20.079 Message relatif à la modification de la loi fédérale sur l'impôt anticipé (Instruments too big to fail) du 28 octobre 2020

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi fédérale sur l'impôt anticipé, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

28 octobre 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2020-2878

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Condensé Les dispositions de la loi fédérale sur l'impôt anticipé concernant l'exonération des intérêts issus des instruments émis par des établissements financiers trop grands pour être mis en faillite (too big to fail, TBTF), comme les bail-in bonds ou les emprunts à conversion obligatoire, arrivent à échéance à la fin de 2021. Si la réforme de l'impôt anticipé (renforcer le marché des capitaux de tiers) était mise en oeuvre, la prorogation de ces dispositions n'aurait plus lieu d'être. Cependant, le Conseil fédéral n'adoptera le message relatif à cette réforme qu'au cours du deuxième trimestre 2021 et il devra ensuite le transmettre au Parlement. Il propose donc, afin de préserver la stabilité financière, un projet séparé visant à prolonger de cinq ans la validité des dispositions d'exonération, soit jusqu'à la fin de 2026. Les participants à la consultation concernant la réforme de l'impôt anticipé sont également favorables à la prolongation des exonérations. Du fait que l'exonération figure dans le droit en vigueur, la mesure n'entraînera pas de conséquences particulières.

La stabilité financière subirait par contre des conséquences négatives si les dispositions d'exonération n'étaient pas valables jusqu'à l'entrée en vigueur de la réforme de l'impôt anticipé.

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Message Les termes techniques utilisés dans le présent message sont définis dans le glossaire.

Ils sont signalés par un astérisque (*) lors de leur première utilisation dans le texte.

1

Contexte

1.1

Contexte prudentiel

Les dispositions applicables aux banques trop grandes pour être mises en faillite (too big to fail, TBTF*) inscrites en 2013 dans la loi du 8 novembre 1934 sur les banques (LB)1 visent à empêcher qu'en cas de crise, les banques d'importance systémique* soumises à la surveillance de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) ne doivent être sauvées par l'argent du contribuable. On entend par banques d'importance systémique les banques*, groupes financiers et conglomérats financiers* à dominante bancaire dont la défaillance porterait gravement atteinte à l'économie et au système financier suisses (art. 7, al. 1, LB). À l'heure actuelle, UBS, Credit Suisse (CS), la Banque cantonale de Zurich, le groupe Raiffeisen et PostFinance sont considérés comme des banques d'importance systémique. Quatre mesures sont prévues pour réduire la probabilité de défaillance et améliorer la capacité d'assainissement et de liquidation (exigences prudentielles*): augmentation du capital propre, amélioration des liquidités, planification de la stabilisation et de l'assainissement et réglementation particulière de la liquidation* d'établissements financiers. Les prescriptions relatives aux deux premières exigences prudentielles concernent, dans une moindre mesure, aussi les banques dont l'importance n'est pas systémique.

Les banques peuvent répondre aux exigences prudentielles en augmentant leur capital propre, par exemple en émettant des actions. Les banques d'importance systémique doivent satisfaire à environ 70 % des exigences en matière de fonds propres pour la poursuite de l'exploitation ordinaire de la banque avec de tels capitaux. Pour les 30 % restants et pour les exigences en matière de fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes, le régime TBTF prévoit trois instruments:

1

­

Les contingent convertibles (CoCo)* sont des emprunts qui sont convertis en capitaux propres (le plus souvent des actions) de la banque concernée lorsque se produit un événement déclencheur déterminé (trigger*). Ces capitaux peuvent, dans une certaine mesure, être pris en compte en tant que fonds propres conformément aux exigences réglementaires. Toutes les banques peuvent utiliser ces instruments. Lors de la 1re phase du régime TBTF, les instruments émis étaient des CoCo; à l'heure actuelle, ils n'existent plus sur le marché suisse.

­

Les write-off bonds* sont amortis également en cas de survenance d'un événement déterminé. Ils permettent également de remplir, dans une certaine RS 952.0

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mesure, les exigences réglementaires en matière de fonds propres. Ces instruments peuvent également être utilisés par toutes les banques. Actuellement (juin 2020), CS et UBS ont, à eux deux, un encours de write-off bonds de quelque 38 milliards de francs. De l'avis de la FINMA, on peut s'attendre que ce volume baisse de 5 à 7 milliards de francs à moyen terme. Les trois autres banques d'importance systémique ont un encours de write-off bonds correspondant à environ 3 milliards de francs au total, et l'ensemble des autres institutions financières, un montant de l'ordre de 3,5 milliards de francs.

­

Les bail-in bonds* sont des obligations d'emprunt qui, en cas (de risque) d'insolvabilité, peuvent être réduites ou converties en fonds propres dans le cadre d'une procédure d'assainissement ordonnée par la FINMA. Il n'existe pas de trigger préalablement défini puisque c'est ici à la FINMA qu'il revient de décider si les emprunts sont convertis ou amortis. Les bail-in bonds permettent de remplir les exigences de fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes, ces exigences ne concernant actuellement que les banques d'importance systémique. Pour l'heure (juin 2020), CS et UBS ont, à eux deux, un encours de bail-in bonds correspondant à quelque 74 milliards de francs. De l'avis de la FINMA, on peut s'attendre que ce volume augmente encore de 20 à 25 milliards de francs dans les 3 ou 4 ans à venir. Selon l'évaluation de la FINMA, il est probable que les autres banques d'importance systémique utiliseront principalement d'autres mécanismes (par exemple, les garanties d'État, qui sont prises en compte dans les fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes) pour répondre aux exigences quant au capital apte à absorber les pertes.

Selon les directives prudentielles, les banques d'importance systémique doivent émettre les instruments TBTF par l'entremise d'une entité ayant son siège en Suisse.

Vu le besoin de fonds par rapport à la taille de la place financière suisse, tous les fonds ne pourront être placés auprès d'investisseurs suisses, tant s'en faut. Pour les investisseurs étrangers, c'est entre autres pour des raisons fiscales, entre autres, que les instruments TBTF sont plus intéressants que les actions. En outre, les conditions de taux d'intérêt sont généralement inchangées pendant une période plus longue et intéressent donc d'autres groupes d'investisseurs.

1.2

Contexte fiscal

Le droit fiscal contient une série de dispositions relatives aux instruments TBTF: ­

2 3

L'exonération, pour une durée de quatre ans, de l'impôt anticipé grevant les intérêts de CoCo et de write-off bonds a été inscrite dans la loi fédérale du 13 octobre 1965 sur l'impôt anticipé (LIA)2 (art. 5, al. 1, let. g, LIA) dans le cadre d'une révision entrée en vigueur le 1er janvier 20133. Le 1er janvier 2017, cette exonération a été prorogée jusqu'à la fin de 2021 et une exonéraRS 642.21 RO 2012 5981

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tion similaire a été créée pour les bail-in bonds (art. 5, al. 1, let. i, LIA)4. Les exonérations s'appliquent aux instruments émis avant la fin de 2021.

Jusqu'au moment d'une éventuelle conversion, ces instruments TBTF constituent la plupart du temps des obligations dont les paiements d'intérêts devraient normalement être soumis à l'impôt anticipé. Dans l'intérêt de la stabilité financière, le besoin se faisait cependant davantage sentir que ces instruments soient émis en Suisse et soumis au droit suisse. Ces exonérations ne concernent pas les instruments émis à compter de 2022, de sorte que l'impôt anticipé sera perçu sur les intérêts liés à des instruments TBTF émis après cette date. Il serait alors beaucoup plus difficile (et plus onéreux) pour les banques de se procurer des fonds, car de nombreux investisseurs internationaux n'acceptent pas la retenue de l'impôt anticipé et auraient tendance ­ dans la mesure où le montant de l'impôt anticipé n'est pas compensé par des taux d'intérêt plus élevés ­ à acquérir d'autres produits, quand bien même ils auraient droit au remboursement de l'impôt anticipé en vertu d'une convention contre les doubles impositions (CDI).

­

En même temps que les exonérations inscrites dans la LIA, l'exonération des droits de timbre dont bénéficient les CoCo convertis en capitaux propres en cas de crise a été complétée par une exonération similaire des bail-in bonds dans la loi fédérale du 27 juin 1973 sur les droits de timbre (LT)5, également à partir du 1er janvier 2017 (art. 6, al. 1, let. l et m, LT).

­

Enfin, au 1er janvier 2019, une réglementation concernant l'impôt sur le bénéfice a été inscrite dans la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD)6 (art. 70, al. 6, LIFD) et dans la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)7 (28, al. 1quater, LHID). Pour éviter que l'émission d'instruments TBTF ait une incidence sur l'imposition du rendement des participations, le calcul de la réduction pour participation dont bénéficient les sociétés mères des banques d'importance systémique a été modifié sur certains points. Même en cas d'émission d'instruments TBTF et de transfert des fonds, leur charge d'impôt sur le bénéfice grevant les rendements de participation reste la même qu'avant l'émission des instruments.

Les révisions de l'impôt anticipé, des droits de timbre et de l'impôt sur le bénéfice garantissent que les banques peuvent émettre des instruments TBTF en Suisse à des conditions compétitives. Pour ces instruments, qui constituent généralement des obligations et, donc, des fonds de tiers jusqu'à leur éventuelle conversion, il est dans l'intérêt supérieur de l'économie et de la réglementation qu'ils soient émis à partir de la Suisse et conformément au droit suisse. Les dispositions augmentent la stabilité financière.

4 5 6 7

RO 2016 3451 RS 641.10 RS 642.11 RS 642.14

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1.3

Nécessité d'agir et objectifs visés

Les exonérations prévues par la LIA concernant les intérêts issus d'instruments TBTF ne s'appliquent pas lorsque les instruments sont émis à partir du 1er janvier 2022. Les intérêts provenant d'instruments TBTF émis après cette date seraient soumis à l'impôt anticipé, ce qui rendrait plus difficile le placement d'instruments TBTF (ch. 1.2). Il est donc opportun de prolonger la validité des exonérations de l'impôt anticipé afin de maintenir la sécurité juridique et la stabilité financière. Les banques peuvent ainsi continuer de répondre aux exigences du régime TBTF, sans pour autant que les coûts de capitalisation ne soient élevés à cause de l'impôt anticipé. Toutefois, cette exonération conduit à privilégier ces instruments par rapport aux autres obligations d'entreprises. Le Conseil fédéral considère que cette situation doit être réglée le plus vite possible.

Du 3 avril au 10 juillet 2020, le Conseil fédéral a mis en consultation un projet de réforme de l'impôt anticipé (renforcer le marché des capitaux de tiers*). Sur le plan économique, le but est de renforcer le marché des capitaux de tiers. À cet effet, l'impôt anticipé sur les intérêts ne doit plus être perçu que sur les personnes physiques domiciliées en Suisse. Les autres investisseurs (personnes morales domiciliées en Suisses, investisseurs étrangers) doivent être exonérés de l'impôt anticipé sur les intérêts.

Avec l'entrée en vigueur de la réforme de l'impôt anticipé, la prolongation de la validité des exonérations existantes prévues par la LIA pour les intérêts issus des instruments TBTF se révélerait sans objet dans la mesure où cette réforme vise à mettre en place des conditions concurrentielles pour tous les emprunts, y compris les instruments TBTF. Étant donné que le Parlement ne pourra pas traiter le projet avant l'été 2021, le Conseil fédéral entend prolonger la validité des exonérations afin de préserver la stabilité financière. C'est pourquoi il propose au Parlement, par le présent message, de prolonger la validité des exonérations jusqu'au 31 décembre 2026 (voir ch. 2).

1.4

Relation avec le programme de la législature

Le projet n'est pas annoncé séparément dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 20238. Il fait cependant partie de la réforme en cours de l'impôt anticipé, qui figure dans les grandes lignes du message sur le programme de la législature9 et dans l'arrêté fédéral du 21 septembre 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202310.

8 9 10

FF 2020 1709 FF 2020 1709, 1769 1821 FF 2020 8385, 8386

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2

Procédure préliminaire

Lors de la consultation sur la réforme de l'impôt anticipé (renforcer le marché des capitaux de tiers)11, le Conseil fédéral a demandé si ­ et, le cas échéant, pour combien de temps ­ l'exonération des intérêts issus d'instruments TBTF devait être prolongée. Il a posé cette question pour le cas où la réforme n'entrerait pas en vigueur à temps.

Les participants à la consultation sont favorables à une prolongation des exonérations, seul Travail.Suisse et l'Association des sociétés anonymes privées s'y opposent. Ils ont proposé des délais de trois ans (SwissHoldings, EXPERTsuisse, SwissRe, Association Suisse d'assurances) ou de dix ans (Conférence des directeurs cantonaux des finances, tous les cantons à l'exception du canton de Vaud). Certains participants préconisent un délai qui arrive à échéance le jour de l'entrée en vigueur de la réforme de l'impôt anticipé ou dès qu'une autre solution a été adoptée (Vaud, la plupart des organisations et tous les partis politiques). Le Forum PME demande, quant à lui, que le délai soit prolongé jusqu'en 2027.

3

Présentation du projet

3.1

Réglementation proposée

Au vu des résultats du processus de consultation, la durée de validité des exonérations devrait être prolongée de cinq ans (jusqu'au 31 décembre 2026). Ce délai permettra au Parlement de délibérer comme il se doit sur la réforme de l'impôt anticipé (renforcer le marché des capitaux de tiers) et de fixer une période de mise en oeuvre suffisamment longue après son adoption. Le délai de cinq ans est donc adéquat compte tenu du résultat de la consultation et correspond par ailleurs à la durée de la dernière prolongation. La réforme de l'impôt anticipé reste une priorité pour le Conseil fédéral. Dans le cadre de cette réforme, il demandera au Parlement d'abroger la prolongation des exonérations dès que la réforme entrera en vigueur.

Pour ce qui est des instruments émis avant l'entrée en vigueur de la modification, il est judicieux de s'en tenir à l'exonération.

3.2

Mise en oeuvre

Pour ce qui est de la fiscalité, la prorogation des dispositions relatives à l'exonération n'exige pas de plus amples précisions puisqu'il s'agit simplement de maintenir le droit en vigueur).

Une révision partielle de la LB est en cours12. Certaines des modifications proposées par le Conseil fédéral déploient des effets sur le présent projet. Dans le cadre des 11

12

Le rapport sur les résultats de la consultation peut être consulté sur www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2020 > DFF.

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délibérations parlementaires, il s'agira de coordonner les travaux concernant ces deux projets.

L'objectif du Conseil fédéral est que la réglementation proposée ici entre en vigueur le 1er janvier 2022. La continuité serait ainsi assurée. Le Conseil fédéral propose donc au Parlement de fixer l'entrée en vigueur en conséquence dans le projet sujet au référendum. En cas d'adoption lors de la session d'été 2021, le ch. II, al. 2, pourrait avoir la teneur suivante: «S'il est établi au 31 octobre 2021 qu'aucun référendum n'a abouti, elle [la loi] entre en vigueur le 1er janvier 2022». Dans le cas contraire, l'entrée en vigueur serait fixée par le Conseil fédéral.

4

Commentaire des dispositions

Art. 5, al. 1, let. g, ch. 2, et i, ch. 3 L'art. 5, al. 1, let. g et i, règle les exonérations de l'impôt anticipé pour les intérêts issus d'instruments TBTF. Seuls les délais inscrits à la let. g, ch. 2, et à la let. i, ch. 3, sont adaptés. Aucune modification n'est apportée sur le plan matériel. En particulier, les instruments TBTF mentionnés resteront soumis à l'approbation de la FINMA. Sont également considérés comme des bail-in bonds les instruments approuvés par la FINMA qui sont émis non pas en tant qu'obligations, mais en tant que prêts consentis aux mêmes conditions que les obligations. Cette solution correspond à la pratique actuelle.

5

Conséquences

La présente modification ne fait que prolonger la durée d'une exonération existante, elle n'a donc aucune conséquence pour la Confédération, les cantons, les communes, les centres urbains, les agglomérations, les régions de montagne, l'état du personnel ou l'économie.

6

Aspects juridiques

6.1

Constitutionnalité

La compétence de la Confédération de percevoir un impôt anticipé sur le revenu des capitaux mobiliers est réglée à l'art. 132, al. 2, de la Constitution (Cst.)13. Les principes établis à l'art. 127 Cst. valent aussi pour la perception de l'impôt anticipé. La LIA règle notamment l'objet de l'impôt et le sujet fiscal. Tous ces principes sont respectés. Les exonérations se justifient objectivement du fait que les instruments TBTF contribuent à préserver la stabilité du marché financier suisse (ch. 1.1). La prolongation du privilège accordé à ces instruments par rapport aux autres obliga-

13

RS 101

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tions d'entreprises répond à un intérêt public et est donc conforme à la Constitution.

En outre, elle est de durée limitée.

6.2

Frein aux dépenses

Le projet ne crée ni nouvelle disposition relative aux subventions ni nouveau crédit d'engagement.

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Glossaire Bail-in bonds

Les bail-in bonds sont prévus dans la législation sur les banques depuis le 1er juillet 2016. Ce sont des instruments de dette destinés à absorber les pertes en présence de mesures en cas d'insolvabilité et servant de volant de capital supplémentaire aux banques. Il s'agit d'obligations d'emprunt qui, en cas (de risque) d'insolvabilité, peuvent être réduites ou converties en capitaux propres dans le cadre d'une procédure d'assainissement ordonnée par la FINMA en application des art. 28 à 32 et en particulier de l'art. 31, al. 3, LB (cf. en outre les art. 126a, 132 et 133, de l'ordonnance du 1er juin 2012 sur les fonds propres [OFR]14). Alors que dans le cas des CoCo, les organes de la société doivent veiller, au moment de l'émission déjà, à ce que les actions soient disponibles en cas de conversion, dans le cas des bail-in bonds, les actions sont créées sur décision de la FINMA, qui agit en sa qualité d'autorité chargée de l'assainissement, et attribuées aux créanciers en compensation de la réduction de la créance, l'ancien capital social ayant préalablement été amorti.

Depuis la modification du 21 novembre 2018 de l'OFR, les exigences relatives à l'obtention de fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes concernent désormais aussi, mais dans une moindre mesure, les banques d'importance systémique qui n'opèrent pas au niveau international.

En vertu des dispositions de l'OFR, la FINMA peut approuver les bail-in bonds non seulement en tant qu'obligations d'emprunt, mais aussi en tant que prêts, à des conditions analogues.

Banque

Selon l'art. 2, al. 1, let. a, de l'ordonnance du 30 avril 2014 sur les banques (OB)15, on entend par banques les entreprises actives principalement dans le secteur financier et qui en particulier acceptent des dépôts du public à titre professionnel ou font appel au public pour les obtenir. Les banques doivent avoir obtenu une autorisation de la FINMA pour commencer leur activité commerciale et sont soumises à la surveillance prudentielle de cette dernière.

Dans le présent contexte, le terme de banque comprend également les groupes financiers et les conglomérats financiers dominés par le secteur bancaire ou celui du négoce en valeurs mobilières.

14 15

RS 952.03 RS 952.02

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Pour les banques d'importance systémique, voir sous ce terme.

Banque d'importance Du fait de sa taille, de sa position sur le marché et des résystémique seaux qu'elle entretient, une banque d'importance systémique est une banque qui peut, en cas de défaillance, ouvrir de graves failles dans le système financier et avoir des répercussions néfastes sur l'ensemble de l'économie.

À l'heure actuelle, UBS et CS sont considérés comme des banques d'importance systémique mondiale16 du point de vue prudentiel et comme des banques d'importance systémique actives au niveau international au sens de l'art. 124a OFR. Les banques d'importance systémique nationale sont la Banque cantonale de Zurich, le Groupe Raiffeisen et PostFinance.

Toutes les banques d'importance systémique doivent observer des prescriptions spéciales en matière de fonds propres (pouvant par ex. être remplies au moyen de CoCo ou de write-off bonds). Elles doivent en outre remplir des exigences en matière de fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes en présence de mesures en cas d'insolvabilité (qui peuvent être remplies par l'émission de bail-in bonds ou à l'aide d'une garantie de l'État ou d'un autre mécanisme similaire en fonction de la structure de l'actionnariat).

Toutes les autres banques sont soumises aux exigences prudentielles d'ordre général. Le terme de banque n'ayant pas d'importance systémique n'apparaît pas dans le droit de la surveillance et n'est donc pas non plus utilisé par la Banque nationale suisse. Dans le présent contexte, on y a recours afin d'établir une délimitation claire.

CoCo

Les CoCo (contingent convertibles) sont des emprunts à conversion obligatoire; ils sont convertis en capitaux propres (le plus souvent des actions) de la banque concernée lorsque se produit un événement déclencheur déterminé, appelé trigger, qui a été défini au préalable dans les conditions d'émission. Avant leur conversion, les CoCo sont des capitaux de tiers pouvant être pris en compte en tant que capitaux propres relevant du droit de la surveillance.

Ils ont été inscrits dans la LB (art. 11, al. 2, LB) le 1er mars 2012, lors de l'intégration dans la loi du régime TBTF.

16

Systématique du Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board [FSB]); la dernière liste, publiée le 22 novembre 2019, est disponible à l'adresse www.fsb.org > Publications > 2019 list of global systemically important banks (G-SIBs).

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Pour l'heure, les banques n'ont émis que des write-off bonds.

La raison en est, d'une part, la complexité relativement plus élevée de la détermination des dispositions de conversion et, d'autre part, le fait que le capital d'une société issu d'une conversion dans le cadre d'un assainissement est amorti sans aucun privilège par rapport aux investisseurs initiaux.

Exigences prudentielles

Dans toutes les banques, les CoCo et les write-off bonds constituent, selon le droit prudentiel, des fonds propres et servent par conséquent à remplir une exigence réglementaire.

Les CoCo et les write-off bonds sont pris en compte prioritairement par les banques d'importance systémique avec les fonds propres nécessaires pour poursuivre leur exploitation ordinaire, mais ils peuvent aussi servir à remplir les exigences en matière de fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes. Les bail-in bonds quant à eux ne servent qu'à remplir les conditions donnant le droit d'obtenir des fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes, conditions que seules les cinq banques d'importance systémique actuelles doivent remplir.

Du point de vue du droit fiscal, les CoCo, les write-off bonds et les bail-in bonds constituent des capitaux de tiers.

Selon les estimations, plus de 95 % de tous les instruments TBTF émis à ce jour l'ont été par des banques d'importance systémique. Toutes les banques d'importance systémique doivent réunir l'ensemble des conditions, mais dans des mesures différentes. La part des banques d'importance systémique au volume des instruments TBTF pourrait ainsi avoir tendance à augmenter encore.

Groupes financiers, conglomérats financiers dominés par le secteur bancaire ou celui du négoce en valeurs mobilières

Un groupe financier est un groupe d'entreprises formant une unité économique ou liées par un devoir de prêter assistance qui est essentiellement actif dans le domaine financier et qui comporte au moins une banque ou un négociant en valeurs mobilières (art. 3c, al. 1, LB). Si dans le groupe financier l'une des entreprises participantes est un assureur, on parle de conglomérat financier dominé par le secteur bancaire ou celui du négoce en valeurs mobilières (art. 3c, al. 2, LB).

La FINMA peut assujettir des groupes financiers et des conglomérats financiers à la surveillance des groupes. Cette dernière complète la surveillance des entreprises individuelles.

Les groupes et conglomérats financiers ne sont soumis à la compétence de la FINMA en matière d'assainissement que s'ils sont dominés par le secteur bancaire ou celui du négoce en valeurs mobilières. Pour les groupes financiers, c'est toujours le cas. Pour les conglomérats financiers, cela n'est

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le cas que lorsque la société mère est soumise à la surveillance de la FINMA et à sa compétence en matière de faillite (art. 2bis, al. 1, let. a, LB).

Instruments TBTF

CoCo, write-off bonds, bail-in bonds; voir sous ces termes.

Les dispositions TBTF de la LB visent à éviter qu'en cas de crise, des banques soumises à la surveillance de la FINMA ne doivent être sauvées par l'argent du contribuable. À cet effet, ces établissements doivent remplir certaines exigences en matière de fonds propres et de fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes. Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er mars 2012. Depuis cette date, les banques peuvent émettre des emprunts à conversion obligatoire (CoCo) et des emprunts assortis d'un abandon de créances (write-off bonds) qui sont pris en compte en tant que fonds propres réglementaires.

Conformément au mandat que la LB confère au Conseil fédéral, ce dernier doit procéder tous les deux ans à une évaluation, dans le cadre de laquelle il est également possible, depuis la modification du 1er juillet 2016, d'émettre des bail-in bonds.

Pour la société émettrice, les instruments TBTF sont réputés être des capitaux de tiers. Il s'agit en l'occurrence de produits structurés de capitaux de tiers (voir sous ce terme).

Liquidation

La liquidation au sens du présent projet de loi équivaut à une sortie du marché. Or la sortie soudaine et désordonnée d'une banque du marché peut avoir des répercussions négatives sur la stabilité du système financier et de toute l'économie. C'est pourquoi l'insolvabilité des banques est régie par des prescriptions spécifiques visant à garantir une sortie ordonnée du marché.

Marché des capitaux de tiers

Le marché des capitaux de tiers fait partie du marché des capitaux. Dans le présent contexte, le capital de tiers comprend les dettes d'une entreprise. On s'intéresse ici en premier lieu aux obligations et autres investissements générant des intérêts.

TBTF

Too big to fail. Afin de réduire au minimum à l'avenir les mesures étatiques de sauvetage de banques d'importance systémique et les conséquences financières pouvant en résulter pour le contribuable, la Suisse a adopté une réglementation TBTF ciblée.

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Quatre mesures sont prévues pour réduire la probabilité de défaillance et améliorer la capacité d'assainissement et de liquidation17: ­ augmentation des fonds propres: les banques d'importance systémique sont tenues de relever le niveau de leurs fonds propres pour couvrir d'éventuelles pertes; ­ amélioration des liquidités: la résistance de la banque face à un choc de liquidités est améliorée par un régime de liquidités particulier; ­ planification de la stabilisation et de l'assainissement ou de la liquidation: les banques doivent se préparer en temps utile à assurer la gestion des crises; un plan d'urgence doit garantir la poursuite des prestations d'importance systémique en cas d'insolvabilité; ­ modification des dispositions relatives à l'insolvabilité des banques: enfin, les moyens juridiques à disposition pour assurer l'assainissement et la liquidation des établissements financiers ont été adaptés.

En vertu de la législation TBTF, les banques soumises à la surveillance de la FINMA peuvent notamment être obligées d'émettre des CoCo, des write-off bonds et des bail-in bonds, afin de renforcer leur base de fonds propres ou de remplir les exigences en matière de fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes.

Trigger

Événement déclencheur en ce qui concerne les deux instruments TBTF que sont les CoCo et les write-off bonds. Un trigger déclenche la conversion d'instruments TBTF en capitaux propres ou l'amortissement de ces instruments.

Dans la pratique, c'est principalement le cas lorsque le ratio de fonds propres passe au-dessous d'un seuil prédéfini (seuil de déclenchement) ou lorsqu'il existe un risque d'insolvabilité.

Dans le cas des bail-in bonds, le trigger est une décision formelle d'assainissement de la FINMA.

Write-off bonds

17

Il s'agit d'emprunts assortis d'un abandon de créances.

Lorsqu'un événement déterminé se produit (trigger, comme pour les CoCo; voir sous ce terme), ils ne sont pas convertis en capitaux propres, mais amortis (la suppression sans remplacement de la dépendance aux capitaux de tiers crée des capitaux propres). L'abandon de créances n'est pas une option en cas de crise, mais une variante choisie d'entrée de jeu par l'établissement émetteur. Selon la forme juridique de ce dernier (en particulier s'il s'agit d'une collectivité pu-

Fiche d'information de la FINMA du 1er décembre 2014, Le régime suisse too big to fail, disponible à l'adresse www.finma.ch

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blique ou d'une société coopérative), cette variante doit être choisie pour la simple et bonne raison qu'une conversion en capitaux propres ne serait pas du tout réalisable.

Avant amortissement, ces fonds constituent du point de vue du droit fiscal des capitaux de tiers. Du point de vue prudentiel, ils peuvent être pris en compte à titre de fonds propres.

Les write-off bonds ont été inscrits dans la LB (art. 11, al. 2, LB) le 1er mars 2012, lors de l'intégration dans la loi du régime TBTF.

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