit l'orientation stratégique des activités menées par la Suisse au titre de l'aide humanitaire, de la coopération au développement, de la promotion de la paix et de la sécurité humaine pendant les années 2021 à 2024. Au cours de l'année sous revue, il a soumis le projet de message aux milieux intéressés dans le cadre d'une consultation facultative.

Le projet mis en consultation prévoit, pour les années 2021 à 2024, de mettre l'accent sur quatre thèmes et autant d'objectifs principaux, à savoir: contribuer à une croissance économique durable, à l'accès à de nouveaux marchés et à la création d'emplois; lutter contre le changement climatique et ses effets et gérer durablement les ressources naturelles; sauver des vies, fournir des services de base de qualité et diminuer les causes de la migration forcée et irrégulière; promouvoir la paix, l'Etat de droit et l'égalité des genres.

La focalisation géographique de la coopération bilatérale au développement assurée par le DFAE, les quatre accents thématiques, la coopération renforcée avec le secteur privé et l'utilisation de technologies numériques devraient contribuer à accroître encore l'efficacité de la coopération internationale.

La coopération économique au développement, qui relève du DEFR, se concentrera sur des pays situés dans les quatre régions prioritaires de la coopération bilatérale du développement du DFAE (Afrique du Nord et Moyen-Orient; Afrique subsaharienne; Asie centrale, Asie du Sud et Asie du Sud-Est; Europe de l'Est). Le DEFR continuera en outre de soutenir une sélection de pays prioritaires d'Amérique latine dans lesquels la Suisse a des intérêts économiques. Enfin, il convient de mentionner le lancement, pendant l'année sous revue, du partenariat GovTech avec la Banque mondiale, qui vise à accroître la transparence, la redevabilité (accountability) et l'efficience des administrations publiques, et à contribuer ainsi à améliorer les services publics et à combattre la corruption.

Cinq crédits-cadre, totalisant 11,37 milliards de CHF, sont prévus pour les années 2021 à 2024. Sur ce montant, environ 1,555 milliard de CHF est destiné à financer la coopération économique au développement du DEFR. Selon le rapport explicatif du 2 mai
2019 sur la coopération internationale 2021­2024, la part de l'aide publique au développement (APD) de la Suisse avoisinera 0,45 % du revenu national brut (RNB) pendant la période en question152.

151

www.admin.ch > Documentation > Communiqués > Le Conseil fédéral pose les jalons stratégiques pour le prochain message sur la coopération internationale (2021­2024).

152 www.ddc.admin.ch > Actualités > Dossiers > Consultation publique sur la coopération internationale 2021­2024.

1969

FF 2020

7.2

Coopération multilatérale

La Suisse est membre d'organisations internationales qui oeuvrent à promouvoir le développement durable et plus particulièrement à lutter contre la pauvreté. La Suisse s'engage en faveur d'un système multilatéral fort et participe à sa mise en place.

Pendant l'année sous revue, la Suisse a participé activement aux négociations visant à augmenter le capital de la Banque africaine de développement (BAfD); elle représentait les autres membres de son groupe de vote, à savoir l'Allemagne, le Luxembourg et le Portugal. Sachant que la pauvreté persiste, que les besoins d'infrastructures demeurent importants et que des défis complexes (changement climatique, catastrophes naturelles, déplacements forcés, pandémies, etc.) doivent être surmontés, les États membres de la BAfD ont décidé de relever le capital de la banque d'un montant total de 7 milliards d'USD, auquel s'ajoutent des garanties à hauteur de 108,9 milliards d'USD. La part de la Suisse comprend un apport de 99,7 millions d'USD (à verser entre 2021 et 2028) et une garantie de plus de 1 562 millions d'USD. Le Conseil fédéral présentera début 2020 au parlement un message sur la participation de la Suisse à l'augmentation de capital.

Par ailleurs, les négociations de la 19e reconstitution des ressources du fonds de développement du Groupe de la Banque mondiale (Association internationale de développement, AID) et de la 15e reconstitution des ressources du Fonds africain de développement (FAfD) se sont achevées pendant l'année sous revue. La lutte contre la pauvreté et la promotion d'une croissance durable et du développement humain sont au coeur de la recapitalisation de ces deux fonds, qui mettent l'accent sur les conséquences du changement climatique, les questions de gouvernance, la création d'emplois, le développement dans des contextes particulièrement fragiles et l'égalité hommes-femmes. La Suisse, qui partage ces priorités, s'est impliquée dans les négociations. Avec ses partenaires multilatéraux, nationaux et privés, elle oeuvre par ailleurs au sein du Fonds vert pour le climat, dont la première recapitalisation a été décidée à la fin d'octobre.

7.3

Fonds destinés à promouvoir l'investissement à impact social et la stabilité des marchés de capitaux

La coopération économique au développement est assurée avec le concours de partenaires privés et de partenaires publics. Elle tire parti des expériences, des connaissances spécifiques, des approches novatrices, des moyens qui lui sont alloués et des ressources de ses partenaires pour accroître l'efficacité des activités déployées.

Dans le cadre du programme SECO 17, par exemple, la Suisse a consacré des fonds au financement de l'assistance technique servant à promouvoir l'investissement à impact social (impact investing). À cet effet, elle a sélectionné des partenaires du secteur privé au terme d'une procédure d'appel à propositions et leur a octroyé des fonds de promotion destinés à l'assistance technique. Les projets ainsi financés apportent entre autres des solutions pour réduire les émissions de CO2 et créer des emplois. La Suisse contribue à minimiser les risques d'investissement et à mobiliser des capitaux supplémentaires en faveur des pays partenaires.

1970

FF 2020

Avec le concours de la Banque mondiale, la Suisse soutient le développement de marchés locaux de capitaux par le biais du programme Capital Markets Strengthening Facility. L'amélioration de l'accès des entreprises et des investisseurs aux capitaux doit permettre d'atténuer les risques de change et d'intérêt inhérents aux flux de capitaux étrangers, de favoriser la mobilisation de ressources nationales et, partant, de réduire la dépendance à l'égard des fonds de l'aide au développement.

7.4

Évaluation de l'efficacité de la coopération internationale 2017­2020

La coopération internationale de la Suisse a fait l'objet de deux évaluations pendant l'année sous revue: l'examen par les pairs de l'OCDE et le rapport intermédiaire sur la mise en oeuvre du message 2017­2020. La pertinence des activités, leur efficacité, leur efficience et leur viabilité ont notamment été passées au crible. Les évaluations permettent à la Suisse d'améliorer sans cesse ses activités et de maximiser l'effet des ressources engagées. Par ailleurs, elles sont utiles, par le biais de processus d'apprentissage institutionnel et propres aux projets, pour définir les contours futurs de la coopération internationale et de la redevabilité.

Pendant l'année sous revue, le Conseil fédéral a soumis au Parlement le rapport intermédiaire sur la coopération internationale 2017­2020153. Celui-ci montre que la Suisse a atteint la plupart des objectifs qu'elle s'est fixés pour renforcer les institutions et les services et créer davantage et de meilleurs emplois. Selon des évaluations externes consacrées à la promotion commerciale et à la compétitivité, la Suisse doit continuer d'intensifier son engagement afin que les produits durables déjà disponibles sur des marchés de niche conquièrent le marché de masse. Les mesures en faveur d'une économie respectueuse du climat ont été mises en oeuvre comme prévu dans le cadre de programmes et de projets globaux.

L'examen par les pairs de l'OCDE dresse un bilan positif de l'engagement de la Suisse: celle-ci tient efficacement compte de l'Agenda 2030 dans ses activités de coopération au développement et s'efforce, aux niveaux bilatéral et multilatéral, de répondre aux défis globaux comme le changement climatique. Les partenaires de la Suisse apprécient son expertise, sa fiabilité et sa souplesse. L'OCDE recommande à la Suisse de recentrer son engagement et de consacrer 0,5 % de son revenu national brut à l'aide publique au développement, ce qui correspond à la valeur cible fixée par le Parlement en 2011. Elle lui recommande en outre de veiller à ce que ses programmes de développement continuent de cibler la réduction de la pauvreté et le développement durable. Les constatations et conclusions de l'examen par les pairs ont été prises en compte dans le message sur la stratégie de coopération internationale 2021­2024.

153

www.eda.admin.ch > Actualités > Dossiers > Archives > Consultation publique sur la coopération internationale 2021­2024.

1971

FF 2020

8

Contrôles à l'exportation, sanctions et politique de la maîtrise des armements

8.1

Contrôles à l'exportation

Le 17 avril 2019, le Conseil fédéral a prolongé de quatre ans, jusqu'au 12 mai 2023, l'ordonnance du 13 mai 2015 sur l'exportation et le courtage de biens destinés à la surveillance d'Internet et des communications mobiles154. Cette ordonnance permet de refuser les permis d'exportation ou de courtage de tels biens s'il y a des raisons de supposer que ceux-ci seront utilisés comme moyens de répression. Fondée directement sur la Constitution, elle a une durée de validité limitée. En juin 2018, le Conseil fédéral a dès lors transmis au Parlement un message 155 concernant la modification de la loi du 13 décembre 1996 sur le contrôle des biens156.

8.2

Sanctions

Les ordonnances édictées en application de la loi du 22 mars 2002 sur les embargos157, qui instituent des sanctions à l'encontre d'un pays donné, sont actuellement au nombre de 23, sans compter l'ordonnance du 29 novembre 2002 sur les diamants158.

La consultation relative à la modification de la loi sur les embargos s'est conclue le 1er novembre. Cette modification vise à maintenir l'interdiction d'importation pour les armes à feu, les composantes et les munitions ainsi que d'autres biens depuis la Russie et l'Ukraine. Elle permet en outre au Conseil fédéral de ne plus avoir à recourir directement à la Constitution pour régler des cas comparables. Cette modification a été saluée par la majorité des parties consultées.

Par ailleurs, pendant l'année sous revue, l'ordonnance du 8 juin 2012 instituant des mesures à l'encontre de la Syrie159 et l'ordonnance du 18 mai 2016 instituant des mesures à l'encontre de la République populaire démocratique de Corée160 ont été complétées pour faciliter le travail humanitaire des pouvoirs publics et des acteurs privés. Les annexes des ordonnances sur les sanctions, qui recensent les personnes physiques ou morales visées par des sanctions, ont également subi de nombreuses modifications.

La Commission de gestion du Conseil des États (CdG-E) a clos, le 26 mars, son examen relatif à la participation de la Confédération à l'application de sanctions économiques. Selon elle, la politique suisse en matière de sanctions est claire et cohérente. Elle respecte les principes de politique étrangère et de politique économique extérieure de la Suisse. La CdG-E relève par contre des lacunes dans 154 155 156 157 158 159 160

RS 946.202.3 FF 2018 4637 RS 946.202 RS 946.231 RS 946.231.11 RS 946.231.172.7 RS 946.231.127.6

1972

FF 2020

l'exécution des sanctions et dans le pilotage et la coordination entre les unités administratives concernées. Le Conseil fédéral explique dans son avis comment il compte améliorer l'application des sanctions économiques.

8.3

Politique de la maîtrise des armements

8.3.1

Initiative populaire «Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre»

Le Conseil fédéral a adopté, le 14 juin, le message concernant l'initiative populaire «Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre»161. Il recommande de rejeter cette dernière. À ses yeux, l'approche adoptée et les mesures envisagées ne sont pas efficaces. Le financement de matériels de guerre prohibés (armes atomiques, biologiques et chimiques, mines antipersonnel et armes à sousmunitions) est interdit en Suisse depuis 2013 déjà. L'interdiction de financer les producteurs de matériel de guerre proposée par l'initiative va bien au-delà de l'interdiction susmentionnée et aurait notamment des répercussions négatives sur l'activité de la Banque nationale suisse, des fondations et des caisses de pensions, et sur l'AVS/AI/APG. Elle remet en cause la place financière suisse et risque de fragiliser l'industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (industrie MEM).

8.3.2

Initiative populaire «Contre les exportations d'armes dans des pays en proie à la guerre civile»

Déposée le 24 juin 2019, l'initiative populaire «Contre les exportations d'armes dans des pays en proie à la guerre civile» a pour objectif d'inscrire dans la Constitution les critères sur lesquels se fondent les autorisations d'exporter du matériel de guerre.

Ses auteurs souhaitent ainsi améliorer le contrôle démocratique en permettant au Parlement et au peuple de participer à la définition des critères d'exclusion applicables aux exportations de matériel de guerre. Ils entendent par ailleurs revenir aux critères d'exclusion adoptés par le Conseil fédéral en 2008 et légèrement revus en 2014. L'objectif est d'empêcher l'exportation de matériel de guerre vers des pays qui violent les droits de l'homme de façon grave et systématique ou qui sont impliqués dans un conflit armé interne ou international, peu importe si le matériel de guerre à exporter peut ou non être utilisé dans un conflit ou servir à violer les droits de l'homme.

Par décision du 20 décembre, le Conseil fédéral a recommandé de rejeter l'initiative populaire. S'il comprend les préoccupations essentielles de ses auteurs, inscrire le texte de l'initiative dans la Constitution va cependant trop loin à ses yeux. Il a donc l'intention de soumettre au Parlement un contre-projet indirect proposant de transfé-

161

FF 2019 4897

1973

FF 2020

rer dans la loi fédérale sur le matériel de guerre (LFMG) 162 les critères d'autorisation inscrits dans l'ordonnance sur le matériel de guerre (OMG)163. Le dossier de consultation comprendra deux variantes afin d'offrir un choix aux participants à la procédure. La première variante propose d'inscrire les critères d'autorisation de l'art. 5 OMG au niveau de la loi. En outre, elle prévoit une exception qui vise à permettre au Conseil fédéral, dans des circonstances exceptionnelles, de procéder à une adaptation limitée dans le temps de ces critères sans devoir consulter le Parlement. La seconde variante propose elle aussi d'inscrire les critères d'autorisation de l'art. 5 OMG au niveau de la loi, mais sans l'exception de l'art. 5, al. 4, OMG ni la dérogation prévue pour le Conseil fédéral. L'art. 5 al. 4 OMG permet d'autoriser l'exportation de matériel de guerre vers des pays qui violent systématiquement et gravement les droits de l'homme si le risque est faible que le matériel de guerre à exporter soit utilisé pour commettre des violations graves des droits de l'homme.

162 163

RS 514.51 RS 14.511

1974

FF 2020

9

Annexes au rapport sur la politique économique extérieure

9.1

Annexes pour information

9.1.1

Thèmes de négociation au sein de l'OMC

Thème

Objet / Mandat de négociation

Forme et état des négociations; Remarques

Subventions à la pêche

Subventions qui contribuent à la surpêche ainsi qu'à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée / Décision ministérielle de 2017, objectifs de développement durable (ODD)

Négociations multilatérales.

Agriculture

Soutien interne et autres aspects du commerce agricole / Accord sur l'agriculture (1994)

La grande majorité des membres continuent d'accorder un intérêt prononcé à ces thèmes.

MPME

Soutien à la participation des microentreprises, petites et moyennes entreprises au commerce international / Déclaration ministérielle de 2017

Discussions plurilatérales visant à identifier les mesures et les accords envisageables.

Commerce et investissements

Facilitation des investissements directs étrangers / Déclaration ministérielle de 2017

Négociations plurilatérales, progrès substantiels.

Commerce électronique

Facilitation du commerce électronique et reconnaissance des réglementations intérieures / Déclaration ministérielle de 2017

Lancement des négociations plurilatérales.

Réglementation intérieure régissant les services

Exigences et processus en maNégociations plurilatérales, tière de licence et de qualificaprogrès substantiels.

tion, normes techniques / AGCS (1994) et déclaration ministérielle de 2017

1975

FF 2020

9.1.2

Négociations en cours concernant des accords de libre-échange

(État au 31 décembre 2019) Partenaire

Objet des négociations

Début des négociations / Nombre de tours

Remarques

Chili

Révision de l'ALE de 2003164

2019 / 1

Actualisation et développement de l'ALE en vigueur. Nouveauté: ajout d'un chapitre sur le commerce et le développement durable et d'un chapitre sur la facilitation des échanges.

Inde

Nouvel ALE

2008 / 17

Négociations avancées. Prises de contact au niveau des chefs négociateurs et des experts. Divergences concernant l'accès aux marchés pour les marchandises, le commerce des services, la propriété intellectuelle et les règles d'origine. Aucun tour de négociations depuis septembre 2017.

Malaisie

Nouvel ALE

2014 / 8

Divergences concernant notamment l'accès aux marchés pour les marchandises, surtout les produits agricoles.

Contact entre les négociateurs en chef (novembre 2019), mais plus de tour de négociations depuis mars 2017.

Mercosur165 Nouvel ALE

2017 / 10

Négociations achevées en substance depuis le 23 août 2019. Date de la signature encore ouverte.

Mexique

2016 / 4

Actualisation et développement de tous les secteurs de l'accord en vigueur.

Nouveauté: ajout d'un chapitre sur le commerce et le développement durable et d'un chapitre sur la facilitation des échanges.

Révision de l'ALE de 2000166

Divergences concernant notamment l'accès aux marchés pour les produits agricoles. Plus de tour de négociations depuis juin 2017.

164 165 166

RS 0.632.312.451 Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay.

RS 0.632.315.631.1

1976

FF 2020

Partenaire

Objet des négociations

Début des négociations / Nombre de tours

Remarques

SACU167

Révision de l'ALE de 2006168

2018 / 5

La révision se limite au commerce des marchandises, aux questions douanières et à l'ajout d'un chapitre sur le commerce et le développement durable.

Vietnam

Nouvel ALE

2012 / 16

Divergences substantielles concernant notamment l'accès aux marchés pour les produits industriels et agricoles, ainsi que les marchés publics et la propriété intellectuelle. Plus de tour de négociations depuis mai 2018 mais rencontre entre négociateurs en chef et experts en matière de propriété intellectuelle en novembre.

9.1.3

Rencontres de comités mixtes dans le cadre d'accords de libre-échange en vigueur

(État au 31 décembre 2019) Partenaire

Accord

Conseil de ALE AELEcoopération CCG169 du Golfe (CCG)

Rencontre

Décisions, remarques

3e rencontre, Pas de décision formelle.

4 mars Discussion concernant la suppression des droits de douane prévue au 1er juillet 2019, en particulier pour les produits agricoles transformés issus des États de l'AELE, et diverses questions d'application de l'ALE (prescriptions en matière d'étiquetage et nécessité de légaliser des formulaires douaniers dans certains États du CCG).

Les parties à l'accord ont annoncé leur intention d'examiner l'intégration dans l'ALE de dispositions relatives à la facilitation des échanges.

167

Union douanière d'Afrique australe: Afrique du Sud, Botswana, Lesotho, Namibie et Swaziland.

168 RS 0.632.311.181 169 RS 0.632.311.491

1977

FF 2020

Partenaire

Accord

Rencontre

Décisions, remarques

Égypte

ALE AELEÉgypte

4e rencontre, Pas de décision formelle.

2 mai Discussions concernant les difficultés des entreprises égyptiennes à exporter vers les États de l'AELE.

Discussions sur d'éventuelles nouvelles négociations concernant les produits agricoles transformés (actuellement: concessions unilatérales octroyées et régulièrement prolongées par l'AELE).

L'Égypte est prête à analyser les dispositions types de l'AELE concernant le commerce et le développement durable.

L'AELE a soumis à l'Égypte une proposition portant sur l'échange de données statistiques douanières.

OLP/Autorit ALE 6e rencontre é palestiAELE-OLP/ 27 juin nienne Autorité palestinienne170

Pas de décision formelle.

Lancement d'un processus de révision des concessions pour les produits agricoles de base.

Discussions relatives à de possibles projets de coopération économique au développement dans le domaine de la promotion commerciale.

Discussions relatives à la mise à jour d'autres domaines de l'accord existant, comme le chapitre commerce et développement durable.

Pérou

ALE AELEPérou171

2e rencontre Pas de décision formelle.

20 septembre L'AELE a proposé au Pérou un chapitre commerce et développement durable mais le Pérou ne souhaite pas l'introduire dans l'accord.

Le Pérou n'est par ailleurs pas intéressé à moderniser l'annexe sur la facilitation des échanges.

170 171

RS 0.632.316.251 RS 0.632.316.411

1978

FF 2020

Partenaire

Accord

Rencontre

Décisions, remarques

Les discussions concernant un rapprochement en matière de services se poursuivent.

Colombie

ALE AELEColombie

3e rencontre, Pas de décision formelle.

30 octobre La Colombie est favorable à un échange concernant une possible reprise des dispositions modèle de l'AELE en matière de commerce et le développement durable mais ne dispose pas d'un mandat à ce stade.

La Colombie a par ailleurs signalé son intérêt à d'ultérieures concessions douanières en matière de produits agricoles.

L'AELE a soumis à la Colombie une proposition en matière d'échange de données sur l'usage de préférences douanières. La réaction de la Colombie est généralement positive.

Discussion sur une possible révision de la liste colombienne des réserves en matière d'investissements.

UE

ALE Suisse-UE

63e rencontre Pas de décision formelle.

13 novembre Discussions sur les thèmes douaniers.

Sous-comité douanier UE

ALE Suisse-UE

66e rencontre Pas de décision formelle.

21 novembre Mesures UE sur les importations d'acier et aluminium.

Contrôles radiométriques à la frontière italo-suisse.

Commerce des produits agricoles transformés.

Politique de libre-échange avec des Etats tiers.

Conséquences de la sortie du R.-U. de l'UE sur l'ALE 72 Suisse-UE.

1979

FF 2020

9.1.4

Négociations d'accords bilatéraux de protection des investissements

(État au 31 décembre 2019) Partenaire

Objet des négociations Début des négocia- Remarques tions / Nombre de tours

Bahreïn

Nouvel API

2018 / 0

Début des négociations initialement prévu pour fin 2018 ou 2019, reporté à la demande des autorités bahreïnies.

Colombie

Révision de l'API

­

Révision de l'API de 2006172.

Nouvel API

2017 / 4

Inde

Début des négociations prévu d'ici à fin 2019 ou 2020.

L'Inde a dénoncé l'API de 1997173, caduc depuis le 6 avril 2017.

Début des négociations en avril 2017; 4e tour prévu d'ici à fin 2019.

Indonésie

Nouvel API

2018 / 4

L'Indonésie a dénoncé l'API de 1974174, caduc depuis le 8 avril 2016.

Des négociations ont eu lieu entre 2010 et 2013, avant d'être interrompues. En 2018, de nouvelles négociations ont pu être lancées; 4e tour tenu en septembre 2019.

Malaisie

Mexique

172 173 174 175 176

Révision de l'API

2016 / 1

Révision de l'API

2017 / 2

RS 0.975.226.3 RO 2002 2037 RO 1976 1954 RS 0.975.252.7 RS 0.975.256.3

1980

Révision de l'API de 1978175.

Les négociations sont menées parallèlement à celles de l'ALE, dès lors aucun tour n'a pu avoir lieu depuis 2017.

Révision de l'API de 1995176 Les négociations sont menées parallèlement à celle de l'ALE, dès lors aucun tour n'a pu avoir lieu depuis 2017.

FF 2020

Partenaire

Objet des négociations Début des négocia- Remarques tions / Nombre de tours

Slovaquie

Révision de l'API

Afrique du Nouvel API Sud

2018 / 4

Révision de l'API de 1990177.

Début des négociations en février 2018; 4e tour tenu en mai 2019.

­

L'Afrique du Sud a dénoncé l'API de 1995178, caduc depuis le 1er novembre 2014.

Actuellement, l'Afrique du Sud n'est pas prête à engager des négociations.

9.1.5

Missions économiques, rencontres de travail bilatérales et sessions des commissions économiques mixtes

Principales missions économiques et rencontres de travail bilatérales du chef du DEFR et de la secrétaire d'État à l'économie en Suisse et à l'étranger Partenaire

Forme, lieu et date

Autriche

Rencontre de travail de la secrétaire d'État à l'économie avec le secrétaire général du Ministère de l'économie et du numérique, Michael Esterl (Vienne, 14 mars).

Autriche

Rencontre de travail du chef du DEFR avec la ministre de l'Économie et du Numérique, Margarete Schramböck (Vienne, 27 mars).

États-Unis

Visite de travail du chef du DEFR auprès du secrétaire au Commerce, Robert Lighthizer (Washington, 13 avril).

Pologne

Rencontre de travail du chef du DEFR avec le ministre des Investissements et du Développement, Jerzy Kwieciski (Berne, 8 mai).

Italie

Rencontre de travail de la secrétaire d'État à l'économie avec le secrétaire d'État du Ministère du développement économique, Michele Geraci, et l'assesseur et membre du Conseil de la région de Lombardie, Massimo Sertori (Milan, 14 et 15 mai).

Russie

Mission économique de la secrétaire d'État à l'économie (Moscou, Kazan, Saint-Pétersbourg, 3­8 juin).

177 178

RS 0.975.274.1 RO 1999 629

1981

FF 2020

Partenaire

Forme, lieu et date

Liban

Rencontre de travail de la secrétaire d'État à l'économie avec le ministre d'État pour les Technologies de l'information, Adel Afiouni (Berne, 11 juin).

Japon et Vietnam

Mission économique et scientifique du chef du DEFR (Tokio, Osaka, Hanoï, Hô Chi Minh-Ville, 7­14 juillet)

Royaume-Uni Visite de travail du chef du DEFR (Londres, 5 septembre).

Pérou

Visite de travail du vice-ministre des Affaires étrangères Jaime Pomareda auprès de la secrétaire d'État à l'économie (Berne, 5 septembre).

Allemagne, Autriche et Liechtenstein

Rencontre quadripartite annuelle des ministres de l'économie (Liechtenstein, 11 octobre).

Allemagne

Rencontre de travail de la secrétaire d'État à l'économie avec la secrétaire d'État du ministère de l'Économie et de l'Énergie, Claudia Dör-Voss (Berlin, 29 octobre).

Italie

Rencontre de travail du chef du DEFR avec le ministre du Développement économique, Stefano Patuanelli (Rome, 31 octobre).

Kenya

Mission économique de la secrétaire d'État à l'économie (Nairobi, 12 au 13 novembre).

Commissions économiques mixtes Partenaire

Ouzbékistan

Cycle de dialogue, lieu et date

8e session, Tachkent, 17 mai

Italie

11e session, Berne, 29 mai

Serbie

9e session, Berne, 5 juin

Argentine

3e session, Berne, 13 juin

Ukraine

12e session, Berne, 20 juin

Azerbaïdjan

8e session, Berne, 28 juin

Indonésie

7e session, Jakarta, 15 juillet

Pérou

3e session, Berne, 5 septembre

Mexique

9e session, Mexico, 18 septembre

Kazakhstan Iran

10e session, Berne, 28 octobre 2e session, Berne, 8 novembre

États-Unis

14e session, Washington, 20 novembre

Allemagne

41e session, Dresde, 26­27 novembre

1982

FF 2020

Partenaire

Turquie Russie

Cycle de dialogue, lieu et date

9e session, Berne, 3 décembre 20e session, Moscou, 17 décembre

9.1.6

Exportations dans le cadre de la loi sur le contrôle des biens

Du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019, les demandes d'exportation et les exportations soumises à l'obligation de déclarer en vertu de l'ordonnance du 3 juin 2016 sur le contrôle des biens (OCB)179 et de l'ordonnance du 21 août 2013 sur le contrôle des produits chimiques (OCPCh)180 ont été les suivantes (des statistiques détaillées des permis délivrés et des demandes d'exportation refusées figurent sur le site Internet du SECO181): Catégorie de biens

Nombre

Valeur (en mio de CHF)

35

14,8

Annexe 2, partie 2, OCB ­ Liste des biens à double usage

1587

324,4

Annexe 3 OCB ­ Liste des biens militaires spécifiques

154

14,7

Annexe 5 OCB ­ Biens qui ne sont pas soumis aux régimes internationaux de contrôle à l'exportation

323

8,9

Convention sur les armes chimiques (CAC) ­ Produits chimiques utilisables à des fins civiles et militaires

58

0,3

Annexe 2, partie 1 OCB ­ Liste des biens nucléaires

Permis selon l'art. 3, al. 4, OCB

5

0,05

619

167

156

­

LG extraordinaires

51

­

LG produits chimiques

12

­

4

0,6

Certificats d'importation Licences générales d'exportation (LG) LG ordinaires

Demandes d'exportation refusées

179 180 181

RS 946.202.1 RS 946.202.21 www.seco.admin.ch > Contrôles à l'exportation et sanctions.

1983

FF 2020

9.2

Annexes pour approbation Partie II: Annexe selon l'art. 10, al. 2 et 3, de la loi fédérale du 25 juin 1982 sur les mesures économiques extérieures (pour approbation).

1984