20.048 Message concernant l'approbation de l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques et sa mise en oeuvre (modification de la loi sur la protection des marques) du 5 juin 2020

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'un arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre (modification de la loi sur la protection des marques) de l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

5 juin 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2019-4034

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Condensé Il est proposé que la Suisse adhère à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques, afin que les producteurs et les consommateurs suisses puissent bénéficier de ce système international d'enregistrement et de protection.

Contexte Viande des Grisons, Vacherin Mont-d'Or, Zuger Kirsch et Rigi Kirsch ou Swiss watches sont des exemples d'indications géographiques reconnues et protégées, utilisées par des groupes de producteurs pour indiquer l'origine géographique de leurs produits ainsi que la qualité et la réputation associées à cette origine. Le succès des produits bénéficiant d'indications géographiques repose sur des filières durables associant de nombreuses entreprises de production et de transformation, qui représentent des milliers d'emplois et contribuent significativement au dynamisme économique de certaines régions périphériques. Or la valeur commerciale des indications géographiques suisses n'est préservée que si elles sont protégées contre les usurpations et les imitations, non seulement en Suisse, mais également à l'étranger. C'est précisément ce que permet d'obtenir, à moindre coût, le système international d'enregistrement fondé sur l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne et administré par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).

La participation de la Suisse au système de Lisbonne permettra aux bénéficiaires d'indications géographiques suisses d'obtenir une protection de haut niveau dans les pays membres au moyen d'une procédure de notification simple, unique et peu onéreuse auprès de l'OMPI, comme c'est déjà le cas pour les détenteurs de marques au moyen du système de Madrid, pour les détenteurs de brevets au moyen du Traité de coopération en matière de brevets (PCT) et pour les détenteurs de designs au moyen du système de La Haye.

En outre, pour les consommateurs, la reconnaissance des indications géographiques étrangères se traduit par une meilleure garantie de se voir proposer des produits authentiques et de haute qualité, dans la mesure où les producteurs légitimes peuvent plus facilement engager les procédures requises en cas d'usage illicite de l'indication géographique concernée.

L'Arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d'origine et leur enregistrement
international, qui date de 1958, compte actuellement 30 États membres. Afin de moderniser ce traité et d'attirer un plus grand nombre de membres, un processus de révision a conduit à l'adoption de l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques (Acte de Genève) par une conférence diplomatique tenue en 2015.

Deux nouveautés majeures sont apportées par l'Acte de Genève par rapport à l'Arrangement de Lisbonne. D'une part, le système est étendu à l'ensemble des indications géographiques, et non plus restreint aux seules appellations d'origine.

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Ainsi, alors que seules les appellations d'origine suisses (par ex. Sbrinz et Abricotine) pouvaient être enregistrées selon l'Arrangement de Lisbonne, ce sont désormais toutes les indications géographiques suisses (par ex. Appenzeller Mostbröckli et Swiss watches) qui pourront être protégées en vertu de l'Acte de Genève. D'autre part, les organisations intergouvernementales telles que l'Union européenne (UE) ou l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle peuvent adhérer à l'Acte de Genève.

L'entrée en vigueur de l'Acte de Genève interviendra le 26 février 2020, étant donné que l'UE a déposé son instrument d'adhésion le 26 novembre 2019, devenant ainsi la cinquième partie contractante.

Contenu du projet Le projet d'adhésion de la Suisse à l'Acte de Genève est présenté sous la forme d'un arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre du traité et inclut une modification de la loi du 28 août 1992 sur la protection des marques (LPM).

Les dispositions de l'Acte de Genève et de son règlement d'exécution directement applicables en Suisse sont suffisamment précises et détaillées pour ne nécessiter que peu de législation de mise en oeuvre. Le projet prévoit donc l'introduction dans la LPM des art. 50c, 50d, 50e et 50f pour régler les points suivants: ­

l'enregistrement des appellations d'origine et des indications géographiques suisses dans le registre international de l'OMPI;

­

la qualité pour demander l'enregistrement international d'une appellation d'origine ou d'une indication géographique dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse;

­

les motifs de refus des effets d'un enregistrement international (appellation d'origine ou indication géographique étrangère) dont la protection est demandée en Suisse;

­

la faculté d'accorder à un tiers une période de transition pour mettre fin à l'utilisation de l'appellation d'origine ou de l'indication géographique protégée en vertu d'un enregistrement international;

­

les cas de coexistence entre des marques antérieures et des enregistrements internationaux et règlement des modalités de traitement des demandes d'enregistrement de marques contenant une appellation ou une indication protégée en vertu d'un enregistrement international;

­

la création d'une base légale pour le prélèvement de taxes pour les procédures prévues par la LPM et son ordonnance d'application;

­

la création d'une délégation de compétence en faveur du Conseil fédéral pour régler les procédures liées à l'enregistrement des appellations d'origine et des indications géographiques dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse dans le registre international de l'OMPI et à l'acceptation ou au refus des effets d'un enregistrement international étranger en Suisse.

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Table des matières Condensé

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1

Contexte 1.1 Nécessité d'agir et objectifs visés 1.1.1 La protection des indications géographiques 1.1.2 Le système de Lisbonne 1.1.3 Situation actuelle du système de Lisbonne 1.1.4 Raisons de la non-adhésion de la Suisse à l'Arrangement de Lisbonne 1.1.5 Opportunité de l'adhésion de la Suisse à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne 1.2 Autres solutions étudiées 1.3 Déroulement et résultat des négociations 1.4 Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral 1.4.1 Relation avec le programme de la législature 1.4.2 Relation avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

5660 5660 5660 5661 5662

2

Résultats de la procédure de consultation 2.1 Déroulement et résultats 2.2 Prise en compte des résultats de la consultation

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3

Présentation de l'accord

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4

Commentaire des dispositions de l'accord et de son règlement d'exécution 4.1 Commentaire des dispositions de l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques 4.2 Commentaire des dispositions du règlement d'exécution commun à l'Arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d'origine et leur enregistrement international et à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques

5663 5665 5665 5666 5667 5667 5667

5671

5671

5681

5

Présentation de l'acte de mise en oeuvre 5.1 Réglementation proposée 5.2 Adéquation des moyens requis 5.3 Mise en oeuvre 5.3.1 Modalités de mise en oeuvre prévues 5.3.2 Mesures prévues pour évaluer l'exécution

5685 5685 5686 5687 5687 5687

6

Commentaire des dispositions de l'acte de mise en oeuvre: modification de la loi sur la protection des marques et des indications de provenance

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7

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Conséquences de l'accord et de l'acte de mise en oeuvre 7.1 Conséquences pour la Confédération 7.1.1 Conséquences financières 7.1.2 Conséquences sur l'état du personnel 7.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 7.3 Conséquences économiques 7.3.1 Nécessité et possibilité d'une intervention de l'État 7.3.2 Conséquences pour les différents groupes de la société 7.3.3 Conséquences pour l'économie dans son ensemble

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Aspects juridiques 8.1 Constitutionnalité 8.2 Compatibilité avec les autres obligations internationales de la Suisse 8.3 Frein aux dépenses 8.4 Délégation de compétences législatives

5701 5701

5696 5696 5696 5697 5701

5702 5703 5703

Arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre (modification de la loi sur la protection des marques) de l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques (Projet)

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Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques

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Règlement d'exécution commun à l'Arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d'origine et leur enregistrement international et à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques

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Message 1 Contexte 1.1 Nécessité d'agir et objectifs visés 1.1.1 La protection des indications géographiques Une indication géographique (IG), généralement un nom de lieu ou une dénomination renvoyant traditionnellement à un lieu, est un signe qui identifie l'origine géographique d'un produit défini, dont la qualité, la réputation ou une autre caractéristique déterminée peut être essentiellement attribuée à cette origine géographique.

Cette définition, introduite en 1992 dans la règlementation de l'UE1, fut reprise dans l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Accord sur les ADPIC)2 de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), entré en vigueur en 1995. L'indication géographique englobe la sous-catégorie de l'appellation d'origine (AO)3, définie par l'Arrangement de Lisbonne du 31 octobre 1958 concernant la protection des appellations d'origine et leur enregistrement international (Arrangement de Lisbonne)4 comme «la dénomination géographique d'un pays, d'une région ou d'une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus exclusivement ou essentiellement au milieu géographique, comprenant les facteurs naturels et humains». Cette définition fut ensuite reprise en droit français en 1966, puis dans certaines législations, comme dans l'UE en 1992 et en Suisse en 1997. Les appellations d'origine ont d'abord été reconnues et protégées pour des vins (ex.: Bordeaux) et des spiritueux (ex.: Cognac), avant d'être étendues à l'ensemble des produits (ex.: poteries de Vallauris, Roquefort, cristaux de Bohème, jambon de Parme, Gruyère).

L'indication géographique est le signe distinctif commun à tous les producteurs légitimes d'un même produit traditionnel issu d'une région délimitée. Elle représente la valeur de la réputation de ce produit et influence la décision des consommateurs.

Ainsi, tant pour assurer une concurrence loyale entre les producteurs que pour éviter la tromperie des consommateurs, il convient de définir des règles pour l'utilisation des indications géographiques et de protéger ces indications contre les usurpations et l'exploitation de leur réputation. Pour atteindre ces objectifs, le moyen par excellence est celui du système d'enregistrement de la dénomination protégée, associée au cahier des charges du produit concerné en tant qu'appellation d'origine protégée (AOP) ou indication géographique protégée (IGP). Ce système a été introduit en 1

2 3 4

Règlement (CEE) n° 2081/1992 du Conseil, du 14 juillet 1992, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires, JO L 208 du 24.7.1992, p. 1 L'Accord sur les ADPIC correspond à l'annexe 1.C de l'Accord du 15 avril 1994 instituant l'Organisation mondiale du commerce (RS 0.632.20).

L'utilisation du terme «indication géographique» seul, dans le présent message, recouvre les deux catégories de l'appellation d'origine et de l'indication géographique.

Le texte de l'Arrangement de Lisbonne peut être consulté sur le site de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle à l'adresse suivante: www.ompi.org > Savoirs > Traités administrés par l'OMPI > Arrangement de Lisbonne.

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droit suisse en 1997 pour les produits agricoles et les produits agricoles transformés (ordonnance du 28 mai 1997 sur les AOP et les IGP5) et en 2017 pour les autres produits (ordonnance du 2 septembre 2015 sur les AOP et les IGP non agricoles6).

Depuis le début des années 90, une divergence majeure est apparue entre, d'une part, les pays protégeant les IG en vertu d'un système juridique dédié (sui generis), parmi lesquels les pays européens, et, d'autre part, les pays protégeant les IG en tant que marques, parmi lesquels des pays de common law, notamment les États-Unis. Cette divergence est non seulement motivée par des conceptions juridiques différentes, mais aussi par des intérêts économiques concurrents. En effet, un certain nombre de dénominations qui sont protégées comme indications géographiques en Europe (par ex. Fontina, Manchego) ou dans d'autres pays (par ex. Basmati en Inde et au Pakistan, boeuf de Kobe au Japon) sont utilisées comme termes génériques par des producteurs de pays tiers, usages parfois diffusés par l'émigration provenant des pays d'origine de ces dénominations. Or, pour de nombreux producteurs suisses, les IG représentent un patrimoine d'une valeur considérable pour l'exportation: le chocolat suisse, le Gruyère, les montres suisses, la viande des Grisons, l'Emmentaler ou la Tête-de-Moine, Fromage de Bellelay en attestent (voir «Conséquences économiques», ch. 7.3).

Cette divergence explique largement le manque d'harmonisation juridique en matière d'IG au niveau international, par rapport aux autres droits de propriété intellectuelle. Ainsi, les négociations de l'Uruguay Round qui ont donné naissance à l'OMC ont abouti à un compromis sur la protection des IG dans l'Accord sur les ADPIC, qui n'accorde un niveau de protection adéquat qu'aux seules IG de vins et de spiritueux, et ne prévoit un registre multilatéral que pour ces seules IG. Par conséquent, les bénéficiaires d'IG suisses ne peuvent obtenir une protection adéquate à l'étranger qu'au moyen de procédures nationales souvent difficiles et toujours très coûteuses, ou au moyen d'accords bilatéraux dont la négociation dépend du degré d'intérêt de chacune des parties.

1.1.2 Le système de Lisbonne L'Arrangement de Lisbonne a été conclu par un groupe de pays dans le cadre de la Convention de Paris du 20 mars 1883 pour la protection de la propriété industrielle7 (Convention de Paris). Il est entré en vigueur en 1966, avant d'être révisé par l'Acte de Stockholm en 1967 puis modifié en 1979, ces deux modifications n'affectant toutefois pas les principes sur lesquels il reposait. Le texte régissant actuellement le système de Lisbonne est appelé, ci-après, «Acte de 1967»8. L'Arrangement de 5 6 7 8

RS 910.12 RS 232.112.2 RS 0.232.04 Un seul pays, Haïti, est lié exclusivement par l'arrangement de 1958. Étant donné que la révision de l'arrangement opérée en 1967 n'a pas modifié les dispositions relatives à la procédure d'enregistrement international des appellations d'origine et aux procédures d'administration du registre international, toute mention de l'Acte de 1967 dans le présent document doit être entendue comme désignant aussi l'Arrangement de Lisbonne du 31 octobre 1958.

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Lisbonne est administré par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).

Comme les systèmes de Madrid et de La Haye (concernant respectivement l'enregistrement international des marques et celui des dessins et modèles industriels), le système établi par l'Arrangement de Lisbonne facilite l'enregistrement des droits de propriété intellectuelle au niveau international sur la base de dispositions énonçant les règles de procédure pour le Bureau international (secrétariat) de l'OMPI (ci-après: le Bureau international) et pour les parties. Cependant, à la différence des arrangements de Madrid et de La Haye, l'Arrangement de Lisbonne comporte des dispositions définissant la protection, d'un niveau élevé, que les parties doivent accorder aux appellations d'origine enregistrées au niveau international.

Le système international instauré par l'Arrangement de Lisbonne n'a pas eu le succès escompté par ses initiateurs9, en raison notamment de sa rigidité ­ effective ou perçue comme telle ­ à l'égard de la définition de l'appellation d'origine et des procédures requises dans la législation nationale pour qu'un pays puisse devenir partie contractante. Après un premier mouvement d'adhésions, avec neuf nouveaux membres entre 1966 et 1977, l'Arrangement de Lisbonne n'a attiré aucun nouveau membre entre 1977 et 1997. L'intérêt renouvelé pour la protection des appellations d'origine et des indications géographiques, après l'entrée en vigueur de l'Accord sur les ADPIC en 1995 et la cristallisation des divergences internationales sur le sujet dans le cadre de l'OMC, conjugué aux efforts du Bureau international pour la promotion et la flexibilisation de l'arrangement, ont suscité un deuxième grand mouvement d'adhésions dans les années 2000, avec neuf nouveaux membres entre 2000 et 2014. C'est dans ce contexte dynamique que le processus de révision de l'Arrangement de Lisbonne a été engagé. Il visait à moderniser les formulations et les procédures, afin de renforcer l'attractivité du traité pour de nouveaux membres (voir ch. 2). Ce processus a abouti à l'organisation d'une conférence diplomatique de révision de l'Arrangement de Lisbonne. Celle-ci a adopté, le 20 mai 2015, l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques (ci-après: l'Acte de Genève), auquel il est proposé que la Suisse adhère.

1.1.3 Situation actuelle du système de Lisbonne Au 1er janvier 201910, le registre de Lisbonne comptait 1012 AO en vigueur. La plupart de ces enregistrements émanent d'un nombre restreint de membres: France, Italie et République tchèque en représentent plus de 76 %. Outre les AO de produits agroalimentaires, le registre compte 120 AO de produits non alimentaires tels que les tapis ou les pierres.

9

10

L'Arrangement de Lisbonne comptait 30 membres au 15 novembre 2019: Albanie, Algérie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Burkina-Faso, Congo, Costa Rica, Cuba, France, Gabon, Géorgie, Haïti, Hongrie, Iran, Israël, Italie, Macédoine du Nord, Mexique, Moldova, Monténégro, Nicaragua, Pérou, Portugal, République dominicaine, République populaire démocratique de Corée, République tchèque, Serbie, Slovaquie, Togo, Tunisie.

Source: Bulletin «Les appellations d'origine», n°45, janvier 2017, OMPI, pp. 208­209

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Le nombre actuel d'enregistrements internationaux, s'il comporte des dénominations dont la valeur économique est considérable pour le pays d'origine, est encore assez modeste. La plupart des membres de l'arrangement n'ont pas encore enregistré toutes leurs AO dans le système de Lisbonne. Le processus de révision a ralenti le processus: avant de soumettre des demandes d'enregistrement, les membres ont attendu de connaître les nouvelles exigences introduites par l'arrangement révisé.

Ainsi, le potentiel de développement du système de Lisbonne est considérable: rien que dans l'UE, ce sont plus de 3000 dénominations qui sont protégées comme AO ou IG. Beaucoup de membres de l'OMPI, notamment des pays d'Asie ayant déjà enregistré nombre de leurs IG domestiques, ont exprimé leur intérêt pour le système de Lisbonne révisé. C'est d'ailleurs le Cambodge qui a, le premier, ratifié l'Acte de Genève le 9 mars 2018.

La concrétisation de ce potentiel au travers de l'Acte de Genève, qui doit être ratifié par cinq parties pour entrer en vigueur, a pris plus de temps que prévu, en raison des incertitudes initiales tournant autour de l'adhésion de l'UE et de ses États membres. La Commission européenne a en effet introduit, le 17 juillet 2015, un recours contre la décision du Conseil, du 7 mai 2015, désignant des États membres comme négociateurs pour la conférence diplomatique de révision de l'Arrangement de Lisbonne11. La Cour de Justice de l'UE s'est prononcée sur ce recours le 25 octobre 2017, en reconnaissant une compétence exclusive à la Commission en matière d'accords internationaux sur les IG. Dès lors, la Commission a publié le 21 décembre 2017 une «feuille de route» en vue d'une proposition de décision du Conseil autorisant l'adhésion de l'UE à l'Acte de Genève12, suivie le 27 juillet 2018 par une proposition de décision du Conseil. Le 14 mars 2019, la Commission, le Parlement et le Conseil ont trouvé un accord sur les modalités de l'adhésion de l'UE et de ses États membres, qui a été formellement approuvé le 7 octobre 2019 par le Conseil13. Il est très vraisemblable que l'adhésion de l'UE, qui déclenche l'entrée en vigueur de l'Acte de Genève, ait un effet d'entraînement sur un nombre important de parties contractantes potentielles.

1.1.4 Raisons de la non-adhésion de la Suisse à l'Arrangement de Lisbonne S'ajoutant aux incertitudes de l'entrée en vigueur et de l'attrait de l'Arrangement de Lisbonne en 1958 et au cours des années suivantes14, l'absence de législation suisse 11 12

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Affaire C-389/15, JO C 311 du 21.9.2015 Roadmap «EU accession to the Geneva Act of the Lisbon Agreement on Appellations of Origin and Geographical Indications», réf.: Ares(2017)6308027. La feuille de route est disponible (en anglais uniquement) sur le site de la Commission européenne à l'adresse suivante: ec.europa.eu > Politiques, informations et services > Législation > Donnez votre avis sur les initiatives de la Commission > Rechercher parmi l'ensemble des initiatives: insérer «Ares(2017)6308027» dans le champ «Mots-clés».

Décision (UE) 2019/1754 du Conseil, du 7 octobre 2019, relative à l'adhésion de l'Union européenne à l'acte de Genève de l'arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques, JO L 271 du 24.10.2019, p. 12 L'Arrangement de Lisbonne n'est entré en vigueur qu'en 1966 avec seulement 8 membres jusqu'en 1972.

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permettant de délivrer des titres de protection en tant qu'appellation d'origine avant 1997 a conduit la Suisse à se désintéresser de ce traité international et à privilégier, dans les années 60 et 70, la négociation d'accords bilatéraux sur les indications de provenance et les indications géographiques avec plusieurs pays européens15.

La fin des années 90 et les années 2000 ont été marquées par la relance des adhésions à l'Arrangement de Lisbonne, par l'entrée en vigueur de l'Accord sur les ADPIC, qui comporte des dispositions spécifiques sur la protection des indications géographiques (incluant les appellations d'origine), et par l'adoption de nombreuses législations nationales sui generis pour la protection des indications géographiques16.

Dès lors, l'opportunité d'une éventuelle adhésion de la Suisse à l'Arrangement de Lisbonne a été réévaluée au cours des années 2000 par les offices fédéraux concernés, qui ont cependant conclu par la négative. La situation paraissait en effet peu propice: le nombre des parties contractantes restait assez modeste, le système était limité aux seules appellations d'origine (excluant ainsi les autres indications géographiques), la législation suisse17 des AOP-IGP était limitée aux produits agricoles et aux produits agricoles transformés et des développements étaient en cours à l'OMC, avec l'offensive menée par la Suisse et d'autres pays pour que les négociations sur la protection des indications géographiques aboutissent à des progrès dans le niveau de protection offert par l'Accord sur les ADPIC et à l'établissement d'un registre multilatéral, applicables à tous les membres de l'OMC.

Le processus de révision de l'Arrangement de Lisbonne engagé en 2008 est bientôt apparu prometteur pour les pays intéressés à une meilleure protection des IG, étant donné que les efforts engagés dans le cadre de l'OMC buttaient contre le blocage durable des négociations du cycle de Doha. L'extension du haut niveau de protection et l'établissement d'un registre international des IG avec des effets juridiques, qu'il n'avait pas été possible d'obtenir à l'OMC, se sont donc concrétisés à l'OMPI. La Suisse a participé activement aux travaux de révision de l'arrangement afin de contribuer à ce que le résultat soit à la fois compatible avec sa propre législation et favorable aux intérêts des bénéficiaires suisses. Le résultat de ce processus de révision, l'Acte de Genève, remplit ces deux objectifs.

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Des accords sur la protection des indications de provenance et des appellations d'origine ont été conclus avec l'Allemagne en 1967 (RS 0.232.111.191.36), la Tchécoslovaquie en 1973 (RS 0.232.111.197.41), la France en 1974 (RS 0.232.111.193.49), l'Espagne en 1974 (RS 0.232.111.193.32), le Portugal en 1977 (RS 0.232.111.196.54) et la Hongrie en 1979 (RS 0.232.111.194.18).

La Suisse a ainsi adopté l'ordonnance du 28 mai 1997 sur les AOP et les IGP, permettant l'enregistrement des AOP et IGP pour les produits agricoles et les produits agricoles transformés.

La législation suisse sur les AOP et IGP de produits agricoles et de produits agricoles transformés s'applique également au Liechtenstein. Ainsi, des AOP ou IGP enregistrées en vertu de cette législation peuvent inclure le territoire du Liechtenstein dans leur aire géographique délimitée (par ex. Rheintaler Ribel) ou porter exclusivement sur le territoire du Liechtenstein (par ex. Liechtensteiner Sauerkäse).

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1.1.5 Opportunité de l'adhésion de la Suisse à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne Le système de Lisbonne permet d'obtenir une protection élevée pour les appellations d'origine et les indications géographiques sur le territoire des parties contractantes au moyen du dépôt international des AO et IG concernées. L'intérêt d'une adhésion de la Suisse pour les bénéficiaires suisses d'indications géographiques dépend du nombre de parties contractantes, et plus particulièrement de l'adhésion de pays avec lesquels la Suisse n'a pas déjà conclu des accords bilatéraux sur les indications géographiques18 et de pays dans lesquels la protection des indications géographiques suisses représente un intérêt économique significatif.

Dans la configuration de l'Arrangement de Lisbonne, limité à 28 membres jusqu'en 2018, cet intérêt n'était pas manifeste. Cependant, l'Acte de Genève vise précisément à renforcer la dynamique d'adhésions des années 2000, et un nombre important de pays manifestent leur intérêt à se joindre au système. L'adhésion de l'UE aura un effet considérable sur l'attrait du système pour tous les pays qui souhaitent protéger leurs IG sur le territoire de l'UE.

Après des décennies de controverses et de blocages sur la protection internationale des IG dans le cadre, notamment, de l'OMC et de l'OMPI, l'Acte de Genève représente une opportunité sans précédent pour le développement d'un système global d'enregistrement des AO et des IG assorti d'un niveau de protection correspondant à celui dont bénéficient les AOP et les IGP au niveau national. En contribuant au développement de ce système au travers de son adhésion, la Suisse permet à ses bénéficiaires nationaux d'AO et d'IG d'obtenir une protection très élevée dans un grand nombre de pays, à un coût qui est très inférieur à celui des procédures directes pour chacun de ces pays (voir «Conséquences économiques», ch. 7.3).

1.2 Autres solutions étudiées Étant donné que les négociations dans le cadre de l'OMC en vue de l'établissement d'un registre multilatéral des IG, que la Suisse et une majorité des membres veulent ouvert à tous les produits et non aux seuls vins et spiritueux, sont au point mort, la négociation d'accords bilatéraux constitue actuellement le seul moyen pour obtenir la protection d'une liste d'IG suisses dans un pays tiers. Néanmoins, la négociation et la procédure de ratification de ces accords sont lourdes et coûteuses. Un système international harmonisé tel que celui régi par l'Acte de Genève permet d'éviter ces écueils. En effet, le régime de protection, les procédures et la gestion du système sont déjà définis et entraînent des économies d'échelle. Par conséquent, le système de Lisbonne apparaît comme une solution plus efficace pour obtenir la protection 18

Outre les accords bilatéraux conclus dans les années 60 et 70, la Suisse a conclu des accords bilatéraux avec l'UE en 1999 sur les IG de vins et de spiritueux et en 2011 sur les AOP-IGP de produits agricoles et de denrées alimentaires (RS 0.916.026.81), avec le Mexique en 2000 sur les IG de spiritueux (RS 0.632.315.631.11), avec la Russie en 2010 sur les IG et les indications de provenance (RS 0.232.111.196.65), avec la Jamaïque en 2013 sur les IG et les indications de provenance (RS 0.232.111.194.58) et avec la Géorgie en 2018 sur les IG et les indications de provenance (RS 0.232.111.193.60).

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dans un grand nombre de pays sans mobiliser les ressources qu'exige la négociation d'accords bilatéraux.

Une autre possibilité réside dans la demande individuelle directe de protection que peut engager chaque groupement de bénéficiaires d'une IG selon les procédures prévues par chaque législation nationale. La faible harmonisation des législations nationales en matière d'IG rendent ces procédures compliquées et très coûteuses en raison de l'obligation d'utiliser la langue du pays concerné et de passer par un représentant local. C'est justement pour cette raison que des systèmes globaux d'enregistrement ont été créés pour d'autres droits de propriété intellectuelle (brevets, marques et designs) alors que les législations nationales en la matière sont plus harmonisées que dans le domaine des IG.

Les difficultés et les coûts associés à ces autres voies plaident en faveur de la participation de la Suisse au système international de Lisbonne, afin que les bénéficiaires d'AO et d'IG suisses puissent obtenir une protection élevée de leurs droits de propriété intellectuelle dans tous les autres pays participant au système.

1.3 Déroulement et résultat des négociations Le Groupe de travail pour le Développement du système de Lisbonne, établi par l'Assemblée de l'Union de Lisbonne (ci-après: Assemblée de Lisbonne) lors de sa 23e session en septembre 2008, a d'abord été chargé d'étudier les éventuelles améliorations à apporter aux procédures. Il s'est réuni dix fois à cet effet entre mars 2009 et octobre 2014. Lors de sa 25e session en octobre 2009, l'Assemblée de Lisbonne a approuvé l'élargissement des travaux afin de déterminer les moyens de rendre le système de Lisbonne plus attrayant pour les utilisateurs et les nouveaux membres potentiels tout en préservant les principes et objectifs de l'arrangement.

En exécution de ce mandat, le groupe de travail a réalisé, à partir d'une enquête auprès des États membres et non membres, des organisations intergouvernementales et non gouvernementales et des milieux intéressés, un examen complet du système de Lisbonne et a élaboré un texte de base pour un nouvel instrument juridique international. La plupart des pays membres de l'arrangement ont participé aux travaux, ainsi que de nombreux pays et organisations non-membres, notamment la Suisse et l'UE, en qualité d'observateurs. Après avoir examiné le programme du groupe de travail pour la finalisation d'une proposition de texte d'accord et de règlement d'exécution, l'Assemblée de Lisbonne a approuvé à l'automne 2013, lors de sa 29e session, la convocation en 2015 d'une conférence diplomatique pour l'adoption d'un Arrangement de Lisbonne révisé sur les appellations d'origine et les indications géographiques.

Les travaux de la conférence diplomatique tenue à Genève du 11 au 21 mai 2015 se sont déroulés dans une atmosphère relativement tendue en raison de l'hostilité de certains pays vis-à-vis de l'extension aux IG de l'approche suivie par les membres de l'arrangement en matière de protection des AO. Néanmoins, les 28 membres de l'Union de Lisbonne ont adopté par consensus, le 20 mai 2015, l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques et son règlement d'exécution.

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Parmi les pays non-membres, l'Allemagne, la Russie et la Suisse notamment se sont félicités de l'adoption de l'Acte de Genève, alors que d'autres, comme les ÉtatsUnis, l'Australie, l'Argentine ou la Corée du Sud ont critiqué cette révision de l'Arrangement de Lisbonne. Bien que l'Acte de Genève ait été adopté par les seuls membres de l'Arrangement de Lisbonne, ceux-ci ont fait preuve d'ouverture, au cours des négociations, sur des questions essentielles et les discussions ont abouti à de nombreux aménagements (voir «Présentation de l'Acte de Genève», ch. 3) visant à prendre en compte les demandes présentées par des délégations ayant le statut d'observateur, en relation notamment avec les systèmes de marques.

1.4 Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral 1.4.1 Relation avec le programme de la législature Le projet n'a été annoncé ni dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201919, ni dans l'arrêté fédéral du 14 juin 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201920. Il n'en est pas moins conforme aux objectifs 2 («La Suisse crée un environnement économique optimal à l'intérieur du pays et renforce ainsi sa compétitivité») et 4 («La Suisse apporte sa contribution à la mise en place d'un ordre économique mondial solide et assure l'accès aux marchés internationaux à son économie») de la ligne directrice 1. En effet, la protection des indications géographiques suisses sur les marchés étrangers permet aux filières concernées, localisées dans diverses régions de Suisse, de se développer de manière durable en préservant la valeur de leur patrimoine immatériel collectif.

1.4.2 Relation avec les stratégies nationales du Conseil fédéral S'inscrivant dans une tradition souvent pluricentenaire et fondées sur une relation étroite à une région déterminée, les indications géographiques revêtent une dimension de durabilité qui correspond aux orientations générales de la Stratégie pour le développement durable 2016 à 201921.

2 Résultats de la procédure de consultation 2.1 Déroulement et résultats La procédure de consultation, qui s'est déroulée du 22 mai au 20 septembre 2019, a porté sur l'avant-projet, accompagné d'un rapport explicatif. Le rapport du 19 20 21

FF 2016 981 FF 2016 4999 La stratégie peut être consultée sur le site de l'Office fédéral du développement territorial à l'adresse suivante: www.are.admin.ch > Développement durable > Politique et stratégie > Stratégie pour le développement durable.

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22 novembre rendant compte des résultats de la procédure de consultation est publié sur Internet par la Chancellerie fédérale22.

2.2 Prise en compte des résultats de la consultation Les participants à la consultation ont unanimement indiqué leur soutien au projet.

Quelques prises de position ont en outre souligné des points particuliers du projet ou formulé des demandes spécifiques à certains produits. Les réponses apportées ciaprès n'impliquent pas de changement par rapport à l'avant-projet de modification de la loi du 28 août 1992 sur la protection des marques (LPM)23.

Droits antérieurs Le canton de Thurgovie et economiesuisse insistent sur l'importance du respect des droits antérieurs de tiers, en relation avec la protection en Suisse d'un enregistrement international en vertu de l'Acte de Genève.

Lesdits droits, qu'ils portent sur la simple utilisation d'une dénomination ou sur une marque enregistrée, sont garantis notamment par les art. 13, 15 et 17 de l'Acte de Genève et par les dispositions de mise en oeuvre de l'art. 50e P-LPM. La base juridique proposée permet, selon le cas d'espèce, de faire prévaloir une marque antérieure et donc de refuser les effets d'un enregistrement international, ou de faire coexister une marque antérieure enregistrée de bonne foi et un enregistrement international, ainsi que d'octroyer une période de transition pour mettre fin à une utilisation antérieure de bonne foi. Elle constitue ainsi un dispositif très complet permettant de régler ces conflits de manière équilibrée, en respectant le caractère distinctif des signes protégés dans l'intérêt des utilisateurs antérieurs de bonne foi, sans dévaluer les intérêts légitimes des bénéficiaires d'IG et des consommateurs.

Le caractère automatique de la coexistence entre marque antérieure et AO ou IG protégée en vertu d'un enregistrement international est salué par economiesuisse.

Cette remarque appelle toutefois une nuance dans la mesure où cette coexistence peut en tout temps être contestée par les bénéficiaires de l'AO ou de l'IG au motif que la marque en question n'a pas été enregistrée de bonne foi (cf. commentaire de l'al. 5 de l'art. 50e P-LPM). Le titulaire de la marque antérieure peut cependant obtenir une sécurité juridique quant à cette coexistence en présentant une demande en ce sens à l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle (IPI), en vertu de l'al. 3 de l'art. 50e P-LPM.

Mise en oeuvre de la protection Le canton de
Thurgovie s'inquiète de la complexité de la mise en oeuvre de la protection des enregistrements internationaux par les autorités cantonales, et de la charge supplémentaire qui pourrait en résulter.

22

23

Les documents de la procédure de consultation peuvent être consultés à l'adresse suivante: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2019 > DFJP.

RS 232.11

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Le Conseil fédéral considère que la mise en oeuvre des droits liés aux AO et IG revient en premier lieu aux bénéficiaires et s'obtient devant les tribunaux. Les autorités cantonales sont néanmoins responsables du contrôle des denrées alimentaires et, en particulier, de réprimer la tromperie en matière de denrées alimentaires, et, par conséquent, de la mise en oeuvre de la protection des AO et IG qui en découle (cf. art. 47 LPM et 18 de la loi du 20 juin 2014 sur les denrées alimentaires24).

Par ailleurs, le canton de Thurgovie, economiesuisse et Migros estiment qu'il sera difficile d'accéder aux informations (par ex., les cahiers des charges) relatives aux produits bénéficiant d'une AO ou d'une IG étrangère protégée en Suisse en vertu de l'Acte de Genève.

Le Conseil fédéral est d'avis, dans un souci d'efficacité et de limitation des coûts, que la base de données Lisbon Express25 de l'OMPI est suffisante pour la mise en oeuvre de la protection des enregistrements internationaux, et qu'elle ne doit être ni dupliquée par une base de données nationale, ni complétée par des informations supplémentaires par rapport à celles qui sont requises par l'Acte de Genève. Il convient cependant de considérer d'une part la responsabilité des bénéficiaires d'AO et d'IG pour la fourniture des informations qui seraient nécessaires pour la mise en oeuvre de la protection par les autorités suisses, et d'autre part la probable généralisation de l'application de la règle 5, par. 3 (données concernant la qualité, la notoriété ou d'autres caractères), du règlement d'exécution, suite à l'intention indiquée par l'UE d'exiger ces informations26.

Enregistrement international de dénominations suisses qui ne bénéficient pas de titre de protection national Biscosuisse et Chocosuisse demandent qu'il soit possible, pour une organisation faîtière représentant les utilisateurs d'une dénomination suisse qui ne bénéficie pas d'un titre de protection national au sens de l'al. 1 de l'art. 50d P-LPM, de demander néanmoins son enregistrement international en vertu de l'Acte de Genève. Ces organisations considèrent notamment que la présence d'une telle dénomination dans des listes de dénominations protégées en vertu des accords bilatéraux conclus par la Suisse constituerait une base justifiant cette possibilité.

Cependant, le Conseil
fédéral a intentionnellement exclu cette possibilité, pour les motifs exposés dans le commentaire de l'al. 1 de l'art. 50d P-LPM. En effet, il n'est pas envisageable de créer une procédure supplémentaire de reconnaissance des IG au niveau national, alors que les dénominations d'appliquant à tous les produits (sauf les vins) peuvent faire l'objet d'une procédure d'enregistrement comme AOP ou IGP. Les deux organisations ayant pris position sur cette question n'apportent aucun élément susceptible de remettre en cause son analyse.

Harmonisation de la protection dans les parties contractantes 24 25

26

RS 817.0 La base de données peut être consultée sur le site de l'OMPI à l'adresse suivante: www.wipo.int > Accueil > Services > Système de Lisbonne > Base de données Lisbon Express.

Art. 5 de la décision (UE) 2019/1754 du Conseil, du 7 octobre 2019, relative à l'adhésion de l'Union européenne à l'acte de Genève de l'arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques, JO L 271, du 24.10.2019, p. 12

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La Fédération de l'industrie horlogère suisse (FH) et economiesuisse signalent l'importance d'une harmonisation internationale dans la mise en oeuvre de la protection conférée aux AO et aux IG par l'Acte de Genève, et demandent aux autorités fédérales d'agir en ce sens.

L'Acte de Genève vise certes à une harmonisation de la protection des AO et IG au niveau international. Toutefois, il prévoit que chaque partie reste souveraine dans son appréciation des différents droits, par rapport à son propre territoire.

3 Présentation de l'accord L'Acte de Genève introduit trois importantes nouveautés dans l'Arrangement de Lisbonne: d'abord, l'intégration de toutes les indications géographiques, au lieu des seules appellations d'origine; ensuite, des options adaptées à la diversité des systèmes nationaux pour la mise en oeuvre des dispositions du traité; enfin, l'ouverture de l'adhésion pour les organisations intergouvernementales telles que l'UE ou l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI).

La protection dont bénéficient les appellations d'origine, étendue aux indications géographiques enregistrées dans le registre international, est précisée et sa formulation modernisée. Cette protection est absolue à l'égard des produits de même type (art. 11, par. 1, let. a, point i) et similaire à celle des marques de haute renommée à l'égard des produits qui ne sont pas du même type et des services (art. 11, par. 1, let. a, point ii). Elle s'applique également en cas d'imitation, de traduction ou d'utilisation de mentions telles que «style», «genre» et «type», même si la véritable origine du produit est indiquée. L'art. 11, par. 1, let. b, proscrit en outre, d'une manière générale, les pratiques susceptibles d'induire le consommateur en erreur quant à la véritable origine, la provenance ou la nature des produits.

Ainsi, la protection assurée par l'Acte de Genève est plus élevée que celle de l'art. 23 (qui ne concerne que les vins et les spiritueux) de l'Accord sur les ADPIC et s'applique à tous les produits sans distinction. En outre, l'art. 12 dispose qu'une appellation d'origine ou une indication géographique protégée par une partie contractante ne peut pas être considérée comme étant devenue générique dans cette partie contractante. L'art. 13 règle les relations entre une appellation d'origine ou une indication géographique enregistrée et les autres droits de propriété intellectuelle, notamment les marques antérieures. Il prévoit qu'une partie contractante peut appliquer le principe de coexistence.

Tant sur les dispositions de fond que sur les éléments de procédure, les membres de l'Arrangement de Lisbonne ont tenu compte, au fil des réunions du groupe de travail et plus encore lors de la conférence diplomatique, des demandes exprimées par certains pays non membres, notamment les pays qui considèrent
que les indications géographiques sont protégées au moyen de leur système des marques. Cette ouverture s'est traduite par de nombreux aménagements, notamment: ­

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la possibilité donnée aux bénéficiaires de déposer directement une demande d'enregistrement international d'une AO ou d'une IG, sans passer par

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l'administration du pays d'origine, si la législation du pays concerné le permet (art. 5, par. 3); ­

s'agissant de la norme générale de protection, le choix d'une formulation qui soit compatible avec les normes usuelles en droit des marques (art. 11);

­

la réserve portant sur les éventuels éléments génériques de l'AO ou de l'IG (déclaration commune concernant l'art. 11.2) et la réserve sur le caractère générique (déclaration commune concernant l'art. 12);

­

la possibilité laissée à une partie contractante d'appliquer le principe de la primauté de la marque antérieure au lieu de celui de la coexistence (art. 13, par. 1);

­

la possibilité pour une partie contractante d'exiger que la demande d'enregistrement international soit signée par une personne habilitée à revendiquer les droits sur l'AO ou l'IG ou qu'elle soit accompagnée d'une déclaration d'intention d'utiliser l'AO ou l'IG ou d'en contrôler l'utilisation par d'autres (règle 5, par. 4, du règlement d'exécution)27;

­

l'obligation d'indiquer dans la demande d'enregistrement international si le titre de protection de la partie contractante d'origine ne couvre pas certains des éléments de l'AO ou de l'IG (règle 5, par. 5, du règlement d'exécution).

4 Commentaire des dispositions de l'accord et de son règlement d'exécution 4.1 Commentaire des dispositions de l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques Art. 1

Expressions abrégées

Des expressions récurrentes dans le texte de l'acte sont abrégées afin de faciliter la lisibilité du texte. En outre, deux expressions sont définies: «partie contractante d'origine» (point. xv) et «bénéficiaires» (point xvii). La partie contractante d'origine est celle sur le territoire de laquelle est située l'aire géographique de l'appellation d'origine ou de l'indication géographique, la possibilité d'une aire géographique transfrontalière étant expressément prévue. La définition des bénéficiaires de l'AO ou de l'IG est formulée de manière à recouvrir les divers cadres juridiques nationaux. La législation suisse en matière d'AOP et d'IGP notamment ne reconnaît pas de titulaire du droit de propriété intellectuelle.

27

Les références au règlement d'exécution sont celles du Règlement d'exécution commun à l'Arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d'origine et leur enregistrement international et à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques, adopté par l'Assemblée de Lisbonne lors de sa 34e session en octobre 2017 (voir ch. 4.2).

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Art. 2

Objet

La définition de l'AO reprend celle de l'Arrangement de Lisbonne, en combinant les deux paragraphes de l'art. 2. La définition de l'IG reprend celle de l'art. 22 de l'Accord sur les ADPIC. Ces définitions sont similaires aux définitions de l'AOP et de l'IGP dans l'ordonnance sur les AOP et les IGP et l'ordonnance sur les AOP et IGP non agricoles.

Selon l'Acte de Genève, une AO ou une IG doit être protégée dans la partie contractante d'origine, mais le moyen juridique de cette protection n'est pas prescrit. Ainsi, une marque pourrait être considérée comme le moyen de protection d'une IG ou d'une AO. C'est une différence importante avec l'Arrangement de Lisbonne actuel, dont l'art. 1, par. 2, prévoit que les appellations d'origine sont «reconnues et protégées à ce titre dans le pays d'origine», ce qui a pu donner lieu dans le passé à une interprétation très étroite de l'objet de l'arrangement.

Art. 3

Administration compétente

Chaque partie contractante doit être représentée par une autorité administrative, qui communique au Bureau international les notifications relatives aux enregistrements internationaux et reçoit les notifications émanant du Bureau international. L'autorité chargée de l'administration de l'Acte de Genève pour la Suisse est l'IPI, en vertu notamment de l'art. 2, al. 1, let. b, de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur le statut et les tâches de l'Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle (LIPI)28 (voir aussi commentaire de l'art. 50c P-LPM).

Art. 4

Registre international

Le Bureau international, représenté par le secrétariat de l'OMPI, tient le registre international. Celui-ci distingue les enregistrements effectués en vertu de l'Acte de 1967, les enregistrements effectués en vertu de l'Acte de Genève et les enregistrements effectués en vertu des deux actes. Seuls les enregistrements internationaux effectués en vertu de l'Acte de Genève auront des effets en Suisse.

Art. 5

Demande

La demande d'enregistrement international doit être déposée auprès du Bureau international (par. 1).

Le par. 2 prévoit que la demande est déposée par l'administration compétente au nom des bénéficiaires de l'AO ou de l'IG, éventuellement représentés par une personne physique ou morale habilitée à revendiquer les droits des bénéficiaires. Cette formulation vise à couvrir aussi bien les cas où les bénéficiaires ne sont pas titulaires du droit, comme pour les AOP et les IGP suisses, que les cas où les bénéficiaires sont représentés par le titulaire d'une marque.

Le par. 3 donne aux bénéficiaires la possibilité de déposer directement la demande d'enregistrement, pour autant que la législation de l'État membre l'autorise.

28

RS 172.010.31

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L'objectif est essentiellement de permettre au titulaire d'une marque d'obtenir un enregistrement international sans passer par les autorités de la partie contractante d'origine29. En effet, certains pays qui privilégient la protection des IG par le droit des marques n'examinent pas la correspondance de l'indication avec la définition de l'art. 22, par. 1, de l'Accord sur les ADPIC. Dès lors, ces pays ne souhaitent pas endosser la responsabilité d'une demande d'enregistrement international pour laquelle la correspondance de la dénomination ou de l'indication avec les définitions de l'AO ou de l'IG de l'art. 2 n'aurait pas été examinée au niveau national. En outre, ces mêmes pays sont réticents à l'idée de considérer la protection d'un enregistrement international qui n'aurait pas été demandé par le titulaire formel d'un droit de propriété intellectuelle, ce qui serait le cas avec une demande effectuée par l'administration compétente d'une partie contractante. Or, la législation de nombreux pays, dont la Suisse, ne reconnaît pas de titulaire du droit d'enregistrement des AOP et des IGP, mais seulement des bénéficiaires du droit. En somme, l'art. 5, par. 3, est une disposition surtout destinée à assurer la compatibilité du système d'enregistrement de Lisbonne avec des législations qui ne définissent pas de titres de propriété pour les IG. Actuellement, l'adhésion d'un des pays concernés à l'Acte de Genève n'est pas à l'ordre du jour. Il est donc prématuré d'introduire cette possibilité pour la Suisse. Du reste, la let. b de l'art. 5, par. 3, prévoit qu'une partie contractante peut notifier en tout temps la possibilité de demande d'enregistrement directe par les bénéficiaires. Aussi la Suisse renonce-t-elle à faire usage de cette possibilité pour le moment.

Le par. 4 prévoit la possibilité d'une demande conjointe de deux parties contractantes, dans le cas où l'aire géographique de l'AO ou de l'IG s'étend sur le territoire de ces deux parties. La demande conjointe requiert un accord entre les deux parties contractantes, qui désignent une des administrations compétentes à cet effet. Pour la Suisse, cette possibilité pourrait être mise en oeuvre à l'égard des AOP (par ex.

l'AOP Rheintaler Ribel) qui couvrent aussi le territoire du Liechtenstein, pour autant que celui-ci adhère aussi à l'Acte de
Genève. Nonobstant cette possibilité, rien ne s'oppose à ce qu'une AO ou IG transfrontalière fasse l'objet de deux demandes d'enregistrement international distinctes émanant de chacune des parties contractantes concernées, ou, si seul l'un des pays concernés est une partie contractante, d'une demande d'enregistrement international émanant de cette seule partie au nom des seuls bénéficiaires situés sur le territoire de cette dernière.

En vertu du par. 5, la demande doit contenir un certain nombre de données. Le règlement d'exécution précise quelles données sont obligatoires et, éventuellement en vertu du par. 6, lesquelles sont facultatives (voir commentaire des règles 5 et 6).

29

Conformément au rapport du Groupe spécial adopté le 25 avril 2005 par l'Organe de règlement des différends de l'OMC dans le différend DS 290 «Communauté européenne ­ protection des marques et des indications géographiques pour les produits agricoles et les denrées alimentaires» ouvert par les États-Unis et l'Australie en relation avec le règlement (CEE) n° 2081/1992 du Conseil, du 14 juillet 1992, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires, JO L 208 du 24.7.1997, p. 1.

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Art. 6

Enregistrement international

Le Bureau international effectue un examen formel, et non matériel, des demandes d'enregistrement. Il les enregistre, publie et notifie aux parties contractantes dès que toutes les exigences formelles (contenu obligatoire de la demande et dépôt selon les dispositions de l'art. 5) sont satisfaites.

Pour la date d'effet de l'enregistrement international en Suisse, voir le commentaire des art. 15 et 18.

Art. 7

Taxes

Les taxes perçues par le Bureau international comprennent une taxe unique pour l'enregistrement international (art. 7, par. 1), ainsi que des taxes relatives à la modification d'un enregistrement, à la fourniture d'un extrait du registre et à la fourniture d'une attestation ou de tout autre renseignement par écrit sur le contenu du registre (art. 7, par. 2).

En vertu du par. 3, un régime de taxes réduites peut être accordé par l'Assemblée à l'égard des enregistrements internationaux de certaines catégories de parties contractantes. Lors de sa 35e session (octobre 2018), l'Assemblée de Lisbonne a décidé une réduction de 50 % du montant des taxes pour les pays les moins avancés30. Cette réduction commencera à s'appliquer trois ans après l'entrée en vigueur de l'Acte de Genève.

En vertu du par. 4, une partie contractante peut indiquer, lors de la notification de son adhésion à l'Acte de Genève ou ultérieurement, qu'elle exige l'une ou l'autre des taxes suivantes, ou les deux, pour protéger un enregistrement international sur son territoire: d'une part, une taxe individuelle servant à couvrir le coût de l'examen matériel d'un enregistrement international, dont le montant ne peut dépasser le montant requis pour une demande d'enregistrement selon la législation nationale; d'autre part, une taxe administrative relative à l'utilisation de l'AO ou de l'IG par ses bénéficiaires dans cette partie contractante. Pour les motifs exposés dans le commentaire du projet de modification de la LPM (art. 50f), la Suisse n'exigera aucune de ces taxes au moment de son adhésion à l'Acte de Genève.

Art. 8

Durée de validité des enregistrements internationaux

La durée de validité des enregistrements internationaux est illimitée, sous réserve d'une radiation demandée par l'administration compétente de la partie contractante d'origine, notamment dans le cas où la dénomination ou l'indication constituant l'AO ou l'IG n'est plus protégée dans la partie contractante d'origine. En Suisse, par exemple, la procédure de radiation d'une AOP ou d'une IGP est prévue à l'art. 15 de l'ordonnance sur les AOP et les IGP et à l'art. 13 de l'ordonnance sur les AOP et les IGP non agricoles.

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Sous-catégorie de pays en développement, établie par l'Organisation des Nations unies et comptant 47 pays au 1er janvier 2019

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Art. 9

Engagement à protéger

En droit suisse, le niveau de protection prévu dans l'Acte de Genève est directement applicable aux enregistrements internationaux, au même titre que le niveau de protection prévu dans l'Accord sur les ADPIC ou dans des accords bilatéraux conclus par la Suisse. Ce niveau de protection correspond à celui dont bénéficient les AOP et IGP suisses.

Art. 10

Protection découlant des lois des parties contractantes ou d'autres instruments

Les parties contractantes sont libres de choisir le type de législation mettant en oeuvre la protection établie par l'Acte de Genève. La protection sur le territoire suisse d'un enregistrement dont les effets ont été acceptés par la Suisse est mise en oeuvre par les art. 51a ss LPM.

La protection des enregistrements internationaux offerte par l'Acte de Genève peut être mise en oeuvre d'une manière propre à chaque partie contractante. Elle ne porte aucun préjudice à la protection des AO et IG conférée par la législation nationale ou un autre instrument international, tel qu'un accord bilatéral. Ainsi, une même AO ou une IG pourra être protégée à la fois en vertu des dispositions d'un accord bilatéral conclu par la Suisse antérieurement à son adhésion à l'Acte de Genève et en vertu de l'Acte de Genève lui-même.

Art. 11

Protection à l'égard des appellations d'origine et indications géographiques enregistrées

La disposition distingue deux cas de figure. Pour les produits du même type que ceux auxquels l'AO ou l'IG se rapporte mais qui ne remplissent pas les conditions prescrites par l'AO ou par l'IG, la protection est absolue. Pour les produits qui ne sont pas du même type et pour les services, la protection s'applique en cas d'utilisation indiquant ou suggérant un lien avec l'AO ou l'IG qui risquerait de nuire aux intérêts de celle-ci ou en cas de risque d'atteinte, d'affaiblissement ou d'exploitation de la notoriété de l'AO ou de l'IG. La formulation de la norme de protection à l'égard des produits qui ne sont pas du même type et des services est inspirée de la recommandation commune concernant des dispositions relatives à la protection des marques notoires31, adoptée par l'OMPI en 1999. Cette disposition couvre la protection à l'égard d'utilisations de l'AO ou de l'IG qui porteraient atteinte à sa notoriété, qui l'affaibliraient de manière déloyale ou qui en bénéficieraient indûment.

La norme de l'Acte de Genève précise et étend celle de l'Arrangement de Lisbonne, en incluant à la fois les AO et les IG pour tous les produits. Ainsi, le niveau de protection prescrit par l'Acte de Genève est le plus élevé au niveau international. La 31

Recommandation commune concernant des dispositions relatives à la protection des marques notoires, adoptée par l'Assemblée de l'Union de Paris pour la protection de la propriété industrielle et l'Assemblée générale de l'OMPI à la 34ème série de réunions des assemblées des États membres de l'OMPI, 20 au 29 septembre 1999.

Disponible sous www.wipo.int/edocs/pubdocs/fr/marks/833/pub833.pdf

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protection s'applique aussi si l'AO ou l'IG est accompagnée de mentions telles que «style», «genre» ou «type», même si la véritable origine du produit est indiquée, ou si l'AO ou l'IG est utilisée sous une forme qui équivaudrait à son imitation ou en traduction.

Art. 12

Protection pour éviter de devenir générique

Une AO ou une IG protégée ne peut être considérée comme étant devenue générique. Cet article correspond aux art. 16, al. 3, de la loi du 29 avril 1998 sur l'agriculture (LAgr)32 et 50a, al. 4, P-LPM.

Art. 13

Garanties à l'égard d'autres droits

L'art. 13 énumère les droits de tiers préexistants qui peuvent être invoqués par une partie contractante pour refuser, totalement ou partiellement, les effets d'un enregistrement international sur son territoire. La liste de ces droits est exhaustive. Il s'agit premièrement du droit déduit d'une marque antérieure déposée ou enregistrée de bonne foi, ou acquise par un usage de bonne foi, dans une partie contractante (par. 1); deuxièmement, du droit de toute personne d'utiliser, au cours d'opérations commerciales, son nom ou celui de son prédécesseur en affaires (par. 2); enfin, des droits fondés sur des dénominations de variétés végétales ou de races animales (par. 3). L'usage propre à induire le public en erreur est réservé pour ces deux derniers cas.

Un refus partiel des effets de l'enregistrement international permet la coexistence entre l'AO ou l'IG protégée et le droit de tiers préexistant. En ce qui concerne plus particulièrement les marques, la possibilité de coexistence prévue au par. 1 est limitée aux droits conférés par la marque et sera mise en oeuvre en Suisse en appliquant aux enregistrements internationaux les critères fixés à l'art. 50e, al. 5, P-LPM.

L'existence d'une marque antérieure, valablement invoquée, peut justifier un refus total des effets de la protection de l'enregistrement international si, compte tenu de la durée de l'usage de la marque, de sa réputation et de sa renommée, la protection de l'AO ou de l'IG risquait de lui porter sérieusement préjudice.

Le par. 4 prévoit des garanties en faveur des droits antérieurs de tiers dans le cas où un refus fondé sur les droits antérieurs en question serait retiré par la suite, sauf si ce retrait est motivé par la radiation, le non-renouvellement, la révocation ou l'invalidation des droits antérieurs.

Les dispositions de l'art. 13 sont similaires à celles de l'art. 24, par. 5, 6, 8 et 9, de l'Accord sur les ADPIC et constituent la norme internationalement reconnue à cet égard. Les parties actuelles de l'Arrangement de Lisbonne n'étant pas toutes membres de l'OMC, il est nécessaire de reprendre ces dispositions dans l'Acte de Genève.

32

RS 910.1

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Art. 14

Procédures destinées à faire respecter les droits et moyens de recours

La mise en oeuvre de la protection peut s'effectuer au moyen de mesures administratives ou de voies de droit disponibles en droit suisse pour les bénéficiaires.

Art. 15

Refus

Une partie peut, dans un délai d'une année, refuser la protection d'un enregistrement international sur son territoire, en indiquant les motifs de cette décision. L'Acte de Genève donne la possibilité aux parties intéressées de demander la notification du refus. Les parties affectées par un tel refus peuvent recourir contre la décision de l'administration compétente.

L'art. 15 n'indique pas les motifs de refus de protection d'un enregistrement international qu'une partie peut faire valoir. Néanmoins, les motifs usuels sont liés au respect de la définition de l'AO ou de l'IG ou de la législation de la partie contractante ou liés à un droit de tiers. Ces motifs sont énumérés de manière non exhaustive à l'art. 50e, al. 1, P-LPM.

Art. 16

Retrait de refus

La procédure de retrait de refus est définie à la règle 11 du règlement d'exécution.

Art. 17

Période de transition

Une partie contractante peut accorder un délai pour mettre fin, sur son territoire, aux utilisations antérieures de l'AO ou de l'IG protégée. La période de transition est accordée nominalement, pour une utilisation déterminée. La partie contractante qui octroie une période de transition à un tiers doit indiquer dans sa communication au Bureau international le nom de ce tiers. La possibilité d'octroyer une période de transition concerne des utilisations antérieures qui ne bénéficient pas de la garantie à l'égard d'autres droits prévue à l'art. 13 et qui sont restées suffisamment restreintes pour qu'un refus des effets de l'enregistrement international au motif de la généricité de l'AO ou de l'IG ne se justifie pas.

Art. 18

Notification d'octroi de la protection

L'administration compétente d'une partie contractante peut émettre une notification d'octroi de la protection. Si elle ne fait pas usage de cette possibilité, et si elle ne notifie pas un refus de protection dans le délai d'une année prescrit à l'art. 15, par. 1, let. a, la protection de l'enregistrement international prend automatiquement effet dans cette partie contractante à compter de la date de l'enregistrement international.

Cette disposition est directement applicable, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de la transposer en droit interne. Par conséquent, l'IPI pourra émettre, en vertu de l'art. 18, une déclaration d'octroi de la protection.

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Art. 19

Invalidation

Les effets d'un enregistrement international peuvent faire l'objet d'une invalidation totale ou partielle sur le territoire d'une partie contractante à l'issue d'une procédure qui doit permettre aux bénéficiaires de faire valoir leurs droits.

Art. 20

Modifications et autres inscriptions au registre international

Cet article renvoie au règlement d'exécution pour les procédures relatives aux modifications et autres inscriptions au registre international.

Art. 21

Appartenance à l'Union de Lisbonne

La plupart des traités administrés par l'OMPI, qu'ils dépendent ou non de la Convention de Paris, constituent des unions distinctes qui ont leur propre organe décisionnel, sous la forme d'une assemblée. Les parties à l'Arrangement de Lisbonne, à l'Acte de 1967 et à l'Acte de Genève constituent une seule union particulière au sens de l'art. 19 de la Convention de Paris. Néanmoins, l'art. 22, par. 4, let. c, de l'Acte de Genève prévoit que les décisions qui ne concernent que l'Acte de 1967 ou que l'Acte de Genève ne sont prises que par les parties contractantes du traité concerné.

Art. 22

Assemblée de l'Union particulière

Étant donné qu'il n'y a qu'une seule Union de Lisbonne, l'Assemblée de l'Union réunit les parties contractantes de l'Acte de 1967 et celles de l'Acte de Genève.

Parmi les attributions classiques d'une telle assemblée dans le système de l'OMPI figure celle de modifier le règlement d'exécution, commun aux deux traités (voir ch. 3.2). Deux points méritent d'être soulignés. Le premier est qu'une organisation intergouvernementale, telle que l'UE, a un nombre de voix correspondant au nombre de ses États membres qui sont parties contractantes de l'Acte de Genève.

L'organisation intergouvernementale ne peut toutefois pas voter si un de ses États membres exerce son droit de vote individuel. Le deuxième point, mentionné cidessus, est que seules les parties contractantes de l'Acte de Genève ont droit de vote sur les questions qui ne concernent que l'Acte de Genève.

Art. 23

Bureau international

Cet article règle les tâches administratives et le rôle du Bureau international, en particulier à l'Assemblée de l'Union de Lisbonne et à d'autres réunions. Le Bureau international assume aussi toutes les autres tâches que lui attribue l'Acte de Genève.

Art. 24

Finances

Les dépenses sont essentiellement constituées par les frais de personnel qu'implique l'administration du système de Lisbonne par le Bureau international. Les recettes sont essentiellement constituées par les taxes perçues par l'OMPI pour les opérations concernant les enregistrements internationaux. Des subventions peuvent également être versées par les parties contractantes (par. 2, point iii). Le par. 2, point v, dispose que, si les taxes perçues et les recettes mentionnées aux points i à iv ne suffisent pas 5678

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à couvrir les dépenses, l'Assemblée de l'Union de Lisbonne peut décider le paiement de contributions spéciales par les parties contractantes ou la perception de toute autre ressource provenant des parties contractantes ou des bénéficiaires. En vertu du par. 4, ces contributions spéciales sont fixées en fonction de la classe de contribution de chaque partie contractante dans le contexte de la Convention de Paris, éventuellement pondérée en fonction du nombre d'enregistrements émanant de chaque partie contractante, si l'Assemblée de l'Union de Lisbonne en décide ainsi.

En raison du nombre limité d'AO, en particulier dans l'attente de l'entrée en vigueur de l'Acte de Genève, les recettes constituées par les taxes sont aujourd'hui nettement inférieures aux dépenses liées au système de Lisbonne. Par conséquent, les dépenses du système sont actuellement couvertes principalement par le budget de l'OMPI.

Environ 95 % des recettes de l'OMPI proviennent des services facturés par l'organisation aux utilisateurs des systèmes d'enregistrement international, à savoir le système du Traité international en matière de brevets (PCT), le système international des marques (Madrid) et le système international des dessins et modèles industriels (La Haye). Les 5 % restants sont couverts par des contributions annuelles des États membres, selon un système de classes de contributions. La Suisse figure à cet égard en classe III, ce qui correspond actuellement à une contribution annuelle de 683 685 francs. Le montant des contributions étatiques peut être modifié sur décision des organes directeurs de l'OMPI.

Des discussions concernant le financement durable de l'Union de Lisbonne sont actuellement en cours parmi les États membres.

Le par. 5 prévoit, de manière similaire à l'art. 11, par. 7, de l'Acte de 1967, un fonds de roulement. L'Assemblée de l'Union de Lisbonne, considérant le très modeste budget de l'union à l'époque, a décidé en 1976 de renoncer à l'établissement d'un tel fonds. Cette question a fait l'objet de nouvelles discussions en 2015, à laquelle l'Union de Lisbonne n'a toutefois pas donné suite jusqu'à présent. Si un tel fonds devait être établi, chaque État membre devrait fournir une contribution dont le montant serait déterminé par les Parties au système de Lisbonne. À court terme, l'établissement d'un
tel fonds de roulement est peu probable.

Le par. 7 prévoit que la vérification des comptes peut être assurée par un ou plusieurs États membres ou par des contrôleurs extérieurs. Selon le règlement financier de l'OMPI, cette fonction incombe à l'auditeur externe de l'OMPI.

Art. 25

Règlement d'exécution

Les modalités d'exécution de l'Acte de Genève sont établies dans un règlement d'exécution. Celui-ci peut être modifié par l'Assemblée, soit à l'unanimité, soit à la majorité qualifiée des trois quarts selon les cas.

Art. 27

Modification de certains articles par l'Assemblée

Seule une conférence diplomatique des parties contractantes peut réviser l'Acte de Genève, mais les art. 22 à 24 et 27 peuvent aussi être modifiés par l'Assemblée à la majorité qualifiée des trois quarts ou des quatre cinquièmes selon les cas.

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Art. 28

Conditions et modalités pour devenir partie au présent Acte

Par rapport à l'Acte de 1967, de nouvelles dispositions ont été introduites concernant l'adhésion d'organisations intergouvernementales compétentes pour l'obtention de titres de protection des IG, telles que l'UE ou l'OAPI. Même si la compétence d'une organisation intergouvernementale est exclusive en matière d'enregistrement des IG, ses États membres peuvent adhérer à l'Acte de Genève. Ainsi, l'adhésion des États membres de l'UE et de l'OAPI à l'Acte de 1967 restera valable même après leur éventuelle adhésion à l'Acte de Genève.

Art. 29

Date de prise d'effet des ratifications et des adhésions

Le par. 2 prévoit que l'Acte de Genève entrera en vigueur trois mois après que cinq parties auront déposé valablement leur instrument de ratification ou d'adhésion. En vertu du par. 3, une partie ayant déposé son instrument de ratification ou d'adhésion au moins trois mois avant l'entrée en vigueur de l'acte deviendra liée à celui-ci à son entrée en vigueur. Une partie ayant déposé son instrument de ratification ou d'adhésion après l'entrée en vigueur de l'acte deviendra liée à celui-ci trois mois après ce dépôt ou à une date ultérieure indiquée dans l'instrument de ratification ou d'adhésion.

Le par. 4 prévoit que, pour une partie contractante adhérant à l'acte après l'entrée en vigueur de celui-ci, le délai pour notifier un refus des effets d'un enregistrement international en vigueur au moment de l'entrée en force de son adhésion, de même que la période de transition éventuellement accordée par cette partie contractante à un tiers pour mettre fin à l'utilisation de l'AO ou de l'IG protégée en vertu de l'art. 17, peuvent être prolongés conformément à la règle 9 du règlement d'exécution.

Art. 32

Dénonciation

La dénonciation de l'Acte de Genève par une partie contractante ne prend effet un an au plus tôt à compter de sa notification au directeur général de l'OMPI. Le par. 2 assure la sauvegarde des effets des enregistrements internationaux en vigueur dans cette partie contractante au moment où la dénonciation prend effet.

Art. 33

Langues du présent Acte; signatures

Les versions originales de l'Acte de Genève dans les six langues officielles de l'Organisation des Nations Unies (anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe) font également foi. En vertu du par. 1, let. b, d'autres versions linguistiques de l'Acte de Genève peuvent être reconnues comme version officielle sur décision de l'Assemblée et après consultation des États concernés. Cette possibilité pourrait concerner les versions allemande et italienne de l'Acte de Genève.

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4.2 Commentaire des dispositions du règlement d'exécution commun à l'Arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d'origine et leur enregistrement international et à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne sur les appellations d'origine et les indications géographiques Le règlement d'exécution fait partie intégrante de l'Acte de Genève et a été adopté en même temps que celui-ci, le 20 mai 2015, par la conférence diplomatique. Les règles qu'il contient, qui précisent certaines dispositions de l'acte, présentent l'avantage de pouvoir être modifiées plus facilement que les dispositions de l'acte lui-même.

À sa 32e session (octobre 2015), l'Assemblée de Lisbonne a créé un groupe de travail chargé d'élaborer un règlement d'exécution commun à l'Arrangement de Lisbonne et à l'Acte de Genève. En effet, dès l'entrée en vigueur de l'Acte de Genève, les procédures et les enregistrements du système de Lisbonne seront régis par deux instruments internationaux: l'Acte de 1967 et l'Acte de Genève. Le groupe de travail s'est réuni deux fois et a présenté un projet de règlement d'exécution qui reprend intégralement les dispositions du Règlement d'exécution de l'Acte de Genève.

En vertu de l'art. 22, par. 2, point iii, de l'Acte de Genève, qui reprend l'art. 9, par. 2, point iii, de l'Acte de 1967, l'Assemblée de Lisbonne est compétente pour modifier le règlement d'exécution. Lors de sa 34e session (octobre 2017), l'Assemblée de Lisbonne a ainsi adopté le projet de règlement d'exécution, incluant le montant des taxes perçues par le Bureau international (identique pour l'Acte de 1967 et pour l'Acte de Genève). L'Assemblée a en outre décidé que l'entrée en vigueur de ce règlement coïnciderait avec celle de l'Acte de Genève.

Le règlement d'exécution est un outil pratique pour les parties qui seront liées à la fois par l'Acte de 1967 et par l'Acte de Genève et pour le Bureau international.

Règle 3

Langues de travail

Les langues de travail du système de Lisbonne sont le français, l'anglais et l'espagnol. Le registre international est tenu dans ces trois langues. Par conséquent, la demande d'enregistrement international d'une AO ou d'un IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse devra être déposée en français.

Règle 5

Conditions relatives à la demande

Les par. 1 et 2 prescrivent le contenu obligatoire de la demande, à savoir l'indication de l'administration compétente, les données servant à identifier les bénéficiaires, l'AO ou l'IG dont l'enregistrement international est demandé, le ou les produits auxquels s'applique l'AO ou l'IG, l'aire géographique d'origine ou de production des produits, ainsi que les données servant à identifier l'enregistrement, l'acte législatif ou réglementaire ou la décision judiciaire ou administrative en vertu duquel la protection est accordée dans le pays d'origine.

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Les par. 3 et 4 portent sur le contenu qui serait obligatoire pour obtenir la protection dans une partie contractante qui aurait notifié au directeur général de l'OMPI qu'elle exigerait ce contenu.

En vertu du par. 3, la demande doit contenir des données sur la qualité, la notoriété ou d'autres caractères du produit concerné et le lien existant avec l'aire géographique d'origine. Certains pays souhaitent en effet examiner d'une manière approfondie la relation entre le produit et son aire géographique d'origine. L'UE a notifié cette exigence en déposant son instrument d'adhésion le 26 novembre 2019. Par conséquent, la quasi-totalité des enregistrements internationaux en vigueur en vertu de l'Acte de 1967 devront être complétés en conséquence pour que la protection dans l'UE puisse être obtenue en vertu de l'Acte de Genève.

En vertu du par. 4, la demande doit être signée par une personne habilitée à revendiquer les droits conférés par la protection de l'enregistrement international ou être accompagnée d'une déclaration d'intention d'utiliser l'AO ou l'IG ou d'exercer un contrôle sur son utilisation par d'autres, pour ce qui concerne le territoire de la partie contractante dans laquelle la protection est demandée. Ces éléments visent à assurer une compatibilité avec le système des marques dans certains pays, notamment les États-Unis. Il est peu probable qu'une des parties qui adhéreront à l'Acte de Genève à moyen terme notifie une telle exigence, qui ne figure même pas comme contenu facultatif dans l'Acte de 1967.

Enfin, le par. 5 prescrit que la demande doit indiquer si l'enregistrement, l'acte ou la décision accordant la protection précise ou non que celle-ci ne porte pas sur certains éléments de l'AO ou de l'IG. Sont notamment visées des appellations ou des indications qui sont composées d'un terme générique et d'un nom géographique et dont la décision d'enregistrement précise que le terme générique en question n'est pas réservé. Par exemple, le règlement (UE) n° 1122/201033 précise à l'art. 1 que le nom «Gouda» peut continuer à être utilisé sur le territoire de l'UE, nonobstant l'enregistrement de l'IGP «Gouda Holland».

Règle 7

Inscription au registre international

Le par. 4 porte sur les enregistrements internationaux émanant d'une partie à l'Acte de 1967 qui adhère à l'Acte de Genève. Ceux-ci, modifiés ou non, notamment compte tenu des conditions prescrites à la règle 5, par. 2 à 4, sont alors enregistrés au titre de l'Acte de Genève et notifiés à chaque partie contractante de l'Acte de Genève. Ainsi, pour une partie contractante de l'Acte de Genève qui ne serait pas partie de l'Acte de 1967, ce qui serait le cas de la Suisse, c'est à partir de cette notification de transfert des enregistrements internationaux d'une partie à l'Acte de 1967 que courrait le délai d'un an pour émettre un refus des effets de ces enregistrements internationaux. Néanmoins, la plus grande partie des enregistrements internationaux

33

Règlement (UE) n° 1122/2010 de la Commission du 2 décembre 2010 portant enregistrement d'une dénomination au registre des appellations d'origine protégées et des indications géographiques protégées [Gouda Holland (IGP)], JO L 317 du 3.12.2010, p. 22

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en vigueur en vertu de l'Acte de 1967 émane d'États membres de l'UE et sont déjà protégés en Suisse en vertu d'accords bilatéraux34.

Règle 8

Taxes

Le montant des taxes perçues par le Bureau international est indiqué au par. 1, conformément à la décision de l'Assemblée de Lisbonne. Lors de sa 34e session (octobre 2017), l'Assemblée de Lisbonne a fixé le montant des taxes pour l'Acte de Genève au même niveau que celui des taxes en vigueur pour l'Acte de 1967, soit 1000 francs pour un enregistrement, 500 francs pour une modification, 150 francs pour un extrait du registre et 100 francs pour un autre renseignement écrit.

Les par. 2 et 3 règlent les questions de taux de change et de transfert en ce qui concerne les taxes exigées par les parties contractantes et perçues par le Bureau international conformément à l'art. 7, par. 4, de l'Acte de Genève.

Le par. 4 prescrit l'utilisation exclusive de la monnaie suisse pour les versements au Bureau international.

Le par. 5 pose le principe du paiement des taxes dues au Bureau international en relation avec la procédure d'enregistrement international par les bénéficiaires de l'AO ou de l'IG (let. a), en prévoyant toutefois qu'une partie puisse notifier au Directeur général le fait que son administration compétente peut accepter de percevoir lesdites taxes et de les transférer au Bureau international. La Suisse ne fera pas usage de cette modalité, si bien que le paiement de la taxe due au Bureau international pour l'enregistrement d'une AO ou d'une IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse devra être effectué par les bénéficiaires eux-mêmes auprès du Bureau international. L'IPI ne prélèvera pas cette taxe.

Les par. 6 à 9 règlent diverses questions administratives relatives au paiement des taxes.

Enfin, le par. 10, qui exempte entre elles les parties à l'Acte de 1967, lorsqu'elles adhèrent à l'Acte de Genève, du paiement des taxes qui seraient exigées par l'une d'entre elles conformément à l'art. 7, par. 4, de l'Acte de Genève, ne concerne pas la Suisse puisqu'elle n'est pas partie à l'Acte de 1967.

Règle 9

Refus

En vertu du par. 1, le délai dans lequel une partie contractante peut notifier un refus des effets d'un enregistrement international est, en règle générale, d'un an à compter de la réception de la notification de l'enregistrement international par l'administration compétente concernée. Ce délai peut être prolongé d'une année pour une partie contractante qui l'indique dans une déclaration jointe à son instrument de ratification ou d'adhésion à l'Acte de Genève. La possibilité de prolongation du délai est justifiée par le fait qu'une partie contractante adhérant à l'Acte de Genève après qu'un grand nombre d'enregistrements internationaux ont déjà été effectués doit se prononcer sur un nombre considérable d'enregistrements internationaux.

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Aux accords signés dans les années 1960 et 1970 (voir note 15) se sont ajoutés les accords visés dans la note 18.

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Le par. 2 prescrit le contenu d'une déclaration de refus, notamment l'indication des motifs sur lesquels le refus est fondé, ainsi que les données essentielles concernant les droits antérieurs, en particulier s'il s'agit d'une marque (date et numéro d'enregistrement, titulaire, liste des produits et services, etc.). Les effets d'un enregistrement international en Suisse pourraient être totalement refusés, par exemple, si la désignation est générique en Suisse ou si l'enregistrement est contraire à l'ordre public ou aux bonnes moeurs. Un droit antérieur de tiers pourrait également, dans certaines circonstances, fonder un refus total.

Un refus partiel, qui ne porterait que sur certains éléments de l'AO ou de l'IG faisant l'objet de l'enregistrement international, pourrait également se fonder sur l'ordre public, les bonnes moeurs ou une marque antérieure. Même si le règlement ne décrit pas explicitement ce cas, un refus partiel pourrait aussi reposer sur une restriction des droits des bénéficiaires de l'AO ou de l'IG en raison d'une situation de coexistence avec une AO ou une IG homonyme déjà protégée en Suisse ou avec une marque antérieure. Par exemple, la France, la Hongrie, l'Italie, le Portugal, la République tchèque et la Slovaquie ont partiellement refusé en 2006 les effets de l'enregistrement international de Pisco, notifié par le Pérou en 2005, arguant que la protection de cet enregistrement international ferait obstacle à l'utilisation de la dénomination Pisco pour des produits originaires du Chili, protégée conformément à l'Accord du 18 novembre 2002 établissant une association entre la Communauté européenne, d'une part, et la République du Chili, d'autre part.

Le par. 3 porte sur la publication des refus par le Bureau international et leur notification à la partie contractante d'origine.

Règle 11

Retrait de refus

Une partie contractante qui a notifié un refus peut, en tout temps, retirer ce refus, en partie ou en totalité, en indiquant le motif de ce retrait. Il ressort des actes de la conférence diplomatique de 2015 que, dès lors qu'une partie contractante émet un refus, rien ne s'oppose à ce que des échanges aient lieu subséquemment entre les parties contractantes, les bénéficiaires et les tiers concernés, aux fins de trouver un accord qui permettrait le retrait du refus.

Règle 13

Invalidation des effets d'un enregistrement international dans une partie contractante

Après l'expiration du délai prescrit pour émettre un refus ou après le retrait d'un refus, les effets d'un enregistrement international peuvent être invalidés, en partie ou en totalité, dans une partie contractante. Celle-ci doit alors notifier cette invalidation, pour autant qu'elle ne soit plus susceptible de recours, au Bureau international, en indiquant notamment les motifs sur la base desquels l'invalidation a été prononcée.

En Suisse, l'invalidation pourrait être prononcée par un juge civil dans le cadre d'un litige.

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Règle 14

Période de transition accordée à des tiers

Le par. 2 prévoit que la durée d'une période de transition, qui commence au plus tard un an et trois mois (ou deux ans et trois mois dans le cas visé à l'art. 29, par. 4, de l'Acte de Genève) à compter de la date de notification de l'enregistrement international, ne peut qu'exceptionnellement dépasser dix ans et ne peut jamais excéder quinze ans.

Règle 16

Renonciation à la protection

L'administration compétente de la partie contractante d'origine peut en tout de temps notifier au Bureau international qu'il est renoncé totalement ou partiellement à la protection d'un enregistrement international dans une ou plusieurs parties contractantes ou retirer une telle renonciation.

Règle 18

Rectifications apportées au registre international

Le Bureau international apporte une rectification, d'office ou à la demande d'une partie contractante ou des bénéficiaires, s'il apparaît que le registre comporte une erreur relative à un enregistrement international. Si la rectification porte sur l'appellation ou l'indication elle-même, ou sur les produits auxquels elle se rapporte, une partie contractante peut notifier un refus de protection dans un délai d'une année à compter de la réception de la notification de rectification par le Bureau international.

Règle 24

Instructions administratives

Les instructions administratives, qui visent à faciliter les opérations liées au registre international en réglant certains détails techniques, sont établies par le directeur général de l'OMPI. La version actuelle des instructions administratives est entrée en vigueur le 1er janvier 2010. Elles prévoient notamment la mise à disposition sous forme électronique, sur le site Internet du Bureau international, des formulaires prescrits par le règlement et les modalités de communication électronique entre le Bureau international et les administrations compétentes qui souhaitent utiliser ce moyen. Le Bureau international a préparé un projet d'instructions administratives révisées s'appliquant à l'Acte de 1967 et à l'Acte de Genève, qui entreront en vigueur en même temps que ce dernier.

5 Présentation de l'acte de mise en oeuvre 5.1 Réglementation proposée La révision partielle de la LPM vise à mettre en oeuvre l'Acte de Genève. Elle prévoit les points suivants: ­

création d'une base légale pour l'enregistrement des AO et des IG suisses dans le registre international de l'OMPI;

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­

définition de la qualité pour demander l'enregistrement international d'une AO ou d'une IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse;

­

création d'une base légale établissant les motifs de refus des effets d'un enregistrement international (AO ou IG étrangère) dont la protection est demandée en Suisse;

­

création d'une base légale permettant d'accorder à un tiers une période de transition pour mettre fin à l'utilisation de l'AO ou de l'IG protégée en vertu d'un enregistrement international;

­

règlement des cas de coexistence entre des marques antérieures et des enregistrements internationaux et règlement des modalités de traitement des demandes d'enregistrement de marques contenant une appellation ou une indication protégée en vertu d'un enregistrement international;

­

création d'une base légale pour le prélèvement de taxes pour les procédures prévues par la LPM et son ordonnance d'application;

­

création d'une délégation de compétence en faveur du Conseil fédéral pour régler les procédures liées à l'enregistrement des AO et des IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse dans le registre international de l'OMPI et à l'acceptation ou au refus des effets d'un enregistrement international étranger en Suisse.

Les aspects formels des procédures suivantes seront précisés au moyen d'une modification de l'ordonnance du 23 décembre 1992 sur la protection des marques et des indications de provenance (OPM)35: ­

demande d'enregistrement international d'une AO ou d'une IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse;

­

refus, d'office ou sur demande d'une tiers, des effets d'un enregistrement international d'une AO ou d'une IG, dont la protection est demandée en Suisses;

­

demande de période de transition pour mettre fin à l'utilisation d'une AO ou d'une IG faisant l'objet d'un enregistrement international.

5.2 Adéquation des moyens requis L'administration de l'Acte de Genève s'intégrera aux activités de l'IPI, avec le concours de l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG), sans requérir de personnel supplémentaire, dans la mesure où le système de Lisbonne remplacera de manière plus efficace les négociations bilatérales en matière de protection des indications géographiques. Le système permettra en outre aux bénéficiaires d'IG suisses d'accéder de manière simple et peu coûteuse à une protection optimale dans de nombreux pays.

35

RS 232.111

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5.3 Mise en oeuvre 5.3.1 Modalités de mise en oeuvre prévues Les dispositions de l'Acte de Genève et de son règlement d'exécution, directement applicables, sont suffisamment précises et détaillées pour ne nécessiter que peu de législation de mise en oeuvre. Le registre international, incluant les effets de chaque enregistrement international dans chacune des parties au traité, est administré par le Bureau international (OMPI). Certains aspects des procédures nationales et certaines questions spécifiques sont réglés dans la LPM et feront l'objet de précisions dans l'OPM. Ces précisions augmentent la transparence des opérations relatives à l'administration du système de Lisbonne pour la Suisse tout en prenant en compte la diversité des cas pouvant se présenter.

5.3.2 Mesures prévues pour évaluer l'exécution À l'heure actuelle, il n'est pas possible de prévoir quelles seront les parties qui auront déjà adhéré à l'Acte de Genève au moment où il entrera en vigueur pour la Suisse. Certaines parties notifieront un nombre très réduit d'enregistrements, alors que d'autres parties pourraient en notifier des centaines. En outre, s'agissant de l'UE et d'autres pays avec lesquels la Suisse a conclu un accord bilatéral en la matière, le traitement des enregistrements internationaux déjà protégés en Suisse en vertu de ces accords bilatéraux requerra nettement moins de ressources que celui des enregistrements internationaux dont la protection n'a pas déjà été reconnue en Suisse. En raison de ces inconnues, il n'est pas possible de prévoir à l'heure actuelle quel sera le volume d'activité du système de Lisbonne pendant les premières années de participation de la Suisse. Néanmoins, un bilan sera établi deux ans après l'entrée en vigueur de l'Acte de Genève pour la Suisse, afin d'évaluer la charge que représente l'administration de ce système pour l'IPI et de déterminer si la mise en oeuvre telle que prévue dans le présent projet est adéquate et satisfaisante.

6 Commentaire des dispositions de l'acte de mise en oeuvre: modification de la loi sur la protection des marques et des indications de provenance La présente modification introduit quatre nouveaux articles dans le titre 2 traitant de l'enregistrement international des indications géographiques. Dès lors, un découpage du titre 2 selon une systématique similaire à celle du titre 1 est judicieux, à savoir un premier chapitre regroupant les dispositions générales applicables aux indications de provenance, un deuxième chapitre dédié à l'enregistrement national des indications géographiques de produits non agricoles et un troisième chapitre couvrant l'enregistrement international des indications géographiques.

Les appellations d'origine constituent une catégorie particulière d'indications géographiques. Afin d'alléger le texte légal, les titres des chapitres et des articles con-

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cernés ne mentionnent que la catégorie générale «indications géographiques», étant entendu que ces dispositions couvrent aussi bien les appellations d'origine.

Art. 27a À l'art. 27a, let. a, la référence à l'art. 50a doit être modifiée, étant donné qu'avec le projet de révision l'actuel art. 50a devient l'art. 50b.

Chap. 1

Dispositions générales

Les indications de provenance sont définies et protégées par les art. 47 à 49 LPM, indépendamment d'un enregistrement. Les indications géographiques au sens de l'art. 22 de l'Accord sur les ADPIC sont des indications de provenance particulières, qui sont donc soumises aux dispositions générales du présent chapitre.

Art. 50a Cette disposition générale, reprise à l'identique de l'art. 51, régit les indications de provenance et ne porte pas sur l'enregistrement d'une indication géographique. Il est nécessaire de la déplacer dans le chapitre 1 et, par conséquent, de la renuméroter.

Chap. 2

Enregistrement des indications géographiques

Les indications géographiques peuvent faire l'objet d'un enregistrement en Suisse en tant qu'AOP ou IGP. Cet enregistrement se fait, conformément à l'art. 16 LAgr, dans le registre tenu par l'OFAG, lorsque l'indication ou l'appellation concerne des produits agricoles, des produits agricoles transformés, des produits sylvicoles ou des produits sylvicoles transformés. Les indications et les appellations concernant d'autres produits (à l'exception des vins) peuvent être enregistrées auprès de l'IPI sur la base de l'art. 50b P-LPM.

Art. 50b En raison de la renumérotation de l'ex-art. 51 en 50a, l'ex-art. 50a devient l'art 50b.

Chap. 3

Enregistrement international des indications géographiques

Ce chapitre contient les nouveaux articles proposés pour la mise en oeuvre de l'Acte de Genève. Il couvre l'enregistrement dans le registre international des appellations d'origine et des indications géographiques pour tous les produits.

Art. 50c

Registre international des appellations d'origine et des indications géographiques

L'al. 1 constitue la base légale pour l'enregistrement d'une AO ou d'une IG suisse dans le Registre international, tenu par le Bureau international. L'enregistrement international d'une AO ou d'une IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire d'une autre partie à l'Acte de Genève déploie ses effets en Suisse, pour

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autant que ceux-ci n'aient pas fait l'objet d'un refus ou d'une invalidation, et sous réserve des éventuelles garanties accordées à l'égard d'autres droits.

L'al. 2 est purement déclaratoire. La compétence de l'IPI pour l'administration de l'Acte de Genève découle directement de l'art. 2, al. 2, let. b, LIPI. L'article a pour fonction de distinguer le rôle du Bureau international, qui tient le registre international, de celui de l'IPI, qui est chargé d'administrer l'Acte de Genève sur le territoire suisse. Cette administration porte, d'une part, sur l'enregistrement international des appellations d'origine et indications géographiques dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse (voir commentaire de l'art. 50d), et, d'autre part, sur les effets des enregistrements internationaux déposés par les autres parties contractantes et dont la protection est demandée sur le territoire suisse (art. 50e).

Art. 50d

Enregistrement international d'une appellation d'origine ou d'une indication géographique dont l'aire géographique est située sur le territoire suisse

L'al. 1 précise que les demandes d'enregistrements internationaux déposées par la Suisse ne peuvent porter que sur des AO ou IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse. La même règle s'applique a fortiori pour les demandes de modification d'un enregistrement déposé par la Suisse. L'IPI examinera en particulier si la désignation pour laquelle l'enregistrement est demandé constitue une AO ou une IG au sens de l'art. 2, par. 1, de l'Acte de Genève. Lorsque les conditions seront remplies, l'IPI transmettra la demande d'enregistrement au Bureau international. Le paiement des taxes dues au Bureau international (qui doit se faire directement auprès du Bureau international) par les bénéficiaires fait partie des conditions requises pour l'inscription de l'AO ou de l'IG au registre international, en vertu de la let. c du par. 2 de la règle 5, du règlement d'exécution.

L'art. 2 de l'Acte de Genève définit les AO et les IG qui peuvent faire l'objet d'un enregistrement international. L'Acte de Genève ne requiert pas que ces désignations soient protégées par un titre sui generis (en particulier, une AOP ou une IGP) en Suisse. Il suffit que la désignation soit protégée dans le pays d'origine.

Ainsi, pour autant qu'elle corresponde à la définition de l'AO ou de l'IG de l'Acte de Genève et que les bénéficiaires puissent fournir les éléments requis par l'art. 5 (et la règle 5 du règlement d'exécution), toute dénomination ou indication suisse bénéficiant d'un titre de protection est susceptible de faire l'objet d'un enregistrement international. Dès lors, il n'est pas exclu que dans des cas très particuliers, une marque puisse être considérée comme le moyen de protection d'une IG ou d'une AO. Il ne serait donc pas justifié de limiter la possibilité de dépôt aux seules AOP et IGP.

En droit suisse, les IG sont protégées automatiquement, même si elles ne sont pas enregistrées comme telles dans le registre de l'OFAG ou dans celui de l'IPI (art. 47 et 48, al. 2 et 3, LPM). Les prescriptions de l'Acte de Genève n'empêcheraient donc pas la Suisse de déposer en vue d'un enregistrement international une dénomination qui remplisse les conditions d'une IG au sens de l'art. 2, par. 1, point ii, de l'Acte de Genève, mais qui ne fait pas l'objet d'un enregistrement en Suisse. Cependant, ni la 5689

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représentativité des bénéficiaires, ni l'aire géographique de production, ni la qualité, les caractères et la méthode de production du produit n'ont été examinés et consignés officiellement en relation avec cette dénomination. En outre, la protection d'une telle dénomination découle de la loi, sans nécessiter une consultation publique. Permettre l'accès de ces dénominations à l'enregistrement international signifierait que l'autorité suisse de dépôt, à savoir l'IPI, conduise à l'égard de ces demandes une procédure analogue à celle qui est effectuée en vue de l'enregistrement de dénominations dans le registre de l'OFAG ou dans celui de l'IPI, portant notamment sur tous les éléments mentionnés ci-avant. Un tel système reviendrait à court-circuiter les procédures ordinaires existantes, à reporter sur l'IPI les compétences de l'OFAG concernant les produits agricoles et, en définitive, à compliquer considérablement la procédure de dépôt d'une demande d'enregistrement international. Par ailleurs, le «titre» obtenu à l'issue d'une telle procédure serait équivalent à une AOP ou une IGP à l'étranger, mais n'en serait pas une en Suisse.

Enfin, les systèmes d'enregistrement des AOP et IGP étant disponibles au niveau national pour tous les produits, il n'est pas justifié de prévoir un contournement de ces systèmes via un enregistrement international.

Aussi est-il prévu de limiter les demandes d'enregistrement international aux AO et au IG dont l'aire géographique est située en Suisse et qui ont été enregistrées ou qui font l'objet d'une réglementation spéciale, à savoir les quatre catégories suivantes: a.

les AOP et IGP enregistrées dans le registre de l'OFAG conformément à l'art. 16 LAgr ou dans celui de l'IPI conformément à l'art. 50a P-LPM;

b.

les appellations d'origine contrôlée (AOC) viticoles protégées conformément à l'art. 63 LAgr;

c.

les AO ou les IG faisant l'objet d'une ordonnance de branche édictée par le Conseil fédéral en vertu de l'art. 50, al. 2, LPM;

d.

les marques constituées exclusivement d'une AO ou d'une IG au sens de l'art. 2, par. 1, de l'Acte de Genève, pour autant que l'AO ou l'IG ne soit pas protégée sous l'une des catégories des lettres précédentes.

La qualité de déposant est reconnue au groupement qui a obtenu l'AOP ou l'IGP, au canton suisse qui protège l'AOC ou à l'organisation faîtière qui a soumis l'avantprojet pour le dépôt d'une dénomination selon la catégorie a, b ou c. Cette organisation ou cette autorité est également considérée représentative des bénéficiaires visés à l'art. 27b LPM pour les demandes d'enregistrement d'une marque géographique.

L'art. 50d, let. d, P-LPM permet l'enregistrement international d'une marque constituée d'une AO ou d'une IG, pour autant que le signe dans son ensemble corresponde à la définition de l'art. 2, par. 1, de l'Acte de Genève. À cet effet, la marque doit se confondre entièrement avec l'IG ou l'AO. Une marque combinant une AO ou une IG avec un élément distinctif ne peut pas servir de base à un enregistrement international, car elle ne remplit pas la condition fixée à l'art. 2, par. 1, de l'Acte de Genève.

La restriction introduite à la let. d in fine, vise à empêcher le dépôt en vue de l'enregistrement international d'une dénomination qui serait protégée en tant qu'AOP ou IGP, qu'AOC viticole ou par une ordonnance de branche et enregistrée 5690

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comme marque en combinaison avec un élément distinctif. Cette éventualité est en principe déjà exclue, puisqu'un enregistrement international ne peut se fonder que sur une marque constituée exclusivement d'une AO ou d'une IG au sens de l'art. 2, par. 1, de l'Acte de Genève. La restriction garantit cependant que le dépôt soit bel et bien effectué par l'organisation ou l'autorité autorisée.

Al. 2: l'Acte de Genève et son règlement d'exécution contiennent des dispositions de procédure détaillées concernant les exigences à remplir pour déposer une demande d'enregistrement d'une AO ou d'IG.

Seuls certains aspects particuliers de procédure relatifs aux interactions entre les administrés et l'IPI, qui ne peuvent pas se déduire de l'Acte de Genève et de son règlement d'exécution, devront être précisés dans l'OPM. L'al. 2 prévoit à cet effet une délégation de compétence au Conseil fédéral.

Art. 50e

Effets de l'enregistrement international d'une appellation d'origine ou d'une indication géographique dont la protection est demandée sur le territoire suisse

Al. 1: les enregistrements internationaux émanant des autres parties de l'Acte de Genève, c'est-à-dire portant sur des AO et des IG étrangères, seront notifiés par le Bureau international à l'IPI, qui examinera si la protection peut leur être accordée, en tout ou en partie, sur le territoire suisse.

L'art. 15 de l'Acte de Genève n'indique pas les motifs de refus de protection d'un enregistrement international qu'une partie peut faire valoir. Aussi l'al. 1 énumère-t-il ces motifs de manière non exhaustive.

L'al. 2 précise que l'IPI examinera d'office si la désignation a acquis un caractère générique en Suisse et si l'enregistrement est contraire au droit, à l'ordre public ou aux bonnes moeurs. A contrario, il n'examinera un potentiel conflit entre l'enregistrement et un droit antérieur de tiers que sur demande de ce tiers (al. 3). Le système de l'enregistrement de marques se base sur un fonctionnement similaire, les motifs relatifs d'exclusion au sens de l'art. 3 LPM n'étant examinés que suite au dépôt d'une opposition par le titulaire d'une marque antérieure.

Al. 3: indépendamment de l'examen d'office par l'IPI, un tiers pourra faire valoir les mêmes motifs dans le cadre d'une demande de refus des effets d'un enregistrement international. En vertu de l'art. 15, par. 3, de l'Acte de Genève, la Suisse doit donner à toute personne dont les intérêts seraient affectés par un enregistrement international une possibilité raisonnable de demander à l'administration compétente de notifier un refus, partiel ou total, des effets de cet enregistrement international.

Un refus partiel des effets de l'enregistrement international permet la coexistence entre l'AO ou l'IG protégée et le droit de tiers préexistant figurant à l'art. 13 de l'Acte de Genève. En ce qui concerne plus particulièrement les marques, la possibilité de coexistence est une exception limitée aux droits conférés par la marque, conforme à l'art. 17 de l'Accord sur les ADPIC et à l'art. 13, al. 1, de l'Acte de Genève. Elle est justifiée par le fait qu'une indication géographique constitue un terme descriptif qui ne peut pas être remplacé par un autre terme. Les bénéficiaires doivent donc pouvoir l'utiliser pour décrire la provenance de leurs produits.

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L'existence d'une marque antérieure à la date de notification à la Suisse de l'enregistrement international et acquise de bonne foi peut, si elle est valablement invoquée, justifier un refus total des effets de la protection de l'enregistrement international. L'autorité examine si, compte tenu de la durée de l'usage de la marque, de sa réputation et de sa renommée, la protection de l'AO ou de l'IG risquerait de lui porter un sérieux préjudice. Le critère de la bonne foi fait référence à la connaissance de l'AO ou de l'IG. La bonne foi est niée si le déposant, au moment du dépôt, avait connaissance de l'utilisation de la dénomination par les producteurs du lieu en question ou par les distributeurs ou commerçants pour identifier la provenance du produit ou s'il savait que la dénomination avait fait ou allait faire l'objet d'un dépôt dans le pays d'origine36.

Al. 4: l'art. 17 de l'Acte de Genève prévoit la possibilité pour une partie contractante d'accorder à un tiers un délai pour mettre fin à l'utilisation sur son territoire d'une désignation faisant l'objet d'un enregistrement international. Cette possibilité doit être prévue par le droit interne de la partie contractante. L'octroi d'une période de transition pour mettre fin à un usage constitue une restriction au droit exclusif procuré par l'enregistrement international. L'enregistrement international ne peut en effet pas être invoqué contre le tiers bénéficiant d'une période de transition pour l'empêcher de faire usage de la dénomination protégée en lien avec des produits auxquels l'AO ou l'IG s'applique et qui ne remplissent pas les conditions requises pour utiliser cette dénomination. Les modalités d'octroi d'une période de transition sont énoncées à la règle 14 du règlement d'exécution.

Une période de transition pourrait être accordée par l'IPI à un tiers lorsqu'il n'existe pas de motif de refus total ou de motif de refus partiel fondé sur une coexistence, par exemple lorsque le tiers utilise la dénomination sans l'avoir enregistrée comme marque. L'usage de bonne foi et antérieur à la date de publication de l'enregistrement international par le Bureau international devra être démontré.

L'octroi d'une période de transition est soumis au principe de disposition au sens de l'art. 58, al. 1, du code de procédure civile37 et une telle période
ne peut être accordée qu'à la demande du tiers concerné. Celui-ci devra en faire la demande, subsidiairement à une demande de refus ou indépendamment d'une demande de refus.

Al. 5: une marque déposée ou enregistrée de bonne foi pour un produit identique ou comparable au produit désigné par l'AO ou l'IG avant la date à laquelle la dénomination ou l'indication faisant l'objet de l'enregistrement international a été protégée en Suisse peut continuer à être utilisée sans respecter les conditions d'usage fixées par l'enregistrement international.

Ce droit est conféré directement par la loi, et conformément à l'art. 13, par. 1, de l'Acte de Genève, de sorte qu'il existe indépendamment d'une décision de l'IPI.

L'IPI peut néanmoins, dans le cadre d'une procédure ouverte par un tiers selon l'al. 3, constater la coexistence et prononcer un refus partiel des effets de l'enregistrement international. Ce droit peut être contesté en justice par les bénéficiaires 36

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Cf. message du 18 novembre 2009 relatif à la modification de la loi sur la protection des marques et à la loi fédérale sur la protection des armoiries de la Suisse et autres signes publics (projet «Swissness»), FF 2009 7711 7778 s.

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d'une IG ou d'une AO faisant l'objet d'un enregistrement international dont les effets n'auraient pas été refusés en Suisse au motif, par exemple, que le titulaire de la marque antérieure n'était pas de bonne foi.

Le début de la protection de l'AO ou de l'IG en Suisse peut être attaché à un acte bien défini (par ex. la conclusion d'un accord bilatéral ou l'enregistrement d'une AOP ou d'une IGP). Cette protection en Suisse peut également découler directement des art. 47, al. 1, et 48, al. 2 et 3 ss, LPM. Dans ce cas, il incombera au déposant, en cas de litige, de démontrer depuis quand l'AO ou l'IG est protégée en Suisse de par la LPM38.

L'al. 5 accorde aux titulaires de marques une garantie qui va au-delà de la protection minimale requise par l'art. 24, par. 5, de l'Accord sur les ADPIC. Cette disposition oblige en effet la Suisse à garantir au moins une coexistence entre l'indication géographique et la marque déposée ou enregistrée avant 1996 ou avant que l'indication géographique ne soit protégée dans son pays d'origine. L'al. 5 prévoit, conformément aux dispositions de l'art. 13, par. 1, de l'Acte de Genève et à l'art. 17 de l'Accord sur les ADPIC, une coexistence automatique aussi pour les marques déposées ou enregistrées de bonne foi avant la protection de la dénomination en Suisse, date qui sera généralement ultérieure à la protection dans le pays d'origine.

Al. 6: l'Acte de Genève et son règlement d'exécution détaillent les informations qui doivent être transmises au Bureau international en cas de refus des effets d'un enregistrement international (cf. commentaire de la règle 9 du règlement d'exécution).

L'OPM doit préciser les aspects de procédure relatifs aux interactions entre les administrés et l'IPI qui ne peuvent pas se déduire de l'Acte de Genève et de son règlement d'exécution. L'OPM réglera ainsi les exigences formelles liées à la procédure de demande de refus et d'octroi d'une période de transition. L'Acte de Genève oblige les États à mettre une telle procédure en place, mais son organisation est laissée à la libre appréciation des parties.

Il est prévu d'accorder à toute personne ayant un intérêt digne de protection au sens de l'art. 48 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative39 la possibilité de faire valoir, par écrit, devant l'IPI un motif de
refus de protection ou de demander une période de transition. Un canton pourra également faire valoir un motif de refus de protection si l'enregistrement international porte sur une dénomination totalement ou partiellement homonyme à un nom de lieu de ce canton ou une dénomination traditionnelle utilisée en Suisse. Le délai prévu pour faire valoir ces motifs ou pour demander une période de transition est de trois mois suivant la date de publication de la demande d'enregistrement. Cette durée correspond au délai prévu aux art. 10, al. 2, de l'ordonnance sur les AOP-IGP agricoles et 9, al. 2, de l'ordonnance sur les AOP-IGP non agricoles. Les enregistrements internationaux sont publiés par le Bureau international, qui les notifie à l'IPI (art. 6, par. 4, de l'Acte de Genève et règle 19 du règlement d'exécution). L'ordonnance prévoira toutefois la possibilité pour l'IPI de publier également ces enregistrements.

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39

Cf. message du 18 novembre 2009 relatif à la modification de la loi sur la protection des marques et à la loi fédérale sur la protection des armoiries de la Suisse et autres signes publics (projet «Swissness»), FF 2009 7711 7779.

RS 172.021

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Ces règles de procédure pourront être calquées sur les procédures existantes pour les oppositions en matière d'enregistrement de marques, en ce qui concerne les conditions formelles (art. 20 OPM), l'échange d'écritures (art. 22 OPM), la pluralité de procédures à l'encontre d'un même enregistrement (art. 23 OPM) et l'éventuelle restitution de la taxe (art. 24 OPM).

Art. 50f

Taxes

L'article 50f instaure le régime des taxes perçues par l'IPI pour les procédures relatives à l'enregistrement international des AO et des IG suisses et aux effets des enregistrements internationaux sur le territoire suisse. Cette disposition permet à l'IPI, avec l'approbation du Conseil fédéral, de fixer leur montant par le biais de l'ordonnance de l'IPI du 14 juin 2016 sur les taxes40.

Let. a: en raison du nombre relativement modeste d'AO et d'IG suisses qui feront l'objet d'une demande d'enregistrement international et du fait que ces AO et IG suisses ont déjà, en principe, subi un examen quant au fond, l'IPI renoncera, dans un premier temps du moins, au prélèvement d'une taxe nationale pour la transmission de ces demandes au Bureau international.

Let. b: la Suisse renoncera également, dans un premier temps du moins, à faire usage de la possibilité que lui donne l'art. 7, par. 4, de l'Acte de Genève de prélever une taxe individuelle auprès du déposant ou des bénéficiaires de l'AO ou de l'IG étrangère, servant à couvrir le coût de l'examen par l'IPI de l'enregistrement international quant au fond. Il importe de souligner que le montant de cette taxe ne peut pas, conformément à l'art. 7, par. 4, de l'Acte de Genève, dépasser le montant exigé en vertu de la législation nationale pour l'enregistrement d'une AOP ou d'une IGP. Or, en Suisse, l'enregistrement des AOP et IGP de produits agricoles et de produits agricoles transformés auprès de l'OFAG ne donne pas lieu au paiement d'une taxe.

La Suisse ne pourrait donc pas demander une taxe individuelle pour les AO et les IG de produits agricoles et de produits agricoles transformés, qui constituent la plus grande partie des enregistrements internationaux. Il n'est toutefois pas exclu que l'IPI fasse usage de la compétence donnée par la présente disposition et que la Suisse notifie ultérieurement le prélèvement d'une telle taxe.

Let. c et d: une taxe sera prélevée pour la procédure permettant à un tiers de demander à l'IPI que les effets d'un enregistrement soient refusés par la Suisse ou qu'une période de transition lui soit octroyée (art. 50c, al. 3, P-LPM). Une telle procédure, qui s'apparente à une procédure d'opposition en droit des marques, requerra de l'IPI un examen quant au fond et à la forme, un ou plusieurs échanges d'écriture et la préparation
d'une décision. Compte tenu de la nature relativement fastidieuse de cette tâche, et afin d'éviter les demandes fantaisistes ou chicanières, il est prévu de soumettre cette procédure à une taxe, d'un montant identique à celui de la taxe d'opposition en matière de marques, à savoir 800 francs. Les règles relatives à la restitution de la taxe seront identiques à celles prévues en matière d'opposition contre une marque (cf. art. 24 OPM). Comme indiqué dans le commentaire de la

40

RS 232.148

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let. b, l'examen d'office par l'IPI des enregistrements internationaux ne fait pas l'objet d'une taxe due par le déposant de l'AO ou de l'IG étrangère.

Les taxes perçues par le Bureau international sont énumérées de manière exhaustive dans l'Acte de Genève (voir commentaire de l'art. 7). Pour cette raison, il n'en est pas fait mention dans la loi. Ces taxes, notamment la taxe unique de dépôt, doivent être versées par les bénéficiaires eux-mêmes au Bureau international (voir commentaire de la règle 8 du règlement d'exécution). L'IPI n'intervient pas dans le prélèvement de ces taxes.

7 Conséquences de l'accord et de l'acte de mise en oeuvre 7.1 Conséquences pour la Confédération 7.1.1 Conséquences financières Les coûts d'administration de l'Arrangement de Lisbonne sont actuellement couverts par les ressources de l'OMPI. Ce devrait aussi être le cas, en principe, pour l'Acte de Genève. Néanmoins, le financement des systèmes internationaux d'enregistrement fait l'objet de discussions au sein de l'OMPI, certains pays considérant que chaque système devrait avoir un budget équilibré, c'est-à-dire que les dépenses de chaque système devraient être entièrement couvertes par les taxes perçues et, si nécessaire, par les contributions spéciales des membres du système en question.

Dans cette hypothèse, les contributions spéciales des membres seraient calculées selon une répartition pondérée en fonction des différentes classes de contribution générale au budget de l'OMPI (voir commentaire de l'art. 24 de l'Acte de Genève) et, éventuellement, selon le nombre d'enregistrements internationaux de chaque membre. En principe, plus les membres de l'Union de Lisbonne seraient nombreux, moins le montant des contributions spéciales de chaque membre serait élevé.

Si, à l'avenir, un tel changement, qui impliquerait que les membres de l'Union de Lisbonne couvrent les coûts d'administration du système par des contributions spéciales, devait intervenir, il faudrait compter, dans la configuration la moins favorable, sur une contribution bisannuelle pouvant se monter jusqu'à 150 000 francs pour la Suisse. Le cas échéant, cette contribution serait couverte à parts égales par l'OFAG et l'IPI. La part qui serait financée par l'OFAG serait couverte par son propre budget. L'IPI, en tant qu'unité décentralisée de la Confédération, tient sa propre comptabilité et couvre entièrement ses dépenses par les taxes perçues sur les titres de protection.

7.1.2 Conséquences sur l'état du personnel Aucune augmentation du personnel de l'OFAG n'est prévue. D'une part, il est très vraisemblable que, pour les IG des parties contractantes de l'Acte de Genève, il soit plus intéressant d'obtenir la protection en Suisse au moyen de l'enregistrement international plutôt qu'au moyen d'une demande d'enregistrement dans un des deux registres nationaux des AOP et IGP. Par conséquent, la charge de travail que repré5695

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sente le traitement des demandes d'enregistrement d'AOP et d'IGP étrangères (une demande d'enregistrement directe d'une IGP a été acceptée par l'OFAG en 2013 pour Café de Colombia) devrait diminuer. D'autre part, l'administration de l'Acte de Genève pour la Suisse (transmission des demandes d'enregistrement international préparées par les interprofessions, les cantons ou les titulaires et décisions concernant les effets des enregistrements internationaux étrangers) sera assumée par l'IPI et n'aura donc pas de conséquences sur l'état du personnel de la Confédération.

7.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne Le message du 27 juin 1995 concernant le paquet agricole 9541 le relevait déjà: «donner la possibilité aux producteurs et aux transformateurs d'utiliser un nom géographique pour leurs produits est un élément central de la dynamique du développement des régions rurales.» Le territoire géographique d'un grand nombre d'AOP et d'IGP se situe exclusivement dans des régions de montagne (par ex. L'Étivaz, Glarner Alpkäse) ou comprend des régions de montagne (par ex.

Vacherin Mont-d'Or, Sbrinz). L'adhésion prévue de la Suisse à l'Acte de Genève contribue par conséquent au maintien de l'activité économique dans ces régions, ce qui profite également aux communes et aux cantons concernés.

Comme pour les autres systèmes internationaux d'enregistrement des droits de propriété intellectuelle, la participation de la Suisse au système de Lisbonne n'entraînera pas de conséquences financières ni de conséquences sur l'état du personnel pour les cantons.

7.3 Conséquences économiques 7.3.1 Nécessité et possibilité d'une intervention de l'État La fonction économique des IG est similaire à celle des marques, à savoir donner aux consommateurs une indication sur la qualité, mais aussi, plus précisément, sur la provenance d'un produit. Si elles n'étaient pas protégées, des tiers qui n'ont pas contribué à la bonne réputation des diverses dénominations pourraient en tirer indûment parti. Dans le cas particulier des IG, il existe en outre le risque, qu'en l'absence de protection elles deviennent génériques, autrement dit que la dénomination géographique perde le lien avec le lieu et devienne un nom générique. «Camembert» ou «saucisse de Vienne» en sont des exemples typiques. Sans protection, il n'y aurait plus d'incitation à investir dans la réputation et par conséquent dans la qualité des produits. La conséquence en serait une défaillance du marché: un produit de haute qualité qui ordinairement génère une grande valeur ajoutée disparaîtrait du marché.

Grâce aux titres de protection tels que les marques ou les IG, il est possible de pallier en grande partie ce genre de dysfonctionnement. Tout comme la protection des 41

FF 1995 IV 621 646

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marques, celle des IG engendre cependant des coûts tant pour l'État que pour les producteurs des produits en question. Ces coûts sont en partie imputables à la validité territoriale de ces titres. S'il faut étendre la protection d'une IG protégée en Suisse à dix autres pays, il est généralement nécessaire d'engager dix autres procédures, à chaque fois dans la langue nationale du pays où la protection est requise. Il se peut donc que le coût de toutes ces procédures additionnées en vue de l'obtention de la protection visée s'avère trop élevé. Les marchés d'exportation sont alors laissés à la merci des resquilleurs sans qu'il soit possible d'intervenir juridiquement; il se peut aussi qu'une IG y soit perçue, au fil du temps, comme un nom générique, et que rien ne puisse être entrepris pour enrayer ce phénomène.

En vue de réduire les coûts élevés induits par l'obtention de la protection nationale dans plusieurs États, des procédures d'enregistrement international ont été introduites pour les autres titres de protection comme les marques, les designs ou les brevets. Elles permettent de requérir une protection sur le territoire de tous les États membres (ou d'une partie d'entre eux) moyennant un seul dépôt auprès d'un bureau centralisé, l'OMPI. Cette possibilité existe pour les brevets sur la base du Traité de coopération du 19 juin 1970 en matière de brevets (PCT)42, pour les marques sur celle de l'Arrangement de Madrid du 15 juin 1957 concernant l'enregistrement international des marques de fabrique ou de commerce43 ou du Protocole du 27 juin 1089 relatif à l'Arrangement de Madrid concernant l'enregistrement international des marques44 et pour les designs sur celle de l'Arrangement de La Haye du 28 novembre 1960 concernant le dépôt international des dessins ou modèles industriels45. L'objectif de l'adhésion de la Suisse à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne est de faire bénéficier les ayants droit suisses de la protection internationale aussi dans le domaine des IG afin de réduire les contraintes d'ordre bureaucratique et par conséquent les coûts et de protéger les IG suisses de l'usage abusif également sur les marchés étrangers. L'adhésion est dès lors pertinente si les bénéfices qui en résultent en termes d'efficacité l'emportent sur les coûts supplémentaires qu'elle occasionne.

7.3.2 Conséquences pour les différents groupes de la société Producteurs suisses L'adhésion à l'Acte de Genève, avec son enregistrement international moins onéreux, est avantageuse pour les producteurs suisses, notamment dans les marchés pour lesquels un enregistrement national serait peu rentable en raison des modestes volumes de ventes escomptés ou dans lesquels l'enregistrement de l'IG a comme objectif premier d'éviter le risque qu'elle ne devienne générique. Elle facilitera aussi l'accès à une stratégie d'internationalisation pour les producteurs qui ne réalisaient pas d'exportations jusqu'ici et qui n'avaient, de ce fait, pas encore requis la protection de leur IG à l'étranger.

42 43 44 45

RS 0.232.141.1 RS 0.232.112.2 RS 0.232.112.4 RS 0.232.121.2

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L'adhésion de la Suisse n'entraîne pas de coûts administratifs ou d'adaptation supplémentaires pour les entreprises, à l'exception des éventuels frais d'examen que les divers États parties à l'Arrangement de Lisbonne pourraient appliquer. Or les entreprises encourraient également ces coûts (qui seraient souvent même plus élevés) dans le cas d'un enregistrement national direct. Il n'est en outre pas impossible que l'on assiste à des processus de substitution sur le marché indigène. Il se peut en effet que, suite à l'adhésion de la Suisse à l'Arrangement de Lisbonne, de plus en plus de produits étrangers bénéficiant d'une IG reconnue soient proposés sur le marché suisse et qu'ils viennent se substituer à des marchandises haut de gamme.

Selon les indications de l'Association suisse des AOP-IGP, en 2016, 21 produits étaient enregistrés en tant qu'AOP et 12 en tant qu'IGP. Le chiffre d'affaires (sortie unité de transformation) s'élevait à près de 900 millions de francs, soit une part de près de 3 % de la valeur de production brute totale de l'industrie des denrées alimentaires suisses pour cette année-là. Le produit de loin le plus important était le fromage qui a permis de dégager plus des trois quarts de l'ensemble du chiffre d'affaires (sortie unité de transformation). Près de la moitié de la quantité de fromage AOP produit était destinée à l'exportation. La part du volume des exportations de fromages AOP sur l'ensemble des quantités de fromage exportées (AOP et nonAOP) comparables se montait aussi à la moitié environ. Les fromages AOP suisses (tels que Gruyère, Tête de Moine, Fromage de Bellelay ou Emmentaler) sont confrontés, sur divers marchés, à des imitations et courent le risque que leur appellation devienne générique. Sur de nombreux marchés d'exportation, les chiffres de ventes sont encore faibles; l'enregistrement, puis la défense des droits s'avèrent par conséquent relativement onéreux. Il peut cependant valoir la peine d'investir dans la protection de l'IG sur ce genre de marchés si les coûts relatifs à l'enregistrement baissent considérablement grâce à l'Acte de Genève. Un enregistrement via cet instrument est significativement plus économique qu'une procédure selon le droit national, et plus le nombre de pays participants sera important plus le système sera avantageux. D'après les
informations de l'Interprofession du Gruyère, la procédure d'enregistrement de l'indication géographique dans un pays tiers dure en moyenne trois ans et coûte environ 10 000 francs (charges de personnel, traductions, taxes d'enregistrement, etc.). Un enregistrement international par le biais de l'Acte de Genève ne coûte que 1000 francs de taxes internationales de dépôt auprès de l'OMPI, et on estime à 2000 francs les coûts internes pour l'interprofession en question et les éventuelles taxes d'inscription dans les pays de protection indiqués.

Dans un scénario qui repose sur l'idée que 15 États adhèrent à l'Acte de Genève et que la Suisse a déjà conclu un accord bilatéral avec 5 d'entre eux (ou que l'interprofession correspondante a déjà acquis un enregistrement individuel dans ces pays), les charges d'enregistrement résultant dans les 10 autres États s'élèveraient à 3000 francs en tout, soit 300 francs par pays (= 1000 francs de taxe d'enregistrement +2000 francs de coûts internes) / 10). Ce montant équivaut seulement à 3 % des coûts décrits plus haut de 10 000 francs par indication géographique et pays. Les coûts par pays baissent encore avec chaque pays qui adhère à l'Acte de Genève avec qui il n'existe pas encore d'accord bilatéral ou individuel correspondant.

L'Acte de Genève présente un grand potentiel également pour l'industrie horlogère, qui pourrait bénéficier d'une protection internationale plus avantageuse de son IG «Swiss». En 2017, les sociétés membres de la FH ont enregistré un chiffre 5698

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d'affaires de 13,9 milliards de francs dans les dix marchés d'exportation les plus importants (dont 4,6 milliards de francs aux États-Unis et à Hong Kong), soit plus des deux tiers des exportations mondiales46. L'autre tiers de 6,1 milliards de francs environ était dégagé dans d'autres parties du monde. La FH peut non seulement déposer une marque géographique en Suisse par exemple, ce qui ne devrait pas constituer une charge trop lourde en raison de l'ordonnance de branche en vigueur, mais aussi faire protéger l'IG «Swiss» par le biais du système international de Lisbonne dans tous les États parties à cet arrangement. Pour l'heure, la FH possède des marques de garantie correspondantes uniquement aux États-Unis et à Hong Kong, les deux plus grands marchés d'écoulement de ses membres. Leur dépôt, notamment aux États-Unis, s'est avéré très coûteux en temps et en argent. La FH examine actuellement la possibilité d'enregistrer la marque de garantie ou collective «Swiss» dans l'UE, qui réunit, avec l'Italie, l'Allemagne et la France, quelques marchés d'exportation parmi les dix plus importants. L'Acte de Genève proposant des coûts d'enregistrement inférieurs par rapport au système de Madrid, il sera avantageux pour l'industrie horlogère de protéger ses IG non seulement dans les principaux marchés d'écoulement mentionnés, mais aussi dans les pays dans lesquels les chiffres d'affaires sont actuellement moins élevés. Pour l'industrie horlogère suisse, l'Inde constitue par exemple un fort potentiel de croissance, mais aussi un grand défi en ce qui concerne l'utilisation abusive de l'IG «Swiss» pour les montres. L'Acte de Genève représente dès lors aussi pour les fabricants de montres suisses un moyen simple de se protéger au plan international contre les resquilleurs, à condition que le pays concerné adhère également à l'acte, et de mieux exploiter le potentiel commercial.

Régions rurales Comme l'expose le message concernant le paquet agricole 95 (cf. ch. 7.2), le système d'enregistrement des IG vise, entre autres, à préserver et à créer des emplois dans des régions structurellement faibles, notamment les régions rurales. L'Association suisse des AOP-IGP estime le nombre de places de travail à 15 000 (à plein temps le long de la chaîne de valeur ajoutée)47. Au total, près de 8 % des personnes employées dans
l'agriculture et dans l'industrie alimentaire étaient donc impliquées dans la production de produits bénéficiant d'une AO ou d'une IG48. Une majorité de ces emplois sont effectivement implantés dans des régions rurales structurellement faibles et présentent un lien fort avec l'agriculture. L'industrie horlogère emploie cependant aussi près de 55 000 personnes49, en grande partie dans l'arc jurassien, dont les structures sont peu développées (91 % des personnes actives dans l'industrie horlogère et microtechnique travaillent dans les cantons de NE, BE, GE, JU, VD

46

47 48 49

Cf. chiffres des exportations de la FH. Les dix marchés enregistrant les meilleures ventes sont Hong Kong, les États-Unis, la Chine, la Grande-Bretagne, le Japon, l'Italie, Singapour, l'Allemagne, la France et les Émirats arabes unis.

Association suisse des AOP-IGP, Les AOP & IGP suisses: regards sur 20 ans d'expériences, 2017 Source: Office fédéral de la statistique (OFS), Statistique structurelle des entreprises STATENT Cf. convention patronale de l'industrie horlogère suisse (2018): Personalund Betriebszählung der Schweizerischen Uhren- und mikrotechischen Industrie 2017

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et SO)50. C'est pourquoi la simplification de la protection internationale des IG suisses et par conséquent la possibilité d'expansion des marchés d'écoulement soutiendra les efforts tendant à renforcer l'attrait des régions périphériques.

Consommateurs Les consommateurs sont généralement prêts à payer plus pour des marchandises de qualité, pour celles de provenance suisse, mais aussi pour des produits d'autres régions du monde51. Les IG aident les consommateurs à reconnaître plus facilement les produits de haute qualité parmi une offre large. Grâce à l'augmentation escomptée de produits étrangers de qualité assortis d'une IG, l'offre de ce genre de produits s'enrichira. Les coûts de recherche de produits de qualité, quant à eux, baisseront grâce à l'étiquetage correspondant. L'adhésion à l'Acte de Genève profitera ainsi aux consommateurs, tout en diminuant leurs coûts de transaction.

D'un autre côté, les produits munis abusivement d'une IG, souvent moins onéreux, disparaîtront du marché suisse ou devront être nommés d'une autre manière. Ainsi, il a par exemple fallu retirer du marché, depuis le 1er décembre 2016, tous les fromages dénommés «Feta» non conformes au cahier des charges de l'AOP ou les vendre sous une autre dénomination en raison de l'accord bilatéral conclu avec l'UE dans le domaine des AOP et IGP. La protection conférée par l'Acte de Genève aurait un effet similaire. Il n'existe pas d'études scientifiques ayant pour objet cet effet de substitution. On peut cependant supposer que les effets négatifs sur les consommateurs seront relativement faibles (accoutumance à la nouvelle dénomination du produit consommé jusque-là, abandon de celui-ci ou coûts supplémentaires pour le produit original), d'autant plus que le marché global des produits à indications géographiques protégées demeurera, à l'avenir aussi, un marché de niche. De plus, l'exclusion des produits contrefaits et des resquilleurs prévient le risque de tromperie du consommateur.

C'est pourquoi le bilan de l'adhésion à l'Acte de Genève sera probablement aussi positif pour les consommateurs.

Administration L'Acte de Genève propose un cadre juridique consolidé pour l'extension de la protection des IG à tous les États membres de l'arrangement. L'adhésion de la Suisse à cet instrument rendrait superflue la négociation de traités
bilatéraux en vue de l'obtention d'une protection avec ces États puisqu'il sera possible, au lieu de cela, d'avoir recours au registre et à la protection proposés par le système de Lisbonne.

Étant donné que la négociation d'un accord bilatéral coûte environ 250 000 francs, l'Acte de Genève permet également de réduire les coûts de l'administration.

Comme présenté sous ch. 6.1.1, il est cependant possible que la Confédération doive faire face à des coûts supplémentaires, notamment la contribution qu'elle devrait éventuellement apporter aux coûts fixes du système de Lisbonne. Celle-ci dépend 50 51

Cf. convention patronale de l'industrie horlogère suisse (2018): Personalund Betriebszählung der Schweizerischen Uhren- und mikrotechischen Industrie 2017 Cf. par ex. Brändle Schlegel, Nicole; Gachet, Émilie (2012): Les moteurs de croissance de l'industrie suisse. In: La Vie économique 5/2012, p. 10 à 13

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essentiellement du nombre d'États adhérant à l'Acte de Genève. Dans un tel scénario, des dépenses d'environ 75 000 francs par année pourraient grever le budget de la Confédération.

Au final, le bilan devrait être positif aussi pour les contribuables. S'agissant des accords bilatéraux, l'administration pourrait se concentrer sur les pays qui ne participent pas au système de Lisbonne, épargnant ainsi des ressources non négligeables.

Il ne faut en outre pas oublier que la contribution à verser par chaque État membre pour couvrir les frais fixes diminue avec chaque nouvel État adhérant.

7.3.3 Conséquences pour l'économie dans son ensemble Les analyses pour les différents groupes concernés mettent en évidence que l'adhésion de la Suisse à l'Acte de Genève de l'Arrangement de Lisbonne devrait permettre un gain d'efficience pour chacun d'eux et, du moins à moyen terme, des économies considérables pour les secteurs public et privé. Pour les producteurs, les coûts substantiellement réduits devraient largement contrebalancer les éventuels effets de substitution provoqués par les nouveaux produits étrangers à indication géographique de haute qualité arrivant sur le marché suisse. Les consommateurs profiteraient d'une offre plus large de produits indigènes et étrangers de haute qualité tout en bénéficiant d'une réduction du risque de tromperie et d'utilisations abusives. Pour les régions rurales également, l'adhésion est un atout car elle étend les possibilités d'exportation des producteurs, qui, dans le cas des produits à indications géographiques sont pour la plupart des PME rurales. De plus, l'administration pourrait ainsi, à l'avenir, concentrer ses ressources sur la négociation d'accords bilatéraux avec des États ne souhaitant pas adhérer à l'Arrangement de Lisbonne pour des raisons de systématique, mais qui représentent toutefois des marchés d'écoulement importants pour les producteurs suisses.

L'adhésion à l'Acte de Genève apporte ainsi de multiples avantages à une petite économie ouverte comme la Suisse, qui est tributaire de conditions favorables pour l'exportation de ses produits. Plus le nombre de pays adhérant à l'acte est grand, plus les coûts fixes incombant à la Confédération diminueront et plus les producteurs de produits à indication géographique pourront en tirer des bénéfices.

8 Aspects juridiques 8.1 Constitutionnalité Aux termes de l'art. 54, al. 1, de la Constitution (Cst.)52, les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. Le Conseil fédéral est compétent pour signer et ratifier des traités internationaux (art. 184, al. 2, Cst.). Il les soumet à l'approbation de l'Assemblée fédérale conformément à l'art. 166, al. 2, Cst., sauf si la conclusion du traité relève de sa seule compétence en vertu d'une loi ou d'un traité international (cf. art. 24, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parle52

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ment53 et 7a, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration 54). Cette dernière condition n'est pas remplie. Il appartient donc à l'Assemblée fédérale d'approuver le présent traité.

Selon l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités internationaux sont sujets au référendum s'ils sont d'une durée indéterminées et ne sont pas dénonçables (ch. 1), prévoient l'adhésion à une organisation internationale (ch. 2) ou contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exiges l'adoption de lois fédérales (ch. 3). L'Acte de Genève peut être dénoncé à tout moment (art. 32).

Tout État partie à la Convention de Paris ou membre de l'OMPI peut devenir partie au traité (art. 28). La Suisse étant membre de l'OMPI depuis le 26 avril 1970, elle peut adhérer à ce traité et cette adhésion n'implique pas l'adhésion à une organisation internationale. Néanmoins, l'Acte de Genève permet aux bénéficiaires d'une AO ou d'une IG faisant l'objet d'un enregistrement international de bénéficier sur le territoire suisse de la protection conférée par ce traité. Il peut donc conférer des droits et créer des devoirs pour des particuliers. Les conditions de l'art. 141, al. 1, let. d, ch.3 Cst. sont ainsi remplies. Par conséquent, l'arrêté fédéral portant approbation de l'Acte de Genève est sujet au référendum.

Selon l'art. 141a Cst., lorsque l'arrêté portant approbation d'un traité international est sujet au référendum, l'Assemblée fédérale peut y intégrer les modifications constitutionnelles ou législatives liées à la mise en oeuvre du traité55. Cette disposition n'est pas limitée à la législation d'application obligatoire, mais comprend toutes les modifications législatives visant à mettre en oeuvre le traité56. En l'occurrence, les art. 50c à 50f P-LPM permettent la mise en oeuvre de l'Acte de Genève sur le territoire suisse. En l'occurrence, les modifications proposées présentent une connexité objective avec l'Acte de Genève et elles découlent directement des obligations que prévoit ce dernier. Aussi a-t-il été décidé d'intégrer le projet de l'acte de mise en oeuvre à l'acte d'approbation plutôt que de le soumettre au référendum sous la forme d'un texte distinct.

La compétence de la Confédération pour légiférer en matière d'indications géographiques est déduite de l'art. 122 Cst.

8.2 Compatibilité avec les autres obligations internationales de la Suisse L'Acte de Genève est compatible avec les obligations de la Suisse dans le cadre de l'OMC et avec ses autres obligations internationales, en particulier avec les obligations découlant des annexes 7, 8 et 12 de l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédé-

53 54 55 56

RS 171.10 RS 172.010 Message du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale, FF 1997 I 1 478 Message du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale, FF 1997 I 1 478)

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ration suisse et la Communauté européenne relatif aux échanges de produits agricoles57.

8.3 Frein aux dépenses Le projet ne prévoit ni subventions ni crédits d'engagement ou plafonds de dépenses qui entraîneraient une nouvelle dépense unique de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs. Il n'est donc pas soumis au frein aux dépenses.

8.4 Délégation de compétences législatives Les art. 50d al. 2, et 50e, al. 7, P-LPM attribuent au Conseil fédéral la compétence de régler par voie d'ordonnance les procédures liées à l'enregistrement des AO et des IG dont l'aire géographique d'origine est située sur le territoire suisse dans le registre international de l'OMPI ainsi que les procédures d'octroi et de refus des effets des enregistrements internationaux. Grâce à la délégation de compétence, le Conseil fédéral dispose de la souplesse nécessaire pour adapter la réglementation au niveau de l'ordonnance à la mise en oeuvre de l'Acte de Genève, autrement dit à l'enregistrement international dans la pratique.

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RS 0.916.026.81

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