20.074 Message concernant un crédit-cadre destiné à financer des engagements conditionnels en vue de l'encouragement de l'offre de logements pour les années 2021 à 2027 du 2 septembre 2020

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet d'arrêté fédéral allouant un crédit-cadre destiné à financer des engagements conditionnels en vue de l'encouragement de l'offre de logements pour les années 2021 à 2027, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

2 septembre 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Condensé Le Conseil fédéral propose au Parlement d'adopter un crédit-cadre de 1700 millions de francs destiné à financer des engagements conditionnels grâce auxquels la Confédération pourra cautionner chaque année, à partir de l'été 2021 et jusqu'à fin 2027, de deux à quatre émissions d'emprunts de la Centrale d'émission pour la construction de logements (CCL) pour un montant annuel de 200 à 300 millions de francs en moyenne. D'ici à la fin de 2027, le montant total des engagements en cours au titre de garanties passera, compte tenu du remboursement des emprunts échus, de quelque 3,5 milliards à la fin de 2019 à plus de 4,2 milliards de francs. L'augmentation du volume des cautionnements doit être stabilisée à partir de 2028 au moyen d'un arrêté de planification.

Contexte L'art. 108 de la Constitution donne mandat à la Confédération de prendre des mesures pour encourager les activités des maîtres d'ouvrage et des organisations oeuvrant à la construction de logements d'utilité publique, en complément à l'offre du marché. Ce mandat est rempli aujourd'hui grâce à la loi fédérale du 21 mars 2003 sur le logement (LOG). Sur la base de cette loi, la Confédération alimente un fonds de roulement, dont elle a confié la gestion à titre fiduciaire aux organisations faîtières de la construction de logements d'utilité publique et qui permet d'octroyer des prêts à des taux d'intérêt avantageux pour les projets de construction et de rénovation des maîtres d'ouvrage d'utilité publique. Elle fournit également des garanties aux instruments de financement mis en place par les maîtres d'ouvrage d'utilité publique. Elle soutient principalement la CCL, qui permet à ses membres d'obtenir des financements à long terme et à des conditions avantageuses, et dont les emprunts sont cautionnés en vertu de l'art. 35 LOG, et, accessoirement, la Société coopérative de cautionnement hypothécaire pour coopératives suisses de construction et d'habitation (CCH), dont l'activité est garantie par des arrièrecautionnements de la Confédération comme le prévoit l'art. 36 LOG.

Le 9 février 2020, le peuple et les cantons ont suivi la recommandation du Conseil fédéral et de la majorité du Parlement, et rejeté l'initiative populaire «Davantage de logements abordables». Cette initiative réclamait entre autres un meilleur encouragement de la
construction de logements d'utilité publique. Elle demandait en particulier que la Confédération et les cantons veillent à ce que 10 % au moins des logements nouvellement construits chaque année soient la propriété de maîtres d'ouvrage d'utilité publique. Le Conseil fédéral et le Parlement ont motivé leur rejet de l'initiative populaire en précisant que l'encouragement de la construction de logements d'utilité publique fondé sur les bases constitutionnelle et légale en place a fait ses preuves et qu'il doit être poursuivi dans le cadre existant. À cet effet, le Parlement a adopté un crédit-cadre de 250 millions de francs, qui servira à alimenter le fonds de roulement pendant dix ans et qui contribuera à ce que le soutien apporté aux projets de construction et de rénovation se poursuive dans la même

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mesure que ces dix dernières années. L'arrêté fédéral correspondant est entré en vigueur avec le rejet de l'initiative populaire.

Contenu du projet Par le présent message, le Conseil fédéral réaffirme la position qu'il a prise en amont de la votation concernant l'initiative populaire «Davantage de logements abordables» et demande le maintien, dans les limites existantes, des garanties accordées jusqu'ici en faveur de la construction de logements d'utilité publique.

Le dernier crédit-cadre destiné à financer des engagements conditionnels, ouvert par l'arrêté fédéral du 15 mars 2015, portait sur 1900 millions de francs et sera épuisé à l'été 2021. Le Conseil fédéral propose de continuer, au-delà de cette échéance, à soutenir par des garanties les activités, à l'efficacité avérée, de la CCL et, à un degré moindre, de la CCH. Cet engagement s'impose en raison du mandat constitutionnel et de la position adoptée par le Conseil fédéral dans le contexte de l'initiative populaire, mais aussi à cause de la situation sur le marché du logement et en matière d'offre de logements. Malgré des taux de vacance régionaux élevés liés à l'activité débordante du secteur de la construction et à un taux hypothécaire de référence historiquement bas, la charge locative est lourde pour les ménages à faible revenu et les membres de la classe moyenne, surtout dans les zones urbaines.

Dans un tel contexte, la construction de logements d'utilité publique, dont les loyers sont calculés en fonction des coûts, est un complément indispensable aux investissements immobiliers axés sur le rendement. Il y a lieu de relever à cet égard que les financements de la CCL n'entraînent pas une extension de l'offre, mais contribuent à réduire durablement le prix de la location dans des immeubles existants et à protéger leurs propriétaires des risques liés à la fluctuation des taux d'intérêt.

Le Conseil fédéral estime que les risques de défaillance inhérents à tous les cautionnements sont acceptables en l'espèce. Prudente dans ses financements, la CCL pratique une gestion performante des informations et des risques, et les gages sont constitués par des immeubles qui gardent leur valeur à long terme. Le test de résistance effectué en 2018 par une société indépendante a confirmé la solidité du portefeuille de la CCL. Depuis l'entrée en vigueur
de la LOG en 2003, la Confédération n'a jamais dû honorer aucune des cautions qu'elle lui a accordées. Si la Confédération ne cautionnait plus les emprunts de la CCL, la solvabilité de cette dernière en souffrirait, au détriment des taux avantageux qu'elle propose. La CCL devrait alors mettre un terme à ses activités. Cela signifierait non seulement la perte d'instruments efficaces, mais pourrait aussi avoir pour effet que des cautionnements de la Confédération soient sollicités.

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Table des matières Condensé

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Contexte 1.1 Mandat constitutionnel et loi d'application 1.2 Initiative populaire «Davantage de logements abordables» 1.3 Utilisation des crédits-cadre 1.3.1 Prêts 1.3.2 Engagements conditionnels

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Situation sur le marché du logement et en matière d'offre de logements

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Encouragement du logement à loyer ou à prix modérés 3.1 Rôle des maîtres d'ouvrage d'utilité publique en matière d'offre de logements 3.2 Importance de la CCL en tant qu'instrument de financement pour la construction de logements d'utilité publique 3.3 Activité de la CCL 3.3.1 Organisation et activité d'emprunt 3.3.2 Importance des emprunts de la CCL du point de vue de l'investisseur 3.3.3 Gestion des risques 3.3.4 Inscription de la gestion des risques dans l'ordonnance sur le logement (OLOG) 3.3.5 Analyse du portefeuille et test de résistance 3.4 Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

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Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies nationales du Conseil fédéral 4.1 Relation avec le programme de la législature 4.2 Relation avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

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Procédure préliminaire

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Contenu de l'arrêté ouvrant le crédit 6.1 Nécessité d'un nouveau crédit-cadre 6.2 Proposition du Conseil fédéral 6.2.1 Volume du crédit d'engagement 6.2.2 Hypothèses de renchérissement 6.2.3 Arrêté de planification relatif au crédit-cadre à partir de 2028 6.3 Points examinés et abandonnés 6.3.1 Modification de la durée du crédit-cadre proposé 6.3.2 Modification du type de cautionnement 6.3.3 Renonciation à l'instrument du cautionnement

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Conséquences 7.1 Conséquences pour la Confédération 7.1.1 Conséquences financières 7.1.2 Conséquences sur l'état du personnel et sur les besoins en matière informatique 7.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains les agglomérations et les régions de montagne 7.3 Conséquences économiques 7.3.1 Implications pour l'économie dans son ensemble 7.3.2 Conséquences pour les bénéficiaires de l'aide fédérale 7.4 Conséquences sanitaires et sociales 7.5 Conséquences environnementales 7.6 Autres conséquences

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Aspects juridiques 8.1 Constitutionnalité et légalité 8.2 Forme de l'acte à adopter 8.3 Frein aux dépenses 8.4 Conformité à la loi sur les subventions

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Arrêté fédéral allouant un crédit-cadre destiné à financer des engagements conditionnels pour l'encouragement de l'offre de logements pour les années 2021­2027 (Projet)

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Message 1

Contexte

1.1

Mandat constitutionnel et loi d'application

L'encouragement de la construction de logements, de l'acquisition d'appartements et de maisons familiales destinés à l'usage personnel de particuliers et des activités des maîtres d'ouvrage et des organisations oeuvrant à la construction de logements d'utilité publique est une tâche permanente inscrite à l'art. 108 de la Constitution (Cst.)1. La loi du 21 mars 2003 sur le logement (LOG)2, en vigueur depuis le 1er octobre 2003, en est le principal texte d'application.

La LOG prévoit des mesures concernant les trois objectifs définis dans le mandat constitutionnel3. Le Conseil fédéral a toutefois décidé, en février 2007, de limiter les aides à la construction de logements à l'encouragement indirect des maîtres d'ouvrage d'utilité publique, qui s'effectue depuis lors par l'intermédiaire d'organisations partenaires. Les trois mesures mises en oeuvre à cet effet sont applicables à diverses phases du développement et de la gestion des biens immobiliers:

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­

La Confédération alimente un fonds de roulement géré à titre fiduciaire par les deux organisations faîtières des maîtres d'ouvrage d'utilité publique (Coopératives d'habitation Suisse et LOGEMENT SUISSE). Des prêts portant intérêts et remboursables pour la construction, la rénovation et l'acquisition d'immeubles ainsi que pour l'achat de terrains constructibles sont ainsi mis à la disposition des maîtres d'ouvrage d'utilité publique en guise d'aide de départ et de financement transitoire.

­

La Confédération fournit dans des cas particuliers des arrière-cautionnements à la Société coopérative de cautionnement hypothécaire pour coopératives suisses de construction et d'habitation (CCH), ce qui facilite le financement de la construction et de la rénovation de logements à des taux d'intérêt préférentiels.

­

La Confédération cautionne les emprunts de la Centrale d'émission des maîtres d'ouvrage d'utilité publique (CCL), dont les membres peuvent lever des fonds à long terme à des taux d'intérêt avantageux pour des immeubles existants mis en location, ce qui permet des loyers meilleur marché.

RS 101 RS 842 Voir le rapport additionnel de l'administration du 23 octobre 2018 concernant l'initiative populaire «Davantage de logements abordables», disponible sur www.ofl.admin.ch > Politique du logement > Politique du logement de la Confédération > Initiative populaire «Davantage de logements abordables» > Rapport additionnel de l'administration.

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1.2

Initiative populaire «Davantage de logements abordables»

L'initiative populaire fédérale «Davantage de logements abordables», déposée le 18 octobre 20164, réclamait entre autres un meilleur encouragement de la construction de logements d'utilité publique. Elle chargeait la Confédération et les cantons de veiller à ce que, à l'échelle de la Suisse, 10 % au moins des logements nouvellement construits soient la propriété de maîtres d'ouvrage d'utilité publique. La Confédération devait autoriser les cantons et les communes à introduire à cet effet un droit de préemption en leur faveur sur des biens-fonds appropriés. En outre, si elle vendait des biens-fonds qui étaient sa propriété ou celle d'entreprises qui lui étaient liées, la Confédération devait accorder un droit de préemption aux cantons et aux communes.

Dans son message du 21 mars 20185, le Conseil fédéral a reconnu que cette initiative touchait un point important en ce qui concerne l'offre de logements en Suisse, car pour les personnes à la recherche d'un logement, en particulier celles qui disposent d'un faible pouvoir d'achat, il était difficile, en maints endroits, de trouver un logement qui réponde à leurs besoins. Selon lui, l'ordre de grandeur exigé par l'initiative populaire (10 % au moins des logements) représentait une charge supplémentaire considérable pour la Confédération et les cantons, parce qu'il fallait multiplier par trois environ le taux de construction des investisseurs d'utilité publique. Qui plus est, ce quota, comme d'ailleurs les droits de préemption exigés, était en contradiction avec une approche libérale de l'approvisionnement en logements. Le Conseil fédéral a estimé que l'initiative n'était ni réaliste ni conforme au marché. Il s'est toutefois déclaré disposé à continuer de soutenir la construction de logements d'utilité publique ­ une aide dont l'efficacité n'est pas démentie ­ en se fondant sur les bases constitutionnelle et légale en place et dans la même mesure que jusqu'à présent. Outre le projet d'arrêté fédéral concernant l'initiative populaire proposant de rejeter celle-ci, il a donc présenté dans son message au Parlement un projet d'arrêté fédéral relatif à un crédit-cadre destiné à augmenter la dotation du fonds de roulement en faveur de la construction de logements d'utilité publique. Ce crédit porte sur un montant de 250 millions de francs pour une période de
dix ans.

Le Conseil national et le Conseil des États ont adopté les deux arrêtés fédéraux respectivement le 14 décembre 2018 et le 22 mars 2019. Lors de la votation populaire du 9 février 2020, l'initiative «Davantage de logements abordables» a été rejetée par 57,1 % des voix6. Elle a obtenu une majorité dans les cantons de Genève, de Vaud, de Neuchâtel, du Jura et de Bâle-Ville, mais seize cantons et cinq demicantons l'ont rejetée. Les conditions sont ainsi réunies pour pérenniser l'aide fournie aujourd'hui aux maîtres d'ouvrage d'utilité publique, comme l'envisage le Conseil fédéral. L'arrêté fédéral du 11 mars 2019 relatif à un crédit-cadre destiné à augmenter la dotation du fonds de roulement en faveur de la construction de logements d'utilité publique7 est entré en vigueur avec le rejet de l'initiative populaire. Le 4 5 6 7

FF 2016 8127 FF 2018 2253 FF 2020 4293 FF 2020 4931

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présent message vise à créer les conditions en vue de continuer à fournir des prestations en matière de cautionnements en faveur de la CCL et de la CCH.

1.3

Utilisation des crédits-cadre

1.3.1

Prêts

Adopté le 21 mars 2003 dans le sillage de la LOG, le crédit-cadre de 300 millions de francs destiné aux prêts a permis de porter le fonds de roulement en faveur des maîtres d'ouvrage d'utilité publique, qui existe depuis plusieurs décennies, à environ 510 millions de francs à fin 2017. Les remboursements, qui se montent à quelque 25 millions de francs, permettent d'assurer l'encouragement d'environ 700 à 800 logements par an. Le crédit-cadre entré en vigueur le 9 février 2020 servira à augmenter la dotation du fonds, ce qui doublera approximativement le volume d'encouragement au cours des dix prochaines années. Dans le budget 2020, 21 millions de francs ont été inscrits en faveur du fonds de roulement, et le plan financier 2021­2023 prévoit chaque année un montant équivalent pour son alimentation. Pour autant que l'on puisse en juger aujourd'hui, ces augmentations sont nécessaires.

Alors que des prêts de 24 et 27 millions de francs ont pu être accordés respectivement en 2017 et 2018, leur volume a atteint 40 millions de francs en 2019. Si, contre toute attente, le besoin de financement devait diminuer ou même augmenter notablement, le Conseil fédéral et le Parlement pourront ainsi adapter les tranches de crédit annuelles en conséquence.

1.3.2

Engagements conditionnels

Se fondant sur la LOG, le Parlement a adopté jusqu'ici trois arrêtés fédéraux allouant des crédits-cadre destinés à financer des engagements conditionnels: ­

l'arrêté fédéral du 19 mars 20038: 1775 millions de francs,

­

l'arrêté fédéral du 17 mars 20119: 1400 millions de francs,

­

l'arrêté fédéral du 9 mars 201510: 1900 millions de francs.

Fin 2019, un total de 4681,5 millions de francs avait été utilisé au titre de la LOG pour cautionner des prêts de la CCL, et quelque 38 millions de francs pour des arrière-cautionnements. Une bonne part de ces derniers, environ 25 millions de francs, a bénéficié à la CCH. Le volume des arrière-cautionnements contractés auprès des coopératives de cautionnement dans le domaine de la propriété jusqu'en 2007 s'élève à 13 millions de francs. Ce soutien a été interrompu en 2008 en raison de la faiblesse de la demande et du scepticisme des banques, puis définitivement supprimé en 2019 avec la liquidation des deux coopératives de cautionnement en

8 9 10

FF 2003 5453 FF 2011 2745 FF 2015 2805

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raison de l'abandon de certaines tâches exécutées par l'Office fédéral du logement (OFL).

Début 2020, le crédit-cadre accordé en 2015 affichait encore une somme disponible de plus de 356 millions de francs, laquelle sera épuisée d'ici à l'été 2021.

2

Situation sur le marché du logement et en matière d'offre de logements

Entre 2002 et 2015, la production annuelle de logements est passée d'à peine 29 000 unités à plus de 53 000. En 2016, elle s'élevait à 52 000 unités et gravitait, l'année suivante, autour de 50 000 unités. L'année 2018 devrait afficher une valeur nettement plus élevée, de près 54 000 logements, et la barre des 50 000 pourrait encore être franchie en 2019, étant donné le grand nombre de projets de construction en vue. La tendance observable depuis une quinzaine d'années, caractérisée par le recul des maisons individuelles, se poursuivra probablement, quoique de manière moins marquée. La grande majorité de la production de logements est destinée à la location, après que les premières années du nouveau millénaire aient été marquées par un boum du logement en propriété, le logement locatif ne représentant alors qu'à peine un quart des nouvelles constructions. S'agissant de la taille des logements construits, on observe depuis quelques années que l'accent est mis sur le segment des petits appartements jusqu'à trois pièces. Le nombre des nouvelles unités de cinq et six pièces est en recul depuis 2006 environ, aussi bien en termes relatifs qu'en termes absolus, tandis que celui des nouveaux logements de quatre pièces, qui est resté relativement stable entre 14 000 et 16 000 unités durant cette période. La croissance la plus forte observée est celle des deux-pièces, dont la production a avoisiné les 10 000 unités par an.

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Graphique 1 Nouveaux logements construits et taux de vacance (1980­2019)

Les conditions extrêmement avantageuses des prêts hypothécaires depuis l'an 2000 ont contribué au développement de la construction de logements en propriété. Cette tendance s'est ralentie après 2012, l'année où les directives d'autorégulation de l'Association suisse des banquiers (ASB) ont été introduites. Depuis lors, il n'est plus possible de prélever la totalité des fonds propres sur l'avoir du 2 e pilier pour acquérir un logement en propriété; une part minimale de 10 % sous forme de capitaux propres durs est requise. En outre, la part de la dette hypothécaire qui dépasse les deux tiers de la valeur de l'objet financé doit être amortie. Les directives de l'ASB ont été durcies en 2014 avec l'obligation d'un amortissement linéaire sur une période plus courte. Ces décisions ont entraîné depuis 2013 une chute par rapport aux années précédentes de l'utilisation des fonds de la prévoyance professionnelle en vue de financer un bien immobilier. Enfin, le taux de logements en propriété présente aujourd'hui une légère tendance à la baisse après avoir atteint, l'espace d'un temps, le record de 38,4 % en 2015.

Suite à la forte hausse de la demande à partir de 2007/2008 due à l'importante augmentation de la population, la production de logements locatifs a elle aussi augmenté et profité de la baisse des taux d'intérêt. Par ailleurs, les décisions prises par la Banque nationale suisse (BNS) en janvier 2015, notamment celle ayant trait aux taux d'intérêt négatifs, et le manque manifeste de possibilités de placement qui s'en est suivi ont eu pour effet de maintenir à un niveau élevé, quand elle n'a pas encore augmenté, la production de logements locatifs, malgré le recul de la demande provoqué par une immigration plus faible.

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Le taux de logements vacants, qui gravitait autour de 1 % entre 2002 et 2013, augmente de manière significative depuis 2014. Au 1er juin 2019, le taux de vacance moyen en Suisse était de 1,66 %. Au cours des 40 dernières années, ce chiffre n'a été plus élevé qu'à deux reprises, en 1997 et en 1998. Ce taux varie fortement d'une région à l'autre. Les taux élevés sont recensés dans les cantons de Soleure (3,40 %), de Thurgovie (2,65 %), du Jura et d'Argovie (2,59 % chacun), et de Schaffhouse (2,56 %), tandis que ceux des cantons de Zoug (0,42 %), de Genève (0,54 %), d'Obwald (0,87 %) et de Zurich (0,89 %) restent en dessous de 1 %. Les grandes villes, en particulier, présentent un faible taux de vacance. Le nombre de logements neufs inoccupés, qui dépasse les 10 000 unités, est resté relativement stable ces dernières années, ce qui signifie que les taux de vacance grimpent surtout pour les objets plus anciens. Quelque 12 500 logements inoccupés étaient en vente en juin 2019, et environ 62 900 logements vacants proposés à la location. Autrement dit, plus d'un logement locatif sur quarante n'était pas occupé.

Avec des taux d'intérêt aussi bas et en constant recul, les prix ont pris l'ascenseur dans toute la Suisse, en particulier dans les régions où le marché était déjà très tendu.

Depuis l'an 2000, une augmentation plus ou moins forte des prix de l'offre a été observée dans tous les segments du marché du logement. Ces quatre ou cinq dernières années, cette tendance s'est affaiblie, voire inversée, en raison notamment des directives d'autorégulation introduites en 2012 puis durcies en 2014. Après une période de stagnation dans le secteur de la propriété, les prix sont repartis légèrement à la hausse, en particulier ceux des maisons individuelles. Quant aux loyers proposés sur le marché, la tendance au fléchissement se poursuit. À l'inverse, l'indice des loyers en cours publié par l'Office fédéral de la statistique (OFS) enregistre une légère progression bien que le taux de référence ait baissé de 3,5 % à 1,5 % entre l'automne 2008 et l'été 2017 et soit tombé à un plus bas historique de 1,25 % en mars 2020.

Les investissements effrénés dans la construction de logements en location, les taux de vacance qui en résultent et la forte hausse des prix de transaction des objets loués ont incité l'ASB, sous
la pression de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) et de la BNS, à adapter les directives d'autorégulation pour les objets résidentiels de rendement. Ces modifications sont entrées en vigueur le 1er janvier 2020. Désormais, lors de l'acquisition d'un objet de rendement, la part minimale de fonds propres doit être de 25 %, et la part de financement qui dépasse les deux tiers de la valeur de l'objet doit être amortie dans les 10 ans. Ces prescriptions ne s'appliquent pas aux maîtres d'ouvrage d'utilité publique, leur activité n'étant pas axée sur le rendement.

En moyenne, la population suisse bénéficie d'un très bon accès au logement et à des prix abordables. De nombreux ménages peuvent s'offrir au fil du temps des logements de qualité et plus spacieux. Pour cette raison, et du fait de la taille des ménages, qui a encore quelque peu diminué, la surface habitable par personne a continué d'augmenter, toutefois dans des proportions bien moindres que dans les années 1980 et 1990. Si l'augmentation au cours de ces années était encore de 5 m2 chaque décennie, elle a nettement ralenti entre 2000 et 2018 (3 m2). En 2018, un habitant occupait en moyenne une surface habitable de 46 m2. Les différences entre les propriétaires occupants, les locataires et les personnes vivant dans des coopéra7305

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tives d'habitation sont importantes: selon les relevés structurels cumulés 2010­2014 (méthode dite du «pooling»), les premiers occupaient en moyenne 52,2 m2, les deuxièmes 42,4 m2 et les derniers 36,5 m2 11. Les personnes vivant dans des coopératives d'habitation occupent donc en moyenne une surface habitable nettement inférieure.

Graphique 2 Évolution de la charge locative brute (2006­2017)

La charge locative moyenne est restée relativement constante (env. 20 %). Il faut toutefois signaler une tendance à la hausse, observée entre 2006 et 2017, chez les ménages dont le revenu mensuel brut ne dépasse pas 6000 francs. Pour cette catégorie de revenu, une charge locative supérieure à 25 % peut menacer la satisfaction d'autres besoins élémentaires et rendre nécessaire le recours à l'assistance sociale ou à des prestations complémentaires. Dans le secteur de la propriété, le coût du logement a d'abord longtemps diminué en raison de la baisse des taux d'intérêt. Mais, comme relevé plus haut, les prix des logements en propriété ont pris l'ascenseur et, conjugués aux effets des directives d'autorégulation introduites en 2012 et durcies en 2014, ils rendent l'accession à la propriété plus difficile.

11

Sotomo (2017), Le point sur le logement d'utilité publique. Une comparaison avec le locatif et la propriété, Office fédéral du logement, Granges. L'étude est disponible sur www.ofl.admin.ch > Marché du logement > Études et publications «marché du logement».

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3

Encouragement du logement à loyer ou à prix modérés

3.1

Rôle des maîtres d'ouvrage d'utilité publique en matière d'offre de logements

Le taux de propriétaires en Suisse étant comparativement bas, la construction de logements d'utilité publique revêt une importance particulière en tant qu'alternative à la propriété du logement et aux conditions «normales» de location du logement.

Lorsque les locataires sont sociétaires, comme c'est le cas dans les coopératives d'habitation, ils disposent d'un droit de regard sur les activités de l'organisation et bénéficient d'une plus grande sécurité du logement par rapport aux conditions normales de location. Cette «troisième voie» en matière de construction de logements réunit ainsi les avantages du logement en propriété et ceux de la location traditionnelle (p. ex. mobilité accrue).

Au niveau national, la construction de logements d'utilité publique reste un phénomène marginal. Seuls un peu plus de 4 % des logements occupés appartiennent à des promoteurs d'utilité publique. Ce segment est plus présent dans des villes comme Zurich, Bâle, Lucerne, Bienne ou Thoune, où il constitue plus de 10 % du marché.

Une étude publiée en novembre 2017 par l'OFL12 confirme que le logement d'utilité publique se distingue par bien des aspects de la location traditionnelle et de la propriété. Il se démarque notamment par la structure (la taille) des bâtiments et des logements, les loyers, la composition sociodémographique des occupants, mais aussi par une consommation de terrain et de surface habitable plus réduite. Par ailleurs, son effet atténuateur sur les prix est le plus marqué aux endroits où le niveau des loyers est le plus élevé: pour le quart des emplacements les plus chers, les loyers coopératifs sont plus de 25 % inférieurs aux loyers des logements locatifs conventionnels. Le principe du loyer basé sur les coûts appliqués par les maîtres d'ouvrage d'utilité publique est particulièrement efficace dans les lieux qui permettent aux promoteurs à vocation commerciale d'exiger des loyers plus élevés. Il s'ensuit que les logements d'utilité publique proposent, dans les centres urbains et chers, des logements abordables pour des personnes économiquement moins bien loties.

L'étude permet de conclure que les personnes disposant de ressources financières modestes sont surreprésentées dans les logements à loyer modéré du secteur d'utilité publique. Elle constate que les logements d'utilité publique contribuent
à atténuer les effets de la gentrification et à lutter contre les phénomènes de ségrégation sociale et d'éviction de groupes de population dans les lieux où la pression sur les prix est élevée.

Les maîtres d'ouvrage d'utilité publique mettent davantage l'accent non seulement sur la qualité de l'habitat à un prix abordable, mais aussi très fréquemment sur les infrastructures communautaires, l'absence d'obstacles, le développement durable et l'efficacité énergétique, ou encore sur les logements pour les familles. Plus de la moitié des projets de construction ayant bénéficié d'une aide du fonds de roulement 12

Sotomo (2017), Le point sur le logement d'utilité publique. Une comparaison avec le locatif et la propriété, Office fédéral du logement, Granges. L'étude est disponible sur www.ofl.admin.ch > Marché du logement > Études et publications «marché du logement».

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depuis 2003 satisfont au moins à la norme Minergie, alors que cette part est d'environ un quart pour les autres logements construits. Qui plus est, plusieurs maîtres d'ouvrage d'utilité publique sont devenus des pionniers en matière d'expérimentation de nouvelles formes d'habitat et de concepts de mobilité ainsi que d'intégration de personnes handicapées ou issues de l'asile.

Les avantages de la construction de logements d'utilité publique sont désormais reconnus au-delà de son champ d'action urbain traditionnel. Sur le plan local, l'évolution du marché du logement est fréquemment observée avec inquiétude, en particulier dans les communes bien situées et susceptibles d'accueillir des pendulaires occupant des emplois bien rémunérés dans le secteur des services, ainsi que dans les communes touristiques. L'arrivée de ménages à haut revenu et fortunés a tiré vers le haut les prix du sol, des maisons et des appartements, de sorte qu'ils deviennent inabordables pour les membres de la classe moyenne et avant tout les jeunes adultes, qui sont nécessaires au bon fonctionnement des communes. Le nombre d'initiatives prises par la population ou les autorités afin de combler, en collaboration avec des organismes de construction de logements d'utilité publique, les lacunes du marché s'est multiplié en conséquence. Ce type d'initiative est également fréquent lorsqu'il s'agit de proposer des logements pour personnes âgées et pourrait prendre davantage encore d'importance à l'avenir, compte tenu du vieillissement démographique.

La campagne menée dans la perspective de la votation populaire du 9 février 2020 a montré que la construction de logements d'utilité publique bénéficie d'un large soutien, notamment dans les zones urbaines; les résultats du scrutin en ont apporté la confirmation. Il ressort en outre de l'enquête post-votation13 que les classes à bas ou moyen revenu et les ménages de très petite taille ainsi que les habitants de petits appartements ont largement plébiscité l'initiative populaire. Par ailleurs, plus le délai écoulé depuis le dernier changement de logement était court, plus élevé a été son taux d'acceptation. Une évaluation des mesures d'encouragement a également mis en évidence l'adhésion suscitée par l'octroi de prêts à taux préférentiel ou de cautionnements des pouvoirs publics. Selon
l'enquête VOTO relative à la votation populaire, l'importance de la question a également été jugée plus élevée par les locataires, les personnes vivant dans des ménages à bas revenu et celles habitant dans des grandes villes14. En résumé, l'enquête VOTO a mis en lumière le bon accueil réservé par le peuple à l'augmentation de l'offre de logements abordables, qui était au coeur du projet. L'initiative a néanmoins échoué parce que les votants ont estimé en majorité qu'elle ne tenait pas suffisamment compte des disparités régionales sur le marché du logement.

Les aspects économiques, sociaux, politiques et écologiques évoqués ci-dessus justifient le soutien apporté par la Confédération, aux côtés des cantons et des communes, à la construction de logements d'utilité publique. Le Parlement en a donné la 13

14

Sotomo (2020), «Davantage de logements abordables». Analyse de la votation. Résumé.

L'étude est disponible sur www.ofl.admin.ch > L'OFL > Publications > Rapports de recherche.

Enquête VOTO relative à la votation populaire fédérale du 9 février 2020, publiée le 26 mars 2020. L'étude est disponible sur www.voto.swiss > Publications et données > Votation du 9 février 2020.

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confirmation en liant au rejet de l'initiative populaire «Davantage de logements abordables» l'introduction de l'arrêté fédéral relatif à un crédit-cadre destiné à augmenter la dotation du fonds de roulement en faveur de la construction de logements d'utilité publique. Ce crédit-cadre peut ainsi contribuer ne serait-ce qu'au maintien, ces prochaines années, de la modeste part occupée par ce secteur sur le marché. Il est crucial de soutenir les assainissements énergétiques, les rénovations de bâtiments anciens et les démolitions-reconstructions, pour des questions de politique énergétique et dans l'optique de la densification du bâti. Par ailleurs, la demande de logements abordables devrait s'accroître à la suite de l'incertitude économique suscitée par la pandémie de COVID-19 et des baisses de revenus qui pourrait en résulter (cf. ch. 6.1).

3.2

Importance de la CCL en tant qu'instrument de financement pour la construction de logements d'utilité publique

Les trois instruments instaurés par la LOG en vue d'encourager la construction de logements d'utilité publique interviennent à des moments différents du cycle immobilier. Les prêts à taux d'intérêt préférentiel du fonds de roulement et les arrièrecautionnements en faveur de la CCH, accordés dans des cas particuliers, aident à garantir le financement de projets de construction ou de rénovation. Malgré tout le soin apporté aux clarifications concernant les besoins et aux examens effectués, les engagements en termes de soutien dans la période précédant la réalisation des projets ne sont pas sans certains risques, dans la mesure où leur qualité marchande doit encore se confirmer une fois les projets achevés.

Par contre, les financements CCL à long terme ne peuvent être sollicités qu'une fois le bâtiment construit et loué, car ils sont fondés, entre autres, sur la valeur de rendement effective de l'objet. Cela signifie, d'une part, que les prêts du fonds de roulement et les financements CCL interviennent à différents stades dans un projet de construction de logements, tant et si bien qu'un financement CCL peut aider à amortir les prêts du fonds de roulement. D'autre part, les objectifs différents des instruments utilisés et les limites de nantissement différentes indiquent clairement que le crédit-cadre approuvé par le Parlement destiné à augmenter la dotation du fonds de roulement ne peut pas remplacer un nouveau crédit-cadre pour les cautionnements en faveur de la CCL. Aussi, continuer à accorder des cautionnements en faveur de la construction de logements d'utilité publique implique l'adoption d'un nouveau crédit-cadre pour financer des engagements conditionnels.

3.3

Activité de la CCL

3.3.1

Organisation et activité d'emprunt

Avec la CCL, la construction de logements d'utilité publique s'est dotée d'un instrument sur mesure. La coopérative a été fondée en 1990 par les organisations faîtières de ce secteur avec le soutien de la Confédération après que les taux hypothé7309

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caires eurent grimpé jusqu'à 8 % en peu de temps. La CCL lève directement des fonds sur le marché des capitaux pour ses membres afin d'encourager, par des financements à faible taux d'intérêt, la construction de logements à loyer modéré.

Fin 2019, la CCL comptait 508 membres, dont 391 sont parties prenantes à l'un de ses emprunts. Elle cofinance ainsi 946 immeubles abritant quelque 35 000 appartements15.

Entre l'entrée en vigueur de la LOG et la fin de 2019, la CCL a procédé à 61 émissions d'emprunts, généralement d'une durée de 10 à 20 ans, plutôt proche de la limite supérieure de la fourchette en raison de la situation des taux d'intérêt. Les 37 émissions en cours à la fin de 2019 représentaient une valeur totale de 3,4573 milliards de francs (plusieurs emprunts de plus de 1,1 milliard de francs ont déjà été remboursés). Le graphique figurant en annexe indique les échéances de ces emprunts. La date de remboursement la plus éloignée est actuellement celle du 25 novembre 2039.

Les emprunts sont émis en collaboration avec la Banque cantonale zurichoise (ZKB), qui représente les créanciers. L'OFL cautionne à titre solidaire, au nom de la Confédération et avec l'accord du Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR), des emprunts vis-à-vis de la ZKB, en sa qualité de créancier. Les emprunts de la CCL sont cotés en bourse et sont détenus par un grand nombre d'investisseurs (obligataires). Grâce au cautionnement de la Confédération prévu à l'art. 35 LOG, la CCL jouit d'une solvabilité de qualité supérieure (débiteur AAA), ce qui se traduit par des intérêts avantageux. Les maîtres d'ouvrage qui participent à un emprunt prennent une quote-part sous la forme d'un prêt préférentiel pour financer leurs immeubles déjà construits et loués. Les fonds provenant des emprunts sont transmis aux promoteurs agréés aux mêmes conditions d'échéance et de taux d'intérêt que lors de la souscription. La CCL n'est donc pas exposée aux risques de variation des taux. Les emprunts en cours et les prêts aux promoteurs sont équilibrés. Comme il ressort du graphique en annexe, les emprunts tous frais inclus ­ c'est-à-dire l'ensemble des frais comprenant, en plus des intérêts et d'un agio ou disagio réalisé lors de l'émission de l'emprunt, tous les frais en lien avec l'emprunt et sa gestion
jusqu'à son terme ­ affichaient en moyenne jusqu'en 2014 un taux d'intérêt d'environ un point, et depuis lors d'environ un point et demi de pourcentage inférieur à celui des hypothèques fixes des banques de durée équivalente à celle des emprunts. L'augmentation de la différence tient au fait que le taux d'intérêt des emprunts de la CCL repose sur les taux SWAP, tandis que les banques appliquent un point zéro pour le calcul des coûts et des marges. En outre, les marges nettes des banques ont eu tendance à être plus élevées pour les échéances plus longues, et de nouvelles prescriptions ont provoqué une légère augmentation des coûts. La différence en question se traduit par une économie d'intérêts pour toute la durée des emprunts considérés, ce qui a un effet de réduction de l'ordre d'un mois de loyer par an pour les logements financés par l'intermédiaire de la CCL.

15

Rapport annuel 2019 de la CCL, disponible sur www.egw-ccl.ch > Documents > Rapports annuels.

7310

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3.3.2

Importance des emprunts de la CCL du point de vue de l'investisseur

Bien établie sur le marché suisse des capitaux, la CCL est un émetteur qui jouit d'une excellente réputation auprès des investisseurs suisses en obligations. La qualité supérieure avec la notation AAA est très prisée de tous les grands investisseurs, et les titres, considérés comme sûrs, peuvent être achetés par l'ensemble des investisseurs, si bien que le canal de vente est très large.

Grâce au cautionnement solidaire de la Confédération, l'investisseur achète indirectement une obligation fédérale avec une petite prime de rendement. Les emprunts en cours de la CCL se négocient sur le marché secondaire avec environ la même prime de crédit qu'un canton suisse très bien noté. Les titres sont considérés comme une diversification par rapport aux emprunts de la Confédération (dont le volume n'a cessé de diminuer ces dernières années) et aux emprunts des deux centrales de lettres de gage.

3.3.3

Gestion des risques

De manière comparable aux financements hypothécaires des banques, les emprunts de la CCL comportent intrinsèquement un risque de crédit. Étant donné que la Confédération serait elle aussi touchée en tant que caution par d'éventuelles défaillances, la CCL est tenue contractuellement de surveiller en permanence les emprunts et les risques qu'ils entraînent, et de prendre des mesures en cas de problèmes. Cet objectif est servi par un système complet d'information et de gestion des risques, consigné par écrit, qui est constamment revu et affiné et qui est appliqué avant l'octroi et pendant la durée des prêts, et en cas d'apparition de problèmes.

Chaque demande de cautionnement est fondée sur des demandes de financement qui ont été autorisées par une commission d'examen composée d'experts immobiliers et financiers confirmés. Sont notamment examinés le caractère d'utilité publique du maître d'ouvrage, sa solvabilité financière et donc la solidité du financement sollicité ainsi que la possibilité de louer durablement les logements (caractère abordable du loyer, comparaison par rapport au marché, évaluation de l'emplacement, taux de vacance). Une valeur de nantissement maximale est déterminée pour chaque immeuble; elle correspond à la valeur de rendement calculée sur la base de la capitalisation des revenus locatifs nets (revenu locatif net ­ rente du droit de superficie / taux de capitalisation). L'âge et l'état du bâtiment, le potentiel de revenus locatifs, la situation financière et la gestion du demandeur ainsi que le contexte global des taux d'intérêt doivent être pris en compte pour déterminer le taux de capitalisation. En règle générale, il est d'au moins 5 %. Fin 2019, le taux de capitalisation moyen se situait à 5,86 %. La limite de nantissement correspond au maximum à 80 % de la valeur de rendement. La part supérieure à 70 % doit être amortie pendant la durée du prêt jusqu'à l'hypothèque de rang antérieur ou de même rang, ou des réserves être constituées à cet effet, dans les deux cas généralement à hauteur de 1 % chaque année de la valeur de rendement. Le respect de cette obligation doit être confirmé chaque année par écrit par l'organe de révision du maître d'ouvrage. Fin 2019, la valeur moyenne de nantissement était de 68,35 %. Normalement, la part de tous les 7311

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financements CCL ne peut pas dépasser 40 % du capital emprunté à long terme par le maître d'ouvrage. En moyenne, les financements CCL représentent 39,59 % de la valeur de rendement des immeubles financés par ce biais. De plus, afin d'éviter la concentration des risques, il est vérifié que la somme de tous les financements CCL d'un maître d'ouvrage n'excède pas 10 % de l'ensemble des emprunts en cours.

Enfin, les fonds provenant de la CCL ne sont alloués qu'une fois que les titres hypothécaires ou d'autres couvertures usuelles ont été délivrés.

Les maîtres d'ouvrage bénéficiant de financements CCL s'engagent contractuellement à gérer leurs immeubles selon des critères professionnels et à présenter un rapport de gestion conformément aux dispositions du code des obligations16 relatives à la comptabilité commerciale et à la présentation des comptes. Un service externe indépendant examine chaque année les comptes du maître d'ouvrage et lui attribue une note (rating). Fin 2019, 270 maîtres d'ouvrage bénéficiant de financements CCL avaient un rating de 1, la meilleure note, et totalisaient plus de 73 % des emprunts. Par ailleurs, aucun maître d'ouvrage ne présentait un rating (insuffisant) de 4. Dans l'ensemble, plus de 90 % des objets financés n'atteignaient pas le plafond de 70 % maximum de la valeur de rendement des immeubles servant de garantie.

Les maîtres d'ouvrage s'acquittent du versement des intérêts à un rythme trimestriel, ce qui permet d'identifier rapidement les problèmes financiers. Pour sa part, la CCL constitue des provisions afin de parer aux risques de perte d'intérêts et d'être en mesure de satisfaire aux obligations en matière d'intérêt vis-à-vis de ses créanciers.

Fin 2019, ces provisions s'élevaient à 11,8 millions de francs. En outre, la CCL procède à un contrôle périodique des biens-fonds financés pour vérifier l'exécution des travaux de rénovation et le taux de location.

Si un risque au niveau du financement ou du maître d'ouvrage devait être constaté, la CCL transmettrait le dossier au service Recovery de l'OFL à des fins de suivi. S'il apparaissait que le service d'un emprunt de la CCL ne pouvait plus être assuré ou qu'une quote-part d'emprunt ne pouvait pas être remboursée, la quote-part serait convertie dans un premier temps avec ses garanties en un prêt de l'OFL et géré
par ce dernier. L'objectif serait alors d'obtenir le remboursement intégral du prêt par le biais de conventions d'assainissement à long terme. De telles mesures visant à limiter les dommages n'ont jamais dû être prises depuis l'entrée en vigueur de la LOG et la mise en place de la gestion des risques présentée ci-dessus. La CCL n'a enregistré aucune perte, et aucun cautionnement octroyé pendant cette période n'a dû être honoré.

3.3.4

Inscription de la gestion des risques dans l'ordonnance sur le logement (OLOG)

Dans son message du 22 mars 2019 concernant le compte d'État de la Confédération suisse pour l'année 201817, le Conseil fédéral a présenté le rapport sur le compte d'État 2018 de la Confédération, qui décrit, au ch. 55 (Examen des subventions 16 17

RS 220 FF 2019 2685; le texte du message est disponible sur www.efv.admin.ch > Rapports financiers > Rapports financiers > Comptes d'État.

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octroyées par le DEFR), les prêts sur garantie (Office fédéral du logement; 725/A 235.0105), dans le cadre desquels les dépenses consenties pour l'octroi de prêts fédéraux sont prises en considération. L'appréciation du crédit mentionne que la gestion des risques liés au cautionnement des emprunts de la CCL qui est pratiquée actuellement comprend les contrôles suivants: ­

l'évaluation annuelle des maîtres d'ouvrage d'utilité publique prenant part à un emprunt;

­

le contrôle périodique des immeubles financés par des parts d'emprunts cautionnés.

Dans la perspective d'une future inscription de cette pratique en matière de contrôle dans les dispositions législatives, il est décidé, conformément au rapport sur le compte d'État, de procéder à une adaptation de l'ordonnance sur le logement (OLOG)18 parallèlement au présent message.

Le nouvel art. 41a OLOG (Gestion des risques) entrera en vigueur le 1er octobre 2020. Il donne aux centrales d'émission l'obligation de procéder chaque année à un examen de la solvabilité et à une évaluation de la capacité de paiement des intérêts et de remboursement des maîtres d'ouvrage d'utilité publique qui ont obtenu un prêt financé au moyen d'emprunts obligataires cautionnés. Ce contrôle et cette appréciation doivent être effectués par une personne indépendante agréée par l'Autorité fédérale de surveillance en matière de révision. Les maîtres d'ouvrage d'utilité publique ont l'obligation de faire rapport au moins tous les quatre ans aux centrales d'émission sur chaque objet gagé bénéficiant d'un prêt financé au moyen d'un emprunt obligataire cautionné et de présenter en particulier le compte de résultat de l'immeuble, l'état du financement, le tableau des loyers, assortis d'une description de l'état du bâtiment. Par ailleurs, les centrales d'émission doivent réaliser un reporting annuel des éventuels risques et informer sans retard l'OFL en cas de doute sur la capacité de paiement des intérêts ou de remboursement d'un maître d'ouvrage d'utilité publique. Dans un tel cas, l'OFL doit prendre les mesures nécessaires pour protéger les intérêts financiers de la Confédération.

3.3.5

Analyse du portefeuille et test de résistance

Le cautionnement par la Confédération des emprunts obligataires de la CCL a été soumis en 2010 à une évaluation par des spécialistes externes 19, conformément à l'art. 48 LOG. L'étude, fondée entre autres sur la banque de données de la CCL, des entretiens avec des experts et une enquête écrite réalisée auprès des membres de la CCL, a porté sur la période allant du premier emprunt réalisé après l'entrée en vigueur de la LOG, en décembre 2003, à juin 2009. Ses auteurs ont conclu que la CCL répond à un besoin avéré, que ses activités permettent indéniablement de 18 19

RS 842.1 Daniel Hornung et Thomas Röthlisberger, Evaluation Emissionszentrale für gemeinnützige Wohnbauträger EGW, avril 2010 (un résumé du rapport est disponible en français sur le site de l'OFL, à l'adresse suivante: www.ofl.admin.ch > L'OFL > Publications > Rapports de recherche).

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réduire le loyer d'un nombre considérable de logements du secteur d'utilité publique et que ses coûts sont largement compensés par son utilité, et ont recommandé à la Confédération de continuer à cautionner les emprunts de la CCL.

En raison des pertes dues au cautionnement des navires de haute mer, l'OFL a, en accord avec le DEFR, fait procéder fin 2017 à l'analyse du portefeuille de prêts de la CCL, qui a par ailleurs été soumis à un test de résistance. À l'époque, le portefeuille approchait 3,2 milliards de francs et comptait 901 immeubles appartenant à 368 maîtres d'ouvrage. La société mandatée pour l'étude réalise régulièrement des tests de résistance respectant les prescriptions de la FINMA pour le compte de banques cantonales et régionales suisses20. L'analyse du portefeuille a montré entre autres que l'engagement financier moyen par maître d'ouvrage s'élevait à 8,7 millions de francs et que le spectre de solvabilité des maîtres d'ouvrage est nettement plus homogène que celui des sociétés immobilières financées par les banques. Il n'est guère étonnant que le rating moyen des maîtres d'ouvrage d'utilité publique soit légèrement plus bas étant donné que le système des loyers fixés en fonction des coûts limite les possibilités d'augmentation des fonds propres. Le portefeuille de la CCL est bien diversifié sur le plan régional; il y a une corrélation géographique entre les volumes financiers et la force économique: le canton de Zurich représente un tiers du volume de financement, ceux de Vaud, de Lucerne et de Berne, un autre tiers.

À l'instar de ceux réalisés dans le domaine de l'économie bancaire, le test de résistance a porté sur trois scénarios. Le premier, qui postule le statu quo par rapport à la situation actuelle et se fonde sur les valeurs comparatives de banques, estime les pertes annuelles potentielles à 4,8 millions de francs, soit 0,15 % des fonds engagés et cautionnés. Dans le deuxième scénario, dit de récession, les prix de l'immobilier s'effondrent jusqu'à 30 % selon les régions sur une durée de sept ans dans un contexte de produit intérieur brut (PIB) qui recule certaines années, avec des pertes annuelles potentielles allant jusqu'à 12,1 millions de francs. Le total de pertes cumulé sur sept ans serait de 58 millions de francs (1,81 % des montants cautionnés). Le troisième
scénario envisage une situation extrême et une crise immobilière encore plus importante que celle des années 90: pendant sept ans, les prix de l'immobilier reculeraient jusqu'à 45 %, le PIB serait lui aussi en recul certaines années, et le niveau des taux d'intérêt exploserait la première année pour atteindre 6 % avant d'amorcer un retour à la normale. Dans de telles conditions, les pertes annuelles attendues se situeraient entre 4,9 et 50 millions de francs pour un total de pertes de 208 millions de francs cumulé sur 7 ans, soit 6,5 % des fonds engagés et cautionnés.

Si un tel scénario devait se produire, encore faudrait-il mettre, selon les auteurs du rapport, les pertes du portefeuille de la CCL, qui «pèse» un peu plus de 3 milliards, en perspective avec les «1000 milliards du marché hypothécaire suisse.

Les conséquences de la crise du coronavirus sur le marché immobilier sont pour l'instant encore difficiles à estimer. Les scénarios conjoncturels du Secrétariat d'État à l'économie évoquent pour 2020 une contraction de l'économie suisse de plusieurs 20

Risk Solution Network AG (2018), Portefeuille de prêts de la Centrale d'émission pour la construction de logements CCL: test de résistance, résumé, novembre 2018.

Le résumé est disponible sur www.ofl.admin.ch > L'OFL > Publications > Rapports de recherche.

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points de pourcentage du PIB. L'ampleur du recul et les conséquences à long terme dépendront en grande partie de l'évolution de la pandémie et de la dynamique de la reprise économique. Il y a des risques de fortes corrections du marché immobilier, toutefois les incertitudes prévisionnelles sont très élevées.

3.4

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

La politique du logement relève de la compétence des États de l'UE. Tous ou presque disposent de bases légales régissant l'aide au logement des populations économiquement défavorisées. En dehors de l'Europe, l'Australie a introduit un modèle d'encouragement et de cautionnement en 2019 qui s'inspire de la CCL.

4

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

4.1

Relation avec le programme de la législature

Le projet est annoncé dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202321.

4.2

Relation avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

Le plan d'action de la Stratégie pour le développement durable 2012­201522 mentionnait l'encouragement de la construction de logements à loyer modéré en tant que mesure en cours au point 6 des défis clés et des mesures («Renforcer la cohésion sociale, promouvoir l'épanouissement culturel et l'intégration, relever les défis démographiques suffisamment tôt»). En septembre 2015, le Conseil fédéral a, de concert avec pratiquement tous les chefs d'État et de gouvernement du monde, approuvé le Programme de développement durable à l'horizon 2030 (Agenda 2030).

L'objectif 11 de ce programme, «Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables», s'est concrétisé dans la Stratégie pour le développement durable 2016­2019, à son objectif 8.8: «La proportion de logements à loyer ou prix modérés est maintenue ou augmentée dans les zones très prisées; les catégories défavorisées ont accès à des logements sociaux.

[... Est encouragée] notamment la construction de logements familiaux et de logements pour les personnes âgées à loyer ou à prix modérés.» L'encouragement de la construction de logements d'utilité publique permet également de réaliser d'autres objectifs à l'instar de l'objectif 8.7 («La cohésion sociale et la diversité culturelle dans les quartiers et le voisinage sont élevées») ou 2.3 («De nouveaux logements 21 22

FF 2020 1709, 1825 Cette stratégie est disponible sur www.are.admin.ch > Thèmes > Développement durable > Stratégie pour le développement durable.

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sont créés pour un développement de grande qualité à l'intérieur du milieu bâti. Il y a suffisamment d'espaces non bâtis répondant aux besoins des habitants»). La Stratégie pour le développement durable 2030, en cours d'élaboration, portera sur une période de dix ans correspondant à l'horizon temporel de l'Agenda 2030.

5

Procédure préliminaire

La demande de crédit n'entraînera de dépense effective que si une caution devait être honorée, ce qui n'est jamais arrivé depuis l'entrée en vigueur de la LOG en 2003. Un montant de 35,76 millions de francs, qui représente environ 1 % des engagements conditionnels en cours, a été provisionné en conséquence dans le bilan de la Confédération fin 2019. La portée financière, mais aussi politique, économique, écologique, sociale ou culturelle est donc limitée. Il ne s'agit pas d'un projet au sens de l'art. 3, al. 1, let. d ou e, de la loi du 18 mars 2005 sur la consultation23, raison pour laquelle aucune procédure de consultation n'a été menée.

6

Contenu de l'arrêté ouvrant le crédit

6.1

Nécessité d'un nouveau crédit-cadre

La poursuite de l'octroi de cautionnements en faveur de la construction de logements d'utilité publique suppose l'adoption d'un nouveau crédit-cadre pour financer des engagements conditionnels. Le crédit-cadre existant sera totalement épuisé à l'été 2021, et la CCL devrait alors interrompre son activité d'emprunt. Pour l'essentiel, le nouveau crédit-cadre servira à cautionner les emprunts de la CCL, une très petite partie du crédit étant de nouveau réservée au financement d'arrière-cautionnements destiné à la CCH.

Le crédit-cadre en faveur de la CCL vise à pérenniser un instrument éprouvé permettant de financer les acteurs qui oeuvrent à la construction de logements d'utilité publique. Grâce au cautionnement de la Confédération, la CCL peut lever directement des fonds pour ses membres sur le marché des capitaux et les mettre à leur disposition à des conditions avantageuses à long terme. Le Conseil fédéral satisfait ainsi à l'art. 108 Cst., qui donne pour mandat à la Confédération de s'engager en faveur de la construction de logements d'utilité publique, à loyer et à prix modérés, pour permettre ainsi de satisfaire les besoins en logements des couches moins favorisées de la population sur les plans économique et social. Les citoyens suisses ont approuvé implicitement cette politique en rejetant l'initiative populaire «Davantage de logements abordables».

Les revenus de nombreux ménages sont mis à mal par les conséquences économiques de la pandémie de COVID-19. Une évaluation spéciale réalisée dans le cadre du monitoring concernant la «Libre circulation des personnes et le marché du loge-

23

RS 172.061

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ment 2019»24 indique qu'une augmentation du chômage ou qu'une longue période de chômage partiel associée à une perte de salaire entraînera une hausse relativement marquée de la demande de logements abordables, parmi lesquels ceux d'utilité publique. Un indice de cette évolution est que la durée de parution des annonces pour des logements du tiers inférieur de la fourchette de prix a déjà nettement diminué dans de nombreuses régions.

6.2

Proposition du Conseil fédéral

6.2.1

Volume du crédit d'engagement

Si l'on considère la pratique actuelle de la CCL, qui émet en moyenne entre deux et quatre emprunts par an pour un montant total de quelque 200 à 300 millions de francs, le crédit d'engagement nécessaire jusqu'en 2027 devrait s'élever à 1700 millions de francs. En raison de l'utilisation avancée du crédit-cadre actuel, un nouveau crédit-cadre sera nécessaire à l'été 2021 déjà, raison pour laquelle le crédit est demandé depuis cette date, avec une échéance en 2027.

6.2.2

Hypothèses de renchérissement

Le volume du crédit d'engagement sollicité tient compte des hypothèses de renchérissement du budget 2021. Présenter les hypothèses de renchérissement dans le cadre d'un arrêté relatif à un crédit d'engagement vise à adapter ultérieurement le montant des crédits budgétaires annuels au renchérissement effectif. Comme le projet porte sur un crédit d'engagement destiné à des cautionnements, les hypothèses de renchérissement n'ont pas d'intérêt pratique, étant donné qu'il n'est pas possible de contrôler le montant d'un éventuel versement.

6.2.3

Arrêté de planification relatif au crédit-cadre à partir de 2028

Le Conseil fédéral sera chargé de concevoir le prochain crédit-cadre au moyen d'un arrêté de planification au sens de l'art. 28 de la loi sur le Parlement (LParl)25 de sorte à ce que le volume des cautionnements n'augmente pas plus rapidement que le nombre des ménages. La croissance du volume des cautionnements pourra être ainsi stabilisée. Simultanément, la CCL pourra poursuivre son activité d'encouragement au niveau actuel en bénéficiant, par le jeu des remboursements, des conversions et

24

25

Meta-Sys/ZHAW (2020), Monitoring «Libre circulation des personnes et marché du logement 2019», rapport mandaté par l'Office fédéral du logement, juillet 2020. Le rapport est disponible sur www.ofl.admin.ch > Marché du logement > Offre de logements fondés sur l'économie de marché > Libre circulation des personnes et marché du logement.

RS 171.10

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des nouveaux financements, de la marge de manoeuvre et de la sécurité de planification nécessaires.

6.3

Points examinés et abandonnés

6.3.1

Modification de la durée du crédit-cadre proposé

Les trois crédits-cadre destinés à financer des engagements conditionnels contractés sous le régime de la LOG ont porté respectivement sur huit, quatre et six ans. Cette dernière durée a fait ses preuves. Il s'agit d'éviter une durée trop longue pour permettre au Parlement de s'exprimer régulièrement sur la mise en oeuvre de la politique du logement fondée sur l'art. 108 Cst. À l'inverse, une durée plus courte aurait pour conséquence que les membres de la CCL qui entendent financer en partie leurs objets par l'entremise de la centrale auraient moins de temps pour réaliser leurs projets de construction et de rénovation. Si elles n'arrivent pas à échéance pendant la durée du crédit-cadre, les hypothèques fixes ne peuvent pas être remplacées par des financements CCL, ou alors au prix d'une pénalité financière. Une durée plus courte complique aussi le contrôle de la demande et, partant, la planification à long terme au sein de la CCL. Enfin, cette dernière perdrait en fiabilité vis-à-vis de ses membres et de la branche, d'une part, et des investisseurs, d'autre part.

6.3.2

Modification du type de cautionnement

Le cautionnement, par la Confédération, des emprunts de la CCL prend une forme solidaire. La caution est constituée vis-à-vis de la ZKB, qui représente les créanciers.

Le passage du cautionnement solidaire au cautionnement simple a été envisagé afin de diminuer les risques de défaillance pour la Confédération, mais il est apparu qu'un cautionnement simple ne diminue en rien ces risques puisque la Confédération devrait malgré tout mettre immédiatement les moyens à disposition pour payer le créancier dans les délais. La Confédération n'aurait peut-être pas à honorer d'office son cautionnement étant donné qu'il s'agit d'un cautionnement simple, mais la CCL serait poursuivie au titre de débitrice principale. Les fonds propres de cette dernière sont limités et ne suffiraient pas à satisfaire une créance substantielle. Certes, ses réserves sont suffisantes pour couvrir temporairement les pertes sur intérêts au moyen des provisions constituées à cet effet, mais la situation de ses liquidités et de ses fonds propres pourrait évoluer rapidement en cas de défaillance d'un maître d'ouvrage relativement important. Sans apport d'argent frais, il y aurait un risque que le versement des intérêts et les remboursements nominaux ne puissent être effectués dans les délais, ce qui, en raison de la clause de défaillance qui figure dans les contrats d'emprunt, entraînerait le risque de dénonciation de la totalité de l'emprunt en vue de son remboursement. L'existence même de la CCL serait remise en question, et la Confédération mettrait en danger sans raison la totalité du montant, qui se chiffre en milliards, cautionné vis-à-vis des créanciers. Modifier le type de cautionnement n'aboutirait donc qu'à remettre inutilement en question l'excellent système d'encouragement du logement dans son ensemble.

7318

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La CCL a pour priorité absolue de satisfaire à ses obligations envers des tiers dans les délais, ce qui nécessite que le cautionnement de la Confédération prenne la forme solidaire. C'est le seul moyen de garantir le service des créanciers et, pour la CCL, de conserver son statut de débiteur AAA.

Pour la Confédération en tant que caution, un cautionnement simple ne changerait rien du point de vue du risque. Comme aujourd'hui, elle devrait mettre immédiatement les moyens à disposition de la CCL pour que celle-ci s'acquitte de ses obligations envers le créancier dans les délais. Un cautionnement simple ne contraint pas la Confédération à agir immédiatement au titre de caution, mais la CCL serait alors poursuivie au titre de débitrice principale.

La pratique actuelle est aussi éprouvée parce que la sollicitation d'un cautionnement n'entraîne pas obligatoirement une perte financière. En effet, si un membre ne pouvait pas rembourser le financement CCL, ce dernier et ses garanties seraient transformés en un prêt de la Confédération géré par l'OFL. Des conventions d'assainissement à long terme seraient passées en vue d'un amortissement complet du prêt.

De plus, en dernier recours, il pourrait être tenté de récupérer le montant du prêt au moyen d'une réalisation forcée.

Le 26 février 2020, le Conseil fédéral s'est prononcé sur les recommandations du 27 juin 2019 de la Délégation des finances des Chambres fédérales 26. Il parvient à la conclusion que le cautionnement solidaire constitue un instrument de promotion utile à condition d'être engagé de manière ciblée, et il entend continuer à y recourir.

Le Conseil fédéral souligne que le cautionnement constitue un instrument de promotion approprié si la tâche faisant l'objet d'une mesure d'encouragement peut, selon toute vraisemblance, se financer elle-même sur le marché des capitaux et si le remboursement des prêts cautionnés paraît plausible.

6.3.3

Renonciation à l'instrument du cautionnement

La question des cautionnements en général a été l'objet de discussions au niveau fédéral en lien avec les cautionnements des navires de haute mer qui ont dû être honorés. Il existe des différences importantes entre le domaine de la navigation de haute mer et celui de l'aide au logement. En ce qui concerne ce dernier domaine, le preneur du prêt, qui doit satisfaire à des exigences sévères, offre une première garantie. La deuxième garantie, la plus solide, est donnée par l'objet hypothéqué et le gage immobilier qu'il constitue. Troisièmement, la garantie dépend de la cote de confiance dont jouit la CCL; quatrièmement, des mesures sont prévues pour limiter les dommages éventuels.

La CCL est un instrument de financement central pourla construction de logements d'utilité publique. Il favorise l'offre de loyers modérés conformément au mandat 26

Rapport du Conseil fédéral du 26 février 2020 concernant les recommandations 6 à 9 du rapport «Cautionnements solidaires de la flotte suisse de haute mer par la Confédération: enquête sur la procédure de vente des navires de SCL et SCT». Le rapport est disponible sur www.dff.admin.ch > Documentation > Communiqués du DFF > Cautionnements solidaires de la Confédération: le Conseil fédéral ne souhaite pas abandonner complètement les cautionnements solidaires.

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constitutionnel. Les investisseurs apprécient les emprunts de la CCL, et la Confédération verrait sa réputation atteinte si elle se retirait. Continuité et confiance sont des aspects importants pour toutes les parties concernées, et un retrait de la Confédération pourrait nuire à la moralité de paiement, pour l'instant très bonne, des membres de la CCL. En outre, le Conseil fédéral a réaffirmé à plusieurs reprises, dans ses prises de position sur l'initiative populaire «Davantage de logements abordables», sa volonté de poursuivre la politique du logement menée jusqu'à présent.

Si la Confédération ne cautionnait plus de nouvel emprunt de la CCL, la solvabilité de cette dernière en souffrirait. La CCL ne pourrait plus proposer des taux avantageux, ce qui reviendrait à abandonner progressivement la politique actuelle. Le dernier emprunt en cours serait remboursé en 2039. La CCL devrait sans doute mettre un terme à son activité. Les quotes-parts d'emprunt arrivant à échéance seraient vraisemblablement remplacées par des hypothèques financées par les banques, ce qui entraînerait une hausse marquée des loyers des logements concernés.

Le remboursement des quotes-parts à terme pourrait plonger dans des difficultés financières un certain nombre de maîtres d'ouvrage ­ avant tout ceux qui sont relativement mal notés et dont les objets sont moins bien situés ­ si leurs nouveaux créanciers fixent des limites de nantissement plus basses. Actuellement, la part des financements dépassant 70 % de la valeur de rendement ne représente qu'environ 9 % du volume total des emprunts, et les quotes-parts correspondantes doivent être amorties pendant la durée de l'emprunt. Bien que les maîtres d'ouvrage dont la solvabilité est légèrement moins bonne et le nantissement légèrement plus élevé en raison d'évolutions potentiellement négatives du marché réussissent eux aussi à s'acquitter des intérêts dus, la Confédération pourrait se trouver contrainte d'honorer des cautions en raison d'un éventuel défaut temporaire de financement à l'échéance de l'emprunt, alors qu'il n'y aurait peut-être pas lieu d'en arriver là. Si une position d'emprunt devait poser concrètement problème, elle serait convertie en un prêt de la Confédération. En revanche, il ne serait pas possible de convertir un emprunt entier avec un grand nombre de quotes-parts à leur échéance, ce qui créerait le risque que des positions doivent être rachetées sans réelle nécessité.

7

Conséquences

7.1

Conséquences pour la Confédération

7.1.1

Conséquences financières

Le montant du crédit-cadre en faveur de la CCL dépend du volume des financements relais nécessaires lorsque les emprunts arrivent à échéance, du volume des nouveaux emprunts et des conditions des prêts. L'engagement étant conditionnel, la demande de crédit n'entraînera une dépense effective que si une caution devait être honorée.

Conformément à sa pratique actuelle, la CCL émet en moyenne entre deux et quatre emprunts par an pour un montant total de quelque 200 à 300 millions de francs. Il en découle que le crédit d'engagement nécessaire jusqu'en 2027 devrait s'élever à 1700 millions de francs. En raison de l'utilisation avancée du crédit-cadre actuel, les premiers engagements imputés au nouveau crédit-cadre devront pouvoir être pris dès 7320

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l'été 2021. Pendant la nouvelle période d'engagement, les engagements actuels et nouveaux diminueront d'au moins 944,1 millions de francs à mesure du remboursement des emprunts échus entre 2022 et 2027. Le montant total des engagements conditionnels pris par la Confédération passerait dès lors, avec le nouveau créditcadre, de quelque 3500 millions de francs à l'été 2021 à environ 4260 millions en 2027. Le tableau 1 présente le développement estimé des engagements et des remboursements en valeur brute ainsi que de l'ensemble des engagements en cours pour les années 2021 à 2027. Cette estimation s'appuie sur l'hypothèse que les nouvelles émissions qui seront émises d'ici à l'été 2021 grèveront de plus de 350 millions de francs le crédit-cadre en cours. Les nouvelles émissions à partir de l'été 2021 seront financées par le nouveau crédit. En lien avec l'arrêté de planification relatif au prochain crédit-cadre évoqué au ch. 6.2.3, l'augmentation du volume des cautionnements sera stabilisée à partir de 2028.

Tableau 1 Estimation de l'évolution du cautionnement des emprunts de la CCL entre 2020 et 2027, en millions de francs Année Situation au début de l'année Remboursements Nouveaux emprunts Situation à la fin de l'année

2020 2021 2022 2023 2024 2025 3457.3 3504.6 3674.6 3887.5 3930.8 4045.6 307.7 0.0 37.1 256.7 125.2 230.9 355.0 170.0 250.0 300.0 240.0 300.0 3504.6 3674.6 3887.5 3930.8 4045.6 4114.7

2026 4114.7 130.8 260.0 4243.9

2027 Total 2021-2027 4243.9 163.4 944.1 180.0 1700.0 4260.5

Avec la progression des engagements nets, qui atteindront 4260 millions de francs d'ici à fin 2027, le volume des risques de défaillance augmentera lui aussi. Comme expliqué précédemment, la CCL a mis en place une gestion approfondie de l'information et des risques, dont l'efficacité a été confirmée par le test de résistance réalisé en 2018. En outre, depuis l'entrée en vigueur de la LOG en 2003, il n'y a jamais eu de défaillance liée à un cautionnement, ce qui témoigne de la prudence avec laquelle la CCL, mais aussi les preneurs de prêts, gèrent leurs affaires. La modification apportée par le Conseil fédéral à l'ordonnance sur le logement (OLOG) en même temps que la présentation du présent message garantit que le standard de qualité qui caractérise l'examen des demandes et la gestion des risques continuera à être respecté.

Le test de résistance a aussi confirmé la robustesse du portefeuille de la CCL, une qualité qui prend toute sa signification eu égard au risque de récession qu'entraîne la pandémie de COVID-19. D'après ce test, les défaillances attendues sur une durée de sept ans dans le cas d'un effondrement de l'immobilier représenteraient 6,5 % des fonds engagés et cautionnés, ce qui reste comparativement modéré. Si un tel scénario devait se réaliser, le reste du marché immobilier et les banques assurant les financements en souffriraient bien plus que la CCL et la Confédération dans son rôle de caution. Il convient par ailleurs d'observer que si une caution octroyée à la CCL devait être honorée, il n'y aurait pas de perte immédiate. Si un maître d'ouvrage n'était pas en mesure de rembourser sa quote-part d'emprunt, cette dernière serait transformée en un prêt de la Confédération. Les conventions d'assainissement viseraient ensuite à l'amortissement intégral du prêt en faveur de la Confédération. En

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FF 2020

dernier recours, il pourrait être tenté de récupérer le montant du prêt au moyen d'une réalisation forcée.

Enfin, il convient de noter que des provisions sont constituées dans le cas d'un risque de défaillance d'un emprunt de la CCL cautionné. Ces provisions s'élevaient à 35,76 millions de francs dans le bilan de la Confédération fin 2019, ce qui correspond à un risque de perte de 1 %. Le montant des provisions est revu chaque fin d'année en fonction de la réévaluation des prêts. Cette adaptation est ensuite approuvée par le Parlement avec les comptes annuels (selon l'art. 33, al. 3, de la loi du 7 octobre 2005 sur les finances [LFC] 27). Dans son message du 27 novembre 2019 concernant la simplification et l'optimisation de la gestion des finances fédérales (Modification de la loi sur les finances)28, le Conseil fédéral propose de considérer à l'avenir que les provisions ont une incidence financière et, par conséquent, de soumettre la constitution de provisions au frein à l'endettement. Si l'on admet que ces provisions continueront à s'élever à 1 % des emprunts de la CCL cautionnés, elles devraient être portées à plus de 42 millions de francs d'ici à fin 2027 du fait de l'évolution des emprunts, ce qui représenterait une hausse de 7,5 millions de francs.

La récession qui s'annonce pourrait certes rendre nécessaire d'augmenter les provisions. Toutefois, la CCL cofinance des logements des segments de prix inférieur à moyen, et ce genre d'objets risque d'être encore plus demandé qu'aujourd'hui, ce qui relativise d'autant les risques par rapport à l'ensemble du marché du logement.

7.1.2

Conséquences sur l'état du personnel et sur les besoins en matière informatique

Le crédit-cadre n'entraînera aucune charge supplémentaire sur les plans du personnel ou de l'informatique.

7.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains les agglomérations et les régions de montagne

Le nouveau crédit-cadre n'aura aucune conséquence directe pour les cantons et les communes, pas plus que pour les centres urbains, les agglomérations ou les régions de montagne. Par contre, il aura un impact indirect sur les régions dont le besoin en logements à loyer ou à prix modérés est avéré et dans lesquelles les maîtres d'ouvrage d'utilité publique sont actifs et cofinancent des logements au moyen d'emprunts de la CCL. Comme le montre la carte ci-dessous, les biens-fonds des maîtres d'ouvrage d'utilité publique financés avec des moyens provenant de la CCL sont présents sur l'ensemble du territoire suisse même si l'on constate une concentration accrue dans les grandes régions de Zurich, Lucerne et Bâle ainsi que dans l'Arc lémanique. Ces cantons, villes et communes du soutien apporté par la Confédération dans le domaine de la construction de logements d'utilité publique. Il est 27 28

RS 611.0 FF 2020 339

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probable que cet appui aura des répercussions positives en termes de réduction de leurs dépenses d'aide sociale.

Illustration 3 Communes comptant des immeubles avec financements CCL (fin 2019)

7.3

Conséquences économiques

7.3.1

Implications pour l'économie dans son ensemble

Le cautionnement des emprunts obligataires de la CCL est un instrument efficace et avantageux de l'aide au logement. En poursuivant la politique adoptée en la matière, la Confédération permettra à plusieurs centaines de maîtres d'ouvrage d'utilité publique de continuer à financer de manière avantageuse une part non négligeable de leur parc immobilier. La sécurité en manière de planification s'en trouve accrue, les risques liés à la variation des taux d'intérêt diminuent et la stabilité des loyers d'un grand nombre de logements est renforcée. Ne plus cautionner les emprunts de la CCL entraînerait une hausse des loyers des immeubles concernés. Rien que pour les ménages occupant les 35 000 logements actuellement cofinancés par le biais de la CCL, la disparition de ces financements entraînerait une hausse de la facture du logement de quelque 50 millions de francs par année en tout, ce qui représenterait un montant annuel moyen de 1400 francs par logement d'un immeuble financé grâce aux emprunts de la CCL.

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L'activité de la CCL n'entraîne pas de distorsion de la concurrence, ni ne contribue à maintenir des structures indésirables sur le marché du crédit. Avec 0,3 % de l'ensemble des prêts hypothécaires octroyés par les banques en Suisse, la part qu'elle représente sur le marché est trop modeste pour cela. Pour la même raison, elle n'entraîne pratiquement pas d'effets d'éviction. Toutefois, on ne saurait exclure que de petites banques régionales souffrent de la résiliation de prêts hypothécaires si des maîtres d'ouvrage annulent leur prêt hypothécaire pour se financer avec l'aide de la CCL. En revanche, l'efficacité du marché est meilleure si les banques, soumises à la concurrence de la CCL, améliorent nettement les offres de financement pour les maîtres d'ouvrage d'utilité publique.

Les logements soutenus par le biais de la CCL doivent satisfaire à des normes énergétiques élevées et aux critères de qualité du système d'évaluation de logements (SEL). Ils font donc figure d'exemple pour une construction de logements avantageux de qualité, sans obstacles et conformes aux principes du développement durable. S'y ajoute, depuis l'entrée en vigueur de la modification du 15 juin 201229 de la loi du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire30, la prise en compte de la consommation de surface habitable et de la densité de la population, qui doit aller en direction d'une utilisation mesurée du sol en suivant les prescriptions et règlements des maîtres d'ouvrage d'utilité publique, en ajoutant des extensions aux bâtiments existants et en procédant à des démolitions-reconstructions.

7.3.2

Conséquences pour les bénéficiaires de l'aide fédérale

Le cautionnement des emprunts de la CCL contribue non seulement à abaisser les loyers, mais aussi à faciliter l'acquisition de capitaux par les maîtres d'ouvrage d'utilité publique. Ces derniers se voient souvent imposer des conditions d'intérêt moins favorables et des limites de nantissement plus basses sur le marché hypothécaire en raison de leur manque de fonds propres et, par conséquent, de leur moins bonne solvabilité. La garantie de la Confédération leur permet d'opérer sur un pied d'égalité et de bénéficier de prêts à long terme à des taux d'intérêt stables et comparativement avantageux. Les bénéficiaires directs sont donc les bailleurs de logements d'utilité publique. Étant donné que leurs logements sont davantage occupés par des familles, des retraités et, d'une manière générale, des ménages dont le revenu est relativement modeste, l'aide fédérale a un effet indirect sur les groupes de population visés par la politique du logement. Les loyers de ces logements étant fixés sur la base des coûts, ces groupes bénéficient, avant tout dans des lieux où les prix sont élevés, d'un loyer généralement de 10 à 25 % inférieur par rapport à des logements comparables de bailleurs privés ou institutionnels.

29 30

RO 2014 899 RS 700

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7.4

Conséquences sanitaires et sociales

Des enquêtes31 montrent que la part des personnes ayant un faible niveau de formation et disposant de ressources financières modestes est plus importante dans les logements d'utilité publique que dans d'autres secteurs du marché du logement. Cela permet de lutter contre les phénomènes de ségrégation sociale et d'éviction des groupes de population économiquement plus faibles dans les centres, où les prix des logements sont souvent élevés. En outre, les maîtres d'ouvrage d'utilité publique sont devenus des pionniers en matière d'expérimentation de nouvelles formes d'habitat et d'intégration de personnes handicapées ou issues de l'asile.

7.5

Conséquences environnementales

Les logements d'utilité publique comportent la plupart du temps plusieurs appartements locatifs, également dans les régions à faible densité de population. La consommation des terrains et l'imperméabilisation des sols sont moins marquées que dans d'autres secteurs du marché du logement. En outre, la surface consommée par habitant étant en moyenne nettement inférieure à celle des autres logements locatifs ou en propriété, les économies d'énergie ainsi réalisées ont un impact positif sur l'environnement. Les maîtres d'ouvrage d'utilité publique mettent davantage l'accent sur la réalisation de zones résidentielles efficaces sur le plan énergétique et durables d'un point de vue environnemental, également en association avec de nouveaux concepts de mobilité.

7.6

Autres conséquences

Les conséquences dans d'autres domaines ont été examinées. Aucune conséquence notable ne mérite d'être mentionnée.

8

Aspects juridiques

8.1

Constitutionnalité et légalité

L'arrêté fédéral se fonde sur l'art. 43, let. b, LOG. Celui-ci repose sur l'art. 108 Cst., en vertu duquel la Confédération encourage la construction de logements et l'acquisition d'appartements et de maisons familiales destinés à l'usage personnel de particuliers, ainsi que les activités des maîtres d'ouvrage et des organisations oeuvrant à la construction de logements d'utilité publique. Ce faisant, elle prend notamment en considération les intérêts des familles et des personnes âgées, handicapées ou dans le besoin.

31

Sotomo (2017), Le point sur le logement d'utilité publique. Une comparaison avec le locatif et la propriété, Office fédéral du logement, Granges. L'étude est disponible sur www.ofl.admin.ch > Marché du logement > Études et publications «marchés du logement».

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8.2

Forme de l'acte à adopter

Conformément à l'art. 167 Cst. et à l'art. 43 LOG, le crédit-cadre doit prendre la forme d'un arrêté fédéral simple.

8.3

Frein aux dépenses

Afin de limiter les dépenses, l'art. 159, al. 3, let. b, Cst. prévoit que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs. Le crédit d'engagement sollicité excédant ces plafonds, son adoption est soumise au frein aux dépenses.

8.4

Conformité à la loi sur les subventions

Les cautionnements sont un instrument expressément prévu par la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions32 en vue d'encourager l'exécution de certaines tâches.

Dans la mesure où leur conception et leur surveillance est conforme aux risques, ils constituent un instrument d'encouragement plus avantageux que des contributions à fonds perdu ou des prêts remboursables.

Conformément à l'art. 108 Cst., la Confédération est tenue d'encourager le logement. Sur le fond, un tel encouragement paraît du reste indiqué eu égard à la situation actuelle du marché du logement. Si la Confédération ne cautionnait pas les émissions d'emprunts de la CCL, cette dernière ne bénéficierait plus de taux d'intérêts préférentiels et devrait vraisemblablement renoncer à ses activités. Du coup, cet instrument central de l'aide au logement de la Confédération n'entrerait plus en ligne de compte, avec les conséquences sur le marché du logement que cela comporterait. Il est judicieux d'autre part que ce soit la Confédération qui cautionne les emprunts de la CCL étant donné que celle-ci est une coopérative d'envergure nationale et que la Confédération bénéficie, en tant que débiteur, de la notation AAA. Avec le recul que permettent de nombreuses années d'expérience, le rapport coût-utilité de cet instrument peut être qualifié d'extrêmement favorable.

L'utilisation des moyens par la CCL est réglée de manière contractuelle entre la Confédération et la centrale. Les modifications apportées aux statuts de la CCL, aux règlements de l'organisation ou aux critères d'autorisation de recours aux financements CCL doivent être approuvées par l'OFL. Le directeur de l'OFL participe aux séances du comité de la CCL au titre d'assesseur. Il dispose d'un droit de veto factuel. Par ailleurs, la Confédération est représentée au sein de la commission d'examen de la CCL. En outre, les immeubles financés grâce aux emprunts de la CCL sont soumis aux limites de coûts prescrites par l'OFL. Grâce à ces trois leviers, la Confédération peut influer directement sur l'utilisation des moyens. Le pilotage 32

RS 616.1

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financier du volume d'engagement s'effectue au moyen du crédit d'engagement sollicité dans le cadre du présent projet. De la sorte, l'échelonnement des différentes tranches d'emprunts de la CCL et de leur cautionnement par la Confédération peut être effectué de manière idéale, en adéquation avec la situation du marché du logement et les besoins qui en découlent. Les cautions et les taux d'intérêt préférentiels qui peuvent ainsi être proposés bénéficient intégralement aux maîtres d'ouvrage participant à l'emprunt. Ces derniers supportent les autres éléments de coût lors de l'émission.

La procédure d'octroi de l'aide financière peut être qualifiée d'efficiente étant donné que le cautionnement des tranches d'emprunts de la CCL, d'un volume annuel de quelque 200 à 300 millions de francs, s'effectue selon des procédures standardisées.

L'objectif principal de l'octroi de la subvention est d'obtenir un effet aussi positif que possible sur le marché du logement, sans pour autant contraindre la Confédération à prendre un risque financier trop important. De plus, la codification de la pratique de gestion des risques déjà en place rend cette dernière encore plus contraignante.

La validité du crédit-cadre de 1700 millions de francs est limitée à la fin de 2027.

Cette limitation dans le temps donne la possibilité aux Chambres fédérales de se prononcer régulièrement sur l'avenir de l'instrument de cautionnement et sur les montants engagés.

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