20.071 Message concernant la modification de la loi sur les espèces protégées du 18 septembre 2020

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi sur les espèces protégées, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer l'intervention parlementaire suivante: 2016

M 15.3958

Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées (N 15.3.2016, Barazzone; É 13.12.2016)

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 septembre 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2020-0530

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Condensé La présente modification de la loi fédérale sur la circulation des espèces de faune et de flore protégées (LCITES) met en oeuvre la motion 15.3958 Barazzone «Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées». Elle prévoit également d'améliorer et d'actualiser ponctuellement la loi.

Contexte Le Parlement a adopté le 13 décembre 2016 la motion 15.3958 Barazzone «Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées», qui charge le Conseil fédéral de présenter une modification de la LCITES durcissant les sanctions pénales.

Objet La révision a pour objectif de renforcer les sanctions pénales prévues dans la LCITES, répondant ainsi à la demande formulée dans la motion Barazzone. Les infractions intentionnelles seront à l'avenir considérées comme des délits, et non plus comme des contraventions. S'agissant des infractions commises par métier ou en qualité d'affilié à une bande, elles constitueront des crimes et du même coup des infractions préalables au blanchiment d'argent.

La loi est également améliorée et actualisée ponctuellement à la faveur de cette révision. Ces modifications portent avant tout sur la compétence d'édicter des interdictions d'importer, l'obligation d'informer imposée aux personnes qui proposent publiquement à la vente des spécimens d'espèces protégées et l'obligation pour les établissements d'élevage de tenir un registre. Elles prévoient par ailleurs de simplifier la procédure de contrôle pour les organes qui sont chargés de cette tâche.

Le projet n'a aucune conséquence pour la Confédération et les cantons et ses conséquences économiques sont minimes.

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

La Suisse est partie à la Convention du 3 mars 1973 sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES)1 depuis 1975. Cette convention contient trois annexes énumérant les animaux et les plantes concernés: les espèces menacées d'extinction (annexe I), les espèces menacées (annexe II), et les espèces protégées par certains États parties (annexe III).

L'importation et l'exportation des spécimens d'espèces menacées d'extinction restent uniquement possibles dans des cas exceptionnels; pour les autres espèces, elles sont contrôlées.

Ce sont en moyenne 1,4 million de plantes (surtout des cactus et des orchidées) et environ 1000 animaux vivants protégés par la CITES qui sont importés chaque année en Suisse. En ce qui concerne les spécimens transformés, la Suisse importe annuellement environ 1 million de bracelets de montres, 60 000 paires de chaussures (avant tout en peau de serpent) et 10 tonnes de caviar.

Les obligations qui découlent de la CITES sont concrétisées dans la loi fédérale du 16 mars 2012 sur la circulation des espèces de faune et de flore protégées (LCITES) 2 et dans deux ordonnances (ordonnance du 4 septembre 2013 sur la circulation des espèces de faune et de flore protégées [OCITES] 3 et ordonnance du 4 septembre 2013 sur les contrôles CITES4).

La motion 15.3958 Barazzone «Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées», adoptée par le Parlement le 13 décembre 2016, charge le Conseil fédéral de durcir les sanctions pénales prévues par la LCITES. La présente révision, qui découle de ce mandat, prévoit d'autres modifications ponctuelles de la LCITES. Celles-ci portent avant tout sur la compétence d'édicter des interdictions d'importer, l'obligation d'informer imposée aux personnes qui proposent publiquement à la vente des spécimens d'espèces protégées et l'obligation pour les établissements d'élevage de tenir un registre. Elles prévoient par ailleurs, de simplifier la procédure de contrôle pour les organes chargés de cette tâche.

1 2 3 4

RS 0.453 RS 453 RS 453.0 RS 453.1

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1.2

Relation avec le programme de la législature, avec la planification financière et avec les stratégies du Conseil fédéral

Bien que le projet ne soit pas annoncé dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 20235, il est cependant jugé nécessaire. En effet, le Conseil fédéral a été chargé de durcir les sanctions pénales prévues dans la LCITES par la motion 15.3958 Barazzone «Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées», adoptée par le Parlement.

Le projet n'est pas en contradiction avec les stratégies du Conseil fédéral.

1.3

Classement d'interventions parlementaires

La modification de la LCITES permet de concrétiser la motion 15.3958 Barazzone «Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées», qui peut donc être classée.

2

Procédure de consultation

Le Conseil fédéral a ouvert le 14 août 2019 la procédure de consultation sur la présente modification de la LCITES, qui a duré jusqu'au 20 novembre 2019. Le projet a été soumis aux cantons, aux partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale, aux associations faîtières nationales des communes, des villes et des régions de montagne ainsi qu'aux associations faîtières de l'économie et aux milieux intéressés.

L'OSAV a reçu 49 avis émanant de 23 cantons, 5 partis politiques et 21 milieux et organisations intéressés. Le rapport sur les résultats de la consultation est en ligne sur la page suivante: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2019 > DFI.

La grande majorité des participants à la consultation s'est félicitée des modifications proposées. Divers participants ont soulevé des questions et proposé de modifier ou de préciser le texte de loi.

En ce qui concerne les dispositions pénales, les organisations de protection des animaux et de l'environnement ont proposé d'augmenter la peine privative de liberté maximale d'un an à trois ou quatre ans pour les délits et le montant maximal de l'amende de 10 000 à 20 000 francs pour les infractions par négligence. Pour les crimes, elles estiment qu'une peine minimale de six mois est appropriée. Elles considèrent par ailleurs que la poursuite des personnes accusées de crime devrait être du ressort des autorités pénales cantonales, et non de l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV). Souhaitant que la LCITES tienne aussi compte d'aspects relevant de la protection des animaux, ces mêmes organisations ont réclamé une interdiction d'importer des produits provenant 5

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d'animaux ayant subi des mauvais traitements. Les demandes de durcissement des peines n'ont été prises en considération que pour les délits commis par négligence, ces derniers étant d'ores et déjà poursuivis selon le droit en vigueur par une amende pouvant atteindre 20 000 francs. L'avant-projet a été modifié sur ce point. Il n'apparaît en revanche pas judicieux d'augmenter la peine privative de liberté à trois ans pour les infractions de base visées à l'art. 26, al. 1, celles-ci étant majoritairement des violations d'obligations (de déclaration, d'autorisation, d'enregistrement) qui ne justifient pas une telle peine. En outre, étant donné qu'en vertu de la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif6, la compétence des autorités administratives fédérales s'étend également aux crimes, l'idée de prévoir une compétence différente (cantonale) pour les sanctionner n'a pas non plus été retenue.

Enfin, la demande relevant de la protection des animaux ne correspond pas à l'objectif de la LCITES puisque la convention qu'elle met en oeuvre constitue un accord commercial conclu dans l'intérêt de la conservation des espèces.

Les représentants de la branche ont proposé de ne pas sanctionner les infractions qui concernent les spécimens dont l'importance pour la conservation des espèces est mineure (comme les animaux d'élevage ou les plantes reproduites artificiellement) ou de les punir seulement de l'amende. Ils ont également préconisé certaines simplifications des autorisations à produire et des preuves à apporter pour ces spécimens.

La législation CITES contenant déjà des dispositions sur les exceptions aux autorisations et preuves obligatoires et les nouvelles dispositions pénales prévoyant une amende pour les cas de peu de gravité (voir les explications concernant l'art. 26 au ch. 5), les demandes de la branche sont partiellement satisfaites. Dans l'intérêt de la conservation des espèces, le projet ne prévoit pas d'autres simplifications.

Si l'obligation d'informer à laquelle sont soumises les personnes qui proposent publiquement à la vente des animaux et des plantes d'espèces protégées a été bien accueillie, certains cantons ont émis des réserves quant aux contrôles. Ils ont par ailleurs relevé que cette obligation d'informer s'applique seulement aux plateformes internet situées en
Suisse et exigent que l'OSAV s'investisse à l'échelle internationale pour que cette exigence soit également imposée aux plateformes étrangères.

Cette demande sera prise en considération autant que possible dans les dispositions d'exécution.

6

RS 313.0

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3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Le projet est conforme au droit de l'Union européenne (UE). La CITES s'applique en effet depuis 1984 à tous les États membres de l'UE, qui la mettent en oeuvre conformément au règlement (CE) no 338/977 et au règlement (CE) no 865/20068 et ont également compétence pour édicter des dispositions pénales. Les sanctions prévues par les pays voisins de la Suisse pour les infractions à la CITES sont actuellement plutôt plus sévères que celles de la Suisse. La présente révision permet pour l'essentiel d'aligner les sanctions de la Suisse sur celles des pays voisins.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

La LCITES a été adoptée par le Parlement le 16 mars 2012 et est entrée en vigueur le 1er octobre 2013. Le présent projet vise à durcir les sanctions pénales de la LCITES, en application de la motion 15.3958 Barazzone «Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées», adoptée par le Parlement le 13 décembre 2016. L'infraction de base à la LCITES ne sera plus considérée comme une contravention, mais comme un délit (art. 26, al. 1). Il est prévu de considérer l'infraction comme un crime lorsqu'elle porte sur un grand nombre de spécimens d'espèces protégées ou que l'auteur agit par métier ou en qualité d'affilié à une bande formée pour commettre des infractions (art. 26, al. 2).

Il est également prévu d'étendre la compétence du Conseil fédéral d'édicter, dans certaines circonstances, des interdictions d'importer les spécimens d'espèces de faune et de flore qui peuvent être facilement confondues avec celles figurant dans les annexes I à III CITES (art. 9, al. 1). De plus, il appartiendra non plus au Département fédéral de l'intérieur (DFI), mais à l'OSAV d'interdire à titre temporaire, sur recommandation des organes de la CITES, l'importation de certains spécimens en cas d'infraction prouvée à la CITES. Mettre en oeuvre les interdictions dans la législation suisse revient en effet à transposer une décision des États parties (art. 9, al. 2). Les organes de la CITES dont la Suisse fait partie sont la Conférence des Parties, le Comité pour les animaux, le Comité pour les plantes et le Comité permanent.

Par ailleurs, les établissements qui font l'élevage à titre professionnel de spécimens d'espèces inscrites aux annexes I à III CITES devront eux aussi tenir un registre des spécimens (art. 11). Enfin, les personnes qui proposent à la vente des spécimens 7

8

Règlement (CE) no 338/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce, JO L 61 du 3.3.1997, p. 1; modifié en dernier lieu par le règlement (UE) 2017/160 du 20.1.2017, JO L 27 du 1.2.2017, p. 1.

Règlement (CE) no 865/2006 de la Commission du 4 mai 2006 portant modalités d'application du règlement (CE) no 338/97 du Conseil relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce, JO L 166 du 19.6.2006, p. 1; modifié en dernier lieu par le règlement (UE) 2019/220 du 6.2.2019, JO L 35 du 7.2.2019, p. 3.

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d'espèces protégées dans des annonces sur internet, dans des revues ou des journaux seront soumises à une obligation d'informer (art. 11a). Le Conseil fédéral définira également les informations qui seront données aux personnes responsables et aux tiers sur l'entreposage ou l'hébergement des spécimens vivants (art. 15, al. 2).

4.2

Mise en oeuvre

Il incombe à la Confédération, en particulier à l'OSAV, de mettre en oeuvre la LCITES (art. 17, al. 1, LCITES et 41 OCITES). L'OSAV sera également responsable de la poursuite pénale (art. 27 LCITES) et donc de l'application des dispositions pénales plus sévères. De plus, il sera habilité à interdire temporairement les importations en cas d'infraction prouvée à la CITES, sur recommandation des organes de la CITES dans lesquels la Suisse est représentée. Le Conseil fédéral gardera la compétence d'édicter les autres interdictions d'importer. Il déterminera par ailleurs les informations que doivent fournir les personnes qui proposent publiquement à la vente des spécimens d'espèces protégées, de même que les informations que les autorités compétentes doivent donner aux personnes responsables et aux tiers sur l'entreposage ou l'hébergement des spécimens vivants.

5

Commentaire des dispositions

Art. 3, let. b Ne concerne que la disposition en langue allemande où un terme peu usuel a été remplacé.

Art. 9, al. 1, phrase introductive, et 2, phrase introductive Al. 1 Selon le droit en vigueur, le Conseil fédéral peut interdire l'importation de spécimens d'espèces protégées, à condition qu'ils soient prélevés dans la nature en des quantités telles ou fassent l'objet d'un commerce tel que l'exploitation durable de leurs populations naturelles pourrait être menacée (art. 1, al. 2, let. b). Il est prévu d'étendre cette compétence aux espèces de faune et de flore dont les spécimens peuvent être facilement confondus avec celles figurant dans les annexes I à III CITES (art. 1, al. 2, let. c). Cette mesure vise à éviter que les espèces de faune et de flore dont il est prouvé qu'elles sont menacées dans un pays donné, où elles donc protégées, ne soient introduites dans le commerce international via la Suisse.

Al. 2 En cas d'infraction prouvée à la CITES, il restera également possible d'interdire, sur recommandation des organes de la CITES, l'importation de spécimens d'espèces protégées. Étant donné que ces recommandations se fondent toujours sur des investigations sérieuses et des discussions approfondies entre les États parties représentés dans les différents organes, la transposition de l'interdiction dans la législation 7709

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suisse revient, dans les faits, à reprendre une décision des États parties. Il est prévu de confier cette compétence non plus au DFI, mais à l'OSAV, en sa qualité d'office spécialisé en la matière (al. 2). Celui-ci pourra ainsi modifier lui-même l'annexe 3 de l'ordonnance sur les contrôles CITES, qui contient les interdictions d'importer.

La norme de délégation sera inscrite dans l'OCITES.

Art. 11, titre et al. 1 et 3 Si l'on considère le commerce des animaux vivants ces dix dernières années, la part de ceux qui proviennent d'élevages n'a cessé d'augmenter, au point de devenir majoritaire actuellement. En parallèle, on a observé, à l'échelle mondiale, une hausse du nombre de cas dans lesquels des établissements d'élevage avaient vendu des animaux en dissimulant le fait qu'ils avaient été prélevés illégalement dans la nature. Pour lutter contre ce phénomène, les États parties à la CITES ont publié en 2016 la résolution Conf. 17.7: «Étude du commerce de spécimens d'animaux signalés comme produits en captivité»9, texte qui incite les parties à accorder plus d'importance au problème. L'obligation de tenir un registre, à laquelle sont soumises les entreprises qui font le commerce à titre professionnel de spécimens d'espèces inscrites aux annexes I à III CITES, est donc étendue aux établissements qui en font l'élevage à titre professionnel. Le registre est important: il permet de vérifier l'origine légale des spécimens sous la garde de l'éleveur. L'al. 2, qui prévoit des exceptions, par exemple pour les plantes reproduites artificiellement, est maintenu.

Pour savoir qui fait de l'élevage de spécimens d'espèces inscrites aux annexes I à III CITES, le DFI doit en outre pouvoir instaurer l'obligation pour les éleveurs de s'enregistrer, comme c'est le cas pour les entreprises commerciales.

Art. 11a

Obligation d'informer en cas de vente de spécimens d'espèces protégées

Les personnes qui proposent à la vente dans des revues, des journaux ou sur internet des spécimens d'espèces protégées ne doivent plus pouvoir le faire anonymement.

C'est pourquoi il est prévu de les soumettre à une obligation d'informer (al. 1). Le Conseil fédéral sera habilité à déterminer les informations qui doivent être fournies (al. 2). Les exploitants de plateformes internet et les éditeurs de publications contenant des petites annonces devront veiller, dans les limites de leurs possibilités, à ce que ces informations soient fournies (al. 3). Cela n'implique pas qu'ils aient un devoir de contrôle complet, mais ils devront mettre en place des instruments appropriés (adresse obligatoire par exemple), afin que les vendeurs respectent leurs obligations.

9

www.cites.org/fra > Documents > Résolutions > Conf. 17.7

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Art. 14, al. 2 Certaines dispositions des ordonnances du 18 novembre 2015 réglant les échanges d'importation, de transit et d'exportation d'animaux et de produits animaux avec les pays tiers10 ou avec les États membres de l'UE, l'Islande et la Norvège 11 s'appliquent aussi aux spécimens protégés par la LCITES. Si ces spécimens ne sont pas conformes aux législations sur les épizooties ou sur les denrées alimentaires, ils sont contestés et détruits. Dans ces cas-là, les organes de contrôle doivent pouvoir renoncer à prendre une mesure fondée sur la LCITES, les mesures prévues par les ordonnances précitées étant suffisantes.

Art. 15, al. 1, let. d et 2, 2e phrase L'art. 14 énumère les mesures qui peuvent être prises en cas de contestation d'un lot.

L'une d'elles est le refoulement (let. b) qui, selon le droit en vigueur, ne peut être ordonné qu'exceptionnellement (art. 35 OCITES). En règle générale, les lots contestés sont séquestrés en vertu de l'art. 15, al. 1. Désormais, dans les cas où les autorisations ou certificats requis pour l'importation, le transit et l'exportation ne peuvent être présentés, le refoulement d'un lot contesté pourra être ordonné s'il n'y a pas de danger qu'il puisse être importé illégalement en Suisse par des voies détournées. Tel est par exemple le cas lorsqu'une entreprise importe des bracelets de montres à des fins commerciales, dans l'intention de les exporter plus tard, toute exportation présupposant la preuve d'une importation légale. Il appartiendra au Conseil fédéral de fixer les conditions du refoulement dans le cadre d'une modification de l'OCITES.

C'est pourquoi l'art. 15, al. 1, let. d, doit être complété.

Les animaux et plantes vivants séquestrés sont hébergés ou entreposés temporairement dans une structure désignée par l'OSAV (art. 39, al. 1, OCITES). Selon le droit en vigueur, l'OSAV informe les personnes responsables, sur demande, du lieu où leurs animaux ou leurs plantes sont hébergés ou entreposés. Or il est arrivé à plusieurs reprises que ces personnes en profitent pour gêner le bon fonctionnement de la structure d'accueil. Afin d'éviter ce genre de situation, il est prévu de compléter l'al. 2: le Conseil fédéral doit définir quelles informations sont communiquées aux personnes responsables et aux tiers au sujet de l'hébergement ou de l'entreposage des
spécimens séquestrés.

Art. 16, al. 1 et 1bis L'art. 16 énumère les conditions dans lesquelles les spécimens d'espèces protégées sont confisqués. Selon le droit en vigueur, la confiscation doit être précédée d'un séquestre au sens de l'art. 15. Il existe cependant des situations dans lesquelles ces deux étapes (séquestre et confiscation) ne se justifient pas, en particulier lorsqu'un spécimen d'une espèce visée à l'annexe I CITES est importé sans l'autorisation requise. Dans les faits, il est rare qu'une autorisation d'importation ait été délivrée dans ces cas et il est donc inutile d'accorder un délai approprié au destinataire de la décision pour déposer l'autorisation nécessaire: la confiscation doit pouvoir être 10 11

RS 916.443.10 RS 916.443.11

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décidée immédiatement. Les personnes qui importent des spécimens d'espèces protégées sans autorisation alors qu'elles savent pertinemment que l'autorisation est obligatoire ne doivent plus pouvoir demander après coup l'autorisation requise. Il faudra évaluer dans chaque cas si la personne a manifestement connaissance de cette obligation. Le fait qu'elle transporte le spécimen de façon inhabituelle (en particulier sous ses vêtements) ou qu'elle use d'autres moyens pour qu'il ne soit pas découvert lors de l'importation indiquerait que tel est le cas. Le séquestre n'est pas non plus utile lorsque les spécimens sont sans maître. L'art. 16 doit donc être modifié de sorte que les organes de contrôle puissent, dans des cas bien définis, confisquer des spécimens d'espèces protégées sans les avoir séquestrés au préalable (al. 1bis). Ce changement implique aussi une modification de l'al. 1.

Art. 24, al. 3 et 4 Les décisions de l'OSAV peuvent faire l'objet d'une opposition (art. 24, al. 1); les décisions rendues par d'autres autorités fédérales peuvent faire l'objet d'un recours auprès de l'OSAV (art. 25, al. 1). Dans le droit en vigueur, les délais d'opposition et de recours diffèrent: le délai d'opposition est de 10 jours (art. 24, al. 3), tandis que le délai de recours est de 30 jours (art. 25, al. 2). Cette différence ne se justifie pas. Il est donc prévu d'adapter le délai d'opposition et de le fixer lui aussi à 30 jours (al. 3).

La procédure d'opposition permet au destinataire d'une décision de faire valoir après coup son droit d'être entendu (voir art. 30, al. 2, let. b, de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative12). Le droit d'être entendu est un droit constitutionnel (art. 29, al. 2, de la Constitution [Cst.]13) qui doit être accordé gratuitement au destinataire d'une décision. Il fait l'objet d'un alinéa supplémentaire (al. 4). Les oppositions téméraires ne sont par contre pas gratuites. C'est notamment le cas lorsque le seul but de l'opposition est de nuire à l'autorité ou à d'autres parties à la procédure ou de les importuner. Les oppositions manifestement sans issue peuvent également être qualifiées de téméraires.

Art. 26

Infractions

Le 13 décembre 2016, le Parlement a adopté la motion 15.3958 «Renforcer les sanctions pénales en Suisse contre le commerce illicite d'espèces menacées», déposée par le conseiller national Guillaume Barazzone. Celle-ci charge le Conseil fédéral de durcir les sanctions pénales de la LCITES. De plus, dans sa résolution 69/314 du 30 juillet 201514, l'Assemblée générale de l'ONU a demandé aux États membres d'ériger en «infraction grave» au sens de la Convention de l'ONU du 15 novembre 2000 contre la criminalité transnationale organisée15 les infractions commises dans le cadre de la criminalité organisée dans le domaine des animaux et plantes protégés.

On entend par «infraction grave» les actes passibles d'une peine privative de liberté 12 13 14 15

RS 172.021 RS 101 www.un.org > Français > Documents > Résolutions de l'Assemblée générale > 69e - 2014 > A/RES/69/314 RS 0.311.54

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de quatre ans au moins (art. 2, let. b, de la convention). Cette décision politique implique un renforcement général des dispositions pénales. Le durcissement des sanctions pénales proposé prévoit de considérer les cas graves comme des crimes et par conséquent comme des infractions préalables au blanchiment d'argent visé à l'art. 305bis du code pénal (CP)16.

L'infraction de base (al. 1) ne sera plus considérée comme une contravention, mais comme un délit. Par ailleurs, quiconque, intentionnellement, possède, propose à la vente ou cède à titre gratuit ou onéreux des spécimens importés sans autorisation sera également punissable (art. 1, let. c), ce qui était d'ailleurs déjà le cas avant l'entrée en vigueur de la LCITES, lorsque la disposition pénale figurait dans la loi du 16 décembre 2005 sur la protection des animaux 17 (ancien art. 27, al. 1, RO 2012 6279). La présente révision a pour but de combler cette lacune juridique.

Il est prévu de considérer les cas graves (al. 2) comme des crimes. On est en présence d'un tel cas lorsque l'auteur commet des infractions à la LCITES par métier (let. b) ou agit en qualité d'affilié à une bande formée pour commettre des infractions à la LCITES (let. c). De plus, l'auteur peut être poursuivi, le cas échéant, pour participation à une organisation criminelle ou soutien d'une organisation criminelle en vertu de l'art. 260ter CP. La résolution 69/314 de l'Assemblée générale de l'ONU est ainsi mise en oeuvre. Enfin, il y aura crime quand l'infraction porte sur un grand nombre de spécimens d'espèces figurant dans les annexes I et II CITES (let. a). Par «grand nombre» de spécimens d'espèces protégées, on entend par exemple 100 kg d'ivoire d'éléphant (annexe I), plus de 50 châles en laine d'antilopes du Tibet (annexe I) ou plusieurs milliers de civelles (annexe II). Les crimes sont des infractions préalables au blanchiment d'argent (art. 305bis CP). Il s'ensuit que les transactions financières liées à ces infractions seront couvertes par la loi du 10 octobre 1997 sur le blanchiment d'argent (LBA)18 et que par conséquent les intermédiaires financiers seront soumis à l'obligation de communiquer visée à l'art. 9 LBA.

Pour les cas de peu de gravité (al. 4), la peine reste l'amende. Il s'agit des situations dans lesquelles les intérêts de la conservation des espèces ne
sont pas affectés de manière significative, par exemple lorsque des pythons royaux d'élevage présentant une mutation chromatique, des orchidées reproduites artificiellement ou des morceaux de corail ramassés sur la plage sont importés sans les autorisations requises.

Quiconque enfreint des dispositions d'exécution dont la contravention est déclarée punissable ou commet une infraction par négligence sera également puni d'une amende (al. 3 et 5).

16 17 18

RS 311 RS 455 RS 955.0

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6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération, les cantons et les communes

Le projet n'entraîne aucune augmentation des activités de la Confédération, des cantons et des communes. Il n'a donc aucune conséquence financière ni répercussion sur le personnel.

6.2

Conséquences économiques, sociales et environnementales

Le projet n'a que des conséquences économiques minimes. Les personnes et les établissements qui élèvent des spécimens CITES à titre professionnel devront à l'avenir tenir un registre des spécimens. Cette mesure exigera du travail supplémentaire, dans une proportion raisonnable. Elle est néanmoins indispensable pour renforcer l'efficacité de la conservation des espèces sur le plan commercial, étant donné que de plus en plus de spécimens prélevés illégalement dans la nature sont blanchis via la vente à des établissements d'élevage (voir commentaire de l'art. 11). Le renforcement des dispositions pénales permet d'améliorer la protection des spécimens d'espèces protégées et a ainsi des conséquences positives sur la biodiversité.

Le projet ne semble pas avoir de conséquences sociales.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

La CITES et les présentes modifications reposent sur l'art. 78, al. 4, Cst.: «Elle [la Confédération] légifère sur la protection de la faune et de la flore et sur le maintien de leur milieu naturel dans sa diversité. Elle protège les espèces menacées d'extinction». La Confédération dispose dans ce domaine d'une compétence législative étendue.

La LCITES et les présentes modifications se fondent sur la CITES, qui oblige les parties à transposer leurs engagements internationaux dans leur droit national.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Les présentes modifications reposent sur la CITES et sont donc compatibles avec elle (voir ch. 7.1).

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7.3

Forme de l'acte à adopter

Selon les art. 164, al. 1, Cst. et 22, al. 1, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement19, toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. La présente révision vise à introduire ou modifier des règles qui portent atteinte aux droits de la propriété et aux libertés des personnes concernées (droit des autorités de contrôle de confisquer des produits, dispositions pénales). Elle réglemente par ailleurs les obligations des citoyens (obligation pour les établissements d'élevage de tenir un registre des spécimens, devoir de fournir différentes informations quand des spécimens d'espèces protégées sont mis en vente publiquement). Ces dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale.

7.4

Frein aux dépenses

Le projet ne contient pas de dispositions relatives aux subventions et ne prévoit pas de crédits d'engagement. Il n'est donc pas soumis au frein aux dépenses (art. 159, al. 3, let. b, Cst.).

7.5

Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

Ce projet ne touche pas à la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons, ni à leur accomplissement.

7.6

Délégation de compétences législatives

L'avant-projet contient les nouvelles normes de délégation suivantes: Il est prévu d'étendre la compétence du Conseil fédéral d'interdire les importations de spécimens d'espèces protégées aux espèces dont les spécimens peuvent être facilement confondus avec celles qui figurent dans les annexes I à III CITES (art. 9, al. 1). Le Conseil fédéral devra en outre définir quelles informations doivent fournir les personnes qui mettent en vente publiquement des spécimens d'espèces protégées (art. 11a) et il pourra soumettre à l'obligation de s'enregistrer les personnes qui font, à titre professionnel, le commerce ou l'élevage de spécimens de certaines espèces figurant dans les annexes I à III CITES (art. 11, al. 3). La réglementation concernant les informations données aux personnes responsables et aux tiers concernant l'entreposage et l'hébergement des spécimens vivants (art. 15, al. 2) entre aussi dans la compétence du Conseil fédéral. Quant aux interdictions d'importer qui peuvent être prononcées en cas d'infraction prouvée à la CITES et sur recommandation des organes de la CITES, elles relèveront désormais de la compétence de l'OSAV et non de la compétence du DFI (art. 9, al. 2).

19

RS 171.10

7715

FF 2020

7.7

Protection des données

Le projet ne contient aucune disposition concernant le traitement de données personnelles ni d'autres mesures ayant des conséquences sur la protection des données.

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