Irrégularités comptables chez CarPostal Suisse SA ­ Considérations du point de vue de la haute surveillance parlementaire Rapport du 12 novembre 2019 de la Commission de gestion du Conseil des Etats Avis du Conseil fédéral du 19 février 2020

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Conformément à l'art. 158 de la loi sur le Parlement, nous nous prononçons comme suit sur le rapport du 12 novembre 2019 de la Commission de gestion du Conseil des États concernant les «Irrégularités comptables chez CarPostal Suisse SA ­ Considérations du point de vue de la haute surveillance parlementaire»1.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

19 février 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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2019-4309

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Avis 1

Contexte

Par lettre du 13 novembre 2019, la Commission de gestion du Conseil des Etats (CdG-E) a informé le Conseil fédéral de son rapport du 12 novembre 2019 sur les irrégularités comptables chez CarPostal Suisse SA. À cette occasion, elle l'a également prié de prendre position d'ici au 26 février 2020 au plus tard sur les constatations et recommandations formulées dans ledit rapport.

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Avis du Conseil fédéral

Le Conseil fédéral a pris acte du rapport de la CdG-E du 12 novembre 2019. Il salue l'initiative de la CdG-E d'examiner de manière approfondie les incidents liés aux irrégularités comptables chez CarPostal Suisse SA.

Le Conseil fédéral se prononce comme suit sur les constatations faites par la CdG-E et sur ses différentes recommandations.

2.1

Concernant les constatations faites par la CdG-E

Instrumentaire de gouvernement d'entreprise suffisant Les trois grandes entreprises proches de la Confédération, Swisscom, La Poste Suisse et les CFF, sont devenues autonomes en 1998 et en 1999 Depuis lors, le Conseil fédéral développe en permanence son rôle et sa stratégie en tant que propriétaire de ces entreprises et affine constamment le modèle de pilotage de la Confédération. Il a franchi une étape fondamentale avec le rapport du 13 septembre 2006 sur le gouvernement d'entreprise2 et avec le rapport complémentaire du 25 mars 20093 (incluant les principes de gouvernement d'entreprise), qui ont permis de constituer une base solide et transparente pour la politique de propriétaire de la Confédération. Le 1er janvier 2012, la loi fédérale du 17 décembre 2010 relative à la participation de l'Assemblée fédérale au pilotage des entités devenues autonomes 4est entrée en vigueur. Cette loi fournissait au Parlement une palette d'instruments pour la haute surveillance sur le pilotage des entités de la Confédération devenues autonomes.

Le pilotage des entreprises par le Conseil fédéral s'appuie principalement sur les objectifs stratégiques, qui servent à fixer de manière transparente les priorités du propriétaire vis-à-vis des entreprises pour une période de quatre ans. Dans les limites qui leur sont fixées par la loi et par les objectifs stratégiques, les entreprises proches de la Confédération sont autonomes, le propriétaire renonçant en principe à toute ingérence dans les affaires opérationnelles. La mise en oeuvre des objectifs stratégiques incombe au conseil d'administration, qui établit chaque année un rapport sur 2 3 4

FF 2006 7799 FF 2009 2299 RO 2011 5859

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la réalisation des objectifs au cours de l'exercice précédent. Le Conseil fédéral évalue la réalisation des objectifs et rédige un rapport à ce sujet. Puis le Parlement évalue, dans l'exercice de sa haute surveillance, si le Conseil fédéral a rempli son rôle de propriétaire. Chaque année, le chef du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) et le directeur de l'Administration fédérale des finances (AFF) ont un entretien à ce sujet avec les Commissions de gestion et les Commissions des finances ainsi qu'avec les présidences des deux Commissions des transports et des télécommunications (CTT).

Le Conseil fédéral a pris acte du fait que la CdG-E considère que le modèle de pilotage stratégique des entreprises proches de la Confédération reste globalement approprié. C'est également la conclusion à laquelle sont parvenus les experts qui, sur mandat du Conseil fédéral du 8 juin 2018, ont examiné la pratique en matière de pilotage des entreprises proches de la Confédération qui fournissent des prestations sur le marché. Dans leur rapport du 26 avril 2019, les experts ont dressé un bilan globalement positif: le pilotage, l'échange d'informations ainsi que le modèle de propriétaire dual ont globalement fait leurs preuves. Quant aux instruments à disposition, ils suffisent pour remplir le rôle de propriétaire de manière générale. Le modèle de propriétaire fonctionne bien dans la pratique. Le 26 juin 2019, le Conseil fédéral a examiné les recommandations du rapport d'experts et a défini leur mise en oeuvre ainsi que la suite des travaux. De plus amples informations figurent dans les commentaires relatifs aux recommandations de la CdG-E.

Dans une note d'information du 17 décembre 2019, le DETEC a informé le Conseil fédéral de l'état d'avancement de la mise en oeuvre de la décision du Conseil fédéral du 26 juin 2019.

En outre, on peut également se référer au postulat 18.4274 Abate «Stratégie du propriétaire pour les entités de la Confédération devenues autonomes», adopté le 6 mars 2019. Le Conseil fédéral a été chargé de présenter un rapport au Parlement qui illustre les critères adoptés pour élaborer la stratégie du propriétaire pour les entités de la Confédération devenues autonomes et les expériences acquises. Il doit également dresser un bilan des
travaux effectués ces dernières années dans le domaine de la gouvernance d'entreprise.

Le Conseil fédéral présentera, lors de l'adoption du rapport en exécution du postulat, un rapport sur l'état de la mise en oeuvre des mesures présentées dans le rapport d'experts ainsi que sur l'état de la mise en oeuvre des recommandations de la CdG-E, qu'il soutient.

Futur rapport sur le bilan global de l'affaire CarPostal Le Conseil fédéral réprouve les irrégularités commises de manière systématique chez CarPostal Suisse SA pendant des années. En tant qu'entreprise proche de la Confédération, la Poste a un rôle de modèle à jouer, surtout lorsqu'il s'agit de l'argent du contribuable. Dans ce contexte, le conseil d'administration de la Poste, qui est responsable de la direction générale de l'entreprise en vertu du droit de la société anonyme, n'a pas reçu de décharge complète pour les années 2017 et 2018.

La Suisse dispose d'un service public fiable et d'excellente qualité. Le Conseil fédéral est conscient que la confiance dans le service public a souffert des irrégulari7147

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tés chez CarPostal Suisse SA. Cependant, il convient également de relever que les structures de gouvernance ont fonctionné et que le comportement frauduleux de CarPostal Suisse SA a été mis au jour par l'Office fédéral des transports (OFT).

Le Conseil fédéral est convaincu que la documentation minutieusement élaborée, comprenant notamment le rapport de révision de l'OFT et les rapports d'enquête du cabinet d'avocats Kellerhals Carrard ainsi que d'un groupe d'experts indépendants, a permis d'examiner le fond de l'affaire et que le Conseil fédéral, le DETEC, l'AFF et la Poste disposaient des informations nécessaires afin que les mesures requises sur les plans de l'organisation et du personnel puissent être prises. La Conférence des directeurs cantonaux des transports publics (CTP), la Poste et l'OFT ont notamment déterminé ensemble les montants à rembourser à la Confédération, aux cantons et aux communes et à verser par la Poste. En outre, la Poste a vendu CarPostal France à une filiale de la SNCF, Keolis S.A., mettant ainsi un terme à l'implication en France.

Le Conseil fédéral a chargé l'Office fédéral de la police (fedpol) de mener à bien la procédure pénale administrative. Celle-ci est toujours en cours et devrait fournir des renseignements supplémentaires. Lorsqu'elle sera conclue, le Conseil fédéral prendra toutes les mesures éventuellement nécessaires, conformément aux attentes de la CdG-E. Le Conseil fédéral est également disposé à dresser un bilan global de l'affaire CarPostal dans un rapport et, en particulier, à exposer les enseignements généraux tirés de l'affaire CarPostal, les conséquences financières pour la Confédération, certains éléments de la procédure pénale administrative qui ont été approfondis, d'éventuelles actions en responsabilité émanant des organes et si les objectifs stratégiques de la Poste ont dû être adaptés. Le Conseil fédéral propose donc au Parlement d'adopter le postulat 19.4385 de la CdG-E «Bilan global de l'affaire CarPostal».

Conflit d'objectifs présumé en ce qui concerne des rendements conformes à la branche La CdG-E estime que le DETEC et l'AFF étaient informés depuis 2011 au moins du conflit d'objectifs auquel CarPostal Suisse SA était confrontée en matière de réalisation de bénéfices. Cependant, ils n'ont pas agi à l'époque.

Le Conseil fédéral ne conteste
pas que le le secrétariat général du DETEC et l'AFF savaient depuis 2011 que la Poste estimait se trouver dans un conflit d'objectifs entre les objectifs stratégiques du Conseil fédéral et les exigences du trafic régional de voyageurs (TRV). À l'occasion des entretiens du propriétaire du 8 septembre 2011 (séance réunissant le secrétariat général du DETEC, l'AFF et la Poste), la Poste a fait valoir que CarPostal Suisse SA était confrontée dans l'exercice de son activité à des exigences divergentes entre la législation sur le TRV et les objectifs stratégiques du Conseil fédéral. Les cantons et l'OFT étaient d'avis que, conformément à la loi du 20 mars 2009 sur le transport des voyageurs (LTV)5, il n'était plus défendable que CarPostal Suisse SA puisse réaliser des bénéfices en tant qu'entreprise de transport au bénéfice d'une concession. Toutefois, cette position était quel-

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RS 745.1

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que peu en contradiction avec les objectifs stratégiques du Conseil fédéral, qui exigent de la Poste qu'elle garantisse et augmente la valeur de l'entreprise.

Les services propriétaires ont ensuite envisagé une éventuelle adaptation des objectifs stratégiques dans le domaine du transport de voyageurs. Toutefois, il a toujours été clair pour les services concernés que les objectifs stratégiques ne priment pas la loi et que la Poste est tenue de se conformer à celle-ci. En outre, l'objectif de garantir ou d'augmenter durablement la valeur de l'entreprise concerne la Poste dans son ensemble et non certains domaines régis par une législation spéciale comme celui de CarPostal. L'exigence d'un résultat conforme à la branche se référait en 2011 (objectifs stratégiques 2010­2013)6 au service universel et aux services libres. Ce n'est qu'à partir des objectifs stratégiques 2013-20167 que l'exigence d'un rendement conforme à la branche s'applique dans tous les domaines d'activité. Dans ce contexte, le Conseil fédéral estime qu'il n'y a pas réellement de conflit d'objectifs entre les objectifs stratégiques et les prescriptions du TRV.

Le 26 novembre 2012, une séance réunissant le directeur de l'OFT et la direction générale de la Poste a eu lieu, des représentants du secrétariat général du DETEC et de l'AFF y assistant. Ainsi que le relève la CdG-E dans son rapport, le DETEC, l'AFF et l'OFT ont alors informé la Poste qu'un rendement proche de zéro s'appliquait au transport régional de voyageurs subventionné et qu'aucun bénéfice ne devait être réalisé dans ce domaine. La CdG-E conclut dans son rapport que par la suite, les services propriétaires et l'OFT pouvaient en toute bonne foi partir du principe que CarPostal Suisse SA respecterait l'exigence en vertu de laquelle le rendement conforme à la branche est proche de zéro dans le TRV subventionné. Le sujet n'a donc plus figuré à l'ordre du jour d'un entretien du propriétaire. CarPostal Suisse SA étant subordonnée pour le domaine donnant droit aux subventions à la surveillance directe de l'OFT, les discussions entre le propriétaire et la Poste dans le secteur de CarPostal se sont concentrées sur l'activité à l'étranger, notamment sur les activités en France. Ce sujet a donc été régulièrement inscrit à l'ordre du jour des rapports de la Poste, notamment dans
le cadre du suivi de l'arrêt du 23 septembre 2016 du Tribunal de commerce de Lyon contre CarPostal France.

La CdG-E invite le Conseil fédéral à examiner la répartition des compétences entre la Confédération et les cantons dans le domaine de la surveillance du TRV et l'opportunité d'attribuer des tâches de surveillance supplémentaires aux offices cantonaux des transports publics ou aux contrôles cantonaux des finances. Ces points seront traités dans le message relatif à la réforme du TRV. Il en va de même pour le mandat de la CdG-E consistant à examiner une révision des dispositions légales portant sur l'utilisation des bénéfices dans le TRV subventionné et sur la comptabilité des entreprises subventionnées. Le Conseil fédéral propose donc au Parlement d'adopter les deux postulats correspondants (19.4387 et 19.4388) de la CdG-E.

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2.2

Concernant les recommandations de la CdG-E

Recommandation 1 ­ Adaptation des objectifs stratégiques de la Poste concernant CarPostal (ch. 5.2.2) Le Conseil fédéral est invité à adapter dès que possible les objectifs stratégiques de la Poste concernant CarPostal. Dans ce cadre, il est invité en particulier à examiner les options suivantes: délier CarPostal de l'obligation d'augmenter la valeur de l'entreprise ou de réaliser un rendement conforme à la branche, ou ancrer explicitement dans les objectifs stratégiques le fait qu'un rendement proche de zéro est attendu dans le domaine subventionné.

Le Conseil fédéral soutient la recommandation 1. Il révise actuellement les objectifs stratégiques de la Poste pour la nouvelle période 2021-2024. Dans le cadre de cette révision, il examinera comment procéder pour que les objectifs indiquent sans équivoque que le Conseil fédéral n'attend aucun rendement de la Poste sur les lignes exploitées par CarPostal SA dans le cadre du TRV subventionné.

Comme cela a déjà été précisé pour les constatations de la CdG-E, le Conseil fédéral estime qu'il n'y a jamais eu de conflit d'objectifs jusqu'ici. D'ailleurs, il n'y a pas à proprement parler d'interdiction de réaliser des bénéfices dans le TRV. Bien qu'aucun bénéfice ne puisse être planifié dans les offres de TRV (notamment aucune rémunération du capital propre), un bénéfice existant à la fin de l'année (p. ex. en raison d'augmentations de la productivité inattendues) n'est pas interdit. Toutefois, l'utilisation d'éventuels excédents est limitée (art. 36 LTV).

Recommandation 2 ­ Clarifications relatives à la période avant 2007 (ch. 6.2.3) A l'issue de la procédure pénale administrative menée par fedpol concernant CarPostal, le Conseil fédéral est invité à mandater une enquête approfondie portant sur les circonstances expliquant l'introduction des pratiques comptables illicites chez CarPostal avant 2007 et les responsabilités y relatives.

Le rapport confié par le président du conseil d'administration de la Poste au cabinet d'avocats Kellerhals Carrard et le rapport du groupe d'experts se réfèrent à la période 2007­2015. Le rapport complémentaire de Kellerhals Carrard à l'intention du propriétaire a porté sur la période 2016­2018. Vu les délais de prescription, la période antérieure à 2007 n'a pas été examinée dans les différents rapports. Les enquêtes ont
cependant montré que des transferts illicites avaient déjà eu lieu avant 2007. Malgré la prescription, la Poste a décidé de rembourser spontanément les subventions indûment touchées pour cette période.

Le Conseil fédéral comprend que la CdG-E souhaite obtenir des éclaircissements sur les circonstances qui ont conduit à l'introduction de pratiques comptables illégales chez CarPostal Suisse SA avant 2007. Il estime toutefois qu'une analyse des événements antérieurs à 2007 serait très laborieuse, complexe et en fin de compte disproportionnée. De plus, les personnes responsables au premier chef ne travaillent plus chez CarPostal SA et les documents nécessaires ne sont sans doute plus disponibles 7150

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dans leur totalité. De même dans la procédure pénale administrative de fedpol, les responsabilités relevant du droit pénal et datant de la période antérieure à 2007 ne seront pas examinées. Le Conseil fédéral attache également une grande importance au fait que, malgré la prescription, la Poste a également procédé à des remboursements pour la période antérieure à 2007. Dans ce contexte, l'OFT a chargé la Poste de lui transmettre un rapport relatif aux pratiques comptables de CarPostal avant 2007. Celui-ci a été finalisé à l'été 2018. Dans ce rapport, la Poste a conclu que des transferts illicites systématiques avaient été effectués surtout à partir de 2004, et que les bénéfices réalisés de 2004 à 2007 peuvent être estimés à environ 17,2 millions de francs. Toutefois, la qualité des données disponibles pour élaborer le rapport a été qualifiée de médiocre par la Poste. C'est également la raison pour laquelle le Conseil fédéral estime qu'une enquête supplémentaire portant sur la période antérieure à 2007 ne devrait guère fournir de nouveaux résultats.

Au vu de ce qui précède, le Conseil fédéral rejette la recommandation 2 de la CdG-E.

Recommandation 3 ­ Flux financiers entre CarPostal Suisse et CarPostal France (ch. 7.3) Une fois que la procédure pénale administrative menée par fedpol au sujet de CarPostal sera close, le Conseil fédéral est invité à s'assurer que la question des flux financiers entre CarPostal Suisse et sa filiale française soit approfondie, que les responsabilités liées à cet aspect soient établies et que toutes les mesures nécessaires soient prises.

CarPostal France a entre-temps été vendue et l'accès à ses documents s'est ainsi compliqué. Le Conseil fédéral accepte cependant de procéder, dans le cadre du bilan global déjà mentionné et à l'issue de la procédure pénale administrative menée par fedpol, à un examen approfondi des flux financiers entre CarPostal Suisse SA et CarPostal France.

Partant, le Conseil fédéral soutient la recommandation 3.

Recommandation 4 ­ Nouveau système de surveillance sur le TRV subventionné (ch. 8.1.1) 4.1. Le Conseil fédéral est invité à s'assurer qu'une attention particulière soit accordée, dans le cadre du développement du nouveau système de surveillance sur le TRV subventionné, aux aspects suivants: compétences des collaborateurs de l'OFT,
indépendance des collaborateurs de l'office vis-à-vis des entreprises, examen des activités annexes des entreprises, vérification des chiffres livrés par les entreprises, méthodologie transparente de définition des risques, documentation relative à l'interprétation des bases légales, responsabilité des organes de révision externe.

4.2. Le Conseil fédéral est invité à examiner si une séparation structurelle plus claire serait souhaitable, au sein de l'OFT, entre les rôles de commande et de surveillance du TRV subventionné.

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4.3. Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que l'OFT développe un système de monitorage des signalements qui lui sont transmis par d'autres organes dans le domaine du TRV.

4.4. Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que les interfaces entre l'OFT et les autorités cantonales compétentes soient identifiées et réglées dans le cadre du nouveau système de surveillance.

Le Conseil fédéral soutient les recommandations 4.1 à 4.4.

Dans le cadre de la réorganisation de la Division Financement de l'OFT, un manuel portant sur un concept de controlling et de pilotage sera élaboré, expliquant comment les différents points contenus dans la recommandation seront mis en oeuvre: compétences spécifiques, indépendance, vérification des chiffres livrés par les entreprises, méthodologie transparente de définition des risques, responsabilité des organes de révision externes (recommandation 4.1). La séparation des rôles de commande et de surveillance doit être examinée (recommandation 4.2). L'OFT escompte que ces travaux seront terminés d'ici fin 2020.

En ce qui concerne la recommandation 4.3, la Division Politique de l'OFT développera un système de monitorage des signalements qui lui sont transmis par d'autres organes d'ici le milieu de l'année 2020.

L'OFT assure la coordination au niveau du système de surveillance avec les offices cantonaux en charge des transports (concernant le concept de controlling et de pilotage) et avec différents services de contrôle financier concernant les examens des subventions en aval (recommandation 4.4).

Recommandation 5 ­ Eléments de l'activité des entreprises considérés comme stratégiques pour la Confédération en tant que propriétaire (ch. 8.2.2.2) Le Conseil fédéral est invité à élaborer des critères et une catégorisation afin de déterminer quels éléments de l'activité des entreprises proches de la Confédération sont considérés comme «stratégiques pour la Confédération en tant que propriétaire». Ces éléments seront soumis à un suivi plus étroit par le Conseil fédéral, les départements propriétaires et l'AFF; ils figureront notamment systématiquement à l'ordre du jour des entretiens trimestriels avec les entreprises.

Les objectifs stratégiques permettent déjà aujourd'hui d'identifier clairement les activités que le Conseil fédéral considère comme stratégiques pour les entreprises proches de la Confédération. Il s'agit notamment: ­

de réaliser dans une optique économiquement durable le mandat légal de service universel de l'entreprise et de toute activité importante en dehors de ce secteur;

­

d'éviter des risques de réputation politique pour l'entreprise proche de la Confédération et donc aussi pour le propriétaire;

­

de garantir la stabilité financière de l'entreprise, y compris des liquidités suffisantes et des capitaux propres stables;

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­

de préserver la survie économique de l'entreprise;

­

de procéder à des changements dans la stratégie d'entreprise imputables à des éléments internes ou externes (p. ex. l'acquisition d'une participation à des fins s'inscrivant dans la stratégie du groupe, l'expansion du groupe à l'étranger, une restructuration importante du groupe sur le plan économique et la baisse du chiffre d'affaires d'une filiale importante), et

­

de garantir le fonctionnement durable de la direction générale (p. ex. la planification de la relève, la prévention des conflits d'intérêts, une politique de rémunération objectivement justifiable et le maintien de la crédibilité des différentes personnes).

Conformément au rapport d'experts «Évaluation du gouvernement d'entreprise 2019», le Conseil fédéral entend aménager de manière plus prospective les entretiens du propriétaire, notamment à l'aide d'une planification plus rapide, d'une mise à l'ordre du jour de sujets sensibles et récurrents ainsi que via des discussions préliminaires au niveau technique. Ce faisant, il s'agit toujours de maintenir un équilibre juridique, économique et politique entre la tâche générale de gestion du conseil d'administration (art. 716a, al. 1, du code des obligations [CO])8 et la surveillance stratégique du Conseil fédéral (art. 8, al. 4 et 5, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration9, en relation avec l'art. 24, al. 3, de l'ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration)10.

Le Parlement et le Conseil fédéral peuvent également préciser des aspects importants du point de vue stratégique dans la loi d'organisation et dans les dispositions d'exécution. Sur la base des compétences que lui confère la loi du 17 décembre 2010 sur l'organisation de la Poste11 , le Conseil fédéral a par exemple défini, dans le cadre de la restructuration de la Poste, des prescriptions concernant la mise en oeuvre des dispositions de la Confédération relatives aux salaires des cadres et sur le pilotage du groupe concernant l'obligation de fournir le service universel (art. 1 à 5 de l'ordonnance du 24 octobre 2012 relative à la loi sur l'organisation de la poste)12 .

Le Conseil fédéral est donc prêt à accepter la recommandation 5. Il considère qu'elle est en principe déjà suivie.

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RS 220 RS 172.010 RS 172.010.1 RS 783.1 RS 783.11

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Recommandation 6 ­ Identification et traitement des conflits d'objectifs (ch. 8.2.2.4) Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que les conflits d'objectifs (internes et externes) auxquels sont confrontées les entreprises proches de la Confédération soient identifiés et traités de manière adéquate. Cet aspect sera pris en charge par la nouvelle délégation permanente du Conseil fédéral consacrée aux entreprises proches de la Confédération. Une attention particulière sera en outre portée à ces aspects dans le cadre des entretiens périodiques avec les entreprises ainsi que lors du renouvellement des objectifs stratégiques.

Le Conseil fédéral estime que l'aspect matériel de la recommandation 6 est réalisé.

Il s'efforce déjà aujourd'hui d'éviter les conflits d'objectifs au moment de formuler ou de renouveler les objectifs stratégiques. Pour clarifier les conflits d'objectifs qui ne peuvent être résolus avec les objectifs stratégiques, le Conseil fédéral et les cadres dirigeants des entreprises proches de la Confédération recourent notamment aux entretiens du propriétaire pour trouver des solutions appropriées. Si nécessaire, les objectifs stratégiques peuvent être adaptés de manière ponctuelle.

En règle générale, le Conseil fédéral fixe les objectifs stratégiques pour quatre ans afin de garantir une sécurité de planification pour les entreprises. Cependant, au cours de cette période, le contexte politique, juridique ou économique peut changer.

Une priorisation des objectifs stratégiques établie à l'avance serait souvent trop rigide. Elle pourrait également estomper les limites des responsabilités entre le propriétaire et le conseil d'administration. L'une des tâches de pilotage centrales du conseil d'administration est précisément d'identifier à temps les conflits d'objectifs de l'entreprise, de pouvoir les traiter et de savoir quand il faut solliciter le propriétaire.

Le Conseil fédéral rejette toutefois l'aspect de la recommandation 6 relatif à l'organisation: il propose au Parlement de rejeter la motion 19.4383 de la CdG-E visant la création d'une nouvelle délégation du Conseil fédéral consacrée aux entreprises proches de la Confédération.

Recommandation 7 ­ Consultation des autorités de surveillance sectorielle au sujet des objectifs stratégiques (ch. 8.2.2.4) Le Conseil fédéral est invité
à s'assurer que, lors de l'élaboration ou du renouvellement des objectifs stratégiques des entreprises proches de la Confédération, les autorités de surveillance sectorielle concernées soient systématiquement consultées, afin qu'elles puissent lui signaler d'éventuels conflits d'objectifs. Le cas échéant, des adaptations seront apportées aux objectifs stratégiques afin d'éviter toute confusion.

Les travaux de révision des objectifs stratégiques assignés aux entreprises proches de la Confédération s'étendent à chaque fois sur une période d'environ un an. Sous la direction du département spécialisé et en collaboration avec l'AFF et l'entreprise concernée, la nécessité de réviser les objectifs est déterminée puis discutée à plu7154

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sieurs reprises lors des entretiens du propriétaire. Ensuite, le projet des nouveaux objectifs stratégiques est soumis aux deux CTT pour consultation. Actuellement, les autorités de surveillance sectorielle sont le plus souvent déjà impliquées dans la révision des objectifs stratégiques, au plus tard lors de la consultation des offices portant sur la proposition du Conseil fédéral relative aux nouveaux objectifs stratégiques.

La recommandation 7 est donc déjà mise en oeuvre aujourd'hui. Les départements spécialisés continueront d'accorder une attention particulière au cercle des destinataires lors des consultations des offices.

Recommandation 8 ­ Respect par les entreprises de la législation sur l'archivage (ch. 8.2.2.5) Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que l'ensemble des établissements fédéraux autonomes soumis à la législation sur l'archivage respectent à l'avenir celle-ci de manière scrupuleuse, et que cet aspect soit mentionné de manière adéquate au sein des objectifs stratégiques des entreprises.

Le Conseil fédéral estime que le devoir de surveillance des Archives fédérales concernant les services qui archivent eux-mêmes leurs documents (art. 8 de l'ordonnance du 8 septembre 1999 sur l'archivage13; en ce qui concerne La Poste en tant qu'organe d'archivage indépendant: art. 1, al. 1, let. e, de la loi fédérale du 26 juin 1998 sur l'archivage[LAr]14, en relation avec l'annexe 2, let. a, 1er tiret, de l'ordonnance sur l'archivage) fournit une base légale qui oblige déjà maintenant le Conseil fédéral à garantir que les entreprises proches de la Confédération respectent la législation fédérale en la matière.

En principe, le Conseil fédéral n'inclut dans les objectifs stratégiques aucune prescription déjà clairement énoncée dans les lois et les ordonnances. Le respect de la législation en vigueur constitue une condition préalable non écrite pour toutes les entreprises, donc également pour celles qui sont proches de la Confédération. La situation est comparable à celle par exemple du droit de la concurrence, du droit de la construction ou du droit du travail. Dans ces cas également, il y a un intérêt public à ce que les entreprises respectent pleinement les prescriptions légales en matière de protection de la concurrence loyale, des propriétaires fonciers voisins ou de la santé des
salariés. Cependant, les objectifs stratégiques ne comprennent pas de tels aspects.

Toutefois, afin d'accorder une importance encore plus grande à la conformité des entreprises proches de la Confédération, le Conseil fédéral reprendra dans les futurs objectifs stratégiques l'obligation pour les entreprises de disposer d'un système de gestion de la conformité (CMS), concrétisant ainsi une recommandation du rapport d'experts «Évaluation du gouvernement d'entreprise 2019». Ce système devra respecter la norme ISO 19.600. Les cadres supérieurs de l'entreprise devront également fournir des informations sur les principaux risques de l'entreprise et sur les do13 14

RS 152.11 RS 152.1

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maines clés dans le CMS. Cette règle a été mise en oeuvre pour la première fois dans les objectifs stratégiques assignés à Skyguide pour la période 2020 à 202315.

Le Conseil fédéral tiendra dûment compte des enseignements tirés des différentes enquêtes menées sur les irrégularités comptables chez CarPostal Suisse SA et qu'il réglera les éventuels problèmes structurels liés à l'archivage avec les responsables du groupe de la Poste et avec les Archives fédérales. La LAr est en cours d'évaluation, le respect de la législation fédérale en la matière par les services archivant eux-mêmes leurs documents et le devoir de surveillance des Archives fédérales sont réexaminés dans ce contexte. Il faut donc attendre les résultats de l'évaluation. S'il en ressortait qu'une intervention plus poussée s'impose, le Conseil fédéral se repenchera sur la question. Mais pour l'instant, il rejette la recommandation 8.

Recommandation 9 ­ Entretiens entre le propriétaire et les entreprises (ch. 8.2.2.6) Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que la future délégation consacrée aux entreprises proches de la Confédération soit informée régulièrement par ses membres des aspects essentiels issus des échanges informels réalisés avec les entreprises, et que cette délégation détermine si ces informations doivent être officialisées dans le cadre des entretiens trimestriels «formels», et/ou si une information doit être transmise au Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral estime qu'il n'est pas possible d'éviter les contacts informels entre les entreprises fédérales et les services propriétaires. Ces contacts peuvent même mener à inscrire un sujet spécifique à l'ordre du jour d'un entretien du propriétaire. Toutefois, ils ne doivent pas dévaloriser l'échange d'informations au plus haut niveau ni même s'y substituer. Les décisions stratégiques doivent toujours être compréhensibles et contrôlables.

Le Conseil fédéral, le département spécialisé et l'AFF ne noueront des contacts informels qu'avec retenue, surtout au plus haut niveau, tet veilleront à renforcer la sensibilité de tous les services concernés à cet égard. On gardera toutefois à l'esprit que les contacts informels sont indispensables aux unités externalisées telles que Swissmedic, qui y recourt avec l'Office fédéral de la santé publique lorsqu'il s'agit d'homologuer des
médicaments.

Comme cela a déjà été mentionné pour la recommandation 6, le Conseil fédéral propose au Parlement de rejeter la motion 19.4383 de la CdG-E visant la création d'une nouvelle délégation du Conseil fédéral consacrée aux entreprises proches de la Confédération.

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Recommandation 10 ­ Instruments internes de surveillance des entreprises (ch. 8.2.2.7) 10.1 Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que les objectifs stratégiques de toutes les entreprises proches de la Confédération mentionnent l'existence des instruments de surveillance suivants: système de gestion des risques, système de contrôle interne, système de gestion de la conformité. Pour chacun de ces instruments, le Conseil fédéral est invité à inclure dans les objectifs stratégiques une disposition relative à l'information du propriétaire et à définir des indicateurs de contrôle.

10.2 Le Conseil fédéral est en outre invité à définir clairement quelles informations issues des instruments internes de surveillance des entreprises doivent être transmis au propriétaire, sous quelle forme et avec quel degré de détail, et à ancrer ensuite cet aspect dans les objectifs stratégiques.

10.3 Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que le rapport sur l'atteinte des objectifs stratégiques des entreprises, remis annuellement au Parlement, fasse état de manière transparente des principales informations issues des instruments internes de surveillance des entreprises, notamment en ce qui concerne la situation financière des entreprises.

10.4 Le Conseil fédéral est enfin invité à procéder, à l'issue de la période stratégique actuelle, à un bilan concernant les objectifs stratégiques relatifs aux risques et leurs indicateurs de contrôle, afin de déterminer si ceux-ci doivent être adaptés ou complétés.

Le Conseil fédéral est d'avis que, du point de vue matériel, les recommandations 10.1 à 10.4 ont été largement mises en oeuvre ou que leur mise en oeuvre a commencé. Conformément au rapport d'experts «Évaluation du gouvernement d'entreprise 2019», il procède actuellement à orienter de manière plus prospective les entretiens du propriétaire (cf. explications concernant la recommandation 5). Le Conseil fédéral peut ainsi exercer encore plus efficacement sa surveillance stratégique des instruments de surveillance interne.

Les objectifs stratégiques exigent déjà des entreprises qu'elles mettent en place un système de gestion des risques (système RM) et qu'elles informent en outre le propriétaire des risques les plus importants de l'entreprise. Des indicateurs ont été définis pour mesurer la réalisation de cet objectif:
le système de gestion des risques, qui doit tenir compte des exigences de la norme ISO 31000, est soumis à un audit indépendant une fois tous les quatre ans. Pour ce faire, des critères d'examen ont été prédéfinis. Deux éléments sont primordiaux: premièrement, l'audit doit déterminer si l'entreprise a mis en oeuvre un système RM approprié et un processus RM conformément à la norme ISO 31000. Deuxièmement, l'évaluation doit indiquer si les systèmes et les processus de gestion des risques sont fonctionnels et appliqués efficacement. Étant donné qu'il n'est pas possible d'évaluer à large échelle le deuxième élément (la norme ISO 31000 n'est pas certifiable), on se réfère à une série de questions directrices. L'audit fournit comme résultat des recommandations classées par ordre de priorité en vue d'améliorer et de développer la gestion des risques examinée. Ces directives concernant la gestion des risques sont édictées depuis 2018 7157

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à chaque renouvellement des objectifs stratégiques pour chacune des grandes entreprises proches de la Confédération (prestataires de service sur le marché). Le Conseil fédéral est donc d'avis que les objectifs stratégiques contiennent déjà suffisamment de prescriptions relatives au système de gestion des risques. Il est toutefois conscient que la mise en oeuvre pourrait mettre en évidence des possibilités d'amélioration. Il sera notamment particulièrement vigilant à l'égard des risques découlant des activités des entités d'un groupe fortement subventionnées ou actives à l'étranger.

Contrairement au système de gestion des risques conçu stratégiquement, le système de contrôle interne (SCI) se concentre sur les risques opérationnels des processus d'entreprise financièrement pertinents et sur la description et la mise en oeuvre de mesures de contrôle permettant de minimiser ces risques. Depuis l'exercice 2008, l'organe de révision de l'entreprise vérifie s'il existe un tel SCI et en fait état dans son rapport d'audit annuel (art. 728a s., CO). Si des défaillances ponctuelles de processus opérationnels signalent des déficiences systématiques, celles-ci doivent être enregistrées dans le système de gestion des risques et portées à l'attention du propriétaire. Cela se fait notamment lors des entretiens du propriétaire. Le fait d'inscrire le contrôle de l'existence du SCI dans les objectifs stratégiques n'apporterait donc aucune plus-value.

Le CMS vise à assurer le respect des lois, règles et normes. Il fait partie d'un système intégré de gestion des risques. L'existence d'un CMS efficace est une composante importante d'une bonne gestion d'entreprise et doit pour cette raison être dorénavant intégrée dans les objectifs stratégiques. L'entreprise devra respecter la norme ISO 19.600. Cette exigence a été inscrite pour la première fois dans les objectifs stratégiques assignés à Skyguide pour la période 2020 à 2023. En ce qui concerne les autres entreprises, des discussions auront lieu dès les premiers mois de 2020, ce qui pourrait conduire à adapter ponctuellement les objectifs stratégiques en vigueur.

Recommandation 11 ­ Structures de conduite des filiales des entreprises (ch. 8.2.2.8) Le Conseil fédéral est invité à examiner si les structures de conduite au sein des filiales des entreprises proches de la
Confédération sont adéquates et si des directives générales devraient être établies à ce sujet.

Le Conseil fédéral pilote les entreprises proches de la Confédération en leur assignant des objectifs stratégiques. Il n'exerce en principe pas d'influence sur les affaires opérationnelles.

Les objectifs stratégiques sont assignés aux entreprises proches de la Confédération et à leurs sociétés relevant du groupe. Le conseil d'administration de la société chapeautant le groupe est responsable de la gestion uniforme de l'ensemble de l'entreprise. Il veille à la mise en oeuvre et à la réalisation des objectifs stratégiques dans tout le groupe, établit à l'intention du Conseil fédéral un rapport sur leur réalisation et fournit les informations nécessaires au contrôle.

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Le Conseil fédéral n'impose aucune exigence aux entreprises proches de la Confédération en ce qui concerne la structure de leur organisation. Cela relève des attributions inaliénables du conseil d'administration (art. 716a, al. 1, ch. 1 et 2, CO). Le Conseil fédéral ne procède pas non plus à un contrôle des structures de gestion dans les sociétés du groupe relevant d'entreprises proches de la Confédération. Il ne lui appartient pas non plus de donner des instructions concernant la conception de ces structures. Il incombe avant tout au conseil d'administration des entreprises proches de la Confédération de contrôler régulièrement les structures organisationnelles et d'informer le propriétaire de manière transparente et exhaustive de la situation de l'entreprise, y compris des sociétés du groupe.

Au vu de ce qui précède, le Conseil fédéral rejette la recommandation 11. Toutefois, s'il venait à disposer d'informations selon lesquelles le respect des objectifs stratégiques ou des prescriptions légales pourrait être menacé, en raison notamment des structures de direction d'une société du groupe revêtant une importance stratégique, il abordera la question avec le conseil d'administration de l'entreprise et au besoin exercera l'influence nécessaire (cf. également les explications concernant la recommandation 12).

Recommandation 12 ­ Filiales les plus importantes des entreprises (ch. 8.2.2.8) 12.1 Le Conseil fédéral est invité à définir quelles filiales des entreprises proches de la Confédération revêtent une importance stratégique pour le propriétaire et à soumettre celles-ci à un suivi renforcé de la part des départements compétents. Dans ce cadre, une attention particulière sera portée aux filiales et coopérations étrangères des entreprises.

12.2 Le Conseil fédéral est invité à s'assurer que le rapport sur l'atteinte des objectifs stratégiques des entreprises, remis annuellement au Parlement, fasse état de manière transparente de la situation des filiales des entreprises qui revêtent une importance stratégique pour la Confédération en tant que propriétaire.

12.3 Le Conseil fédéral est invité à vérifier quelles mesures permettraient de garantir une meilleure transparence concernant la situation financière des filiales des entreprises proches de la Confédération et de faire part des résultats de
son examen.

Le Conseil fédéral partage le point de vue de la CdG-E, qui estime que certaines filiales des entreprises proches de la Confédération revêtent une importance stratégique. Dans le contexte de l'affaire CarPostal, de l'activité déficitaire de CarPostal France ainsi que de la présentation incomplète de la situation financière des filiales étrangères de CarPostal, le Conseil fédéral entend accorder de manière générale encore plus d'attention aux filiales (en particulier à celles qui ont des activités à l'étranger). Il est donc disposé à donner suite à la recommandation 12 et à accorder, dans le rapport annuel sur la réalisation des objectifs des entreprises proches de la Confédération, une attention accrue à la situation des filiales revêtant une importance stratégique. Cette exigence est toutefois déjà partiellement mise en oeuvre, dans la mesure où par exemple Swisscom SA établit un rapport sur sa filiale italienne Fastweb.

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Le Conseil fédéral examinera également comment accroître la transparence concernant la situation financière des filiales (selon le rapport de la CdG-E également avec le soutien des organes de révision externe ou du Contrôle fédéral des finances (CDF) en sa fonction d'organe suprême de la Confédération en matière de surveillance financière (en référence à la motion 19.4371 Ettlin)). Il convient toutefois de mentionner sur ce point qu'il existe une asymétrie d'information inhérente entre l'entreprise et le propriétaire. Dans les faits, le Conseil fédéral est souvent tributaire des informations du conseil d'administration pour pouvoir évaluer les objectifs stratégiques des entreprises proches de la Confédération.

Recommandation 13 ­ Mesures à disposition de la Confédération en cas de crise au sein des entreprises (ch. 8.2.2.9) Le Conseil fédéral est invité à établir, sur la base de la législation en vigueur, un inventaire des instruments à disposition de la Confédération lors de situations de crise au sein des entreprises dont elle est propriétaire, définissant également les processus et responsabilités dans de telles situations. Il est invité à se référer à cet inventaire lors de situations de crise futures. L'élaboration de cet inventaire sera confiée à la délégation permanente du Conseil fédéral chargée des entreprises proches de la Confédération.

Le principe 22b du rapport sur le gouvernement d'entreprise de la Confédération définit les principaux instruments dont dispose le Conseil fédéral en cas de dérive d'une entreprise proche de la Confédération. Outre la modification des objectifs stratégiques et les mesures législatives (par ex. révision partielle de la loi d'organisation), le Conseil fédéral dispose de toutes les possibilités prévues par le droit des sociétés anonymes pour pouvoir prendre des mesures contre la volonté du conseil d'administration: ­

modification des statuts dans le cadre du droit de la société anonyme obligatoire (art. 698, al. 2, ch. 1, CO);

­

révocation ou remplacement de l'organe de révision et de tout ou partie des membres du conseil d'administration (ch. 2);

­

refus d'approbation du rapport annuel, en particulier des comptes annuels et des comptes consolidés (ch. 3 et 4), et donc de la détermination du bénéfice du bilan et de la constitution de réserves;

­

refus de donner décharge à un membre ou à l'ensemble des membres du conseil d'administration (ch. 5);

­

extension des attributions de l'organe de révision, ad hoc ou statutaire (art. 731a, al. 1, CO; p. ex. contrôle des liquidités, du rapport sur la situation financière, de la politique salariale ou de toutes les opérations commerciales dans un domaine déterminé; rapport à l'assemblée générale plus complet que celui exigé par le CO);

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désignation d'experts pour contrôler l'ensemble ou une partie de la gestion (al. 3);

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demande d'un contrôle spécial auprès du tribunal (art. 697a ss CO);

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droits en matière de responsabilité exercés contre les membres du conseil d'administration et l'organe de révision (art. 754 ss CO).

Le Conseil fédéral peut utiliser ces instruments lors d'une assemblée générale formellement convoquée (art. 699 CO) ou immédiatement lors d'une assemblée réunissant tous les actionnaires (art. 701 CO).

L'inventaire des instruments à disposition existe déjà. Toutefois, la manière dont le Conseil fédéral les utilise et les combine dans une situation de crise ne peut être déterminée à l'avance que de manière relativement abstraite. Trop d'éléments dépendent de l'éventuelle situation de crise (calendrier, aspects liés au droit de la preuve, comportement actuel des cadres dirigeants, réflexions quant aux opportunités d'ordre économique, préliminaires relevant d'autres services étatiques, mesures déjà mises en oeuvre par l'entreprise, dimension politique, etc.). Dans le modèle de propriétaire dual, qui dans l'ensemble a fait ses preuves, le département spécialisé et l'AFF devraient pouvoir proposer au Conseil fédéral les mesures appropriées en fonction du cas d'espèce. Un plan comprenant des mesures fixées préalablement créerait une sécurité du droit illusoire et priverait les services concernés de la flexibilité nécessaire, ce qu'il faut éviter. C'est pourquoi le Conseil fédéral rejette la partie correspondante de la recommandation 13.

Comme cela a déjà été mentionné pour la recommandation 6, le Conseil fédéral propose au Parlement de rejeter la motion 19.4383 de la CdG-E visant la création d'une nouvelle délégation du Conseil fédéral consacrée aux entreprises proches de la Confédération.

Recommandation 14 ­ Coordination entre le propriétaire et les autorités de surveillance sectorielle (ch. 8.2.3.1) 14.1. Le Conseil fédéral est invité à faire en sorte que les échanges entre les départements propriétaires et l'AFF, d'un côté, et les autorités de surveillance sectorielle sur les entreprises proches de la Confédération, de l'autre, soient renforcés et clairement documentés.

14.2 Le Conseil fédéral est invité à inclure, en annexe de son rapport annuel sur l'atteinte des objectifs stratégiques des entreprises adressé au Parlement, un chapitre présentant les principales informations pertinentes pour l'atteinte des objectifs qui lui ont été communiquées par les autorités de surveillance sectorielle.

Le Conseil fédéral est d'avis que la recommandation 14.1 est déjà largement mise en oeuvre aujourd'hui,
notamment lorsque les autorités de surveillance sectorielle sont des offices du DETEC. Toutes les deux à trois semaines, des séances (rapports d'office) réunissent la direction de l'office et le chef du DETEC et permettent également d'aborder des sujets en lien avec les entreprises proches de la Confédération (p. ex. rapports avec l'OFCOM portant sur la Poste, rapports avec l'OFT portant sur les CFF, rapports avec l'Office fédéral de l'aviation civile consacrés à Skyguide).

Ces rapports font à chaque fois l'objet de procès-verbaux. Les échanges avec les autorités de surveillance (Commission fédérale de la poste [PostCom], Commission

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fédérale de la communication) sont beaucoup moins intensifs en raison de l'indépendance prescrite par la loi.

Le Conseil fédéral veillera à ce que les départements spécialisés encouragent les autorités de surveillance sectorielles à aborder suffisamment tôt les difficultés constatées avec les entreprises proches de la Confédération. De même, il soutient la demande de la CdG-E de consulter les autorités de surveillance avant les discussions avec le propriétaire afin de pouvoir inscrire les difficultés éventuelles à l'ordre du jour. Afin d'éviter un mélange au niveau des fonctions, la participation d'une autorité de surveillance aux entretiens avec le propriétaire ne devrait être cependant qu'exceptionnelle.

Le rapport du Conseil fédéral concernant la réalisation des objectifs stratégiques durant l'exercice écoulé se fonde sur les objectifs qu'il assigne aux entreprises proches de la Confédération et fournit des renseignements spécifiques à chaque objectif, indiquant notamment le degré de réalisation. Les informations émanant des autorités de surveillance sectorielle sont donc un des éléments sur lesquels le Conseil fédéral fonde son appréciation, outre le rapport général du conseil d'administration et les observations faites par les services propriétaires. L'image globale qui en résulte permet au Conseil fédéral d'établir le niveau de réalisation, qu'il corrobore avec des explications. Si le Conseil fédéral devait indiquer dans son rapport sur la réalisation des objectifs quelles informations des autorités de surveillance sectorielle sont pertinentes pour l'évaluation des objectifs, il devrait également évaluer les autres informations dont il dispose. Cela entraînerait un investissement disproportionné et ne générerait pratiquement aucune valeur ajoutée dans le processus de réalisation des objectifs. Comme déjà mentionné, le Conseil fédéral procède à une appréciation globale de toutes les informations dont il dispose. C'est pourquoi il rejette la mise en oeuvre de la recommandation 14.2.

Recommandation 15 ­ Transparence des entreprises vis-à-vis des autorités de surveillance sectorielle (ch. 8.2.3.2) Le Conseil fédéral est invité à prendre des mesures afin que les autorités de surveillance sectorielle sur les entreprises proches de la Confédération aient en tout temps accès à l'ensemble des
informations nécessaires à l'exercice de leur mandat légal. Le Conseil fédéral est en outre invité à examiner si la transparence vis-à-vis des autorités de surveillance sectorielle devrait être explicitement mentionnée dans les objectifs stratégiques des entreprises.

Le Conseil fédéral est bien entendu également d'avis que les autorités de surveillance sectorielle doivent avoir accès aux documents dont elles ont besoin dans le cadre de la surveillance qu'elles exercent sur les entreprises proches de la Confédération. Toutefois, il ne lui incombe pas de fixer des objectifs aux entreprises concernant leur collaboration avec les autorités de surveillance. Quant à la question de la transparence par rapport aux autorités de surveillance sectorielle, elle n'est pas non plus un aspect stratégique du pilotage des entreprises qui devrait être inscrit dans les objectifs stratégiques.

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Comme déjà mentionné en réponse à la recommandation 8, le Conseil fédéral n'inclut en principe dans les objectifs stratégiques aucune prescription déjà clairement énoncée dans les lois et les ordonnances. Même si les lois spéciales ne contiennent pas toutes des dispositions explicites sur l'obligation de renseigner, des dispositions spéciales indiquent quels documents et informations doivent être mis à la disposition des autorités de surveillance. L'art. 23, al. 3, de la loi du 17 décembre 2010 sur la poste16 prévoit par exemple que la Poste est tenue de fournir à la PostCom, autorité de surveillance des services postaux relevant du service universel, notamment les renseignements nécessaires au contrôle du respect du mandat légal de service universel et de la qualité ainsi qu'à la surveillance concernant l'interdiction des subventions croisées.

Si les autorités de surveillance rencontrent des difficultés à obtenir des informations, elles peuvent s'adresser en tout temps aux services propriétaires (ce que l'OFT a fait dans l'affaire CarPostal Suisse SA).

Dans ce contexte, le Conseil fédéral est d'avis que les prescriptions concernant la transparence des entreprises vis-à-vis des autorités de surveillance sectorielle ne peuvent être abordées dans les objectifs stratégiques. Il rejette donc la recommandation 15.

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