20.038 Message sur le train de mesures en faveur des médias du 29 avril 2020

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet de loi fédérale sur un train de mesures en faveur des médias, que nous vous proposons d'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer les interventions parlementaires suivantes: 2017

P

16.3630

Institution d'une autorité de surveillance de l'audiovisuel indépendante (N 14.3.17, Commission des transports et des télécommunications CN)

2018

M 17.3008

Modification de l'article 44, alinéa 3, et de l'article 39, alinéa 2, lettre a, LRTV pour renforcer les offres électroniques du service public hors SSR (N 11.9.17, Commission des transports et des télécommunications CN, E 11.12.17, N 7.6.18)

2018

M 17.3627

Modèle de contenu partagé (N 11.9.17, Commission des transports et des télécommunications CN, E 12.12.17, N 7.6.18)

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

29 avril 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2020-0001

4385

Aperçu Par le présent message, le Conseil fédéral propose au Parlement des mesures d'aide aux médias rapidement réalisables. Il entend ainsi créer des conditions attrayantes pour une offre de médias diversifiée et de même valeur dans toutes les régions et régions linguistiques.

Contexte Dans une démocratie, des médias indépendants et diversifiés remplissent une fonction étatique et politique importante. Or, la situation économique des médias se détériore de plus en plus: les recettes liées à la publicité et aux abonnements réalisées par les journaux sont en constante baisse. Les recettes de la publicité en ligne affichent une hausse, certes, mais les médias en ligne nationaux n'en profitent pas.

La disposition à payer pour des médias en ligne est faible. Dans ce contexte, il a été donné suite à une initiative parlementaire visant à étendre l'aide indirecte à la presse.

Par le présent message, le Conseil fédéral propose des mesures d'aide aux médias rapidement réalisables. Le projet de loi fédérale sur les médias électroniques proposé lors de la consultation a été abandonné, mais le Conseil fédéral propose de modifier des lois existantes (loi sur la poste, RS 783.0; loi fédérale sur la radio et la télévision, RS 784.40) et de créer une nouvelle loi fédérale sur l'aide aux médias en ligne.

Le service public assuré par la radio et la télévision (SSR, radios et télévisions locales et régionales) doit être maintenu inchangé.

Contenu du projet Le projet contient trois éléments principaux, qui partagent un objectif commun: améliorer les conditions pour les médias suisses, afin que ceux-ci puissent continuer à exercer leur fonction de vigile.

Modification de la loi sur la poste: Les aides indirectes à la presse régionale et locale doivent être développées. Le plafonnement du tirage et le critère des têtières sont supprimés, alors que le rabais sur la distribution par exemplaire est augmenté.

La contribution annuelle fédérale doit passer de 30 à 50 millions de francs. Cette mesure soulage financièrement les éditeurs en libérant des fonds pour la transformation numérique. La presse associative et des fondations ne fait pas l'objet du présent message et continue à recevoir un soutien annuel de 20 millions de francs.

Modification de la loi fédérale sur la radio et la télévision: Les mesures générales
existantes d'aide aux médias doivent être développées. Il s'agit en particulier de soutenir les institutions de formation et de formation continue, les agences de presse et les organismes d'autorégulation, ainsi que les investissements dans les technologies de l'information. Ces mesures visent à améliorer la qualité, la visibilité et la repérabilité des médias suisses et devraient profiter à l'ensemble de la branche, quel

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que soit le modèle commercial appliqué. Elles sont financées par la redevance de radio-télévision.

Création d'une nouvelle loi fédérale sur l'aide aux médias en ligne: En raison de l'évolution de l'utilisation des médias, les médias en ligne prennent de plus en plus d'importance pour la démocratie. Cependant, la création de contenus est coûteuse et le marché des utilisateurs encore trop peu développé. Afin d'aider les médias en ligne à atteindre le public avec des contenus diversifiés et pertinents tout en l'amenant à payer pour ces contenus, une contribution doit leur être versée si leurs offres médiatiques génèrent des recettes provenant du public. Il peut s'agir de recettes émanant de services payants (abonnement numérique, téléchargement individuel) ou de contributions volontaires des utilisateurs. Cette solution permet d'offrir des prix attractifs et de lancer des modèles commerciaux durables. Elle incite à produire et à proposer des contenus journalistiques pour lesquels l'utilisateur est prêt à payer. Cette aide requiert jusqu'à 30 millions de francs par an, puisés dans les fonds généraux de la Confédération. La mesure est limitée à dix ans.

Comme pour l'aide indirecte à la presse quotidienne et hebdomadaire en abonnement, les offres gratuites ne sont pas soutenues.

Objectifs La branche des médias connaît une baisse des recettes, des fusions et des suppressions d'emplois. L'information régionale est particulièrement touchée. D'un point de vue étatique et démocratique, cette évolution est alarmante. Actuellement, les médias en ligne ne reçoivent aucun soutien - contrairement à la radio, à la télévision, aux journaux et aux magazines. La future aide aux médias doit tenir davantage compte de l'utilisation croissante des médias numériques. D'une part, les médias en ligne doivent être soutenus financièrement, d'autre part, les mesures générales d'aide aux médias doivent soulager les médias électroniques dans leur ensemble. Le train de mesures profitera ainsi à tous les types de médias. La presse quotidienne et hebdomadaire en abonnement bénéficiera de rabais plus importants sur la distribution régulière. Les offres des médias en ligne générant des recettes auprès du public seront également soutenues (critères basés sur ceux appliqués pour l'aide indirecte à la presse, sans mandats de prestations
journalistiques). Tous les médias électroniques, quel que soit leur modèle commercial, bénéficient des mesures d'aide générales, par exemple des contributions à l'infrastructure. Le financement des mandats de prestations journalistiques à la radio et à la télévision ainsi que des rabais sur la distribution pour la presse associative et la presse des fondations est maintenu.

L'objectif du train de mesures est de permettre une offre médiatique diversifiée et équivalente dans toutes les régions et langues nationales, à la radio, à la télévision, dans les quotidiens et les hebdomadaires, ainsi qu'en ligne.

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Table des matières Aperçu

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1

Contexte 1.1 Nécessité d'agir et objectifs 1.1.1 La situation des médias 1.1.2 Constats établis jusqu'ici par le Parlement, le Conseil fédéral et la Commission fédérale des médias 1.1.3 Train de mesures et objectifs 1.2 Possibilités examinées et solution choisie 1.2.1 Assouplissement du critère de la fréquence de parution 1.2.2 Inclusion de la distribution matinale et dominicale 1.2.3 Extension du rabais sur la distribution pour la presse associative et des fondations 1.2.4 Possibilités en matière d'aide aux médias en ligne 1.3 Relation avec le programme de législature et les stratégies du Conseil fédéral 1.4 Classement d'interventions parlementaires

4390 4390 4390

2

Procédure préliminaire, en particulier procédure de consultation 2.1 Contenu du projet mis en consultation 2.2 Résultats de la consultation 2.3 Conclusions

4405 4405 4407 4408

3

Comparaison juridique, notamment avec le droit européen 3.1 Aide aux offres de médias en ligne dans des pays comparables 3.2 Comparaison avec le droit européen 3.3 Recommandations du Conseil de l'Europe

4409 4409 4413 4415

4

Présentation du projet 4.1 Nouvelle réglementation proposée 4.2 Harmonisation des tâches et des moyens financiers 4.3 Mise en oeuvre

4416 4416 4417 4417

5

Commentaire des dispositions 5.1 Loi sur la poste 5.2 Loi fédérale sur la radio et la télévision 5.3 Loi fédérale sur l'aide aux médias en ligne

4417 4417 4418 4422

6

Conséquences 6.1 Conséquences pour la Confédération 6.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 6.3 Conséquences pour l'économie 6.4 Conséquences pour la société

4428 4428

4388

4396 4399 4401 4401 4402 4403 4403 4404 4405

4428 4429 4430

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6.5 6.6 7

Conséquences sur l'environnement Autres conséquences

Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité 7.1.1 Remarques préalables 7.1.2 Modification de la loi sur la poste 7.1.3 Modification de la LRTV 7.1.4 Loi fédérale sur l'aide aux médias en ligne 7.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 7.3 Forme de l'acte à adopter 7.4 Assujettissement au frein aux dépenses 7.5 Respect du principe de subsidiarité et du principe d'équivalence fiscale 7.6 Conformité à la loi sur les subventions 7.7 Délégation de compétences législatives 7.8 Protection des données

4430 4430 4430 4430 4430 4432 4432 4433 4434 4435 4435 4436 4436 4437 4437

Annexe Mesures actuelles d'aide en faveur des médias

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Loi fédérale sur un train de mesures en faveur des médias (Projet)

4441

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs

1.1.1

La situation des médias

Les médias indépendants constituent un élément central de la démocratie directe.

Leur importance d'un point de vue étatique et démocratique est incontestable. Le Parlement et le Conseil fédéral s'occupent de la politique des médias depuis de nombreuses années, incités par le changement structurel profond de la branche des médias, lequel a un impact négatif sur la situation économique des entreprises de médias et donc sur la diversité des médias.

L'aide aux médias aujourd'hui Aujourd'hui, la SSR ainsi que les radios et télévisions locales et régionales remplissent un mandat de service public. En contrepartie, elles reçoivent une quote-part de la redevance de radio-télévision, soit 1,2 milliard de francs pour la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SSR) et 81 millions pour les autres diffuseurs (état 2019). La loi fédérale du 24 mars 2006 sur la radio et la télévision (LRTV) 1 prévoit également d'autres mesures de soutien.

La presse reçoit une aide indirecte. La Confédération consacre désormais 30 mil­ lions de francs par an aux rabais sur la distribution des quotidiens et des hebdomadaires en abonnement dans le cadre de la distribution régulière effectuée par La Poste Suisse. Les rabais sur la distribution de la presse associative et des fondations sont financés à hauteur de 20 millions de francs par an. La Constitution (Cst.)2 ne prévoit pas d'aide directe à la presse par la Confédération.

Les médias en ligne ne bénéficient aujourd'hui d'aucun soutien, à l'exception d'une réduction du taux de TVA.

On trouvera une vue d'ensemble des mesures actuelles d'aide aux médias dans l'annexe.

Utilisation des médias suisses et situation économique Avec la numérisation et l'avènement de l'internet, les modes d'utilisation des médias ont considérablement changé. Le recours aux médias classiques à des fins d'information est en constante diminution.

1 2

RS 784.40 RS 101

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Illustration 1 Fréquence d'utilisation des différentes catégories de médias à des fins d'information

Source: fög 2019, population suisse 16-69 ans, internautes au sens large, question sur l'utilisation des différents types de médias à des fins d'information (très souvent/souvent)

S'agissant des médias classiques, la baisse des chiffres relatifs à l'utilisation va de pair avec une dégradation de la situation économique: les recettes engendrées par la publicité et les abonnements diminuent. Entre 2009 et 2018, les recettes publicitaires

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de la presse ont diminué de plus de moitié. Le tirage des journaux a lui aussi chuté, pour passer de 9,2 millions d'exemplaires en 2009 à 5,9 millions en 20193.

S'agissant de la radio et de la télévision, dans l'ensemble, les recettes publicitaires accusent un léger recul, une tendance qui concerne en particulier les diffuseurs chargés d'un mandat de prestations journalistiques.

Selon une enquête menée auprès d'experts4, il fallait s'attendre pour 2019 à une baisse du volume publicitaire pour la presse, la télévision et la radio (moins 10 % par rapport à 2017); 92 % des personnes interrogées étaient en outre certaines, ou jugeaient probable, que d'autres produits de médias disparaissent et 88 % que d'autres rédactions fusionnent.

Les recettes publicitaires perdues principalement par la presse ne profitent pas aux offres journalistiques en ligne, mais vont à des plateformes étrangères ou aux marchés nationaux des petites annonces.

Illustration 2 Evolution des recettes publicitaires nettes de la presse et du domaine en ligne, 2009-2018, en millions de francs

Source: Fondation Statistique Suisse en Publicité, Dépenses publicitaires suisses 2010­2019.

Presse: Presse quotidienne, hebdomadaire et régionale; en ligne: Affichage et marchés des petites annonces

Les recettes publicitaires perdues ne peuvent actuellement pas être compensées par les offres payantes proposées en ligne. Selon les indications fournies par la branche 3 4

Source: www.schweizermedien.ch > Zahlen & Fakten > Branchendaten (état le 6.1.2020) Sous le nom DELPHInarium, Publicom, une entreprise spécialisée dans le conseil et la recherche sur les médias, publie deux fois par an les résultats d'une enquête menée auprès d'experts des médias. Plus de quarante experts des principales entreprises de médias ainsi que des représentants de la publicité, du journalisme des médias, des sciences de la communication et de la communication d'entreprise participent au panel.

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des médias imprimés, d'une part la disposition à payer pour l'utilisation de médias numériques reste généralement faible, et d'autre part la valeur des offres numériques est inférieure à celle des offres analogiques. Un abonnement à une édition imprimée génère encore des revenus nettement supérieurs à ceux d'un abonnement à une édition en ligne. Les éditeurs sont sur la corde raide: ils doivent adapter leurs offres aux nouveaux besoins d'utilisation sans pour autant négliger les abonnements imprimés pour des raisons de rendement, et n'encouragent donc pas beaucoup le passage au numérique.

Rien ne semble annoncer un renversement de tendance dans un futur proche.

C'est également la conclusion à laquelle est parvenue la Commission fédérale des médias (COFEM) en 2017. Selon un rapport d'experts commandé par celle-ci5, l'espoir d'un refinancement durable des offres journalistiques sur le marché numérique par des entreprises de médias traditionnelles ne s'est pas réalisé jusqu'à maintenant. Le marché publicitaire en ligne serait même soumis à un changement de paradigme institutionnel fondamental, qui pourrait se révéler fatal pour les offres d'information en ligne. Un journalisme en ligne socialement pertinent ne pourra pas non plus être refinancé à partir des marchés numériques de la publicité ou des paiements. Des produits payants de niche sont certes imaginables, mais ils ne répondent pas à l'exigence d'universalité d'un journalisme pertinent pour la société.

Les changements qui s'opèrent dans les habitudes d'utilisation se reflètent également dans le pouvoir d'opinion des différents types de médias. Le Monitoring médias Suisse6, qui analyse les médias et la formation de l'opinion sur mandat de l'Office fédéral de la communication (OFCOM), constate que le plus grand pouvoir d'opinion revient à la télévision, devant la radio, la presse écrite et l'internet. Ce résultat repose sur deux facteurs: la performance qualitative des marques (enquête auprès de la population) et le pouvoir de marché quantitatif (performances de contact des marques de médias). Dans ce contexte, la presse imprimée obtient de bons résultats pour tous les groupes d'âge, tandis que les médias en ligne obtiennent des résultats particulièrement bons auprès des jeunes.

5

6

Lobigs, F. (2017): Changement de paradigmes dans l'économie des contenus numériques.

Rapport d'experts réalisé sur mandat de la COFEM (résumé en français), TU Dortmund.

Disponible sous www.emek.admin.ch > Thèmes > L'avenir des médias Suisse (état le 6.1.2020).

www.monitoring-medias-suisse.ch

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Illustration 3 Pouvoir d'opinion des différents types de médias, par tranche d'âge, en % 2017

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Source: Monitoring médias Suisse

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Une comparaison des années 2017 et 2018 montre que les médias en ligne gagnent en importance dans toutes les tranches d'âge, mais en particulier chez les jeunes, et que la presse écrite perd du terrain.

Structure et diversité du paysage suisse des médias La détérioration de la situation économique des médias suisses se reflète également dans la diversité de la presse. Entre 2011 et 2019, le nombre de journaux et de feuilles officielles dans toute la Suisse est passé de 315 à 269 titres: les titres en allemand de 258 à 221, les titres en français de 41 à 35 et les titres en italien de 14 à 11; les titres en d'autres langues restent stables (2 titres)7. Enfin, le nombre d'unités journalistiques est passé de 30 (en 2011) à 20 en 2019, soit neuf en Suisse alémanique, sept en Suisse romande, trois en Suisse italienne et une en Suisse rhétoromane8. Une unité journalistique est constituée de journaux qui ont des rubriques communes, reprises soit complètement, soit avec des modifications mineures par les différentes éditions (p. ex. journaux régionaux).

Le Monitoring médias 2018 relève également des signes indiquant que les conditions de marché difficiles accélèrent les tendances à la concentration. Au cours de l'exercice sous revue, certaines marques ont complètement disparu ou n'ont conservé que la diffusion en ligne. En outre, des rédactions et des entreprises ont fusionné, ce qui se traduira probablement par un nouvel appauvrissement de la diversité des contenus. Le pouvoir d'opinion se concentre de plus en plus chez Tamedia et à la SSR, ce qui peut nuire à la libre formation de l'opinion.

Perspectives d'avenir pour les médias suisses Les changements qui s'opèrent dans les habitudes d'utilisation posent de nouveaux défis. Pour atteindre le même public, en termes quantitatifs, les médias doivent exploiter davantage de canaux avec moins de ressources. Malgré ce qu'on pourrait croire à première vue, la fourniture de contenus numériques n'est pas plus économique que l'envoi d'un journal imprimé. Certes, il n'y a pas de coûts d'impression et d'envoi, mais l'alimentation des différents canaux et plateformes engendrent d'autres frais. Les cycles d'investissement sont plus courts et les attentes du public en matière d'attractivité et de convivialité des offres sont élevées. Les organisations de médias
doivent investir dans ce domaine pour s'assurer que le public reste disposé à payer pour leurs offres sur l'internet. Dans le même temps, elles ne doivent pas négliger leurs clients de la presse imprimée.

Sur le marché de la publicité en ligne, les médias nationaux se trouvent en concurrence avec les plateformes internationales, dont les revenus publicitaires sont générés à leurs dépens. Par conséquent, les rédactions sont réduites ou fusionnées, et certaines offres supprimées. L'ancrage régional de l'information en paie le plus lourd tribut.

7 8

www.schweizermedien.ch > Zahlen & Fakten > Branchendaten (état le 22.1.2020).

Les chiffres pour 2011 proviennent de: Künzler, M. (2013): Mediensystem Schweiz.

Konstanz und München, UVK Verlagsgesellschaft mbH. Les chiffres pour 2019 sont tirés de la conférence de M. Künzler «Das schweizerische Mediensystem in Bewegung», le 1er avril 2019, à l'Université de Zurich.

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1.1.2

Constats établis jusqu'ici par le Parlement, le Conseil fédéral et la Commission fédérale des médias

Les milieux politiques planchent sur l'aide aux médias depuis longtemps déjà. Au cours des dix dernières années, le Conseil fédéral a soumis au Parlement de nombreux rapports consacrés aux thèmes de la diversité des médias, de l'aide aux médias et du service public dans les médias:

9

10

11

­

Dans son rapport du 29 juin 20119, le Conseil fédéral répond à la question de savoir si la presse va pouvoir continuer à remplir sa fonction d'information, d'intégration et de formation de l'opinion malgré le changement structurel que connaît la branche des médias, ou s'il convient de prendre des mesures étatiques. A l'époque, le Conseil fédéral ne voit pas la nécessité d'intervenir et évoque la responsabilité individuelle et l'autorégulation. Il estime que les médias doivent chercher eux-mêmes la manière de gérer ces changements et les difficultés qui les accompagnent, et qu'ils pourraient entre autres créer une base économiquement viable pour l'offre journalistique en ligne, améliorer les conditions de travail des journalistes et garantir la qualité dans le domaine en ligne.

­

Dans son rapport sur l'aide aux médias du 5 décembre 201410, le Conseil fédéral constate que le changement structurel dans le secteur des médias se poursuit et que le public aussi bien que les annonceurs se tournent toujours plus vers les offres en ligne. Il arrive à la conclusion que la presse imprimée est la plus touchée et que la suppression de l'aide indirecte à la presse sans mesure compensatoire augmenterait encore la pression. Dans le domaine des médias électroniques, le Conseil fédéral préconise une approche globale, incluant les médias en ligne. L'aide aux médias en ligne doit être examinée sur la base d'un débat approfondi sur le service public. La Commission des transports et des télécommunications du Conseil national (CTT-N) a organisé des auditions lors des délibérations sur le rapport. A l'issue de ces dernières, le Conseil des Etats a adopté le postulat 14.3298 «Rapport relatif aux prestations de service public de la SSR».

­

Dans son rapport sur le service public du 17 juin 201611, le Conseil fédéral analyse le service public dans les médias. Sur la base de ses considérations Rapport du Conseil fédéral du 29 juin 2011 en réponse au postulat Fehr du 12 juin 2009 (09.3629 «Garantir la diversité de la presse») et au postulat de la CIP-N du 6 novembre 2009 (09.3980 «Aide à la presse. Alternatives aux taxes postales préférentielles»).

Garantir les fonctions étatiques et démocratiques des médias, rapport du Conseil fédéral du 5 décembre 2014 en réponse à la motion 12.3004 de la Commission des institutions politiques du Conseil national (CIP-N), disponible sous www.ofcom.admin.ch > Médias électroniques > Politique des médias > Actualités et contextes > Rapport sur le paysage médiatique suisse: une branche en pleine mutation.

Rapport d'analyse de la définition et des prestations du service public de la SSR compte tenu de la position et de la fonction des médias électroniques privés ­ Rapport du Conseil fédéral du 17 juin 2016 en réponse au postulat 14.3298 de la Commission des transports et des télécommunications du Conseil des Etats (CTT-E), disponible sous www.ofcom.admin.ch > Médias électroniques > Politique des médias > Actualités et contextes > Rapport du Conseil fédéral sur le service public dans le domaine des médias.

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d'ordre politique et démocratique, il conclut que le service public de la SSR et celui des radios et télévisions locales et régionales doivent être maintenus, mais que l'offre doit être adaptée aux conditions numériques. A moyen terme, la LRTV doit être remplacée par une loi sur les médias électroniques contenant une réglementation indépendante des vecteurs de diffusion. Il convient de tenir compte de l'augmentation de l'utilisation mobile. Les deux CTT mènent alors des auditions approfondies (associations de la presse, de la radio et de la télévision, éditeurs, entreprises de médias, COFEM, Union européenne de radiodiffusion [UER], secteur publicitaire). Le Parlement prend connaissance du rapport et d'autres rapports complémentaires, dont une analyse détaillée du principe de subsidiarité réalisée par l'OFCOM 12. En suite de quoi, le 13 février 2017, la CTT-N dépose deux motions (17.3008 «Modification de l'article 44, alinéa 3, et de l'article 39, alinéa 2, lettre a, LRTV pour renforcer les offres électroniques du service public hors SSR», 17.3009 «Instaurer un modèle fondé sur les contenus libres»).

D'autres rapports ont été demandés dans le contexte des débats sur le service public menés au Parlement. Pour la CTT-N, l'application du principe de subsidiarité au service public dans les médias et le financement de la SSR par la publicité occupent une place centrale. Les rapports contiennent des explications détaillées sur l'application du principe de subsidiarité à la branche des médias. Ils examinent par ailleurs si le service public provoque des distorsions de la concurrence et dans quels domaines les radios et télévisions privées suisses se développeraient si la concurrence était moins intense.

La COFEM a été créée en 2012 dans le but de surveiller et d'analyser le paysage suisse des médias et de mettre son expertise au service du Conseil fédéral. Elle est composée de spécialistes externes à l'administration, issus des groupes professionnels, des institutions et des associations concernés de l'ensemble de la branche des médias. Dans le passé, elle a publié de nombreux rapports et recommandations sur l'aménagement des médias et l'aide aux médias: ­

12

13

Dans son rapport de 2014 intitulé «Aide aux médias: état des lieux et recommandations»13, la COFEM préconise de maintenir l'aide indirecte à la presse pour trois à cinq ans et de la remplacer ensuite par un nouveau concept, qui ne soit plus lié au papier ni à la distribution. En outre, elle y plaide en faveur de l'aide à la formation et à la formation continue journalistiques, à l'agence de presse Keystone-ATS (alors ats) et à des projets de médias (par le biais d'Innosuisse, alors Commission pour la technologie et l'innovation [CTI]). En outre, elle avance qu'il faut promouvoir les start-up journalistiques, les prestations journalistiques ou rédactionnelles d'exception et la recherche appliquée dans le domaine des médias.

Service public dans le domaine des médias: précisions données par l'administration, disponible sous www.ofcom.admin.ch > Médias électroniques > Politique des médias > Actualités et contextes > Rapport du Conseil fédéral sur le service public dans le domaine des médias (état le 6.1.2020).

Disponible sous www.emek.admin.ch > Thèmes > Aide aux médias (état le 6.1.2020)

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­

En 2015, la COFEM met l'accent sur le service public et publie le document de discussion «Médias de service public en Suisse»14. Elle y conclut que le système actuel des mandats de prestations confiés à la radio et à la télévision (y compris la SSR) doit être maintenu. Elle recommande un soutien comparable pour les médias journalistiques imprimés et en ligne.

­

En 2017, la COFEM présente la rapport «Avenir du système des médias et de la communication en Suisse: tendances, scénarios, recommandations»15.

Sur la base d'études empiriques, elle identifie une tendance croissante vers une utilisation des médias affranchie du temps et de l'espace, technique (algorithmes), individualisée et interactive. Elle réitère la recommandation selon laquelle des mesures de soutien doivent être prises pour les principales infrastructures journalistiques. Elle estime également qu'il est nécessaire de promouvoir directement les services de médias essentiels pour la démocratie. L'aide doit être conçue de manière à être neutre sur le plan de la technologie et des canaux de diffusion.

­

Le dernier document de travail de 2018 est intitulé «Spécificités des médias à l'ère numérique: Options d'organisation pour un paysage suisse des médias performant d'un point de vue économique et social»16. La COFEM recommande une aide directe et technologiquement neutre aux médias journalistiques. Elle considère essentiel que la population suisse continue à disposer d'une offre en médias complète et diversifiée. Selon elle, le service public d'un fournisseur national doit être maintenu et la radiodiffusion publique adaptée aux nouvelles réalités numériques.

En outre, un certain nombre d'interventions parlementaires récentes relatives à la future réglementation et à l'aide aux médias ont été déposées 17. Le Conseil national n'a pas donné suite à quatre initiatives parlementaires visant à modifier l'art. 93 Cst.; une initiative n'a pas encore été traitée18.

14 15 16 17

18

Disponible sous www.emek.admin.ch > Thèmes > Service public (état le 6.1.2020) Informations détaillées sous www.emek.admin.ch > Thèmes > L'avenir des médias Suisse (état le 6.1.2020) Disponible sous www.emek.admin.ch > Thèmes > Avenir des médias Suisse (état le 6.1.2020) Iv. pa. Engler du 13 décembre 2018 (18.479 «Soutenir la transformation numérique de la presse», donné suite), Iv. pa. Savary du 13 décembre 2018 (18.480 «Pour un soutien indirect renforcé à la presse», retiré), Mo. Vogler du 14 décembre 2018 (18.4284 «Pour une presse suisse diversifiée qui favorise la formation démocratique de l'opinion», non encore traité au Conseil), Ip. Guhl du 27 septembre 2018 (18.3941 «Evaluer et améliorer l'aide indirecte à la presse», liquidé), Mo. Quadri du 13 juin 2018 (18.3514 «Attribuer une partie de la redevance de la SSR à la presse papier, afin de vraiment garantir le pluralisme médiatique», non encore traité au Conseil), Ip. Fluri du 26 septembre 2017 (17.3729 «Etendre l'aide indirecte accordée à la presse», liquidé), Mo. Groupe socialiste CN du 6 juin 2017 (17.3393 «Pour une loi multimédias», liquidé).

Iv. pa. Aebischer du 12 décembre 2018 (18.470 «Inscription dans la Constitution d'un article sur les médias», liquidé), Iv. pa. Guhl du 12 décembre 2018 (18.471 «Inscription dans la Constitution d'un article sur les médias», liquidé), Iv. pa. Feller du 12 décembre 2018 (18.472 «Créer la base constitutionnelle nécessaire à un élargissement des formes de soutien à la presse écrite», liquidé), Iv. pa. Lombardi du 12 décembre 2018 (18.473 «Inscription dans la Constitution d'un article sur les médias», non encore traité au Conseil), Iv. pa. Grossen du 12 décembre 2018 (18.474 «Inscription dans la Constitution d'un article sur les prestations de base en matière de médias», liquidé).

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L'aide indirecte à la presse est un thème récurrent en politique, mais le principe dans lequel elle est ancrée est ancien. Sa base légale a été révisée quatre fois au cours des vingt dernières années; trois autres fois, elle devait être supprimée, sur proposition du Conseil fédéral. Dans son message du 30 septembre 2002 sur les mesures d'allégement des finances fédérales, le Conseil fédéral a proposé que les subventions fédérales soient réduites et que l'aide soit limitée jusqu'en 2007 au plus tard. En 2004, la CTT-N a déposé une initiative demandant l'élaboration d'un projet de modification de la loi du 17 décembre 2010 sur la poste (LPO)19. Dans le cadre du paquet de consolidation et de réexamen des tâches (LCRT 2014), le Conseil fédéral a proposé une dernière fois de renoncer à l'aide indirecte à la presse et d'économiser ainsi 50 millions de francs par an. Avec l'adoption de la motion Bulliard-Marbach du 6 mars 2013 (13.3048 «Contre la suppression de l'aide indirecte à la presse sans solution de remplacement convaincante») en juin 2016, le Parlement a clairement soutenu le maintien de l'aide indirecte à la presse, au moins jusqu'à ce qu'une alternative crédible soit disponible. Le Conseil fédéral a été contraint de renoncer à supprimer l'aide indirecte à la presse dans les paquets ultérieurs de consolidation et de réexamen des tâches. La motion a été classée en juin 2019. A l'occasion des débats concernant le budget 2018 avec le plan intégré des tâches et des finances 2019­2021, la demande de réduction des contributions fédérales et de limitation dans le temps, formulée par une minorité de la commission, a été rejetée (23.10.2017).

1.1.3

Train de mesures et objectifs

Comme expliqué au ch. 1.1.1 ci-dessus, les médias suisses sont en pleine mutation structurelle. Leur diversité, en particulier la présence de médias indépendants à l'échelle nationale, est menacée. L'Etat ne peut pas rester inactif alors que les rédactions sont réduites ou fusionnées et que l'information régionale rétrécit comme peau de chagrin. Une démocratie comme la Suisse a besoin de médias indépendants et forts, ainsi que d'une population informée.

Voici les principaux défis auxquels les médias sont confrontés:

19

­

Les recettes de la presse reculent, ce qui entraîne des fusions et des réductions d'effectifs dans les rédactions. Les informations sur les régions et la perspective régionale sur les événements nationaux et internationaux sont particulièrement menacés.

­

Les utilisateurs se tournent de plus en plus vers l'internet, notamment les jeunes.

­

Ce changement ne s'accompagne pas des flux financiers correspondants, ce qui pose problème. En effet, les recettes publicitaires réalisées sur l'internet tendent à profiter à des plateformes étrangères plutôt qu'au contenu journalistique national. Les recettes émanant des abonnements numériques ne peuvent pas non plus compenser cette évolution car les consommateurs sont RS 783.0

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moins disposés à payer pour des offres numériques que pour des offres analogiques.

­

Même si les recettes sont actuellement faibles, les organisations de médias doivent investir dans la création de services en ligne, afin d'établir des offres numériques nationales payantes solides.

Le train de mesures est conçu pour relever rapidement ces défis et pour soutenir la branche dans sa transformation numérique. Il poursuit en particulier les objectifs suivants: ­

Les éditeurs régionaux doivent être renforcés afin de contrecarrer les tendances à la concentration et à l'appauvrissement des prestations rédactionnelles dans les régions.

­

La qualité et la pertinence des médias électroniques doivent être préservées et soutenues.

­

La création, dans le contexte numérique, de modèles commerciaux autofinancés doit être facilitée.

Afin de soutenir les médias suisses, des mesures ciblées pouvant être mises en oeuvre rapidement seront prises et les médias dans leur ensemble renforcés. Les mesures prévues concernent la presse quotidienne et hebdomadaire en abonnement ainsi que les médias en ligne qui réalisent des recettes auprès du public. Quel que soit le modèle commercial, les mesures générales, en particulier l'aide aux projets d'infrastructure informatique, doivent profiter à tous les médias électroniques.

Le Conseil fédéral propose donc un train de mesures qui renforceront la place suisse des médias dans son ensemble. L'aide indirecte à la presse pour les journaux régionaux et locaux doit être étendue de manière à ce que les titres dont le tirage dépasse 40 000 exemplaires ou faisant partie d'un réseau de têtières avec un tirage global supérieur à 100 000 exemplaires, qui n'ont actuellement droit à aucune aide, puissent également en bénéficier. Par ailleurs, une augmentation du financement à 50 millions de francs (actuellement: 30 millions) par an doit permettre d'augmenter le rabais sur la distribution par exemplaire. Le but est que les titres déjà soutenus disposent de davantage de moyens financiers pour la transformation numérique. La presse associative et la presse des fondations continueront à recevoir une aide annuelle de 20 millions de francs.

Les médias en ligne deviennent de plus en plus importants pour la formation démocratique de l'opinion. Le passage de la lecture des journaux imprimés à la consommation en ligne entraîne une baisse considérable des recettes. L'élaboration de modèles payants prend du temps. Une aide temporaire vise à atténuer les effets du processus d'ajustement structurel; elle est basée sur le modèle de l'aide indirecte à la presse. Les critères sont principalement le contenu rédactionnel, l'actualité, la diversité thématique et le respect des normes journalistiques; il ne doit pas y avoir d'exigences en matière de contenu sous forme de mandats de prestations (voir ch. 5.3). Comme dans le cas de l'aide indirecte à la presse, l'aide temporaire n'est pas destinée aux offres gratuites. Elle doit inciter les médias à concevoir des offres de manière à ce que le public soit disposé à les payer. Le financement de médias par les recettes générées auprès du public garantit une large assise, ce qui contribue à 4400

FF 2020

l'indépendance de ces médias. Le modèle de radios et de télévisions chargées de mandats de prestations journalistiques pour certaines offres en ligne a été rejeté lors de la consultation.

L'aide doit être basée sur le chiffre d'affaires réalisé auprès des utilisateurs. Il s'agit donc d'un mécanisme d'aide axé sur le marché et qui soutient les offres de médias en ligne atteignant un public disposé à payer. Les éditeurs sont incités à développer des offres numériques novatrices, sans pour autant que les investissements consentis n'impliquent des mesures d'économie dans les rédactions. Lorsque les éditeurs augmentent leur chiffre d'affaires tiré des recettes réalisées auprès du public grâce à des offres attrayantes et s'assurent ainsi des revenus à long terme, le succès et l'effet de la mesure d'aide se constatent directement. L'objectif est d'encourager en particulier les petits et moyens éditeurs à investir dans des offres numériques pendant la phase de transformation, laquelle est inévitable compte tenu de l'évolution de l'utilisation des médias. Afin d'éviter une concentration encore plus forte et de ne pas laisser les grands éditeurs en profiter de manière excessive, le modèle proposé est dégressif.

Un montant de 30 millions de francs par an provenant des ressources générales de la Confédération doit être prévu pour l'aide aux médias en ligne payants.

1.2

Possibilités examinées et solution choisie

1.2.1

Assouplissement du critère de la fréquence de parution

Dans le domaine de l'aide indirecte à la presse, le Conseil fédéral a également examiné la possibilité d'assouplir le critère de la fréquence de parution pour la presse régionale et locale.

Actuellement, dans cette catégorie, les quotidiens et les hebdomadaires en abonnement bénéficient d'un soutien, pour autant qu'ils paraissent au moins une fois par semaine; le critère est rempli à partir de 39 parutions par an (compte tenu des doubles numéros). Pour la presse associative et la presse des fondations, la fréquence de parution doit au moins être trimestrielle.

L'importance d'une publication est évaluée en fonction de sa fréquence de parution et de sa «contribution à la diffusion de l'information politique, économique et culturelle». La meilleure manière d'évaluer la contribution à une grande diversité d'opinions serait d'examiner le contenu des publications, ce qui pose toutefois problème.

En lieu et place, la fréquence de parution est prise en compte, en supposant que les publications paraissant au moins une fois par semaine apportent cette contribution (actualité politique, événements régionaux).

L'assouplissement du critère de la fréquence de parution pour la presse régionale et locale remettrait en question la distinction actuelle qui sépare cette catégorie de celle de la presse associative et des fondations. Il permettrait aux titres appartenant à cette deuxième catégorie, mais qui, par exemple, poursuivent un but lucratif et n'ont pas droit à un soutien, de demander une aide en tant que presse régionale et locale.

4401

FF 2020

La distinction devrait alors se fonder principalement sur le critère fixé à l'art. 36, al. 1, let. g, de l'ordonnance du 29 août 2012 sur la poste (OPO)20 («qui ne font pas partie de la presse associative, ni de la presse des fondations, ni de la presse spécialisée ou professionnelle»). Certains titres de la presse grand public qui, en raison d'une fréquence de parution trop faible, ne profitent pas d'un rabais sur la distribution, pourraient alors bénéficier d'un soutien. L'admission des titres concernés dans la catégorie de la presse régionale et locale ayant droit à une aide se ferait au détriment des autres quotidiens et hebdomadaires soutenus, qui constituent les bénéficiaires des subventions initialement prévus.

1.2.2

Inclusion de la distribution matinale et dominicale

Aujourd'hui, l'aide indirecte à la presse se limite à la distribution régulière par la Poste Suisse, assurée sur tout le territoire suisse dans le cadre de l'obligation de service universel de cette dernière. Sa mise en oeuvre est donc simple. Or, pour les quotidiens en abonnement, la distribution matinale et dominicale est essentielle. Un groupe de travail mis sur pied par le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) et composé de représentants des éditeurs, des organisations de distribution matinale et de la Poste estime qu'il est possible en principe d'intégrer la distribution matinale des quotidiens et hebdomadaires en abonnement dans l'aide indirecte à la presse. Comme la distribution matinale est assurée par plusieurs organisations de distribution spécialisées, la mise en oeuvre est cependant plus complexe que pour la distribution régulière. Globalement, les quotidiens et hebdomadaires soutenus aujourd'hui diffusent déjà plus de la moitié de leur tirage abonné dans le cadre de la distribution matinale, le pourcentage des exemplaires en distribution matinale et en distribution régulière variant considérablement d'un titre à l'autre. Tout dépend en effet si une distribution matinale et dominicale est assurée dans la région de distribution du journal concerné.

Contrairement à la distribution régulière, pour des raisons économiques, aucune offre de distribution matinale et dominicale couvre l'ensemble du territoire national.

Alors qu'en Suisse alémanique, l'offre est bien développée, elle n'est disponible que ponctuellement dans les villes et les grandes agglomérations en Suisse romande, en Valais et dans les Grisons. Au Tessin, une distribution matinale n'est assurée qu'en ville de Lugano.

Avec l'élargissement à la distribution matinale et dominicale, 270 millions d'exemplaires supplémentaires pourraient bénéficier d'une aide. Les besoins financiers supplémentaires dépendent du montant du rabais sur la distribution. Pour éviter un déplacement des volumes vers le canal de la distribution matinale, le groupe de travail propose un rabais légèrement plus bas pour la distribution matinale. Actuellement, le rabais sur la distribution régulière des journaux est de 27 centimes par exemplaire. Si, comme le propose le groupe de travail, un rabais
de 22 centimes par exemplaire était fixé pour la distribution matinale et dominicale, le besoin financier supplémentaire s'élèverait à 60 millions de francs. Néanmoins, le Conseil fédéral estime que les autres mesures proposées sont plus appropriées et suffisantes pour 20

RS 783.01

4402

FF 2020

venir rapidement en aide aux médias imprimés. Elles forment avec les autres mesures recommandées (aide aux médias en ligne, possibilités de soutien pour l'ensemble du secteur des médias) un paquet équilibré. Il renonce expressément à inclure la distribution matinale et domincale dans le train de mesures.

1.2.3

Extension du rabais sur la distribution pour la presse associative et des fondations

La presse associative et la presse des fondations aussi contribuent au débat démocratique et favorisent la cohésion sociale en Suisse. C'est pourquoi la Confédération leur alloue une contribution annuelle totale de 20 millions de francs (art. 16, al. 4 et 7, LPO). En l'espèce, il s'agit de satisfaire à la demande ­ exprimée lors de la consultation ­ d'un soutien accru de la presse quotidienne et hebdomadaire en abonnement dans le cadre de la transformation numérique. Une éventuelle extension du rabais sur la distribution pour la presse associative et des fondations n'a pas été exigée lors de la consultation. Le Conseil fédéral s'abstient donc de procéder à un ajustement correspondant.

1.2.4

Possibilités en matière d'aide aux médias en ligne

S'agissant de l'aide aux médias en ligne, de nombreuses possibilités ont été examinées. Il s'agissait de déterminer si elles contribuaient au soutien des médias en ligne dans les régions et si leur mise en oeuvre était facile. L'indépendance des médias soutenus était également un critère. La Confédération souhaite que, dans le secteur en ligne également, toutes les régions linguistiques disposent d'une offre de médias diversifiée et de qualité.

Dans le cadre de la consultation relative à l'avant-projet de loi fédérale sur les médias électroniques (AP-LME)21, les mandats de prestations journalistiques ont été rejetés par la majorité (voir ch. 2.2).

Le soutien aux postes de journalistes a été discuté avec la branche des médias et rejeté par celle-ci pour des raisons d'indépendance des rédactions. Il convient d'éviter de donner l'impression d'une influence étatique.

Une aide pour les coûts d'hébergement est inappropriée à plusieurs titres. Les coûts varient beaucoup et ne disent rien de la pertinence journalistique (p. ex., les vidéos génèrent des frais d'hébergement plus élevés que les contributions textuelles). Par ailleurs, la différenciation des coûts d'hébergement, par exemple pour des portails en ligne avec ou sans pertinence journalistique, pour des archives de journaux ou pour d'autres offres au sein d'un groupe, serait difficile et incontrôlable.

L'idée d'une aide calculée en fonction du nombre d'abonnements numériques vendus plutôt que du chiffre d'affaires a également été examinée. Dans le contexte numérique, les modèles d'abonnement sont tellement différents (abonnements 21

L'AP-LME peut être consulté sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2018 > DETEC.

4403

FF 2020

annuels et mensuels classiques, paiement par article, pass journaliers, etc.) que le nombre d'abonnements ne fournirait pas une indication adéquate. En outre, les modèles commerciaux des médias en ligne qui reposent sur des contributions volontaires seraient désavantagés. Il y aurait également un risque d'abus, par exemple avec des offres de dumping. En fin de compte, il est plus pertinent et plus pratique de se référer au chiffre d'affaires en tant que somme de ce que le public paie pour l'utilisation des offres journalistiques.

La question de savoir si les médias gratuits devraient ou non avoir accès à une aide a suscité la controverse. Le Conseil fédéral souhaite que ces médias puissent bénéficier de mesures de promotion générales, comme le soutien à des projets informatiques. En revanche, il entend soutenir spécifiquement les médias en ligne financés par le public, et ce pour les raisons suivantes: Les médias dépendent des recettes qu'ils réalisent auprès du public, et il convient donc de les soutenir s'ils proposent un contenu payant. L'aide indirecte à la presse profite elle aussi uniquement aux journaux payants en abonnement. La nouvelle mesure vise à ce que les médias ne soient pas freinés dans les efforts qu'ils déploient pour inciter le public à payer, dans le domaine en ligne également. Les médias gratuits suivent un modèle commercial différent; ils misent sur la portée et donc sur un financement par la publicité. L'aide étant destinée aux offres pertinentes pour la démocratie et financée par les recettes réalisées auprès du public, les médias gratuits peuvent se positionner différemment avec leurs contenus, de sorte à augmenter leur portée et leurs recettes publicitaires.

Dans ce contexte, les trois mesures ci-après se sont avérées adéquates et susceptibles de rallier une majorité: 1.

L'aide indirecte à la presse doit être étendue à la presse régionale et locale, afin que tous les quotidiens et hebdomadaires en abonnement bénéficient d'un allégement financier plus important. Le système actuel est maintenu.

2.

Les instruments de soutien qui profitent à l'ensemble des médias électroniques, tous modèles commerciaux confondus, doivent être renforcés dans la LRTV.

3.

Il convient d'introduire une aide aux médias en ligne. Cette mesure doit bénéficier aux médias qui fournissent un contenu en ligne à la demande, pour lequel le public est disposé à payer (sur une base obligatoire ou volontaire).

1.3

Relation avec le programme de législature et les stratégies du Conseil fédéral

Le projet est annoncé dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202322.

22

FF 2020 1709, 1825 (objectif 7, autres objets). Pour le projet d'arrêté fédéral sur le programme de la législature 2019 à 2023: FF 2020 1839

4404

FF 2020

1.4

Classement d'interventions parlementaires

Il est proposé de classer les interventions parlementaires suivantes: Postulat CTT-N 16.3630 «Institution d'une autorité de surveillance de l'audiovisuel indépendante»: L'AP-LME mis en consultation proposait une autorité indépendante de surveillance et de réglementation, laquelle a soulevé des critiques. Dans la directive 2010/13/UE «Services de médias audiovisuels» dans sa version révisée du 14 novembre 201823 (directive SMA), l'Union européenne (UE) exige de ses Etats membres qu'ils disposent d'une autorité de contrôle indépendante dans le domaine de réglementation couvert par la directive. Il est probable que l'UE exigera de la Suisse qu'elle s'aligne sur la directive SMA si elle souhaite participer au nouveau programme «Europe Créative» pour les années 2021-2027. Cet alignement sera examiné dès que la collaboration avec l'UE dans le cadre de la participation au programme «Europe Créative» se précisera.

Motion CTT-N 17.3008 «Modification de l'article 44, alinéa 3, et de l'article 39, alinéa 2, lettre a, LRTV pour renforcer les offres électroniques du service public hors SSR»: la motion modifiée demande l'abrogation de l'art. 44, al. 3, LRTV. Elle est mise en oeuvre par la présente proposition (voir ch. 5.1).

Motion CTT-N 17.3627 «Modèle de contenus partagés»: La motion vise à permette aux entreprises privées de médias suisses d'utiliser facilement les reportages de la SSR. Elle a été concrétisée dans la concession SSR du 29 août 201824 (en vigueur depuis le 1er janvier 2019). Conformément à l'art. 31 de sa concession, la SSR met des extraits de contenus audiovisuels actuels à disposition des entreprises de médias suisses qui reconnaissent la Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste du Conseil suisse de la presse.

2

Procédure préliminaire, en particulier procédure de consultation

2.1

Contenu du projet mis en consultation

Le 21 juin 2018, le Conseil fédéral a ouvert la procédure de consultation relative à l'AP-LME. Avec cet avant-projet, le Conseil fédéral voulait faire un premier pas vers un service public multimédias, dans le cadre de la Constitution actuelle. Outre la radio et la télévision, les médias en ligne devaient également fournir des prestations journalistiques sur la base de mandats de prestations. Dans son rapport sur le service public (cf. ch. 1.1.2), le Conseil fédéral concluait qu'à moyen terme, les médias en ligne devraient également jouer un rôle de service public. Selon l'AP-LME, le service public dans les médias devait être étendu aux offres en ligne proposant des contenus audio et audiovisuels. La LRTV actuelle porte sur les pro23

24

Directive 2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2010 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive «Services de médias audiovisuels») (version codifiée), JO L 95 du 15.4.2010, p. 1; modifiée par la directive (UE) 2018/1808, JO L 303 du 28.11.2018, p. 69.

FF 2018 5589

4405

FF 2020

grammes linéaires de radio et de télévision. L'exécution de ces prestations de service public aurait été financée par la redevance des ménages et des entreprises.

L'AP-LME prévoyait des mandats de service public aux niveaux national et régional. La radio, la télévision et l'internet auraient été placés sur un pied d'égalité.

Selon l'avant-projet, la SSR aurait rempli un mandat de prestations complet au niveau national et linguistique-régional, comme elle le fait aujourd'hui. Elle aurait dû affiner davantage son profil de service public et coopérer davantage avec les entreprises de médias privées, notamment dans le domaine du divertissement et du sport (contenu partagé).

D'autres fournisseurs de médias auraient également fourni des prestations de service public. L'avant-projet prévoyait des accords de prestations pour des offres d'information régionale, des offres destinées à des groupes de population spécifiques et des offres impliquant le public. Un maximum de 6 % de la redevance pouvait être affecté aux médias électroniques.

Par égard pour la presse, il était prévu que les prestations de service public de la SSR et d'autres fournisseurs de médias électroniques soient essentiellement assurées par le biais de contributions audio et vidéo.

Diverses mesures d'aide indirecte aux médias devaient contribuer à la qualité du journalisme suisse et encourager l'innovation. En plus du soutien existant aux institutions de formation et de formation continue dans le secteur des médias, il devait être possible de soutenir les organismes d'autorégulation, les agences de presse et les solutions informatiques innovantes. Un maximum de 2 % de la redevance devait être affecté à cette fin.

Les mandats de prestations journalistiques et l'aide indirecte aux médias auraient été financés par la redevance pour les médias électroniques (l'actuelle redevance de radio-télévision, perçue auprès des ménages et des entreprises).

En outre, des exigences minimales étaient prévues pour la télévision sans mandat de service public, afin de remplir les obligations envers le Conseil de l'Europe. Les autres médias électroniques (radios et médias en ligne sans mandat de service public) ne devaient pas être réglementés de manière spécifique.

L'AP-LME prévoyait une nouvelle autorité indépendante de régulation et de surveillance. Elle
devait reprendre des tâches qui incombent actuellement au Conseil fédéral, au DETEC et à l'OFCOM, notamment l'attribution et la surveillance des mandats de prestations journalistiques ainsi que la surveillance générale. En outre, l'actuelle Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio et de télévision (AIEP) restait responsable des plaintes relatives au contenu des contributions rédactionnelles.

La presse ne faisait pas l'objet de l'AP-LME.

4406

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2.2

Résultats de la consultation

Dans le cadre de la consultation publique, 253 avis ont été remis 25. Tous les cantons, sept partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale, ainsi que la plupart des associations faîtières nationales des communes, des villes, des régions de montagne et de l'économie se sont exprimés. Ont également participé des commissions extraparlementaires, des représentants des médias, des professionnels des médias et des syndicats ainsi que des associations de personnes souffrant de handicaps sensoriels, des télécommunications, de la culture et de la publicité.

Les résultats étaient controversés, avec des commentaires très divergents. La majorité des participants a reconnu la nécessité d'agir. Cependant, aucun dénominateur commun n'est ressorti. Sur cette base, il n'aurait pas été possible d'élaborer un modèle susceptible de réunir une majorité.

Certains partis ont rejeté l'avant-projet, ou du moins ont émis des critiques à son encontre (PBD, PDC, PLR, UDC), d'autres l'ont accueilli plutôt positivement (PVL, Parti écologiste, PS).

Une majorité s'est félicitée de l'extension du champ d'application aux médias en ligne, tout en émettant des réserves. Les cantons et la branche de la radio et de la télévision craignaient un affaiblissement du service public régional à la radio et à la télévision. Les éditeurs redoutaient des désavantages pour les médias en ligne ne bénéficiant pas d'aide: cette nouvelle concurrence avec des offres en ligne financées par la redevance les empêcherait d'établir des modèles payants. La majorité a rejeté le modèle proposé, qui prévoyait des accords de prestations pour les médias en ligne.

Certains participants doutaient que la base constitutionnelle soit suffisante pour promouvoir les médias en ligne.

La restriction selon laquelle les médias en ligne ne seraient soutenus que si leur offre consistait principalement en contributions audio et audiovisuelles a été controversée.

De nombreuses voix se sont prononcées pour qu'une aide soit également accordée aux médias en ligne purement textuels.

Les organisations culturelles se sont montrées favorables à davantage de prestations culturelles et de promotion du cinéma. La branche des télécommunications a plébiscité une réduction des obligations de diffusion imposées aux fournisseurs de services de télécommunication. La branche de
la publicité souhaitait une réduction de la réglementation en matière de publicité. Les associations de personnes atteintes d'un handicap sensoriel espéraient des adaptations concernant les prestations destinées à ces personnes (p. ex. le sous-titrage de la publicité).

La proposition d'une autorité indépendante de surveillance et de réglementation a soulevé la controverse. Bien que le principe d'une autorité des médias indépendante de l'Etat ait convaincu une petite majorité, la forme et la taille proposées ont été clairement rejetées.

Le mandat général de la SSR a suscité moins de controverse. Une faible majorité s'est prononcée en faveur d'une réglementation de l'interdiction de la publicité en 25

Les avis peuvent être consultés sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2018 > DETEC.

4407

FF 2020

ligne au niveau de la loi (actuellement au niveau de l'ordonnance). En ce qui concerne le service public aux niveaux local et régional, notamment les cantons, les associations de radio et de télévision et les diffuseurs ont majoritairement plébiscité le statu quo.

L'aide indirecte aux médias (institutions de formation et de formation continue, organismes d'autorégulation, agences de presse, infrastructures informatiques) a été saluée par la majorité, contrairement à la proposition de supprimer le soutien aux études d'audience, qui a été largement rejetée.

La procédure de recours de l'AIEP ainsi que la redevance des ménages et des entreprises n'ont guère été commentées.

Une préoccupation centrale exprimée dans le cadre de la consultation portait sur l'expansion de l'aide indirecte de la presse. De nombreuses demandes ont été formulées, notamment par les cantons, les partis politiques et la branche des médias, pour que des mesures rapides en faveur de la presse soient prises. Ce point ne faisait pas l'objet de la consultation26.

2.3

Conclusions

Tous les types de médias sont touchés par la numérisation, la dynamique du contexte, la baisse des recettes, la forte concurrence internationale et des cycles d'investissement toujours plus courts. La consultation a été marquée par ce contexte.

Elle a révélé des opinions très divergentes et une grande préoccupation par rapport à un paysage des médias fort et durable. Les attentes sont très différentes d'un média à l'autre: la radio et la télévision souhaitent de la stabilité, la presse un soutien plus important, et les médias en ligne davantage d'action, mais le soutien devrait mieux assurer l'indépendance des médias.

Pour ces raisons, le Conseil fédéral a préconisé, le 28 août 2019, d'abandonner l'APLME et de réorienter le projet sur les médias. Avec un train de mesures, il entend plutôt renforcer l'aide générale dans la LRTV et les rabais sur la distribution dans la LPO, et soutenir aussi les médias en ligne financés par le public. La proposition a reçu un écho positif. Elle a ensuite été discutée en détail avec les associations de médias. La COFEM a également été consultée.

Le point le plus controversé est le fait que les médias en ligne gratuits ne bénéficient que de mesures d'aide générales et sont exclus de la nouvelle aide prévue pour les médias en ligne financés par le public. Le nouvel encouragement proposé en faveur des médias en ligne continue de dépendre de la disposition des lecteurs à payer pour le contenu, mais il s'oriente désormais aux recettes issues du public. Cela correspond aux efforts déployés par la branche des médias afin d'établir des modèles payants en ligne pour les services journalistiques et d'assurer ainsi une viabilité financière à long terme. En outre, ce critère est majoritairement approuvé.

26

Le rapport sur les résultats de la consultation peut être consulté sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2018 > DETEC.

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Le projet ne porte pas sur l'une des principales demandes des éditeurs, à savoir un soutien à la distribution matinale des quotidiens. (voir ch. 1.2.2)

3

Comparaison juridique, notamment avec le droit européen

3.1

Aide aux offres de médias en ligne dans des pays comparables

Des mesures d'aide des médias en ligne ont été adoptées dans des pays européens comparables27.

Voici un aperçu des mesures prises en Autriche, en Belgique, au Danemark, en Norvège, en Suède et en Finlande.

Pays

Instrument de soutien

Autriche

Promotion de la qualité et mesures de pérennisation (formation, clubs de la presse, promotion de la lecture, conseil de la presse)

Critères

2 (2019)

Belgique Soutien au journalisme (Communauté d'investigation (fonds) flamande) Conseil de la presse

0,3 (2019) 0,1 (2016, indexé)

Formation des journalistes

0,2 (2017)

Belgique Soutien au journalisme (Communauté d'investigation (fonds) francophone) Soutien au journalisme d'innovation (fonds)

Danemark

Moyens en millions de francs (an)

0,5 (2018) 0,6 (2018)

Education aux médias

1,2 (2018)

Conseil de la presse

Inconnu

Soutien à la production ­ Contenu d'intérêt général de journaux imprimés et en ligne à base de texte ­ Au moins trois journalistes à plein temps

53,9 (2019)

­ Au moins la moitié du contenu rédactionnel, dont au moins un sixième autoproduit ­ Nombre minimum d'éditions 27

Puppis M. / Bürdel E. (2019): Aide aux médias en ligne, comparaison internationale, rapport à l'attention de l'Office fédéral de la communication, Fribourg.

4409

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Pays

Instrument de soutien

Critères

Moyens en millions de francs (an)

Soutien à des projets d'innovation de journaux imprimés et en ligne à base de texte

­ Degré d'autofinancement de 40 à 60 %

2,3 (2019)

Aide à la réorganisation

Finlande

Norvège

4410

Mêmes critères que pour le soutien à la production

Inconnu

Soutien d'émissions ­ Produits par une société et de séries TV (y compris de production indépendante à la demande) ­ Taux d'autofinancement d'au moins 50 %

7,2 (2018)

Soutien aux journaux ­ Actualité imprimés et en ligne dans ­ Tarifs raisonnables les langues minoritaires ­ Au moins trois éditions à base de texte actuelles par semaine

0,6 (2019)

Soutien convergent à des projets d'innovation

34,7 (unique pour la période 2015 à 2018)

Agences de presse

1,7 (unique pour la périod e 2018 à 2020)

Soutien à la production de journaux imprimés et en ligne à base de texte

­ Actualité et contenu d'intérêt 36,1 (2019) général varié ­ Non distribué gratuitement et au moins la moitié du tirage en abonnement ­ Nombre de parutions et tirage minimaux ­ Au maximum un tiers du chiffre d'affaires dans d'autres domaines d'activité ­ Limitation du bénéfice, de la marge et du dividende

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Pays

Suède

Instrument de soutien

Critères

Moyens en millions de francs (an)

Soutien à la production de journaux imprimés et en ligne en lapon à base de texte

­ Actualité 3,8 (2019) ­ Non distribué gratuitement et au moins la moitié du tirage en abonnement ­ Maximum 50 % d'annonces ­ Nombre de parutions et tirage minimaux ­ Au maximum un tiers du chiffre d'affaires dans d'autres domaines d'activité ­ Limitation du dividende et des indemnités

Soutien convergent à des projets d'innovation

­ Actualité et contenu d'intérêt général varié ­ Taux d'autofinancement de 50 à 60 %

1,1 (2019)

Formation continue et recherche appliquée dans le domaine des médias

2,5 (2019)

Soutien à la production ­ Contenu d'intérêt général de journaux imprimés ­ Au moins 55 % du contenu et en ligne à base de texte rédactionnel autoproduit ­ Nombre de parutions et tirage minimaux ­ Au moins 51 % vendus en abonnement ­ Bassin d'utilisateurs ne dépassant pas 30 % ­ Journaux hebdomadaires: minimum de contenu rédactionnel et maximum 50 % de publicité

53,8 (2019)

Soutien convergent à la production pour le journalisme local

­ 50 % de contenu rédactionnel 3,2 (2019) ­ 20 % de contenu autoproduit ­ Respect des principes d'éthique des médias ­ Au moins 45 parutions/an ­ Au moins 1500 utilisateurs réguliers

Soutien convergent à des projets d'innovation et de développement

­ Taux d'autofinancement de 60 % ­ Critères: voir soutien à la production

3,7 (2019)

4411

FF 2020

L'Autriche et la Belgique soutiennent le conseil de la presse, ce qui correspond à l'aide aux organismes d'autorégulation proposé ici (art. 76a P-LRTV). Elles soutiennent également la formation et la formation continue des journalistes (art. 76 P-LRTV).

En plus de la télévision régionale, la Belgique soutient les médias, par le biais d'un fonds. Le journalisme d'investigation et d'innovation est encouragé. Un tel soutien n'est pas prévu dans le présent projet car, dans la phase de transformation, il faut non pas un soutien sélectif mais des mesures générales.

Les pays scandinaves mettent un accent particulier sur le soutien à la production de journaux imprimés et en ligne à base de texte, et sur le soutien convergent à des projets d'innovations.

Les fonds sont consacrés en majorité au soutien à la production des médias imprimés et en ligne à base de texte; une aide supplémentaire est prévue pour les langues minoritaires en Finlande et en Norvège. L'aide est accordée selon des critères généraux qui varient d'un pays à l'autre. Le Danemark, la Norvège et la Suède exigent un contenu d'intérêt général (et varié en Norvège), la Finlande et la Norvège uniquement des contenus d'actualité. Une obligation de paiement existe en Finlande (tarifs raisonnables), en Norvège (pas de distribution gratuite et au moins la moitié du tirage vendu en abonnement) et en Suède (au moins 51 % de ventes en abonnement).

Des quotas pour le contenu rédactionnel et le contenu autoproduit sont fixés au Danemark (au moins la moitié de contenu rédactionnel, dont au moins un sixième autoproduit) et en Suède (au moins 55 % du contenu rédactionnel autoproduit).

Parfois, un nombre minimum de parutions est requis (Danemark, 10 numéros par an; Finlande, au moins trois éditions actuelles par semaine; Norvège et Suède, au moins une parution hebdomadaire).

Au Danemark, l'aide versée aux médias en ligne à base de texte ne doit pas dépasser 50 % des coûts de rédaction. En Norvège, l'aide à la production de médias à base de texte ne doit pas dépasser 40 % du total des coûts d'exploitation.

La proposition d'aide aux offres de médias numériques contient également la plupart de ces critères. Pour diverses raisons, elle ne fixe pas de quota pour les contenus autoproduits. D'une part, on peut tabler sur une autorégulation, car sans contenus
journalistiques autoproduits, la disposition à payer serait marginale. D'autre part, le contrôle serait laborieux. En outre, les demandes pour des offres de médias qui émanent d'une même entreprise (structure) sont traitées comme une seule demande.

Dans cette constellation, l'acquisition de parties rédactionnelles est la plus probable, ce qui implique une dégression du financement.

Les quatre pays scandinaves soutiennent également les projets d'innovation, mais dans une moins large mesure. En Norvège, des contenus peuvent être financés à ce titre. En Finlande, un tel soutien n'a été accordé que temporairement de 2015 à 2018. Au Danemark et en Suède, les projets sont soutenus pour une durée maximale de trois ans (lancement, passage de la version imprimée à une publication en ligne, élaboration de contenus pour les canaux numériques, développement et innovation dans le domaine de la publication et de la distribution numériques de contenus journalistiques, conception de modèles commerciaux numériques).

4412

FF 2020

Le soutien aux infrastructures numériques prévu à l'art. 76c P-LRTV va plus loin que les soutiens à des projets décrits ci-dessus. Il ne s'agit pas du contenu (qui est déjà soutenu ailleurs), mais des infrastructures numériques qui sont à la disposition de l'ensemble des médias électroniques et qui servent à la diffusion et à la visibilité des contenus journalistiques (p. ex., plateforme commune, système de gestion de contenus).

Pour le Danemark, la Finlande et la Suède, qui sont membres de l'UE, la Commission européenne a approuvé toutes les aides présentées ici dans le cadre de la législation européenne sur les aides d'Etat28.

Dans tous les pays, la presse écrite et électronique bénéficie d'un taux de TVA réduit, voire d'une exemption de la TVA. En Suisse, les médias (journaux, magazines, radio et télévision, médias électroniques) bénéficient d'un taux de TVA réduit de 2,5 %.

Des évaluations systématiques de l'effet des mesures d'aide prises dans les pays étudiés sont rares. De manière générale, leurs auteurs tirent les conclusions suivantes. L'aide aux médias ne compense que dans une mesure limitée les désavantages structurels dus à la petitesse d'un marché et, selon une étude norvégienne, la diversité des thèmes traités et l'information locale ne sont pas plus larges dans les médias subventionnés. L'aide directe et sélective à la production permet toutefois de garantir la survie de publications économiquement faibles. Au niveau des éditeurs, cependant, l'aide ne peut pas empêcher la concentration, du moins en Scandinavie.

Toutefois, l'introduction de quotas de contenus autoproduits a pour effet que des contenus continuent d'être produits par des rédactions indépendantes. En général, une grande diversité structurelle augmente les chances d'une information différente.

3.2

Comparaison avec le droit européen

La directive SMA (révisée) fixe des normes minimales contraignantes pour la télévision linéaire, pour les contenus vidéo à la demande non linéaires et pour les services de plateformes de partage de vidéo qui organisent, à l'aide d'algorithmes et d'autres procédures automatiques, les contenus générés par les utilisateurs. La précédente directive SMA29 prévoyait déjà pour les services de vidéo à la demande une réglementation du parrainage, l'identification des placements de produits, des mesures de protection des mineurs ainsi que l'interdiction de l'incitation à la haine et l'interdiction de la publicité clandestine. Parmi les principales nouveautés de la directive SMA révisée, il convient de mentionner les quotas fixes d'oeuvres européennes dans les offres de vidéo à la demande, l'obligation pour les Etats membres 28

29

Voir Commission européenne, aide d'État SA_36366 (2013/N) - Denmark, Production and innovation aid to written media, C(2013) 7870, 20.11.2013; Commission européenne, aide d'État SA 34885 (2012/N) - Finland, Aid for newspapers - prolongation, C(2012) 4377, 4.7.2012; Commission européenne, aide d'État SA 49405 (2018/N) - Sweden, Media Aid, C(2018) 424/01, 22.10.2018 Directive 2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2010 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive «Services de médias audiovisuels»), JO L 95 du 15.4.2010, p. 1.

4413

FF 2020

de l'UE de mettre en place des autorités de régulation indépendantes et les exigences minimales pour les services de plateformes de partage de vidéos. Les Etats membres doivent veiller à ce que les exploitants prennent les mesures appropriées pour protéger les mineurs contre les incitations à la haine et les contenus terroristes, pédopornographiques, racistes et xénophobes.

Pour participer au programme «Europe Créative 2021-2027» de l'UE, la Suisse devrait probablement aligner ses prescriptions en matière de droit des médias sur la directive SMA. En 2007, dans le cadre des Bilatérales II, la Suisse a conclu pour la première fois un accord avec l'UE pour la participation au programme de soutien au cinéma MEDIA 2007-2013. Elle a dû respecter, entre autres, le principe du pays d'origine, lequel impliquait que les fenêtres publicitaires suisses diffusées par des chaînes étrangères n'étaient plus soumises au droit suisse. Le programme MEDIA est désormais un sous-programme du programme «Europe Créative», qui soutient la branche audiovisuelle et culturelle. Depuis 2014, ce programme comprend le sousprogramme «Culture» (pour la promotion de la branche culturelle et artistique), qui s'est ajouté au sous-programme MEDIA (pour le soutien au cinéma). La Suisse a participé à MEDIA entre 2006 et 2007 et entre 2007 et 2013. Actuellement, la LRTV et la directive SMA ne sont largement compatibles qu'en ce qui concerne la télévision linéaire.

La différence fondamentale entre la directive SMA et la LRTV réside dans le champ d'application. La directive SMA prévoit des exigences minimales pour la télévision linéaire, les contenus non linéaires de vidéo à la demande et les services de plateformes de partage de vidéos, alors que la LRTV se limite à la radio et à la télévision linéaires. Dans le domaine linéaire, la LRTV et la directive SMA ne présentent que des différences mineures. La LRTV n'interdit pas la publicité pour les traitements médicaux disponibles uniquement sur prescription médicale ni les offres de vente pour des traitements médicaux car le droit suisse de la santé ne reconnaît pas la notion de traitement médical et ne prévoit donc pas une telle obligation de prescription. En outre, contrairement à la directive SMA, la LRTV n'exclut pas le placement de produits dans les émissions de conseil et de consommateurs.
La LRTV ne contient aucune disposition sur les services de vidéo à la demande. La nouvelle loi fédérale sur l'aide aux médias en ligne (LFML) ne contient pas de réglementation sur les services de vidéo à la demande, comparable à la directive SMA.

Actuellement, le domaine des services de plateformes de partage de vidéos n'est pas non plus spécifiquement réglementé.

4414

FF 2020

Dans le domaine de la protection de la jeunesse et des quotas pour les oeuvres européennes, des messages sont en préparation ou ont été approuvés par le Conseil fédéral. Ils prévoient partiellement un alignement sur la directive SMA30.

La directive SMA exige des Etats membres qu'ils instaurent une autorité de régulation indépendante pour l'ensemble du champ d'application de la directive. L'AIEP correspond certes à une telle autorité. En vertu de la LRTV, elle n'est toutefois responsable que de la surveillance du respect des principes en matière de contenu dans les programmes linéaires. La surveillance générale incombe à l'OFCOM.

3.3

Recommandations du Conseil de l'Europe

Le Conseil des ministres du Conseil de l'Europe recommande aux Etats membres de développer un large éventail de mesures afin de soutenir les médias d'information indépendants et garantir ainsi la diversité des médias. Ces mesures doivent être accessibles à différentes catégories de médias, y compris les médias en ligne, et comprendre diverses formes de soutien financier, par exemple le versement de subventions. Il recommande en outre aux Etats membres de soutenir des projets dans le domaine de la formation des journalistes ou des approches novatrices visant à garantir la diversité31. Sous le terme «médias en ligne», le Conseil des ministres du Conseil de l'Europe inclut un large éventail d'acteurs impliqués dans la production et la diffusion de contenus de médias en ligne. Le respect des devoirs de diligence journalistique est l'un des nombreux critères permettant d'établir quels fournisseurs sont considérés comme des médias en ligne. Les intermédiaires qui influencent le marché et le pluralisme des médias en contrôlant la distribution des contenus de médias en ligne ou par des décisions de type rédactionnel sont également considérés comme des médias en ligne32.

Le projet prévoit des mesures d'aide correspondant aux objectifs programmatiques du Conseil de l'Europe. Les médias en ligne doivent être soutenus de manière ciblée afin d'enrichir la diversité journalistique. Les médias en ligne soutenus doivent respecter les directives relatives au travail journalistique généralement reconnues par la branche. En outre, la LRTV élargit les instruments d'encouragement, de sorte à ce qu'ils profitent à l'ensemble de la branche des médias électroniques (radio, télévision et offres numériques à la demande). Cela comprend le soutien à des institutions 30

31

32

Le projet de consultation d'une loi fédérale sur la protection des mineurs en matière de films et de jeux vidéo (AP-LPMFJ) prévoit des mesures de protection de la jeunesse pour les services vidéo à la demande et les services de plateformes de partage de vidéo.

Le Conseil fédéral prévoit d'adopter le message durant le premier semestre 2020. Le projet de consultation peut être consulté à l'adresse suivante: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2019 DFI.

Le message concernant l'encouragement de la culture pour la période 2021 à 2024 (Message culture 2021­2024) du 26 février 2020 fixe un quota pour les services vidéo à la demande (FF 2020 3037).

Recommandation du Conseil des ministres du Conseil de l'Europe CM/Rec(2018)1, Nouvelles lignes directrices sur le pluralisme des médias et la transparence de leur propriété du 7 mars 2018, annexe, point 2.13 Recommandation du Conseil des ministres du Conseil de l'Europe CM/Rec(2011)7 sur une nouvelle conception des médias du 21 septembre 2011, annexe, points 9 et suivants

4415

FF 2020

de formation et de formation continue, à des organismes d'autorégulation et à des agences de presse, ainsi que le financement d'infrastructures numériques. Ces instruments sont conformes aux recommandations susmentionnées du Conseil des ministres du Conseil de l'Europe.

4

Présentation du projet

4.1

Nouvelle réglementation proposée

La réglementation proposée se base sur la discussion sur la politique des médias actuellement en cours et sur les résultats de la consultation sur l'AP-LME. Elle répond aux principales préoccupations, à savoir: ­

L'urgence des mesures est reconnue. Le projet prévoit des mesures pouvant être mises en oeuvre rapidement, principalement sur la base d'instruments éprouvés.

­

Le montant de l'aide indirecte à la presse quotidienne et hebdomadaire en abonnement doit être augmenté. Les journaux en abonnement d'un tirage moyen supérieur à 40 000 exemplaires ainsi que les têtières doivent également pouvoir bénéficier du rabais sur la distribution. L'augmentation de la contribution fédérale se traduit par un rabais plus important par exemplaire pour tous les quotidiens et hebdomadaires en abonnement soutenus. Le but est de soulager financièrement la presse et de lui permettre d'atténuer les conséquences de la numérisation (voir ch. 5.1).

­

Les mesures générales d'aide doivent être élargies. Il s'agit d'adapter aux besoins d'un environnement numérisé les instruments de soutien éprouvés dont bénéficient actuellement la radio et la télévision en particulier, et de les étendre à tous les médias électroniques, y compris les médias gratuits. Il est prévu également de soutenir des institutions de formation et de formation continue, les organismes d'autorégulation de la branche, les agences de presse d'importance nationale ainsi que des projets informatiques. Le but est de favoriser la qualité et la repérabilité des médias électroniques, et de permettre d'amortir les cycles d'investissements coûteux consentis dans des solutions informatiques (voir ch. 5.2).

­

Les médias en ligne occupent une place croissante dans l'information de la population. L'élaboration de nouveaux modèles commerciaux doit être facilitée. Un soutien est accordé aux fournisseurs professionnels de médias qui génèrent un chiffre d'affaires avec des offres numériques proposées au public. Comme dans le cas de l'aide indirecte à la presse, aucune exigence en matière de contenu sous forme de mandats de prestations journalistiques n'est posée. L'aide vise à accroître la diversité journalistique (voir ch. 5.3).

4416

FF 2020

4.2

Harmonisation des tâches et des moyens financiers

La radio et la télévision sont actuellement soutenues à hauteur de 1,3 milliard de francs. Le but est de garantir une offre équivalente et pertinente dans toutes les régions linguistiques. L'élargissement du rabais pour la distribution des quotidiens et des hebdomadaires à hauteur de 20 millions de francs supplémentaires et l'aide aux médias en ligne à hauteur de 30 millions de francs par an au maximum sont proportionnelles à l'objectif visé. Sur ces canaux aussi, la population suisse doit avoir accès à une offre de médias diversifiée.

4.3

Mise en oeuvre

L'art. 76d P-LRTV et les art. 1 et 2 P-LFML chargent le Conseil fédéral d'édicter dans l'ordonnance les dispositions d'exécution relatives aux mesures d'aide envisagées. La modification de l'art. 16 LPO sur l'aide indirecte à la presse nécessite une adaptation de l'ordonnance sur la poste. Ces dispositions légales indiquent dans quel sens iront les dispositions d'exécution du Conseil fédéral (voir ch. 5).

5

Commentaire des dispositions

5.1

Loi sur la poste

Art. 16 Le rabais pour la distribution des quotidiens et des hebdomadaires en abonnement est maintenu. Toutefois, en raison de la situation économique précaire du secteur, une concentration de l'aide sur les titres à faible tirage n'est plus pertinente. Les titres suprarégionaux et à fort tirage doivent également pouvoir bénéficier du rabais (al. 4, let. a). La limite de tirage à 40 000 exemplaires pour les quotidiens et les hebdomadaires en abonnement, prévue à l'art. 36, al. 1, let. k, de l'ordonnance du 29 août 2012 sur la poste (OPO)33, est donc supprimée. En raison de la baisse constante du nombre d'abonnés ces dernières années, de plus en plus de titres à fort tirage de grandes entreprises de presse sont passés sous la limite supérieure et bénéficient déjà du rabais sur la distribution.

Dans le même ordre d'idées, il convient de supprimer également le critère des têtières, qui exclut actuellement de l'aide indirecte à la presse les journaux appartenant à un groupe de têtières dont le tirage total est supérieur à 100 000 exemplaires en moyenne. Il s'agit d'éviter une inégalité de traitement entre un titre ayant un tirage de 130 000 exemplaires (p. ex. le Tages-Anzeiger, tirage distribué selon le Bulletin des tirages REMP 2019) et des têtières affichant également un tirage total de plus de 100 000 exemplaires (al. 5).

La fixation du montant des rabais sur la distribution nécessite l'approbation du Conseil fédéral (al. 6). Le Conseil fédéral approuve à la fin de chaque année les 33

RS 783.01

4417

FF 2020

rabais par exemplaire pour l'année suivante. La modification apportée à cet alinéa est de nature purement rédactionnelle.

Afin de pouvoir maintenir au moins le niveau de l'aide actuelle (27 centimes par exemplaire en 2020) malgré l'élargissement du soutien à d'autres titres, la contribution fédérale annuelle pour la presse quotidienne et hebdomadaire est augmentée.

L'augmentation à 50 millions de francs (actuellement: 30 millions) permet un rabais sur la distribution par exemplaire sensiblement plus élevé que le niveau actuel et soulage donc financièrement les journaux régionaux et locaux déjà soutenus aujourd'hui. Un élargissement du cercle des ayants droit sans relèvement de la contribution fédérale serait particulièrement préjudiciable aux titres à faible tirage (al. 7).

La catégorie de la presse associative et des fondations reste inchangée et est soutenue à hauteur de 20 millions de francs par an.

5.2

Loi fédérale sur la radio et la télévision

Art. 1 Les mesures d'aide en faveur de tous les médias électroniques sont réglées dans un nouveau chapitre de la LRTV. L'art. 1 doit être adapté en conséquence.

Art. 44 Conformément à l'art. 44, al. 3, de l'actuelle LRTV, un diffuseur ou l'entreprise à laquelle il appartient peut obtenir au maximum deux concessions de radio et deux concessions de télévision. Lors de la révision partielle du 26 septembre 201434, le Parlement a déjà relativisé cette disposition et établi que le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions pour l'introduction de nouvelles technologies de diffusion.

En application de la motion 17.3008 (voir ch. 1.4), cette disposition est abrogée.

L'art. 45, al. 3, LRTV, constitue un instrument utile pour empêcher une concentration. Il définit un ordre de priorité dans l'octroi des concessions: si plusieurs candidatures sont équivalentes, la concession est octroyée au diffuseur qui contribue le plus à la diversité de l'offre et des opinions.

Art. 68a, al. 1, let. h L'art. 68a LRTV énumère de manière exhaustive les besoins de financement dont le Conseil fédéral doit tenir compte pour fixer le montant de la redevance de réception de radio et de télévision. Les mesures générales d'aide en faveur des médias électroniques énumérées aux art. 76 à 76d du projet LRTV sont élargies. Elles sont financées de manière homogène par le biais de la redevance de radio-télévision. Une lettre h est ajoutée en conséquence à l'art. 68a, al. 1, LRTV.

34

RO 2016 2131

4418

FF 2020

Art. 70 Les entreprises qui sont enregistrées auprès de l'Administration fédérale des contributions dans le registre des personnes assujetties à la TVA (al. 2) et ont atteint au cours de l'année civile précédente le chiffre d'affaires minimum fixé par le Conseil fédéral (al. 1) sont soumises à la redevance. Le nouvel article précise désormais explicitement que toutes les sociétés ayant leur siège, leur domicile ou un établissement stable en Suisse doivent payer la redevance. En regard du droit international, les sociétés étrangères sans siège, domicile ou établissement stable en Suisse ne sont pas soumises à la redevance. L'al. 2 est adapté en conséquence afin d'assurer la sécurité juridique.

Al. 2bis: Dans l'ordonnance du 9 mars 2007 sur la radio et la télévision (ORTV)35, le Conseil fédéral a apporté des précisions sur la formation de groupes de TVA. Les entreprises peuvent former un groupe d'assujettissement pour l'assujettissement à la redevance (art. 67c ORTV); des services autonomes de collectivités publiques peuvent aussi se regrouper dans le même but (art. 67d ORTV). Le Conseil fédéral s'est inspiré de la loi du 12 juin 2009 sur la TVA36, qui prévoit la constitution de groupes de TVA et le regroupement de services autonomes de collectivités publiques (art. 12, al. 2, et art. 13 LTVA). Un regroupement pour l'assujettissement à la redevance est ainsi envisageable sans devoir constituer obligatoirement un sujet fiscal selon la LTVA. L'art. 70, al. 2bis, mentionne désormais explicitement cette possibilité.

Al. 4: Le Conseil fédéral a fixé le montant de la redevance de manière à ce que les petites entreprises dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 500 000 francs ne doivent pas payer la redevance (art. 70, al. 4, LRTV en relation avec l'art. 67b ORTV). En outre, il a prévu un remboursement de la redevance pour des cas de rigueur (art. 67f ORTV), à savoir si une entreprise de la catégorie tarifaire la plus basse (chiffre d'affaires déterminant entre 500 000 et 999 999 francs) affiche une perte ou enregistre un bénéfice qui se monte à moins de dix fois la redevance. Cette mesure vise à éviter une charge disproportionnée pour les entreprises de la catégorie tarifaire actuellement la plus basse. La disposition doit maintenant être inscrite dans la loi. La réglementation à l'al. 4 n'est
pas liée à des catégories tarifaires, mais au chiffre d'affaires. Ainsi, les entreprises qui enregistrent moins d'un million de chiffre d'affaires peuvent se référer à la réglementation des cas de rigueur. Comme aujourd'hui, les modalités sont réglées par le Conseil fédéral. L'art. 67f ORTV doit être adapté en conséquence.

Remarques générales concernant les art. 76 à 76d P-LRTV (Mesures d'aide en faveur de tous les médias électroniques) L'actuel art. 76 (Formation et formation continue des professionnels) est remplacé par les mesures de financement générales énumérées aux art. 76 à 76d. Elles s'inspirent des mesures auparavant prévues aux art. 71 à 75 de l'AP-LME, approuvées par la majorité des participants à la consultation. Les mesures bénéficieront à 35 36

RS 784.401 RS 641.20

4419

FF 2020

tous les médias électroniques, y compris les médias en ligne (offres payantes et gratuites).

Art. 76

Formation et formation continue

L'exécution de la tâche sociale et politique propre aux médias suppose de solides connaissances et un grand professionnalisme journalistique. L'actuelle LRTV prévoit à l'art. 76 un soutien à la formation et à la formation continue des professionnels du programme: des institutions de formation et de formation continue de toutes les régions linguistiques reçoivent des subventions de la Confédération d'un montant total d'un million de francs par an. Grâce à ce soutien, elles peuvent proposer à de meilleurs prix des offres de cours dans le domaine du journalisme d'information à la radio et à la télévision. Les cours soutenus incitent les médias électroniques à proposer des formations et des formations continues à leurs collaborateurs et contribuent à un journalisme de qualité.

Le besoin de formation en matière de compétences journalistiques et de normes professionnelles reste élevé. Avec l'évolution des médias, les attentes vis-à-vis des journalistes augmentent, tout comme les exigences concernant la formation et la formation continue. Sont notamment concernés les développements liés à la numérisation, c'est-à-dire le journalisme multimédia, les nouvelles formes narratives permettant d'atteindre différents groupes de population, l'accessibilité des contenus en ligne, le journalisme de données, etc. Vu ces attentes supplémentaires, le montant à disposition doit être relevé.

Les aides sont accordées sur demande. Les destinataires sont des institutions de formation et de formation continue indépendantes qui proposent durablement une offre de cours destinées aux collaborateurs des médias électroniques actifs au sein rédactionnel, notamment dans le domaine du journalisme d'information. Les écoles internes des entreprises de médias ne touchent pas d'aide. Une institution est considérée comme indépendante aussi lorsqu'elle regroupe plusieurs entreprises de médias pour autant qu'elle soit gérée de manière élargie.

Art. 76a

Autorégulation de la branche

La loi crée dorénavant une base permettant de soutenir financièrement l'autorégulation de la branche. Il s'agit en l'occurrence d'une autorégulation spécifique à la branche, c'est-à-dire de règles fixées et appliquées par et pour la branche. Sont soutenues des organisations supportées par une part importante de la branche. A titre d'exemple, on peut mentionner le Conseil suisse de la presse qui, en tant qu'organisme d'autorégulation de la branche des médias, est non seulement une autorité de recours, mais contribue aussi de manière significative à transmettre des normes d'éthique journalistique (droits et devoirs des journalistes). Par ses activités, qui comprennent des débats publics sur l'éthique des médias, il contribue à sensibiliser à la grande importance d'un journalisme de qualité.

4420

FF 2020

Art. 76b

Prestations d'agences

Un soutien financier est prévu pour les agences suisses indépendantes. Avec leurs prestations peu coûteuses (p. ex. mise à disposition de contenus journalistiques professionnels en format texte, audio ou vidéo), les agences de presse apportent une contribution à la qualité journalistique notamment des petits médias. Leurs prestations sont en principe ouvertes à tous les fournisseurs de médias intéressés. Les aides sont accordées sur demande. Le but du soutien ­ service de base destiné aux médias électroniques ­ diffère de l'objectif de la loi du 5 octobre 2007 sur les langues37, qui permet à la Confédération d'accorder des aides financières aux agences de presse d'importance nationale qui informent sur les régions linguistiques du pays. Dans le présent projet, l'aide aux médias électroniques régionaux privés est placée au premier plan. La convention de prestations demande de fournir des services journalistiques de base dans les domaines de la politique, de l'économie, du sport, etc. Dans la loi sur les langues, il s'agit de thèmes en rapport avec la politique des langues ou encourageant la culture et la compréhension mutuelle.

Art. 76c

Infrastructures numériques

La numérisation a aboli les frontières entre les fournisseurs de contenus de médias, les exploitants d'infrastructures et les utilisateurs. Elle a entraîné une multiplication des offres et une fragmentation de l'utilisation. La visibilité et la repérabilité des contenus ou des marques de médias spécifiques sont devenues plus difficiles. Avec des intermédiaires comme Google et Facebook, de puissants groupes internationaux sont actifs dans le secteur des médias et peuvent exercer une influence marquée sur l'offre et l'utilisation des médias en recourant à des algorithmes. En raison de leur position forte sur le marché publicitaire, ils mettent les fournisseurs de médias classiques sous pression, en particulier la presse écrite.

Dans ce contexte, il paraît judicieux de prévoir des mesures d'aide générales qui, pour des raisons économiques, prévoient un soutien technologique aux fournisseurs de médias. La loi doit encourager les infrastructures numériques, pour autant qu'elles ne bénéficient pas déjà d'un autre soutien financier public. Les moyens alloués pourraient par exemple être utilisés pour développer ou exploiter, durant un certain laps de temps, une plateforme technique commune de fournisseurs de médias, afin de renforcer la place médiatique suisse, maintenir la diversité des offres et améliorer la repérabilité de celles-ci. Autres exemples: une app pour une plateforme mobile pour les médias comprenant une application de paiement, un système de gestion de contenus à la disposition de tous les médias électroniques ou le développement d'un logiciel d'adaptation de contenus destinés aux personnes atteintes de déficiences sensorielles.

L'objectif est de soutenir des solutions informatiques servant au conditionnement, à la publication et à la diffusion de contenus pertinents pour la démocratie ou la société, produits de manière professionnelle par des journalistes ou permettant d'améliorer la repérabilité et l'accessibilité de ces contenus.

37

RS 441.1

4421

FF 2020

L'infrastructure informatique soutenue ne doit pas forcément être mise à la disposition de tous les médias électroniques. Si les moyens sont insuffisants, un ordre de priorité doit être établi: dans ce cas, il convient de privilégier le projet qui développe ou exploite des infrastructures ouvertes à tous les médias électroniques à des conditions adéquates et non discriminatoires. La collaboration est favorisée et la subvention utilisée efficacement.

Art. 76d

Dispositions générales

Le Conseil fédéral fixe les modalités de prise en considération des coûts de chaque mesure générale d'aide énumérée aux art. 76 à 76c LRTV. La part maximale des coûts imputables peut s'élever à 80 % au maximum (al. 1). Afin d'empêcher une aide à la presse non admissible au regard du droit constitutionnel, le Conseil fédéral devra veiller à ce que seules les prestations en faveur des médias électroniques soient prises en considération (al. 2). Il précisera par ailleurs les conditions d'octroi des contributions (al. 3). Les contributions sont prélevées sur le produit de la redevance de radio-télévision, à hauteur de 2 % du produit au maximum (al. 4). Le Conseil fédéral détermine les besoins (art. 68a, al. 1, let. h).

5.3

Loi fédérale sur l'aide aux médias en ligne

Les médias sont de plus en plus utilisés sur des supports numériques. Toutefois, les utilisateurs sont encore peu enclins à payer pour des contenus purement en ligne.

Pour des motifs d'ordre politique et démocratique, la Confédération est intéressée à la mise en place de médias en ligne diversifiés, critiques et indépendants, capables de se financer eux-mêmes. La production de contenus journalistiques professionnels est chère, aussi dans le secteur en ligne. Sur l'internet, l'offre est pratiquement illimitée et souvent disponible gratuitement. Les médias suisses sont confrontés à une concurrence internationale et doivent partager l'attention du public. Dans ce contexte, il leur est difficile de mettre en place des modèles de paiement pour une utilisation mobile et en ligne. Dans le secteur en ligne, il existe déjà de nombreuses offres provenant de médias traditionnels et de nouveaux fournisseurs. Différents modèles commerciaux sont appliqués, qui se justifient tous et contribuent tous à la diversité, entre autres: ­

le modèle rigide: l'accès à tous les contenus est payant;

­

le modèle basé sur des dons: le financement est assuré uniquement par des contributions volontaires;

­

le modèle mixte: par unité de temps, un certain nombre de contributions sont mises à disposition gratuitement ou la rédaction décide, selon la situation, si un contenu est librement accessible ou payant;

­

l'offre gratuite: tous les contenus sont accessibles gratuitement, on mise sur l'audience et donc sur des recettes publicitaires plus élevées.

L'objectif de la présente loi est de promouvoir la diversité journalistique des offres de médias en ligne payantes. Cette approche programmatique se reflétera dans les 4422

FF 2020

critères de financement (voir art. 1). En particulier les offres de médias en ligne axées sur un contenu pertinent pour la démocratie sont actuellement très difficiles à financer à moyen ou long terme. Ni le public, ni les annonceurs ne permettent d'assurer un financement durable. Jusqu'ici, plusieurs modèles commerciaux ont été développés et testés. Pour des raisons démocratiques, il est essentiel que les utilisateurs toujours plus nombreux qui s'informent principalement en ligne ou sur un appareil mobile disposent aussi d'offres diversifiées et pertinentes pour la formation de l'opinion. D'ici à ce que ces modèles commerciaux deviennent rentables, un soutien de la Confédération est nécessaire. Cette mesure est aussi une contribution au développement démocratique, social et culturel de la Suisse.

Art. 1

Bénéficiaires des contributions

L'OFCOM verse des contributions aux médias en ligne dans la limite des fonds fédéraux alloués (al. 1). Les contenus doivent être offerts de manière non linéaire (à la demande), par exemple sous forme d'applications ou de pages internet, peu importe qu'il s'agisse de contenus textuels, audio ou vidéo.

L'aide est destinée à des organisations, à des réseaux de professionnels de médias et à certains professionnels qui sont actifs dans le journalisme professionnel et fournissent des contenus d'information (al. 2). Les conditions d'octroi sont énumérées de manière exhaustive. Elles se basent dans les grandes lignes sur les critères de l'aide indirecte à la presse (art. 36, al. 1, OPO), pour autant qu'ils soient également appropriés aux offres de médias en ligne.

Let. a: Sont soutenus les médias en ligne qui génèrent des recettes en vendant des contenus journalistiques à la demande (chiffre d'affaires généré par des recettes du public). Il peut s'agir par exemple de recettes provenant d'offres payantes (abonnement, contenu à la demande). L'aide indirecte à la presse exige également que l'offre soit en abonnement ou payante (voir art. 36, al. 1, let. a et j, OPO). Peu de médias en ligne ont introduit un accès payant pour tous les contenus; par contre, beaucoup se financent à travers des contributions volontaires ou en partie volontaires de leurs utilisateurs (dons, paiement d'une contribution volontaire pour un contenu à la demande, cotisation de membre). Ces contributions volontaires du public sont aussi considérées comme des recettes. L'essentiel est qu'elles soient proportionnelles à la prestation journalistique offerte. Le Conseil fédéral introduira cet aspect dans l'ordonnance en fixant le montant maximal de la contribution volontaire, probablement à environ 1000 francs par année et par personne. Les revenus qui proviennent de dons importants (mécénat) ne sont pas pris en compte pour l'évaluation des contributions de soutien. Le Conseil fédéral fixe les chiffres d'affaires minimaux (voir art. 2, al. 1), qui peuvent différer selon la région linguistique: en effet, les recettes auprès du public sont potentiellement plus importantes en Suisse alémanique que dans les autres régions linguistiques.

L'offre de médias doit principalement s'adresser à un public suisse (let. b, voir art. 36, al. 1, let. c,
OPO) et être actualisée en permanence (let. c, voir art. 36, al. 1, let. d, OPO). Les contenus rédactionnels et la publicité doivent être clairement séparés (let. d).

4423

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Let. e: L'offre de médias traite principalement de thèmes pertinents pour la démocratie, c'est-à-dire de nature politique, économique et sociale. Il ne s'agit pas d'un critère qualitatif, mais formel. L'offre se distingue par la diversité des thèmes et s'adresse à un large public; tous les thèmes mentionnés doivent être traités, mais des priorités peuvent être établies. Les offres purement fictionnelles, purement divertissantes ou générées par les utilisateurs, ainsi que celles qui s'adressent à un public spécialisé ou particulier sont notamment exclues. Il n'y a cependant pas d'exigences en matière de contenu sous la forme de mandats de prestations, ni relatives à la qualité, à l'objectivité et à l'équilibre. La diversité des opinions n'est pas exigée et la liberté en matière de tendances n'est pas restreinte. Cette disposition aussi se fonde sur l'aide indirecte à la presse quotidienne et hebdomadaire: l'art. 36, al. 1, let. e et f, OPO exige principalement des contenus rédactionnels, et la let. g exclut la presse des fondations, associative, spécialisée et professionnelle.

Let. f: Les émissions des programmes de radio et de télévision qui sont déjà financées par la redevance de radio-télévision en vertu de la LRTV sont souvent aussi disponibles à la demande après la diffusion linéaire. Rendre cette offre sur demande payante serait problématique du point de vue de la LRTV. En effet, ces contenus rédactionnels de service public ont déjà été financés par les ménages et les entreprises (redevance de radio-télévision) et doivent rester librement accessibles. Par ailleurs, il s'agit d'éviter les doubles subventionnements, raison pour laquelle les émissions à la demande peuvent certes faire partie intégrante d'une offre de médias soutenue, mais seulement si elles sont de moindre importance. Il n'existe en principe aucune obligation de fournir gratuitement sur demande des émissions financées par la redevance. L'obligation ne vaut que lorsque de telles émissions font partie d'offres en ligne payantes soutenues. La distinction entre l'aide aux médias en ligne et l'aide indirecte aux quotidiens et hebdomadaires en abonnement repose sur des critères différents: un double subventionnement ne pourrait se produire que si la même contribution (p. ex. abonnement à un journal, paiement pour une offre en ligne)
était doublement soutenue. C'est pourquoi, pour établir une distinction par rapport à l'aide indirecte à la presse, il convient de se référer aux recettes générées par le public, provenant clairement de l'offre de médias en ligne (voir art. 2, al. 4).

Le fournisseur de médias déclare travailler selon les règles de pratique journalistique reconnues dans la branche (let. g), par exemple le code des journalistes du Conseil de la presse. Les mentions légales (let. h) instaurent de la transparence en ce qui concerne le fournisseur. L'offre de médias en ligne doit émaner d'une structure privée (let. i). Il s'agit d'une perspective économique, c'est-à-dire du contrôle effectif sur le média. L'adaptation aux besoins des personnes atteintes d'un handicap sensoriel, qui passe en premier lieu par la mise à disposition de contenus textuels accessibles sans entraves, doit être soutenue dans une mesure adéquate (let. j). Il faut partir du principe que le développement technologique (p. ex. l'intelligence artificielle) ouvrira la voie à d'autres solutions peu coûteuses. A l'heure actuelle, seules les télévisions sont tenues de proposer des émissions adaptées aux personnes atteintes de handicaps sensoriels (art. 7, al. 3 et 4, LRTV). Les exigences en matière de protection de la jeunesse sont également fondées sur la LRTV (let. k, voir art. 5, LRTV). Le Conseil fédéral fixe les modalités relatives aux let. c, e, h, j et k (al. 3).

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Les aides sont allouées sur demande (al. 2, phrase introductive). Le Conseil fédéral fixera les exigences dans l'ordonnance (al. 4). La procédure doit être efficace: un formulaire de demande sera mis à disposition. La demande devra être remise dans l'année de contribution et évaluée par l'OFCOM, le paiement se fera en une tranche l'année suivante, après remise des justificatifs demandés. La loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu)38 est applicable. En vertu de cette loi, le bénéficiaire devra fournir à l'autorité compétente tous les renseignements requis permettant d'évaluer la demande et d'effectuer les contrôles nécessaires (art. 11, al. 2 et 3, LSu). Quiconque ne respectera pas cette obligation recevra une décision négative.

Art. 2

Calcul

L'al. 1 précise que le montant de la contribution est calculé en fonction du chiffre d'affaires net qu'une organisation génère avec les recettes provenant du public pour l'utilisation de ses contenus de médias en ligne. Cette approche évite de devoir traiter différemment les multiples modèles de paiement et d'abonnement possibles.

Une mesure basée sur le nombre d'abonnements vendus a été examinée mais rejetée (ch. 1.2.4). Dans le domaine en ligne, les modèles commerciaux sont plus flexibles et plus variables que chez les médias traditionnels. En prenant comme base le chiffre d'affaires, les fournisseurs de médias ont plus de marges dans le choix de leur modèle de financement. Le chiffre d'affaires est une mesure simple et facilement contrôlable. Un chiffre d'affaires minimum (voir art. 1, al. 2, let. a) garantit que l'offre a déjà une audience significative et payante, ce qui est un gage de pertinence et de professionnalisme. Le Conseil fédéral fixe les modalités. Il est envisageable que le chiffre d'affaires minimum s'oriente en fonction des coûts complets d'un poste de journaliste. Il ne faut pas partir du principe qu'une offre pourra être fournie de manière professionnelle et économiquement durable à long terme avec moins de ressources. En outre, fixer un chiffre d'affaires minimum contribue à empêcher que des offres dont la rentabilité résulte de mauvaises conditions de travail puisse bénéficier d'un soutien. Le chiffre d'affaires est aussi adapté à un modèle dégressif (voir al. 3), ce qui signifie que les médias ayant une portée et un chiffre d'affaires moindres, par exemple les médias locaux et régionaux ou destinés à un groupe cible spécifique, peuvent être davantage soutenus par franc de chiffre d'affaires que les offres des grandes entreprises de médias avec une orientation régionale linguistique.

Il s'agit du chiffre d'affaires net, à savoir les recettes effectivement réalisées auprès du public, déduction faite de toute incitation sous la forme de prestations en espèces fournies en contrepartie par les organisations de médias (motivation, p. ex. sous la forme d'avantages financiers pour les membres ou de cadeaux).

Al. 2 et 3: Le Conseil fédéral détermine la part maximale du montant de la contribution sur la base du chiffre d'affaires imputable, récompensant ainsi le succès (disposition
à payer pour un produit de média). Pour définir la part maximale de la subvention, il se base sur la taille et la structure du marché dans les régions linguistiques, comme c'est le cas pour le chiffre d'affaires net minimum. Le pourcentage s'élève à 80 % au maximum, c'est-à-dire que pour un franc de chiffre d'affaires net, un fournisseur de médias reçoit au maximum 80 centimes. Actuellement et à moyen terme, 38

RS 616.1

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les médias en ligne ne peuvent pas être financés sans pertes car les recettes réalisées auprès du public et avec la publicité ne couvrent pas les coûts. Comme déjà mentionné, dans le domaine en ligne, les recettes publicitaires profitent aux plateformes étrangères et aux marchés des petites annonces, mais pas aux contenus de médias.

Ces derniers doivent donc être financés essentiellement par des recettes réalisées auprès de leur public. La subvention sert de mesure transitoire pour mettre en place ce modèle d'affaires, jusqu'à ce que les coûts puissent être entièrement couverts par les recettes provenant de la publicité et du public. Le pourcentage de 80 % au maximum, calculé sur la base du chiffre d'affaires issu des recettes réalisées auprès du public, devrait permettre également aux petits fournisseurs de médias de couvrir leurs coûts. Ce pourcentage correspond presque à un doublement des recettes réalisées auprès du public, et devrait pouvoir compenser le manque de recettes publicitaires ou générées auprès du public. On estime que les éditeurs nationaux générant un chiffre d'affaires important également en ligne sont peu nombreux, et les fournisseurs de moindre importance, majoritaires. L'aide est donc conçue de sorte que les plus petits fournisseurs reçoivent proportionnellement un soutien plus important. Le Conseil fédéral fixera des parts différentes en fonction du chiffre d'affaires et aménagera l'aide de manière dégressive.

Le Conseil fédéral élaborera un modèle pour le calcul des contributions. Comme le marché en ligne est en constante évolution, il n'est pas possible pour l'heure de prévoir en détail quels seront le chiffre d'affaires et les parts de marché des offres de médias en ligne au moment de l'entrée en vigueur. Pour déterminer la subvention, le Conseil fédéral analysera et prendra en compte les critères suivants: ­

la taille du marché (rapport entre la subvention totale et le chiffre d'affaires sur le marché);

­

la structure du marché (dégression plus forte, avec une concentration forte/en augmentation);

­

la dépendance aux subventions des différentes offres (le rapport entre subvention et chiffre d'affaires doit se situer dans une fourchette raisonnable).

Compte tenu de ces critères, le Conseil fédéral établira les points clés suivants: ­

montant de la subvention totale

­

chiffre d'affaires minimal

­

classes de chiffres d'affaires

­

part de la subvention par franc gagné dans chacune des classes de chiffres d'affaires (graduation).

Al. 4: Seules les recettes réalisées auprès du public et provenant clairement de l'offre de médias en ligne sont prises en compte. Les doubles subventionnements (aide indirecte à la presse, redevance de radio-télévision) doivent être évités. Habituellement, les offres de médias sont disponibles dans de nombreuses combinaisons, et il n'existe plus guère d'abonnements purs et simples à des journaux. Il convient donc d'établir ici une limite par rapport aux recettes générées par les produits de presse.

Afin d'exclure les doubles subventionnements, les recettes des offres de médias en ligne doivent être clairement séparées de celles des quotidiens et hebdomadaires.

4426

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L'offre des éditeurs est en effet souvent vaste, par exemple la version imprimée avec l'accès en ligne (abonnement combiné, l'accès en ligne étant accordé d'emblée avec l'abonnement au journal), l'offre numérique avec ou sans version électronique (sans version imprimée) ou la combinaison de la version en ligne (lundi à vendredi) et de la version imprimée (samedi et dimanche). Les recettes réalisées auprès du public sont reconnues pour autant qu'elles émanent sans équivoque de l'offre en ligne. Tel est le cas notamment des offres numériques sans version imprimée et de l'offre uniquement en ligne certains jours de la semaine. Si le modèle de prix relatif à l'abonnement combiné est conçu de manière à ce qu'il y ait des prix identifiables séparément pour la version imprimée et la version en ligne, les recettes réalisées auprès du public avec l'offre en ligne sont reconnues proportionnellement. Les recettes provenant de la télévision en différé sont exclues car il s'agit de l'offre groupée d'un fournisseur de services de télécommunication, lequel n'est pas une organisation de médias au sens de l'art. 1, al. 2.

Art. 3

Offres de médias multiples émanant d'une même structure

Lorsqu'une entreprise exerce un contrôle économique sur plusieurs offres de médias dans la même région linguistique, celles-ci sont traitées pour le calcul de la dégressivité comme une seule offre. La définition du contrôle économique se réfère largement au concept de contrôle des entreprises, tel que défini dans le droit de la concurrence. Le Conseil fédéral fixe les modalités.

Art. 4

Financement

Selon l'art. 4, le financement des contributions est assuré par les ressources générales de la Confédération. La redevance de radio-télévision n'entre pas en considération. Contrairement au service public librement accessible à la radio et à la télévision, il n'existe pas de liens étroits entre le cercle des assujettis (tous les ménages, toutes les entreprises à partir d'un certain chiffre d'affaires) et la prestation (offres en ligne payantes). Le montant est fixé dans la loi afin de tenir compte de l'indépendance des médias. L'affectation ou non de la totalité de la contribution dépend de la taille et de la structure du marché ainsi que des critères de calcul (part en pourcentage, dégression). Si les moyens à disposition ne suffisent pas, les contributions sont toutes réduites de manière proportionnelle (art. 2, al. 5). Les moyens non utilisés sont reversés à la Confédération, contrairement à l'aide indirecte à la presse: le montant annuel alloué à cette dernière est toujours utilisé entièrement (montant divisé par le nombre d'exemplaires soutenus).

Art. 5

Evaluation

L'aide est limitée à dix ans (ch. III, al. 3). Le Conseil fédéral est chargé d'entamer une évaluation cinq ans après l'entrée en vigueur. Il soumet à l'Assemblée fédérale un rapport concernant les effets de l'aide sur la diversité des médias en ligne payants. Il évalue également la rentabilité. Le Parlement pourrait ensuite délibérer sur une aide définitive ou d'éventuelles adaptations.

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6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération

Avec ce train de mesures, il faut un financement supplémentaire au moyen des ressources générales de la Confédération de 50 millions de francs par an au maximum: 20 millions pour l'aide indirecte à la presse et 30 millions au maximum pour l'aide aux médias en ligne. Le soutien aux institutions de formation et de formation continue (1 million de francs par an) n'est plus nécessaire, car ces entités seront financées par la redevance de radio-télévision (voir ch. 6.3).

Le projet ne nécessite pas l'engagement de nouveaux collaborateurs à l'OFCOM. La charge administrative supplémentaire résultant de l'extension de l'aide indirecte à la presse est faible et peut être traitée avec le personnel déjà en place. Aux mesures générales de soutien déjà existantes dans la LRTV s'ajoutent d'une part celles qui concernent les organismes d'autorégulation et les infrastructures informatiques, et d'autre part l'aide aux médias en ligne. Ces nouvelles subventions exigeront un travail de mise en oeuvre important, qui pourra être effectué par le personnel existant de l'OFCOM, à condition que d'autres subventions se terminent d'ici-là. Dans le cas de certaines subventions, les fonds disponibles proviennent d'excédents non utilisés (art. 109a LRTV et art. 82 à 85 ORTV, affectation à la formation et à la formation continue, aux coûts de transmission DAB+, aux investissements des radios dans le traitement numérique, aux investissements des télévisions dans les processus numériques de production TV). Quant au soutien aux nouvelles technologies accordé pour le DAB+, il devrait prendre fin au plus tard en 2023.

6.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Le train de mesures renforce les médias suisses dans leur ensemble, ce qui profite à tous. Tous les quotidiens et hebdomadaires en abonnement doivent bénéficier d'un rabais par exemplaire sur la distribution régulière par voie postale, quel que soit leur tirage. Les journaux et magazines régionaux et locaux à faible tirage seront davantage soutenus grâce à une augmentation du rabais par exemplaire. Les régions périphériques en profiteront, car la distribution régulière y est plus importante; dans les agglomérations, la distribution matinale est également proposée. Lors de la consultation sur l'avant-projet LME, les cantons se sont dits favorables à l'extension de l'aide aux médias. Afin d'éviter une nouvelle réduction des prestations dans les régions, plusieurs cantons envisagent déjà de prendre leurs propres mesures de soutien (p. ex. Genève, Vaud, Berne, Saint-Gall).

Les nouvelles offres de médias en ligne doivent être soutenues. Ce soutien est dégressif, pour que les rédactions des petits médias reçoivent un soutien spécifique.

Cette mesure vise à contrer la suppression des prestations journalistiques et la centralisation des rédactions.

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6.3

Conséquences pour l'économie

D'un point de vue macroéconomique, les conséquences sont faibles à négligeables.

Modification de la LPO: Le cercle des ayants droit est élargi, de sorte que l'on estime (en l'état actuel des connaissances) à une quinzaine le nombre des titres supplémentaires qui pourront bénéficier d'un soutien. Parallèlement, la contribution fédérale annuelle sera augmentée de 20 millions de francs, ce qui permettra de relever légèrement le niveau d'encouragement actuel.

Modification de la LRTV: Les modifications de la LRTV concernent l'extension des mesures générales de soutien aux médias électroniques, qui recevront une aide exclusivement par le biais de la redevance de radio-télévision (maximum 2 % des recettes, voir art. 76d P-LRTV). L'extension dans cette ampleur a été saluée lors de la consultation sur l'avant-projet LME.

Aperçu des mesures générales et des besoins financiers: Affectation

2019

Institutions de formation et de formation continue (art. 76 P-LRTV)

(1 million de francs, actuelle- Le Conseil fédéral définit ment sur les ressources géné- les besoins rales de la Confédération)

A l'avenir

Organismes d'autorégulation (art. 76a P-LRTV)

­

Le Conseil fédéral définit les besoins

Prestations d'agences (art. 76b P-LRTV)

2 millions de francs

Le Conseil fédéral définit les besoins

Infrastructures numériques (art. 76c P-LRTV)

­

Le Conseil fédéral définit les besoins

Total des besoins sur la redevance

2 millions de francs

Maximum 28 millions de francs (besoins supplémentaires maximaux: 26 millions)

Sur un volume total d'environ 1,3 milliard de francs, 26 millions de francs (besoins supplémentaires maximaux) est une somme marginale. Dans la perspective actuelle, une augmentation de la redevance des ménages et des entreprises n'est pas nécessaire. Une augmentation du nombre de ménages est vraisemblable. En outre, les besoins pour le soutien aux technologies (art. 58 LRTV) diminuent continuellement et disparaîtront complètement d'ici 2023.

Le cercle des ayants droit est limité. S'agissant des organismes d'autorégulation, ils sont au nombre de cinq au maximum, et s'agissant des infrastructures informatiques, les fonds seront octroyés prioritairement et de manière groupée à des projets développés par et pour la branche. Les projets particuliers destinés à certains éditeurs resteront une exception.

LFML: L'aide aux médias en ligne nécessite un financement sur les fonds généraux de la Confédération de 30 millions de francs au maximum. Le cercle des destinataires est prévisible et ne dépassera pas 200 bénéficiaires (portails en ligne d'éditeurs existants, quelques nouveaux portails exclusivement en ligne).

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Dans l'ensemble, l'impact économique global est négligeable à faible.

6.4

Conséquences pour la société

Les répercussions sur la société sont positives. Les conditions générales sont améliorées, afin de garantir dans toutes les régions linguistiques une offre de médias diversifiée et pertinente pour la démocratie et la société. Le soutien actuel aux médias est principalement destiné aux services utilisés majoritairement par des groupes de population plus âgés (radio, TV, presse). Dans une perspective d'ordre tant politique que démocratique, il est toutefois important que les jeunes aient également accès à des contenus suisses attrayants et qu'ils puissent s'informer avec les médias du pays.

L'aide aux médias en ligne constitue une première étape.

6.5

Conséquences sur l'environnement

Le projet n'a aucune conséquence sur l'environnement.

6.6

Autres conséquences

Le projet ne prévoit pas d'alignement sur le droit de l'UE (voir ch.3.2).

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

7.1.1

Remarques préalables

Tant la modification de la LRTV que le P-LFML se fondent sur l'art. 93 Cst. L'al. 1 contient une règle de compétence (compétence de la Confédération pour légiférer) et les al. 2 à 5 les conditions pour l'exercice de cette compétence. Bien que l'art. 93 Cst. soit intitulé «Radio et télévision», d'autres formes de médias sont également mentionnées dans la compétence législative à l'al. 1. Ainsi, outre la radio et la télévision, le constituant inclut explicitement les «autres formes de diffusion de productions et d'informations ressortissant aux télécommunications publiques» dans la compétence législative de la Confédération. Cette formulation introduit une clause générale pour que, dans la compétence fédérale, une porte soit laissée ouverte aux nouveaux développements technologiques. Interprétée de manière historique, cette réglementation tournée vers l'avenir permet, selon une grande partie de la doctrine, à la Confédération de prévoir des dispositions légales pour l'ensemble des médias diffusés par des techniques de télécommunication. Selon la doctrine dominante, la notion de médias diffusés par des techniques de télécommunication ou par voie

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électronique comprend également la diffusion d'offres numériques39. La presse écrite n'est incontestablement pas couverte par l'art. 93, al. 1, Cst. Pour que la Confédération ait compétence en la matière, il faudrait créer une nouvelle base constitutionnelle40. L'art. 93, al. 1, Cst. prévoit, avec l'expression «relèvent de la compétence de la Confédération», une compétence générale de la Confédération, qui comprend également des mesures d'aide41. L'aide indirecte à la presse, sous forme de rabais sur la distribution des journaux par la Poste, est fondée sur la compétence de la Confédération dans le secteur postal selon l'art. 92 Cst.

Aux termes de l'art. 93, al. 1, Cst., la diffusion par voie électronique d'informations adressées au public est déterminante pour distinguer les médias électroniques de la presse écrite. Conformément à l'interprétation grammaticale, l'art. 93, al. 1, Cst.

s'applique indépendamment du fait que le contenu des médias numériques soit simultanément disponible sous forme imprimée. Cette interprétation s'impose également en recourant à l'interprétation conforme à l'esprit du temps. A l'ère des rédactions convergentes et des offres hybrides, il devient de plus en plus difficile de ramener un contenu essentiellement à une édition imprimée 42. Par conséquent, conformément à l'art. 93, al. 1, Cst., la Confédération peut légiférer sur l'ensemble de la branche des médias électroniques, qu'il existe ou non des répliques sous forme imprimée. La réglementation fédérale basée sur l'art. 93 Cst. ne peut toutefois se référer qu'à la forme électronique des offres de médias, et doit donc exclure les répliques imprimées ­ ne fut-ce qu'arithmétiquement.

39

40

41

42

Voir Biaggini, Giovanni (2017): Kommentar zu Art. 93 BV, N 5. 2. überarb. und erweiterte Aufl. Zurich: Orell Füssli; Graber, Christoph Beat / Steiner, Thomas (2014): Kommentar zu Art. 93 BV, N 12. In: Ehrenzeller, Bernhard / Schindler, Benjamin / Schweizer, Rainer J. / Vallender, Klaus A. (éd.): St. Galler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung. Zurich: Schulthess; arrêt du Tribunal administratif fédéral A-6603/2010 du 21 avril 2011, cons. 3.3.2; voir le commentaire détaillé de Martin Dumermuth (2016): Die Zuständigkeit des Bundes im Bereich der elektronischen Medien nach Art. 93 BV, p. 335 ss, In: AJP 2016, p. 335 ss; Zeller, Franz / Dumermuth, Martin (2015): Kommentar zu Art. 93 BV, N 12 ss. In: Waldmann, Bernhard / Belser, Eva Maria / Epiney, Astrid (éd.): Basler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung (BV). Bâle: Helbing Lichtenhahn Verlag; avis divergent en ce qui concerne la compétence de la Confédération de légiférer sur la presse en ligne: Saxer, Urs (2017): Die Online-Zuständigkeiten des Bundes, p. 335 s. et 343 s. In: AJP 2017, p. 334 ss.

Par le passé, toutes les tentatives de créer une base constitutionnelle pour une aide directe à la presse et aux médias ont échoué. Au cours des quarante dernières années, des parlementaires ont cherché à faire aboutir un tel projet à quatre reprises. Jamais une telle proposition n'est toutefois parvenue à réunir une majorité; elle a toujours été rejetée au motif de préserver la liberté de la presse et des médias et de contenir tout risque d'influence étatique.

Voir Biaggini, Giovanni (2017): Kommentar zu Art. 93 BV, N 3. 2. überarb. und erweiterte Aufl. Zurich: Orell Füssli; Graber, Christoph Beat / Steiner, Thomas (2014): Kommentar zu Art. 93 BV, N 2. In: Ehrenzeller, Bernhard / Schindler, Benjamin / Schweizer, Rainer J. / Vallender, Klaus A. (éd.): St. Galler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung. Zurich: Schulthess; Zeller, Franz / Dumermuth, Martin (2015): Kommentar zu Art. 93 BV, N 10. In: Waldmann, Bernhard / Belser, Eva Maria / Epiney, Astrid (éd.): Basler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung (BV). Bâle: Helbing Lichtenhahn Verlag.

Voir Dumermuth, Martin (2016): Die Zuständigkeit des Bundes im Bereich der elektronischen Medien nach Art. 93 BV, p. 352. In: AJP 2016, p. 335 ss.

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Le fait que l'art. 93 Cst. soit intitulé «Radio et télévision» s'explique par le fait que l'al. 2 constitue la partie principale de l'art. 93 Cst. En conséquence, le législateur fédéral doit veiller à ce que le système global de radio et de télévision fournisse une offre diversifiée. Les art. 93, al. 3, et 17 Cst. (liberté des médias) garantissent l'indépendance vis-à-vis de l'Etat, notamment de la radio et de la télévision, mais aussi des médias en général: l'Etat ne peut pas fournir d'offres de médias lui-même ou par l'intermédiaire d'organisations contrôlées par lui. L'art. 93, al. 4, Cst., demande par ailleurs de prendre en considération la situation et le rôle des autres médias, en particulier de la presse. A l'origine, cette disposition était destinée à protéger surtout la presse écrite et le cinéma contre les conséquences négatives de l'évolution technique. Elle vise notamment à contrebalancer l'expansion excessive des fournisseurs de médias financés par des fonds publics. Toutefois, le principe constitutionnel de prise en considération ne signifie pas que des structures doivent être conservées ou que des catégories de médias doivent être protégées contre la concurrence43. En particulier, l'art. 93, al. 4, Cst. ne doit pas être compris comme étant un principe de subsidiarité, selon lequel l'Etat ne peut prendre des mesures de soutien dans un domaine spécifique qu'en cas de défaillance du marché44.

7.1.2

Modification de la loi sur la poste

La modification de la loi sur la poste se fonde sur l'art. 92 Cst., lequel confère à la Confédération la compétence en matière postale. Avec les changements proposés, le modèle pratiqué d'aide indirecte à la presse est maintenu.

7.1.3

Modification de la LRTV

La révision de la LRTV introduit diverses mesures générales d'aide, qui doivent profiter à tous les médias électroniques. Alors que la LRTV actuelle ne prévoit jusqu'à présent qu'un soutien aux institutions de formation et de formation continue en faveur des professionnels de la radio et de la télévision, le projet propose que soient soutenues aussi bien les institutions de formation et de formation continue que les organismes d'autorégulation, les agences de presse ou les infrastructures numériques dans l'ensemble de la branche des médias électroniques (voir art. 76 à 76d P-LRTV). Comme ces mesures servent à améliorer la qualité, la visibilité et la repérabilité des médias électroniques, elles profitent indirectement à l'ensemble de la branche.

Comme expliqué ci-dessus, l'art. 93, al. 1, Cst. ne permet pas à la Confédération de réglementer et donc de soutenir la presse écrite. Ce principe n'exclut toutefois pas 43

44

Voir Saxer, Urs (2011): Die Online-Aktivitäten der SRG und ihre rechtlichen Grenzen, p. 695 s. In: sic! ­ Zeitschrift für Immaterialgüter-, Informations- und Wettbewerbsrecht 2011, p. 693 ss.; Widmer-Schlumpf, Eveline (1990): Voraussetzungen der Konzession bei Radio und Fernsehen. Basel/Zürich/Genf: Helbing Lichtenhahn Verlag, p. 18.

Voir notamment (avec d'autres renvois) Müller, Jörg Paul (2017): Zur Relevanz des Subsidiaritätsprinzips nach Art. 6a BV im Verhältnis der SRG zu privaten Anbietern.

In: Medialex 2017, p. 52 ss., ch. 48 s.

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que des mesures de soutien puissent bénéficier indirectement à la presse écrite en plus des médias électroniques, pour autant que l'aide reste accessoire et profite essentiellement aux médias électroniques. Une situation similaire existe dans le cadre du champ d'application de la compétence fédérale en matière de promotion de la production cinématographique, prévue à l'art. 71, al. 1, Cst. («La Confédération peut promouvoir la production cinématographique suisse»). A cet égard, la doctrine considère comme compatible avec le but visé par l'art. 71, al. 1, Cst. que la loi, au sens d'une définition large, définisse comme étant un film suisse toute oeuvre réalisée pour l'essentiel par un auteur suisse45. L'art. 76d P-LRTV prévoit par conséquent que, pour les mesures générales d'aide, seules les prestations en faveur des médias électroniques sont prises en considération.

7.1.4

Loi fédérale sur l'aide aux médias en ligne

Le P-LFML prévoit d'allouer directement des contributions de soutien pour la fourniture d'offres de médias numériques à la demande si certains critères objectifs et neutres du point de vue du contenu sont remplis. Dans ce cas, la Confédération peut s'appuyer sur l'art. 93, al. 1, Cst. car, selon la doctrine dominante, la notion de médias diffusés par voie électronique englobe également les offres en ligne (voir ch. 7.1.1). Etant donné que l'ensemble du système de radio et de télévision est soumis à un mandat constitutionnel, les radios et télévisions reçoivent des concessions assorties d'un mandat de prestations journalistiques national ou régional.

Contrairement au domaine de la radio et de la télévision, l'art. 93 Cst. n'apporte cependant pas de réponse à la question de savoir quelles prestations journalistiques la Confédération doit garantir dans le domaine des autres médias électroniques visés à l'art. 93, al. 1, Cst. Dans la doctrine, il est toutefois largement admis que, dans le contexte de la liberté des médias (art. 17 Cst.), il existe également dans le domaine des médias en ligne un grand intérêt public à des offres de médias diversifiées46. Par conséquent, le législateur est libre de prévoir des mesures de soutien pour garantir la diversité journalistique dans ce domaine également, soit en attribuant des mandats de prestations liés au contenu, soit en conditionnant le soutien au respect de critères objectifs et neutres du point de vue du contenu.

La contribution aux offres de médias en ligne est financée par les fonds généraux de la Confédération. En raison du principe d'équivalence, le financement des offres de médias par le produit de la redevance des ménages et des entreprises n'est pas auto45

46

Voir Geiser, Thomas / Graber, Christoph Beat (2014): Kommentar zu Art. 71 BV, N 11.

In: Ehrenzeller, Bernhard / Schindler, Benjamin / Schweizer, Rainer J. / Vallender, Klaus A. (éd.): St. Galler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung. Zurich: Schulthess; Stöckli, Andreas (2015): Kommentar zu Art. 71 BV, N 8. In: Waldmann, Bernhard / Belser, Eva Maria / Epiney, Astrid (éd.): Basler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung (BV). Bâle: Helbing Lichtenhahn Verlag.

Voir Brunner, Stephan C. / Burkert, Herbert (2014): Kommentar zu Art. 17 BV, N 4, 26, 34 et 38. In: Ehrenzeller, Bernhard / Schindler, Benjamin / Schweizer, Rainer J. / Vallender, Klaus A. (éd.): St. Galler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung. Zurich: Schulthess; Zeller, Franz / Kiener, Regina (2015): Kommentar zu Art. 17 BV, N 20.

In: Waldmann, Bernhard / Belser, Eva Maria / Epiney, Astrid (éd.): Basler Kommentar zur Schweizerischen Bundesverfassung (BV). Bâle: Helbing Lichtenhahn Verlag.

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risé, car il n'existe pas de lien factuel suffisant entre les personnes assujetties à la redevance et les personnes qui consomment des offres de médias payantes.

S'agissant de l'exigence d'indépendance vis-à-vis de l'Etat (art. 17 et 93, al. 3, Cst.), il convient de faire preuve de prudence dès que des offres de médias sont financées par le budget ordinaire de l'Etat. Comme pour l'aide indirecte à la presse, le montant de la contribution est fixé dans la loi; cela permet une dépense liée qui restreint fortement la marge de manoeuvre du Conseil fédéral et du Parlement dans le processus de budget. En outre, les contributions qui reviennent aux différentes offres sont conçues comme des subventions donnant droit à des prestations, dont l'octroi est conditionné au respect de critères objectifs. Si les fonds ne suffisent pas, la loi prévoit que toutes les contributions sont réduites dans la même proportion. Enfin, les décisions en matière de subventions sont soumises à un contrôle juridictionnel. Par conséquent, il n'y a guère de risque que des autorités étatiques influencent certaines offres de médias par le biais du budget ou de l'octroi de subventions. Dans ce contexte, le financement de la contribution fédérale à des offres de médias par le budget ordinaire de la Confédération est conforme à la Constitution.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

La Convention européenne du 5 mai 1989 sur la télévision transfrontière47 (CETT) soumet les Etats signataires à des normes minimales contraignantes pour la télévision (linéaire), par exemple en ce qui concerne la protection de la jeunesse, le respect de la dignité humaine ou les règles en matière de publicité. Le présent projet n'affecte pas la compatibilité de la LRTV avec la CETT.

Le projet est compatible avec les obligations de la Suisse en matière d'accords internationaux ou d'adhésion à des organisations internationales. Il respecte en particulier les dispositions de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 195048 (CEDH), qui est contraignante pour la Suisse, et tient compte de la liberté d'expression (art. 10 CEDH). Ainsi, la Cour européenne des droits de l'homme a réaffirmé à plusieurs reprises l'obligation pour l'Etat de garantir la diversité dans l'ensemble de la branche des médias49. Le présent projet crée de nouveaux instruments d'aide directe et indirecte, qui visent tous à garantir la diversité dans le secteur des médias électroniques.

L'art. 19 du Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques50 (Pacte II de l'ONU) oblige l'Etat à promouvoir la diversité des médias et à empêcher une concentration excessive51.

47 48 49 50 51

RS 0.784.405 RS 0.101 Voir par exemple la décision de la CEDH n° 13914/88 «Informationsverein Lentia et autres c. Autriche», ch. 38.

RS 0.103.2 Voir Comité des droits de l'homme, Observation générale n° 34, CCPR/C/GC/34, 12.9.2011, ch. 40; message du 19 octobre 2016 concernant l'initiative populaire «Oui à la suppression des redevances radio et télévision (suppression des redevances Billag)», FF 2016 8013, 8049.

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Les instruments d'aide nouvellement créés sont également conformes au Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits économiques, sociaux et culturels52 (Pacte I de l'ONU). En vertu de l'art. 15, al. 1, let. a, du Pacte I de l'ONU, la Suisse doit, en tant qu'Etat membre, reconnaître à tout individu le droit de «participer à la vie culturelle». Ce droit inclut la consommation d'offres culturelles via des médias. Dans la limite des ressources financières disponibles, l'Etat est tenu de promouvoir la culture (aussi) dans les médias électroniques, et de poser des fondements pour le pluralisme et la participation démocratique active des citoyens 53.

La Convention du 20 octobre 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles54 (Convention de l'UNESCO) est étroitement liée à l'art. 15, al. 1, let. a, du Pacte I de l'ONU. Elle autorise les parties à adopter des mesures pour protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles (art. 6, ch. 1). Il peut s'agir de mesures qui visent à accorder des aides financières publiques (let. d) et à accroître la diversité des médias (let. h). A cet égard, la Convention est fondée sur le principe de la neutralité technologique (voir art. 4, ch. 1, al. 2, de la Convention de l'UNESCO) et reconnaît le droit des Etats parties de prendre des mesures de protection de la diversité également dans le domaine en ligne55. La Convention reconnaît donc le droit des Etats à promouvoir, par des mesures financières et réglementaires, la diversité des médias dans le secteur des médias électroniques56.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Dans le présent projet, la LRTV et la LPO sont modifiées simultanément. Un lien matériel étroit et donc l'unité de la matière sont donnés, car il s'agit d'un train de mesures visant à renforcer tous les médias. Il est admissible de regrouper dans un acte modificateur unique la nouvelle loi fédérale ainsi que les modifications des deux lois existantes.

L'aide aux médias en ligne est un nouvel instrument d'aide. Par conséquent, cette mesure est limitée à dix ans (cf. ch. III, al. 3).

7.4

Assujettissement au frein aux dépenses

En vertu de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., l'art. 16 P-LPO et le P-LFML requièrent l'approbation de la majorité des membres des deux Chambres, car ils impliquent de nouvelles subventions périodiques de plus de 2 millions de francs (20 millions 52 53 54 55 56

RS 0.103.1 Message du 19 octobre 2016 concernant l'initiative populaire «Oui à la suppression des redevances radio et télévision (suppression de la redevance Billag)», FF 2016 8048 s.

RS 0.440.8 Voir message du 21 septembre 2007 relatif à la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, FF 2007 6881, 6899.

Voir message du 21 septembre 2007 relatif à la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, FF 2007 6890 s., 6891 s. et 6905.

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supplémentaires pour l'aide indirecte à la presse et 30 millions par an pour les médias en ligne).

Il en va autrement de l'extension de l'aide générale aux médias, prévue aux art. 76 à 76d P-LRTV, et financée par la redevance de radio-télévision. Les recettes de la redevance figurent dans le bilan de la Confédération, mais pas dans le compte d'Etat. Il ne s'agit donc pas d'une disposition relative aux subventions qui entraîne des dépenses couvertes par le budget de l'Etat. Selon l'art. 68a LRTV, le Conseil fédéral est chargé de déterminer les besoins pour les différentes affectations et de fixer les tarifs de la redevance. Il prend cette décision en ce sens tous les deux ans.

L'introduction de nouvelles subventions financées par la redevance de radiotélévision ne pèse pas sur le budget de la Confédération. Cela ne signifie pas que la redevance doit être augmentée; en effet les besoins peuvent aussi diminuer.

7.5

Respect du principe de subsidiarité et du principe d'équivalence fiscale

La répartition des compétences entre la Confédération et les cantons n'est pas affectée.

7.6

Conformité à la loi sur les subventions

Le projet prévoit une nouvelle subvention pour soutenir les médias en ligne.

L'importance croissante de ceux-ci et la nécessité pour la démocratie et la politique de soutenir les offres en ligne ont déjà été expliquées (voir ch. 1.1). La structure de l'aide est décrite en détail dans les explications (voir ch. 5.3). Le financement étant limité à dix ans, il convient, pour des raisons d'efficacité, d'allouer des ressources suffisantes. Une contribution maximale de 30 millions de francs par an devrait être nécessaire. Celle-ci provient des ressources générales de la Confédération. Par comparaison aux montants accordés aux radios et télévisions privées au bénéfice d'une quote-part de la redevance (81 millions de francs) et aux quotidiens et hebdomadaires (à l'avenir 50 millions, actuellement 30 millions), cette contribution est appropriée. La gestion matérielle est garantie par la définition de conditions et de critères clairs. La gestion financière est basée sur une part maximale, de sorte qu'une part minimale de contribution propre est requise. La procédure est simple et efficace.

Les contributions sont accordées sur demande, les critères sont justiciables avec peu d'appréciation et le paiement n'est effectué qu'une seule fois rétroactivement.

Actuellement, des rabais à hauteur de 30 millions de francs sont accordés pour la distribution des quotidiens et des hebdomadaires en abonnement de la presse régionale et locale. La nécessité de l'aide indirecte à la presse pour la démocratie et la politique a déjà été expliquée au ch. 1.1.3. Les critères pour y avoir droit et la procédure d'octroi prévue dans l'ordonnance sur la poste restent inchangés. Comme aujourd'hui, l'OFCOM octroie l'aide au cas par cas, par voie de décision; le Conseil fédéral approuve les rabais par exemplaire. L'aide indirecte à la presse a été approuvée pour la dernière fois par le Parlement en 2010 et doit se poursuivre. Désormais, 4436

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tous les quotidiens et hebdomadaires en abonnement bénéficieront d'un soutien s'élevant à 50 millions de francs par an.

7.7

Délégation de compétences législatives

L'art. 1 LFML délègue au Conseil fédéral la compétence de préciser les conditions d'octroi de l'aide aux médias en ligne payants (al. 3), ainsi que les exigences en matière de demandes (al. 4). Les modalités sont basées sur l'aide indirecte à la presse, pour autant que ces conditions soient adaptées au contexte numérique. Le Conseil fédéral fixe également le chiffre d'affaires net minimum (art. 1, al. 2, let. a, LFML). L'art. 2 LFML charge le Conseil fédéral de fixer le montant de la subvention et la dégression.

L'art. 16, al. 5, LPO délègue déjà au Conseil fédéral la compétence de définir les conditions d'octroi pour les quotidiens et les hebdomadaires en abonnement. Le Conseil fédéral les a précisés à l'art. 36, al. 1, OPO, et il prévoit de les y adapter: la limite de tirage de 40 000 exemplaires (let. k) et le critère relatif aux têtières (let. l) seront supprimés. Conjointement avec l'augmentation de la contribution à 50 millions de francs par an, ces mesures permettront de soutenir tous les quotidiens et hebdomadaires en abonnement et d'augmenter légèrement le rabais sur la distribution par exemplaire.

Le Conseil fédéral fixe la part maximale des coûts imputables en vertu de l'art. 76d, al. 1 et 2, LRTV, ainsi que les coûts imputables pour les mesures d'aide générales conformément aux art. 76 à 76c LRTV.

7.8

Protection des données

Le projet ne contient aucune modification significative pour la protection des données.

4437

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Annexe

Mesures actuelles d'aide en faveur des médias Affectation

Montant total par an, en millions de francs (2019)

Provenance des fonds

SSR (LRTV)

1 200

Redevance de radio-télévision

Offre de la SSR destinée à l'étranger, part de la Confédération (LRTV)

19,33

Ressources générales de la Confédération

Radios et télévisions locales et régiona- 81 les chargées d'un mandat de prestations et bénéficiant d'une quote-part de la redevance (LRTV)

Redevance de radio-télévision

Sous-titrage des émissions 2,5 d'information des télévisions régionales (LRTV)

Redevance de radio-télévision

Aide indirecte à la presse (LPO): Presse locale et régionale Presse associative et des fondations

Ressources générales de la Confédération

30 20

Institutions de formation et de formati- 1 on continue dans le domaine du journalisme d'information pour la radio et la télévision (LRTV)

Ressources générales de la Confédération

Formation et formation continue des collaborateurs des diffuseurs privés bénéficiant d'une quote-part de la redevance (LRTV)

1,07

Excédent de la redevance de réception précédente (total 10,125 millions)*

Soutien aux nouvelles technologies Radios: coûts de transmission DAB+ (LRTV)

16,49

Redevance de radio-télévision et Excédent de la redevance de réception précédente (total 10,125 millions)*

Investissements consentis par les radios 1,51 bénéficiant d'une quote-part de la redevance pour la numérisation (LRTV)

Excédent de la redevance de réception précédente (total 10,125 millions)*

Investissements consentis par les télévi- 2,32 sions bénéficiant d'une quote-part de la redevance pour des processus numériques de production TV (LRTV)

Excédent de la redevance de réception précédente (total 10,125 millions)*

Campagne d'information sur le DAB+

Redevance de radio-télévision

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1,5

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Affectation

Montant total par an, en millions de francs (2019)

Provenance des fonds

Soutien à la diffusion de programmes radio dans les régions de montagne et les régions périphériques (LRTV)

0,8

Ressources générales de la Confédération

Etudes d'audience Mediapulse (LRTV)

2,8

Redevance de radio-télévision

Keystone ATS (LRTV)

2,0

Redevance de radio-télévision

Archivage de programmes par les diffuseurs privés de radio et de télévision (LRTV)

1

Redevance de radio-télévision

Recherche dans le domaine des médias (LRTV)

1,59

Redevance de concession

Taux de TVA réduit

125 à 130**

Total

1510 à 1515

* Conformément à l'art. 109a LRTV, en relation avec l'art. 82 ORTV (en vigueur depuis le 1er juillet 2016), les redevances de réception radio et télévision non utilisées d'un montant de 40,5 millions de francs sont consacrées aux radios et télévisions chargées d'un mandat de prestations et bénéficiant d'une quote-part de la redevance: chaque catégorie reçoit un montant de 10,125 millions de francs pour la formation et la formation continue des professionnels du programme, les coûts de diffusion des radios pour le DAB+, les investissements des radios dans la préparation au format numérique et les investissements des télévisions régionales dans les processus numériques de production. L'excédent est réduit de manière continue.

4,5 millions de francs ont été consacrés à la campagne d'information DAB+ 2017-2018.

** Taux normal 7,7 %, taux réduit 2,5 %

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